Coadic S., Dez J. et Larre F., « Le mobilier ligneux du puits PT25055 », in : Bouet A. (dir.),...

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Chapitre 14. Le mobilier ligneux du puits PT25055 S. Coadic, J. Dez, F. Larre – Un secteur d’habitat dans le quartier du sanctuaire à Barzan, p. 689 à 718 L e puits PT25055 1 se trouve au sud du quartier d’habitations et au voisinage direct des thermes de la pre- mière moitié du II e s. p.C. Il a été utilisé à la fin de la seconde moitié du I er s. et son comblement, rapide et volontaire, est contemporain de la phase de monumentalisation de la ville, caractérisée notamment par la mise en place du bâtiment thermal. De nombreux fragments de bois gorgés d’eau ont été dégagés au cours des campagnes de fouilles 2006 et 2007. Les conditions anaérobies ont permis la conservation des vestiges, du fait de la présence permanente de l’eau de la nappe phréatique. Elle se trouve actuellement à 2,90 m NGF (soit à plus de 11 m de la surface) et son niveau a probablement varié au cours de ces derniers siècles, comme le laissent penser les bois de l’US 25995, moins bien conservés que ceux des couches inférieures. Les éléments qui se trouvaient dans les US 26292 et 26293 sont contemporains de la fin de la phase d’utilisation du puits et peuvent être interprétés comme des rejets accidentels et les premiers dépôts volontaires. En effet, lorsque les bois apparaissent en nombre dans les niveaux inférieurs des puits, cela correspond à la fin de leur utilisation, l’eau n’étant plus bonne à consommer. C’est la première couche d’abandon 2 . Ceux qui ont été mis au jour dans les couches supérieures appartiennent à la phase 4-1, correspondant à un comblement rapide et volontaire de la structure, vraisemblablement à partir de matériaux disponibles dans des zones de rejets alentour. Ils sont donc un reflet des activités qui ont eu lieu à proximité du puits pendant son utilisation et au moment de son comblement. Ils peuvent également être l’indice de l’exploitation du milieu environnant. PRÉSENTATION GÉNÉRALE DU CORPUS Le contexte humide du puits PT25055 a permis la découverte de plus de 2000 fragments de bois, répartis de façon aléatoire dans douze couches stratigraphiques. Les bois ont fait l’objet d’une étude macroscopique et microscopique. Afin d’appréhender l’ensemble du dépôt, le mobilier ligneux a été classé en trois catégories 3 : les objets, les branchages et les bois architecturaux. Dans cette dernière catégorie, ont été inclus également les éclats et déchets de taille. Lors de la fouille, la totalité des éléments ligneux travaillés a été recueillie. Les bois non travaillés (type branchages) ont fait l’objet d’un prélèvement partiel, mais indifférencié, des éléments repérés dans la totalité des US du puits 4 . Sont interprétés comme branchages tous les éléments “naturels”, c’est- à-dire non façonnés par la main de l’homme, mais pouvant présenter une trace de coupe (toujours un simple biseau dans notre corpus). Cette coupe ne provient que de la récolte du bois et il n’y a aucun indice de seconde transformation 5 . Dans la catégorie des bois architecturaux, le sous-groupe des éclats et déchets de taille inclut les vestiges considérés comme rebuts d’une activité de façonnage d’un élément ligneux. Par éclats, on entend une parcelle de bois enlevée avec 1. Nous tenons à remercier A. Dietrich et D. Cherchi pour leurs nombreux conseils avisés. 2. Dietrich 2010. 3. Saedlou 2000, 241 ; Mille 2000, 219. 4. Méthode préconisée par L. Chabal (Chabal 2005, 222). 5. Terminologie forestière de la filière bois : la première transformation regroupe les activités de débitage du matériau bois ; la seconde transformation rassemble les activités (charpente, menuiserie, ébénisterie) qui travaillent à partir du bois issu de la première transformation.

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Chapitre 14.

Le mobilier ligneux du puits PT25055

S. Coadic, J. Dez, F. Larre

– Un secteur d’habitat dans le quartier du sanctuaire à Barzan, p. 689 à 718

L e puits PT25055 1 se trouve au sud du quartier d’habitations et au voisinage direct des thermes de la pre-mière moitié du iie s. p.C. Il a été utilisé à la fin de la seconde moitié du ier s. et son comblement, rapide et volontaire, est contemporain de la phase de monumentalisation de la ville, caractérisée notamment par

la mise en place du bâtiment thermal.

De nombreux fragments de bois gorgés d’eau ont été dégagés au cours des campagnes de fouilles 2006 et 2007. Les conditions anaérobies ont permis la conservation des vestiges, du fait de la présence permanente de l’eau de la nappe phréatique. Elle se trouve actuellement à 2,90 m NGF (soit à plus de 11 m de la surface) et son niveau a probablement varié au cours de ces derniers siècles, comme le laissent penser les bois de l’US 25995, moins bien conservés que ceux des couches inférieures.

Les éléments qui se trouvaient dans les US 26292 et 26293 sont contemporains de la fin de la phase d’utilisation du puits et peuvent être interprétés comme des rejets accidentels et les premiers dépôts volontaires. En effet, lorsque les bois apparaissent en nombre dans les niveaux inférieurs des puits, cela correspond à la fin de leur utilisation, l’eau n’étant plus bonne à consommer. C’est la première couche d’abandon 2. Ceux qui ont été mis au jour dans les couches supérieures appartiennent à la phase 4-1, correspondant à un comblement rapide et volontaire de la structure, vraisemblablement à partir de matériaux disponibles dans des zones de rejets alentour. Ils sont donc un reflet des activités qui ont eu lieu à proximité du puits pendant son utilisation et au moment de son comblement. Ils peuvent également être l’indice de l’exploitation du milieu environnant.

Présentation générale du corPus

Le contexte humide du puits PT25055 a permis la découverte de plus de 2000 fragments de bois, répartis de façon aléatoire dans douze couches stratigraphiques.

Les bois ont fait l’objet d’une étude macroscopique et microscopique. Afin d’appréhender l’ensemble du dépôt, le mobilier ligneux a été classé en trois catégories 3 : les objets, les branchages et les bois architecturaux. Dans cette dernière catégorie, ont été inclus également les éclats et déchets de taille. Lors de la fouille, la totalité des éléments ligneux travaillés a été recueillie. Les bois non travaillés (type branchages) ont fait l’objet d’un prélèvement partiel, mais indifférencié, des éléments repérés dans la totalité des US du puits 4. Sont interprétés comme branchages tous les éléments “naturels”, c’est-à-dire non façonnés par la main de l’homme, mais pouvant présenter une trace de coupe (toujours un simple biseau dans notre corpus). Cette coupe ne provient que de la récolte du bois et il n’y a aucun indice de seconde transformation 5.

Dans la catégorie des bois architecturaux, le sous-groupe des éclats et déchets de taille inclut les vestiges considérés comme rebuts d’une activité de façonnage d’un élément ligneux. Par éclats, on entend une parcelle de bois enlevée avec

1. Nous tenons à remercier A. Dietrich et D. Cherchi pour leurs nombreux conseils avisés. 2. Dietrich 2010.3. Saedlou 2000, 241 ; Mille 2000, 219.4. Méthode préconisée par L. Chabal (Chabal 2005, 222).5. Terminologie forestière de la filière bois : la première transformation regroupe les activités de débitage du matériau bois ; la seconde

transformation rassemble les activités (charpente, menuiserie, ébénisterie) qui travaillent à partir du bois issu de la première transformation.

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un instrument tranchant, de type hache ou herminette, outils de percussion lancée 6. Les déchets sont les débris, les restes sans valeur issus du façonnage et de l’ajustage d’une plus grande pièce de bois. Ils sont retranchés par percussion posée (scie ou couteau) 7. Leur taille n’excède pas une dizaine de centimètres. Le rabotage (percussion posée) produit également des copeaux. Ces éléments, courbes, fins et cassants, se brisent en une multitude de petits morceaux lorsqu’ils sont gorgés d’eau. Leur présence est attestée ; ils constituent les résidus de tamisage (“tapis” de matière organique) (fig. 1).

La nécessité d’étudier un corpus aussi important a induit le recours à des choix méthodologiques. Si le petit mobilier a fait l’objet d’une étude systématique, il a fallu, pour les autres bois, avoir recours à un seuil de représentativité, communément fixé à 300 fragments 8. Trois US permettent d’atteindre cette quantité d’éléments ligneux : US 25995, US 26292 et US 26293. Elles correspondent à deux phases bien distinctes de la chronologie relative du puits. L’US 25995 fait partie de sa phase de comblement. C’est une couche déposée rapidement et qui se trouve en limite des fluctuations de la nappe phréatique. Les US 26292 et 26293 appartiennent à la dernière phase d’occupation puis d’abandon du puits. Ces couches d’accumulation dans un temps dont nous ne connaissons pas l’étendue ont été le réceptacle d’objets et de déchets mêlés. Il reste très difficile d’interpréter la chute accidentelle à la fin de l’utilisation du puits ou le rejet volontaire d’éléments hors d’usage.

Du fait de leur nombre, les branchages, les éclats et déchets de taille des US ont été étudiés à l’aide de “filtres interprétatifs”. Chaque problématique a fait l’objet d’une étude spécifique (comptage, prise de mesures, etc.), s’appuyant sur un assortiment d’un petit nombre de fragments saisis de façon aléatoire, généralement 50 par lot. Cette approche permet d’appréhender le dépôt dans toutes ses couches et dans toutes les catégories de débris de bois. Une telle étude n’est pas destinée à fournir le profil précis de chaque individu.

Des échantillons de chaque lot ont fait l’objet d’observations macroscopiques botaniques et d’une détermination microscopique selon les plans transversal, radial et tangentiel (fig. 2-3).

