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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord Rapport de recherche Éric Gagnon Michèle Clément Emilie Raizenne Cette évaluation a été réalisée avec l’appui et le soutien financier du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord Mai 2009

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement

du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

Rapport de recherche

Éric Gagnon Michèle Clément Emilie Raizenne

Cette évaluation a été réalisée avec l’appui et le soutien financier du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

Mai 2009

Pour obtenir des exemplaires supplémentaires de ce document ou pour plus d’information : Centre de documentation Centre de santé et services sociaux de la Vieille-Capitale 880, rue Père-Marquette, 3e étage Québec (Québec) G1S 2A4 Téléphone : 418 681-8787 poste 3853 Télécopie : 418 687-9694 Ce document est aussi disponible en version PDF sur le site Web : www.csssvc.qc.ca. Ce document peut être reproduit, en tout ou en partie, avec mention de la source. Dépôt légal : 2009 Bibliothèque et Archives nationales du Québec Bibliothèque et Archives Canada ISBN 978-2-922823-80-6 (papier) ISBN 978-2-922823-81-3 (PDF)

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TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION............................................................................................................................ 1 1. L’ÉVALUATION DE L’ÉQUIPE DE SOUTIEN : OBJECTIF ET MÉTHODOLOGIE .............................. 3

1.1 Objectifs de l’évaluation ................................................................................................. 3 1.2 Méthodologie .................................................................................................................. 4

1.3 Limites de l’évaluation ................................................................................................... 6 1.4 Collaboration et questions éthiques ................................................................................ 7 2. L’ÉQUIPE DE SOUTIEN : MANDAT ET FONCTIONNEMENT ......................................................... 8

2.1 Des comportements difficiles et perturbateurs................................................................. 8 2.2 Des intervenants et des gestionnaires en difficulté ..........................................................12 2.3 Mandat et composition de l’équipe de soutien.................................................................14 2.4 Une procédure en étapes ..................................................................................................16 2.5 Le protocole d’intervention spécifique ............................................................................17 2.6 Le rôle de l’intervenant pivot...........................................................................................20

3. RÉDUIRE LES TENSIONS ET ATTÉNUER LES DIFFICULTÉS ..........................................................21

3.1 Permettre l’expression des tensions, des frustrations et de la fatigue ..............................21 3.2 Comprendre......................................................................................................................22 3.3 Dépersonnaliser le problème............................................................................................23 3.4 Faire équipe ou travailler en collectif...............................................................................26 3.5 Diminution de la charge de travail et des tensions...........................................................27 3.6 Faire appliquer le protocole .............................................................................................28 3.7 Apprentissages des intervenants et prévention des problèmes ........................................31 3.8 Appréciations générales ...................................................................................................33

4. POUVOIR INTERVENIR ................................................................................................................35

4.1 Mandat .............................................................................................................................35 4.2 Accueil et collaboration ...................................................................................................37 4.3 Compétences de l’équipe de soutien ................................................................................39 4.4 Disponibilité et suivi .......................................................................................................41 4.5 Entendre les résidents ou leurs proches?..........................................................................42

CONCLUSION ...............................................................................................................................45 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES...........................................................................................48 ANNEXES : Schémas d’entrevue .....................................................................................................49

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INTRODUCTION

Les centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) font face depuis quelques

années à de nombreuses difficultés et nombreux défis. Les personnes hébergées arrivent dans un

état avancé de perte d’autonomie physique ou cognitive, et requièrent beaucoup plus de soins

qu’autrefois. Dans le même temps, la clientèle se diversifie, la condition physique et mentale des

personnes est très variable, certaines sont en perte d’autonomie physique, d’autres souffrent de

démence; les personnes sont également d’âge et d’origine sociale très variés. À cela s’ajoute un

roulement important du personnel soignant et du personnel cadre, parfois un manque de

personnel et des limites dans les services pouvant être offerts. La situation est parfois difficile,

elle crée des tensions entre les résidents, leurs proches et la direction des établissements. Les

employés sont partagés entre un désir de répondre davantage aux demandes des résidents et leurs

capacités réelles d’intervention.

