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Le droit matrimonial de Nuzi dans le contexte juridique du Nord de la Mésopotamie et de la Syrie à l’âge du Bronze Récent JOSUÉ J. JUSTEL* Altorientalisches Institut, Leipzig 159 Studies on the Civilization and Culture of Nuzi and the Hurrians - 19 ©2012. All rights reserved. Marriage law is an important element of Near Eastern legal systems, as it concerns the nature of the family as a unit of social organization, the legal capacity of women, polygamy, childhood as a legal object, and kinship. The topic of marriage law in Nuzi and ArrapÓe has been treated previously, but it needs fundamental review, especially because of the discovery and publication of new documents from Nuzi dealing with marriage law, such as marriage contracts, adoption contracts, wills, and court cases. Moreover, apart from Nuzi, numerous dis- coveries and publications of archives and many works on marriage law in the ancient Near East have appeared, especially since 1970. The documents from the archives of Emar and Ekalte, in Syria, appear to be most closely related to those from Nuzi. Finally, histo- riography has progressed significantly since the major studies on this subject. The aim of the present article is to provide a brief overview of research perspectives on Nuzi marriage law, consid- ering in particular the new data mentioned above. Le droit matrimonial est une partie importante du système juridique proche-oriental. Ce domaine juridique concerne en effet la famille comme unité d’organisation sociale, la capacité juridique des femmes, la polygamie, l’enfance comme objet de droit et la parenté. La question du droit matrimonial à Nuzi et ArrapÓe a déjà été traitée, mais il est nécessaire de procéder à une révision appro- fondie, en particulier du fait de la découverte et de la publication de nouveaux documents de Nuzi relatifs au droit matrimonial tels * Nous tenons à remercier les organisateurs du colloque, Ph. Abrahami et B. Lion, pour leur invitation à y participer, et en particulier B. Lion pour avoir révisé et discuté le contenu de ce travail. Les erreurs possibles sont le fait exclusif de l’auteur. Dans ce travail, la mention des tablettes de Nuzi renverra non seulement aux textes issus de ce site, mais aussi à ceux provenant des sites voisins, ArrapÓe et Tell al-FaÓÓar. NUZI19-J-Justel Page 159 Thursday, November 1, 2012 9:29 AM

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Le droit matrimonial de Nuzi dans le contexte juridique du Nord de la Mésopotamie et

de la Syrie à l’âge du Bronze Récent

JOSUÉ J. JUSTEL*

Altorientalisches Institut, Leipzig

159

Studies on the Civilization and Culture of Nuzi and the Hurrians

- 19

©2012. All rights reserved.

Marriage law is an important element of Near Eastern legalsystems, as it concerns the nature of the family as a unit of socialorganization, the legal capacity of women, polygamy, childhood asa legal object, and kinship.

The topic of marriage law in Nuzi and ArrapÓe has been treatedpreviously, but it needs fundamental review, especially because ofthe discovery and publication of new documents from Nuzi dealingwith marriage law, such as marriage contracts, adoption contracts,wills, and court cases. Moreover, apart from Nuzi, numerous dis-coveries and publications of archives and many works on marriagelaw in the ancient Near East have appeared, especially since 1970.The documents from the archives of Emar and Ekalte, in Syria,appear to be most closely related to those from Nuzi. Finally, histo-riography has progressed significantly since the major studies onthis subject. The aim of the present article is to provide a briefoverview of research perspectives on Nuzi marriage law, consid-ering in particular the new data mentioned above.

Le droit matrimonial est une partie importante du systèmejuridique proche-oriental. Ce domaine juridique concerne en effetla famille comme unité d’organisation sociale, la capacité juridiquedes femmes, la polygamie, l’enfance comme objet de droit et laparenté.

La question du droit matrimonial à Nuzi et ArrapÓe a déjà ététraitée, mais il est nécessaire de procéder à une révision appro-fondie, en particulier du fait de la découverte et de la publicationde nouveaux documents de Nuzi relatifs au droit matrimonial tels

*

Nous tenons à remercier les organisateurs du colloque, Ph. Abrahami et B. Lion, pourleur invitation à y participer, et en particulier B. Lion pour avoir révisé et discuté le contenude ce travail. Les erreurs possibles sont le fait exclusif de l’auteur. Dans ce travail, la mentiondes tablettes de Nuzi renverra non seulement aux textes issus de ce site, mais aussi à ceuxprovenant des sites voisins, ArrapÓe et Tell al-FaÓÓar.

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que: contrats de mariage, contrats d’adoption, testaments et procès.De plus, en dehors de Nuzi, d’autres archives ont été découverteset publiées et des travaux sur le droit matrimonial dans le Proche-Orient ancien, en particulier depuis les années 1970, ont été réalisés.Les documents issus des archives d’Emar et d’Ekalte, en Syrie,apparaissent comme étant les plus proches des documentsjuridiques de Nuzi. Finalement, l’historiographie a bien avancédepuis les études fondatrices sur le sujet. Le but de cette présenta-tion est de fournir une vue d’ensemble des perspectives de recher-che sur le droit matrimonial à Nuzi, en tenant compte en particulierdes nouveautés mentionnées plus haut.

1. Introduction

Dès leur origine, une grande partie des études juridiques menées sur ladocumentation du Proche-Orient ancien se sont intéressées au «droit matri-monial». Les travaux dans ce domaine permettent d’étudier des sujets divers:la famille comme unité de base de l’organisation sociale, la capacité juridiquedes femmes, les transferts de propriétés, la parenté, la descendance et lafiliation.

Le sujet du droit matrimonial a été surtout traité pour l’époque paléo-babylonienne: depuis l’étude classique de Van Praag (1945) jusqu’à celle, plusrécente, de Westbrook (1988), l’historiographie a en particulier pris en comptela situation en Basse Mésopotamie au Bronze Moyen (XX-XVI

e

s. av. J.-C.), etcela à partir des codes de lois disponibles, notamment le Code de Hammu-rapi.Même l’

œ

uvre récente de Friedl (2000) sur la polygamie au Proche-Orientancien a entièrement laissé de côté la documentation proche-orientale neprovenant pas de cette région pendant cette période.

Le grand intérêt de la documentation de Nuzi et ArrapÓe sur ce sujet a ététrès tôt reconnue. Le premier auteur ayant travaillé sur cette question est P.Koschaker (1928, 1933), qui a étudié l’adoption matrimoniale, les transferts depropriétés et l’existence possible du fratriarcat dans le droit matrimonial.

Par la suite, d’autres auteurs, comme Van Praag, ont poursuivi l’étude dudroit matrimonial, les références à Nuzi n’intervenant cependant que de fa

ç

onmarginale. Par exemple, cet auteur signale que le droit matrimonial de Nuziavait peu de points communs avec les droits babylonien ou assyrien

1

. Les progrès essentiels sur le droit matrimonial de Nuzi ont été réalisés par

Breneman (1971) dans sa thèse inédite. L’auteur a travaillé sur 125 textesprovenant des archives de Nuzi, et étudié la documentation selon une approchetypologique: contrats de mariage, contrats d’adoption, testaments, documentsjudiciaires, etc. La synthèse générale représente 40 pages qui traitent notam-ment des transferts matrimoniaux, de l’âge au mariage, des différences entrepersonnes libres et esclaves.

1

Van Praag 1945: 19–20: «En étudiant ces documents [de Nuzi et d’ArrapÓa] nous avonsacquis la conviction que la population Óurrite de qui ils proviennent a conservé et développéun système juridique qui offre peu de points de comparaison avec le droit assyro-babylonien».

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Depuis ces travaux, quelques autres études partielles ont été menées. Parexemple, Grosz (1981) a travaillé sur les transferts de propriété qui se dérou-laient lors d’un mariage, ou sur les adoptions de jeunes filles en vue de leurmariage (Grosz 1987a)

2

. Paradise (1987a) a étudié du point de vue juridique lesmariages entre personnes libres. Zaccagnini (2003: 587–94) a résumé ces don-nées, tout en indiquant clairement que certains aspects n’ont toujours pas étéabordés en profondeur. De son côté, Bellotto (2004) a réalisé une étude sur lesmariages de Nuzi et ceux d’Emar en Syrie, dans lesquels le beau-père adoptepréalablement son futur gendre comme fils. Pour ma part, dans le cadre d’uneétude sur la capacité juridique des femmes, j’ai pu établir un lien, sur plusieurspoints, entre le droit matrimonial syrien (étudié à partir des textes d’Emar,Ekalte, AlalaÓ et Ugarit) et celui de Nuzi

3

. Finalement, Pfeifer (2009) a publiétout récemment une étude sur les racines paléo-babyloniennes de certainsphénomènes juridiques matrimoniaux de Nuzi (§ 3).

2. Nouveautés sur le droit matrimonial de Nuzi

Depuis ces travaux, notamment depuis la synthèse de Breneman, plusieursdonnées nouvelles sont à prendre en considération. La plus importante est sansdoute la publication de nouveaux textes liés au droit matrimonial, grâce aux-quels la documentation s’est accrue de près de 20%. Ces documents se répartis-sent de la fa

ç

on suivante:

a) Contrats de mariage: Jank. 48, JEN 440+ (voir Maidman 1990: 74–82),SANTAG 4 152, EN 9/3 473 (d’après Owen 1995, 131).

b) Contrats pour adopter des jeunes filles afin de les marier: HSS 19 42,HSS 19 76, HSS 19 106

4

, YBC 5134, JEN 708, JEN 868, EN 9/2 271, EN 9/2 299, EN 10/2 103, EN 10/3 275, SANTAG 4 18, SANTAG 4 149, Jank.45, Jank. 46+89 (voir Fincke 1996: 279–80),

SCCNH

7 5

(Fincke 1995: 32–35),

SCCNH

7 6 (Fincke 1995: 35–36), sans oublier quelques textesajoutées par Eichler (1977).

c) Adoptions d’hommes: depuis l’étude de Breneman, quelques contratsd’adoption ont été édités; parmi eux, certains, comme JEN 600 et JEN957, contiennent des références au droit matrimonial (voir Lion 2004:556 n. 56 et 59, et p. 575).

d) Testaments: JEN 880 contient des clauses sur le droit matrimonial (voirdéjà Pfeifer 2009: 406 n. 378). Il faut probablement ajouter BM 104816(Grosz 1988: 138, 168).

