L'idée de « race » et l'expérience sur le terrain au XIXe siècle : Science, action indigène et...

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L'IDÉE DE « RACE » ET L'EXPÉRIENCE SUR LE TERRAIN AU XIXE SIÈCLE : SCIENCE, ACTION INDIGÈNE ET VACILLATIONS D'UN NATURALISTE FRANÇAIS EN OCÉANIE Bronwen Douglas Ed. Sc. Humaines | Revue d'Histoire des Sciences Humaines 2009/2 - n° 21 pages 175 à 209 ISSN 1622-468X Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-histoire-des-sciences-humaines-2009-2-page-175.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Douglas Bronwen, « L'idée de « race » et l'expérience sur le terrain au xixe siècle : science, action indigène et vacillations d'un naturaliste français en Océanie », Revue d'Histoire des Sciences Humaines, 2009/2 n° 21, p. 175-209. DOI : 10.3917/rhsh.021.0175 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Ed. Sc. Humaines. © Ed. Sc. Humaines. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 121.127.213.57 - 08/08/2014 10h55. © Ed. Sc. Humaines Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 121.127.213.57 - 08/08/2014 10h55. © Ed. Sc. Humaines

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L'IDÉE DE « RACE » ET L'EXPÉRIENCE SUR LE TERRAIN AU XIXESIÈCLE : SCIENCE, ACTION INDIGÈNE ET VACILLATIONS D'UNNATURALISTE FRANÇAIS EN OCÉANIE Bronwen Douglas Ed. Sc. Humaines | Revue d'Histoire des Sciences Humaines 2009/2 - n° 21pages 175 à 209

ISSN 1622-468X

Article disponible en ligne à l'adresse:

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Douglas Bronwen, « L'idée de « race » et l'expérience sur le terrain au xixe siècle : science, action indigène et

vacillations d'un naturaliste français en Océanie »,

Revue d'Histoire des Sciences Humaines, 2009/2 n° 21, p. 175-209. DOI : 10.3917/rhsh.021.0175

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Revue d'Histoire des Sciences Humaines, 2009, 21, 175-209.

L'idée de « race » et l'expérience sur le terrain au XIXe siècle : science, action indigène et vacillations d'un naturaliste

français en Océanie

Bronwen DOUGLAS

RésuméCet article ne considère pas l'idée de « race » exclusivement dans l'abstrait. Je regarde plutôt la pensée raciale soutenue comme un produit historique de l'interrelation des discours métropolitains fluides – eux-mêmes fondés en praxis sociale – et de la documentation empirique résultant des rencontres spécifiques des Européens avec les non-Européens. D'un point de vue théorique, cette démarche postule une liaison indirecte entre les actions indigènes et les représentations de telles actions par les observateurs étrangers. Autrement dit, les mots et les dessins des voyageurs n'étaient pas seulement l’expression involontaire des discours ou des conventions dominants ; ces représentations étaient aussi des productions personnelles, suscitées par les tensions et l’ambiguïté des rencontres et foncièrement influencées par des perceptions immédiates de l’attitude et du mode de vie indigènes. J'illustrerai ces propos en me référant principalement aux expériences en Océanie de Jean-René Constant Quoy, médecin et naturaliste ayant participé aux voyages de Freycinet en 1817-1820 et de Dumont d'Urville en 1826-1829. Les représentations raciales de Quoy et de ses collègues oscillent en fonction des discours et du genre de texte, mais aussi selon l'accueil fait sur place aux voyageurs et le comportement, le mode de vie et l'apparence physique des habitants.

Mots-clés : Notion de race – Océanie – Histoire – Travail sur le terrain – Rencontres sur place – Action indigène – Naturalistes français – Jean-René Constant Quoy.

Abstract : The Concept of « Race » and Field Experience in the Nineteenth Century : Science, Indigenous Agency, and the Vacillations of a French Naturalist in Oceania This paper does not consider « race » as an exclusively abstract concept. Rather, formal racial thinking is conceived as an historical product of the relationship between fluid metropolitan theorizing about human differences – itself rooted in praxis – and the empirical material produced by Europeans in response to specific encounters with non-Europeans. Theoretically, I argue for an indirect liaison between indigenous actions and their representation by foreign observers. That is, travellers' words and drawings were not simply arbitrary expressions of prevailing discourses and literary or artistic conventions. They were also personal productions generated in the tensions and ambiguities of encounters and significantly shaped by immediate perceptions of indigenous demeanour and lifestyle. I illustrate these propositions primarily with reference to the Oceanic experience of Jean-René Constant Quoy, a naval doctor and naturalist on the French voyages of Freycinet in 1817-1820 and Dumont d'Urville in 1826-1829. Quoy's racial representations oscillate in relation to mode of discourse and genre of text; but they also do so in response to the reception given to the voyagers in particular places and the behaviour, lifestyle, and physical appearance of the inhabitants.

Key-words : History of Race – Oceania – History – Fieldwork – Encounters – Indigenous Agency – French Naturalists – Jean-René Constant Quoy.

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Cet article ne considère pas l'idée de « race » purement dans l'abstrait 1. Il situe le développement historique de la pensée raciale en France aux XVIII

e et XIXe siècles par

rapport aux interrelations des discours métropolitains fluides – eux-mêmes fondés dans la praxis sociale – et de la documentation empirique résultant de l'expérience problématique des voyageurs européens au contact des peuples non européens. De telles rencontres sur le terrain procuraient les renseignements et les objets exotiques – y compris les artefacts, les crânes et d'autres restes humains, et même quelques indigènes vivants – sur lesquels la science naissante de la race s'appuyait pour illustrer ses déductions.

Sur le plan méthodologique, par conséquent, je joins l'histoire de l'idée de race à l'ethnohistoire de quelques voyages scientifiques en Océanie. Par manque absolu d'histoires indigènes contemporaines de ces rencontres, je corrèle les rapports et les classifications raciales des voyageurs, d'un côté avec leur connaissance des discours scientifiques, et de l'autre côté avec leur expérience sur le terrain. À l'interface des idées préconçues et des perceptions du comportement indigène énigmatique, les présupposés européens ou se confirment ou se transforment. De nouvelles compréhensions s'engendrent et des représentations empiriques sont suscitées qui serviront tour à tour de preuves aux savants. Ce point de vue nous permet de décentrer les Européens et de représenter les habitants en tant que sujets agissants au lieu d'objets ou de victimes dont les actions ne sont que des réponses mécaniques aux initiatives d'autrui. À part quelques ouvrages importants récents qui questionnent systématiquement les relations interculturelles 2, la plupart des écrits sur les voyages européens en Océanie, tant classiques que modernes, constituent un sous-ensemble de l'histoire ou de la biographie impériales. Leurs auteurs manquent en général de sensibilité ethnographique. Ils ignorent les populations implantées ou les relèguent au mieux en arrière-plan exotique ou sauvage 3. En scrutant les relations des voyageurs, il semble néanmoins évident que la conduite indigène à leur égard – y compris l'apparence de la cordialité, l'indifférence ou l'hostilité – était stratégique. Elle variait en fonction des intérêts particuliers, des pratiques locales de réception des nouveaux venus et des précédents divers formés par les visites antérieures. Pendant l'âge de la voile, en dépit de la conviction des Européens sur la supériorité de leur technologie, leur civilité ou leur race, les voyageurs étaient d'ordinaire vulnérables aux actions imprévisibles des habitants nombreux, bien établis et bien armés.

Théoriquement parlant, ma démarche postule une liaison indirecte entre les actions indigènes et les représentations de telles actions par les observateurs étrangers – à savoir, entre des référents et des signifiants 4. Ces représentations ne sont pas seulement les expressions arbitraires des discours, des conventions ou des stéréotypes

1 Je n'utilise les guillemets qu'à la première référence à un terme problématique comme « race »,

« nègre », « sauvage », et les implique par la suite. 2 DENING, 1980, 1992, 1995, 2004 ; GASCOIGNE, 2007 ; SALMOND, 1991, 1997, 2003 ; SAHLINS, 1981,

1985, 1995 ; THOMAS, 1991, 2003. 3 Cf., par exemple, BARRATT, 1988-1992 ; BEAGLEHOLE, 1934 ; BLAIS, 2005 ; BROSSE, 1983 ;

BROSSES 1756 ; CLODE, 2007 ; DALRYMPLE, 1767 ; DUNMORE, 1965-1969, 2005 et 2006 ; FROST, 1998 et2003 ; GAZIELLO, 1984 ; JACK-HINTON, 1969 ; KIPPIS, 1788 ; MARSHALL, WILLIAMS, 1982 ; MORGAT,2005 ; RICHARD, 1986 ; SPATE, 1979 et 1983.

4 Ici, le concept de signifiant ne se limite pas au sens strict saussurien d'une « tranche de sonorité ». Je lui donne plutôt le sens plus large d'expression pour tenir compte de quelque influence empirique indirecte de l'objet de représentation, le référent.

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courants. Elles sont également des productions personnelles créées en réaction aux tensions et aux ambiguïtés des rencontres. Autrement dit, le comportement, la physionomie et le mode de vie indigènes attirent, intimident ou révulsent les Européens et peuvent influencer profondément leurs perceptions et leurs représentations. En confirmant ou mettant en question les préjugés des étrangers, les actions indigènes laissent des traces plus ou moins obscures dans leurs représentations. J'appelle semblables traces des « countersigns » 5. Les « countersigns » de l'action indigène ne sont jamais transparents et doivent se lire en creux. Ils se manifestent syntaxiquement par le choix et la disposition des mots ; grammaticalement, par le temps, le mode et la voix ; et sémantiquement, par la présence, l'emphase ou l'absence. On peut les identifier au moyen d'une analyse systématique des divers modes de discours, des genres différents de textes, et de la langue et du ton d'énonciation 6. Les modes sont officiels et scientifiques, historiques et anthropologiques. Les genres sont écrits ou dessinés. Les écrits sont soit manuscrits, soit édités : journal de bord, narration de voyage et traité scientifique. Les genres visuels regroupent les aquarelles, les gravures et les lithographies.

