Lecture à vue en régions aiguës à la guitare : L’élaboration d’un plan de travail pour...

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UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL LECTURE À VUE EN RÉGIONS AIGUËS À LA GUITARE : L’ÉLABORATION D’UN PLAN DE TRAVAIL POUR FAVORISER DES AUTOMATISMES DE LECTURE TRAVAIL DE RECHERCHE PRÉSENTÉ À LA FACULTÉ DE MUSIQUE EN VUE DE L’OBTENTION DU GRADE DE DOCTEUR EN MUSIQUE OPTION INTERPRÉTATION (GUITARE) PAR DANILO BOGO HIVER 2013

Transcript of Lecture à vue en régions aiguës à la guitare : L’élaboration d’un plan de travail pour...

UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL

LECTURE À VUE EN RÉGIONS AIGUËS À LA GUITARE :

L’ÉLABORATION D’UN PLAN DE TRAVAIL POUR FAVORISER DES

AUTOMATISMES DE LECTURE

TRAVAIL DE RECHERCHE PRÉSENTÉ À LA FACULTÉ DE MUSIQUE EN

VUE DE L’OBTENTION DU GRADE DE DOCTEUR EN MUSIQUE OPTION

INTERPRÉTATION (GUITARE)

PAR DANILO BOGO

HIVER 2013

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REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier sincèrement mon directeur de recherche, Peter McCutcheon, pour

m’avoir appuyé et encouragé tout au long des mes études doctorales.

Je remercie également ma codirectrice, Isabelle Héroux. Son regard, sa rigueur, son

suivi ainsi que sa compréhension et sa patience m’ont été très précieux. Je la remercie

également pour son engagement dans cette recherche.

Un merci tout particulier à Tidiane Seri-Gnoleba et Anne-Marie Leclerc pour la révision

linguistique. Je tiens aussi à exprimer ma reconnaissance à mes élèves qui ont collaboré

et inspiré cette recherche.

Je voudrais exprimer ma gratitude à mes parents qui m’ont apporté, malgré la distance,

un appui inconditionnel et un support moral précieux.

Enfin, je remercie ma conjointe Duany Parpinelli pour son soutien, sa compréhension et

son amour. Muito Obrigado !

ii

Table de matières

Chapitre 1 – Problématique et méthodologie ..................................................................... 1 Chapitre 2 – Considérations théoriques ........................................................................... 12

2.1 L’architecture cognitive ......................................................................................... 13 2.2 La mémoire dans la lecture à vue .......................................................................... 15

2.2.1 Construction de connaissances .................................................................. 18 2.2.2 Récupération des informations .................................................................. 19 2.2.3 L’importance des automatismes ................................................................ 20

Chapitre 3 – Revue de littérature ...................................................................................... 22 3.1 Références scientifiques ........................................................................................ 22

3.1.1 Leitura à primeira vista no violão : Um estudo com alunos de graduação par Pastorini (2011). ......................................................................... 22 3.1.2 Leitura à primeira vista ao violão : A influencia da organização do material de estudo par Fireman (2010). ............................................................. 24

3.2 Références professionnelles .................................................................................. 26 3.2.1 Les méthodes de lecture ............................................................................ 26

3.2.1.1 Sight reading for the classical guitar par Robert Benedict (1985) .. 27 3.2.1.2 Pattern perception as a basis for the development of sight-reading for the classical guitar par J. L. Passalacqua (2000). ..................... 30 3.2.1.3 La lecture à vue en position par K. Stevens (2006). ......................... 33 3.2.1.4 Progressive reading for guitarists par S. Dogdson et H. Quine (1975) ............................................................................................................ 35 3.2.1.5 Musicianship and sight reading for guitarists par Oliver Hunt (1977). ........................................................................................................... 38 3.2.1.6 Conclusion ........................................................................................ 42

3.2.2 Les études dédiées aux positions ............................................................... 43 3.2.2.1 Méthode complète pour la guitare divisée en trois parties par Carcassi (1836) et Méthode complète pour guitare par Carulli. (?) ............ 43 3.2.2.2 Nine etudes in nine positions Peter Danner (1982) .......................... 44 3.2.2.3 Estudos par Paulo Porto Alegre (1991) ............................................ 44

Chapitre 4 – Conception du plan de travail ..................................................................... 45 4.1 Les études de changement d’armure ..................................................................... 48 4.2 Les études des accords et les tableaux de triades .................................................. 49 4.3 Le suraiguë ............................................................................................................ 53

Conclusion ........................................................................................................................... 57 Bibliographie: ...................................................................................................................... 60 ANNEXE 1: ANNEXE 2: ANNEXE 3:

1

Chapitre 1 – Problématique et méthodologie

Arriver à une bonne définition du terme « lecture à vue » n’est pas une tâche facile.

Plusieurs éléments sont à prendre en considération afin de trouver une définition

adéquate. Par exemple, si je fais un pré examen de la partition, soit en regardant

l’armure, la mesure, quelques passages plus difficiles ou la réalisation d’un doigté, peut-

on encore parler de lecture à vue ? Si j’ai déjà entendu la pièce, et que je sais comment

elle sonne, peut-on encore parler de lecture à vue ? Si j’ai déjà lu la pièce il y a plusieurs

années, même si je ne me rappelle plus du morceau, peut-on encore parler de lecture à

vue ? Loin d’entrer dans des discussions plus approfondies en ce que concerne le but de

ce travail, nous retenons une définition plus objective sur ce sujet, celle de Gabrielsson

(2003, p. 243) : « La lecture à vue signifie la performance d’une partition sans aucune

répétition antérieure à l’instrument pour lequel elle a été composée, jouer a prima vista1

». Donc, grosso modo, jouer sans avoir lu (avec ou sans l’instrument) le morceau

auparavant.

Mais pourquoi est-il important d’avoir une bonne lecture à vue ? Lehmann et McArthur

(2002, p. 136) nous donnent des exemples de l’importance de cette habilité en

soulignant les examens d’admission pour les pianistes accompagnateurs, les musiciens

d’orchestres ou de studio d’enregistrement qui n’ont pas beaucoup de temps pour

répéter leurs parties, ou encore, dans le choix de répertoire pour des ensembles ou

chorales, le chef d’orchestre va très souvent vouloir avoir un aperçu de comment

« sonne » un morceau en réalisant une lecture à vue, et bien sûr, dans la pratique

personnelle, les musiciens font souvent aussi leurs choix de répertoire par l’entremise de

la lecture à vue.

1 Sight reading means performing from a score without any preceding practice on the instrument of that score, to perform a prima vista. (toutes les traductions ont été réalisées par l’auteur)

2

En ce qui concerne la guitare classique, l’habilité de lecture ne semble pas être une

caractéristique développée chez les guitaristes. Fireman (2010) et Pastorini (2011) citent

une blague à propos de ce sujet : « Si tu veux qu’un guitariste arrête de jouer, mets une

partition devant lui2 ». Dogson et Quine (1975), en parlant du même sujet dans la

préface de leur méthode, disent qu’ils veulent faire fuir les fantômes qui errent dans ce

cauchemar. Cette approche humoristique semble cacher un lieu commun. Cependant, il

est difficile de conclure que cette difficulté est due à un manque dans la formation du

guitariste. On souligne également que les caractéristiques de l’instrument ne semblent

pas favoriser la nécessité d’avoir une lecture développée.

La guitare a un caractère intimiste et solitaire dû peut-être à sa facilité de transport, mais

aussi à son volume sonore assez faible. Tout cela fait que, malgré son utilisation dans la

musique de chambre, dans quelques concerts et dans très peu de pièces orchestrales, la

majorité du répertoire de l’instrument est composée de pièces solos. Son faible volume

sonore en fait un instrument plus souvent qu’autrement joué en solo et dans ce cas, la

lecture devient secondaire, car on a tout le temps que l’on souhaite pour déchiffrer un

morceau. Même aujourd’hui avec des systèmes d’amplification très performants, ainsi

que des exemples d’œuvres réussies qui utilisent la guitare (tels que Le Marteau sans

Maître de Boulez ou la Sérénade op. 24 de Schoenberg) les compositeurs semblent

avoir une certaine réserve par rapport à l’utilisation de l’instrument dans la musique de

chambre ou même dans la musique orchestrale.

Pour bien comprendre la difficulté de la lecture à vue avec cet instrument, on doit

d’abord savoir comment se produit le son à la guitare. La main gauche choisit la note à

la touche qui doit être pincée par la main droite. Donc les deux mains travaillent de

manière asymétrique, une presse la note et l’autre la pince. On a la possibilité de jouer

jusqu’à six notes en même temps, même si l’on n’utilise que quatre doigts de la main

2 Quer fazer um violonista parar de tocar, coloque uma partitura na frente dele.

3

gauche, car l’utilisation de cordes à vide et de barrés3 rend la formation d’un groupe de

six notes possible.

Une particularité qui entrave beaucoup la lecture à la guitare est le fait qu’une même

note peut être réalisée de plusieurs façons, c’est-à-dire, qu’elle peut être jouée à

plusieurs endroits sur la plaque de touches. Sur d’autres instruments (comme le piano ou

le marimba, par exemple), il n’y a qu’une possibilité de réalisation pour chaque note

écrite.

Mais à quoi cela sert-il de jouer une même note à plusieurs endroits ? Il est bon de

savoir qu’une note donnée a une sonorité différente selon la position à laquelle on la

joue. Tout d’abord, en raison des différents types de cordes, qui se divisent en deux

catégories distinctes : les trois plus aiguës sont en nylon et les trois plus graves (les

bourdons), en nylon entouré de métal. Donc, une même note sonne différemment selon

qu’on la joue sur un type de corde ou un autre. Deuxièmement, une note jouée proche

de la caisse de résonance aura un timbre plus rond et foncé que la même note jouée

éloignée de la caisse, près du chevalet, laquelle sera plutôt nasale et ouverte. Ainsi,

dépendamment des caractères musicaux qu’on veut souligner, on peut jouer un passage

plus proche de la caisse ou plus éloigné. Troisièmement, si la vitesse de la pièce est

élevée, ou pour avoir un bon legato, on va choisir la note qui se trouve plus proche de

la position où on joue le passage.

Si on prend l’exemple des instruments à archet, on peut aussi avoir la même note à

plusieurs endroits. Par contre, pour ces instruments, l’accordement est linéaire (à la 5te

pour le violon, l’alto et le violoncelle et à la 4te pour la contrebasse). Ainsi, l’intervalle

entre les cordes est toujours le même. L’accordement de la guitare (Mi, La, Ré, Sol, Si

3 Le terme « corde à vide » fait référence à une corde qui est pincée par la main droite sans utiliser la main gauche, c'est-à-dire, la corde vibre au complet sans que sa longueur soit diminuée par la main gauche. Le « barré » c’est lorsqu’un doigt (souvent l’index) est placé perpendiculairement à la plaque des touches, ce que nous permet de presser plusieurs cordes d’une même case à la fois.

4

et Mi) est par contre presque toujours en 4te sauf entre la 3e et la 2e corde où on a une

3ce majeure (voire la première colonne à gauche de la figure 1). Donc, si on veut jouer

un intervalle de 4te juste entre deux cordes (par exemple 6e et 5e), il suffit de jouer dans

la même case (disons 5te). Mais, si on veut faire le même intervalle entre la 3e et la 2e

corde, une note sera jouée à la 5e case (3e corde) et la deuxième note sera à la 6e case (2e

corde). C’est-à-dire qu’il y a une logique différente dans l’enchaînement des notes entre

la 2e et la 3e corde par rapport au reste de la guitare. Un décalage qui ira affecter, bien

sûr, tout le montage d’intervalles, d’accords, de gammes, d’arpèges, etc. :

Figure 14

La figure 1 montre la position de notes naturelles jusqu’à la 10e frette de la guitare ainsi

que le décalage pour obtenir des intervalles de 4te juste (colonne verte) entre la 3e et la

2e corde.

4 Figure par Mark Newstetter (2011) trouvée sur http://fretography.blogspot.ca/2011/12/3rd-rail-g-b-strings-part-2.html au 18 février 2013.

5

Pour mieux expliquer la problématique qui concerne la possibilité de jouer une même

note à plusieurs endroits, on propose la figure 2 qui montre une triade de Sol majeur (1er

renversement) dans les trois octaves possibles à la guitare. On voit au centre de la figure

l’accord écrit à la portée. En haut de la figure, on voit comment le réaliser au piano,

c’est-à-dire, quelles sont les touches sur lesquelles il faut appuyer. Les diagrammes du

piano sont comparés à ceux de la guitare, plus bas :

Figure 2

La première chose qu’on observe est la quantité nettement supérieure de diagrammes

pour la guitare par rapport à ceux pour le piano. Cela est dû, comme nous l’avons déjà

dit, à la possibilité de jouer la même note à plusieurs endroits. À la deuxième ligne

d’accords de la figure 2, on peut observer l’utilisation de cordes à vide (le petit zéro en

dehors du dessin de la touche), c’est-à-dire que les cordes sont pincées sans utiliser la

main gauche. Les chiffres romains représentent la case où on doit monter les accords

6

(s’il n’y a pas de chiffres, on considère la case à côté de la ligne épaisse comme étant la

première). Ainsi, les mêmes patrons peuvent être trouvés sur différentes cases. Le

patron qu’on voit au premier accord de la première ligne (sans cordes à vide) est celui

de l’accordement en 4te juste qui se répète aux deux autres accords qui suivent. Si on

continue sur la première ligne, on observe par contre que ce patron change au fur et à

mesure qu’on arrive aux 3e et 2e cordes où on a l’accordement à la 3e majeur.

Chacun des diagrammes du premier et du deuxième accord (figure 2) a une sonorité

caractéristique. Le fait de mélanger des cordes à vide avec des cordes fermées a pour

conséquence un mélange de sonorités différentes, c’est-à-dire, des notes avec un son

proche de la caisse de résonance et d’autres qui sont éloignées de celle-ci (voir

explication de sonorité à la page 3). De son côté, sur un clavier, le changement d’octave

n’est qu’un changement de position du bras, car le doigté ne change pas. Le clavier a

une logique d’organisation de notes linéaire, horizontale et visuelle. On voit clairement

où sont les dièses/bémols, et plus on va vers la droite, plus on va vers les aiguës. À la

guitare par contre, l’organisation est diagonale, c’est-à-dire que plus on se déplace

horizontalement vers la droite et plus la note est aiguë, mais si on descend

verticalement, on va également vers les aiguës.

On ne peut pas oublier que la difficulté de la lecture a été aggravée par l’abandon

définitif de l’utilisation de la tablature à la guitare à la deuxième moitié du XVIIIe siècle

(Grove 1954 p.836; Pujol 1956 p. 66 ; Dudeque 1994 p. 53). Tel que nous l’avons vu à

la figure 2, un stimulus visuel peut avoir plusieurs réalisations motrices (jusqu’à sept

dans ce cas), ce qui n’était pas un problème pour la tablature qui représentait justement

la réalisation motrice et non les notes. Par contre, l’utilisation de la tablature empêche

les compositeurs ne connaissant pas la guitare d’écrire pour cet instrument ainsi qu’elle

empêche les guitaristes de pouvoir lire des pièces écrites pour d’autres instruments.

7

À cause des problèmes de positionnement des notes sur la plaque des touches de la

guitare exposées plus haut, on pense qu’une étude réalisée sur cette spécificité est

nécessaire pour avoir une bonne lecture à l’instrument. On retrouve, dans des méthodes

classiques comme celles de Carcassi (1836 p. 46-53) et Carulli (sans date, p. 35-43),

une façon d’organiser la plaque de touches en la séparant par positions, ainsi que des

exercices pour travailler chaque position. D’autres méthodes plus récentes (voir revue

de littérature) se sont également penchées sur ce problème. Le concept de position

réfère à la division de la touche en groupe de quatre cases. On nomme la position selon

la case où on place le 1er doigt de la main gauche (index). Ainsi, si le 1er doigt est à la

première case, on est à la Ie position, s’il est à la 2e case, c’est la IIe position, et ainsi de

suite. La figure 3 montre les positions sur la plaque de touches de la guitare en haut :

Figure 3

Dans le bas de la figure 3, on voit la division par région proposée par Pujol (1956 p.

