STEPHANE LACROIX, UN SPECIALISTE DU SALAFISME?

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LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI La Réponse que l'Institution Sciences Po ne veut pas que vous lisiez... Réplique aux thèses non fondées de Stéphane Lacroix, « Spécialiste de l’Islam Politique », Professeur à Sciences Po et Chercheur au CERI

Transcript of STEPHANE LACROIX, UN SPECIALISTE DU SALAFISME?

LES FABLES DE LACROIX COMMENTE ES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI La Réponse que l'Institution Sciences Po ne veut pas que vous lisiez...

Réplique aux thèses non fondées de Stéphane Lacroix, « Spécialiste de l’Islam Politique », Professeur à

Sciences Po et Chercheur au CERI

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

2

MOT DU TRADUCTEUR

a France n’est plus ce qu’elle l’était durant

l’avant-Sarkozy. Les lois votées contre la liberté

des femmes musulmanes leur interdisant de

s’habiller selon leurs convictions, les profanations

récentes de mosquées et de cimetières musulmans, les

caricatures ignobles du Prophète Mohammed ainsi

que la diffamation croissante des politiciens envers les

musulmans pratiquants ne sont que quelques éléments

qui démontrent que la France a déclaré persona non

grata tout musulman qui refuse de s’assimiler à la über-

culture française.

Certes, la politique et les médias de

l’hexagone sont trempés dans

l’islamophobie et le racisme

antimusulman comme l’était, au

siècle précédent, la propagande

antisémite en Allemagne. Tout

comme la démocratie allemande a

permis à Hitler, en 1933, de

populariser le fascisme antijuif, la

laïcité française véhicule dans ce

nouveau siècle le fascisme antimusulman. Or, les

islamophobes français ont appris à ne pas commettre les

mêmes erreurs de leurs précurseurs allemands et mènent

leur campagne antimusulmane sous couvert d’une liberté

d’expression et un combat pour « des valeurs

républicaines et laïques ». Ils transforment les

appellations pour atténuer le caractère xénophobe de

leurs attaques calomnieuses contre les musulmans qui

pratiquent ouvertement leur religion et ne parlent plus de

croyance musulmane ou de citoyens musulmans —

termes exclusivement réservés aux Arabes occidentalisés

–, mais d’islamistes, wahhabites, extrémistes, intégristes,

fondamentalistes et fous d’Allah. Ce sont des termes

avec lesquels ils augmentent sans cesse le sentiment de

peur dans ce pays qui, à en croire les médias asservis,

semble être sous occupation « salafiste ».

Il n’y a que très peu de résistance scientifique ou

intellectuelle de la part des membres de la communauté

musulmane et ceux qui ripostent se contentent

d’énumérer quotidiennement les agressions

islamophobes, chose d’ailleurs totalement inutile, car il

suffit de suivre les infos pour comprendre que la France

est aujourd’hui le pays le plus islamophobe d’Europe.

Dans le monde anglophone, les choses diffèrent ;

l’islamophobie est moins présente et plusieurs auteurs1

sont connus pour écrire des répliques académiques aux

islamologues, orientalistes et journalistes

antimusulmans. Une de ces réponses s’est faite à un

1 Comme Haneef Oliver, auteur des livres « The Wahhabi Myth » et

« Sacred Freedom ».

professeur de Sciences Po nommé Stéphane Lacroix2,

connu pour diffamer la religion musulmane et les

savants de l’Islam. La réponse a été écrite en anglais

quelque temps avant la défaite électorale de Sarkozy par

un étudiant au Yémen… comme quoi les drones peuvent

parfois aller dans l’autre sens. L’étudiant démontre que

les analyses, recherches et conclusions du professeur

sont en réalité un mélange des fables de Lafontaine et

des Mille et une Nuits présentées sous forme d’ouvrage

académique. Or, comme vous le verrez dans cette

réponse, les écrits de Lacroix n’ont rien d’académique.

Après la sortie de « Les Fables de Lacroix commentées

par l’œuvre de Sheikh al-Albani » en anglais3, la

réputation du professeur s’est

effondrée dans le monde académique

anglo-saxon. L’humiliation subite par

Stéphane Lacroix fut telle que, dès

lors, il n’a presque plus rédigé

d’articles en anglais sur ce qu’il

nomme le « salafisme » et le

« wahhabisme ».

Il était donc important de partager les

compétences académiques de cet

expert en Islam avec le monde francophone où il

continue à se faire passer pour un spécialiste. Il est, en

effet, temps que la France sache qui est réellement le

professeur Stéphane Lacroix comme il est grand temps

qu’en France, on se rende compte à quel degré les

charlatans islamophobes se sont infiltrés dans les

universités, les instituts et les centres de recherches

français.

Dans une interview avec le Figaro4, Stéphane Lacroix

reprochait aux « Salafistes » de rester dans leur bulle.

C’est un reproche qu’il ne devra plus faire, car

aujourd’hui un Salafi est sorti de sa bulle pour mettre au

grand jour les tromperies académiques de cet imposteur

qui sombre dans l'escroquerie intellectuelle...

2 Stéphane Lacroix est connu pour rédiger des articles islamophobes

en anglais et passe régulièrement dans les médias français. Il a

participé à un débat avec un Imam d’une mosquée à Marseille après

la diffusion d’un reportage d’Harry Roselmack sur le « Salafism ». 3 L’article original en anglais s’intitule « Sheikh al-Albani’s works

reply to Stephan Lacroix’ revolutionary Lie » 4 « Les Salafistes en France restent dans leur bulle » Le Figaro,

12/10/2012

L

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

3

Certains professeurs à Sciences Po exploitent l’industrie fructueuse de l’islamophobie pour entamer leur carrière

urant les quatre années sous le « régime » de

Nicolas Sarkozy, la France a non seulement

connu un déchaînement d'islamophobie dans les

médias principaux et sur de le devant de la scène

politique, mais aussi dans ses universités les plus

prestigieuses qui, aujourd’hui, sont clairement

contaminées par le nouveau fléau du siècle. Le

« Sarkozysme » a produit des drôles de spécimens qui se

sont autoproclamés « islamologues » et « experts de

l'Islam » dans le but de mener une campagne visant à

discréditer la communauté musulmane de France.

Les articles dans la presse occidentale qui traitent la

religion musulmane et ses différentes sectes ont

clairement révélé que tout ignare peut s’infiltrer dans le

domaine complexe des sectes

musulmanes et leurs différences

religieuses. Dans certains milieux

académiques, ils font même figure de

référence sans avoir la moindre notion

ou compréhension de la matière dans

laquelle ils se font nommer

« experts ». En auscultant les écrits de

ces « islamologues » et pseudo

spécialistes du Moyen-Orient, le

lecteur intègre se doit de conclure que

leur vaste majorité est composée

d’imposteurs incompétents qui

amassent des fonds de recherche considérables destinés

aux études académiques d'universités comme Princeton,

Cambridge, Oxford, la Sorbonne et Sciences Po. Ils

gagnent leur vie en rédigeant des articles d'amateurs qui,

à de rares exceptions près, contiennent des thèses

farfelues, voire des histoires fictives. En France, une

élite de fondamentalistes laïques5 a entamé une vendetta

médiatique contre les musulmans qui refusent de

s'assimiler à la culture française et de se soumettre à ses

normes. C'est souvent en exploitant l'ignorance des

masses que cette nouvelle génération « d'orientalistes »

est parvenue à diaboliser une partie bien précise de la

communauté musulmane en France et cela en présentant

les « musulmans qui s’habillent islamiquement » comme

des islamistes, fanatiques, intégristes et

fondamentalistes6.

Éditer des articles sur l'Islam et ses sectes est devenu un

5 Parmi les islamophobes les plus actifs en France, nous avons

Jacques Myard, André Gerin, Jean-Marie Le Pen, Bernard Rougier,

Caroline Fourest, Manuel Valls, George Freche, Jean-François Copé,

Bernard Henry Lévy, Nicolas Sarkozy, Alain Finkielkraut, Fadela

Amara, Marine Le Pen et Siham Habchi. 6 Notez que les juifs religieux — contrairement aux musulmans qui

pratiquent ouvertement l’Islam—, sont toujours décrits comme des

« orthodoxes » et non comme « fondamentalistes » ou « intégristes ».

commerce à « profit garanti ». Or il est impressionnant

de constater que la quasi-totalité de ces « islamologues »

sont inaptes à effectuer de simples recherches

académiques dans les livres d’origine en arabe qui

constituent la source primaire pour tout chercheur qui

désire étudier les origines, l'influence et le

développement des sectes musulmanes contemporaines.

Il n’y a probablement pas d’autre branche de

spécialisation dans les cercles académiques où

l'illettrisme dans la langue primaire, sur laquelle est

basée son étude, ne pose aucun problème pour devenir

expert dans le domaine. De plus, leur incapacité de

conduire des recherches de base conformes à la réalité

ne semble les déranger en rien. Les militants de

l'islamophobie française recyclent principalement les

anciennes ambiguïtés de leurs précurseurs orientalistes

en ajoutant leur touche personnelle avec des

argumentations insolites. En effet, ils semblent bien

conscients de leur immunité presque

absolue lorsqu’ils rédigent des contes

de fées présentées sous forme de

recherches académiques. Ils n’ont

jamais à se justifier et ne doivent pas

prendre en considération les

sentiments des musulmans de qui ils

écrivent, car ces derniers se

retrouvent citoyens de seconde zone

dans cette nouvelle France où

l'apartheid religieux n’a pas d’égal.

Aujourd'hui, nous allons analyser de

plus proche les écrits de Stéphane Lacroix qui est un

adversaire fervent de la famille royale saoudienne et des

Salafis de France qui refusent de s’agenouiller devant la

laïcité française et les valeurs occidentales. Comme c'est

le cas pour la plupart des professeurs de Sciences Po, les

écrits du professeur Lacroix révèlent une animosité

particulière envers l'Islam et plus spécifiquement à

l’égard des musulmans qui pratiquent leur religion7.

Dans ses articles, il juge ceux qui suivent les préceptes

musulmans comme des personnes intellectuellement

retardées qui ont abandonné toute pensée rationnelle. À

l’inverse, il décrit les arabes laïques qui se sont

hardiment assimilés aux idéaux de l'Occident comme des

intellectuels courageux et audacieux. Stéphane Lacroix

rêve bel et bien d'une Arabie Saoudite laïque déchue de

toutes ses valeurs musulmanes8…

7 En mars 2007, Stéphane Lacroix participe au colloque xénophobe et

islamophobe « Le Rôle de l’Etat Civil qui plaide pour les Reformes

dans le Monde Arabe » organisé par le FPC à Londres. Comme tout

bon islamophobe, Lacroix revendique le droit aux « sociétés civiles »

d’imposer des réformes chez les arabes dans leurs « sociétés

primitives ». 8 Dans sa croisade pour libéraliser les lieux saints occupés par les

musulmans, Stéphane Lacroix a fait une intervention à l’Institut des

Affaires Etrangères de Norvège qu’il a nommé « Perspectives pour

une libéralisation religieuse et politique de l’Arabie Saoudite ».

D

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

4

Après avoir fui l’Albanie la famille d’al-Albani s’est installée dans cette maison à Damas

…et voici la maison dans laquelle Sheikh al-Albani a grandi pendant son enfance

La Riposte de Sheikh Naser al-Din al-Albani

Mohammed Ibn Nouh Nadjati, mieux connu sous le nom

de Mohammed Naser al-Din al-Albani fut

incontestablement un des savants musulmans les plus

aimés du XXe siècle. Lors de son enfance, il a dû fuir

l'Albanie à cause de la persécution religieuse du

dictateur sanguinaire Ahmed Zogolli9, de la même

façon dont de nombreux musulmans français émigrent

aujourd’hui vers des pays musulmans

pour échapper à la politique

antimusulmane de Sarkozy. La

famille de Sheikh al-Albani choisit la

Syrie comme nouveau pays d'accueil

et c’est là où Mohammed al-Albani,

encore très jeune, se lance dans les

études religieuses dans la

bibliothèque « al-Thahiriya » de

Damas. Il devint renommé pour son

zèle ardent dans la recherche du

Hadith à tel point que l'administration

de la bibliothèque mit une pièce à

disposition du Sheikh et lui donna une

clé de la bibliothèque où il passait la

plus grande partie de son temps10

. Al-

Albani, qui devint un savant

mondialement reconnu dans la

science du Hadith, fut plus tard invité

en Arabie Saoudite pour enseigner à

la prestigieuse Université Islamique

de Médine. Il finit en Jordanie où il

décède au milieu de ses livres en

s’adonnant à l’occupation qu’il

appréciait le plus : la recherche de hadiths. Lorsqu’al-

Albani décède, les musulmans au monde entier avaient

perdu un de leurs savants les plus éminents et le plus

grand Muhaddith de leur époque.

Tout au long de sa vie, Sheikh al-Albani fut harcelé par

de nombreux islamophobes, polythéistes et partisans

sectaires pour avoir appelé à la tradition prophétique et

avoir exposé les enseignements erronés des sectes

égarées. Dans ses livres, al-Albani consacra beaucoup de

temps à se défendre contre les nombreuses fausses

allégations à son égard. Cela, comme il l’avait

mentionné à plusieurs reprises, lui prenait beaucoup de

son temps :

9 Dictateur albanais laïc, connu pour avoir assassiné ses rivaux

politiques et avoir mené une politique de collaboration étroite avec

l’Italie fasciste. Sa dictature royale fut caractérisée par une

combinaison de despotisme et réformes occidentales dans lesquelles

il prit des mesures oppressives en adoptant des lois civiques et

commerciales ainsi que des codes pénales occidentaux. Les

musulmans furent les plus grandes victimes de ce tyran impitoyable. 10 Voir la biographie officielle de Sheikh al-Albani :

www.alalbany.net/albany_serah.php

« Cela fait maintenant plus d'un demi-siècle que nous

constatons comment la diffamation prend, chaque

année, une nouvelle forme. En effet, chaque année il y a

quelque chose qui se répète, chaque année on invente

une nouvelle chose contre moi alors que personne parmi

ces gens-là n’est venu me voir directement… » 11

Malheureusement, la calomnie lancée contre Naser al-

Din al-Albani n’a pas cessé après son décès. Il y a

quelques années, une tentative fut

entreprise pour lier le Sheikh

indirectement à l'attentat sanglant de

1979 perpétré sur la mosquée de la

Mecque par Mohammed al-Qahtani12

.

D'autres, encore, ont dépeint ce grand

homme de science comme un simple

d’esprit qui rejette le raisonnement

humain. Et en France, le savant

albanais fut gravement diffamé dans

un article de Stéphane Lacroix intitulé

« l'Approche Révolutionnaire d’al-

Albani du Hadith13

».

L'œuvre de Sheikh al-Albani contient

suffisamment de matière à démanteler

les accusations calomnieuses du

professeur Lacroix. Par conséquent,

cette réponse sera majoritairement

restreinte aux paroles du Sheikh qui,

même après sa mort, s’avèrent

toujours très utiles pour répondre aux

articles islamophobes écrits par les

partisans fanatiques et xénophobes de

la laïcité française.

11 Muhammad Nasir al-Din al-Albani, « As-Salafiya wal Madhahib »

[La Salafiya et les Madhabs], p.103 12 Voir la ‘1e Partie’ de la série « Thomas Hegghammer under the

Sledgehammer » (à venir incha Allah). 13 Stéphane Lacroix « Al-Albani’s Revolutionary Approach to Hadith

», ISIM Review 21, p.6-7.

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

5

L’entrée de la bibliothèque « al-Thahiriya » à Damas où le Sheikh fit ses recherches

La pièce de la bibliothèque mise à disposition à Al-Albani. Le Sheikh y passait parfois plus de quinze heures par jour.

Les Origines de la Salafiya… ?

Comme la plupart des islamophobes institutionnalisés, le

professeur Lacroix étiquette l’Islam orthodoxe comme

du « Wahhabisme » et le présente comme une secte

islamique qui se base sur les enseignements de Sheikh

Mohammed Ibn Abdel-Wahhâb al-

Najdi. Dans son article, il décrit le

« Wahhabisme » comme étant :

« … le discours produit et soutenu par

l'établissement officiel et religieux de

l’Arabie Saoudite »

Avant tout, Stéphane Lacroix

considère le « Wahhabisme » comme

un discours produit par l'établissement

officiel et religieux de l’Arabie

Saoudite. Ensuite, il fait une différence

avec le « Salafisme » en mentionne :

« Contrairement au Wahhabisme, le

Salafisme se réfère à toutes les

hybridations qui ont eu lieu depuis les

années 1960 entre les enseignements

de Mohammed Ibn 'Abdel-Wahhâb et

d'autres écoles juridiques islamiques. »

Donc, si nous avons bien compris, le

« Wahhabisme » est une école juridique et le

« Salafisme » a vu le jour dans les années 196014

… Tout

cela est, certes, très intéressant et évoque le témoignage

bouleversant de Dounia Bouzar15

invitée à parler devant

la mission d'information parlementaire en 200916

établi

dans le but de priver les femmes musulmanes de leur

droit de s’habiller selon leurs convictions religieuses.

Dans sa déclaration ahurissante, Bouzar a allégé que le

14 Cette déclaration de Stéphane Lacroix comme quoi le

« Salafisme » se réfère aux hybridations des années 1960 contredit

ses propos dans l’interview avec le Figaro où il allège que le

« Salafisme » est né au XVIIIe siècle (voir « Les Salafistes en France

restent dans leur bulle » Le Figaro, 12/10/2012). Ce n’est qu’une des

nombreuses contradictions qui confirme bien l’incompétence du

professeur Lacroix qui sombre dans la plus grande confusion. 15 Dounia Bouzar est une ancienne éducatrice à la Protection

Judiciaire de la Jeunesse qui est devenue « islamologue » grâce à son

expérience acquise avec de jeunes délinquants issus des banlieues (c.-

à-d. voyous, voleurs, dealers, braqueurs de banque, etc.). 16 En juin 2009, l'Assemblée nationale a nommé une Commission de

32 députés pour mener une mission d'information sur la pratique du

port du voile intégral sur le territoire national. La commission s’est

terminée en tribunal d'inquisition moderne où une meute de

xénophobes a diabolisé les porteuses de niqab avec un acharnement

pathétique afin de justifier une loi ôtant la liberté aux musulmanes de

France de se vêtir selon les préceptes de leur religion. Éric Raoult, le

rapporteur de la mission sur le port du voile intégral fut placé en

garde à vue en octobre 2012 pour violences conjugales après que sa

femme dépose plusieurs plaintes à son encontre. Lors de la

commission, il a toujours prétendu vouloir défendre les « femmes

opprimées sous leur niqab »…natürlich mein Führer!

niqab

fut une innovation imposée aux femmes par

certains savants saoudiens au début du XXe siècle.

L’islamophobie et l'histoire culturelle de l'Islam ne vont

clairement pas de pair, ce qui explique d’ailleurs

pourquoi les islamophobes sont incapables de situer la

Salafiya dans un contexte historique.

Dans plusieurs articles, le professeur

Lacroix emploi le terme

« jurisprudence Wahhabite ». Le fait

qu’un spécialiste de l’Islam improvise

un discours invoquant un madhab

inexistant qui n'a jamais été mentionné

dans un livre de jurisprudence

islamique met en péril sa réputation de

chercheur islamologue. Il est clair que,

dû à leur manque d'études adaptées et

de recherches approfondies, beaucoup

« d’experts du Moyen-Orient et de

l’Islam » rendent confus leurs lecteurs

quand ils s’efforcent de décrire la

Salafiya. C’est pourquoi nous allons

laisser derrière nous Stéphane et

Dounia aux pays des merveilles laïques

et voir ce que les vraies spécialistes des

sciences musulmanes ont à dire sur le

sujet. Dans ses écrits, Sheikh al-Albani

a clarifié à plusieurs reprises

qu’historiquement, les origines de la

Salafiya remontent à fort longtemps :

« De nombreux savants, au passé et au présent, ont

adopté la dénomination de 'L’appel à la Salafiya’.

Certains l’ont décrit par l’appel de ceux qui préconisent

la Sounna Prophétique, d'autres l’ont nommé l’appel

d'Ahl al-Hadith. Ce sont toutes des dénominations qui

indiquent une même signification. Beaucoup de gens

dans la communauté musulmane, au passé comme au

présent, ont souvent été insouciants de cela ; ou peut-

être ils en étaient conscients, mais ne l'ont jamais

appliquée de façon appropriée »17

En effet, l'affiliation à la Salafiya est très ancienne ; c’est

une chose qui est bien connue et peut aussi bien être

retrouvé dans les œuvres des anciens savants que dans la

littérature musulmane contemporaine. Mais si la Salafiya

ne se réfère pas aux hybrides imaginaires du professeur

Lacroix qui ont eu lieu dans les années 1960, alors de

quoi s’agit-il ? Sheikh al-Albani nous l'explique d’une

manière simple et claire :

17 Muhammad Nasir al-Din al-Albani, « Ousoul al-Da’wa al-

Salafiya » [Principes de la Da’wa al-Salafiya], p. 13

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

6

L’école primaire dans laquelle étudiait al-Albani avant que son père lui apprenne le Coran et lui enseigne le madhab Hanafite

L’entrée de la même école à Damas, qui, à la base, fut une maison d’orphelins.

« La Salafiya est l’Islam selon sa compréhension

correcte ; elle invite les gens à se cramponner à leur

croyance islamique originale et n’exclus pas injustement

un type de personnes. Dans son appel au Coran et à la

tradition prophétique, elle ne fait aucune distinction

entre la personne cultivée et l'illettrée, entre la personne

éduquée et celle qui n’a pas eu d’éducation. » 18

Ainsi, la Salafiya n'est rien de nouveau.

Al-Albani explique la fausse

conception qui est présente chez ceux

qui considèrent que la Salafiya prend

ses racines dans l’œuvre de Sheikh

Mohammed Ibn Abdel-Wahhâb ou

d’Ibn Taymiya :

« Certains prétendront que l’appel à la

Salafiya est quelque chose de nouveau,

qu’il s’agit d’un développement ou que

la première personne s’être affilié à

elle fut Sheikh al-Islam Ibn Taymiya et

après lui, à l’époque contemporaine,

Ibn Abdel-Wahhâb. Or, cette

conception est entièrement fausse.

Plutôt, il s’agit d’un mensonge puisque

l'appel à la Salafiya est l'appel correct

et original de l'Islam en soi... » 19

La Salafiya vs le Sectarisme

La Salafiya diffère des sectes islamiques dans le fait

qu'elle se réfère à la compréhension des compagnons du

Prophète et des grands savants aux trois premières

générations après la révélation20

:

« L'appel à la Salafiya est basé sur la connaissance du

Coran et la Sounna suivant la compréhension des pieux

prédécesseurs des (premières) trois générations et de

qui le Prophète a attesté la droiture dans le hadith

connu : 'Les meilleurs des gens sont ceux de ma

génération, puis ceux de la génération d’après, puis

ceux de la génération d’après.' Les quatre Imams21

et

les autres savants qui ont vécu pendant — ou un peu

après — leur temps appartiennent tous aux grands

savants des pieux prédécesseurs. Et ce sont eux que nous

suivons dans notre appel à Islam. » 22

18 Muhammad Nasir al-Din al-Albani, « Shubah Hawl al-Salafiya »

[Ambiguïtés concernant la Salafiya] p.130 19 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Durus Lil Sheikh Nasir al-

Din al-Albani » (Shabakat al-Islâmiya) 20 Plusieurs sectes revendiquent également leur appartenance à la

Salafiya. Or, leurs actes et idéologues invalident leur allégation. 21 C.-à-d. les Imams Abu Hanifa, al-Shafi’i, Malek et Ahmed. 22 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Shubah Hawl al-Salafiya »

[Ambiguïtés concernant la Salafiya] p.113

Ainsi, la Salafiya peut simplement être définie comme

l’orthodoxie ou comme l’Islam dans sa forme originale

puisqu’elle est basée sur la compréhension des gens qui

étaient les plus rapprochés de la période de la révélation.

