Les Français de la Volga. La politique migratoire russe des années 1760 et la formation des...

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Vladislav Ržeuckij Les Français de la Volga [La politique migratoire russe des années 1760 et la formation des communautés francophones à Saint-Pétersbourg et à Moscou] In: Cahiers du monde russe : Russie, Empire russe, Union soviétique, États indépendants. Vol. 39 N°3. Juillet- septembre 1998. pp. 283-296. Citer ce document / Cite this document : Ržeuckij Vladislav. Les Français de la Volga [La politique migratoire russe des années 1760 et la formation des communautés francophones à Saint-Pétersbourg et à Moscou]. In: Cahiers du monde russe : Russie, Empire russe, Union soviétique, États indépendants. Vol. 39 N°3. Juillet-septembre 1998. pp. 283-296. doi : 10.3406/cmr.1998.2525 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/cmr_1252-6576_1998_num_39_3_2525

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Vladislav Ržeuckij

Les Français de la Volga [La politique migratoire russe desannées 1760 et la formation des communautés francophones àSaint-Pétersbourg et à Moscou]In: Cahiers du monde russe : Russie, Empire russe, Union soviétique, États indépendants. Vol. 39 N°3. Juillet-septembre 1998. pp. 283-296.

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Ržeuckij Vladislav. Les Français de la Volga [La politique migratoire russe des années 1760 et la formation des communautésfrancophones à Saint-Pétersbourg et à Moscou]. In: Cahiers du monde russe : Russie, Empire russe, Union soviétique, Étatsindépendants. Vol. 39 N°3. Juillet-septembre 1998. pp. 283-296.

doi : 10.3406/cmr.1998.2525

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/cmr_1252-6576_1998_num_39_3_2525

AbstractVladislav Ržeucku, The French in the Volga region: the Russian policy on migration during the 1760sand the establishment of French-speaking communities in Saint Petersburg and Moscow. The questionof recruiting French settlers for Russia has not ever received the same attention as the influxes ofFrench immigrants who populated the foreign communities of Saint Petersburg and Moscow. However,these French immigrants are often the same as those who came with the stream of German-speakingsettlers destined for agricultural labor in the Volga region and who decided to establish themselves inthe two capital cities, either upon their arrival, or by slipping away before reaching the Volga region, orafter having known the difficulties of life in the settlements. They are largely responsible for the rapidgrowth of the French colony in Moscow during the years 1760-1770. A comparison of several lists ofsettlers, most of which have not been studied until recently, shows that this end result of the colonizationcampaign was in keeping with what usually happened in the case of French settlers. Given their culturallevel, they frequently had already lost the habit of agricultural work at the time of their departure forRussia and most of them had been migrants for a great part of their lives. All these factorspredetermined the most important collective migration of French settlers from the Volga region to thecapitals, around the year 177S.

RésuméVladislav Ržeucku, Les Français de la Volga : la politique migratoire russe des années 1760 et laformation des communautés francophones à Saint-Pétersbourg et à Moscou. La question durecrutement des colons français pour la Russie n'a pas été mise jusqu'à présent sur le même plan queles vagues de l'émigration française qui ont peuplé les communautés étrangères de Saint-Pétersbourget de Moscou. Ce sont pourtant ces Français qui, dans le flot des colons germanophones devant seconsacrer aux travaux agricoles dans la région de la Volga, ont décidé de s'installer dans les capitales,soit dès leur arrivée, soit en s'esquivant avant de gagner la Volga, soit après avoir connu les difficultésde la vie dans les colonies. C'est en grande partie grâce à eux que la colonie française de Moscou crûtrapidement dans les années 1760-1770. La comparaison de plusieurs listes de colons, dont la plupartn'ont pas été exploitées jusqu'à maintenant, montre qu'un tel dénouement de la campagne decolonisation fut conforme à ce qui se passait habituellement pour les Français. Compte tenu de leurcapital culturel, ils avaient déjà souvent perdu au moment de leur départ pour la Russie l'habitude dutravail agricole et la plupart d'entre eux avaient été emigrants durant une grande partie de leur vie. Toutcela prédétermina la plus importante migration collective des colons français de la région de la Volgavers les capitales aux environs de 1775.

VLADISLAV RŽEUCKD

LES FRANÇAIS DE LA VOLGA

La politique migratoire russe des années 1760 et la formation des communautés francophones

à Saint-Pétersbourg et à Moscou

Peut-on organiser une émigration ? Au XVIIIe siècle ce fut chose courante. Mais y eut-il des entreprises de ce genre qui justifièrent les espérances de leurs auteurs et qui atteignirent les objectifs préconisés ? Le gouvernement russe chercha, dès 1762-1763, à faire venir des pays d'Europe des colons, d'origine rurale de préférence, afin de contribuer au peuplement de territoires vides, notamment dans la région de la Volga. Mais, paradoxalement, cette politique contribua à la formation de colonies étrangères dans les deux capitales russes et eut des effets importants pour les communautés francophones de ces villes. C'est pourquoi il importe d'étudier l'origine, les lieux de résidence, l'expérience professionnelle, familiale, psychologique, bref, le capital culturel que ces Français apportèrent dans les communautés francophones de Saint-Pétersbourg et de Moscou. Dans cette publication nous voudrions jeter un nouvel éclairage sur cette question en nous fondant avant tout sur la comparaison de plusieurs listes inédites et — sauf une — encore inexploitées1. Elle poursuit une recherche abordée dans un article précédent consacré à la communauté francophone de Moscou sous le règne de Catherine II2.