2

Sur ce dernier sujet voir aussi, plus récemment, Cassin 1994 et, dans le présent volume,le travail de J. Fincke.

3

Voir en particulier Justel 2008a: 35–101, cf. p. 344, 349–50.

4

Sur l’appartenance probable de ces deux textes au présent corpus, voir Grosz 1987a: 145.

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e) Paiements du don nuptial ou dot : JEN 186 (voir Eichler 1977: 49 n. 31et Grosz 1981: 177) et EN 10/2 167+HSS 19 97 (voir Fincke 1998: 377–379et Lion 2001a: 100–4).

f) Autres documents: des déclarations et contrats ont été publiés, certainsd’entre eux contenant des références au droit matrimonial: EN 9/3 468,JENu 1065c, JENu 1111b, JENu 1152a, JENu 1167c

5

, Jank. 47

6

.

g) D’autres sources textuelles contemporaines de celles de Nuzi ont étédécouvertes et partiellement publiées. Grâce aux fouilles réalisées parune mission irakienne à Tell al-FaÓÓar, environ 850 tablettes cunéi-formes ont été découvertes, contenant, entre autres, des documentsjuridiques sur le droit matrimonial (Fadhil 1972, Al-Rawi 1977)

7

.

D’autre part, au cours des dernières années, de nombreux documents surle droit matrimonial de l’ensemble du Proche-Orient ancien ont été publiés. Lesdocuments qui se rapprochent le plus de ceux de Nuzi sont les textes d’Emaret d’Ekalte, en Syrie

8

, qui forment des ensembles documentaires d’une im-portance capitale pour comprendre le sujet à Nuzi.

3. Le droit matrimonial de Nuzi et le droit matrimonial syrien: points de contact

Récemment, Pfeifer (2009) a étudié la réception du droit matrimonial paléo-babylonien à Nuzi (voir en particulier. p. 416–19). Elle conclut que, bien que lesformes et parfois les formulaires de Nuzi aient été hérités du droit paléo-babylonien, le système a changé pour s’adapter aux conditions sociales deNuzi.

La documentation de Nuzi gagne à être comparée non seulement à celle desépoques antérieures, mais aussi à celle du Bronze Récent, donc quasimentcontemporaine, issue d’autres zones géographiques. Par exemple Zaccagnini(2003: 587 n. 67) a souligné que certains phénomènes matrimoniaux connus àNuzi devraient être comparés à ceux des archives syriennes de la mêmeépoque.

Jusqu’aux années 1970, les seuls sites syriens du Bronze Récent ayant livrédes archives cunéiformes étaient Ugarit et AlalaÓ. Les textes juridiques prove-nant de ces archives fournissaient déjà certains parallèles avec la documen-tation de Nuzi

9

.

5

Voir le catalogue de Maidman2005: 122, 146, 163, 171.

6

Voir Fincke 1995: 29–32.

7

Voir en particulier les documents RATK 1–6.

8

La publication officielle des textes d’Emar se trouve dans Arnaud 1985–1987. Pour laliste des publications des tablettes hors corpus, voir en ligne B. Faist, J. Justel, F. Sakal et J.P. Vita 2010. Les textes d’Ekalte sont publiés par Mayer 2001.

9

Voir l’article mentionné de Zaccagnini 2003, en particulier p. 587 n. 67. Un exemple clairest l’emploi, dans les textes littéraires d’Ugarit, du terme alphabétique

mlg

, équivalent àl’akkadien

mul›gu

, qui apparaît à Nuzi (voir § 7).

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LE DROIT MATRIMONIAL

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Dès les premières publications des textes d’Emar et d’Ekalte, dans lesannées 1970, il a été évident qu’il y avait des ressemblances intéressantes entrela documentation juridique de la région de l’Euphrate et celle de Nuzi. Le casle plus clair est, probablement, le phénomène de la concession d’un statut légalmasculin aux filles, ce qui est attesté dans trois tablettes de Nuzi et ArrapÓe

10

,et dans une vingtaine d’exemples à Emar et Ekalte

11

.Ces parallèles ne portent pas seulement sur le droit à l’héritage, mais aussi

sur le droit matrimonial. La présente étude souhaiterait, d’un côté, montrerquelques aspects nouveaux de la recherche sur le droit matrimonial à Nuzi et,de l’autre, établir de fa

ç

on provisoire une comparaison entre divers phéno-mènes matrimoniaux présents dans la documentation de Nuzi et ceux connuspar les textes syriens de l’âge du Bronze Récent.

4. Contrats matrimoniaux et mariages

Un mariage faisait l’objet d’un document écrit seulement s’il contenait desprévisions additionnelles au fait du mariage

12

. S’il était finalement nécessaired’établir un document, à l’époque paléo-babylonienne, par exemple, onrédigeait un contrat de mariage, dont le but principal était de laisser untémoignage de l’acte juridique et d’en régler les particularités.

Dans les archives qui font l’objet de cette étude, ce phénomène se présentesous des formes diverses. Breneman, dans son étude de 1971 sur le droitmatrimonial de Nuzi, recense 24 contrats de mariage (

ˇuppi riksi

), auxquels ilfaut désormais en ajouter 6

13

, ce qui porte le total à 30 contrats de mariage.Cependant, à Nuzi, certains mariages n’apparaissent pas sous la forme decontrats de mariage, mais dans d’autres documents juridiques

14

, comme descontrats d’adoption (

RA

23 51, HSS 5 67, HSS 19 49, HSS 19 51)

15

ou destestaments (HSS 19 2)

16

.Environ 45 documents concernant des mariages, provenant de Syrie et

datant du Bronze Récent, ont été publiés (Justel 2008a: 37). Cependant, la naturejuridique de ces documents est variée. Seuls 5 documents d’Emar peuvent être

10

Voir Paradise 1987b; Grosz 1987b; Undheim 2001: 208–9.

11

Voir Justel 2008a: 156–67, avec mention de la bibliographie antérieure. Voir aussi uneautre étude comparatiste dans Ben-Barak 2006; Lion 2009.

12

Sur la nécessité d’établir (ou non) un contrat écrit à l’époque paléo-babylonienne, voirGreengus 1969, en particulier p. 512. Pour Nuzi voir Breneman 1971: 257–61; Paradise1987a: 3, 6. L’idée qu’à Nuzi, un document écrit était nécessaire pour que le mariage fûtvalide, semble être défendue par Breneman 1971: 258.

13

JEN 440+, HSS 19 81, EN 9/3 473, SANTAG 4 152, RATK 1, RATK 2.

14

Nous ne comptons pas les adoptions matrimoniales (§ 9).

15

Voir Paradise 1972: 2 n. 10. Ces cas sont appelés «adoptions avec mariage » (§ 8).

16

Pfeifer (2009: 363–65) fait référence à d’autres documents, mais il semble s’agir de

ˇuppikall›ti

ou d’autres sortes de documents juridiques. Ils ne sont pas pris en compte dans lespages qui suivent.

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classés typologiquement comme des contrats de mariage

17

. Plus souvent, àEmar, les mariages apparaissent dans d’autres documents juridiques, enparticulier les contrats d’adoption (18 cas) et les testaments (5). Aucun des 2mariages connus par les archives d’Ekalte n’est attesté par un contrat demariage, et le cas d’Ugarit est identique. À AlalaÓ (niveau IV), en revanche,chacun des 4 mariages documentés l’est par un contrat de mariage

18

. On trouve donc des cas très divers. Bien qu’à Nuzi la plupart des mariages

documentés le soient par des contrats de mariage, dans la région de l’Euphratecette pratique était très rare, alors qu’elle était constante à AlalaÓ. Cettesituation pourrait changer sensiblement l’évaluation des données.

5. Gestion du mariage

19

Dans les textes de Nuzi

20

on peut observer que le fiancé gère habituellement sonpropre mariage, ce qui pourrait être attesté dans 22 cas

21

. Si le fiancé est unesclave, ce rôle est réservé à son maître

22

. Le cas de la fiancée est différent. Son mariage peut être conclu à l’initiative

de:

La fiancée elle-même, qui est peut-être une veuve (2 cas)

23

.

Son père (10 cas possibles)

24

ou sa mère (6 cas possibles)

25

.

Son frère (10 cas possibles)

26

.

La personne qui prend en charge la jeune fille, dans le cas d’uneadoption matrimoniale (voir § 9, 2 cas possibles)

27

.

17

E6 124, RE 6, RE 61, RE 76, Sem 46 1. Voir Démare-Lafont 2010: 63.

18

Voir l’étude récente sur les contrats de mariage d’AlalaÓ, réalisée par Niedorf 2008:158–74, 265–95 (voir aussi Justel 2009: 107). ATT 8/50a, publié aux p. 296–99, n’est pas uncontrat de mariage habituel, bien qu’il contienne peut-être une adoption matrimoniale.

19

Parfois un document relève des différentes situations présentées ci-dessous, parce quele même contrat mentionne plusieurs mariages, ou parce que le texte est difficile àcomprendre.

20

Voir Freedman 1970: 82, et récemment Pfeifer 2009: 371–75.

21

Contrats de mariage: AASOR 16 31+, AASOR 16 55, AASOR 16 57, HSS 5 25, HSS 5 80,HSS 9 24, HSS 13 263, HSS 19 81+, HSS 19 84, HSS 19 85, HSS 19 108+, JEN 440+, JEN 638,TCL 9 6,

RA

23 12, RATK 1, RATK 2, SANTAG 4 152. De plus, dans 4 contrats d’adoption lefiancé gère son mariage:

RA

23 51, HSS 5 67, HSS 19 49, HSS 19 51.