48). Comme on peut voir sur la figure, la région grave correspond à la Ie position, la

moyenne à la Ve position, l’aiguë à la XIXe et la suraiguë à la XIIIe et XVIe à la fois (car

elle est plus grande). En ce qui concerne notre travail, le concept de région nous paraît

8

plus objectif, car au lieu de penser en 16 positions différentes, on peut penser en 4

régions, ce qui nous facilite la tâche.

Nous pensons qu’un travail organisé de chaque région et la disposition des notes dans

ces régions favorisent l’adaptation aux changements de position lors d’une lecture à

vue. Ainsi, le but de cette recherche est de développer du matériel éducatif, plus

précisément un plan de travail, comprenant des exercices de différents auteurs et des

études originales pour favoriser le jeu instrumental de la région moyenne à la région

suraiguë.

On a décidé d’éliminer la région grave de notre travail, car c’est la première région que

les méthodes pour débutants enseignent. On remarque que normalement (selon notre

expérience) les guitaristes n’ont pas de problème à reconnaître les notes dans cette

région et la quantité de matériel qui lui est dédiée est aussi nettement plus grande. Le

problème apparaît plutôt quand on doit sortir de cette « zone de confort » pour aller vers

des régions plus aiguës. Ainsi, le plan de travail s’adresse au guitariste de 1e cycle

universitaire, c'est-à-dire quelqu’un qui a déjà fait des incursions dans les régions plus

aiguës (à partir de la Ve position), mais qui éprouve de la difficulté à savoir où sont

situées les notes. Enfin, la région suraiguë, celle où la plaque de touche se trouve sur la

casse de résonance, répète la région grave, une octave plus aiguë. Ainsi, en guise de

comparaison, on s’adressera à la région grave lors du travail dans la région suraiguë.

Pour développer ce plan de travail visant à développer du matériel éducatif pour

favoriser le jeu instrumental de la région moyenne à la région suraiguë, nous utiliserons

le processus méthodologique du modèle de développement de matériel éducatif en

pédagogie instrumentale proposé par Dubé, Héroux et Garcia (2011, sous-presse). Ces

chercheurs soulignent que traditionnellement, le matériel éducatif dédié à

l’apprentissage instrumental était produit de manière assez intuitive et selon

l’expérience pédagogique de l’élaborateur plutôt que provenant d’une démarche

9

méthodologique basée sur une approche scientifique. Cette approche plus systématique

amènera à une élaboration d’un matériel plus apte à combler les besoins pédagogiques

identifiés dans la pratique (page 4). Ainsi, la modélisation proposée dans cet article a

pour but de guider les musiciens-pédagogues dans cette démarche de développement

afin que l’élaboration de leur matériel soit plus structurée, donc moins intuitive. Le

modèle propose 4 phases (voir tableau en bas - figure 4) :

1. Rencontre du problème : Cette phase comporte trois étapes : L’identification du

problème, la revue de littérature et l’identification des lacunes. Afin de répondre à la

première étape, nous avons présenté, en début de chapitre, les problèmes des spécificités

de la lecture à la guitare. Nous présenterons par la suite une critique/comparaison (2e

étape) de cinq méthodes de lecture à vue à la guitare en montrant leurs lacunes (3e

étape) et en les plaçant en ordre croissant de difficulté.

2. Identifications des paramètres de l’objet : Cette phase amène le chercheur à «

réfléchir à différents paramètres qui caractériseront et singulariseront le matériel

éducatif projeté » (p. 16). Elle comporte huit étapes : le besoin, le but, les personnes

visées, les ressources utiles, la procédure, le contexte d’utilisation, la thématique et la

nature de l’objet. La revue de littérature faite dans la rencontre du problème nous

permet d’identifier le besoin, le but et les personnes visées. Ensuite, nous procédons à

une analyse des ressources utiles afin d’identifier les connaissances théoriques

existantes liées à la lecture à vue à la guitare, lesquelles nous aidera à définir la

procédure et le contexte d’utilisation ainsi que la thématique et la nature de l’objet.

3. Conception : Cette phase est divisée en trois étapes : Détermination du contenu,

recherche des structures et des présentations possibles et élaboration des grandes

lignes et structures du contenu. Dans la première étape, on rassemble l’ensemble des

connaissances et des idées acquises dans la revue de littérature et dans la pratique

personnelle du chercheur (p. 18) afin de déterminer le contenu qui sera travaillé. Dans la

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deuxième étape, recherche des structures et des présentations possibles, on utilise la

psychologie cognitive en ce qui concerne la manière de présenter les informations et les

activités d’apprentissages, afin de favoriser les « mécanismes de construction des

connaissances en mémoire » (Tardif, 1992 tel que cité par Heroux, 2006, p. 112). Notre

intention avec cette approche est de créer des automatismes pouvant être évoqués et

reproduits lors d’une lecture à vue. À la troisième étape, élaboration des grandes lignes

et structures du contenu, on explique comment le matériel a été organisé pour créer le

plan de travail. Ainsi, on commence par des exercices pris dans les méthodes analysées

et dans d’autres sources, qui précéderont les études originales. Ces exercices feront

office de préparation aux études. Chaque groupe d’exercices et d’études sera divisé

selon les trois régions citées : moyenne, aiguë et suraiguë.

4. Fabrication : Cette phase est divisée en deux étapes : L’ébauche et le prototype final.

L’ébauche vise à produire différentes versions initiales du plan d’étude. Puisque l’on a

décidé d’éliminer la 5e phase (voir explication en bas), cette étape brouillonne servira

aussi de contrôle de qualité du plan. Ainsi, après avoir imprimé le matériel, nous allons

l’utiliser pour vérifier sa logique d’organisation et pour proposer de possibles

ajustements afin d’arriver au prototype final.

Originellement, le modèle de Dubé, Heroux et Garcia (2011 sous-presse) propose une

5e phase, soit la mise au point. Dans cette étape, un groupe de personnes visé analyserait

la méthode en proposant des modifications et des adaptations pour arriver au prototype

final. Dans le cas d’un travail de synthèse, nous croyons que cela irait au-delà de

l’objectif visé, ainsi nous laissons cette phase à de futures recherches.

11

1. RENCONTRE DU PROBLÈME

La difficulté de la lecture à vue auxpositions plus élevées de la guitare

-

- Méthodes de lecture à vueà la guitare

- Articles scientifiques

- Approche aux régions aiguës- Matériel qui manque de caractère artistique

- Matériel qui manque d'écrituredans un style moderne

2. IDENTIFICATIONS DES PARAMÈTRES DE L'OBJET

Insuffisance de matérielqui aborde les positions

plus élevées- Cours de lecture à vue- Pratique personnelle

- Cours de guitare

Développer du matérieléducatif

pour favoriser lejeu instrumental dansles régions moyenne,

aiguë et suraiguë

Plan de travail imprimé avecdes exercices preparatoires et

études originales.- Pratiquer les études sans

les connaitre par coeur- Pratiquer une position à la fois

Monographies dédiées à lalecture à la guitare

Étudiants guitarristes de1e cycle universitaire.

Problème: Revue de litterature:Lacunes:

But:Besoin:

Nature de l'objet:Personnes visées:

Contexte d'utilisation:

- Régions- Positions- Armures- Accords

Procédure d'utilisation:

Ressources utiles:

Thématique:

3. CONCEPTION 4. FABRICATION

- Exercices préparatoires- Études d'accords- Études d'armures

- Études libres

Favorisant la création de automatismes présentéssur en approche cognitiviste.

Exercices preparatoires suivis des étudesregroupées selon les régions.

Préparation des ébauches

Prototype final

Détermination du contenu:

Élaboration des grandes lignes et structuresdu contenu:

Recherche des structures et des présentationspossibles:

1. RENCONTRE DU PROBLÈME

La difficulté de la lecture à vue auxpositions plus élevées de la guitare

-

- Méthodes de lecture à vueà la guitare

- Articles scientifiques

- Approche dans les régions aiguës- Matériel qui manque de caractère artistique

- Matériel qui manque d'écrituredans un style moderne

2. IDENTIFICATIONS DES PARAMÈTRES DE L'OBJET

Insuffisance de matérielqui aborde les positions

plus élevées- Cours de lecture à vue- Pratique personnelle

- Cours de guitare

Développer du matérieléducatif

pour favoriser lejeu instrumental dansles régions moyenne,

aiguë et suraiguë

Plan de travail imprimé avecdes exercices preparatoires et

études originales.- Pratiquer les études sans

les connaitre par coeur- Pratiquer une position à la fois

Monographies dédiées à lalecture à la guitare

Étudiants guitaristes de1e cycle universitaire.

Problème: Revue de litterature:Lacunes:

But:Besoin:

Nature de l'objet:Personnes visées:

Contexte d'utilisation:

- Régions- Positions- Armures- Accords

Procédure d'utilisation:

Ressources utiles:

Thématique:

3. CONCEPTION 4. FABRICATION

- Exercices préparatoires- Études d'accords- Études d'armures

- Études libres

Favoriser la création d'automatismes présentéssur une approche cognitiviste.

Exercices preparatoires suivis des étudesregroupées selon les régions.

Préparation des ébauches

Prototype final

Détermination du contenu:

Élaboration des grandes lignes et structuresdu contenu:

Recherche des structures et des présentationspossibles:

Figure 4 : Modèle de développement de matériel éducatif en pédagogie instrumentale

utilisé pour l’élaboration de notre plan de travail.

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Chapitre 2 – Considérations théoriques Lehmann et McArthur (2002 p. 138) soulignent que du point de vue psychologique, la

lecture à vue est une aptitude qui implique quatre sous habilités qui peuvent être traitées

séparément : perception (décodage de patron des notes), kinesthésie (exécution motrice

programmée), mémoire (reconnaissance de patrons) et solution de problèmes

(supposition et improvisation). En ce qui concerne le but de ce travail où l’on veut créer

des automatismes de lecture, on doit donc surtout parler de perception et de mémoire,

ainsi que de reproductions kinesthésiques. Tout cela nous amène à parler de cognition :

La psychologie cognitive s'intéresse aux mécanismes de construction graduelle des connaissances en mémoire, aux conditions de réutilisation de ces connaissances, aux stratégies d'apprentissage de l'apprenant et aux stratégies d'enseignement. (Tardiff, 1992, tel que cité par Héroux, 2006, p. 112)

Ainsi, on essaiera de comprendre le processus d’apprentissage selon cette approche

cognitive, c’est-à-dire, comment créer des automatismes prêts à surgir lors de la lecture

à vue. On tient à souligner que lorsque l’on fait une lecture à vue, la reconnaissance de

patrons automatisés (comme des gammes, des arpèges, des cadences, des accords, etc.)

est nécessaire pour avoir une prise de décision rapide permettant ainsi au discours

musical d’être continu. Madell et Hebert (2008 p. 166) soulignent (en citant plusieurs

recherches5) que la fixation6 des yeux sur la partition chez les lecteurs professionnels

sont plus courtes et plus fréquentes que chez les lecteurs amateurs, qui prennent plus de

temps afin de déterminer ce qu’ils doivent jouer. Cela nous montre que les meilleurs

lecteurs sont plus rapides pour la prise de décision, car ils restent moins longtemps avec

les yeux fixés sur une partie donnée de la partition. Ces données nous suggèrent aussi

que les lecteurs plus expérimentés ont une gamme d’automatismes plus développés et

5 Comme: Goolsby, Eye movement in music reading (1994); Truitt et all., The perceptual spam an the eye hand spam in sight-reading music (1997); Waters and Underwood, Eye movement in a simple reading music test (1998); Waters et all., Studying expertise in music reading (1997). 6 La durée pendant laquelle les yeux s’arrêtent sur une partie donnée de la partition.

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sont capables de donner une signification plus profonde à un passage donné tandis que

les moins expérimentés ont tendance à lire note par note sans reconnaître les relations

entre elles (Lehmann and McArthur, 2002 p. 140-141). Pour mieux comprendre ce

processus d’acquisition et de construction d’automatismes, on doit comprendre d’abord

comment fonctionne la mémoire humaine.

2.1 L’architecture cognitive

Figure 5 – Architecture de la mémoire (une adaptation de R. Gagné et E. Gagné)7

La figure 5 nous montre l’architecture de la mémoire selon un modèle constructiviste.

Les chiffres et les flèches indiquent les chemins que l’information suit. Ce modèle

proposé par Tardif (1992) est une adaptation de R. Gagné (1974) et E. Gagné (1985). Le

processus commence par les stimuli provenant de l’environnement ou de la pensée. Ces

stimuli sont captés par des récepteurs sensoriels et se dirigent vers le registre sensoriel.

Un filtre basé sur les connaissances déjà acquises sépare les informations, tout en

éliminant ce qui ne doit pas être retenu. Ce qui passe par ce filtre atteint la mémoire de

travail (MDT), laquelle interprète les informations en leur donnant du sens.

La MDT fait le lien entre les informations stockées dans la mémoire à long terme et les

nouvelles informations qu’on reçoit. Selon Miller (1956), la MDT est capable de 7 Figure par Tardif (1992 p. 163)

14

contenir sept unités d’information, qui disparaissent au bout de dix secondes. Le

chunking8 permet de contourner les limites de la MDT en regroupant plusieurs

connaissances qui seront traitées comme une seule unité d’information.

La mémoire à long terme (MLT) garde les connaissances affectives, sociales, motrices

et intellectuelles, ainsi que les automatismes, soit ce qu’on est capable de faire sans

surcharger la MDT. Il y a deux types de MLT : la MLT épisodique ou autobiographique

(souvenirs personnels), et la MLT sémantique (concepts, lois, règles, principes,

procédures et conditions). Une fois qu’on reçoit les nouvelles informations et qu’on est

capable de les comparer avec celles déjà existantes (tout cela à MDT), on va être

capable de faire un lien entre les anciennes et les nouvelles informations tout en ancrant

les connaissances les unes aux autres, ce qui nous permettra d’enregistrer cette chaîne

d’information amplifiée à la MLT.

Pour que l’information se transforme en connaissances, elle doit d’abord être traitée par

le système cognitif. Selon Anderson (1985) et Marzano et al. (1988) il y a trois types de

connaissances : les connaissances déclaratives (notions purement théoriques),

procédurales (séquence d’actions plus ou moins longue) et conditionnelles (« où » et «

quand » les connaissances déclaratives et procédurales doivent être utilisées). Par

contre, on peut avoir, d’autres représentations mentales non verbales telles que des

représentations auditives, visuelles, spatiales ou kinesthésiques. Les connaissances ne

sont pas dissociées les unes des autres dans le cas de la MLT, mais elles sont plutôt

organisées hiérarchiquement en s’articulant en schéma. Une bonne organisation de ce

schéma favorisera l’évocation et la reproduction des connaissances acquises, ainsi que

l’acquisition de nouvelles informations qui ont pour base des connaissances antérieures.

8 La façon de découper les grandes informations en plus petites unités. Cela peut être observé par exemple dans la façon dont on découpe les numéros de téléphone (en 3+3+4 chiffres) ou dans la capacité de reconnaître un groupe de notes comme un accord au lieu de les voir note par note. Dans la lecture textuelle par exemple, un lecteur expérimenté ne reconnaît pas une lettre à la fois, mais plutôt des syllabes et même des mots entiers.

15

Les émetteurs sont les muscles et les membranes qui permettent une réponse aux stimuli

(Gagné 1985 tel que cité par Héroux 2006). Le générateur de réponse va contrôler ces

muscles et membranes qui peuvent être les doigts, les cordes vocales, etc. Tardif (1992)

écrit que le générateur de réponses aura besoin de plus de place provenant de la MDT

quand les connaissances procédurales et conditionnelles ne sont pas automatisées

(p.177). Si la connaissance est automatisée, elle peut passer presque directement de la

MLT au générateur de réponses (flèche 6 de la figure 5). Tardif (1992 p. 357) pense que

dans le cas d’une connaissance automatisée chez un expert, la place prise dans la MDT

pour la réalisation d’une tâche sera très limitée, probablement d’une unité (sur un total

de sept).

