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ILLUSTRATION D'UN RAPPROCHEMENT ENTRE OCCUPANTS ET OCCUPÉS ? LA QUESTION JUIVE AU MIROIR D'UNE COLLABORATION D'ÉTAT, 1940-1942 Barbara Lambauer Les Belles lettres | « Les Cahiers de la Shoah » 2005/1 n o 8 | pages 151 à 178 ISSN 1262-0386 ISBN 225169417X Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-les-cahiers-de-la-shoah-2005-1-page-151.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Barbara Lambauer, « Illustration d'un rapprochement entre occupants et occupés ? La question juive au miroir d'une collaboration d'État, 1940-1942 », Les Cahiers de la Shoah 2005/1 (n o 8), p. 151-178. -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Les Belles lettres. © Les Belles lettres. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 83.199.193.148 - 20/07/2015 09h58. © Les Belles lettres Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 83.199.193.148 - 20/07/2015 09h58. © Les Belles lettres

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ILLUSTRATION D'UN RAPPROCHEMENT ENTRE OCCUPANTS ETOCCUPÉS ? LA QUESTION JUIVE AU MIROIR D'UNECOLLABORATION D'ÉTAT, 1940-1942Barbara Lambauer

Les Belles lettres | « Les Cahiers de la Shoah »

2005/1 no 8 | pages 151 à 178 ISSN 1262-0386ISBN 225169417X

Article disponible en ligne à l'adresse :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-les-cahiers-de-la-shoah-2005-1-page-151.htm--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Pour citer cet article :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Barbara Lambauer, « Illustration d'un rapprochement entre occupants et occupés ? La questionjuive au miroir d'une collaboration d'État, 1940-1942 », Les Cahiers de la Shoah 2005/1 (no 8),p. 151-178.--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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IIlllluussttrraattiioonn dd’’uunn rraapppprroocchheemmeenntt eennttrree ooccccuuppaannttss eett ooccccuuppééss ?? LLaa qquueessttiioonn jjuuiivvee aauu mmiirrooiirr

dd’’uunnee ccoollllaabboorraattiioonn dd’’ÉÉttaatt,, 11994400--11994422

Barbara Lambauer

La présente contribution a pour but d’élucider lescirconstances dans lesquelles sont prises les premièresmesures de persécution contre les juifs de France en1940, jusqu’aux grandes vagues de déportation de 1942,en mettant en lumière les interdépendances franco-alle-mandes. Il ne s’agit évidemment pas ici d’émettre unquelconque doute sur l’antisémitisme de Vichy, mais demontrer que celui-ci répond sans doute également à unedynamique nourrie par une partie des services alle-mands installés à Paris.

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Car, durant cette période, l’ambassade d’Allemagnejoue un rôle d’instigation singulier. Ce n’est pas pourrien si, dans le Who’s Who in Nazi Germany de RobertWistrich, l’accident de voiture mortel ayant coûté la vieen mai 1958 à Otto Abetz, ancien ambassadeur, restémystérieux, est interprété comme un acte de vengeancepour le rôle que celui-ci a joué dans la déportation desjuifs de France1. Ce qui peut certes étonner, étant donnéque cette facette du personnage est restée pendant long-temps dans l’ombre. Dans les faits, on peut s’interrogersur la part de responsabilité d’un ambassadeur dans lespersécutions exercées dans un pays occupé où gouverneune administration militaire, flanquée par les représen-tants du Reichssicherheitshauptamt de Berlin. Et pour-tant, le rôle d’Otto Abetz est effectivement unique dansl’histoire des ambassadeurs ; il est surtout lourd deconséquences dans le domaine de la persécution desjuifs de France entre 1940 et 1944.

CCoonnttaaccttss ppoolliittiiqquueess eett mmeessuurreess aannttiisséémmiitteess ddee ll’’ééttéé11994400

Nommé représentant en France occupée de Joachimvon Ribbentrop, le ministre des Affaires étrangères alle-mand, Otto Abetz, ancien professeur de dessin et debiologie devenu « ministre plénipotentiaire », arrive le15 juin 1940 à Paris, accompagné d’une équipe dejeunes collaborateurs francophiles, pour installer sesservices au Palais Beaumont de la rue de Lille, siège del’ancienne ambassade d’Allemagne. À côté des servicesmilitaires allemands de la capitale française, il doit

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encore trouver sa propre place. Il y parvient en renouantd’anciens contacts établis dans les années 1930 et réus-sit ainsi à constituer un réseau de connaissances dans lesmilieux politiques, intellectuels et culturels français,s’étendant jusqu’à Vichy, ville thermale qui abrite lenouveau gouvernement du maréchal Pétain. Le 14juillet 1940, un membre de ce gouvernement, PierreLaval, essaie d’entrer en relation avec lui. Faisantannoncer sa visite dans la capitale de la zone occupéepar un émissaire, le vice-président du Conseil desministres s’enquiert de la possibilité de rencontrer leReichsmarschall Göring2. En quelque sorte en guise decontrepartie, il annonce plusieurs projets dont il doitpenser qu’ils plaisent à ses futurs interlocuteurs alle-mands : parmi eux, la fondation d’un parti unique, maisaussi l’élaboration de deux lois portant l’une sur l’inter-diction de la franc-maçonnerie et l’autre sur l’évictiondes juifs du service public3. Le 19 juillet, Laval, premierministre français à traverser la ligne de démarcation, estaccueilli à Moulins par Carltheo Zeitschel, collabora-teur d’Abetz, afin d’être escorté à Paris où l’attend l’am-bassadeur pour un dîner tardif. Cette première rencontreentre les deux hommes est fondamentale et constitue lepoint de départ d’une amitié de plusieurs années : leFrançais sait trouver les mots convenant à la circons-tance, alors que l’Allemand perçoit les affinités qui pour-raient fonder une collaboration de longue durée ;affinités qu’il explore sans aucun doute promptement, ensuggérant quelques mesures jugées nécessaires4.