22

AASOR 16 44, EN 9/3 473, HSS 19 83, JEN 120 (?), JEN 434, JEN 637.

23

AASOR 16 57, JEN 434. À Nuzi la fiancée peut influer sur son propre mariage, voirPfeifer 2009: 375.

24

EN 9/3 473, HSS 5 67, HSS 19 51, HSS 19 81+, HSS 19 85, JEN 435, JEN 637 (?),

RA

23 12(?),

RA

23 51, TCL 9 41.

25

AASOR 16 44, AASOR 16 55, HSS 13 263, HSS 19 49, JEN 120, RATK 1.

26

AASOR 16 55, HSS 5 25, HSS 5 80, HSS 9 24, HSS 19 108+, HSS 19 144 (?), JEN 120, JEN441, RATK 2, SANTAG 4 152. Voir aussi une référence indirecte dans RATK 5 (

ˇuppitamgurti

).

27

JEN 440+ (?), JEN 638.

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LE DROIT MATRIMONIAL

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Son maître, si elle est esclave (2 cas possibles)

28

.

En ce qui concerne la Syrie du Bronze Récent, c’est aussi le fiancé qui gère sonmariage: la plupart des mariages connus le sont dans le cadre d’«adoptions avecmariage» (§ 8), où le fiancé est adulte. Dans un seul cas, à Emar (SMEA 30 9),le père doit gérer les mariages de ses deux fils.

Le mariage de la fiancée peut être conclu à l’initiative de:

La fiancée elle-même, dans deux cas à Emar; dans ces deux cas, il s’agitd’une veuve (E6 30, E6 124)

29

.

Son père (18 cas possibles)

30

ou sa mère (8 cas possibles)

31

.

Son frère (3 cas)

32

.

La personne qui prend en charge la jeune fille, dans le cas d’uneadoption matrimoniale (RE 76, voir § 9).

Son maître, si elle est une esclave (2 cas, RE 26,

WVDOG

102 66).

D’autres cas échappent à notre compréhension (2 cas, E6 69, RE 76).

Les circonstances sont en général les mêmes dans les deux ensemblesdocumentaires, mais dans des proportions variables. Une donnée sembleparticulièrement frappante: à Nuzi, le frère de la fiancée organise le mariagedans de nombreux cas, alors que le phénomène est beaucoup plus rare en Syrie;cela a parfois conduit à postuler l’existence du fratriarcat dans la sociétéhourrite (essentiellement dans Koschaker 1933)

33

. En marge de ce débat, il fautremarquer que tous les cas où un homme gère le mariage de sa s

œ

ur sontdocumentés par des contrats de mariage: ce fait peut paraître normal à Nuzi, oùpresque tous les mariages sont connus par des contrats de mariage, mais pas àEmar, où les contrats de mariages sont exceptionnels (§ 4). De plus, on observequ’une femme peut se marier de fa

ç

on indépendante, ce qui est attesté par deuxcas dans chacun des deux ensembles documentaires.

Quant au statut des conjoints, dans certains mariages de Nuzi, la fiancée (1cas) ou le fiancé (6 cas) est esclave, et ces actes juridiques sont toujours connuspar des contrats de mariage. Dans la Syrie du Bronze Récent cette situation n’estattestée que par deux documents, tous deux des contrats d’adoption, provenantd’Emar (RE 26) et Ekalte (

WVDOG

102 66).

28

AASOR 16 31+, HSS 19 46.

29

Voir Justel 2008a: 40–43.

30

E6 5 (?), E6 31 TBR 23, TBR 39, TBR 40, TBR 43, TBR 46, TBR 72, TBR 73, RE 6, RE 25, RE41, RE 88,

AuOr

5 14; SMEA 30 9, RAI 47 1,

ZA

90 7,

WVDOG

102 40.

31

E6 69, E6 124, E6 213, TBR 75, RE 61, RE 82 (?), RAI 47 2,

ASJ

14 46.

32

RE 76, Sem 46 1, AlT 92.

33

Voir aussi les idées de Skaist 1969.

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JOSUÉ J. JUSTEL

6. Terminologie

En Mésopotamie, à l’époque paléo-babylonienne, le mariage est habituellementexprimé par le verbe

aÓ⁄zum

, « prendre (une épouse) »

34

. Les contrats demariage de Nuzi cependant emploient en général, pour consigner cet actejuridique, l’expression NP

1

fNP ana aÍÍ›ti ana NP2 iddin / ittadin, « NP1 a donnéfNP comme épouse à NP2 ». Les textes ne recourant pas à cette expression sonttout à fait exceptionnels. Par exemple, dans le contrat de mariage HSS 19 46, unhomme prend (leqû) une femme comme épouse pour son fils. C’est le seul casdans lequel la fiancée est une esclave du palais. Il contient aussi les clauseshabituelles des testaments, et de plus il s’agit d’une déclaration (liÍ⁄nu)35 :

Ainsi (parle) °ampizi, fils d’Ar-Íatuya: “Dès [ce jo]ur j’ai pris ffiarum-elli,se[rvant]e du palais, fille d’EÓl[li]-TeÍÍup, comme ép[ous]e pour mon filsaîné Zikanta”.

Dans TCL 9 6, le verbe leqû est également employé36. Dans JEN 434 unefemme devient (er¤bu), par sa propre volonté, épouse d’un homme; c’est le seulcas dans lequel l’initiative de l’acte revienne à la fiancée37 :

fAkim-ninu, fille d’ItÓip-Íarri, d’elle-même, est entrée pour (être) l’époused’Issa-n›ri, serviteur de TeÓip-Tilla .

En fait, nad⁄num et er¤bum sont aussi employés à l’époque paléo-baby-lonienne (contrairement à leqûm)38, mais ils ne sont pas aussi courantsqu’aÓ⁄zum. Le verbe aÓ⁄zu, à Nuzi, est seulement employé de façon indirectedans certains documents juridiques, par exemple des testaments où il estquestion du remariage de la veuve (§ 10). Dans les clauses des mariages cepen-dant, surtout celles liées à la prévision de la polygamie, on trouve habituelle-ment le verbe leqû, « prendre ». Par exemple, dans HSS 19 84 : 8–1739 :

8–11Si fNawaya ne met pas (d’enfant) au monde, °upita pourra prendre uneautre épouse. 11–13Mais si elle met au monde (des enfants), °upita ne pourrapas prendre une autre épouse. 13–17Et si fNawaya met au monde (des enfants)et si °upita prend (quand même une autre) épouse, PuÓi viendra et(re)prendra fNawaya et ses en[fan]ts.

34 Voir en particulier CAD A/1 175–77 2a; Westbrook 1988: 10–16; Pfeifer 2009: 365;Démare-Lafont 2009: 11–12.35 1‚umŸ-ma IÓa-am-pí-zi-[ma DU]MU ar-Íá-tù-ia 2fÍa-ru-me-el-li GE[MÉ] Ía É.GAL-lì

3[D]UMU.MUNUS-ti Ía ‚eÓŸ-[li]-te-Íup 4i+na u4-m[i an-ni]-i a-na aÍ-Í[u-t]i 5a-na zi-ka4-an-ta DUMU-ia GA[L] 6el-te-qè-mi.36 Sur la nature particulière de ces deux documents voir aussi Pfeifer 2009: 372.37 1fa-ki-im-ni-nu DUMU.MUNUS it-Ói-ip-LUGAL 2ra-ma-aÍ-Íu 3a-na aÍ-Íu-ti a-na Ii-sà-an-nu-ri

4ÌR Ía Ite-Ói-ip-til-la ú-Íe-ri-ib.38 Voir Westbrook 1988: 10 n. 1; Pfeifer 2009: 365 nn. 60–61.39 8Íum-ma 9fna-wa-a-a la Ù.TU 10ù IÓu-pí-ta aÍ-Ía-ta Ía-ni-ta 11i-leq-qè ù [Í]um-ma Ù.TU 12ù IÓu-pí-ta ‚aÍŸ-Ía-ta Ía-ni-ta 13la i-leq-qè ù Íum-ma fna-wa-a-a 14Ù.TU ù IÓu-pí-ta 15aÍ-Ía-ta i-leq-qè Ipu-Ói16i-ma-qú-ut-‚taŸ ù fna-wa-a-a 17[q]à-a-du Íe-[er]-ri-Íu i-leq-qè.

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Les mariages syriens emploient la même expression qu’à Nuzi, avec leverbe nad⁄nu; ces mentions de mariages figurent presque toujours dans descontrats d’adoption (§ 4, § 9). Trois mariages cependant sont exprimés par leverbe aÓ⁄zu: RAI 47 1 : 3 (Emar), AlT 91 : 4 (AlalaÓ) et RS 8.303 : 14 (Ugarit). Lesautres mariages syriens emploient librement les verbes leqû, ep¤Íu et Íi⁄mu40.Dans les clauses d’Emar aussi, le verbe aÓ⁄zu apparaît parfois, par exemple dansRE 61 : 1541.

Ces données indiquent que les deux ensembles documentaires, celui deNuzi et celui de Syrie, correspondent en général à la même sorte d’actejuridique matrimonial, par lequel un homme donne (nad⁄nu) une femmecomme épouse à un autre homme. Bien que de façon marginale, et seulementdans la zone syrienne, l’emploi du verbe habituel à l’époque paléo-baby-lonienne, aÓ⁄zu, se maintient régulièrement, ce qui indiquerait une conserva-tion de formulaire. En revanche, dans les deux zones, il y a des innovations ence qui concerne l’emploi des expressions matrimoniales, pour les adapter à dessituations familiales concrètes; en fait, il semble que ces innovations soient plusflexibles et variées en Syrie.