Le concept de transfert de connaissances comprend une information générale stockée

qui sera utilisée comme un modèle dans un autre contexte (recontextualisation) pour

développer une nouvelle connaissance. Cela signifie davantage que le fait de se rappeler

d’une connaissance déjà acquise, mais surtout de créer une nouvelle connaissance et de

modifier la MLT. L’apprenant fait donc face à un problème qu’il doit résoudre avec ses

connaissances stockées dans la MLT. La résolution du problème entraînera la création

d’une nouvelle connaissance ainsi qu’une modification en MLT.

Finissons cette courte description du processus cognitif par le concept de «

métacognition » qui peut être compris comme la capacité de réfléchir sur la qualité du

résultat d’une tâche. C’est l’auto-évaluation de notre processus d’apprentissage.

2.2 La mémoire dans la lecture à vue

Prenons cet exemple de stimulus visuel (figue 6) et comparons une attitude « idéale »

entre un lecteur expérimenté et un débutant. Pour cette comparaison, notre tâche sera de

16

jouer cet accord à la guitare et on essaiera de comparer le meilleur comportement au

pire :

Figure 6

Parcourons dans un premier temps le chemin que fait ce stimulus dans l’architecture de

la mémoire jusqu’à sa sortie en tant que son. Aperçu dans l’environnement, le stimulus

passe par les récepteurs sensoriels (dans ce cas les yeux) qui captent et filtrent les

informations pour laisser passer seulement ce qui est important pour la réalisation de la

tâche. Cette information arrive à la MDT qui doit consulter la MLT pour savoir si cette

information est déjà enregistrée. À partir de cette réponse, la MDT doit prendre une

décision concernant la tâche, et envoie tout cela au générateur de réponse. Le générateur

commandera les émetteurs (les doits, les bras, etc.) qui feront les mouvements

kinesthésiques nécessaires pour jouer l’accord donné.

La différence entre un bon et un mauvais lecteur se situe surtout en ce qui concerne le

moment où l’information arrive à la MDT. À cet instant, l’utilisation des connaissances

déclaratives (un accord de do majeur écrit à la portée de sol) et procédurales (mettre les

doigts 3, 2 et 1 de la main gauche sur les cases correspondantes et pincer les cordes 5, 4,

3 et 2 avec la main droite) sont nécessaires. Le mauvais lecteur verra les notes do, mi,

sol et do (déclarative) une à une et essaiera de trouver ces notes à la plaque de touches

(procédural), ce qui va certainement surcharger la MDT. Étant donné qu’il n’a pas en

mémoire le résultat sonore de ce stimulus visuel, il ne pourra donc pas savoir si la tâche

a été accomplie correctement (métacognition). Par contre, dans le cas d’un bon lecteur,

il reconnaîtra ce stimulus comme étant une seule information, soit un accord (un chunk),

17

et il aura une réponse kinesthésique automatisée. Le son produit arrivera également de

façon auditive à la MDT qui confirmera la sonorité de l’accord de do majeur (déjà

enregistré dans la MLT) et validera que la tâche a été accomplie.

Furneaux et Land (1999), en analysant la différence de l’écart yeux-main9 chez les

lecteurs professionnels et amateurs, ont observé que les professionnels ont une mémoire

de travail plus développée que les amateurs, car ils sont capables de garder plus

d’informations (1,4 note de plus) dans le même indice-temps de ca. 1 sec. Les

chercheurs pensent que cela n’est pas dû au fait que les bons lecteurs ont un tampon de

mémoire plus grand, mais plutôt parce qu’ils sont capables de chunker (regrouper) plus

de notes ensemble et de les traiter comme une seule unité. Cette théorie est aussi

soutenue par Sloboda (2005), Comeau (2009) et Dehaene (2007) (tels que cité par

Comeau 2009). Cette capacité serait donc liée à une meilleure perception de la

grammaire musicale. Une comparaison avec la lecture de textes est inévitable. Par

exemple, il est plus difficile de lire le mot « lavadibacarentad » que le mot

« professionnelles ». Même s’ils ont la même taille, le premier mot n’existe pas et il ne

fait donc pas partie du lexique français (ni de celui d’autres langues). Il faut alors

s’arrêter sur chaque syllabe en s’obligeant à faire plusieurs fixations et en fin de compte,

comme ce mot ne fait pas partie du lexique français, on ne le retrouve pas enregistré

dans la MLT.

Il est très difficile d’établir un lexique musical, car il change selon l’époque, le genre, le

style, etc. Par contre, une grande majorité du répertoire de n'importe quel instrument est

basée sur des éléments plus courants (des gammes, des accords, des motifs, des

9 C’est la distance (l’écart moyen) entre ce qu’on joue et ce qu’on regarde. Pour Furneaux et Land, cette distance est mesurée en notes et en secondes. Ils ont donc créé deux indices : l’indice temps : combien de secondes il y a entre ce qu’on joue et ce qu’on regarde et l’indice note : le nombre de notes. L’indice temps a été le même pour tous les niveaux (ca. 1 sec). Par contre, l’indice note a été plus grand chez les meilleurs lecteurs (1,4 notes de plus). Cela veut dire que dans la même seconde analysée, les professionnels ont déchiffré 1,4 notes de plus que les amateurs. Cette information nous donne une idée de la quantité d’information gardée dans la mémoire de travail pendant une tâche de lecture à vue.

18

cadences, etc.) qui semblent être plus rapidement reconnaissables par les lecteurs

expérimentés que par les amateurs.

2.2.1 Construction de connaissances

Comme nous l’avons mentionné, les connaissances déclaratives, procédurales et

conditionnelles ne sont pas dissociées les unes des autres dans la MLT, mais elles sont

plutôt organisées en chaîne, liées en réseaux. De plus, dans une même connaissance

donnée, les informations sont liées entre elles. Par exemple, en ce qui concerne les

connaissances déclaratives, une ronde vaut 2 blanches, qui valent 4 noires, qui valent 8

croches, ainsi de suite. De la même façon, lorsqu’on voit la note si au centre de la

portée, on sait que la note do est dans l’espace au-dessus et que le la est en dessous. De

cette façon, on ancre les informations les une aux autres, ce qui fait que l’on connaît les

valeurs des figures ou la position des notes à la portée.

Heroux (2006) écrit que « les connaissances procédurales servent en effet à rendre

opérationnelles les connaissances déclaratives » (p.123). Ainsi, la démarche pour jouer

une blanche écrite sur la note do (déclarative) est de mettre le 1e doigt de la main gauche

à la 2e corde de la première case, de pincer la 2e corde avec l’index de la main droite et

d’attendre qu’elle vibre 2 temps (procédurale). Cette description de la démarche pour

jouer une note détaille aussi une chaîne de mouvement qui doit être automatisée pour ne

pas surcharger la mémoire de travail (MDT).

Les connaissances conditionnelles sont très importantes à la guitare, car on peut avoir la

même note à plusieurs positions. Ainsi, quand on voit le stimulus, on doit adapter nos

émetteurs selon la position à laquelle on joue. Cela nous oblige à avoir un répertoire

différent dans notre générateur de réponse pour chaque région de la plaque de touches.

Si on prend le même exemple de la figure 6, pour le jouer à la Ie position, la procédure

19

de réalisation va être différente pour le même accord monté à la Ve position. On voit

donc que les connaissances procédurales pour un déchiffrage à la guitare sont fortement

liées à une connaissance conditionnelle : la position.

Le transfert de connaissances fait en sorte qu’à l’aide d’une connaissance générale

stockée, on est capable de créer de nouvelles connaissances. Par exemple, si on connaît

la position de la note do sur la plaque de touches de la guitare et que l’on possède la

connaissance générale selon laquelle la distance entre deux cases adjacentes est d’un

demi-ton, on sera alors capable de supposer que la note qui se trouve à la case suivante

est le do #.

2.2.2 Récupération des informations

Comme nous l’avons dit, dans la MLT, les connaissances déclaratives, procédurales et

conditionnelles se rapportent entre elles en schéma. Plus les informations sont ancrées

entre ces trois types de connaissances et plus elles sont faciles à réutiliser (Heroux, 2006

p.129). Paivio (tel que cité par Heroux 2006) parle d’autres types de représentations

mentales que la représentation verbale, ainsi que d’un double codage. « Ses recherches

ont prouvé qu’une information encodée de manière verbale et visuelle est plus durable

et plus facile à récupérer » (p. 129). Un accord comme celui de la figure 6, par exemple,

peut avoir au moins quatre représentations en MLT : visuelle, verbale, auditif et

kinesthésique. Si ces quatre informations sont liées entre elles, c'est-à-dire qu’on

reconnaît l’accord visuellement, qu’on peut le nommer, qu’on est capable d’imaginer

comment cela sonne et qu’on a les mouvements automatisés pour le réaliser, alors ce

multiple encodage fait que la récupération de l’accord en MLT est plus facile. Par

contre, comme le souligne Heroux (2006), des recherches futures sur les

représentations mentales en relation à l’encodage auditif et kinesthésique chez les

musiciens pourront élargir la compréhension de « mécanismes complexes de la

20

représentation mentale et de la mémorisation en musique » (p. 200). Ainsi, nous

espérons que le multiple encodage lié aux représentations auditives et kinesthésiques

sera étudié plus en détails ultérieurement.

2.2.3 L’importance des automatismes

Tardif (1992 P. 173) dit qu’il est possible que la mémoire à long terme contrôle

directement le générateur de réponses (voir flèche 6 de la figure 5). Cela qu’il s’agisse

d’une connaissance procédurale ou conditionnelle qui est automatisée, cela libérera de

l’espace dans la mémoire de travail en passant directement dans le générateur de

réponses (p. 174). En musique, il est possible d’avoir un répertoire d’automatismes qui

pourrait être fait de gammes, de cadences, d’accords, etc. Ces automatismes peuvent

aussi être des chunks, c'est-à-dire que lorsque l’on pense à un accord donné par

exemple, on ne pense pas à toutes les notes qui le constituent, mais à une seule unité

d’information qui englobe toutes ces notes. Nous ne devons pas oublier que, dans le cas

de la guitare, ces automatismes doivent être liés à la condition : la région de la plaque de

touches où on doit les réaliser.

Fireman (2010) cite plusieurs recherches10 qui indiquent que le résultat lors d’une tâche

de lecture à vue est meilleur quand les lecteurs sont capables de reconnaître des patrons

avec une cohérence tonale. Cela nous montre qu’il est plus simple de répéter les patrons

automatisés appris plutôt que de déchiffrer de nouvelles informations non automatisées.

Tardif (1992) indique qu’une tâche importante de l’enseignant « est de faire en sorte que

les connaissances qui peuvent être automatisées le soient le plus rapidement possible

afin que l’élève puisse employer ses unités de mémoire de travail aux éléments les plus

10 Comme : Sloboda (2005 p. 36), Water et Underwood (1998 p. 35) et fine Berry et Rosner (2006 p. 440).

21

significatifs de la tâche » (p.175). Ces éléments plus significatifs en musique pourront

être des phrases, la sonorité, le discours musical, etc.

22

Chapitre 3 – Revue de littérature Cette revue de littérature analysera deux types de références : celles issues de

recherches scientifiques et celles provenant d’ouvrages pédagogiques. Les références

scientifiques sont constituées de deux études qui portent sur l’observation d’étudiants

guitaristes lors d’une tâche de lecture à vue. En ce qui concerne les références

professionnelles, elles sont constituées de cinq méthodes de lecture à vue dédiées à la

guitare, ainsi que des études dédiées aux positions.

3.1 Références scientifiques 3.1.1 Leitura à primeira vista no violão : Um estudo com alunos de graduação11 par

Pastorini (2011).

L’auteur analyse les résultats d’onze étudiants du premier cycle à l’Université Fédéral

du Rio Grande do Sul (Brésil) dans une tâche de lecture à vue. L’étude est composée de

quatre parties : réalisation d’une lecture à vue d’un extrait musical, entrevue à propos de

l’accomplissement de la tâche, réalisation d’un test d’habilité motrice à travers 3

exercices techniques à la guitare et application d’un questionnaire à la fin des tâches.

L’extrait utilisé a été composé par l’auteur de l’étude afin d’assurer que les participants

ne puissent pas avoir eu de contact antérieur avec le matériel. L’extrait en ré mineur,

décrit par l’auteur comme étant de niveau « moyen », est composé de 4 phrases de

différentes textures. La première est une mélodie accompagnée ; la deuxième est

monodique avec les indications dolce et express ; la troisième est une séquence

d’accords au cycle de quarte avec des notes de passage et la dernière est la cadence

11 Lecture à vue à la guitare : une étude avec des étudiants au baccalauréat.

23

finale. Les participants avaient droit à une minute de lecture silencieuse avant de jouer

l’extrait (qui a été filmé) et par la suite ils donnaient leur avis sur ce qu’ils ont observé

pendant la lecture silencieuse et comment a été leur performance à la tâche. Ensuite,

pour vérifier s’il y avait une relation entre l’habileté motrice et la lecture à vue, trois

exercices techniques (arpèges, notes liés et notes répétées) pris des cahiers de Carlevaro

ont été appliqués. À la fin, un questionnaire a été réalisé pour la collecte des données

générales afin de les comparer avec leurs habiletés de lecture. Les données collectées

étaient : l’âge, le programme et le trimestre d’étude, le temps d’étude de l’instrument, le

nombre d’heures d’étude par semaine, la pratique quotidienne de lecture et les activités

de musique de chambre.

À la lecture silencieuse, les éléments les plus cités, avec entre parenthèses le nombre de

sujets qui l’ont cité étaient : doigtée (9), tonalité (8), nuances (7), mesure (5), tempo (3),

articulation (3), marques d’expression (3), rythme (2) et accords (2).

Le but principal était d’observer le choix du doigté de la main gauche (qui n’a pas été

suggéré) par rapport à certains éléments musicaux : legato, marques d’expression et

tenue des notes. Avant d’analyser les vidéos, l’auteur propose lui-même les résolutions

de doigtés les plus communs pour chaque phrase. Ses résolutions serviront de base pour

la comparaison avec les solutions des participants en observant lesquelles ont été les

plus choisies. L’auteur a observé que les participants choisissaient en général un chemin

simplifié sans considérer le legato, l’expression ou même la tenue des notes et qu’ils ont

essayé plutôt de garder le rythme et la fluidité (ce qui est commun dans une lecture à

vue). 27 % ont été considéré comme ayant une bonne fluidité par rapport au choix de

doigté, 27 % avaient une fluidité moyenne et 46 % avaient une faible fluidité. Le

chercheur n’a pas observé non plus une meilleure lecture entre les participants les plus

expérimentés ou qui répétaient plus d’heures par jour en montrant initialement qu’il n’y

a pas une relation claire entre une bonne technique ou la maîtrise de l’instrument et une

performance satisfaisante dans une tâche de lecture à vue. L’auteur a également

24

observé que les meilleurs lecteurs participaient à des activités de chorale ou de musique

de chambre. Même s’il manque une étude plus approfondie, cela nous suggère que ces

activités aident au perfectionnement de la lecture. Les participants qui avaient la guitare

comme instrument complémentaire (Licence12 en musique) ont eu un résultat moins

satisfaisant que ceux (ou celles) qui étaient inscrits au Baccalauréat en guitare.

Dans cette étude, il est surprenant de constater que la majorité des participants ont

choisi un doigté simplifié, à la Ie position, sans égard aux aspects musicaux tels que le

legato, la tenue de notes, etc. pour lesquels une position plus élevée aurait été plus

appropriée. Par exemple, 8 participants sur 11 ont choisi de jouer la mélodie de la 2e

phrase (dolce et express) à la Ie position, ce qui rend plus difficile l’expressivité

demandée qui aurait été plus simple à faire à la Ve position, car le vibrato et le glissando

seraient ainsi possibles. Cela indique de la part de la majorité des participants une

habilité insuffisante aux changements de position, car un nouveau doigté implique,

presque toujours, un changement de position.

3.1.2 Leitura à primeira vista ao violão : A influencia da organização do material de

estudo13 par Fireman (2010).