J'illustrerai ce raisonnement en me référant en particulier à plusieurs écrits relatifs aux Océaniens de Jean-René Constant Quoy (1790-1869). Formé comme chirurgien à l'École de Médecine navale de Rochefort et diplômé en médecine à Montpellier, Quoy était médecin et naturaliste des expéditions en Océanie de Louis de Freycinet (1779-1842) entre 1817 et 1820 et de Jules-Sébastien-César Dumont d'Urville (1790-1842) entre 1826 et 1829. Très expérimenté sur le terrain, Quoy sera le plus célèbre des médecins navals qui s'occupaient aussi de l'histoire naturelle pendant les grands voyages français de la Restauration et la monarchie de Juillet. Ses collections et ses publications zoologiques faites en association avec son collègue et grand ami Paul Gaimard (1793-1858) méritaient les louanges des savants les plus éminents pour leur « notable accroissement » de la science 7. Élu membre correspondant de l'Académie des sciences et du Muséum d'histoire naturelle de Paris, Quoy était pressenti par les professeurs du Muséum pour une chaire vacante après la mort de Georges Cuvier (1769-1832). Mais « une haute et puissante influence prévalut », (selon Quoy, la Reine intervint pour son compétiteur), et on refusa sa candidature 8. À l'inverse de Gaimard – « l'homme le plus désordonné que j'aie connu » 9 – Quoy légua d'importantes archives manuscrites, textes contemporains et souvenirs tardifs, dont la plupart sont conservées à La Rochelle et à Rochefort. Dans l'histoire des voyages

5 Cf. DOUGLAS, 1999, 2003, 2006 et 2009a. 6 DOUGLAS, 1996, 137 ; GUHA, 1983.7 ARAGO, et al., 1821, 418-421 ; CUVIER, et al., 1830 ; GEOFFROY SAINT-HILAIRE, 1825, 351 ; Cuvier à

Gaimard, le 18 avril 1821 ; Cuvier à Quoy, le 11 avril 1829 ; E. Geoffroy Saint-Hilaire à Quoy et Gaimard, le 12 mars 1829, in QUOY, 1820-1870, MS 2510.

8 HAMY, 1906 ; QUOY, 1864-1868, 114-115 et 177-182 ; Quoy au ministre de la Marine et des Colonies, le 7 avril 1840, in FARDET, 1992, 116 ; E. Geoffroy Saint-Hilaire à Quoy, le 21 mai 1832, inQUOY, 1820-1870, MS 2510 ; Directeur des Ports au ministre du Commerce et des Travaux Publics, le 3 octobre 1832 ; Quoy à Sa Majesté la Reine, 22 avril 1835; Le Secrétaire des commandements de la Reine au ministre de la Marine et des Colonies, le 27 avril 1835, in FRANCE, MARINE NATIONALE, s.d.

9 QUOY, 1864-1868, 135.

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scientifiques en Océanie, Quoy est ainsi un personnage à la fois important et exemplaire 10.

Des Lumières à la science de la race

Du point de vue discursif, les textes de Quoy révèlent la transition bien connue de l'universalisme ethnocentrique de l'histoire naturelle de l'homme au matérialisme racialiste qui dominera l'anthropologie émergente 11. Nonobstant la prévalence de stéréotypes extrêmement négatifs à l'égard du « nègre » et de quelques « sauvages », la plupart des philosophes et des naturalistes des Lumières croyaient à l'unité originelle de l'espèce humaine et (du moins en théorie) au potentiel commun de tous les hommes de progresser vers la civilisation. Ils attribuaient les différences physiques et sociales entre les variétés humaines à l'influence dégénérative directe – mais en principe réversible – des climats et des milieux sur une espèce unique migrante : par exemple, Georges-Louis Leclerc, comte de Buffon (1707-1788), affirmait que « les grandes différences qui se trouvent entre les hommes, dépendent de la diversité des climats » 12. Au XVIII

e siècle, le nom commun une race était synonyme d'une variété,une espèce (c'est-à-dire une sorte), une nation, ou un peuple et signifiait les descendants d'une souche commune. En 1777, Buffon différencie ce « sens le plus étroit » du mot race de son propre usage innovateur « dans le sens le plus étendu ». Ce nouveau sens dénote spécifiquement la « ressemblance » entre tous les hommes du cercle arctique dont, selon Buffon, le climat extrême avait rendu les races semblables, de sorte qu'on puisse « dès lors (les) regarder comme ne faisant qu'une seule et même race dans l'espèce humaine » – quoiqu'ils ne soient pas « une même nation » 13. Cet usage buffonien étendu du substantif race ne correspond cependant pas au signifié biologique moderne du terme.

En revanche, dans le contexte social et politique transformé du XIXe siècle, les

naturalistes, les anatomistes, les géographes et les anthropologues distinguaient nettement les races humaines les unes des autres, les hiérarchisaient et doutaient que les soi-disant « races inférieures » puissent progresser sans aide, si tant est qu'elles puissent jamais progresser. Ces savants réifiaient les races en affirmant qu'elles sont permanentes, héréditaires, peut-être primordiales et fondées sur l'organisation physique. Ainsi, selon la « véritable synthèse raciologique » 14 de Cuvier :

« Quoique l'espèce humaine paraisse unique, (...) on y remarque de certaines conformations héréditaires qui constituent ce qu'on nomme des races » 15 ;

10 NOËL, 1960 ; OLLIVIER, 1988, 45-50. Pour des ouvrages sur l'histoire de la science des voyages

océaniens, cf. BLAIS, 2005 ; BONNEMAINS, FORSYTH, SMITH, 1988 ; COPANS, JAMIN, 1978 ; GAZIELLO,1984 ; RICHARD, 1986 ; SMITH, 1969.

11 BLANCKAERT, 2003 ; DOUGLAS, 2008a. 12 BUFFON, 1777, 462. 13 Ibid., 462-463 et 478. 14 BLANCKAERT, 2003, 148. 15 CUVIER, 1817a, t. 1, 94, italiques originales.

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« Il y a (...) des causes intrinsèques qui paraissent arrêter les progrès de certaines races, même au milieu des circonstances les plus favorables » 16 ;

« (une) loi cruelle (...) semble avoir condamné à une éternelle infériorité les races à crâne déprimé et comprimé » 17.

Cuvier lui-même se conformait à la doctrine monogéniste dominante de la particularité de l'espèce humaine. Mais dès le début du XIXe siècle, quelques naturalistes et anatomistes, tels que Charles White (1728-1813) et Julien-Joseph Virey (1775-1846), commençaient à soutenir l'hypothèse polygéniste de la diversité originelle des espèces humaines distinctes 18. Même des monogénistes résolus, disciples de Buffon comme Étienne de Lacépède (1756-1825), normalisaient la terminologie et la logique raciales 19. Cuvier écrivit relativement peu à propos de l'homme. Mais en tant que secrétaire perpétuel des sciences physiques à l'Institut de France, il exerça une grande influence sur les développements de l'anthropologie pendant presque trente ans. À ce titre, il concourait à la nomination, l'instruction et l'évaluation des naturalistes voyageurs en Océanie 20. Tous les naturalistes responsables de la zoologie durant les voyages de Nicolas Baudin (1754-1803), Freycinet, Louis-Isidore Duperrey (1786-1865) et Dumont d'Urville, y compris Quoy, soutenaient les principes taxinomiques de Cuvier, son insistance sur la primauté de l'organisation physique et sa division de l'espèce humaine en trois races « éminemment distinctes : la blanche, ou caucasique ; la jaune, ou mongolique ; la nègre, ou éthiopique » 21.

Vers une taxinomie des Océaniens

Dans la limite de ces tendances intellectuelles larges, l'histoire des essais de classement des peuples d'Océanie est d'assez longue durée 22. Dès 1756, Charles de Brosses (1709-1777), ami de Buffon et président du parlement de Dijon, remarque déjà une grande différence morale et physique « dans l'espèce humaine du même climat » aux Terres australes – à savoir, une anomalie d'après la théorie des climats de Buffon. De Brosses cherche à résoudre cette énigme en formulant une histoire conjecturale quasi raciale qui suppose la destruction ou le déplacement d'une « vieille race » de « noirs crépus » par « des colonies étrangères de peuples Malais » – c'est-à-

16 Ibid. 17 CUVIER, 1817b, 273. 18 CUVIER, 1817a, t. 1, 81 et 94 ; VIREY, 1800 ; WHITE, 1799. Je généralise ici les termes utiles

« monogéniste » et « polygéniste » inventés au milieu du XIXe siècle pour désigner des positions opposées adoptées sur la question de l'unité ou la diversité originelle de l'humanité.

19 Par exemple : « Dans l'espèce humaine, les traits caractéristiques d'une véritable race consistent dans des modifications d'organes plus importants qu'un simple tégument (peau, cheveux) ; ils sont le signe d'une influence bien plus grande que celle qui n'agit qu'à la surface ; ils sont le résultat des impressions reçues par les parties les plus solides ; ils se trouvent principalement dans les dimensions des pièces les plus remarquables de la charpente osseuse du corps humain » (LACÉPÈDE, 1800, 2 ; cf. aussi 22-24).

20 ARAGO, et al., 1821, 418-421 ; CUVIER, 1825 et 1857 ; CUVIER, et al., 1806 et 1830 ; Jussieu au ministre de la Marine, 19 thermidor an 8 (le 7 août 1800) ; Bureau des Ports, Rapport au ministre de la Marine, 1er fructidor an 8 (le 19 août 1800), in FRANCE, MARINE NATIONALE, 1796-1815, BB4 997, BB4 995.

21 CUVIER, 1817a, t. 1, 94, italiques originales ; DUMONT D'URVILLE, 1832, 19-21 ; GARNOT, 1826-1830, 507-509 ; QUOY, GAIMARD, 1824a, ii ; 1824b, 9 ; 1830, 50-53, 59 et 1830-1834, t.1, i.

