AUQUIER C., 2013. Transformations agraires par le prisme de la mondialisation. Le cas d'Olmos, une...

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ISTOM Ecole Supérieure d’Agro -Développement International 32, boulevard du Port F. - 95094 - Cergy-Pontoise Cedex Tél. : 01 30 75 62 60 Télécopie : 01 30 75 62 61 [email protected] Mémoire de fin d’études Célia AUQUIER Promotion 99 Stage effectué à Olmos, Pérou du 11/03/13 au 25/09/13 au sein de : UMR Prodig, programme Périmarge soutenu par l’ANR Maître de stage : MESCLIER Evelyne, PRODIG IRD Tuteur pédagogique : VAILLANT Michel Mémoire de fin d’études soutenu le 13/11/2013 Transformations agraires par le prisme de la mondialisation. Le cas d'Olmos, une oasis dans le nord du Pérou

Transcript of AUQUIER C., 2013. Transformations agraires par le prisme de la mondialisation. Le cas d'Olmos, une...

ISTOM Ecole Supérieure d’Agro-Développement International

32, boulevard du Port F. - 95094 - Cergy-Pontoise Cedex

Tél. : 01 30 75 62 60 Télécopie : 01 30 75 62 61 [email protected]

Mémoire de fin d’études

Célia AUQUIER

Promotion 99 Stage effectué à Olmos, Pérou

du 11/03/13 au 25/09/13 au sein de : UMR Prodig, programme Périmarge

soutenu par l’ANR Maître de stage : MESCLIER Evelyne, PRODIG IRD

Tuteur pédagogique : VAILLANT Michel

Mémoire de fin d’études soutenu le 13/11/2013

Transformations agraires

par le prisme de la mondialisation.

Le cas d'Olmos, une oasis dans le nord du Pérou

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Résumé Olmos est une localité située sur le piémont littoral aride des Andes dans le nord du Pérou, au carrefour de l’ancienne route panaméricaine et de l’axe qui permet de rejoindre la

côte depuis la forêt amazonienne. Malgré la moindre disponibilité en eau que dans les oasis voisins, une petite agriculture s’y est développée le long des cours d’eau intermittents, et des éleveurs utilisent les interfluves, couverts de forêt sèche, pour l’alimentat ion de troupeaux

dont ils adaptent la taille aux variations climatiques. A partir du milieu des années 1970, Olmos, comme l’ensemble des oasis de la région, est entrée dans de nouvelles dynamiques

liées aux marchés mondiaux. Ces dynamiques s'intensifièrent avec le processus de libéralisation économique lancé par le gouvernement de A. Fujimori en 1990. Dans ce contexte actuel d'intégration d'Olmos au commerce international, un processus de

différentiation de l'agriculture est à l'œuvre dont deux formes extrêmes coexistent dans les vallées étudiées : une petite agriculture caractérisée par des systèmes diversifiés de

polyculture-élevage et fortement dépendante des précipitations annuelles et de la présence de puits, et une agriculture capitalistique, en cours d’installation, avec des systèmes de production agricole spécialisés, hautement performants, chimisés et basée sur une irrigation

continue à partir des ressources hydriques du sous-sol. Par ailleurs, un projet de vaste envergure en cours de réalisation vise à apporter de l'eau provenant du versant oriental des

Andes dans interfluve situé à proximité d'Olmos. Bien qu'encore en construction, ce projet suscite déjà des transformations qui affectent également les vallées. Cette présente étude se propose d'identifier et d'analyser les transformations agraires qui apparurent au début des

années 2000 et leurs conséquences sur les systèmes de production existants. Pour ce faire, les systèmes de productions ainsi que les flux de produits agricoles ayant été peu influencés par

ces transformations sont étudiés dans un premier temps. Les systèmes de production et les flux apparus pendant les années 2000 sont ensuite décrits et analysés. Les influences potentiels du projet d'irrigation complètent cette étude.

Mots-clefs : mondialisation, eau, Pérou, transformations agraires, agro- industrie, flux, filière

fruitière, projet d'irrigation, espace périphérique.

Sumary

Olmos is a locality situated on the arid coastal Piedmont of the Andes in North of Peru, at the crossroads of the ancient Pan-American's road and of the way that connect Pacific

coast and the Amazonian forest. In spite of the lower water availability that in neighbors oasis, a little form of agriculture has been developed along the irregular rivers. Shepherds use the dry forest as pastureland and the flocks' sizes depend on the climate that encourages or not

the vegetation's regrowth. From the mid of seventies, Olmos, as all oasis of the region, started to be part of new dynamics related to world markets. These dynamics heightened with the

economic liberalization process initiated by the government of A. Fujimori in 1990. In that contemporary context of Olmos' integration at the world trade, a process of agricultural differentiation is at work that distinguish two extreme and coexisting forms in the studied

valleys : on one hand, a little agriculture characterized by diversified systems of mixed farming and highly dependent on yearly precipitations and wells and on the other, a

capitalistic ongoing agriculture, based on specialized and efficient production systems, using continuous irrigation from subsoil hydric resources. Furthermore, a large-bodied project in progress aim to bring water from the East slope's Andes to a arid region closed by Olmos.

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Although the project is still under construction, it is already provoking agrarian

transformations in the studied valleys as well. This study intends to identify and to analyze those agrarian transformations happened at the beginning of the 2000s and theirs

consequences in the existing production systems. Thus, production systems and flows of farming products that did not much influenced by the transformations have been studied in a first phase. Then, production systems and flows appeared during the 2000s have been

described. The potential influences of the irrigation project complete the study.

Key words : globalization, water, Peru, agrarian transformations, company, food-producing agriculture, flow, fruit industry, irrigation project.

Resumen Olmos es una localidad ubicada en la llanura litoral y árida de los Andes al Norte del

Perú, al cruce de la antigua pista Panamericana con la vía que llega a la costa pacífica desde la selva amazónica. A pesar de una disponibilidad en agua menor que en los oasis vecinos, una

pequeña agricultura se desarrollo a lo largo de los ríos intermitentes. Los ganaderos usan los interfluvios, cubiertos de bosque seco, para alimentar los rebaños. Las lluvias anuales condicionan

las cuantidades de pastos disponibles cuyo depende el ganado para sobrevivir. A partir de los años

1970 e igual que en los otros oasis de la región, Olmos conoció nuevas dinámicas relacionadas a los mercados mundiales. Estas dinámicas se intensificaron con el proceso de liberalización

económica iniciado por el gobierno A. Fujimori en 1990.

En este contexto actual de integración de Olmos a l comercio internacional, un proceso de diferenciación agrícola es pendiente caracterizado por dos formas extremas que coexisten en los

valles estudiados : por una parte, una pequeña agricultura diversificada y fundada en policultivos y ganadería, dependiente de las precipitaciones anuales y de la presencia de pozos y por otra, una

agricultura capitalista, eficiente, usando productos químicos y basada en el riego permanente

explotando los recursos hídricos del sub-suelo. Por otro lado, un proyecto regional en vía de construcción tiene el objetivo de llevar agua de la

Cordillera de los Andes en una zona desértica cerca de Olmos. Este proyecto ya suscita

transformaciones que afectan también los valles irrigados. Este presente estudio propone de identificar y analizar las transformaciones agrarias que ocurrieron al principio de los años 2000 y

sus consecuencias en los sistemas de producción existentes. Así, los sistemas de producción y los

flujos de productos agrícolas que fueron poco influenciados por estas transformaciones son estudiados en primer lugar. Luego, los sistemas de producción y los flujos aparecidos durante los

años 2000 son descritos y analizados. Las influencias potencia les del proyecto de irrigación completan este estudio.

Palabras claves: mundialización, agua, Perú, transformaciones agrarias, agro-industria, flujos, cadena frutícola, proyecto de irrigación, espacio periférico.

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Table des matières

Introduction ................................................................................................... 9

Partie 1. Un dynamisme essentiellement national ........................................... 12

I. Cadre conceptuel et méthodologie ................................................................................ 12

II. Des ressources inégalement réparties ....................................................................... 14

a) De 1950 à 2000, vers une maîtrise de plus en plus efficiente de l'eau ..................... 14

b) L'accès au foncier, entre propriété et possession...................................................... 17

c) Une ressource hydrique convoitée............................................................................ 21

d) Un paysage agraire dominé par des cultures fruitières et vivrières .......................... 24

II. Des systèmes de production peu tournés vers l'international ................................... 26

a) Description des systèmes de culture et d'élevage ..................................................... 26

b) Des systèmes inscrits à l'échelle locale : faire face à la sécheresse .......................... 36

c) Des systèmes inscrits à l'échelle nationale : la contrainte du marché ....................... 43

III. Des flux qui se tournent lentement vers l'extérieur .................................................. 51

a) Entre consommation locale et réponse à la demande du marché national ............... 52

b) Les premières expériences d'exportation.................................................................. 53

Partie 2. La transformation des campagnes d'Olmos par les influences

mondialisées ................................................................................................ 57

I. L'évolution favorable du contexte agraire ..................................................................... 57

a) Ouverture du marché foncier et exploitation des ressources .................................... 57

II. Le développement de l'agro-exportation .................................................................. 59

a) De nouveaux systèmes de culture hautement performants ....................................... 59

a) Des systèmes inscrits à l'échelle mondiale ............................................................... 61

b) Une production agricole orientée vers les marchés mondiaux ................................. 68

c) Des travailleurs très demandés ................................................................................. 68

III. Transformations des structures existantes ................................................................ 70

a) De nouvelles opportunités de salariat ....................................................................... 70

b) Une terre qui prend de la valeur ............................................................................... 73

c) Des services mieux assurés ...................................................................................... 75

Partie 3. Un processus qui pourraient s'intensifier demain .............................. 77

IV. Le PEOT, un "projet social" ..................................................................................... 77

a) La mise en place des associations de producteurs .................................................... 77

b) De potentielles sources de conflits ........................................................................... 79

c) Des opportunités risquées ......................................................................................... 80

5

d) Un impact relatif sur les moyens et grands producteurs........................................... 83

V. Une réorganisation des flux ...................................................................................... 84

a) Les entrepreneurs face aux différents scenarii possibles .......................................... 84

b) Modification des systèmes de production et migrations de travail .......................... 85

c) Centres et périphéries ............................................................................................... 88

Conclusion ................................................................................................... 90

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Table des illustrations

Tableau 1: Les différentes formes d'accès au foncier en 1990 à Olmos .................................. 18 Tableau 2 : Les formes d'accès au foncier selon la taille des parcelles possédées à Olmos en 1990 .......................................................................................................................................... 18

Tableau 3 : Mode de transmission du foncier à Olmos ............................................................ 20 Tableau 4 : Dema

Carte 1 : Les vallées irriguées d'Olmos (zone d'étude) ............................................................ 24 ndes d'irrigation selon la culture............................................................................................... 23 Tableau 5 : Matrice des rotations vivrières selon la trésorerie et le régime pluviométrique

annuel ....................................................................................................................................... 29 Tableau 6 : Performances économiques des systèmes de culture ............................................ 34

Tableau 7 : Performances économiques du type Eleveur salarié ............................................. 38 Tableau 8 : Performances économiques du type Eleveur pluriactif ......................................... 40 Tableau 9 : Performances économiques du système Producteur vivrier propriétaire .............. 42

Tableau 10 : Performances économiques moyennes du Petit planteur propriétaire................. 45 Tableau 11 : Performanc

Graphique 1 : Calendrier de travail (HJ/ha) d'une plantation de citronniers associée au fruit de la passion en phase d'installation .............................................................................................. 31 Graphique 2 : Succession culturale du fruit de la passion ........................................................ 32

Graphique 3 : Calendrier de culture d'une plantation associée à des cultures saisonnières ..... 34 Graphique 4 : Structuration du coût du maïs à Olmos ............................................................. 53 Graphique 5 : Schéma filière du fruit de la passion et du citron .............................................. 54

Graphique 6 :Performances économiques des systèmes de production ................................... 67

Figure 1 : Diagramme ombrothermique Olmos 2009-2012 ..................................................... 21 Figure 2 : Schéma d’une jeune plantation associant fruit de la passion et citronnier .............. 33 es économiques du système Planteur locataire......................................................................... 47

Tableau 12 : Calendrier de travail et performances économiques du Planteur moyen ............ 48 Tableau 13 : Performances économiques du Gestionnaire à distance ...................................... 49

Tableau 14 : Performances économiques des systèmes de production. (RAF par actif en fonction de la surface cultivée par actif) .................................................................................. 50 Tableau 15: Répartission des consommations intermédiaires de la culture de piment ............ 60

Tableau 16 : Performances économiques des systèmes de culture de piment et de raisin ....... 61 Tableau 17 : Performances économiques du type Entrepreneur agricole ................................ 63

Tableau 18 : Différents RAF selon les scenarii proposés......................................................... 72

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Liste des abréviations et sigles

ANA : Agencia Nacional del Agua AP : Année pluvieuse

APOQ : Asociación de Pequeños Productores Orgánicos de Querecotillo AS : Année sèche CEPES : Centro Peruano de Estudios Sociales

cf : confère CICAP : Centro de Investigación, Capacitación, Asesoría y Promoción

CIF : Cost, Insurance and Freight CNRTL : Centre National des Ressources Textuelles et Lexicales COFOPRI : Organisme de formalisation de la propriété informelle

Comunero : membre de la Communauté Paysanne EPA : Environnemental Protection Agency

et al. = et collaborateurs GPS : Global Positionning System ha : hectare

HJ : Homme-jour INADE : Instituto Nacional de Desarrollo

INEI : Instituto Nacional de Estadística e Informática K : Capital JU : Junta de Usuarios

kg : kilogramme PEOT : Proyecto Especial Olmos-Tinajones

PETT : Proyecto Especial Titulación de Tierras y catastro rural RAF : Revenu par Actif Familial S.A. : Société Anonyme

s : soles (monnaie péruvienne, 1 euro = 3,80 soles) SENAMHI : Servicio Nacional de Metrología e Hidrología del Perú

SENASA : Servicio Nacional de Sanidad Agraria S.R.L. : Société à Responsabilité Limitée T : Tonne

UMR : Unité Mixte de Recherche VAN : Valeur Ajoutée Nette

VAB : Valeur Ajoutée Brute % : Pourcent $ : dollar

€ : euros

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Remerciements

Au-delà des considérations politiques menant à la confrontation du modèle néolibéral agro-exportateur et du modèle de souveraineté alimentaire, au-delà des convictions qui,

malgré l’objectif d’impartialité du chercheur, sont sous-jacentes à toute production intellectuelle, au-delà de la volonté d’engagement politique générée par l’observation

d’inégalités frappantes, au-delà de tous ces "obstacles" éthiques qui rendent finalement la recherche si fascinante, ce stage a d’abord été l’occasion de rencontrer une multitude de personnes d'une diversité incroyable, toutes riches de savoirs et d’expérience, toutes enfin,

enthousiasmées par l’échange et la discussion. Les personnes enquêtées, quel que soit le monde auquel elles appartiennent, ont été la source d’inspiration de cette étude et sa raison

d’être. Ce sont elles qui en ont fait sa matière, sa consistance et ce sont elles qu’il me semble légitime de remercier en premier lieu : producteurs, éleveurs, entrepreneurs, ingénieurs, techniciens, commerçants, intermédiaires, transporteurs, responsables politiques,…c’est

d’abord à vous que je dédie les lignes qui vont suivre.

Ces remerciements vont ensuite à la famille péruvienne qui m’a accueillie à bras ouverts et qui m’a laissé sa porte entrebâillée que je n’hésite plus à pousser aujourd’hui : Choya et Guilo, Elias et Vicky, Sharon, Daniel et tous les enfants, cousins et cousines qui m’ont

accompagné pendant cette demi-année. Mon étude aurait été bien différente sans l’aide précieuse de Yolmer Montenegro et de sa

famille, de Lucho et de tous les autres ingénieurs (Jorge, Arturo, Orlando) qui se sont escrimés à me donner ces sacrés nombres d’homme-jour indispensables au diagnostic agraire,

de Marco, évidemment, qui me fit découvrir el campo à dos de moto et qui m’appris à la conduire dans le sable de la pampa.

Merci à mes amis qui m'ont permis d'entrevoir une infime partie de ce si beau pays : Arduni, Jimy, Arkano, Franco, Oliver, Reder, Julio, Paula, Daniel et leur fille Carla, Cesar Cieza, Ivan

et son frère, Willie et j'en oublie forcément… Merci aux entrepreneurs qui, contrairement à mes doutes, furent tout aussi accueillants que les

autres et plus particulièrement à Javier De La Pena, à Sebastian Oneto, à Freddy et à Hover A. Oribe. Allant encore une fois contre mes aprioris, je tiens à remercier Paco Goytizolo qui me

fit découvrir le travail de terrain du PEOT et Ruitor Odar Puse qui me donna accès à beaucoup d'informations.

Je n’ai évidemment pas assez de place pour remercier tous les agriculteurs que j’ai vu et revu, qui, toujours avec patience, ont répété ou éclairci bon nombre de choses et qui ne liront

probablement jamais ces pages : une pensée pour José, la famille Martinez, Sandoval, Joséfa, Segundo, Jesus et sa famille, William…

Cette expérience n'aurait jamais vu le jour sans Evelyne Mesclier, ma maître de stage, qui me permis de prendre part à l'aventure Périmarge et qui m'offrit de nombreuses opportunités post-

stage et qui me fit prendre goût à la recherche. Merci à Michel Vaillant pour son soutien lors des moments de confusion et d'égarement.

Et enfin, un grand merci à ma famille qui n'a jamais cessé d'être là.

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Introduction

Aujourd'hui, il n'est plus rare de lire dans les journaux péruviens "Tous les regards sont tournés vers Olmos1". Petit bourg de campagne, Olmos est devenu objet de débats ayant

trait à de multiples sujets de controverse (place de la petite agriculture, légitimité des grands projets d'irrigation, droits des Communautés Paysannes, crise écologique…). Située dans le Nord du Pérou, entre le désert côtier et les contreforts des Andes, la localité

d'Olmos est le théâtre de nombreuses transformations agraires. Au cœur de cette région désertique, l'assèchement saisonnier des fleuves et l'irrégularité des précipitations limitent

l'agriculture locale. Ainsi, jusqu'à la moitié du XIXème siècle, l'élevage extensif, l'exploitation du charbon végétal et l'agriculture vivrière intermittente le long des fleuves furent les principales sources de revenus de la population d'Olmos. A partir de 1950, les premières

cultures de rente (coton et citron) apparurent dans le paysage grâce à l'accès à l'eau du sous-sol facilité par l'arrivée des puits tubulaires. Jusqu'à la fin des années 1990, les vallées

irriguées furent à l'origine d'un dynamisme agricole basé sur les cultures vivrières et fruitières, vendues majoritairement sur les marchés régionaux et nationaux.

Au début des années 2000, de nouvelles influences vinrent transformer les campagnes d'Olmos, son organisation et ses réseaux. D'abord, l'ouverture du marché foncier permis

l'implantation d'entreprises agro-exportatrices et la production de nouvelles cultures très rémunératrices. En outre, avec les épisodes de sécheresse réguliers et durables causant la baisse des surfaces cultivées, le gouvernement décida de mettre en place un projet d'irrigation

de grande ampleur dont la réalisation avait été conçue dans les années 1920. Initié en 2012, ce projet a pour objectif de transformer les terres désertiques de la région en terres exploitables

par l'agro- industrie. Depuis environ une décennie, l'agriculture d'Olmos se modifie progressivement en faveur d'une agriculture chimisée, moto-mécanisée et orientée vers les marchés mondiaux. Cette

récente transformation de l'agriculture soulève de nombreuses questions, tant pour l'avenir de la petite agriculture dont les acteurs se tournent progressivement vers le salariat agricole et les

inégalités économiques entre acteurs agricoles qui en résultent, que pour l'insertion d'Olmos dans les réseaux nationaux et internationaux et sa place dans la mondialisation.

Illustrant les processus de mondialisation à l'œuvre, Olmos s'inscrit dans le programme de recherche Périmarge de l'UMR Prodig. Ce programme se propose d'étudier les relations

existantes entre les centres et les espaces périphériques à l'heure de l'augmentation de la circulation des biens matériels et immatériels, des personnes et des capitaux. Les origines de ce processus sont multiples : des premiers mouvements de population à la

découverte du nouveau monde en passant par l'émergence du commerce mondial, les théories quant à l'origine de la mondialisation diffèrent de plusieurs siècles et mettent en jeu des

sociétés distinctes. A l'instar de J. Lombard et al., (2006), dans l'ouvrage "Mondialisation côté Sud", l'initiation du processus de mondialisation considéré ici prend place avec l'effondrement du bloc Soviétique qui facilita "l’extension à l’ensemble de la planète des flux de

marchandises et de capitaux et l’implantation des firmes multinationales dans des pays qui leur avaient été jusqu’alors fermés" (J. Lombard et al., 2006). Paraphrasant ces auteurs, le

processus de mondialisation a d'abord concerné les échanges de biens matériels et immatériels "avant d’étendre la notion à tous les domaines de la vie des sociétés, les phénomènes culturels comme les mobilités des personnes".

1 "El proyecto Olmos ante los ojos del mundo" (Noticias del PEOT-18/02/2009, La Republica 3/11/2011)

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Périmarge revisite le modèle "Centre-périphérie" élaboré en 1981 par A. Reynaud qui considère le centre comme un lieu de concentration des pouvoirs de toutes formes.

Interdépendants, ces deux ensembles sont basés sur des relations inégales qui expliqueraient les inégalités spatiales et à plus large échelle, les inégalités de développement. A l'heure de la mondialisation, ce modèle doit être remis en question. N. Cattan dans le "Dictionnaire des

mondialisations" (2006) évoque ainsi que "l’imbrication croissante des situations de centralités et des positions périphériques rend aujourd’hui le concept centre-périphérie de

moins en moins opérationnel voire obsolescent ". L'objectif de Périmarge est donc d'élaborer un nouveau modèle prenant en compte la complexité des systèmes spatiaux intégrés à la mondialisation. L'enjeu de ce programme est de mieux comprendre comment la

mondialisation influence les espaces, "produits d'une longue accumulation de lieux dans la sédimentation et l'érosion de leurs histoires" (O.Dollfus, 1997), notamment en terme

d'inégalités socio-spatiales, à travers la reconfiguration des espaces périphériques. Pour mieux comprendre le rôle de la mondialisation dans la transformation des

espaces périphériques et de leurs relations aux centres, le programme Périmarge a sélectionné huit sites d'étude aux propriétés communes spécifiques à la notion d'espace périphérique : ces

territoires sont peu contrôlés par les Etats nationaux ; les sociétés locales qui les habitent présentent une certaine autonomie ; ces espaces ne se ressemblent pas (zone urbaine ou rurale africaine ou sud-américaine) ; enfin, ils ont connus des changements rapides en lien avec la

mondialisation. Ces territoires sont intégrés au système mondial (F. Braudel, 1967 ; I. Wallerstein, 1974) par des influences mondialisées, expressions de la mondialisation générant

de nouvelles dynamiques territoriales, formes d'appropriation et de gestion d'un territoire par un groupe organisé d'individus : grand projet, développement immobilier, lieu d'investissement, arrivée d'acteurs étrangers,… (Compte-rendu de l'atelier de lancement

Périmarge, mars 2013). Pour élaborer le nouveau modèle Centres-Périphéries, Périmarge reprend les éléments de flux

et relations énoncés par le modèle de Reynaud, les adapte au nouveau contexte de mondialisation et pose de nouvelles hypothèses. Ces éléments, repris, reformulés ou ajoutés, tirées du Séminaire de lancement du programme Périmarge, (L. Perrier Bruslé, M. Piraux et

E. Mesclier, Mars 2013) sont données en annexe 1. Elles permettent de mieux définir les concepts de centre, de marge, les relations qui les lient et le contexte spatio-temporel dans

lequel elles évoluent. La localité d'Olmos a été sélectionnée par Périmarge car sa structure, son organisation

et les récents changements qui l'affectent respectent les exigences soule vées par la problématique de recherche. Olmos est une localité aux multiples facettes. Elle correspond à

la fois au district2 de la Province de Lambayeque, à une Communauté paysanne, la Comunidad Campesina Santo Domingo de Olmos et à une ville, chef- lieu du district. En tant que Communauté Paysanne, Santo Domingo de Olmos est une institution propriétaire d'un

territoire : elle maîtrise de ce fait l'usage et la répartition des terres communales lui appartenant. La municipalité d'Olmos représente l'autorité institutionnelle de l'Etat et est

directement reliée au Gouvernement Régional de Lambayeque, la capitale de la Province. Le site d'étude d'Olmos respecte également le dernier critère qui impose la présence d'influences mondialisées. A Olmos, les expressions de la mondialisation sont doubles. Elle

s'exprime d'abord par l'arrivée des entreprises agro-exportatrices en 2000.

2 Plus petite subdivision politico-administrative du territo ire. Le territoire péruvien se divise en région (ou

département), province, et d istrict.

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Le processus d'intégration au système mondial se poursuit avec la réalisation d'un projet

d'irrigation régional à l'origine de nouvelles dynamiques territoriales. En effet, face aux fortes contraintes hydriques auxquelles fait face cette région, le gouvernement a finalement décidé

de mettre en œuvre le projet d'irrigation visant à modifier le cours du fleuve Huancabamba, situé sur le versant oriental de la Cordillère. A travers la construction d'un tunnel transandin et d'un canal, l'eau permettra de créer un périmètre irrigué de 38 000ha situé à l'Ouest de la ville

d'Olmos, en dehors des vallées irriguées. Le projet bénéficiera également à q uelques 5500ha situés au sein des vallées irriguées, le long du nouveau canal (cf annexe 2). L'ensemble des

terres irriguées par le nouveau projet, hors des vallées irriguées ou au sein de celles-ci, feront l'objet d'une exploitation agricole moderne, intensive en surface et dédiée à l'exportation selon la politique néolibérale du gouvernement, représenté par le PEOT (Proyecto Especial Olmos-

Tinajones), l'organisation étatique chargée de superviser le projet. Ce projet est issu d'un partenariat public-privé : le maître d'ouvrage est le PEOT et le maître d'œuvre est l'entreprise

brésilienne Odebrecht, chargée de construire les infrastructures hydrauliques (tunnel, canaux). Ainsi se pose l'hypothèse suivante : avec la mondialisation, les formes d'agriculture

existantes et les réseaux de flux de biens agricoles, de personnes et de capitaux se transforment. En effet, avant même que le projet d'irrigation ne soit achevé, les relations avec

l'extérieur de la ville d'Olmos, de sa population et de ses espaces agricoles sont en pleine évolution. L'enjeu est donc de comprendre comment "les processus de mondialisation s'internalisent dans les sociétés" (O. Dollfus, 1997) et plus précisément dans un espace

périphérique, en identifiant les transformations des structures agraires ayant eu lieu entre la période précédent l'apparition de l'agro- industrie (années 2000) et la période actuelle.

Nous tenterons ainsi d'apporter les éléments de réponses aux questions suivantes : En quoi les entreprises agricoles ont-elles transformé l'agriculture d'Olmos et son intégration

dans le monde ? De quelles échelles dépendent les différentes formes d'agriculture actuelles ? Dans quelle mesure le projet d'irrigation peut- il recomposer les systèmes de production qui

caractérisent les campagnes d'Olmos et les flux qui les accompagnent ? Pour comprendre les logiques agraires actuelles, il nous faudra d'abord décrire brièvement

l'histoire agricole d'Olmos et les conditions d'accès aux ressources naturelles, principales contraintes de l'agriculture d'oasis : le foncier et l'eau. Cette première partie développera alors

les différents systèmes de production antérieurs aux années 2000 et les flux agricoles qui y sont liés. La seconde partie, dédiée au début du nouveau millénaire jusqu'à nos jours, présentera les

changements contextuels auxquels ont fait face les agriculteurs d'Olmos. La description des nouveaux systèmes de productions, des flux ainsi que les transformations des structures

agraires existantes achèvera cette partie. Enfin, la troisième partie, dans une optique prospective, s'attèlera à analyser les premières conséquences du projet d'irrigation sur les producteurs, petits et grands. Cette partie

s'achèvera sur une première conclusion quant au modèle revisité par Périmarge.

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Partie 1. Un dynamisme essentiellement national

I. Cadre conceptuel et méthodologie Pour apprécier les transformations agricoles d'une localité rurale donnée, nous avons choisi d'utiliser le concept de "système agraire" qui permet selon Mazoyer et Roudart, (1997a,

p 46-47), "de se représenter les transformations incessantes de l'agriculture […] comme une succession de systèmes distincts, constituant autant d'étapes d'une série historique définie,

[…] d'appréhender dans ces grandes lignes la diversité géographique de l'agriculture à une époque donnée […]". Dufumier (2007), ajoute que "l'idée [du système agraire] est d'analyser conjointement les transformations des techniques agricoles et les modifications qui

interviennent dans les rapports sociaux, non pas seulement à l'échelle locale mais aussi au niveau national et planétaire". C'est par l'étude des relations et interactions entre l'ensemble

des éléments constitutifs d'un système (agronomique, social, économiques, écologique, technique) et par l'identification des échelles spatiales et temporelles dans lesquelles évolue le système que l'on peut distinguer les transformations agraires à l'œuvre. S'inspirant de

l'agriculture comparée (H. Cochet, 2011), cette étude emploie l'approche systémique pour caractériser les systèmes de production composant le système agraire d'Olmos et pour

identifier les transformations agraires ayant lieu dans des contextes spatio-temporels en mouvement.

Le terme de transformation agraire implique un changement d'état d'un système stable considéré comme initial par rapport à un système qui a évolué ou qui est en voie d'évolution.

Bien que l'agriculture d'Olmos ait été en continuelle évolution au cours de son histoire, nous avons identifié une période au cours de laquelle les transformations, visibles dans le paysage agraire, ont modifié les systèmes de production de la région. Nous n'utilisons pas les termes

de "révolution" ou de "crise agricole" qui impliquent selon M. Mazoyer (1987) "un changement de qualité ou de nature du processus de production […] qui suppose des

changements préalables dans les rapports de travail et d'échanges, dans les institutions et les idées qui gouvernent ce processus […]". De par la durée relativement courte de l'étude, nous ne sommes pas en mesure d'affirmer si les transformations observées et décrites à Olmos font

partie ou non d'un processus de révolution agricole. Nous nous limitons donc au terme de transformation agraire pour cette présente étude.

En outre, dans le cadre du programme Périmarge, l'approche flux est éminemment importante puisque ce sont les flux qui déterminent la place de la zone d'étude dans la mondialisation et qui informent de l'évolution de ses relations avec l'extérieur. Le choix de l'époque charnière

dépend donc de l'évolution de ces flux. Le moment charnière identifié au moment duquel s'exprime le changement correspond donc à

l'entrée dans les années 2000 et illustre le passage d'un Olmos "nationalisé" à un Olmos "mondialisé". L'arrivée des entreprises et du projet ont donné lieu à d'importantes modifications du territoire des vallées irriguées.

Nous nous intéresserons donc aux transformations de quelques éléments constitutifs

du système agraire : le paysage et l'histoire agraire, les systèmes de production, les flux de produits agricoles et les migrations de travail. Un système agraire en mutation est nécessairement constitué d'éléments touchés par la transformation et d'éléments indépendants

qui n'y sont pas attachés (ou à de moindres degrés).

13

Il nous faudra donc également identifier les systèmes et flux n'ayant pas ou peu été influencés

par les entreprises et le projet, et expliquer pourquoi certains apparaissent moins influencés que d’autres.

La méthodologie utilisée comprend plusieurs étapes (qui se succèdent tout en se complétant).

- l'étude des systèmes de production existant avant 2000 et ayant peu ou pas évolués et des systèmes étant apparus ou ayant évolué après les années 2000,

- l'étude des influences du projet d'irrigation sur ces systèmes. - l'étude des principales filières agricoles de la zone.

Pour ce faire, une analyse paysage (transects), une analyse de l'histoire agraire (entretiens historiques) et l'étude des systèmes de culture, d'élevage et de production ont été réalisées.

Bien qu'une brève description des années antérieures à 1950 figure dans l'étude historique, nous avons considéré les années 1950 comme le point de départ de l'étude car c'est à cette époque qu'apparaissent les première cultures de rentes à Olmos. Pour l'étude des systèmes de

culture, d'élevage et de production, une démarche itérative fut préférée permettant d'effectuer des allers-retours entre problématique, données récoltées, interprétation et résultat.

L'interprétation permit de redéfinir les hypothèses de recherche et de les adapter à la nouvelle compréhension du milieu étudié. Une centaine d'enquêtes exploratoires (entretiens semi-directifs) permit d'établir une pré-

typologie des systèmes de production mis en œuvre par différentes catégories d’exploitants en fonction de l'accès aux différents facteurs de production (terre, eau, travail, capital).

Cette première étape d'enquêtes fut réalisée de manière à couvrir l'ensemble de la zone d'étude ainsi que des systèmes de production présents dans la région selon le principe de saturation (limite du nombre d'entretien fixé selon la redondance des entretiens et l'absence de nouvelles

données). Ces premières données récoltées furent surtout qualitatives et n'entrèrent pas dans les détails des systèmes de culture ou d'élevage. Ces entrevues permirent ensuite de

sélectionner un échantillon illustrant la variabilité des systèmes de production agricole. Avec cet échantillon constitué de 35 cas, une typologie a été réalisée de manière à identifier les stratégies adoptées par les diverses catégories d’exploitants agricoles. Pour ces 35 cas, les

données récoltées furent tant qualitatives que quantitatives et les entretiens de plus en plus directifs à mesure que la compréhension du système s'affinait.

La totalité des entretiens fut géo-référencée (GPS Garmin 60) de manière à confectionner les cartes présentées dans l'étude ou en annexe.

Pour l'étude des influences dues aux projet d'irrigation, des entretiens auprès des producteurs concernés et non-concernés par le projet ont été réalisés (même producteurs que pour le

diagnostic agraire). Des entretiens auprès de personnes ressources et des institutions ont également été menés (Municipalité, Communauté paysanne, Comité d’irrigation (Junta de Usuarios Olmos-Cascajal), PEOT Olmos et Chiclayo, Association CICAP, CEPES,

commerçants d'Olmos, SENASA), complétés par les informations tirées des médias et de la bibliographie.

Les études filières ont été réalisées dans l'objectif d'identifier les transformations ayant eu lieu à Olmos. Nous nous sommes concentrés sur les principales filières à l'origine du dynamisme économique d'Olmos, c'est-à-dire sur les filières du citron, du fruit de la passion et du maïs.

Elles se concentrent sur les acteurs et flux présents essentiellement à Olmos (elles ne vont pas jusqu'au lieu de commercialisation finale ou de consommation des produits par exemple).

Il était prévu que ces études restent sommaires, par faute de temps. Toutefois, il est certain que des études complémentaires dans le cadre de Périmarge viendront compléter ces prémices

14

d'étude filière. La méthodologie utilisée est constituée d'entretiens directifs quantitatifs auprès

des acteurs des filières (producteurs, intermédiaires, transporteurs, grossistes, détaillants). Les données récoltées permirent d'identifier et de quantifier les flux de produits agricoles. Cela

représente environ 50 entretiens. Les prix (au niveau des producteurs, grossistes, intermédiaires et détaillants) furent relevés afin de cerner leurs évolutions moyennes au cours de l'année.

Les flux humains furent évalués par des entretiens auprès des entrepreneurs (employeurs massifs de main d'œuvre) et producteurs-éleveurs (employeurs de main d'œuvre, migrants) et

des entreprises de transport de passagers. Cette partie de l'étude représente environ 25 entretiens. Le marché d'Olmos ainsi que les pépiniéristes furent également l'objet d'enquêtes.

Le principe de triangulation des données a été utilisé pour chacune des études de manière à vérifier l'ensemble des informations rapportées par ce mémoire (croisement des informations

entre différents points du vue d'enquêtés et avec la bibliographie). La totalité des résultats ne figurera pas dans ce présent mémoire mais sera utilisé par le programme de recherche Périmarge afin de compléter les bases de données exista ntes et de

caractériser du mieux possible les flux matériels, humains et institutionnels qui traversent Olmos.

Cette étude permet en outre de produire une "photographie agraire" des vallées irriguées d'Olmos avant la mise en fonctionnement des infrastruc tures d'irrigation.

Au terme du programme Périmarge, des études complémentaires et portant également sur les activités non agricoles (commerce, services…) et les flux qu’elles génèrent permettront de

comparer la situation actuelle avec la situation post-projet. Ces études complétées par l'ensemble du matériel scientifique issu du programme (études des flux de production, d'information, de personnes et des flux liés aux projets sur les huit sites d'étude) permettront

de fournir les ensembles de données à l'origine de l'élaboration d'un modèle de Reynaud revisité.

II. Des ressources inégalement réparties

a) De 1950 à 2000, vers une maîtrise de plus en plus efficiente de l'eau

L'élevage face au manque d'eau

D'après E. Zegarra et al. (2006), jusqu'aux débuts des années 1950, l’agriculture d’Olmos reposait essentiellement sur l'élevage. Les troupeaux, caprins et bovins, se

partageaient les pâturages, de grands espaces boisés et ouverts. A l'époque, la taille des troupeaux variait d’une cinquantaine à plusieurs centaines voire milliers de têtes. Les nombreux témoignages d'éleveurs de la région (recueillis par cette étude) rapportent que la

taille des cheptels était largement dépendante du régime pluviométrique qui garantissait la présence de pâturages et la survie d'un maximum d'animaux. Les années clémentes

(précipitations supérieures à 500mm/an d'après la confrontation des témoignages et le graphique 1 des précipitations) permettent la reconstitution de la végétation et assurent une ou deux années de pâturage pour le bétail.

Comme le montre l'illustration (annexe 3), les parcelles, cultivées uniquement en année pluvieuse, étaient peu nombreuses, l'élevage extensif étant l'activité principale des comuneros

(L. Del Castillo, 2012). Selon les témoignages de personnes ayant vécu à cette époque, les lopins de cultures vivrières n'excédaient pas deux hectares et étaient cultivés (maïs et haricot

15

associés ou cultivés successivement) pour la consommation et la vente sur les marchés locaux

au sein des hameaux ou à Olmos. Toujours selon leurs témoignages, les puits, manuels et de faible profondeur étaient destinés uniquement à la consommation humaine et animale. La

taille des troupeaux dépendait de la capacité de l'éleveur à s'affranchir de la contrainte hydrique par un accès privilégié à l'eau (puits profond, zone de remontée de nappes phréatiques) ou par l'achat de fourrages complémentaires (capital).

Très peu d'agriculteurs interrogés témoignent de l'utilisation des fumures animales sur les parcelles à cette époque. A priori, la plupart n'effectue pas ce transfert car les terres sont

encore fertiles, peu exploitées et le travail d'épandage n'est pas nécessaire. Aucun repos de la terre n'est mentionné si ce n'est durant les années de sécheresse où la culture devient impossible. Ces jachères ne faisaient pas non plus l'objet d'apport de matière organique

d'après les agriculteurs. L'exploitation intensive du charbon végétal issu du caroubier (Propopis chilensis et Propopis

limensis), dont les feuilles étaient consommées par le bétail, commença dans les années 30 et fut à l'origine de la déforestation massive de la région (E. Zegarra et al., 2006) . La disparition progressive de la principale ressource alimentaire du bétail fut une des causes de réduction de

la taille des cheptels.

A cette époque, les différentes composantes du territoire comprenant l'ager, le saltus et la silva sont exploitées. S'il est vrai que les terres bénéficiant d'un accès régulier à l'eau sont cultivées, elles restent néanmoins minimes par rapport à la totalité des terres disponibles dans

la communauté. La question de l’accès à l'eau (et de ses conditions) apparaît comme l’un des principaux facteurs de différenciation sociale et va de pair avec la taille des troupeaux. Les

inégalités en dotation de facteur de production sont intrinsèquement liées à la taille des troupeaux et à l'accès à l'eau.

La ressource hydrique mieux maîtrisée

A partir des années 50, avec la croissance de la demande nationale et internationale en coton puis en citron, de grands propriétaires originaires de Piura à la recherche de grandes

étendues foncières s'installèrent à Olmos et se tournèrent vers l'agriculture de plantation : "en relativement peu de temps, l'usage de l'espace changea de vocation, passant d'un espace de

pâturage en un espace de culture toujours plus important" (Arts et al., 1992). Ces nouvelles cultures transformèrent radicalement le paysage, le contexte agraire et la situation économique d'Olmos au niveau régional et national. Avec le développement des

infrastructures hydrauliques, de plus en plus de parcours furent mis en culture (L. Del Castillo, 2012). Avec l'utilisation de machines agricoles, une irrigation mieux maîtrisée et

l'utilisation d'intrants de synthèse, la productivité de la terre augmenta pour les grands planteurs de la région. Ces premières formes d'ouverture sur les marchés internationaux (exportation de produits agricoles, importation d'intrants) restent cependant très minoritaires

dans la région et une grande partie des productions restent destinés au marché national.