En partie pour répondre à ces problèmes, on cherche actuellement à faire des centres

d’hébergement des « milieux de vie », un endroit où les résidents se sentent bien, bénéficient

d’une certaine intimité, d’un horaire et d’activités plus individualisées, reçoivent des soins de

qualité et se sentent en sécurité. Cela demande de réconcilier ce qui demeure un milieu de soins

et un milieu de travail pour les employés, avec un milieu de vie pour les résidents, de revoir les

normes et les conduites, les manières de faire et les façons de cohabiter, tant pour les employés

que pour les résidents.

Dans ce contexte déjà difficile, exigeant pour le personnel et préoccupant pour les résidents,

s’ajoutent des situations qui viennent compliquer et perturber la vie et le travail en centre

d’hébergement. Les comportements de quelques résidents ou de leurs proches rendent les

relations avec le personnel malaisées et même pénibles : demandes constantes et harcelantes,

plaintes continuelles, menaces et agressivité à l’endroit des soignants, dénigrement de leur

travail, et cela depuis parfois plusieurs années, sans que les équipes trouvent le moyen d’y mettre

fin. Des intervenants et des gestionnaires sont fatigués, physiquement et mentalement épuisés,

finissent par douter d’eux-mêmes et de leurs compétences, certains partent en congé maladie.

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Ces comportements ont également pour effets de désorganiser l’ensemble du travail des équipes

soignantes. Une enquête effectuée en 2007 dans les centres d’hébergement du CSSS de Québec-

Nord relevait un grand nombre de situations conflictuelles.

Une équipe de soutien (ÉS) en hébergement a été mise sur pied dans le but d’aider le personnel à

résoudre ces conflits et à surmonter ces difficultés. Créée à l’automne 2007, elle a pour mandat

d’assister les gestionnaires et les équipes d’intervenants qui font face à des problèmes importants

de comportement de la part de résidents. Cette équipe a été imaginée par le personnel du CSSS

de Québec-Nord. C’est une pratique novatrice. Bien qu’un guide de prévention des conflits avec

la clientèle (DQSSI, 2007) donne un aperçu du rôle de l’ÉS, elle n’est cependant nulle part

décrite ou documentée. Au moment où nous réalisions cette étude, elle en est encore à une phase

d’essai et d’expérimentation.

Le présent rapport présente les résultats d’une recherche évaluative commandée par le CSSS de

Québec-Nord, visant à vérifier si l’équipe de soutien atteint les objectifs qu’elle s’est donnés, et à

mieux connaître et comprendre ses actions afin d’améliorer ses interventions. Ce rapport a

également pour but de faire connaître l’équipe de soutien à l’extérieur du CSSS, en espérant que

cette expérience pourra inspirer des interventions dans d’autres centres d’hébergement, qui

connaissent des difficultés semblables.

On trouvera dans la première section de ce rapport une présentation du protocole de recherche.

Les trois autres sections sont consacrées à la présentation des résultats : d’abord une description

des situations qui ont conduit à la création de l’équipe de soutien, puis de l’équipe elle-même et

de ses interventions; ensuite une analyse des effets à court et à moyen terme de l’intervention sur

les gestionnaires et les équipes soignantes (réduction des tensions et atténuation des difficultés);

enfin, un examen et une appréciation des moyens dont dispose l’équipe pour réaliser

adéquatement son mandat.

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1. L’ÉVALUATION DE L’ÉQUIPE DE SOUTIEN : OBJECTIFS ET MÉTHODOLOGIE

En novembre 2007, au moment où l’équipe de soutien commençait ses interventions, une

première rencontre a eu lieu entre des membres de la direction du CSSS de Québec-Nord et les

chercheurs, afin de discuter d’une éventuelle recherche évaluative. Une première proposition a

été rédigée à la suite de la rencontre, on s’est entendu sur les objectifs de l’étude et on a convenu

d’un échéancier et d’un budget. La méthodologie a par la suite été précisée.