L’auteur analyse l’habilité de lecture de sept étudiants au premier cycle (Licence en

musique) à l’Université Fédéral d’Alagoas (Brésil). Les tests ont été divisés en trois

parties : test de lecture à vue, test de flash et test d’accompagnement de partition avec

audio. L’essai a été composé d’un pré-test et d’un post-test à 39 jours d’intervalle.

12 La Licence au Brésil est un diplôme universitaire de 1e cycle qui vise la formation de professeurs de musique au primaire et au secondaire (au niveau universitaire dans certain cas). Elle a une approche plus pédagogique que celle du baccalauréat, car cela comprend 300 heures de pratique, de l’enseignement obligatoires et plus de disciplines de pédagogie 13 Lecture à vue à la guitare : l’influence de l’organisation du matériel d’étude.

25

Entre le pré et le post-test, les participants ont été invités à répéter la lecture à vue avec

les études op. 35 et 31 de Fernando Sor organisées en trois ordres différents de difficulté

: progressive, régressive (du plus difficile au plus simple) et aléatoire. Trois étudiants

ont reçu le matériel organisé régressivement, trois aléatoirement et un progressivement

(car il y a eu deux désistements).

Pour réaliser le test de lecture à vue, le chercheur a choisi huit pièces classiques (parmi

Sor op. 44, 60 et 26 études de Sor-Coste) puis les participants avaient trente secondes de

pré-lecture (sans jouer). Toutes les performances ont été enregistrées par vidéo et

envoyées à 3 juges (trois professeurs universitaires) qui ont accordé une note de 0 à 5

selon trois critères : technique, mélodique et rythmique.

Pour le test de flash, les participants ont été exposés à une image d’une portée avec un

petit motif de quatre noires construites à l’intervalle de secondes et présentaient des fois

quelques altérations. Les participants voyaient l’image pendant 400 millisecondes (ms)

ou 500 ms. Ensuite, ils avaient trente secondes pour la réécrire sur papier.

Pour le test d’accompagnement d’audio avec partition, les participants ont été invités à

accompagner des enregistrements d’œuvres de Giulianni auxquelles ont été ajoutés des

sons de cloche. Le but était de noter exactement où les cloches ont été ajoutées.

Le chercheur a observé une amélioration entre le pré et le post-test (39 jours) pour le

groupe régressif dans tous les critères. Le groupe aléatoire a amélioré le rythme et la

technique, toutefois le critère mélodique a régressé. Le participant du groupe progressif

a eu une régression dans les critères mélodiques et techniques, mais il est resté égal au

critère rythmique. En moyenne, en considérant les notes de 0 à 5, le groupe régressif

s’est amélioré de 0,41 point, le groupe aléatoire de 0,0 point et le groupe progressif de -

0,44 point (diminué). Par contre, dans le groupe aléatoire, deux participants ont régressé

alors qu’un participant a progressé. En résumé, parmi sept participants, quatre ont

26

amélioré leur score. À peine deux étudiants ont déclaré avoir tout étudié (48 morceaux)

et celui qui a déclaré avoir complété le plus d’heures d’étude a obtenu la plus grande

amélioration.

Les tests de flashs ont montré qu’il y a une relation entre une amélioration dans la

lecture à vue et ce test-ci. C'est-à-dire que les étudiants qui ont amélioré leur score dans

les tests de lecture à vue se sont également améliorés dans les tests de flashs. La plus

grande exposition aux flashs (500 ms) a montré des meilleurs résultats pour presque

tous les participants (sauf 1).

Le test d’accompagnement audio avec partition n’a pas montré une relation claire entre

cette capacité et une amélioration significative de la lecture à vue, car ces résultats ont

été semblables dans le pré-test ainsi que dans le post-test.

Même avec aussi peu de participants, cet essai est important pour le présent travail, car

il nous suggère qu’une pratique organisée est capable d’améliorer l’habileté. En effet,

quatre sur sept ont amélioré leur score de la lecture à vue à la guitare dans une courte

période de temps (39 jours).

3.2 Références professionnelles

3.2.1 Les méthodes de lecture

Nous proposons d’analyser cinq méthodes de lecture à vue à la guitare qui portent sur la

lecture en position14. Ainsi, nous avons choisi les méthodes qui travaillent ces

14 Pour l’explication du terme « position » voir page 7.

27

positions, dans un premier temps de manière séparée puis de façon combinée. Les

paramètres qui guideront notre analyse sont :

• L’approche aux positions.

• Écriture typique à la guitare : accords, arpèges, mélodies, etc.

• Présentation des signatures rythmiques, divisions, armures et accidents.

• Les indications musicales : nuances, tempo, articulations et expressions.

• L’attention dédiée à l’édition musicale.

• L’approche pédagogique de l’auteur.

Le but final de ce chapitre sera de comparer les méthodes présentées et de trier leurs

séquences pédagogiques par ordre de difficulté pour qu’on puisse les utiliser de manière

logique dans notre plan de travail (annexe 1). Je tiens à souligner que notre intention

n’est pas de porter un jugement de valeur sur les méthodes présentées, car elles sont

toutes de grandes qualités et sont très souvent citées pour le développement de la

lecture. Loin de juger la qualité des méthodes, notre but est de proposer une nouvelle

approche.

3.2.1.1 Sight reading for the classical guitar par Robert Benedict (1985)

L’ouvrage est divisé en deux volumes. Étant donné que le présent travail s’adresse aux

étudiants de niveau universitaire, nous avons décidé d’analyser uniquement le deuxième

livre (niveau 4 et 5), car le premier était trop élémentaire.

La méthode de Benedict se différencie des autres ouvrages, car il compose lui-même les

exercices et les envisage ainsi comme de véritables petites pièces de musique. Même si

elles sont rares, il y a toujours des indications concernant le caractère et les nuances qui

guident l’interprétation du lecteur. Il ajoute aussi une liste avec les marques

28

d’expression les plus utilisées ainsi que sa traduction des mots italiens en anglais, à la

fin d’ouvrage15. Ainsi, quand l’étudiant voit le mot italien giocoso au début d’un

morceau, il se doit d’adapter sa façon de jouer. Cela pourrait amener à une recherche et

une possible traduction du mot (gai, joyeux, etc.) ce que nous semble important.

Cependant, il n’y a pas d’indications métronomiques, ce qui suppose que l’auteur donne

le choix de la vitesse de travail à l’étudiant selon son niveau. Toutefois, un scherzando

n’est jamais très lent, et un solene n’est pas non plus rapide, on peut donc interpréter les

tempi à partir des indications d’expressions.

Il y a également un autre élément très réussi : les petites phrases qu’il met avant les

exercices. Dans ces phrases, il présente l’exercice et donne des conseils à l’étudiant. Les

sujets vont de petits conseils comme « lisez d’avance » ou « faites attention au bémol »

à des explications concernant les formes musicales (canon et chorale) et

l’ornementation16.

L’auteur ajoute aussi des exercices pour la pratique du rythme17 où il présente des

mesures simples et composées avec les figures rythmiques les plus fréquemment

utilisées. Ces exercices doivent être joués avec une corde à vide ou sans guitare en

chantant ou tapant dans les mains la rythmique de la pièce.

Du point de vue guitaristique, il propose des structures d'accords typiques de

l’instrument, toujours liées à une tonalité prédéterminée et il ajoute aussi des difficultés

techniques telles que des notes étouffées, des notes staccato ou différentes façons de

faire les ornements, etc. Par contre, nous trouvons désavantageuse son approche

concernant la problématique du changement de position. La majorité de la méthode est

principalement construite pour la première et la deuxième position. Dans le supplément

15 Pg., 60. 16 Pgs., 6, 7 et 28. 17 Pgs., 22 à 25 et 65 à 59.

29

position-playing, M. Benedict propose de travailler le changement vers la troisième, la

quatrième, et la cinquième position. Pour réaliser cela, il demande de jouer une même

ligne dans plusieurs positions :

Figure 7 (P. 48)

Comme on peut voir, les exercices ont au maximum deux voix et la deuxième voix est

toujours une basse à vide18. Il n’y a donc pas de grand défi pour le lecteur. D’autre part,

la musicalité est totalement oubliée, il n’y a pas d’indications d’expressions et de

nuances. Dans ce supplément, il ajoute également des exercices pour travailler les

intervalles harmoniques dans les cinq positions et un exercice pour travailler le

changement de position des accords19 de la première position vers la cinquième.

Le fait d’enlever les indications dites musicales est un détail20 si on considère que

Benedict a limité sa méthode à la cinquième position. En effet, cela ne correspond pas à

la réalité du répertoire de la guitare. Il faut au moins atteindre le mi 5 pour cela et

travailler la neuvième position. Pour cette raison, on encourage l’élève à lire les

exercices donnés dans toutes les positions possibles, car beaucoup d’exercices présentés

peuvent être joués dans différentes positions (non mentionnées). Même si Benedict a 18 Sauf pour l’exercice 93 en page 47. Mais dans cet exercice, la voix aiguë ne change pas. 19 Ex. 114, p. 52 20 L’auteur a voulu travailler uniquement les notes de la nouvelle position afin de ne pas distraire l’élève sur d’autres éléments.

30

limité sa méthode (du point de vue de la note la plus aiguë) au do 5, ce do peut être joué

dans trois positions différentes : à la cinquième (première corde), à la dixième

(deuxième corde) et à la quatorzième (troisième corde) position. Même si on perd les

notes plus aiguës (de do# 5 à mi 5), avec les mêmes exercices donnés, on peut travailler

les positions les plus élevées. Au bas de la page 7 Benedict écrit :

Pensez aux exercices de lecture à vue comme des petites performances. Préparez les cadences avec des ritardandi ; utilisez les nuances et variez les articulations pour donner des couleurs au jeu21.

Nous apprécions particulièrement ce discours, car même les livres pédagogiques où il

est question d’exercices techniques peuvent avoir un caractère artistique.

3.2.1.2 Pattern perception as a basis for the development of sight-reading for the

classical guitar par J. L. Passalacqua (2000).

Dans le premier chapitre, l’auteur discute de la problématique de la lecture à la guitare

en soulignant que le développement de la lecture peut aider l’étudiant en écourtant son

temps de déchiffrage. Il défend aussi une approche plus systématique, car dans le milieu

de la guitare, on croit généralement que la lecture à vue se développe de façon

indépendante en fonction de l’évolution des compétences de l’élève. La problématique

du changement de position est toujours au centre des discussions ; il souligne son

importance pour éviter les « trous » dans la lecture, lesquels sont causés par la

nécessité de regarder la touche de la guitare lors de la performance.

Dans le dernier chapitre, il présente sa méthode. Il explique sa méthodologie

progressive et la façon dont il l’a conçue, c’est-à-dire qu’à partir d’une simple mélodie,

21 Think of the sight reading as little performances in themselves. Prepare for cadences with retards ; use dynamics and varying articulations to give colour to your performance.

31

on ajoute peu à peu de nouvelles voix et des rythmes de plus en plus complexes. Il

précise aussi que la méthode s’adresse aux étudiants de niveaux moyen à avancé, qu’il

associe aux étudiants qui sont déjà habitués à jouer à différentes positions. En présentant

les méthodes précédentes à son travail, il énumère quelques-unes de ses faiblesses et

montre comment et en quoi sa recherche peut être une nouvelle approche à ce problème.

« Quand l’étudiant fait une lecture à vue, il a besoin de reconnaître des formes visuelles

à la place de notes isolées…»22 (Pg. 1). Les questions de connaissances musicales, allant

des patrons rythmiques à la reconnaissance d’un groupe de notes comme un accord, sont

aussi encouragées par l’ouvrage tout comme l’habilité à la lecture anticipée (lire les

notes rapidement avant de les jouer).

Dans le deuxième chapitre, l’ouvrage présente une revue de littérature des différentes

méthodes. L’auteur les décrit23 et souligne les exercices les plus importants pour

chacune d’entre elles. Il explique comment ces exercices peuvent être utilisés pour

développer la lecture.

Le dernier chapitre concerne sa propre méthode. Ainsi, il propose de commencer par

des exercices préparatoires dans les Ve et VIIe positions. Puis, il présente un tableau

avec quelques notes et intervalles qui doivent être identifiés dans différentes positions.

La 2e section de la méthode est composée d’exercices de lecture présentés tels

que des petits morceaux de musique. Il sépare chacun des morceaux en trois parties : le

background, le midleground et le foreground. L’approche est basée sur l’analyse

Schenkérien et l’objectif est de faire comprendre la structure de la pièce au lecteur avant

d’arriver au résultat final (foreground), dont les notes ajoutées peu à peu sont comme

des ornements à la structure harmonique déjà établie par la partie du background. Dans 22 When sight reading, the student needs to recognize visual patterns instead of isolated notes… 23 Les méthodes analysées par Passalacqua sont : AGUADO, D. New method for guitar. (1981). BENEDICT, R. Sight reading for the classical guitar (1985). GONZALES, R. The advancing classical guitarrist (1996). PUJOL, E. Escuela razonada para guitarra (1971). PURSE, B. Bach chorales for guitar solo (1994). SOR, F. Metodo para guitarra (1830). VAN EPS, G. Harmonic mechanisms for guitar Volume 1 (1980).

32

cette 2e section, il présente trois différentes séries qui vont être transposées aux quatre

positions travaillées (IIe, Ve, VIIe et IXe) c’est-à-dire, les trois mêmes morceaux

transposés pour être adaptés à chaque région :

Figure 8 (Pages 28, 29, 30 et 31 respectivement)

Dans la figure ci-dessus, on peut voir les quatre premières mesures (foreground) de

chaque pièce de la première série. La même procédure a été utilisée pour les deux autres

séries. Dans la 3e section, il présente des exercices mélodiques en utilisant des gammes

pentatoniques aux IIe, IVe, Ve et VIIe positions.

La problématique de la lecture à la guitare est bien présentée par Passalacqua. On ne

comprend pas toujours son choix d’ouvrages, car même après avoir cité24 Progressive

Reading For Guitarists25, par exemple, il a choisi de le laisser de côté dans son 2e

chapitre (revue de littérature). À la place, il a choisi des méthodes dont le but est celui

de la technicité telles que celles de Sor et Aguado. Son approche basée sur l’analyse

schenkérien est très intéressante, car elle nous donne une meilleure idée de la structure

de chaque morceau et développe un regard plus analytique sur la pièce qui doit être lue.

Par contre, l’idée d’utiliser une même musique pour travailler différentes positions nous

semble quelque peu désavantageuse, car on travaille davantage la mémoire plutôt que

l’apprentissage de la lecture elle-même. D’autre part, outre la mémoire musicale, il y a

également la mémoire musculaire, celle des mouvements musculaires. Si on joue un

morceau à la IIe position et on le répète à la Ve position, on va répéter tous les

mouvements de la main et on va entendre la même musique transposée. Les trois séries

utilisées sont construites sur des tonalités mineures ce qui aide à exclure des « figures »

24 Page 3. 25 DODGSON, S. et H. QUINE. Progressive Reading for Guitarists, London, Ricordi, 1975.

33

d’accords et des cadences propres à la tonalité majeure26. Dans la 3e section de la

méthode construite avec les gammes pentatoniques, il n’utilise pas la neuvième position

comme il l’avait fait dans les exercices précédents. Il ne suit donc pas la logique utilisée

jusqu’à présent. Cependant, pris dans son ensemble, l’ouvrage est très important, car il

propose un regard de lecture à vue dédié exclusivement à la guitare, et cela en

présentant ses problématiques et en proposant des solutions qui ont de la valeur.

3.2.1.3 La lecture à vue en position par K. Stevens (2006).

C’est la seule méthode où il est question d’un travail en duo élève/professeur. L’auteur

décide d’utiliser uniquement des mélodies. Dans la partie de l’élève, il n’y a aucun

intervalle harmonique, aucun accord, ce qui peut être expliqué par le fait que l’ouvrage

s’adresse à un public spécifique : « Il a été écrit en pensant aux jeunes élèves, mais peut

certainement être utilisé par les étudiants de tout âge »(P. 2). Cependant, Stevens

manifeste de façon claire que la méthode ne s’adresse pas aux débutants : «…j’ai limité

l’étude aux positions II, IV, VII et IX, en assumant que l’élève est déjà familier avec la

première position » (P. 2).