22 DOUGLAS, 2008b.

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dire, par des peuples d'un teint plus clair – « ainsi que les Espagnols nouveaux venus dans l'Amérique en ont usé avec les habitants du pays ». Représentés comme les « premiers habitans de la zone torride, (...) plus brutes et plus farouches » que leurs conquérants, ces autochtones noirs hypothétiques ne restaient « seuls maîtres de leurs anciennes possessions » qu'en « la Nouvelle-Hollande (le continent d'Australie) et autres Terres australes inconnues ». C'est une des premières versions d'un récit téléologique de la dispersion ou de l'extinction des races autochtones qui se combinera bientôt au projet de taxinomie raciale en Océanie et se réalisera brutalement dans les colonies de peuplement en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Nouvelle-Calédonie. De Brosses lui-même ne propose cependant pas une classification des habitants de « cette cinquième partie du monde » et il refuse également d'accepter « qu'il y ait aucune espèce d'hommes tout à fait indisciplinables » 23.

Ce n'est pas avant 1778 que paraîtra une telle classification, formulée par le naturaliste voyageur allemand Johann Reinhold Forster (1729-1798), lequel avait accompagné, entre 1772 et 1775, le deuxième voyage de circumnavigation de James Cook (1728-1779). Monogéniste ardent, Forster constate l'existence empirique de « deux grandes variétés humaines dans la mer du sud », l'une « plus blonde » et l'autre « plus noire », qu'il suppose être descendues de « deux races différentes d'hommes » 24. Il reprend à son compte l'histoire conjecturale de Charles de Brosses à propos de « la race noire aborigène » déplacée par des migrations « successives » de « Malais anciens plus civilisés ». Cependant, en bon buffonien, Forster tient les différences des variétés humaines qu'il avait constatées dans la région pour « accidentelles ». Elles ne tiennent qu'à des causes externes. Sa taxinomie humaine est fluide et très influencée par l'apparence et le comportement des individus qu'il avait vus en personne. Il croit en outre à l'aptitude universelle humaine à progresser vers la civilisation 25.

En 1804, les géographes Conrad Malte-Brun (1775-1826) et Edme Mentelle (1730-1815) remplacent le terme « Terres australes » par « l'Océanique ». En 1815, Adrien-Hubert Brué (1786-1832) le modifie à son tour en « Océanie » (cf. figure 1) 26.Dans quelques ouvrages généraux et théoriques publiés avant 1813, Malte-Brun classifie les Océaniens de façon nettement racialiste. Il différencie la « race noire » ou « Nègres océaniques » de la « race basanée » ou « polynésienne » : la première se compose « des hommes aussi noirs que les nègres d'Afrique, ayant les lèvres aussi grosses, le nez aussi plat, et de la laine au lieu de cheveux » ; la race basanée est « souvent plus blanche que les Espagnols, d'une figure agréable, d'une (t)aille (sic)haute et robuste, enfin une très belle race d'hommes ». Ces deux races « paraissent se rapporter à deux souches très distinctes » : « les Nègres d'Océanique » et « les Malaisou les Océaniens jaunes ». En Nouvelle-Hollande, il y a probablement une « troisième race distincte » que Malte-Brun place « un seul degré au-dessus de la brute » et qu’il compare aux « singes » 27. À son avis, la « race noire de l'Océan pacifique » fournit

23 BROSSES, 1756, t. 2, 376-380. 24 FORSTER, 1778, 228 et 276. 25 Ibid., 252, 271-284 et 353-360. 26 BRUÉ, 1816 (1814) ; MENTELLE, MALTE-BRUN, 1804, 357-626, italiques originales. 27 MALTE-BRUN, 1803, 548 et 1813, 244 ; MENTELLE, MALTE-BRUN, 1804, 473-474, 612 et 620,

italiques originales.

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« une preuve certaine » contre l'opinion buffonienne sur l'influence déterminante des climats dans « la formation des races », parce que dans les pays qu'elle habite les brises de mer font censément baisser la température. Les caractères de cette race sont ainsi intrinsèques 28. Sceptique à propos de « la doctrine orthodoxe », « le systèmed'une origine commune des hommes » qu'il ne veut « ni (...) réfuter, ni (...) confirmer », Malte-Brun se demande si « la race dite Malaye est indigène du Grand-Océan » et si peut-être « plusieurs autres races ou variétés de notre espèce sont dans le même cas », notamment « la race de Nègres Océaniens, qui paraît être originaire de cette partie du monde » 29. Cette insinuation d'autochtonie appuie l'idée, jadis hétérodoxe, que la diversité humaine est organique et peut-être originelle – une opinion très éloignée de celles de Buffon et de Forster.

Figure 1 : BRUE A.H., Océanie ou cinquième partie du monde,gravure, David Rumsey Map Collection 30

Les vacillations de M. Quoy – de l'humanisme au racialisme

Revenons maintenant à Quoy qui quitta la France en septembre 1817 en qualité de chirurgien-major du voyage autour du monde de l'Uranie, commandée par Freycinet. Presque cinquante ans après, Quoy rappelle dans son autobiographie son étonnement quand Freycinet lui apprit qu'il devait en plus servir de naturaliste. Le souvenir de « l'embarras et même le désordre » provoqués dans l'expédition de Baudin par la présence de nombreux savants civils persuada Freycinet qu'il « ne voulait point en

28 MALTE-BRUN, 1803, 548. 29 Ibid., 540 et 1813, 229 ; MENTELLE, MALTE-BRUN, 1804, 377-378, italiques originales. 30 BRUÉ, 1816 (1814).

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prendre et comptait sur ses seuls officiers pour remplir sa mission » 31. La réussite même des travaux scientifiques entrepris par Quoy et Gaimard, second chirurgien et naturaliste de l'expédition, convainquit la Marine d'adopter comme politique officielle – en dépit de l'opposition de l'Institut et des savants – que les hommes chargés de faire l'histoire naturelle lors des voyages scientifiques français seraient dorénavant des officiers de santé de la marine préalablement instruits 32.

Quoy préface son journal historique de ce voyage d'une citation relativiste et humaniste tirée de l'Histoire de l'Amérique de William Robertson 33 ; et il ajoute sa propre profession apparemment sincère de cette intention noble :

« D'après la nature du voyage que je vais entreprendre, il est probable que je serai exposé à avoir malgré moi des démêlés avec les naturels des pays que je vais parcourir. Mais je jure ici que je préfère perdre la vie que de la conserver en donnant la mort à des malheureux qui ne sont barbares que par défaut de jugement et de civilisation, et qui ne peuvent pas toujours démêler quelles sont nos intentions en abordant chez eux (...). Ainsi donc, si je conserve les mêmes sentiments qui m'animent, je me bornerai constamment à une simple défense » 34.

C'est un fait assuré qu'à cette époque, avant son premier voyage, Quoy reconnaît l'humanité commune des « naturels » qu'il prévoit de rencontrer et qu'il attribue leur comportement à des circonstances externes et non à l'organisation physique.

Quoy et Gaimard seront par la suite coauteurs de la Zoologie du Voyage et d'un volume de Planches zoologiques. Mais c'est Quoy qui rédigea le brouillon du texte : « sur l'honneur », attestera-t-il beaucoup plus tard, « je peux dire qu'il m'appartient tout entier » 35. Seulement onze des 712 pages et deux des 96 planches concernent « l'homme ». Le premier chapitre est un mémoire court « De l'homme : observations sur la constitution physique des Papous », c'est-à-dire, des gens qu'ils avaient vus à Waigeo, une île à l'ouest de la Nouvelle-Guinée (cf. figure 2) 36. Si Quoy est l'auteur principal, Gaimard en est le collaborateur majeur sur le terrain ethnographique et linguistique. Linguiste doué, il recueillait des vocabulaires locaux systématiques à chaque relâche tout au long de ces deux voyages autour du monde. Ces listes serviront de base indispensable aux études philologiques de Dumont d'Urville qui reconnaît sa dette à de nombreuses reprises dans la Philologie de son Voyage 37. Gaimard était très apprécié de tous : « excellent garçon », dit Quoy ; Dumont d'Urville fait l'éloge de « son zèle, son activité et (du) crédit dont il jouissait d'ordinaire au milieu des nations

31 QUOY, 1864-1868, 100. 32 CUVIER, 1825, 177-182 ; GEOFFROY SAINT-HILAIRE, 1825, 342-345 ; HAMY, 1906, 457 ; OLLIVIER,

1988 ; QUOY, GAIMARD, 1824a, i ; STAUM, 2003, 105-117. 33 QUOY, 1817-1820, i ; cf. aussi ROBERTSON, 1779 (1777), t. 2, 179 : « Le voyageur attache l'idée de

perfection et de bonheur aux qualités semblables à celles qu'il possède, et partout où il ne trouve pas les objets de plaisir et de jouissance auxquels il est accoutumé, il prononce hardiment que le peuple qui en est privé, doit être barbare et misérable ».

34 QUOY, 1817-1820, ii. 35 QUOY, GAIMARD, 1824a et 1824c ; QUOY, 1864-1868, 144.36 QUOY, GAIMARD, 1824b et 1824c, pl. 1, 2. À l'insu (mais nullement au grand dam) de Quoy, qui

écrivit le mémoire, Gaimard le lisait à une séance de l'Académie des sciences le 5 mai 1823 et un « extrait » était publié sous son nom dans les Nouvelles Annales des Voyages (GAIMARD, 1823 ; QUOY, 1864-1868,132). Une version quelque peu modifiée constitue le chapitre « De l'homme » dans la Zoologie du Voyageet était rééditée dans les Annales des Sciences Naturelles (QUOY, GAIMARD, 1824b et 1826).

37 DUMONT D'URVILLE, 1833-1834, t. 2, 1, 6, 9, 11, 137, 143, 146, 152, 157, 161, 165, 190, 193 et 265 ;GAIMARD, 1833, 341-342.