1.1 Objectifs de l’évaluation

La recherche évaluative poursuivait trois objectifs : décrire l’intervention de l’équipe de soutien,

apprécier l’atteinte de ses objectifs à court et à moyen terme et vérifier si l’équipe dispose des

moyens suffisants pour mener son intervention et atteindre ses objectifs.

a) Décrire l’intervention de l’équipe de soutien. Cet objectif s’imposait du fait qu’on ne dispose

d’aucune description du travail et des interventions de l’équipe. Si l’expérience doit se prolonger,

mais que le personnel change ou si d’autres établissements veulent s’en inspirer, il fallait mettre

par écrit non seulement le mandat et le fonctionnement de l’équipe, mais aussi les raisons de ce

fonctionnement et les modalités d’intervention retenues. Les dimensions à investiguer étaient :

Les objectifs de l’ÉS, ses justifications, sa pertinence et ses limites;

Ses pratiques, ses modes d’interventions et leur contenu;

Les changements et ajustements apportés en cours de route, et les raisons de ces

changements.

b) Évaluer l’atteinte des principaux objectifs que s’est fixés l’équipe de soutien. Les critères

d’évaluation des résultats obtenus par l’équipe de soutien tiennent compte des délais impartis et

moyens mis à la disposition des chercheurs (la direction avait besoin des résultats assez

rapidement). Il fallait également tenir compte du fait qu’au moment où débutait l’étude, l’équipe

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avait commencé ses interventions depuis six mois à peine, et qu’il était difficile d’en apprécier

les effets à long terme. L’étude devait donc apprécier :

Les effets à court terme : conflits désamorcés, réduction des tensions, satisfaction chez

les acteurs impliqués ou touchés par les situations;

Les effets dans le moyen terme : capacité des équipes à faire face aux nouvelles situations

problématiques et à prévenir une aggravation des problèmes; le développement

d’habilités chez les intervenants pour agir dans des situations difficiles;

Les limites ou les obstacles rencontrés dans l’atteinte de ces objectifs : roulement du

personnel, adhésion de l’ensemble des membres de l’équipe d’intervenants, contenu de

l’intervention, etc.

c) Évaluer la capacité de l’équipe de soutien à mener son intervention. Le troisième et dernier

objectif de l’évaluation touche aux moyens dont dispose l’équipe de soutien pour faire son

intervention. Il s’agissait d’évaluer :

La pertinence de l’expérience professionnelle et de la formation des membres de l’ES,

l’encadrement et le soutien fournit par l’établissement, les moyens mis à sa disposition

(temps, ressources, dégagement, clarté du mandat, etc.);

La réception de l’équipe de soutien par les intervenants des différents sites

d’hébergement impliqués (ouverture, disponibilité, etc.).

1.2 Méthodologie

Pour atteindre ces trois objectifs et répondre à ces questions, il fallait interroger les membres de

l’équipe de soutien, ainsi que des gestionnaires et des intervenants qui ont bénéficié du soutien.

Entrevues avec les membres de l’équipe de soutien. Les membres de l’ÉS ont été rencontrés à

deux reprises afin d’avoir une description plus précise de leurs actions, de leurs objectifs et de

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leur fonctionnement, mais aussi pour recueillir leur appréciation des résultats obtenus, et

identifier les difficultés rencontrées (objectifs 1, 2, et 3). Les entretiens ont porté sur :

• Les conflits entre les intervenants, les résidents et leurs familles : nature et origine des

tensions et des conflits; impacts sur les équipes d’intervenants;

• Le travail de l’ÉS : description de ses actions et de son fonctionnement; clarification de

ses objectifs, de sa pertinence et des raisons motivant le type d’intervention retenu;

• La formation et l’expérience des membres de l’équipe de soutien;

• Les moyens mis à la disposition de l’ÉS pour faire son travail (ressources, temps, appuis

institutionnels, etc.);

• La réception (accueil et collaboration) de l’ÉS par les intervenants et le personnel cadre;

• Les difficultés et obstacles rencontrés dans leur travail;

• L’appréciation que l’ÉS fait de ses interventions sur le court et moyen terme;

• Les changements qui ont été apportés en cours de route ou qui devront être apportés en

lien avec ses objectifs, son fonctionnement, le contenu de ses interventions, ses rapports

avec les intervenants, etc.