La méthode s’organise en deux parties. Dans la première partie, il travaille les quatre

positions citées en utilisant uniquement les trois premières cordes, une à une. Le but est

clairement celui d’ajouter de nouvelles connaissances, car même lorsqu’il travaille une

nouvelle position, il revient souvent aux positions travaillées antérieurement en utilisant

des chiffres romains pour indiquer le changement :

26 Comme par exemple les accords de III et VII degrés ne sont jamais présentés dans ses séries en mineur. Élément qui était quasiment impossible à éviter dans les tonalités majeures relatives, car elles représentaient respectivement les I et V degrés.

34

Figure 9 (Page 40)

Chaque pièce est précédée d’un exercice (parfois d’une gamme aussi) qui présente le

matériau utilisé dans la pièce en question. Le répertoire choisi est composé des

morceaux très connus et des compositions de M. Stevens. Il ajoute peu à peu des

altérations et les tonalités les plus utilisées à la guitare27. Il utilise toujours des exercices

préalables, lesquelles permettent de travailler ces nouveautés avant de lire la pièce en

question. On peut également observer des changements d’armure au sein d’une même

pièce.

Dans la deuxième partie, il suit la logique utilisée jusqu'à présent en ajoutant les 4e, 5e et

6e cordes. Toutefois, il s’arrête à la VIIe position.

Cette méthode présente une structure très claire. Stevens travaille bien les positions, et

les exercices aident à reconnaître les caractéristiques de chaque région. Cependant,

l’idée d’utiliser des musiques connues28 est un peu désavantageuse, car le lecteur a alors

des références musicales lorsqu’il joue (il connaît souvent déjà la musique). Ainsi, il

cherche les notes sur la touche plutôt que sur la partition. Par contre, son idée d’ajouter

des musiques du monde29 qu’il compose est très intéressante. Il manque cependant

d’indications de nuances, d’articulations et de tempi. Comme la méthode a déjà été

27 Limité à 4 # et 2 b. 28 Par exemple : Hymne à la joie (Beethoven) p. 6, La cucaracha (Populaire Mexicain) p. 20, Españoleta (G. Sanz) p. 32. 29 Par exemple : Samba facile p. 10, Night in Argentina p. 36. Il ajoute aussi des chansons traditionnelles plus au moins connues de divers lieux à travers le monde.

35

facilitée par l’utilisation exclusive des mélodies, on pourrait travailler d’autres éléments

sans perdre le caractère pédagogique. L’idée d’exclure la IXe position de la deuxième

partie, c'est-à-dire, les 4e, 5e et 6e cordes n’est pas logique, car il élimine une région très

importante de l’apprentissage guitaristique.

3.2.1.4 Progressive reading for guitarists par S. Dogdson et H. Quine (1975)

La méthode conçue en trois langues (anglais, allemand et italien) commence par une

préface où Quine présente la problématique et donne des indications sur la façon dont

on peut utiliser la méthode.

Il commence les exercices par la Ve position. Cette position va être le centre de la

méthode où il va diviser la touche de la guitare entre les positions plus graves (IVe, IIIe,

IIe et Ier) et les plus aiguës (VIe, VIIe, VIIIe et IXe). À chaque nouvelle position, il

commence par une corde, puis deux cordes, trois cordes, et ainsi de suite. L’avantage est

que l’on connaît les notes de la Ve position, et lorsqu’on commence à apprendre la IVe

position, on connaît déjà trois cases déjà jouées à la Ve position. Il y aura une seule case

à apprendre.30 La même chose peut être observée pour la VIe position par rapport à la

Ve.

Pour travailler les notes et le rythme, il propose un concept très intéressant, l’« interlude

rythmique » :

30 Pour une meilleure visualisation de cela, voir l’explication des positions à la page 7.

36

Figure 10 (Page 10)

Comme on peut l’observer, il utilise uniquement les notes entre les crochets ce que

permet de travailler le rythme et les notes choisies à la position donnée en même temps.

Le travail rythmique dans la méthode est bien développé. Il utilise des signatures

rythmiques de mesures simples et composées en changeant les unités de temps et il

ajoute des divisions exceptionnelles (allant du duolet au quintolet). Il travaille aussi des

armures allant de 4# à 4b.

Après avoir travaillé les positions V et IV, il propose des exercices pour les

changements de positions entre ces deux positions. Pour cela, il utilise une corde à vide

pour aider le changement de la main et donner aux élèves un peu de temps afin de

penser à la nouvelle position. Cette procédure va être omniprésente dans la méthode, et

proposée avec différentes positions. À la fin du chapitre IV, il présente son dernier

exercice en utilisant les positions les plus basses (de Ve à Ier) où il indique la position

utilisée en chiffre romain.

Dans le chapitre V, il commence à intégrer les positions les plus élevées (de VIe à IXe)

où il suit la même logique, mais il consacre moins de pages à cela (presque la moitié).

Dans la page 22, il explique son idée :

Bien que les cordes les plus graves soient rarement utilisées dans les positions les plus élevées pour elles-mêmes, les exercices 68 et 69 (tout comme d’autres dans ce chapitre) démontrent son importance combinée avec les cordes aiguës obligatoires dans ces positions. Si les exercices

37

donnés ne présentent pas la pratique suffisante pour la reconnaissance rapide des notes dans les cordes 4, 5 et 6 de ces positions-là, vous pouvez adapter les exercices de 12 à 18, 32 et 38 à ce propos»31.

Avec ce propos, on voit clairement qu’il a, la plupart du temps, dédié cette partie de la

méthode aux cordes les plus aiguës (de 1er à 3e cordes).

Sa façon d’introduire les accords est très logique, car les exercices deviennent de plus

en plus complexes ce qui va conduire, à la fin de l’ouvrage, à un chapitre exclusivement

dédié aux accords. Dans ce chapitre VI, il travaille l’habilité à reconnaître les cadences

(vers la tonique ou pas) en montrant à l’élève ou elles sont (exercices 85-87) et en

l’invitant à les chercher (exercices 88-92). À la page 31, il souligne l’importance de

travailler des œuvres de compositeurs tels que Sor, Carcassi, Carulli et Giuliani afin

d’avoir une connaissance plus approfondie des structures d’accords les plus communes

à la guitare. Dans les « interludes rythmiques » de ce chapitre, il présente les

changements de signature rythmique avec unités de temps différentes. À la fin, il

présente un exercice avec la 6e corde accordée en ré (très utilisé dans le répertoire de la

guitare) et termine la méthode par un sommaire.

Parmi les méthodes analysées dans ce travail, cette méthode est celle qui nous apparaît

la plus complète, car l’ouvrage met très clairement en exergue les défis de la lecture à

vue à la guitare et propose des exercices qui permettent de relever ces défis. Néanmoins,

on souligne un manque de rigueur dans l’édition musicale, car nombreux sont les

moments où l’élève doit s’arrêter pour tourner les pages au milieu de la lecture32, ce qui

va à l’opposé du conseil de départ : lisez toujours à l’avance (préface, conseil 6). Dans

31 Although high positions are seldom employed on the lower strings on their own account, exercises 68 and 69 (as well as others in this chapter) demonstrate their value in conjunction with obligatory high positions on the upper strings. If the exercises given do not provide sufficient practice in quick recognition of note position high up on strings 4, 5 and 6, you should adapt exercises 12 to 18 and 21 to 33 for this purpose. 32 Pages : 11, 15, 17, 23, 25 et 31. On souligne aussi une autre petite erreur : le dernier accord de l’exercice 52 est impossible à réaliser dans la position demandée.

38

cette section où il donne des conseils, il souligne également l’importance de ne jamais

arrêter la lecture même si nous faisons des erreurs, ce qui permet de développer la

fluidité, ainsi que de ne jamais répéter le morceau tout de suite (conseille 7) au risque de

faire travailler davantage la mémoire plutôt que la lecture à vue. Dans cette méthode, il

y a de nombreux textes, ce que démontre une approche plus pédagogique, car l’élève

peut même utiliser la méthode seule, sans nécessairement avoir un professeur à côté

pour le guider. Par contre, il n’y a aucune indication de tempo et de nuance. Même s’il

invite l’élève à les additionner lui-même (p. 14), on aurait souhaité que cela soit donné

par l’auteur. En effet, de telles indications figurent dans toutes les partitions de guitare

et préparer l’étudiant à cette lecture pourrait être un bon exercice. Ces petits détails plus

au moins critiques n’enlèvent en rien de l’importance à cette méthode. Cette dernière est

bien organisée et se présente comme un outil très adéquat pour le développement de la

lecture.

3.2.1.5 Musicianship and sight reading for guitarists par Oliver Hunt (1977).

Cette méthode est la plus complexe analysée dans ce travail. Hunt essaie de couvrir

toute la problématique de la lecture à vue à la guitare, car cette méthode propose un

travail allant de la Ire position à la XVe (c'est-à-dire, toute la touche de la guitare). Les

chapitres de la méthode travaillent jusqu'à une position déterminée : le premier et le

deuxième chapitre s’intéressent à la Ire position, le 3e chapitre à la IIe position (y

compris la Ire position), le 4e chapitre jusqu’à la Ve position (y compris de Ier à Ve

positions), et ainsi de suite. De cette façon, on ajoute toujours de nouvelles

connaissances en révisant les anciennes.

39

Chaque chapitre est guidé par six paramètres : tessiture, armure, signature rythmique,

texture, division et test exemple33. Ces paramètres deviennent de plus en plus

complexes à travers la méthode. Dans ces paramètres, la tessiture fait référence aux

positions utilisées. Pour l’armure, on commence avec aucune altération et on termine

avec les 7 dièses et bémols. On découvre la signature rythmique des mesures simples,

composées et asymétriques avec différentes unités de temps. La texture change aussi

peu à peu : mélodies au début, deux voix en page 17, des accords en page 21, et des

arpèges en page 22. Pour la division, il utilise des exercices avec juste une note où il

ajoute toutes les divisions naturelles et plusieurs artificielles (allant du duolet au

quintolet avec par exemple l’utilisation de silences).

Il demande de faire chaque exercice (sauf le test exemple) de cinq façons différentes :

jouer seulement, conter et jouer, chanter et jouer, dire le nom de la note et jouer, dire le

doigté et jouer (une main à chaque fois). Dans le test exemple, il fait un sommaire des

éléments travaillés dans le chapitre où il présente l’exercice comme un petit morceau de

musique avec des nuances, tempo et doigtés.

Cette méthode analysée présentement est la seule qui propose de travailler la région sur-

aigüe de la guitare (de XIIIe position ensuite). Hunt présente une façon très abordable de

travailler ces positions :

Vu que les douze premières frettes complètent une octave, c’est plus simple de visualiser et de penser aux positions XIIIe, XIVe, XVe et XVIe comme en étant Ier, IIe, IIIe et IVe.34 (p. 40).

33 Le test exemple est un sommaire qui sert à réviser le matériel travaillé dans le chapitre. 34 Since the first twelve frets complete an octave, it is easier both visually and mentally to think of positions XIII, XIV, XV and XVI as being positions I, II, III and IV.

40

Même si cela sonne une octave plus aiguë et que les symboles qu’on voit (c'est-à-dire

les notes) sont aussi notés une octave plus aiguë, on a au mois la même référence pour

les positions de notes que celle que l’on avait pour les positions plus graves :

Figure 11

La figure 11 compare les notes de la 6e corde aux Ier et IVe positions avec les positions

XIIIe et XVIe. La même logique peut être retrouvée dans les autres cordes.

À la page 52, il présente les deux façons d’écrire les harmoniques à la guitare (écrire

comment ça sonne et où on doit jouer) et propose des exercices pour travailler ces deux

façons. À la page 64, il présente les ornements et les abréviations les plus communs et

termine le livre avec un test exemple dans un système atonal.

La méthode a essayé de couvrir l’intégralité de la problématique de la lecture à vue à la

guitare et de ce point de vue, elle est réussie. Il y a toutefois un détail dans l’édition,

probablement dû à un manque d’attention, car l’élève doit s’arrêter pour tourner les

pages au milieu de la lecture35. Le fait d’introduire peu à peu les éléments tout au long

de la méthode est très intéressant et pédagogique, car on révise toujours les anciennes

35 Pages : 21, 27, 33, 55, 59 et 65.

41

connaissances. Sa façon de présenter les divisions artificielles et de proposer une façon

plus claire de les comprendre (quand c’est possible) est remarquable :36

Figure 12 (Page 47)

Son approche des différents niveaux est complète. Si l’on compare le premier exercice

avec le dernier, par exemple, on voit clairement que Hunt a essayé de recouvrir tous les

niveaux possibles :

(Page 9)

36 Voir pages 30, 47 et 62

42

Figure 13 (Page 65)

Bien qu’il soit presque impossible de lire à vue ce dernier exercice, on peut comprendre

la logique de l’auteur qui est de proposer de commencer par une simple mélodie au

début pour terminer avec un défi comme celui-là à la fin.

3.2.1.6 Conclusion

L’analyse des méthodes nous a montré leurs nombreuses qualités. Elles pourront être un

outil très important pour développer la lecture à vue à la guitare. Elles ont toutefois

chacune leurs spécificités. Pour cette raison, nous souhaitons les classer dans un ordre

croissant de difficulté afin de les placer dans notre plan de travail (annexe 1) de manière

plus logique. Ainsi, la méthode de Stevens se présente comme un bon début, car elle

utilise une note à la fois (juste des mélodies) et propose le concept de duo, ce qui peut

encourager l’étudiant car il y a une deuxième personne qui participe à son entreprise.

Comme suite à cela, on propose la méthode de Benedict. Même si elle ne va pas très

loin dans les positions les plus élevées, elle propose plus d’une note à la fois et introduit

les indications de nuances et d’expression. On continue avec Passalacqua, car son

approche schenkérienne développe un regard plus structurel pour la pièce à lire et cette

méthode permet d’aller aux positions les plus élevées avec des accords. Pour la suite, on

propose Dogdson et Quine en raison de leur approche plus pédagogique. Ils couvrent les

43

positions les plus importantes, vont plus loin dans la rythmique et présentent une

écriture avec un style plus moderne que les méthodes précédentes. Pour terminer, on

propose Hunt, car il est le seul à faire travailler le suraiguë et à proposer de vrais défis

de lecture à la fin de sa méthode.

Voici le résumé de la hiérarchie des méthodes que nous proposons selon le niveau :

• La lecture à vue en position par K. Stevens

• Sight reading for the classical guitar par Robert Benedict

• Pattern perception as a basis for the development of sight reading for the

classical guitar par J. L. Passalacqua.

• Progressive reading for guitarists par S. Dogdson et H. Quine.

• Musicianship and sight reading for guitarists par Oliver Hunt

3.2.2 Les études dédiées aux positions

D’autres références qui feront partie de notre plan de travail sont les études dédiées aux

différentes positions. Contrairement aux méthodes citées plus haut, ces études ne font

pas partie, à l’origine, d’une séquence d’apprentissage progressive, mais sont plutôt des

morceaux écrits dans une région spécifique présentée sans préparation préalable.

3.2.2.1 Méthode complète pour la guitare divisée en trois parties par Carcassi (1836) et Méthode complète pour guitare par Carulli. (?)

Ces deux méthodes ont été conçues au 19e siècle par deux grands guitaristes,

pédagogues et compositeurs. Bien qu’elles aient pour but de favoriser l’apprentissage

général de la guitare, elles proposent néanmoins des études polyphoniques dédiées aux

positions IV, V, VII et IX que nous utiliserons dans le plan de travail.

44

3.2.2.2 Nine etudes in nine positions Peter Danner (1982)

Danner dédie une étude pour chaque position de la région grave à la région aiguë. Dans

sa préface, il explique qu’il a évité l’utilisation de barrés et que les études ont été

conçues comme une suite, mais il est toutefois possible de les jouer séparément. Tel que

cité par l’auteur, le style des études est plutôt « conservateur », cependant, quelques-

unes sont plus contemporaines. Dans le cas des études qui seront utilisées dans le plan

de travail (annexe 1) nous prendrons l’étude à la Ve position (plus contemporain) et une

deuxième à la IXe (plutôt conservateur).