7. Transferts matrimoniaux

Deux types principaux de transferts matrimoniaux sont attestés à Nuzi et dansla Syrie du Bronze Récent. Le premier est le don nuptial, désigné généralementpar le terme akkadien terÓatu42. Il s’agit des propriétés données par la famille dufiancé à la famille de la fiancée à l’occasion de leur mariage, comme compen-sation pour la perte d’une fille43. À Nuzi la terÓatu s’élève en général à 40 siclesd’argent, qui peuvent parfois être remplacés par d’autres biens meubles. Dansla Syrie du Bronze Récent, le montant du don nuptial, appelé aussi terÓatu (ouà AlalaÓ, selon une terminologie hourrite d’origine indo-aryenne, uadur⁄nni44),pourrait avoir été fixé par la coutume, par exemple à Emar le montant est de 30sicles d’argent environ45.

À cet égard, on observe un parallèle entre la documentation syrienne duBronze Récent et celle de Nuzi. Dans ce deuxième ensemble documentaire,pour déclarer qu’une propriété a été donnée comme don nuptial à la famille de

40 Voir Justel 2008a: 42.41 Voir Démare-Lafont 2010: 63 n. 44.42 L’étude principale sur le don nuptial à Nuzi est Grosz 1981: 175–78, voir aussirécemment Pfeifer 2009: 380–83; sur la Syrie voir Justel 2008a: 49–56.43 L’idée proposée par Koschaker du mariage par achat, où le don nuptial était compriscomme le prix de la fiancée, a été en général abandonnée; voir en particulier Westbrook1993–1997; Pfeifer 2009: 383–93.44 Voir en particulier Niedorf 2008: 294–95 (avec les références antérieures); l’étude duterme indo-aryen figure dans Mayrhofer 1996. Dans les textes littéraires d’Ugarit apparaîtparfois le terme mhr, correspondant l’hébreu môhar ; voir Justel 2008a: 50.45 Voir Ben-Barak 2006: 85, 153; Justel 2008a: 54. Il pourrait en aller de même à AlalaÓ, voirAlT 17 : 5–6 et Márquez-Rowe 2003: 709; Niedorf 2008: 165, 251–52.

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la femme, on dit: k‹ma / k‹mu terÓatiÍu Ía fNP nad⁄nu. Les dictionnairesn’enregistrent que les occurrences de Nuzi (AHw 1348 5, CAD T 353); dansd’autres régions et à d’autres époques, la préposition k‹ma / k‹mu est remplacépar ana. Cependant, dans un texte d’Emar, on trouve cette même formule(contexte fragmentaire) : … (propriétés énumérées) [k]i-i-mu-ú [NÌ.MUNUS].ÚS

Í[a DAM-Íu] … (E6 186 : 21).Le deuxième transfert matrimonial est la dot, constituée de propriétés

données à la fiancée par sa famille, et qui fait partie du patrimoine familial46. ÀNuzi, ce transfert ne semble pas souvent mentionné, mais peut être dénommémul›gu / mul›g›tu (voir ci-dessous). Il est étonnant qu’à Nuzi, le mul›gu /mul›g›tu soit toujours composé de biens immobiliers; Grosz (1981: 173)propose l’explication suivante:

If the dowry were composed of typically “female” property like blankets,household utensils and animals, there would be no need to write adocument of ownership. When the dowry consists of land, however, adocument recording the transfer of the dowry is necessary because it is thetitle to the plot in question and must be produced should claims be raisedto this field.

En Syrie, la dot apparaît aussi, mais sa désignation change selon lesarchives. Une quinzaine de textes d’Emar et Ekalte emploient pour la dot lemême terme que celui qui désigne habituellement le don nuptial, terÓatu47. Onpeut donc observer que le terme terÓatu à Emar et Ekalte est employé pourdésigner deux réalités différentes et seul le contexte permet de dire s’il s’agit dudon nuptial ou de la dot. Les trois attestations du terme terÓatu à Ugarit fonttoujours référence à la dot (RS 15.92 : 22, RS 16.141 : 14, RS 16.158 : 6)48.

Dans les textes littéraires d’Ugarit, le terme « dot » apparaît en écriturealphabétique, mlg (RS 5.194 : 47, RS 26.261 : 31), équivalent à l’akkadien mul›gu/ mul›g›tu de Nuzi49. Il a été proposé que l’étymologie de ces termes (enécriture syllabique et alphabétique) soit sumérienne ou hourrite50. Le mul›gu /melôg, au premier millénaire, correspondait à une subdivision de la dot, qui

46 La principale étude sur la dot à Nuzi se trouve dans Grosz 1981:169–75, voirmaintenant Pfeifer 2009: 397–99; sur la Syrie voir Justel 2008a: 57–63.47 Une liste des occurrences se trouve dans Justel 2008a: 57 n. 124. Hormis le cas d’ASJ 1330: 20, les autres occurrences se trouvent dans des documents de tradition scribale syro-hittite. 48 Voir CAD T 353–54, 2. Dans les textes littéraires d’Ugarit apparaît aussi le terme ΔlÓ,qu’on traduit aussi comme «dot» (RS 5.194: 47) ; voir Justel 2008a: 57 n. 126 (avecbibliographie).49 Le terme mul›gu / mul›g›tu est aussi attesté dans le corpus d’Amarna, les documentsmédio- et néo-babyloniens et le Talmud: Levine 1968: 272. 50 L’idée d’une origine sumérienne est due à Neufeld 1944: 112, et la bibliographie figuredans Levine 1968: 272 n. 5. L’idée d’une origine hourrite, moins probable, est défendue parexemple par Watson 1995: 538.

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contenait généralement des esclaves51. Il reste à savoir pourquoi, à Ugarit, ceterme n’apparaît que dans les textes littéraires, alors que les textes juridiquesemploient le terme terÓatu52, qui ne fait pas référence au don nuptial mais à ladot. L’explication la plus convaincante est celle de Marrassini (1984: 68, 72), quipense que le terme ancien a subsisté dans la tradition littéraire, plus conser-vatrice du point de vue lexical.

À Nuzi et Emar existe la pratique appelée «dot indirecte», phénomène grâceauquel un sujet reçoit de l’argent (le don nuptial) pour le mariage de sa fille et,subséquemment, remet une part ou la totalité de cet argent sous forme de dotà cette même fille53. Cette pratique est aussi attestée en Mésopotamie auxépoques paléo- et néo-babylonienne et chez les peuples premiers actuels. Pourexprimer qu’il y a une dot indirecte à Nuzi, comme à l’époque paléo-babylonienne, on recourt à la formule: X Íiqil kaspi ina sissiktim (paléo-bab.) /qanni (Nuzi) fNP rak⁄su(m), « attacher X sicles d’argent à l’ourlet de fNP». ÀEmar, l’expression employée est différente, bien que le but semble êtreexactement le même: ana muÓÓiÍi utt¤r, « il (= le père) a rendu / j’ (= la mère) airendu (la propriété) à elle (= la fille) »54.

8. Mariages er¤bu

À l’occasion d’un mariage, le couple allait en général résider au foyer du fiancé,ce qui est connu sous le nom de «patrilocalité». Parfois le couple pouvait résiderchez la fiancée: ces unions sont dénommées «mariages er¤bu», parce que le mari«entrait» (akk. er¤bu) dans la maison de l’épouse55. Ce phénomène de matri-localité est connu dans diverses cultures, à différentes époques56.

Dans la documentation provenant de Nuzi et dans celle d’Emar et Ekalte,la pratique juridique suivante est attestée: le père de la fiancée adopte le fiancéavant le mariage; on désigne ce phénomène comme «adoption avec mariage »57.De cette façon, le nouveau couple réside chez le père biologique de la fiancée,qui est aussi devenu le père adoptif du fiancé. Dans ces cas, il semble que lefiancé ne doive pas donner de don nuptial (§ 7), parce que la propriété reste

51 Voir Levine 1968 : 278–80; Kuhrt 1989: 229 ; Roth 1989: 250.52 Dans les textes littéraires d’Ugarit apparaît aussi un groupe de termes étymolo-giquement liés à la terÓatu: mtrÓt, «fiancée », trÓtt, «don nuptial »; voir Justel 2008a: 49–50(avec bibliographie).53 Voir, sur Nuzi, Grosz 1981: 170–71; Malul 1988: 179–97; et Pfeifer 2009: 404–9; sur Emaret Ekalte voir Justel 2008a: 54–56.54 Voir cette idée dans Justel 2008c. Une autre attestation possible d’une expressionconcernant l’ourlet de la femme en Syrie se trouve dans AlT 8, texte d’AlalaÓ, d’après Malul1988: 193–94.55 Gordon 1981: 155. Voir aussi les commentaires sur cette sorte de mariages dans lemonde homérique, dans Leduc 2002: 328–33.56 Voir par exemple les parallèles établis par Gordon 1981 et, tout récemment, lesréférences apportées par Démare-Lafont 2009: 13–14.57 Expression employée par Bellotto 2004: 130 n. 4, 2008: 189.

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toujours à l’intérieur du foyer58. En marge des considérations suivantes qui seconcentrent sur nos deux ensembles documentaires, il faut souligner que cettepratique juridique particulière est aussi attestée, dans le Proche-Orient ancien,en Mésopotamie à l’époque paléo-babylonienne et au °atti59.

À Nuzi cette pratique est attestée dans 4 contrats d’adoption60 (RA 23 51,HSS 5 67, HSS 19 49, HSS 19 51)61, dans des circonstances diverses (voir ci-dessous). À Emar et Ekalte62, ce phénomène juridique est aussi présent, maisdans une vingtaine de documents (dont un d’Ekalte)63. Il ne s’agit passeulement de contrats d’adoption, mais aussi de testaments (E6 213, RE 82),d’un document judiciaire (ASJ 14 46) ou d’un acte de divorce (WDVOG 102 40).Tandis que à Nuzi l’initiateur de l’acte juridique est l’un des parents, à Emar ily a des cas dans lesquels une personne adopte un homme et lui donne enmariage sa petite-fille (E6 69) ou une esclave (RE 26). De plus, une autredifférence avec Nuzi est qu’à Emar, l’adoptant peut donner ses deux filles enmariage non à l’adopté, mais aux fils de ce dernier (SMEA 30 9).