Entrevues avec des intervenants ayant bénéficié de l’équipe de soutien. Ces entretiens visaient à

mieux cerner les objectifs, la nature et le contenu de l’intervention, le fonctionnement de l’équipe

de soutien et ses relations avec les intervenants. Ils visent à mieux connaître l’accueil qui est fait

à l’ÉS par les intervenants (accueil pouvant varier d’une équipe de travail et d’un intervenant à

l’autre), et l’appréciation qu’ils font de l’intervention, tant de son contenu et des moyens utilisés,

que de ses effets à court et moyen terme (objectifs 1, 2 et 3). Les entretiens ont porté sur :

La nature et l’origine des tensions et conflits avec les résidents et leur famille;

Les effets de ces conflits sur leur travail, leurs relations avec les résidents, sur la santé et

le bien-être des personnes (résidents et intervenants);

Leur connaissance et leur appréciation des objectifs et des actions de l’ÉS;

Leur appréciation du fonctionnement de l’ÉS, de son mode d’intervention et de ses

relations avec les équipes d’intervenants;

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• Leur appréciation des effets à court terme (résolution des conflits, diminution des

tensions, amélioration des relations avec les résidents et leur famille, amélioration de la

qualité de vie au travail) et à moyen terme (se sentir mieux préparé ou outillé pour faire

face aux difficultés et prévenir les conflits).

Nous avons ainsi interrogés individuellement des chefs d’unité (n=6), des infirmières et des

préposés (n=7). Nous avions songé au départ à faire des entrevues de groupe, pour des

considérations matérielles (temps et budget) et des considérations scientifiques (permettre aux

intervenants d’échanger sur l’appréciation qu’ils font de l’intervention, mettre en perspective les

points de vue, dégager les points sur lesquels il y a accord et désaccord). Cependant, il s’est

avéré impossible de réunir en même temps plusieurs intervenants.

1.3 Limites de l’évaluation

Il s’agit d’une évaluation qui a des visées modestes. Elle n’inclut pas de mesures précises

d’acquisition des habiletés, afin de vérifier l’atteinte de cet objectif. Elle n’évalue pas non plus

les retombées des interventions de l’équipe de soutien sur le long terme.

Le nombre de gestionnaires et d’intervenants interrogées est relativement petit. Nous avons en

effet rencontré des difficultés dans le recrutement des gestionnaires et surtout des intervenants,

en raison principalement du roulement du personnel (l’intervention de l’ÉS remontant à plusieurs

mois, certains avaient quitté le CSSS) et de l’obligation de mener les entretiens durant les heures

de travail (difficultés à se faire remplacer).

Cette évaluation est néanmoins pertinente pour évaluer le bien-fondé de l’intervention et les

conditions nécessaires à sa mise en œuvre. Elle permet de faire des recommandations à l’équipe

de soutien et à la direction de l’établissement, touchant le fonctionnement de l’équipe, ses

ressources, le contenu de ses interventions et la manière dont elle intervient auprès des

intervenants.

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1.4 Collaboration et questions éthiques

Pour mener à bien cette étude, les chercheurs ont eu besoin de la collaboration de l’équipe de

soutien, qui a accepté de se soumettre à l’évaluation, de rencontrer les chercheurs et de discuter

des résultats. Les chercheurs ont également eu besoin de la collaboration de l’établissement, le

Centre de santé et de services sociaux Québec-Nord, afin de permettre aux intervenants de

rencontrer les chercheurs. L’établissement a fourni des locaux pour les rencontres et libéré du

temps pour les intervenants1.

Les chercheurs s’engageaient à discuter de leurs résultats, de leurs interprétations et de leurs

recommandations avec la direction de l’établissement et l’équipe de soutien, et ce, aux

différentes étapes de la réalisation de l’étude2. Ces échanges ont fait partie de l’évaluation. Ils

visaient non seulement à faciliter le transfert des connaissances, mais à améliorer l’analyse. Les

chercheurs demeurent toutefois entièrement libres dans leurs interprétations et dans la

formulation de leurs recommandations.