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sauvages » 38 ; un autre collègue explique qu'il était « Partout bien accueilli par suite de ses qualités aimables : aussi (...) se faisant bien venir même des sauvages, surtout par ses largesses – car une de ses qualités était la générosité » 39. Gaimard réservait surtout cette largesse pour ses partenaires sexuelles. Selon Quoy, qui écrivit une « érotique biographie » inédite de son ami, les femmes étaient « sa passion dominante » et « il y avait en lui une facilité et une puissance se rencontrant rarement au même degré ». Sur le terrain, pourtant, ces partenaires lui servaient quelquefois d'interlocutrices linguistiques importantes et estimées.40

Le mémoire « De l'homme » conclut de façon optimiste « que les Papous seroient susceptibles d'éducation, que leurs facultés intellectuelles ne demanderoient qu'à être exercées et développées pour leur faire tenir un rang distingué parmi les nombreuses variétés de l'espèce humaine » 41. En outre, ce texte explique en termes buffoniens relativement favorables la condition « (d')une des peuplades les plus misérables du monde » qui habitaient la côte ouest de la Nouvelle-Hollande (cf. figure 4, infra) :

« au développement et au perfectionnement de laquelle un sol des plus affreux semble s'opposer ; mais qu'il y avoit encore loin de l'état des hommes de cette peuplade à celui des brutes, qui, nous le répétons, ne sauroit, rigoureusement parlant, exister pour des êtres que l'usage de la parole rend susceptibles de se communiquer leur pensées! » 42.

Figure 2 : LEROY S., Îles des Papous : divers portraits de naturels vus sur l'Île Rawak,aquarelle, nla.pic-an3099610, Canberra, National Library of Australia 43

38 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 5, 158 ; QUOY, 1864-1868, 101. 39 LESSON, 1826-1829, t. 3, 557. 40 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 1, 105-106 et 1833-1834, t. 2, 9 ; QUOY, s.d. b, 1, 12-13, 15

et 29. 41 QUOY, GAIMARD, 1824b, 11. 42 Ibid., 2. 43 LEROY, env. 1819.

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Cinq ans après son retour en France en 1820, Quoy « sollicita comme une faveur la permission de faire la campagne » en Océanie sur l'Astrolabe sous le commandement de Dumont d'Urville. Gaimard était déjà nommé chirurgien-major et zoologiste de l'expédition. « C'était un motif », dira Quoy, « de me joindre à ce brave garçon, et, plus expérimentés, de chercher à faire mieux que nous n'avions fait ». Dumont d'Urville nous dit qu'il accepta « avec transport l'offre d'un collaborateur aussi distingué » 44. Leur jeune collègue Pierre-Adolphe Lesson (1805-1888), second chirurgien de l'Astrolabe, dépeint ainsi dans son journal le mode opératoire scientifique de Quoy et Gaimard pendant le voyage :

« M. Quoy travaillait sans cesse (...) – quand il n'était pas sur le pont à faire l'anatomie des animaux, surtout des mollusques, ou à les dessiner, il était dans sa chambre écrivant ou dictant à Gaimard... C'est ainsi et par ses excursions, qu'il (Gaimard) prenait part au travail commun, M. Quoy faisant à peu près tout le reste » 45.

Encore une fois, ces deux médecins naturalistes produiront conjointement la Zoologie du Voyage mais, selon un mémorandum officiel, « chacun d'eux est chargé de traiter une partie distincte de l'autre ». En effet, c'est Quoy qui composait le texte tandis que Gaimard se chargea d'arranger « les gravures et les presses ». Le chapitre « De l'homme » est bien évidemment de Quoy puisque le brouillon encore existant de ce texte est de son écriture et incorpore de longs extraits de son journal 46.

Ces deux ouvrages intitulés « De l'homme » étaient publiés respectivement en 1824 et 1830. Il y a entre eux des différences frappantes de ton et de perspective qui attestent, en premier lieu, un durcissement général des opinions raciales européennes pendant les années 1820. En contraste avec le premier texte, le second est explicitement taxinomique et racialiste et subordonne la théorie des climats de Buffon à un système zoologique cuvierien. Tout d'abord, Quoy réifie les « deux grandes variétés humaines dans la mer du sud » identifiées par Forster. De la même façon que Malte-Brun, Quoy les transforme en « deux types prononcés (...), deux races bien distinctes : la race jaune et la race noire » 47, qu'il caractérise en termes manichéens (cf. figure 3) :

« Nous avons vu dans la race jaune une grande uniformité physique (...) Partout ce sont les mêmes hommes : grands, robustes, à physionomie ouverte et dont les traits ne déplaisent point ; (...) ils présentent de belles proportions, telles que l'espèce noire, en général, est loin d'en offrir (...). Leurs longs cheveux noirs et ondulés qu'ils laissent flotter sur leurs épaules en boucles élégantes, ou bien qu'ils relèvent avec grâce au-dessus de la tête, ne contribuent pas peu à leur donner un agréable aspect. La race noire, au contraire, torture ses cheveux en tous sens, les couvre de poudres de diverses couleurs, et leur fait prendre cette forme ébouriffée qui, de prime abord, paraît si singulière (...). Indépendamment de la couleur, les traits de ces deux races ne sont point comparables. Des pommettes élargies, un front rétréci et comprimé latéralement, des lèvres épaisses ou avancées, un nez écrasé, les yeux un peu obliques et quelquefois saillants : tels sont les caractères de la figure des noirs » 48.

44 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 1, 3 ; QUOY, 1864-1868, 149. 45 LESSON, 1826-1829, t. 3, 549-550. 46 QUOY, GAIMARD, 1830 et 1830-1834 ; QUOY, s.d. a ; Directeur des Ports, Note pour la direction du

Personnel, le 31 mars 1832, in FRANCE, MARINE NATIONALE, s.d. 47 FORSTER, 1778, 228 ; QUOY, GAIMARD, 1830, 17. 48 Ibid., 46-47.

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Il faut noter ici la technique rhétorique (probablement involontaire) dont se sert Quoy pour déshumaniser « les noirs » vis-à-vis « des hommes jaunes » : il représente les noirs toujours au singulier comme une « race» ; il pluralise les jaunes comme des « hommes ».

Figure 3 : MAURIN A. d’après SAINSON L.A. de, Tikopia et Vanikoro.Costumes des habitants de Vanikoro. Costumes des habitants de Tikopia,

lithographie, photographie B. Douglas 49

Au dire de Quoy, les différences entre les deux races sont « (des) caractères zoologiques proprement dits » et elles sont fondées sur « la base fondamentale de l'organisation (physique) » 50. Il affirme que ces deux races « sont tellement distinctes qu'on ne s'est jamais trompé en les citant ». Pour le naturaliste-anatomiste, il ne reste donc « qu'à saisir les variétés de ces deux types principaux ». Les variétés « ne sont que des nuances » qui résultent de l'opération des « modificateurs » externes tels que les « latitudes », la « configuration du sol », les « habitudes, etc. » 51. L'essentiel du texte approfondit en conséquence la division des deux races en variétés connues directement par Quoy et Gaimard. Mais Quoy évite soigneusement « (d')attribuer au climat ce qui appartient en propre à l'organisation » 52. Dans des notes archivées avec le brouillon de ce texte, il attribue expressément l'intelligence et la moralité à la biologie : quoiqu'il ne veuille point « jetter (sic) un anathème d'infériorité » sur « la race nègre », il soutient néanmoins que sa capacité d'accéder au « progrès » est contrecarrée par un « obstacle (qui) tient à son organisation et la met dans un certain degré d'infériorité dont elle ne pourra sortir que par un croisement de race » 53.

En deuxième lieu, des différences discursives entre les deux textes soulignent le dilemme professionnel qui contrariait les naturalistes voyageurs aux aspirations scientifiques : à savoir, la tension entre, d'une part, l'attrait grandissant du

49 DUMONT D'URVILLE, 1833 pl. 185. 50 QUOY, GAIMARD, 1830, 51 et 53. 51 Ibid., 16-17 et 50. 52 Ibid., 18-46 et 53. 53 QUOY, s.d. a, 10.

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polygénisme pour l'anthropologie naissante et, d'autre part, la force d'inertie morale et politique qu'exerçait l'orthodoxie monogéniste, soutenue par l'administration navale conservatrice, surtout en ce qui concerne les rapports officiels convenus tels que les Voyages. Le texte postérieur démontre une ambivalence notable au sujet de la population indigène de la Nouvelle-Hollande, habituellement déshumanisée par les discours racialistes. Dans les notes attachées à son brouillon, Quoy se replie à son égard sur un propos toujours buffonien mais à peine favorable : les habitants des îles voisines de la Nouvelle-Hollande, « tous de la race nègre, sont encore dans un état à demi sauvage. S'ils ont quelque supériorité sur ceux de la Nouvelle-Hollande ils le doivent à l'art de pêcher et à quelques végétaux qui leur donnent une nourriture pour ainsi dire toute préparée » 54. Dans l'ouvrage publié, il insinue que les habitants de la Nouvelle-Hollande pourraient constituer une espèce humaine distincte. Voici son raisonnement embrouillé à ce sujet :

« Malgré notre répugnance pour tout ce qui est hypothétique ou seulement obscur, nous ne pouvons nous empêcher de croire cependant que la race noire tire son origine de la Nouvelle-Guinée. Nous voulons dire la race des îles qui environnent cette grande terre (...) ; car, pour l'espèce qui habite la Nouvelle-Hollande, nous ne pouvons la regarder comme identique. Les caractères qui la différencient sont trop frappans pour qu'on cherche jamais à la rattacher aux Papous. Nous citerons les faits sans nous engager dans aucune conjecture sur leur origine. Nous demandons seulement qu'on nous tienne compte de la réserve que nous apportons dans des opinions zoologiques, qui, vu le développement actuel de la science, pourraient être portées fort loin et trancheraient bien des difficultés » 55.

Évidemment, Quoy reconnut ensuite le caractère stratégique de sa réserve puisqu'en annotant à l'encre la marge de son exemplaire personnel du livre, il écrit : « ici je ne suis pas trop clair. J'ai apparemment en vue l'unité de l'espèce humaine, àlaquelle je ne crois pas » 56.