Au total, ce sont 21 taxons qui ont été déterminés. Quatre essences se dégagent particulièrement. Le Chêne caducifolié (Quercus sp.) tout d’abord, qui représente la moitié des échantillons étudiés. Il est omniprésent dans toutes

6. Leroi-Gourhan 1971, 47-48. 7. Leroi-Gourhan 1971, 47-48. 8. Chabal 1997, 33.

Instrumentum

Catégories

Branchages

Bois architecturaux

Petit mobilier

Sous-groupesÉclats et déchets de taille Éléments structurels

US Total Quantité/m3

25994 76 130 + copeaux 1 33 240 4825995 98 263 16 20 397 7925996 71 148 7 226 7525997 7 18 1 2 28 1925998 3 55 4 62 1025999 1 1 0,526288 2 0 2 126289 19 67 15 8 109 526290 18 51 1 6 76 1526291 28 105 2 13 148 7426292 226 277 61 12 576 28826293 112 207 + copeaux 18 6 343 572Total 658 1323 115 112 2208

| Fig. 1. Nombre de fragments par US, par catégories et sous-groupes.

le mobilier ligneux du puits pt25055 – 691

Branchages Objets

Bois architecturaux

Taxons Éléments structurels Éclats et Déchets de taille

Conifèr

es Sapin pectiné (ou blanc) Abies alba Mill. 10 27 191Epicéa Picea abies Karsten 1

Pin maritime Pinus pinaster Aiton 55 If Taxus baccata L. 1

Feuill

us

Buis Buxus sempervirens L. 18 Clématite Clematis vitalba L. 8

Cornouiller sanguin Cornus saguinea L. 1 Noisetier Corylus avellana L. 184 Fusain Evonymus europaeus L. 1 Hêtre Fagus silvatica L. 88 2 54Frêne Fraxinus exclesior L. 1 Houx Ilex aquifolium L. 1

Pommier et assimilés Pirus malus L.et assimilés * 8 Pomoïdés indéterminés 11

Merisier Prunus avium L. 12 Prunoïdés indéterminés 4

Chêne caducifolié Quercus sp. 170 14 93 421Chêne liège Quercus suber L. 4

Saule Salix sp. 2 Tilleul Tilia sp. 16

Orme champêtre Ulmus campestris L. 3 Indéterminés 13 5

Total 520 112 120 667

* pommier (Pirus malus L.) ; poirier (Pirus communis L.) ; aubépine (Crataegus sp.) ; cognassier (Cydonia oblonga L.)

Sapin  pec)né  +ou  .lanc0  

Epicéa   Pin  mari)me  

If   Buis    Cléma)te  

Cornouiller  sanguin  

 <oise)er  

Fusain   Hêtre  

Frêne   Houx   Pommier  et  assimilés  

Pomoïdés  Indéterminés  CDerisier  

Prunoïdés  Indéterminés  

Chêne  caducifolié  

Chêne  liège  

Saule   Tilleul  

Orme  champêtre  

Indéterminés  

| Fig. 2. Nombre et répartition des taxons selon les catégories et sous-groupes.

| Fig. 3. Répartition totale des taxons.

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les catégories. La part importante (16 %) du sapin blanc ou pectiné (Abies alba), uniquement dans les bois manufacturés, soulève de nombreuses questions : à Barzan, cette essence est a priori loin de ses aires naturelles de croissance. Le hêtre (Fagus silvatica) et le noisetier (Corylus avellana) occupent chacun environ un dixième du corpus. Si le hêtre est présent dans toutes les catégories, le noisetier se trouve uniquement sous la forme de branchages. Les 17 essences restantes sont présentes dans des proportions très restreintes, de moins de 1 % à 4 % maximum (une seule occurrence pour certains taxons) et se concentrent dans les catégories des objets et des branchages.

l’instrumentum : objets et bois architecturaux

Le système de puisage

Deux fragments de douelles ont été mis au jour dans le comblement :

1. Sapin blanc (Abies alba) ; long. : 24 cm ; 5 cm. Planche ; extrémités perpendiculaires au fin du bois ; long. de la queue (espace sous le fond) 3 cm ; larg. du jable (encoche destinée à maintenir le fond) : 0,6 cm. La pièce semble s’être brisée à l’emplacement d’une mortaise cylindrique traversant toute la largeur de la pièce, 14 cm au-dessus du fond (US 26293) (non figuré).

2. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 5,4 cm ; larg. : 4,1 cm ; ép. : 1,9 cm. Fragment de planche ; une face plane, l’autre légèrement convexe ; une extrémité perpendiculaire au fil du bois, l’autre brisée ; une mortaise à mi-bois ramène l’épaisseur de la pièce à 1 cm, à 4,2 cm de l’extrémité intacte. Il pourrait s’agir de la queue d’une douelle (US 26293) (non figuré).

Ces éléments appartiennent vraisemblablement à deux seaux distincts, les essences étant différentes et les queues n’ayant pas la même longueur. La dimension du premier semble réduite.

Le travail du textile

L’étude du petit mobilier en bois montre un nombre important de fragments pouvant être mis en lien avec le travail du textile.

Les fuseaux 3. Sapin blanc (Abies alba) ; long. : 13,2 cm ; diam. : 1,2 cm. Pièce cylindrique plus épaisse au centre qu’aux extrémités (US 26289) (fig. 4a).

4. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 5,1 cm ; diam. : 0,8 cm. Pièce cylindrique ; une extrémité brisée (US 25995) (fig. 4b).

5. Sapin blanc (Abies alba) ; long. : 14,6 cm ; diam. : 1 cm. Pièce cylindrique plus épaisse au centre qu’aux extrémités (US 25995) (fig. 4c).

6. Sapin blanc (Abies alba) ; long. : 7,2 cm ; diam. : 1 cm. Pièce cylindrique ; une extrémité brisée (US 25995) (fig. 4d).

7. Essence indéterminée ; long. : 6,5 cm ; diam. : 1,1 cm. Pièce cylindrique appointée ; une extrémité brisée (US 26289) (non figuré).

8. Essence indéterminée ; long. : 5 cm ; diam. : 1,3 cm. Pièce cylindrique ; une extrémité arrondie, l’autre brisée (US 26289) (non figuré).

9. Buis (Buxus sempervirens) ; long. : 6,3 cm ; diam. : 1,4 cm. Pièce cylindrique ; une extrémité arrondie, l’autre brisée (US 26291) (fig. 4e).

10. Sapin blanc (Abies alba) ; long. : 12,1 cm ; diam. : 0,9 cm. Pièce cylindrique plus épaisse au centre qu’aux extrémités ; une extrémité brisée (US 26291) (non figuré).

le mobilier ligneux du puits pt25055 – 693

La fusaïole11. Buis (Buxus sempervirens) ; diam. : 3,3 cm ; ép. : 1,4 cm. Pièce cylindrique, traversée dans son épaisseur par une mortaise cylindrique, comblée par un tenon en bois. Profil de la tranche bitronconique (US 26293) (fig. 5).

Les quenouilles12. Buis (Buxus sempervirens) ; long. : 16 cm ; diam. : 1,6 cm. Pièce cylindrique tournée et décorée (US 25998) (fig. 6a).

13. Buis (Buxus sempervirens) ; long. : 15,7 cm ; diam. : 1,5 cm. Pièce tournée et décorée ; une extrémité grossièrement appointée (US 26289) (fig. 6b).

14. Buis (Buxus sempervirens) ; long. : 26,5 cm ; diam. : 1,2 cm. Pièce tournée et décorée ; une extrémité a une section octogonale, sur une longueur de 5,5 cm ; chaque face est creusée de 10 à 11 mortaises cylindriques (diam. : 0,3 cm), toutes comblées par un tenon (US 26292) (fig. 6c).

Douze éléments peuvent être attribués au travail du textile. Ce sont huit fragments de fuseaux, une fusaïole et trois pièces interprétées comme des quenouilles. La découverte de ces trois dernières est relativement exceptionnelle. En effet,

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c

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0 5 cm

| Fig. 4. Les fuseaux. a. US 26289 ; b. US 25995 ; c. US 25995 ; d. US 25995 ; e. US 26291 (dessins F. L.).

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| Fig. 5. La fusaïole (US 26293) (dessins F. L.).

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c

| Fig. 6. Les quenouilles. a. US 25998 ; b. US 26289 ; c. US 26292 (dessins F. L.).

le mobilier ligneux du puits pt25055 – 695

ces outils utilisés pour le filage sont la plupart du temps découverts en contexte funéraire. Ils peuvent être en verre, en os, en ivoire ou en bois 9. Trois types se dégagent 10 : les quenouilles à anneau, à main et à bras. Les premières sont courtes et terminées par un anneau que la fileuse fixait au bout de son doigt 11. Les comparaisons ethnographiques laissent penser qu’elles étaient destinées à filer des fibres courtes, comme la laine 12. Les secondes sont un peu plus longues. Elles sont composées de “plusieurs tiges assemblées, bouletées ou moulurées, terminées à leur extrémité supérieure par un bouton ou un élément cupuliforme” 13. Enfin, trois exemples plus longs (61 cm pour la celui de Milan (Italie) 14, un peu plus de 59 cm pour celui de la resserre de Selongey (Côte-d’Or) 15 et 62 cm pour l’exemplaire de Cologne 16) pourraient témoigner de l’existence d’un modèle bloqué sous le bras pendant le filage. Les dimensions de la pièce 14 de Barzan et le profil mouluré des deux autres fragments indiquent qu’il s’agit ici de quenouilles tenues à la main.

Cet ensemble d’éléments, associé aux pesons en terre cuite découverts dans le comblement du puits 17 suggère l’existence d’une petite chaîne de production textile à proximité de la zone de puisage. Il n’existe cependant pas assez d’indices pour pouvoir déterminer s’il s’agit d’une production à grande échelle 18 ou d’une activité domestique 19.

Si l’interprétation de ces éléments est assurée, il en est d’autres pour lesquels l’association avec la fabrication du tissu est tentante, mais reste discutable. C’est le cas des peignes, des bobines, des navettes et de deux fragments cupuliformes.

Les peignes15. Buis (Buxus sempervirens) ; long. : 4,8 cm ; larg. : 3,7 cm ; ép. : 1 cm. Deux rangées de dents (une rangée plus espacée que l’autre), séparées par un corps central de 1,2 cm de large (US 25995) (fig. 7a).

16. Buis (Buxus sempervirens) ; long. : 3,9 cm ; larg. : 5 cm ; ép. : 0,8 cm. Deux rangées de dents (une rangée plus espacée que l’autre), séparées par un corps central de 1 cm de large (US 25995) (fig. 7b).

17. Buis (Buxus sempervirens) ; long. : 3,6 cm ; larg. : 3,5 cm ; ép. : 0,5 cm. Deux rangées de dents (une rangée plus espacée que l’autre), séparées par un corps central de 2,2 cm de large (US 25995) (fig. 7c).

18. Buis (Buxus sempervirens) ; long. : 1,9 cm ; larg. : 4,5 cm ; ép. : 0,8 cm. Deux rangées de dents (une rangée plus espacée que l’autre), séparées par un corps central de 0,9 cm (US 25996) (fig. 7d).

19. Buis (Buxus sempervirens) ; long. : 4,8 cm ; larg. : 5 cm ; ép. : 0,9 cm. Deux rangées de dents (une rangée plus espacée que l’autre), séparées par un corps central de 1,5 cm (US 25996) (fig. 7e).