Comme toute recherche, cette évaluation soulevait des questions éthiques. La première a trait à la

confidentialité des réponses. L’équipe de soutien, non plus que la direction de l’établissement, ne

devait connaître l’identité et l’opinion particulière de chacun des intervenants qui a accepté de

répondre à nos questions. Non seulement l’anonymat des personnes interrogées est préservé dans

le présent rapport, comme dans toute autre présentation écrite ou verbale des résultats de l’étude

par les chercheurs, mais nous invitons tout membre du personnel de l’établissement qui

1 L’évaluation a été réalisée par deux chercheurs du CSSS de la Vieille-Capitale (M. Gagnon et Mme Clément) et une assistante de recherche (Mme Raizenne). Les deux chercheurs ont conçu l’étude, préparé les instruments de collecte des données, analysé les résultats, présenté et discuté leurs conclusions à la direction de l’établissement et rédigé le rapport. L’assistante de recherche a participé à la collecte des données (entrevues, transcription), l’analyse des données, la présentation des résultats et la rédaction du rapport.

2 En février 2009 les chercheurs rencontraient des représentants de la direction du CSSSQN, un représentant du bureau de la Commissaire aux plaintes et les membres de l’ÉS pour leur présenter les grandes lignes de ce rapport. La rencontre avait pour objectifs de recueillir des réactions à nos premières analyses, afin de les nuancer ou de les approfondir, et de permettre à la direction du CSSS de prendre des décisions quant à l’avenir de l’ÉS.

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reconnaîtrait (ou croirait reconnaître) une personne dans les idées et jugements rapportés à

préserver cet anonymat et respecter le point de vue exprimé.

La seconde question éthique a trait à de possibles dissensions au sein des équipes d’intervenants

(désaccords sur la cause des conflits avec les familles ou désaccords sur la pertinence de

l’intervention de l’équipe de soutien). Pour les besoins de l’évaluation, les chercheurs devaient

connaître ces désaccords. Cependant, si l’évaluation ne visait pas à résoudre ou atténuer les

désaccords et les possibles conflits, elle ne devait pas non plus les exacerber. Les personnes

rencontrées demeuraient libres d’exprimer leur désaccord, insatisfaction ou déception. Nous

avons cherché de notre côté à utiliser ces avis divergents ou ces insatisfactions pour mieux cerner

les limites de l’intervention de l’ÉS et ses défis, et non pour opposer ou critiquer des personnes.

La troisième question touche au consentement libre et éclairé des personnes. Bien que la

recherche ait été entreprise à la demande du CSSS Québec-Nord, qui la finance et la soutient, le

personnel de l’établissement demeurait libre d’y collaborer et de répondre aux questions des

chercheurs. Pour des raisons qui leur appartenaient, le personnel pouvait refuser de participer aux

entretiens ou de répondre à certaines questions, sans subir des pressions ou encourir des

préjudices de la part de leur employeur.

2. L’ÉQUIPE DE SOUTIEN : MANDAT ET FONCTIONNEMENT

À quels types de problèmes plus exactement l’équipe de soutien cherche-t-elle à répondre?

Comment le fait-elle? En quoi consiste son intervention? Quel soutien apporte-t-elle? C’est à ces

questions que cette section apporte des réponses. Cette description de l’intervention de l’équipe

de soutien répond au premier objectif de notre étude.

2.1 Des comportements difficiles et perturbateurs

Les intervenants des centres d’hébergement éprouvent d’importantes difficultés avec certains

résidents : demandes continuelles et harcelantes de services et d’aide (le résident sonne la cloche

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constamment pour avoir de l’aide, demande à se faire changer de vêtement plusieurs fois par

jours, se met à crier s’il n’obtient pas ce qu’il veut); manipulation et chantage pour obtenir ce

qu’il veut; comportements agressifs (cris, insultes, menaces de frapper) et manque de respect

envers les intervenants qu’il ne cesse de critiquer et de dévaloriser (on leur reproche de mal faire

leur travail et d’être incompétents); conduites désagréables à l’égard des autres résidents