Selon les enquêtes de terrain, plusieurs catégories d'exploitants agricoles cohabitèrent alors au sein de la communauté paysanne : les petits agriculteurs vivriers dépendants de l'irrigation fluviale et de la traction animale, les moyens et grands éleveurs ayant accès à une

ressource hydrique plus régulière issue du sous-sol et enfin les migrants ayant investis dans les plantations de coton et de citron basées sur la mécanisation et l'utilisation progressive des

intrants chimiques.

16

Outre la modification du paysage de la région, l'implantation de grandes surfaces cultivées

recombina le système social (E. Zegarra et al., 2006). Celles-ci offrirent de nouvelles opportunité de travail aux comunero engendrant une nouvelle

forme de différenciation sociale : les paysans les moins bien dotés en terre ou en cheptel devinrent salariés journaliers des plus grands propriétaires fonciers (E. Zegarra et al., 2006). La plupart d'entre eux combinaient néanmoins leurs propres activités agricoles avec le travail

salarié. En année sèche, lorsqu'il n'était pas possible de semer, ils se consacraient au salariat agricole et en année pluvieuse, ils continuaient de semer maïs, haricot et manioc sur de

petites surfaces (moins de 5ha) pour l'autoconsommation, la consommation du bétail et la vente sur les marchés locaux (Olmos, Chiclayo). Le calendrier de travail se densifia pour ces petits producteurs qui bénéficièrent de nouvelles opportunités de travail. Selon E. Zegarra et

al., "la majorité des comuneros demeurèrent exclus de l'accès à l'eau du sous-sol" ce qui entraina une augmentation des inégalités entre producteurs ayant un accès à l'eau permanent

et producteurs n'ayant qu'un accès saisonnier. Avec l'émergence de ces nouvelles cultures commerciales, les échanges entre la communauté d'Olmos et les grandes villes du pays s'intensifièrent. La panaméricaine passant par Olmos et

reliant Piura au nord et Chiclayo au sud facilita ces échanges.

Una augmentation de la production fruitière...

Avec la réforme agraire de 1969, nombre d’haciendas furent démantelées,

contraignant leurs propriétaires originaires de Piura à migrer vers d’autres lieux (Zegarra et al, 2006). Certains de ces grands propriétaires fonciers expropriés (cf carte en annexe 4),

s'installèrent donc à Olmos, région propice à la culture de citron et ayant déjà accueilli une première vague de migrants dans les années 1950. Selon les producteurs, des crédits furent octroyés par la banque nationale Banco Agrario (aujourd'hui disparue) pour inciter les

exploitants à moderniser leur système de production avec du matériel d'irrigation et des machines agricoles. Dans toute la région, le nombre de puits et de canaux d'irrigation

augmenta donc encore (cf annexe 5 tirée de l'article de Zegarra et al., 2006). Amorcés dans les années 60, les transferts fonciers se multiplièrent au dé triment des terres de pâturages (E. Zegarra et al., 2006)

Un nouveau zonage agraire se dessinait : les terres irrigables étaient destinées aux plantations

et les zones reculées, sans accès à l'eau ou encore trop pentues servaient de pâturages aux éleveurs qui peu à peu s'éloignèrent du centre urbain d'Olmos pour s'établir dans les collines aux alentours. A mesure que la région s'ouvrit aux échanges commerciaux avec les grandes

villes, la culture fruitière se diversifia avec le citron et le fruit de la passion. Le coton disparut du paysage agricole suite aux crises péruviennes de 1966-1967 et aux grandes maladies de

1965 (Arts et al, 1992). Le citron dont la demande nationale était croissante, remplaça progressivement le coton à partir des années 1970 et le fruit de la passion à Olmos au début des années 1980 (Arts et al., 1992). Les cultures vivrières furent également remplacées par les

plantations fruitières pour les producteurs capables d'investir. Selon les producteurs, avec l'émergence des plantations fruitières, les fumures animales

commencèrent à être utilisées aux pieds des arbres fruitiers. Parallèlement, l'utilisation d'intrants chimiques (urée en grande majorité) se généralisa à l’ensemble des cultures.

En peu de temps, la réputation du citron d'Olmos s'accrut sur les marchés de Lima et la demande ne cessant d'augmenter, les surfaces dédiées au citron s'étendirent. De plus, la

production fut dynamisée par la création de plusieurs usines de transformation dans les années

17

1970, premières formes d'agro- industrie approvisionnées par les producteurs de citron de la

région (CICAP, 2003 ; E. Zegarra et al, 2006 ; Arts et al., 2012).

La différenciation des systèmes de production s'accrut : les producteurs de moins de 5ha combinaient les cultures saisonnières (maïs et haricot) destinées à l’autoconsommation et à la vente, le petit bétail (cheptel allant de quelques têtes à une cinquantaine selon les

précipitations) et le salariat journalier. Les agriculteurs capables d'investir se tournèrent vers les cultures fruitières : 1 à 5ha de citron ou de fruit de la passion (E. Zegarra et al., 2006). La

plupart du temps, cet investissement était rendu possible par la vente d'une part ie ou de la totalité du bétail (témoignages). Ces agriculteurs devinrent ainsi de petits planteurs fruitiers dont les surfaces augmentaient selon le capital aux dépens des éleveurs qui nécessitaient

d'espaces ouverts pour l'alimentation du bétail. Bien que les surfaces dédiées aux cultures saisonnières diminuèrent, elles ne disparurent pas car demeuraient essentielles en période de

soudure, tant pour l’alimentation animale qu’humaine. Pour certains, il devint possible de louer le tracteur du grand planteur voisin. Ainsi, le labour moto-mécanisé se diffusa au sein de la communauté, et ce, même sur de petites surfaces.

...confrontée aux lois du libre-échange.

Néanmoins, ce nouveau marché du citron très attractif n'était pas sans risque pour le producteur investisseur. A partir des années 80, les consommations intermédiaires

augmentèrent sensiblement, avec la hausse du prix du pétrole et de ses corollaires (J-L. Chaléard et al., 2010). L'impact à Olmos fut très important du fait de la dépendance des

producteurs aux motopompes, seul moyen d'avoir un accès permanent à l'eau. En outre, les régions voisines telles que Piura ou Trujillo commencèrent à produire du citron à moindre coût : ayant accès à l'eau de surface, les producteurs de ces régions n'avaient pas besoin de

moteur pour l'irrigation et étaient par conséquent moins sensibles aux variations de prix du carburant (témoignages, E. Zegarra et al., 2006). A la fin des années 80, cette nouvelle

concurrence entraina une chute spectaculaire des ventes de citrons d'Olmos et mena la majorité des producteurs de citron à la faillite avec la saisie des terres que certains avaient hypothéquées.

A partir de cette époque, les planteurs n'ayant pas perdu leurs parcelles suivirent les

orientations du marché, modifiant leurs assolements et choix culturaux selon les produits valorisés par le marché : citron, mangue et fruit de la passion. Ces variations de prix sont relativement cycliques : lorsque le prix d'une culture augmente, la majorité des producteurs se

tournent vers celle-ci ; à terme, l'offre devient supérieure à la demande, les prix chutent et les producteurs changent de culture. La conversion d'une culture de plantation à une autre

nécessitant un important investissement, seuls les producteurs possédant une trésorerie suffisante peuvent se permettre de suivre ainsi les cours du marché. Pour y faire face de nombreuses stratégies de réduction des risques sont mises en place par les agriculteurs :

diversification agricole, conservation des cultures vivrières dans l'assolement, accès à des débouchés commerciaux distincts ou encore diversification des sources de revenus par des

activités extra-agricoles.

b) L'accès au foncier, entre propriété et possession

Selon les recensements nationaux des années 1981, 1993, 2005 et 2007, la population

du district d'Olmos a augmenté de 69% de 1981 à 2007. Elle commence à se stabiliser à partir de 2005 (cf annexe 6).

18

La population du district d'Olmos se répartie entre la zone urbanisée d'Olmos (constituée de 5083 habitants3) et les 184 hameaux encerclant la ville sur plus de 500 000ha. Selon le recensement de population de l'INEI de 1993, 27% de la population est urbaine face à une

majorité rurale (73% soit 22 663 habitants). Les terres d'Olmos étaient majoritairement utilisées à des fins de productions agricoles. Dans les années 1990, différentes formes d'accès

au foncier existaient à Olmos, produits de l'histoire, de l'évolution de la législation et de la réforme agraire.

Tableau 1: Les différentes formes d'accès au foncier en 1990 à Olmos

En

propriété

En

location Communal

Plus de 50%

en propriété Autre TOTAL

Nombre d'exploitation 722 42 427 9 20 1220

% en nombre d'exploitation 59% 3% 35% 1% 2% 100%

Surface en ha 86287 215 3368 113 299 90282

% en surface 95,6% 0,2% 3,7% 0,1% 0,3% 100% Source : Recensement agraire de 1994 (Institut National des Statistiques et de l'Informatique, INEI)

Le tableau 1 renseigne sur le fait que dans les années 90, la majorité des terres relevaient du régime de la propriété (majoritairement collective). En nombre d'exploitants, cette

information est relativisée puisque seulement 59% possédait des terres en propriété tandis que 35% avaient un accès communal. En manquant de précision, ces chiffres lissent les distinctions qui existait entre les exploitations d'Olmos. Le tableau suivant donne un

panorama foncier bien plus précis. Tableau 2 : Les formes d'accès au foncier selon la taille des parcelles possédées à Olmos en

1990

Exploitation agricole

selon la superficie cultivée

En

propriété

En

location Communal

Plus de 50% en

propriété Autre

TOTAL

(en ha)

Surface de moins de 1ha (% en terme de surface)

58% 3% 39% 0% 31

Surface entre 1 à 5ha 54% 4% 41% 1% 1 749

Surface entre 5 et 10ha 64% 1% 28% 3% 4% 904

Surface entre 10 et 50ha 68% 0% 27% 2% 3% 3 253

Surface de plus de 50ha 91% 1% 7% 0% 1% 14 522 Source : Recensement agraire de 1994 (Institut National des Statistiques et de l'Informatique, INEI)

D'après ce tableau, plus l'exploitation est grande, plus elle a accès à un foncier en propriété

privée et moins la possession 4communale apparait : 98% des terres de plus de 50ha sont en propriété privée. Il est important de noter que pour l'élaboration de ce tableau, les terres appartenant à la communauté paysanne ont été supprimées car elles apparaissaient dans les

exploitations de plus de 50ha ce qui ne reflète pas la réalité.

3 Recensement de population 1993 de l'INEI

4 On utilise le terme de possession car c'est le terme couramment employé dans la région. Il ne désigne

cependant pas une forme de propriété puisque seul l'usufruit y est attribué. Pour ces terres, la propriété foncière

relève de la Communauté Paysanne.

19

Un total de 68 378ha (cf tableau 3) correspondant aux terres de la Communauté ont donc été

exclus des chiffres de ce tableau afin de ne représenter que la propriété privée concernant les exploitants agricoles.

Les petites exploitants (moins de 5ha) ont quasiment autant de terre en propriété privée que de terre en possession communale. En 1994, le fermage (faire-valoir indirect) reste encore peu utilisé. Il concerne surtout les exploitations entre 5 et 50ha.

L'accès au foncier à Olmos est donc triple : la "possession" communale et le fermage sont

limités à l'usufruit alors que la propriété privée concerne l'ensemble du faisceau de droit (usus-fructus-abusus). Les terres communales, bien qu'appartenant à la Communauté, peuvent servir de terre de pâtis pour les éleveurs (eux-mêmes sont comuneros, donc propriétaires à

titre collectif) si aucun autre comuneros ne revendique son droit de cultiver cette parcelle. Cette distinction possession/propriété a aussi pour conséquence de limiter les possibilités de

crédit car la terre communale n'appartient pas au producteur et n'est pas hypothécable. L'histoire foncière d'Olmos, comme celle du Pérou, est éminemment complexe. Celle-ci ne faisant pas l’objet unique de la présente étude, nous nous contenterons d’apporter des

éléments de compréhension sur le sujet dans le but de répondre à la question de recherche.

D'après L. Del Castillo (2012), jusqu'en 1920, les terres communales pouvaient être transmises en propriété privée aux comuneros. Ces terres, ayant été transmises aux producteurs avant 1920, étaient donc des propriétés privées. En 1920, la Constitution fut

modifiée une première fois et la loi reconnut l'existence légale des Communautés Paysannes : "L'Etat protège les indigènes et dicte des lois en conséquence pour leur assurer un

développement en harmonie avec leurs besoins" (Article 58). Une seconde fois modifiée en 1931 et ratifiée en 1933, la Constitution, indique, dans son article 207 que "Les Communautés Paysannes détiennent une existence légale et sont considérées comme personne juridique". La

résolution suprême 86 reconnait officiellement la Communauté Paysanne de Santo Domingo de Olmos. Les terres situées sur le territoire officiel des Communautés devinrent des

propriétés communales. Les producteurs purent y avoir accès avec l'obtention d'un "Certificat ou titre de possession communale", document qui "leur assure l'usage de la terre mais sans que celle-ci ne puisse être vendue à un tiers ni même transmise à sa descendance" (Burneo de

la Rocha et al., 2009).

Toujours selon Burneo de la Rocha et al. dans un article intitulé "Terres communales et conflits avec l'Etat : le cas d'Olmos" (2009), il existait (et existe toujours) quatre groupes de comuneros : "le premier n'a pas de terre, qu'elle soit communale ou privée et cultive la terre

d'un tiers (location ou fermage), le second groupe possède un titre de propriété communale […]le troisième possède un titre privé, du fait de l'acquisition foncière antérieure à 1920 et le

quatrième qui ne possède pas de terre, dont l'activité principale est l'élevage et qui cultive un lopin de terre lorsque les pluies le permettent. En général, les comuneros possèdent des biens à la fois en propriété privée et communale."

S'il est vrai que le titre de possession communal ne permet pas de céder l'héritage

foncier à ses enfants, il existe cependant différents modes de transmission des terres. Comme l'indique le tableau suivant, l'héritage concerne uniquement la propriété privée. La terre communale n'étant pas transférable, elle apparait en rouge dans le tableau et correspond à la

terre appartenant à la Communauté Paysanne.

20

Tableau 3 : Mode de transmission du foncier à Olmos

Héritage Achat/vente Adjudication Communal Autre total

Nombre d'exploitation 287 367 183 1 47 885

% en nombre d'exploitation 32% 41% 21% 0% 5% 100%

Surface en ha 1147 3844 12354 68378 671 86394

% en surface 1% 4% 14% 79% 1% 100% Source : Recensement agraire de 1994 (Institut National des Statistiques et de l'Informatique, INEI)

La majorité des terres ont été acquises par achat/vente (41%), à l'aide d'un contrat entre deux propriétaires ou à la suite de ventes aux enchères. Les terres achetées par contrat sont

généralement reconnues par la loi car les nouveaux propriétaires inscrivent leurs acquisitions foncières sur le Registre Public. D'après Zegarra et al (2006), les ventes aux enchères ont

surtout eu lieu après la saisie des biens fonciers par les banques en cas de faillite des planteurs. Ces saisies ont été fréquentes notamment lors de la chute du prix du citron dans les années 80, affirmation confirmée par les nombreux témoignages d'actuels propriétaires ayant

acquis des terre par ce moyen. Les terres obtenues par adjudication ne sont pas négligeables et correspondent à près d'un

quart des terres d'Olmos. Ces mode d'accès au foncier est le fruit de la réforme agraire de 1969.

Le processus de réforme agraire modifia la loi foncière quant au concept de propriété et appliqua le principe selon lequel "la terre appartient à celui qui la cultive". Selon, L. Del

Castillo, "la conduction directe […] (c'est-à-dire le travail de la terre) devint suffisant pour revendiquer son droit de propriété5". Les propriétaires d'haciendas furent expropriés et de multiples formes de groupement virent le jour. Dans la vallée Motupe-Olmos, neuf

coopératives se formèrent (Torre, 1995). Selon S. Aldana et al., 2006, "les petits et moyens producteurs, à titre individuel ou collectif, dans le cadre des coopératives […] et des « communautés paysannes », devinrent propriétaires de la plus grande partie des terres

agricoles". Mais à partir de 1978, du fait de revendications liées "à l’insatisfaction des anciens travailleurs permanents, qui souhaitaient avoir leur propre exploitation, et aux

tensions entre ceux-ci et les administrateurs et techniciens chargés de diriger les nouvelles structures" (J-L. Chaléard et al., 2008), les coopératives furent finalement démantelées et les terres réparties entre les anciens travailleurs. Ce sont ces terres qui furent attribuées à la suite

du démantèlement des coopératives. Les producteurs qui avaient eu accès aux terres attribuées par la réforme agraire purent les convertirent en propriété privée : dans une

interview de la revue La Revista Agraria (Revue Agraire) n°108, le Directeur Général de la réforme agraire, Benjamín Samanez Concha témoigne : "Nous attribuons les terres en propriété, avec les titres inscrits dans le Registre Public." Cependant, toutes ces terres ne

furent pas privatisées et une partie demeura sous cette dénomination.

Cette brève description du foncier ne mentionne pas la distinction entre les terres irriguées et les terres ne bénéficiant que de l'apport des précipitations. Cette différence est pourtant de taille dans un oasis marqué par les fortes sécheresses.

5 Del Castillo, 1997, " Propriété rurale, titularisation des terres et propriété communale", Debate agrario

(Débat agraire).

21

c) Une ressource hydrique convoitée

Dans cette zone désertique, les terres irriguées n'ont cessé d'être un enjeu majeur pour

le contrôle du territoire. Selon Collin-Delavaud, "[à Olmos], le bilan est tragique : 36000 personnes disposent de 10000ha cultivés dont 6000 seulement peuvent être considérés comme irrigués, ce qui représente un taux de 0.17ha par habitant, le taux le plus bas de toute la côte"

(1968).

L'eau de surface

Pour l'irrigation des parcelles, l'eau est abord recherchée sous forme superficielle à

travers les fleuves de la région, les canaux d'irrigation et les précipitations. Dépendant du régime pluviométrique annuel, la disponibilité de cette eau de surface reste limitée à quelques

mois de l'année. Située dans le piémont occidental des Andes, les précipitations annuelles varient énormément

d'une année sur l'autre et sur une même année (fortes variations interannuelles entre février-mars et juillet-août-septembre). Selon le "Diagnostic de la micro-région Motupe-Olmos"

réalisé par D. Arts et al. en 1992, les années sèches sont marquées par de très faibles précipitations, ne dépassant pas 50 mm/an. Les précipitations en année pluvieuse varient d'une centaine à 400mm/an comme ce fut le cas en 2012, selon les données du SENAMHI, le

Service National Météorologique et Hydrologique Péruvien. D'après les données des années 2009 à 2012, nous avons élaboré un diagramme ombrothermique.

Figure 1 : Diagramme ombrothermique Olmos 2009-2012

Source : SENAMHI, Elaboration propre.

Le diagramme représente une courbe de températures mensuelles minimales (en bleu) et une

autre de températures mensuelles maximales (en rouge) sur la période 2009-2012. Les températures sont des moyennes car elles ont été calculées à partir des données

pluviométriques journalières minimum et maximum.

0,0

10,0

20,0

30,0

40,0

50,0

60,0

70,0

80,0

90,0

0,00

5,00

10,00

15,00

20,00

25,00

30,00

35,00

précipitations moyennes température moyenne minimum

température moyenne maximum

22

Sur ce diagramme, les températures varient peu ; on remarque une légère baisse des

températures en hiver d'Avril à Novembre. Quant aux précipitations moyennes annuelles, elles atteignent 221mm/an.

On remarque que les précipitations minimales sont inférieures à 50mm/an comme indiqué dans le diagnostic de D. Arts. Cette asymétrie d'information n'est pas nécessairement issue d'une erreur de mesure. Le régime pluviométrique de 1992 ans a pu baisser en 20 ans pour

atteindre aujourd'hui des précipitations minimales de moins de 10 mm/an. Cette observation est relayée par les témoignages des agriculteurs d'Olmos qui ont remarqué une baisse sensible

des pluies. La déforestation du caroubier qui commença dès les années 30 et les conséquences du réchauffement climatique à Olmos sont des hypothèses qui pourraient expliquer ce phénomène.

Quoi qu'il en soit, les variations d'une année sur l'autre du régime pluviométrique sont telles qu'une moyenne de quatre années consécutives n'est pas suffisante pour mettre en évidence

les variations pluviométriques interannuelles et il est nécessaire de considérer chaque année une par une. Le diagramme (annexe 7) représente les précipitations de ces quatre dernières années 2009, 2010, 2011 et 2012.

Les années 2009, 2010 et 2011 ont été considérées comme sèches par les agriculteurs n'ayant

accès qu'à l'eau de surface. L'année 2012 fut plus pluvieuse et permit aux agriculteurs de cultiver une bonne partie de leurs terres. Bien que les potentialités productives d'un milieu soient le résultat de multiples facteurs climatiques (températures, vent, nébulosité,

précipitations, durée d'ensoleillement,…) il n’est pas aberrant de penser que le facteur climatique limitant l'activité des agriculteurs n'ayant pas accès à l'eau souterraine soit la

pluviométrie. L'eau superficielle tant attendue par ces agriculteurs provient des fleuves Olmos et Cascajal qui traversent la zone d'étude et forment deux vallées irriguées, principale zone étudiée au cours de ce stage. Le fleuve Olmos nait dans la Cordillère des Andes à une altitude

de 2100m. Il parcourt 41,5 km avant de se jeter dans l'océan Pacifique, créant ainsi un bassin d'environ 300km² (PEOT, 2012). D'après le Diagnostic de la micro-région Motupe-Olmos

(Arts et al., 1992), les fleuves Olmos et Cascajal forment un bassin de 4120 km². Ils sont principalement alimentés par les pluies et relativement peu par l'eau des nappes phréatiques. Selon une étude hydrogéologique réalisée par l'entreprise soviétique Selkhozpromexport en

19726, les vallées Olmos et Cascajal bénéficiaient respectivement de bassins hydriques de 200hm3 et 900hm3. De plus, selon Arts et al. (1992), le fleuve Olmos bénéficie d'un débit

annuel de 0.89m3/seconde, débit inférieur au fleuve Cascajal qui lui est formé par deux rivières : Tocto d'un débit de 1.05m3/sec et Palo Blanco de 1.03m3/sec. Cascajal bénéficie donc d'un meilleur accès à l'eau que la vallée d'Olmos. Mais même s'il existe une différence

de disponibilité hydrique certaine, après deux années de sécheresse, les deux fleuves s'assèchent, Olmos précédant Cascajal.

En période de pluie, la Junta de Usuarios est l'institution publique en charge de la distribution des eaux par les canaux d'irrigation. Cet organisme ne fonctionne que quelques mois de

l'année de Janvier à Avril, lorsque les fleuves se remplissent. L'eau est cependant rarement disponible tout au long de l'année, elle se raréfie au cours des mois précédents la potentielle

saison des pluies (septembre, octobre, novembre). Cet organisme se divise en deux Commissions d'irrigateurs, une pour la vallée d'Olmos, l'autre pour la vallée de Cascajal. Un total de 18 canaux traverse la vallée, 7 canaux

6 Il semblerait que cette étude réalisée il y a plus de 40 ans soit la dernière à avoir été publiée. Au vu de

l'exp loitation des ressources en eau du sous -sol qui ne cesse de croitre, on peut supposer ce chiffre a augmenté

depuis 1972.

23

appartenant à la Commission d'Olmos et 11 appartenant à la Commission de Cascajal. Là

encore, de par la différence de dotation en canaux d'irrigation des deux vallées, nous constatons que la vallée Cascajal jouit d'un meilleur accès à l'eau que la vallée d'Olmos.

L'eau du sous-sol

Avec le besoin d'irrigation permanent des cultures pérennes, les agriculteurs furent rapidement contraints d'exploiter l'eau du sous-sol, seule ressource disponible toute l'année.

Depuis les années 1950, les puits tubulaires firent leur apparition. D'après le recensement de l'INEI, le nombre de puits noria (puits manuel utilisant l'énergie hydraulique pour

fonctionner) est encore supérieur au nombre de puits tubulaires en 1994 (cf annexe 8). La moitié des exploitants cultivent sans le recours à un puits mais grâce aux pluies ou aux canaux

de la Junta de Usuarios. Les exploitations possédant des puits tubulaires concentrent le plus de surface. D'après une étude complémentaire tirée du diagnostic de la micro-région (Arts et al., 1992), il existe un total de 297 puits tubulaires ce qui pourrait correspondre aux données

du recensement (nous ne sommes pas en mesure de le vérifier car la catégorie "avec les deux puits" ne distingue pas les puits tubulaires des puits noria).

La plupart des producteurs dont les terres cultivables sont supérieures à 0.5ha bénéficient d'un double accès à l'eau : l'eau des fleuves Cascajal et Olmos lors des années clémentes et l'eau

souterraine. Les producteurs s’organisent pour tirer le meilleur parti des deux accès à l'eau : ils privilégient généralement l'eau du fleuve que les producteurs jugent (selon leurs

témoignages) de meilleure qualité en termes de salinité et de température. Ils complètent, le cas échéant, leurs besoins avec leur propres puits. Mais certaines années très sèches, seule l'eau du puits est disponible.

Système d'irrigation

Selon le diagnostic Olmos-Motupe, l'efficience d'irrigation dans le district d'Olmos est de 70%. Basées sur ce chiffre, les demandes nettes hydriques spécifiques à chaque culture

figurent dans le tableau ci-dessous :

Tableau 4 : Demandes d'irrigation selon la culture

Culture Demande nettes (m3/ha)

Haricot 6 428

Maïs et coton 10 143

Arbres fruitiers 15 428 Source : Diagnostic de la micro-rég ion Olmos-Motupe (Arts et al., 1992)

Les cultures de maïs et de haricot ont des besoins en eau inférieurs à ceux des arbres fruitiers du fait de leur cycle de production plus court (5 mois pour le maïs et 3 mois pour le haricot).

Les arbres fruitiers quant à eux nécessitent un apport hydrique sur toute l'année. Les cultures saisonnières sont donc plus adaptées à des systèmes de production dont l'accès à l'eau est

limité. Le système d'irrigation utilisé à cette époque est le système gravitaire avec l'utilisation de canaux pour transporter l'eau du fleuve aux champs. D'après le recensement agraire de l'INEI

en 1994, 98% du total des exploitations ayant accès à un système d'irrigation possède un système gravitaire (ce qui correspond à 1160 exploitations et à 8282ha). A cette époque, 1%

seulement a accès à un système de goutte à goutte (soit 6 exploitations et 50ha).

24

Le pourcentage restant est constitué de système par aspersion ou de systèmes combinés. Le

système gravitaire est peu économe en eau du fait de sa faible efficience (40 à 50% d'efficience d'irrigation selon Arts et al., 1992).

Les producteurs sont donc contraints de prélever de manière importante dans les ressources naturelles de la région. Dans un contexte de rareté de la ressource hydrique, les modes d'irrigation ne permettent pas aux producteurs de réaliser des économies, en termes de

quantité utilisée et de coût de l'eau.

d) Un paysage agraire dominé par des cultures fruitières et vivrières

Dans ces vallées arides, le paysage est principalement façonné par la présence de l'eau.

Ni les températures (quasiment constantes), ni les caractéristiques pédologiques, ni les formations végétales qui en résultent ne laissent apparaitre de facteur de différenciation de

l'agriculture. En effet, la zone couverte par cette présente étude est caractérisée par une formation végétale de steppe arborée à sous-bois herbacée exceptionnel (C. Collin Dellavaud, 1968). Employant un terme d'origine africaine, le géographe C. Collin Dellavaud désigne la

région comme une "marge sahélienne" constituée d'une couverture boisée claire (caroubier, Propopis chilensis et Propopis limensis, sapote, Capparis angulata, faique, Acacia

macracantha,…) pouvant laisser place, lors des années pluvieuses, à "une végétation herbacée dense et vivace idéale pour le pâturage du bétail". Les sols de la région sont uniformes et composé d'un mélange d'alluvions descendu des montagnes andines, de limons et de sables

éoliens. En présence de précipitations, "ces lithosols évoluent vite vers des sols bruns d'une texture et d'une structure exceptionnelle", réputés pour leur fertilité. En effet, "les alluvions,

en dehors des sables (10 à 40%) sont essentiellement limoneuses pour 30 à 60% et les argiles sont formées de montmorillonites et d'illites" (C. Collin Dellavaud, 1968). A Olmos, seules les terres relativement planes sont destinées à l'agricultures. Les contreforts, appelés cerros,

ne bénéficient d'aucun accès à l'eau et sont bien trop escarpés pour être cultivés. Les parcelles cultivées se concentrent donc sur les surfaces planes et à proximité des cours d'eau ou des

voies de communication.

La zone étudiée lors de ce stage mesure

environ 1000 km² et se limite aux vallées irriguées, situées à proximité de la ville

d'Olmos dans un rayon d'environ 20km. L'objectif de cette étude est d'identifier les transformations agraires qui ont lieu dans

les espaces déjà cultivés. La zone du projet n'étant pas encore cultivable, elle ne

constitue pas un intérêt pour notre étude. De plus en pleine construction, elle n'est pas accessible au public et a été le lieu de

quelques revendications violentes. Cette étude ne s'intéresse donc pas à cette zone

désertique ciblée par le projet.

Carte 1 : Les vallées irriguées d'Olmos (zone d'étude)

Source : Image Landsat 8 du 24 aout 2013, téléchargée sur Glovis, US Geological Survey

25

La constance des températures, la relative homogénéité des sols et leur fertilité démontrent

que l'accès à l'apport hydrique (superficiel ou souterrain) et son appropriation par les producteurs (pluies, canaux, puits, systèmes d'irrigation), constitue un facteur important de

différenciation agricole. De par ces différents apports hydriques, les vallées ne présentent pas le même paysage.

Les trois modalités d'accès à l'eau (les oueds, l'eau du sous-sol et les précipitations) ont un impact considérable sur l'aspect du paysage et sur l'agriculture d'Olmos.

Basé sur les observations de paysage et les données bioclimatiques, nous pouvons distinguer deux zones principales :

- La première zone, la vallée Cascajal, située au Nord d'Olmos est caractér isée par une majorité de plantations fruitières (fruit de la passion, citronniers et à plus petite échelle

manguiers) en culture pure ou associée. Moins fréquentes, des surfaces dédiées au maïs et au haricot en culture pure ponctuent également le paysage. Quelques arbres fruitiers (papayer, bananier, orangers, lime) destinés à l'autoconsommation sont

présents ici et là en bordure de parcelle ou a proximité des maisons. Des parcelles en friche composent également le paysage. Elles constituent un espace de pâ turage pour

le bétail qui participe au renouvellement de la fertilité. Ces friches, d'âges différents, offrent au promeneur des aspects tout à fait différents : les plus jeunes (quelques mois à un an) possèdent encore les vestiges d'un dernier labour et so nt parsemées de

quelques adventices. Les friches d'âge moyen (moins de cinq ans) sont reconnaissables par la présence d'une strate arbustive caractéristique de climat semi-aride et plus ou

moins dense selon le nombre d'années de friche. Les marques d'une activité agricole passée disparaissent progressivement. Pour les plus âgées (plus de cinq ans), de jeunes arbres ont repris leur droit sur les parcelles mais leur densité reste assez faible.

Des espaces boisés dont l'exploitation agricole remonte à plus de dix ans ou qui n'ont a priori pas encore fait l'objet d'une exploitation agricole terminent d'illustrer le paysage.

Quant à l'élevage, on devine que dans cette zone, cette activité y est peu présente car le territoire est découpé en petites parcelles fermées et occupées ne permettant pas aux animaux d'y pâturer. Cela ne signifie pas que les ménages ne possèdent pas d'élevage,

loin s'en faut. Les troupeaux se trouvent généralement en périphérie des vallées cultivées, dans les zones plus sèches et au relief plus prononcé.

- La seconde zone est la vallée du fleuve Olmos à l'Est et à l'Ouest de la ville. La partie

occidentale est la plus aride des zones étudiées. La partie orientale, plus en amont du fleuve, bénéficie d'une quantité d'eau supérieure à la partie occidentale, en aval. Cette distinction marque une légère différence de paysage.

A l'Est, les eaux du fleuve permettent aux agriculteurs de produire les mêmes cultures saisonnières (maïs, haricot) et fruitières (fruit de la passion, citron, mangue) que dans

la zone précédente, bien que la moindre densité de plantations soit bien visible. A l'Ouest, il n'y a quasiment pas d'eau de surface disponible, seuls les puits rendent possible l'activité agricole mais ils y sont plus rares que dans la première zone 7.

L'activité agricole principale est l'élevage.

Enfin, l'eau de pluie, objet de toutes les attentes durant les mois de décembre à mars, provoque un changement radical du décor végétal.

7 On suppose que la rareté des puits provient de la nappe phréatique, plus profonde que dans les autres zone.

Aucun référence bibliographique ne le prouve cependant, uniquement des témoignages de producteurs.

26

Avec l'arrivée des précipitations, les niveaux d'eau des rivières et des nappes augmentent et

induisent une augmentation considérable des surfaces cultivées8. Quelle que soit la vallée, le paysage d'Olmos devient verdoyant. Les surfaces cultivées de

maïs ou les terres de pâturages augmentent significativement et réduisent le nombre de friche de la zone. Ce changement radical impacte majoritairement les petites parcelles de vivrier ; les plantations fruitières et les parcelles de raisin et de piment ne dépendent pas des précipitations

et sont cultivées quel que soit le régime pluviométrique de l'année. Les annexes 9 et 10 illustrent le changement de végétation que connait le paysage en année sèche et pluvieuse.

II. Des systèmes de production peu tournés vers l'international

L'approche systémique implique la compréhension fine des éléments constitutifs du

système agraire. Après avoir décrit brièvement l'histoire agraire et le paysage et identifié les enjeux que représente l'accès au foncier et à l'eau dans le contexte spécifique d'Olmos, il est nécessaire de changer d'échelle d'analyse : de la localité d'Olmos, nous passons à l'échelle de

la parcelle avec l'analyse des systèmes de culture et d'élevage.

a) Description des systèmes de culture et d'élevage

L'élevage extensif fortement dépendant des pluies

Ce système regroupe des tailles de cheptels très différentes. Néanmoins, la conduite du

troupeau et les stratégies mises en œuvre sont similaires alors même que les troupeaux peuvent varier énormément en terme d'effectif : de dix à une centaine d’ovins et caprins ou de cinq à trente vaches.

La conduite du troupeau est intrinsèquement liée à la présence de pâturage et donc à la

pluviométrie annuelle : - En année sèche, les bêtes ne peuvent se contenter des quelques bourgeons présents sur

les branches des arbres et arbustes, seuls résistants à la sécheresse. En l'absence de

parcelle cultivable, l'éleveur ne peut produire sa propre ressource fourragère et, pour maintenir son troupeau en vie, est contraint d'acheter une source d'alimentation

complémentaire : les cannes de maïs. L'achat de la paille de maïs se fait pendant la période de grande sécheresse, lorsque les pâturages sont secs (de juillet à décembre, avant que les pluies reprennent). Ce transfert fourrager s'effectue de deux manières

différentes. L'éleveur peut acheter la matière sèche au producteur de maïs qui l'apportera directement à proximité de l'habitation et du troupeau de l'éleveur. Mais

généralement, les éleveurs "louent" des parcelles de pailles de maïs et font pâturer leur troupeau directement sur les terres des producteurs. L'avantage est réciproque : les éleveurs n'ont pas à payer le coût du transport, le fourrage est donc moins coûteux. Il

faut quand même amener les animaux sur la parcelle du maïsiculteur et les surveiller ce qui induit l'immobilisation d'un actif durant une demi-journée tous les jours

(15HJ/mois) pour mener à bien cette tâche ; les animaux participent au renouvellement de la fertilité du champs par les fumures organiques et facilitent le nettoyage du champ par incorporation de la matière végétale non-ingérée avant la prochaine campagne.

8 Ces dernières observations sont toutes tirées de témoignages car aucune observation n'a pu être réalisée en

raison de l'absence de précipitations durant la période d'étude.

27

- Les éleveurs ayant une trésorerie suffisante complètent l'alimentation du bétail avec

l'achat de fleurs et de feuilles de caroubier, appelées algarrobina ou encore de granulés.

En année sèche, le manque d'alimentation limite la reproduction des femelles reproductrices et seule une minorité entre en gestation (environ 10% selon les éleveurs

enquêtés). La forte mortalité des petits diminue encore plus le taux de renouvellement du troupeau. Dans le cas où la trésorerie de l'éleveur est insuffisante pour nourrir le bétail, le

système est en situation de décapitalisation : les éleveurs se séparent de la plupart de leurs bêtes, vendant d'abord les jeunes mâles et les vieilles femelles. La stratégie

consiste à vendre les bêtes avant qu'elles ne soient devenues trop maigres pour être achetées. Lorsqu'il devient impossible de nourrir le reste du troupeau, ils ne gardent qu'une ou deux bêtes afin de reconstituer le troupeau au retour des pluies.

- En année des pluies, la vente est limitée aux jeunes mâles après un processus

d'engraissement de 4 à 6 mois et les dépenses liées à l'alimentation sont nulles, les pâturages étant présents en quantité suffisante pour nourrir tout le bétail de la zone. Les cheptels augmentent de manière considérable : chaque chèvre en reproduction

donne naissance de un à quatre chevreaux par an. Les vaches donnent naissance à un veau par an.

Concernant les systèmes d'élevage situés dans les hameaux éloignés de la ville d'Olmos, les caprins et ovins sont en divagation la journée dans les zones d'altitudes ; elles reviennent la

nuit pour s'abreuver. Pour les bovins, un ou deux actifs (en majorité les femmes mais les hommes peuvent également y prendre part) les accompagnent généralement. Lorsque le

système se situe à proximité de la ville, les éleveurs accompagnent systématiquement les troupeaux car les espaces sont fermés et les bêtes doivent pâturer dans des espaces définis (champs de cannes de maïs par exemple). Il a été remarqué que de plus en plus d'éleve urs

accompagnaient leurs troupeaux (caprins, ovins ou bovins) pour lutter contre les vols de bétail ou les attaques d'animaux sauvages (puma). La présence de chiens est systématique et ils

combinent les fonctions de surveillance, de défense du troupeau (et de la maison) et de présence pour les maîtres. La nuit, les animaux sont toujours enfermés dans leur enclos toute la nuit pour éviter les vols, très fréquents dans la région.

Un puits noria manuel sert à la consommation animale et domestique. Chaque année, les éleveurs font vacciner les bêtes par le SENASA, organisme de sécurité sanitaire national. Ces

vaccins sont obligatoires pour les bovins mais la plupart des éleveurs vaccinent également caprins et ovins. La monte est naturelle, sans intervention humaine. La plupart des éleveurs de possède un mâle pour la reproduction. Dans le cas contraire, les mâles sont généralement

prêtés aux éleveurs ne possédant que des femelles gratuitement ou en échange d'un petit service ou d'un chevreau.

Un tableau (annexe 11) présente le coût moyen que représente un troupeau de 20 chèvres en année sèche. Les sources de dépenses liés à l'activité d'élevage résident dans

l'alimentation et la santé. D'après ce tableau, un troupeau de 20 chèvres consomment environ 3ha de paille de maïs par an, ce qui correspond à 6 mois de nourriture. Ce chiffre est une

approximation tirée de plusieurs témoignages, il est toutefois difficile d'évaluer la consommation journalière d'un troupeau car celle-ci dépend de la quantité de matière sèche disponible, de l'effectif et de la conduite du troupeau. De plus, la ration alimentaire disponible

dans un hectare de maïs correspond à une ration "de survie" et non à une ration permettant la production de lait ou de viande.

28

Il est donc difficile de calculer la quantité d'hectare de maïs nécessaire à alimenter un

troupeau. C'est pourquoi nous nous basons plutôt sur les témoignages des éleveurs pour ce calcul économique.

Les performances économiques de ce système ont été calculées dans l'étude des systèmes de production car elles se distinguent d'un système à l'autre.

L'élevage extensif affranchi des pluies

Ce système d'élevage est également extensif mais il dépend bien moins de la contrainte des précipitations. Les éleveurs disposent dans ce cas des ressources économiques nécessaires pour l'alimentation du troupeau quel que soit le climat.

La taille des cheptels varie donc beaucoup moins d'une année sur l'autre. Les effectifs ne sont pas nécessairement supérieurs au système précédent mais les fluctuations interannuelles de la

taille des troupeaux disparaissent. La conduite du troupeau est relativement similaire : la reproduction est naturelle (la grande majorité possède des mâles reproducteurs), les maladies sont traitées par les vaccins du

SENASA. Les animaux disposent d'un enclos pour la nuit et sont en divagation le jour. Selon le système de production considéré, l'actif familial se charge lui-même de surveiller le

troupeau la journée sur les terres de pâturage ou charge un actif extérieur de le faire (salarié permanent). Les coûts du troupeau sont légèrement supérieurs avec les dépenses liées à l'alimentation plus conséquentes et régulières (plus de granulés et de feuilles de caroubier) et

le gardiennage. Ces dépenses peuvent atteindre 2500 soles pour le même troupeau de 20 chèvres. En année des pluies, les dépenses sont nulles, comme pour le système précédent.