20. Buis (Buxus sempervirens) ; long. : 8 cm ; larg. : 5,5 cm ; ép. : 1 cm. Deux rangées de dents (une rangée plus espacée que l’autre), séparées par un corps central de 1,2 cm ; extrémité intacte arrondie (US 26289).

21. Buis (Buxus sempervirens) ; long. : 5,1 cm ; larg. : 3,2 cm ; ép. : 1,1 cm. Deux rangées de dents (une rangée plus espacée que l’autre), séparées par un corps central de 0,7 cm. Extrémité intacte arrondie (US 26289) (fig. 7f).

22. Buis (Buxus sempervirens) ; long. : 3,2 cm ; larg. : 5,4 cm ; ép. : 1 cm. Deux rangées de dents (une rangée plus espacée que l’autre), séparées par un corps central de 1 cm (US 26289) (non figuré).

Neuf fragments de peignes ont été mis au jour dans les US de comblement du puits. Ils sont tous en buis (Buxus Sempervirens), munis de deux rangées de dents, l’une étant plus serrée que l’autre. Leur modèle est classique, on le connaît

9. Béal 2001-2002, 326. 10. Facchinetti 2005, fig. 6. 11. Wasowicz 1987 ; Cremer 1996a ; Cremer 1996b. 12. Wasowicz 1987, 268. 13. Béal 2001-2002, 326 ; Gottschalk 1996. 14. Facchinetti 2005, 199.15. Béal 2001-2002, 326.16. Facchinetti 2005, 209.17. Voir chapitre 13, p. 588.18. Les sources antiques laissent entendre que la production lainière était particulièrement importante chez les Santons et l’étude de la

faune de Barzan montre une forte représentation des ovins-caprins (Bouet 2008 ; voir également chapitre 16, p. 780). 19. Une petite installation de ce type est restituée par exemple à Autun (Rodet-Belarbi & Chardron-Picault 2005, 169).

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pendant tout l’Empire 20. Sur les fragments les mieux conservés, le côté intact est arrondi. Trois types peuvent être distingués. Ils sont différenciés par la largeur de la bande transversale : 1 cm, 1,5 et 2,3 cm. Les deux premiers modules sont proches, leur différence résulte sans doute d’une légère modification du geste de l’artisan. La troisième bande est plus marquée, elle pourrait alors traduire un choix esthétique.

Les peignes sont généralement interprétés comme des instruments de toilette. Cependant, on ne peut exclure une utilisation à des fins artisanales : L. Chabal et M. Feugère ont montré qu’ils pu être également employés pour carder la laine à filer. Cette hypothèse ne peut être écartée ici, d’autant plus qu’au fond du puits se trouvaient de nombreux vestiges liés au travail du textile 21.

20. Chabal & Feugère 2005, 153. 21. Voir chapitre 13, p. 588.

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| Fig. 7. Les peignes. a. US 25995 ; b. US 25995 ; c. US 25995 ; d. US 25996 ; e. US 25996 ; f. US 26289 (dessins F. L.).

le mobilier ligneux du puits pt25055 – 697

Les bobines de type 123. Houx (Ilex aquifolium) ; long. : 4,9 cm ; diam. : 5,3 cm. Elément monoxyle composé de deux disques bombés réunis par un axe cylindrique (US 25994) (fig. 8a).

24. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; diam. : 5,8 cm ; ép. : 2,9 cm. Disque bombé sur lequel est encore visible le départ d’un axe cylindrique (US 26290) (fig. 8b).

Les bobines de type 225. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 9,1 cm ; larg. : 1,7 cm ; ép. : 1,3 cm. Pièce à section hexagonale ; présence de deux rainures diamétralement opposées (larg. : 0,4 cm ; prof. : 0,5 cm) ; une extrémité creusée par une mortaise triangulaire de 1,1 cm de profondeur (US 26289) (fig. 9).

26. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 8,3 cm ; larg. : 1,9 cm ; ép. : 1,9 cm. Pièce à section hexagonale ; présence de deux rainures diamétralement opposées (larg. : 0,2 cm ; prof. : 0,6 cm) ; extrémités creusées par des mortaises triangulaires de 0,5 et 0,8 cm de profondeur (US 26291) (non figuré).

27. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 10,7 cm ; larg. : 2,5 cm ; ép. : 1,8 cm. Pièce à section hexagonale ; présence de deux rainures diamétralement opposées (larg. : 0,3 cm ; prof. : 0,6 cm) ; extrémités creusées par des mortaises triangulaires de 1 et 1,3 cm de profondeur (US 26292) (non figuré).

28. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 6,1 cm ; larg. : 1,9 cm ; ép. : 1,9 cm. Pièce à section hexagonale ; présence de deux rainures diamétralement opposées (larg. : 0,3 cm ; prof. : 0,6 cm) ; une extrémité creusée par une mortaise triangulaire 0,8 cm de profondeur, l’autre brisée (US 26292) (non figuré).

29. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 11,6 cm ; larg. : 2,7 cm ; ép. : 2,7 cm. Pièce à section hexagonale ; présence de deux rainures diamétralement opposées (larg. : 0,3 cm ; prof. : 0,6 cm) ; une extrémité munie d’un tenon rectangulaire (long. : 0,5 cm ; larg. : 1,1 cm ; ép. : 0,3 cm), l’autre brisée (US 26292) (non figuré).

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| Fig. 8. Les bobines de type 1. a. US 25994 ; b. US 26290 (dessins F. L.).

250 5 cm

| Fig. 9. La bobine de type 2 (US 26289) (dessin S. C.).

698 – un secteur d’habitat dans le quartier du sanctuaire à barzan

30. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 6,2 cm ; larg. : 2,4 cm ; ép. : 1,7 cm. Pièce à section hexagonale ; présence de deux rainures diamétralement opposées (larg. : 0,3 cm ; prof. : 0,4 cm) ; extrémités creusées par des mortaises triangulaires de 1 et 1,3 cm de profondeur (US 26292) (non figuré).

Une bobine circulaire entière et un fragment ont été dégagés du comblement. Leur profil est relativement classique : chaque élément est constitué d’un bloc de bois sphérique dans lequel a été creusée une rigole. Ce type d’objet connaît de nombreuses comparaisons et, comme l’ont noté L. Chabal et M. Feugère, “ceux qui les dénomment bobines, […] les attribuent au tissage” 22. Cette interprétation est en effet abusive : la multiplication des découvertes récentes laisse supposer que ces éléments ont plutôt servi à la fixation de bâches 23.

À l’inverse, nous ne connaissons pas de parallèle avec le second modèle de bobine, hormis dans le comblement du puits PT20700 de Barzan. Ces éléments de bois ont une rigole étroite creusée à leur circonférence et leurs extrémités présentent une entaille triangulaire. Ceci pourrait être un indice de leur fonction : un fil ou une cordelette entourait ces objets et ne devait pas en glisser. On pourrait attribuer ces pièces de bois à l’activité du tissage. Il s’agirait alors de navettes au profil très simple, destinées à soutenir le fil de trame, rappelant celui des outils employés à la fabrication des filets de pêche 24.

Les éléments cupuliformes31. Buis (Buxus sempervirens) ; diam. : 6,5 cm ; haut. : 2,3 cm. Pièce hémisphérique évidée, dont la paroi est épaisse de 0,1 à 0,2 cm et creusée d’une ouverture circulaire (US 25996) (fig. 10a).

32. Buis (Buxus sempervirens) ; diam. : 4,6 cm ; haut. : 3,5 cm. Pièce cylindrique, décorée de cinq gorges parallèles et dont l’intérieur a été totalement évidé. Ce creusement est large 3,8 cm à une extrémité, puis se resserre pour atteindre 1,6 cm (US 26292) (fig. 10b).

Ces deux éléments ont des formes différentes, mais sont tous deux cupuliformes et traversés par un creusement axial. D’une part, un fragment identique à la pièce 32 a été mis au jour dans la resserre de Selongey (Côte-d’Or), à proximité d’une quenouille 25. D’autre part, cet élément rappelle le sommet de la quenouille de type IIe de la typologie proposée par G. Facchinetti ; la pièce 31 pourrait se rapprocher également de l’extrémité du type IId1 26. Ceci tendrait à laisser penser que ces deux pièces sont des éléments de quenouilles.

22. Chabal & Feugère 2005, 161. 23. Chabal & Feugère 2005, 161. 24. Voir chapitre 13, p. 609, fig. 22.25. Béal 2001-2002, 310 et fig. 14, C1. 26. Facchinetti 2005, fig. 6.

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| Fig. 10. Les éléments cupuliformes. a. US 25996 ; b. US 26292 (dessins F. L.).

le mobilier ligneux du puits pt25055 – 699

La menuiserie

Plusieurs fragments pourraient être les vestiges de meubles et de portes.

33. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 14 cm ; larg. : 3,5 cm ; ép. : 5 cm. Pièce monoxyle prenant la forme d’un T et traversée dans son épaisseur par un clou (US 26291) (fig. 11a).

Cet élément ne présente pas de trace d’usure ; il était fixé par un clou. L’envergure de la pièce laisse penser qu’il pourrait s’agir d’une poignée, peut-être de porte. D’autres modèles de poignées ont été mis au jour à Untereschenz (Suisse) ; ce sont leurs extrémités qui portent les fixations 27.

34. Essence indéterminée ; long. : 42 cm ; diam. : 4,9 cm. Pièce cylindrique ; extrémités munies de tenons : un tenon cylindrique simple pour la première (long. : 3,6 cm ; diam. : 3 cm), un autre constitué de deux degrés pour la seconde (long. totale : 4,6 ; diam. : 4,1 et 2,7 cm) (US 26292) (fig. 11b).

En l’absence de comparaison pour cet objet, nous ne pouvons que supposer qu’il pourrait être un pied de meuble.

35. Buis (Buxus Sempervirens) ; long. : 6 cm ; diam. max. : 1,2 cm. Appendice mouluré dont l’extrémité intacte, conique, est précédée de deux gorges contiguës (US 25996) (fig. 11c).

36. Fusain (Evonymus europaeus) ; long. : 4,7 cm ; diam. max. : 1,7 cm. Cylindre, surmonté d’une extrémité sphérique et muni d’un tenon facetté (US 25999) (fig. 11d).

Deux appendices moulurés se trouvaient dans le comblement du puits. Le premier est identique à un élément de tabletterie, découvert dans le même contexte 28. Son extrémité la plus étroite présente de fortes traces d’usure. Le second est muni d’un tenon facetté. Il est possible qu’ils aient été employés en tant que décor de meuble 29.

La vaisselle37. Essence indéterminée ; long. : 5 cm ; larg. : 3,4 cm ; ép. : 7 cm (US 25994) (fig. 12a).