Fernand de Brinon, l’ancien président du ComitéFrance-Allemagne, devient leur homme de liaison : dès

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le 25 juillet, il retourne à l’ambassade pour proclamer quePétain approuve « entièrement » la politique de Laval –sans doute celle que ce dernier a exposée lors de sa der-nière visite à Paris –, n’oubliant pas d’évoquer en passant,entre autres, que « tous les juifs connus » sont invités àquitter Vichy, leur séjour dans les départements del’Allier et du Puy-de-Dôme étant désormais interdit5.On a donc tout lieu de penser que la question juive s’im-pose parmi les sujets qui semblent intéresser l’ambassade.

Ces dernières nouvelles parviennent à Abetz alorsque celui-ci séjourne auprès de son ministre à Fuschl,près de Salzbourg, pour préparer son premier entretienavec Hitler à Berchtesgaden. Dans cet objectif, il rédigeun mémorandum soulignant encore, pour ce quiconcerne la question qui nous intéresse ici, que « l’at-mosphère antisémite au sein du peuple français est siforte qu’elle n’aurait pas besoin d’être renforcée parnous6 ». La conversation avec le Führer est consacrée àla définition de la mission d’Abetz en France ; maisnous ne savons que relativement peu de choses sur cetentretien. Dans tous les cas, la question juive y figure,car le jeune diplomate, qui sera nommé ambassadeur àla sortie de cet entretien, rapporte que Hitler luiannonce alors l’intention de parvenir à une solutiongénérale de la question juive à la fin de la guerre, rési-dant dans l’évacuation de tous les juifs d’Europe7. S’illui en fait part, c’est qu’il doit certainement jouer sonrôle dans ce dessein ; c’est du moins l’interprétationqu’en tire Abetz.

Peu après son retour à Paris, il se rend auprès deWerner Best, qui dirige le département « Administration »

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des services du Militärbefehlshaber Frankreich, pourpousser à la préparation d’une série de mesures anti-juives : celles-ci, selon lui, doivent permettre de vider lazone occupée de ses juifs. C’est, premièrement, l’inter-diction de retour aux juifs réfugiés en zone Sud, deuxiè-mement, la préparation de l’expulsion de tous les juifsqui séjournent encore en zone occupée et, troisième-ment, l’examen de la possibilité de leur expropriation8.La réaction de Best est assez prudente : visiblement sur-pris par cette initiative, il annonce vouloir d’abord faireexaminer cette question par les départements juridiqueet économique. Pour sa part, afin d’accélérer le proces-sus, Abetz s’adresse aussi à son ministre pour demanderson approbation. Ses propositions vont alors à la foisplus et moins loin : outre l’interdiction de retour, ilréclame l’obligation d’immatriculation pour les juifsinstallés en zone occupée, la mise en évidence des maga-sins juifs ; au lieu d’une expropriation, la nominationd’administrateurs pour les boutiques, firmes, dépôts etgrands magasins juifs dont les propriétaires sont partis9.Mais surtout, il ajoute une précision très importante :selon lui, ces mesures peuvent être réalisées par lesautorités françaises.

Cette information témoigne de l’approfondissementdes contacts de l’ambassadeur avec certains membresdu gouvernement de Vichy : pour affirmer cette possi-bilité et rester tout de même crédible, Abetz doit dispo-ser de certaines assurances et informations du côtéfrançais. Son interlocuteur préféré est en l’occurrencePierre Laval ; les deux hommes se lient sur la base d’unevéritable interdépendance : chacun a besoin de l’autre

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pour consolider sa place et son influence dans les struc-tures de pouvoir où ils agissent. Cette interdépendanceest effectivement l’élément clef pour comprendre cettecollaboration franco-allemande si précoce, qui se meten place dès l’automne 1940 dans le domaine de l’anti-sémitisme. Pour le Français, c’est l’argument de la pos-sibilité de contacts directs avec Berlin via Abetz, sanspasser par les militaires de la commission d’armistice,pour affirmer sa propre position primordiale au sein dugouvernement français. L’Allemand a quant à lui besoinde résultats visibles mettant en évidence sa prise d’in-fluence sur Vichy.

Il semble bien que la politique antisémite s’y prête àmerveille, d’autant plus qu’elle occupe visiblement uneplace importante dans les desseins du gouvernementfrançais, alors que, comme le montrent les réticences deBest, les mesures contre la population juive de la zoneoccupée ne figurent aucunement au programme desautorités d’occupation. La suite aussi le montre : Abetzsurprend avec ses propositions. Dès le lendemain,Joachim von Ribbentrop fait certes accuser réceptiondu message de son ambassadeur, en signalant qu’on« est favorable ici » à ses propositions, mais il ajoutecependant que celles-ci seront traitées « en haut lieu10 »– formule qui désigne Hitler. L’accord de ce dernier estacquis dans les jours qui suivent ; le 29 août, Abetz eninforme Best11. Mais la mise en application des propo-sitions de l’ambassadeur traîne néanmoins encore pen-dant plusieurs semaines, pour des raisons internes –d’autres services nazis notamment font valoir leurscompétences en la matière. Parmi eux, par exemple,

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Reinhard Heydrich, chef du RSHA, qui dépêche alorsun représentant du département d’Adolf Eichmann surplace : Theo Dannecker, dans la fonction de Judenberater(« conseiller aux affaires juives12 »).