3.2.2.3 Estudos par Paulo Porto Alegre (1991)

Divisées en trois séries, les études par Porto Alegre sont les seules parmi les études

dédiées aux positions qui vont jusqu’à la région suraiguë (avec la méthode de Hunt).

Deux études ont été composées pour chaque position allant de la région grave à la

région aiguë. De l’autre coté, quatre études ont été composées pour la région suraiguë,

mais cette région est plutôt vue comme un ensemble, c'est-à-dire, qu’elle n’est pas

divisée en plus petites régions de quatre cases chacune. Dans notre plan de travail, on va

utiliser les études 9 et 10 qui sont dédiées à la Ve position, 17 et 18 à la IXe position et

19, 20, 21 et 22 à la région suraiguë.

45

Chapitre 4 – Conception du plan de travail

Comme nous avons vu au chapitre 1, notre but avec ce plan de travail est de créer des

automatismes de lecture à vue liés à trois régions spécifiques sur le manche de la

guitare, soit la moyenne, l’aiguë et la suraiguë. Madell et Hebert (2008) rapportent que

les fixations des yeux sur la partition sont plus courtes (car la lecture est plus

automatisée) chez les lecteurs professionnels que chez les amateurs. Ainsi, une question

se pose : comment aider l’étudiant à créer des automatismes ?

Au chapitre 2, nous avons vu qu’il y a trois types de connaissances qui peuvent être

utilisés dans le cas d’une lecture à vue, soit les connaissances déclaratives (noms des

notes, d’intervalles, des triades, des renversements, des cordes des gammes, etc.) ;

procédurales (où mettre les doigts pour mettre en action les connaissances déclaratives

et jouer les notes sur la guitare) ; et conditionnelles (comment choisir dans quelle région

et sur quelle corde jouer une note ou un accord). Comme les personnes visées sont des

étudiants de niveau universitaire (voir page 8), nous assumons qu’elles ont en grande

partie les connaissances déclaratives (théoriques) nécessaires pour comprendre les

tâches demandées (ex. nom des notes sur la portée, etc..). Ainsi, nous allons nous

pencher sur les connaissances procédurales et conditionnelles à acquérir pour la lecture

à vues dans les positions élevées à la guitare à l’aide d’exercices et d’études qui doivent

être répétés à l’instrument. En effet, Tardif (1992) affirme que dans le cas d’acquisition

de connaissances procédurales et conditionnelle « ce n’est que dans l’action et par celle-

ci que leur acquisition a le plus de probabilité de se produire » (p. 356). Il soutient aussi

que les interventions pédagogiques, dans le cas d’une connaissance procédurale, «

consistent donc à rendre la séquence d’actions disponible au champ perceptif de l’élève

» (idem p. 359). La procédure (séquence d’actions nécessaire pour réaliser une tâche)

doit donc être assimilée et disponible en mémoire pour que l’élève puisse la « consulter

chaque fois que cela est nécessaire dans l’actio n» (idem p. 359). Aussi, « L’enseignant

stratégique va donc placer l’élève dans un contexte de pratique guidé où il doit effectuer

46

la connaissance procédurale d’un but à l’autre » (Tardif p. 363). Ainsi, nous avons

pensé le plan de travail en petites séquences d’actions organisées en chaîne, qui

permettront d’organiser l’information en une seule action automatisée, soit un chunk.

Par exemple, dans le cas d’une triade, nous avons trois actions (trois notes à jouer) qui

formeront une seule triade, soit un chunk. Nous avons donc prévu des exercices de

triades afin de favoriser l’acquisition de ces chunks par l’étudiant, avant qu’il

n’entreprenne le travail des études. Un autre exemple est la gamme. Ainsi, pour un

étudiant qui connaît les notes naturelles individuellement, s’il travaille à en automatiser

le jeu l’une après l’autre en séquence, alors ces notes indépendantes deviendront une

gamme. L’étudiant doit se familiariser avec la gamme appropriée avant de travailler

l’étude d’armure qui lui est associée. Le fait d’organiser une séquence d’action

automatisée en chaîne représente le deuxième niveau d’acquisition d’une connaissance

procédurale : la composition. Ici le rôle de l’enseignant est primordial, il doit servir

comme médiateur entre la connaissance et l’étudiant. L’étudiant ne doit pas être laissé à

lui-même, l’enseignant doit être un motivateur/entraîneur et guider l’étudiant dans sa

démarche (idem p. 363).

Ainsi, ce plan propose une séquence d’exercices pratiques qui doivent être guidés

préférablement par un professeur37. Ces exercices sont organisés selon une région visée.

Comme nous avons vu à la page 19, un stimulus visuel (partition) sollicite une réponse

kinesthésique adaptée à une région concernée. De cette façon, notre plan est divisé selon

les régions moyenne, aiguë et suraiguë. Pour chaque région, il y a une liste progressive

d’exercices qui regroupe des extraits de méthodes, des études dédiées aux positions et

des études composées par l’auteur de cet examen de synthèse (Bogo, 2012 annexe 2).

37 Comme le travail est dédié aux étudiants de niveau universitaire, la personne peut par elle-même travailler le plan. Elle doit être, par contre, consciente de son niveau pour choisir la vitesse ainsi qu’avoir une capacité d’évaluer si la tâche a été bien accomplie, c'est-à-dire, si le résultat sonore est celui proposé par la partition.

47

Quelques conseils seront donnés dans le plan de travail38: premièrement, nous

éviterons la répétition d’un même exercice tout de suite, car cela conduit à une pratique

de mémorisation d’un morceau et non à une pratique de lecture. Nous conduirons

l’étudiant ainsi à travailler une réponse automatisée au stimulus visuel et non à une

répétition mémorisée. Deuxièmement, tel que vu à la page 19 au sujet de l’efficacité du

double encodage, nous encourageons l’étudiant à jouer et dire (préférablement chanter)

le nom des notes. Cette pratique favorise un multiple codage en juxtaposant des

représentations verbales, visuelles, auditives et kinesthésiques.

Souvent, les séries d’études dédiées à un instrument sont conçues pour combler une

difficulté technique particulière, mais dans le cas des Onze études par Bogo (2012), le

but est de pallier à la difficulté de trouver les notes sur la touche lors d’un changement

de position. Pour organiser la tâche, nous avons donc divisé la touche en trois régions

(chapitre 1 p. 7 et 8). Ainsi, quatre études ont été composées pour la région moyenne,

quatre pour l’aiguë et trois pour la suraiguë. Dans ces onze études, il y en a de 3 types :

libre, dédié au changement d’armure ou dédié aux accords. Les trois types ont été

composés avec une même exigence : jouer au moins une fois toutes les notes qui se

trouvent à la région pour laquelle elles ont été composées. Au contraire des exercices

trouvés aux méthodes citées au chapitre 3, ces études ont un caractère plus artistique,

c’est-à-dire qu’elles n’ont pas été conçues comme de simples exercices. Elles ont des

sections et des tempi définis ; des indications de caractère, des phrases, des nuances, etc.

Nous croyons que les matériels pédagogiques peuvent (et doivent même) avoir un

caractère artistique dans le but d’être plus en mesure de susciter l’intérêt de l’étudiant.

Une description plus détaillée de la façon dont les Études par Bogo (2012) ont été

conçues sera présentée plus loin.

38 Voir orientations générales de travail à l’annexe 1 p. 3.

48

4.1 Les études de changement d’armure

Quand on décide de travailler la lecture musicale de toutes les armures possibles, un

problème se pose : devons-nous écrire une étude pour chaque armure existante ? Au lieu

de composer 14 études (7 pour les dièses et 7 pour les bémols), la solution choisie a été

de créer des études qui possèdent un dispositif d’onglet qui nous permet de changer la

quantité de dièses et de bémols à l’armure. Ainsi, chaque étude peut être jouée de 15

façons différentes (sans ou avec les 14 altérations). Par contre, cela fait que chaque

armure présentera une « couleur », une sonorité différente. Si l’étude I, par exemple, est

jouée tout bécarre, elle est en ré dorien. Si on ajoute le fa #, elle devient en ré

myxolydien ; un fa # et un do #, elle devient en ionien et ainsi de suite. Notons que dans

une région donnée, une même étude devrait être travaillée avec les différentes armures.

Pour que l’étudiant s’habitue à la nouvelle armure, nous avons ajouté une gamme qui

doit être jouée avant le début de l’étude. Au-delà d’habituer l’étudiant à la nouvelle

sonorité générée par le changement d’armure, cette pratique permet aussi au guitariste

de s’habituer à la position des notes des altérations présentées en facilitant ainsi

l’acquisition des connaissances préalables au jeu de l’étude. Ainsi, comme l’étude de

changement d’armure utilise les sept notes données à la fois, la pratique de jouer la

gamme aidera la création d’automatismes liés à une gamme. Par exemple, si le

guitariste doit jouer une gamme avec 2 bémols à la Ve position, il doit répéter cette

gamme (en chantant ces notes) jusqu'à ce qu’elle soit automatisée avant de jouer

l’étude. Une fois automatisée, il passe à l’étude en soi et ainsi il n’aura pas de problème

pour trouver les notes, car il suffira d’utiliser les sept notes qu’il vient d’apprendre.

En lien avec le concept de transfert de connaissances tel qu’expliquée au chapitre 2 (p.

19), nous recommandons fortement à l’étudiant/professeur de commencer avec l'étude

sans aucune altération et de travailler celle qui en possède une, puis deux, etc. Par

exemple, si l’étudiant sait où est la note ré sur le manche, et s'il sait que la distance

49

d’une case à l’autre est d’un demi-ton, ainsi il peut effectuer un transfert de

connaissance pour trouver la note ré # ou ré b qui est située aux cases voisines. De

cette façon, avant d’avancer au premier dièse/bémol, il est absolument nécessaire que le

guitariste sache de manière automatisée où sont les notes naturelles (bécarres). Les

exercices préparatoires commencent aussi par les notes bécarres. Ainsi, une fois rendu

aux études d’armure, nous estimons que l’étudiant devrait avoir déjà une bonne

connaissance de la position des notes.

Le guitariste doit jouer la note altérée préférablement à la même corde sur laquelle il la

jouait bécarre. Par exemple, si à la Ve position, il joue la note fa à la 5e corde, une fois

qu’il avance au fa # il doit la jouer aussi à la 5e corde (et non à la 4e), comme une

extension de la position vers l’aigue. Cela fait que, à la fin, lorsque l’on joue les sept

dièses, on ira jouer une étude qui était à la Ve position à la VIe position, c'est-à-dire, de

la même façon qu’on la jouait avec toutes les notes bécarres, mais en se déplaçant d’une

case. Dans le cas du bémol, une étude qui était à la Ve position, une fois qu’on joue

tous les sept bémols, sera jouée à la IVe position.

4.2 Les études des accords et les tableaux de triades

Étant donné la grande quantité de possibilités d’arrangement des notes dans la formation

d’un accord, nous avons décidé de nous pencher sur la superposition de tierces, plus

précisément, la triade. Selon Piston (1959) « on peut dire que la triade est la base de tout

notre système harmonique, un rôle qu’elle tient encore malgré plusieurs

développements radicaux contemporains »39 (p. 10). Malgré ces « développements

radicaux contemporains », Piston enseigne dans son livre ce qu’il appelle la « pratique

39 The triad may be said to be the basis of our whole harmonic system, a place it still holds in spite of numerous radical contemporary developments.

50

commune » qui fait référence à la pratique harmonique qui englobe en gros les siècles

XVIIIe et XIX (p. 2). Par rapport au XXe siècle, Persichetti (1961) témoigne que les

compositeurs ont donné une autre approche à la triade et à la superposition de tierces en

général en confirmant son importance dans la pratique harmonique40.

Bien que nous allons nous pencher sur la triade, cela ne veut pas dire, par contre, que

nous traiterons uniquement des accords de trois sons, mais on abordera les accords de

quatre sons comme une triade avec une autre basse (qui n’est pas une simple doublure).

Ainsi, la figure 15 nous montre comment à partir d’une triade donnée nous pouvons

construire des accords de quatre sons :

40 Voir chapitres 2, 3, 7. 9 et 12.

51

Figure 14

De cette façon, notre but est de développer une habileté de lecture qui favorise

l’indépendance entre la ligne de basse et les triades. La basse est ainsi jouée par le

pouce de la main droite et la triade par les doigts index, majeur et annulaire. Cette

lecture doit fonctionner de façon plus au moins autonome, de la même manière que les

mains séparées du pianiste, dont l’une joue les notes en clef de fa et l’autre les notes en

clé de sol. En reprenant l’analogie des mains du pianiste, c’est comme si le pouce faisait

52

le travail de la main gauche, et les doigts index, majeur, et annulaire celui de la main

droite.

Pour réaliser cette tâche de lecture indépendante de la basse et de l’aiguë, nous devons

développer des automatismes de lecture41. Ainsi, les triades ne devraient pas être vues

comme trois notes indépendantes, mais plutôt comme une seule unité qui constitue trois

notes, un chunk42. Pour aider l’étudiant à regrouper les notes en accords, nous avons

développé les tableaux de triades (annexe 3). Ces tableaux présentent des connaissances

déclaratives43 liées aux triades. Ainsi, on peut trouver sur les tableaux les quatre types

de triades, ses renversements, les intervalles et les notes qui les constituent.

Du point de vue du développement d’une connaissance procédural, les diagrammes

présentés dans les tableaux montrent le chunk (les trois notes) déjà réalisé en accord. Un

travail plus détaillé de la procédure avec l’aide de l’enseignant est nécessaire pour

découper cette tâche en plusieurs séquences d’actions (Tardif 1992 p. 356 à 362), c’est-

à-dire, placer un doigt à la fois, puis penser le tout encadrant les trois notes ensemble.

La construction d’un chunk en mémoire se fait quand cette procédure est finalement

automatisée.

Avant de jouer les études d’accord, l’étudiant doit donc assimiler les accords présentés

dans les tableaux de triades (annexe 3). Il y a un tableau dédié à la région moyenne et un

autre à la région aiguë. Les triades doivent être jouées et assimilées avant l’étude des

accords dédiée à la région concernée. Ces tableaux se présentent comme des exercices à

répéter, mais aussi comme une référence de consultation pour la construction d’autres

exercices si besoin. Dans les tableaux de triades larges de la 5e corde à la 1e et de la 6e à

1e, nous avons dû choisir les triades plus importantes, car le nombre d’options était trop

41 À propos des automatismes voir chapitre 2 p. 20. 42 Pour l’explication de chunk voir chapitre 2 pages 14,17 et 20. 43 À propos des types de connaissances voir chapitre 2 p. 14.

53

grand. Ainsi, nous avons signalé les triades importantes, qui se retrouveront dans les

études des accords, avec la couleur rouge. De cette façon, dans le cas de ces deux

tableaux, l’étudiant ne répète que les triades rouges en omettant les noires.

4.3 Le suraiguë

La région suraiguë présente un défi technique au guitariste, car elle est difficilement

accessible. En effet, située à partir de la XIIIe case, elle se trouve sur la caisse de

résonance et les cases sont plus rapprochées. Comme nous avons vu au chapitre 1 (p.7),

la région suraiguë est la seule qui englobe plus de quatre cases. Ainsi, nous avons dû la

diviser en deux positions avec 4 cases chacune pour éviter des extensions trop grandes.

Ces extensions sont possibles techniquement (car les cases sont plus étroites), mais sont

moins viables du point de vue du positionnement des notes. Comme nous verrons plus

bas, nous allons rapporter une position à la suraiguë avec une autre à la région grave qui

se trouve à la distance d’une octave. De cette façon, nous avons préféré travailler la

région suraiguë en la divisant en deux groupes de quatre cases qui pourront être

rapportés à un autre groupe de quatre cases à la région grave.