Ce fragment, même ténu, témoigne du recours à la vaisselle en bois sur le site de Barzan. De tels fragments sont connus ailleurs, notamment des coupes et des louches à Xanten, un récipient de stockage à Vitudurum (Suisse) et un plat en orme à Untereschenz 30. L’utilisation de tels récipients était sans doute courante, bien que moins fréquente qu’au Moyen Âge.

38. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 18,5 cm ; larg. : 3,5 cm ; ép. : 1,8 cm. Pièce cylindrique facettée s’aplatissant et s’élargissant d’une extrémité à l’autre (de 1,8 cm de diamètre à 1,3 cm d’épaisseur pour 3,5 cm de large). Extrémité la plus étroite biseautée sur une longueur de 1,5 cm, l’autre brisée (US 26292) (fig. 12b).

Cette pièce facettée est semblable à un manche. L’extrémité la plus large est brisée, mais il apparaît qu’à l’origine elle devait être plate. Il pourrait peut-être s’agir d’une cuillère. À Xanten, on connaît une louche en bois 31, ce qui confirme l’utilisation sans doute fréquente du bois pour la fabrication de ce type de matériel.

Les bouchons39. Chêne liège (Quercus suber L.) ; diam. : 6 cm ; ép. : 1,4 cm. Fragment de liège, plat, grossièrement circulaire, traversé en son centre par un trou (diam. : 0,7 cm), comblé par un fragment de bois (US 25994) (fig. 13a).

40. Chêne liège (Quercus suber L.) ; diam. : 5,3 cm ; ép. : 1,1 cm. Fragment de liège, plat, grossièrement circulaire (US 25994) (fig. 13b).

27. Hedinger & Leuzinger 2003, 112, n° 78 et 79. 28. Voir chapitre 13, p. 651, n°13695. 29. Un objet au profil semblable est restitué à l’extrémité d’une charnière par J.-Fr. Dureuil (Dureuil et al. 1996, 79). 30. Hedinger & Leuzinger 2003, 71-73. 31. Hedinger & Leuzinger 2003, 73, fig. 5.

700 – un secteur d’habitat dans le quartier du sanctuaire à barzan

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| Fig. 11. Les éléments de menuiserie. a. US 26291 ; b. US 26292 ; c. US 25996 ; d. US 25999 (dessins F. L. : a, c, d ; dessin S. C. : b).

le mobilier ligneux du puits pt25055 – 701

| Fig. 12. La vaisselle. a. US 25994 ; b. US 26292 (dessins F. L.).

| Fig. 13. Les bouchons. a. US 25994 ; b. US 25994 ; c. US 25995 ; d. US 25995 (dessins F. L.).

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702 – un secteur d’habitat dans le quartier du sanctuaire à barzan

41. Chêne liège (Quercus suber L.) ; diam. : 2,8 cm ; ép. : 0,7 cm. Fragment de liège, plat, circulaire (US 25995) (fig. 13c).

42. Chêne liège (Quercus suber L.) ; long. : 6,2 cm ; larg. : 1,3 cm. Fragment de liège, plat, grossièrement circulaire (US 25995) (fig. 13d).

Ces éléments circulaires et plats peuvent être interprétés comme des bouchons de cruche. L’un d’eux a même été retrouvé en place, sur un fragment de céramique. Ce type de vestige se conserve rarement, mais il devaient être fréquent. Par exemple, à Lyon, cet objet obture l’ouverture d’une cruche calcaire, dont on sait, grâce à une inscription peinte, qu’elle a contenu du vin importé de Falerne, en Campanie 32.

L’écorce ne présente pas la même structure cellulaire que le bois. La détermination n’a pu être faite avec certitude. Cependant, la principale source d’approvisionnement reste le liège issu de l’écorce du chêne-liège (Quercus suber L.).

Les éléments de jeu43. Buis (Buxus Sempervirens) ; diam. : 1,8 cm ; larg. : 0,8 cm. Élément hémisphérique (US 26293) (non figuré).

44. Buis (Buxus Sempervirens) ; diam. : 1,8 cm ; larg. : 0,8 cm. Élément hémisphérique (US 26293) (fig. 14).

Deux jetons en bois se trouvaient au fond du puits PT25055. Ils sont tous deux hémisphériques et s’approchent des pions en os du type Béal AXXXIV, 2 33. Ils sont vraisemblablement à mettre en lien avec la quantité importante d’éléments de jeu mis au jour dans le même contexte.

Les outils ?45. Buis (Buxus Sempervirens) ; long. : 9,2 cm ; diam. : 2,7 cm. Pièce cylindrique, creusée par une gorge principale et deux filets décoratifs, terminée par un tenon facetté et appointé (long. : 3,5 cm) (US 25995) (fig. 15a).

46. Buis (Buxus Sempervirens) ; long. : 8,6 cm ; diam. : 3,4 cm. Pièce cylindrique légèrement concave, creuse (diam. percement : 0,5 cm, 0,7 cm et 1,2 cm), décorée de cinq filets doubles et terminée par un fragment de tenon cylindrique (diam. ext. : 1,6 cm) (US 25995) (fig. 15b).

En l’absence de comparaison, nous pouvons supposer que ces deux éléments ont eu une fonction utilitaire. Le tenon du premier pourrait indiquer qu’il a servi à perforer des matériaux tendres. Le creusement axial de la seconde pièce pouvait maintenir une tige cylindrique.

47. Frêne (Fraxinus exclesior) ; long. : 57 cm ; diam. max. : 16,5 cm. Pièce constituée d’une base tronconique (diam. max. : 16,5 cm ; hauteur : 16,8 cm), surmontée d’un prolongement s’élargissant vers le sommet (de 6 à 8 cm). À 0,5 cm de la base tronconique, une mortaise de 3,5 cm de large environ vient partager en deux abouts la partie supérieure. L’arasement est convexe. Une mortaise cylindrique (diam. : 1,8 cm) traverse chaque about à 0,5 cm de l’arasement (US 26292) (fig. 15c).

Cet objet ne trouve aucune comparaison. Son aspect massif et sa base plane indiqueraient qu’il s’agit d’un poids ou d’un système destiné à damer le sol ou un quelconque matériau similaire. Néanmoins, ces deux caractéristiques tranchent singulièrement avec l’étroitesse des deux ouvertures circulaires du sommet (0,5 cm), indiquant que si une tige soutenait ici la masse de l’objet, elle était particulièrement frêle.

32. Silvino 2007, 207. 33. Béal 1983, 321.

0 5 cm

| Fig. 14. Le jeton (US 26293) (dessin F. L.).

le mobilier ligneux du puits pt25055 – 703

| Fig. 15. Les outils. a. US 25995 ; b. US 25995 ; c. US 26292 (dessins F. L. : a, b ; dessin F. L. et S. C. : c).

Fig. 37

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704 – un secteur d’habitat dans le quartier du sanctuaire à barzan

Les tablettes48. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 13,3 cm ; larg. : 2 cm ; ép. : 0,8 cm. Planchette brisée au niveau de deux rayons ; partie centrale surcreusée sur une profondeur de 0,1 à 0,2 cm (US 26290) (fig. 16a).

49. Sapin blanc (Abies alba) ; long. : 7,5 cm ; larg. : 5,2 cm ; ép. : 0,5 cm. Angle de tablette. Un graffito au dos (US 26289) (fig. 16b).

50. Sapin blanc (Abies alba) ; long. : 8 cm ; larg. : 2,5 cm ; ép. : 0,8 cm ; Planchette brisée au niveau de deux rayons et dans sa longueur ; partie centrale surcreusée sur une profondeur de 0,1 à 0,2 cm (US 26290) (non figuré).

51. Sapin blanc (Abies alba) ; long. : 5 cm ; larg. : 1,8 cm ; ép. : 0,8 cm ; Planchette brisée au niveau de deux rayons et dans sa longueur ; partie centrale surcreusée sur une profondeur de 0,1 à 0,2 cm (US 26290) (non figuré).

0 5 cmb

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| Fig. 16. Les tablettes. a. US 26290 ; b. US 26290 (dessins F. L.).

le mobilier ligneux du puits pt25055 – 705

Ces fragments de tablettes sont les seuls découverts à ce jour sur le site de Barzan. Ce type de planchette est bien connu ailleurs : les fouilles de la Cité judiciaire à Bordeaux en ont livré trois, celles d’Oberwinterthur (Suisse) une trentaine 34, celles d’Eschenz (Suisse) vingt-cinq 35, celles du port de Marseille plus de cinquante 36 et celles de Vindonissa près de six cents 37. Ce sont des objets en sapin, dont la partie centrale a été surcreusée pour recevoir une couche de cire sur laquelle on écrivait. Il est difficile de tirer des conclusions de la présence des fragments dans le comblement du puits. J. Pearce a en effet montré, à travers l’étude des tablettes bretonnes, l’emploi de l’écriture aussi bien en contexte urbain que rural ou militaire 38. Le fragment le plus grand de Barzan porte sur sa face externe le graffito “Casii”. Ailleurs, plusieurs types de marques ont été relevés à l’extérieur des tabulae ceratae. À Marseille 39, près de Budapest 40 et à Londres 41 ce sont des inscriptions pyrogravées qui témoignent d’un usage administratif. À Vitudurum, les tablettes ont servi de support à la rédaction de contrats, mais aussi, semble-t-il, de lettres privées. La face externe de certaines tablettes donne l’adresse de plusieurs destinataires 42. De même, à Bordeaux, le terme LINIIARIO (Lineario), gravé à la main, est lisible sur un feuillet dégagé sur la fouille de Saint-Christoly. Il semble désigner l’activité artisanale du destinataire 43. Le caractère manuscrit du graffito de Barzan, sur lequel on peut distinguer le terme “Casii”, peut faire penser à une utilisation personnelle ou comptable de l’objet, plutôt qu’à un usage administratif. De telles marques de propriété sont attestées sur de nombreux objets personnels 44. Un fragment osseux mis au jour à Barzan dans une couche de décapage, dans le cadre la fouille du bâtiment thermal du iie s. p.C., porte de la même façon le praenomen Gaius, interprété comme le prénom du propriétaire de l’objet 45.

Ce nom est attesté en Gaule, à Narbonne 46 et par de rares occurrences dans les provinces occidentales 47. Plusieurs hypothèses d’origine peuvent être proposées. Il peut s’agir d’un latin italien : on connaît un Caius Casius, consul en 171 a.C. 48 Il est également possible que ce soit une simplification de la géminée répondant à Cassius, très répandu dans les Gaules 49. Enfin, il peut aussi être considéré comme un nom celtique 50.

Les pièces à la fonction indéterminée

Dans le dépôt, tous les éléments n’ont pas pu être interprétés. C’est le cas des cinq pièces suivantes.