Une fois les trois premières générations révolues, les

sectes islamiques n’ont cessé d’accroitre tout en

développant leur propre compréhension du Coran et de

la Sounna Prophétique. Mais, comme

l’explique Sheikh al-Albani, toutes les

sectes islamiques revendiqueront

toujours leur adhésion aux deux

sources de la révélation musulmane :

« La caractéristique de ce groupe de

gens (c.-à-d. Ahl al-Sounna) ne se

limite pas à leur affiliation à

l'application du Coran et de la Sounna

car aucune de ces sectes, que ce soit au

passé ou au présent, ne peut nier

s’affilier au Coran et à la Sounna de

manière générale. Par conséquent, je

dis que les groupes islamiques et les

sectes qui ont été mentionnés par le

Prophète et auxquels il faisait

référence dans le hadith (des 73

sectes), sont unanimes pour

revendiquer leur affiliation au Coran et

à la Sounna. »23

Il semble, en effet, n’y avoir aucune

différence entre les sectes quant à leur

appartenance au Coran et à la Sounna. Cependant, ils

diffèrent fondamentalement dans leur compréhension :

« La société dans laquelle nous vivons aujourd'hui

comprend de nombreux groupes qui prétendent tous

s’adhérer à la religion de l'Islam et qui ont tous la

conviction que l'Islam est basé sur le Coran et la

Sounna. Cependant, la grande majorité d'eux

n’approuvent pas le suivi de la voie des compagnons et

ceux qui les ont suivis avec droiture… »24

Les sectes musulmanes se distinguent par le suivi étroit

de leur fondateur dans la compréhension de l'Islam ; les

Salafis, en revanche, basent leur compréhension non

seulement sur les sources islamiques les plus

authentiques, mais ils étudient également l’œuvre des

grands savants des trois premières générations pour ainsi

atteindre la compréhension adéquate et originale de leur

religion. Ils ne suivent pas aveuglément ces savants en

question, mais se servent de leurs ouvrages pour arriver

à une compréhension correcte de l'Islam25

:

23 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Ousoul al-Da’wa al-

Salafiya » [Principes de la Da’wa al-Salafiya], p.18 24 Ibid, p.35 25 Un des reproches que répète souvent le professeur Lacroix est que

les « Salafistes » ont une lecture littéraire puisqu’ils appliquent « à la

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

7

L’horlogerie du père d’al-Albani dans lequel le Sheikh a appris le métier d’horloger, à l’entrée se trouve son plus jeune frère.

Plus tard al-Albani devient indépendant et ouvre sa propre horlogerie à Damas. Il devient un des meilleurs horlogers de la ville.

« Nous voyons les grands savants comme un moyen et

nous les considérons comme des intermédiaires qui

transmettent la science d'Allah et de Son Prophète .

Nous ne les suivons pas pour 'qui' ils sont (mais pour ce

qu’ils transmettent). De plus, nous ne considérons pas

leur suivi comme un de nos objectifs (en soi) puisque

notre intention unique est de comprendre la voie que

suivait le Prophète . Cela veut dire que l'objectif est de

savoir ce qui lui a été révélé dans le Coran ou ce qu'il a

clarifié dans sa Sounna. »26

Selon al-Albani, toutes ces différentes

façons de comprendre les deux

sources divines ont divisé la

communauté musulmane comme elle

l'est aujourd'hui :

« Par conséquent, je dis que la

défaillance par laquelle est atteinte la

communauté dans le fait de revenir à

la compréhension, les idées et les

opinions de nos pieux prédécesseurs

constitue le facteur principal dans la

division des musulmans en plusieurs

'madhabs' et diverses sectes. »27

À maintes reprises, al-Albani déclara

que la raison pour laquelle la

communauté musulmane doit revenir

à la compréhension des trois

premières générations est parce qu'il

s’agit des générations qui ont transmis

l’Islam au reste du monde dans sa

forme correcte et originale28

. Le

Sheikh comprenait bien que, pour

éviter les divisions et les frictions

dans la Oumma, il est essentiel

d’obtenir une façon unie de comprendre l’Islam.

Il est important de souligner que cette façon de

comprendre l’Islam a toujours existé et peut être

retrouvée dans l’œuvre des savants qui se sont distingués

lors des quatorze siècles passés. Revenir à la

compréhension des premières trois générations n’est, en

effet, rien de nouveau et Sheikh al-Albani faisait souvent

référence à la parole de l'Imam Mâlik dans laquelle il

lettre » ce qu’ils trouvent dans les textes religieux. Cette thèse sert

ensuite de prétexte pour justifier des appellations comme

« fondamentalistes » ou « intégristes ». Imaginez-vous que nous

traiterions de « fondamentalistes intégristes » tous les citoyens de

France qui appliquent « à la lettre » toutes les lois de leur démocratie

tout en prétextant qu’ils ont lecture littéraire. Tout bon citoyen

français deviendrait ainsi un intégriste fondamentaliste. 26 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Shubah Hawl Al-Salafiya »

[Ambiguïtés concernant la Salafiya] p.120 27 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Ousoul al-Da’wa al-

Salafiya » [Principes de la Da’wa al-Salafiya], p.35 28 Ibid, p.46

dit : « Ce qui ne faisait pas partie de la religion à la

première époque, ne fera pas partie de la religion

aujourd'hui. Certes, les générations futures de notre

communauté seront uniquement rectifiées par ce qui a

rectifié les premières générations »29

. Al-Albani voyait

que c’était le seul moyen pour que la communauté

musulmane sorte de sa situation misérable.

Mais si Salafiya est aussi ancienne que la religion

musulmane elle-même et représente, certes, la forme

originale de l’Islam, pourquoi alors les musulmans de

nos jours semblent-ils si peu familiers

avec la Salafiya? Sheikh al-Albani

explique que c’est principalement dû

au fait que beaucoup de musulmans

suivent aveuglément une école

juridique:

« La raison de ceci est que notre

communauté a subi de nombreux

siècles dans lesquels une forme

solidifiée du suivi aveugle des

‘madhabs’ s’est ancrée dans les

cœurs des gens qui s’affilient à Ahl al-

Sounna. »30

Sheikh al-Albani s’est souvent

indigné de cette ignorance largement

répandue chez les musulmans qui est

apparue après leur négligence de la

religion et de son apprentissage. Il a

mentionné que beaucoup sont tombés

dans une ignorance profonde à tel

point qu'ils n’éprouvent plus

d’émotion en lisant le Coran ou en

étudiant les textes authentiques de la

Sounna Prophétique31

.

En effet, l'ignorance a toujours eu des conséquences

néfastes et des répercussions historiques pour la

communauté musulmane et a même facilité la

colonisation occidentale du monde musulman. Sheikh

al-Albani expliquait souvent qu’il n'était pas admissible

que les musulmans soient satisfaits de leur situation

actuelle dans laquelle ils sombrent dans l’ignorance et

n’apprennent plus les croyances indispensables de leur

religion. En suivant les enseignements du Coran et de la

Sounna, al-Albani maintenait le principe selon lequel

l'ignorance actuelle des musulmans est la cause de leur

humiliation incessante32

.

29 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Al-Fatawa al-Manhajiya Lil-

Albani » [Les Fatwas d’Al-Abani liées au Manhaj] p.85 30 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Ousoul al-Da’wa al-

Salafiya » [Principes de la Da’wa al-Salafiya], p. 14 31 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « As-Salafiya wal Madhahib »

[La Salafiya et les Madhabs], p.101 32 Ibid, p.106

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

8

Manuscrit de « al-Thamar al-Mustatâb fi Fiqh al-Sounna wal Kitab», premier livre duquel Sheikh al-Albani a évalué les hadiths.

Briser le mythe « Wahhabite »

L’article de Stéphane Lacroix sur Sheikh al-Albani

aurait pu être crédible si le professeur avait fait l’effort

de lire au moins quelques chapitres dans les livres du

Sheikh. Il n’aurait probablement pas décrit si

maladroitement la Salafiya, ni aurait-il attribué sa propre

vision du « Wahhabisme » à Sheikh al-Albani, car pour

Lacroix, le « Wahhabisme » est une secte islamique

fondée par Mohammed Ibn Abdel-Wahhâb et ses

héritiers :

« Le Wahhabisme fait initialement

référence à la tradition religieuse

développée à travers les siècles par les

ulémas de l'établissement officiel

religieux saoudien et a été fondée par

les héritiers de Mohammed Ibn Abdel-

Wahhâb. »

Si le « Wahhabisme » est une tradition

religieuse qui s’est développée à

travers les siècles suivants le décès de

Sheikh Ibn Abdel-Wahhâb, alors il

serait très intéressant de savoir en quoi

le « Wahhabisme » diffère des

enseignements originaux de l'Islam

transmis par le Prophète et dans

quels aspects il contredit le Coran et la Sounna. Les

islamophobes ont toujours refusé d’aborder ce sujet et se

contentent d’étiqueter l’Islam orthodoxe comme du

« Wahhabisme »33

. Cela leur permet de dénigrer de

manière indirecte la foi musulmane sans pour autant

devoir mentionner le terme ‘Islam’34

. Il n'est pas

surprenant de voir que l’appellation « Wahhabite »

trouve ses origines dans la poésie injurieuse de la secte

des Déobandis au Pakistan et en Inde au début du XXe

siècle35

. Sheikh al-Albani est remonté encore plus loin

dans l’histoire et a mentionné que le terme

33 D’autres experts autoproclamés, comme le sociologue-mufti Samir

Amghar, présentent toute pratique orthodoxe de l’Islam comme une

radicalisation. Comme la laïcité française néglige et éradiqué le statut

de toute référence musulmane compétant dû à son savoir islamique,

les médias font recours à des sociologues totalement ignorants des

préceptes musulmans. Ce sont souvent ce genre d’Arabes ou

Berbères qui servent de faux alibi aux médias tendancieux qui les

exploitent pour transmettre leur protocole qui stipule que le

musulman peut uniquement être un ‘bon citoyen’ s’il s’habille, se

comporte et pense entièrement comme le Français de souche. 34 Lacroix diffame ainsi la religion musulmane en employant le terme

« Wahhabisme ». En janvier 2005, il a présenté une communication à

un colloque organisé par le CERI intitulé « La critique du

Wahhabisme… », ce qui passe mieux que « la critique de l’Islam » 35 L'animosité de la secte des Deobandis envers Sheikh Ibn Abdel-

Wahhâb réside dans le fait que le Sheikh prônait un Islam orthodoxe

qui interdit l'adoration des tombes, des saints, etc. Voir al-Shams al-

Salafi al-Afghani « Al-Maaturidya wa Mawqifuhum min Al-Asmaa

wa Al-Sifaat » Vol.3, p.312, 313

« Wahhabite » fut déjà employé par les Ottomans en tant

qu’outil de propagande :

« L'emploi du terme (Wahhabite) faisait partie de la

politique menée par l'Empire Ottoman lorsqu'un homme

de science et de réforme nommé Mohammed Ibn Abdel-

Wahhâb commença à appeler les gens (à l’Islam) dans

certaines parties de la région du Najd. »36

Le nom « Wahhabisme » fut dès lors repris dans les

ouvrages tendancieux d'islamophobes

et d’orientalistes et cela, jusqu’à notre

époque. En effet, il s’agit aujourd’hui

d’une appellation très populaire

exploitée dans la virulente campagne

de propagande antimusulmane.

Certains « islamologues » utilisent le

terme pour décrire les Takfiris (c.-à-d.

ceux qui déclarent d’autres musulmans

mécréant sans respecter les

prescriptions de l'Islam), d'autres

emploient le terme de façon très

générale pour cataloguer les hommes

barbus et les femmes qui portent le

niqab, et puis il y a encore ceux qui

considèrent que le « Wahhabisme » est

un système politique. De cette façon,

chaque spécialiste possède sa façon

personnelle de représenter et de comprendre ce qu'il

appelle le « Wahhabisme ». Dans son article, Stéphane

Lacroix commence par décrire al-Albani comme un

« Wahhabite » et mentionne :

« Il est connu de tout le monde que Sheikh Nasir al-Din

al-Albani fut un partisan loyal du Wahhabisme. »

Plutôt, il est connu de tout le monde que cette

déclaration est simplement absurde. Sheikh al-Albani,

ainsi que tous les autres savants sunnites n'emploient pas

le terme « Wahhabite » et le considèrent comme une

injure. Dans son explication du livre « al-Tahawiya »

Sheikh al-Albani mentionne :

« Et parmi les preuves principales qui prouvent que le

Sheikh (al-Tahawi) fut bien Salafi, est que ses ennemis le

décrivent comme étant un ‘Wahhabite’. Ce terme est une

accusation préfabriquée portée contre tous ceux qui

suivent le chemin des prédécesseurs, qui appellent à la

tradition prophétique et rejettent le suivi aveugle.»37

36 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Fatawa al-Sheikh al-Albani

wa Muqaranatuha bi Fatawa al-Uléma » [Les Fatwas de Sheikh al-

Albani comparées à celles d’autres savants], p. 12 37 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Sharh Aqida al-Tahawiya »

[Explication de ‘Aqida al-Tahawiya], p.53

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

9

Cour intérieure de la librairie « al-Thahiriya » où Sheikh al-Albani acceuilla al-Ghimari

A l’intérieur de la bibliothèque, al-Albani informait al-Ghimari du contenu des livres

Dans sa « Silsila al-Ahadith al-Da'ifa », Sheikh al-

Albani mentionne un extrait d'une lettre qui remonte à

1959 dans laquelle un de ses adversaires le décrit de la

manière suivante :

« Ensuite, Nasir al-Din al-Albani est arrivé à Damas où

il apprit l’arabe et étudia la science du Hadith dans

laquelle il a acquis la maîtrise. Il a

bénéficié largement d'une bibliothèque

qui contient de précieux manuscrits de

hadiths. L'année dernière, lorsque j'ai

rendu visite à cette bibliothèque,

c’était lui qui m’apportait les livres

que je cherchais et c’est lui qui

m’informait de leur contenu. Et Sheikh

al-Albani est un homme malicieux et

un pur ‘Wahhabite Taymite’. Si ce

n'était pas pour son vicieux madhab et

son obstination, il aurait été une des

personnes uniques à son époque dans

la science du Hadith, malgré qu'il gère

toujours une horlogerie... » 38

Sheikh al-Albani et les autres savants

de l'Islam orthodoxe sont souvent

dépeints comme « Wahhabites » par

leurs opposants. De même, dans son

livre « Tahdhir al-Sajid min Ittighadh

al-Qubur Masajid », al-Albani tire

l’attention sur les orientalistes

contemporains qui offensent les gens

de la Sounna avec l’appellation « Wahhabite »39

.

L’Imposture d'un Professeur Charlatan

Un peu plus loin, le professeur Lacroix attribue les

propos suivants à Sheikh al-Albani :

« Mais plus important que ça, al-Albani affirmait être

plus fidèle à l'esprit du Wahhabisme que Ibn 'Abdel-

Wahhâb lui-même. Cette parole a rendu les idées d’al-

Albani très populaires chez la jeunesse Salafie. »

Premièrement, la « jeunesse Salafie » rejette totalement

le terme « Wahhabite ». Par conséquent, cette

déclaration du professeur ne peut être vraie.

Deuxièmement, Sheikh al-Albani n'a jamais prononcé

ces mots et celui qui est familier aux écrits du Sheikh

sait pertinemment qu’il est impossible que cette parole

puisse être sortie de la bouche du Sheikh. La question se

38 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Silsila al-Ahadith al-Da’ifa

Wal Madou’a Wa Atharouha Al-Sayyi’ Fil Umma » [Collection des

hadiths faibles et inventés et leur effet néfaste sur la communauté

musulmane] 4/6 39 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Tahdhir al-Sajid Min

Ittighadh al-Qubur Masajid » [Prémunir ceux qui se prosternent

contre le fait de transformer les tombes en mosquées], p. 102

pose : d’où le professeur Lacroix obtient-il ses

informations. Vu que dans son article, il ne cite pas une

seule référence des paroles attribuées à Sheikh al-Albani,

j'ai personnellement contacté Stéphane Lacroix pour lui

demander une référence de cette citation en question40

.

Bien que j’aie réitéré ma demande à maintes reprises, le

professeur Lacroix a obstinément refusé de me fournir la

moindre source. J'ai poursuivi ma

recherche dans l’œuvre d'al-Albani et

je suis tombé sur une parole dans

laquelle le Sheikh explique avoir subi

des insultes grossières lancées par

Ahmed al-Ghimari41

. Sheikh al-Albani

conclut cette partie dans son livre en

mentionnant les propos dénigrants

d'al-Ghimari que voici :

« Celui qui considère Sheikh al-Albani

comme Wahhabite a eu tort, car il est

plus partial à l'esprit du Wahhabisme

qu’Ibn Abdel-Wahhâb lui-même et il

est plus têtu que lui... »42

Dans ce passage, Sheikh al-Albani

explique qu'un de ses plus grands

adversaires l'accuse d'être plus partial

à l'esprit du « Wahhabisme » qu’Ibn

Abdel-Wahhâb lui-même. Le

professeur Lacroix a

intentionnellement déformé cette

déclaration et l'a présentée comme

étant une affirmation d’al-Albani lui-même. Notre

« chercheur » français a tout simplement pris une insulte

d'al-Ghimari pour l’attribuer à Sheikh al-Albani dans le

but de convaincre le lecteur qu’al-Albani se considérait

comme « Wahhabite ». Le professeur n'a jamais donné

suite à ma requête d’une référence de la citation de

Sheikh al-Albani parce qu'il a sciemment inventé un

mensonge qu'il a alors exploité pleinement pour faire

croire aux lecteurs que Sheikh al-Albani fut populaire

chez la « jeunesse Salafie » et cela, en prétendant qu’il

se disait plus fidèle à l'esprit du « Wahhabisme » qu’Ibn

Abdel-Wahhâb lui-même. En France, si vous volez

l’ouvrage d'un auteur vous avez commis du plagiat, si

vous volez de plusieurs auteurs, vous avez effectué des

recherches et si vous inventez des propos que l'auteur

n’a jamais dits, ça devient de la « spécialisation ».

40 Le professeur Lacroix fut contacté par mail à l’adresse mail

[email protected] 41 Sheikh marocain qui, d'après al-Albani, penchait vers l’idéologie

Shi’ite (Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Silsila al-Ahadith al-

Da'ifa... », Vol.6, p.212) 42 Ibid, Vol.3, p. 15

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

10

La région du Najd où a débuté la da’wa de Sheikh Mohammed Ibn Abdel-Wahhâb.

Mais pourquoi le professeur Lacroix forge-t-il un

mensonge aussi flagrant ? Tout simplement parce qu'il

est obsédé par l’appellation « Wahhabite » et sans

représenter al-Albani comme quelqu’un qui se

revendiquait comme « Wahhabite », une partie

principale de son article perd toute signification et ses

conjectures fantaisistes s'écroulent comme un château de

cartes.

On peut se demander quelle aurait été la réaction de

Sheikh al-Albani à ce professeur « spécialiste de

l’Islam » qui l’a taxé de partisan loyal du

« Wahhabisme » tout en attribuant des insultes

grossières lancées par ses adversaires au Sheikh lui-

même. Il est important de comprendre que les savants de

l'Arabie Saoudite joignent leurs voix à la désapprobation

d’al-Albani face au terme « Wahhabisme ». Pour citer un

exemple, l’ancien Mufti du

Royaume d’Arabie, Sheikh Adbel-

Aziz Ibn Baz, a dit que le terme

« Wahhabite » est uniquement

employé par les adversaires

tendancieux et ignorants de

l'Islam43

. Sheikh Saleh al-Fawzan,

un autre savant majeur du pays, a

déclaré que le « Wahhabisme »

n'existe pas dû au fait que Sheikh

Mohammed Ibn Abdel-Wahhâb

n'est pas venu avec un dogme ou

une méthodologie propre à lui

pour attribuer cette da’wa à son

nom. En conséquence, le « Wahhabisme » n’est pas plus

qu’une dénomination inventée pour aliéner le public des

écrits de Mohammed Ibn Abdel-Wahhâb et pour le

représenter comme quelqu'un qui a son propre madhab

et qui contredit les imams du passé44

.

Le « Wahhabisme » est aujourd'hui devenu un mythe

populaire dans les cercles islamophobes. Une des raisons

les plus apparentes pour laquelle les islamologues

fabulent en inventant ces nouveaux termes non reconnus

auprès des savants musulmans est simplement parce

qu'ils ne sont pas capables de mener des recherches

comparatives entre les idéologies de sectes musulmanes

d’une part et les œuvres historiques de savants

musulmans contemporains et modernes, de l'autre45

.

L’histoire a démontré que Mohammed Ibn Abdel-

Wahhâb n'est pas venu avec une nouvelle tradition

religieuse comme certains semblent croire. Pour

43 Abdel-Aziz Ibn Baz, « Fatawa al-Sheikh Ibn Baz » [Recueil de

Fatwas de Sheikh Ibn Baz], 3/1306 44 Voir le site officiel de Sheikh al-Fawzan sur ce lien 45 Ainsi, Stéphane Lacroix a rédigé un article dans une revue

« académique » qu’il a intitulé « Les courants islamiques après le 11

septembre ». Le professeur ne comprend pas qu’il n’y a pas eu de

nouvelles sectes ou « courants islamiques » après le 11 septembre dû

au fait qu’il n’a aucune notion des développements des sectes

musulmanes à travers l’histoire.

comprendre la réalité de l'appel (da’wa) de Mohammed

Ibn Abdel-Wahhâb, nous devons d’abord retracer

l’histoire de la péninsule Arabique à son époque...

L'appel de Mohammed Ibn Abdel-Wahhâb al-Najdi

Avant la da’wa de Sheikh Mohammed Ibn Abdel-

Wahhâb, la région du Najd se trouvait dans une situation

où la majorité des gens furent ignorants des

enseignements fondamentaux de l'Islam.

L’analphabétisme largement répandu, ce fut l’époque où

l’Arabie se trouva dans « l’Âge Obscur » où les

croyances de bases musulmanes ne furent plus

enseignées. Les gens adoraient tombes, statues et arbres

et prenaient les morts comme intermédiaires pour

invoquer leur Seigneur. D’un point de vue global, leur

situation fut, à plus d’un égard, très semblable à la

période préislamique du

paganisme…46

Il semble que les islamologues

refusent de commenter cette

époque et s’ils le font, ils la

décrivent comme une période

riche et culturellement diversifiée.

Ceci, bien entendu, est une simple

façon d’ignorer les exploits

fabuleux qu’avait réalisés Sheikh

Mohammed Ibn Abdel-Wahhâb

sur le plan religieux, pédagogique,

structurel et politique.

Cependant, c'est dans ce contexte historique qu'Ibn

Abdel-Wahhâb a fait renaître la Sounna Prophétique,

qu’il a relancé les enseignements originaux de l'Islam et

qu’il a commencé à instruire la population. Le dogme

(aqida), la jurisprudence (fiqh), le Hadith, le Tafsir ainsi

que toutes les autres sciences religieuses s’enseignaient à

nouveau et bénéficiaient largement à la communauté47

.

Tout comme l’Imam Ahmed, Ibn Taymiya et d'autres,

Ibn Abdel-Wahhâb fut un des rénovateurs de l'Islam

orthodoxe et tentait de ramener sa communauté vers la

pratique et la compréhension correcte de l'Islam. Sheikh

Al-Albani mentionne :

« Ensuite, ce fut Sheikh al-Islam Mohammed Ibn Abdel-

Wahhâb qui a fait renaître cet appel dans le Najd à une

époque où la région se trouvait dans un état

d’abomination ténébreuse et où le paganisme fut

prédominant dans tout le pays. Les gens de la région

sont redevenus instruits grâce aux enseignements de

Sheikh Al-Islam (Ibn Taymiya) de qui il (c.-à-d.

46 Madiha Darwish, « Tarigh al-Dawla al-Sa’udiya » [L’Histoire de

l'Etat Saoudien] 47

Dr Abdel-Aziz Ibn Mohammed al-Hujaylan, « Al-Fiqh Wal-

Fuqaha Fil-Mamlaka al-Arabiya al-Sa’udiya...” [La Jurisprudence et

les savants de Fiqh au Royaume d’Arabie Saoudite], p.37

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

11

Manuscrit de l’évaluation du recueil de hadiths « Sahih Abu Dawud » par Sheikh al-Albani.