Il faut souligner les points suivants à propos des adoptions avec mariage deNuzi, d’Emar ou d’Ekalte. En premier lieu, l’adoption peut être effectuée par unhomme ou, moins souvent, par une femme64.

À Nuzi l’adoptant n’avait, en général, pas de fils, ce qui fait penser que cespratiques sont surtout destinées à obtenir un héritier masculin, qui en fait doitrésider dans le foyer familial. Seul le texte HSS 19 49 atteste que la familleadoptante avait des fils; l’adopté est obligé de veiller aux mariages de sesnouveaux frères, qui sont probablement mineurs65:

Lorsque fTu[ppa]ya mourra, Enna-pali ne quittera pas la maison defTuppaya jusqu’à ce qu’il ait fait prendre des épouses aux fi[l]s de fTuppaya.

58 Justel 2008a: 52. Voir aussi les idées de Westbrook 2003: 669–70.59 Voir en particulier les cas d’adoption avec mariage mentionnés par Gordon 1981;Bellotto 2004: 131. En ce qui concerne le °atti, voir Beckman1986; sur la Mésopotamie dupremier millénaire voir Wunsch 2003–2004: 192–93. 60 Une référence indirecte à l’adoption avec mariage se trouve dans le testament HSS 19 2et peut-être dans BM 104816; voir en particulier Lion 2004: 561.61 Voir Paradise 1980: 190–92, 1987a: 28–30; Gordon 1981: 156–57; Grosz 1988: 32; Cassin1994: 140 ; Bellotto 2004: 130–31; Lion 2004: 559–61 ; Ben-Barak 2006: 134–38. 62 En marge des cas mentionnés ci-dessous, d’autres documents témoignent du phéno-mène de la matrilocalité, pour d’autres raisons (E6 30, E6 124, WVDOG 102 66); voir Justel2008a: 92.63 E6 29, E6 69, E6 213, TBR 39, TBR 40, TBR 43, TBR 46, TBR 72, TBR 73, TBR 75; RE 25, RE26, RE 41, RE 82, RE 88, ASJ 14 46, AuOr 5 14, SMEA 30 9, RAI 47 1, ZA 90 7 (Emar), WVDOG102 40 (Ekalte). Voir en particulier Limet 2001: 7–10; Bellotto 2004: 132–35, 2008: 189–90;Justel 2008a: 258–59. Toutes les tablettes d’Emar mentionnées dans cette note sont de typesyro-hittite. 64 Ce dernier cas dans HSS 19 49 (Nuzi), E6 69, E6 213, TBR 75, RE 82, ASJ 14 46 (Emar).65 16im-ma-ti-me-e ftup-[pa-a]-a Úfi-ut 17Ien-na-pa-li iÍ-tu É [f]tup-pa-a-a 18la ú-u‰-‰í a-di-i

DU[MU].MEfi-Íu 19Ía ftup-pa-a-a aÍ-Íá-ta ú-Íá-Óa-as-sú-Íu-nu.

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LE DROIT MATRIMONIAL 171

On trouve à Emar les deux situations. Par exemple, il est parfois spécifié quel’adoptant n’a pas d’héritiers66; ou alors, c’est le contexte qui indique qu’il n’ena pas67; et dans un texte (RAI 47 1) le seul fils biologique de l’adoptant est mêmedéshérité (ll. 29–31)68. Six autres attestent au contraire que l’adoptant a déjà desfils69. L’adopté peut prendre en charge des fils de l’adoptant, qui sont mineurs(RE 26, RE 82), et il peut même être spécifié que l’adopté doit leur procurer desépouses (RE 26 : 9–11)70.

Dans les trois cas de Nuzi dans lesquels l’adoptant n’a pas d’héritier mâle,la possibilité que l’épouse conçoive cependant, par la suite, un fils biologiqueest mentionnée (RA 23 51: 10–14, HSS 5 67: 8–9, HSS 19 51: 10–12). Dans ces cas,ce fils biologique serait considéré comme l’aîné et recevrait une part d’héritagedouble de celle de son frère (HSS 5 67, HSS 19 51), ou alors tous deux pourraientrecevoir une part égale (RA 23 51, mais le fils biologique garderait les dieuxfamiliaux, ll. 13–14). Dans les cas d’Emar où l’adoptant a déjà des fils, plusieurspossibilités sont envisagées : que l’adopté soit l’aîné (TBR 43 : 5–9)71 ; qu’ilpartage l’héritage avec les autres fils à parts égales (RE 25 : 6–9) ; ou qu’il partageavec les autres fils, sans spécifier si les parts sont égales, mais en précisant queles dieux sont rattachés au foyer principal (TBR 46 : 6–10, TBR 73 : 6–7).

Certains documents d’Emar attestent que l’adopté avait contracté une detteenvers l’adoptant (TBR 39: 2–4, TBR 40 : 2–3)72. En revanche, dans E6 213, ilapparaît qu’une femme, ayant contracté une dette auprès d’un homme bienconnu, l’adopte et lui donne sa fille comme épouse73. On connaît mal l’arrièreplan économique précis de ces sortes d’adoptions avec mariages.

En dernier lieu, ces documents contiennent diverses clauses, parfoistypiques des adoptions habituelles, comme l’obligation imposée à l’adopté

66 E6 213: 6, TBR 75: 5’, AuOr 5 14: 13–14, SMEA 30 9: 14. Tous ces textes emploient laformule w/yaraÍa muballila ul ‹Íu, «je n’ai pas(d’autre) héritier naturel »; sur cette formule,voir le résumé dans Justel 2008a: 131 n. 39; Démare-Lafont 2010: 57–58.67 E6 29, E6 69, TBR 39, TBR 40, TBR 72, TBR 75 (abîmé), RE 41 (abîmé), RE 88, ASJ 14 46,ZA 90 7, WVDOG 102 40.68 Sur les caractéristiques particulières de ce document, voir Justel 2008a: 266–67.69 TBR 43, TBR 46, TBR 73, RE 25, RE 26, RE 82. De plus, dans TBR 72 la fille donnée enmariage avait reçu un statut légal masculin (ll. 3–4), ce qui n’a jamais lieu dans les casconnus à Nuzi discutés ici. AuOr 5 14 présente peut-être un cas similaire, si l’on interprètele document précédent, AuOr 5 13, comme le propose Bellotto 2004: 132.70 «Tuppil-enna donn[er]a sa fille à ‚la maisonŸ du beau-père, et il fera pr[en]dre uneépouse à (mon fils) IpÓur-Dag⁄n » (9Itup-pí-li-in-na 101 DUMU.MUNUS-Íú a-na ‚ÉŸ e-mi l[i-i]d-din-ma 11DUMU Iip-Óur-dKUR DAM-ta5 l[i-Í]a-Ói-iz).71 C’est le seul cas dans lequel, de plus, la possibilité que l’épouse de l’adoptant aitplusieurs enfants est établie (ll. 7–8). 72 Bellotto 2004: 135, 2008: 189. Ces textes emploient la formule suivante : «Voici que NPétait mon homme pour X sicles d’argent; maintenant j’ai annulé son argent» (anumma NPam¤l›tiya Ía X Íiqil kaspi inanna an⁄ku kaspiÍu uÓtalliq).73 Bellotto (2008: 189) signale qu’il s’agit d’un mariage virilocal.

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d’honorer (pal⁄Óu) l’adoptant. Deux sortes de dispositions ont une significationparticulière dans le cadre du droit matrimonial. D’une part, dans les documentsde Nuzi, il existe des clauses liées au phénomène de la polygamie; concrète-ment, il est interdit à l’adopté de prendre une autre épouse (RA 23 51: 20–24),du moins si la première a eu des enfants (HSS 5 67: 18–21, HSS 19 51: 16–21), etdes conséquences peuvent être prévues au cas où il enfreindrait cetteinterdiction (HSS 19 51 : 16–21, RA 23 51 : 20–24). D’autre part, le cas suivant estattesté uniquement à Emar: si la fille de l’adoptant –mariée avec l’adopté–meurt, l’adoptant doit donner au veuf une autre de ses filles comme épouse(TBR 40 : 18–19, TBR 72 : 24–25, TBR 75 : 13'–14'). Parfois il n’est pas spécifié quela femme doit être la fille de l’adoptant, probablement parce qu’il n’en a plus(TBR 73 : 19–20, ZA 90 7 : 23–24)74.

Toutes ces données peuvent être résumées ainsi:

• Les adoptions avec mariage dans le Proche-Orient ancien sont bienattestées, notamment dans le royaume d’ArrapÓe ainsi que dans lesarchives syriennes de l’Euphrate, ces deux ensembles documentairesdatant du Bronze Récent.

• Un homme ou parfois une femme adopte un homme (ana m⁄r›ti ep¤Íu/ leqû), et lui donne sa fille comme épouse (ana aÍÍ›ti nad⁄nu). D’autresvariantes, attestées à Emar, semblent être marginales, comme le fait quela femme ne soit pas fille de l’adoptant, ou qu’elle soit donnée commeépouse aux fils de l’adopté.

• Dans la plupart des cas, il est clair que l’adoptant n’a pas d’héritiersmasculins. Cette pratique vise donc à lui donner une descendance, àtravers sa fille; de plus le couple reste dans le foyer de l’adoptant et lepatrimoine donné comme dot à la fille ne se disperse pas.

• Quelques documents attestent que cette pratique est parfois destinée àfaire entrer dans une famille un homme adulte, qui peut s’occuper desaffaires juridiques familiales. Ce fait est visible surtout quand l’adoptéest prié de s’occuper du mariage de ses frères (HSS 19 49 de Nuzi, RE26 d’Emar).