La maitrise de l'alimentation permet à l'éleveur de régulariser le renouvellement de son troupeau et la vente d'animaux.

Un autre système d'élevage existe dans la région d'Olmos. Ces systèmes mettent en jeu des cheptels bien supérieurs (d'une centaine à plusieurs centaines de têtes de bétail) situés

dans des hameaux très reculés de la Communauté Paysanne. Ces systèmes se sont perpétués au cours de l'histoire tirant leurs origines d'un Olmos principalement tournés vers l'élevage. Dans les vallées irriguées, il n'y a plus aucune trace de ce type d'élevage. Les propriétaires ont

depuis combiné d'autres systèmes de culture en parallèle de leurs grands élevages. Nous supposons que ces éleveurs ont accès aux ressources naturelles (terre et eau) leur permettant

d'abreuver les troupeaux et de cultiver. Nous pouvons seulement mentionner ce système car nous savons qu'il existe. Mais il n'a pas pu être étudié de par sa situation géographique extérieure à la zone d'étude et l'impossibilité d'entrer en contact avec ces éleveurs.

Le système de culture vivrier

Les performances économiques des systèmes de culture seront présentées à la fin de cette partie pour des raisons de facilité de comparaison ; elles ne figurent donc pas dans les

descriptions suivantes. Ce système de culture est constitué de cultures vivrières saisonnières de maïs et de

haricot. Ce système est très dépendant du régime des pluies car les producteurs qui le mettent en œuvre sont pourvus d'un accès à l'eau temporaire. Ce système peut être représenté par la matrice suivante.

29

Régime pluviométrique

Trésorerie

Tableau 5 : Matrice des rotations vivrières selon la trésorerie et les précipitations

Trésorerie

insuffisante Trésorerie moyenne Trésorerie suffisante

Année très sèche Aucune culture 0.5ha haricot 1ha maïs

Année sèche Aucune culture 1ha maïs puis 0.5ha

haricot 1ha maïs puis 1ha haricot

Année pluvieuse 3ha maïs 3ha maïs puis 1.5ha maïs

et/ou haricot 3ha maïs puis 3ha maïs et/ou haricot

Cette matrice n'est qu'une modélisation, chaque producteur adaptant les surfaces cultivées aux facteurs de production dont ils disposent. Toutefois, elle illustre l'ensemble des choix

auxquels sont confrontés les producteurs. Le marché, qui est une contrainte importante pour les types suivant, entre peu en compte ici car la contrainte de l'eau est plus importante que la variation de prix.

En année sèche, le haricot est préféré au maïs car il nécessite moins d'eau. Toutefois, il est vite remplacé par le maïs dès que la trésorerie est suffisante pour l'irrigation. Le haricot est

une culture très sensible aux maladies et ravageurs et le risque de ne rien récolter en fin de campagne est important. Il est donc rarement semé en année pluvieuse. Le maïs est plus résistant et ses rendements sont rarement nuls (en moyenne 6,5T/ha). D'autre part, les

coproduits de maïs (paille) ont l'avantage d'être consommables par le bétail. La double campagne annuelle est très fréquente puisqu'elle permet une intensification importante de la

terre. Généralement, la première culture (toujours le maïs) bénéficie de l'eau de surface (canaux et pluies) puis de l'eau souterraine si nécessaire. La seconde campagne (maïs ou haricot) est irriguée par l'eau de surface restante (si l'année est très pluvieuse) ou par l'eau du

puits. Le haricot en seconde campagne détient en outre l'avantage agronomique de fixer l'azote dans le sol. Cette dernière requiert moins de travail et est souvent utilisée pour de

petites surfaces inférieures à 1ha. Pour profiter au maximum de l'humidité présente dans les sillons, des pieds de manioc, de lentille et de patate douce sont sporadiquement semés au bord des canaux. Ils servent à l'autoconsommation du ménage.

Le système d'irrigation utilisé par ce système est gravitaire comme indiqué dans la partie I.c). Les annexes 12 et 13 illustrent les méthodes d'irrigation par sillons simples ou circulaires.

Pour les raisons énoncées plus haut d'accès à l'irrigation, il est rare que les producteurs suivent une rotation fixe sur plusieurs années et sèment dès que l'accès à l'eau le permet.

Toutefois, lorsque deux années sèches se suivent et qu'ils sont contraints de cultiver une partie seulement de leur parcelle totale, ils évitent de semer la même partie deux années de suite,

alternant chaque partie cultivée. D'autre part, certains essayent d'alterner une campagne de haricot avec une campagne de maïs. Mais lorsque les facteurs de production le permettent, ils n'hésitent pas à cultiver plusieurs années de suite la même parcelle. Les années de sécheresse

sont considérées comme des périodes de repos pour la terre (6 mois de repos lorsque l'agriculteur n'effectue qu'une campagne à un an si l'agriculteur est en incapacité de semer).

D'après le calendrier de travail de ce système de culture (annexe 14), la quantité de travail totale s'élève à 154HJ/ha sur dix mois, 96HJ/ha pour le maïs et 58HJ/ha pour le haricot. Une

unité de production de 2 actifs dispose de 624HJ/an (on considère qu'un actif dispose de 312HJ/an, soit 6 jours de travail par semaine pendant 52 semaines) ce qui est suffisant pour

réaliser l'ensemble des opérations culturales. Elle l'est également pour une double campagne de maïs (192HJ) et de haricot.

Source : Elaboration propre

30

En année pluvieuse, lorsqu'il est possible de cultiver l'ensemble des parcelles, deux actifs

suffisent encore pour cultiver une double campagne de 3ha de maïs mais au-delà, le facteur travail devient limitant : les deux actifs familiaux sont insuffisants et l'unité de production a

recours à la main d'œuvre extérieure. Ainsi, lorsque l'eau n'est plus le facteur limitant, c'est le travail qui le devient. Les producteurs adaptent les surfaces cultivées en fonction du nombre d'actifs familiaux disponibles. En effet, la rémunération du travail pour les cultures vivrières

étant élevée (cf le tableau des opérations culturales en annexe 15), l'unité de production a tout intérêt à travailler elle-même, quitte à limiter les surfaces cultivées.

Le travail motorisé du sol est un service payé au propriétaire du tracteur. Un labour est généralement effectué à chaque début de campagne. Lorsque la trésorerie est insuffisante, le

labour mécanisé (charrue tractée par un cheval) est privilégié réduisant les coûts de production. La reproduction de la fertilité est assurée par les fumures animales déposées par le

bétail en fin de campagne, les mois de repos imposés par la sécheresse, les cannes de maïs et les fanes de haricot incorporées par le bétail puis par le labour (mécanisé ou moto-mécanisé). Les apports extérieurs de fertilisants chimiques sont systématiques et ne se limitent pas qu'à

l'azote (phosphore et potassium également).

Les plantations fruitières

Les plantations fruitières en tant que cultures pérennes nécessitent un apport hydrique

continue et permanent sur toute l'année (cf partie I.c)). Cette forte contrainte hydrique implique que le planteur détienne un accès à l'eau souterraine assez efficient pour lui

permettre d'irriguer pendant tout le cycle de production. L'accès à l'eau permanent constitue donc un facteur de différenciation significatif dans ce système agraire.

La plantation de citronniers

Les citronniers (Citrus aurantifolia, variétés Subtil et Tahiti) sont semés en lignes à des densités de semis variant de 100 à 200 pieds/ha. Le système d'irrigation est gravitaire et réalisé selon différents agencements de canaux comme indiqué dans l'annexe 12. Ces

plantations deviennent productives au bout de trois ans et sont en pleine production à cinq ans. Les deux ou trois premières années, la plantation est associée avec le fruit de la passion

de manière à rentabiliser l'unité de surface pendant les années non-productives du citronnier. Cette association rend négligeable le coût d'investissement de la plantation (déjà limitée à la préparation du sol, à l'achat des jeunes plants et aux fumures animales). Le coût d'installation

des plantations n'a donc pas été pris en compte dans les calculs d'amortissement. A partir de la 4ème année, l'association culturale cesse car les citronniers ne laissent plus assez d'espace aux

fruits de la passion. La complémentarité entre espèces des quatre premières années se transforme en concurrence pour la captation de la lumière, des éléments minéraux, de l'eau, de l'espace...

De par l'itinéraire technique et la quantité de fertilisants épandues, on distingue deux sous-systèmes de culture.

La plantation de citron avec préparation de la saison et utilisation d'intrants chimiques est caractérisée par une opération technique particulière ayant pour but de décaler la

période de production des citronniers. Habituellement productifs tout au long de l'année, cette technique permet de faire débuter la production à une époque souhaitée afin de profiter de prix plus avantageux. Chaque producteur décide de la période de production

qui l'arrange le plus, que ce soit en fonction de son calendrier de travail, de sa trésorerie ou plus généralement des prix que proposent les acheteurs.

31

Pour ce faire, les producteurs récoltent l'intégralité des fruits présents sur les arbres,

provoquent un stress hydrique de quelques semaines (8 semaines maximum) puis lors de la reprise de l'irrigation, ils fertilisent la plantation avec des engrais chimiques. A cette période,

l'irrigation est indispensable, le risque étant de laisser sécher l'arbre. Les producteurs pratiquant cette technique ont une maîtrise certaine de la ressource hydrique. Cette technique est très pratiquée par les producteurs disposant d'une trésorerie suffisante. Les citronniers

produisent tout de même des fruits le reste de l'année mais en moindre quantité.

La plantation de citron sans préparation de la saison est un système ne prévoyant pas de changement d'itinéraire technique tout au long de l'année. Les arbres bénéficient de la

même quantité d'eau au fil des mois et l'usage de fertilisants chimiques est très rare. Dans ce cas, les arbres produisent régulièrement toute l'année et les rendements annuels sont plus faibles que dans le premier système (voir tableau 6).

Dans les deux systèmes, des tailles sont effectuées ainsi qu'un apport annuel de matière organique (fumures animales) au moment de la transplantation puis à n'importe quel moment

de l'année. Les opérations culturales sont présentées dans l'annexe 16. Ces opérations peuvent être réalisées tout au long de l'année. Ici, le semis est réalisé peu avant l'arrivée des pluies de

manière à profiter des précipitations en début de cycle. Le cycle de production du fruit de la passion est détaillé dans la partie suivante.

Graphique 1 : Calendrier de travail (HJ/ha) d'une plantation de citronniers associée au fruit de

la passion en phase d'installation

La mise en place de l'installation du citron seul étant relativement peu contraignant, les producteurs en profitent pour installer les fruits. L'entretien des citronniers en année de

routine et sans phase de préparation ainsi que le calendrier de travail sont données dans les annexes 17 et 18.

La quantité de travail requise est de 310 HJ/ha en moyenne (varie selon le rendement de la plantation). La récolte représente environ 1/3 du travail demandé. Le calendrier de travail spécifique au système présentant une phase de préparation est semblable. Il requiert

néanmoins plus de travail (phase de première récolte, fertilisation et plus grosse récolte). Le travail de récolte est plus concentré sur une période de l'année et les planteurs font face à ce

pic de travail en recrutant des salariés journaliers. En moyenne, la quantité totale de travail représente 400HJ/ha.

0

20

40

60

80

100

HJ/ha Citron HJ/ha Fruit de la passion

Le travail total dû au citron est de 194HJ/ha et celui du fruit de la passion

de 402HJ/ha pour un total de 596HJ/ha. Différencier ces deux quantités de travail est peu pertinent

puisque des tâches sont conduites simultanément pour les deux cultures

(préparation du terrain, semis, irrigation, pulvérisation et fertilisation). de la passion en association.

32

La plantation de fruits de la passion

Le cycle de production du fruit de la passion (Passiflora edulis) peut aller de 12 mois à

18 mois. Le schéma (annexe 19) permet de visualiser le cycle de production du fruit de la passion sur 16 mois. L'ensemble des calculs ont cependant été réalisé pour un cycle d'un an.

Ce cycle se rallonge selon différents facteurs : trésorerie et eau disponible, prix élevé d'achat au producteur, calendrier de travail inoccupé, absence de maladie et ravageurs. Il est donc

peu aisé d'estimer le rendement moyen d'un ha de fruit de la passion (de 25 à 32T/ha maximum). Généralement, les producteurs cultivent deux cycles de fruit de la passion (trois ans) puis changent avec une culture saisonnière (maïs, haricot) pendant un ou deux ans avant

de recommencer un cycle de fruit de la passion.

Graphique 2 : Succession culturale du fruit de la passion

Source : Elaboration propre.

La double campagne annuelle permet en outre une intensification à l'hectare inté ressante (cf tableau 6) qui limite l'écart de revenu généré par la culture fruitière et vivrière. Le nombre

d'année de culture saisonnière dépend des rendements du fruit de la passion et donc de l'état des sols.

Concernant la reproduction de la fertilité, les intrants chimiques sont systématiques et les fumures animales sont rarement utilisées : les producteurs les incorporent plutôt aux arbres fruitiers car comme ils sont moins densément plantés, le travail et la quantité nécessaire est

moindre. La rotation, le travail du sol et le plan de fertilisation suivi par le producteur permettent le renouvellement de la fertilité des sols. Généralement, les vieilles plantations (de

plus de 2 ou 3 ans) sont d'abord brûlées puis incorporées au sol car elles sont vectrices de pathogènes pour les cultures voisines. Le fruit de la passion est une liane, elle nécessite donc un support, lequel représente un des

coûts d'investissement les plus lourds pour la production de fruit de la passion (47% des consommations intermédiaire pour la première année d'installation). Ce coût est néanmoins un

réel investissement puisque ce matériel dure une dizaine d'année. Le fruit de la passion commence à produire au bout du 7ème mois de culture et cet investissement est rapidement amorti.

Le système d'irrigation utilisé en majorité est illustré par le schéma suivant. D'autres systèmes existent (cf annexes 12 et 13).

Cette succession culturale a des intérêts

économiques et agronomiques. La rotation permet d'enrayer le cycle de vie et la

prolifération d'agents pathogènes ou d'adventices. Le haricot, culture légumineuse permet de fixer l'azote de l'air

dans le sol qui profitera à la culture de fruit de la passion, fortement rémunératrice (cf

tableau 6)

33

Figure 2 : Schéma d’une jeune plantation associant fruit de la passion et citronnier

Source : Elaboration propre.

L'organisation du travail et le calendrier ont déjà été détaillés dans l'étude de la plantation de citronniers précédente (cf graphique 1). Ce système de culture (en monoculture) requiert de

420 à 700HJ/ha selon la durée du cycle de production (allant de 12 à 18 mois), la quantité d'intrants chimiques apportés, la réalisation ou non de la pollinisation manuelle (elle permet

d'augmenter le nombre de fruit par plante) et le désherbage (la pulvérisation d'herbicide est bien moins exigeante en travail que le désherbage). Le fruit de la passion requiert plus de travail que le citronnier.

La plantation de manguiers

Ce système de culture du manguier (Mangifera indica, variété créole, Kent, Hass, Haden, Tommy, Atkins) est semblable à celui du citronnier, seule la récolte l'en différencie.

En effet, cet arbre fruitier présente une période de récolte de quatre mois, de décembre de mars précédée de la floraison en Août-Septembre. Le reste de l'année, aucune récolte n'est

possible. Cet arbre commence à produire au bout de 3 ans et sa production augmente progressivement jusqu'à atteindre sa production maximale la 8ème année. Le système d'irrigation est le même que pour le citronnier.

Les opérations culturales de la plantation de manguiers en phase de production sont données dans l'annexe 20. (La phase d'installation étant sensiblement la même que pour le citronnier)

D'après le calendrier de travail de la plantation de manguier (annexe 21), le manguier requiert moins de travail que le citronnier (248HJ/ha). La part de la récolte et de la post-récolte

représente 50% du travail total, suivi par la taille.

Les plantations associées

Ce système de culture, qui compte autant de sous-systèmes qu'il y a de cultures

fruitières et saisonnières, est régulièrement pratiqué par les producteurs souhaitant diversifier ses sources de revenu, alimenter un bétail ou avoir un calendrier de travail moins chargé. Le

semis des cultures saisonnières au sein des plantations est généralement peu régulier. Le nombre de combinaisons des différentes cultures mises en association étant très élevé, nous proposons l'étude d'un calendrier de culture couramment pratiqué. Celui-ci est composé de

fruits de la passion, de maïs et de manioc associés sur la même parcelle. Les lignes de ma ïs alternent avec celles des fruits de la passion et le manioc est semé au bord des sillons ou entre

les maïs, plus ou moins régulièrement, dans l'ensemble de la parcelle. Dans cet exemple, le producteur ne réalise qu'une campagne de maïs pour des raisons pratiques (les plantes âgées de 6 mois gênent le semis d'une seconde campagne de maïs).

34

Graphique 3 : Calendrier de culture d'une plantation associée à des cultures saisonnières

Source : Elaboration propre.

La quantité de travail totale est de 322 HJ/ha. Les travaux communs (irrigation, application d'intrants, désherbage) sont imputés au fruit de la passion bien qu'ils soient réalisés pour l'ensemble des cultures. Seuls les semis et récolte apparaissent spécifiques aux cultures

saisonnières. Le calendrier de travail est bien plus léger que pour les systèmes précédents. En effet, après récolte du maïs, l'entretien de la plantation est réduit de moitié en comparaison à

une plantation en monoculture. Performances économiques des systèmes de culture

Les performances économiques de ces quatre systèmes de culture sont présentées dans

le tableau suivant.

Tableau 6 : Performances économiques des systèmes de culture

Système de culture

Densité

moyenne de

semis

Rendement

moyen

(T/ha)

VAB/ha VAB/HJ VAB/capital

Plantation en

monoculture

Plantation de citronniers avec

préparation de la saison et système d'irrigation gravitaire

150 pieds/ha

22 T/ha 18 126 39,2 6,2

Plantation de citronniers sans

préparation de la saison et système d'irrigation gravitaire

15 T/ha 7 586 77,8 15,0

Plantation de fruit de la passion par système

d'irrigation gravitaire 1000 pieds/ha 27 à 30 T/ha 27 288 42,6 5,6

0

10

20

30

40

50

60

HJ/ha Manioc

HJ/ha Maïs

HJ/ha Fruit de la passion

35

Plantation de manguiers avec intrants chimiques

250 pieds/ha

18 T/ha 6 045 34,9 2,9

Plantation de manguiers sans

intrant chimique 10 T/ha 2 328 11,5 3,8

Plantation

associée

Plantation de fruit de la

passion + maïs + manioc 500 pieds/ha de fruits de la

passion

- 12 494 38,8 2,0

Plantation de fruit de la

passion + maïs + haricot - 12 434 38,3 1,9

Plantation de citronniers + manguiers + manioc + lentille

100 pieds/ha d'arbres fruitiers

- 11 940 40,9 4,8

Système

vivrier

Maïs 50kg/ha 6,5T/ha 3031 50 1,1

Haricot (dépend des variétés) 60kg/ha 1,5T/ha 3860 81 5.7

Maïs/Haricot - - 8512 77 6.2

Maïs/Maïs - - 7001 47 2,0

Source : Données d'enquêtes 2013, en vert, les performances min imales, en orange, les performances maximales.

Concernant les cultures vivrières, le système de culture de l'haricot est plus intensif en travail et en capital que celui du maïs. Cette différence de résultat s'explique essentiellement

par les prix du haricot, plus favorable à ceux du maïs. La culture du haricot requiert moins d'intrants chimiques et moins de travail (cycle de production plus court). Toutefois, les surfaces cultivées en maïs restent bien supérieures à celles destinées au haricot et les choix

des producteurs, lorsqu'ils ont de l'eau, s'orientent en priorité vers le maïs. Comme nous l'avons évoqué précédemment, le haricot constitue un risque important pour le producteur qui

préfère sécuriser sa production et ses revenus par le maïs. La double campagne annuelle permet une intensification importante à l'hectare ce qui explique la préférence des agriculteurs pour ces choix culturaux.

En année sèche, les différences de résultats entre cultures restent les mêmes. Cependant, les chiffres augmentent tous d'environ 25% de par l'augmentation généralisée des prix (dans la

région d'Olmos, l'offre baisse considérablement en année sèche entrainant une hausse des prix du maïs et du haricot) et la moindre utilisation des produits phytosanitaires et désherbages (faible présence d'adventices et de pathogène en période de sécheresse).

Les fruitiers sont des systèmes plus rémunérateurs à l'hectare que les systèmes vivriers sauf pour la mangue, dont le prix est en chute libre. Les systèmes vivriers sont intensifs en travail

et en capital notamment les systèmes de double campagne avec l'haricot. La plantation de citronniers sans préparation est plus intensive en travail et en capital

que la plantation avec préparation car les producteurs ne pratiquant pas de préparation ont un calendrier de travail bien moins chargé et des coûts de production inférieurs (pas de première

récolte, pas d'application d'intrants, récolte moins importante). La grande rémunération du travail de la plantation sans préparation explique que beaucoup de producteurs rencontrés pratiquent ce système. La différence de rendement obtenus avec les deux itinéraires

techniques est importante (augmentation de 32%) et explique l'écart important de rémunération à l'hectare des deux systèmes.

36

L'unité de surface du fruit de la passion est plus rémunératrice que le citronnier avec

préparation car cette année les prix sont plus favorables à cette culture. Cette observation est confirmée par le grand nombre de producteurs se lançant à nouveau dans la production de

fruit de la passion. L'évolution des prix au cours de l'année pour le fruit de la passion et le citron est donnée dans les annexes 22 et 23. La rémunération du travail est également légèrement supérieure mais ce chiffre peut diminuer sensiblement dans le cas d'un producteur

n'effectuant pas la pollinisation des fleurs. La rémunération du capital est quasiment identique à celle du citronnier avec préparation car les intrants chimiques sont utilisés dans les deux cas.

La plantation de manguiers est actuellement peu rémunératrice quel que soit le facteur de production du fait de la chute des prix. Les producteurs utilisant encore des intrants

chimiques sont ceux possédant des débouchés commerciaux certains. Au début des années 2000, ce système était bien plus rémunérateur car les prix étaient très attractifs. (égal ou

supérieur à la rémunération du fruit de la passion aujourd'hui). La majorité des producteurs n'entretiennent plus leur plantation, irriguant seulement ponctuellement afin de ne pas laisser mourir les arbres, ce qui explique les performances économiques très faible de ce système.

La rémunération d'un système associé est inférieure à celle d'une plantation en

monoculture lorsqu'il est fait usage de produits chimique : le maïs, le manioc, le haricot et la lentille sont moins rentables que le fruit de la passion ou le citronnier en monoculture. En revanche, elle est supérieure à la rémunération des systèmes non-préparés ou des plantations

de manguiers. Cette observation est intéressante car dans la réalité, lorsque la plantation n'est pas préparée (pas de fertilisants notamment), la grande majorité des producteurs sèment

d'autres cultures saisonnières en association avec leurs fruitiers. Concernant le travail, il est globalement autant rémunéré que les plantations en monoculture. Le capital est relativement moins bien rémunéré car les fruitiers sont plus intensifs en capital que les cultures vivrières.

Les résultats obtenus mettent en évidence une grande diversité de systèmes de culture

et d'élevage. Les agriculteurs réalisent une combinaison des différents systèmes de culture et d'élevage au sein d'une exploitation, "combinaison décidée au niveau de la famille en fonction des parcelles accessibles et de leurs localisations, compte tenu du matériel disponible, de la

force de travail familiale ou mobilisable moyennant rémunération, des opportunités de crédit et de vente sur les marchés." (N. Ferraton et al., 2003).

b) Des systèmes inscrits à l'échelle locale : faire face à la sécheresse

D'après le CNRTL (Centre National des Ressources Textuelles et Lexicales), l'échelle locale se dit d'un lieu limité dans l'espace que l'on oppose généralement à un ensemble plus

vaste. Les systèmes de production locaux que l'on se propose d'analyser sont inscrits dans un système de réseaux demeurant à proximité de l'espace de production et de résidence du système considéré. Bien qu'ayant évolué au cours de l'histoire, ces systèmes sont antérieurs

aux années 2000 et ont été peu modifiés par l'arrivée des entreprises.

Limités par une contrainte commune, l'accès à l'eau, ils apparaissent fortement dépendants de la présence d'eau superficielle dans le lit des fleuves. Pour l'irrigation des parcelles et la consommation animale, ces producteurs doivent adapter leurs systèmes en

fonction du régime pluviométrique annuel. Ainsi, pour l'étude de cet ensemble de systèmes, il est nécessaire de considérer deux cas de figure : l'année pluvieuse (AP) et l'année sèche (AS).

37

L'éleveur salarié

Qu'ils soient comuneros ou migrants, ces exploitants se consacrent à l'élevage sur les

terres communales et au salariat agricole. Ils n'ont pas d'accès à la ressource foncière irriguée. Bien que l'insuffisance de trésorerie soit la contrainte principale, d'autres raisons apparaissent : le calendrier de travail ne permet pas d'entretenir une parcelle, le manque de terres irrigables

accessibles ou leur éloignement géographique ou encore le coût lié à l'irrigation de la parcelle (puits, moteur, pompe). En effet, peu de terres irrigables par canaux sont encore disponibles

dans les vallées à proximité d'Olmos. Les terres disponibles requièrent la construction d'un puits, investissement en capital ou en travail, qu'il n'est pas possible de financer par ces systèmes.

Les migrations concernées par une partie de ces éleveurs datent de plusieurs décennies et

auraient débuté dans les années 1960 comme en témoigne la présence de familles de migrants de deux générations. Les migrations se seraient intensifiées récemment car la plupart des personnes enquêtées ont migré il y a environ cinq ans. Le manque de terres disponibles pour

l'agriculture dans la région d'origine serait une des principales raisons de migration de ces populations. Généralement, un jeune couple migre, laissant le reste de la famille dans la

région d'origine. Au regard de la grande quantité de terre de pâturage potentiellement disponible en année pluvieuse, Olmos représente un grand intérêt pour ces éleveurs.

La principale source de revenu repose sur le travail salarié dans les champs des producteurs ou des entrepreneurs agricoles. Dans l'unité de production considérée, constituée

de deux grands-parents, de deux parents et de cinq enfants, les deux parents travaillent en tant que salariés agricoles toute l'année (lorsque l'offre de travail le permet). Les enfants majeurs n'étant pas mariés le sont également. Un des grands-parents s'occupe des enfants tandis que

l'autre est ouvrier agricole si sa santé le permet encore. La plupart du temps, ces actifs recherchent un travail au sein des grandes exploitations. Le travail y est plus stable car les

employeurs utilisent la main d'œuvre extérieure pour l'intégralité des travaux agricoles. De plus, ces entreprises agricoles, soumises aux lois du travail en vigueur, sont obligés de respecter le salaire minimum journalier (25soles/jour soit 7.3€/jour). Ceux-ci sont donc mieux

payés et ne souffrent généralement pas de retard de paiement, contrairement à certains petits producteurs qui ne peuvent rémunérer leur personnel qu'au moment de la vente de la récolte.

La source de revenu complémentaire réside dans la vente de tête de bétail. Cette catégorie d'éleveurs possède un effectif limité de caprins, entre 5 et 20 chèvres, effectif pouvant doubler d'une année sur l'autre, en présence de pluies. L'accès au parcours n'est pas limité, les éleveurs

devant cependant respecter les parcelles cultivées ou ayant été cultivées par les producteurs comuneros. Les chèvres sont préférées aux moutons ou aux vaches car elles sont plus

résistantes au manque d'eau et de nourriture. La taille du cheptel dépend de la présence de pâturage comme expliqué dans la partie

précédente. Elle est également déterminé par la date d'arrivée de l'éleveur : une famille arrivée depuis plus de dix ans a eu le temps de capitaliser, c'est-à-dire d'augmenter progressivement la

taille du troupeau. Une famille arrivée depuis un an doit faire face à de grosses dépenses notamment pour l'achat de la parcelle habitable et pour la construction de la maison. Les besoins de premières nécessités sont privilégiés à l'investissement que nécessite la croissance

du troupeau (alimentation, soin). La vente du bétail est une décision prise par les deux membres de la famille et l'homme se

charge de trouver acheteur et si besoin de transporter la bête vivante (à pied, en mototaxi ou en transport collectif).

38

Pour une unité de production constituée de deux actifs familiaux travaillant comme ouvriers

agricoles et possédant un troupeau de 20 chèvres, les performances économiques du système sont données ci-dessous. Le seuil de survie est fixé à 2872 soles par an et par actif (environ

760€) (cf annexe 24).

Tableau 7 : Performances économiques du type Eleveur salarié

Eleveur salarié

Capital bétail Vente bétail RAF Salaire

ouvrier

Revenu total

par actif

AS AP AS AP AS AP AS AP AS AP

1 440 4 000 800 1125 860 1 365 860 1 365 5 360 8 115

Source : Elaboration propre.

L'effectif du troupeau diminue en année sèche car bien que la paille de maïs permette la survie du troupeau, elle est peu nutritive et l'éleveur a dû vendre 8 chèvres. Le capital en année

sèche est d'autant plus faible que les prix diminuent. On considère qu'un ouvrier agricole travaille 30 semaines en année de sécheresse (5 jours de

travail/semaine sur 7,5 mois) et 45 semaines en année pluvieuse (11 mois). En effet, la quantité de travail disponible en année pluvieuse est plus élevée : les surfaces semées sont plus importantes, les désherbages et applications de produits phytosanitaires plus fréquents du

fait de la croissance des adventices et de la présence de maladies et ravageurs. En année sèche, le travail n'est pas disponible est limité par la diminution des surfaces cultivées par les

petits et moyens producteurs. Les entreprises ne suffisent pas à absorber toute la main d'œuvre. La vente du bétail ne représente que 10% du revenu total de l'éleveur en année sèche et en année pluvieuse. Ce système repose donc largement sur le revenu de l'ouvrier agricole.

Cet élevage est encore trop petit et trop dépendant de la présence des pâturages pour générer un revenu stable et significatif. De plus, même en année pluvieuse, la part du revenu issue de

la vente de bétail n'augmente pas : le système est bien en phase d'accumulation, l'éleveur ne vend pas beaucoup de têtes de bétail, de manière à augmenter l'effectif du troupeau.

Comme le montre le tableau précédent, l'objectif de ces éleveurs est d'accumuler un maximum de capital sur pied. Grâce à la vente d'un nombre important de tête et à

l'accumulation d'un revenu issu du travail agricole, ce type d'éleveur évolue généralement vers des systèmes de production plus diversifiés. Il peut par exemple acheter une parcelle et se lancer dans la production vivrière. Toutefois, l'agriculture présente une limite importante : elle

dépend elle-aussi de la présence des pluies, tout comme l'élevage. L'autre contrainte non-négligeable que rencontrent ces éleveurs est l'accès au crédit : ne disposant pas de titre de

propriété, ils sont exclus des projets agricoles actuels et ne peuvent pas avoir accès au crédit car n'ont pas de biens à hypothéquer. L'autre stratégie est de se dédier à une activité extra-agricole, indépendante des précipitations

(commerce, artisanat, transport), choix généralement plus fréquent chez ce type d'éleveur, car il est moins contraignant (pas d'accès au foncier requis) et nécessite généralement moins

d'investissement.

39

L'éleveur pluriactif extra-agricole

Migrants ou comuneros, ces agriculteurs fondent leur système de production sur

diverses sources de revenu, agricole et non-agricole. L'élevage constitue toujours le capital essentiel du système mais d'autres activités participent à sa reproduction. Le cheptel est plus important que le type précédent et ne concerne pas uniquement les caprins. L'effectif se situe

entre 60 et 100 chèvres ou une vingtaine de bovins. La taille des troupeaux dépend également du régime pluviométrique bien que la décapitalisation en année sèche soit moins importante

que pour le premier type. En effet, les revenus complémentaires, agricoles ou extra-agricoles, permettent une meilleure alimentation du troupeau en année sèche : les bêtes maigrissent moins, les pertes animales sont moindres et le système permet d'entretenir un troupeau plus

important d'une année sur l'autre. Ces éleveurs, à l'instar des exploitants du type précédent, n'ont pas de terres mais compensent

ce manque par les revenus issus d'autres activités complémentaires. Le système d'élevage de ces exploitants pluriactifs est ainsi moins dépendant des précipitations grâce à la réalisation d'activité n'ayant pas de lien avec le régime pluviométrique.

Généralement, ces éleveurs se consacrent à des activités de commerce, de transport ou d'artisanat : commerce d'animaux d'élevage, petite épicerie, stand au marché, commerce

ambulant, mototaxi, charpentier, maçon… Les femmes s'occupent surtout du troupeau et du petit commerce. Les hommes et les jeunes à l'artisanat, au commerce de bêtes ou au transport en mototaxi dans la ville d'Olmos. Il n'est pas exclu qu'un autre membre de la famille en âge

de travailler soit ouvrier agricole.

Les stratégies quant à la conduite du troupeau sont les mêmes que précédemment bien que les dépenses liées à l'alimentation soient plus importantes pour les éleveurs ne cultivant pas de terre. La majorité des animaux (vivants ou carcasses) est vendue sur le marché local d'Olmos

grâce à la présence d'un abattoir à Motupe à 20km d'Olmos. Des grossistes d'Olmos généralement éleveurs eux-mêmes se chargent d'acheter les bêtes et de les vendre aux

boucheries du marché local. Le commerce de la viande dépend d'un réseau local, peu influencé par les autres échelles de flux nationales et internationales. Ce marché, bien que très localisé, souffre de variations de prix assez importantes selon les années pluvieuses ou

sèches: lorsqu'en année sèche, la plupart des éleveurs décapitalisent pour assurer la reproduction de leur système, l'offre abonde sur le marché et le prix de la viande chute. Cette

baisse importante des prix est également due à la maigreur des animaux en absence de pâturages. Le contraire est vrai en année pluvieuse car les producteurs tâchent d'augmenter les effectifs au maximum et peu d'éleveurs vendent leurs bêtes, excepté les jeunes mâles

engraissés. Les bêtes, d'autre part mieux nourries, se vendent à meilleur prix. Certains éleveurs peuvent aller vendre leurs bêtes jusqu'à Chiclayo pour bénéficier de prix plus élevés.

Généralement, ils utilisent des réseaux privés (un frère commerçant à Chiclayo se charge de la vente de la viande, par exemple).

Dans le tableau ci-dessous figurent les performances économiques de l'éleveur pluriactif. Le capital du bétail (nombre de têtes de bétail multiplié par sa valeur en soles)

varie selon sa nature : les éleveurs de bovins ont un capital plus élevé que les éleveurs de caprins ou d'ovins. Cependant, cet écart disparait lors du calcul du revenu agricole familial car le gros bétail se vend moins fréquemment que le petit.

40

Tableau 8 : Performances économiques du type Eleveur pluriactif

Eleveur pluriactifs

Capital bétail Vente bétail RAF Revenu total/actif

AS AP AS AP AS AP AS AP

11 285 33 150 2 615 7 990 1 193 8560 6 332 11 911

Source : Elaboration propre.

Le revenu total est le RAF auquel sont ajoutés les bénéfices liés aux activités extra-agricoles dont les estimations sont présentées dans l'annexe 25. Les écarts des témoignages concernant

ces revenus étant assez conséquents, ils servent surtout d'ordre de grandeur pour comparer les types entre eux. Ces activités extra-agricoles sont combinées dans un même système de

production. Ce type est largement dépendant du revenu des activités extra-agricoles puisqu'en moyenne, il

représente 86% en année sèche. Son importance diminue en année pluvieuse pour atteindre environ 50% du revenu total : l'activité d'élevage est plus rémunératrice (augmentation du

nombre de têtes de bétail, meilleurs prix). La stratégie de ce type réside dans la diversification des sources de revenus. L'élevage étant une activité tributaire du régime pluviométrique, les éleveurs sont contraints de compenser la

décapitalisation importante durant les années de sécheresse par d'autres activités indépendantes des pluies (le RAF en année sèche correspond à 14% du RAF en année

pluvieuse). Cela explique également que peu d'éleveurs de ce type font le choix d'investir dans la culture car celle-ci dépend également du régime pluviométrique. Ils se tournent plutôt vers des secteurs autonomes face aux précipitations de manière à sécuriser leurs revenus en

année sèche. Outre la nécessité de ne plus dépendre des pluies, ces métiers sont moins éprouvant que le travail d'ouvrier (ils conviennent mieux aux personnes âgées, aux femmes

enceintes ou ayant des enfants en bas âge) et sont plus gratifiants. Nécessitant de faibles investissements et peu risqué, l'élevage reste néanmoins un capital sur pied indispensable à la reproduction du système.

Le producteur vivrier

Alors que les deux premiers systèmes présentés ci-dessus se basaient essentiellement sur l'élevage ou l'activité extra-agricole, ce système réserve une place indispensable à la

culture de maïs et de haricot, cultures dont les cycles de production n'excèdent pas six mois.

Le propriétaire

Ces producteurs adaptent les surfaces cultivées à l'intensité des précipitations. La taille

de ces exploitations varie de 1 à 5ha. Cultivant en moyenne 3ha en année pluvieuse, cette surface diminue jusqu'à 1ha en année sèche. Les surfaces cultivées en année sèche

augmentent d'environ 60% en année pluvieuse. Cette catégorie de producteurs possède toujours un puits pour l'usage domestique et animal. Selon sa profondeur et son équipement (motopompe), ils l'utilisent également pour l'irrigation

des parcelles. Cependant, bien qu'ils possèdent un accès à l'eau souterraine, les surfaces cultivées demeurent proportionnelles à l'apport pluviométrique pour plusieurs raisons : le

puits n'étant pas assez profond ou la pompe pas assez performante, sa capacité hydrique est limitée et, en l'absence d'un apport complémentaire assuré par l'eau superficielle (pluies et

41

fleuve), le puits ne peut irriguer qu'une partie de la parcelle ; d'autre part, pour extraire l'eau

du puits et la mener jusqu'au champs, les dépenses en combustible afin d'alimenter le moteur sont très lourdes. Enfin, certains agriculteurs ayant un accès à l'eau très limité sont contraints

de payer l'eau à d'autres producteurs, propriétaires de puits. Ce coût est généralement comparable au prix du carburant ou légèrement supérieur dans certains cas. Les producteurs, très souvent limités par cette dépense, adaptent les surfaces irriguées en fonction de ces

dépenses. L'eau, à travers sa simple présence ou son coût (achat direct, combustible), semble être le principal facteur limitant l'activité agricole.

Ces producteurs utilisent en priorité la main d'œuvre familiale bien qu'ils aient parfois recours à la main d'œuvre extérieure lors des pics de travail (désherbage et récolte). On compte 2 à 4

actifs familiaux. Dans le schéma (annexe 26) sont représentées les relations de parenté entre personnes d'une même famille et les unités de résidence, consommation et production qui en

résultent. Ce schéma est n'est qu'une proposition, une multitude d'autres combinaisons existe dans la réalité.

L'unité de production est centrée sur les hommes de la famille (grand-père, père, frère) bien que l'épouse et le fils puissent aider à quelques tâches lorsque leur calendrier de travail le leur

permet. Le fils aide généralement le week-end et la femme lors des pics de travail. Les pointillés indiquent que les jeunes mariés bénéficient de l'aide de la famille si nécessaire (sous forme de partage de nourriture ou de force de travail). Ils forment cependant un ménage

indépendant, cultivant ses propres parcelles. Les autres membres de la famille peuvent travailler dans d'autres secteurs, à Olmos ou à Chiclayo ou encore être agriculteur dans une

autre zone d'Olmos. Ainsi, ils ne partagent plus les mêmes unités de consommation et de résidence. Cette représentation des différentes unités constitutives du ménage est aussi valable pour les petites exploitations de producteurs vivriers ou de planteurs ne dép assant pas 7ha.

Au-delà, l'activité de production est généralement spécifique à un seul actif familial.

Outre le système de culture présenté ci-dessus, ces exploitants sont propriétaires d'un petit élevage pouvant aller de cinq à une trentaine de têtes (ces chiffres dépendent encore une fois de la quantité de pâturages disponibles). Le bétail est constitué en majorité de caprins et

d'ovins avec quelques vaches et cochons. Certains possèdent également leur propre cheval de labour et proposent ses services aux producteurs voisins. Le capital sur pied correspond en

moyenne à 3200 soles en année sèche et à 11 000 soles en année pluvieuse. Bien qu'elle ne figure pas dans le tableau suivant9, la vente de bétail permet aux producteurs de compenser les périodes de sécheresse lorsqu'ils ne peuvent semer qu'une partie de leur terre. L’association

agriculture/élevage est forte pour ce système de production, tant pour des aspects agronomiques qu'économiques.