Mohamad Ibn Abdel-Wahhâb) a bénéficié en lisant ses

livres... »48

En étudiant ces développements dans la région du Najd

dans un contexte historique, l'appel d'Ibn Abdel-Wahhâb

ne semble n’être rien de plus qu'une extension de la

longue succession de savants d'Ahl al-Sounna qui

commence par les compagnons du Prophète , les

savants majeurs des premières trois générations, les

quatre Imams, les Muhaddithin tout en poursuivant avec

Ibn Taymiya, ses étudiants et les autres grands savants

musulmans49

. Les enseignements de tous ces savants

sont basés sur la même fondation

idéologique au point que plusieurs

« spécialistes de l’Islam » en Occident

ont décrit des savants comme Ibn

Taymiya et al-Souyouti comme étant

des « Wahhabites », bien que Sheikh

Ibn Abdel-Wahhâb soit né plusieurs

siècles après eux50

. Si vraiment l'appel

à l’Islam de tous ces savants est

considéré comme du « Wahhabisme »,

alors le Prophète Mohammed et ses

compagnons peuvent aussi bien être

appelés « Wahhabites ».

Toutefois, le professeur Lacroix a une

autre façon de voir les choses. Dans

son article, il développe une thèse

conspirationniste et prétend que

Sheikh al-Albani a eu des ennuis avec les savants

saoudiens dû au fait qu'il aurait « remis en question leurs

fondations méthodologiques » :

« Cependant, l'opposition qu’a endurée al-Albani de la

part de l'établissement religieux Wahhabite ne fut pas

uniquement intellectuelle. En remettant en question les

fondations méthodologiques sur lesquelles le

Wahhabisme avait bâti sa légitimité, il avait également

défié leur position dans le champ religieux saoudien. »

Ici, nous voyons clairement comment les hallucinations

s’emparent du professeur Lacroix qui, dans sa nouvelle

déception, prétend que Sheikh al-Albani a défié la

position des savants saoudiens en remettant en question

leurs fondations. Mais pourquoi donc ? Craignaient-ils

que ce savant albanais devienne le futur Mufti de

l'Arabie Saoudite, le ministre des Affaires religieuses, ou

est-ce qu'ils le considéraient comme un héritier potentiel

du trône ? Quoi qu’il en soit, analysons de plus proche

48 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Haqiqatou al-Da’wa al-

Salafiya » [La Réalité de la Da’wa al-Salafiya] p.156 49 Saleh Ibn Mohammed Âl al-Sheikh, « Al-Minhaj al-Fiqhi Li

A’imma al-Da’wa al-Salafiya Fil Najd » [La Méthodologie

Jurisprudentielle des Grands Savants Salafis du Najd], p. 93 50 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Silsila al-Ahadith al-

Sahiha » [Recueil de Hadiths Authentiques], 8/1

les fondations méthodologiques dont parle notre

professeur.

Sheikh Mohammed Ibn Abdel-Wahhâb, les générations

successives des savants du Najd ainsi que tous les autres

savants saoudiens n'avaient pas de principes

indépendants. Or, ils suivaient tous les fondations

méthodologiques51

connues et maintenues par les

Compagnons, les quatre Imams et les savants d'Ahl al-

Sounna au passé52

. Ceux-ci s’avèrent être exactement les

mêmes principes sur lesquels se basait Sheikh al-Albani.

Des Fondations « Wahhabites » ?

Les exploits de Sheikh Ibn Abdel-

Wahhâb ne seront jamais appréciés —

voire compris — par ceux qui ne les

ont jamais étudiés, et encore moins

par ceux qui n’ont pas bénéficié d’un

enseignement de base de l'Islam à

travers les œuvres des savants

Musulmans orthodoxes qui permettra

de mettre en corrélation leur credo et

méthodologie indiscernable. Cette

incompréhension a fait que beaucoup

de chercheurs simples d’esprit

comprennent l’œuvre de Sheikh Ibn

Abdel-Wahhâb comme une nouvelle

religion qu’ils taxent alors de

« Wahhabisme ». Dû à leur mépris de

l’Islam et leur refus de mener la moindre étude

approfondie des textes de révélation, ils considèrent

l'appel d'Ibn Abdel-Wahhâb comme une tradition

religieuse qui ne se réfère pas aux œuvres principales de

l’Islam, mais qui se base plutôt sur des écrits apparus

bien après. C’est également ce que prétend Stéphane

Lacroix :

« Dès son début, le Wahhabisme s'est établi en tant que

tradition religieuse qui s’est basée sur quelques livres

clés, aussi bien dans le dogme (aqida) que la

jurisprudence (fiqh). »

Le professeur décrit l'héritage d'Ibn Abdel-Wahhâb

comme une nouvelle tradition religieuse et indépendante

basée sur ses œuvres personnelles et celles de ses

héritiers. Sheikh Ibn Abdel-Wahhâb était sans aucun

doute un réformateur qui a fait revivre les sciences

islamiques dans la péninsule Arabique, mais la plupart

des livres qui se trouvent à la base de l'appel des savants

saoudiens, depuis l’époque de Sheikh Mohammed Ibn

51 Ces fondations sont le Coran et la Sounna, le Consensus, les

Jugements des Compagnons et le Qiyaas juridique. Voir Saleh Ibn

Mohammed Âl al-Sheikh, « Al-Minhaj al-Fiqhi… », p.252-268 52 Saleh Ibn Mohammed Âl al-Sheikh, « Al-Minhaj al-Fiqhi Li

A’imma al-Da’wa al-Salafiya Fi Najd » [La Méthodologie

Jurisprudentielle des Grands Savants Salafis du Najd], p. 251-256

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

12

Manuscrit de « Sahih al-Sira al-Nabawiya », la biographie du Prophète .

Abdel-Wahhâb jusqu'à ce jour, sont des œuvres qui

datent d’avant le temps d’Ibn Abdel-Wahhâb. Dans son

ensemble, les savants du Najd ont bénéficié des savants

d’Ahl al-Hadith53

comme peut facilement être déduit de

leurs écrits, fatwas et propos54

.

En somme, les livres qui sont enseignés dans le

Royaume appartiennent à de grands savants issus du

monde entier. Dans le dogme (aqida) ils ne dépendaient

pas uniquement des ouvrages d'Ibn Abdel-Wahhâb mais

aussi, et surtout, de ceux d’Ibn

Taymiya (Syrie XIIIe siècle) et son

étudiant Ibn Qayim (Syrie XIIIe

siècle) qui ont soutenu et transmis les

croyances originales de l’Islam. Dans

la grammaire arabe une de leurs

références principales est « al-

Ajurrumiya » rédigé par le savant

marocain Mohammed Ibn Ajurrum

(XIVe siècle) et dans la jurisprudence

ils dépendaient en grande partie des

écrits du Sheikh palestinien Abdel-

Ghani al-Maqdisi (XIIe siècle). Dans

la science du Hadith ils revenaient

aux livres du savant syrien al-Nawawi

(XIIIe siècle) et du Muhaddith

égyptien Ibn Hajar al-Asqalani (XVe

siècle) et dans la science de l'héritage

ils dépendaient surtout du livre « al-Rahabiya » du

savant irakien Mohammed al-Rahabi (XIIe siècle).55

Cela confirme la tendance observée à travers l’histoire :

les œuvres des savants du Najd ont toujours eu une

dimension internationale et n’ont jamais été restreintes,

comme le prétendent certains professeurs, à quelques

livres clés d'une tradition religieuse saoudienne.

Une Bande Tribale qui prend contrôle de la Péninsule

Arabique ?

Stéphane Lacroix persiste obstinément dans sa fausse

représentation de la da’wa de Sheikh Ibn Abdel-Wahhâb

et explique comment la conspiration des savants

saoudiens a débuté par une aristocratie :

53 Comme les Imams al-Shafi’i, Malek, Ahmed, al-Bukhari, Muslim,

Abu Dawud, al-Tirmidhi, al-Awza’i, al-Darimi, al-Dar al-Qutni, al-

Bayhaqi, Ibn Hazm, Ibn Hajr, Ibn Abdel-Bar, Ibn Taymiya, Ibn

Qayim ainsi que d’autres savants qui portaient une grande attention

au Hadith. 54 Saleh Ibn Mohammed Âl al-Sheikh, « Al-Minhaj al-Fiqhi Li

A’imma al-Da’wa al-Salafiya Fi Najd » [La Méthodologie

Jurisprudentielle des Grands Savants Salafis du Najd], p. 241-242 55 Dr Abdel-Aziz Ibn Mohammed al-Hujaylan, « Al-Fiqh Wal-

Fuqaha fil-Mamlaka al-Arabiya al-Sa’udiya... »[La Jurisprudence et

les savants de Fiqh au Royaume d’Arabie Saoudite], p.39, 44.

« Cette tradition (c.-à-d. le « Wahhabisme ») fut

monopolisée par une petite aristocratie religieuse du

Najd, qui s'est d’abord concentrée autour de Mohammed

Ibn ‘Abdel-Wahhâb et ses descendants (connus sous les

Âl al-Sheikh) avant de s'élargir à un petit nombre

d'autres familles... les membres de cette aristocratie

étaient devenus les seuls transmetteurs légitimes de la

tradition Wahhabite; dans ce contexte, les savants

indépendants furent exclus parce qu'ils n'avaient pas

reçu de ‘science adéquate’ de ‘savants qualifiés’. »

Plus loin, il insinue que « l'approche

révolutionnaire » d’al-Albani de la

science du Hadith contredisait les

normes saoudiennes puisque cette

approche menait au fait que :

« ... la science du hadith peut être

mesurée selon des critères objectifs

sans qu’ils soient liés à la famille, la

tribu ou à la descendance locale ce

qui a permis une certaine mesure de

méritocratie56

qui fut auparavant

absente. »

Stéphane Lacroix représente la

renaissance de l'Islam au Najd comme

une aristocratie religieuse instaurée

par une famille bourgeoise qui tente de monopoliser la

da’wa en favorisant des tribus locales. Par conséquent,

l'état saoudien est tout sauf une méritocratie dû à la prise

de pouvoir de la « mafia religieuse Wahhabite ». Certes,

tous les moyens sont justifiés pour diaboliser les savants

saoudiens.

Cependant, l'histoire conteste cette allégation du jeune

professeur, car les archives des savants du Najd révèlent

clairement que le seul critère de réussite chez les ulémas

a toujours été la connaissance des différentes sciences de

l’Islam. L’origine tribale ou les liens de famille n’ont

jamais fait d’une personne un savant religieux. Ici, nous

pourrions citer l’exemple du Roi Abdel-Aziz qui avait le

plus grand respect pour les gens de science et était connu

pour avantager les savants aux membres de sa propre

famille57

.

De même, le grand nombre de savants étrangers qui ont

atteint de hauts rangs dans l’établissement religieux

56 NDT La méritocratie est un système qui classe les gens selon leur

mérite. Ce que Lacroix entend par là est que les savants du Hadith en

Arabie, chez les « Wahhabites », n’ont pas de mérite réel (comme la

science, l’intelligence, etc.) puisqu’ils sont uniquement devenus

savants dû à leur origine et à leur appartenance à une certaine famille

ou tribu. Le fait qu’ils aient étudié les sciences islamiques pendant

des décennies n’a, bien entendue, joué aucun rôle, car l’Arabie

Saoudite, avant l’arrivée d’al-Albani fut un pays vide de toute

méritocratie. 57 Al-Zarkali, « Al-Wajiz », p.197

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

13

Couverture de la première revue islamique pour laquelle Sheikh al-Albani a rédigé des articles

saoudien58

est une preuve claire qui le tribalisme et

l’origine locale ne jouent aucun rôle dans la

reconnaissance et l’admission des savants en Arabie

Saoudite. De plus, Stéphane Lacroix sait très bien qu’à

Sciences Po, un arabe d’Arabie Saoudite ou du Yémen,

par exemple, ne sera jamais admis dans leur institut pour

enseigner.

Les islamophobes tentent souvent d’arabiser la religion

musulmane en insinuant que l’Islam est basé sur une

forme de nationalisme ou tribalisme. Cependant, jamais

dans l’histoire la science du Hadith n’a-t-elle été

mesurée selon les liens de famille, les tribus, les classes

sociales, l’origine ou la descendance du Muhaddith. Les

plus grands savants musulmans et narrateurs de hadith

sont une parfaite illustration de cela puisque la majorité

d’eux étaient des non-arabes

souvent très pauvres. Néanmoins,

ça ne les a pas empêchés de

devenir les détenteurs et les

narrateurs de la tradition

prophétique à niveau mondial. Ce

sont eux qui ont transmis les

hadiths et une partie majeure des

sciences islamiques au reste du

monde. Al-Bukhari, Muslim, Abu

Dawud, al-Tirmidhi, Al-Nassa'i,

Ibn Majah furent tous des non-

arabes qui ont instauré les

ouvrages de référence du Hadith

sur lesquels dépend aujourd'hui

toute la communauté musulmane.

La critique « Haddadi » de Lacroix : Al-Albani contre

les Saoudiens

En examinant le développement des assertions du

professeur Lacroix, nous voyons qu’il arrive maintenant

au message principal dans lequel il reflète un conflit

intense entre al-Albani et les savants saoudiens :

« Al-Albani est fortement en désaccord avec les

Wahhabites - et surtout avec leurs représentants

principaux, les ulémas de l'établissement religieux

saoudien – dans le domaine de la jurisprudence (loi). »

De manière globale, Sheikh al-Albani n'était pas en

grand désaccord avec les savants saoudiens dans les

affaires de jurisprudence puisque leur méthodologie dans

58 Parmi eux nous comptons Sheikh Mohammed Aman al-Jami

(Ethiopie), Sheikh Abdel-Razzaq al-A’fifi (Égypte), Sheikh

Mohammed Aman al-Shinqiti (Maurétanie), Sheikh Mohammed

Nasir al-Din al-Albani (Albanie), Sheikh Hammad al-Ansari (Mali),

Sheikh Wasiyullah A’bbas (Inde), Sheikh Mohammed al-Harras

(Egypte) etc.

la déduction de preuve fut identique59

. Il divergeait

évidemment avec eux dans certaines fatwas de la

manière dont divergent tous les savants Sunnites entre

eux dans les affaires de jurisprudence. Ce n’est rien de

spectaculaire pour ceux qui ont une connaissance

superficielle des sciences religieuses au long de

l’histoire islamique et prouve simplement que les

savants d’Ahl al-Sounna font leur propre ijtihad, à

l’inverse des partisans qui suivent aveuglement une

certaine école de principes jurisprudentiels ou un

madhab. De plus, ces différences n'ont pas causé la

moindre animosité entre Sheikh al-Albani et ses

confrères parmi les savants saoudiens comme devient

clair dans les éloges prononcés par deux des

représentants principaux de « l’établissement religieux

saoudiens » à l’époque d’al-Albani. Le premier est

Sheikh Abdel-Aziz Ibn Baz qui a

déclaré qu'il n'a jamais vu, dans

son temps, un savant de Hadith

comme Sheikh al-Albani. L’ancien

mufti a même avoué qu’il a

beaucoup bénéficié de lui et dit

qu’il le considérait comme un des

meilleurs savants de son époque60

.

Le deuxième est Sheikh Ibn

Utheymin qui l'a loué pour ses

œuvres dans le dogme et la

jurisprudence61

et l'a appelé le

Muhaddith de son époque62

ainsi

que le Muhaddith de la région du

Châm63

.

Les savants dans le Royaume Arabe qui ont réfuté al-

Albani ont tous explicitement mentionné dans leurs

réponses que leurs différences n’étaient pas basées sur

des contradictions fondamentales et qu'ils respectaient et

aimaient Sheikh al-Albani64

. Un d'entre eux, Sheikh

Mohammed Aman al-Jami, a déclaré dans sa réfutation

de Sheikh al-Albani :

« Allah, les anges, et ceux présents (dans cette assise)

sont témoins de mes propos dans lesquels je déclare que

j'aime Sheikh al-Albani pour (la cause) Allah. »65

59 Saleh Ibn Mohammed Âl al-Sheikh, « Al-Minhaj al-Fiqhi Li

A’imma al-Da’wa al-Salafiya Fi Najd » [La Méthodologie

Jurisprudentielle des Grands Savants Salafis du Najd], p. 90 60 Sheikh Abdel-Aziz Ibn Baz, “Durus Lil Shaikh Abdel-Aziz Ibn

Baz” (Shabaka al-Islamiya), cours 17 61 Mohammed Ibn Salih al-Utheymin, “Al-Diya’ Al-Lami’ min

Khutab Al-Jawami’” [Etincelles Lumineuse des Sermons de

Vendredi] p.446 62 Muhammad Ibn Salih al-Utheymin, “Sharh Aqidatul Safariniya”

[Explication de la Aqida Al-Safariniya] p.185 63 Les pays du Châm sont le Liban, la Palestine, la Syrie en la

Jordanie. 64 Voir Rabi’ Bin Hadi al-Madkhali, [Les Egarements Limpides

d’Abdul-Latif Bashmel], p. 9 et « A Lighthouse of Knowledge from a

Guardian of the Sunnah », p.41 65 Ibid, p.39

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

14

Ibn Taymiya fut incarcéré dans cette prison, plus de sept siècles avant l’emprisonnement d’al-Albani.

De même, Sheikh al-Tuwayjari a déclaré, tout en

réfutant le savant albanais, que « critiquer al-Albani

permet (à certains) de critiquer la Sounna66

». Malgré

avoir réfuté al-Albani, ces savants partageaient tous sa

méthodologie et ne l’ont jamais accusé d'avoir des

différences fondamentales ou une approche

révolutionnaire du Hadith.

Il y a plus d’une décennie Abdul-Lateef Bashmel, un

Haddadi67

notoire et un ennemi juré de Sheikh al-Albani,

a essayé d’exploiter les réfutations de quelques savants

saoudiens contre le Muhaddith albanais pour porter

atteinte à son intégrité et ameuter les gens contre lui.

Ainsi, il a voulu faire croire que les

réponses des savants saoudiens à Sheikh

al-Albani étaient motivées par une

animosité et une opposition totale à al-

Albani. Malgré que Bashmel se soit

vigoureusement efforcé de diviser

l’unité des savants Salafis68

, ces derniers

ont exposé ses égarements et ont

ouvertement mis en garde contre lui.

Aujourd'hui, Stéphane Lacroix marche

sur les traces d’Abdul-Lateef Bashmel

en suivant des principes Haddadis

indiscernables. De façon identique, il

accentue avec ardeur les différences

entre al-Albani et les savants saoudiens

afin de porter atteinte à leur réputation.

D’une part, les savants saoudiens sont

dépeints comme des malfaiteurs fanatiques qui ne

tolèrent aucune divergence d’opinion alors qu’al-Albani

est, d’autre part, représenté comme un savant dont

l’approche révolutionnaire du Hadith constitue une base

idéologique pour des extrémistes qui finissent par

commettre des attentats terroristes69

.

On pourrait également s'interroger sur la raison pour

laquelle le professeur Lacroix insiste à démontrer toute

cette « hostilité saoudienne » alors qu’il passe sous

silence le conflit intense qui a eu lieu entre al-Albani et

l’établissement religieux syrien. Mohammed Nasir al-

Din al-Albani fut emprisonné à deux reprises en Syrie

après que ses adversaires l’accusent à tort auprès des

autorités. Au début des années soixante, le Sheikh fut

emprisonné pour une période d’un mois dans la

forteresse de Damas, l’endroit où fut incarcéré Ibn

Taymiya sept siècles auparavant. En 1967, al-Albani est

emprisonné pour une deuxième fois, faisant huit mois de

prison dans le nord-est de la Syrie. Tout cela semble

n’être d’aucune importance pour le professeur Lacroix

66 Ibid 67 La secte des Haddadis a été nommée après Mahmoud al-Haddad,

un comptable égyptien connu pour diffamer les savants de la Sounna. 68 Ibid, p.41 69 NDT Ce qui deviendra clair vers la fin de l’article

qui diffame uniquement le Royaume saoudite dans ses

articles et exprime son admiration envers les Saoudiens

occidentalisés qui préconisent une constitution

occidentale pour se débarrasser des valeurs islamiques

dans le Royaume Arabe70

.

Comprendre l’adhésion d'Ibn Adel-Wahhâb au

Hanbalisme

La raison du « profond désaccord » entre al-Albani et les

savants saoudiens est, selon Stéphane Lacroix,

l’appartenance des « Wahhabites » au Hanbalisme :

« Ici, al-Albani fait allusion à une

contradiction fondamentale dans la

tradition Wahhabite : les partisans

Wahhabites ont préconisé une

dépendance exclusive au Coran, à la

Sounna et au consensus d'al-salaf al-

salih (les pieux prédécesseurs).

Cependant, pour leurs fatwas ils se sont

presque uniquement référés à la

jurisprudence Hanbalite. Par

conséquent, ils agissent en tant que

partisans d'une école juridique

spécifique, à savoir le Hanbalisme.»

Dans un autre article, le professeur

Lacroix prétend même qu’al-Albani

reprochait aux savants saoudiens de suivre aveuglément

le madhab Hanbalite :

« Cependant, les Hanbalites contemporains ont eu

tendance à imiter (taqlid), de plus en plus, d’anciennes

fatwas des membres de leur école, au lieu de pratiquer

leur propre interprétation (ijtihad) basé sur le Coran et

la Sounna. C'était un des reproches principaux d’al-

Albani aux Wahhabites qui prétendaient faire du ijtihad

mais avaient tendance à agir comme des Hanbalites. » 71

Depuis le XVIe siècle, les savants du Royaume saoudite

ont adhéré au madhab de l'Imam Ahmed Ibn Hanbal

dans la jurisprudence, tout en prenant en considération

des verdicts d'Ibn Taymiya et Ibn Qayim72

. Initialement,

l'influence du Hanbalisme a marqué la région du Najd

grâce aux circonstances de voyage favorables pour les

étudiants saoudiens qui, avant la période d’Ibn Abdel-

70 NDT Stéphane Lacroix ne formule pas la moindre critique contre

le régime syrien puisqu’il est bien connu que les laïques fanatiques de

la France ont toujours soutenu Bachar al-Assad dans sa répression

des Salafis en Syrie. 71 Stéphane Lacroix et Thomas Hegghammer, « Rejectionist Islamism

in Saudi Arabia : The Story of Juhayman al-‘Utaybi Revisited », p.4 72 Dr Abdel-Aziz Ibn Mohammed al-Hujaylan, « Al-Fiqh Wal-

Fuqaha fil-Mamlaka al-Arabiya al-Sa’udiya... » [La Jurisprudence et

les savants de Fiqh au Royaume d’Arabie Saoudite], p.223

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

15

En 1967, al-Albani fait huit mois de prison à al-Hasakah, dans le nord-est de la Syrie.

Wahhâb, voyageaient à Damas (Syrie) et à Nables

(Palestine) où ils assistaient au cours de savants

Hanbalites. De retour au Najd, ils transmettaient la

science qu’ils avaient acquise dans leurs régions73

.