(agitation, cris, agressivité); comportements dangereux pour eux-mêmes ou les autres (refus de

suivre son traitement; cuisiner dans sa chambre avec risque d’intoxication ou d’incendie),

inéquitables (mauvaise créance, sans possibilité réelle de contraindre le résident à payer) ou

illégaux (consommation de drogues). Généralement plusieurs de ces comportements se

cumulent, ce qui crée une situation tendue, des rapports difficiles et méfiants avec le personnel,

beaucoup de frustrations de part et d’autre. D’un côté, le résident se sent lésé et incompris, de

l’autre, les intervenants se sentent peu respectés et même parfois agressés.

Les difficultés peuvent également provenir d’un proche ou de la famille, qui ne cesse d’exiger,

de critiquer et de surveiller les employés, qui se dit déçu par les services offerts en hébergement

et en exige davantage (qualité des repas, soins d’hygiène) ou qui s’oppose à une décision

(changement de chambre). Certains n’hésitent pas à déposer une et même plusieurs plaintes au

bureau du commissaire local aux plaintes et à la qualité des services, menacent de dénoncer

l’établissement dans les médias ou encore de déposer une plainte en justice, ce qui exacerbe les

tensions et les conflits. La communication est sur le bord d’être rompue.

« Encore là l’équipe se sent agressée, parce que lorsque [les proches] font la tournée et que la résidente n’est pas levée à 13 h 30, ils disent : « comment se fait-il que vous ne l’avez pas levé, ça fait combien de fois que je vous le dit de la lever à 13 h 30! ». Et là, ça repart et les préposés trouvent la famille bête et ne lui parle plus. Ça s’enchaîne, plus de lien de confiance, plus de communication, c’est une roue qui tourne. […] Souvent ces familles viennent à tous les jours. Ils viennent sur le quart de jour et viennent voir sur le quart de soir voir si c’est pareil.[…] Il n’y a plus personne qui veut aller dans cette chambre là quand ils savent que sa fille va arriver, parce qu’ils savent qu’ils vont se faire ramasser. » CU3

3 Les extraits d’entrevues sont identifiés par un sigle : ÉS (membre de l’équipe de soutien); CU (chef d’unité), INF (Infirmière), P (préposé aux bénéficiaires).

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Une enquête effectuée à l’automne 2007 auprès des gestionnaires dans l’ensemble des sites

d’hébergement du CSSS Québec-Nord recensait 84 situations problématiques, dont 30 étaient

qualifiées d’urgentes. Le commissaire aux plaintes et à la qualité des services recevait également

de nombreuses plaintes en provenance de l’hébergement, révélant des conflits importants, et

exigeant parfois une intervention allant au-delà du traitement habituel d’une plainte. Certains

problèmes durent depuis plusieurs années, d’autres sont plus récents.

Ces comportements perturbateurs n’ont pas une seule cause. Selon l’équipe de soutien, certaines

conduites des résidents sont attribuables aux problèmes cognitifs ou de santé mentale de la

personne, à une forte anxiété ou à une dépression. Des résidents ont reçu un diagnostic

psychiatrique ou psychologique, certains souffriraient d’un trouble de personnalité (personnalité

narcissique, histrionique ou antisociale; trouble de personnalité limite ou TPL4). D’autres

conduites sont attribuées à une forte réaction émotionnelle consécutive à la perte d’autonomie et

à l’hébergement; les personnes auraient de la difficulté à faire le deuil de leur ancienne vie et à

accepter leur situation nouvelle, qui leur fait perdre tous leurs repères et bouleverse leur

existence, leur identité, leur avenir, leur rapport aux autres (ex. : perdre toute autonomie et devoir

être hébergé à la suite d’un ACV, alors qu’on est encore dans la force de l’âge). L’hébergement

peut conduire à la dépression ou provoquer une forte anxiété; l’impuissance et le désarroi

peuvent se changer en colère. La conduite des proches pourra s’expliquer par le sentiment de

responsabilité à l’égard de la personne hébergée, leur culpabilité de l’avoir placé en

hébergement, leurs difficultés à accepter sa perte d’autonomie, sa maladie et bientôt sa mort5. On

explique également certains troubles de comportements par le fait que les résidents et leurs

proches sont plus instruits qu’autrefois, connaissent mieux leurs droits et son davantage 4 Il aurait lieu de s’interroger sur le sens et la portée de cette catégorie diagnostique– TPL – d’apparition récente et qui recouvre un ensemble hétérogène de conduites. Centrée sur les comportements et sur ce qu’ils ont de dérangeant pour les autres (les intervenants notamment), elle contribue à faire un problème clinique, ce qui était auparavant des comportements socialement et moralement inacceptables.