Quand nous avons décidé quelles positions travailler, nous avons été confrontés à une

caractéristique particulière de la construction de plusieurs guitares. C’est une pratique

rependue chez plusieurs luthiers et les raisons ne concernent pas notre travail et seraient

trop longues à expliquer. Sur de nombreuses guitares, la touche se termine en épousant

le contour de la rosace, ce qui a pour conséquence une coupure d’une partie de la XIXe

case. Les photos en bas montrent cette pratique chez quatre luthiers reconnus44.

44 La Friederich a été utilisée par les Romeros, Scott Tennant Roberto Aussel et Eduardo Fernandez ; la Fleta par Segovia et John Williams ; La Hauser par Andres Segovia, Julian Bream et les Romeros ; la Smalman par John Williams.

54

Photo 1 – Daniel Friederich 196145 Photo 2 – Ignacio Fleta (1961)46

Photo 3 – Herman Hauser II (1973)47 Photo 4 – Greg Smallman (2008)48

45 Trouvé sur http://www.williampetit.com/guitar-classical-guitar.htm le 6 avril 2013 46 Trouvé sur http://guitarsalon.com/p165-1961-ignacio-fleta-spin-ex-john-williams.html le 6 avril 2013. 47 Trouvé sur http://www.guitarsalon.com/productimages/resized/372328dcedbf6472ead1d3af0b513b2e-1362174613-large.jpgle 6 avril 2013. 48 Trouvé sur http://guitarsalon.com/blog/?p=5129 le 6 avril 2013

55

Cette pratique rend impossible l’utilisation des cordes centrales (5, 4, 3, et 2) à la XIXe

case. Comme nous avons vu à la page 7 (figure 3) théoriquement, la région suraiguë va

de la position XIIIe à la XVIe. La dernière case de la XVIe position (XIXe) est, par

contre, impossible à jouer à cause de la coupure. Ainsi, dans la région suraiguë, nous

avons décidé de travailler sur deux positions : la XIIIe et la XVe. La dernière case sera

donc jouée seulement à la 1e corde comme une extension de la XVe position. Nous

arrivons de toute façon à la note la plus aiguë de la guitare (le si 5 - écrit)49. La figure 16

montre les deux positions de la suraiguë. Le carré jaune représente la XIIIe position et le

rouge la XVe avec l’extension du si sur la 1e corde.

Figure 15

La figure 15 nous montre aussi la relation entre la Ie et la XIIIe position et entre la IIIe et

la XVe (voir les notes écrites sur la 6e corde). Comme nous avons vu au 3e chapitre (p.

40), Hunt (1977) nous conseille de penser à la région suraiguë comme étant les

premières positions transposées d’une octave, avec les mêmes rapports entre les doigts.

Nous assumons que l’étudiant qui commence à jouer dans les positions plus élevées (à

partir de la Ve) a déjà une bonne connaissance des positions plus graves. Ainsi, nous

utilisons une connaissance qu’il a déjà dans sa mémoire à long terme (voir chapitre 2) et

49 Bien que la note si de la 6e corde (XIXe case) soit possible, différemment du si de la 1e corde, elle peut être trouvée dans une autre case (sur la 5 corde XIVe case). De cette façon, on a décidé de ne pas utiliser cette note dans notre étude, car elle est difficile d’accès et on a laissé ainsi l’extension de la XVe position exclusivement pour la 1e corde.

56

on va l’adapter à la région suraiguë. Notre plan d’étude (annexe 1 p. 9 et 10) indique

certains exercices qui peuvent être utilisés dans les deux octaves, ce qui permettra une

pratique en rapport aux positions concernées. Dû à la différence d’octave dans

l’écriture, l’étudiant peut, s’il le juge nécessaire, réécrire les exercices à l’octave

supérieure. Les trois études originales dédiées à la région suraiguë peuvent être jouées

aussi aux deux octaves différentes. La difficulté que l’étudiant trouvera dans ce rapport

sera l’écriture une octave plus aiguë50 (car à la guitare on n’a pas la tradition d’utiliser

l’indication d’octave – 8va).

Rappelons qu’en général, une position comporte quatre cases. L’étude IX (de

changement d’armure) a par contre été composée avec une case de plus. Cela est dû à la

difficulté de trouver les notes bécarres dans la XIIIe position51. Comme les études de

changement d’armure commencent sans altération (tout bécarre), l’absence de ces notes

dans cette position rendrait difficile la composition de l’étude. Pour aller chercher ces

notes manquantes, la solution a été de profiter du fait que les cases dans la région

suraiguë sont plus petites et d’élargir la XIII position. Ainsi, avec ces cinq cases, on

arrive au la de la 1e corde. Une fois rendu à l’altération du la # avec le dispositif

d’onglets, on arrivera à l’avant-dernière note de la guitare et ainsi on jouera la région

suraiguë presque au complet52 avec une seule position (XIII), sans avoir besoin

d’utiliser les deux positions différentes (XIII et XV) comme c’est les cas dans les deux

autres études à la région suraiguë.

En raison du manque d’espace à la région suraiguë, on a décidé de ne pas écrire une

étude d’accord dans cette région très peu utilisée dans le répertoire pour guitare.

50 Si l’étudiant décide de jouer les études de suraiguë à la région grave, il peut les réécrire à l’octave inférieure. 51 Sans cette case complémentaire, on n’aurait pas pu avoir le la de la 6e corde, le ré de la 5e, le sol de la 4e, le mi de la 2e et le la de la 1e. 52 Car la dernière note est le si.

57

Conclusion

La guitare présente des caractéristiques qui rendent difficile la lecture à vue à

l’instrument. On relève le fait qu’une note puisse être jouée à plusieurs positions (et

même à vide) et ceci très souvent dans un contexte polyphonique, et que l’accordement

soit en quarte et en tierce. Tout cela complexifie la tâche du guitariste qui doit lire à vue

une pièce musicale.

Pour favoriser les habiletés de changement de position lors de la lecture à vue à la

guitare et favoriser le jeu instrumental à la région moyenne, aiguë et suraiguë, c'est-à-

dire aux positions V, IX, XIII et XV, nous avons développé du matériel éducatif qui

comprend des exercices de différents auteurs et des études originales. Pour ce faire,

nous avons utilisé le processus méthodologique du modèle de développement de

matériel éducatif en pédagogie instrumentale proposé par Dubé, Héroux et Garcia

(2011, sous-presse). Au contraire d’un développement intuitif ou basé sur l’expérience

pédagogique de l’élaborateur, ce modèle propose une démarche méthodologique basée

sur une approche scientifique étant plus apte à combler les besoins pédagogiques

identifiés dans la pratique. Ainsi, après avoir identifié notre problème (la difficulté de

lecture aux positions plus élevées de la guitare), nous avons procédé à une revue de

littérature qui comprenait des méthodes pour guitare et des textes scientifiques, ce qui

nous a permis d’identifier les lacunes dans le matériel pédagogique existant. Par la suite,

nous avons défini les caractéristiques des personnes visées par ce plan de travail, soit

des étudiants guitaristes de premier cycle universitaire.

Ensuite, nous avons conçu le plan de travail, organisé en ordre croissant de difficultés,

avec des exercices extraits de certaines méthodes et des études de différents auteurs,

dont Bogo (2012).

58

Pour orienter notre plan de travail et les séquences pédagogiques proposées, nous avons

choisi une approche cognitiviste dans le but de créer des automatismes de lecture de

notes qui puissent être rappelées lors de la lecture à vue d’une pièce musicale. Pour ce

faire, nous avons cherché à comprendre comment fonctionne la mémoire humaine et

comment sont construites les connaissances en mémoire et nous avons utilisé différents

concepts issus du cognitivisme.

Premièrement, le concept de transfert de connaissances nous a amenés, pour chaque

région visée, à toujours commencer avec des exercices et des gammes avant d’aborder

les études de changement d’armures. Deuxièmement, en ce qui concerne la lecture

d’accords, nous avons développé les tableaux de triades (annexe 3) pour aider la

construction de chunks en mémoire. Troisièmement, influencé par le concept du double

codage, nous invitons l’étudiant à une pratique où il joue et chante la note. De cette

façon, ces différentes pratiques décrites plus haut ont un but commun, qui est de créer

des automatismes de lecture.

Ainsi, pour concevoir le plan, nous avons pris des exercices qui travaillent les régions

moyenne, aiguë et suraiguë de divers auteurs et on les a organisés en ordre croissant de

difficultés. Aux extraits choisis des méthodes citées au chapitre 3, nous avons ajouté

d’autres extraits de Carulli (?) et Carcassi (1836) ainsi que les études de positions de

Danner (1982) et Porto Algre (1991). Tout ce matériel a servi de préparation aux Onze

études de région par Bogo (2012 – annexe 2). En résumé, nous avons organisé une liste

progressive d’exercices pour chaque région concernée qui comprend des exercices et

études de plusieurs auteurs ainsi que des études originales.

Décrite comme un « cauchemar » par quelques guitaristes tel que souligné par Dogdson

et Quine (p.2), l’amélioration de l’habilité de lecture à la guitare se révèle possible

comme le suggère l’essai de Fireman (p. 24). Notre plan de travail propose ainsi une

proposition pédagogique qui vise à améliorer cette habilité. Par contre, il est important

59

que d’autres recherches ultérieures valident l’efficacité de ce plan de travail en

l’expérimentant auprès d’étudiants universitaires.

60

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Université de Montréal

ANNEXE 1:

Plan de travail pour développer les habilités de lecture à vue à la guitare organisé selon les régions moyenne, aiguë et suraiguë.

Par

Danilo Bogo

Hiver 2013

1

Plan de travail

Le plan de travail qui suit a pour but de développer les habiletés de lecture aux positions élevées de la guitare (à partir de la Ve position). Il utilise trois types de matériel pédagogique conçu par différents auteurs. Il comprend des extraits de méthodes, des études dédiées aux positions et des études composées par l’auteur de cet examen de synthèse (Bogo, 2012). Aux extraits des méthodes présentées au chapitre 3, nous avons ajouté des morceaux pris dans les méthodes de Carulli (?) et de Carcassi (1836). En ce qui concerne les études de positions, on a choisi Danner (1982) et Porto Alegre (1991). On termine ce plan avec les Onze études de région par Bogo (2012). La liste qui suit présente, de façon progressive en ce qui concerne le niveau de difficulté, tout le matériel qui sera travaillé:

• La lecture à vue en position par K. Stevens (2003)

• Sight reading for the classical guitar par Robert Benedict (1985)

• Metodo completo per chitarra par Carulli (?)

• Guitar methode par Carcassi (1836)

• Pattern perception as a basis for the development of sight reading for the

classical guitar par J. L. Passalacqua. (2000)

• Musicianship and sight reading for guitarists par Oliver Hunt (1977)

• Progressive reading for guitarists par S. Dogdson et H. Quine. (1975)

• Nine etude in nine positions par Peter Danner (1982)

• Estudos para violão série I,II e III par Paulo Porto Alegre (1991)

• Onze études de région par Danilo Bogo (2012)

Extraits de méthodes de lecture à vue et études Comme nous avons proposé de travailler seulement les régions moyenne, aiguë et suraiguë de la guitare (chapitre 1 page 7 et 8), il ne sera choisi que les parties de ces ouvrages qui travaillent ces régions (en matière de position cela représenterait les Ve, IXe, XIIIe et XVe). Le plan, donc le matériel à travailler, est organisé en trois sections : la première regroupe tout le matériel qui travaille la région moyenne dans toutes les méthodes/études ; à la deuxième, la même procédure a été adoptée pour la région aiguë ; et à la troisième section, la même procédure est appliquée à la suraiguë. Une liste

2

d’exercices et d’études de différents auteurs précédera les études de région (Bogo 2012 annexe 2), ainsi, ces exercices et études serviront de préparation aux Onze études de région. Les Onze études de région (annexe 2) Onze études ont été composées, dont quatre pour la région moyenne, quatre pour l’aiguë et trois pour la suraiguë. Dans ce corpus, il y a trois types d’études : une libre, une dédiée aux changements d’armure et l’autre aux accords. Les études de changements d’armures sont conçues avec un onglet qui permet de changer la quantité de dièses et de bémols. Ainsi, il est prévu que l’étudiant commence par jouer la gamme (laquelle sera présentée avant l’étude, avec les altérations indiquées à l'armure), avant de jouer l’étude concernée. Cette pratique de jouer la gamme a deux fonctions : premièrement, d’habituer le guitariste aux altérations présentées et deuxièmement, de lui permettre de s’habituer à la nouvelle sonorité induite par l’armure. La gamme doit être répétée le nombre de fois nécessaire pour que l’étudiant se sente totalement habitué à la sonorité et à la position des notes. En lien avec le concept de transfert de connaissances tel qu’expliqué au chapitre 2 (p. 19), on conseille fortement à l’étudiant/professeur de commencer avec l'étude sans aucune altération et de travailler celles qui en possèdent une, puis deux, etc. Par exemple, si l’étudiant sait où est la note ré sur le manche, et s'il sait que la distance d’une case à l’autre est d’un demi-ton, ainsi il peut effectuer un transfert de connaissances pour trouver la note ré # ou ré b qui est située dans des cases voisines. De cette façon, avant d’avancer au premier dièse/bémol, il est absolument nécessaire que le guitariste sache de manière automatisée où sont les notes naturelles (bécarres). Les exercices préparatoires commencent aussi par les notes bécarres, ainsi, une fois rendu aux études de changements d’armures, on pense que l’étudiant devrait avoir déjà une bonne connaissance de la position des notes. Un détail très important est que l’étudiant doit jouer la note altérée préférablement à la même corde qu’il la jouait lorsqu’elle était bécarre. Si à la Ve position, il joue la note fa à la 5e corde, par exemple, une fois que le guitariste avance au fa # il doit la jouer aussi à la 5e corde (et non à la 4e), comme une extension de la position vers l’aiguë. Cela fait que, à la fin, une fois qu’on joue tous les sept dièses, on ira jouer une même étude qui était à la Ve position à la VIe position, c'est-à-dire, de la même façon qu’on le jouait avec des notes bécarres, mais déplacé d’une case. Dans le cas du bémol, une même étude qui était à la Ve position, une fois qu’on joue tous les sept bémols, sera joué à la IVe position.

3

L'autre type d'étude est dédié aux accords. Ces études sont basées sur des triades. Au chapitre 4 (p. 49, 50 et 51), on a montré l’importance des triades dans la pratique harmonique et la nécessité de développer une lecture indépendante entre la ligne de basse et l’aiguë. Avant de jouer les études des accords, on conseille le travail de l’annexe 3 – les tableaux de triades. Ainsi, on peut trouver sur les tableaux les quatre types de triades, ses renversements, les intervalles et les notes qui les constituent. Avant de jouer les études des accords, l’étudiant doit donc répéter les tableaux de triades (annexe 3)1. Il y a une série de tableaux dédiés à la région moyenne et l’autre à la région aiguë. De cette façon, ils doivent être pratiqués avant l’étude d’accords dédiée à la région concernée. Ces tableaux se présentent comme une pratique à faire, mais aussi comme une référence de consultation pour la construction d’autres exercices si besoin. En raison de la difficulté de jouer les accords (surtout les triades serrées) à la région suraiguë, nous avons décidé de ne pas composer d’étude d’accords pour cette région. Cette difficulté est liée à la fabrication de la guitare. En effet, les barrettes sont plus rapprochées et les cases plus petites, ce qui rend le jeu de ces positions difficile et peu employé dans le répertoire. Orientations générales de travail Pour une meilleure assimilation, on encourage fortement une lecture où l’étudiant joue et dit (préférablement il chante) le nom des notes. S’il y a plus d’une voix, on peut choisir de chanter la principale (mélodie). Cette pratique favorise un codage multiple en utilisant des représentations verbales, visuelles, auditives et kinesthésiques. Chaque liste d’exercices dédiés à une région doit être répétée jusqu'à ce qu’il y ait aisance. On doit éviter de répéter le même exercice tout de suite, car cela conduit à une pratique de mémorisation d’un morceau et non à une pratique de lecture à vue. On cherche à favoriser chez l’étudiant une réponse automatisée au stimulus visuel et non une répétition mémorisée. Une fois le premier exercice joué, on passe au deuxième, au troisième, ainsi de suite. Une fois arrivé à la fin de la liste, l’étudiant/professeur doit se demander si les réponses aux exercices sont assez automatisées. Si oui, on passe aux études par Bogo (2012 - annexe 2). Sinon, on répète la liste du début. L’idéal est que l’étudiant ajoute les études de lecture à ses pratiques techniques quotidiennes (gammes, arpèges, etc.). Ainsi, nous conseillons une pratique d’une vingtaine de minutes par jour et si possible, lors du cours hebdomadaire, une pratique de certains exercices travaillés dans la semaine, surveillée par un professeur. L’étudiant

1 Des orientations d’utilisation des tableaux de triades seront données à l’annexe 3.

4

doit dans sa pratique quotidienne respecter les règles citées plus haut, soit chanter le nom des notes qu’on joue et ne jamais répéter un exercice tout de suite. La vitesse choisie devrait être adaptée aux habilités de lecture de l’étudiant avec le but de ne jamais nuire au discours musical. Par exemple, si on commence à 60 à la noire et que l’étudiant s’arrête trop pour déchiffrer un morceau, on doit réduire cela à 50, 40, etc. Si ce n’est pas assez, on peut considérer la noire (qui valait 1 temps) comme 2, 4 même 8 temps. On doit arriver ainsi à une vitesse optimale qui sera confortable pour le lecteur. Dans le cas de la répétition d’une liste ou si le professeur sent que l’étudiant est assez à l’aise avec la vitesse proposée, on augmentera celle-ci (toujours en respectant les habilités de l’étudiant) en proposant un petit défi. Les indications de vitesse proposées aux Onze études de région (Bogo 2012 - annexe 2) doivent aussi être considérées comme un idéal à atteindre. On doit donc les réduire si nécessaire.