Cependant, il est important de bien saisir ce qui est

voulu par cette adhésion au Hanbalisme. Dans une lettre

de Sheikh Abdoullah al-Sana’âni à Sheikh Mohammed

Ibn Abdel-Wahhâb, le savant yéménite lui demanda de

quelle manière les savants du Najd adhéraient au

madhab Hanbalite :

« Que voulez-vous dire lorsque vous dites que vous

suivez le madhab de l'Imam Ahmed? Le suivez-vous

aveuglément ou suivez-vous sa méthodologie dans la

pratique du ijtihad? »

Sheikh Mohammed Ibn Abdel-

Wahhâb répondit avec les paroles

suivantes :

« Toute déclaration et tout acte doit

être mesuré aux paroles et aux

actions du Prophète . Ce qui est en

accord avec celles-ci est accepté, et

ce qui les oppose est rejeté, peu

importe la personne qui tient les

propos. Aucune priorité n’est

donnée aux opinions personnelles

sur le Coran et la Sounna Prophétique. Nous suivons les

principes de l'Imam Ahmed de la façon qui fut

mentionnée par Ibn Qayim a dans son livre ‘I'lâm El

Muwaqqi'în’…Voici ce que nous voulons dire quand

nous disons que notre madhab est le madhab de l'Imam

Ahmed. »74

Bien que les savants de la péninsule Arabique aient

toujours attaché une grande importance scolastique à

l’œuvre de l'Imam Ahmed, ils ne suivaient pas

aveuglément son madhab. Les archives historiques

attestent toutes qu'ils abandonnaient le jugement du

madhab si celui-ci était en contradiction avec un hadith

ou avec toute autre preuve claire75

. Le madhab Hanbalite

a été utilisé en tant que fondation dans la jurisprudence

ce qui est considéré comme un élément facilitateur pour

apprendre le fiqh. Cependant, Sheikh Ibn Abdel-Wahhâb

a déclaré explicitement que ses fatwas n'étaient jamais

restreintes à un madhab précis :

73 Dr Abd-Allah al-Turki, « Al-Madhab Al-Hanbali » [Le Madhab

Hanbalite], Vol.1, p.291-295 74 Sheikh Mohammed Ibn Abdel-Wahhâb, « Al-Durar al-Saniya Fil

Ajwiba al-Najdiya » [Les Perles Inestimables Tirées des Réponses du

Najd] Vol.4, p.21 75 Dr Abdel-Aziz Ibn Mohammed al-Hujaylan, « Al-Fiqh wal-

Fuqaha fil-Mamlaka al-Arabiya al-Sa’udiya... » [La Jurisprudence et

les savants de Fiqh au Royaume d’Arabie Saoudite], p.43 et Saleh

Ibn Mohammed Âl al-Sheikh, « Al-Minhaj al-Fiqhi Li A’imma al-

Da’wa al-Salafiya Fi Najd » [La Méthodologie Jurisprudentielle des

Grands Savants Salafis du Najd], p. 361

« Nous ne nous limitons pas à un madhab spécifique. Si

nous trouvons une preuve tangible dans un des quatre

madhabs, quel qu’il soit, nous l'acceptons et nous nous y

accrochons. » 76

Le Sheikh a également fait remarquer que la priorité

devait être donnée au Coran et à la Sounna prophétique

sur les jugements de son propre madhab :

« Si nous tombons sur un texte clair du Coran ou de la

Sounna qui n'a pas été abrogé ni spécifié, qui ne

contredit rien de plus tangible et qui a été accepté par

un des quatre Imams77

, alors nous acceptons cette

décision et abandonnons le madhab…Nous ne suivons

pas aveuglément les savants, et cela dans aucun

domaine, parce que la parole de

chacun peut être acceptée ou rejetée,

à l’exception des paroles du Prophète

. » 78

Ibn Abdel-Wahhâb fut suivi dans

cette méthodologie par les savants du

Royaume saoudite qui exigeaient que

leurs étudiants délaissent le madhab

si une preuve contradictoire leur

devenait apparente79

. Et cela

correspondait avec la méthodologie

de Sheikh al-Albani qui dit :

« Par conséquent, nous disons qu'en nous accrochant à

tout ce qui a été rapporté dans la Sounna de façon

authentique, personne ne pourra nous accuser d’avoir

contredit intentionnellement le madhab des imams ou

leur méthodologie, même si nous contredisons certains

de leurs verdicts. »80

Tout comme al-Albani81

, Ibn Abdel-Wahhâb bénéficiait

des jugements des quatre madhabs et tout comme

Sheikh al-Albani82

, il rejetait la petitesse d'esprit cachée

dans le suivi aveugle des madhabs en donnant la priorité

aux preuves du Coran et de la Sounna sur les jugements

76 Dr. Abdel-Muni’m Abdel-Athim Khayrah, « Al-Qada fil-Mamlaka

al-Arabiya al-Sa’udiya » [Le Système Juridique dans le Royaume de

l’Arabie Saoudite], p.68 77 Sheikh al-Albani ne voyait pas ceci comme étant une condition.

Cependant, les fatwas dans lesquelles al-Albani contredit l’ensemble

des quatre madhads sont si rares qu'elles n'auraient jamais pu mener à

un conflit profond avec les savants saoudiens. 78 Sheikh Mohammed Ibn Abdel-Wahhâb, « Al-Durar al-Saniya Fil

Ajwiba al-Najdiya » [Les Perles Inestimables Tirées des Réponses du

Najd] Vol.4, p.10 79 Saleh Ibn Mohammed Âl al-Sheikh, « Al-Minhaj al-Fiqhi Li

A’imma al-Da’wa al-Salafiya Fi Najd » [La Méthodologie

Jurisprudentielle des Grands Savants Salafis du Najd], p.364-366 80 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Asl Sifat Salat al-Nabi » [La

Description de la Prière du Prophète, Version Originale], p.32 81 Ibid, p.23 82 Voir Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Haqiqatou al-Da’wa

al-Salafiya » [La Réalité de la Da’wa al-Salafiya] p.170

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

16

Manuscrit du « Recueil de hadiths faibles et inventés » par Sheikh al-Albani

du madhab. Ses livres contiennent de nombreuses fatwas

dans lesquelles il contredit les décisions de l'école

Hanbalite83

; et ce fut également la méthodologie

adoptée par les savants saoudiens qui l’ont succédé

jusqu'à ce jour84

. Ils ont adhéré au Hanbalisme en

considérant l’école comme une structure générale de

principes jurisprudentiels sans déployer acharnement ni

suivi aveugle. Leur référence décisive reste

invariablement le Coran et les hadiths de la Sounna

Prophétique suivant la compréhension des pieux

prédécesseurs85

.

Tout ceci invalide la théorie du professeur Lacroix qui

repose sur une contradiction fondamentale entre al-

Albani et la tradition « Wahhabite ».

Rappelons que la chose que blâmait

réellement le savant albanais était le

courant où les gens suivent

aveuglément un madhab sans diverger

sur le moindre point, sans demander de

preuves et en abandonnant le jugement

interprétatif (ijtihad)86

. Une

contradiction fondamentale entre al-

Albani et les savants saoudiens aurait

certainement été présente si ces

derniers suivaient aveuglément le

madhab Hanbalite. Or, ce ne fut pas le

cas avec Sheikh Ibn Abdel-Wahhâb

qui a pavé le chemin menant à la

réouverture des portes de l’ijtihad

après que celles-ci s’étaient fermées

lors de la chute de Bagdad au XIIIe

siècle. Ironiquement, le Sheikh fut reproché de faire du

ijtihad pendant sa vie et ce n’est qu’après son décès que

ses adversaires l'ont faussement accusé de suivre

aveuglément un madhab87

.

Il y a deux groupes de gens qui adhèrent au madhab

Hanbalite. Les premiers — auxquels appartiennent les

savants saoudiens — font leur propre ijtihad et donnent,

en cas de désaccord, priorité aux preuves religieuses sur

les jugements du madhab. La deuxième catégorie est

composée d’individus qui sont ancrés dans la

méthodologie du suivi aveugle du madhab88

. Vu que le

83 Saleh Ibn Mohammed Âl al-Sheikh, « Al-Minhaj al-Fiqhi li

A’imma al-Da’wa al-Salafiya fil-Najd » [La Méthodologie

Jurisprudentielle des Grands Savants Salafis du Najd], p.363 et « Al-

Durar... », Vol.7, p.285 84 Sayid Mohammed Ibn Ibrahim, « Tarigh al-Mamlaka al-

Sa’udiya » [Historique du Royaume Saoudien], p.136 85 Dr Abdel-Aziz Ibn Mohammed al-Hujaylan, « Al-Fiqh Wal-

Fuqaha fil-Mamlaka al-Arabiya al-Sa’udiya... » [La Jurisprudence et

les savants de Fiqh au Royaume d’Arabie Saoudite], p. 227 86 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Haqiqatou al-Da’wa al-

Salafiya » [La Réalité de la Da’wa al-Salafiya] p.170 87 Saleh Ibn Mohammed Âl al-Sheikh, « Al-Minhaj al-Fiqhi Li

A’imma al-Da’wa al-Salafiya fi Najd » [La Méthodologie

Jurisprudentielle des Grands Savants Salafis du Najd], p. 406 88 Ibid, p. 172,173

professeur Lacroix n'a pas été capable de discerner cette

différence, il s’est imaginé que la méthodologie de

Sheikh al-Albani fut en contradiction fondamentale avec

l'approche des savants saoudiens dû, bien entendu, à leur

adhésion à l'école Hanbalite. Si le professeur Lacroix

avait pris la peine d’examiner brièvement les fondations

de la jurisprudence Hanbalite ou s’il s’était fait une idée

plus au moins exacte des fatwas des savants saoudiens,

ses hypothèses farfelues, son audace et son ignorance

insolente n'auraient jamais vu le jour dans ses articles.

Cela soulève à nouveau la question de l’intégrité de ce

professeur qui ne dispose pas des capacités nécessaires

pour analyser les textes sources dans un domaine qu’il

prétend maitriser.

Attiser un Conflit Imaginaire avec

une Parole Révolue

Pour démontrer la « contradiction

fondamentale » supposée entre al-

Albani et les savants saoudiens, le

professeur Lacroix avance l’argument

suivant:

« D'après al-Albani, cela s’applique

aussi à Mohammed Ibn 'Abdel-

Wahhâb qu'il décrit comme ‘salafi

dans le credo, mais pas dans le fiqh’.»

À une seule occasion, Sheikh al-

Albani a déclaré que l’engagement de Sheikh Ibn Abdel-

Wahhâb dans son appel au Tawhid dans une région

totalement infectée de polythéisme lui prenait tellement

de temps qu’il n’a pas assez pu se consacrer à la science

du Hadith89

. Selon al-Albani, il aurait par conséquent fait

des évaluations de hadith incorrectes dans le domaine de

la jurisprudence. Pour appuyer son assertion, al-Albani

reprochait Sheikh Ibn Abdel-Wahhâb d’avoir jugé

authentique (sahih)90

un hadith que la majorité des

89 Avant l'arrivée du Sheikh Ibn Abdel-Wahhâb, les livres de

référence du Hadith furent absents dans région du Najd. Ce n'est

qu’avec la venue du Sheikh que ces livres ont massivement été

propagés dans la région. De même, les enfants de Sheikh Ibn Abdel-

Wahhâb étaient des Muhaddithin qui enseignaient des livres de

hadith tel que Sahih al-Bukhari. Les livres de hadith ont uniquement

été répandus dans le Najd dû au fait que les savants de la région y

attachaient une grande importance. Que ces savants aient traité plus

souvent les livres de fiqh que les livres de hadith est parce que la

population était plus en besoin de la jurisprudence que la science du

Hadith. Source : Sheikh Saleh Âl al-Sheikh « Al-farq Bayn Kutub al-

fiqh wa Kutub al-Hadith » [La Différence entre les livres de

Jurisprudence et les livres du Hadith] 90 Il s’agit d’un hadith rapporté par Abu Said al-Khudri qui

mentionne l’invocation de celui qui sort de chez lui pour aller à la

mosquée (Ahmed 11156). Sheikh Mohammed Ibn Abdel-Wahhâb a

mentionné ce hadith dans son livre « Âdab al-Machi Ila al-Masjid »

[L’étiquette de celui qui se dirige vers la Mosquée]

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

17

Tout comme les savants saoudiens, al-Albani se basait sur le Coran et la Sounna selon la compréhension des premières générations

savants du Hadith avaient rendu faible (da’if)91

. Il a

ensuite déclaré que son intention n’était pas de ternir

l’image du Sheikh puisqu’un acte pareil pouvait

uniquement venir d’un ennemi de l'Islam92

. Or, Sheikh

al-Albani s’est plus tard rendu compte que sa parole fut

inexacte93

. Il s'est excusé pour ses propos tenus à l’égard

de Sheikh Ibn Abdel-Wahhâb et est revenu sur cette

accusation94

. Au passé, plusieurs savants de Hadith ont

témoigné que les écrits d'Ibn Abdel-Wahhâb prouvent

bien qu'il prêtait une grande attention

au Hadith dans tous ses jugements95

.

Et jusqu'à ce jour, les Muhaddithin

témoignent encore de la grande

connaissance que possédait le Sheikh

dans le domaine du Hadith96

.

Dans ses œuvres, Sheikh al-Albani ne

manquait pas une occasion pour louer

Ibn Abdel-Wahhâb. À nombreuses

reprises, il l'a appelé le réformateur

du Tawhid de la péninsule Arabique

et il l’a défendu contre ceux qui le

critiquaient97

. Curieusement, Lacroix

a négligé toutes ces apologies à l’égard d'Ibn Abdel-

Wahhâb et a soigneusement choisi l’unique parole d’al-

Albani dans laquelle il a critiqué Ibn Abdel-Wahhâb —

et qu’il a rétracté par la suite – pour en faire l’argument

clé de son article. En amplifiant cette critique de Sheikh

al-Albani, le professeur Lacroix a établi un conflit fictif

entre Sheikh al-Albani et Sheikh Ibn Abdel-Wahhâb

basé sur des « contradictions fondamentales dans

l'approche du Hadith ».

91 Sheikh al-Albani avait critiqué ce hadith aussi bien dans la chaîne

de narrateurs (sanad) que dans son texte (matn) (« Silsila al-Ahadith

al-Da’ifa » no.24) 92 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Haqiqatou al-Da’wa al-

Salafiya » [La Réalité de la Da’wa al-Salafiya] p.183-186 93 Sheikh Saleh Âl al-Sheikh avait réagi à la parole de Sheikh al-

Albani dans laquelle il disait que Sheikh Ibn Abdel-Wahhâb ne

différenciait pas entre le hadith sahih et da’if dû au fait qu’il a rendu

faible le hadith en question. Sheikh Saleh explique que c'est l'avis

personnel du Sheikh (al-Albani) et que d'autres Muhaddithin au

passé, comme al-Hafidh Ibn Hajr (et al-Hafidh al-Dimyata), avaient –

tout comme Ibn Abdel-Wahhâb – rendu authentique ce même hadith.

Sheikh Saleh conclut en disant que ces divergences dans l’évaluation

des hadiths ne doivent pas mener à ce genre de critique. Source :

Sheikh Saleh Âl al-Sheikh « Al-farq Bayn Kutub al-fiqh wa Kutub al-

Hadith » [La Différence entre les livres de Jurisprudence et les livres

du Hadith] 94 Voir Sheikh Rabi’ Bin Hadi al-Madkhali, « Sharh Kitab al-Iman li

Sahih al-Boukhari » [Explication du Chapitre de la Foi de Sahih al-

Bukhari] Cassette no. 2, face B. 95 Saleh Ibn Mohammed Âl al-Sheikh, « Al-Minhaj al-Fiqhi li

A’imma al-Da’wa al-Salafiya fi Najd » [La Méthodologie

Jurisprudentielle des Grands Savants Salafis du Najd], p. 244-246 96 Le grand Muhaddith à cette époque, Sheikh Abdel-Mouhsin al-

Abbad, fait partie des nombreux savants de Hadith contemporains qui

ont déclaré qu’Ibn Abdel-Wahhâb faisait partie des Muhaddithin. 97 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Silsila al-Ahadith al-

Sahiha » [Recueil de Hadiths Authentiques], Vol.5., p.302, Vol.1,

p.8, etc.

Ainsi, le professeur Lacroix passe d’une invention à

l’autre et son article devient un vrai tissu de fables:

« De plus, pour al-Albani, être un ‘salafi dans le fiqh’

adéquat implique qu’on fasse de la science du Hadith le

pilier central du procédé jurisprudentiel, car les hadiths

en soi peuvent fournir des réponses à des sujets qu’on ne

retrouve pas dans le Coran, sans devoir dépendre de

l'école juridique. »

Comme mentionné précédemment,

Sheikh Ibn Abdel-Wahhâb et tous les

autres savants saoudiens ont toujours

considéré les hadiths— accompagnés

du Coran — comme étant le pilier

essentiel de tout verdict religieux.

Par conséquent, cela ne peut être

considéré comme une particularité

‘révolutionnaire’ et distinctive de

Sheikh al-Albani. Cependant, dans

les affaires de fiqh pour lesquelles il

n'y avait pas de preuve claire dans

les hadiths prophétiques ou versets

coraniques, ils se référaient aux différents jugements de

l’école juridique Hanbalite alors qu’al-Albani se référait

également aux décisions de savants en dehors des quatre

imams. Stéphane Lacroix a interprété cette différence

d'application pratique dans ce cas particulier – qui est

d’ailleurs très rare – comme une différence dans la

méthodologie. Il s’agit d’une perception erronée qui est

évidente puisque nous parlons de cas où les questions

religieuses ne contiennent pas de hadiths suffisamment

clairs pour fournir une preuve décisive. Malgré cette

différence, les savants saoudiens ainsi qu'al-Albani,

considéraient tous le Hadith comme un support

indispensable dans le fiqh pour clarifier des décisions.

Leur divergence n'avait aucun rapport avec le fait de

rendre la science du Hadith le pilier essentiel de la

jurisprudence ou avec le fait que les hadiths en soi

fournissent des réponses qui ne peuvent être trouvées

dans le Coran, car nous parlons d'une situation

spécifique dans laquelle il n'y a pas de hadiths

disponibles pour pouvoir fournir une réponse claire à

une matière juridique.

Il est connu que dans ses réfutations, Sheikh al-Albani

mentionnait toujours, et de façon très précise, les défauts

liés à la méthodologie des gens qu'il réfutait. Dans le cas

présent, si la dépendance secondaire des savants

saoudiens au madhab Hanbalite avait été une

contradiction fondamentale ou un défaut important, al-

Albani l’aurait certainement signalé dans une de ses

réfutations. Or, cela ne s'est jamais produit.

Finalement, il doit être souligné que les jugements

d’ijtihad d’al-Albani dans lesquels il a contredit les

verdicts de l’ensemble des quatre madhabs

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

18

Dans son livre « al-Tawhid Awwalan », al-Albani explique que le Tawhid passe avant toute chose.

simultanément sont si peu qu’il est inconcevable que

cela ait pu aboutir à une forme de conflit quelconque.

Une Approche Révolutionnaire du Hadith ?

Après avoir mis en place le conflit « Albano-

Wahhabite » qui repose sur des différences

méthodologiques supposées dans le

Hadith, Lacroix tente de démontrer

qu’al-Albani adoptait une approche

révolutionnaire du Hadith:

« Comment al-Albani, avec ses origines

sociales et ethniques peu distinguées, a-

t-il réussi à occuper une place tellement

prestigieuse dans un domaine qui fut

longuement monopolisé par une élite

religieuse dans la région saoudite du

Najd ? La réponse, comme nous verrons

à travers l'exemple d'al-Albani lui-

même et certains de ses disciples, se

trouve dans son approche

révolutionnaire du Hadith. »

Ainsi, le professeur de Sciences Po

prétend qu’al-Albani favorisait « une

nouvelle approche dans la critique du Hadith » qui

mettrait au défi « le monopole même de l’aristocratie

religieuse Wahhabite ». De plus, la méthode du Sheikh

aurait un « pouvoir révolutionnaire » selon Lacroix qui

semble persuadé du bien-fondé de ses opinions.

En analysant la méthodologie des grands savants du

Hadith de manière comparative, on peut facilement

conclure qu’al-Albani n’a jamais adopté une approche

révolutionnaire du Hadith. Il n’a pas instauré de

nouveaux principes dans la science du Hadith, ni a-t-il

inventé de nouvelles règles dans sa méthodologie de

critique. Toutefois, le professeur Lacroix avance

plusieurs arguments qu'il croit soutenir sa thèse. Il

déclare en premier lieu:

« La mère de toutes les sciences religieuses devient par

conséquent la "science du Hadith" qui vise à réévaluer

l'authenticité de hadiths connus. »

Dans ses écrits, Sheikh al-Albani a mentionné de

manière systématique que toutes les sciences religieuses

sont basées sur le Coran et la Sounna prophétique (c.-à-

d. les hadiths) suivant la compréhension des pieux

prédécesseurs. Quant à la science qu’il considérait

comme la plus importante de toutes, alors il faut savoir

que le Sheikh fut d’avis que c’était la science du

Tawhid98

. C’est d’ailleurs pourquoi il a rédigé un livre

intitulé « Le Tawhid avant toute chose »99

où il explique

que la mère de toutes les sciences religieuses est l'étude

de l'adoration unique d'Allah sans Lui attribuer

d’associés dans les différentes formes d'adoration. Par

conséquent, il considérait l’étude du Coran, le Hadith, le

fiqh et toutes les autres sciences religieuses comme un

moyen d'atteindre le but pour lequel l'homme fut créé:

l'adoration unique du Seigneur de

l’Univers. Vu que Stéphane Lacroix

n’a pas pu ramener la moindre

déclaration de Sheikh al-Albani

indiquant qu’il place la science du

Hadith au-dessus de l'étude du Coran

et des autres sciences islamiques, on ne

peut que conclure une des deux choses

suivantes : Lacroix est ou bien un

trompeur audacieux ou bien quelqu’un

qui est ignorant des opinions réelles de

Sheikh al-Albani. En outre, il y a de

nombreuses déclarations dans

lesquelles Sheikh al-Albani approuve

les jugements spécifiques ainsi que la

méthodologie globale des savants

majeurs du Hadith à travers les siècles.

Ceci annule explicitement la thèse

farfelue d'une « approche

révolutionnaire du Hadith. »

Al-Albani et le Raisonnement Indépendant

Selon le professeur Lacroix, le premier aspect dans

l'approche révolutionnaire d'al-Albani du Hadith est

l'abandon de la raison :

« Selon al-Albani, le raisonnement indépendant doit être

exclu du procédé : la critique du matn (le texte du

hadith) devrait être exclusivement formelle, c.-à-d.

grammaticale ou linguistique ; seulement le sanad (la

chaîne de narrateurs du hadith) peut réellement être mis

en question. »

Voici, une fois de plus, une série de déclarations

malhabiles du professeur. Sheikh al-Albani a toujours

été partisan du raisonnement indépendant, que ce soit

globalement dans le domaine des sciences islamiques

ou, plus spécifiquement, dans la science du Hadith. En

98 Le Tawhid, souvent traduit par « monothéisme », est le fait de

rendre Allah unique dans l'adoration sans ne rien Lui associer.

L'appel au Tawhid fut le message principal de toutes les religions

monothéistes, issues du même Dieu Unique. Non seulement le

Tawhid est-il considéré comme le premier et le plus important des

cinq piliers de l’Islam, c’est également le premier des dix

commandements du Christianisme : « Un seul Dieu tu aimeras et

adoreras parfaitement ». 99 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Al-Tawheed Awalan Ya

Du’at al-Islam » [Ô Prêcheurs de l’Islam: Le Tawhid avant toute

chose], p.6-11

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

19

Un hadith contient une chaine de transmission (sanad) jusqu’au Prophète et un contenu textuel (matn)

outre, al-Albani était connu pour inciter ses étudiants à

ne pas le suivre aveuglément et à mener leurs propres

recherches de façon indépendante. Le Sheikh

comparerait alors les résultats de ses étudiants avec les

siens et ils bénéficieraient tous les uns des autres100

.

En se lançant dans la science du Hadith, le professeur

Lacroix croit étaler sa science et ses connaissances

d’islamologue. Or, il s’exprime sur des sujets dont il ne

saisit même pas les notions de base.

En déclarant que Sheikh al-Albani

n’analysait pas le continu du hadith101

(matn), il tente de recycler un vieil

outil de propagande déployé par les

orientalistes pour dénigrer les

Muhaddithin. En effet, ce fut un

moyen pour des orientalistes comme

Ignác Goldziher102

et Alfred

Guillaume103

de représenter les

savants du Hadith comme des gens

qui n'utilisent pas de raisonnement

indépendant et qui approuvent

systématiquement le matn tant que la chaîne de

narrateurs (sanad) est correcte104

.

À première vue, il peut paraître que les Muhaddithin se

sont uniquement concentrés sur la chaîne de narrateurs

sans avoir pris en considération le matn. C’est pourquoi

certains orientalistes ont accusé les savants du Hadith de

délaisser tout raisonnement. Or, cette thèse se heurte aux

réalités des sciences musulmanes puisque la critique du

contenu ou texte du hadith (matn) a toujours existé et

100 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Al-Rawda al-Dani fil

Fawa’id al-Hadithiya lil-Allama Al-Albani », p.9 101 Dans la Sounna prophétique chaque hadith est précédé d’une

chaîne de narrateurs qui monte du dernier Mouhaddith qui a compilé

les hadiths (comme al-Bukhari ou Muslim) jusqu'aux compagnons

qui ont rapporté le hadith du Prophète Mohammed . 102 Ignác ‘Yitzhaq Yehuda’ Goldziher fut un orientaliste hongrois juif

qui rejeta la méthodologie des Muhaddithin en prétendant que celle-

ci ne comprenait pas l'étude du matn. Ainsi, il a établi son approche

personnelle dans l’analyse du matn ayant l’audace de rendre faible

les hadiths qui mentionnent les vertus de la visite de la Mosquée

sacrée d’al-Aqsa. Voir « Mohammedanische Studien », 2e imp.