En outre, dans le brouillon de ce deuxième texte, Quoy se sert arbitrairement des termes espèce et race comme synonymes 57. Selon Claude Blanckaert, l'identification morphologique de ces mots était généralisée par le discours polygéniste dès le début du XIX

e siècle 58. Quoi qu'il en soit, lors de la publication du tome, ou Quoy, ou Gaimard, ou leurs éditeurs ne voulaient pas discuter ouvertement la doctrine de l'unité de l'espèce humaine. Le texte édité utilise systématiquement le terme race, sauf deux exceptions en ce qui concerne « l'espèce qui habite la Nouvelle-Hollande » et « l'espèce noire »59. Plus de trente ans après, dans son autobiographie, Quoy ne doute plus de la pluralité des espèces humaines. Il affirme alors qu'il « ne partage pas les idées (...) sur l'unité des races humaines » du vénérable monogéniste Johann Friedrich Blumenbach (1752-1840) et d'autres « hommes de cabinet ». Condamnant leur « système », Quoy invoque l'autorité de l'expérience :

« quand on les a vues de près et leur dégradation dans la Nouvelle-Hollande et à la terre de Van-Diémen, on ne peut pas se refuser à croire que le créateur a fait tout aussi bien plusieurs espèces d'hommes qu'il a fait deux espèces d'Éléphants, trois avec la

54 Ibid., 9. 55 QUOY, GAIMARD, 1830, 29-30, je souligne. 56 Ibid., 30, je souligne ; exemplaire personnel de Quoy détenu par la Bibliothèque scientifique du

Muséum d'histoire naturelle de La Rochelle. 57 QUOY, s.d. a. 58 BLANCKAERT, 1988, 31. 59 QUOY, GAIMARD, 1830, 29 et 47.

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fossile. À l'aspect d'un naturel de la baie-des-chiens-marins, ou du port du Roi Georges, si l'on demandait à un académicien : cette race noire et malheure (sic), vivant dans les bois comme les animaux, pourrait-elle arriver un jour à s'asseoir à l'institut ? Sa réponse ne serait pas douteuse » 60.

Ce jugement est beaucoup plus ferme que ceux qu'il avait prononcés soit dans le journal de bord, soit dans la Zoologie de son premier voyage ; et il est même plus sévère que ses opinions publiées dans la Zoologie du second voyage 61. Sur le plan discursif, de telles vacillations démontrent l'acceptation quelquefois dissimulée du polygénisme par la science des races en France au XIX

e siècle et la résistance ambivalente de l'opinion conformiste. Par rapport à la pratique, cette évocation tardive a d’ailleurs quelque chose de trompeur puisque Quoy n'avait vu en personne que deux habitants de la Terre de Van-Diémen (la Tasmanie) ni aucuns de la Baie des Chiens-marins (Shark Bay).

L'idée de race, l'action indigène et l'expérience du terrain

Je me tourne donc vers l'axe ethnohistorique de ma démarche – les représentations problématiques de l'expérience des voyageurs européens lors des rencontres avec des individus non-européens et les traces ou « countersigns » de l'action indigène qu'on peut y discerner. Je suggère que le changement de ton racial entre les deux textes « De l'homme » de Quoy et Gaimard n'est pas exclusivement discursif mais qu'il découle aussi de l'expérience déconcertante de ces auteurs du comportement insolite de certains insulaires dans le cours du voyage de l'Astrolabe.

Tout au long de la campagne antérieure de l'Uranie, au contraire, les voyageurs avaient en général profité des relations amicales avec les habitants locaux. Rien ne venait troubler les sentiments paternalistes mais positifs à leur égard des deux naturalistes. De nombreux indices d'actions indigènes approuvées émaillaient leurs propos. Pour autant, elles n'en étaient pas moins stratégiques 62. Quoy et Gaimard n'avaient vu eux-mêmes aucun des habitants de la côte ouest de la Nouvelle-Hollande. Toutefois, ils tirèrent parti des comptes rendus de quelques-uns de leurs compagnons qui, en septembre 1818, avaient eu un contact « sinon intime, au moins pacifique » avec un groupe de quinze personnes. Ces dernières s'étaient rapprochées d'un campement français à terre à la Baie des Chiens-marins et s'étaient engagées de leur plein gré dans des échanges avec un officier de la marine 63. L'artiste Jacques Arago (1790-1855) dépeint cet entretien et le personnalise en se mettant au centre de l'image en train d'amuser les habitants avec des castagnettes (cf. figure 4). Par contraste prononcé avec le ton ingénu et la présence personnelle de l'artiste, Quoy s'appropriera rétrospectivement cet événement, au cours d'un essai biographique sur Gaimard, pour justifier son classement racial ultérieur des habitants de la Nouvelle-Hollande comme « l'espèce la plus dégradée de la terre, occupant le dernier échelon de l'humanité » :

60 QUOY, 1864-1868, 175. 61 Cf. QUOY, 1817-1820, 71-99 ; QUOY, GAIMARD, 1824b, 2. 62 Pour des narrations contemporaines de ce voyage, cf. ARAGO, 1822 ; FREYCINET, 1825-1839 ;

FREYCINET, 1927. 63 FREYCINET, 1825-1839, t. 1, 450-453 ; QUOY, 1817-1820, 86-89.

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« nous ne communiquâmes avec eux qu'au bout d'une longue perche pour leur donner quelque chose, et ils disparurent aussitôt » 64.

Si cet exemple illustre la radicalisation des jugements raciaux durant toute la vie de Quoy, l'examen approfondi des deux épisodes suivants révélera à la fois le processus de racialisation en cours et l'ambivalence des représentations françaises dérivant des rencontres particulières qui survenaient à la Nouvelle-Hollande et au Vanikoro pendant le voyage de l'Astrolabe.

Figure 4 : ARAGO J., Première entrevue avec les sauvages,phototypie, nla.pic-an11510415, Canberra, National Library of Australia 65

Premier épisode : la Baie du Roi Georges, octobre 1826

Le tableau et le portrait ci-après (cf. figures 5 et 6) représentent une autre rencontre entre des voyageurs français et des habitants de la Nouvelle-Hollande qui se passait en octobre 1826 à la Baie du Roi Georges (King George Sound) dans le sud-ouest du continent. L'artiste est Louis-Auguste de Sainson (1801-1887). Même si ses formes semblent caricaturer ses sujets (européens autant qu'indigènes), son but est de raconter graphiquement une histoire personnelle. L'homme vêtu à l'européenne – c'est lui qui est aussi le sujet du portrait – était resté une nuit et une journée à bord du vaisseau. Selon Dumont d'Urville, il « a passé gaiement son temps, buvant, mangeant et se chauffant au feu de la cuisine. Les matelots lui ont fait des cadeaux, et l'ont

64 QUOY, s.d. b, 3. 65 ARAGO, 1827.

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même habillé. Il a répondu avec intelligence aux questions qu'on lui a adressées, tant qu'elles ne l'ont pas ennuyé » 66. Puisque ni lui, ni les Français ne pouvaient se comprendre, la communication dut dépendre des gestes et des expressions. Le soir, cet homme rentrait chez lui avec Sainson, Gaimard et un autre officier (tous les trois également figurés dans l'image) qui voulait coucher à terre « pour observer de plus près les manières des naturels » 67. Dans son journal, Sainson décrit le même événement qu'il dessine, qui survient quand les trois Français rencontrent un groupe d'hommes et de garçons se tenant debout autour d'un feu et passent ensuite la soirée chez eux. Voici le récit de Sainson :

« lorsqu'ils vinrent à distinguer leur compatriote couvert de vêtemens, et décoré de colliers, de miroirs, enfin de mille bagatelles dont on lui avait fait présent, il n'y eut plus de bornes à leur gaieté. Tous se mirent à hurler et à chanter à la fois, et c'était un spectacle du plus étrange effet, que ces êtres noirs et maigres éclairés par le reflet des flammes, s'agitant, sautant, et poussant des sons qui ressemblaient à des aboiemens. De temps en temps un cri aigu et général paraissait servir de refrain à leurs chants, car toutes les voix s'accordaient pour le pousser, et il était suivi d'une courte pause. Notre sauvage, cependant, était fêté, caressé, examiné par ses amis ; chaque fois qu'une nouvelle merveille frappait leurs regards, les transports renaissaient plus vifs et plus bruyans encore : et lui, pour répondre à tant de politesse, poussait de longs éclats de rire, et s'unissait d'une façon très-énergique au bruit assourdissant de la joie commune... (C'était) une scène singulière, fertile en émotions neuves, et dont on chercherait en vain l'équivalent dans ces spectacles que la civilisation a inventés pour amuser l'esprit » 68.

Figure 5 : MAURIN A. d’après SAINSON L.A. de, Port du Roi Georges (Nouvelle-Hollande). Un naturel montre à ses compagnons les cadeaux qu'il a reçus à bord de l'Astrolabe,

lithographie, photographie B. Douglas 69

66 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 1, 96. 67 Ibid. 68 SAINSON, 1830, 187-188. 69 DUMONT D'URVILLE, 1833, pl. 23.