5

Voici le plan de travail comprenant des extraits de méthodes, des études dédiées aux positions et des études par Bogo (2012). Pour des questions de droit d'auteur, on ne peut malheureusement imprimer ici les exercices écrits par d'autres auteurs. Ainsi, on conseille l'achat de tout le matériel avant le début du travail. Il suit trois listes de travail : une à la région moyenne, l’autre à l’aiguë et la dernière à la suraiguë.

Région moyenne (Ve position) Stevens (2003) Pages de 3 à 11. p. de 30 à 37. Benedict (1985) p. 16, the fifth position – diagram A and B. p. 17 exercices 75, 76 et 77. p. 18 ex. de 78 à 82. p. 19 ex. 85b, 86b, 87b et 88b. p. 20 ex. 89c, 90b et 91c. p. 21 (seulement à la Ve pos.) p. 42 ex. 68 et 69 (seulement à la Ve pos.) p. 43 ex. 70 à 75 (seulement à la Ve pos.) p. 47 ex. 93 et 97c. p. 48 ex. 98b. p. 49 ex. 103 à 105 (seulement à la Ve pos.) p. 50 ex. 106 à 109 (seulement à la Ve pos.) p. 51 ex. 110 à 112 (seulement à la Ve pos.) p. 52 ex. 113 à 115 (seulement à la Ve pos.) Carulli ( ? ) p. 37 Carcassi (1836) p. 47 Passalacqua (2000) p. 24 ex. 1. p. 29. p. 33. p. 37. p. 42.

6

Hunt (1977) p. 19 ex. 52 et 53. p. 20 ex. 63 et 64. p. 21 ex. 65 et 66. p. 36 ex. 125 et 126. Dogdson et Quine (1975) p. de 1 à 6. Danner (1982) p. 6 et 7. Porto Alegre (1991) Série I – Études 9 et 10 p. 10 et 11. Bogo (2012) Études I, II, III et IV

7

Région aiguë (IXe position)

Stevens (2003) p. 22 et 23 (la 2e partie de Cielito Lindo peut être jouée aussi à la IXe position. Il suffit de jouer le ré # de l’avant-dernière mesure à la 3e corde VIIIe case). p. 24 (peut être joué seulement à la IXe pos.) Les exercices qui suivent (Stevens) sont écrits originalement à la VIIe position, par contre, ils peuvent être joués à la XIXe: p. 16 ex 2. p. 18 (le do de l’avant-dernière mesure peut être joué à la 2e corde et XIIIe case) p. 20, gamme ré majeur, gamme ré lydien. p. 43 ex. 1, 2 et 3. p. 44 In the bleak midwinter et Étude en la mineur. p. 45 God rest ye merry, gentleman. p. 50 ex. 5 Carulli ( ? ) p. 39 Carcassi (1836) p. 49 Passalacqua (2000) p. 31 p. 35 p. 39 Hunt (1977) p. 29 ex. 94 et 95. p. 31 ex. 106 à 108. p. 32 ex. 109. p. 36 ex. 127. Dogdson et Quine (1975) p. 21 ex. 67. p. 22. p. 23 (continuation de l’exercice 70).

8

Danner (1982) p. 13 et 14. Porto Alegre (1991) Série II – Études 17 et 18 p. 7. Bogo (2012) Études V, VI, VII et VIII

9

Région suraiguë (XIIIe et XVe positions) Hunt (1977) Position XIII p. 54 ex. 201 p. 58 ex. 212 p. 63 ex. 225 Position XV p. 46 ex. 163 et 164. p. 48 ex. 178. p. 49 ex. 179. Exercices à adapter de la région grave vers la région suraiguë Comme nous avons vu à la page 55-56, la Ie et la XIIIe position présentent les mêmes rapports entre les doigts. Par contre, ces positions sonnent et sont écrites à une octave d’intervalle. La même chose peut être dite des positions III et XV. Ainsi, comme nous avons un répertoire plus petit d’exercices pour la région suraiguë (de XIIIe à XVe position) on adaptera les exercices présentés plus bas de la région grave vers la région suraiguë. De cette façon, les exercices aux positions I et III seront respectivement adaptés vers les positions XIII et XV. Il suffit à l’étudiant/professeur de réécrire les notes une octave plus aiguë – ou simplement de les jouer à l’octave plus aiguë. Le but de faire cette relation est de montrer à l’étudiant que ces positions (Ie-XIIIe et IIIe-XVe) se rapportent entre elles à la distance d’une octave. On utilise donc une connaissance qu’il a déjà (le rapport entre les doigts), la seule difficulté étant technique : le manque d’espace de la région suraiguë. Les trois études de Bogo (2012) portant sur la région suraiguë, qui sont présentées ici, peuvent aussi être jouées aux deux octaves. Elles ont toujours deux sections, une à la XIIIe position et l’autre à la XVe. Ainsi, il suffit de les réécrire une octave plus bas (si nécessaire) et de les jouer respectivement aux Ie et IIIe positions. À adapter de la Ie position vers la XIIIe position (octave aiguë). Le problème de ce changement est que la Ie position ajoute les cordes à vide comme composante. Quand on essaye de jouer un même exercice de la Ie position transposé à la XIIIe, ces cordes à vide vont sonner une octave plus bas, et ainsi, elles ne peuvent plus

10

être jouées à vide. De cette façon, une fois qu’on réécrit l’exercice à l’octave supérieure, ces notes, qui étaient des cordes à vide, se trouveront en dehors des quatre cases de la XIIIe position. Il est ainsi nécessaire d’élargir la XIIIe position d’une case pour aller chercher ces notes qui se trouvent soit à la XVIIe soit à la XIIe case. En suivant ce conseil, la majorité des exercices à la Ie position dans les livres de Hunt (1977) et Benedict (1985) peuvent être adaptés vers la XIIIe. À adapter de la IIIe position vers la XVe position (octave aiguë). Benedict (1985) p. 18 exercices 83 et 84 (basse continue à vide, soprano change d’une octave plus aiguë) p. 19 ex. 85 et 87 (basse continue à vide, soprano change d’une octave plus aiguë) p. 20 ex. 90a et 91b (basse continue à vide, soprano change d’une octave plus aiguë) Dogdson et Quine (1975) p. 15 ex. 52 (sans cordes à vide) p. 16 ex. 55 (sans cordes à vide – jouez les notes indiquées par 0 non à vide) p. 17 ex. 57 et 58 (ne jouez que les basses à vide) Hunt (1977) p. 42 ex 145 et 146. p. 47 ex 172 et 173. Exercices originalement écrits pour la région suraiguë Porto Alegre (1991) Sans avoir besoin d’aucune adaptation, Porto Alegre dédie la 3e série de ses études aux positions suraiguës. Par contre, dans ses quatre études, il utilise les positions à partir de la XIIe case sans spécifier laquelle. La position peut alors être notée par l’étudiant/professeur avant le début de la pratique. Bogo (2012) Études IX, X et XI.

11

Références:

Benedict, R. (1985). Sight reading for the Classical guitar – Level 4 and 5, ?, Alfred.

Bogo, Danilo (2012). Onze études de région. Annexe 2.

Carcassi, Mateo. Méthode complète pour la guitare divisée en trois parties. London: Schott & Co. Ltd, 1836. Carulli, Ferdinando. Méthode complète pour guitare. Milano : Ricordi, sans date (1er

édition en 1810)

Danner, Peter (1982). Nine etudes in nine positions. New York. Associated publishers,

inc.

Dodgson, S. et Quine, H. (1975). Progressive reading for guitarists,London , Ricordi.

Hunt, O. (1977). Musicianship & sight reading for guitarists, London, Musical new

services Ltd.

Passalacqua, J. L. (2000). Pattern perception as a basis for the development of sight

reading for the classical guitar, Miami, University of Miami.

Porto Alegre, Paulo (1991). Estudos Série I, II et III. Trouvée gratuitement sur

http://www.pauloportoalegre.com/compositions.html. Consulté le 3 novembre

2012.

Stevens, K. (2006). La lecture à vue en position : Apprendre progressivement la lecture

dans les positions plus élevées, Saint-Romuald, D’Oz.

Université de Montréal

ANNEXE 2:

Onze études de région

Par

Danilo Bogo

2012

1

Précisions de l’édition Voici quelques précisions quant à la notation employée dans les études : Les liaisons : si une liaison lie deux notes égales, c’est une liaison de prolongation. Si elle part d’une note et ne lie rien, la note doit être tenue jusqu’à ce que le son suivant de la même voix entre ou que le son soit fini. Si elle lie des notes différentes, elle représente les coulés guitaristiques (lié ascendant et descendent). Les liaisons pointillées indiquent le phrasé. Les chiffres indicateurs de mesure : Quand les changements de chiffres indicateurs sont trop fréquents, nous avons décidé de ne pas les indiquer, car nous pensons que ça embrouillera plus le lecteur que ça ne l’aidera. Ces chiffres sont une indication d’un patron qui va être répété. S’il n’y a pas de répétition de ce patron, son utilisation devient déplacée. La figure 1 en bas montre un exemple pratique de cette idée en utilisant l’étude VI. Les appuis musicaux (le temps fort) sont donnés par les débuts de mesure (après le barré de mesure) et les « moyennement forts » par la façon qu’on lie les crochets. Dans une mesure 5/8 par exemple, si on voit 3 croches plus 2 croches, on sait que le premier temps est fort et que le quatrième est moyennement-fort. Tout cela est aussi aidé par les accents et les liaisons de phrase :

Figure 1 - Extrait de l’étude VI

Nous pensons que cette façon de procéder est plus intuitive, cependant l’étudiant/professeur pourra ajouter les chiffres indicateurs au-dessus de chaque barré de mesure s’il les juge nécessaire. La même logique a été appliquée aux études I et X. Par contre, dans ces deux cas, c’est lorsque les mesures sont trop grandes (10 ou 11 temps) ou lorsque les figures n’ont pas de crochets pour être liées, les liaisons de phrases guideront les lecteurs pour une bonne compréhension du texte musical. À l’étude III, où il n’y a pas de barré de mesures, on articule les phrases sans trop appuyer les débuts et on suit, bien sûr, les accents écrits.

2

Les équivalences des durées : Dans les onze études, peu importe le changement de chiffre indicateur de mesure, les durées sont toujours équivalentes. Ainsi, la croche est toujours égale à une croche, la noire égale à une noire etc. Les harmoniques : Pour éviter les erreurs d’interprétation, nous avons ajouté en haut de la note (qui représente où on met le doigt) la corde et la case où on doit faire l’harmonique. Si le résultat est différent de celui de la note écrite, on a ajouté la note réelle entre parenthèses. Dans le cas d’harmonique artificielle, on a ajouté l’indication de la main droite (M. D.) Le doigté : En général, nous avons ajouté le doigté seulement où cela ne suivait pas la logique d’un doigt pour chaque case où encore quand un mauvais doigté pourrait nous conduire à une erreur. Au suraiguë, en ce qui concerne les bourdons, nous avons préféré la non-utilisation du quatrième doigt, car il est plus petit que les autres. Le fait qu’il soit petit, combiné à la caisse de résonance qui se trouve dans cette région rend difficile l’accès aux cordes graves. Ainsi, nous avons préféré la répétition du troisième doigt qui jouera les deux dernières cases 0de chaque position (XIII et XV) du suraiguë. Si les études au suraiguë sont jouées à la région grave (l’adaptation à l’octave inférieure), par contre, un doigté plus « normal » peut être utilisé. Aux études de changements d’armures, nous avons évité d’ajouter des doigtés, car l’armure est mobile et à chaque nouvelle altération la doigtée change. Les cordes à vide: Jouer les cordes à vide uniquement quand elles sont indiquées par

3

4

* indiquées

5

6

7

8

9

10

11

12

13

14

15

16

17

Université de Montréal

ANNEXE 3:

Tableaux de triades aux régions moyenne et aiguë

Par

Danilo Bogo

Hiver 2013

1

Tableaux de triades aux régions moyenne et aiguë Les tableaux de triades présentés ici doivent être répétés avant les études d’accords. Ils ont été divisés entre les régions moyenne et aiguë1. Dans chaque série de tableaux dédiés à une région donnée, on trouvera deux grandes divisions : les triades serrées et les larges. Dans ces deux grandes divisions, on trouvera des sous-divisions de cordes. Ainsi, une page sera dédiée aux triades serrées aux 1e, 2e et 3e cordes ; l’autre aux 2e, 3e et 4e cordes et ainsi de suite. En ce qui concerne les triades larges, une page sera dédiée de la 4e à la 1e corde ; l’autre de 5e à la 1e et une dernière de 6e à la 1e. Orientations générales de ce travail Les tableaux doivent être joués avec les vitesses qui suivent : Ronde de 60 à 80 bpm2 Blanche pointée de 60 à 80 bpm – À partir d’ici avec les diagrammes cachés Blanche de 60 à 80 bpm Noire de 60 à 80 bpm On répète ainsi chaque tableau (page) de 60 à la ronde à 80 à la noire. Pour être plus claire, on commence à 60 à la ronde, après on augmente le métronome un peu (disons 63) et on répète l’exercice. Une fois arrivé à 80 à la ronde, on passe à 60 à la blanche pointée et ainsi de suite. Le but est d’arriver au moins à 80 à la noire. À partir de 60 à la blanche pointée, on cache les diagrammes (à l’aide des onglets) et on se concentre seulement sur les notes. Ces diagrammes ont été conçus pour aider la visualisation de la position des notes au début du processus. Par contre, dans la réalité, les partitions ne présentent pas de diagramme, ainsi on doit s’habituer à cette pratique. Dans les tableaux de triades larges de la 5e corde à la 1e et de 6e à 1e, nous avons dû choisir les triades plus importantes, car le nombre d’options était trop grand. Ainsi, on a signalé les triades importantes, qui se retrouveront dans les études d’accords, avec la couleur rouge. De cette façon, dans le cas de ces deux tableaux, l’étudiant ne répète que les triades rouges en omettant les noires.

1 Comme nous avons expliqué au chapitre 4, la région suraiguë a été laissée de côté à cause de son manque d’espace. 2 Battement par minute.

2

Tableaux de triades à la région moyenne

3

4

5

6

7

8

Tabl

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9

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+

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10

Tableaux de triades à la région aiguë

11

12

13

14

15

16

Tabl

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17

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