G. Pisarevskij écrivait que l'émigration en Russie au début du règne de Catherine П était rurale par ses objectifs mêmes3. Cette opinion était contestée par A. Kizevetter et P. Šafranov, qui citaient les quelques exemples d'établissements urbains subventionnés par le gouvernement — tous connus de la science historique à l'époque, admettait P. Safranov4. Or, tout en soulignant le caractère rural de la vague migratoire. G. Pisarevskij convenait que parmi les colons des « représentants du prolétariat urbain n'étaient pas rares », et c'est à cette dernière particularité qu'il imputait le nombre élevé de colons reconnus en 1769 inaptes à l'agriculture (6.7 % parmi ceux de la couronne, 1 2 % parmi les colons « levés » par des recruteurs)5. Mais Pisarevskij n'indiquait pas si le « prolétariat urbain » était plus ou moins nombreux selon qu'il s'agissait des Français ou des germanophones. Le sort des Français ne l'intéressait pas particulièrement, ces derniers n'étant qu'une poignée sur les rives de la Volga.

Cahiers du Monde russe. 39(3). juillet-septembre 1998. pp. 283-296.

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L'académicien V. Šišmarev, passionné par la recherche des traces de l'émigration « romane » en Russie, a évoqué le document bien connu des Archives de la Bastille intitulé Observations sur la levée des colonies russes et l'émigration des familles françaises (par la suite appelé Observations...)6, mais il n'en a pas tiré de conclusion sur la composition du groupe français recruté pour la Russie7. Il n'a pas comparé non plus la part française et allemande de cette émigration. Mais il a analysé la liste des colons français de 17678 et il en a conclu que les Français véritables n'étaient pas nombreux dans les colonies de la Volga — à peine 70 familles et célibataires — dont la moitié étaient laboureurs et les autres artisans. Mais, selon Šišmarev, c'étaient des artisans ruraux (« remeslenniki kresťan- skogo tipa ») qui avaient seulement perdu l'habitude de la terre mais n'étaient pas à proprement parler inaptes à l'agriculture9. En comparant l'origine géographique des Français d'après les listes dont il disposait avec les données des Observations..., Šišmarev relève un décalage très important. D'un côté, les uns viennent de Г Ile-de-France, de l'Orléanais, du Berry, de Picardie, d'Artois, de Champagne, de Lorraine, de Bourgogne, d'Alsace et de Franche-Comté, etc., de l'autre la plupart des colons « français » (c'est Šišmarev qui met entre guillemets) proviennent d'Alsace et de Lorraine. Et Šišmarev de conclure que cette divergence s'explique par l'abondance des germanophones, cachés sous la dénomination de « Français », « sujets français » dans les Observations... des Archives de la Bastille10.

Il revint à Roger Bartlett de montrer les causes du revirement survenu dans la politique migratoire en Russie quand l'accent n'était plus mis sur le savoir-faire des étrangers mais sur la population des espaces inhabités de l'Empire1 '. Il a aussi relevé une contradiction certaine entre les objectifs de l'immigration et le capital culturel d'une partie des immigrants12. En effet, c'est en 1775 que la couronne, après le « tri » organisé dans les colonies de la Volga, reconnut que 1 755 colons étaient inaptes à l'agriculture. 529 d'entre eux reçurent finalement des passeports leur permettant de se choisir un autre mode de vie et un nouveau domicile, y compris dans les villes. Et la plupart des 3(X) familles autorisées à partir auraient tourné leurs regards vers les capitales, Saint-Pétersbourg et Moscou, bien décidés à rembourser à la Chancellerie de tutelle des étrangers les frais occasionnés par leur voyage en Russie, ainsi que les impôts dont ils étaient exemptés pour 30 ans dans leurs colonies de la Volga13. Par cette mesure le gouvernement reconnaissait que ses projets du développement de l'agriculture dans la région de la Volga par les étrangers n'avaient pas entièrement réussi.

Cela faisait surgir naturellement quelques questions. Ce fiasco serait-il provenu des difficultés imprévisibles de l'existence des colons dans la région de la Volga ? Les rigueurs de leur vie étaient bien connues et ont été évoquées à plusieurs reprises : sécheresse, mauvaises récoltes, insurrection de Pugačev, raids des nomades, etc.14. Le vice-consul de France à Moscou, informé des calamités qu'avaient subies les colonies, en informait à son tour l'ambassadeur de France1-^.

Un des mérites du livre de Bartlett a été de relever d'une part la contradiction entre les objectifs de l'immigration et les aptitudes des immigrants et, d'autre part, la dispersion d'une partie des colons avec le « tri » de l'année 1775 et leur exode vers les capitales ; cette dernière migration avait été passée sous silence par tous les auteurs antérieurs16. Mais la liaison entre les deux, si logique qu'elle

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paraisse, n'a pu qu'être esquissée : on ignorait presque tout de la nature de ces immigrants qui quittaient, au bout de près de dix ans, les colonies pour recommencer — une fois de plus — leur vie à zéro.

Au tout début de l'année 1777, le vice-consul de France à Moscou, Pierre Martin, rédigea une liste des Français domiciliés dans l'ancienne capitale de Russie17. Ce précieux document que nous avons analysé ailleurs18 contient une partie intitulée « État des François et Francoises qui ont été sollicités de passer en Russie comme colons par les Srs. Meunier de Précourt et Hauterive, tant à Paris qu'en Allemagne, etc.». Le vice-consul y rappelle brièvement qu'en 1765 et 1766 beaucoup de colons étrangers venant des différents États de l'Europe sont passés en Russie. Les informations qu'il donne quant aux chiffres sont vraiment très fantaisistes et font sans aucun doute partie de la mythologie que ces anciens colons recensés par Martin à Moscou s'étaient forgée pendant les années passées dans les colonies. Pierre Martin écrit :