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Figure 6 : MAURIN A. d’après SAINSON L.A. de,(Un des) naturels qui vinrent à bord les premiers,

lithographie, photographie B. Douglas 70

Si l'enthousiasme pour l'exotique du jeune artiste dépasse même l'aveu public de sentiments similaires dans les récits de voyage des marins professionnels, le ton naïf et sensationnaliste de l'extrait n'atténue pas l'intérêt ethnohistorique de cette inscription de traces des protocoles indigènes de salutation et d'incorporation des étrangers. En outre, le ton subséquent de la description devient de plus en plus empathique à mesure que le discours change du mode hiérarchique et détaché de l'observation ethnographique vers le mode subjectif et plus égalitaire de la participation personnelle et du rapport. Pris ensemble, le journal et le dessin de Sainson exemplifient de façon frappante la vulnérabilité des a priori objectivistes à l'épreuve de l'expérience. D'abord, Sainson reconnaît que les Européens sont eux aussi les objets du regard de leurs interlocuteurs : « Leurs yeux brillans et expressifs nous observaient avec curiosité, et parcouraient toutes nos personnes. Leurs mains dures et maigres touchaient alternativement nos vêtemens et notre peau, et chaque parole que nous prononcions excitait leur étonnement et provoquait leur rire » 71. Ensuite, les Français s'étonnent quand leurs hôtes veulent « changer leurs noms contre les nôtres » parce qu'ils associent cette coutume à « un état de société déjà perfectionné » tel qu'aux îles du Pacifique, et non à quelque « horde errante de ce pays sauvage » 72. De

70 Ibid., pl. 8, no 4. 71 SAINSON, 1830, 188. 72 L'échange des noms était une stratégie répandue en Australie, comme partout en Océanie, pour

établir des liens de parenté avec les étrangers et donc pouvoir les assimiler et contrôler. Cf., par exemple,

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plus, Sainson et le jeune officier leur chantent « un air fort gai à deux voix » que les hommes applaudissent en battant des mains. Les Français s'étonnent encore que « ce misérable peuple » ait pu exprimer le contentement d'une manière « usitée aussi dans notre Europe » 73.

Rapportés dans le journal de Sainson, ces indices existentiels d'une disjonction entre a priori et expérience reparaissent dans le texte zoologique de Quoy, « De l'homme », sous forme d'une tension marquée entre un système scientifique global et des anecdotes personnelles. Les données générales de la zoologie humaine sont enlacées de longs extraits du journal de Quoy qui juxtaposent la caractérisation anthropologique et les anecdotes. Le mode d'énonciation souvent subjectif des passages circonstanciels et leur infiltration de « countersigns » de l'action indigène sapent l'objectivité scientifique de l'ensemble du texte. Par exemple, sa discussion de la Nouvelle-Hollande commence en avilissant en général les habitants du continent : « S'ils appartiennent à la race (noire) (...), ils en forment une variété bien distincte et des plus dégradées » 74. Ensuite, son catalogue zoologique des caractères physiques du peuple de la Baie du Roi Georges les dépersonnalise encore plus :

« Au premier aspect on est frappé de la maigreur et de l'exiguïté de leurs membres inférieurs ; mais cette disposition ne paraît pas être le caractère propre à ces peuples ; elle tient à l'état de misère dans lequel ils sont et au défaut d'une nourriture suffisante (...). Leur tête est assez grosse, la face un peu élargie transversalement ; l'arcade sourcilière très-saillante, d'autant plus peut-être que leurs yeux petits, obliques, noirs, et dont la sclérotique est blanc-jaunâtre, sont très-enfoncés. Ils ont les narines plus ou moins aplaties et écartées ; les lèvres médiocrement grosses, les gencives blafardes ; la bouche grande, très-fendue, ornée de dents fort belles, régulières et serrées, dont l'ensemble ressemble parfaitement à ces râteliers artificiels qu'on voit chez les dentistes de Paris. Ils ont les oreilles médiocrement grandes, les cheveux bruns ou noirs, frisés sans être laineux (...) la couleur de leur teint est un noir rougeâtre » 75.

Les choix de temps sont toujours significatifs : dans cette caractérisation anthropologique, le présent ethnographique affermit l'autorité scientifique des données en les universalisant. Mais tout de suite, l'auteur réhumanise ces hommes en intercalant un extrait de son journal. Cette anecdote rédigée au temps passé (l'imparfait) est évidemment inspirée par le comportement des indigènes particuliers rencontrés pendant le court séjour à terre de Gaimard et Sainson :

« Cependant ils ne sont point stupides (...) ; ils ont de la sagacité et de la finesse dans le sourire et dans les manières. Notre présence leur causait une sorte de gaieté, et ils cherchaient à nous communiquer leurs sensations avec une loquacité à laquelle nous ne pouvions répondre, car nous n'entendions pas leur langage (...). Bientôt l'échange de nom avait lieu (...) Dans une nuit passée au milieu d'eux à terre, nous obtînmes assez facilement les mots les plus usuels de leur vocabulaire, et ils ne cessèrent de nous montrer les dispositions les plus bienveillantes » 76.

BROOME, 2005, 13 (au Victoria au XIXe siècle) ; GAIMARD, 1833, 329 (au Vanikoro en 1828) ; MENDAÑA,1967, 199-200 (à Santa Isabel, Îles Salomon, en 1568) ; MORRISON, 1935, 189 (à Tahiti de 1789 à 1791) ; QUIRÓS, 2000, 91-92 (à Santa Cruz, Îles Salomon, 1595).

73 Ibid., 189-190. 74 QUOY, GAIMARD, 1830, 40, je souligne. 75 Ibid., 41-43. 76 Ibid., 43-44.

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Toutes ces représentations sont surdéterminées par des partis pris raciaux puissants mais elles démontrent par ailleurs l'empreinte indirecte du comportement et de l'accueil indigènes sur la langue, le ton et le contenu mêmes des textes européens de première main. Ces « countersigns » de la présence ou des actions indigènes sont des plus frappants dans les journaux de bord et dans les portraits fins lithographiés dans l'Atlas historique du Voyage que Sainson avait dessinés dans l'intention de dépeindre de façon naturaliste des individus réels nommés (cf. figure 7).

2

5

6

Figure 7 : MAURIN A. d’après SAINSON L.A. de, Nouvelle-Hollande (Port du Roi Georges). 2. Yalepouol ; 5. Patêt II ; 6. Mokoré,

lithographies, photographies B. Douglas 77

77 DUMONT D'URVILLE, 1833, pl. 8, no 2, 5 et 6.

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Deuxième épisode : Tikopia et Vanikoro, février et mars 1828

Le 10 février 1828, l'Astrolabe jeta l'ancre à l'île de Tikopia, une des Îles Salomon, mais n'y restait guère qu’un jour. Les Français identifièrent sur-le-champ les habitants à la race jaune où polynésienne et s'étonnèrent de les trouver enclavés dans des populations voisines apparemment toutes de race noire (cf. figure 3, supra). La langue de Tikopia était assez familière aux voyageurs qui avaient récemment passé plusieurs semaines aux Îles Tonga. Et de plus, deux marins européens qui s'y étaient installés depuis quelque temps servaient aux Français « (d')introducteur » et d'interprète 78. En ce qui concerne les gens de Tikopia, il y a une grande uniformité de ton parmi les divers genres et modes de représentation : c'est-à-dire, entre les dessins et les textes écrits ; et entre les passages anecdotiques rédigés à la première personne et au passé simple ou au présent historique, et les généralisations anthropologiques à la troisième personne et au présent ethnographique. Gaimard et Sainson allaient brièvement à terre avec deux autres officiers. S'exprimant en mode historique dans son journal, Gaimard s'enchante que :

« la réception qui nous est faite est extrêmement gracieuse : deux naturels viennent prendre chacun de nous par la main, pour nous conduire à terre au milieu de la population (...) et auprès des deux chefs (...). On s'empresse autour de nous ; on nous présente des cocos, des fruits à pain, des épis… » 79.

Pour sa part, Sainson s'exclame que « tous les visages respiraient la joie et la douceur » 80. Écrivant en mode racial comparatif dans la Zoologie, Quoy constate que les gens de Tikopia « sont grands, robustes, gais, confians, communicatifs comme tous les hommes de cette race en quelque lieu qu'on la trouve ». Dans un passage ethnographique de son journal, Sainson souligne avec un enthousiasme égal que « La race de Tikopia est belle ; sa couleur est peu foncée. Les hommes sveltes et grands paraissent agiles et dispos ; les traits de leur visage sont généralement agréables. On rencontre même parmi eux quelques types de figures d'une beauté parfaitement régulière » 81.

De tels sentiments favorables s'inscrivent également dans l'archive graphique. La lithographie d'une aquarelle de Sainson dépeint le débarquement des Français à la plage de Tikopia, avec l'aide « empressée » des habitants (cf. figure 8). Une autre lithographie représente la bienveillance de l'accueil cérémonial des visiteurs par les chefs ; Sainson lui-même est à l'œuvre au centre du premier plan (cf. figure 9) 82.

78 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 5, 109-121 ; GAIMARD, 1833, 305. 79 GAIMARD, 1833, 305. 80 SAINSON, 1833, 312.81 QUOY, GAIMARD, 1830, 23 ; SAINSON, 1833, 314. 82 Ibid., 312-313.

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Figure 8 : ARAGO J. d’après SAINSON L.A. de, Vue de la plage de Tikopia,lithographie, photographie B. Douglas 83

Figure 9 : ADAM V.J., TIRPENNE J.L. d’après SAINSON L.A. de,Les chefs de Tikopia recevant les officiers de l'Astrolabe,

lithographie, photographie B. Douglas 84

Onze jours après l'appareillage de Tikopia, l'Astrolabe atteignit l'île voisine de Vanikoro où les trois langues – tout à fait distinctes de celle de Tikopia et assez différentes l'une de l'autre – étaient inconnues des Français. Gaimard nous dit qu'un

83 DUMONT D'URVILLE, 1833, pl. 173. 84 Ibid.

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marin anglais embarqué à Tikopia « connaissait assez bien la langue et les mœurs de ces insulaires » – mais, dans les faits, sa compétence en ces domaines devait être très restreinte puisqu'il n'avait habité Tikopia que neuf mois et jamais Vanikoro 85. Dans cette dernière île, les voyageurs rencontraient, selon les dires réitérés de Dumont d'Urville, des insulaires « naturellement farouches et défians, comme tous les sauvages de la race noire océanienne » 86. L'expérience française pendant un séjour de presque un mois au Vanikoro tranche avec celle qui précédait. Leurs représentations respirent par conséquent les différences empiriques qui non seulement confirment les préjugés raciaux mais les élaborent et finiront par se figer dans les stéréotypes opposés de la race jaune et de la race noire tels que nous les avons examinés ci-dessus. Plus encore qu'en matière des représentations françaises de la population de la Baie du Roi Georges, on peut discerner ici une disjonction de ton marquée entre les dessins, les anecdotes et les généralisations scientifiques ; cette dissonance est du moins en partie le produit ambigu et le « countersign » de l'action indigène insolite, imprévisible et incontrôlable.