Hildesheim 1961. 103 Alfred Guillaume fut un Orientaliste anglais qui, par sa critique du

matn, a fait la fabuleuse « découverte » que la Mosquée d'Al-Aqsa

n'est pas située à Jérusalem, mais à Jirana (40 kilomètres de la

Mecque). Voir « Où se trouvait la Mosquée d’al-Aqsa? » Al-

Andaluse, Madrid, 1953 p. 323-336. Les critiques du matn de

Goldziher et Guillaume furent motivées religieusement puisqu’ils ont

uniquement rendu faibles ces hadiths dans le but de représenter la

Palestine comme n'ayant aucun patrimoine musulman. D'autres

orientalistes tendancieux comme Joseph Schacht et Arent Jan

Wensinck ont aussi développé une critique personnelle du matn pour

ternir l’image de l’Islam. Il s’agit de personnes qui, durant toute leur

vie, ont étudié la science du Hadith dans le but unique de diffamer la

religion musulmane de façon « académique ». 104 Dr Mohammed Mustafa al-A’thami, « Minhadj al-Naqd I’nd al-

Muhaddithin » [La Méthodologie de la Critique employée par les

Muhadithin], p. 127-149.

peut uniquement se faire en stimulant l’intellect et en

employant le raisonnement105

.

Une simple recherche dans la science du Hadith

confirmera avec certitude que lors des quatorze siècles

passés, la méthodologie de l’évaluation du Hadith des

Muhaddithin a toujours contenu l’analyse de la chaîne

de narrateurs ainsi que l’une analyse du matn106

. Les

critiques de la chaîne et du matn ont chacun leurs

propres conditions et sont évalués de

façon indépendante107

. De plus, la

critique du matn est loin d'être

simplement grammaticale108

comme

le prétend Stéphane Lacroix. Ainsi,

le matn peut être mis en question

scolastiquement et empiriquement

tout comme c’est le cas pour le

sanad. Et cela, bien évidemment,

peut uniquement se faire avec un

raisonnement indépendant109

. Cette

approche est précisément la

méthodologie adoptée par Sheikh al-

Albani qui, dans son recueil de hadiths faibles, a jugé

faibles de nombreux hadiths uniquement à cause d'une

anomalie dans le matn110

.

En outre, les savants de Hadith ont toujours appliqué la

règle qui stipule que l’exactitude de la chaîne de

narrateurs n’implique pas nécessairement l’exactitude du

contenu du hadith111

. Ce fut également l’avis de Sheikh

al-Albani112

qui, tout comme d’autres Muhaddithin, a

énuméré plusieurs situations dans lesquelles un hadith

peut être jugé comme inventé (mawdu’) en basant ce

jugement uniquement sur le matn et cela, en dépit d’une

chaîne de narrateurs correcte113

.

Par conséquent, la thèse de Lacroix comme quoi la

critique du matn, pour Sheikh al-Albani, fût restreinte à

une perspective linguistique est une nouvelle fantaisie ou

tromperie ingénieuse du Muhaddith en herbe de

105 Ibid, p. 81, 83 106 Ibid, p. 82 107 Dr. Abdoullah Bin Dayfoullah al-Rouhayli, « Manhadj Al-

Mouhadditheen fi Naqd al-Riwayat Sanadan wa Matnan ». [La

Méthodologie des Muhaddithin dans la Critique du Hadith dans la

Chaine de Transmission et le Matn], p.14. 108 Ibid, p.24-25. 109 Ibid, p.22. 110 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Silsila al-Ahadith al-Da’ifa

Wal Madou’a Wa Atharouha al-Sayyi’ fil Umma » 111 Dr. Abdoullah Bin Dayfoullah al-Rouhayli, « Manhadj al-

Mouhaddithin fi Naqd al-Riwayat Sanadan wa Matnan ». [La

Méthodologie des Muhaddithin dans la Critique du Hadith dans la

Chaine de Transmission et le Matn], p.21. 112 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Silsila al-Ahadith al-

Sahiha » [Recueil de Hadiths Authentiques], voir l’introduction 113 Dr. Abdoullah Bin Dayfoullah al-Rouhayli, « Manhadj al-

Mouhadditheen fi Naqd al-Riwayat Sanadan wa Matnan ». [La

Méthodologie des Muhaddithin dans la Critique du Hadith dans la

Chaine de Transmission et le Matn], p.42.

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

20

Contrairement à ce que prétendent certains orientalistes, la critique du Hadith englobe également le matn

Sciences Po puisque les œuvres d'al-Albani, publiées

pendant plusieurs décennies, sont truffés d’exemples qui

invalident totalement cette hypothèse114

.

Il est étonnant de constater que le professeur Lacroix

ignore que Sheikh al-Albani a rendu faible des hadiths

dû à leur contenu textuel, car dans son même article il

mentionne que Sheikh al-Albani a jugé faibles des

hadiths dans les recueils canoniques d’al-Bukhari et

Muslim. Celui qui entreprend une lecture superficielle de

la critique de Sheikh al-Albani des hadiths dans les

recueils d’al-Bukhari et Muslim, saura que le Sheikh en

a critiqué une bonne partie dû à un

défaut dans le matn, non dans le sanad.

Il devient clair, une fois de plus, que

Lacroix, qui est chercheur au CERI, est

incapable d’effectuer de simples

recherches. Il se contente de répéter

comme un perroquet les conjectures

d'autrui, alors qu’il ignore entièrement

le contenu réel et la véracité des propos

qu’il tient dans ses articles, comme le

démontre également sa déclaration

suivante :

« Par conséquent, l’aspect principal de

la science du Hadith devient 'ilm al-

rijal (la science des hommes), aussi

connu comme 'ilm al-jarh wa-l-ta'dil (la science de la

critique et de l’évaluation positive) qui évalue la

moralité – qui équivaut à la fiabilité — des narrateurs. »

Cette tentative désespérée de tromper le lecteur échoue

rapidement lorsqu’on apprend que la science des

narrateurs (du hadith) ou « I'lm al-Rijal » a toujours été

l’aspect principal de la science du Hadith pour tous les

Muhaddithin à tous les temps. C’est cette science qui a

préservé la Sounna de toute altération et qui a exposé

toute implication de menteurs dans le sanad du hadith ou

de narrateurs ayant une mauvaise mémoire.

Al-Albani et la Critique d’al-Bukhari et Muslim

Selon Lacroix, Sheikh al-Albani adoptait une approche

unique dans le Hadith dû au fait qu'il aurait rendu faible

des hadiths dans les collections de hadiths d’al-Bukhari

et Muslim :

« En même temps — et contrairement aux pratiques

antérieures —, al-Albani insiste sur l'étendue de cette

réévaluation qui doit englober tous les hadiths existants,

même ceux mentionnés dans les recueils canoniques

114 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Silsila al-Ahadith al-

Da’ifa… » – « Rhayatoul Maram » – « Ta’liqat A’la Moukhtasir

Sahih Muslim lil-Moundhiri », etc.

d’al-Bukhari et Muslim. Al-Albani a été jusqu'à déclarer

certains de ces hadiths comme faibles. »

Sheikh Mohammed al-Albani a effectivement réévalué

certains hadiths dans les recueils d’al-Bukhari et

Muslim. Toutefois, l'allégation de Lacroix comme quoi

le Sheikh aurait rendu faible certains hadiths dans les

deux recueils en question est fausse. Après avoir fait une

explication approfondie d'un hadith dans sa « Silsila al-

Ahadith al-Sahiha », al-Albani mentionne :

« J'ai volontairement pris plus de temps pour commenter

ce hadith et ses narrateurs. J'ai fait ceci

dans le but de défendre la Sounna

prophétique et pour que personne

n’invente des mensonges à mon égard.

J'ai fait ceci afin que la personne

ignorante, envieuse ou tendancieuse ne

dise pas : 'Al-Albani a dénigré Sahih al-

Bukhari et a rendu faibles ses

hadiths'…»115

En effet, la thèse comme quoi al-Albani

aurait rendu faible des hadiths dans al-

Bukhari et Muslim peut uniquement

venir d’une personne ignorante,

envieuse ou tendancieuse — et je ne

considérerais certainement pas le

professeur Lacroix comme étant envieux. Sheikh al-

Albani avait une grande estime pour Sahih al-Bukhari et

Muslim et a toujours loué ces deux recueils pour leur

précision et authenticité :

« Les recueils d’al-Bukhari et Muslim sont les deux

livres les plus exacts jamais écrits après le Livre d'Allah

d’après le consensus des savants musulmans du Hadith

et d’autres. Ils ont un avantage sur les autres recueils de

hadith dû à leur distinction qui repose sur leur sélection

des hadiths les plus corrects et plus authentiques ainsi

que sur leur omission de hadiths faibles et ceux qui

contiennent un matn très faible…Il est devenu connu de

manière générale que tous les hadiths dans les recueils

d’al-Bukhari et Muslim, ou dans l’un des deux, ont

atteint le degré d’exactitude le plus élevé et sont

considérés comme authentiques et correct sans aucun

doute. Voici notre position de base sur ces deux livres.

Cependant, cela ne veut pas dire que chaque lettre, mot

ou expression dans al-Bukhari et Muslim doit être placé

au même niveau (d’exactitude) que le Coran. Il se peut

que certains hadiths contiennent une fausse conception

ou une erreur dans un certain aspect qui fut commise

par un des narrateurs du hadith. En effet, à l'exception

115 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Silsila al-Ahadith al-

Da’ifa », Vol.4, p.465.

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

21

Les recueils d’al-Bukhari et Muslim ont été réévalués par plus de soixante Muhaddithin

du Coran, nous ne considérons aucun livre infaillible. »

116

Cette parole démontre que Sheikh al-Albani ne rendait

pas faible certains hadiths dans al-Bukhari ou Muslim. Il

a uniquement critiqué quelques termes et expressions

dans le matn du hadith ainsi que quelques chaînes de

narrateurs. Il est important de comprendre que dans la

science du Hadith, on fait une distinction entre la

critique d’un hadith d’un point de vue des anomalies

dans le sanad et entre le fait de rendre

faible un hadith dans sa totalité. Par

exemple, la chaîne d'un hadith peut

être critiquée dû à une certaine

critique d'un narrateur présent dans

cette chaine. Or, cela en soit, ne rend

pas forcément faible le texte du hadith

dû au fait que d'autres hadiths avec le

même contenu textuel, mais une

chaîne différente, peuvent renforcer la

solidité du premier hadith qui, par

conséquent, atteindrait le niveau de

« Hassan » (bon) ou « Sahih »

(authentique) bien que sa chaîne de

narrateurs soit critiquée. Cela vaut

également pour tous les hadiths que Sheikh al-Albani a

critiqués dans les recueils d’al-Bukhari et Muslim

puisqu’il a toujours conclu qu'ils étaient corrects dans

leur contexte textuel. C'est ainsi qu’al-Albani a expliqué

cette forme de critique :

« L’authenticité d’un hadith dans ‘Sahih al-Bukhari’ ne

peut être contesté en se basant simplement sur une

certaine faiblesse dans sa chaîne puisqu’il reste la

possibilité que le hadith fut rapporté avec une autre

chaîne par laquelle les deux hadiths se consolideront

réciproquement. » 117

La deuxième allégation du professeur Lacroix est que la

critique ou la réévaluation de Sheikh al-Albani

englobait, contrairement aux pratiques antérieures, tous

les hadiths existants. Regardons plutôt ce que disait le

Muhaddith du siècle précédent au sujet de ces pratiques

antérieures des Muhaddithin du passé :

« Malgré la magnificence de Sahih al-Bukhari et malgré

le consensus des savants sur son acceptation — comme

je l’ai mentionné dans l'introduction —, nous devons

savoir que le livre a été critiqué aux passé par certains

savants. » 118

116 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Sharh Aqida al-Tahawiya »

[Explication de al-Aqida al-Tahawiya], p.22-23 117 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Silsila Al-Ahadith Al-

Sahiha » [Recueil de Hadiths Authentiques], Vol.4, p.185 118 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Moukhtasir Sahih al-

Boukhari » [Résumé de Sahih al-Boukhari], 2/4

En effet, al-Albani fut précédé dans la réévaluation des

recueils canoniques d’al-Bukhari et Muslim par plus de

soixante savants différents119

. Parmi les premiers

savants, plusieurs Muhaddithin ont écrit des ouvrages

indépendants dans lesquels ils ont réévalué les hadiths

d’al-Bukhari et Muslim. Le plus célèbre parmi eux est

al-Dar al-Qutni (Xe siècle) qui a écrit le célèbre « al-

Ilzamât wal-Tattabu ». D'autres comme Mohammed al-

Shaheed120

(IXe siècle), Yehya al-Attar121

(XIIIe siècle),

Abdel-Rahim al-Iraqi122

(XIVe siècle) ainsi qu’Abu

Zur’a al-Iraqi123

(XVe siècle) ont tous

écrit des critiques indépendantes sur le

même sujet. En outre, nous retrouvons

parmi ceux qui ont critiqué certains

hadiths dans al-Bukhari ou Muslim

plusieurs savants très connus tels que

l’Imam Ahmed, Ibn Ghuzeyma, Ibn

Hazm, al-Nawawi, al-Qortobi, Ibn al-

Qayim, Ibn Hajr, Ibn Taymiya, al-

Dhahabi, al-Zarqashi, al-Suyuti et Ibn

Kathir124

. Ce sont, un par un, des

savants reconnus dans le Hadith et les

sciences islamiques qui n’ont jamais

été accusés d’avoir contredit les

« pratiques antérieures » de la

réévaluation du Hadith. Finalement, al-Albani n'était

certainement pas le seul à son époque à avoir critiqué

certains hadiths d’al-Bukhari et Muslim. Plusieurs

savants de hadith contemporains, Sunnites et autres, l'ont

précédé dans sa critique : al-Mu’allimi, Moqbil, Shu’ayb

al-Arna’out, Tariq Ibn I’wadillah, al-Kawthari, Hassan

al-Saqqaf, etc.125

Une fois de plus, une étude élémentaire confirme qu'il

n'y a rien d’inhabituel concernant l’approche de Sheikh

al-Albani à la science du Hadith puisque tous les hadiths

d’al-Bukhari et Muslim critiqués par al-Albani avaient

déjà, précédemment, subi une forme de critique par

d'autres savants du Hadith.

119 Muhyi al-Din al-Samarqandy, « Naqd Matn al-Hadith fi Daw

Nata’ij al-Ulum al-Tajribiya » [La critique du Matn dans le Hadith à

la lumière des Sciences Expérimentales], p.113 120 Mohammed Ammar al-Shaheed, « I’lal Sahih Muslim », [Défauts

dans Sahih Muslim] 121 Yahya Ali al-Rasheed al-Attar, « Gharar al-Fawa’id al-Majmou’a

fi Bayan ma Waqa’a fi Sahih Muslim... » 122 Abdel-Rahim Ibn al-Hussein al-Iraqi, « Al-Ahadith al-Mughrija fil

Sahihayn Allati Takallama fiha » [Sélection de Hadiths dans les

recueils authentique d’al-Bukhari et Muslim qui ont été critiqués] 123 Abu Zura’ Ahmed Ibn Abdel-Rahim al-Iraqi, « Al-Bayan wal

Tawdih Liman Kharaja lahu fil Sahih wa Qad Massa Bi Darb Min

al-Tajrih » [Clarification des Hadiths dans Sahih al-Bukhari qui sont

sujet à une certaine forme de Critique] 124 Muhyi al-Din al-Samarqandy, « Naqd Matn al-Hadith Fi Daw

Nata’ij al-Ulum al-Tajribiya » [La critique du Matn dans le Hadith à

la lumière des Sciences Expérimentales], p.115-140 125 Ibid, p.144-148

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

22

Sheikh al-Albani avait démontré que l'opinion de la majorité des savants allait parfois à l’encontre de certains consensus proclamés.

Lorsqu’al-Albani fut interrogé au sujet d'une personne

qui, tout comme Stéphane Lacroix, prétendait que les

hadiths d’al-Bukhari et Muslim ne sont plus soumis à la

critique et que leur réévaluation était contraire aux

pratiques antérieures, sa réponse fut la suivante :

« Cette déclaration en soi est suffisante pour convaincre

le lecteur de l'ignorance de cet escroc rusé et démontre

sa diffamation envers les savants antérieurs et

contemporains lorsqu’il prétend qu'il y a un consensus à

ce sujet126

. Ainsi, jusqu'à ce jour même, les savants

critiquent toujours certains hadiths dans les recueils

d’al-Bukhari et Muslim. » 127

Les Illusions Révolutionnaires du Professeur Lacroix

Après s’être défoulé dans la science

du Hadith, le professeur Lacroix,

très confiant dans ses capacités, se

lance maintenant dans la

jurisprudence islamique et se permet

de citer une liste de ce qu'il nomme

des « interprétations

révolutionnaires » de Sheikh al-

Albani :

« Dû à la particularité de sa

méthode, al-Albani finissait par

prononcer des fatwas qui allaient à

l’encontre du consensus islamique,

et plus spécifiquement, à l’encontre de la jurisprudence

Hanbalite-Wahhabite. »

L'imagination déréglée du professeur Lacroix fait de

plus en plus de dégâts. Il s’est, en premier lieu,

cramponné à la thèse qui stipule que l'approche d’al-

Albani du Hadith fut particulière pour ensuite l’exploiter

en soutenant une autre fausse assertion dans laquelle il

accuse al-Albani de contredire le consensus islamique

des savants.

Certains critiques ont déjà précédé Lacroix dans cette

allégation128

qui d’ailleurs, dérangeait Sheikh al-Albani.

Dans son livre « L'Étiquette du Mariage », al-Albani

répondit à Isma’il al-Ansari qui l'avait accusé de

contredire le consensus islamique :

« Au début de son livre ‘Al-Ibaha’, ce pauvre homme

m'a accusé de contredire le consensus islamique. À la

126 NDT c.-à-d. qu’il n’a plus de réévaluation des hadiths d’al-

Bukhari et Muslim 127 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Âdab al-Zifaf » [L’étiquette

du Mariage], p. 54 128 NDT Et c’est sans aucun doute d’eux que Stéphane Lacroix a

calqué sa critique.

page 57, il mentionne même explicitement que je rejette

le consensus… »129

Il est impossible qu’al-Albani ait prononcé des fatwas

qui vont à l’encontre du consensus établi des savants

puisqu’il considérait le consensus islamique comme une

preuve irréfutable dans la déduction de jugements.

Ce que le professeur Lacroix n’a pas réussi à saisir, dû à

son incapacité à faire des recherches dans ce domaine,

est qu’al-Albani remettait en question des consensus

supposés qui furent prononcés par certains savants.

Grâce à sa connaissance remarquable, Sheikh al-Albani

fut capable de démontrer que le consensus proclamé par

certains savants dans plusieurs questions était invalide

ou qu’il s’agissait d’un consensus

qui, en réalité, n’a jamais eu lieu130

.

Ce qui fut considéré comme un

consensus islamique dans ces

questions précises ne pouvait, par

conséquent, plus être vu comme un

consensus reconnu et acceptable.

Ainsi, al-Albani avait établi que ces

consensus en question avaient été

contredits et remis en question par

des savants au passé :

« J'ai certes, étudié de nombreuses

questions dans lesquelles un

consensus a été proclamé et j'ai

découvert qu’il s’agissait, en réalité, de questions sur

lesquelles les savants ont divergé. J'ai même découvert

que l'opinion de la vaste majorité des savants allait à

l’encontre du prétendu consensus dans ces

questions. »131

La personne qui ignore les divergences entre savants

dans lesquelles un consensus a été proclamé aura par

conséquent la fausse impression qu’al-Albani défiait le

consensus islamique établi. Pour ce qui est de l’assertion

du professeur Lacroix que les fatwas prononcées par al-

Albani iraient à l’encontre de la jurisprudence Hanbalite,

alors ce n’est bien entendu rien de révolutionnaire, car

les savants saoudiens font, et ont toujours fait, la même

chose.

Dans sa quête d’exemples qui devraient prouver

l’approche révolutionnaire d'al-Albani du Hadith,

Lacroix mentionne :

« Par exemple, il a écrit un livre dans lequel il a redéfini

les gestes et formules adéquats qui constituent le rituel

129 Ibid, p.41-42. 130 Ibid, p.44-47 – p.238-239 131 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Ahkam al-Jana’iz wa

Bida’uha » [Jugements liés aux Funérailles et à ses Innovations],

p.219

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

23

Dans son livre «Asl Sifat Salat al-Nabi », al-Albani fut précédé dans tous ses jugements par d’autres savants

de la prière musulmane ‘selon la pratique du prophète’-

en contredisant les prescriptions de toutes les écoles

juridiques établies. »

Le livre en question ici est « La Description de la Prière

du Prophète » et notre chercheur au CERI132

aurait

mieux fait de lire ou feuilleter ce chef-d’œuvre avant de

le commenter de cette manière dérisoire. La réalité est

que dans cette étude, Sheikh al-Albani a uniquement

contredit les jugements des quatre écoles simultanément

dans certains cas133

. Dans son introduction, al-Albani

confirme qu'il y a un consensus établi

dans un grand nombre d’aspects de la

prière musulmane134

ce qui, en soit, est

assez pour démolir la thèse de Lacroix

dans laquelle il prétend qu’al-Albani, en

redéfinissant les gestes adéquats de la

prière, aurait contredit les prescriptions

de toutes les écoles juridiques établies. À

la fin de son introduction, le Sheikh

déclare explicitement que son travail ne

contient pas un seul jugement dans lequel

il n’a pas été précédé au passé par un

autre savant, ni un jugement qui va à

l’encontre du consensus des savants135

.

De plus, Sheikh al-Albani mentionne

dans l'introduction que :

« Ce livre rassemblera tous les éléments

dispersés des livres du Hadith et de jurisprudence y

compris les divergences entre les madhabs qui sont liées

à ce sujet »136

Al-Albani avait critiqué ouvertement ceux qui, comme le

professeur Lacroix, l'accusaient de ne pas prendre en

considération les jugements des quatre imams :

« Cette accusation ne peut être plus farfelue. C'est une

fausse accusation dans chaque aspect comme cela peut

être déduit clairement de mes déclarations précédentes

qui indiquent toutes que le contraire est vrai. Tout ce

que nous demandons c’est de ne pas transformer un

madhab quelconque en religion en élevant ce madhab

au statut du Coran et de la Sounna... » 137

En suivant la méthodologie des Muhaddithin du passé,

al-Albani refusait de suivre aveuglément un madhab

132 Sur le site du CERI, le centre prétend mener des travaux qui

s’enracinent dans une tradition comparatiste et qui valorisent les

trajectoires historiques des sociétés étudiées. Certains chercheurs ne

semblent réellement pas être à leur place au CERI. 133 Dans ce livre, les jugements d'Al-Albani coïncident pour plus de

90 % avec au moins un jugement des quatre écoles juridiques. 134 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Asl Sifat Salat al-Nabi » [La

Description de la Prière du Prophète, Version Originale], p.21 135 Ibid, p.52 136 Ibid, p.22 137 Ibid, p.48

spécifique. Par contre, il prenait ce qu’il y avait de

mieux dans chaque madhab en se basant d'abord et

surtout sur les preuves directes de la Sounna. Dans son

livre sur la description de la prière, al-Albani fait

d’abord un jugement sur chaque question séparément et

le compare ensuite avec les jugements des quatre écoles

pour déterminer celles qui correspondaient à sa

recherche analytique et celles qui la contredisaient :

« Je suis d’avis que cette approche est la meilleure, car

elle correspond au chemin qu’Allah a ordonné de suivre

aux croyants et à son Prophète

Mohammed . C'est la méthodologie

des pieux prédécesseurs qui comportent

les compagnons et les générations après

eux auxquelles appartiennent les quatre

Imams. Ils ont tous consenti à

l'obligation de revenir et de s'accrocher

à la Sounna et sont unanimes pour dire

que chaque allégation qui la contredit

doit être rejetée. » 138

Pour appuyer sa thèse, al-Albani citait de

nombreuses paroles des quatre Imams

dans lesquelles ils réprimandent ceux qui

suivent aveuglément leurs jugements et

verdicts sans les mesurer au Coran et à la

Sounna139

. C'était une façon ingénieuse

du Muhaddith albanais de démontrer que

celui qui suit un madhab quelconque dans tous ses

jugements de fiqh a contredit les enseignements des

quatre Imams. Ainsi, ces mêmes paroles venants des

Imams Abu Hanifa, Malek, al-Shafi’i et Ahmed dans

lesquelles ils interdisent les autres de suivre aveuglement

leurs jugements, constituent une approbation de la

méthodologie de Sheikh al-Albani et des Muhaddithin :

« Par conséquent, je dis qu’en nous accrochant à tout ce

qui a été rapporté de façon authentique dans la Sounna,

même si cela contredit certains verdicts des Imams, on

ne peut être accusé de contredire leur madhab, ni leur

méthodologie. En agissant de la sorte, on suit plutôt la

méthodologie incontestable sur laquelle ils se basaient

tous... C’est une chose qui ne peut être dite de ceux qui

abandonnent ce qui est authentique dans la Sounna en

suivant aveuglément un de leurs jugements dans l’école

juridique. »140

Ainsi, les jugements d’al-Albani étaient en parfaite

harmonie avec la méthodologie des quatre imams qui,

aujourd'hui, ont chacun un madhab qui leur est attribué.