« On estime qu'il est passé cent quatre mille familles de colons en Russie, en 1765 et 1766, des différents États de l'Europe. On a formé de tous ces emigrants cent quatre colonies, dont cinquante-deux de chaque côté du Volga, tant au-dessus qu'au-dessous de Saratoff ; mais il ne reste plus guère que quatre ou cinq mille de ces familles, le reste étant péris de misère et de maladies, ou massacrés par Pouga- tchoff, ou emmenés en esclavage par les Tartares. La grande colonie françoise était à Saratoff, mais elle a été presque toute dispersée par les ordres de l'Impératrice, qui a permis aux familles qui la composoient de se répandre dans l'Empire pour y faire usage de leurs talents et y chercher à vivre. Il est cependant resté plusieurs de ces familles à Saratoff, ainsi que dans d'autres colonies mêlées de toutes les nations. » ' .19

Ce long préambule est suivi de la liste des Français venus des colonies de la Volga s'installer à Moscou. Cette liste contient les noms de 48 Français dont 37 étaient mariés et avaient des enfants, soit en tout près de 150 personnes. En 1777, le nombre des Français à Moscou ne dépassait pas 650 personnes, avec ces anciens colons, ce qui permet d'évaluer l'importance de la contribution des colonies de la Volga.

Ces chiffres permettent également d'estimer, ne serait-ce qu'approximative- ment, la part des Français dans la migration des colonies vers les capitales. Sur les 300 familles qui auraient émigré de la Volga vers les capitales20, le nombre des Français était assez important : on ne sait pas encore combien ils étaient exactement et on ignore combien retournèrent à Saint-Pétersbourg, mais il est évident que la part des Français dans cette migration était très supérieure à leur proportion dans les colonies de la Volga. Qui plus est, cette migration draina, à en juger par les listes dont nous disposons, la majorité des colons francophones de la Volga. Ce n'est absolument pas le cas des germanophones. Il est donc important de rappeler l'origine de ces colons.

Une autre question se pose : celle de la différence entre le capital culturel des colons allemands et français qui expliquerait peut-être cette disproportion. Qui étaient ces colons français ? d'où venaient-ils ?

Les Observations... des Archives de la Bastille n'ont pas encore livré tout ce qu'elles recèlent. Quelles conclusions pourrait-on en tirer ? Pour moi, elles se

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résumeraient en ceci : le recrutement des Français se faisait généralement à l'extérieur de la France, dans les communautés françaises des villes comme Hambourg, Francfort, etc. Originairement les colons français semblent avoir été principalement des Alsaciens et des Lorrains ; ils étaient, au moment de leur départ, majoritairement de milieu urbain, tant par leur lieu d'habitation que par leurs professions ; il y avait parmi eux pas mal de déserteurs, trait significatif, caractérisant ces colons aussi d'un point de vue psychologique. Il est à remarquer que le nombre de déserteurs est tout aussi important dans la liste des Français venus des rives de la Volga pour s'installer à Moscou : au moins 18 hommes sur 51 sont appelés « déserteurs » dans la liste de Pierre Martin rédigée en 1777. Mais le document des Archives de la Bastille contient très peu de noms, ce qui rend impossible toute comparaison avec les listes de Šišmarev et de Martin.

Le fonds de la Chancellerie de tutelle des étrangers aux Archives d'État des actes anciens (RGADA) contient un dossier sur les contrats passés avec les colons. On y trouve une liste des 55 colons français, arrivés en 1764 à Saint- Pétersbourg, accompagnés des recruteurs célèbres, de Boff et Meunier de Précourt21. Si on y ajoute les quelque trente personnes, venues, sous la conduite de Philippe Auguste Delesalle, durant l'été 176522, on retrouve la plupart des Français connus d'après la liste de ŠiSmarev et celle de Martin, et en général la majorité des colons français qui nous sont connus. On peut penser qu'il s'agit des deux plus grands contingents de Français dans cette vague de colonisation, qui pour cette raison méritent notre attention23.

Le 6 août 1764, le ministre plénipotentiaire de Russie à Paris, le prince D. A. Golicyn, envoya à Saint-Pétersbourg un rapport dans lequel il avisait la Chancellerie que les trois directeurs, Meunier de Précourt, de Boff et de Hauterive « levaient » avec beaucoup de succès des colons en Allemagne et qu'un bon nombre d'entre eux devaient arriver incessamment à Lubeck pour être acheminés vers Saint-Pétersbourg. Un mémoire était joint au rapport du ministre, probablement de la main de Meunier de Précourt dont les talents littéraires étaient bien connus. L'auteur, évoquant la méprise de la Chancellerie à l'égard de ses associés et de lui-même qu'elle considérait comme « un entrepreneur qui sous l'appât d'un intérêt pécuniaire offrait de faire expatrier des familles », tenait à faire la lumière sur ses véritables intentions :

« C'est l'honneur de créer un peuple nouveau, la gloire de vaincre les difficultés qui s'opposent aux premiers établissements, la douce satisfaction de conduire des hommes et de les rendre heureux par de sages règlements et par une administration bien entendue ; c'est enfin la noble ambition de faire sortir du sein d'une terre agreste, les arts, les sciences, le commerce et l'agriculture qui animent les chefs de la colonie et ses associés. »24

L'envoyé russe à La Haye, le comte A. S. Musin-Puškin, informait la Chancellerie de tutelle à la fin du mois d'août 1764 qu'il envoyait le jour même à Lubeck Meunier de Précourt avec ses 30 colons originaires de France et Jean de Boff à la tête d'un groupe de 17 colons. Il les avait munis d'une somme de 412 thalcrs et demandait d'autres subventions, en attendant le convoi du troisième recruteur, de Hauterive, venant de Hollande. Il était stipulé que ces colons « ne

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feront jamais corps avec les colons venus au hasard, de droite et de gauche, tels que sont aujourd'hui les colons allemands »25. Les Français débarquèrent à Saint- Pétersbourg vers le mois de septembre 1764, le 19 septembre 1764 ils se trouvaient à Oranienbaum26. À la date du 6 janvier 1765 les colons étaient déjà à Moscou27. C'est eux qui formèrent l'unique colonie presque exclusivement française de la région de la Volga — Franzosen-Rossoschi28. Sur près de 40 hommes de ce groupe, 10 seulement purent signer eux-mêmes le contrat avec leurs recruteurs29.