52. Chêne caducifolié (Quercus sp) ; long. : 9,5 cm ; larg. : 9,5 cm ; ép. : 8 cm. Pièce cubique, traversée dans son épaisseur par une mortaise cylindrique (diam. : 3,9 cm ; traces de gouge) ; une des faces, au-dessus de la mortaise précédente, est creusée d’une mortaise rectangulaire (larg. : 2,2 cm ; prof : 0,8 cm) (US 26292).

53. Hêtre (Fagus silvatica) ; long. : 11,3 cm ; larg. : 4,2 cm ; ép. : 3,6 cm. Pièce de section triangulaire (long. : 5,5 cm), terminée par un tenon cylindrique brisé (diam. : 2,2 cm) (US 26292) (fig. 17a).

54. Hêtre (Fagus silvatica) ; long. : 5,1 cm ; larg. : 5,2 cm ; ép. : 1,9 cm. Planche surcreusée en son centre, sur une largeur de 1,4 cm et une profondeur de 0,6 cm (US 25994) (fig. 17b).

55. Chêne caducifolié (Quercus sp) ; long. : 7,3 cm ; larg. : 7,3 cm ; ép. : 2,6 cm. Pièce monoxyle prenant la forme de deux tiges perpendiculaires de section rectangulaire (US 25994) (fig. 17c).

34. Hedinger & Leuzinger 2003, 58. 35. Hedinger & Leuzinger 2003, 58.36. France & Hesnard 1995, 80, n. 11. 37. Hedinger & Leuzinger 2003, 58. 38. Pearce 2004. 39. France & Hesnard 1995, 83. 40. France & Hesnard 1995, 89 ; CIL, III, 2, 958, 23. 41. France & Hesnard 1995, 90. 42. Hedinger & Leuzinger 2003, 60. 43. Raux 2008, 239. 44. Lassère 2005, 218-219. 45. Bouet 2003e, 401. 46. CIL, XII, 4460, 451847. Lörincz 1999, t. 2, 40. 48. AE 2000, 414. 49. Holder 1961, col. 832-833, s.v. “Cassius” ; Gorrochategui-Churruca 1984, 183 ; Lörincz 1999, t. 2, 41. 50. Holder 1961, col. 823, s. v. “Casius”.

706 – un secteur d’habitat dans le quartier du sanctuaire à barzan

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| Fig. 17. Les pièces à la fonction indéterminée. a. US 26292 ; b. US 25994 ; c. US 25994 ; d. US 26293 (dessin F. L.).

le mobilier ligneux du puits pt25055 – 707

56. Hêtre (Fagus silvatica) ; long. : 11,4 cm ; larg. : 9 cm ; ép. : 2,5 cm. Pièce ovale (diam. max. : 11,4 cm ; diam. min. : 9 cm) ; une mortaise cylindrique traverse l’épaisseur de la pièce (diam. : 4,3 cm) (US 26293) (fig. 17d).

57. Sapin blanc (Abies alba) ; long. : 5 cm ; ép. : 1,9 cm. Pièce circulaire ; sur deux chants sont visibles le négatif de deux clous plantés en biais (US 25995) (non figuré).

Les allumettes

Cinquante six fragments de bois peuvent être interprétés comme des “allumettes”, c’est-à-dire les vestiges de pièces enflammées et destinées à allumer un feu. Ce sont des tiges longues d’une dizaine de centimètres, présentant des traces d’outils de percussion lancée et d’arrachement. Au moins une de leurs extrémités est brûlée. Ces éléments sont en pin maritime (Pinus pinaster) ou en épicéa (Picea abies). On en connaît d’autres exemplaires ailleurs, notamment à Saintes, dans le puits des Ateliers municipaux, où ils sont également taillés dans du conifère (pin maritime) 51.

Les éléments architecturaux : planches, madriers et poutre

Cent douze planches, intactes ou fragmentaires, ont pu être étudiées. Dans la très grande majorité des cas, il manque une extrémité, voire les deux. Seulement six sont entières : l’une atteint 132 cm, les cinq autres n’excèdent pas 12 cm. Ce sont leurs dimensions réduites qui expliquent leur état de conservation. Toutes les autres étant brisées, il est impossible de restituer leur longueur. On peut néanmoins observer que sur 44 exemplaires, l’extrémité intacte est perpendiculaire aux faces, neuf sont biseautées et huit sont taillées en biais.

Le fait que ces objets soient brisés dans leur longueur permet cependant d’observer les valeurs liées à leur largeur et leur épaisseur. Il apparaît que ces deux critères varient de façon assez importante (fig. 18).

Plus les valeurs sont largement distribuées, plus l’écart-type est élevé. Dans ce cas, les valeurs de l’écart-type relatif sont assez importantes ce qui témoigne de l’hétérogénéité du lot. Aucun module ne se dégage. Les dimensions de la section d’un objet définissent sa force de résistance mécanique. Ici on ne peut que supposer des utilisations variées de ces planches.

Deux groupes de planches se distinguent cependant de l’ensemble. Alors que la très grande majorité de ce type d’objets est en chêne caducifolié (Quercus sp.), les US 25995 et 26292 comptent respectivement cinq et sept fragments en sapin blanc (Abies Alba). Leurs dimensions sont également exceptionnelles. Bien que la plupart soient brisées, deux atteignent 132 et 142 cm ; les plus réduites approchent 30 et 60 cm. Leur épaisseur, comprise entre 2 et 2,5 cm, est très homogène (l’écart-type relatif n’est que de 0,2). On ne peut exclure qu’il s’agit d’un module volontairement choisi lors de la fabrication de ces objets. Certaines d’entre elles présentent des traces de clous, mais il est impossible de restituer leur fonction originelle.

À ces éléments s’ajoutent neuf fragments de madriers, tous en chêne caducifolié (Quercus sp.) :

58. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 23,8 cm ; larg. : 6,3 cm ; ép. : 4,2 cm. Fragment de madrier ; une extrémité perpendiculaire au fil du bois, l’autre brisée ; deux clous traversent la pièce dans le sens de la largeur, respectivement à 3,2 et 14,5 cm de l’extrémité intacte (US 26292) (non figuré).

59. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 25,5 cm ; larg. : 5,2 cm ; ép. : 3,7 cm. Fragment de madrier ; extrémités brisées ; deux clous traversent la pièce dans le sens de la largeur, séparés par une distance de 13,5 cm (US 26292) (non figuré).

51. Saedlou 2002, t. 2, 40.

Dimension minimale Dimension maximale Moyenne Écart-type relatifLargeur 1,7 cm 17 cm 5,3 cm 0,6

Épaisseur 0,5 cm 3,7 cm 1,8 cm 0,4

| Fig. 18. Largeur et épaisseur des planches.

708 – un secteur d’habitat dans le quartier du sanctuaire à barzan

60. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 55 cm ; larg. : 6,3 cm ; ép. : 4,8 cm. Fragment de madrier ; une extrémité perpendiculaire au fil du bois, l’autre brisée ; six clous traversent la pièce dans le sens de la largeur, respectivement à 4,8, 17, 23, 34,5 et 44 cm de l’extrémité intacte (US 26292) (non figuré).

61. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 16,3 cm ; larg. : 4 cm ; ép. : 4 cm. Fragment de madrier brisé dans le sens de la longueur ; extrémités brisées ; deux clous traversent l’épaisseur de la pièce, séparés par une distance de 5,5 cm (US 26292) (non figuré).

62. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 11,7 cm ; larg. : 4,3 cm ; ép. : 3,7 cm. Fragment de madrier ; une face et un chant plans et perpendiculaires ; une extrémité perpendiculaire au fil du bois, l’autre brisée (US 26292) (non figuré).

63. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 19,5 cm ; larg. : 6,5 cm ; ép. : 4,8 cm. Fragment de madrier ; une extrémité brisée (US 26292) (non figuré).

64. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 23 cm ; larg. : 4,9 cm ; ép. : 3,5 cm. Fragment de madrier ; deux faces planes (US 26292) (non figuré).

65. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 30 cm ; larg. : 6,5 cm ; ép. : 6,5 cm. Fragment de madrier ; une extrémité perpendiculaire au fil du bois, l’autre brisée ; deux clous plantés dans l’épaisseur de la pièce, à 16,7 et 21,8 cm de l’extrémité intacte (US 26292) (non figuré).

66. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 58,7 cm ; larg. : 6,5 cm ; ép. : 6,5 cm. Fragment de madrier ; une extrémité perpendiculaire au fil du bois, l’autre brisée ; cinq clous plantés dans l’épaisseur de la pièce, respectivement à 15, 17,2, 28,3, 41 et 51,5 cm de l’extrémité intacte (US 26292) (non figuré).

Enfin, dans l’US 26292 se trouvait une poutre :

67. Chêne caducifolié (Quercus sp.) ; long. : 140 cm ; larg. : 34 cm ; ép. : 31 cm. Fragment de poutre de section rectangulaire ; extrémités brisées (non figuré).

Aucun de ces éléments ne présente d’abouts et les clous sont pour la plupart absents (leur présence est établie par de simples traces). Cela pourrait être l’indication d’un démontage ou d’une dépose et non d’une rupture accidentelle.

Les éclats et déchets de travail

Les éclats n’ont pas de morphologie particulière. Ils résultent du travail du bois avec un fer plat à percussion lancée type hache. Il est intéressant de noter que pour l’US 26293, il est possible de remonter certains fragments (de la même façon que des éclats de silex autour d’un nucléus), notamment pour les taxons moins présents que le chêne, tels le sapin blanc (Abies alba) ou le hêtre (Fagus silvatica). Ces déchets semblent ainsi faire partie d’un ensemble cohérent, rejetés ensemble dans le puits. Fait également remarquable, les éclats et déchets de travail en sapin blanc (Abies alba) sont très présents dans l’US 25995 de comblement : ils représentent près de la moitié des éclats contre à peine un dixième pour l’US 26292 et un quart pour l’US 26293.

Une observation du mode de débitage des éclats de chêne caducifolié (Quercus sp.) a été réalisée. Comme le fait remarquer N. Saedlou 52, ces éléments ne doivent pas être négligés car ils restituent indirectement les gestes de l’artisan.

Les éléments étudiés ont été débités de la façon suivante (fig. 19).

On constate donc que le débitage privilégié est radial, suivi de près par le débitage tangentiel. Les gestes de travail sont réalisés en usant de la morphologie cellulaire du chêne, en se servant des zones de clivages naturelles, le long des rayons et des vaisseaux.