Enfin, dernier signe qui témoigne du caractère spon-tané et isolé de cette initiative de la part de l’ambassa-deur : le 20 septembre, Martin Luther, chef dudépartement Allemagne de l’Auswärtiges Amt13, qui asous ses ordres aussi la section des questions juives,attire l’attention d’Abetz sur ses doutes quant à « l’adé-quation » de ces mesures, impossible à déterminer àpartir de Berlin14. Selon lui, une « préparation psycho-logique » suffisante de l’opinion publique française estpour le moins indispensable ; se référant au fait qu’ils’agit d’ordonnances allemandes, il serait alors « sou-haitable » que ces mesures soient effectivement exécu-tées par les autorités françaises, le gouvernementfrançais apparaissant ainsi comme responsable en casd’échec…

Les suggestions d’Abetz sont finalement réalisées enplusieurs étapes : le 27 septembre, le Militärbefehlshaberin Frankreich publie une première ordonnance prescri-vant en zone occupée le recensement des juifs, dontl’identité est alors définie précisément. Vichy luiemboîte le pas en publiant à son tour le statut des juifsdu 3 octobre, excluant ces derniers des métiers de lafonction publique, de la presse et du cinéma. Le lende-main, une deuxième loi française permet aux préfetsd’interner les juifs étrangers dans des camps spéciaux.Enfin, la préfecture de police de Paris et du départe-ment de la Seine publie un communiqué invitant les

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Français juifs à se présenter dans les commissariats depolice de leur quartier pour répondre à l’ordonnanceallemande du 27 septembre. Le 19 octobre, suite à unedemande présentée par l’administration militaire, lepréfet de police ordonne le marquage des cartes d’iden-tité dont les détenteurs sont juifs avec un cachet rouge,ainsi que l’affichage, dans les magasins juifs, de pan-cartes jaunes avec l’inscription « Jüdisches Geschäft –Entreprise juive ». Une seconde ordonnance allemandedu 18 octobre enfin impose la déclaration de toutes lesentreprises juives en zone occupée, en vue de la nomi-nation de commissaires-administrateurs15.

EEffffoorrttss ddee ppéérreennnniissaattiioonn dd’’uunnee pprriissee dd’’iinnfflluueenncceeaalllleemmaannddee

Le 21 janvier 1941, Dannecker tire un premier bilandes mesures antijuives en France pour le mettre en rap-port avec le « projet d’une solution finale ». Celle-ciréside dans « l’expulsion totale » des juifs d’Europe etleur concentration dans un territoire encore à détermi-ner. En guise de préparation, l’action à mener consistedans le « repérage » des juifs au sein de la population,leur exclusion de tous les domaines de la vie et del’État, ainsi que dans la gestion centrale de leur vie et deleurs biens16. L’Allemand estime que l’ensemble de cetteaction doit être dirigé par un organe centralisé ; or, lesautorités françaises font preuve d’un « travail mesquindécentralisé », se tenant au pied de la lettre des ordon-nances, « et d’ailleurs, même cela, encore très mal ! ». Ildéplore le manque total de « compréhension politique »

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en ce qui concerne la nécessité d’une épuration générale,en faisant état du « drame de l’exécution du soi-disantstatut des juifs de Vichy du 4 [sic] octobre 1940 ». PourDannecker, la création d’un « Zentrales Judenamt »(« Office central juif ») s’impose donc de toute urgence.

Dans tous les cas, l’implication du gouvernementfrançais paraît indispensable si l’entreprise doit réussir.Or, le chargé des questions juives de la police allemanden’a pas d’interlocuteur approprié pour aboutir dans sonentreprise, ni auprès des militaires allemands ni auprèsdu gouvernement français, d’ailleurs. Il dépend du bonvouloir de l’ambassade qui intervient effectivement :d’abord pour apaiser les conflits existant entre uneadministration militaire refusant de se charger d’unepersécution accrue des juifs de zone occupée (parexemple en les internant)17 ; ensuite, pour soutenir leprojet de Dannecker vis-à-vis de ses supérieurs et lesoumettre enfin aux représentants du gouvernement deVichy18.

Notons que le contexte général des relations entreVichy et Berlin du début 1941 ne pourrait être plusfavorable. Après le renvoi de Laval, le 13 décembre1940, et une période de rupture de plusieurs semainesavec l’arrêt de toutes les négociations en cours (lescontacts ne passent plus alors que par la commissiond’armistice de Wiesbaden), Vichy est prêt à céder par-tiellement aux exigences formulées du côté allemand,s’accordant avec l’ambassade sur la composition d’unnouveau gouvernement (sans Laval cependant)19. Sousla direction de l’amiral Darlan, ce cabinet s’ouvre à unvaste programme de collaboration, notamment sur le

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plan économique et militaire. Lors d’un dîner à l’am-bassade le 5 mars 1941, Darlan est confronté au projetde la création d’un Office central juif. Sa réaction est aupremier abord plutôt positive, même s’il se réfère à l’at-titude chancelante du maréchal Pétain, qui insiste sur ladistinction entre juifs immigrés et juifs français, lorsqueces derniers sont en France de longue date et ont servidans l’armée française. Pour Abetz, qui rapporte sespropos à Berlin20, l’implication du gouvernement restetout de même indispensable pour garantir l’efficacité etsurtout la base légale de toute nouvelle action dirigéecontre la population juive. Pour prévenir un probablefreinage par Vichy, l’ambassadeur annonce vouloir« activer » le futur Office de façon à exercer une pres-sion en zone occupée qui oblige la zone non-occupée àsuivre. Cette tactique fait d’ailleurs l’unanimité entrepolice et ambassade allemandes, où l’on s’interroge déjàsur le profil des Français qui « entreraient en ligne decompte » pour être employés à la direction de ce nou-vel Office21.

Mais malgré cet optimisme, la création de cet Officeprend du retard. Le 20 mars, Dannecker s’en plaintamèrement à l’ambassade, en soulignant l’urgence abso-lue de voir « quelque chose bouger dans les prochainsjours » : sinon, « tout finira en queue de poisson22 ». Sesinterlocuteurs promettent d’intervenir rapidement parle biais de Fernand de Brinon, délégué général du gou-vernement français en zone occupée. Neuf jours plustard, apparaissent les fruits de ces efforts : certes, nonpas sous forme d’un « Office central juif », mais à tra-vers la nomination de Xavier Vallat en tant que nouveau