Le deuxième groupe des colons fut recruté aussi sous le compte de Meunier de Précourt. Le véritable chef en était un certain Philippe Auguste Delesalle, se disant fermier, écrivant dans un français châtié ; ayant pris la décision d'aller en Russie avec sa femme et ses onze enfants, il entraîna avec lui quelques compatriotes. Au mois d'avril 1765, le comte A. R. Voroncov les expédia à Hambourg chez le comte A. S. Musin-Puškin. En mai de la même année, embarqués sur le « Violence » à Travemiinde, ces colons se dirigèrent vers la Russie. Meunier de Précourt plaça un certain Larmée à la tête de ce groupe, le sommant de conduire ces Français à destination « en évitant de passer par Moscou ville funeste aux colonies », selon lui trop d'étrangers préfèrent « la capitale des moscovites aux fatigues que peuvent occasionner des établissements où l'on ne trouve que la gloire de remplir les devoirs et donner des preuves de son zèle pour le service de Sa Majesté Impériale ». Une partie de ces colons, à l'instigation de M. Delesalle, refusèrent de s'établir dans la colonie de Meunier de Précourt et allèrent dans quelque colonie d'État-10.

Certains colons réussirent à s'esquiver déjà à Saint-Pétersbourg avant de gagner les rives de la Volga, soit en demandant asile à l'ambassade de France (cf. les listes en annexe), soit en se débrouillant pour trouver du travail11.

On observe une particularité commune à toutes ces listes : les noms des colons s'y répètent tandis que leurs caractéristiques sont plutôt complémentaires. On dénombre en tout 51 hommes dans les deux listes de la Chancellerie dont on vient de parler. Au moins 20 d'entre eux se trouvent déjà à Moscou en 1777, or ce chiffre peut être en réalité encore plus élevé, vu la déformation de l'orthographe des noms. Sur ces 20 familles qui atteignirent Moscou, la grande majorité est composée à la fois de « laboureurs et vignerons ». Il y a en outre deux « fabricants », un architecte, un ingénieur et un tailleur. L'origine géographique est très variée. On y trouve plusieurs anciens Parisiens (mais il s'agit de « laboureurs » !), des Orléanais, quelques ressortissants de Lorraine, du Languedoc, de Picardie, du Berry, de Normandie, de Franche-Comté... Mais il est intéressant de noter que certains « laboureurs » de Paris ont pour femmes des habitantes de Liège, de Hanovre ou de Brandebourg. Cela fait supposer que si ces Français, lors de leur départ en Russie, défrichaient la terre ou cultivaient les vignes, c'était quelque part sur les bords du Rhin. Cette hypothèse est confirmée par la relation susmentionnée de Golicyn vantant les succès des trois directeurs « en Allemagne »12. Autre exemple : un nommé Casimir Certellet, « cultivateur pour le défrichement » de Champagne, se trouve marié à une couturière de Paris et figure lui-même dans une autre liste comme « cordonnier de Paris ». Je crois que ces exemples sont assez parlants31. Détail important : cinq de ces « laboureurs et vignerons » sont appelés déserteurs dans la liste du vice-consul français

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Martin. On a peine à croire que tous les déserteurs français à Moscou aient reconnu avoir déserté l'armée royale, et partant leur nombre pourrait être plus considérable. Même s'il s'avère impossible d'identifier ces listes avec celle des Observations..., on constate au moins leur similitude sur un point important, celui du lieu de recrutement.

Ainsi, il n'y a pas de doute, beaucoup, peut-être la plupart des colons français recrutés pour la Russie dans les années 1760 résidaient, à l'époque de leur départ, hors des frontières de France. Il est possible aussi qu'une partie eussent été embauchés à Paris, comme le vice-consul français à Moscou l'indique dans sa liste. Ceci est significatif : qu'ils eussent quitté la France, puis qu'ils fussent allés en Russie, sur les rives de la Volga si lointaine, d'où ils regagnèrent les capitales, en tout cas Moscou, et qu'ils ne se fussent pas éternisés non plus dans ces mégalopoles si appréciées de leurs compatriotes34 puisqu'ils les quittèrent également (pour la France ou pour une autre destination ?) — voilà qui pourrait s'expliquer par leur difficulté à se fixer où que ce fût : c'étaient des migrants par définition.

Étaient-ils liés à la terre quand ils prirent la décision de partir en Russie ? Je laisserai cette question à la responsabilité des recruteurs qui n'ignoraient pas, on le devine, ce qu'il fallait indiquer dans la rubrique « profession » pour décrocher l'argent de la Chancellerie de tutelle. Ils le savaient bien car les objectifs de l'immigration étaient ouvertement formulés par le gouvernement russe.

Nous n'ignorons pas bien sûr d'autres facteurs qui eurent leur part dans la migration des Français : les calamités qui frappèrent les colonies, les rumeurs de l'existence d'une communauté française à Moscou que le directeur de Rossoschi, de Boff, un des trois recruteurs associés, connut personnellement lorsqu'il y passa quelque temps en 176535 et où il se retira comme le firent ses colons (cf. la liste des colons en annexe), enfin la certitude de pouvoir y gagner leur vie, notamment en leur qualité de Français. Ce fut le sort des Delesalle, enfants et descendants de Philippe Auguste Delesalle, qui apportèrent au XVIIIe comme plus tard au XIXe siècle une contribution impressionnante dans le domaine de l'instruction publique à Moscou36.