52. Saedlou 2000, 241.

US 25995 US 26292 US 26293Débitage radial 63 53 58

Débitage tangentiel 23 35 37Indéterminé 14 12 5

| Fig. 19. Mode de débitage du chêne caducifolié par US (en %).

le mobilier ligneux du puits pt25055 – 709

la biodiversité, l’exPloitation de la ressource bois et gestion forestière

Les vestiges ont été étudiés en prenant en compte, comme nous venons de le voir, l’aspect xylologique et technologique, à savoir le bois comme matériau. L’approche dendrologique, quant à elle, privilégie l’arbre, c’est-à-dire le bois comme être vivant 53. Elle permet de donner une image des écosystèmes forestiers, d’aborder leur gestion et leur exploitation, mais aussi de mettre en exergue la sélection des essences, qu’elles soient endogènes ou exogènes (importation de certaines essences).

Les branchages : hypothèses de provenances et d’utilisations

La répartition des taxons repérés dans les branchages se présente comme suit (fig. 20 à 23).

Au sein des différentes US, le chêne caducifolié (Quercus sp.) représente environ un tiers des fragments de branchages. Cinq à huit taxons sont plus rares et constituent seulement entre un dixième et un quart des dépôts. Les taxons des US liées à l’utilisation du puits se distinguent nettement de ceux enregistrés dans l’US 25995, contemporaine du comblement.

La diversité et le nombre absolu des taxons sont beaucoup plus importants dans les US du fond. Le noisetier (Corylus avellana), si abondant dans les US 26292 et 26293, disparaît quasiment au profit du hêtre (Fagus silvatica) dans l’US 25995. Cette répartition pourrait confirmer le caractère cumulé des US du fond, réceptacles d’une plus grande diversité de branchages. La composition de l’US 25995 est quant à elle beaucoup plus homogène.

53. Mille 2000, 215-216.

USTaxon 25995 26292 26293

Corylus avellana 0,8 43,6 47Cornus saguinea 0,8 0 0Fagus silvatica 53 9,6 2,7

Quercus sp. 34,1 29,3 35,3Clematis vitalba 0 2,8 1,1Prunus avium 0 0 6,4

Prunoïdés 0,9 0,5 1,1Pirus malus et assimilés 0 2,3 1,6

Pomoïdés 3,4 3,2 0Salix sp. 0 0,9 0Tilia sp. 0 5,5 3,2

Ulmus campestris 0 1,4 0Indéterminés 7 0,9 1,6

| Fig. 20. Branchages : répartition des taxons dans les US 25995, 26292 et 26293 (en %).

| Fig. 21. Répartition des taxons de branchages dans l’US 25995.

Fagus silvatica

Cornus saguinea

Corylus avellanaIndéterminés

Prunoïdés

Pomoïdés

Quercus sp.

710 – un secteur d’habitat dans le quartier du sanctuaire à barzan

| Fig. 22. Répartition des taxons de branchages dans l’US 26292.

| Fig. 23. Répartition des taxons de branchages dans l’US 26293.

Fagus silvatica

Corylus avellana

IndéterminésUlmus campestris

Tilia sp.

Clematis vitalba

Prunoïdés

Salix sp.

Pirus malus et assimilésPomoïdés

Quercus sp.

Fagus silvatica

Quercus sp.

Pirus malus et assimilés

PrunoïdésPrunus avium

Clematis vitalba

Tilia sp. Indéterminés

Corylus avellana

Par la suite, 50 fragments de branchages ont été prélevés par US, en veillant à garder les proportions de taxons identifiés lors de l’analyse microscopique. Sur ces 50 fragments, les cernes ont été comptés, la saison de coupe (activité ou repos) identifiée et le diamètre mesuré en deux points opposés. Les résultats sont présentés ci-dessous (fig. 24 à 26).

Le comptage du nombre de cernes apporte une information quant à l’âge de coupe de la branche, à mettre en relation avec son diamètre 54. Quel que soit le taxon, ce sont de très jeunes branches de faible diamètre qui sont rejetées dans le fond du puits (US 26293 et 26292), de l’ordre de 15 à 18 mm, pour un âge de 5 à 11 ans maximum. Le diamètre et l’âge sont légèrement supérieurs et plus homogènes pour l’US 25995 de comblement (21-22 mm pour 9-10 ans) (fig. 27).

Pour les US liées à l’occupation, il semble qu’environ 30 mm de diamètre soit la taille en deçà de laquelle les fragments de branchages sont rejetés. Cette taille est relevée de 20 mm, passant à 50 mm pour l’US 25995 du comblement. De plus, certains fragments de branchages présentent dans cette US des traces plus ou moins importantes de combustion partielle, totalement absentes sur les fragments trouvés au fond dans les US liées à l’occupation. L’absence d’étude anthracologique ne permet pas de pousser plus avant le raisonnement quant à un éventuel recyclage en combustible des déchets liés au travail du bois.

L’étude du dernier cerne a également permis d’estimer la saison de coupe des branchages pendant la saison végétative de l’arbre (printemps-été) ou lors de la phase de repos (automne-hiver) (fig. 28).

Lors de la phase d’activité du puits (US 26293 et 26292), les bois rejetés les plus représentés (noisetier, chêne et hêtre) ont été coupés à la fois lors de la période de repos et lors de la saison végétative, avec une légère prédominance pour la saison végétative. Les branchages travaillés dans les environs du puits proviennent donc d’une exploitation régulière du milieu proche de l’antique Barzan.

54. Dietrich & Lecomte-Schmitt, à paraître.

le mobilier ligneux du puits pt25055 – 711

| Fig. 24. Étude des échantillons de branchages de l’US 25995.

Échantillon TaxonDiamètre (mm)

Nombre de cernesSaison de coupe

Diam 1 Diam 2 Repos Activité1 Quercus sp. 52 35 2 Quercus sp. 17 18 7 13 Quercus sp. 17 21 7 1 4 Quercus sp. 15 16 4 15 Quercus sp. 16 17 11 16 Quercus sp. 13 14 11 1 7 Quercus sp. 15 17 9 18 Quercus sp. 11 11 11 19 Quercus sp. 44 10 Quercus sp. 22 9 111 Quercus sp. 20 21 11 12 Quercus sp. 15 15 5 1 13 Quercus sp. 18 15 1 14 Quercus sp. 36 15 Quercus sp. 20 23 16 Quercus sp. 11 12 5 1 17 Quercus sp. 45 18 Quercus sp. 38 19 Fagus silvatica 19 19 20 Fagus silvatica 20 21 6 1 21 Fagus silvatica 16 17 14 1 22 Fagus silvatica 15 17 10 23 Fagus silvatica 22 24 11 1 24 Fagus silvatica 13 14 5 1 25 Fagus silvatica 18 19 8 1 26 Fagus silvatica 21 24 12 1 27 Fagus silvatica 22 22 12 1 28 Fagus silvatica 16 17 8 129 Fagus silvatica 16 20 8 30 Fagus silvatica 17 18 9 1 31 Fagus silvatica 21 26 9 1 32 Fagus silvatica 18 22 9 1 33 Fagus silvatica 14 15 9 1 34 Fagus silvatica 30 32 18 35 Fagus silvatica 23 24 6 136 Fagus silvatica 29 30 10 37 Fagus silvatica 23 13 38 Fagus silvatica 44 39 Fagus silvatica 21 22 40 Fagus silvatica 34 37 41 Fagus silvatica 24 42 Fagus silvatica 27 31 43 Fagus silvatica 38 44 Fagus silvatica 43 45 Fagus silvatica 12 13 6 1 46 Fagus silvatica 14 15 6 1 47 Pomoïdés 17 23 7 1 48 Pomoïdés 15 4 1 49 Pomoïdés 26 33 10 1 50 Corylus avellana 15 15

712 – un secteur d’habitat dans le quartier du sanctuaire à barzan

Échantillon TaxonDiamètre (mm)

Nombre de cernesSaison de coupe

Diam 1 Diam 2 Repos Activité1 Quercus sp. 20 21 7 1 2 Quercus sp. 10 12 3 1 3 Quercus sp. 21 22 6 14 Quercus sp. 16 21 9 15 Quercus sp. 12 14 3 1 6 Quercus sp. 18 27 8 17 Quercus sp. 9 10 2 1 8 Quercus sp. 14 17 22 1 9 Quercus sp. 20 21 7 110 Quercus sp. 14 21 8 1 11 Quercus sp. 18 18 7 1

| Fig. 25. Étude des échantillons de branchages de l’US 26292.

Échantillon TaxonDiamètre (mm)

Nombre de cernesSaison de coupe

Diam 1 Diam 2 Repos Activité1 Fagus silvatica 17 18 9 1 2 Fagus silvatica 11 11 11 1 3 Fagus silvatica 22 23 13 1 4 Fagus silvatica 21 22 14 1 5 Fagus silvatica 14 16 6 1 6 Quercus sp. 18 18 6 17 Quercus sp. 16 17 5 18 Quercus sp. 17 17 4 19 Quercus sp. 19 20 6 110 Quercus sp. 13 15 6 1 11 Quercus sp. 19 22 3 1 12 Quercus sp. 17 19 5 113 Quercus sp. 14 15 3 114 Quercus sp. 13 14 4 1 15 Quercus sp. 23 24 21 1 16 Quercus sp. 21 21 10 1 17 Quercus sp. 14 14 5 1 18 Quercus sp. 21 21 5 1 19 Quercus sp. 11 13 4 120 Quercus sp. 14 14 5 1 21 Clematis vitalba 12 14 3 122 Clematis vitalba 17 19 12 123 Corylus avellana 20 22 9 124 Corylus avellana 12 16 2 125 Corylus avellana 10 17 7 1 26 Corylus avellana 16 17 5 1 27 Corylus avellana 13 17 7 1 28 Corylus avellana 21 21 9 1 29 Corylus avellana 17 19 4 130 Corylus avellana 17 17 5 131 Corylus avellana 12 14 3 1 32 Corylus avellana 14 14 7 1 33 Corylus avellana 14 15 5 134 Corylus avellana 15 16 6 135 Corylus avellana 11 12 4 136 Corylus avellana 11 12 5 137 Corylus avellana 12 14 4 1 38 Corylus avellana 16 16 5 139 Corylus avellana 21 21 5 1 40 Corylus avellana 21 21 5 1 41 Corylus avellana 15 19 5 142 Corylus avellana 17 17 5 1 43 Pirus malus et assimilés 13 20 6 1 44 Pirus malus et assimilés 18 20 7 1 45 Pomoïdés 14 20 6 1 46 Ulmus campestris 14 15 6 147 Tilia sp. 14 17 5 1 48 Tilia sp. 23 28 7 1 49 Tilia sp. 23 27 20 1 50 Prunoïdés 16 18 6 1

le mobilier ligneux du puits pt25055 – 713

US 26293 US 26292 US 25995

Taxon repos activité repos activité repos activité indéterminableCorylus avellana 12 34 20 20 2 Clematis vitalba 2 4 Fagus silvatica 4 10 26 4 26

Prunoïdés 6 2 2 Pomoïdés 2 6 6

Quercus sp. 12 22 16 14 10 12 14Tilia sp. 4 6

Ulmus campestris 2 Sous- total 38 62 60 40 44 16 40

Total 100 100 100

| Fig. 27. Maximum, minimum et moyennes des diamètres (mm) et âges (année) des branches étudiées.

| Fig. 28. Branches coupées selon la saison, le taxon et l’US (en %).