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« commissaire général aux Questions juives ». Évidem-ment, du côté allemand, on exprime des idées très pré-cises quant à ses tâches. Elles sont reformulées lorsd’une réunion entre Abetz, Zeitschel, Dannecker etSchilling, le 3 avril23 : c’est d’abord l’élaboration rapided’une législation antijuive qui doit être « la plus dure(schroff) possible », permettant certes d’excepter dansun premier temps certaines catégories de juifs (notam-ment ceux qui sont français de longue date, les ancienscombattants ou ceux « scientifiquement méritants »)qui seront frappés par les mesures d’exclusion dans ladernière de quatre étapes prévues (après les juifs étran-gers, les juifs récemment naturalisés et les juifs alsa-ciens). Si Vallat faisait preuve de « mollesse », il seraitpris en main par Dannecker. Les Allemands sont d’ac-cord pour qu’il soit tenu dans « l’illusion » de pouvoirprogressivement maîtriser les groupements antisémitesfrançais de la zone occupée ; en réalité, ceux-ci sontgérés « de manière dynamique » par l’ambassade, oùZeitschel s’attachera à « brider » leurs tendances « illé-gales ». La ligne de conduite élaborée par l’ambassade etle SD est ainsi claire : les prochaines mesures n’aurontplus besoin de passer par une ordonnance du MBFpour la zone occupée, mais pourront être saisies par legouvernement français pour toute la France, grâce aunouveau commissaire qui doit leur fournir une emprisedirecte sur la politique antisémite de Vichy.

Or, lorsque Vallat se rend en zone occupée pourprendre contact avec les différents services allemands, ilne se montre pas vraiment à la hauteur de leurs attentes.Werner Best, notamment, exprime amèrement la décep-

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tion que lui a causée sa première entrevue avec lui24 :Vallat refuse « absolument » de s’occuper de l’expulsiondes juifs étrangers ou politiquement « indésirables » dela zone occupée, affirmant que cela relève de la compé-tence de l’armée allemande et de la police française. Or,l’administration militaire espérait justement que grâce àsa nomination, toutes les questions juives seraientdésormais résolues « de ce côté-là » et que la « partiedésagréable » – l’internement et l’expulsion – ne luiincomberait plus.

Dans les semaines qui suivent, les relations restenttendues, les Allemands essayant d’exercer une pressionmaximale sur Vallat. Paradoxalement, c’est dans lecadre de cet effort que s’inscrit la demande présentée augouvernement français par l’ambassade le 25 avril, àsavoir de centraliser les pleins pouvoirs entre les mainsdu commissaire aux Questions juives : mesure qui nonseulement doit le priver de tout prétexte d’inaction,mais aussi permettre de monter son propre « appareil »administratif ; ce mécanisme doit correspondre auxconceptions allemandes, bien entendu25. C’est chosefaite avec la loi du 19 mai 1941 qui étend les pouvoirsdu commissaire général, lequel peut désormais interfé-rer auprès d’autres ministères français dans la questionjuive, et « provoquer éventuellement à l’égard des juifs[…] toutes mesures de police commandées par l’intérêtnational26 ». Parallèlement, l’emprise allemande sur lecommissaire se resserre, car lors de chaque passage àParis, il doit s’adresser à un comité composé deDannecker, Blancke (représentant du département éco-nomique de l’administration militaire), Zeitschel et un

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représentant des services de Best et « soumettre à leurapprobation le moindre des décrets27 ».

Dans ces circonstances, la ténacité allemande porteses fruits. Dès le 14 mai 1941, la police française procèdeà la première grande rafle ; 3.710 juifs, majoritairementapatrides (Polonais, Tchécoslovaques et Autrichiens)sont internés dans les deux nouveaux camps ouverts àPithiviers et Beaune-la-Rolande, près d’Orléans. Le 2juin, de nouvelles lois antijuives françaises sont publiéesau Journal officiel, entraînant une aggravation du statutdu 3 octobre 1940 et introduisant le recensement desjuifs dans toute la France. Abetz en transmet les textesà Berlin en soulignant fièrement qu’ils sont valables« non seulement dans l’hexagone, y compris l’Algérie »,mais dans toutes les colonies, protectorats et mandatsfrançais28.

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Le nombre de juifs internés s’accroît considérable-ment au cours de l’été 1941. Lors d’une deuxièmegrande rafle, le 20 août 1941, 4.000 juifs sont arrêtés,auxquels s’ajoutent 200 avocats notamment de la Courd’appel ou du Conseil d’État, qui sont transférés dans lenouveau camp de Drancy, ouvert la veille. Les camps dela zone occupée sont alors complets, ce qui rend diffi-cile toute nouvelle opération d’internement. Dans cesconditions, le chargé des questions juives à l’ambassade,Zeitschel, se lance dans des réflexions concernant lapoursuite de l’œuvre engagée. Son regard se tourne vers

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l’Est, où l’offensive allemande depuis le mois de juinlaisse entrevoir de vastes conquêtes territoriales : dansune note adressée à Abetz, il suggère que celui-ciprenne contact avec les hauts dignitaires nazis (notam-ment Alfred Rosenberg et Heinrich Himmler) au sujetd’une concentration de la population juive sur un terri-toire limité à l’Est29. Pour souligner l’urgence de laquestion, il importerait de faire remarquer qu’enFrance, « on travaille en toute intensité pour un pro-chain règlement de la question juive », mais que l’actionsouffre fortement du nombre insuffisant de camps d’in-ternement et qu’on « doit se débrouiller avec toutessortes de lois et autres ordonnances ». Par ailleurs,Abetz devrait également s’adresser à Göring, « trèsaccessible justement en ce qui concerne le problèmejuif » et pouvant être d’un « appui extraordinaire » en lamatière.