Un faible espoir de retrouver des Mémoires relatifs à cette migration permet de supposer qu'on aura un jour des réponses aux questions qu'on se pose encore : la migration des Français de la Volga vers Moscou fut très probablement collective, mais quel en a été le mécanisme ? On ne sait que peu de choses sur les occupations de ces Français à Moscou, et pas davantage sur leur insertion dans la vie de la communauté française de la ville37. Les membres de ce groupe, qui avaient passé près de dix ans côte à côte dans le même village, gardèrent-ils des rapports entre eux une fois installés dans une grande ville et si oui dans quelle mesure ? Que sont-ils devenus par la suite38 ?

Institut genealogičeskih issledovanij Rossijskaja nacional'naja bibliotéka 18, ul. Sadovaja 1 91069 Sankt-Peterburg

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ABREVIATIONS

ANF Archives Nationales de France RGADA Rossijskij Gosudarstvennyj Arhiv Drevnyh Aktov RGIA Rossijskij Gosudarstvennyj Istoričeskij Arhiv RGVIA Rossijskij Gosudarstvennyj Voenno-Istoričeskij Arhiv RNB Rossijskaja Nacionalnaja Bibliotéka

1. J'ai cru nécessaire de publier ces listes en annexe : elles constituent des sources de base dont je ne fais que tirer quelques conclusions, sans prétendre à l'exhaustivité de mon analyse.

2. V. Rjéoutski, « La communauté francophone de Moscou sous le règne de Catherine II ». Revue des Études slaves, 68, 4, 1996, pp. 445-461, spéct. pp. 449-451.

3. G. Pisarevskij, «Iz istorii inostrannoj kolonizacii v Rossii v XVIII v. (po neizdannym arhivnym dokumentam)» (Histoire de la colonisation étrangère en Russie au XVIIIe s. (d'après des documents d'archives inédits)), Zapiski Moskovskogo arheolo- gičeskogo instituta, 5, 1909, pp. 46-48, 57, 76-77.

4. A. A. Kizevetter, «Otzy v o sočinenii G. G. Pisarevskogo "Iz istorii inostrannoj kolonizacii v Rossii v XVIII veke". Otčet о 52-m prisuždenii nagrad gr. Uvarova» (Compte rendu de l'œuvre de de G. G. Pisarevskij 'Histoire de la colonisation étrangère en Russie au XVIIIe s.'), Zapiski Imperatorskoj Akademii nauk po istnňko-filologičeskomu otddeniju, XI, 3, SPb., 1912, pp. 15 1-200, passim, p. 159 en particulier; P. A. Šafranov, «Otzyv о knige G. G. Pisarevskogo "Iz istorii inostrannoj kolonizacii v Rossii v XVIII veke"», Čtenija vObščestve istorii i drevnostej rvssijskih pr i M os kov s kom universitete, 4, 1909.

Les documents de la Chancellerie de tutelle des étrangers conservés aux Archives d'État des actes anciens (RGADA), notamment la collection des contrats passés avec des fabricants étrangers (f. 283 (Chancellerie de tutelle des étrangers), op. 1, d. 16 (1764- 1775), laissent supposer que ces auteurs citèrent à peu près tous les cas de subvention par le gouvernement des établissements urbaias des étrangers à cette époque.

5. G. Pisarevskij, art. cit., pp. 65, 76, 1 1 1 - 1 1 2. 6. Ce document des Archives de la Bastille est conservé au département des manusc

rits de la Bibliothèque nationale de Russie. Cf. A. Ljublinskaja, Bastil'skij arhiv v Leningrade. Annotirovannyj katalog, Leningrad, 1988. p. 22 : « Observations sur la levée des colonies russes et l'émigration des familles françaises ». Analysé pour la première fois dans : Paul d'Estrée, « Une colonie franco-russe au XVIIIe siècle », Revue des Revues, 19, 1896, p. 1 1. Publié par A. Ljublinskaja dans un catalogue interne du département des manuscrits de la Bibliothèque nationale de Russie : A. Ljublinskaja, Dokumenty iz Bastil'skogo arhiva. Annotirovannyj katalog, Leningrad, I960. Publié dans une édition largement accessible par Bartlett : R. Bartlett, Human capital. The seulement of foreigners in Russia, 1762-1804, Cambridge, Cambridge University Press, 1979, pp. 250-256.

7. V. Šišmarev, «Romanskie poselenija na juge Rossii. Naučnoe nasledie» (Les colonies romanes au sud de la Russie. Héritage scientifique), Trudy arhiva Akademii nauk SSSR, 26, 1975. pp. 109-110.

8. Une copie de la liste des Français dans les colonies de la Volga se trouve aux Archives de l'Académie des sciences de Russie (section de Saint-Pétersbourg), 896 (fonds

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de V. Šišmarev), 1, 477, f. 493-499. Il s'agit probablement des listes dressées en 1769 qui étaient conservées aux Archives de l'état-major (Voenno-učebnyj arhiv general'nogo štába), aujourd'hui ce fonds se trouve aux Archives de guerre de Russie (RGVIA).

9. V. Šišmarev, art. cit., pp. 106, 1 17. 10. Ibid., p. 110. 1 1. R. Bartlett, op. cit., pp. 51-54. 12. Ibid, pp. 59,97-98. 13. Ibid, p. 107 : « However, although many individuals settled in the Volga region,

the largest single group appears to have made its way back to the capitals, where they joined the communities of Western artisans and tradesmen. » R. Bartlett tirait cette information de l'oukaze du 30 mai 1782, in Polnoe sobranie zakonov Rossijskoj Imperii (cité infra PSZ), Saint-Péterbourg, 1830. XXI, n° 15411.

14. R. Bartlett, op. cit., pp. 96-99. Voir aussi la bibliographie dans les notes. 15. Archives Nationales de France (cité infra ANF), Affaires étrangères, B-I-480, f.