Sainson dépeint la réception des Français au village de Nama comme une scène d'activité indigène énergique mais apparemment aimable (cf. figure 10) : à gauche, un homme aide un marin à dresser un taud pour protéger les officiers du soleil brûlant ; à droite, un autre homme fait un échange avec un marin. En revanche, les rapports écrits signalent que ce sont la variabilité et l'inconstance du comportement des résidents des divers villages de Vanikoro qui déconcertent et contrarient le plus les Européens. Le journal de Quoy confirme en premier lieu l'impression visuelle favorable que donne Sainson de la conduite des gens de Nama : « Ils vinrent tous vers nous, sans armes ». Mais il démontre ensuite la vulnérabilité, l'appréhension et les présomptions racialistes de voyageurs qui naviguent dans des mers mal connues parmi des peuples indépendants, guerriers et censément sauvages : « Quelque bonnes que parussent leurs intentions, nous ne nous hasardâmes point à descendre, nous avions appris à nos dépens à nous défier de tous ces peuples en général » 87.

Dans sa narration d'une visite au village de Tevai, Dumont d'Urville est d'abord déçu de « (l')indifférence » des habitants qui « n'ont paru ni satisfaits ni fâchés de nous voir ». Il est ensuite mécontent des exigences et de la « mauvaise foi » du « chef » qui négocie astucieusement un échange. Il est enfin intimidé par les « dispositions avides et turbulentes » de « ces sauvages alertes, résolus et bien armés » et par leur soi-disant « perfidie », étant donné que les Français sont venus « sans armes ». Gaimard remarque dans son journal que l'attitude de ces gens est « très incertaine » et que le chef « se montre peu bienveillant » et « fort exigeant dans les marchés » 88. En contraste net, toutefois, Dumont d'Urville exulte de sa réception au district voisin de Manevai et la décrit en termes très évocateurs de celle des Polynésiens de Tikopia : « les habitans accoururent au-devant de nous, sans armes, et en témoignant une joie extrême de nous voir » ; le vieux chef (c'est peut-être son portrait ci-dessous, cf. figure 11) « me prit amicalement par la main, et me conduisit dans une espèce de case publique où l'on préparait des vivres. Nous nous assîmes au milieu de tout le peuple et à côté des chefs ». Dumont d'Urville se loue dorénavant

85 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 5, 113 ; GAIMARD 1833, 328 et 338-342. 86 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 5, 214 et 221, je souligne. 87 QUOY, 1833, 316. 88 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 5, 150-152 ; GAIMARD, 1833, 326.

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des habitants de Manevai et de leur chef « honnête », qu'il appelle « mon ami particulier » 89.

Figure 10 : ASSELINEAU L.A. d’après SAINSON L.A. de, ADAM V.J.,Vue du village de Nama (Vanikoro),

lithographie, nla.pic-an8391589, Canberra, National Library of Australia 90

Figure 11 : LLANTA J.F.G. d’après SAINSON L.A. de, Vanikoro. 1. Monbai,lithographie, photographie B. Douglas 91

89 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 5, 153-154, 175-176, 181. 90 DUMONT D'URVILLE, 1833 pl. 183.

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La subtilité de ces notations n'aura néanmoins pas de suites dans les généralisations de Dumont d'Urville à propos des indigènes de Vanikoro : « En masse, comme tous ceux de la race noire océanienne, ce peuple est dégoûtant, fainéant, stupide, farouche, avide et sans qualités ni vertus que je lui connaisse ». Ils sont, du reste, « timides, défians, et naturellement animés de dispositions hostiles contre les Européens » 92. Il faut noter que Dumont d'Urville se dirigeait vers Vanikoro à la recherche des restes de l'expédition maudite de Jean-François de Galaup de La Pérouse (1741-1788), disparue dans ces parages presque quarante ans auparavant. Les comptes rendus de la visite de l'Astrolabe sont imprégnés du spectre du sort funeste imaginé de l'équipage de La Pérouse. Ainsi, la narration de Dumont d'Urville déplore :

« (qu')il fut sans doute bien cruel pour notre illustre Lapérouse de succomber d'une manière si malheureuse sur la fin de sa brillante expédition ; mais s'il eut le temps de connaître les êtres hideux entre les mains desquels son mauvais sort l'avait précipité, avant de périr, son naufrage dut lui paraître dix fois plus déplorable encore. Partout ailleurs, au milieu des peuples de la race polynésienne, (...) il eût pu traiter avec eux, et en obtenir des égards et même des secours et des vivres (...). Mais à Vanikoro les compagnons de Lapérouse ne durent trouver que cupidité, barbarie et perfidie » 93.

Dans ce passage, non seulement Dumont d'Urville soutient-il la prédétermination téléologique des événements par la race, mais en plus il reconstitue l'histoire sur un plan racialiste. En effet, ce sont les Polynésiens de la Nouvelle-Zélande, de Samoa et d'Hawaii qui avaient commis les actes les plus notoires de violence contre les Européens, alors qu'un an avant des Polynésiens de Tonga avaient menacé et même attaqué l'équipage de l'Astrolabe 94.

Il y a également d'autres cas flagrants de dissonance entre les genres et modes divers de représentation des gens de Vanikoro. Par exemple, selon la description générale de Dumont d'Urville : « La coupe alongée de leur visage, la hauteur de leur front et surtout le rétrécissement de cette partie à la hauteur des tempes donnent à ces sauvages un aspect bizarre et tout-à-fait particulier » 95. Quoy confirme cette caractérisation comme un fait objectif sur le plan zoologique : « une apparence de rétrécissement latéral du front, produit par la saillie du coronal très-bombé en devant et par la forte arête que décrit la ligne courbe temporale ». Cependant, les portraits lithographiés personnels (et presque tous nommés, cf. figures 12 et 13) ne dépeignent guère ce trait soi-disant caractéristique. Quoy lui-même devra par ailleurs ajouter une annotation concédant que « Ce rétrécissement très-apparent n'est cependant que relatif, comme il a été facile de s'en convaincre par des mesures prises avec un compas courbe sur une quinzaine d'individus, et comparées ensuite, avec les dimensions de cette partie, sur des hommes de notre équipage ». La volte-face est surtout ironique parce qu'elle résulte de la contradiction des données de l'observation partiale par des preuves imprévues de la réalité indigène que fournit la craniométrie – la science concrète mais foncièrement subjective qui soutiendra l'anthropologie physique racialiste du XIX

e siècle. Cette concession oblige Quoy à reconnaître en

91 Ibid., pl. 167, no 1. 92 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 5, 166 et 213. 93 Ibid., 166-167. 94 Ibid., t. 4, 1-177. 95 Ibid., t. 5, 214.

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outre un élément de mode et de choix en matière de hauteur du front de ce peuple : « Leurs cheveux n'avancent point sur le front, et les soins qu'ils prennent de les relever et de les rejeter en arrière font que toutes ces parties sont bien visibles » 96.

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Figure 12 : LLANTA J.F.G. d’après SAINSON L.A. de, Vanikoro...4. Femme de Pako, chef de Manévai. 5. Valié, chef de Vanou,

lithographies, photographie B. Douglas 97

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Figure 13 : MAURIN A. d’après SAINSON L.A. de, Vanikoro... 2. Mériko, chef à Manévé... 5. Naturel de Manévé,

lithographies, photographie B. Douglas 98

96 QUOY, 1833, 358-359 ; QUOY, GAIMARD, 1830, 35. 97 DUMONT D'URVILLE, 1833, pl. 167, no 4-5. 98 Ibid., pl. 176, no 2 et 5.

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L'effondrement partiel de son système zoologique ne dissuade pas Quoy de continuer ce projet de caractérisation raciale de la population de Vanikoro : c'est-à-dire, la synthèse des présomptions racialistes et des analogies africaines et simiennes avec le mécontentement provoqué par les actions et la physionomie indigènes. Cette dialectique du discours et de l'expérience aboutit à l'invention de la race noire de l'Océanie dont les gens de Vanikoro servent à la fois de modèle et de synecdoque 99 :

« Nous devons avouer qu'ici la variété de l'espèce noire (...) se rapproche autant du type nègre proprement dit, que du papou (...). Un autre caractère non moins remarquable encore est la dépression des os du nez, ce qui fait paraître cet organe comme écrasé à sa racine : singulière ressemblance avec celui de l'orang-outang. Par cette disposition, les bosses orbitaires, déjà très bombées, le paraissent encore davantage. Le nez lui-même est très épaté (...) La forme bombée du front fait que leur angle facial n'est pas trop aigu (...). Le globe (de l'œil) est saillant et ressemble pour la forme et la couleur à celui des nègres ; les lèvres sont grosses, le menton est petit (...), le calcanéum chez beaucoup d'individus fait une saillie assez remarquable, ce qui est un nouveau rapport avec le Nègre, que ne présentait pas la race polynésienne. Leurs cheveux sont crépus (...). Les femmes sont d'une laideur effrayante » 100.

On doit se demander : « Pourquoi cette aversion presque insensée pour cesinsulaires précis » ? Les textes de première main nous livrent des témoignages assez nets de la consternation et même de la fureur qu'inspirent à ces voyageurs les attitudes et les actions des habitants de Vanikoro – l'opiniâtreté et l'égoïsme des hommes, leurs armes omniprésentes, et surtout leur détermination à dominer les échanges. Dumont d'Urville s'en plaint spécifiquement : « Malgré nos offres nous ne pouvons obtenir, des habitans de Tevai, que des noix de cocos et quelques bananes, tant leurs prétentions sont excessives pour les autres productions. Quant aux cochons, ils paraissent décidés à ne pas en céder, quel que soit le prix qu'on leur propose ». Il formule ici, sans la reconnaître, l'impasse imposée quand un équipage européen fort d'environ quatre-vingts hommes fait relâche assez longtemps et cherche d'urgence à se ravitailler dans un groupe de petites îles dont la population « très-faible » ne totalise pas « plus de douze ou quinze cents individus » et dont les ressources alimentaires sont très restreintes 101. Les Français et les gens de Vanikoro font également valoir leurs impératifs et leurs désirs matériels. Mais Dumont d'Urville ne voit dans les réticences des insulaires qu'autant de preuves de défauts moraux inhérents à leur race :

« toujours exigeans outre raison, les sauvages n'ont presque rien vendu. Ils ont apporté aujourd'hui des arcs et des flèches qu'ils se sont obstinément refusés à échanger, à quelque prix que ce fût. Ces hommes continuent de montrer une défiance étrangère aux peuples de la race polynésienne. Cela paraît tenir à une sorte d'antipathie naturelle des races noires contre les blancs » 102.