5 Avant qu’elle soit hébergée, la famille de la personne en a parfois pris soin pendant longtemps, et elle a parfois de la difficulté à lâcher prise. Elle estime avoir la responsabilité de vérifier la qualité des services que la personne reçoit, de la protéger, de voir au respect de sa dignité et son intégrité physique et psychologique, et d’assurer une continuité dans son parcours biographique et son identité. Cela se traduit parfois par des exigences élevées et une surveillance des soins prodigués (Bowers, 1988; Keefe et Fancey, 2000; Vézina et Pelletier, 2003; Ducharme, 2006).

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revendicateurs; ils ont également des attentes élevées à l’endroit des services publics. Les

intervenants se sentent alors sous pression et ont le sentiment que les résidents ont tous les

droits6. Dans certains cas, il semble également qu’au moment de l’admission, l’offre de service

n’avait pas été clarifiée avec le résident et ses proches, ce qui a favorisé les insatisfactions et les

différends.

« […] de venir vivre en établissement, c’est déjà un deuil énorme, donc les gens peuvent vivre, avoir des éléments dépressifs, peuvent faire de l’anxiété, des fois ça sort sous forme de colère et puis de colère qui s’exprime un peu plus proche. […] Quand la personne a perdu ses moyens d’adaptations habituels, a perdu ses repères habituels, ça peut mener à toutes sortes de comportements et des fois on s’explique mal, mais quand on étudie la situation dans son ensemble on comprend mieux. » (ÉS)

« La fille ou le fils [du résident] contrôle le service alimentaire, contrôle les soins infirmiers, contrôle tout, parce qu’ils veulent que leur mère ou leur père vive de la même façon qu’il vivait avant et puis ça c’est impossible. […] Quand les gens arrivent, ils ont plein, plein, plein de deuils à faire, mais ils doivent s’habituer à vivre en communauté, à se faire laver, ça peut-être gênant. De ne plus manger la même nourriture qu’ils avaient dans le temps quand ils étaient en appartement, de ne plus avoir nécessairement son déjeuner à sept heures et demie avec son café […] c’est difficile quand les gens mangent souvent à des heures qui sont plus…tu sais adaptées aux lieux. » (ÉS)

On ne peut regrouper tous ces comportements sous une seule catégorie. Ils ont néanmoins en

commun de désorganiser le travail et d’affecter durement le personnel sur le plan émotionnel. En

outre, ces comportements requièrent des interventions non standardisées; les situations, les

conduites et l’état des personnes sont très divers et demandent une réponse adaptée à chaque cas.

Mais ce n’est pas à nous d’expliquer ces conduites ou de proposer un diagnostic, nous n’avons ni

la compétence, ni les moyens de le faire. Ce qui retient ici notre attention ce sont plutôt leurs

impacts sur les travailleurs et la vie en centre d’hébergement, la manière dont on les appréhende,

et quelle réponse on y apporte.

6 Ainsi, un gestionnaire déplore le fait qu’à leur arrivée, les résidents soient informés sur leur droit de porter plainte. Cela leur donne le droit de se plaindre dès qu’une chose ne fait pas leur affaire.