218. 16. R. Bartlett, op. cit., pp. 97, 107. 17. ANF, Affaires étrangères, B-I-480, f. 213-223 : « État de La Colonie françoise à

Moscou et dans cette partie de l'Empire de Russie, pour être mis sous les yeux de Monseigneur de Sartine Ministre et Secrétaire d'État ayant le département de la marine, par le Sr. Martin vice-consul à Moscou, au commencement de 1777 ».

18 V. Rjéoutski, « La communauté francophone...», art. cit. 1 9. ANF, Affaires étrangères, B-I-480, f. 2 18. 20. Ou kaze du 30 mai 1782, PSZ, op. cit 21. RGADA, 283, 1,17 (1764-1777), f. 50-50 verso : « 19 septembre 1764. État du

nombre des colons arrivés en Russie le 18 septembre 1764 sous les ordres et la conduite de Mr. De Boffe et Meunier de Précourt, directeurs d'une branche de la colonie étrangère à former entre Saratoff et Astracan, en vertu du traité du 5 juillet dernier, dont copie est ci- jointe : ensemble l'endroit de leur naissance, leur âge, métiers et talents, suivant le détail ci-après ».

22. RGADA, 283, 1 , 59 ( 1 765). 23. On a tout lieu de croire que des Français se soient joints individuellement à

d'autres départs collectifs. Cf. les colons Saunier et Michel engagés par Bauregard. RGADA, 283. 1, 97 (1766-1780).

24. RGADA, 283, 1 , 1 7 ( 1 764- 1 777), f. 64, etc. 25. RGADA. 283, 1, 17 (1764-1777), f. 47. 26. RGADA, 283, 1, 17 (1764-1777), f. 54-58. 27. RGADA, 283, 1,17(1 764- 1 777), f. 1 1 1 . 28. Le destin de cette colonie intéressait beaucoup V. Šišmarev, op. cit., pp. 111-112.

Lors du recensement des colons en 1798 il s'avéra que des premiers habitants il ne resta que la famille « Брешере » et la veuve Leblanc. Dans les deux cas ils semblent être apparentés à des Français qui s'en allèrent à Moscou. Archives Historiques de l'État de Russie (RGIA), 383, 1, 802 (description de la colonie Rossoschi).

29. RGADA, 283, 1 , 1 7 ( 1 764- 1 777), f. 49. 30. RGADA, 283, 1 , 59 ( 1 765).

LES FRANÇAIS DE LA VOLGA 291

31. En 1772, Albertině Delesalle et son père, Philippe Auguste Delesalle, s'engagèrent comme gouverneurs à l'Académie des Beaux-Arts à Saint-Pétersbourg, où ils succédèrent à deux autres colons, un certain Saunier [?] qui chercha secours auprès de l'ambassade de France et auquel on délivra en 1766 un passeport pour s'établir à Saint- Pétersbourg (RGADA, 283, l. 79 (1766) ; 97 (1767-1780)) et Claude Grené, venu avec le même Philippe Auguste Delesalle. Tous deux furent mis à la porte pour avoir eu des disputes entre eux (RGIA, 789 (Académie des Beaux-Arts), 1, 462, f.27-34). Le colon Charles Michel suivit l'exemple de Saunier, de François Girardot (Girardau) ou de Jean Cuissac en demandant asile à l'ambassade (RGADA. 283, 1, 97 (1767-1780)). Un autre exemple est le colon Horn [?), probablement futur libraire à Moscou, qui est autorisé, après remboursement des frais, à rester à Saint-Pétersbourg (RGADA, 283, 1, 64 (1766)). Certains colons parvinrent à rester à Moscou par où ils passaient en allant vers la Volga, toujours à la même condition de payer ce qu'ils devaient à la Chancellerie. Le colon français La Coste venu avec Delesalle s'établit à Moscou dès le début de février 1766. C'est son recruteur, de Hauterive, qui consentit à rembourser, en attendant que La Coste puisse gagner de l'argent, les quelque 80 roubles que la Chancellerie avait dépensé pour le transport, la nourriture, etc., de chaque colon. La Coste fut logé chez le marchand français Desmarais dans le Faubourg des Étrangers à Moscou et fut bientôt engagé comme « outchitel ». Il ne remboursa sa dette qu'en 1771 (RGADA, 283, 1, 72 ( 1 766- 1 77 1 )).

32. RGADA, 283, 1, 17 (1764-1777), f. 64. 33. Les autres Français, non mentionnés sur les deux listes de la Chancellerie et qui

passèrent eux aussi par les colonies pour aboutir à Moscou, appartenaient pour la plupart au milieu urbain.

34. Par exemple le colon de Plassan, officier déserteur. ANF, Affaires étrangères, B- 1-480. f. 218. On ne retrouvera que cinq ou six familles dans la liste des Français résidant à Moscou en 1793, Sankt-Peterburgskie vědomosti, 47-51, 1793.

35. G. Pisarevskij, art. cit.. Annexe, p. 63. 36. La généalogie que j'ai établie de cette famille va paraître en 1999 aux éditions de

la Bibliothèque nationale de Russie. 37. Un seul cas bien connu, celui des Delesalle : ils bénéficièrent de la protection

d'une branche de la famille des Cheremetev, grâce à qui la famille emigrante se fit très vite naturaliser à Moscou ; cet exemple d'acculturation anticipée par rapport aux autres membres de la colonie serait peut-être une réaction à l'expérience vécue par les Delesalle sur la Volga et que le reste de la colonie n'a pas connue.

38. Outre ces quelques familles qu'on trouve encore en 1793 à Moscou, trois ou quatre colons se dirigèrent plus tard à Saint-Pétersbourg, pour devenir domestique, fabricant d'étoffe, comptable dans une banque. Cf. Sankt-Peterburgskie vědomosti, 45-46, 1793.

292 VLADISLAV RŽEUCKU

ANNEXE

Listes des Français recrutés par Meunier de Précourt, de Boffet de

Hauterive (1764 et 1765) J

Autrin, Anjou, 27 ans, distillateur en brandevin et liqueurs.