Des arbres fruitiers et un jardin de case pour l'autoconsommation sont généralement présents à proximité des habitations (agrumes, manguiers, avocatiers, bananier, papayer, lentilles,

manioc,…). Ces actifs travaillent également en temps qu'ouvrier agricole lorsque leur propre calendrier de

travail le permet (période de sécheresse) et dans les transports (mototaxi). Ils possèdent un puits noria (équipé d'une motopompe ou non), un enclos pour l'élevage, des outils de travail du champ (pelle, machette, hache, râteau, charrue et équipement du cheval, pulvérisateur

manuel) et parfois un moyen de transport (mototaxi ou triporteur motorisé). Ils stockent leurs récoltes chez eux ou dans des greniers.

9 Nous n'avons pas chiffrer la vente de bétail car elles sont très irrégulières et dépendent des revenus issus des

cultures. Estimer le capital que représente le bétail parait plus adapté.

42

Dans le tableau suivant sont présentées les performances économiques de ce système.

Tableau 9 : Performances économiques du système Producteur vivrier propriétaire

VAN RAF

Revenu extra agricole Revenu total RA/actif

Année sèche 7446 6 146 10 660 16 571 9 070

Année pluvieuse 21986 19 136 7 258 24 293 13 357

Source : Elaboration propre.

Les activités extra-agricoles constituent là encore une grande part de leur revenu (64% du RAF total) en année sèche lorsque les conditions culturales ne sont pas favorables et permet

au système de décapitaliser le moins possible. Celles-ci se substituent au revenu agricole en année sèche. Sa durabilité dépend donc des activités extra-agricoles (salariat majoritaire, mototaxi) et du capital que représente le bétail. En année pluvieuse, la place du système de

culture devient primordiale (70% du RAF total). La complémentarité élevage/culture est forte pour ce système de production, tant pour des

aspects agronomiques qu'économiques. Mais il est difficile d'estimer les bénéfices liés à l'activité d'élevage car les ventes sont rares et irrégulières : l'objectif du système étant de ne pas décapitaliser pour profiter des prix hauts en période de sécheresse. En effet, avec les

cultures (pailles de maïs et trésorerie), le bétail est mieux nourri et vendu à meilleur prix.

Ce système de production vivrier peut évoluer vers un système de petit planteur fruitier lorsqu'il accumule suffisamment de capital pour investir dans la culture fruitière. Cette accumulation de capital peut survenir au terme de plusieurs années pluvieuses et/ou lorsque

les actifs ont multiplié les entrées d'argent (travaux extra-agricoles complémentaires, vente de tête de bétail). Les cultures fruitières vers lesquelles se tournent ces producteurs sont majoritairement le citron et le fruit de la passion. Comportant cependant plus de risques que

les cultures vivrières (variations des prix, coût d'investissement initial et de production plus élevés), les producteurs faiblement dotés en facteurs de production préfèrent la sécurité que

représente la production vivrière. Le locataire

Comme vu précédemment, certains producteurs (comuneros ou étrangers) n'ont pas un

accès direct à la ressource foncière et doivent louer une ou plusieurs parcelles pour exercer leur activité agricole. Le système de culture pratiqué est comparable au type précédent. Il est néanmo ins très

intéressant pour le locataire d'avoir accès à une parcelle bénéficiant d'un accès à l'eau permanent de manière à réaliser deux campagnes par an (maïs/maïs ou maïs/haricot), le but

étant de rentabilité le coût de la location au maximum. Le coût de l'eau varie selon le mode d'accès. Le producteur peut avoir accès à l'eau de surface, il peut payer l'eau d'un puits voisin ou encore utiliser son propre moteur sur le puits appartenant au propriétaire de la parcelle

(coût du carburant, outre l'investissement initial). Ces producteurs utilisent très rarement la main d'œuvre extérieure de manière à limiter les coûts de production déjà supérieurs de par le

prix de la location (environ 500soles/campagne/ha, une campagne équivalent à 6 mois de l'année). Les caractéristiques de ce type sont semblables à celles du type Propriétaire (élevage, activité

extra-agricole, outillage, jardin de case).

43

Les performances économiques de ce système de production sont légèrement inférieures à

celle du type précédent de par la dépense supplémentaire de la location. Toutefois, l'écart de revenu entre l'année sèche et l'année pluvieuse diminue pour ce type : en louant une parcelle

dotée d'eau, il réalise plus souvent une double campagne annuelle. La stratégie du locataire est la même que celle du propriétaire : lorsqu'il ne peut faire qu'une campagne, le producteur compense par l'activité de salariat. Dans ce cas, ses revenus sont un peu plus faibles que celui

du propriétaire car le coût de la location n'est pas amorti.

Doté d'une trésorerie modeste, ce type de locataire n'investit pas dans une autre culture que le maïs ou le haricot. Il ne peut pas se lancer dans la production fruitière tant que son capital d'investissement ne le lui permet pas. Toutefois, comme pour le producteur propriétaire, en

situation de transition, c'est vers la production fruitière saisonnière que son système de production évolue généralement. Un locataire ne pouvant pas investir dans la culture pérenne,

le fruit de la passion en culture pure est privilégié (cycle de production inférieur à deux ans). L'ensemble des ces systèmes de production met en œuvre des réseaux de production et

de commercialisation demeurant dans la proximité de la ville d'Olmos. Le maïs et le haricot, bien que vendues à l'échelle nationale, sont produites, stockées et vendues à Olmos par des

grossistes exerçant leurs activités dans la ville même. De plus, les activités extra-agricoles pratiquées par les producteurs sont localisées dans la ville d'Olmos. Bien que la plupart des denrées alimentaires voient le prix varier selon le marché de Lima (car il correspond au plus

gros marché de consommation du pays), les prix des produits vivriers varient également selon le régime pluviométrique : en année sèche, les prix montent et ils chutent en année pluvieuse.

Ils varient donc aussi avec l'offre locale. Ces systèmes de production s'inscrivent donc dans des espaces et réseaux essentiellement locaux, influencés par les dynamiques régionales ou nationales mais très peu par les dynamiques internationales..

c) Des systèmes inscrits à l'échelle nationale : la contrainte du marché

Les systèmes de production suivants sont apparus dans les années 1950, importés par les planteurs originaires de Piura. Aujourd'hui répandus parmi une majorité de producteurs,

qu'ils soient comuneros ou non-comuneros, ces systèmes de production ne mettent plus seulement en jeu les cultures de maïs et de haricot mais dépendent essentiellement des

plantations fruitières telles que le fruit de la passion, le citron et la mangue. Pour ces systèmes, la contrainte de l'eau, bien que toujours présente, n'est plus le facteur limitant. Les stratégies des producteurs quant à leurs choix culturaux dépendent plus largement des

variations des prix du marché. Ces systèmes, inscrits à l'échelle nationale, interagissent avec des réseaux de commercialisation plus complexes et tournés vers la capitale du pays, Lima.

Le petit planteur fruitier

Les origines de ce système de production sont multiples : les petits planteurs fruitiers peuvent hériter de ce même système de production, celui de leurs parents déjà planteurs et le

devenir à leur tour. Ils cultivent la même terre ou une parcelle cédée par la Communauté paysanne ou encore achetées à un propriétaire. Certains producteurs, auparavant producteurs de maïs, le sont devenus. En accumulant du capital, ils ont pu faire évoluer leur système vers

des systèmes plus rémunérateurs composés de cultures fruitières. Cette accumulation du capital provient généralement d'une vente importante de bétail et sert à investir dans

l'équipement du puits et dans les coûts de production du fruit de la passion ou du citron. Certains producteurs ne pouvant pas fournir les facteurs de production nécessaires (terre et

44

capital) optent pour une seconde alternative : le fermage ou l'association. La majorité des

planteurs fruitiers, propriétaires, locataires ou associés, se situent dans la vallée Cascajal et de Racali ou à proximité de la ville d'Olmos, le long de la Panaméricaine.

Le propriétaire

Le petit planteur propriétaire possède 2 à 10ha au total réparti entre culture fruitière, maïs et haricot. Dans cette catégorie de producteurs, la fourchette des surfaces cultivées est

relativement importante et induit une forte différenciation de revenu. Outre un accès au foncier inégal, la part des cultures fruitières par rapport aux cultures de maïs et d'haricot marque aussi cette distinction. Ces planteurs possèdent en moyenne 2ha de fruit de la passion,

1ha de citronniers et 1ha consacré à la culture de maïs et de harico t. La contrainte principale des plantations est le besoin d'irrigation permanent. Seuls les

agriculteurs possédant un puits performant (assez profond et doté d'une motopompe) peuvent garantir une irrigation pendant tous les mois de l'année. Bénéficiant d'un double accès à l'eau, superficiel (assuré par la Junta de usuarios) et souterrain (puits), ces producteurs sont plutôt

limités par leur trésorerie ou le foncier. En effet, ce système de production requiert des investissements conséquents, tant pour l'installation des plantations que pour leurs entretiens.

De plus, il exige une immobilisation du foncier sur plus de 15 ans pour les arbres fruitiers. Il n'est pas rare que ces planteurs propriétaires louent quelques hectares supplémentaires pour cultiver fruit de la passion ou maïs (1 à 3ha en moyenne).

La main d'œuvre familiale est utilisée au maximum mais il est cependant toujours nécessaire

d'employer de la force de travail extérieure lors des pics de travail (installation des plantations, désherbage, récolte). L'unité de production est constituée de 1 à 4 personnes (le schéma de parenté précédent est valable pour ce cas présent). Certains pères de famille

s'occupent seuls de la plantation en complétant le calendrier de travail avec des travailleurs salariés ; d'autres sont suffisamment nombreux pour n'avoir besoin de main d'œuvre

extérieure que ponctuellement. L'utilisation d'intrants chimiques pour le maïs, le haricot et surtout le fruit de la passion est systématique ; pour le citronnier, des fumures organiques sont épandues au moins une fois par

an mais les engrais chimiques ne sont pas toujours employés. Ils possèdent un bétail moyen constitué d'une vingtaine de têtes (toutes espèces confondues)

et sont dotés du même outillage que le type précédent avec certains équipements supplémentaires : motopompe, poteaux et fil pour l'installation du fruit de la passion. Ils possèdent généralement un véhicule motorisé (moto ou mototaxi).

Selon le calendrier de travail que représente ce système de production (annexe 27), la totalité

du travail est de 1543HJ/an, le mois de Novembre étant le plus chargé (216HJ). Ce système est réalisé par une unité de production de 3 actifs familiaux. Une telle unité dispose de 936HJ/an ce qui est loin d'être suffisant pour réaliser l'ensemble des travaux.

Ce système de production implique un apport de 607HJ supplémentaires, soit un coût de 15 175 soles. Ce système est largement dépendant de main d'œuvre salariée (généralement les

éleveurs décrits dans les systèmes précédents et en moindre mesure les producteurs vivriers). Lorsque la trésorerie est limitée, les planteurs adaptent les surfaces en fonction de leur force de travail familiale disponible.

45

Tableau 10 : Performances économiques moyennes du Petit planteur propriétaire

VAN RAF/actif Système de production correspondant

Minimum 14 521 10 920 2ha de citronniers + manguiers, 1 actif

Maximum 67 465 48 431 4ha fruit de la passion dont 2 avec

citronniers associés + 1ha maïs, 3 actifs

Moyenne 55 959 28 539

Le revenu agricole minimum correspond au producteur le moins bien doté en facteurs de production terre, travail et capital. Le revenu agricole maximum correspond à un système de

production constitué de 5ha cultivés. Dans les deux cas, l'usage de main d'œuvre extérieure est nécessaire. Les producteurs ayant de petites plantations et dont la place des cultures saisonnières est importante ont un recours moindre à la main d'œuvre extérieure (30%

environ). Les planteurs dont le système de production dépend essentiellement des plantations fruitières emploient plus de main d'œuvre extérieure : 71% du coût total de production

représente la main d'œuvre et 29% les consommations intermédiaires. Les revenus agricoles qui composent ce type sont caractérisés par un écart-type assez élevé : les revenus varient beaucoup selon la dotation en terre et le choix cultural. En effet, les planteurs possédant

autrefois des manguiers avaient des revenus bien plus élevés et supérieurs aux systèmes constitués uniquement de citron ou de fruit de la passion. Aujourd'hui, c'est cette dernière qui

est la culture la plus rémunératrice par unité de surface (cf tableau 6). Ces petits planteurs ont une stratégie de marché prêtant grande attention à l'évolution

des prix du citron, du fruit de la passion et de la mangue car la situation peut très vite évoluer causant la faillite de beaucoup de producteurs. Toutefois, la prise de risque est généralement

compensée par la combinaison de plusieurs systèmes de culture, fruitiers et saisonniers ainsi que par l'association culturale. De plus, le citron et le manguier sont des arbres fruitiers relativement résistants à la sécheresse et en période de déficit hydrique critique, les

producteurs peuvent cesser d'irriguer sans que l'arbre ne meure. Le citron et le fruit de la passion sont également d'un grand avantage pour la trésorerie du planteur : la période de récolte s'étalant sur toute l'année, les revenus issus de la vente des

fruits sont continus au fil des mois. Généralement, ces planteurs ont également des productions saisonnières, en culture pure ou en association, de manière à compléter les

revenus, une à deux fois par an, en milieu et/ou fin d'année (juin-juillet et octobre-décembre selon la culture considérée). Ces entrées d'argent ponctuelles et plus importantes permettent de faire face aux dépenses causées par les cultures fruitières, plus coûteuses en intrants et en

main d'œuvre, notamment. Il n'est pas rare que ces agriculteurs aient également une activité extra-agricole pour

compléter leurs revenus. Ces activités correspondent généralement à de très petites entreprises commerciales pouvant être liées à l'activité agricole (acheteur-stockeur des productions fruitières, appelé acopiador10, vendeur de cagette de fruits) ou sans lien (propriétaire d'une

scierie ou d'un petit négoce à Olmos). On note également des revenus supplémentaires dus à la rente foncière.

Le système de production de cet exploitant évolue généralement vers l'augmentation de sa surface cultivée grâce à l'accumulation d'un capital au cours des années clémentes (prix de vente élevés, pluies abondantes permettant d'économiser les consommations intermédiaires,

bon rendements,…). Ce système peut également décapitaliser lors d'une forte chute du prix des produits fruitiers.

10

Son rôle sera décrit dans l'étude de la filière dans la partie suivante.

46

L'exploitant remplace alors les arbres fruitiers par les cultures vivrières et se consacre au

salariat agricole lors des temps libres du calendrier agricole (type de système précédent). Les inondations provoquées par le phénomène El Niño peuvent également emporter une partie de

son capital foncier (la parcelle est alors remplacée par des pierres et devient inutilisable). L'exploitant ne peut plus investir dans la production fruitière car, ayant perdu une partie de son capital foncier, il ne peut plus immobiliser de terre pour la culture pérenne et se tourne

vers la culture vivrière. Ce phénomène touche l'ensemble des producteurs possédant des terres a proximité des fleuves Olmos et Cascajal. Dans tous les cas, si les parcelles ne sont plus

cultivables, le producteur décapitalise de manière importante.

Le locataire ou associé

On considère que ce type de producteurs est exclusivement locataire : il ne possède

aucune terre en propriété contrairement au système de production précédent qui pouvait combiner terres en propriété et en location. Outre la location de 2 à 4ha, certains producteurs s'associent à deux personnes ou plus de

manière à partager les facteurs de production. Par exemple, un propriétaire foncier fournit la terre et l'eau, l'associé se charge des frais d'installation de la plantation (poteau, fil de fer,

plants). Les consommations intermédiaires (intrants chimiques, combustible, main d'œuvre) sont payées par les deux associés, à part égale. Des contrats sous d'autres modalités existent mais ils sont tous similaires à celui-ci. Ce type d'association peut être réalisé par des membres

d'une même famille (4 frères louant 3ha, chaque frère appartenant à une unité de consommation et de résidence différentes) ou par des personnes sans lien familial. Les

bénéfices sont répartis à parts égales. Ce procédé comporte aussi un intérêt lorsqu'un des deux associés ne disposent pas des connaissances techniques nécessaires. L'unité de production est généralement constituée des actifs familiaux investis dans la location

ou l'association. La main d'œuvre extérieure est toujours sollicitée bien que les actifs engagés dans le système puissent contribuer aux travaux des champs (dépend de la trésorerie

possédée). Les autres caractéristiques de ces systèmes de production sont similaires au type précédent (calendrier de travail, outillage, équipement, activité extra-agricole, élevage).

L'association et la location étant des procédés ponctuels et limités dans le temps, les cultures

pérennes (citrons, mangue) n'y sont pas adaptées. La culture spécifique à la location ou à l'associativité pour ce type de producteur est le fruit de la passion. Cette culture durant 18 mois maximum est la seule culture fruitière non-pérenne cultivée dans la région et dont la

production commence rapidement (7mois). En outre, elle est bien plus rémunératrice que le maïs ou l'haricot (cf tableau 6) Les locataires changent de parcelles tous les 3 ans, lorsque les

rendements du fruit de la passion diminuent. Ils peuvent également y être contraints pa r le propriétaire. Il est intéressant de remarquer que ces producteurs ne cultivent que des systèmes en

monoculture : le système doit maximiser le rendement du fruit de la passion. Les intrants chimiques, l'eau et le travail sont exclusivement destinés à l'intensification de la terre par le

fruit de la passion et il n'y a pas de culture associée pour éviter le transfert de maladie et pathogène. Il n'y a ainsi pas de partage des facteurs de production et le capital est exclusivement investi pour la culture la plus rémunératrice.

Le risque encouru par ces planteurs locataires est justement lié cette absence de diversification culturales ainsi qu'au coût supplémentaire de location de la terre par rapport aux propriétaires.

L'intensification de l'unité de surface doit être suffisamment rapide et importante pour rentabiliser cet investissement.

47

Ce risque est toutefois modéré du fait du faible coût de la location (4 à 10% du coût total de

production) ; le coût de la main d'œuvre représentent un coût bien plus élevé (de 40 à 62% du coût total). Mais dans certain cas, la faible diversification culturale au sein du système de

production est relative car les agriculteurs cultivent du maïs ou du haricot en parallèle (toujours sur des terres louées). Il n'est en effet pas rare que ces producteurs louent plusieurs parcelles, une consacré au fruit de la passion, l'autre aux cultures saisonnières.

Ces producteurs peuvent avoir recours au crédit lorsque les coûts de production sont trop élevés par rapport à leur trésorerie.

Tableau 11 : Performances économiques du système Planteur locataire

VAN RAF total RAF/actif

85 452 51 197 32 542

Les revenus agricoles par actif sont légèrement supérieurs au revenu moyen des propriétaires. Le faible coût de la location ainsi que la forte rémunération des systèmes de culture mis en jeu

explique cette supériorité. Il est cependant inférieur à celui des propriétaires les mieux rémunérés qui combinent les systèmes de culture les plus intensifs en surface (fruit de la passion, citron).

La plupart des planteurs associés ou locataires cultivent dans l'objectif d'accumuler suffisamment de capital pour acheter leur propre parcelle ou produire de manière

indépendante. Selon leur dotation en facteur terre et en capital, ils deviendront à terme des petits planteurs propriétaires et pourront investir dans les cultures pérennes (citron, avocat, mangue) de manière à avoir une source de revenu complémentaire. Certains pratiquent la

location ou l'association en attendant d'hériter de la terre de leurs parents. Il existe également des locataires ou associés qui se maintiennent dans ce système non pas par défaut mais parce

qu'ils ne veulent pas courir le risque d'effectuer une telle dépense (terre, puits, équipement) et que leur système est suffisamment rémunérateur. Néanmoins, la question de l'héritage pour les enfants contraint généralement ces locataires à acheter une parcelle de manière à sécuriser

l'avenir de leurs enfants qui ne sont pas partis travailler en ville.

Le planteur fruitier moyen

Cette catégorie est composée de planteurs fruitiers propriétaires ou locataires. Certains

propriétaires héritent du capital foncier de leur parent et accumulent progressivement de plus en plus de terre au cours de leur vie. D'autres propriétaires sont d'anciens petits entrepreneurs

ayant décidé d'investir dans l'agriculture. La distinction entre ces deux statuts fonciers (propriété et location) a peu d'influence sur les revenus agricoles, seul le capital d'investissement et la stratégie sont différents.

Deux stratégies s'offrent aux locataires : - acheter prochainement une terre pour devenir propriétaire et investir à plus long terme dans

l'agriculture, - continuer à louer pour ne pas s'engager et pouvoir investir dans un tout autre secteur en cas d'opportunité.

Qu'il soit locataire ou propriétaire, ce producteur possède un capital d'investissement suffisant pour cultiver de grandes surfaces : les propriétaires possèdent entre 10 et 45ha dont une

vingtaine de cultivé ; les locataires louent entre 7 et 15ha. Ce système de production, tout comme le précédent, est basé sur des cultures pérennes et saisonnières avec une préférence majeure pour le fruit de la passion et le citron.

48

Les puits tubulaire sont utilisés pour les grandes surfaces à irriguer et certains agriculteurs

investissement dans le courant triphasé (énergie plus puissante et occasionnant moins de perte lors du transport en ligne) qui s'avère bien moins coûteux que le combustible. Le

raccordement est cependant très couteux et très rares sont les producteurs de ce type qui bénéficient de cet équipement. Ils possèdent un système d'irrigation gravitaire bien que certains aient récemment investi dans

des systèmes de goutte à goutte. L'ensemble des terres de l'exploitation n'est pas équipée, seulement une partie car ce système coûte très cher. Pour avoir un ordre d'idée, une

exploitation équipée du courant triphasé économise 34% du coût total de production par rapport à un système utilisant le combustible. Cette même exploitation économise plus de 70% du coût de production si elle est équipée du courant et d'un système goutte à goutte 11.

Les systèmes de culture utilisant le goutte à goutte seront décrits dans la partie II car ils sont apparu il y a seulement quelques années dans ces systèmes de production.

Ces producteurs possèdent également un bétail de taille un peu plus conséquente que les petits planteurs.

La main d'œuvre est très largement extérieure (travailleurs permanents et journaliers), ces exploitations sont donc considérées comme exploitation patronale. L'administration de la

parcelle, les prises de décision et les dépenses sont à la charge entière du propriétaire qui effectue parfois quelques opérations culturales telles que l'application d'engrais afin de vérifier les dosages et la pulvérisation.

Ce graphique présente le calendrier de travail pour un système constitué de 20ha de fruit de la passion, 6ha de citronniers et 6ha de manguiers, dont 26ha est équipé d'un système de goutte à

goutte.

Tableau 12 : Calendrier de travail et performances économiques du Planteur moyen

L'ensemble de système de production représente un total de 10 470 HJ. Les salaires peuvent représenter de 50 à 70% du coût de production selon la quantité de travail effectuée par les

actifs familiaux. Les objectifs des ces producteurs sont d'anticiper les aléas du marché pour leur choix

culturaux. Ayant les moyens d'investir et le capital foncier suffisant, ils cherchent à électrifier au maximum leur installation et à la techniciser avec un système d'irrigation de précision de manière à réduire les coûts de production.

11

Ces chiffres sont issus de calculs à la suite d'entretiens auprès de producteurs.

0

200

400

600

800

1000

1200

1400

janvie

r

févri

er

mar

s

avri

l

mai

juin

juil

let

aoû

t

septe

mbre

oct

obre

novem

bre

déc

embre

HJ Mangue (6ha)

HJ Citron (6ha)

HJ Fruit de la

passion (20ha)

VAN RAF RAF/actif

278 699 177 924 105 129

49

Les gestionnaires à distance

Cette catégorie d’exploitants agricoles est également patronale car les propriétaires

fonciers ne sont pas producteurs eux-mêmes. Ils se consacrent à d'autres professions : entrepreneurs, avocat, médecin, ingénieur agronome…Certains, originaire d'Olmos, ont hérité des terres de leurs parents et ont décidé de ne pas la vendre par attachement à la région et

parce qu'en présence d'un capital suffisant, elle peut dégager des revenus loin d'être négligeables. D'autres encore, étrangers à la Communauté, ont acheté la terre lorsque celle-ci

était moins chère. Certains propriétaires possèdent et exploitent d'autres terres dans la région proche (Chiclayo). Leur système de production ne peut pas être considéré comme celui d'un planteur propriétaire

car leurs stratégies ne sont pas les mêmes : un planteur moyen dépend directement des revenus de son exploitation ; pour ce type en revanche, les plantations représente un revenu

complémentaire. Ne connaissant pas les revenus extra-agricoles de ces exploitants12, nous ne pouvons donc pas dire dans quelle mesure les revenus issus des plantations constituent leurs revenus totaux. Ils possèdent des surfaces allant 10 à 50ha, dont une partie ou la totalité est

cultivées par des plantations pérennes (citron ou manguier). Ils peuvent cultiver en parallèle du maïs ou mettre en location certaines terres.

Ils rémunèrent un administrateur-ouvrier agricole considéré comme permanent en plus des travailleurs salariés journaliers. Il n'y a aucun actif familial. Les propriétaires sont rarement présents sur l'exploitation. Ils s'y rendent une fois par mois à une fois par an généralement

pour le contrôle de la récolte. Gérant leur exploitation à distance, ce sont eux qui s'occupent des grosses dépenses

d'investissement (puits, motopompe, achat d'équipement de transport ou de stockage, réparation de machine…) mais les petites dépenses quotidiennes liées aux consommations intermédiaires sont gérées par l'administrateur. Celui-ci n'avance pas toutefois pas les frais,

des transferts d'argent sont réalisés pour toutes ces dépenses. Ils sont munis de puits tubulaires, équipement indispensable pour irriguer de telles surfaces.

Le système d'irrigation est gravitaire : peu investissent dans un système de goutte à goutte. Très coûteux, ces propriétaires préfèrent investir le moins possible dans l'agriculture car elle ne représente qu'une activité secondaire.

La commercialisation de la production est à la charge de l'administrateur lorsqu'il s'agit de réseaux de vente régionaux et nationaux. Lorsque l'exploitant exporte sa production, il se

charge généralement lui-même des ventes.

Tableau 13 : Performances économiques du Gestionnaire à distance

Surface cultivée

VAN RA RA/actifs

Minimum 4,25 ha

(mangue) 23 394 17 394 17 394

Maximum

17 ha (citron +

fruit de la passion)

335 908 299 508 299 508

Moyenne 128 815 107 826 107 826

12

Ces explo itants, rarement présents sur leur parcelle n'ont pas fait l'objet d'entretiens directs. Seuls les

travailleurs permanents chargés de l'entretien et du suivi de la parcelle ont pu être interrogés.

50

Comme pour les planteurs, l'écart de revenu est très important de par la différence de dotation

en facteur foncier et la nature des plantations. La chute du prix de la mangue a considérablement affecté les producteurs de mangue par

rapport aux producteurs de citron. Seuls ceux exportant leurs mangues ont pu bénéficier de prix plus élevés. Les débouchés nationaux et régionaux, quant à eux, ont perdu beaucoup de leur intérêt (les prix ont été divisés par 6 à partir de 2010).

Les différents systèmes de production ci-dessus présentent des stratégies bien

distinctes. Alors que certains producteurs se concentrent d'abord sur l'accroissement de leur cheptel, d'autres surveillent l'évolution des prix pour en anticiper une chute potentielle. Les éleveurs et producteurs vivriers ont des stratégies de sécurisation de leurs revenus. Ils

compensent des situations de décapitalisation en année sèche par les revenus issus du salariat et/ou d'activités extra-agricoles ainsi que par la maximisation de la rémunération de la surface

en année des pluies (double campagne). Cette dualité année sèche/pluvieuse n'existe pas pour les planteurs qui, très réactifs, ajustent leur choix culturaux face aux variations des tendances du marché.

Les écarts de rémunération de ces systèmes sont illustrés par le graphique suivant qui présentent les performances économiques des systèmes de production en fonction de la

surface cultivée. Nous n'avons représenté qu'une année (année de sécheresse) car les différences sont négligeables à l'échelle de ce graphique. Les petits planteurs ont des systèmes plus rémunérateurs à l'hectare que les producteurs vivriers.

Tableau 14 : Performances économiques des systèmes de production. (RAF par actif en

fonction de la surface cultivée par actif)

Deux autres graphiques (annexes 28 et 29) présentent les systèmes d'élevage car l'échelle du

premier graphique ne permettait pas de les visualiser. Pour ces systèmes, la distinction année pluvieuse/sèche est nécessaire. Le revenu minimum brut est de 750 soles/mois (2837€/mois) au Pérou depuis le 1er juin 2012 (d'après le journal péruvien Perú21.pe). Seuls les systèmes

basés sur l'élevage, le salariat et les activités extra-agricoles passent en dessous de ce seuil, les revenus des systèmes vivriers et fruitiers y sont supérieurs. Pour le seuil de survie (2872soles/actif/an, 760€/actif/an), certaines exploitations d'éleveurs passent en dessous du

seuil en année sèche. En année pluvieuse, tous y sont supérieurs : ces systèmes basés sur la pluriactivités sont donc plutôt efficients.

Les types sont caractérisés par de forts écarts dus à la différenciation de dotation en capital foncier et à la nature de leurs plantations fruitières.

-

50 000

100 000

150 000

200 000

250 000

300 000

0 10 20 30 40 50 60

RA

F/ac

tif

Surface cultivée/actif

Gestionnaire à distance

Planteur locataire moyen

Petit planteur

Producteur vivrier

Planteur propriétaire moyen

51

Il aurait fallu distinguer des sous-systèmes plus précis basés sur ces différenciations pour

avoir une typologie caractérisée par des écarts-types moindres. Cependant, cette échelle permet d'apprécier la grande diversité des systèmes de production d'Olmos, d'autant plus que

seuls les systèmes étant antérieurs aux années 2000 sont représentés ici. Ces systèmes s'inscrivent dans des réseaux de tailles et de natures différentes, plus ou moins intégrés au territoire national. S'il est vrai que ces systèmes sont encore peu tournés

vers les marchés mondiaux, une minorité est toutefois en phase de modernisation agricole susceptible de faciliter prochainement son accès aux marchés internationaux.

La typologie des systèmes de production suivante rend compte des différents systèmes n'ayant pas ou peu évolués par rapport aux années 1990. Ces derniers illustrent la manière dont les producteurs s'approprient leurs espaces de production, en fonction de leurs facteurs de

productions, de leurs accès à l'eau et de leurs inscriptions dans des réseaux locaux, régionaux ou nationaux.

III. Des flux qui se tournent lentement vers l'extérieur L'objectif de cette présente étude est d'identifier les principaux changements agraires

issus du processus de mondialisation à l'œuvre. Après avoir caractérisé les systèmes de production et de culture n'ayant pas ou peu été modifiés par des influences mondialisées, il nous faut maintenant étudier les flux matériels agricoles transitant par Olmos qui n'auraient

potentiellement pas été l'objet de changement structurels entrainés par la mondialisation.

Pour étudier ces flux, nous devons changer d'échelle : l'étude des systèmes de production a été réalisée à l'échelle des exploitations agricoles archétypiques situées dans une zone située au sein des vallées irriguées d'Olmos. Pour les flux, nous considérons l'ensemble des surfaces

cultivées du district d'Olmos, c'est-à-dire l'ensemble des vallées irriguées. Pour les cultures comme le maïs, ces surfaces cultivées s'étendent un peu plus car cette culture est pluviale. Ces

cultures restent tout de même marginales. Pour ce faire, des données issues du recensement agraire de l'INEI de 1994 ont été

sélectionnées. Celles-ci permettent d'identifier les cultures apparues ou disparues entre les années 1990 et l'actualité. Les données de l'année 2012 proviennent de ce même recensement

complétées par les données du SENASA. En effet, dans sa méthode de recensement, l'INEI de 2012 distingue les cultures associées des monocultures. Ses chiffres ne nous permettaient donc pas de connaitre la quantité de pieds de fruits de la passion dans le district. Les données

du SENASA ne font pas cette distinction et prennent en compte les deux systèmes de culture en calculant la densité de semis selon les systèmes. D'autre part, le recensement de l'INEI est

moins précis que les données du SENASA concernant les variétés de piment; en outre, le raisin ne figure pas dans sa base de données.

L'annexe 30 permet de comparer le paysage agraire d'Olmos à ces deux époques. Bien que l'ensemble des surfaces cultivées aient augmenté considérablement en 18 ans, il est

possible de distinguer les productions dont les surfaces apparaissent comparables, des productions apparues au cours des années 2000. Conjointement à l'étude de l'histoire agraire de la région et au travail d'enquête, nous considérons que le processus de mondialisation a eu

peu d'influences sur certaines productions, déjà présentes dans le paysage d'Olmos en 1994 et que leurs réseaux de commercialisation n'ont pas évolué de manière radicale.

52

Parmi les plantations fruitières, on retrouve le citron, la mangue (exceptée la mangue

d'exportation), le fruit de la passion et parmi les cultures vivrières, le maïs, le haricot, le manioc, la lentille et la patate douce.

Dans cette partie nous étudions donc les flux de quelques unes de ces productions : le maïs, le citron et le fruit de la passion. L'importance des surfaces cultivées ainsi que la présence importante d'acteurs de ces filières à Olmos ont permis de réaliser cette sélection.

a) Entre consommation locale et réponse à la demande du marché national

Le maïs est une culture commune à la majorité des systèmes de production étudiés, quelle que soit la maîtrise des facteurs de production. En 2012, on comptait 1114ha de maïs

dans le district d'Olmos (INEI, 2012). Ce chiffre, fortement dépendant du régime pluviométrique, varie d'une année à l'autre ce qui explique la grande différence de surfaces

cultivées entre les années 1994 et 2012. La production de maïs est donc très difficile à estimer (du fait qu’il existe une forte corrélation entre production et pluviométrie). Les données de l'INEI permettent néanmoins d'avoir un ordre de grandeur de la production annuelle générée

par le district. Avec un rendement moyen de 6,5T/ha, la production de maïs en 2012 atteindrait entre 7241T dans le cas d'une seule campagne par an et 12 811T dans le cas d'une

seconde campagne (rendement de 5T/ha en seconde campagne). Le schéma filière présent en annexe 31 illustre les flux du maïs entre les différents acteurs de la filière présents à Olmos et dans sa région proche (Chiclayo). La production de maïs

concerne plusieurs variétés : le maïs dur, le maïs amylacé et le maïs choclo sont les principales variétés produites dans le district d'Olmos. Le schéma filière présenté ici ne

concerne que la commercialisation du maïs dur. Les producteurs vendent une grande partie de leur production (environ 95%) aux grossistes d'un nombre de quatre dans la zone d'étude. Les pailles de maïs sont vendues aux éleveurs ou

consommées par le bétail du producteur. Les grossistes de la ville d'Olmos égrainent le maïs, l'ensachent, le pèse et l'achètent au producteur à un prix variant de 0.80 à 1,1s/kg selon les

quantités produites à Olmos l'année considérée. Ils vendent à divers clients qui pourront transformer le maïs, le distribuer ou encore le consommer directement. Les grossistes d'Olmos vendent principalement aux entreprises de transformation de Chiclayo (moulins) et aux

fermes d'élevage avicoles et porcins présentes sur la côte jusqu'à proximité de Lima. Ils vendent également aux semi-grossistes et détaillants du district d'Olmos ainsi que directement

aux consommateurs. Ces grossistes proposent généralement d'autres services aux producteurs : vente de semences et de fertilisants, crédit avec remboursement au cours de la récolte. Les relations

producteurs/grossistes sont donc réciproques. Le tableau en annexe 32 représente les achats mensuels d'un grossiste d'Olmos. Le total des

achats à l'année est supérieur à la totalité de la production d'Olmos car il achète également du maïs produit dans la zone de Motupe. Celui-ci achète à environ 630 producteurs de la zone Olmos-Motupe à des prix allant de 0.90

à 1.3s/kg. Le prix grossiste est supérieur de 10 à 20 centimes du prix producteur. D'après son témoignage, ce grossiste représente un peu plus de 30% des achats/ventes de maïs de cette

zone.

53

Graphique 4 : Structuration du coût du maïs à Olmos

Nous considérons que les salaires des travailleurs journaliers représentent 30% du coût total de production. Les coûts de production sont extrêmement variables selon le type

d'exploitation et pour plus de précisions, il faudrait réaliser ce calcul pour chaque type. Les semi-grossistes se situent surtout dans le marché de la ville. Ils achètent aux grossistes

d'Olmos ou de Chiclayo ou aux moulins pour les farines. Ils vendent directement aux consommateurs de la ville et aux détaillants situés dans les hameaux à proximité de la ville d'Olmos.

Les flux liés à la production de maïs semblent être plus stables à long terme. Cette culture de

base à Olmos était présente dans la zone avant même l'apparition du coton et est antérieur aux années 1950. Les progrès techniques (utilisation d'intrants chimiques et de machines, système d'irrigation plus efficient…) ont permis une augmentation des rendements à l'hectare et de ce

fait une densification des flux de maïs. La grande quantité de moulins à proximité de Chiclayo et les nombreuses fermes d'élevage présents sur la côte démontrent l'importance grandissante

de sa production. Toutefois, bien que stables sur le long terme, les flux de maïs restent encore tributaires des précipitations pour toute une frange de la population (Type Eleveur pluriactif et Producteur vivrier). Les flux vont donc varier considérablement d'une année à l'autre selon

l'accès à l'eau de surface disponible.

b) Les premières expériences d'exportation

Les productions fruitières de citron et de fruit de la passion empruntent les mêmes

voies et mettent en jeu les mêmes acteurs de la filière à Olmos. Les planteurs produisent généralement les deux fruitiers et les intermédiaires, appelés acopiadores, achètent et stockent

ensemble les productions. En revanche, les deux filières se distinguent à partir du transport jusqu'au lieu de commercialisation : les usines de transformation et le marché de Lima. Avec les rendements moyens de 20T pour le citron subtil et de 27T pour le fruit de la passion

et les surfaces cultivées en 2012 données par le SENASA13 (cf annexe 30), il est possible d'estimer les productions des vallées irriguées d'Olmos. Celles-ci atteindraient respectivement

19 800T et 14 600T comme le montre le schéma filière suivant :

13

Nous utilisons les données du SENASA car elles prennent en compte l'intégralité des arbres fruitiers des

vallées irriguées d'Olmos, qu'ils soient cultivés en association ou en monoculture. Les chiffres de l'INEI quant à

eux distinguent les plantations associées des monocultures et cette distinction ne nous est pas nécessaire ici.

La structuration des prix ne rend compte

que des marges du producteur et de l'intermédiaire d'Olmos (il manque les

acteurs du reste de la filière hors-étude). La structuration du prix du maïs dépend du type d'exploitation considéré. Dans ce

cas, nous prenons l'exemple du petit planteur fruitier (cas le plus rencontré

dans la zone d'étude) qui cultive du maïs en parallèle de ces plantations fruitières.

0,429

0,371

0,16

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

1,2

Pri

x d

u m

aïs

(en

so

les/

kg)

Marge grossiste

Marge producteur

Cout de production

54

Graphique 5 : Schéma filière du fruit de la passion et du citron

Les planteurs vendent leurs productions aux intermédiaires qui les pèsent et les stockent. Ces intermédiaires sont presque tous des planteurs eux-mêmes qui commercialisent

leurs propres récoltes et bénéficient d'un prix de vente intermédiaire (supérieur au prix de vente producteur). Une quinzaine d'intermédiaires a été enquêtée ce qui est loin de représenter la totalité des intermédiaires présents dans la zone d'étude et encore moins dans les vallées

irriguées d'Olmos. Les tableaux en annexe 33 et 34 représentent les quantités de citrons et de fruits de la passion achetées par les intermédiaires puis vendues au marché de Lima ou aux

usines selon les périodes de production. Les chiffres de ces tableaux ne sont donc pas représentatifs de la quantité produite par la zone d'étude mais pe rmettent d'avoir un ordre de grandeur des différentes tailles et quantités gérées par ces intermédiaires.

Quantifier ces échanges n'est pas aisé du fait de la saisonnalité des récoltes. Les planteurs et

acheteurs distinguent une haute et une basse saison de production. Mais chaque enquêté identifie ces deux périodes selon ses propres estimations. En faisant la moyenne de l'ensemble des témoignages des intermédiaires, il a été possible d'identifier et de mesurer la durée de ces

deux périodes.

Les intermédiaires possèdent chacun un centre de stockage de taille très variable. Certains n'achètent qu'à 5 planteurs différents situés dans la même zone de production. D'autres peuvent acheter jusqu'à une centaine de planteurs. Ces centres de stockage permettent de

rassembler une première fois les récoltes produites non loin les unes des autres. Un intermédiaire peut donc rassembler d'une vingtaine de tonnes à plus de 1500T en basse

production et de 85 à 5000T en haute production. Les intermédiaires, même les plus grands achètent rarement les stocks des plus petits : d'une part, le prix intermédiaire est moins intéressant et d'autre part, les petits intermédiaires préfèrent vendre directement aux

transporteurs. Certains intermédiaires possèdent des camions de 15 T qui leur permettent d'envoyer les fruits aux entreprises de transformation situé à proximité d'Olmos (Motupe,

Chiclayo, Piura). Toutefois, pour la vente au marché de Lima, ils n'utilisent pas ces camions de petite contenance car la vente des produits ne couvre pas les coûts de transport.