Ici est nettement exposée la séquence textuelle menant des actions désapprouvées commises par des particuliers jusqu'à un jugement général racialiste.

99 Dans une polémique anti-polygéniste, l'antiquaire Claude-Charles Pierquin de Gembloux (1798-

1863) ironise à cet égard sur le fait que « la dernière race (du genre humain) a été récemment découverte, c'est le mot propre, par MM. Quoy et Gaymard (sic) » (PIERQUIN DE GEMBLOUX, 1840, 34).

100 QUOY, GAIMARD, 1830, 35-37. 101 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 1, XXXIV-XLVII ; t. 5, 167 et 213. 102 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 5, 145-146.

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Gaimard passa six nuits au village de Nama, seul à part le marin anglais qu'il accompagna à terre. Son but principal était de chercher des renseignements précis sur la perte des vaisseaux de La Pérouse mais il voulait aussi poursuivre son enquête sur les langues et les mœurs locales 103. Les problèmes de communication étaient doublement critiques pendant ce séjour sur le terrain. Quelle que soit la compétence de l'interprète, Dumont d'Urville regrettera « que M. Gaimard ne connaisse point l'anglais ». Même ce dernier, toujours optimiste, admettra qu'« ordinairement » il n'entendait pas « très-bien » l'anglais ; quand cet homme s'excitait, « il me parlait très-vite, (et) je ne le comprenais plus du tout ». Quoy confirmera que « dans l'ignorance de la langue (indigène) notre actif et dévoué compagnon ne put rien apprendre ». Pour sa part, Gaimard avouera : « Je n'entends plus la langue, lorsque, dans leur fureur, ils parlent avec une incroyable volubilité » 104. Cette fureur, incompréhensible pour Gaimard, éclata subitement à deux reprises pendant son séjour au village. Il devinait que peut-être, « sans le vouloir,... nous avons fait quelque chose qui a déplu à nos insulaires ou qui les a outragés dans leurs idées religieuses », ou que son hôte se fâchait « par jalousie ». Selon son journal qu'il rédigea sur place :

« la colère de ces hommes noirs est terrible ; et lorsque toute une population ressemble à ceux qui étaient irrités, le spectacle ne doit pas être rassurant, si l'on n'est pas en nombre suffisant pour opposer une résistance énergique, et si l'on n'a au moins une chance de succès. Ici le sang-froid est la seule arme que je doive employer. Je tiens mon fusil sous le bras et je trace ces lignes au moment où le trouble existe encore à un haut degré » 105.

Le sang-froid manqua finalement à Gaimard face à « ce danger perpétuel » et à l'expérience désagréable de « voir sa vie à chaque instant compromise au milieu de ces sauvages » 106. Il rembarqua, dit Dumont d'Urville, « très-peu satisfait de l'esprit turbulent, du caractère irascible et des dispositions avides » des habitants de Nama et prostré par « des furoncles très-douloureux » et une fièvre « assez violente », sans doute la malaria. Le lendemain, Dumont d'Urville lui-même tomba malade de la même fièvre et en moins d'onze jours « quarante personnes (étaient) hors de service » 107. Les actions ambiguës et le comportement versatile et énervant des habitants de Vanikoro à la fois provoquèrent et catalysèrent l'expression d'un mélange d'émotions collectives composé d'aversion générale contre les noirs et d'imagination fébrile particulière à propos de La Pérouse. Le tout s'embrouillait des effets débilitants de la fièvre réelle que contracta une moitié de l'équipage dans « ce sol aussi malsain », selon la connaissance médicale du jour 108.

Conclusion

Dans son texte « De l'homme » de 1830, Quoy identifie également « des distinctions non moins fondamentales » entre les « mœurs » et les « habitudes » des deux races océaniennes. Tandis que la race jaune accueille les voyageurs en leur

103 Ibid., 158 ; GAIMARD, 1833, 328-350. 104 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 5, 158 ; GAIMARD, 1833, 349-350 ; QUOY, s.d. b, 19. 105 GAIMARD, 1833, 345-346. 106 Ibid., 349. 107 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 5, 185-186, 191 et 206. 108 QUOY, 1833, 320.

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offrant ses produits et « même les faveurs de ses femmes », les noirs sont belliqueux, « défians et surtout excessivement jaloux de leurs femmes » 109. Par cette opposition rhétoricienne, l'hospitalité des Polynésiens et la défiance des Noirs deviennent des caractères raciaux naturels. Au dire de Dumont d'Urville, les habitants de Tikopia sont « naturellement doux, joyeux et familiers » ; ceux de Vanikoro manifestent « une sorte d'antipathie naturelle (...) contre les blancs » 110. Je soutiens au contraire, dans cet article comme ailleurs 111, que l'hospitalité et la défiance sont toutes deux des stratégies locales adoptées pour contrôler ou profiter des Européens et que des « countersigns » de telles conduites imprègnent les représentations des voyageurs. Mais Quoy conclut de plus, en raison de ces prétendus « caractères » distinctifs, que « sous l'influence des Européens, (la race jaune) marche rapidement vers la civilisation, tandis que l'autre, refusant tout contact, demeure stationnaire dans son ignorance et sa barbarie » 112. Cette prophétie brutale (et démentie) est bien loin de l'optimisme préalablement exprimé par Quoy par rapport à l'avenir des Papous.

Le projet de taxinomie raciale de Quoy anticipe celui de son commandant Dumont d'Urville qui, deux ans plus tard, figera lui aussi les variétés labiles de « l'immortel Forster » en ne reconnaissant « que deux races vraiment distinctes dans l'Océanie » et en les dotant de leur nomenclature définitive devenue classique depuis (cf. figure 14) : « la race noire » ou « mélanésienne », considérée comme « celle des véritables indigènes » ou du moins des premiers occupants du sol ; et « la race polynésienne basanée ou cuivrée », considérée comme « une race de conquérants » colonisateurs qui détruisaient, expulsaient ou s'entremêlaient avec la race autochtone. Dumont d'Urville représente les Mélanésiens comme « généralement bien inférieurs » aux Polynésiens sur les plans physique, politique, moral ou intellectuel et comme des « ennemis naturels des blancs ». Il dénigre particulièrement les Australiens et les Tasmaniens « qui occupent le dernier degré » de la race mélanésienne et qui « sont probablement les êtres les plus bornés, les plus stupides et les plus essentiellement rapprochés de la brute sans raisonnement ». Non seulement Dumont d'Urville répète-t-il l'histoire conjecturale de migrations et de déplacements raciaux anciens introduite par de Brosses et Forster. Mais encore, et de la même façon que Quoy, il transforme cette spéculation historique en fait colonial moderne. C'est, dit-il, une « loi de la nature », résultant de « différences organiques » dans les « facultés intellectuelles » des diverses races, que la noire « dut obéir » aux autres races « ou disparaître » et que la blanche « dut dominer » 113.

109 QUOY, GAIMARD, 1830, 48. 110 DUMONT D'URVILLE, 1830-1833, t. 5, 112 et 145-146. 111 DOUGLAS, 2009b. 112 QUOY, GAIMARD, 1830, 49. 113 DUMONT D'URVILLE, 1832, 3-4, 11-13 et 15-20.

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Figure 14 : TARDIEU A., Carte pour l'intelligence du mémoire de M. le capitaine d'Urville sur les îles du grand océan (Océanie),gravure, photographie B. Douglas 114

Les représentations raciales de Quoy et de ses collègues oscillent en fonction de l'époque, des discours (soit officiel soit scientifique, soit historique soit anthropologique) et des genres de textes (écrit ou dessiné ; journal de bord, narration de voyage, traité scientifique, réminiscence postérieure). Mais elles diffèrent aussi selon l'accueil fait sur place aux voyageurs et selon le comportement, le genre de vie et l'apparence physique indigènes. J’en conclus, par conséquent, que les référents peuvent influencer les signifiants qui les représentent. La présence et les « countersigns » indigènes dominent souvent les histoires circonstanciées de contacts particuliers ou les portraits d'individus et peuvent désorganiser les narrations, les ouvrages scientifiques et les taxinomies raciales. L'œuvre de Quoy, qu'elle fût éditée ou manuscrite, démontre en outre l'attrait furtif qu'exerçait le polygénisme sur l'esprit des naturalistes voyageurs du XIX

e siècle qui aspiraient au renom scientifique le plus large. Quoique des savants le citent assez souvent comme source empirique, la célébrité scientifique de Quoy restera relativement modeste, sauf en sa province de Charente-Maritime 115. Après sa candidature malheureuse au Muséum en 1832, il se

114 Ibid., frontispice. 115 Cf., par exemple, BORY DE SAINT-VINCENT, 1827, t. 1, 83 et 303 ; t. 2, 108, BROCA, 1858-1859,

t. 2, 385 ; 1859-1860, t. 2, 603-607 et t. 3, 415 ; CUVIER, 1829-1830, t. 1, XXXIV et t. 3, V ; VIREY, 1824, t. 1, 500-501.

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dévoua avec grand succès à sa vocation médicale navale. En 1858, on le nomma au poste élevé d'Inspecteur général du Service de santé de la Marine, une fonction qu'il occupera jusqu'à sa retraite, dix ans plus tard.

Bronwen DOUGLAS

The Australian National University, Canberra, [email protected]

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