Bague Jean, Comté, 30 ans, laboureur, vigneron et connaisseur en chevaux.

Batistes Léonard, des Pays de Liège, 16 ans, laboureur.

Bertrand Jérôme, Languedoc, 26 ans, fabricant et très habile ouvrier en chapeaux. Sa femme, Hanovre, 26 ans, couturière.

Boicou [?] N.. Orléans, fabricant de baromètres.

Boucher Jean, Languedoc, 21 ans, laboureur et vigneron.

Bougy Nicolas, Picardie, 28 ans, laboureur.

Brun N.. Comté , 26 ans, laboureur.

Liste des Français de la colonie Franzosen-Rossoschi (1767)

Баш Жан, Lyon, boucher.

Baret Jean, Лабор, infirmier. Батеру Жан Батист. Arras,

cuisinier. [C'estprobablement à lui que dorme asileen 1764 fe chargé d'affaires français en Russie Bér anger].

Beaucaire [-oeur ?1 Joseph, Банн [?], infirmier.

Benoit Antoine, Orléans, fabricant de bas.

Boucher Jean, Nîmes, laboureur.

Bougie Nicolas. Villers-Cotterêt, «cehovoj »

Бропгре Фердинанд, Maubeuge Nord, fils de copiste.

Liste des colons français venus à Moscou de la région de la Volga (1777)3

Bagne Jeaa sa femme et un enfant.

Bertrand Jérôme et sa femme.

Boucher Jean*, saferrane et trois enfants.

Brauné, sa femmeetsix enfants. Brochen Ferdinand, sa femme et

deux enfants.

1. Source : RGADA, 283. 1,17 (1764-1777). f. 50-50 v. ; et 283, 1. 59 (1765). f. 5. 2. Source : Archives de l'Académie des sciences de Russie (section de Saint-Pétersbourg), 896, I, 477,

f. 493-499. 3. Source : Archives Nationales de France, Affaires étrangères. B-I-480, f. 218. Pour faciliter la lecture, les noms ont été classés, dans la mesure du possible, par ordre alphabétique et l'o

rthographe a été modernisée. *Dans la colonne de gauche, l'astérisque placé après les noms désigne les membres du groupe de Delesalle

(liste de 1765). Dans la colonne de droite, l'astérisque désigne les déserteurs.

LES FRANÇAIS DE LA VOLGA 293

Bruneau Jean. Périgord, 28 ans, laboureur et vigneron.

Capitaine. Bassigny, 23 ans, laboureur, vigneron et faïencier.

Cavane Mathieu. Languedoc , 28 ans. laboureur.

Certellet Casimir. Champagne. 45 ans. agriculteur, cultivateur pour les défrichements. Sa femme, Paris, 37 ans, couturière pour femmes. Sa fille. Brie, 18 ans, travaille de même.

Cuissac Jacques. Languedoc, 27 ans, laboureur. [C'est à lui que donne asile en 1765 l'envoyé français De Bausset].

De Boffe. directeur [de la colonie Franzosen-Rossoschi], Picardie. 30 ans, ingénieur géographe. Son épouse, Touraine, 23 ans.

Delesalle Philippe Auguste*, sa femme et sa famille composée de cinq garçons et six filles, Béthune et Arras, Nord, bourgeois-rentier. Engagé, avec sa fille Albertině, en 1772 à l'Académie des Beaux- Arts à Saint-Pétersbourg.

Doucet. Normandie. 19 ans, barbier perruquier.

Dubois François, St. Germain. 40 ans, habile ouvrier et fabricant de chapeaux.

Fouchet André. Paris. 27 ans, laboureur. Sa femme, Liège, 24 ans, ouvrière en linge.

Bruneau Jean, Батове, «густи некой нации»

Capitaine Antoine. Шомуабайни [?], laboureur.

Сартеле Казимир, fôris, cordonnier.

Charpentier Jean, Paris, tourneur.

Ден Этьенн, Tournay. laboureur.

Dubois François, Rj ri s, chapelier.

Dupied Charles. Foix, laboureur.

'ЭкерЛуи.ЬеярЕга. laboureur. Фет Жозеф, Valenciennes,

tourneur. Ferrant Jeaa провинция Базанье.

laboureur. Foucher André. Paris, fabric art de

tabac.

France Joseph. Liège, couturier. Ciautier André. Sairt-Ouen.«io

клашнтшв».

Bru паи Jean*, sa femme et cinq enfant;.

Capitaine Antoine, sa femmeet trois enfant!.

Cercles Casimir, marié, un enfant.

Charpentier*, sa femme et trois en fan к .

Daine Etienne, sa femme et de их enfant!.

de Во f, marié, un enfant.

Delsal avec sa femme et onze enfant! dont plusieurs sont mariés.

Du Bois François et sa femme.

Du Vivier Charts*, sa femmeet deux entants.

Ferrand Jean* et sa femme.

Fouchet André*, safemmeet quelques enfants.

Goutier Andréet sa femme.

294 VLADISLAV RŽEUCKU

Gene Pierre, Paris, 21 ans, laboureur. Sa femme. Brandebourg, 33 ans, couturière.

Genin Charles, Lorraine, 25 ans, vigneron.

Girardon.... [?], Paris. 26 ans, laboureur. Sa femme. Hollande, 26 ans, blanchisseuse.

Govéa Jean-Baptiste*, originaire de Turin, habitant à Liège.

Graff Antoine*. Grené Claude* et sa femme,

Маргарита Патин, Brie. Engagés à l'Académie des Beaux-Arts à Saint-Pétersbourg jusqu'en 1772.

Hubert Louis*. Arpajon .

La Coste Gaspard Bonaventure*. Lyon, chapelier.

Lavie Alsaubert [?]. Suisse, 38 ans, charpentier. Sa femme, Suisse, 26 ans. ouvrière en linge.