L’ambassadeur réagit aux suggestions de son subor-donné en demandant d’abord des précisions sur les juifsinternés, leur nombre exact et les nationalités concer-nées. Zeitschel transmet la question à Dannecker30,mais faute d’une réponse à l’approche du voyaged’Abetz au quartier général de Hitler, il les chiffreapproximativement à 10.00031, en insistant sur la néces-sité que Ribbentrop obtienne de Himmler leur expulsionvers les territoires de l’Est nouvellement conquis : « Lesquelques camps misérables dont nous disposons »devraient être enfin « libérés » pour permettre l’interne-ment d’autres juifs32. Abetz a l’occasion d’approcherlui-même Himmler pour évoquer la situation française.Et une fois de plus, il devient clair que les autorités alle-

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mandes à Paris travaillent en amont, car leReichsführer-SS promet de faire de son mieux, tout eninsistant sur la pénurie des moyens de transport ; dèsque la situation se détendra, des transferts vers l’Estpourront être envisagés à partir de la France33… C’estd’ailleurs au cours des mêmes jours que Himmler pro-clame le souhait de Hitler de vider le Reich et le pro-tectorat de Bohême-Moravie le plus rapidementpossible de sa population juive ; régions indubitable-ment bien plus prioritaires à ses yeux que la France.

Là, la question des internements se trouve très rapi-dement liée à d’autres événements dramatiques quisecouent le pays, à savoir les premières exécutionsd’otages suite aux attentats perpétrés par des mouve-ments de résistance contre l’occupant. Les otages sontmajoritairement prélevés dans les prisons françaises,parmi les détenus de droit commun ou les politiques –souvent des membres du Parti communiste. La pratiquecrée une grande consternation auprès des Allemands enFrance ; elle menace le délicat équilibre trouvé entreoccupants et occupés : selon Abetz, les attentats visentclairement à « écarter le danger de trop bonnes relationsentre la population [française] et la puissance d’occupa-tion34 ». À la fin du mois de novembre, lorsque Hitlerordonne l’exécution de 300 otages après de nouveauxattentats, le commandant militaire, le général Otto vonStülpnagel, répond en suggérant de tuer plutôt 50 juifset communistes et d’y ajouter une amende générale35. Sadémarche est appuyée par l’ambassadeur qui considèreen outre que, par principe, les attentats doivent être sys-tématiquement attribués au juifs et aux agents sovié-

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tiques et anglais, même lorsque le contraire est avéré36.De ces propositions découle la grande rafle du 12décembre 1941, avec l’arrestation de 743 hommes,majoritairement français, dits « juifs d’influence37 »,transférés dans le nouveau camp ouvert à cette fin àCompiègne, où il formeront la majorité du premierconvoi partant à Auschwitz en mars 1942. L’avis officieldu 14 décembre 1941, préparé par l’ambassade et l’ad-ministration militaire, attribue ces arrestations aux der-niers « actes terroristes » commis à l’instigation desAnglo-Saxons par des juifs et des communistes – les-quels seraient « déportés à l’Est pour des travaux for-cés ». S’y ajoute une amende d’un milliard de francsimposée à la population juive, ainsi que l’exécution de95 otages, dont 53 juifs extraits du camp de Drancy38.

Un pas important est ainsi franchi ; les déportationssont désormais activement préparées et utilisées commeinstrument de répression à l’égard de la Résistance. Ladésignation des juifs (et des communistes) commeacteurs de cette dernière permet aussi, sur le plan de lapropagande cette fois, d’approfondir le fossé qui doit secreuser avec le reste de la population française pourrenforcer l’indifférence générale concernant leur sort.Lors de la conférence de Wannsee, qui a lieu le 20 jan-vier 1942 dans les environs de la capitale allemande, ras-semblant les représentants des services du Reich àimpliquer dans la mise en œuvre de ce qui est appelé« solution générale de la question juive », la Francefigure comme un pays pionnier où « l’évacuation » desjuifs pourra se faire « sans grandes difficultés ». Deuxmois plus tard, le 27 mars 1942, le premier convoi quitte

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Compiègne pour Auschwitz ; le gouvernement deVichy n’élève aucune protestation.

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Le retour de Laval au gouvernement français en avril1942, orchestré par l’ambassadeur sans concertation avecses supérieurs, est accompagné d’une radicalisation géné-rale de la situation française qu’il n’est pas lieu ici d’exa-miner de plus près. Retenons cependant que l’année 1942est une césure non seulement en ce qui concerne les rela-tions franco-allemandes, marquées d’exigences crois-santes du Reich et d’une attitude de plus en plusdéfensive de Vichy, mais aussi dans le domaine qui nousoccupe ici. De fait, si le gouvernement de Vichy arépondu, voire agi de lui-même avec beaucoup de zèlepour exclure les juifs de la vie publique au cours des deuxpremières années d’occupation, force est de constaterque ce zèle diminue depuis le début des déportations en1942 et la radicalisation de la politique antisémite qu’ellesentraînent. Si les autorités françaises sont encore large-ment disposées à livrer les réfugiés antinazis des campsde la zone Sud, elles deviennent plus réticentes au coursde l’été 1942 avec la montée des protestations de la popu-lation, et avec celles que formulent l’Église catholique etles représentants des États-Unis à Vichy. L’ambassadeurs’y adapte : il prône soit des mesures allemandes en zoneoccupée sans implication du gouvernement français(ainsi l’introduction de l’étoile jaune), soit la concentra-tion des mesures sur les juifs étrangers encore protégéspar leurs représentations diplomatiques de Paris.

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En ce qui concerne le premier point, l’initiative del’ambassadeur au mois de mai 1942 est étonnante : n’a-t-il pas refusé, encore peu de temps auparavant, l’intro-duction du signe distinctif demandée par Dannecker39 ?Au début du mois de mai, annonçant la nominationofficielle de Darquier de Pellepoix en remplacement deVallat, il ajoute qu’au vu de deux incidents récents oùdes juifs se seraient « de manière prouvée » livrés à lapropagande ennemie en se révoltant contre la « forceofficielle », le moment est enfin « favorable » à l’intro-duction de l’étoile jaune : « J’ai donc demandé aujour-d’hui au Militärbefehlshaber de saisir une mesure dansce sens40 ». Il prend en outre contact avec HelmutKnochen, de la police allemande, pour souligner l’ur-gence en la matière, étant donné qu’il souhaite exploiterdes attentats récents pour justifier la mesure41. Commeelle nécessite une ordonnance de l’administration mili-taire, Zeitschel se charge d’informer Best du fait que lamesure doit être imposée en zone occupée « indépen-damment » de l’attitude française ; certes, Vichy estlibre de l’appliquer en zone Sud, ce qui serait « naturel-lement bienvenu », mais ce n’est pas une conditionpréalable42. C’est ici un véritable revirement de la tac-tique allemande dominante jusque-là, résidant à fairepasser les mesures de cet ordre par une loi française.Deux grilles d’explication se présentent : premièrement,la situation délicate de Pierre Laval et les tensions quisubsistent entre lui et le Maréchal que l’ambassadeur nesouhaite pas charger davantage ; deuxièmement, lavisite imminente de Reinhard Heydrich, chef duRSHA, personnage clé dans la mise en œuvre de la