US 26293 US 26292 US 25995 Diamètre Âge Diamètre Âge Diamètre Âge

Taxon max min moyen max min moyen max min moyen max min moyen max min moyen max min moyenCorylus avellana 29 9 15 7 2 5 22 10 16 9 2 5 Fagus silvatica 23 11 17 14 6 11 44 12 22 18 5 9

Quercus sp. 27 9 18 22 2 7 24 11 17 21 3 6 52 10 21 35 4 10

| Fig. 26. Étude des échantillons de branchages de l’US 26293.

12 Quercus sp. 21 26 6 113 Quercus sp. 19 24 8 114 Quercus sp. 24 5 115 Quercus sp. 20 20 8 116 Quercus sp. 19 20 7 117 Quercus sp. 14 18 5 118 Corylus avellana 12 13 3 1 19 Corylus avellana 13 16 7 120 Corylus avellana 12 12 2 121 Corylus avellana 10 12 2 1 22 Corylus avellana 12 12 3 1 23 Corylus avellana 11 12 3 124 Corylus avellana 11 13 7 125 Corylus avellana 13 14 7 126 Corylus avellana 21 21 7 1 27 Corylus avellana 9 21 7 1 28 Corylus avellana 13 5 129 Corylus avellana 10 14 4 130 Corylus avellana 20 21 4 131 Corylus avellana 15 21 6 132 Corylus avellana 16 21 4 133 Corylus avellana 15 19 4 134 Corylus avellana 29 6 135 Corylus avellana 17 20 4 136 Corylus avellana 20 20 5 1 37 Corylus avellana 15 19 4 138 Corylus avellana 11 14 6 139 Corylus avellana 13 15 6 140 Corylus avellana 18 20 4 141 Prunus avium 15 16 7 1 42 Prunus avium 13 16 7 1 43 Prunus avium 13 18 8 1 44 Prunus avium 10 10 4 145 Fagus silvatica 19 24 3 146 Fagus silvatica 19 29 6 147 Clematis vitalba 16 18 2 1 48 Pirus malus et assimilés 13 16 6 1 49 Tilia sp. 29 29 8 1 50 Tilia sp. 33 42 10 1

714 – un secteur d’habitat dans le quartier du sanctuaire à barzan

Quant au travail des branchages en lui-même, il est probable qu’il se fait également de manière relativement constante autour du puits, en flux tendu avec l’exploitation des branchages. En effet, à moins d’un stockage en vue d’une utilisation pour le feu, les branchages se conservent mal après leur récolte et il perdent une partie de leur propriétés premières comme leur souplesse. En revanche, à une exception près, les fruitiers (prunoïdés et pomoïdés) et la clématite (Clematis vitalba) ont été coupés lors de la saison de repos.

Pour les rejets contemporains de la phase de comblement (US 25995), la mauvaise conservation des bois permet de dégager seulement une tendance, avec une exploitation du bois plutôt lors de la saison de repos, sans pouvoir aller plus avant dans l’interprétation. Dans 40 % des cas enregistrés dans l’US 25995, la saison de coupe n’a pas pu être déterminée, du fait, d’une part la carbonisation partielle de certains fragments, d’autre part de la mauvaise conservation générale des bois (aspect pulvérulent en surface et donc perte du dernier cerne).

Enfin, la mesure des diamètres en deux points opposés aurait pu mettre en évidence une déformation des branchages due au poids des sédiments déversés rapidement dans le puits. L’hypothèse de départ étant que les branchages des deux US du fond, après un séjour plus long que les bois du comblement dans l’eau et par là même fragilisés, aient pu être plus facilement déformés par un apport massif de sédiments lors de la phase de comblement ; ceci aurait pu confirmer la rapidité du phénomène. Cependant, si quelques fragments présentent effectivement des traces d’écrasement importantes, cela reste ponctuel et résulte probablement d’un choc avec un matériau dur (pierre, terre cuite architecturale...). La comparaison de la moyenne des diamètres entre l’un et l’autre côté donne une différence moyenne de 2 à 3 mm, ce qui n’est pas suffisant pour prouver quoi que ce soit.

En considérant les différents paramètres étudiés ici pour les branchages (taxons, diamètre, âge...), il est possible de dégager deux groupes dans ces rejets de bois.

Le premier est composé des rebuts de différentes activités domestiques : dans les US 26292 et 26293, les jeunes et fines branches de chêne caducifolié et de hêtre, et plus particulièrement de noisetier, ont pu servir à la fabrication de clayonnages 55. Les rejets présents dans le puits peuvent être des fragments non utilisés voire, pour les plus petits d’entre eux, avec parfois traces de coupe (biseau), des ajustements des panneaux de clayonnage (les parties qui dépassent sont étêtées). Ces mêmes branchages ont également pu être utilisés comme fourrage pour les animaux, notamment lors de période de sècheresse estivale. La clématite, commune au sein des haies, par ses qualités intrinsèques (légèreté et souplesse), se prête à toute activité de ligature et vannerie 56, voire comme fourrage d’hiver pour les animaux 57.

Pour la phase de comblement, la part dominante de hêtre en partie carbonisé et aux caractéristiques homogènes (faible diamètre, taille moyenne) peut être interprété comme un fond de foyer rejeté dans le puits.

L’entretien des cultures peut aussi être source de rejets ligneux : dans toutes les US, l’élagage et la taille des arbres fruitiers (pomoïdés et prunoïdés) produit de petits fragments de branchages (avec encore parfois la trace d’une coupe nette en biseau). La saison de coupe, lors de la phase de repos, va également dans le sens d’un entretien des arbres fruitiers. Leur bois, qui se rétracte et fendille peu, est apprécié pour sa densité, son homogénéité et son grain fin, présentant un beau poli. Cependant les fragments sont trop petits pour être le rebut d’une activité de façonnage.

L’interprétation des fragments de branchages reste difficile car elle est rapidement limitée : les éléments sont souvent fragmentaires et de petite taille. Une observation attentive des indices et des essences permet de proposer, sinon un éclairage sur les activités environnantes du puits, du moins quelques pistes de réflexions quant aux usages et la provenance possibles de ces branchages.

55. Mille 2000, 219.56. Dietrich & Gentili 2000, 171.57. Lieutaghi 2004, 489.

le mobilier ligneux du puits pt25055 – 715

Déchets, éclats et dendrologie

Avant de développer plus avant les études sur les fragments de chêne, il convient de brosser un rapide tableau des chênaies présentes à l’échelle régionale autour de Barzan.

Le sous-sol de Barzan est à dominante calcaire, avec des apports sédimentaires alluviaux (ruisseau du Rambaud et plus généralement, la zone de cuvette au nord de l’actuel lieu-dit Les Monards) 58. Le climat est de type océanique aquitain (pluviométrie assez importante en automne-hiver). Cette partie de la côte charentaise est suffisamment ensoleillée au cours de l’année pour être comparable aux régions méditerranéennes 59. Du point de vue botanique actuel, comme le fait remarquer Ph. Poirier, “ce territoire appartient au secteur phytogéographique aquitanien du domaine atlantique, caractérisé par des chênaies [caducifoliées] mixtes de chênes pédonculés, sessiles et pubescents. La présence de la série du chêne tauzin est à signaler” 60 En association réduite avec le chêne pubescent, le chêne vert, au feuillage persistant, devient calcicole-thermique et pénètre le Sud-Ouest et la côte atlantique jusqu’à la Loire, en raison du climat doux et ensoleillé 61. La diversité des associations écologiques possibles entre les différentes essences et leur cortège offre un large panel de rythmes de croissance, tant en fonction des caractéristiques intrinsèques de chaque essence, que des conditions environnementales 62.

En remarque préliminaire, il faut rappeler qu’en raison de caractères anatomiques très proches, l’identification botanique sur le chêne ne permet pas de discriminer les taxons au-delà de la différence entre chênes caducifolié et sempervirent. Tous les fragments pris en compte ici sont issus de chênes caducifoliés.

La proportion de chêne est très importante au sein du corpus dans la catégorie des bois architecturaux, mais la taille des pièces très souvent restreinte n’a pas permis de recueillir des échantillons pour analyses dendrochronologiques. Outre une possible datation, ces analyses apportent généralement des informations sur les types de chêne rencontrés et sur le rythme de croissance de ces derniers. Nous ne disposons ici, mis à part quelques pièces travaillées, que de déchets de taille et d’éclats, détachés de pièces de bois plus grosses.

Au sein de chaque US, 50 fragments de chêne, répartis entre déchets (quelques uns) et éclats (majoritaires) ont été prélevés. Deux séries d’observations ont été réalisées.

Dans un premier temps, afin d’avoir une image du rythme de croissance, le nombre de cernes a été évalué sur un centimètre, selon trois fourchettes, moins de cinq cernes, entre cinq et dix cernes et plus de dix cernes (fig. 29).

Les déchets et éclats de chêne à croissance rapide (entre un et cinq cernes au centimètre) sont majoritaires au sein des trois US étudiées : ils occupent près de la moitié voire plus des fragments étudiés. Ceux de chêne à croissance lente (plus de dix cernes par centimètre) représentent entre un cinquième et un quart des échantillons. L’étude palynologique évoque un paysage assez ouvert en évolution, où persiste une chênaie-hêtraie au sein de zones dédiées à l’agriculture 63. Dans l’hypothèse d’une exploitation des ressources locales en bois, les proportions des rythmes de croissance vont dans le même sens : une majorité de chênes exploités poussant en milieu relativement ouvert, où la compétition entre individus est

58. Carte géologique et hydrographique de Barzan ; www.geoportail.fr. 59. Poirier 2003, 524.60. Poirier 2003, 524.61. Jacamon 2001, 144 et 156 ; Lieutaghi 2004, 415 ; Poirier 2003, 524.62. Jacamon 2001, 136-137, 140-141, 144-145, 154-155.63. Voir chapitre 20, p. 948-952.

| Fig. 29. Indice de croissance des éclats de chêne caducifolié par US.