55

Ainsi, la totalité des intermédiaires confient leurs marchandises à la dizaine de

transporteurs présents dans les vallées irriguées d'Olmos. Le second rassemblement des stocks se fait lors du transport. Des intermédiaires spécialisés, appelé les comisionistas, se chargent

de louer les services d'un camion avec chauffeur pour transporter les productions d'Olmos à Lima. Ils regroupent plusieurs intermédiaires pour remplir des camions de 30 à 32T. Les tableaux 32 et 35 en annexe présente la quantité de fruits produits par les vallées irriguées

d'Olmos et transportée jusqu'à Lima. La quantité de fruit de la passion est supérieure en basse production car sa période de récolte est plus étalée. Les tonnages présentés dans l'annexe 35

ne correspondent pas uniquement à la région d'Olmos ; les régions de Motupe et de Jayanca sont également des zones de production fruitière et les camions complètent leur chargement avec leurs marchandises. A partir de Chiclayo, les camions transitent d irectement à Lima,

sans effectuer plus d'arrêt.

Dans le graphique et tableau en annexe 36 et 37, figure le détail du coût du transport. Ce prix (0,18s/kg) est payé par le grossiste qui achète la production à Lima. Dans ce prix, plusieurs acteurs de la filière sont rémunérés : 62% pour le chauffeur du camion, 18% pour la main

d'œuvre chargée de la pèse et du chargement, 9% pour le déchargement, 7% correspond au salaire du transporteur d'Olmos (comisionista) et 4% au salaire de la personne chargée de

répartir les marchandises à Lima. Outre le marché de Lima, les fruits ne correspondant pas aux exigences du marché

national (taille, forme, couleur) sont destinés aux usines de transformation. Actuellement, le citron est transformé par une seule entreprise, AgroIndustrias Backus S.A. située à Motupe.

L'ensemble des productions y est envoyé. Concernant le fruit de la passion, les choix sont plus variés. Au total, les intermédiaires envoient les productions à une dizaine d'usines de transformation situées dans tout le pays : Quicornac S.A.(Olmos), Frutos Tongorrape

S.A.(Motupe), AgroIndustrias Backus S.A (Motupe), Jugos del Norte S.A. (Chiclayo), Agromar Industrial S.A. (Sullana), Procesadora Agroindustrial Selva S.R.L (Iquitos),

Corporacion Lindley S.A. (Lima). Les principales entreprises clientes sont celles d'Olmos, de Motupe, de Chiclayo et de Sullana. Les fruits sont généralement transformés en jus et en concentré de fruit. Elles exportent dans quelques pays d'Amérique Latine, en Europe et aux

Etats-Unis. L'entreprise Quicornac S.A. achète environ 30T en basse saison et 120T en haute saison (ce qui représente 1/3 et 20% des marchandises envoyées à Lima). La destination des

productions dépend uniquement des prix de vente du marché de Lima et des usines. Actuellement, le prix du marché est bien supérieur au prix établis par les usines (cf annexe 20 et 21). La grande majorité des fruits (70%) est donc destinée au marché de Lima et les 30%

restants aux usines. La structuration des prix en annexe 37 est donnée pour le fruit de la passion et le citron en fonction de la destination des produits.

Comme pour le maïs, la marge du producteur varie beaucoup en fonction de la quantité de main d'œuvre extérieure engagée (ici, nous considérons qu'elle correspond à 50% du coût de

production mais cette dépense représente, selon nos entretiens, 30 à 70% des coûts de production selon le système considéré). Nous remarquons que le marge du producteur est

négative lorsqu'il vend sa production aux usines et relativement grande lorsqu'il vend sur les marchés de Lima. Cela explique son souci de vendre au maximum sur les marchés et le moins possible aux usines. Le marché lui permet de compenser la très faible rémunération des usines

de transformation (vente à perte). Ce constat permet de relativiser le rôle de ces industries présentes à Olmos, vues souvent comme vecteur de développement local.

56

Les prix que proposent ces entreprises sont loin d'y contribuer14 (elles ne permettent même

pas d'amortir les coûts de production) et les producteurs restent dépendants du prix du marché national.

Les intermédiaires quant à eux ont une marge relativement faible. Ces derniers pratiquent très rarement cette activité seule. Ils sont souvent des agriculteurs-planteurs en parallèle et complètent leur revenu par l'achat, le stockage et la vente des productions. Certains parlent

même d'un "service" (moyennant rémunération) qu'ils rendraient aux producteurs.

Les flux de fruit de la passion et de citron structurent et dynamisent l'économie de la région d'Olmos depuis les années 1950 lorsque les producteurs se sont tournés vers les plantations fruitières. Les échanges se sont diversifiés lorsque les premières usines de

transformation sont apparues (années 1970) et les premières expériences d'exportation sous forme de produits transformés ont vu le jour dans les années 90. Aujourd'hui, ces flux se

maintiennent comme en témoignent les nombreux centres de stockage tout au long de la Panaméricaine et au niveau de quelques hameaux spécifiques (Playa Cascajal, nota mment où se trouvent 5 magasins de stockage appartenant à 5 intermédiaires différents sur environ

100m²). Mais ces flux restent encore largement dépendants de l'évolution du marché national, tant pour leurs destinations (les usines ou marché de Lima) que pour leurs densités. Une

baisse des prix induit une baisse de la production car les producteurs, réactifs, ajustent leurs systèmes. Cette réorientation passe rarement par l'abattage des arbres fruitiers : les planteurs cessent simplement d'investir dans les plantations pour limiter leurs coûts mais de manière à

maintenir les arbres en vie (seul coût d'irrigation). Pour le fruit de la passion, la stratégie est différente puisque ce n'est pas une culture pérenne.

Les producteurs qui décident d'investir dans cette culture savent généralement que les prix vont se maintenir pendant au moins la première récolte (rôle du téléphone portable pour appeler les marchands de Lima, anticipation de l'évolution des prix grâce à leur connaissance

du marché, proximité entre producteurs et intermédiaire,…). En cas de coup dur (baisse inattendue des prix, épidémie, inondation,…), le rôle des cultures

vivrières (et notamment du maïs) devient primordial : il permet aux exploitations d'avoir une source sûre de revenu pour, lorsque la trésorerie le permet, réorienter leurs systèmes ou faire face à de subites dépenses. Ces planteurs ayant un accès à l'eau permanent, ils peuvent

cultiver maïs ou haricot durant toute l'année.

L'agriculture marchande entraine l'arrivée d'un ensemble de nouveaux éléments indispensables à l'activité de production : les intrants chimiques, les semences et la main d'œuvre sont généralement présents dans les bassins de production agricole. Ainsi, avec

l'augmentation progressive de l'agriculture à Olmos (en termes de surface cultivée et de flux), les entreprises de vente de fertilisants et de matériel agricole, les pépinières et la main d'œuvre

ont pris de l'ampleur au fil des ans.

14

En 2005, un conflit entre l'usine équatorienne Quicornac S.A. et les producteurs de fruit de la passion avait

éclaté à Olmos et concernait justement cette très faible rémunération. Les producteurs durent se détourner de

cette production.

57

Partie 2. La transformation des campagnes d'Olmos par

les influences mondialisées

I. L'évolution favorable du contexte agraire

A partir des années 1990, l'ouverture du marché foncier au sein de la Communauté paysanne d'Olmos a entrainé, dix ans après, l'arrivée de nouveaux acteurs sur le devant de la

scène agricole. Recomposant le paysage agraire et les flux matériels et immatériels, ces entrepreneurs et entreprises agro- industriels modifient progressivement le réseau dans lequel s'inscrit Olmos, développant de nouvelles potentialités dans son espace rural et bouleversants

les dynamiques déjà en place. De même que les entrepreneurs agricoles et les entreprises agro- industrielles de la zone, le projet d'irrigation du PEOT participe également à la

transformation de l'agriculture d'Olmos et de ses flux avec l'extérieur (flux de produits et de personnes, flux immatériel de lois,…). Bien qu'encore en phase de réalisation, ce projet d'ampleur considérable a déjà une influence sur Olmos, influence qui se distinguent de celle

des entreprises installées récemment à Olmos.

a) Ouverture du marché foncier et exploitation des ressources

La politique néo- libérale de Fujimori (1990-2000) initia un virage qui a marqué

l'histoire du Pérou. Se distinguant de ses prédécesseurs "aux politiques hétérodoxes [A. Garcia dans les année 1980], nationalistes et socialistes" [années 1970] (E. Mesclier et al.,

2006), son gouvernement visa à moderniser le secteur primaire afin de rendre l'agriculture péruvienne compétitive sur les marchés mondiaux. Sa politique s'est exprimée au travers de différentes mesures : démantèlement des mécanismes protectionnistes, expansion des

infrastructures routières, suppression des aides consacrées certaines cultures vivrières, disparition de la Banque Agraire et de l'assistance technique,… (E. Mesclier et al., 2006).

Parallèlement, la législation en vigueur évolua et par l'intermédiaire de la Loi de Promotion Agraire de 1990, elle encouragea la libéralisation du marché foncier : "La maîtrise et la conduite de la propriété agricole peut être exécutée par n'importe quelle

personne naturelle ou juridique à condition égale […]." (Article 5). Les terres non cultivées, incluant les terres communales sans titre de propriété, devinrent propriété de l'Etat. La

définition de la "conduite directe" fut modifiée dans le but de légaliser la présence de locataires sur les terres communales. Cette loi supprima également les limitations de surfaces (450ha de terres irriguées en région côtière en 198, (Revista Agraria #107, 2009)) ou de

transfert foncier et visa à faciliter l'accès des entreprises et investisseurs agricoles, d'origine péruvienne ou étrangère, sous la forme de d'achat ou de location foncière. Avec la Loi

Foncière de 1995, il fut en outre considéré que "toute terre habilitée par un projet développé avec des fonds publiques était propriété de l'Etat" (Loi n°26505). Comme l'indique l'article de J-L. Chaléard et E. Mesclier, "Nouveaux acteurs, nouveaux

produits et expansion du marché foncier dans le nord du Pérou" (2010), à partir de 1990, "une partie des achats de terre concerne aujourd’hui les terres des communautés, ce qui

permet un agrandissement du marché foncier". Avec la Loi de Promotion Agraire des années 1990, la législation de la ressource en

eau a, elle aussi, subit des modifications. La réduction du rôle de l'Etat remplacé par les gouvernements régionaux et les associations d'usagers (JU) s'est traduite par une grande

instabilité et un manque d'efficience dans la répartition de la ressource causés notamment par

58

un manque de formation et de coordination des organismes responsables et une corruption

omniprésente (L. Del Castillo et al, 2011 ; Oré, 1998 ; A. Marshall, 2011). Avec la loi 653 de Promotion des Investissements, l'accès à l'eau du sous-sol par le forage de

puits est garanti aux investisseurs privés. L'Institut National de Développement (INADE) est en outre chargé des grands projets hydrauliques à échelle nationale (Eguren, 2004). Cet organisme "est autorisé à concéder au secteur privé, la construction et l'entretien de la

principale infrastructure hydraulique des grands projets d'irrigation. L'entreprise sélectionnée peut ensuite amortir son investissement en faisant payer ses services par les

utilisateurs bénéficiaires." (A. Marshall, 2009) La légitimité du PEOT pour la supervision du projet d'irrigation et celle de l'entreprise Odebrecht pour la réalisation des travaux sont garanties par cette nouvelle attribution des

pouvoirs publics.

Parallèlement à ces nouvelles mesures foncières et hydriques, l'environnement est vu comme "un obstacle pour l'exploitation des ressources naturelles, […]; il un rôle passif, victime des conséquences des activités productives, sous-estimé et déchargé de son rôle

fondamental pour le développement local durable". (J. Postigo, 2001, Debate Agrario 33) En ce sens, la législation péruvienne est peu contraignante en matière de protection

environnementale : thème marginalisé et faiblement intégré dans les décisions politiques, hétérogénéité des structures publiques en charge de sa protection, manque de formation, d'assistance technique, de structure éducative ou de campagne de sensibilisation…(J. Postigo,

2001). Cette législation a donc encouragé les entreprises agro-exportatrices à produire selon les règles de l'agriculture intensive en capital (maximisation de la production à l'hectare, faible

temps de retour, usage élevé d'intrants chimiques, …). Les seules contraintes existantes pour l'agriculture d'exportation résident dans les exigences phytosanitaires des pays importateurs et des organismes de santé (listes autorisées de produits chimiques, seuils de concentration à ne

pas dépasser,…).

L'ensemble des cadres législatifs relatifs aux ressources foncière et hydrique et à l'environnement modifiés dans les années 1990 eut des répercussions sur Olmos à partir des années 2000 et facilita considérablement l'implantation des entreprises pour l'exploitation

agricole des terres de la région. Elle modifia le paysage agricole, l'exploitation de la ressource hydrique et introduit de nouveaux systèmes de production à Olmos.

De grandes superficies (supérieures à 40ha) de vignes, de piment ou encore de maïs (cultivé en rotation avec le piment) se distinguèrent du reste du paysage. Bien visible dans le paysage, ces grandes surfaces sont généralement accompagnées de puits tubulaires et de systèmes

d'irrigations technicisés, d'infrastructures et de magasins de stockage (fertilisants, outils) et sont marqués par la présence de tracteurs, de véhicules et d'un grand nombre de travailleurs

présents sur le site. Ces exploitations, qui existent toujours à l'heure actuelle, ne dépendent pas des

paramètres hydriques mentionnés dans le premier chapitre : elles emploient majoritairement l'eau du sous-sol (70% des exploitations de plus de 50ha utilisent uniquement les puits, 65%

des exploitations comprises entre 20 et 50ha font de même). Selon le recensement national agricole de 2012 effectué par l'INEI, il existe aujourd'hui 332 puits tubulaires (dont 272 opérationnels) et 658 puits noria (dont 573 opérationnels). L'évolution du nombre de puits de

1992 à 2012 représente une augmentation de 43% (puits tubulaires et norias confondus) (cf annexe 39).

Plus la taille des exploitations augmente, plus elles ont recours à des puits pour l'irrigation de leurs grandes cultures. Les puits à ciel ouvert ne sont pas assez profonds et n'ont pas des

59

capacités hydriques suffisantes pour irriguer de si grandes parcelles. De plus, les producteurs

cultivant de grandes surfaces (supérieures à 20ha) se tournent de plus en plus vers l'irrigation de précision, le goutte-à-goutte, qui est bien plus efficient et économique. Le système

d'irrigation gravitaire est très peu efficient (40 à 50%) et est à l'origine de beaucoup de pertes contrairement au système d'irrigation de précision qui aurait une efficience allant jusqu'à 90% selon Arts et al. (1992). Nous étudierons les conséquences précises induites par cette nouvelle

maîtrise de l'eau dans les systèmes de production actuels.

II. Le développement de l'agro-exportation

a) De nouveaux systèmes de culture hautement performants

Les nouveaux acteurs présents à Olmos mettent en œuvre des systèmes de culture bien différents des systèmes vus précédemment. Nécessitant de lourds investissements, ces systèmes sont très performants par la maîtrise précise des facteurs de production.

Le système de culture du piment

Plusieurs variétés de piment (Capsicum annuum) sont cultivées à Olmos (Paprika, Piquillo, Cayenne) et leurs systèmes de cultures sont semblables pour chacune de ces variétés.

Pour des raisons de simplification, nous considérons une seule variété de piment, celle du piment Paprika. La variété Piquillo relève du même calendrier de travail mais possède un

rendement et un prix légèrement différents. Les entrepreneurs agricoles préfère nt le piment Paprika, au prix d'achat supérieur. La variété Piquillo est préférée par les entreprises qui le transforment ensuite.

La rotation généralement effectuée par les producteurs est constituée de 3 ou 4 années de piment suivie d'une année de maïs. Avec son cycle de production de 6 mois (piment frais) à 7

mois (piment séché), la terre est laissée au repos pendant 4 mois avant d'être cultiver à nouveau. Les producteurs peuvent réaliser une rotation différente mais elle s'effectue systématiquement avec le maïs : la même année, ils cultivent une première campagne de

piment puis une campagne de maïs et ce durant 4 ans. La 5ème année, ils réalisent deux campagnes de maïs. Le piment étant une Solanacée, c'est une culture exigeante en nutriments

et minéraux et très sensible aux pathogènes si le temps de repos de la parcelle est insuffisant. Il est donc nécessaire de la mettre en rotation avec une céréale afin de limiter les risques de diffusion de pathogènes et la baisse de la fertilité des sols. L'épidémie de 2008 a d'ailleurs pu

être causée par ce manque de précaution dans les rotations, erreur (ou risque conscient pris par les producteurs) doublée d'un temps de repos court et d'un climat humide permettant aux

adventices hôtes des virus de se propager. Les producteurs achètent les jeunes plants dans une pépinière située à Trujillo dont la

qualité est certifiée par les standards du GlobalGAP. La fragilité et la sensibilité des jeunes plants de piment est telle qu'il est nécessaire de les désinfecter avant la transplantation.

L'usage d'intrants chimiques est systématique et l'incorporation de matières organiques (fumures animales) est réalisée généralement en début de cycle. Avec l'usage d'un système d'irrigation de précision, le recours à la fertilisation chimique, le contrôle rigoureux des

pathogènes et ravageurs et un travail du sol moto-mécanisé, les rendements de piment Paprika atteignent en moyenne 40T/ha et 30T/ha pour le piment Piquillo. Sur un total de 5 à 7 mois

selon la variété, la culture de piment requiert un total de 500HJ/ha (cf annexe 40) et ce, même avec l'usage de système d'irrigation de précision et la moto-mécanisation.

60

La transplantation, les applications d'intrants chimiques, les désherbages, la lutte contre les

ravageurs représentent chacun environ 5% du calendrier de travail (cf annexe 41). Les récoltes de piment frais et séché représentent à elles seules 44% du calendrier de travail et

sont uniquement réalisées manuellement. La reproduction de la fertilité est assurée par les labours entre chaque campagne, l'incorporation de fumures organiques, l'utilisation d'intrants et les rotations effectuées sur 3 à

5 ans. La culture d'un hectare de piment nécessite un investissement de 17600 soles (hors salaire)

réparti comme suit : Tableau 15: Répartission des consommations intermédiaires de la culture de piment

PIMENT Consommations intermédiaires Salaires

Semence Intrant

chimique Eau Machine

Entretien

machine

Matériel et

équipement Journalier

Suivi

technique

Gestion du

champs

% 7,2% 22,2% 9% 5% 3% 0,6% 42% 10% 1%

Total en %

47% 53%

Total en soles

17 611 soles 20 015 soles

Les dépenses principales auxquelles font face les producteurs sont les dépenses de main d'œuvre et d'intrants chimiques. Les performances économiques du piment et du raisin sont données dans la partie suivante.

La plupart des producteurs vend ses productions de piment aux entreprises

exportatrices de la région qui se chargent de vérifier les conditions de culture et itinéraires techniques de ses producteurs- fournisseurs selon l'EPA (Environnemental Protection Agency), le GlobalGap ou d'autres organismes certificateurs avant d'exporter. Certains

producteurs jugent ces exigences trop élevées et préfèrent vendre à d'autres entreprises dont les critères d'achat sont moins élevés.

Le système de culture du raisin

La vigne cultivée à Olmos est un raisin de table (Vitis viniferas), consommé frais et de différentes variétés : RedGlobe et Thompson Seadless sont les variétés les plus courantes dans

la région. Elle est apparue récemment à Olmos : il semblerait que les premières expériences datent de 2009 avec un total de 33ha (SENASA Olmos, 2009). En 2012, plus de 80ha sont recouverts de vignes. Cette culture pérenne dure entre 7 et 14 ans. Les plus vieilles vignes

d'Olmos étant âgées de 4 ans, les producteurs ne connaissent pas exactement la durée du vie de cette plantation sous le climat d'Olmos.

La vigne est une culture particulièrement coûteuse que ce soit en phase d'installation ou en phase de croisière. Elle nécessite un système d'irrigation de précision et un plan de

fertilisation très précis. Elle est systématiquement cultivée en culture pure. La vigne nécessite un support pour croître qu'il est nécessaire d'installer avant de transplanter les jeunes plants.

61

Comme pour le piment, les semences viennent de pépinières certifiées. Son itinéraire

technique est relativement complexe car composé de différentes tailles (taille de formation en première année, taille de l'appareil foliaire, taille des branches principales et secondaires, de la

grappe, des bourgeons) aux objectifs bien spécifiques (éclaircissement, accélération de la fécondation et de la croissance des fruits, sélection de la branche et des bourgeons de production, meilleure qualité de fruit).

Un schéma en annexe 42 illustre les différents stades phénologiques simplifiés de la vigne en production. Les tailles se réalisant à des moments précis ont été ajoutées. D'autres tailles

complètent ce tableau mais elles n'ont pas de contraintes temporelles spécifiques et s'effectuent tout au long de l'année (régulation de la partie foliaire, élimination des bourgeons non-sélectionnés sur le tronc ou sur la branche principale et secondaire,…).

Les opérations culturales et le temps de travail dédié à chacune d'elles sont détaillés dans les

annexes 42 et 43. Avec un besoin total de 641HJ par an, la culture de raisin est le système de culture le plus

exigeant en travail, notamment pour la taille de la grappe qui est une opération délicate nécessitant une main d'œuvre au préalablement formée. La répartition des coûts des

consommations intermédiaires et des salaires est très semblable à celle du piment. Le piment et le raisin sont des deux systèmes de culture particulièrement risqués puisqu'ils

nécessitent de gros investissements (respectivement environ 13000$/ha et 40000$ /ha). De plus, ils requièrent une attention particulière car sont très sensibles aux pathogènes et

ravageurs. Les performances économiques de ces deux systèmes sont présentées dans les tableaux suivants :

Tableau 16 : Performances économiques des systèmes de culture de piment et de raisin

VAB/ha VAB/HJ VAB/K

Piment seul 135 269 272 7,7

Piment en rotation avec maïs

(P/P/P/P/M) 21 715 53 1,4

Raisin 58 784 92 0,56

Les différences de performances entre la culture de piment considéré en dehors de son

système de culture et inséré dans sa rotation est très impressionnante et témoigne l'importance de considérer le système de culture dans son ensemble. La vigne, culture pérenne, n'est pas concernée par les rotations ; en revanche, le coût d'investissement est compté dans les

amortissements au niveau du système de production. Dans l'annexe 45 figure une comparaison des performances économiques de l'ensemble des

systèmes de production présent à Olmos. Le raisin est de loin la culture la plus rémunératrice.

a) Des systèmes inscrits à l'échelle mondiale

Combinant ces systèmes de culture avec ou sans plantations fruitières, les systèmes

d'exploitation capitalistiques suivants rendent compte de l'évolution du système agraire d'Olmos et de son ouverture sur les marchés mondiaux.

62

L'entrepreneur capitaliste

Orientés vers des marchés d'exportation et armés de systèmes d'irrigation de précision,

ces nouveaux producteurs se sont installés dans la région d'Olmos, dans ses vallées irriguées ou dans des zones plus éloignées, situées sur des terres communales (pouvant être à l'origine de conflits avec les comuneros). Péruviens ou d'origine étrangère, la majorité a acheté des

terres mises aux enchères par les banques ou à d'anciens propriétaires fonciers. D'autres exploitants détenant des systèmes de production semblables étaient présents dans les vallées

irriguées d'Olmos depuis plus longtemps : anciennement planteurs de citronniers, ils ont peu à peu fait évoluer leurs systèmes essentiellement fruitiers vers des systèmes de production plus rémunérateurs.

Propriétaires de 40ha à plusieurs centaines d'hectares, ces entrepreneurs agricoles se tournent vers des cultures d'exportation, principalement le piment (variété Paprika ou Piquillo) et le

raisin, cultures bien adaptées aux conditions bioclimatiques de la région, comptant sur une main d'œuvre bon marché et des prix relativement élevés sur les marchés mondiaux. Leur système de production comprend parfois des plantations de citronniers ou de manguiers et

plus récemment d'avocatiers. Appartenant aux anciens propriétaires, les nouveaux conservent parfois les arbres fruitiers présents sur leurs parcelles lors de l'achat foncier.

Tournées vers des cultures nécessitant une trésorerie et un capital impor tant, ces nouveaux propriétaires ont généralement d'autres entreprises ou profession en parallèle de leur exploitation agricole. C'est avec ces entrées d'argent complémentaires qu'ils peuvent investir

dans l'agriculture et dans des systèmes d'irrigation très coûteux et indispensables dans cette région désertique.

S'il est vrai que la plupart des exploitations sont situées au sein des vallées irriguées d'Olmos, les raisons de leur présence ne sont pas les mêmes que celles des petits et moyens

producteurs de la zone. La localisation de ces exploitations dépend en effet de plusieurs facteurs bien différents des facteurs spécifiques à la petite agriculture. La disponibilité

foncière est un de ces premiers facteurs : les entrepreneurs recherchent des terres disponibles en propriété privée car il n'est pas aisé de convertir une terre de propriété communale en propriété privée et les conflits avec les comuneros sont récurrents. Ainsi, la grande majorité

de nouveaux propriétaires recherche des terres déjà privées et qui soient situées à proximité de voies d'accès pour des raisons évidentes liées à la commercialisation des productions et aux

passages répétés de camions et du personnel. Un accès à l'électricité est un atout majeur pour ces exploitants qui effectuent d'importantes dépenses énergétiques pour le fonctionnement des motopompes. Enfin les systèmes de culture à base de piment, de raisin et de citron se basent

sur des systèmes d'irrigation de précision approvisionnés exclusivement par l'eau du sous-sol extraite par les puits tubulaires. L'eau de surface (pluie, canaux d'irrigation de la Junta de

usuarios) n'est jamais utilisée pour l'irrigation. Des tanks et réservoirs sont parfois présents sur quelques exploitations mais ils sont également alimentés par l'eau du sol sauf lors d'épisodes pluvieux qui ne font que compléter l'apport hydrique disponible. Ces nouveaux

propriétaires achètent leurs terres à d'anciens propriétaires en faillite, n'ayant plus les moyens d'investir ou à la Communauté Paysanne.

Ces systèmes sont relativement indépendants des précipitations ayant lieu à Olmos (même s'il est vrai que les nappes phréatiques sont alimentées par les ressources en eau

présentes en aval de la vallée). L'unique limite que peut représenter l'eau est donc liée à la disponibilité de l'eau de sous-sol : des études du profil hydrique sur les parcelles sont

systématiquement réalisées afin de connaitre la profondeur de la nappe phréatique et l'investissement correspondant à la profondeur de la perforation.

63

Le dernier facteur de localisation notoire est donc l'accès à la nappe phréatique. Le prix de la

parcelle dépendra de la profondeur et de la capacité (taille) de cette nappe (peu profonde et suffisamment grande pour alimenter des systèmes de culture très consommateurs d'eau).

Outre l'accès à un capital très important, ce type d'exploitation fait appel à l'utilisation exclusive de main d'œuvre qualifiées et non-qualifiées pour effectuer l'ensemble des

opérations culturales, de l'ouvrier agricole à l'ingénieur agronome en charge de superviser l'itinéraire technique des parcelles. Les entrepreneurs ne sont pas présents sur leur terre de

manière continue. Chargés de responsabilités relatives à d'autres activités, ils effectuent généralement des allés-retours réguliers entre leurs différents lieux de travail et lieux de vie. Le personnel chargé d'administrer et de surveiller l'exploitation (ingénieur agronome principal

et secondaire, chef de parcelle, technicien sanitaire, secrétaire…) est donc très important lors des moments d'absence du propriétaire. Les ouvriers agricoles sont payés à la semaine et les

salariés permanents et consultants agronomes ont un salaire mensuel. Ce type se distingue totalement du type Gestionnaire à distance de par ses systèmes de culture

et le capital mis en jeu ainsi que la présence du propriétaire sur ces terres. Bien que l'entrepreneur ne soit pas présent tout le temps, il est néanmoins indispensable au bon

déroulement de l'activité agricole, contrairement au gestionnaire à distance qui confie l'intégralité de la gestion de la parcelle à un administrateur.

Ces exploitants n'ont pas d'élevage, leur système de production étant basé sur les revenus des cultures. L'équipement est lourd : il est composé d'un ou plusieurs puits

tubulaires, de système d'irrigation de précision avec un système de fertilisation intégré, de plusieurs magasins de stockage pour les intrants chimiques, les machines et le stockage des productions si nécessaire et de machines agricoles (tracteur, pulvérisateur). Les

investissements indiqués dans le tableau suivant correspondent à ces outils et équipement.

Certains producteurs sont en train de soumettre leur système de production aux exigences et standards du GlobalGap (Good Agricultural Practice) afin de pouvoir exporter vers les pays d'Europe, très exigeants en termes de qualité et de traçabilité. Ces conditions

concernent tant la production (liste de produits chimiques autorisée, conditions de travail des ouvriers agricoles, protection lors de la pulvérisation de produits chimiques) que le stockage

des produits chimiques (magasins séparés) ou la traçabilité des produits. Pour exporter vers les Etats-Unis, les producteurs doivent respecter le formulaire EPA qui interdit également l'usage de certains pesticides et qui incite à respecter les règles de protection de l'ouvrier

agricole (usage de gants, masque, combinaison).

Tableau 17 : Performances économiques du type Entrepreneur agricole

Système de

production Investissement VAN RA Surface RA/ha

Entrepreneur 1 19ha de vigne 390390 3 098 090 1 017 566 19ha 53 556

Entrepreneur 2 20ha de vigne + 20ha

de maïs + 12ha de

citron

409500 6 394 322 3 865 413 52ha

74 335

Entrepreneur 3 33ha de piment +

14ha de citron 429975 4 645 793 3 445 603

47ha 73 311

Moyenne 409 955 4 712 735 2 776 194 67 067

64

D'après ces performances, la combinaison de plusieurs systèmes de culture (pérenne et

saisonnière) est plus rémunératrice. Les dotations foncières marquent également la différence de revenu comme le démontre la rémunération à l'unité de surface qui est supérieure pour les

systèmes 2 et 3. Les calendriers de travail des systèmes de production des trois entrepreneurs se trouvent en

annexe 47. Les quantités de travail totales sont respectivement : 12 180HJ, 17 513HJ et 20 919HJ par an. Ces besoins énormes de main d'œuvre ont des impacts importants sur le

système agraire de la région. On devine que des systèmes de production moins rémunérateurs se tournent vers le travail salarié disponible en grande quantité chez ces entrepreneurs. Ces influences au niveau du système agraire seront développées dans les parties suivantes.

Le raisin et le piment sont exclusivement destinés à l'exportation. Ces deux cultures

figurent parmi les principaux produits d'exportation du Pérou des cinq dernières années (cf. annexe 48). Alors que les exportations de piments stagnent à environ 3% du total des exportations, les exportations de raisin augmentent quant à elles chaque années (elles doublent

en quatre ans, passant de 3 à 6% du total des produits agricoles exportés).

Selon le témoignage d'un entrepreneur, 93% de la production de raisin s’exporterait vers les Etats-Unis et l'Europe, 5% vers le marché national (les fruits ne correspondants pas aux exigences étrangères : grappes pas assez dense, grain trop petits, mauvaise couleur…) et

2% est destiné au marché local d'Olmos (fruits abîmés ou trop mûrs). Quant au piment, 95% est exporté et 5% est vendu sur le marché national (selon les témoignages des entrepreneurs).

Pour les citrons, certains entrepreneurs ont des clients étrangers et exportent donc aux Etats-Unis et vers les pays d'Amérique Latine. D'autres entrepreneurs se contentent des marchés nationaux mais possèdent leurs propres moyens de transport et entreprises de

commercialisation pour envoyer et vendre leurs productions sur les marchés de Lima. Ils bénéficient ainsi de prix allant jusqu'à 8s/kg par rapport aux prix des intermédiaires d'Olmos

qui ne dépassent pas plus de 2s/kg et ce durant seulement quelques mois de l'année (cf annexes 22 et 23). Ces entrepreneurs ont donc accès à des réseaux de commercialisation très efficients leur permettant de faire face aux importantes dépenses que représentent la culture

du raisin ou du piment. Les relations commerciales se sont mêmes inversées puisqu'ils reçoivent les commandes des acheteurs-exportateurs pour faire le choix des meilleurs contrats

de vente. D'autre part, avec le climat particulièrement chaud et sec d'Olmos, les périodes de récolte du piment et du raisin sont précoces par rapport aux autres pays concurrents et les productions

bénéficient de fenêtre commerciales très intéressantes sur les marchés mondiaux ce qui constitue un important « avantage comparatif » d’Olmos sur le marché mondial. Le piment

cultivé au Nord du Pérou (Piura, Lambayeque, La Libertad) est récolté à partir de Septembre et arrive sur les marchés mondiaux avant les productions du Mexique ou de la Chine. La période de récolte du raisin du Nord du Pérou a lieu avant celle des Etats-Unis, du Mexique,

de la Chine et à partir de Novembre à Olmos (cf annexe 49).

Toutefois, quelques risques réduisent ce panorama plutôt prometteur pour les entrepreneurs agricoles d'Olmos. D'une part, le piment est, comme les autres productions de la région, sensible aux variations de prix. En 2005 par exemple, selon les entrepreneurs

enquêtés, les prix ont diminué (offre abondante, autres marchés compétiteurs du Mexique et de la Chine,…). Les entreprises exportatrices ne sont pas non plus à l'abri de variations de

prix pouvant affecter la rentabilité du système de production.

65

D'autre part, le piment est une culture risquée et fragile. Ses rendements peuvent être

très affectés par des pluies imprévues lors du cycle de production : les plants sont très sensibles aux pathogènes qui se répandent très vite lors d'épisodes pluviométrique et les

producteurs doivent recourir à davantage de produits phytosanitaires pour réduire le risque de perte de récolte globale. De plus, les pluies peuvent anéantir l'ensemble d'une récolte si elles arrivent lors du séchage du fruit, opération réalisé à l'air libre sur de grandes surfaces planes.

En 2008, une épidémie liée à plusieurs virus a détruit la quasi-totalité des parcelles de piment dans toute la région Olmos-Motupe-Jayanca. De nombreux producteurs se sont endettés et se

tournent aujourd'hui vers d'autres productions moins risquées telles que le maïs. Ils peuvent également mettre le terrain en location aux entreprises spécialisée dans le piment. Les termes du contrat seront explicités dans la partie suivante.

Le raisin est une production qui nécessite une immobilisation du capital foncier (plantation pouvant durer plus de 10 ans), de gros investissements de départ (support pour la vigne

notamment) et un entretien régulier sur toute la durée du cyc le de production (plusieurs années). Cette culture est donc bien plus contraignante que le piment et encore peu d'entrepreneurs se lancent dans sa production. Ainsi, le marché du raisin péruvien est loin

d'être saturé et les prix restent élevés et stables.

L'entreprise agro-industrielle

Les entreprises présentes à Olmos sont relativement nombreuses : Industrial Comercial

Holguin e Hijos S.A., Sociedad Agricola Viru S.A., Grupo Capas SAC, Danper Trujillo S.A., Agro Inper S.A… Ces nouveaux acteurs de l'agro-industrie sont apparus depuis peu à Olmos

(2005 pour Danper Trujillo et AgroVirú). Ces entreprises ont la particularité de cultiver plusieurs produits différents (asperge, piment, artichaut, haricot vert) sur des surfaces extrêmement étendues situées dans l'ensemble du Pérou. Elles possèdent en outre plusieurs

usines de transformation agro-alimentaire situées à proximité de leurs parcelles afin de proposer des produits frais et transformés sur les marchés mondiaux (conserve, surgelé,

poudre). Ainsi, AgroVirú possède 2000ha dans les vallées de Virú et de Chincha et loue encore près de 3000ha dans les régions Nord et Sud du pays. Ces entreprises contrôlent l'ensemble de la filière, de la production à la commercialisation : elles produisent elles-mêmes

leurs produits, ont leurs propres moyens de transport et de transformation et exportent dans plusieurs pays étrangers. Ces entreprises sont parmi les acteurs essentiels dynamisant le

commerce international du Pérou. A Olmos, elles se concentrent particulièreme nt sur la culture du piment ; de plus, des essais de culture d'asperge ont été réalisés cette année 2013 par l'entreprise Danper.

L'objectif principal de ces entreprises est d'obtenir une production de piment en

continue de manière à faire fonctionner les usines de transformation sur un maximum de temps (11 mois de fonctionnement et un mois de maintenance) et ainsi approvisionner les marchés mondiaux sur l'ensemble de l'année. Cette stratégie permet de bénéficier de

l'ensemble des fenêtres commerciales disponibles selon les marchés visés et entraine en outre des économies d'échelle en terme de durée de fonctionnement des usines (le coût d'entretien

d'une usine est mieux amorti si elle fonctionne durant onze mois de l'année). Pour mettre en place cette stratégie, il faut pouvoir produire toute l'année et donc avoir des terres cultivées sur toute la côte du pays pour bénéficier des différents climats et latitudes. Ainsi, pour Danper

qui produit du piment Piquillo à Virú, le cycle de production dure de Septemb re à Décembre (110 jours) et la récolte débute à partir du 80ème jour (mi-Novembre).

A Olmos, cette même variété est semée en Mai et récoltée à partir du 50ème jour (mi-Juin) et son cycle de production est un peu plus court qu'à Virú du fait des conditions climatiques

66

favorables (100 jours). Comme pour le type précédent qui bénéficiait de fenêtre commerciale,

les entreprises agro-industrielles profitent également de la précocité des cycles de culture leur permettant d'étendre leurs périodes de récolte de mi-Juin à Janvier en décalant dans le temps

chaque période de semis. Outre cet avantage certain que représente le climat d'Olmos pour les exploitants ayant accès à l'eau du sous-sol (températures élevées et constantes, surfaces planes facilement

mécanisables, sols fertiles, …), les conditions pédologiques de ces sols sont très avantageuses. Ayant été peu exploitées15 (ancienne plantation de citron n'ayant pas produit depuis 10 ans,

par exemple), les terres d'Olmos sont très fertiles. D'autre part, elles cont iennent un taux d'argiles supérieur aux sols de Virú très sableux. Les coûts liés aux intrants chimiques sont donc limités par rapport aux coûts de production des cultures de Virú. Cette économie est

compensée par le coût du transport d'Olmos jusqu'à l'usine de transformation se trouvant à Trujillo.

Un autre aspect expliquant la venue des entreprises sur les terres d'Olmos est la perte de fertilité des sols exploités dans les régions d'origine des entreprises. Les sols de Virú deviennent en effet de moins en moins productifs et certains parasites ou pathogènes plus

résistants. Les coûts liés aux fertilisants et produits phytosanitaires augmentent et les entreprises se mettent à la recherche de nouvelles terres de production, moins coûteuses et

plus fertiles. A Olmos, les relations contractuelles entre entreprises et entrepreneurs capitalistiques

sont multiples. Comme l'explique A. Marshall dans sa thèse 16, à partir des travaux des économistes Caro (2000 : 124) et Shimizu (2001 : 77), les contrats de ces entreprises "sont

liés aux trois possibilités dont disposent les entreprises pour s'approvisionner en matières premières, en fonction de leur degré d'intégration dans les processus de production." Ainsi, les entreprises peuvent établir des contrats avec les entrepreneurs consistant en un véritable

partenariat : l'entreprise fournit l'ensemble du paquet technique à l'exploitant (semences, intrants, suivi technique) qui doit respecter les instructions de l'ingénieur de l'entreprise pour

la parcelle considérée. La récolte est ensuite vendue à l'entreprise qui se charge de sa transformation (si besoin) puis de sa commercialisation. Bien que ce partenariat ait encore lieu à Olmos, il est progressivement remplacé par le fermage. Ce deuxième type de contrat est

assez courant à Olmos : les propriétaires mettent leurs terres en location pour que les entreprises puissent produire (coût de la location de 800-1000$/ha/an). Dans ce cas, c'est

l'entreprise qui gère elle-même sa production. L'entreprise peut même reverser un pourcentage des bénéfices de vente de la production (10%) mais ce type de rémunération n'est pas systématique.

Enfin, l'entreprise peut directement acheter la récolte aux producteurs en vérifiant l'itinéraire technique suivi et la qualité des productions achetées.

Les entreprises préfèrent aujourd'hui louer des terres plutôt que de travailler en partenariat avec les producteurs. En effet, selon un ingénieur employé dans une de ces entreprises, les

producteurs ne respectent pas toujours les conseils des entreprises ce qui affecteraient les rendements obtenus par les producteurs, rendements inférieurs aux résultats préconisés par les

entreprises.