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solution finale. Il est à Paris le 7 mai pour introduireCarl Oberg dans ses nouvelles fonctions de « chef supé-rieur des SS et de la police ». Une réception à l’ambas-sade permet à Abetz de faire connaissance plusintimement avec Heydrich et d’apprendre les intentionsde celui-ci en ce qui concerne la situation française. Parailleurs, une réunion est organisée pour clarifier les der-nières questions concernant les modalités d’introduc-tion de l’étoile jaune43.

Le 15 mai enfin, Abetz soumet à l’Auswärtiges Amt,pour approbation, le texte de l’ordonnance correspon-dante, en posant la question du traitement des juifs res-sortissants des pays ennemis, neutres ou amis duReich44. La question semble embarrasser Berlin, etaprès avoir été relancé à plusieurs reprises, Lutherdéclare préférer que ce soit Vichy qui prenne la mesure(car cela permettrait d’éviter pareilles distinctions). Laréponse d’Abetz est alors sans équivoque : « pour lemoment » on ne peut « en aucun cas » s’attendre à unedémarche française dans ce sens, alors que la mesures’imposerait d’urgence en zone occupée. De toutemanière, l’administration militaire « nous demandesimplement d’occasionner le plus rapidement unedécision, tranchant si et quels ressortissants étrangersdoivent être exceptés45 », sous-entendu qu’il ne peutêtre question de remettre en cause la mesure elle-même. On le voit, l’ambassadeur ne tolère pas dedébat sur l’opportunité du texte ni sur la forme envi-sagée. Luther donne alors son accord en proposantque soient concernés les juifs des pays où pareillemesure a déjà été appliquée46. Le texte devient ainsi la

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neuvième ordonnance antijuive du MBF, entrant envigueur le 7 juin 1942.

Dans un autre domaine, l’ambassadeur se montreplus prudent : celui du traitement des juifs étrangers etnotamment leur internement (en vue de leur déporta-tion). Le 22 juin 1942, Adolf Eichmann demande àl’Auswärtiges Amt son accord quant à la déportation de40.000 juifs de la France occupée « pour le service detravail à Auschwitz47 ». Comme prévu lors de la confé-rence de Wannsee, cet accord conditionne la mise enroute des déportations. Le 28 juin, la nouvelle esttransmise à l’ambassade, afin qu’elle prenne position48.Or, il semble que le concours des autorités françaises,indispensable pour atteindre ce chiffre, n’est plus auto-matique. Lors du Conseil des ministres du 26 juin,Laval évoque la question juive, « fort délicate » : selonlui, l’opinion française « accepterait difficilement » desmesures antijuives comparables à celles, « extrêmementsévères », en vigueur dans le Reich49. Il convient doncd’agir « avec la plus grande prudence », l’objectif étant,selon le président du Conseil, de protéger les juifs fran-çais en procédant « avant toute mesure d’exécution […],à un recensement des juifs, de façon à discriminer lesjuifs français des juifs étrangers ». La question de lanationalité devient donc cruciale, le gouvernementfrançais n’étant disposé à prêter son concours qu’àcondition qu’il ne s’agisse pas de juifs français.

La réponse de l’ambassadeur à la missive du 28 juinest rédigée en conséquence. Se référant à la décision dugouvernement hongrois de ne plus protéger sescitoyens juifs en France, il s’en félicite en soulignant

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que la population française, « tout à fait favorable à ladistinction des juifs » par l’étoile, éprouve un « fortmalaise » du fait que les juifs étrangers, ressentis« encore beaucoup plus fortement comme corps étran-ger », sont en partie exceptés des mesures allemandes50.En vue de l’annonce des prochaines déportations mas-sives, il y aurait donc un « intérêt politique urgent » à ceque d’autres gouvernements alliés et amis suiventl’exemple hongrois ; sinon, qu’ils procèdent au moinsau rapatriement de leurs ressortissants juifs : « La popu-lation ouvrière française, en particulier, ne comprendrapas [pourquoi] les juifs italiens, hongrois, espagnols etroumains restent en France, alors que les juifs français,installés depuis plusieurs générations en France,seraient éloignés. » Sentiment à ses yeux d’autant pluscompréhensible « si l’on sait » que les responsablesd’une série d’actes terroristes et de sabotages sont « jus-tement des juifs étrangers ». Dans un deuxième courrierenfin, il communique l’accord de principe concernant ladéportation de 40.000 juifs, tout en soulignant encoreune fois qu’il serait « psychologiquement efficace auprèsde larges couches du peuple français » que les juifs étran-gers soient les premiers touchés par les « mesures d’éva-cuation », et en émettant le souhait que l’on recoure auxjuifs français uniquement pour compléter les contin-gents51. Abetz précise cependant aussitôt qu’il ne s’agit« en aucun cas » de privilégier ces derniers, qui, au coursde la « libération » de l’Europe de ses juifs, doivent« dans tous les cas également disparaître ».