• L’adopté entre dans une relation exclusive avec sa nouvelle famille. Cefait peut être reconnu à Nuzi dans les clauses lui interdisant de prendreune autre épouse, car le patrimoine pourrait passer à la descendanceobtenue avec elle. À Emar, on peut reconnaître ce phénomène dans lefait que l’adoptant essaie d’empêcher l’adopté de sortir de la famille,même si la fille de l’adoptant (et épouse de l’adopté) meurt; dans ce cas,l’adoptant doit trouver une autre femme à l’adopté, une autre de sesfilles si c’est possible (sororat).

Pour l’essentiel, les cas de Nuzi, Emar et Ekalte sont équivalents, mais àEmar on peut observer un emploi plus libre de l’adoption avec mariage; ce

74 À cet égard voir Justel 2008a: 97–98.

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phénomène pourrait avoir ici des raisons économiques et pas seulementfamiliales.

9. Adoption matrimoniale

Par l’expression moderne « adoption matrimoniale » on désigne le phénomènejuridique au moyen duquel une femme (généralement jeune), appelée d’ordi-naire en akkadien kall⁄tu, passait de l’autorité de son père ou de son gardienlégal à l’autorité d’une autre personne qui, ensuite, pouvait la donner enmariage à un autre homme.

Ce phénomène est attesté dans la Mésopotamie des époques paléo- etmédio-babylonienne, à Nuzi et en Syrie. En ce qui concerne Nuzi, la principaleétude sur le sujet a été réalisée par Grosz (1987a)75, sur un corpus de 60 textesenviron, auxquels il faut maintenant ajouter une dizaine de nouveauxdocuments (§2). Pour la Syrie du Bronze Récent, le phénomène a été étudiérécemment, à partir d’un corpus de 10 documents provenant d’Emar, Ekalte,AlalaÓ et Ugarit (Justel 2008a: 93–96)76. Parmi ces archives, celles d’Emarprésentent 5 cas, qui ont fait l’objet exclusif d’un autre travail (Justel 2008b).Cette pratique juridique étant bien étudiée, nous relèverons brièvement lespoints communs et les différences qui existent entre ces deux ensemblesdocumentaires.

En ce qui concerne la typologie des documents, les différences sont claires.À Nuzi, l’adoption matrimoniale est en général mise par écrit dans undocument juridique réalisé ex professo, nommé ˇuppi m⁄rt›ti, ˇuppi kall›ti, ˇuppim⁄rt›ti u kall›ti ou ˇuppi aÓ⁄t›ti. Dans la Syrie du Bronze Récent, en revanche,ces actes sont exprimés sur les contrats de mariage, d’adoption ou sur d’autresdocuments juridiques (voir par exemple les données fournies dans Justel2008b: 18–19).

En ce qui concerne les acteurs, dans les deux ensembles documentaires, lapersonne qui donne la femme en adoption matrimoniale peut être, par rapportà celle-ci, son père, sa mère ou son frère. À Nuzi cependant, il est attesté qu’unefemme donne sa petite-fille comme kall⁄tu (HSS 5 11)77, situation qui n’apparaîtpas dans les documents syriens du Bronze Récent. La personne qui reçoit la filleen adoption peut être un homme ou une femme. À Emar, chaque fois qu’unefemme reçoit une jeune fille en adoption matrimoniale, le statut de cettedernière est celui de kall⁄tu et de fille (voir ci-dessous). Lorsque c’est un hommequi reçoit la jeune fille, celle-ci n’est donnée qu’en qualité de kall⁄tu. Cephénomène apparaît également à Nuzi: la quasi totalité des femmes donnéesavec le statut légal de kall⁄tu étaient reçues par des hommes (dans huit cas sur

75 Voir aussi Cassin 1994 et, dans le présent volume, le travail de J. Fincke. Les adoptionsde femmes comme sœurs avaient déjà été étudiés par Eichler 1977.76 Il est possible d’ajouter maintenant ATT 8/50a, d’après l’analyse de Niedorf, 2008: 296–99.77 Voir Grosz 1987a: 141–43.

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neuf78). Lorsque la femme est donnée en qualité de fille et kall⁄tu, elle est remiseà un homme dans onze cas sur seize79; sur ce dernier point, la situation est doncdifférente de celle d’Emar.

Un point important est la terminologie employée. La principale ressem-blance entre les deux ensembles documentaires est l’utilisation du terme kall⁄tu,«fiancée» (à la forme abstraite kall›tu / kall⁄t›tu, «statut de fiancée»). Lesfemmes peuvent être données comme kall⁄tu ou comme kall⁄tu et fille (à Emarune femme n’est jamais donnée simplement comme fille, alors que cela estparfois attesté à Nuzi)80.

Deux éléments doivent être soulignés à ce sujet. Le premier est l’ordre desmots dans cette expression81. À Nuzi, quand une femme est donnée comme filleet kall⁄tu, la formule ana m⁄rt›ti u ana kall›ti nad⁄nu est toujours employée82.Cependant, dans deux documents provenant de la Syrie du Bronze Récentl’ordre des mots change et l’expression devient kall›tu u m⁄rt›tu (E6 216: 5–6d’Emar, AlT 91: 6, 18 d’AlalaÓ). Ce dernier ordre apparaît aussi dans un docu-ment d’époque paléo-babylonienne (Westbrook 1988: 38). Il faut aussi remar-quer qu’un autre document d’Emar, RE 61: 10, observe le même ordre qu’àNuzi. Dans les autres adoptions matrimoniales de la Syrie du Bronze Récent, lafemme est simplement donnée comme kall⁄tu (Justel 2008b: 7–8).

Le deuxième élément est lié aux implications juridiques de ces expressions.En général, à l’époque paléo-babylonienne comme à Nuzi, on suppose que lestransferts de femmes avec un statut de kall⁄tu impliquent que l’adoptant devramarier plus tard la femme à quelqu’un de la famille, tandis que le transfertd’une femme avec un statut de fille et kall⁄tu laisserait à l’adoptant la possibilitéde marier la femme à quelqu’un d’extérieur à la famille83. Les différences entreles deux types de contrats ont été étudiées à partir d’autres points de vue. Parexemple, dans les transferts de femmes ayant un statut de fille et kall⁄tu à Nuzi,l’adoptant est d’ordinaire un personnage jouissant d’une position économiqueélevée, alors que la jeune fille est de basse extraction sociale et, le plus souvent,destinée au mariage avec un esclave (Grosz 1987a: 179). Les transferts defemmes n’ayant que le statut de kall⁄tu ne semblent pas partager ces carac-téristiques. En revanche, dans la Syrie du Bronze Récent, on ne peut pas noter

78 Homme: HSS 5 79, HSS 19 75, JEN 430, JEN 437, JEN 708, RA 32 42, RATK 4, IM 70970.Femme: HSS 5 11.79 Homme: HSS 19 87, HSS 19 142, JEN 26, JEN 50, JEN 429, JEN 432, JEN 433, JEN 596,JEN 620, SANTAG 4 18, RATK 6. Femme: AASOR 16 30, AASOR 16 42, HSS 9 145, JEN 428,JEN 431.80 Voir Grosz 1987a: 133–41.81 Voir cette idée dans Justel 2008a: 6 n. 27.82 Voir par exemple Cassin 1938: 43. Ces documents commencent en général par ˇuppim⁄rt›ti u kall›ti, voir Grosz 1987a: 145.83 Par exemple Van Praag 1945: 82 ; Cardascia 1959: 4 ; Westbrook 1988: 39 ; Zaccagnini2003: 588 n. 73. La même situation semble exister dans les adoptions de sœurs, ana aÓat›ti;voir Greengus 1975: 17–18; Eichler 1977: 45 n. 4.

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de correspondance entre les différents types d’adoption matrimoniale et descaractéristiques sociales particulières (Justel 2008b: 8).

10. Le remariage de la veuve

Le dernier point de comparaison entre le droit matrimonial de Nuzi et celuid’Emar et d’Ekalte est lié aux dispositions qui, dans des testaments d’hommes,concernent la veuve. Le genre testamentaire est un fait caractéristique de laMésopotamie du nord et de la Syrie, pendant le Bronze Récent84.

En ce qui concerne Nuzi, ce sujet a été déjà travaillé, même s’il s’agit souventd’études partielles, qui ne l’aborde que brièvement85. Les textes de l’Euphratesyrien, dont la découverte et la publication sont plus récentes, ont moins retenul’attention86. Un autre ensemble que l’on pourrait ajouter à cette étude est ladocumentation médio-assyrienne, mais un seul testament évoque un cascomparable, KAJ 987.

Dans toutes ces archives, on trouve des prévisions sur un remariage de laveuve, qui sont exprimées sous deux formes. Dans 22 cas est envisagée lapossibilité que la femme épouse un homme extérieur au groupe familial, parl’emploi d’une phrase conditionnelle (avec protase et apodose)88. Le phéno-mène, dans trois autres cas, est mentionné simplement par une phrase affir-mative89.

La formulation du premier type, la phrase conditionnelle, diffère selon lesarchives. La protase peut être:

Nuzi: Íumma fNP ana aÍÍ›ti uÍÍab…, «si fNP habite en tant qu’épouse (d’unautre homme)…»90.

Emar: Íumma fNP arki ‰arr⁄ri tallak …, «si fNP va derrière un ‰arr⁄ru…»91.