15

Selon les critères de ces entreprises, "explo iter" une terre relève de l'agriculture modernisée et intensive. Il est

évident que les terres étaient auparavant exploitées mais dans des proportions inférieures (rendements plus

faible, meilleur renouvellement de la fertilité, durée de friche longue) 16

Marshall A. (2009) "S'approprier le désert. Agriculture mondialisée et dynamiques et dynamiques socio -

environnementale sur le piémont côtier du Pérou ." UFR de Géographie.

67

S'il est vrai qu'un rendement agricole élevé passe par le suivi précis d'un itinéraire technique

en agriculture intensive à l'hectare, les producteurs font également des choix relatifs à leurs trésoreries disponibles qui permettent de réduire les coûts de production.

Ces deux acteurs ayant des objectifs généralement différents, l'un visant la maximisation du rendement (sans prise en compte aucune des externalités négatives), l'autre l'optimisation du rapport coût-bénéfice, les conflits d'intérêt sont de ce fait susceptibles d'advenir.

Ces procédés ont permis aux entreprises de s’imposer progressivement dans le

paysage agraire d'Olmos, de connaître les différents acteurs agricoles de la région et de faire un état des lieux des terres disponibles en location ou à l'achat. Aujourd'hui par exemple, Danper n'établit plus de partenariat avec les producteurs, elle se contente de louer des terres et

de gérer elle-même l'intégralité des cycles de production. Les locations se font en générale sur plusieurs années (10 ans pour le cas de Danper dans le secteur de La Estancia) afin de

permettre aux entreprises d'investir dans le puits et le système d'irrigation. Il ne parait en effet pas réaliste d'investir dans de telles dépenses d'équipement pour seulement une ou deux années de location. D'autres entreprises, quant à elles, ne se contentent pas de louer et

achètent leur propre terrain.

Ces entreprises semblent s'implanter à long terme à Olmos, comme en témoignent les achats fonciers, les infrastructures présentes à proximité des parcelles et les temps de location de plusieurs années. Aujourd'hui installées dans les vallées irriguées d'Olmos, certaines

d'entre elles ont également investies dans la vallée prochainement irriguée par le projet du PEOT. C'est le cas de Danper Trujillo qui a acheté des terres dans cette zone et qui n'exclut

pas la construction d'une nouvelle usine de transformation approvisionnée par les productions du Nord du Pérou.

Le schéma suivant doublé de la carte représentant les enquêtes producteurs (annexe 50) illustrent la coexistence de systèmes capitalistes, dégageant de très fortes rémunération à

l'hectare avec des systèmes vivriers marchands beaucoup moins rémunérateurs (J-L. Chaléard, 2002) dans un même espace de production.

Graphique 6 :Performances économiques des systèmes de production

-

500 000

1 000 000

1 500 000

2 000 000

2 500 000

3 000 000

3 500 000

4 000 000

4 500 000

0 10 20 30 40 50 60 70

RA

F/ac

tif

Surface cultivée

Entrepreneur capitalistique

Gestionnaire à distance

Planteur propriétaire moyen

Planteur locataire moyen

Petit planteur

Producteur vivrier

Eleveur pluri axtra-agri

Eleveur salarié

68

L'implantation de ces nouveaux acteurs, entreprises ou entrepreneurs, a modifié et continue de

modifier le système agraire d'Olmos : son paysage est aujourd'hui ponctué de grandes étendues cultivées, d'équipements d'irrigation et de fertilisation et d'infrastructure de

stockage; les systèmes de production préconisées par ces derniers sont intensifs en terre et en travail, avec des techniques culturales issue de l'agriculture chimisée de précision. Ces changements bien visibles à Olmos s'additionnent d'une modification des flux de biens et de

personnes que nous détaillons dans la partie suivante.

b) Une production agricole orientée vers les marchés mondiaux

Comme l'indique le tableau 30 en annexe, les vallées irriguées d'Olmos ainsi que le

reste de la Communauté Paysanne sont caractérisées par la présence de 81ha de vignes et de 622ha de piment (paprika et piquillo) en 2012. Avec des rendements moyens respectifs de

35T/ha et 30T/ha, la production de raisin est de 2835T et celle de piment de 13 230T. En considérant que 5% environ n'est pas exporté et destiné au marché national ou local, les production de raisin et de piment exportées vers les Etats-Unis, l'Asie et l'Europe sont de

2693T et 12568T. Selon le SENASA, en 2012 sur 441ha de piment cultivé à Olmos, l'entreprise AgroViru en cultivait 261ha, Holguin 126ha et Danper, 25,5ha, équivalent à un

total de 412ha (soit 66% de la production totale). Une de ces entreprises exporte par exemple 99% du piment piquillo en Espagne. Le reste est produit par les entrepreneurs individuels qui vendent dans la majorité à ces mêmes entreprises. En 2012, la production de piment

correspond à un total de onze producteurs et entreprises et celle de la vigne à huit producteurs. Elle est de 18 000T/an en 2012. Les vignes quant à elles, ne cessent d'augmenter comme en

témoignent les nouvelles parcelles en pleine installation en 2013 (observations terrain). Le raisin est actuellement exporté vers la Chine, les Etats-Unis et l'Europe.

Des données concernant les pépinières (ventes de plants fruitiers à Olmos), le marché d'Olmos (détaillants ou semi-grossistes et quantité vendues) ou les mobilités de personnes

(transports en commun entre Olmos-Chiclayo-Lima) ont été collectées mais sont peu utiles au regard de la question de recherche. Ces données ne sont pas présentes dans ce mémoire mais renseignent sur la densité des réseaux locaux de transport (de passagers, de produits) entre

Olmos et Chiclayo notamment qui ne cesse d'augmenter parallèlement à l'augmentation de la population (cf annexe 6). Ce phénomène de densification des échanges peut être considéré

comme le résultat du processus de mondialisation auquel Olmos prend part progressivement.

c) Des travailleurs très demandés

Avec l'accroissement des surfaces dédiées au piment et à la vigne, le besoin de main

d'œuvre a considérablement augmenté ces dernières années. Selon le recensement agraire de 1994, les surfaces dédiées au piment étaient négligeables (0,5ha) ; en 2006, selon le SENASA, 276ha lui sont alors consacrés. Malheureusement, aucune donnée concernant les

années intermédiaires n'est disponible.

Selon l'annexe 51, un hectare de piment et de raisin requiert respectivement 498 et 641HJ. Si on compare le besoin de main d'œuvre du piment avec celui du maïs qui a une durée de cycle de production quasiment similaire (5 mois), un hectare de maïs dont le labour

est mécanisé et cultivé avec des intrants chimiques ne requiert qu'une centaine de journée de travail, soit environ cinq fois moins de main d'œuvre. En outre, le travail du piment et du

raisin est exclusivement salarié.

69

Ce sont donc plus de 300 milliers de journées de travail disponible dans le district

d'Olmos, créées par la culture d'environ 700ha au total en 2012. Selon le recensement national de population effectué par l'INEI en 2007, 5402 personnes (47% de la population recensée) à

Olmos travaillaient en tant qu'ouvrier agricole ou vendeur ambulant. Si on considère que ce chiffre n'a pas trop évolué en 2012 (l'accroissement de la population étant stable depuis 2005 selon le graphique précédent) et que l'ensemble de ces personnes travaillent en tant qu'ouvrier

agricole, les cultures de piment et de raisin seraient à l'origine de 55 journées de travail par personne.

Ne connaissant pas, ni le renouvellement quotidien des travailleurs, ni leur répartition spécifique à chaque système de production, il est délicat de chiffrer ces flux en nombre de

personnes et seule la quantité de journées de travail est une information certaine. En comparant néanmoins la création de travail issue de ces nouvelles exploitations entre les

années 1990 et 2006, on peut affirmer que ces systèmes de production ont été à l'origine de flux de travailleurs salariés importants. Selon les enquêtes menées auprès des entrepreneurs, administrateurs de parcelles et des travailleurs eux-mêmes, ces derniers viennent en majorité

des campagnes avoisinant les grandes cultures. Cependant, certaines tâches requiert un travail plus méticuleux que d'autres. C'est notamment le cas de la taille de la grappe de raisin qui

nécessite une formation au préalable des travailleurs. Cette formation étant chronophage pour le formateur (l'entrepreneur lui-même ou l'ingénieur en charge du champs), les entrepreneurs choisissent généralement d'employer les mêmes personnes sur plusieurs jours. Toutefois, bien

que prospectif de par la très récente apparition des vignes à Olmos, certains entrepreneurs pensent aller chercher de la main d'œuvre déjà formées dans d'autres régions du Pérou

productrices de raisin depuis plus longtemps (Ica, Lima, La Libertad, selon un dossier d'Agrobanco sur le développement de la vigne réalisé en 2008). Selon ces derniers, cette main d'œuvre, plus expérimentée, effectue un travail égal si ce n'est meilleur et en moins de temps.

Les économies réalisées seraient ainsi multiples : une baisse du coût de la main d'œuvre lié à cette tâche, de meilleurs rendements entrainés par une taille plus efficace et un

raccourcissement du cycle de production (plus cette taille est réalisée sur un temps court, plus la récolte est précoce). On l'a déjà vu, les avantages liés à la fenêtre commerciale d'Olmos se situent dans la précocité des productions. Mais cette idée n'est pas encore d'actualité

aujourd'hui.

Cette stratégie pose néanmoins de nombreuses questions pour le développement d'Olmos. Du point du vue de la collectivité, cette perspective implique une baisse de la quantité de travail pour ses habitants dont les revenus dépendent de cette rémunération

salariale (Eleveurs, Producteurs vivriers, Petits planteurs). Si on peut mettre en doute la distribution de la richesse générée par ces entreprises à Olmos 17, la création d'emploi est

généralement l'argument de taille en faveur de leur implantation dans une région où la petite agriculture est prédominante. Or, si les travailleurs proviennent en majorité d'autres régions agricoles (régions caractérisées en plus par la grande présence d'entreprises), il est légitime de

remettre en cause l'intérêt de ces entreprises à Olmos. Par ailleurs, cela pose le problème du développement par le salariat, qui constitue une autre question que nous développerons plus

loin. Tous ces changements, que ce soit au niveau des systèmes de production ou des flux,

ont vu le jour avec l'apparition de nouveaux acteurs incités à investir localement (modification

17

Cette création de richesse au sein de la Collect ivité se traduit généralement sous forme d'externalités positive :

création de route, meilleur accès aux services (eau, électricité), créat ion de filière,… Ce point sera détaillé dans

la suite du mémoire.

70

des modalités d’accès à la terre, construction de lourds aménagements hydroagricoles, main-

d’œuvre abondante et bon marché, politiques conciliantes en matière d’environnement,...). Mais ces changements ne peuvent pas être analysés sans considérer en parallèle l'arrivée du

projet d'irrigation qui fait lui aussi partie intégrante du paysage agraire. Ce projet n'étant pas en fonctionnement à l'heure actuelle, il entraine encore peu de changements directs sur l'agriculture. Toutefois, même si les infrastructures sont en phase de

construction, le PEOT a pris une place prépondérante dans le paysage et dans quelques hameaux d'Olmos. La partie suivante permet d'identifier et d'analyser ces différentes

transformations dues à l'agro-exportation et au projet d'irrigation.

III. Transformations des structures existantes

a) De nouvelles opportunités de salariat

Dans cette nouvelle organisation de l'espace, certains systèmes de production sont plus

affectés que d'autres. Nous avons vu dans la première partie que trois de ces systèmes étaient basés sur une activité de salariat complémentaire au système de culture ou d'élevage. Avec

l'augmentation de la quantité de travail disponible en tant qu'ouvrier agricole au cours des années 2000, il est fort probable que ces actifs familiaux aient modifié leurs calendriers de travail pour profiter des nouvelles opportunités de travail dégagées par les cultures

d'exportation. Ce choix dépend de plusieurs facteurs : la rémunération du travail et le coût d'opportunité lié à l'un ou l'autre des choix, la pénibilité du travail, la stabilité de l'emploi et

son salaire régulier. Les deux types d'éleveurs, l'éleveur salarié et l'éleveur pluriactif sont totalement

dépendant des activités extra-agricoles. Ainsi, avant même l'augmentation de la place du salariat, ces systèmes de production étaient déjà basés sur une activité de salariat, d'artisanat

ou de petit négoce. La reproduction de leur système ne résultant que de cette double activité, leurs migrations à Olmos devaient probablement dépendre de la quantité de travail salarié disponible. Il est important de noter que le travail salarié existait avant l'apparition des

entreprises : la majeure partie des producteurs des vallées irriguées utilisent la main d'œuvre extérieure pour compléter leurs calendriers de travail. Les migrations d’éleveurs-travailleurs

saisonniers étaient donc tout à fait plausibles. Ce phénomène a d'ailleurs été vérifié par les témoignages d'anciens migrants installés à Olmos depuis plus d'une génération. En revanche, il est possible qu'à partir des années 2000, ces migrations aient été facilitées par

un meilleur accès au travail. En effet, les période d'embauche actuelles sont plus longues qu'auparavant et la rémunération est supérieure. Selon un chef d'exploitation, un o uvrier

agricole était rémunéré en monnaie constante 7,87 soles/journée de travail (8heures) en 2005. En 2008, le salaire passe à 14,2 soles/jour puis à 19,7 soles/jour en 2010. En 2013, la journée de travail est actuellement rémunérée à 24,1 soles.

Concernant les producteurs vivriers, la situation n'est pas la même. Ceux-ci ne

travaillent comme ouvriers agricoles que lorsque leur calendrier de travail le leur permet. En dehors des travaux réalisés sur leurs propres champs, ces producteurs se rendent dans les entreprises pour compléter leur revenu. Avant l'arrivée des entreprises, ces producteurs

avaient un accès très limité au salariat de par la faible disponibilité du travail. Pour expliquer les stratégies employées par ces producteurs, nous comparons deux périodes : la première

(avant 2000) caractérisée par la très faible part du travail salarié dans le revenu agricole du fait de la moindre quantité de travail disponible et de la plus faible rémunération de la journée

71

de travail (8soles/jour) ; le seconde (actualité) pour laquelle le salariat est plus fréquent et

mieux rémunéré (25soles/jour). Cette comparaison se complexifie par l'existence de plusieurs scenarii possibles liés à :

- le régime pluviométrique de l'année considérée (année sèche/année pluvieuse) - la disponibilité du foncier (la terre est-elle facteur limitant ?) Pour des raisons de simplification, nous modélisons les situations actuelles et les scenarii pour

un système de production basé sur un campagne de 1ha de maïs en année sèche et de deux campagnes de 1ha de maïs en année pluvieuse. Pour l'ensemble des cas de figure, le

calendrier de travail est assuré par un seul actif familial.

En situation actuelle et en année sèche, si le foncier est limitant, le revenu du

producteur est basé sur la vente de maïs et le salariat. Le nombre de journée de travail salarié correspond à 5 jours de travail par semaine sur 21 semaines (5 mois). En effet,

la quantité de travail disponible est limitée aux tâches de transplantation, de désherbage et de récolte dans les entreprises et peu d'autres producteurs employeurs

sèment. Les entreprises ne suffisant pas à absorber l'ensemble de l'offre de travailleurs, ces derniers ne peuvent pas travailler en tant qu'ouvrier agricole durant la totalité de journées libres de son calendrier. En année pluvieuse, les surfaces cultivées

augmentent ; nous considérons que l'ensemble des journées libres de l'actif sont utilisées pour l'activité de salariat (104HJ) 18.

En situation actuelle et avec un foncier non- limitant, le revenu est composé de la vente de maïs et du salariat sur le reste des journées disponibles. Le système n'étant pas

limité par le foncier, le producteur peut donc augmenter sa surface cultivée de 50% (1,5ha de maïs). Il ne l'augmente pas plus car son calendrier de travail ne le permet pas: un producteur dispose de 312HJ par an (6 jours de travail par semaine et 52

semaines par an); deux campagnes de 1ha de maïs requiert 179HJ, deux campagnes de 1,5ha requièrent 269HJ et deux campagnes de 1,75ha requièrent 314HJ. Il ne lui reste

donc plus que 43 journées libres pour le salariat. Deux scenarii pour la situation passée sont proposés :

Pour ces deux scenarii, on considère qu'en année sèche, il n'y a pas de travail salarié disponible.

Scenario 1 : Le revenu est basé sur la vente du maïs et un peu de salariat. L'accès au foncier étant limité, le producteur n'augmente pas les surfaces cultivées (toujours 1ha de maïs sur une ou deux campagnes). Le salariat est limité à 40 journées ce qui peut

correspondre à 4 jours par semaine pendant 10 semaines. Ce chiffre est une estimation tirée de témoignages. Selon les producteurs, le travail en tant qu'ouvrier agricole était

moins fréquent et plus difficile à obtenir.

Scenario 2 : L'agriculteur est plus occupé par sa parcelle que dans le scenario

précédent car il a augmenté sa surface. Le salariat est donc limité à 20 journées de travail car il est limité par son calendrier de travail qui ne lui laisse que 43 journées disponibles et il est peu probable qu'elles correspondent systématiquement aux besoins

de main d'œuvre des autres producteurs.

Ce tableau est biaisé car il ne prend pas en compte les variations de prix du maïs entre les deux périodes de l'histoire. En revanche, les variations de prix entre saison sèche et pluvieuse sont prises en compte.

18

Nous proposons ici un modèle de manière à comparer plusieurs situations illustrant des stratégies de

producteurs distinctes ; il est évident que dans la réalité, les producteurs ne suivent p as exactement ces scenarii.

72

D'autre part, les producteurs possèdent généralement d'autres petits activités extra-agricoles

comme la vente ambulante ou le transport de passagers. Entre les deux périodes étudiées, ces autres activités n'ont pas beaucoup évoluées, il n'y a

aucune raison qu'elle soient prises en compte. D'autant plus que l'objectif est d'apprécier l'impact spécifique du salariat sur les revenus.

Tableau 18 : Différents RAF selon les scenarii proposés

Actuel 1 Actuel 2 Scenario 1 Scenario 2

Foncier limitant

(1 actif, 1ha disponible)

Foncier non

limitant (1 actif, 1,5ha disponible)

Pas de salariat,

foncier limitant (1 actif et 1 ha)

Pas de salariat,

foncier non limitant (1 actif et 1,5ha)

AS AP AS AP AS AP AS AP

Revenu 1ère

campagne 1ha mais

3975 3030 5963 4545 3975 3030 5963 4545

Revenu 2nde

campagne de mais

0 3030 0 4545 0 3030 0 4545

Nombre de journée de travail

salarié

104 133 104 40 0 40 0 20

Salaire 2600 3325 2600 1000 0 320 0 160

RAF total 6575 9385 8563 10090 3975 6380 5963 9250

Situation passée et présente : Le scenario 2 est comparable à l'actualité 1 en année pluvieuse. La faible présence du salariat

est compensée par l'augmentation de la surface cultivée. En année sèche, il est logique que l'écart se creuse par l'absence du salaire. La situation où le salariat est faible et le foncier limitant est la plus critique du fait du manque

de solution de secours pour pallier la faible rémunération du maïs.

Bien que le salariat permettent une augmentation globale des revenus, c'est la seconde campagne de maïs qui apporte la meilleure rémunération. Lorsque le prix du maïs diminue, le salariat est un bon compromis pour atteindre un niveau de rémunération similaire; en

revanche, quand il augmente, le maïs assure une rentabilité bien supérieure. Il est en plus bien plus sûr, contrairement au travail salarié qui n'est ni régulier, ni durable. Pour avoir une

rémunération comparable à la seconde campagne de maïs, les producteurs doivent en outre travailler durant toutes les journées libres ce qui ne parait pas tout à fait réaliste. Car même si la quantité de travail disponible a globalement augmenté à Olmos, il n'en reste pas moins que

les temps de recherche de travail et les imprévus existent.

Parallèlement au salariat agricole, un autre phénomène est apparu, celui-ci spécifique au projet d'irrigation. En pleine construction du tunnel et des canaux, le maître d'œuvre Odebrecht, emploient un grand nombre d'ouvriers, la majorité étant des producteurs

originaires d'Olmos. Malheureusement, nous ne connaissons pas le nombre d'ouvriers exact employé pour la construction. Ce chiffre est d'autant plus difficile à estimer que l'entreprise

emploie généralement un ouvrier pendant un à trois mois seulement.

73

Pendant ces quelques mois de salariat que l'on peut considérer d'exceptionnel (le travail que

propose Odebrecht est ponctuel et prendra fin en décembre 2013), les unités de production dont un ou plusieurs des actifs sont salariés (généralement des éleveurs et des producteurs

vivriers) sont diminuées car une partie des actifs partent travailler pour l'entreprise. Ceci a pour conséquence de faire baisser les surfaces cultivées généralement ou d'augmenter le recours à la main d'œuvre extérieure. En effet, ce travail, bien que très ponctuel, est mieux

rémunéré que le travail d'ouvrier agricole comme le montre le tableau suivant. Les producteurs engagés peuvent l'être en tant qu'ouvrier ou que surveillant. Dans la majorité des

cas, même si les surfaces cultivées baissent, le ménage conserve une campagne agricole, que ce soit du maïs ou du haricot.

Les producteurs intéressés par le travail que propose Odebrecht (annexe 52) sont des producteurs vivriers car le calendrier de travail des planteurs ne permettent pas de s'investir

dans ce travail. La journée de travail d'un ouvrier d'Odebrecht travaillant 24 jours par mois est rémunéré 50 soles/jour (31soles/jour pour un surveillant). Pour gagner la somme de l'ouvrier ou plus, un

planteur doit avoir 1ha de fruit de la passion et environ 80 citronniers (0,8ha selon la densité de plantation) ce qui correspond à une surface cultivée relativement faible. Sa rémunération

grimpe rapidement avec l'augmentation de la surface cultivée. En dessous de ce seuil, la rémunération de l'entreprise Odebrecht est supérieure. En outre, le travail qu'elle propose est chronophage, fatigant (les travailleurs travaillent dans la poussière et la chaleur toute la

journée) et très limité. Généralement, elle n'emploie qu'un actif par famille. La rémunération de ce travail étant bien supérieure à celle de l'ouvrier agricole, beaucoup de personnes ont

postulé mais le nombres de poste restent faibles et bon nombre n'ont pas vu leur candidature acceptée. Il parait donc logique que les planteurs privilégient leurs systèmes de production à ce travail salarié.

Pour les producteurs vivriers , peu se sont lancés cette année dans une seconde campagne de maïs ou de haricot (année sèche). Les choix des producteurs après la récolte de

la première campagne de maïs s'orientent donc entre le salariat agricole ou le salariat d'un ouvrier ou surveillant. La rémunération moyenne du producteur vivrier en année sèche est de 25soles/jour (et de 37soles/jour en année pluvieuse). En comparant ces revenus, ce choix est

vite fait, d'autant plus que le travail de Odebrecht ne comprend pas les inconvénients du salariat agricole (irrégularité du temps de travail et attente de la récolte pour obtenir son

salaire). Encore faudra-t- il trouver une place dans cette course à l'emploi… De plus, une concurrence accrue pour l'accès aux ressources naturelles est en cours :

avec l'arrivée de nouveaux grands propriétaires, la concurrence hydrique et foncière s'accroit dans un contexte où il n'est pas aisé pour les petits producteurs de conserver leurs droits sur

l'eau et sur leurs terres.

b) Une terre qui prend de la valeur

Avec le développement des cultures fruitières, l'apparition des entreprises et du projet,

le foncier est devenu un enjeu capital à Olmos, que ce soit dans les vallées irriguées, les terres plus éloignées appartenant à la Communauté Paysanne ou même en zone urbaine.

Nous l’avons dit, l'ensemble des stratégies des producteurs d'Olmos réside dans l'accès à l'eau permanente de manière à diversifier son système de production. Le citron, culture pérenne, est

un investissement sur le long terme, le fruit de la passion est une culture très rémunératrice qui ne constitue pas un risque important pour le producteur.

74

Ces revenus réguliers sont complétés par les cultures saisonnières, filet de sécurité dans le cas

d'une baisse des prix et ressources fourragères pour le bétail. La grande majorité des producteurs vivriers tendent vers ce système de production efficient en termes de

coût/bénéfice/risque compte tenu des conditions dans lesquels ils opèrent. La contrainte principale est donc un accès permanent à l'eau. Deux choix s'offrent aux producteurs en présence d'une trésorerie suffisante : l'accès direct à une parcelle irriguée (puits existant et

accès à l'eau de canal) ou la construction d'un puits performant, tous deux dépendants de la trésorerie. Le marché grandissant de la location foncière témoigne d'une pression foncière

grandissante sur les terres irriguées. A ce premier constat s'ajoute la présence des entreprises qui concentrent de grandes

quantités de terres dans les vallées irriguées. S'il est vrai que ces dernières pourraient cultivées sur les terres non-irriguées de par la perforation obligée de puits tubulaires, elles trouvent

néanmoins d'autres avantages à s'installer sur ces terres irriguées. D'abord, la faible profondeur des nappes phréatiques rend la réalisation de puits tubulaires beaucoup moins onéreuse. Sur les terres non- irriguées, les nappes sont généralement bien plus profondes.

Ensuite, les terres irriguées sont le cœur d'un réseau dense de flux de toute nature : de personnes (producteurs, travailleurs), de marchandises (productions, alimentation), d'eau, des

lignes électriques et surtout des routes. L'accessibilité des entreprises est un élément majeur dans leurs choix d'implantation de par l'importance des flux dont elles vont être à l'origine (travailleurs qualifiés et non qualifiés, électricité, camions de marchandise).

De par ces deux phénomènes, la pression sur les terres irriguées n'a pas cessé de s'accroitre

depuis la multiplication des plantations fruitières. Cette pression s'est ensuite intensifiée assez brutalement avec l'apparition des entreprises et entrepreneurs à partir des années 2000. Et elle n'est pas prêt d'arrêter, notamment avec la venue du projet.

Le prix de la terre illustre bien ce phénomène de pression foncière grandissante.

La première source d'augmentation du prix de la terre, indépendamment de la présence d'entreprises, est l'équipement d'une parcelle. Une parcelle dotée d'un puits est plus chère qu'une parcelle nue ; une parcelle équipée d'un puits tubulaire et de l'énergie triphasée l'est

encore plus. Selon plusieurs témoignages, dans les années 1990, le prix de la terre (propriété privée) allait

de 400$/ha à 1000$/ha selon l'équipement de la parcelle. En 2005, les prix vont de 1300 à 5000$/ha. Aujourd'hui, les terres les mieux équipées (proche d'une ville, puits tubulaire et accès à l'électricité) atteignent un maximum de 10 000$. Les terres communales quant à elle

sont moins chères (750$/ha, ce prix dépendant également de l'équipement et de la proximité de la ville).

L'augmentation du prix du foncier n'est pas né avec l'arrivée de l'agro-industrie. Ce processus était déjà entamé mais il s'est considérablement amplifié à partir des années 2000, époque à partir de laquelle les terres ont été distinguées en plusieurs catégories selon le niveau

d'équipement.

Les terres prochainement irriguées situées dans la zone du projet n'ont pas suivi cette même progression. Confisquées à la Communauté Paysanne par l'Etat, elles n'avaient à l'époque pas de valeur d'échange monétaire (bien qu'elles détiennent une forte valeur d'usage pour les

éleveurs les exploitant). Avec l'ouverture du marché foncier, ces terres, au fort potentiel agricole moyennant investissement, ont vite été convoitées et ont été vendues à environ

4250$/ha (site internet du PEOT). L'annonce de ce prix a été suivi de beaucoup de revendication de la part des comuneros qui jugeaient ce prix dérisoire par rapport aux coûts

75

d'installation des infrastructures d'irrigation et au niveau d'équipement dont vont bénéficier les

entreprises acheteuses. Si on considère qu'une entreprise possède un lot de 500ha produisant du piment, sa valeur ajoutée brute atteint près de 25 millions de dollars (sans prise en compte

des coûts d'installation de l'infrastructure mineure à la charge des entreprises). Le coût de la terre représente alors 0.017%.

On l'a compris les terres du district d'Olmos sont devenues le théâtre d'un marché de plus en plus conflictuel dans lequel s'affrontent de nombreux acteurs marqués par leur

différence : les comuneros, les dirigeants communaux, les entrepreneurs et aujourd'hui le gouvernement régional de Lambayeque qui a été à l'origine de la vente des terres du projet. Dans ce contexte conflictuel, de nouveaux phénomènes spéculatifs s'ajoutent à la complexité

de la situation foncière. Au sein de la Communauté Paysanne, les transferts fonciers non légalisés ne sont pas une nouveauté (Zegarra et al, 2006). Ces transferts fonciers étaient

auparavant destinés à donner accès au foncier à des personnes étrangères à la Communauté. Ils ont également permis une concentration foncière de la part de certains propriétaires. A l'heure actuelle, ces transferts fonciers détiennent un intérêt un peu différent, celui de la

spéculation. Des terres seraient effectivement transmises par la Communauté Paysanne à des comuneros (échange monétaire ou non selon les cas) organisés en "associations". Ces

associations n'ont d'association que le nom puisqu'il ne s'agit que de groupes fictifs, l'ajout d'un maximum de noms permettant d'accéder à plus de terre. Ces associations sont reconnues par la Communauté Paysanne qui formalise ce type de transaction que l'on peut considérer de

clientélistes car elle s'effectue en faveur des acheteurs (comuneros ou non) ayant connaissance de cette opportunité (personnes proches des dirigeants communaux, vieilles familles

d'Olmos,…). Chaque personne inscrite a ainsi droit à une parcelle qu'il vendra à terme au plus offrant. Il ne s'agit donc plus d'un transfert foncier à but productif mais bien spéculatif.

Ce phénomène témoigne encore une fois de l'augmentation importante de la valeur de la terre ces dernières années. Dans ce marché foncier aux multiples enjeux, il semble de plus

en plus difficile pour le petit producteur d'avoir accès au foncier et notamment au foncier irrigué.

c) Des services mieux assurés

Alors que les débats autour du projet d'irrigation s'intensifient et que les opinions divergent au sein de la population concernée ou non, une multitude de nouveaux programmes dirigés par la municipalité sont nés au début des années 2000 : électrification des hameaux du

district d'Olmos, amélioration de routes joignant Olmos et ses hameaux, proposition de formation techniques à la culture fruitières et maraîchères,…(CICAP, 2003). L'intérêt n'est

pas de savoir si ces projets ont été menés à bien (et dans la plupart du temps, la lenteur et l'inefficience des opérations démontrent une volonté publique ambigüe). Leurs existences, même si elles ne furent qu'administratives, témoignent du regain d'intérêt dont fait part le

gouvernement à l'égard d'Olmos depuis que la zone abrite un projet d'irrigation de grande ampleur et qu'elle est placée au centre des préoccupations publiques.

De multiples exemples renseigne de la volonté des institutions agricoles à moderniser 19 la petite agriculture d'Olmos.

19

Le terme de " moderniser" est utilisé comme l'entend le gouvernement péruvien : une agriculture plus

performante, employant des systèmes d'irrigation technicisés, suivant des itinéraires techniques hautement

performants et intensif à l'hectare (chimisés, moto-mécanisés) afin d'être compétitif sur les marchés mondiaux.

L'exemple le plus marquant est illustré par le PEOT qui, parallèlement à la supervis ion du projet d'irrigation, organise les producteurs des vallées irriguées en association dans le but de

transformer les systèmes de production vivrière en systèmes plus technisés (irrigation de précision) orientés vers les cultures d'exportation. Ce point est approfondi dans la partie suivante.

Autre changement récent : un certain nombres de banques, autrefois inexistantes dans la ville, ont ouvert des bureaux assurant un meilleur service bancaire (CajaPiura, AgroBanco, Banco De

Credito, BBVA Continental). Cette amélioration du secteur bancaire est primordiale pour les nouveaux entrepreneurs agricoles qui doivent réaliser des transferts financiers très régulièrement

notamment pour les petites dépenses du quotidien (rémunérations des salariés, entretiens et réparations de machines…). Beaucoup d'entrepreneurs attestent qu'auparavant, le manque de banques à Olmos les obligeaient à se rendre à Chiclayo pour effectuer leurs transferts financiers

ou à payer des commissions supplémentaires en les réalisant à Olmos. Bien qu'aujourd'hui cela reste encore un problème, la situation s'est améliorée du fait de la multiplication des caisses

bancaires. Concernant la petite agriculture, la banque AgroBanco, dédiée au secteur agricole, s'est installée il y a 7 mois en parallèle du projet d'irrigation et a ouvert une nouvelle ligne de crédit permettant

aux producteurs d'emprunter à un taux inférieur aux taux proposés par d'autres institutions financières. Ces prêts sont destinés au financement de puits électrifiés et de sys tème d'irrigation

technisés. Ils prévoient en parallèle un service d'accompagnement et de suivi des producteurs sur la production de culture d'exportation. Par ailleurs, le Ministère de l'Agriculture et de l'Irrigation a créé, il y a quatre ans, un Programme de Compensation pour la Compétitivité appelé AgroIdeas

destiné à soutenir les petits et moyens agriculteurs organisés en association et désirant moderniser leurs activités en leur octroyant des subventions. Ce programme est par ailleurs en partenariat avec le PEOT pour la formation des associations de producteurs abordée

précédemment. Quant à la municipalité, elle obtint cette année une perforeuse de puits mise à la disposition des

comuneros. Avec le programme d'électrification en cours, quelques puits ont pu être raccordés à l'énergie triphasée. Enfin, les entreprises de vente de fertilisants, plus nombreuses qu'avant (cinq entreprises au total à Olmos), proposent de plus en plus de formations destinées aux moyens et

petits producteurs sur l'entretien des cultures et l'emploi des engrais chimiques et des produits phytosanitaires.

Bien que ces marques de "modernité" ne soient encore qu'à l'état embryonnaire, elles témoignent non seulement de la volonté de l'Etat d'encourager le secteur de l'agro- industrie mais

aussi de son intention de moderniser la petite agriculture, d'augmenter sa productivité à l'hectare et de l'orienter vers les marchés de l'export. Les objectifs de croissance agricole visés par l'Etat

dépendent d'une augmentation des surfaces cultivées et d'une intensification des flux de biens agricoles. Mais comme nous le voyons dans ce chapitre, ces éléments bien visibles dans le paysage s'accompagnent d'une réorganisation plus profonde des éléments constitutifs d'une ville

qui s'apprête à accueillir de nouveaux acteurs promoteurs de cette croissance. Les modifications ne figurent pas uniquement dans les flux et relations qui lient Olmos à l'extérieur, elles touchent

également l'organisation interne de la ville, ses équipements, ses infrastructures et bien sûr ses habitants. La citation de O. Dollfus prend ici tout son sens : "Les processus de mondialisation s'internalisent dans les sociétés, avec des temps de réponses propres à chaque ensemble" (La

mondialisation, 1997). Et c'est cette diversité des temps de réponse qui fait du développement un processus difficile à généraliser au sein de tous ces ensembles. Chaque ensemble vise des

objectifs de développement distincts à des échelles et selon des délais différents. Il n'est donc pas toujours aisé pour les institutions de développement de proposer des projets en adéquation avec les objectifs spécifiques de ces ensembles et plus particulièrement des plus

vulnérables.

Partie 3. Un processus qui pourraient s'intensifier demain

Le projet d'irrigation, en tant que catalyseur de l'intégration des terres d'Olmos au reste du monde, a permis l'émergence de nouvelles influences mondialisées qui n'avaient pas vu le

jour avec l'apparition des entreprises à partir des années 2000 : capitaux étrangers mobilisés pour la construction des infrastructures (maître d'œuvre brésilien), achat des terres par des entreprises étrangères (entreprises péruvienne-norvégienne, uruguayenne), agriculture

performante destinée majoritairement à l'exportation… Situé à l'échelle du gouvernement régional, le projet a des effets, actuels et à venir, tant sur les entreprises des anciennes vallées

irriguées que sur les petits producteurs de ces mêmes vallées. Appuyée d'une littérature récente ayant trait aux nombreux projets d'irrigation réalisés ces dernières années par le gouvernement, nous tenterons d'analyser les premiers effets du projet à l'abri d'un modèle

manichéen dont la seule issue serait de diabolisation le PEOT, premier organe institutionnel responsable du projet.

IV. Le PEOT, un "projet social" Objet de controverse, l'accès à l'eau résultant du projet d'irrigation est

curieusement un des sujets les plus incertains qui soit. Alors que l'intention première du projet était de donner accès aux petits producteurs des vallées irriguées d'Olmos20, il semble aujourd'hui avoir été dépassé par de nouveaux objectifs.

a) La mise en place des associations de producteurs

L'originalité du projet d'Olmos relève de la pluralité de ses bénéficiaires. Du côté des nouvelles terres irriguées, il est exclusivement destiné à l'agro-exportation. Au sein des anciennes vallées irriguées, le projet se veut, selon les mots du PEOT, le promoteur d'un

nouveau système institutionnel "à caractère social" (cf site web du PEOT "Responsabilidad social") . Pour ce faire, des associations de petits producteurs sont actuellement formées par le

PEOT en partenariat avec la Junta de Usuarios, l'ANA (Agence Nationale de l'Eau), AgroIdeas et AgroBanco.

L'objectif final de ces associations est de cultiver des produits destinés à l'exportation qui nécessitent un accès à l'eau permanent doublé d'un système d'irrigation de précision. Mais

le projet, par l'intermédiaire de l'entreprise concessionnaire Odebrecht, se charge uniquement de la construction des infrastructure d'irrigation majeures21, c'est-à-dire le tunnel et le canal. Les infrastructures mineures reliant les parcelles au canal et le système d'irrigation sont à la

charge des producteurs. Or il est évident que les petits producteurs ne possèdent pas le budget nécessaire à la construction d'un tel réseau.

Ainsi, le premier rôle du PEOT est de donner accès à des financements (subventions ou crédits) aux producteurs pour la construction de ces infrastructures mineures. Pour cela, il

aide les agriculteurs intéressés par le projet à s'organiser en association.

20

L'origine du projet date de 1920 lorsque l'ingénieur Charles Sutton développa l'idée de déplacer les eaux de

fleuve andin pour irriguer les terres arides d'Olmos . Selon cet ingénieur, ce projet était consacré en premier lieu

aux petits producteurs afin qu'ils puissent "développer une agriculture plus intensive et diversifiée destinée à

nourrir la population péruvienne au détriment de l'exportation" (Victor Perez Santisteban, 1980, tiré de l'art icle

de L. Del Castillo, 2012). 21

Terme employé par le PEOT

78

Le système de financement préconisé par le PEOT n'est pas simple.

Il se divise en deux : - D'abord le financement des infrastructure d'irrigation qui est financé à 70% par AgroIdeas

sous forme de subventions, à 21% par un crédit d'AgroBanco22 avec remboursement différé d'un an pour attendre la récolte prochaine et les 9% restants sont à la charge du producteur. - Ensuite, le financement de la campagne de cultures d'exportation qui nécessite des

consommations intermédiaires bien supérieures aux consommations intermédiaires dépensées habituellement par les producteurs. Ce système de culture nécessite donc lui-aussi un

financement. Et pour cela, le dispositif qu'est en train d'élaborer le PEOT met en œuvre un nouvel acteur : l'investisseur. Celui-ci se chargerait de financer la campagne. Les productions seraient alors vendues à cet investisseur qui s'occuperait lui-même de l'écouler sur les marchés

mondiaux. Ces investisseurs auraient donc à la fois le rôle de banquier et d'intermédiaire. Le suivi technique serait assuré par le PEOT. Les termes du contrat de production (notamment la

déduction des investissements et consommations intermédiaires) et de vente (prix d'achat producteur et grossistes) ne sont pas encore fixés et dépendent des investisseurs intéressés.

Le second rôle du PEOT est de proposer de nouveaux systèmes de culture aux producteurs afin de remplacer les cultures vivrières (maïs, haricot) et fruitières non-exportées

(fruit de la passion, citron) par des cultures exportables. Le choix du PEOT s'est actuellement arrêté sur la banane issue de l'agriculture biologique qui, selon lui, possède un marché ciblé et encore peu exploité par les régions alentours. Chaque producteur administrerait sa parcelle,

seule la vente des productions serait commune. Pour l'instant le PEOT ne souhaite imposer aucune limite de surface cultivée et n'exclue pas les cultures vivrières complémentaires. La

seule obligation imposée par le financement d'AgroIdeas est d'orienter son système vers une culture d'exportation, proposée ou non par le PEOT. Cette obligation est tout à fait en continuité avec la stratégie économique du gouvernement qui consiste à stimuler les

exportations agricoles du pays et ce, sans considération les stratégies propres à la petite agriculture (gestion du risque, modification profond des systèmes de culture, appropriation de

l'innovation,…). Ce constat pose également la question de l'autosuffisance alimentaire et de la place de l'agriculture vivrière dans l'économie nationale (cette question sera détaillée plus bas).

Ce projet très ambitieux est loin d'être facile à mettre en place et depuis ses débuts,

l'équipe du PEOT tente de l'adapter aux réalités sociales et économiques d'Olmos. Par exemple, pour la formation des associations, le PEOT s'est heurté à des contraintes d'ordre administratives et organisationnelles (titularisation des parcelles, inscription dans le Registre

Publique, grande dispersion des parcelles d'une même association, …).