25995 26292 26293Nombre de cernes/cm Nombre d’individus % Nombre d’individus % Nombre d’individus %

<5 24 48 27 54 24 485< <10 13 26 13 26 16 32

10< 13 26 10 20 10 20Total 50 100 50 100 50 100

716 – un secteur d’habitat dans le quartier du sanctuaire à barzan

plus faible, la croissance s’en trouvant facilité. La présence de chêne à croissance plus lente indique également l’exploitation d’un milieu plus densément occupé, de type forestier.

Dans un second temps, selon des critères anatomiques (vaisseaux, rayons...), on a essayé de dégager des “types” de chêne. Les tableaux ci-après présentent les résultats (fig. 30-31). L’observation de certains critères anatomiques des fragments de chêne nous a permis de dégager six grands types, regroupés selon deux rythmes de croissance.

Ils peuvent être assimilés, d’une part à des chênes caducifoliés différents, au regard de la diversité des chênaies présentes dans la région, d’autre part à autant de pièces de bois brutes ou partiellement façonnées, amenées à proximité du puits et retravaillées dans le cadre d’activités artisanales locales. Les déchets issus de ces façonnages sont dans un second temps rejetés ensemble dans le puits.

| Fig. 31. Types de chênes.

| Fig. 30. Types de chêne par US.

Type de chêneUS 25995 US 26292 US 26293

Nombre d’individus % Nombre d’individus % Nombre d’individus %Type I 22 44 15 30Type II 11 22 9 18Type III 8 16 7 14Type IV 6 12 13 26Type V 19 38 Type VI 6 12

Indéterminés 25 50 3 6 6 12Total 50 100 50 100 50 100

TYPES DE CHÊNE Bois Initial (de printemps) Bois Final (d'été)

Rayons

US Types

Cro

issa

nce

Nombre de cernes/cm

Vaisseaux

Nombre de rangs Diamètre Remarques Thyllose Dendrites Densité Épaisseur HauteurLongueur/médullaires

Cro

issa

nce

len

te

supérieur ou égal à

1 à 2Environ 0,1 mm

légèrement oblongue,

dans le sens radial

peu abondante

absentes

4 rayons/cm,jusqu’à 1mm

20-30 mm médullaires

26292

TYPE I

7/8 cernes/cm Surtout 2moyennement

nombreux26293

5-7 cernes/cm 1rangEnviron 0,1 mm

abondante absentes3-6 rayons/cm inférieur à

0,5 mm10-20 mm médullaires

26292TYPE II

Nombreux 26293

5-7 cernes/cm

2 rangsEnviron 0,1 mm

peu

abondanteabsentes

3 rayons/cminférieur à0,5 mm

jusqu’à40 mm

médullaires

25995 TYPE V2e rang plus petit moyennement nombreux

ondoyants

que le 1er

Cro

issa

nce

rap

ide

1-3 cernes/cm 3 à 4 rangsEnviron 0,25 mm

peu

abondanteprésentes

4-5 rayons/cm inférieur à0,5 mm

environ10 mm

fins 26292

TYPE III

Nombreux courts 26293

quelques

médullaires

3-5 cernes/cm 2-3 rangsEnviron 0,15-0,2

mm

légèrement oblongue,

dans le sens radial

abondanteparfois

présentes

3 rayons/cm 0,5 mm 10-20 mm médullaires 26292

TYPE IVmoyennement

nombreuxinférieur à0,5 mm

inférieur à10 mm

courts et fins26293

1-3 cernes/cm Jusqu’à 4 rangsEnviron 0,25 mm

peu

abondante

présentesbois final

jusqu’à 8 mm4-5 rayons/cm

inférieur à0,5 mm

inférieur à10 mm

courts

25995TYPE

VIquelques médullaires

le mobilier ligneux du puits pt25055 – 717

Les différences de qualité notables entre les types de chêne amènent à formuler deux hypothèses.

– Il pourrait s’agir d’une sélection des bois liée à leur résistance : les chênes à croissance rapide ont une structure anatomique plus dense et sont par là même plus résistants au contraintes mécaniques et d’usure. En contrepartie, ce type de bois est aussi beaucoup plus difficile à travailler car très hétérogène et nécessite un outillage bien affûté et régulièrement entretenu. Les chênes à croissance moyenne à lente produisent un bois qui garde les propriétés de bonne résistance mécanique du chêne, mais ils sont plus faciles à façonner du fait d’une structure anatomique moins dense et beaucoup plus homogène (les vaisseaux, creux, sont plus rapprochés). Ils sont privilégiés pour la fabrication de petits objets. En fonction de la destination de la pièce à fabriquer, l’artisan effectue donc un choix à double niveau de la matière première : le chêne est choisi pour ses qualités intrinsèques que l’on peut encore améliorer en choisissant un arbre en particulier pour ces propres caractéristiques (croissance, forme...).

– Cette sélection pourrait plutôt refléter la disponibilité du matériau : le chêne, si l’arbre est encore sur pied, est alors sélectionné pour sa proximité ou son accessibilité au sein des formations forestières ou non-forestières ; si le bois est déjà débité, il est choisi pour sa disponibilité.

Quelle que soit la destination des pièces façonnées, l’étude des rebuts de fabrication permet de souligner l’emploi de chênes caducifoliés très divers, que ce soit en fonction de leur essence ou de leur disponibilité.

Écologie et gestion de la ressource bois.

En recoupant les 21 taxons identifiés dans le comblement du puits et les analyses palynologiques, ainsi que les taxons dont le bois est travaillé ou non, il est possible de dégager trois groupes : le premier rassemble les essences de provenance locale et résultant de l’exploitation de ressources proches de l’agglomération antique de Barzan, le deuxième regroupe les essences cultivées et le dernier celles venant de probables importations, de réseaux d’échanges et d’approvisionnement en bois.

Sur le sol à dominante calcaire de l’agglomération, il est possible de trouver une bonne partie des taxons identifiés ici. À la chênaie-hêtraie déjà évoquée, on peut y associer quatre essences à amplitude écologique assez forte (bonne adaptation au substrat calcaire et implantation en lisière de la formation forestière), le tilleul (Tilia sp.), l’orme (Ulmus campestris) et le frêne (Fraxinus exclesior), ainsi que le noisetier (Corylus avellana) abondant en bordure de la chênaie-hêtraie. S’y ajoutent, là encore en bordure, le fusain (Evonymus europaeus) et le cornouiller sanguin (Cornus sanguinea) calcicoles affirmés. Les haies sont suggérées là encore par l’orme et le noisetier, auxquels on peut ajouter la clématite (Clematis vitalba). La ripisilve apparaît au travers du saule (Salix sp.) et du frêne (Fraxinus exclesior).

Les sous-familles des prunoïdés et pomoïdés peuvent être interprétées comme des essences cultivées. On peut éventuellement y adjoindre la clématite (Clematis vitalba) comme plante décorative.

Cette image du paysage est proposée en tenant compte de l’écologie de chaque essence (zone naturelle de croissance, associations à d’autres essences…). L’analyse palynologique donne une image d’un paysage ouvert, assez fortement anthropisé, avec la présence de cultures proches. Les essences précédemment décrites ont également une grande faculté d’adaptation et deviennent ubiquistes à proximité des zones d’habitations et de cultures.

Il est également possible de faire la distinction entre les bois uniquement utilisés pour le façonnage d’objet ou comme bois d’œuvre, les taxons seulement présents sous forme de fragments de branchages ou encore les essences “transversales”, présentes dans les deux cas 64.

Ainsi, le sapin blanc (Abies alba) est présent seulement comme bois d’œuvre ou pour la fabrication de petits objets. En effet, exigeant une humidité atmosphérique constamment élevée, il est typique des stations montagnardes. Ses aires de répartitions naturelles les plus proches de Barzan sont dans les Pyrénées et, de manière disséminée, dans le Massif Central 65. Présents dans les comblements de puits antiques à Saintes sous forme de tablette à écrire ou d’éléments de tonnellerie, son

64. Voir infra fig. 2. 65. Jacamon 2001, 6 et Dupéron & Saedlou 2001, 428.

718 – un secteur d’habitat dans le quartier du sanctuaire à barzan

importation sous forme de matière première, partiellement ébauchée ou encore comme objet fini est acquise 66. Les pièces en sapin présentes dans le comblement du puits PT25055 sont sans aucun doute issues d’éléments importés soit comme objets totalement manufacturés (fragments de tablettes, fuseaux…), soit sous la forme de billes ou de produits semi-finis (planches à l’épaisseur constante) retravaillés sur place, comme le laissent penser les nombreux éclats et déchets de cette essence de l’US 25995. Cette présence peu courante de sapin blanc loin de ses aires naturelles de croissance peut en partie s’expliquer par le fait que Barzan est une ville portuaire. En effet, c’est un bois qui est utilisé dans la construction et l’aménagement des bateaux gallo-romains 67.

L’aire de répartition du buis recoupe quasiment celle du sapin au sein de chênaies-buxaies (association au chêne pubescent dans ses aires montagnardes) 68. Du fait de sa morphologie générale (arbrisseau de 1 à 4 mètres ne permettant pas le débitage de grande pièce) et de ses qualités intrinsèques (bois dense à grain fin prenant un beau poli), son usage est réservé au façonnage de petits objets tels les peignes, pyxide, etc. Son exportation sous forme de matière première ou grossièrement mis en forme semble à proscrire, du fait de la déformation et de la fente lors de la dessiccation du bois 69. Il se travaille nécessairement vert. Façonnées en buis, ce sont donc des objets finis qui sont exportés dans tout le monde romain (notamment les peignes 70).

conclusion

Le comblement du puits PT25055 a livré de nombreux vestiges ligneux, des branchages aux petits objets en passant par les bois architecturaux. Cette structure est le réceptacle à la fois de rejets accidentels mais aussi volontaires, reflétant partiellement les activités humaines des environs immédiats. Elle offre un éclairage exceptionnel par la conservation de matériaux périssables qui témoignent de la proximité d’un quartier dont l’économie est plutôt tournée vers les activités artisanales à la fin du ier s. p.C., au cœur d’une agglomération portuaire ouverte aux échanges.

En effet, au-delà des différents usages du matériau bois dans la ville de Barzan, la dendrologie renseigne sur la provenance des bois utilisés. S’ils sont pour la plupart issus de l’exploitation de l’environnement local (forêt, ripisilve, haies), la part des importations, sous la forme de produits manufacturés ou semi-finis, reste un fait marquant.

66. Dupéron & Saedlou 2001, 428.67. Rival 1991, 40-41. 68. Mille 2000, 231 ; Jacamon 2001, 145.69. Mille 2000, 231.70. Mille 2000, 231-232.