Les trois documents – la demande de Berlin du 28juin et les deux prises de position de l’ambassadeur –

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forment la base des pourparlers entre Helmut Knochenet René Bousquet, en présence d’Oberg, en vue d’orga-niser le concours de la police française à l’arrestation età la livraison des juifs. On remarque d’ailleurs l’absencecomplète de Dannecker, en raison des frictions avecKnochen qui s’efforce d’obtenir son remplacement ;efforts qui aboutissent peu de temps plus tard52.L’accord trouvé stipule l’action commune des policesallemande et française dans l’arrestation de juifs étran-gers, avec les effectifs souhaités par les Allemands53. Le16 juillet, environ 13.000 juifs, majoritairement apa-trides, sont arrêtés au cours d’une grande rafle menée àParis et en banlieue. Le 11 août, l’ambassade informeBerlin que le gouvernement français s’apprête « effecti-vement » à transférer des camps de la zone Sud vers lazone Nord les juifs apatrides, un premier train de 3.000personnes étant en préparation. Vichy aurait promis decontinuer les internements de juifs apatrides et leurextradition « sans interruption, dans l’objectif de l’éva-cuation vers Auschwitz54 ». Si le nombre exact de juifsapatrides en zone Sud est « encore » inconnu, il s’agiraitd’environ 30.000 personnes.

Cette collaboration est terriblement efficace : le 11septembre, l’ambassade informe Berlin que depuis ledébut de l’action, 28.069 juifs ont été déportés versl’Est55. Quatre jours plus tard, il s’agit de 32.000 per-sonnes, contingent qui, selon Zeitschel, comprendraitcependant « seulement » 7.000 des 12.000 juifs apatridesde la zone non-occupée56. Néanmoins, il devient deplus en plus difficile de remplir les trains mis à la dis-position pour les départs vers Auschwitz : suite à la

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publication des lettres pastorales, des sermons lus à par-tir de « différentes chaires », mais aussi à « l’immixtion »de la représentation américaine, ainsi que des émissionsradiophoniques de Londres, Zeitschel déplore que lesmesures antijuives ne sont plus exécutées que demanière « lamentable » en zone Sud. Sous la pression devoir diminuer les capacités de transport réservées auxdéportations de France, l’ambassadeur se focalise alorssur les derniers étrangers protégés de la zone occupée,se plaignant vis-à-vis de Berlin de leur comportementtoujours plus « arrogant », à l’origine de « difficultéstechniques considérables57 ». Les appels d’Abetz sontentendus : Ribbentrop ordonne par la suite l’accélérationde l’évacuation des juifs de tous les pays européens58, enstipulant que les juifs étrangers résidant encore au 1er jan-vier 1943 dans les pays d’Europe de l’Ouest seront sou-mis aux lois antijuives locales. De cette manière, lasituation se débloque rapidement, mettant fin aux inter-ventions des représentations étrangères et permettant depersécuter désormais une bonne partie des juifs étran-gers59. L’emprise sur ces derniers permet d’ailleurs des’appuyer à nouveau sur la police française.

À partir de l’été 1942, les modalités de collaborationfranco-allemande dans ce domaine changent profondé-ment. Le changement est dû à plusieurs facteurs, dont,du côté allemand, la nouvelle répartition des compé-tences entre police et armée allemandes à la suite de l’ar-rivée de Carl Oberg, le renforcement du pouvoir deHelmut Knochen, le remplacement de Theo Danneckeret la disgrâce du grand promoteur de la collaborationdans ce domaine, Otto Abetz.

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Pour conclure cette période, soulignons donc lecaractère véritablement précoce de la collaborationfranco-allemande dans la persécution de la populationjuive de France. Aucun autre domaine n’est de manièresous-jacente aussi présent dans le quotidien des pre-mières années d’occupation et de collaboration. Si laquestion juive n’est certes pas au premier plan des pré-occupations des occupés et des occupants, elle n’en estpas moins très présente, et son évolution découle de ladouble influence des deux parties.

La collaboration permet une forte accélération del’introduction des mesures antisémites et leur mise enœuvre très efficace par les autorités françaises : Vichypoursuit avec un grand zèle l’exclusion des juifs. Zèlequi a pour objectif d’écarter les juifs des fonctionsimportantes de la société, puis de séparer les juifs fran-çais des juifs arrivés en France plus récemment. Cetempressement s’essouffle justement lorsqu’il s’agit desdéportations de Français juifs. Comme le concoursfrançais est crucial, cela permet d’épargner effective-ment une grande partie des juifs français, avec commedramatique revers le sacrifice des juifs apatrides etétrangers. Enfin, retenons pour les années 1940 à 1942le rôle redoutable de la représentation diplomatiqueallemande à Paris. Celle-ci crée des liens franco-alle-mands, entrevoit très tôt les pistes d’action communeen accélérant ainsi la mise en place des mécanismes depersécution antisémite, terrain d’entente franco-alle-mand qui coûte « peu cher » aux deux partenaires, touten fournissant des signaux très visibles de leur rappro-chement politique et idéologique.

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NNootteess

1. Robert S. Wistrich, Who’s Who in Nazi Germany, Londres/New York, Routledge, 1995.

2. Abetz à Ribbentrop, 14 juillet 1940, Politisches Archiv desAuswärtigen Amts (cité par la suite PA-AA), R 29587, MF 280.

3. Une partie de ces annonces est suivie par des faits trèsconcrets : les lois des 17 et 22 juillet interdisent aux juifs le ser-vice public et stipulent la révision des naturalisations effectuéesdepuis 1927, ce qui concerne environ 7.000 personnes.

4. Se référer notamment au rapport rédigé très probable-ment par Fernand de Brinon du 23 juillet 1940, Archives natio-nales, 72 AJ 248, dossier AII.

5. Schleier à Abetz/Auswärtiges Amt, 25 juillet, PA-AA, R29587, MF 280.

6. Mémorandum d’Otto Abetz, 30 juillet 1940, Centre dedocumentation juive contemporaine (désormais CDJC),LXXI-28.

7. Notice de Luther (Auswärtiges Amt), 15 août 1940, citéedans : Akten der Deutschen Auswärtigen Politik, série D, tomeX (cité par la suite ADAP D/X), document n° 345.