Les difficultés rencontrées sont en majorité liées à la méfiance des villageois qui accordent peu de confiance aux ingénieurs du PEOT. Les raisons sont multiples : les conditions d'accès du gouvernement aux terres de la Communauté ne furent pas sans revendications paysannes ;

la confiscation des terres demeurent très mal vécue par les producteurs qui jugent que l'Etat a outrepassé ses droits. Ce sentiment a été aggravé par la vente des terres aux entreprises et la

distribution très inéquitable de l'eau détournée par le projet (38000ha de nouvelles terres irriguées vendues aux entreprises contre 5500ha dans les vallées anciennes) ; le projet implique en outre de grosses dépenses d'investissement pour des agriculteurs des types

Producteur vivrier ou Eleveur pluriactif ayant une trésorerie et un accès au crédit très limités.

22

La banque AgroBanco n'est pas censée accorder de prêt aux producteurs ne détenant pas de titres de propriété

privée. Mais dans ce cas, les membres des associations sont soutenus par le PEOT et par AgroIdeas qui servent

de garantie à la banque.

79

Les difficultés de remboursement du crédit, le risque de s'endetter et de perdre sa terre mise

en hypothèque sont des craintes profondément ancrées dans les mentalités des producteurs, résultat d'une construction historique longue ; les nombreuses institutions financières et de

développement (AgroBanco, AgroIdeas, PEOT) mises en jeu au sein du projet impliquent beaucoup de contraintes et une certaine perte d'indépendance selon les producteurs : obligation d'achat de l'eau alors qu'elle est plus chère, obligation de cultiver la banane bio, de

travailler avec le PEOT, d'être associé à d'autres producteurs, de vendre à des clients imposés… ; de plus, le manque de confiance dans les leaders paysans souvent accusés de

corruption, le fort absentéisme aux réunions et le manque d'esprit d'équipe sont autant de limites auxquelles doivent faire face les formateurs. Outre ces contraintes structurelles, le PEOT a plusieurs fois changé de stratégie d'action : il y

a deux ans, lors des premières formation d'association, le projet était de former un groupe associatif par zone (appelée bloc) (annexe 53), mais la taille des groupes (plus de 1000ha et de

100 membres) entraina de grandes difficultés de gestion et n'entrait pas dans les critères de sélection d'AgroIdeas. Ils abandonnèrent alors ces premiers groupes et formèrent des associations plus petites constituées de membres dont les parcelles étaient voisines les uns des

autres. Enfin, le projet étant encore en cours, toutes les conditions concernant l'accès à l'eau ne sont

pas encore actualisées (prix de l'eau, quantité disponible) ; les ingénieurs porte-parole du projet ne détiennent pas l'ensemble de ces informations et dans ce contexte déjà complexe, le manque de clarté, de précision et de crédibilité portent atteinte à l'avancée du projet.

Cet ensemble de facteurs ne facilite pas la formation des associations et le PEOT a accumulé

un certain retard dans l'organisation de ces vallées.

b) De potentielles sources de conflits

S'il est vrai que le bouleversement est inhérent au changement, il est des situations qui

constituent un terreau particulièrement fertile à l'émergence de conflits. A Olmos, plusieurs niveaux de désaccords sont à considérer. En premier lieu, il est nécessaire de poser la question du choix des bénéficiaires, en terme de zonage et en terme de systèmes de production.

Les raisons de ces choix semblent très pragmatiques : les zones bénéficiaires doivent être

situées à proximité du passage du tuyau et du canal et sont dans l'ensemble très sensibles aux variations des précipitations. Ces choix paraissent plutôt logiques au vu des contraintes de production dont parlent les agriculteurs. Une première différenciation apparait pourtant entre

les zones bénéficiaires et les zones plus éloignées du passage de l'eau.

Concernant le choix des bénéficiaires, celui-ci ne parait pas avoir été réellement ciblé : on retrouve, dans les associations, des producteurs ayant un puits équipé d'une motopompe, des producteurs avec un puits manuel et des producteurs n'ayant pas de puits du tout. La seule

contrainte effective réside dans le fait d'avoir une parcelle disponible pour cultiver. Le reste ne dépend que de l'intérêt du producteur lui-même dans le projet, de sa motivation envers le

changement et de sa capacité à prendre ce risque. De par ce relatif laxisme pour la sélection des bénéficiaires, le PEOT se protège contre l'éventuelle accusation résidant dans le fait de privilégier certaines catégories de producteurs. Les éleveurs sans terre ou les locataires

demeurent néanmoins excluent du projet.

80

Ainsi, au sein d'un même hameau situé en zone bénéficiaire, il y a les producteurs intégrés au

projet, des producteurs n'ayant pas désiré y adhérer et ceux dont le choix ne s'est pas présenté (type Locataire ou Eleveur).

De par ce constat, une nouvelle différenciation d'accès à l'eau et aux services va certainement apparaitre. La typologie élaborée en première partie fait déjà surgir différents accès aux facteurs de production et notamment à l'accès à l'eau. Les nouvelles opportunités créées par le

projet sont susceptibles de réorganiser intégralement le système agraire des vallées irriguées en faisant cohabiter des exploitants dont les systèmes seront en pleine transition avec des

exploitants ayant conservé leurs systèmes de production habituels. Les nouveaux systèmes de production soutenus par le PEOT n'étant qu'à l'état de projet, il est difficile d'estimer l'ampleur de ce changement et de ses conséquences.

Même si, au fil des entretiens, aucune rivalité entre les producteurs et éleveurs ayant ou non

accès à la terre ou à un puits ne se sont manifestées, cela ne signifie en rien qu'elles n'existent pas. Nous ne pouvons exclure le risque qu'elle apparaissent ou, si elles existent, qu'e lles ne s'aggravent. Les projets de développement, quelle que soit la manière dont ils sont présentés,

créent nécessairement des bouleversements dans l'accès aux facteurs de production entre les bénéficiaires et les non-bénéficiaires. Le PEOT a fait le choix de privilégier les questions

pratiques d'accès au canal (proximité du passage de l'eau, accès à une parcelle cultivable) à la sélection des agriculteurs les plus vulnérables en terme d'accès à l'eau, par exemple. Quel que soit ce choix, il est nécessaire d'envisager et d'anticiper les différends, rivalités ou

conflits susceptibles de se manifester de par cette différenciation d'accès au projet. La question fondamentale reste complète : en tant que promoteur du projet, le PEOT est-elle

l'institution chargée légitimement de gérer ces conflits potentiels ? A-t-elle prévu de les gérer ? Le cas échéant, comment va-t-elle les solutionner ?

c) Des opportunités risquées

On se propose maintenant d'écarter les différenciations d'accès à l'eau et aux services abordées ci-dessus et de considérer plus précisément le projet productif proposé par le PEOT. Inspiré par le succès d'une association de producteurs de bananes bio dans la région de Piura

(Asociación de Pequeños Productores Orgánicos de Querecotillo-APOQ), le PEOT souhaite développer la culture de banane qui constituerait le premier produit cultivé par les petits

producteurs-planteur d'Olmos et destiné exclusivement à l'exportation. Cette transition entre les systèmes originaux (Type Eleveur pluriactif, Produc teur vivrier ou Petit planteur) et le système prévu par le PEOT semble particulièrement délicate car elle

implique un changement radical du système de production à tous les niveau :

- la technique : modification du système d'irrigation par le passage d'un système gravitaire à un système de goutte-à-goutte. Elle implique des formations pour la gestion du système lui-même et pour l'itinéraire technique à suivre avec ce dernier (reconnaissance d'un manque ou

d'un excès d'eau, dosage des fertilisants,…).

- le coût de l'eau : première source de conflit entre les producteurs et le PEOT, le prix de l'eau annoncé à 0,70$/m3 est supérieur au prix actuel de l'eau (0,014soles/m3 soit 0.038$/m3 avec la Junta de Usuarios).

81

Ce nouveau tarif23 entraine une augmentation de 54% des coûts d'irrigation. Les économies

réalisées par le système de goutte-à-goutte seront-elles si significatives avec une telle différence de prix ? Car l'intérêt premier des producteurs, outre le fait de pouvoir cultiver en

permanence, reste bien d'abaisser les coûts de production. - la reproduction de la fertilité : rares sont les producteurs qui réalisent des rotations régulières

et qui intègrent de long temps de friche à leur système de culture. Ces pratiques sont en grande partie liée aux épisodes de sécheresse. Mais avec ce nouveau système d'irrigation, les

agriculteurs seront potentiellement en mesure de cultiver leurs parcelles en continu, sans interruption. A terme, des problèmes de reproduction de fertilité risquent d'advenir si les nouveaux systèmes de culture ne prévoient pas des temps de retour suffisamment long ainsi

que des rotations et temps de friche adaptés. La perte de fertilité des sols est un phénomène déjà visible dans les plantations de fruit de la passion et de piment (baisse des rendements et

de la durée du cycle de production, apparition de virus, résistance de pathogènes) qui conduit à l'augmentation de l'utilisation de produits chimiques depuis quelques années 24. Les systèmes de cultures performants encouragés par le gouvernement (au travers du Ministère de

l'Agriculture et de l'Elevage, notamment) paraissent peu scrupuleux de la dégradation de la qualité des sols. L'équilibre entre performances économiques et écologiques est encore loin

d'être une priorité pour le gouvernement. - le système de production : remplacement du système de culture sur lequel se base la majeure

partie du revenu agricole familial. Les entrées et sorties d'argent sont modifiées entrainant une redéfinition des stratégies développées par les producteurs. Ce niveau nécessite une attention

particulière car elle met en jeu l'intégralité du système de production et non simplement celui du système de culture. L'intégralité du calendrier de travail et de la trésorerie va subir des transformations. Quelles sont alors les conséquences à prévoir sur les systèmes de culture et

d'élevage originalement complémentaires et sur leurs interactions ?

- l'investissement : lié au calendrier de trésorerie, les agriculteurs doivent baser leur campagne sur le crédit. Certains utilisent déjà des crédits pour acheter les consommations intermédiaires nécessaires au fruit de la passion. Mais la grande majorité préfère ne pas y

avoir recours. Outre la peur de l'incapacité de pouvoir rembourser, c'est aussi l'ensemble de la trésorerie qu'il faut revoir de manière à respecter les annuités. La banque ou l'investisseur

associé au projet ont-t- ils prévue d'assurer un tel suivi pour les producteurs n'ayant encore jamais eu accès au crédit ?

- l'organisation sociale : le projet impose une nouvelle organisation pour l'ensemble du processus de production et de commercialisation. Bien que chaque producteur administre sa

parcelle, les formations et les suivis techniques, la mise en commun de la production et la vente se feront entre les membres associés. Même les premières demandes de crédit doivent se faire en commun pour la mise en place du système (les crédits futurs liés à la production

seront probablement individuels). Ce système n'est évidemment pas voué à l'échec, les sciences sociales n'étant pas prédictives, nous ne pouvons savoir comment les agriculteurs

peuvent réagir face à cette nouvelle organisation. La méfiance dont ils font preuve n'est cependant pas à éluder et un travail de mise en confiance est indispensable (il a d'ailleurs débuté avec la formation des associations mais devrait se poursuivre sur la durée).

23

Ce tarif est imposé par l'entreprise concessionnaire Odebrecht qui a réalisé l'ensemble des infrastructures

hydrauliques. Elle bénéficie pour quelques années des bénéfices de la vente de l'eau. A terme, ces bénéfices

reviendront à l'Etat. 24

Elément issu des observations et témoignages de la grande majorité des producteurs enquêtés.

82

- le respect de qualité : de nouvelles exigences sont à prévoir tant au niveau de la production (respect du cahier des charges de l'agriculture biologique) que de la commercialisation (les

clients et consommateurs des pays importateurs ont généralement de plus hautes exigences de qualité) avec le risque important de produits mis à l'écart (marché national ou local) ou perdus que cela entraine.

Ces changements sont d'autant plus importants qu'ils surviennent d'un seul coup, en

une seule étape. Le projet ne prévoit pas de période d'adaptation au système d'irrigation par exemple. Alors que l'implantation du goutte-à-goutte constituerait déjà un changement dans les systèmes de cultures saisonniers ou pérennes (économie d'eau, meilleur rendement,

meilleure qualité), le projet ne laisse pas le temps aux producteurs de se l'approprier avec les cultures qu'ils connaissent. Les critères d'accès aux subventions sont tels que les bénéficiaires

sont contraints d'orienter leurs systèmes vers l'exportation. Celui-ci s'inscrit dans la politique néolibérale du gouvernement en place et les contraintes de commercialisation que connaissent les agriculteurs de la zone les encouragent à cibler des marchés plus stables et caractérisés par

un risque faible de saturation. Mais un tel changement requiert des adaptations structurelles et profondes qu'ils ne faut pas sous-estimer. Une transformation progressive est souvent source

de durabilité. De plus, le PEOT va mettre à disposition un paquet technique très sophistiqué à un

ensemble d'exploitants aux caractéristiques distinctes. La variabilité des systèmes de production intégrés au projet peut entrainer des difficultés de gestion. Tous les agriculteurs ne

possédant pas les mêmes objectifs en terme de surfaces à cultiver, de rendement et de génération de revenu, le PEOT va endosser le rôle d'un chef d'orchestre bien peu homogène. Cependant, il est probable que cette étude ne fasse pas état de l'ensemble des stratégies

d'action du PEOT et que ce dernier ait prévu différentes méthodes adaptées à chaque catégorie de producteur. Il serait intéressant de réaliser une étude spécifique à l'action du PEOT lors du

commencement réel du projet. En dehors des contraintes énoncées ci-dessus, il faut également considérer

l'intervention de l'investisseur, le nouvel acteur au rôle essentiel. En finançant la campagne et en achetant la récolte, il contrôle les coûts de production et le prix d'achat au producteur. Ce

système ressemble aux contrats utilisés par les entreprises de piment auprès des propriétaires et entrepreneurs. Les risques liés aux conflits d'intérêts abordés dans le chapitre 2 concernant le contrat entre entreprises et entrepreneurs existent également pour ce cas de figure. Les

termes du contrat doivent donc être étudiés afin d'obtenir des garanties suffisantes pour les deux parties prenantes de la transaction : modalités de vente (prix, de quantité produite et

vendue, transport et flet,…), organisation de la production (surface minimum cultivée, coût de production,…), durée du contrat. Les producteurs de fruit de la passion ont déjà vécu l'expérience d'un contrat assurant un prix de vente fixé minimum en 2005 avec l'entreprise de

transformation Quicornac. Malheureusement, ce prix minimum ne fut pas respecté et lors de la chute du prix de vente, beaucoup de producteurs firent faillite. Cet épisode ne facilite pas la

mise en place d'un contrat similaire entre les producteurs et ce potentiel investisseur. Le manque de confiance des producteurs reste un élément majeur à prendre en compte pour la réalisation de ce projet.

Ce projet du PEOT contient une visée sociale. Au vu de la complexité des conditions

de mise en œuvre du projet d'irrigation, il est légitime de se demander si les associations ne sont pas une façon de "compenser" le tort fait aux habitants des vallées irriguées.

83

Quelles que soient les raisons d'existence du projet social du PEOT, les efforts réalisés par

l'équipe et les producteurs pour s'emparer des opportunités qui s'offrent à eux existent bel et bien. En revanche, l'ambition du projet risque de compromettre son succès et d'affecter encore

la confiance des paysans dans les institutions nationales de développement.

d) Un impact relatif sur les moyens et grands producteurs

Les contraintes de production entre petits, moyens et grands producteurs ne sont

évidemment pas les mêmes. L'accès à l'eau constituant le principal facteur limitant pour les petits producteurs, il ne l'est pas pour les autres. Ces derniers doivent faire face à des contraintes bien différentes ne faisant pas l'objet d'une intervention directe du PEOT.

Ces catégories de producteurs possèdent leur propre source d'eau, issue d'un ou de

plusieurs puits tubulaires. Leur préférence concernant l'irrigation dépend en grande partie du prix de l'eau et de la praticité de son accès. Actuellement, les producteurs ont deux possibilités pour faire fonctionner leur puits :

- le combustible : 0,09$/m3 - l'énergie électrique : 0,027$/m3

L'eau proposée par le PEOT coûtera probablement 0,07$/m3, ce qui constitue une bonne alternative pour les entrepreneurs ou moyens producteurs n'ayant pas accès au réseau

électrique. Cependant, les démarches pour acheter l'eau, les investissements nécessaires pour construire les infrastructures reliant le canal principal à la parcelle et la perte de temps lié à

l'acheminement de l'eau découragent les producteurs qui préfèrent payer une eau un peu plus chère et l'avoir à disposition dans le puits situé directement dans la parcelle. La majorité des producteurs de ces types (Planteur moyen, Entrepreneur, Entreprise) se tournent plutôt vers

l'équipement électrique de leurs parcelles. L'électricité est contrôlée par une entreprise privée péruvienne ElectroNorte (anciennement publique) qui propose des prix stables et dégressifs

hors des heures de pointe. Cet équipement est un investissement durable et les entrepreneurs préfèrent l'individualité que leur offre cette entreprise à la potentielle source de conflit que pourrait constituer l'eau du projet. D'autant plus que cette entreprise étant péruvienne, elle

permet de maintenir la richesse créée au sein du pays.

L'objectif de nombreux producteurs moyens est d'installer cet équipement. Certains en font une priorité pour faire baisser les coûts de production liés à l'irrigation. La contrainte de l'accès à l'eau permanente laisse place à celle de l'équipement électrique pour ces producteurs.

Mais ce raccordement ne dépend pas uniquement d'eux. En l'absence de réseau dans la plupart des zones isolées, les producteurs n'ont pas la possibilité de se procurer cette source

énergétique. L'installation des réseaux dépend principalement de la municipalité ou du gouvernement régional qui décident d'intégrer ou pas ce service dans leurs priorités. Seuls les entrepreneurs disposant d'une trésorerie conséquente peuvent envisager une installation sans

intervention des institutions nationales, et même eux s'associent généralement à d'autres pour partager les investissements.

84

V. Une réorganisation des flux

a) Les entrepreneurs face aux différents scenarii possibles

L'apparition de nouvelles entreprises multinationales à proximité d'Olmos dans la zone prochainement irriguées aura certainement un impact considérable sur l'agriculture,

notamment en terme de flux de biens et de personnes. Il y a cependant peu de certitude concernant la nature des productions visées par ces entreprises. A l'aide de l'ensemble des témoignages récoltés sur le sujet, les cultures a priori sélectionnées seraient const ituées de

canne à sucre, de raisin, d'avocatier et d'asperge si les températures le permettent. Ainsi, nous formulons l'hypothèse que les flux correspondant à ces productions vont subir des

transformations majeures. Les autres flux de citron, de fruit de la passion ou de maïs seront également affectés mais de manière indirecte. Dans tous les cas, il n'est pas aisé d'émettre des prévisions sur l'évolution des flux car ils dépendent beaucoup de la réponse des marchés face

à la nouvelle offre abondante que constituera la zone de production. Les entrepreneurs des anciennes vallées irriguées produisent à l'heure actuelle piment et raisin

en majorité. De nouvelles cultures ont également fait leurs apparition il y a quelques années tels que l'avocatier ou l'asperge (apparue seulement cette année). L'activité des actuelles et futures entreprises auront donc la même activité : la production et la transformation de biens

agricoles.

Basés sur la méthode d'analyse sectorielle, p lusieurs scenarii sont proposés. Ces scenarii dépendent des secteurs et marchés visés par les nouvelles entreprises (mêmes produits, mêmes marchés visés ?) :

- Les nouvelles entreprises multinationales visent de nouveaux marchés et créent ainsi des opportunités de vente pour les entreprises actuelles déjà installées qui ont la possibilité de s'y implanter et de bénéficier de nouveaux débouchés (dans ce cas, les entreprises ont un rôle de

"suiveur" car elles visent les mêmes marchés). Ce scenario implique que l'offre créée par les nouvelles entreprises ne suffise pas à couvrir la demande des marchés et que les entreprises

actuelles profitent de cet écart pour compléter l'offre. Dans ce cas, ce nouveau débouché dépend beaucoup de la capacité des marchés visés à absorber l'offre, des quantités produites par les futures entreprises et de leurs stratégies commerciales concernant les autres entreprises

concurrentes.

- Les nouvelles entreprises visent les mêmes secteurs d'activités (avocat, asperge, piment, citron) et les mêmes marchés. En véritables concurrentes, elles inondent le marché de leurs production. De part la taille de leur exploitations, elles réalisent de grandes économies

d'échelle, ont des coûts de productions réduits et sont capables de vendre des productions à prix inférieurs. Dans ce scenario, il est probable qu'avec les lois du libre-échange, l'ensemble

des prix diminuent ce qui affecteraient négativement la situation des autres entreprises, contraintes de se tourner vers d'autres marchés ou d'autres produits.

- Les marchés visés par l'ensemble des entreprises multinationales ou individuelles présentes dans les deux zones sont distincts et peu perméables. Dans ce cas, chacun conserve sa part de

marché et continuent à tendre vers les marchés les plus attractifs. Dans le cas du raisin, les entrepreneurs individuels ont accès à un marché en pleine

expansion. Il est peu probable qu'ils se risquent à interagir avec les nouvelles entreprises, bien plus grandes. Leurs stratégies résideraient plutôt dans la conservation de leurs parts de marché

respectives afin de sécuriser leurs ventes et débouchés. Concernant le piment, son marché semble un peu plus saturé.

85

Des baisses de prix sont déjà survenues affectant les bénéfices des entrepreneurs (selon

témoignages). Bien qu'aucun témoignage ne fasse état de cette culture dans la nouvelle zone, il se peut qu'avec une augmentation de la production, les prix ne se maintiennent plus. Les

producteurs et entreprises devront alors se tourner vers d'autres variétés de piment ou faire le choix de cultures de remplacement. L''avocatier en est encore un autre cas de figure. Apparu il y a quelques années dans la région,

il commence seulement à se développer. Encore peu de plantations d'avocatiers sont enregistrées dans la région (142ha selon le recensement agra ires de 2012) et les arbres encore

jeunes ne sont pas encore en pleine production. Les entreprises se consacrant à sa culture ont donc accès à un marché attrayant dont la fenêtre commerciale est décalée par rapport aux autres zones de production (Trujillo). Les prix sont élevés et la demande bat son plein. Ce

marché attractif n'a pas échappé aux entreprises. Avec une augmentation de l'offre, la séduction de ce marché risque fort d'être éphémère et certains entrepreneurs de la zone

pensent déjà à la reconversion des plantations d'ici quelques années. Les flux des autres productions telles que le citron ou le fruit de la passion vont sans

doute subir des modifications indirectes. Par exemple, si contrairement à la prévision précédente, le marché de l'avocatier se développe, il se peut que les avocatiers acquièrent une

place plus importante dans les systèmes de production, affectant nécessairement les productions de fruit de la passion ou de citron.

L'arrivée de nouveaux acteurs sur la scène agricole n'influence pas seulement le volet commercial mais également productif. La concurrence pour les ressources (eau, force de

travail, intrants agricoles) risquent de s'accentuer et réorganisant complètement les rapports de force entre les deux zones. Ces nouvelles entreprises peuvent aussi être à l'origine d'externalités positives, notamment sur

les infrastructures (routes, réseau électrique, etc.). Les routes sont généralement disponibles pour tous les usagers sans distinction. En revanche, l'accès au réseau élect rique ne dépend pas

uniquement de la présence du réseau mais bien des conditions d'accès (possibilité de se raccorder au réseau, coûts engendrés) qui résultent des relations qu'entretiendront ces nouvelles exploitations avec le reste de la population.

Aucune culture ne peut être à l'abri de modifications dans un tel contexte où plus de

38000ha de désert seront convertis en un oasis d'agriculture intensive. Directes ou indirectes, ces transformations contraindront les producteurs, petits et grands, à revoir leur stratégies, à poursuivre ou changer la trajectoire de leurs systèmes de production suivant les opportunités

et limites occasionnées par le projet. D'importants changement sont à prévoir mais pour l'instant, il est bien difficile d'en prévoir les conséquences sur l'agriculture d'Olmos.

b) Modification des systèmes de production et migrations de travail

Les flux de production agricoles ne seront pas les seuls à subir de grandes modifications. Dans un tel contexte d'expansion rapide de l'agro-industrie, les offres de travail

salarié vont très probablement croître afin de répondre aux exigences de main d'œuvre. Bien qu'aucun chiffre ne puisse l'appuyer, il est envisageable que la population agricole d'Olmos ne suffise pas à couvrir les besoins de main d'œuvre des entreprises actuelles et nouvellement

installées. Des migrations de travailleurs sont donc attendus pour répondre à ses besoins. Les travailleurs salariés pourront être originaire d'Olmos ou de régions plus éloignées.

Actuellement, ils viennent principalement des régions montagneuses. Mais ces nouvelles migrations de travail pourront concerner toutes les régions alentours caractérisées par une

86

faible quantité de travail disponible, une pression foncière importante ou encore des

conditions climatiques ne facilitant pas l'agriculture.

De plus, comme abordé dans la partie I c), avec l'augmentation des surfaces cultivées et pour des raisons d'économies d'échelle, les entreprises nécessitent de plus en plus de travailleurs expérimentés pour certaines tâches (taille du raisin par exemple). Ces nouvelles

exigences impliquent soit la formation des travailleurs actuels à ces tâches particulières, soit la délocalisation de la force de travail expérimentée dans les exploitations qui le nécessitent.

La première option apparait plus économique mais elle est chronophage. Le choix dépend des économies et bénéfices réalisés par la délocalisation de la main d'œuvre. Si les coûts de transport et d'hébergement restent inférieurs aux bénéfices réalisés par

l'entrepreneurs, la seconde option peut être réellement envisagée.

N'ayant pas encore connaissance des prévisions culturales précises dans la zone irriguée du projet, il est difficile de prévoir la quantité de travail créée. Toutefois, selon le PEOT, la création de travail correspondrait à environ 40 000 postes directs et 120 000 postes présumés,

tous travailleurs confondus, qualifiés ou non qualifiés (La Republica, 08/04/2013).

Ce constat, loin d'être une nouveauté, ne prend pas en considération les structures agraires de la zone. Alors que le gouvernement utilise l'argument de la création d'emploi comme fer de lance pour légitimer le projet, rien n'indique que cette dernière enraye la

pauvreté et encore moins qu'elle constitue une requête de la part de la population agricole d'Olmos et de ses hameaux. Cette observation met en évidence le devoir d'intégrer les

stratégies paysannes dans les prévisions proposées par le PEOT. Basée sur la première modélisation réalisée dans la partie II a), nous avons procédé à la

modélisation de différents scenarii prenant en compte l'augmentation de la quantité de travail salarié. Ce nouveau scenario est modélisé dans le tableau suivant. Les modèles actuels

reprennent les mêmes résultats que la comparaison précédente. Deux scenarii sont proposés : - le premier représente un système de production conservant une campagne de maïs annuelle et dédiant le reste de son calendrier de travail à l'activité de salariat.

- le second représente un agriculteur ayant cesser de cultiver pour se consacrer uniquement à l'activité de salariat.

Chacun des scenarii met en jeu 1ha de maïs et un actif. Le tableau est placé est annexe (annexe 54).

Le scenario 1 est le plus rémunérateur en année sèche car l'agriculteur profite de l'augmentation du prix du maïs et en parallèle, de l'offre d'emploi abondante. En année

pluvieuse toutefois, la seconde campagne de maïs reste la meilleure option en terme de rémunération. Le scenario 2 quant à lui est peu rémunérateur et ne semble pas adapté aux trajectoires des systèmes de production étudiés à Olmos qui essayent systématiquement de

conserver une activité de production lorsqu'ils en ont les moyens. Ainsi, la stratégie la plus rémunératrice serait, selon cette modélisation, de réaliser une campagne de maïs et du salariat

en année sèche et deux campagnes de maïs complété par de salariat en année pluvieuse. Il est tout de même intéressant de constater que, bien que la culture de maïs reste au cœur des stratégies paysannes, le salariat a acquis beaucoup de poids dans les revenus familiaux au

cours des années : sa part ne dépassait pas 5% du revenu avant 2000 et il atteint 40% aujourd'hui. Bien que ces chiffres restent des estimations, elles illustrent l'évolution globale de

la composition du revenu agricole familiale au gré des transformations successives de l'agriculture.

87

Si les producteurs d'Olmos ne deviennent pas des travailleurs salariés à temps plein,

les migrations de travailleurs agricoles originaires d'autres régions du Nord du Pérou seront indispensables. Ces migrations à l'instar des flux agricoles contribueraient à la réorganisation

du système agraire d'Olmos avec toutes les conséquences qu'une augmentation rapide de la démographie implique (pression foncière accrue, expansion urbaine et dans le meilleur des cas, évolution des infrastructures et services publics ou privés de santé, de commerce, d'eau,

d'électricité, de transport…). La concurrence pour les facteurs de production envisagée dans la partie précédente se confirme.

Une trajectoire est à envisager : en cas de pénurie de main d'œuvre ou même dans le but d'attirer les travailleurs, les entrepreneurs pourraient être contraints d'augmenter encore la rémunération salariale ou de proposer des services aux salariés (couverture sociale, service de

transport, garderie pour enfants, service de restauration, éducation,…) comme c'est le cas au sein des entreprises de floriculture en Equateur prêtes à tout pour maintenir une main d'œuvre

bon marché et tempérer les éventuelles revendications sociales (Gasselin, 2006). Selon cette modélisation toujours, il est peu probable que les producteurs ayant la

possibilité de cultiver se tournent exclusivement vers le salariat. La gestion du risque confirme d'ailleurs cette hypothèse. Il est rare qu'un petit agriculteur privilégie une seule

source de revenu à la possibilité de diversifier son système. Cette observation permet de remettre en question la stratégie de PEOT qui rappelons- le est de baser les revenus des producteurs sur une seule culture. Cette stratégie parait bien trop risquer pour qu'elle soit

directement intégrée par les producteurs. Ces derniers se l'approprieront probablement d'une manière toute autre afin de conserver marges de manœuvre et répartition efficiente du risque.

Cette modélisation permet enfin de constater que même la petite agriculture commerciale est encore suffisamment rémunératrice pour que l'agriculteur ne se tourne pas vers le salariat agricole ou l'exode rural.

Ce constat est d'autant plus important dans un contexte où l'agriculture d'exportation

est largement favorisée au détriment de l'agriculture destinée à nourrir la population nationale. S'il est vrai que l'agriculture d'exportation apporte un réel dynamisme à l'économie nationale en terme de création de filières, d'emplois et de génération de devises (Mesclier et al., 2013),

le rôle de la petite agriculture demeure essentiel et ce, à des niveaux très variés. Selon P. Gasselin dans son article "Transformations historiques des agricultures autour de

Quito en Equateur : entre diversités et permanences" (2006), le maintien de la petite agriculture permet : - la sécurité alimentaire (de l'unité de consommation ainsi que des populations des villes et

des campagnes), - "la conservation d'un patrimoine foncier qui incarne une lutte historique pour l’accès à la

propriété privée et qui prend rapidement de la valeur, surtout près des voies de communication et des zones urbanisées" (valeurs symbolique, productive et spéculative qui ne cessent d'augmenter à Olmos),

- "l'occupation de la force de travail familiale qui serait bien en peine d’être salariée dans un marché de l’emploi sélectif (telle les personnes âgées et les enfants, […]),

- et la préservation d'une cohésion communautaire par laquelle ils tirent de nombreux avantages, à travers les filières de migrations pendulaires et des liens de solidarité qui restent plus efficaces que la protection sociale publique."

De plus, selon A. Karsenty interviewé dans une émission de France Culture (26/09/2012), la petite agriculture se révèle créatrice d'emploi à condition d'être encadrée et soutenue par une

politique agricole adaptée.

88

Si la création de richesse nationale générée par la petite agriculture n'est effectivement

pas comparable à celle créée par l'agriculture d'exportation, il n'en reste pas moins qu'elle détient de nombreux autres avantages et qu'elles concernent une part non-négligeable de la

population péruvienne (22% de la population est rurale selon FAOSTAT, 2013). Avec une population urbaine représentant plus des trois-quarts de la population, le pays doit mettre en place des stratégies efficaces pour nourrir l'ensemble de ses habitants. Avec une politique

agricole surtout orientée vers l'exportation, la stratégie adoptée par l'Etat semble être le recours aux importations pour alimenter les populations des villes.

En effet, selon l'annexe 55 la balance commerciale de 2007 à 2013, est globalement négative, les exportations agricoles restant inférieures aux importations (excepté en 2011). De plus, l'annexe 56 confirme que les importations agricoles concernent en majorité les produits de

consommation quotidienne (blé, maïs, sucre, riz). Dans un contexte de crise mondiale caractérisée par un commerce des matières agricoles très fluctuant, baser l'alimentation de sa

population sur les importations n'est- il pas risqué ? L'appareil productif agricole concernant ces denrées demeure peu efficient alors que la majorité de la petite agriculture est tournée vers ces cultures.

Le projet d'irrigation d'Olmos illustre la concentration des efforts du gouvernement sur

l'agro- industrie et l'entrepreneuriat agricole. Même si la modernisation de la petite agriculture et l'accroissement de sa compétitivité figurent parmi ses objectifs, ces derniers convergent encore vers des produits d'exportation et maintiennent l'agriculture vivrière exclue d'une

valorisation économique pourtant indispensable.

Cette étude ne s'est pas portée directement sur les risques environnementaux que représentent les systèmes de cultures promus par la politique néolibérale actuelle. Toutefois, il parait évident que le faible renouvellement de la fertilité (faible temps de retour, rotations peu

élaborées, usage encore limité de matière organique 25, labour motorisé), la pression sur les ressources (terre et eau), la pollution (usage croissant d'intrants chimiques et de combustible

pour extraire l'eau) et enfin le risque de salinisation des terres sont des problèmes environnementaux que s’approprient encore très peu les acteurs agricoles et les institutions publiques. Les causes de dégradation environnementale sont ici doubles : il faut d’une part

considérer les impacts du projet d’irrigation (modification des cours et réserves d’eau, salinisation,…) et ceux de l’agriculture agro-exportatrice dont la diffusion est encouragée par

ces mêmes projets (dégradation des sols, pollutions de l’eau, pression sur des ressources non-renouvelables, impacts sur la biodiversité,…). La question du rôle que joue l’agro-exportation sur les écosystèmes ruraux reste essentielle et ne pourra être approfondie sans l’intégration de

ces problématiques au sein des préoccupations des dirigeants politiques nationaux et internationaux.

c) Centres et périphéries

La population et les institutions d'Olmos doivent se préparer à une réorganisation totale du système agraire. Auparavant inscrit à l'échelle nationale par les flux de productions

fruitières et majoritairement tourné vers une économie locale, Olmos connait actuellement les prémices d'une ouverture globale : la législation foncière et les institutions la concernant, les politiques publiques (effets escomptés de l’accord de libre-échange signé avec les Etats-Unis

d’Amérique) sa population, ses productions agricoles, ses flux matériels et immatériels,

25

Des témoignages ont cependant affirmé que la mat ière organique était utilisée dans certains systèmes de

culture du piment et du raisin. Il est cependant vrai que les engrais chimiques sont largement majoritaires.

89

ses équipements, en un mot, son système agraire est intégré à un processus de mondialisation

qui, tout en le transformant, entraine des rythmes d'intégration variés et spécifiques à chaque ensemble (O.Dollfus, 1997). C'est ainsi qu'on observe des ensembles baser exclusivement

leurs économies sur les marchés mondiaux, tandis que certains s'ouvrent progressivement au commerce extérieur et que d'autres subsistent encore à l'échelle locale. Les schémas (annexe 57) illustrent ces changements d'échelle caractéristiques des trois temporalités considérées :

avant les années 2000, entre 2000 et 2012 et à partir de 2012. Les acteurs et interactions qui existaient s'intensifient, de nouveaux apparaissent et peu d'entre

eux disparaissent. Ces schémas ne sont pas réalisés dans un objectif de précision, mais bien de compréhension systémique de l'évolution des flux, de leurs origines et de leurs destinations. On ne distingue donc pas les produits agricoles qui s'effacent du paysage agraire d'Olmos car

l'échelle n'y est pas appropriée.

L'étude d'Olmos s'est effectuée sur une période charnière, chevauchant la phase pré-projet et l'initiation de la phase projet. Elle a donc permis d'identifier, de quantifier dans certains cas et d'analyser l'évolution agraire d'Olmos, lieu considéré comme espace

périphérique, lors de l'arrivée d'un élément extérieur transformant profondément les structures agraires de la région.

Ce travail permet d'effectuer une première validation de certaines des hypothèses énoncées dans la méthodologie. La majorité de ces propriétés ne sera réellement vérifiable qu'après la mise en route du projet d'irrigation, lorsque les structures agraires se seront organisées selon

le nouvel ordre établi. On peut cependant se risquer à quelques constats et suppositions. Dans le tableau en annexe 58, figurent les éléments de flux et relations associées aux commentaires

que l'on peut formuler à partir du cas d'Olmos. Aucun résultat général n'est avancé au terme de cette étude ; c'est bien la confrontation de tous

les terrains d'étude ainsi que l'analyse de l'ensemble des données qui conduira à l'élaboration finale du modèle et à sa validation scientifique.

Comme le démontre l'ensemble de ce travail, les processus de mondialisation s'expriment au travers d'une multitude d'échelles et de systèmes dont il est peu a isé d'en tirer

toutes les ficelles. C'est bien cette complexité du processus lui-même, de ses effets et de ses impacts sur un territoire qui contrecarrent les arguments de ses détracteurs comme de ses

défenseur. Il est important de garder à l'esprit que, derrière ce terme "bouc-émissaire" (O. Dollfus, 1997), se cache autant de manifestations de la mondialisation que de sociétés dans le monde. Il est dont indispensable de s'attacher à l'étude précise d'un système mondialisé avant

d'en tirer des conclusions hâtives.

90

Conclusion

La mondialisation est souvent observée à l'échelle "macro" avec les grands flux mondiaux, les migrations internationales ou encore les technologies de l'information et de la communication

comme premiers objets d'étude révélateurs de ce processus. Reprenant l'approche d'Olivier De Sardan qui défend l'étude "micro" pour la compréhension des dynamiques de développement (Bulletin de l'APAD n°6, 1993), cette étude s'est intéressée aux formes d'expression de la

mondialisation d'un point de vue "micro", à l'échelle d'une localité et de ses systèmes de production constitutifs.

Grâce à cette précision qu'offre le diagnostic agraire, il a été possible d'émettre des hypothèses quant aux trajectoires potentielles des exploitations prises dans le tourbillon de la mondialisation.

Alors que ce processus change de manière irrémédiable le visage des villes du monde, les campagnes des pays en développement semblent être encore loin du bourdonnement si

caractéristique de l'expansion des réseaux urbains. S'il est vrai que les villes accumulent les facteurs de croissance et de pouvoir, les régions rurales sont loin d'être exclues du processus de mondialisation qui les façonne et les fait évoluer vers de nouveaux systèmes agraires plus ou

moins intégrés au reste du monde, comme c'est le cas actuellement à Olmos. Ces transformations, résultantes d'une énergie folle dépensées pour augmenter les exportations et faire du Pérou un pays

de modernité agricole à l'image de ses voisins américains et européens, impactent profondément les systèmes de productions existants. Certains systèmes apparaissent plus enclins à se transformer que d'autres. C'est ainsi que nous avons vu des systèmes, peu influencés par la présence des

entreprises ou du projet (les Planteurs moyens, les Gestionnaires à distance), se maintenir dans leurs trajectoires propres indépendamment des soubresauts liées à l'arrivée de nouveaux acteurs et des systèmes, généralement plus vulnérables, changer de trajectoire et se tourner vers de nouvelles

activités dans l'objectif de diversifier leurs sources de revenu ou au contraire de se spécialiser dans la production d'une culture théoriquement plus rémunératrice en terre, travail et capital.

La précision du diagnostic agraire a également permis d'étudier la coexistence de systèmes très différenciés et pourtant complémentaires en l'absence de projets réellement destinés aux

producteurs vivriers et aux éleveurs. Ces derniers n'ont alors d'autres choix que de se tourner vers le salariat agricole. Cette complémentarité pour le travail pose véritablement question : elle

légitime la présence des entreprises agro- industrielles car elle offre une source de diversification des revenus indispensable aux producteurs si soucieux de répartir le risque agricole dans un contexte de sécheresse régulière et de variation des prix du marché. Ce sont pourtant ces mêmes

entreprises qui accumulent terres, ressources hydriques, capitaux et qui bénéficient des programmes de développement nationaux les plus coûteux au détriment d'une petite agriculture

sous-estimée mais qui joue un rôle essentiel pour l'autosuffisance alimentaire nationale. Ces grands projets mise en œuvre par l'Etat, peu rationnels en terme de rapport coût/bénéfice (Hendriks,1990) servent d'abord les intérêts des grands propriétaires en omettant généralement de

considérer d'autres aspects du développement : baisse des inégalités socio-économiques, accès aux ressources productives pour tous, limite du gaspillage de l'eau en région désertique, prise de

conscience du risque réel de désastre écologique,… Enfin, alors que l'augmentation des exportations constitue une stratégie du gouvernement

pour équilibrer sa balance commerciale, il ne faut pas éluder l'intérêt d'une réduction des importations agricoles en promouvant une agriculture vivrière plus productive (quel que soit le

facteur de production). Maîtrisée par les producteurs eux-mêmes, l'agriculture vivrière contribuant à l'indépendance alimentaire et à la création d'emploi se doit d'être estimée à sa juste valeur, et ce, à l'échelle de la planète.