84 Voir Démare-Lafont 2010: 52–53.85 En particulier Paradise 1972: 284–85, 288; Wilcke 1977: 216–18. Voir aussi Cassin 1969:139–43, 1994: 137–38; Breneman 1971: 234–35, 289; Wilcke 1985: 307; Malul 1988: 123, 139–40; Grosz 1989: 177–78 ; Ben-Barak 2006: 146.86 Limet 2001: 14–15; Undheim 2001: 240–41; Westbrook 2003: 671, 682 ; Justel 2008a: 142–44.87 Étudié par Wilcke 1977: 212–13.88 Nuzi: BM 104816, HSS 5 71, JEN 444, HSS 19 2, HSS 19 3, HSS 19 6, HSS 19 7, HSS 19 10,HSS 19 19, Sumer 32 2. Emar: RA 77 2, RA 77 3, E6 91, E6 176, TBR 41, TBR 45, ASJ 13 23, RE8, RE 42, CM 13 14. Ekalte: ASJ 16. AÍÍur: KAJ 9. Voir aussi RS 17.033 d’Ugarit.89 Emar: RA 77 3, TBR 22. AÍÍur: KAJ 9.90 Il existe d’autres formulations de la protase, par exemple : Íumma fNP ana aÍÍ›ti illak uuÍÍab…, «si fNP va demeurer comme épouse (d’un autre homme)…»; Íumma fNP ana am¤li/ muti uÍÍab…, «si fNP demeure avec (un autre) homme / mari…». 91 On trouve aussi une autre formulation: 22 Íum-ma fNP LÚ mu-ta 23 sa-ar-ra ta-Óa-az…, «si

fNP épouse un homme faux…» (E6 176).92 Voir les commentaires de Tsukimoto 1994: 234. Il faut remarquer que Undheim (2001:236 n. 111) lit E6 91 : 7: arki muti ta‰‰abat.

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Ekalte (ASJ 16): 15 Íum-ma fNP … 19 ar-ki sar-ra-ri 20 ta-‰a-ab-bat…, «si fNP …suit92 un sarr⁄ru…».

AÍÍur (KAJ 9): 29 Íum-ma (fNP) a-na [mu-ti] 30 tu-Ía-ab…, «si (fNP) habite chez[(un autre) mari]…».

Concernant la protase, on peut faire les remarques suivantes:

• À Emar, l’emploi du verbe al⁄ku, «aller», est habituel pour indiquer quela veuve peut habiter chez un autre homme. À Nuzi ce verbe apparaîtdeux fois dans ce contexte (JEN 444: 20, HSS 19 3: 12), bien qu’il soit jointau verbe plus habituel waÍ⁄bu, «habiter».

• L’expression ana aÍÍ›ti est habituelle à Nuzi, mais on emploie aussi anaam¤li / muti (HSS 5 71: 34, HSS 19 10: 24). Cette dernière se retrouve dansle testament médio-assyrien KAJ 9: 28.

• Tant à Emar qu’à Ekalte, le terme désignant le nouveau mari estinconnu par ailleurs. Il a été proposé que ‰arr⁄ru (écrit sarr⁄ru à Ekalte)soit un terme ouest-sémitique provenant de la racine flRR, “se montrerhostile”93. À Nuzi et dans le testament médio-assyrien, les termes plusgénéraux am¤lu et mutu sont employés.

Les conséquences sont exprimées dans les apodoses, elles aussi variantselon les archives. Celles de Nuzi sont les suivantes, qui se partageant en deuxgroupes:

1) … qannaÍu inassaqma u u‰‰i, «(fNP) choisira sa dot94 et elle partira »95.

2) … 35 TÚG.°I.A i-Óa-ma-Íú-ma e-ri-Íi-Í[a] 36 ú-Íe-‰ú-uÍ, «ils lui arracheront(ses) vêtements et la feront s’en aller nue » (HSS 5 71).

… 21 TÚG-Íu Ía DAM-ia 22 DUMU-ia i-Óa-ma-‰ú 23 ù uÍ-tu É-ia ú-Íe-e‰-‰ú-ú,«mon fils arrachera le vêtement de mon épouse et la fera sortir de mamaison » (JEN 444).

… 24 qa-du […] 25 TÚG-Íu ú-Óa-ma-a‰ ù ú-Íe-e‰-‰í, « […] arrachera sonvêtement et (la) fera sortir » (HSS 19 10).

… 19’ TÚG-sú 20’ ú-Óa-am-ma-sú-ma ú-Íe-e‰-‰í « arrachera son vêtement et(la) fera sortir » (BM 104816).

On peut observer que les conséquences du remariage différent. Paradise(1972: 284–85, 288) par exemple, propose que la première apodose correspond

93 Voir en particulier Huehnergard 1985: 431–32; Limet 2001: 15 n. 22; Pentiuc 2001: 161–62; Justel 2008a: 142. En ce qui concerne la lecture du signe SAR à Ekalte, il peut s’agir d’unevaleur inconnue et il faudrait alors lire ‰arx-ra-ri.94 Le terme qannu fait référence à l’ourlet du vêtement (CAD Q 83–84 b3’). Dans lescontrats de mariage de Nuzi le don de la dot est parfois exprimé par la formule «attacher Xsicles d’argent à l’ourlet de fNP » (§ 7). Voir une autre interprétation dans Démare-Lafont2008: 15.95 HSS 19 2: 62, HSS 19 6: 22–23, HSS 19 7: 47, HSS 19 19: 56. Dans HSS 19 3, la protase etl’apodose sont différentes (voir ci-dessous).

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LE DROIT MATRIMONIAL 177

au cas où, dans le testament, l’épouse a été établie comme gardienne de lafamille et des propriétés familiales (ana abb›ti ep¤Íu)96. En revanche, les apodo-ses de type (2) apparaîtraient lorsque l’épouse n’a pas été établie commegardienne97. La thèse est peut-être correcte mais pose des problèmes et a étécontestée par divers auteurs. Malul (1988: 123–138) par exemple insiste sur lefait que le premier cas se produit lorsque l’épouse ne veut pas aliéner lespropriétés familiales, c’est-à-dire si elle ne fait pas sortir les biens de la maisondu défunt mari98. En revanche, les autres cas sont liés au fait de que la femmea la possibilité de faire sortir des propriétés du foyer. Cette proposition sembleplus probable, d’après ce qu’on trouve à Emar et à Ekalte (voir ci-dessous).

Les apodoses de type 2 impliquent que la femme soit rejetée nue du foyerdu défunt mari99. Les fils doivent s’occuper de surveiller son comportement etprocéder à l’expulsion. C’est seulement dans HSS 19 10: 23–25 qu’il est signaléque la femme doit quitter la maison, mais ensuite il est explicitement dit que sesfils doivent l’en expulser100:

Si ffiilwa-Turi veut donner toutes ces propriétés à un autre (homme), ellesne seront pas données. Si elle les donne, mes ‚filsŸ lui arracheront sonvêtement et la feront s’en all[er].

HSS 19 3 présente un cas particulier, car les formulations de la protase etl’apodose sont tout à fait différentes101:

[Si fU]nu[Í-k]iaÍe pa[rt] de l[a maison de K]el-TeÍÍup [et va] habiter [commeépouse (d’un autre homme), les fils!!! de K]el-T[eÍÍup la f]eront sor[tir. S]iun homme entretient des relations sexuelles avec elle à l’extérieur ‚ouŸentretient des relations sexuelles avec elle chez [Ke]l-TeÍÍup, ‚les fils?Ÿ deKe[l-T]e[ÍÍup] lui […]. S[i] fUnuÍ-k[i]aÍe prend n’importe quelle [pro]priétéde [la maison de K]el-TeÍÍup (et) [la don]ne à quel[qu’un …], les fils de Kel-Te[ÍÍup…].

96 Sur ce sujet voir Cassin 1969.97 Voir aussi JEN 880: 24–26, texte très abimé mais partiellement transcrit par Pfeifer 2009:406 n. 378. Il n’est pas possible de savoir si dans ce testament l’épouse a été établie commegardienne.98 Voir aussi Pfeifer 2009: 406–7.99 D’après Cassin (1969: 137–38), il ne s’agit pas d’un acte symbolique; voir contra Paradise1972: 285. L’expression pourrait être attestée aussi dans HSS 19 1: 14, un texte très abîmé (cen’est pas l’opinion de Paradise 1972: 65; Ben-Barak 2006: 148). L’expression «s’en allernue » dans ce contexte apparaît aussi dans un testament médio-babylonien provenant de°ana; voir Podany 2002: 133–38, l. 14 (commentaire à la p. 137).100 36Íum-ma fÍi-il-wa-tù-ri 37mi-im-ma Íu-un-Íu a-na Íá-ni-i i-na-an-din 38la na-ad-nu Íum-mai+na-an-din ‚DUMU.MEfiŸ-ia TÚG-Íu : ú-Óa-am-ma-‰ú-ma ú-Íe-‰[ú-Íi].101 11[Íum-ma fú]-nu-[uÍ-k]i-a-Íe i-n[a É k]é-el-te-Íup 12[ù a-na] ‚aÍŸ-Íu-ti i[l-la-ak ù u]Í-Ía-ab13[DUMU.MEfi!!! k]é-el-t[e-Íup uÍ]-te-e‰-‰[í Í]um-ma i-na ba-bi LÚ i-na-ak-Íi 14‚ùŸ i-na É [ké-e]l-te-Íupi-na-ak-Íi 15‚DUMU?.MEfi?Ÿ ké-e[l-t]e-[Íup] i-[xx]-Íi Í[um]-ma fú-nu-uÍ-k[i]-a-Íe 16mi-im-ma [ma-n]a-Óa-ti i-na [É ké]-el-te-Íup 17te-le-eq-qè a-na ma-am-m[a-an xxx ta-na]-din 18ù DUMU.MEfi ké-el-te-[Íup xxx].

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Dans les clauses, il est établi que, au cas où l’épouse se remarierait, elledevrait simplement quitter le foyer de son défunt mari (ll. 11–13). La suite dutexte est abîmée et on ne peut pas donc savoir ce que les fils doivent faire sid’autres hommes entretiennent des relations (nâku) avec elle, soit dans le foyer,soit à l’extérieur (ll. 13–15). Il faut remarquer que cette référence spatiale, lafemme se trouvant au-delà du seuil de la maison, est aussi attestée dans untestament d’Emar, RA 77 3: 10, et dans un autre d’Ugarit, RS 17.033: 8’–9’102.