138 Ibid, p.23 139 Ibid, p.23-32 140 Ibid, p.32

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

24

Al-Albani et de nombreux savants avant lui ont déclaré que le mihrab est une innovation.

Les Consensus Islamiques inventés par Lacroix

Une fatwa de Sheikh al-Albani que le professeur Lacroix

considère aller à l’encontre du consensus islamique est

celle-ci :

« Aussi, il a déclaré que les mihrabs — c.-à-d. la niche

que l’on retrouve dans les mosquées pour indiquer la

direction de la Mecque — fut une bida'a (une

innovation)... »

La déclaration d’al-Albani comme quoi les

mihrabs sont une innovation141

est tout

sauf révolutionnaire. À nouveau, un grand

nombre de savants l'ont précédé dans ce

jugement. Ce n’est d’ailleurs rien

d’étonnant, car le mihrab tire son origine

de la courbure que l’on retrouve dans les

églises chrétiennes d’Égypte et de

Najran142

. Divers savants et historiens

mentionnent que les mihrabs ont

seulement été introduits dans les mosquées

après l’époque du Prophète Mohammed 143

. On comprend ainsi pourquoi al-Albani

fut déjà précédé il y a environ quatorze

siècles par le compagnon Ibn Masu’d qui

déclarait qu’il n'était pas permis de prier

dans une mosquée qui contenaient un mihrab144

. Il a été

suivi par de nombreux savants à travers les siècles

comme Salim Ibn Abd al-Dja’d145

(VIIe siècle), Ibrahim

al-Nakha'i146

(VIIe siècle), Sufyan al-Thawri147

(VIIIe

siècle), Ibn Hazm148

(Xe siècle), Ibn Taymiya149

(XIIIe

siècle), al-Zarqashi150

(XIVe siècle), Ali al-Qari151

(XVIe siècle), etc. Au XVe siècle, le célèbre savant

Abder-Rahman al-Souyouti a même composé un

ouvrage qu’il a nommé « Renseignements Utiles

concernant l’Apparition de l'Innovation du Mihrab ».152

De plus, à l’époque d’al-Albani, certains savants comme

141 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Silsila al-Ahadith al-Da’ifa

Wal Madou’a wa Atharouha al-Sayyi’ fil Umma », Vol.1, p.452. 142 Dr Ibrahim Ibn Saleh al-Khodeir, « Ahkam al-Masajid fil Sharee’a

al-Islamiya » [Jugements liés aux Mosquées dans la Législation

Musulmane], Vol.1, p.339. 143 Dr Hussein Mou’nis, « Al-Masajid » [Les Mosquées], p.77-79 144 Al-Bazzar, « Kashf al-Astar », no 416 145 Rapporté par Ibn Abi Shayba, « Musannaf Ibn Abi Shayba »,

Vol.1, p.408 146 Rapporté par Abdel-Razaq al-Sana’ani, « Musannaf Abdel-

Razaq », Vol.2, p.412 147 Ibid, p.413 148 Ibn Hazm, « al-Muhalla », Vol.4, p.239-240 149 Sheikh al-Islam Ibn Taymiya, « Iqtida al-Sirat al-Moustaqim »,

p.215-225 150 Mohammed Bin Abdillah al-Zarqashi, « I’lam al-Masajid bi

Ahkam al-Masajid », p.258 151 Ali Ibn Sultan Mohammed al-Qari, « Marqat Al-Mafatih Sharh

Mishkat Al-Masabih », Vol.2, p.223. 152 Abder-Rahman Jalal al-Din al-Souyouti, « I’lam al-Arib bi

Huduth Bid’a al-Maharib »

Sheikh Moqbil153

et Abdoullah al-Ghimari154

avaient

également prononcé un jugement identique quant aux

mihrabs. Or, Stéphane Lacroix considère que déclarer

les mihrabs comme une innovation est une interprétation

révolutionnaire qui va à l’encontre du consensus

islamique ! Les lecteurs n’auraient pas été confrontés

avec ce genre d’absurdités ridicules, si le professeur

avait pris le temps de faire une petite recherche. Lacroix

semble bien conscient qu’il, comme le veut le vieux

proverbe arabe, est « comme l’homme borgne parmi des

aveugles. » 155

Et décrire le professeur Lacroix comme

un borgne peut même être une

surestimation, car il s’étonne du faut que :

« … al-Albani disait qu’il était permis de

prier en chaussures dans une mosquée. »

Une fois de plus, il n'y a rien exceptionnel

à ceci. Dans son jugement sur la

permission de prier dans une mosquée en

chaussures, al-Albani a été précédé par le

Prophète de l'Islam lui-même, les

compagnons et tous les savants

islamiques, car il existe un consensus

établi sur la permission de prier en

chaussures. Si cette parole d'al-Albani

coïncide avec le consensus des savants

musulmans, comment alors peut-elle être

décrite comme un jugement révolutionnaire ? Prier en

chaussures fait, en effet, partie de la tradition

prophétique156

puisque le Prophète priait en

chaussures dans la mosquée, comme ce fut rapporté par

al-Bukhari qui a intitulé le chapitre à ce sujet « Prier en

chaussures ». Plus encore, prier en chaussures est une

recommandation en Islam, car le dernier des Messagers

a ordonné sa communauté de se différencier des juifs

qui étaient connus pour prier sans chaussures157

. Bien

entendu, il faut mentionner qu’al-Albani et les autres

savants ont uniquement permis de prier en chaussures

dans la mosquée sous certaines conditions158

. Prétendre

que cette tradition prophétique qui est mentionnée dans

153 Mohammed Ibn Abdel-Wahhâb al-Wasabi, « Al-Qawl al-Sawab fi

Hukm al-Mihrab » [L’avis correct concernant le Jugement du

Mihrab], p.51-52 154Abdoullah Ibn Mohammed al-Ghimari, voir ses annotations dans

« I’lam al-Arib bi Huduth Bid’a al-Maharib”, p.20 155 Ceci n’est qu’un proverbe parmi les nombreux proverbes arabes

connus qui ont été absorbés dans les langues occidentales. En

français, ce proverbe en question est aujourd’hui devenu : « au

royaume des aveugles, les borgnes sont rois ». 156 Isma’il Ibn Marshud al-Rumayh, « Ahkam al-Ni’al » [Jugements

liés aux Chaussures], p.18 157 Sounan Abi Dawud, « Kitab al-Salat– al-Salat Fil-Ni’al »

[Chapitre de la Prière – Prier en Chaussures], Vol.1, p.176, no 652. 158 La personne doit s'assurer que ses chaussures soient propres avant

d’entrer à la mosquée. Également, elle ne doit pas prier en chaussures

dans une mosquée si les gens du commun (qui ignorent cette Sounna)

réagissent de manière à semer des problèmes.

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

25

Après les massacres suivant l’occupation de la Palestine, al-Albani conseilla aux Palestiniens de quitter leur terre

presque chaque recueil de hadiths159

irait à l’encontre du

consensus islamique est une chose que Sheikh al-Albani

décrivait comme étant impossible :

« Il est impossible d’obtenir un consensus islamique

correct qui contredit un hadith authentique, à moins que

le hadith en question soit correctement abrogé. »160

Dans son approche trompeuse et inepte des œuvres d'al-

Albani, le professeur Lacroix s'est contenté de

rassembler quelques fatwas du Sheikh qu’il a,

audacieusement et sans la moindre

recherche, jugé révolutionnaires. Son

désir de faire passer al-Albani comme

quelqu’un qui contredisait le consensus

fut tellement ardent qu’il a inventé lui-

même des consensus islamiques qui

n’ont jamais existé pour ensuite

accuser al-Albani de les avoir

contredits. N’est-ce pas agréable de

travailler en tant que professeur et

spécialiste de l’Islam à Sciences Po ? Il

vous suffit de fabuler un peu, de

rédiger des histoires avec des termes

arabes que personne ne comprend et de présenter le tout

sous couvert d’un ouvrage académique. Ensuite, il ne

vous reste qu’à empocher le pactole. Le professeur

Lacroix n'a pas effectué la moindre recherche dans les

livres de jurisprudence pour pouvoir comparer les

déclarations d’al-Albani aux autres fatwas des

Muhaddithin. Par conséquent, les fatwas du Sheikh

albanais ont été conçues comme révolutionnaires selon

l’avis personnel de Lacroix.

Dans un de ses livres, Sheikh Mohammed al-Albani

s’est adressé à ceux qui, tout comme Stéphane Lacroix,

écrivent sur les sujets qu'ils ne comprennent pas :

« Je les conseille de ne pas écrire dans un domaine de

science quelconque qu’après l’avoir maîtrisé et après y

avoir gagné une certaine expérience pendant un certain

temps... »161

Le professeur pédant poursuit en étalant les conclusions

de ses « recherches académiques » :

« Une autre position controversée était son appel aux

Palestiniens de quitter les territoires occupés puisqu’ils

y étaient, comme il le prétendait, incapables de

159 Al-Bukhari (1/102), Abu Dawud (1/176), al-Tirmidhi (2/247), Ibn

Majah (1/330), Al-Dar al-Qutni (1/313), Musnad al-Imam Ahmed

(11/241)… 160 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Âdab al-Zifaf » [Les règles

du Mariage], p. 42. 161 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Difa’ a’n al-Hadith al-

Nabawi wal-Sira » [En Défense de la Tradition Prophétique et la

Biographie], p. 60

pratiquer leur foi comme ils devaient et ceci est

beaucoup plus important qu'un morceau de terre. »

Mais quel est donc le rapport entre cette fatwa et la soi-

disant approche révolutionnaire d’al-Albani du Hadith ?

Cette position du Sheikh devient beaucoup moins

controversée si on comprend que, dans cette fatwa,

Sheikh al-Albani s’est basé sur la « hijra »

(l’émigration) du Prophète qui a quitté la Mecque, son

lieu préféré, pour pouvoir pratiquer l’Islam à Médine.

C'est un avis que tient la vaste majorité des savants, au

passé et au présent, par rapport aux

personnes qui se trouvent dans une

situation pareille. Le professeur Lacroix

ne devrait pas concevoir cette fatwa

comme controversée, car dans son

propre pays, des milliers de musulmans

tentent de fuir l’oppression et

l’apartheid religieux du régime français

pour obtenir des droits religieux, et cela

bien entendue, dû aux nombreuses

atteintes à la pratique individuelle de

l’Islam162

.

Un peu plus loin, Lacroix sort les paroles de Sheikh al-

Albani de leur contexte :

« Finalement, al-Albani prit une position ferme contre

toute participation à la politique, en répétait que ‘la

bonne politique était d’abandonner la politique’ – une

expression salafiste… »

Cette déclaration est également contestable puisque

Lacroix a tout d’abord mal traduit la parole d’al-Albani

qui est « min163

al-siyasa tark al-siyasa » qui se traduit

correctement par « délaisser la politique fait (également)

partie de la politique ». Al-Albani entendait par là que,

dans certains cas, il était mieux de ne pas participer au

système politique. Or, la traduction de Lacroix sous-

entend qu’al-Albani était entièrement opposé à la

politique, ce qui est entièrement faux et une autre

tentative du professeur de faire passer les savants Salafis

pour des gens arriérés et non structurés qui sont coupés

du monde. Al-Albani s'est uniquement opposé à la

participation politique si celle-ci n'est pas basée sur les

valeurs islamiques :

162 NDT Voir l’article du même auteur: « The French Suburban

House and Field Negro » 163 La préposition arabe « min » ici est « lil tab’id » ce qui veut dire

que la préposition exprime « une partie de » ou « une portion de » la

politique. Il est étonnant de voir que le professeur Lacroix n’a pas

saisi le sens de cette préposition, car dans son cv, il prétend maîtriser

la langue arabe et même l’avoir enseignée. Tout comme on peut

douter sur ses capacités de recherche, on peut également remettre en

cause ses capacités dans la langue arabe, car quelqu’un qui ne

comprend pas des prépositions aussi simples ne peut avoir la capacité

d’enseigner la langue arabe, à moins qu’il s’agisse d’un charlatan.

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

26

Al-Albani et les autres savants d’Ahl al-Sounna dépendaient tous du Hadith dans la législation

« Malgré que la politique est une chose requise sans

aucun doute, je pense que ce n'est pas le bon moment de

participer à la politique. » 164

Ce que disait donc réellement Sheikh al-Albani est

qu’avant de participer à la politique, les gens devaient

d’abord acquérir la connaissance de leur religion et

entreprendre un processus essentiel de purification et

d’éducation (« Tasfiya wa Tarbiya») :

« Nous ne disons pas que la politique (c.-

à-d. la Politique Islamique) n'est pas

obligatoire en Islam. Au contraire, cela

fait partie des devoirs collectifs

islamiques. Cependant aujourd'hui, nous

savons qu'en se consacrant à la politique

les gens qui sont responsables de la

da'wa se déroberont aux deux

obligations principales qui sont 'la

Purification et l’Éducation’…Par

conséquent, nous aimerions pour nos

frères dans le monde islamique qui

participent à l'appel au Coran et à la

Sounnah selon la compréhension des

pieux prédécesseurs, d’acquérir, en

premier lieu, de solides bases avant de consacrer leur

temps à la politique. » 165

Cela veut dire que la compréhension de l'Islam dans la

communauté musulmane doit d’abord être purifiée de

toute chose qui l’a infiltrée et qui ne fait pas partie de la

religion. Deuxièmement, al-Albani était d’avis que les

musulmans doivent être éduqués et élevés selon la

croyance correcte et originale de l’Islam166

. Cependant,

la majorité des systèmes politiques dans le monde

Musulman ne sont aujourd’hui plus basés sur l’Islam.

Par conséquent, il n'est pas admissible religieusement

pour les musulmans d’y participer. De la même façon

dont les non-musulmans refuseront de participer à la

politique d’un état Islamique, les musulmans orthodoxes

voient qu’il n’est pas acceptable de participer aux

systèmes politiques non-musulmans. Mais à nouveau,

quel est le rapport entre le fait de ne pas participer à la

politique et cette soi-disant approche révolutionnaire du

Hadith ?

164 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Al-Fatawa al-Manhadjihya

lil-Albany » [Les Fatawas d’al-Albani liées aux affaires de Manhadj]

p. 20-21 165 Muhammad Nasir al-Din al-Albani, “Durus Lil Shaikh Nasir Al-

Din Al-Albani” (Shabaka al-Islamiya), Cours no. 20 166 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Al-Fatawa al-Manhadjihya

lil-Albany » [Les Fatawas d’al-Albani liées aux affaires de Manhadj]

p. 20-21

Al-Albani et les Ecoles Juridiques

Après avoir étalé sa science infuse du Hadith et de la

jurisprudence islamique, le professeur Lacroix nous

transmet maintenant son savoir des écoles juridiques :

« Malgré son milieu social insignifiant, al-Albani est

devenu connu comme le plus grand savant de Hadith de

sa génération. Sa dépendance du Hadith comme pilier

central de la législation aux dépens des

écoles juridiques l'a poussé à prendre des

positions controversées. »

Dans un autre article, Lacroix explique ce

qu’il pense être la position d’al-Albani

vis-à-vis des écoles juridiques :

« Al-Albani, en échange, rejetait toutes

les écoles juridiques, et appelait à une

dépendance directe et exclusive sur le

Coran et le Sounna. »167

Dans cette nouvelle distorsion de notre

chercheur infatigable, la prédication de

Sheikh al-Albani aurait été incompatible

avec les quatre écoles juridiques dû à sa dépendance du

Hadith. Or, un aperçu des ouvrages des quatre Imams

montre bien que les écoles juridiques se sont

initialement basées sur le Hadith. Les quatre Imams

interdisaient explicitement de donner la priorité à leurs

fatwas si celles-ci allaient à l’encontre d’un hadith

quelconque. L’Imam Abu Hanifah a déclaré : « Si mes

propos contredisent le livre d'Allah ou un hadith du

Prophète , alors abandonnez mes propos. »168

L’Imam

Malek a dit : « Acceptez tout ce qui correspond au

Coran et à la tradition prophétique et rejetez tout ce qui

contredit le Coran et la Sounna. »169

De même, l’Imam

al-Shafi’i disait : « Si le hadith est authentique, alors

c'est mon madhab. »170

Finalement, l’Imam Ahmed

accentuait l'importance de se référer aux hadiths en

disant : « Celui qui rejette les hadiths du Messager

d'Allah se trouve au bord de la destruction. » 171

Ainsi, toutes les écoles juridiques dépendaient du Hadith

comme le pilier essentiel de la législation. C'est

seulement lors des derniers siècles qu'un grand nombre

de musulmans ont cessé de donner la priorité aux hadiths

et cela, en suivant aveuglément les jugements d'un

certain madhab. Et voilà ce qu’al-Albani désapprouvait

réellement :

167 Stéphane Lacroix et Thomas Hegghammer, « Rejectionist

Islamism in Saudi Arabia : The Story of Juhayman al-‘Utaybi

Revisited », p.4 168 Al-Fulani, « Al-Iqath », p.50 169 Ibn Abdel-Bar, « Al-Jami’ », 2/32 170 Al-Nawawi, « Al-Majmou’ », 1/63 171 Ibn al-Djawzi, « Al-Manaqib », p.182

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

27

Sheikh al-Albani n’acceptait pas que l’on critique les écoles juridiques.

« Une chose qui est devenue très répandue chez les gens

lors des derniers siècles est que lorsqu’une personne

atteint l'âge adulte, on le force à suivre un des quatre

madhabs. Il suivra par exemple le madhab de son père

qu’il acceptera alors entièrement. Il restera fidèle à ce

madhab sans jamais diverger sur le moindre aspect. Il

suivra ce madhab aveuglément sans réclamer la

moindre preuve. Il n’attachera aucune importance au

jugement interprétatif (ijtihad) puisqu’il considère que

les portes de l’ijtihad sont fermées. » 172

Pour justifier son refus du suivi aveugle des madhabs,

al-Albani démontrait comment, au passé, les savants

majeurs d'un certain madhab abandonnaient les

décisions de leur Imam173

s’ils

considéraient qu’elles contredisaient

la Sounna174

. Sinon, al-Albani a

toujours eu une grande estime des

différents madhabs et ne tolérait

aucune critique à leur égard :

« Il y a certaines personnes qui

s'affilient de façon directe ou indirecte

à l'appel de la Salafiya et qui se

permettent de critiquer un des

madhabs. Nous disons que ce n'est

pas permis dans notre religion et dans notre

croyance... »175

Le professeur Lacroix prétend ensuite que l’allégeance

d’al-Albani au Hadith — et qui se faisait soi-disant au

détriment des quatre madhabs — l'a poussé à prendre

des positions controversées qui ont engendré un conflit

avec les savants saoudiens :

« Cela l'a non seulement mis en conflit avec

l'établissement religieux saoudien, mais l’a également

rendu populaire dans les cercles Salafis. »

La grande majorité des savants de « l’établissement

religieux saoudien » sont considérés comme Salafis,

même par Sheikh al-Albani. Donc comment est-il

concevable, pour quelqu’un qui se trouve en conflit avec

les savants saoudiens, de gagner la popularité dans les

cercles Salafis ?

La mauvaise compréhension du professeur Lacroix dans

cette partie de l’article est basée sur son impression

erronée que les savants saoudiens suivent aveuglément

172 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Haqiqatou al-Da’wa al-

Salafiya » [La Réalité de la Da’wa al-Salafiya] p.170 173 Mohammed Ibn al-Hassan et Abu Yousouf furent deux savants

Hanafites qui contredisaient Abu Hanifa dans un tiers de son

madhab. 174 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Asl Sifat Salat al-Nabi » [La

Description de la Prière du Prophète, Version Originale], p.35 175 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Shubah Hawl al-Salafiya »

[Ambiguïtés concernant la Salafiya] p.128

le madhab Hanbalite. Si c'était le cas, al-Albani aurait

certainement été en conflit majeur avec les savants

saoudiens et n'aurait, en premier lieu, jamais été invité

par ces « Wahhabites féroces ».

Les différences d’opinions qui ont eu lieu entre al-

Albani et d'autres savants n’étaient pas dues au fait

qu’al-Albani dépendait sur le hadith comme pilier

central de la législation, car c’est aussi ce que font les

savants dans le Royaume. C’est une chose qui devient

claire comme le jour dans les nombreuses conversations

qui ont eu lieu entre Sheikh al-Albani et ses confrères

saoudiens; toutes leurs discussions et argumentations

étaient basées sur des preuves directes du Coran et de la

Sounna prophétique. Dans ces débats,

les ulémas de l'Arabie Saoudite n’ont

jamais pris l’avis du madhab comme

étant une preuve.

Certes, les différences scolastiques

entre al-Albani et les autres savants

ne doivent pas être dramatisées. Ceux

qui fréquentaient le plus Sheikh al-

Albani ont témoigné que le Sheikh

réfutait ses propres étudiants et ses

amis les plus proches sans que

personne ne conçoive cela comme un conflit176

. Il s’agit

de différences d’opinions qui ont toujours existé chez les

savants d'Ahl al-Sounna. Dans ses écrits, al-Albani a

mentionné que les quatre Imams divergeaient, eux aussi,

dans beaucoup de sujets :

« Et je sais avec certitude que les grands Imams se

respectaient mutuellement même lorsqu’un d’entre eux

se trompait et (je sais) qu'ils se réfutaient

réciproquement. » 177

Le chercheur non initié ou celui qui a des motivations

secrètes interprétera ces différences d’opinions comme

une discorde interne qui aboutit à de majeurs conflits

insolubles qui reposent sur des contradictions

fondamentales. Par conséquent, la thèse

conspirationniste où les « Wahhabites » se trouvent en

conflit frontal avec les Salafis existe seulement dans

l'imagination de Lacroix.

Si vraiment il y avait eu un conflit entre al-Albani et les

savants saoudiens basé sur des divergences

fondamentales, ce premier n'aurait jamais conseillé

vivement ses lecteurs de se référer à la compréhension

de Sheikh Ibn Abdel-Wahhâb et des savants saoudiens

actuels qu'il appelait « ses frères Hanbalites dignes de

176 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Al-Rawda al-Dani fil

Fawa’id al-Hadithiya lil-Allama al-Albani », p.9 177 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Asl Sifat Salat al-Nabi » [La

Description de la Prière du Prophète, Version Originale], p. 50

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

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Sheikh al-Albani fut professeur à l’Université Islamique de Médine de 1961 à 1963

confiance »178

. De plus, Sheikh al-Albani fut récompensé

pour les exploits remarquables qu'il a réalisés au

Royaume. Plusieurs années après son départ du

Royaume, le « Comité International de Gratification

pour les Études Islamiques du Roi Faysal » lui a accordé

un prix pour ses efforts scientifiques dans le domaine du

Hadith. Est-ce ainsi qu’un organisme reconnu pour la

science religieuse en Arabie Saoudite récompenserait

une personne avec qui elle a des contradictions

fondamentales dans l'approche du Hadith ?