8. Notice de Werner Best, 19 août 1940, CDJC, XXIV-1.9. Abetz à Ribbentrop, 20 août 1940, ADAP D/X, docu-

ment n° 368.10. Ibid. (dans la note de bas de page).11. Notice de Best, 30 août 1940, CDJC, XXIV-5.12. Cf. Claudia Steur, Theodor Dannecker. Ein Funktionär

der « Endlösung », Essen, Klartext, 1997, pp. 38-39.13. Le ministère allemand des Affaires étrangères.14. Luther à Abetz, 20 septembre 1940, CDJC, CXXVIa-91.15. Michael R. Marrus, Robert O. Paxton, Vichy et les Juifs,

Paris, Calmann-Lévy, 1981, pp. 23-24.16. Note de Dannecker, 21 janvier 1941, CDJC, V-59.17. Knochen à Best, 28 janvier 1941, CDJC, V-64 et notice

de Zeitschel pour Achenbach, 1er mars 1941, ibid., V-61.

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18. Ambassade à SS-Brigadeführer Max Thomas, 14 février1941, CDJC, V-60.

19. Cf. Barbara Lambauer, Otto Abetz ou l’envers de la col-laboration, Paris, Fayard, 2001, pp. 291-302.

20. Abetz à Ribbentrop, 6 mars 1941, PA-AA, DBP 1297.21. Parmi les personnages suggérés par Abetz figurent

Marcel Bucard, Darquier de Pellepoix, Serpeille de Gobineau etCéline. Cf. notice d’Abetz pour Zeitschel, 1er mars 1941,CDJC, V-65.

22. Notice de Nostitz, 20 mars 1941, CDJC, V-83.23. Notice manuscrite de Zeitschel, 3 avril 1941, CDJC, V-80.24. Zeitschel à Dannecker au sujet de sa conversation avec

Werner Best, 10 avril 1941, CDJC, V-81.25. Zeitschel à Dannecker au sujet de la conversation

Schleier-Darlan, 25 avril 1941, CDCJ, V-83.26. D’après Laurent Joly, Xavier Vallat (1891-1972). Du

nationalisme chrétien à l’antisémitisme d’État, Paris Grasset,2001, p. 215.

27. Ibid., p. 243.28. Abetz à l’Auswärtiges Amt, 14 juin 1941, PA-AA, R

29590, MF 297.29. Zeitschel à Abetz, 22 août 1941, CDJC, V-15.30. Zeitschel à Dannecker, 2 septembre 1941, CDJC, V-34.31. Ce n’est que le 20 octobre que Dannecker fournit les

données précises sur le nombre d’internés dans les trois campsde la zone occupée, Orléans, Pithiviers et Beaune-la-Rolande :7443, dont 5841 étrangers et apatrides (Dannecker à Zeitschel,20 octobre 1941, Archives de Yad Vashem, JM 3122).

32. Zeitschel à Abetz, 10 septembre 1941, CDJC, LXXI-65.33. Cf. Zeitschel à Dannecker, 8 octobre 1941, CDJC,

LXXI-65.34. Abetz à Ribbentrop, 25 octobre 1941, ADAP D/XIII.2,

n° 422.35. Ulrich Herbert, « Die deutsche Militärverwaltung in

Paris und die Deportation der französischen Juden », in U.

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Herbert (dir.), Nationalsozialistische Vernichtungspolitik 1939-1945, Francfort-sur-le-Main, Fischer, 1998, pp. 189-190.

36. Prise de position d’Abetz du 7 décembre 1941(n°2764/41g), reprise dans son télégramme à l’Auswärtiges Amtdu 12 décembre 1941, PA-AA, Nachlass Rudolf Schleier, Kass.II ; 24 III (14).

37. Cf. ambassade à l’Auswärtiges Amt, 16 décembre 1941,CDJC, LXXI-72.

38. Cf. Renée Poznanski, Les Juifs en France pendant laSeconde Guerre mondiale, Paris, Hachette, 1997, p. 260.

39. Cf. Claudia Steur, op. cit., p. 69.40. Abetz à l’Auswärtiges Amt, 2 mai 1942, PA-AA, R

102961.41. Cf. notice de Dannecker, 4 mai 1942, CDJC, XLIXa-7.42. Zeitschel à Best, 5 mai 1942, CDJC, LXXI-91.43. Cf. Ulrich Herbert, Best, Bonn, Dietz, 1996, p. 320 ; note

de Dannecker, 7 mai 1942, CDJC, XLIXa-53.44. Abetz à l’Auswärtiges Amt, 15 mai 1942, PA-AA, R

29593, MF 313.45. Abetz à l’Auswärtiges Amt, 21 mai 1942, ibid., MF 314.46. Luther à Abetz, 21 mai 1942, ADAP E/II, n°230.47. Eichmann (RSHA) à l’Auswärtiges Amt, 22 juin 1942,

ADAP E/III, n° 23.48. Luther à l’ambassade, 28 juin 1942, CDJC, CXX-34.49. Compte rendu de la réunion du Conseil des ministres en

date du 26 juin 1942, Archives nationales, 72 AJ 249, dossierConseil des ministres 1942.

50. Abetz à l’Auswärtiges Amt (télégramme n° 2783), 2juillet 1942, PA-AA, R 29594, MF 318.

51. Abetz à l’Auswärtiges Amt (n° 2784), 2 juillet 1942, ibid.52. Cf. Claudia Steur, op. cit., pp. 86-90.53. Ibid., pp. 80-81. 54. Ambassade à l’Auswärtiges Amt, 11 août 1942, ADAP

E/III, n° 178.55. Rapport de Schleier, 11 septembre 1942, ibid., n° 283.

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56. Notice de Zeitschel, 16 septembre 1942, CDJC, LXXI-106.

57. Abetz à l’Auswärtiges Amt, 15 septembre 1942, PA-AA,R 100867.

58. Notice de Luther, 24 septembre 1942, ADAP E/III, n°307.59. Dans certains cas toutefois, par exemple celui des juifs de

Turquie, le rapatriement s’étend jusqu’en janvier 1944 pour lazone Nord, et jusqu’en mai 1944 pour la zone Sud. Cf. télé-gramme d’Abetz du 10 juin 1944, PA-AA, R 100867.

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