Par ailleurs, dans le texte Sumer 32 2, il est dit que si la veuve se remarie, sesfrères peuvent la tuer103:

Si mon épouse ffiakutu part habiter comme épouse (d’un autre homme), lesfrères de ffiakutu (la) tueront.

À Emar on trouve en général l’apodose suivante :

… ‰ub⁄tiÍi a/ina litti l› tiÍkun u aÍar libbiÍi tallak, «que (fNP) laisse sonvêtement sur le tabouret et qu’elle parte où elle veut »104.

Cet acte symbolique qui consiste à laisser son vêtement sur le tabouret indiquela perte des droits que l’épouse avait sur la maison et peut être assimilé au faitde s’en aller nue, qu’on a mentionné pour Nuzi. À Emar il y a d’autres apodosesplus développées et précises, qui indiquent explicitement que l’épouse perdraitdéfinitivement ses droits sur les propriétés familiales et la descendance:

… 15 i-na É-ia 16[i-na DU]MU.MEfi-[Íi NU TUKU TÚG-Íi a-na] GIfi.fiÚ.A li-iÍ-ku-un-ma 17a-Íar [lìb-bi-Íi xxx] ‚taŸ-lak, «(fNP) [n’aura pas de droits] sur ma maison[(ni) sur ses f]ils; qu’elle laisse [son vêtement sur] le tabouret et qu’elle parteoù elle [veut]» (RA 77 3).

… 24mi-im-mu-Ía Ía DUMU.MEfi-Ía ‰e-eÓ-ru-ti, «ses propriétés (de fNP) serontà ses fils mineurs» (E6 176).

… 23a-na É-ia 24gáb-bi mím-mu-ia NU TUKU TÚG-Íi i-na GIfi.fiÚ.A 25li-iÍ-ku-un-maa-Íar fiÀ-Íi lil-lik, «(fNP) n’aura pas de droit sur ma maison (ni) rien de moi;qu’elle laisse son vêtement sur le tabouret et qu’elle parte où elle veut »(TBR 41).

… 32TÚG?-Íi u GIfi.BUGIN ta-Ía-ka-an 33a-Íar fiÀ-Íi ta-al-la-ak, «(fNP) laissera sonvêtement et le coffre (et) elle partira où elle veut » (ASJ 13 23).

… 21TÚG-Íi i-na GIfi.fiÚ.A li-iÍ-ku-un-ma a-Íar fiÀ-Íi 22lil-lik a-na ku-bu-da-e-Íi NU

TUKU, «que (fNP) laisse son vêtement sur le tabouret et qu’elle parte où elleveut; elle n’aura pas de droit sur ses kubudd⁄’¤105» (CM 13 14).

102 Cf. aussi JEN 444 : « fWaÍirwa ne fera pas sortir mes propriétés de ma maison, ni ne (les)donn[era] à personne au-delà de la porte » (16 fwa-Íi-ir-wa mi-im-ma 171 N≤G uÍ-tu É-ia la ú-Íe-e‰-‰ú-[ú] 18ù a-na ma-am-ma a-na bá-bi la i+na-[an-din]).103 31Íum-ma fÍa-ku-tu4 DAM-ia 32a-na DAM-ti ú-uÍ-Ía-ab 33fiEfi.MEfi fÍa-ku-tu4 i-du-uk!-ku!.104 RA 77 2: 21–24, E6 91: 2, TBR 45: 12–13, RE 8: 42–43, RE 42: 5'. 105 Le terme ouest-sémitique kubudd⁄’¤ (sg. kubudd⁄’u) désigne à Emar les propriétés quele mari stipule pour l’entretien de son épouse, une fois qu’il est décédé ; voir en particulierJustel 2008a: 135–37 (avec bibliographie).

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Le dernier témoignage provient du testament médio-assyrien, KAJ 9:

… 30ra-qu-ti-[Ía tu-u‰-‰a], «(fNP) [sortira] les mains vides »106.

Bien qu’à Emar et Ekalte l’épouse puisse être établie comme gardienne, il nesemble pas exister de corrélation entre ces cas et ceux d’épouses qui ne seraientpas gardiennes. De plus, dans les archives de l’Euphrate, il est explicitementinterdit que l’épouse se marie avec un homme extérieur au groupe familial(‰arr⁄ru, voir ci-dessus). Ces faits pourraient confirmer l’idée de Malul men-tionnée ci-dessus, sur la raison du choix d’une apodose ou de l’autre à Nuzi: peuimporte si la veuve a été établie comme gardienne de la famille, c’est seulementson intention de disperser les biens qui conduit à employer une apodose oul’autre.

Trois documents montrent l’interdiction imposée à la veuve, mais expriméepar une phrase négative, et non par une conditionnelle:

RA 77 3 (Emar): 10pí-i KÁ-bi É-[i]a la-a t[u?]-‚u‰Ÿ?-‰a LÚ-Íi 11i-na É-ti-ia-ma ‚la-a?Ÿ107 tu-Íe-ri-ib, «(fNP) ne sortira pas par la porte de ma maison;elle ne fera pas entrer un homme dans ma maison ».

TBR 22 (Emar): 14i-na É ur-Íi-Ía ma-am-ma 15la-a ir-ru-ub, «personne n’entreradans sa chambre».

KAJ 9 (mA): 28a-na mu-ti 29la tu-Ía-ab, «elle n’habitera pas chez (un autre)mari».

Quelques ressemblances et différences juridiques peuvent être observéesdans toutes ces attestations. Parfois des expressions et des termes proches sontemployés, ou bien on trouve des situations similaires, par exemple :

• Le but de ces clauses est d’empêcher la veuve de disperser le patrimoinefamilial.

• À Nuzi et AÍÍur est employée la formule ana muti waÍ⁄bu, «habiter chez(un autre) mari ».

• À Nuzi, Emar, Ugarit et AÍÍur, est évoquée la conduite de la veuve danssa maison et au-dehors.

11. Conclusions et nouvelles perspectives

Grâce à l’étude de divers aspects du droit matrimonial, on a pu dégagercertaines ressemblances entre les systèmes juridiques de Nuzi et de la Syrie,notamment à partir des archives des villes de l’Euphrate (Emar et Ekalte). Defaçon générale, le droit matrimonial tel qu’il est documenté correspond à celuique l’on connaît dans d’autres régions et à d’autres époques. Certains éléments,

106 Bien que le texte soit partiellement abîmé, cette reconstruction, basée sur le paragraphe37 de la tablette A des lois médio-assyriennes (Roth 1995: 166–67) et proposée par Wilcke(1977: 216), semble cohérente; voir aussi CAD R 374a.107 Huehnergard (1983: 18 [l. 11]) lit ‚lu-úŸ, la copie étant assez claire. D’après les autresattestations, il pourrait être lu la-a. Sur ces lignes voir aussi Tsukimoto 1991: 288.

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attestés ailleurs, sont cependant particulièrement bien représentés à Nuzi,Emar et Ekalte :

• La pratique de la dot indirecte, bien connue aussi pour l’époque paléo-babylonienne, qui est peut-être un phénomène général dans le Proche-Orient ancien.

• Une terminologie précise de la dot, comme les termes mul›gu / mul›g›tu et mlg.

• Des mariages dans lesquels le fiancé a été adopté par le père de la fiancée.

• L’adoption matrimoniale, aussi attestée dans des textes d’autres époques.

• Des prévisions interdisant à la veuve de se remarier, surtout en dehors de la famille.

En général, on peut observer que le droit matrimonial de Nuzi (XIVe s. av.J.-C) est plus proche de la tradition paléo-babylonienne, sujet que Pfeifer (2009)a récemment étudié. En revanche, pour la Syrie, dont les principales archivessont postérieures (XIIIe s. av. J.-C.), les phénomènes mentionnés se développentavec plus de liberté en ce qui concerne les usages et la terminologie.

Toutes les convergences mentionnées doivent être mises en relation avecl’existence possible d’un droit spécifique du nord du Proche-Orient ancien108.En marge du droit matrimonial, d’autres domaines juridiques attestent desressemblances de fond et de forme, ce qui est particulièrement clair dans le droittestamentaire. Cette conclusion pose le problème des agents culturels suscep-tibles d’avoir transmis ce droit spécifique. Il a parfois été proposé que la trans-mission de certaines pratiques juridiques précises soit attribuable auxHourrites109. Il est aussi possible que l’expansion assyrienne, à caractère com-mercial au Bronze Moyen, en soit la cause.

Diverses pistes de recherche restent à explorer notamment en ce quiconcerne le droit matrimonial de Nuzi. Breneman (1971) n’avait à sa dispositionque le recueil d’anthroponymes de Gelb, Purves et MacRae (1943). Une autreliste a été dressée par Cassin et Glassner (1977) qui compilèrent tous les nomsde personnes alors connues. Enfin Lacheman établit une liste demeurée inédite.Parallèlement ces dernières décennies une attention particulière a été portéeaux lots d’archives familiales et au lieu de découverte des tablettes (Zaccagnini2003: 567). On peut citer les travaux de Maidman (1976), Grosz (1988), Morrison(1987, 1993), Müller (1994), Lion (2001a, 2001b), Negri Scafa (2005 et dans leprésent volume). Ils permettent de mieux identifier les personnes apparaissantdans les contrats, de reconstruire des arbres généalogiques et de dégager desstratégies familiales.

108 Voir cette idée déjà dans Muffs 2003 (voir par ex. p. 95–96), et récemment dansDémare-Lafont 2010: 52–53.109 Voir par exemple Skaist 2008.

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En ce qui concerne le droit matrimonial, il sera nécessaire de vérifier quiconserve les documents, parfois pendant plusieurs générations. Une telleanalyse n’a jamais été faite pour ce type de textes à Nuzi, ni d’ailleurs pour lesautres archives du Proche-Orient ancien. Elle devrait permettre de mieuxcomprendre les relations entre les familles et le poids des diverses parties dansle cadre des mariages

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