Dans son testament, al-Albani a offert sa bibliothèque

personnelle entièrement à l'Université de Médine, car il

reconnaissait son statut particulier dans la propagation

des sciences islamiques. Pour al-Albani, c’était l’endroit

où il avait gardé de très agréables souvenirs dans son

appel à l’Islam.

Le Royaume : Arrivée et Départ de Sheikh Al-Albani

Les fables de Lacroix semblent

inépuisables. Voici comment il décrit

l’arrivée d’al-Albani dans le

Royaume d’Arabie:

« La présence d'al-Albani en Arabie

Saoudite — où il fut invité en 1961 par

son bon ami Sheikh Abdel-'Aziz bin

Baz pour enseigner à l'Université

Islamique de Médine — a incité des

réactions gênantes au cœur de l'établissement

Wahhabite... »

Résumé de cette nouvelle thèse : l’ancien mufti du

Royaume d’Arabie se rend coupable de favoritisme dû

au fait qu’il a fait entrer al-Albani dans le Royaume, non

pas parce que ce fut le Muhaddith du siècle, mais parce

que c’était son bon ami. Il s’agit d’une autre accusation

pathétique puisque Sheikh al-Albani fut déjà invité en

Arabie Saoudite avant cela. En 1957, le ministre

saoudien de l’Éducation Sheikh Hassan Ibn Abdoullah

Âl al-Sheikh lui avait demandé de remplir la fonction de

responsable du plus haut département des études

islamiques à l’Université de la Mecque. Al-Albani a dû

décliner cette offre merveilleuse dû à des circonstances

imprévues, mais quatre années plus tard, il reçoit une

nouvelle invitation. Si al-Albani fut aussi demandé en

Arabie Saoudite, pourquoi son arrivée aurait-elle suscité

de l’hostilité et des réactions gênantes dans le

Royaume ? Mais plus important que cela, où sont les

références du professeur Lacroix pour soutenir ses

revendications ? Il n'en mentionne pas, car la plupart de

ses écrits sont clairement basés sur des idées calquées

des écrits de Mansur al-Nuqaidan qui est une figure

178 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, voir ses annotations dans

« Mukhtasir al-Uluw Lil-Dhahabi », p. 64

principale dans le milieu des Saoudiens occidentalisés

qui se considèrent comme des « libéraux ». C'est, en

effet, al-Nuqaidan qui a prétendu qu'al-Albani est entré

dans le Royaume grâce au traitement préférentiel de

Sheikh Abdel-Aziz Ibn Baz. Cependant, prendre al-

Nuqaidan comme référence pose un problème. Tout

d’abord, il s’agit d’un individu qui n’a jamais bénéficié

d’un enseignement quelconque. C’est un fait prouvé

qu’il a dû se retirer de l’école à cause de son instabilité

mentale. Il a ensuite tenté d’étudier les sciences

islamiques mais échoue, à nouveau, lamentablement.

Mansur al-Nuqaidan finit en tant que hooligan Takfiri

dans les rues de Riyad où il brûle des commerces. Dans

un de ses articles, il admet avoir incendié une association

caritative pour veuves et orphelins. Al-Nuqaidan est

condamné à deux années et huit mois de prison fermes et

se rend finalement compte qu’il est un incompétent

incapable de mener une vie stable. Certes, il a échoué

dans les différents types d’études et son espoir de

devenir un leader dans le mouvement

Takfiri s’est envolé. Le docteur

Istifham explique dans le compte

rendu de son analyse de la personne

d’al-Nuqaidan intitulé « Mansur al-

Nuqaidan, Djawla fi radahat nafsi wa

damirihi »179

qu'il s’agit d’un individu

totalement déséquilibré qui prend une

opinion le soir uniquement pour

l’abandonner le lendemain180

. En effet,

al-Nuqaidan est passé de Takfiri

radical et délinquant pyromane à

néoconservateur extrémiste et diffamateur laïque de la

religion musulmane. Il a été poursuivi en justice pour

calomnie et diffamation et fut condamné pour une

deuxième fois par la justice saoudienne. Mansur

exploitera plus tard cette condamnation pour tirer

l’attention des médias tendancieux en Occident et

prétend avoir été déclaré coupable parce qu’il se battait

pour « la liberté »181

.

179 Source : http://www.saaid.net/mktarat/almani/46.htm 180 Dr Istifham a démontré comment le dénommé Mansur al-

Nuqaidan, durant toute sa vie, est tombé d'un extrême à l'autre. Dans

sa période Takfiri, il refusa par exemple de prier derrière un Imam

Sunnite qu'il accusait d'être un membre de la secte des Murjiyas. Un

an après, Mansur commença lui-même à inviter les gens ouvertement

à l'idéologie des Murjiyas. Puis, quelques mois avant sa conversion à

la laïcité, al-Nuqaidan offensa un Sheikh qui ne partageait pas son

avis en lui disant : « Tes propos sont de la mécréance! » Et

aujourd'hui, ce pantin des islamophobes occidentaux, accuse

l’ensemble des savants saoudiens de rendre mécréant les musulmans.

Avec un comportement si incohérent, il n’est pas étonnant que

Lacroix et al-Nuqaidan aillent admirablement de pair. 181 Mansur al-Nuqaidan « Telling the Truth, Facing the Whip », New

York Times [Dire la vérité face au fouet]. Le fait qu’un journal

comme le New York Times demande à une personne inculte et

tendancieuse comme al-Nuqaidan de rédiger un article où il diffame

les savants de l’Islam montre bien que les médias occidentaux

acceptent uniquement les articles d’Arabes à condition qu’ils se

déchaînent contre l’Islam et les musulmans.

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

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Sheikh al-Albani a gardé de très agréables souvenirs de l’Université Islamique de Médine

Dr Istifham explique que Mansur est extrêmement

égocentrique et en besoin d'attention continuelle. Ce

sont, bien entendu, des gens comme le professeur

Lacroix et d’autres islamophobes occidentaux qui, avec

un acharnement imbécile, lui consacrent l’attention dont

ils sont tellement en manque. Dans certains de ses

articles, Lacroix tente de porter aux nues ce délinquant

psychopathe et sacré menteur en le décrivant comme un

« intellectuel courageux »182

.

Mais revenons aux contes imaginaires du professeur

Lacroix qui, de plus en plus, remettent en question son

intégrité professionnelle. Les propos

suivants sur le voile musulman qu’il

attribue à Sheikh al-Albani n’étonnent

donc guère venant de sa part :

« La controverse suscitée par son livre

‘Le Voile de la Femme Musulmane’

dans lequel il a argumenté avec des

preuves qu’il ne faut pas que les

femmes musulmanes se couvrent le

visage — un avis inacceptable selon

les normes saoudiennes — a fini par

donner à l'établissement Wahhabite la

justification requise pour le faire sortir du Royaume en

1963. »

C’est avec ce ton pédant que le professeur Lacroix parle

d’un livre d'al-Albani qu’il n'a jamais lu. Dans « Le

Voile de la Femme Musulmane », le Sheikh albanais

conclut que les femmes musulmanes doivent couvrir leur

visage, mais mentionne que ce n'est pas une obligation.

Comme la majorité de savants musulmans, il considère

que le niqab fait partie de la Sounna et tombe sous la

catégorie « mustahab » des actes d'adoration183

. Par

conséquent, il n’est pas surprenant de savoir que les

femmes dans la famille d’al-Albani portaient le niqab.

L’assertion de Lacroix, attribuée à al-Albani, comme

quoi il ne faut pas que les femmes musulmanes se

couvrent le visage implique qu’al-Albani considérait le

port du niqab comme un acte détestable (makruh),

illicite (haram) ou qui ne fait pas parti des préceptes de

l’Islam (mubah).

182 Stéphane Lacroix est connu pour défendre ce genre d’Arabes

incultes avec un acharnement si furieux qu’il a présenté une

communication au colloque islamophobe de l'ISIM intitulé « Les

intellectuels saoudiens et le mouvement Islamo-Liberal ». En effet,

pour les racistes antimusulmans l’Arabe ne peut être intellectuel que

s’il prône la laïcité dans son pays. En contrepartie, les savants

musulmans qui ont étudié pendant des décennies n’ont obtenu ce titre

que par leur appartenance à une tribu qui a réussi à monopoliser une

partie du désert Arabe. De plus, ils ont tellement de science qu’ils ont

délaissé tout raisonnement humain. 183 Ce qui veut dire qu’il s’agit d’adorations fortement

recommandées.

Les quatre Imams (Abu Hanifa Malek, al-Shafi'i et

Ahmed) étaient tous d’avis que le niqab est une

recommandation religieuse et non une obligation184

ce

qui montre bien que les savants saoudiens contredisent

parfois le jugement de la majorité des savants islamiques

et des quatre écoles juridiques.

L'allégation de Lacroix comme quoi ce livre aurait

donné à ‘l'établissement « Wahhabite » la justification

requise pour expulser al-Albani du Royaume en 1963 est

impossible, car le livre a été écrit en 1949, douze années

avant l'arrivée du Sheikh en Arabie Saoudite. Bien au

contraire, la position d’al-Albani sur le

niqab n'a manifestement pas empêché

les plus hauts représentants de

« l’établissement Wahhabite »

d'inviter le Sheikh albanais pour

enseigner dans une de leurs universités

les plus prestigieuses.

En outre, d’autres articles du

professeur Lacroix démontrent qu’il se

livre à des conjectures et s’imagine

des choses insensées pour lesquelles il

est incapable de citer la moindre

référence. Dans un de ses articles, il mentionne :

« Dans son célèbre livre ‘Les Caractéristiques de la

Prière du Prophète’ (sifat salat al-nabi) al-Albani a

présenté plusieurs avis particuliers sur des rituels

islamiques qui ont suscité une controverse avec d'autres

savants. Certains affirment que ces controverses ont

mené à son expulsion de Médine en 1963... » 185

Cette assertion est également impossible parce que

Sheikh al-Albani a écrit ce livre à Damas avant qu'il ne

voyage en Arabie Saoudite. Donc, si nous avons bien

compris : un jour le départ d’al-Albani du Royaume était

dû à sa position sur le voile de la femme musulmane et,

un autre jour, c'est à cause de ses verdicts sur les rituels

islamiques de la prière. Est-ce que l’incompétence

stupéfiante du professeur doit être attribuée à sa

fourberie islamophobe ou tout simplement à une

confusion mentale186

? Une chose est certaine; il saisit

chaque prétexte pour présenter les savants saoudiens

comme des individus intolérants et mauvais qui

n'acceptent pas d'autres opinions.

184 L’Imam Ahmed a deux paroles dans ce sujet. Dans une parole il

considérait qu’il s’agissait d’une obligation, dans l’autre il voyait que

c’était mustahab (une adoration recommandée). 185 Stéphane Lacroix et Thomas Hegghammer, « Rejectionist

Islamism in Saudi Arabia : The Story of Juhayman al-‘Utaybi

Revisited », p.4 186 La confusion mentale est un état psychiatrique aigu, caractérisé

par une obnubilation de la conscience, un ralentissement de la

pensée, une désorientation dans l’espace et le temps et des troubles

de la mémoire. (Larousse médical)

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

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Al-Albani est né en 1914 à Shkodër dans le nord-ouest de l’Albanie.

La ville natale d’al-Albani ne se trouve pas en Syrie mais près de la frontière Monténégrine.

Sheikh al-Albani n'a jamais été expulsé officiellement de

l'Arabie Saoudite, mais a décidé de partir de lui-même

pour des raisons inconnues à tout le monde. Il n’a jamais

mentionné pourquoi il a dû quitter le Royaume et cela

reste un secret bien gardé jusqu'à ce jour. Il est

regrettable que Stéphane Lacroix utilise cet événement

pour critiquer les savants saoudiens, quelque chose

qu’al-Albani n'a jamais fait.

Le professeur foufou conclut cette partie

de son article avec une autre bévue

monumentale :

« Il s'est ensuite réinstallé dans son pays

de naissance, la Syrie, avant de partir

pour la Jordanie en 1979. »

Mohammed Nasir al-Din al-Albani est né

en 1914 à Shkodër près du la frontière

Monténégrine dans le nord-ouest de

l’Albanie, pas en Syrie. En brossant le

portrait du plus grand savant du Hadith au

siècle passé, le professeur Lacroix a été

incapable de déterminer correctement son

pays de naissance! L'idée que Stéphane

Lacroix se fasse rémunérer pour ses

articles maladroits fait froid dans le dos.

Les « Ijazas » et d'autres perceptions

erronées

Les nombreuses théories mentionnées par

notre expert islamologue tombent en

désordre total. Il n'y a pas une seule

phrase dans son article qui paraît vide

d’erreur, mensonge, fabulation ou

perception erronée. En voici un autre :

« Par conséquent, la science Wahhabite

traditionnelle fut le fruit d'un processus

de transmission et dépendait du nombre

d'ijazas — un certificat avec lequel un savant reconnaît

la transmission de sa science (ou une partie d’elle) à un

de ses élèves, et lui autorise de la transmettre –

attribuées par les savants Wahhabites respectés… »

Les « ijazas » ne sont rien de caractéristique pour ce que

Lacroix appelle le « Wahhabisme », elles ont toujours

existé depuis l’époque des tout premiers Muhaddithin et

des savants en général. Le professeur Lacroix nous

démontre, une fois de plus, son inaptitude à faire des

recherches dans un domaine qu’il prétend pouvoir

expliquer aux autres. Ce que Lacroix n’a pas saisi c’est

qu’il y a plusieurs types d’ijazas. Une catégorie autorise

de transmettre une collection de hadiths à travers une

chaîne de transmission distincte, tandis qu’une autre se

réfère à la maitrise et la connaissance approfondie d'une

certaine œuvre et à la capacité de l'enseigner aux autres.

Le premier type d’ijazas consiste d’autorisations qui

étaient basées sur des sessions de hadith auprès d’un

Sheikh187

et qui avaient souvent lieu à l’époque des

premiers savants du Hadith et contenaient une audience

beaucoup plus large188

. Aujourd'hui, ces sessions

existent toujours, mais ce genre d'ijazas n'est plus

considéré comme un élément décisif dû à

la propagation d'exemplaires imprimés des

livres de source. Les savants saoudiens

contemporains ont presque tous cessé

d’attacher ce degré d’importance à ce type

d’ijazas bien que certains les emploient

toujours pour garder en vie cette pratique

des prédécesseurs189

. De nos jours, avoir

plusieurs ijazas n’est plus forcément une

garantie que la personne soit qualifiée

pour enseigner190

.

Le deuxième type d’ijazas est un certificat

qui témoigne de la maitrise d’un certain

domaine des sciences Islamiques ou d’un

certain livre et qui est accompagné d’une

autorisation de l’enseigner. La raison pour

laquelle al-Albani ne possédait pas un

grand nombre de ce genre de certificats est

parce qu’il a grandi dans un pays avec très

peu de savants Sunnites. Malgré cela,

personne ne l’a considéré comme étant un

savant non qualifié, même pas les

« Wahhabites » qui l’ont invité pour

enseigner dans leur pays.

En présentant l’avis supposé d’al-Albani

sur les ijazas comme un nouvel élément

dans son approche révolutionnaire du

hadith, Lacroix pense avoir trouvé une

nouvelle preuve pour sa déduction

insolite :

« C'est exactement cette logique qu’al-Albani — qui lui-

même, ne possédait que très peu de ce genre de

certificats — allait défier en promouvant son approche

personnelle de la critique. En effet, selon al-Albani, la

transmission n'a aucune importance, car, chaque hadith

187 Cela signifie que l'étudiant présenterait à un Sheikh une certaine

matière dans une science d’une façon précise. Le Sheikh lui

accordera alors une ijaza ou une permission de transmettre cette

science aux autres. 188 Parfois, le nombre de personnes qui assistaient à ce genre

d’assises dépassait 200.000 individus. 189 C.-à-d. sans la présence des sévères conditions imposées par les

Muhaddithin 190 Abdoullah Ibn Mohammed al-Shamrani, « Thabt Mu’allafat al-

Albani », p. 97-98

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

31

Les « ijazas » ont toujours existé depuis l’époque des premiers Muhaddithin

étant suspect, le fait qu'il soit rapporté par un savant

respecté ne peut garantir son authenticité. »

En développant son argumentation, Lacroix confond les

deux types d’ijazas et cela dans un même contexte.

Après avoir décrit les certificats de transmission du

savoir islamique, il mentionne soudainement le

deuxième type d’ijazas qui est exclusivement restreint à

la transmission de hadiths. Par conséquent, notre

professeur donne l’impression que les deux types

d’ijazas sont une chose identique poussant le lecteur à

croire qu’al-Albani dédaignait les ijazas. Ceci est

impossible, car nous parlons d’une des façons reconnues

dans la transmission du hadith qui est universellement

acceptée chez les Muhaddithin. Les livres d’al-Albani

contiennent d’innombrables exemples où il mentionne

comment certains narrateurs transmettent des hadiths

authentiques par le biais d’une ijaza191

. De même, sa

collection de hadiths authentiques intitulée « Silsila al-

Ahadith al-Sahiha » déborde d'exemples de ce type de

transmission. Voici une des paroles d’al-Albani:

« Je dis que cette chaîne de

narrateurs est correcte et que le

hadith est authentique parce qu'il a

été renforcé par d’autres hadiths par

le biais de la ijaza. »192

Comment le professeur Lacroix a-t-il

pu penser qu’al-Albani considérait

cette approche célèbre d'être sans

importance ? Une autre interprétation

plausible des récits incohérents de

Lacroix est qu’il croit que la

succession des rapporteurs du hadith existe jusqu’à ce

jour dans une chaine de transmission ininterrompue qui

comprend donc les Muhaddithin contemporains. Si c’est

vraiment sa compréhension, alors il est parfaitement

connu que l’époque de la transmission narrative

personnelle s’est terminée avec la composition

universelle des hadiths dans les recueils canoniques de

hadiths au IXe et Xe siècle. Mais peu importe si Lacroix

l’a compris de la première ou de la seconde façon, son

allégation est fausse dans les deux cas.

Or, en analysant l’assertion suivante de Lacroix, il

semble plutôt qu’il est d’avis que les Muhaddithin

contemporains font encore partie de la chaine de

transmission du hadith :

« Au contraire, le processus important est

l’accumulation — un bon savant de hadith est quelqu'un

qui a mémorisé un grand nombre de hadith et, de façon

191 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, voir ses commentaires dans

« Al-Tankil Bima fi Ta’nib al-Kawthary min al-Abatil » 192 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Silsila al-Ahadith al-

Sahiha » [Recueil de Hadiths Authentiques], 1/8

plus importante, les biographies d'un grand nombre de

narrateurs. »

Voici une nouvelle tentative de dépeindre les

Muhaddithin comme des gens qui n’emploient pas le

raisonnement indépendant, car ‘ils dépendent

uniquement de la mémorisation’. Or, il est bien connu

qu’une personne ne peut jamais devenir un vrai

Muhaddith sans avoir profondément étudié les autres

sciences Islamiques de la même façon qu’une personne

ne peut être considéré comme un expert dans les

mouvements Islamiques sans posséder une connaissance

de base de l’Islam, ses sciences et son histoire.

À nouveau, Lacroix confond les choses. Ce qu’il attribue

ici à al-Albani est une description de la réalité des

savants du Hadith à l’époque avant la composition des

recueils de Hadith. Or, le professeur comprend qu’al-

Albani voyait ceci comme une condition pour les

Muhaddithin au passé et au présent. Voici ce que disait

al-Albani à propos des conditions du savant du Hadith :

« Pour résumer, nous disons que la

seule condition requise pour juger les

hadiths authentiques ou faibles est

que la personne possède la

compétence nécessaire. En ce qui

concerne la mémorisation, alors c’est

une autre chose. Si la personne

possède un grand nombre de hadiths

mémorisés, alors c'est préférable.

Mais s'il ne possède pas cette grande

quantité de hadiths, alors ce n'est pas

une condition. Et cela a été établi par

les savants antérieurs. » 193

De plus, al-Albani a déclaré qu'il y avait un consensus

chez les savants dans la question :

« Les grands savants sont unanimes pour dire que la

seule et unique condition pour celui qui désire juger

authentiques ou faibles les hadiths, est qu'il maitrise

bien la science du hadith... »194

Mais selon le professeur Lacroix, l’importance est

uniquement d’accumuler et de mémoriser des hadiths.

Cette fable de Lacroix sert d’ailleurs d’appui pour sa

thèse qui veut que les « Wahhabites saoudiens » soient

devenus savants par leur descendance familiale ou

tribale, non par leur connaissance :

« Ainsi, la science du Hadith peut être mesurée selon des

critères objectifs qui ne sont pas liés à la famille, la

193 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Al-Rad A’la Ta’aqub al-

Hadith », p.60 194 Ibid, p.57

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

32

Pour Lacroix, les Muhaddithin contemporains font partie de la chaine de narrateurs du hadith also includes.

tribu ou à l’origine régionale, ce qui a permis une

certaine mesure de méritocratie qui fut auparavant

absente. »

Ce n'est certainement pas la première fois que Lacroix

représente les Saoudiens comme des ignorants et leur

société comme étant non méritocratique. C'est en effet,

la perception raciste que les islamophobes ont stimulée

et propagée dans les médias occidentaux durant de

longues décennies.

Au lieu de parler sans science sur les conditions des

savants du Hadith, le professeur Lacroix ferait peut-être

mieux de se poser la question s’il remplit

lui-même les conditions pour travailler en

tant que chercheur au CERI où « l’ancrage

empirique des recherches, adossé à une

connaissance des langues195

et des terrains,

a vocation à nourrir les débats conceptuels

en sciences sociales »…selon le site du

centre.

La Connexion Lacroix-Bin Laden

Il ne fait plus aucun doute que, dans sa

description de Sheikh al-Albani, le

professeur Lacroix a recueillis les

différentes critiques des ennemis de

l’époque du Sheikh. Après avoir exploité

les argumentations fallacieuses des

islamophobes laïques, des Soufis, des Haddadis et des

orientalistes, Lacroix reprend maintenant les calomnies

de la secte des Takfiris:

« A la fin des années 1980, certains élèves d'al-Albani,

sous la direction d’un Sheikh Médinois nommé Rabi’ al-

Madkhali, ont formé un réseau religieux non officiel

généralement connu sous le nom d'al-Jamiyya (‘les

Jamis’ sont nommés après un de leurs membres clés,

Mohammed Aman al-Jami). »

Le terme « al-Jamiya » fut introduit par les Takfiris et

des membres de la secte des neo-Khawarij après la

Guerre de Golfe pour riposter aux paroles des grands

savants comme Sheikh Ibn Baz, Mohammed Aman al-

Jami et d’autres qui avaient prononcé des fatwas qui

autorisaient de faire appel aux américains pour repousser

l’agression irakienne de Saddam Hussein. Les savants

d’Ahl al-Sounna qui avaient prononcé cette fatwa furent

couvert d’injures par les Takfiris qui les surnommaient

les « savants d'Amérique ». Comme Sheikh Mohammed

Aman al-Jami réfutait ouvertement les ambiguïtés de ces

gens qui adhéraient aux idéologies révolutionnaires et

qui suivaient le chemin de l'excommunication, ils ont

commencé à taxer de « Jamis » tous ceux qui n'ont pas

195 …y compris les prépositions comme « min » par exemple.

rejeté la présence militaire américaine dans le Royaume

Saoudien. Le terme est aussi utilisé par les ennemis de

l'appel au Tawhid pour aliéner les gens de la croyance

musulmane196

. Il n'y a bien entendu aucune secte ou

réseau religieux au nom de « al-Jamiyya » et personne

n’a jamais prétendu appartenir à ce groupe fictif197

. De

plus, Mohammed Aman al-Jami a toujours condamné la

formation de groupes et de sectes et n’aurait jamais

admis que des gens s’associent à un groupe qui est

dérivé de son nom198

. Or, pour le professeur Lacroix, le

Sheikh fut un membre clé de cette soi-disant

organisation.

En employant le terme « al-Jamiyya »,

Stéphane Lacroix a rejoint les rangs des

partisans d’Osama Bin Laden dans leurs

attaques des Salafis. Espérons seulement

que ce lien apparent à al-Qaïda ne va pas

susciter une attaque de drone américain sur

les immeubles de Sciences Po et du CERI à

Paris d’où opère le professeur Lacroix.