Le Jeune Jacques, Beauce. 22 ans, laboureur.

Jeune Pierre. Paris, marchand.

Giraud Jean Baptiste, Poligny Jura, laboureur.

ГравоЖан.

Жуен Оген , Ch âteau- Gon tier, vigneron.

Ину Клщ.ШамбшнГЛ laboureur.

Leblanc Bonaventurc, Alençon, menuisier.

Leblanc Joseph.

Lebran François, Vesoul. couturier. Lefevre Jean-Bapéste, «иесарец». Legagnier Nicolas, Баквил.

ma rcha nd , ré for mé. Legrand Alexandre, Arras, fil.s de

secrétaire. Lejeune Jacques. Бел ем, menuisier.

Genre et sa femme.

Genin Charle s et sa femme.

Gibot Jacques et sa femme. Girardau François [Cestà luiqu' en

1 764 donne asile au chargé d'affaires français en Russie, Béranger].

Girault. sa femme et un enfant.

Govéa.

Grené et sa femme.

Hautiss Julien*, sa femme et trois en fans.

Hubert. Hugner Louis*, sa femmeetun

enfant

Henot Chude*. sa femmeetun enfant

La Coste [à Moscou depuis 1766].

Le Blanc Joseph, sa femme et deux enfants.

Le Febvre et sa femme. Gagneux*.

Le Jeune Jacques* et sa femme.

LES FRANÇAIS DE LA VOLGA 295

Le Maire Joseph Bruno Ignace [proche parent des Delesalle]*, sa femme et sa famille composée de 2 garçons et 3 filles.

Ix Rouge Robert, Picardie, 24 ans, laboureur et cordonnier.

L'Estrade fils. Orléans, 18 ans, laboureur.

L'Estrade père. Orléans, 56 ans, architecte et connaissant la culture des terres.

Lorencin Paul Antoine* et Antoine François*, Lons-le-Saulnier, négociants en Touraine.

Malliez Jean. Luxembourg. 30 ans, laboureur. Sa femme. Sarre, 26 ans. brodeuse, couturière et blanchisseuse.

Marchand François. Lyonnais, 32 ans, boucher. Sa femme, Liège, 23 ans. couturière.

Mavel Gabriel*. Mestre Pierre de. Quercy, 24 ans,

vigneron. Meudek Jean*. Bretagne. Sa femme,

Шарлотта фон Горен. Meulle Louis. Strasbourg, 21 ans,

laboureur. Meusel Jean*.

Oudoi Jean B.te, Comté, 36 ans, laboureur.

Philippe. Franche-Comté. 25 ans, laboureur et vigneron.

Plassan Louis Martin*, officier. Bordeaux.

Peraudin Lazare*. Autun.

Лемер Бруньо. Béthune. infirmier.

Lemaire Pierre. Paris, gouverneur. Lerouget Robert, Конем,

cordonnier. Лестра Себастьян, Orléans,

laboureur.

Мал ге Жан. Luxembourg, lab ou ieur.

Marchand François

Me дек Жан Дерне, cuisinier.

МеллерЛуи (Danois)

Михаль Ангуан, Бафор. soldat. Mounier François. Arras, hboureur. Удо Жан Батист, Besançon,

laboureur. Pagnon Alexis, Picardie,

« cehovoj » Paner Antoine, PolignyJura.

cordonnier Пе рьян Клод. Lyon, tisserand en

soie. Philippe Joseph.

Плеса Луи. Bordeaux, gentilhomme.

Lestrade. marié . un enfant.

Lorencia deux frères, officiers du Régiment de la Couronne [recherchés par la Chancellerie de tu telle àMosocu).

Meudre [?].

Mu nier et sa femme. Houdot Je an* et s a femme.

Pagnon Alexis*, sa femme et un enfant

Panier Antoine*, sa femme et deux en fan к .

Perian Claude, sa femme et un enfant

Plassan de. ofrïcierqui estrepassé en France.

Préaudix [7|.

296 VLADISLAV RŽEUCKD

Précourt Meunier de, directeur. Brie, 40 ans, officier breveté, aide major au corps royal des arquebusiers de France. Son épouse, Bretagne, 29 ans. Sa fille, Paris, 9 ans, sait lire, cuire, broder et travailler en .... [?]

Prud'hon Pierre, Bourgogne, 37 ans, agriculteur. Sa femme. Hanovre, 28 ans, couturière.

Repay Emmanuel*, Mâcon.

Ricard Pierre, Avignon, 26 ans, cordonnier. Sa femme*. Brandebourg, 17 ans, couturière.

Ricoux François, Normandie, 24 ans, tailleur d'habits et connaissant l'agriculture.

Robin Pierre, Berry, 23 ans, laboureur.

Rossignol Jacob, Beauce, 24 ans, vigneron.

Roustes [? ) Hubert, Liège. 18 ans, maçon, marchand de boeufs et laboureur.

Saucier. Franche-Comté, 27 ans, cordonnier tanneur.

Terre... [?] Bap.te du. Flandre. 26 ans, agriculteur et très connaisseur en chevaux.

Vignr [?] Pierre de, Bourgogne, 23 ans, chapelier.

Prudhon Pierre, BeauneCôted'Or, marchand.

Рамбе Руфос, Liège, soldat. Ренуар Франсуа. РеонЖшеф, Bagnoles, laboureur.

Ribot Jean, Poitiers, boucher. УкарПьер [parentde IcardJ.-B. ?],

Avignon, cordonnier.

Pofie Этьенн. Bourges, laboureur.

Rossignol, Chartres, laboureur.

Tardif Nicolas, Paris, «cehovoj »

Icard Jean Baptiste* et sa femme.

Ricoux, safemmeettroisenfants.

Robin Etienne* etsa femme.

Rossignol, sa femme et deux enfants.

TardifNicolas.