91

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96

Tables des annexes

Annexe 1 : Prémices des propriétés élaborées par Périmarge.......................................................... 98 Annexe 2 : Schéma représentant le projet d'irrigation Olmos.......................................................... 98 Annexe 3 : Représentation schématique du paysage d'Olmos de 1950 à aujourd'hui ..................... 99

Annexe 4 : Olmos et sa région ....................................................................................................... 101 Annexe 5 : Evolution de la dotation en puits à Olmos selon leurs profondeurs (en mètre) ........... 101

Annexe 6 : Evolution démographique à Olmos de 1981 à 2007.................................................... 102 Annexe 7 : Précipitations mensuelles des années 2009-2010-2011-2012 ..................................... 102 Annexe 8 : Mode d'irrigation à Olmos selon le nombre d'exploitations et la surface irriguée

correspondante ............................................................................................................................... 102 Annexe 9 : Représentation schématique du paysage actuel vu du ciel en année pluvieuse ........... 103

Annexe 10 : Représentation schématique du paysage actuel vu du ciel en année sèche ............... 103 Annexe 11 : Coût moyen d'un troupeau constitué de 20 chèvres en année sèche ......................... 104 Annexe 12 : Système d'irrigation par trous circulaires .................................................................. 104

Annexe 13 : Système d'irrigation par sillons.................................................................................. 104 Annexe 14 : Calendrier de travail pour le système de culture Maïs/haricot (HJ/ha) ..................... 105

Annexe 15 : Tableau des opérations culturales pour le système de culture Maïs/haricot .............. 105 Annexe 16 : Tableau des opérations culturales pour la plantation de citron associée au fruit de la passion en phase d'installation ....................................................................................................... 106

Annexe 17 : Tableau des opérations culturales pour la plantation de citron (monoculture) en phase de routine ........................................................................................................................................ 107

Annexe 18 : Calendrier de travail d'une plantation de c itronniers en année de production (routine) ........................................................................................................................................................ 107 Annexe 19 : Cycle de production du fruits de la passion et stades phénologiques ........................ 107

Annexe 20 : Tableau des opérations culturales pour la plantation de manguiers en phase de production....................................................................................................................................... 108

Annexe 21 : Calendrier de travail d'une plantation de manguiers en production .......................... 108 Annexe 22 : Estimation du prix du citron au cours de l'année ....................................................... 109 Annexe 23 : Estimation du prix du fruit de la passion au cours de l'année.................................... 109

Annexe 24 : Calcul du seuil de survie pour une unité de consommation de 5 personnes .............. 110 Annexe 25 : Estimations des VAB de quelques activités extra-agricole ....................................... 110

Annexe 26 : Schéma de parenté d'un ménage ................................................................................ 111 Annexe 27 : Calendrier de travail du petit planteur propriétaire constitué d'un ha de citronniers, de ha de fruits de la passion et d'un ha de maïs .................................................................................. 111

Annexe 28 : Performances économiques ses systèmes de production basés sur l'élevage en année sèche ............................................................................................................................................... 112

Annexe 29 : Performances économiques ses systèmes de production basés sur l'élevage en année pluvieuse......................................................................................................................................... 112 Annexe 30 : Surfaces cultivées pour chaque culture en 1994 et 2012 dans le district d'Olmos (en

ha) ................................................................................................................................................... 113 Annexe 31 : Schéma de la filière maïs ........................................................................................... 114

Annexe 32 :Achat mensuel de maïs d'un grossistes d'Olmos en 2012........................................... 114 Annexe 33 : Estimations des quantité de citrons produits par les vallées irriguées d'Olmos selon leurs destinations ............................................................................................................................ 115

Annexe 34 : Estimation des quantités de fruits de la passion produits par les vallées irriguées d'Olmos selon leurs destinations .................................................................................................... 115

Annexe 35 : Estimations de la quantité de citron et de fruits de la passion envoyée à Lima ........ 116 Annexe 36 : Détail du coût du transport fruitier ............................................................................ 116 Annexe 37 : Représentation graphique du coût du transport ......................................................... 116

97

Annexe 38 : Structuration du prix du fruit de la passion : vente au marché de Lima et en usines 117

Annexe 39 : Modalités d'accès à l'eau des exploitations agricole du district d'Olmos .................. 118 Annexe 40 : Calendrier de travail du piment ................................................................................. 118

Annexe 41 : Opérations culturales pour la culture de piment ....................................................... 119 Annexe 42 : Stades phénologiques et opérations culturales de la vigne ........................................ 120 Annexe 43 : Opérations culturales pour la culture du raison ......................................................... 121

Annexe 44 : Calendrier de travail pour l'entretien d'un hectare de vigne en production ............... 122 Annexe 45 : Performances économiques de l'ensemble des systèmes de culture étudiés ............. 122

Annexe 46 : Coût d'un journalier pour un entrepreneur................................................................. 123 Annexe 47 : Calendriers de travail des trois entrepreneurs............................................................ 124 Annexe 48 : Exportations agricoles par produits (valeur CIF en millions de US $)...................... 125

Annexe 49 : Calendrier de récolte du raisin par pays producteurs ................................................. 125 Annexe 50 Carte illustrant les enquêtes producteurs en fonction de la typologie des systèmes de

production....................................................................................................................................... 126 Annexe 51 : Quantité de journée de travail requise pour les cultures de piment et de raisin à Olmos ........................................................................................................................................................ 127

Annexe 52 : Comparaison de la rémunération du travail entre Odebrecht et le salariat agricole .. 127 Annexe 53 : Carte représentant les blocs créés par le PEOT ......................................................... 128

Annexe 54 : Comparaison des RAF selon les scenarii proposés ................................................... 129 Annexe 55 : Balance commerciale agraire 2007-2013 (Millions US $ FOB) ............................... 129 Annexe 56 : Importations agricoles par produits (valeurs CIF en millions de US $ CIF) ............. 130

Annexe 57 : Représentations schématiques des relations d'Olmos avec l'extérieur selon trois époques distinctes........................................................................................................................... 131

Annexe 58 : Application des propriétés du modèle de Périmarge à Olmos................................... 134 Annexe 59: Cuestionario Empresa Quicornac S.A. ....................................................................... 135 Annexe 60 : Guide d'entretien ........................................................................................................ 137

Annexe 61 : Questionnaire commerçants....................................................................................... 138 Annexe 62 : Guide d'entretien intermédiaire ................................................................................. 139

98

Annexes

Annexe 1 : Prémices des propriétés élaborées par Périmarge

Annexe 2 : Schéma représentant le projet d'irrigation Olmos

99

Annexe 3 : Représentation schématique du paysage d'Olmos de 1950 à aujourd'hui

Le paysage d'Olmos antérieur aux années 1950

Le paysage d'Olmos de 1950 à 1970

Le paysage d'Olmos de 1970 à 1990

100

Le paysage d'Olmos de 1970 à 1990

Le paysage d'Olmos de 2000 à aujourd'hui

Légende :

Source : Elaboration propre fondée sur l'étude historique

101

Annexe 4 : Olmos et sa région

Source : OpenStreetMap

Annexe 5 : Evolution de la dotation en puits à Olmos selon leurs profondeurs (en mètre)

102

Annexe 6 : Evolution démographique à Olmos de 1981 à 2007

Source : Recensement de population de l'INEI (1981, 1993, 2005 et 2007). Elaboration propre.

Annexe 7 : Précipitations mensuelles des années 2009-2010-2011-2012

Source : SENAMHI, Elaboration propre.

Annexe 8 : Mode d'irrigation à Olmos selon le nombre d'exploitations et la surface irriguée

correspondante

Total Avec puits

tubulaire

Avec

puits noria

Avec

les deux

Avec puits

commun Autre

Autres sources

(JU ou pluies)

Nombre d'exploitations

1174 154 217 53 102 61 587

Surface 8282 4176 1142 658 432 275 1599

Nombre de puits 564 209 230 121 - 4 -

Nombre de puits

opérationnels - 179 201 110 - 2 -

Source : Recensement agraire de 1994 (Institut National des Statistiques et de l'Informatique, INEI)

10

15

20

25

30

35

40

1981 1993 2005 2007

Population d'Olmos (en milliers

d'habitants)

0

50

100

150

200

250

300

350

Janvie

r

Fév

rier

Mar

s

Avri

l

Mai

Juin

Juille

t

Août

Sep

tem

bre

Oct

ob

re

Novem

bre

Déc

embre

Pré

cipit

atio

ns

en m

m

2012

2011

2010

2009

103

Annexe 9 : Représentation schématique du paysage actuel vu du ciel en année pluvieuse

Source : Elaborée à part ir du cadastre du PETT

Annexe 10 : Représentation schématique du paysage actuel vu du ciel en année sèche

Source : Elaborée à part ir du cadastre du PETT

Légende :

104

Annexe 11 : Coût moyen d'un troupeau constitué de 20 chèvres en année sèche

Année sèche Unité Coût unitaire

(soles/chèvre/mois)

nombre

de têtes Coût total

Vaccins 1 2,5 20 50

Unité CU (soles/ha) troupeau CT

Sac d'algarrobina 2 30 1 60

Location d'ha de paille de maïs

3 600 1 1800

Total 1910

Source : Données d'enquête de terrain 2013

Annexe 12 : Système d'irrigation par trous circulaires

Source : Arts et al.,1992

Annexe 13 : Système d'irrigation par sillons

Source : Arts et al.,1992

105

Annexe 14 : Calendrier de travail pour le système de culture Maïs/haricot (HJ/ha)

Source : Elaboration propre

Annexe 15 : Tableau des opérations culturales pour le système de culture Maïs/haricot

Opération culturale Période de l'année Quantité de travail requis

(HJ/ha)

Arrosage du sol Janvier 2HJ

Labour motorisé Janvier Pas d'HJ

Réalisation des sillons (cheval) Janvier 1HJ

Semis maïs Janvier 6HJ

Désherbage Une fois par mois de

Janvier à Mai 9HJ/désherbage

Irrigation Une fois par mois 1HJ/irrigation

Fertilisation chimique Mars 9HJ

Pulvérisation contre pathogène Avril 1HJ

Coupage des pailles et séchage sur

champs Juin 4HJ

Récolte de l'épi et mise en sac Juin 24HJ

Arrosage sol Juin 2HJ

Enfouissement des pailles de maïs

(tracteur) Juin Pas d'HJ

Réalisation des sillons (cheval) Juin 1HJ

Semis haricot Juillet 6HJ

Désherbage Deux fois : Aout-

Septembre 9HJ/désherbage

Irrigation Deux fois : Aout-

Septembre 1HJ/irrigation

Pulvérisation contre pathogène Deux fois : Aout-

Septembre 1HJ/pulvérisation

Récolte et séchage Octobre 27HJ

Total 154HJ

Source : Elaboration propre

0

5

10

15

20

25

30

35

HJ Haricot

HJ Maïs

106

Annexe 16 : Tableau des opérations culturales pour la plantation de citron associée au fruit de la

passion en phase d'installation

PHASE D'INSTALLATION (1ère année)

Opération culturale Période de l'année Quantité de travail requis

(HJ/ha)

Arrosage du sol Décembre 1HJ

Labour motorisé

Décembre Location du tracteur

Mesure et réalisation des trous,

apport de fumures animales pour citronniers

Janvier 12HJ

Plantation jeunes plants de

citronniers et de fruits de la passion Janvier 6HJ

Mise en place des poteaux et du fil pour fruits de la passion

Janvier 20HJ

Réalisation des canaux Janvier 12HJ

Désherbage Trois à quatre désherbages

par an 32HJ/désherbage

Irrigation Une fois par semaine 1HJ/irrigation

Pulvérisation de produits phytosanitaires si maladie

Lorsque nécessaire (généralement deux à cinq

fois par an) 1HJ/pulvérisation

Fertilisation fruit de la passion (sol

et plante) Une fois tous les deux mois 4HJ/mois

Guidage du fruit de la passion De Février à Juillet 1HJ/mois

Taille du fruit de la passion De mars à mai 4HJ/mois

Second apport de matière organique sur citronniers

Juin 6HJ

Pollinisation manuelle du fruit de la passion (facultatif)

De juin à novembre 30HJ/mois

Récolte fruit de la passion (peut durer de 6 mois à 12 mois selon

durée du cycle de production)

De juillet à décembre (6

mois)

16HJ/mois en basse production et 32HJ/mois en

haute production Source : Elaboration propre

107

Annexe 17 : Tableau des opérations culturales pour la plantation de citron (monoculture) en phase

de routine

PHASE DE PRODUCTION (à partir de la 4ème année)

Opération culturale Période de l'année Quantité de travail requis

(HJ/ha)

Désherbage Deux désherbages par an 32HJ/désherbage

Irrigation Une fois par semaine 1HJ/irrigation

Pulvérisation de produits phytosanitaires si maladie

Lorsque nécessaire 1HJ/pulvérisation

Apport de matière organique Juin 6HJ

Taille N'importe quel mois 40HJ

Récolte (dépend de la production) Toute l'année Total de 150 HJ

Total 331HJ/ha Source : Elaboration propre

Annexe 18 : Calendrier de travail d'une plantation de citronniers en année de production (routine)

Source : Elaboration propre

Annexe 19 : Cycle de production du fruits de la passion et stades phénologiques

Source : Elaboration propre

0

10

20

30

40

50

60

70

80

HJ/ha Citron

108

Annexe 20 : Tableau des opérations culturales pour la plantation de manguiers en phase de

production

PHASE DE PRODUCTION (à partir de la 3ème année)

Opération culturale Période de l'année Quantité de travail requis

(HJ/ha)

Désherbage Un ou deux désherbages par an

25HJ/désherbage

Irrigation Une fois par semaine 1HJ/irrigation

Pulvérisation de produits

phytosanitaires si maladie Lorsque nécessaire 1HJ/pulvérisation

Apport de matière organique Juillet 6HJ

Taille de production Mars-Avril 30HJ

Fertilisation (facultative) Trois fois par an 2HJ/application

Récolte Décembre-Avril Total de 85HJ

Enterrement des fruits inutilisés (lutte contre la mouche du fruit)

Janvier-Mai Total de 40HJ

Total 248 HJ/ha Source : Elaboration propre

Annexe 21 : Calendrier de travail d'une plantation de manguiers en production

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

50

HJ/ha Manguiers

109

Annexe 22 : Estimation du prix du citron au cours de l'année

Source : Elaboration propre

Annexe 23 : Estimation du prix du fruit de la passion au cours de l'année

Source : Elaboration propre

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

1,2

1,4

1,6

1,8

Pri

x (so

les/

kg)

Prix marché (qualité extra)

Prix marché (qualité primera)

Prix marché (qualité segunda)

Prix usine

0

0,5

1

1,5

2

2,5

Prix

(so

les/

kg

)

Prix marché

Prix usine

110

Annexe 24 : Calcul du seuil de survie pour une unité de consommation de 5 personnes

Coût unitaire (soles) Nombre/an Coût total

Nourriture (par semaine) 260 52 13520

Electricité (batterie ou pétrole) (par mois) 20 12 240

Vêtement et équipement 200 3 600

Total (5 personnes) 14360

Total/actif (soles) 2872

Total/actif en euros 759,78836 Source : Elaboration propre

Annexe 25 : Estimations des VAB de quelques activités extra-agricole

AS AP

Ouvrier agricole 4 500 6 750

Mototaxi 5 625

Artisan (charpentier, maçon)

6 000

Commerce moyen

(épicerie, vente de têtes de bétail) 6 500

Petit commerce (stand au marché, vendeur

ambulant) 2 600

Source : Elaboration propre

111

Annexe 26 : Schéma de parenté d'un ménage

Source : Elaboration propre

Annexe 27 : Calendrier de travail du petit planteur propriétaire constitué d'un ha de citronniers, de ha de fruits de la passion et d'un ha de maïs

0

50

100

150

200

250

HJ Maïs

HJ Citronniers

HJ Fruit de la passion

112

Annexe 28 : Performances économiques ses systèmes de production basés sur l'élevage en année

sèche

Annexe 29 : Performances économiques ses systèmes de production basés sur l'élevage en année pluvieuse

-

2 000

4 000

6 000

8 000

10 000

12 000

14 000

0 5000 10000 15000 20000

RA

F/ac

tif

(so

les)

Capital bétail /actif (soles)

Eleveur pluri axtra-agri

Eleveur salarié

Salaire minimum

Seuil de survie

-

5 000

10 000

15 000

20 000

25 000

30 000

0 10 20 30 40 50

RA

F/ac

tif

(so

les)

Capital bétail/actif (soles)

Milliers

Eleveur pluri axtra-agri

Eleveur salarié

Salaire minimum

Seuil de survie

113

Annexe 30 : Surfaces cultivées pour chaque culture en 1994 et 2012 dans le district d'Olmos (en

ha)

DONNEES RECENSEMENT AGRAIRE INEI 2012 DONNEES RECENSEMENT

AGRAIRE INEI 1994

Culture

Surfaces cultivées par

irrigation (en ha)

Surfaces cultivées en

saison

pluvieuse (en ha)

Total

Surfaces cultivées par

irrigation (en ha)

Surfaces cultivées en

saison

pluvieuse (en ha)

Total

Citron subtil 1025 - 1025 2713 - 2713

Mangue d'exportation*

930 - 930 376 - 376

Mangue 19 - 19

Avocat 142 - 142 6 - 6

Fruit de la passion* 540 - 540 137 - 137

Mais dur 1050 65 1114 1842 203 2045

Haricot 252 35 287 164 21 185

Lentille 67 2 69 9 - 9

Manioc 80 3 83 151 5 156

Patate douce 7 0 8 6 0,5 7

Pastèque 123 9 132 6,5 7

Piment Paprika* 255 -

622 0,5 - 0,5

Piment Piquillo* 284 -

Piment (autre variété)* 83

Raisin* 81 - 81 0,2 123 0,2

Source : Recensement national agraire de 1994 et de 2012 complété par les données du SENASA d'Olmos (2012).

Elaboration : Célia Auquier *

Les données 2012 pour ces cultures proviennent du SENASA.

114

Annexe 31 : Schéma de la filière maïs

Annexe 32 :Achat mensuel de maïs d'un grossistes d'Olmos en 2012

ACHAT MAIS (en T/mois)

Mois T/mois

Janvier 2995

Février 923

Mars 2892

Avril 907

Mai 330

Juin 1479

Juillet 2568

Août 1395

Septembre 904

Octobre 858

Novembre 988

Décembre 814

Total (en T/an) 17054

Moyenne par mois 1421

115

Annexe 33 : Estimations des quantité de citrons produits par les vallées irriguées d'Olmos selon

leurs destinations

CITRON

MARCHE LIMA USINE DE

TRANSFORMATION

Quantité vendue

(T/intermédiaire/an)

Quantité vendue

(en

Tonne/intermédiaire/époque)

Quantité vendue

(en

Tonne/intermédiaire/époque)

Basse

production

Haute

production

Basse

production

Haute

production

Juin à

Décembre (7

mois)

Janvier à

Mai (5 mois)

Juin à

Décembre (4

mois)

Janvier à

Mai (5 mois)

Minimum 0 4,8 0 23,4 80

Maximum 200 600 720 6480 7380

Moyenne 69,03272727 350,928 268,4 2707,04 2892,62

Total des

enquêtés 379,68 1754,64 1476,2 13535,2 17355,72

Annexe 34 : Estimation des quantités de fruits de la passion produits par les vallées irriguées

d'Olmos selon leurs destinations

FRUIT DE LA PASSION

MARCHE LIMA USINE DE

TRANSFORMATION

Quantité vendue

(T/intermédiaire/an)

Quantité vendue

(en

Tonne/intermédiaire/époque)

Quantité vendue

(en

Tonne/intermédiaire/époque)

Basse

production

Haute

production

Basse

production

Haute

production

Mars à Juillet

(5 mois)

Aout à

Février (7

mois)

Mars à Juillet

(5 mois)

Aout à

Février (7

mois)

Minimum 1,6 2,4 16,8 84 60

Maximum 360 1080 1200 4060 4860

Moyenne 107,04 273,5 259 937 1256

Total des

enquêtés 535,2 1641 2844 9370,6 15074,8

116

62% 18%

9%

7% 4%

Coût chauffeur

Pèse et chargement

Déchargement

Transporteur Olmos

Répartition Lima

Annexe 35 : Estimations de la quantité de citron et de fruits de la passion envoyée à Lima par an

Citron et fruit de la passion

Quantité transportée par époque (en

tonnes)

Basse production Haute production

Reste de l'année Avril à Juin (3mois)

Nombre de camion/semaine (30T) 3 24

Total destiné au marché de Lima (T/semaine)

90 720

- dont citron 9 540

- dont fruit de la passion 81 180

Annexe 36 : Détail du coût du transport fruitier

Par caisse Par camion

% 25kg 1200

Coût total flet (en soles) (0,18s/kg)

4,5 5400 100%

Coût chauffeur 2,8 3360 62%

Pèse et chargement 0,8 960 18%

Déchargement 0,4 480 9%

Transporteur Olmos 0,3 360 7%

Répartition Lima 0,2 240 4%

Annexe 37 : Représentation graphique du coût du transport

117

0,51

0,625

0,2

0,2

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

1,2

1,4

1,6

1,8

Fruit de la passion

Vente à Lima

Structuration du prix du citron : vente au marché de Lima et en usines

0,21

0,82

0,2

0,2

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

1,2

1,4

1,6

Citron

Vente à Lima

0,765

-0,065

0,2

0,2

-0,2

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

1,2

1,4

Fruit de la passion

Vente aux usines

Coût de transport

Marge intermédiaire Olmos

Marge producteur

Coût de production moyen

0,21

-0,06

0,2

0,2

-0,1

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

Citron

Vente aux usines

Coût de transport

Marge intermédiaire Olmos

Marge producteur

Coût de production moyen

Annexe 38 : Structuration du prix du fruit de la passion : vente au marché de

Lima et en usines

118

Annexe 39 : Modalités d'accès à l'eau des exploitations agricole du district d'Olmos

Taille des exploitations en ha

< 0,5 ha 0,5 - 4,9 ha 5 - 9,9 ha 10 - 19,9 ha 20 - 49,9 ha 50 ha ou plus

Total

Puits 0 77 98 110 169 100 554

Fleuves et canaux 0 65 75 75 37 40 293

Sources 0 3 5 0 0 - 8

Petit réservoir/

barrage saisonnier - 0 - - - - 0

Autre - 0 - 0 - - 0

Total 0 145 179 185 206 140 855

Source : Recensement agricole national 2012, INEI

Annexe 40 : Calendrier de travail du piment

0

20

40

60

80

100

120

140

160

Quantité de

travail (HJ/ha)

119

Annexe 41 : Opérations culturales pour la culture de piment

Opérations culturales Périodes Quantité de travail

(HJ/ha)

Nettoyage de la parcelle Avril 0,2

Incorporation de matière organique Avril 4

Mise en place du système d'irrigation Avril-Mai-Juin 12

Désinfection des jeunes plants Mai 0,6

Transplantation Mai 17

Entretien des rangs Avril-Mai-Juin-Juillet 3

Installation des pièges Avril-Mai-Juin 1

Désherbage De mai à Novembre 28

Mise en place/entretien des tuteurs De Juillet à Octobre 21

Application fongicide et pesticide De mai à Novembre 29

Application foliaire De mai à Novembre 31

Irrigation + fertilisation soluble De mai à Novembre 16

Lutte contre oiseaux d'Avril à Décembre 42

Récolte piment frais de Septembre à Décembre

140

Contrôle de la récolte de Septembre à Décembre

3

Chargement, mouvement, distribution de la récolte

de Septembre à Décembre

38

Récolte piment séché Octobre et Décembre 80

Séchage Novembre-Décembre 3

Hydratation Novembre-Janvier 12

Ensachage Novembre-Janvier 18

Pesée Novembre-Janvier 0,6

Total 500

120

Annexe 42 : Stades phénologiques et opérations culturales de la vigne

Stades

phénologiques Janvier Février Mars Avril Mai Juin Juillet Août Sept Octobre Novembre Décembre

Bourgeonnement Taille de

production

Floraison et fécondation

Véraison et

maturation

Taille de l'appareil

foliaire et des grappes

Taille de l'appareil

foliaire et des

grappes

Récolte

Dessèchement

121

Annexe 43 : Opérations culturales pour la culture du raison

Opérations culturales Périodes Quantité de travail (HJ/ha)

Fixation et taille de production Janvier-Mai 42

Application cicatrisante Janvier-Février 1

2ème taille des pointes Janvier à Mars 35

Irrigation Toute l'année 25

Entretien des tuyaux 4 fois par an 6

Incorporation de matière organique Une fois par an 3

Entretien des vignes Mai-Juin 21

Désherbage Toute l'année 86

Taille des ramification Juin 23

Entretien du support Juin-Juillet 4

Passage tracteur Juin à Décembre 14

Fixation et guidage Toute l'année 11

Taille de l'appareil folaire Juillet-Aout 29

Taille de la grappe Aout-Septembre 155

Lutte contre oiseaux Aout-Septembre 5

Application foliaire Toute l'année 46

2nde application machine Toute l'année 5

Application fongicide et herbicide Toute l'année 18

Application insecticide 3 fois par an 4

Protection des grappes Sept-Octobre 9

Traitement post-récolt Octobre 30

Taille d'éclaircissement Novembre 5

Fixation Décembre 3

Récolte Décembre 21

Chargement et sélection Décembre 2

Entretien quotidien Toute l'année 17

Maintenance Toute l'année 20

Total 641

122

Annexe 44 : Calendrier de travail pour l'entretien d'un hectare de vigne en production

Annexe 45 : Performances économiques de l'ensemble des systèmes de culture étudiés dans la zone

Système de culture

Densité

moyenne de

semis

Rendement

moyen

(T/ha)

VAB/ha VAB/HJ VAB/K

Culture

hautement

performantes

Raisin 1500pieds/ha 30T/ha 58 784 92 0,56

Piment en rotation avec maïs (P/P/P/P/M)

60 000 pieds/ha

18 à 30T/ha

frais (décroissant

suivant

l'année)

21 715 53 1,4

Piment seul 60 000

pieds/ha 30T/ha frais 135 269 272 7,7

Plantation en

monoculture

Plantation de citronniers avec

préparation de la saison et système d'irrigation gravitaire

150 pieds/ha

22 T/ha 18 126 39,2 6,2

Plantation de citronniers sans préparation de la saison et système

d'irrigation gravitaire 15 T/ha 7 586 77,8 15,0

Plantation de fruit de la passion par système d'irrigation gravitaire

1000 pieds/ha 27 à 30 T/ha 27 288 42,6 5,6

Plantation de manguiers avec intrants chimiques

250 pieds/ha

18 T/ha 6 045 34,9 2,9

Plantation de manguiers sans intrant chimique

10 T/ha 2 328 11,5 3,8

-

20,000

40,000

60,000

80,000

100,000

120,000

140,000

HJ/ha

123

Plantation

associée

Plantation de fruit de la passion +

maïs + manioc 500 pieds/ha de fruits de la

passion

- 12 494 38,8 2,0

Plantation de fruit de la passion +

maïs + haricot - 12 434 38,3 1,9

Plantation de citronniers + manguiers + manioc + lentille

100 pieds/ha d'arbres

fruitiers

- 11 940 40,9 4,8

Système

vivrier

Maïs 50kg/ha 6,5T/ha 3031 50 1,1

Haricot (dépend des variétés) 60kg/ha 1,5T/ha 3860 81 5.7

Maïs/Haricot - - 8512 77 6.2

Maïs/Maïs - - 7001 47 2,0

Annexe 46 : Coût d'un journalier pour un entrepreneur

Coût d'un journalier

Salaire 25,00

CTS 2,43

Gratifications 4,17

Total 31,60

Alloc..Fam. 2,50

Total 34,10

Les entrepreneurs agricoles sont soumis aux lois du travail des entreprises et doivent donc payer des impôts, indexés sur les salaires et sur les ventes. Ainsi, l'entrepreneur paye l'ouvrier

25s/journée de travail. A ce chiffre s'ajoute un impôt sur le temps de travail (2,43s/jour), les allocations familiales (2,50s/jour) et les

gratifications relatives aux jours fériés correspondants au fêtes patriotes (4,17s/jour). Les entrepreneurs agricoles ne payent pas l'impôt général sur les ventes (IGV) mais doivent verser 1,5% du

total des ventes à l'Etat ainsi que 15% du résultat de l'exercice comptable.

124

Annexe 47 : Calendriers de travail des trois entrepreneurs

0

500

1000

1500

2000

2500

3000

Entrepreneur 1 (en HJ/ha)

19ha de vigne

-

500

1 000

1 500

2 000

2 500

3 000

3 500

Entrepreneur 2 (en HJ/ha)

12ha de citron

20ha de raisin

20ha de vigne

0

1000

2000

3000

4000

5000

6000

Entrepreneur 3 (en HJ/ha)

33ha de piment

14ha de citron

125

Annexe 48 : Exportations agricoles par produits (valeur CIF en millions de US $)

Source : MINAG de 2009 à 2013. Elaboration propre.

La catégorie "Autres" a été éliminée pour une meilleure visib ilité

Annexe 49 : Calendrier de récolte du raisin par pays producteurs

0

500

1000

1500

2000

2500

3000

2009 2010 2011 2012 2013

Carmin de cochenille

Artichaut préparée

Piment paprika

Banane "Cavendish Valery"

Alcool ethylique

Lait évaporé

Aliments pour animaux

Raisin frais

Avocat frais

Mangue

Café non toréfié

Asperge

126

Annexe 50 Carte illustrant les enquêtes producteurs en fonction de la typologie des systèmes de production

127

Annexe 51 : Quantité de journée de travail requise pour les cultures de piment et de raisin à

Olmos

PIMENT (campagne de 6 mois) Par ha 1994 2006 2012

Surfaces cultivées 1 0.526 276 621

Nombre de journée de travail dégagé par campagne 498 249 137 378 309 100

RAISIN (campagne d'un an) Par ha 1994 2011 2012

Surfaces cultivées 1 0 39 81

Nombre de journée de travail dégagé par campagne 641 0 24 743 51 921

Annexe 52 : Comparaison de la rémunération du travail entre Odebrecht et le salariat agricole

Salaire mensuel Mois de travail Total salaire

Rémunération journalière

Odebrecht Ouvrier 1200 3 3600 50

Surveillant 750 3 2250 31

Peon 600 3 1800 25

26

Cette donnée parait peu plausible ; on suppose qu'aucune surface n'était encore dédiée au piment en 1994. La

quantité de travail dégagée est donc peu certaine.

128

Annexe 53 : Carte représentant les blocs créés par le PEOT

Source : PEOT, 2012

129

Annexe 54 : Comparaison des RAF selon les scenarii proposés

Actualité Scenario 1 Scenario 2

AS AP AS AP AS et AP

1 campagne +

salariat 2 campagnes +

salariat 1 campagne + salariat Salariat

Revenu 1ère

campagne 1ha mais 3975 3030 3975 3030 0

Revenu 2nde campagne de mais

0 3030 0 0 0

Nombre de journée de travail salarié

104 133 220 220 312

Salaire 2600 3325 5500 5500 25

RAF total 6575 9385 9475 8530 7800

Part du salariat dans le RAF

39,5% 35,4% 58% 64,5% 100%

Elaboration propre. Rappel : Seuil de survie = 1104soles/an

Annexe 55 : Balance commerciale agraire 2007-2013 (Millions US $ FOB)

130

Source : MINAG 2009 à 2013, élaboration propre. La catégorie "Autres" a été éliminée pour une meilleure

visibilité (il est donc normale que la balance commerciale n'y corresponde pas tou t à fait).

0

500

1000

1500

2000

2500

3000

2009 2010 2011 2012 2013

Préparations alimentaires

Riz

Lait en poudre

Sucre

Coton

Maïs jaune dur

Blé

Soja

Annexe 56 : Importations agricoles par produits (valeurs CIF en millions de US $ CIF)

131

Annexe 57 : Représentations schématiques des relations d'Olmos avec l'extérieur selon trois époques distinctes

132

133

Source : Elaboré par l'équipe Périmarge à l'occasion d'une communication lors du colloque de la Société de Géographie de Lima à Trujillo du 3 au 5 Octobre 2013 auquel

participa Périmarge.

134

Annexe 58 : Application des propriétés du modèle de Périmarge à Olmos

Propriétés du nouveau modèle Application à Olmos

Les centres concentrent les pouvoirs

Le gouvernement régional de Lambayeque est l'organe décisionnel concernant la

municipalité d'Olmos et le projet du PEOT. Le PEOT est en plus directement relié au gouvernement national.

Les centres génèrent de l'intégration

territoriale

Mise en œuvre du projet PEOT qui est le fruit d'un partenariat publique-privé.

Ouverture du marché foncier par la législation nationale.

Complexité interne fait de jeux d'échelle Superposition des échelles locales, régionales, nationales et internationales.

Relations croisées Multiplication des relations d'Olmos avec plusieurs centres (Piura, Chiclayo, Lima, Jaen,

Trujillo…) et périphéries (hameaux).

Centres et périphéries interdépendants et en interaction

Le projet n'est pas faisable sans Olmos (fournisseur d'une force de travail, et des terres), il ne l'est pas non plus sans le centre (capitaux, partenariat avec Odebrecht, institutions)

Relations inégales Olmos ne fournit pas de capitaux à ses centres sauf sous la forme de devises issues des

productions exportées.

Autonomie des périphéries Pas encore de preuve d'autonomie d'Olmos. Rôle encore indispensable de Chiclayo. Mais

possibilité d'autonomisation avec les entreprises de transformation et d'exportation.

Réversibilité des processus En cas de chute des prix des denrées commerciales, réorientation des producteurs vers

l'agriculture vivrière

Importance accrue des réseaux

L'éloignement géographique d'Olmos ne limite pas son intégration. Le nombre de réseaux qui transite par la région augmente (nouvelles filières, intensification des filières

existantes, nouveaux flux de capitaux et migrations)

135

Annexe 59: Cuestionario Empresa Quicornac S.A.

MARACUYA

Cuando se estableció Quicornac en Olmos ?

………………………………………………………………………………………………………………………………………………. A un promedio de cuantos productores de maracuyá de Olmos compra la empresa ?

……………………………………………………………………………………………………………………………………………….

A qué otras regiones la empresa compra maracuyá ? ¿A cuántos productores de maracuyá compra la empresa fuera de la región de Olmos ? …………………………………………………………………………………………………………………

……………………………. …………………………………………………………………………………………………………………

……………………………. A cuantos centros de acopio de Olmos la empresa compra la maracuyá ? ¿Porqué los centros de acopio tienen que tener un código para vender a la empresa ? ¿Cómo consiguen este código ?

……………………………………………………………………………………………………………………………………………….

………………………………………………………………………………………………………………………………………………. …………………………………………………………………………………………………………………

……………………………. Cuantas toneladas de maracuyá la empresa compra en época de escasez en Olmos ? …………………………………………………………………………………………………………………

……………………………. Cuantas toneladas de maracuyá la empresa compra en época de escasez en la región Norte del país ?

………………………………………………………………………………………………………………………………………………. Cuando es la época de escasez y qué tiempo dura esta época ?

……………………………………………………………………………………………………………………………………………….

Cuantas toneladas de maracuyá la empresa compra en época de abundancia en Olmos ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………………….

Cuantas toneladas de maracuyá la empresa compra en época de abundancia en la región Norte del país ? …………………………………………………………………………………………………………………

……………………………. Cuando es la época de abundancia y qué tiempo dura esta época ? …………………………………………………………………………………………………………………

…………………………….

Qué derivados de maracuyá la empresa exporta ? ¿ Cuantas toneladas de derivados al mes exporta la empresa ?

……………………………………………………………………………………………………………………………………………….

………………………………………………………………………………………………………………………………………………. En qué países Quicornac S.A. exporta ?

……………………………………………………………………………………………………………………………………………….

136

MANGO

Con un promedio de cuantos productores de mango trabaja la empresa en la región de Olmos ?

……………………………………………………………………………………………………………………………………………….

………………………………………………………………………………………………………………………………………………. En qué otras regiones la empresa compra mango ? ¿Con cuántos productores de mango trabaja la empresa

fuera de la región de Olmos ? …………………………………………………………………………………………………………………

……………………………. ……………………………………………………………………………………………………………………………………………….

A cuantos centros de acopio de Olmos la empresa compra el mango? ¿Son los mismos que los de la maracuyá ?

………………………………………………………………………………………………………………………………………………. …………………………………………………………………………………………………………………

……………………………. Cuantas toneladas de mango la empresa compra al mes en Olmos ?

………………………………………………………………………………………………………………………………………………. Cuantas toneladas de mango la empresa compra al mes en Motupe ?

……………………………………………………………………………………………………………………………………………….

Cuantas toneladas de mango la empresa compra al mes en la región Norte del país ? ……………………………………………………………………………………………………………………………………………….

Qué derivado de mango la empresa exporta ? ¿Cuántas toneladas por mes exporta la empresa ? …………………………………………………………………………………………………………………

……………………………. ……………………………………………………………………………………………………………………………………………….

A qué países Quicornac S.A. exporta el producto del mango ? …………………………………………………………………………………………………………………

……………………………. ……………………………………………………………………………………………………………………………………………….

137

Annexe 60 : Guide d'entretien

Histórico/Presentación

Antigüedad de la explotación

- cuando, porqué y con quien esta llegado aquí ? - A donde vivió y cuales actividades después de llegar ?

- Actividades de principio ? cuales evoluciones globales ? - Pertenencia a una cooperativa antes ? qué ano ?

- Hoy, cuantas personas son en la unidad de residencia/consumación/producción ? Acceso al territorio

- condiciones de acceso al territorio ? (comunidad campesina, antiguo trabajador en hacienda, reforma agraria, compra reciente ?

- Evolución de la superficie en propiedad ? - Problemas eventuales antes ? - costo de la tierra ?

- contractos agrarios ? (locación, aparcería ?)

Migraciones (si hay)

- migración solo una parte del ano ? (lugar de destino, periodo, razones, quien se ocupa de la firme ?) - migración de larga duración ? (lugar de destino, periodo, razones, quien se ocupa de la firme ?)

Actividades agrícolas (+ evolución)

- cuales cultivos ? ganado ? - Superficie cultivadas, por cultivo, y total - rotación ?

- reproducción de la fertilidad ? (baldío, estercolamiento, abonos ?) - unidad de producción antes (activo familiar)

- salariados ? si, de donde venían ? para cuales trabajos? - acceso a las consumaciones intermediarias (semillas, abonos, productos fito, injerto) - medios de almacenaje ?

Acceso al agua

- condiciones de acceso (pozo, canales) construido/comprado/poseído/mantenido por quien ? - Cual evolución de este acceso al agua ? - Hoy : compartido entre quienes, a condición de qué ?

- regularidad ? (volumen y frecuencia) - problemas : vecindad , robo, precio, repartición desigual ?

Comercialización

- cuales mercados para la venta de los productos ? aquellas épocas de venta ?

- acceso ? (medio de transporte, intermediaros ?) - costo de transporte ?

- Cuales volúmenes y frecuencias si es posible ? Proyecto Olmos

- participación al proyecto ? - hace parte de una asociación ?

- que piense del proyecto ?

138

Annexe 61 : Questionnaire commerçants

Nom marchand et localité :

Autres points de

vente Jour Produit

Lieu d'approvisionnement

Lieu de vente

Approvisionnement Prix d'achat

grossiste prix d'achat producteurs

prix de vente concommateur

cout transport

éuivalent en kg

mais

frijol

riz

lentaja

limon

maracuya

mango

uva

manzana

platano

naranja

banano

pera

sandia

choclo

papaya

papa

cebolla

granaria

camote

139

Annexe 62 : Guide d'entretien intermédiaire

Citron/Fruit de la passion - Combien de clients producteurs et où se trouvent- ils?

- Quelle saisonnalité : Abondance/Rareté - Quelle quantité par mois selon saisonnalité - Quelle quantité en moyenne va à Lima/va dans les usines ?

Moyen de transport : lui-même ou comisionista ?

Quel coût de transport Quelle destination des produits ?

Coût : - prix d'achat producteur

- prix de vente usine/marché Lima