Certes, plusieurs endroits dans ce monde

ont déjà été dévastés par les yankees pour

des liens aux terroristes beaucoup moins

évidents que celui-ci.

Comme d’habitude, Stéphane Lacroix n’a

pas entrepris la moindre recherche sur

l’origine du terme « al-Jamiyya » et s’est

tout simplement contenté de suivre

aveuglément son gourou saoudien Mansur al-Nuqaidan

qui a acquis cette appellation lors de ses fréquentations

avec ses anciens compagnons Takfiris.

Le professeur Lacroix va encore plus loin et exploite

cette appellation forgée comme un nouvel argument

dans sa thèse manigancée pour représenter les savants

saoudiens comme une bande de racistes:

« Au-delà de leur focalisation sur le Hadith, les Jamis

sont devenus connus pour souligner avec force l’appel

d’al-Albani à ne pas participer à la politique et à

dénoncer ceux qui le faisaient. À nouveau, beaucoup de

Jamis étaient d'origine périphérique (al-Madkhali était

de Jazan, à la frontière yéménite, alors qu'al-Jami était

d'Ethiopie) et furent, par conséquent, exclus de toutes les

positions principales dans le champ religieux. »

196 Abdul-Aziz Ibn Rayyis, « Al-Jamiyya wa al-Wahhabiyya wa al-

Hachwiyya Alqab Tanfiriya », [Les Jamis, les Wahhabites,

Hachwiya, des termes d’aliénation], p.7 197 Bilal Ibn Abdul-Ghani al-Salimi « Abra’a Ila Allah min al-

Jamiyya wal Madkhaliyya », [Je cherche refuge auprès d’Allah des

Jamis et des Madkhalis], p. 81-82 198 Ibid, p.87, 117

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

33

En dépit de ses origines, Sheikh Mohammed Aman al-Jami a eu l’honneur de pouvoir enseigner à la Mosquée du Prophète à Médine.

Comme nous l’avions déjà mentionné, l’appellation des

Jamis fut basée sur le rejet de la secte des neo-Khawarij

des fatwas prononcées lors de la Guerre du Golfe et non

sur des critères tribaux ou raciaux puisque plusieurs

savants Saoudiens d’origine ‘non périphérique’ (comme

par exemple Shaikh Saleh al-Fawzan) ont également été

accusé d’être membre de ce soi-disant ‘réseau non

officiel’. En conséquence, Sheikh Mohammed Aman al-

Jami et Sheikh Rabi’ al-Madkhali n'ont jamais été exclu

de positions principales dans le champ religieux, en

dépit de leurs origines étrangères ou périphériques. Pour

clarifier ceci, il suffit de mentionner que Sheikh

Mohammed Aman al-Jami faisait

partie de l’élite religieuse qui a eu

l’honneur de pouvoir enseigner au

« Masjid al-Nabawi », la grande

Mosquée du Prophète. Sheikh al-

Jami fut également embauché

comme professeur de dogme (aqida)

à la faculté de « Shari’a » de la

prestigieuse Université Islamique de

Médine. Mais, ce qui prouve hors de

tout doute qu’il ne fut jamais exclu

par « l’établissement religieux

Wahhabite », est que le Sheikh

éthiopien était un ami proche du

mufti de l’Arabie à l’époque, Sheikh Abdel-Aziz Ibn

Baz, avec qui il a effectué plusieurs voyages199

. Il a

également eu de nombreux entretiens personnels avec le

mufti Sheikh Mohammed Ibn Ibrahim Âl al-Sheikh200

.

De même, Sheikh Rabi’ al-Madkhali n’a jamais été

exclu du fait qu’il a grandi à la frontière yéménite

puisqu’il fut à la tête du département « al-Sounna » de

l’Université Islamique de Médine et était membre du

département d’enseignement. Il y a, en effet, une liste

innombrable de savants non-saoudiens et de savants

d’origine périphérique qui ont atteint les positions

religieuses les plus élevées dans le Royaume Saoudien

grâce à leur savoir islamique, non à leur origine ou leur

tribu.

Dans une prochaine étape, le professeur Lacroix prétend

que le gouvernement saoudien aurait financé ce groupe

imaginaire des Jamis:

199 Sheikh Mohammed Aman al-Jami accompagna Sheikh Ibn Baz

pendant ses voyages à Riyad après l'ouverture de l'Institut de la

Science (al-Ma’had al-I’lmi). Il fut également très proche du Mufti

pendant ses assises de sciences. 200 Imaginez-vous maintenant un étudiant Ethiopien qui atterrit en

France et qui finit comme professeur dans une des grandes

universités de l’hexagone. Ensuite, imaginez-vous que ce même

étudiant africain noue une amitié avec une personne haute placée

dans le gouvernement français (genre Sarko ou Valls) et effectue des

voyages avec elle. En effet, ce n’est même pas imaginable. Or,

Stéphane Lacroix a eu l’audace de prétendre que Sheikh al-Jami fut

exclus par les saoudiens dû à ses origines éthiopiennes.

« Ils gagneraient finalement de l’importance au début

des années 1990, lorsque le gouvernement saoudien les

appuya financièrement et institutionnellement dans

l'espoir de créer un contrepoids idéologique et

apolitique à l'opposition islamiste mené par 'al-Sahwa

al-Islamiyya’ (l'Éveil Islamique), un mouvement

religieux-politique et informel qui est apparu en Arabie

Saoudite dans les années 1960. ‘Al-Sahwa al-Islamiyya’

fut le résultat d'une hybridation entre le Wahhabisme

dans les affaires religieuses, et les idées de la Confrérie

Musulmane, dans les affaires politiques. »

Lorsque des savants comme Sheikh

al-Jami et Sheikh al-Madkhali

avaient réfuté des individus qui

adhéraient au mouvement d’al-

Sahwa, ces derniers les ont accusés

d’être les apologistes du

gouvernement saoudiens, voir leurs

agents. En prétendant que ces

savants se sont fait influencer dans

leurs fatwas par des financements

gouvernementaux, Stéphane Lacroix

rejoint à nouveau les Takfiris dans

leurs attaques calomnieuses à

l’égard des savants Sunnites

reconnus.

A-t-il réellement fallut trois décennies pour le

gouvernement saoudien avant de contrecarrer le

mouvement d’al-Sahwa en finançant quelques savants

« d'origine périphérique »? La thèse conspirationniste de

Lacroix devient très complexe. D’où obtient-il ses

informations dérisoires ? Si ces savants en questions

avaient réellement été soutenus institutionnellement,

alors où sont leurs organisations, où sont leurs

immeubles et où sont leurs institutions? Il est bien connu

que le gouvernement saoudien n’a pas besoin de

favoriser financièrement les savants du pays puisqu'ils

sont, à la base, déjà tous bien rémunérés.

Lacroix fait passer al-Albani pour un Takfiri

En survolant les fables de Lacroix dans cet article, une

question fondamentale surgit : pourquoi le professeur se

fatigue-t-il autant à inventer toutes ces histoires ? Il le

fait pour arriver à une conclusion finale qui sert à porter

atteinte à l’image du Muhaddith albanais. L’approche

« révolutionnaire » d’al-Albani du Hadith, son conflit

dissimulé avec les savants saoudiens, son adhésion

présumée au « Wahhabisme » ainsi que sa soi-disant

critique d’Ibn Abdel-Wahhâb auraient engendré

d’audacieux entrepreneurs religieux indépendants qui

mettraient au défi le « Wahhabisme ». Voici par quoi

Lacroix conclut son article :

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

34

Dans ses articles, S. Lacroix tente fallacieusement de lier les Sheikhs Ibn Baz, Moqbil et al-Albani à l’attentat de Juhayman à la Mecque en 1979

« Par conséquent, les idées d’al-Albani ont donné aux

entrepreneurs indépendant et religieux Salafis une arme

pour se frayer un chemin dans des cercles qui,

auparavant, étaient très fermés… Pour toutes ces

raisons, les idées d’al-Albani deviendraient très vite un

moyen pour les entrepreneurs religieux Salafis, qui

n’étaient pas issus de l'aristocratie Wahhabite, de défier

la hiérarchie existante. »

Le message que Lacroix essaie de faire passer, est que

l'héritage d’al-Albani se compose d’un groupe de jeunes

aux idées insensées qui s’opposent aux savants

saoudiens. Or, Lacroix ne semble pas avoir saisi que les

gens qui défient les savants saoudiens et la « hiérarchie

existante » sont précisément les Takfiris et neo-Khawarij

connus pour rendre mécréant Sheikh al-Albani, pas pour

le défendre !

Les allégations du professeur Lacroix sont loin d’être

innocentes, car il tente d’argumenter

que ce soi-disant défi des jeunes

albanistes de « l'aristocratie

Wahhabite » fut seulement la phase

initiale d'un mouvement qui

résulterait plus tard en attentats

terroristes :

« Vers le milieu des années

soixante, plusieurs disciples d’al-

Albani à Médine ont fondé al-

Jama’a al-Salafiyya al-Muhtasiba

(Le Groupe Salafi qui Ordonne le

Bien et Interdit le Mal), une faction

radicale, dirigée par al Juhayman al-‘Utaybi, qui finira

par assaillir la grande mosquée de la Mecque en

novembre 1979. »

Le professeur Lacroix a rédigé une biographie de Sheikh

al-Albani truffée de fabrications et d’arguments

fallacieux dans le but unique de le lier à un mouvement

terroriste.

Les islamologues, orientalistes et « spécialistes » du

Moyen-Orient sont bien conscients qu’en liant des

personnages musulmans au terrorisme ils attireront

toujours plus d’attention. En élargissant de façon

imaginaire le réseau d’al-Qaida et en diabolisant la

communauté musulmane et ses savants reconnus, leurs

articles auront toujours plus de chance d'être publiés.

L’assaut de Juhayman de la grande mosquée de la

Mecque n'était en aucune façon lié à Sheikh al-Albani et

encore moins à son dogme ou à ses idées. L’attentat fut

basé sur le rêve présumé de certains partisans de

Juhayman dans lesquels ils ont vu que Mohammed al-

Qahtani était supposément le mahdi attendu. Peu après,

de nombreux témoignages sont apparus dans le monde

arabe de personnes qui prétendaient également avoir eu

le même rêve qui présageait l’arrivée du mehdi dans la

personne d’al-Qahtani. Le groupe de Juhayman a ensuite

exploité cette « répétition » de rêves pour corroborer leur

assertion que leur gourou fut réellement le mahdi. Dans

ses livres, al-Albani mentionna que bien avant

Juhayman, de nombreuses personnes démentes avaient

déjà faussement prétendu être le mehdi et que cela avait

également résulté en des agitations et séditions

ténébreuses. De même, il a expliqué que Juhaiman

s’était égaré justement à cause de son ignorance

immense et a déclaré que ses adeptes furent des simples

d’esprit et des scélérats.201

Le chercheur égyptien Dr

Mohammed al-Muqaddam explique dans son livre « al-

Mahdi » que les partisans de Juhayman avaient, à ce

stade, été imprégnés par l'idéologie Soufie dans laquelle

les rêves ont le même statut de véracité que la révélation

divine202

. Il est important de noter que ses adeptes sont

tombés dans un suivi aveugle absolu qui, par

conséquent, contredisait entièrement

les enseignements d’al-Albani. De

même, leur idéologie de « khuruj »

et de « takfir » fut entièrement

opposée aux principes salafis de

Sheikh al-Albani.

Dans un article qu’il a consacré à

Juhayman203

, le professeur Lacroix a

affirmé lui-même que le

groupement de Juhayman fut un

groupe politique204

alors qu’il

certifie qu'al-Albani n’était pas du

tout intéressé par la politique en

attribuant au Sheikh la parole que « la bonne politique

est d’abandonner la politique ». Cependant, d'une façon

ou d'une autre, Stéphane Lacroix veut nous faire croire

que les membres de ce groupe terroriste étaient des

partisans de Sheikh Albani ?!? Au moment de l'attaque,

Juhayman et ses partisans n'avaient plus rien en commun

avec le credo de la Salafiya ni avec les savants Salafis.

De plus, ils n'étaient pas les disciples ou étudiants d’al-

Albani mais plutôt un groupe de novices qui assistaient à

certains de ses cours tout comme ils assistaient au cours

201 Mohammed Nasir al-Din al-Albani, « Silsila al-Ahadith al-

Sahiha » [Recueil de Hadiths Authentiques], Vol. 8 (Hadiths 1529,

1924 et 2236) 202 Dr Mohammed Ahmed Isma’il al-Muqaddam, « Al-Mahdi »,

p.557-559 203 Dans l’article « Rejectionist Islamism in Saudi Arabia… » coécrit

avec l’islamophobe norvégien Thomas Hegghammer, le professeur

Lacroix prétend fallacieusement que son histoire sur Juhayman est

basée des recherches approfondies. Or, une petite recherche démontre

très vite qu’il s’agit d’un texte plagié en grande partie de l'article

arabe « Juhayman al-Uteybi, Maqati’ min Hayat Astura » écrit par

Mansur al-Nuqaidan que beaucoup considèrent comme la version

saoudienne de Hirshi Ali. 204 Stéphane Lacroix et Thomas Hegghammer, « Rejectionist

Islamism in Saudi Arabia : The Story of Juhayman al-‘Utaybi

Revisited », p.12

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

35

Selon Stéphane Lacroix, des « savants Salafis » – âgés d’une vingtaine d’années – ont participé aux attentats de Riyad en 2003

de beaucoup d'autres savants. Plusieurs années avant

l’attentat de 1979, ils se sont égarés dans les ténèbres du

sectarisme. Ils ont d’ailleurs été conseillés par certains

Sheikhs Salafis qui leur ont demandé de ne pas former

un groupuscule indépendant.

Prétendre que cette attaque cruelle qui a eu lieu seize ans

après le départ d’al-Albani du Royaume soit liée à ses

idées ou à son idéologie est aussi farfelue que de

prétendre que Saddam Hussein avait un lien quelconque

avec al-Qaïda. Mais comment peut-on s’attendre à ce

que le professeur Lacroix comprenne réellement les

idées de Sheikh al-Albani en sachant qu’il n’a même pas

réussi à déterminer correctement son pays de naissance ?

Le message sous-entendu qui est également la

conclusion tirée de l’article du professeur Lacroix est

qu’un groupe d’étudiants d'al-Albani qui promouvaient

le rôle central du Hadith et défiaient « l’aristocratie

religieuse Wahhabite » ont fini par

commettre des attaques terroristes :

« À nouveau, la plupart de ces

savants étaient des figures

périphériques, tel que Sulayman al-

'Alwan. Né en 1970, al-'Alwan a

commencé à être connu comme savant

lorsqu’il avait la vingtaine. À part ce

jeune Sheikh d'origine non tribale, il y

avait également Abdallah al-Sa’d, de

qui la famille était venue de la ville de

Zubayr situé dans l’Irak Moderne.

Tous les deux deviendraient plus tard des figures clés

dans le mouvement Jihadi saoudien qui, après avoir

défié l'ordre religieux, se sont mis à défier l'ordre

politique. Par conséquent, ils ont été arrêtés et

emprisonnés après les attentats à la bombe en mai

2003. » 205

Et voilà ! Lacroix a d’abord imaginé une approche

révolutionnaire du Hadith qu’il a machiavéliquement

attribué à Sheikh al-Albani. Ensuite, il a élaboré un

scénario dans lequel cette approche a mené à des

frictions avec les savants de l’Arabie et, plus tard, à une

révolte contre « l’aristocratie Wahhabite ». Il conclut en

insinuant que l’attentat de Riyad en 2003 fait partie de

l’héritage de Sheikh al-Albani en liant l’assaut du

Haram al-Mekki en 1979 à certains de ses étudiants

présumés. Or, rattacher, directement ou indirectement, le

grand Muhaddith du siècle passé à des actes de

terrorisme montre que le professeur Lacroix est une

immonde créature qui n’éprouve aucun scrupule à

souiller l’honneur des grands savants musulmans. Quelle

205 Selon Lacroix, des jeunes d’une vingtaine d’années sont devenus

connus pour être des savants Salafis aux côtés de Sheikh Ibn

Utheymine et Sheikh Ibn Baz. De plus, ces jeunes savants Salafis ont

fini par commettre des attentats terroristes à la bombe.

est l’utilité de mentionner ces attentats à la bombe

commis par des gens qui détestaient et rendaient

mécréant al-Albani? Certes, les racistes antimusulmans

s’acharnent à lier tout ce qui revient aux enseignements

originaux de l’Islam au terrorisme. Il y a

malheureusement dans ces méthodes ignobles et

perverses de quoi prospérer dans le monde de la

recherche académique.

Le vrai Héritage de Sheikh al-Albani

L’Albanie, le pays le plus pauvre du continent européen,

est uniquement connue dans le monde musulman grâce à

Sheikh Mohammed Nasir al-Din al-Albani et son

remarquable patrimoine scientifique. Le dictateur

albanais Ahmed Zogolli n'aurait jamais été cité dans un

livre arabe si la biographie d’al-Albani ne mentionnait

pas comment lui et sa famille ont dû fuir son régime

dictatorial et laïc.

En France, le professeur Stéphane

Lacroix est représenté dans les

médias comme spécialiste de l’Islam

politique et expert de l’Arabie

Saoudite. Or, ses articles sur les

musulmans et leur religion sont des

compilations frauduleuses

d’illusions, de distorsions de faits, de

contrevérités flagrantes et de

compréhensions erronées dans

lesquelles il prend une approche

révolutionnaire dans la diffamation

de l’Islam et les musulmans. Le professeur Lacroix est

inapte à mener des recherches académiques dans le

domaine qu’il prétend maitriser avec si grande

confiance. Ses analyses et recherches « académiques »

s’avèrent être un mélange de recherches Google, de

plagiat éhonté et d’anciennes ambiguïtés orientalistes

modifiées à sa guise. Stéphane Lacroix est bien

conscient qu'il peut écrire des articles en toute impunité

tant qu’il traite des sujets avec lesquels son public n’est

pas familier. Et comme c’est le cas pour bien d'autres

enseignants à Sciences Po, il tire de grands avantages de

l’industrie fructueuse qui se cache derrière

l’islamophobie. Il est d’ailleurs très déplorable qu’un

centre comme le CERI — qui se vante de « valoriser les

trajectoires historiques des sociétés étudiées à travers ses

travaux » — serve de tremplin pour des islamophobes

qui, justement, n’ont aucun respect des sociétés qu’ils

étudient.

Cependant, une chose reste incontestable: dans ses

fables, le professeur Lacroix fait preuve d’une

imagination débordante. Il est ingénieux et pond des

articles invraisemblables qui contiennent des intrigues

détaillées qui sont toutes le fruit béni de son imagination

féconde. Il n'y a aucun doute que Stéphane Lacroix a le

LES FABLES DE LACROIX COMMENTEES PAR L’ŒUVRE DE SHEIKH AL-ALBANI

36

Le dictateur albanais laïc Ahmed Zogolli collaborait avec l’Italie Fasciste

Stéphane Lacroix, un charlatan islamophobe en croisade contre les musulmans et l’Islam.

profil idéal d’un écrivain de romans policier et, peut-être

même, d’un comédien humoriste.

On peut conclure que les islamologues qui

sont incapables d'analyser les fondations de

la croyance musulmane, l’œuvre des

Muhaddithin ainsi que l'influence et

l’expansion des sectes islamiques dans un

contexte historique viendront toujours avec

les déclarations les plus incohérentes. Mais

en France, il ne faut pas être expert dans le

domaine pour attirer l'attention des médias.

Khalida Messaoudi206

est un parfait exemple

de comment les médias français sont prêt à

absorber toute forme de diffamation

islamophobe, peu importe la profonde

débilité mentale de ces « experts ».

Messaoudi a proclamé, avec une rare

insolence, que la prosternation dans la prière

musulmane est « une position d’esclave

inventée par des Bédouins esclavagistes de

l’Arabie Saoudite ». En contrepartie, les

auteurs musulmans qui ont les compétences

d’effectuer des recherches académiques sont

exclus de toute participation dans les médias

principaux qui assurent ainsi un cordon

sanitaire pour éviter que l’assaut médiatique

mené contre « les barbus » et les porteuses

de niqabs soit interrompu.

Jusqu'à ce jour, la France n'a pas de loi

interdisant les diffamations et injures à caractère

islamophobe, comme c’est le cas pour les juifs toujours

si « intouchables ». Cette politique à deux mesures a

permis aux icônes de l'islamophobie française de se

présenter comme de bons Samaritains qui prétendent

défendre « le monde laïque et civilisé » des « grands

maux de l'Islam ». Dans les médias et la politique, ils

sont de plus en plus nombreux à se justifier et à se vanter

de leur haine envers les musulmans pratiquants et leur

religion. Tous les jours, la France ressemble un peu plus

à l’Allemagne Nazie.

Lorsque Sheikh al-Albani décède en 1999, ce fut un jour

de deuil pour des millions de musulmans au monde

entier. Bien que le Sheikh ne soit plus dans ses livres à

rechercher des hadiths, son œuvre continue d’exister et

personne ne doute que ce Muhaddith, si unique à son

époque, ne sera jamais oublié. Ses nombreuses

recherches scientifiques et ses écrits profitables pour la

Oumma ont fait de Mohammed Naser al-Din al-Albani

un homme qui sera aimé pour toujours. Quant au

professeur Lacroix, alors c’est l’un des nombreux

206 Khalida Messaoudi est une islamophobe Algérienne mis sur un

piédestal pas les medias antimusulmans. Elle est professeure de

mathématiques, mais ses attaques contre l’Islam en France ont fait

d’elle un expert de la religion musulmane.

charlatans issus du fanatisme laïciste français qui a

gâché sa vie dans la calomnie de la religion musulmane.

Il s’est entièrement dévoué à la cause des xénophobes

antimusulmans qui ont pour but unique de

porter atteinte à l’image des musulmans

qui souhaitent pratiquer ouvertement, et en

toute liberté, leur religion. Le professeur

Lacroix sera oublié, son discours

obscurantiste dissoudra sous la lumière

éclatante du savoir musulman et ses écrits

diffamatoires continueront ainsi à être

connus comme des escroqueries qui

disparaitront à jamais dans les ordures de

la propagande islamophobe…207

K. El Hidjaazi208

REMARQUE : Suite à la publication de cette

réponse sur ‘stéphane-lacroix-sciences-

po.com’, il semble que Stéphane Lacroix a fait

appel à l'assistante de direction à Sciences Po

pour porter plainte contre ce site dans lequel

sont divulguées ses fourberies scientifiques.

Ainsi, Olivia Ameye, a exigé à notre hébergeur

que le site soit supprimé au plus vite possible,

car celui-ci, selon elle, contiendrait une

usurpation d'identité. Bien entendu, ceci est

faux, car, à aucun moment, n'avons-nous

prétendu être Stéphane Lacroix ou Sciences

Po.

Il ne fait plus de doute que Sciences Po

cherche, coute que coute, à défendre ses employés

islamophobes. Alors que beaucoup s’attendaient justement à

une plainte contre Stéphane Lacroix pour racisme

antimusulman, plagiat et diffamation, il semble que Sciences

Po assume pleinement la défense de l'islamophobie au sein de

son institution.

Pour justifier leurs attaques continues visant la communauté

musulmane, les islamophobes en France font souvent appel à

la liberté d'expression, mais lorsque les musulmans désirent

s'exprimer et se défendre contre les affronts portés à l'égard

de l'Islam et des membres de leur communauté, il n'y plus de

liberté d'expression, ni même de droit à l'autodéfense.

Plusieurs nouveaux sites apparaîtront bientôt (incha Allah)

pour mettre au grand jour les tromperies de l'islamophobe

Stéphane Lacroix. La résistance au fascisme antimusulman et

à la diffamation islamophobe des Tartuffes islamologues

continu…

Les adresses des nouveaux sites seront postées en bas de ce

document PDF.

207 Les recherches pour cet article ont été faites dans la bibliothèque

de « Dal al-Hadith » à Ma’bar (Yémen). Je demande à Allah de

récompenser Sheikh Mohammed al-Imam pour mettre à disposition

aux étudiants la bibliothèque de son institut précieux... 208 Article original: « Sheikh al-Albani’s works reply to Stéphane

Lacroix’ revolutionary Lie »