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2.2 Des intervenants et des gestionnaires en difficulté

Agressivité, demandes répétées et plaintes constantes ont de fortes répercussions sur le

personnel. Ils ont d’abord pour conséquences de désorganiser le travail des intervenants : le

résident ou ses proches accaparent le personnel; l’intervenant qui consacre plus de temps à un

résident accroît le travail de ses collègues auprès des autres résidents. Ils ont également pour

effet de culpabiliser ou de dévaloriser le personnel, et de créer des conflits et de vives tensions

entre l’établissement et le résident. Les menaces de porter plainte, de dénoncer la situation dans

les médias ou en justice intimident très souvent les intervenants et les gestionnaires et accroissent

leurs désarrois7. Faire l’objet d’une plainte est reçu par l’intervenant comme un blâme : elle le

fait douter de sa compétence ou elle est perçu comme injuste et pouvant entacher sa réputation.

Ces situations conduisent à l’épuisement physique et mental du personnel, qui ne parvient jamais

à satisfaire les personnes, qui se sent surveillé et constamment jugé et finit par se croire

incompétent. « On n’en venait pas à bout (…) C’était l’enfer », raconte une infirmière. « C’est

lourd, c’est lourd! » dira une autre. Certains intervenants partent d’ailleurs en congé de maladie,

d’autres demandent à être affectés ailleurs ou pensent à quitter le métier de préposé en centre

d’hébergement8. Les intervenants ne comprennent pas la conduite du résident, ils n’ont pas de

recul, ni la formation clinique ou de nature psychosociale pour se l’expliquer et adapter son

intervention. Ils se sentent seuls avec le problème : « on ne sait pas si plus haut ils nous

entérinent », nous dire une infirmière. « C’est très demandant pour le personnel, qui devient

fatigué », nous confiera une autre. Ces difficultés surviennent de surcroît au moment où les

centres d’hébergement ont connu des changements qui ont affecté les employés et contribué

7 On parle de « peur de représailles » chez le personnel, qui a peur des plaintes des usagers ou des réprimandes de la direction. Ce n’est pas sans faire écho à la peur des représailles, symétrique, mais inverse, que les résidents peuvent savoir s’ils portent plainte.

8 Les problèmes de santé mentale sont devenus l’un des principaux problèmes de santé au travail et l’une des principales causes d’absentéisme. Ils sont plus fréquents parmi le personnel de la santé que dans l’ensemble de la population en âge de travailler (Bourbonnais et al. 2006). Les nombreuses réorganisations des services et des équipes au cours des dernières années ne sont pas sans créer une insécurité et un désarroi. L’intensification du travail en CHSLD, en raison notamment de l’alourdissement de la clientèle accroît l’essoufflement et les risques d’épuisement (ibid.).

12

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

parfois à les démotiver : réorganisation du travail en équipe et réaffectation d’une partie du

personnel.

On peut parler sans exagération d’intervenants et de gestionnaires en souffrance : épuisés et à

bout, qu’ils se sentent seuls, ils ne parviennent plus à imaginer de solutions et ils n’osent prendre

une mesure de crainte de recevoir une plainte ou d’être blâmés. Ces situations aggravent le

problème de roulement de personnel et rendent plus difficile encore un travail qui est déjà

exigeant au plan physique, émotionnel et moral : prendre soin d’une personne en lourde perte

d’autonomie.

« Le personnel qui ne sait pas toujours comment réagir face à ça et puis certains clients vont avoir le don, d’aller toucher personnellement certains membres du personnel, par leurs remarques désobligeantes, des reproches, des commentaires inappropriés. […] on se retrouve avec des gens qui veulent bien faire, qui veulent donner des soins, mais qui se retrouvent dans une situation où là c’est très ardu d’aller donner des soins à quelqu’un qui te reçoit toujours de travers… ou d’offrir des soins à quelqu’un où la famille est toujours à proximité et doute de tes compétences et de la qualité de tes soins ». ÉS

Des intervenants sont plus affectés que d’autres par ces comportements, parce qu’ils y réagissent

plus fortement, parce qu’ils ne savent pas toujours comment y répondre, ou encore parce que

l’usager ou ses proches n’agissent pas de la même façon avec tous les intervenants (blâmant

certains et valorisant d’autres). Au sein d’une équipe, tous ne voient pas la situation ou le

problème de la même façon et n’interviennent pas de la même manière (certains répondent aux

demandes des résidents, d’autres non). Entre les différents quarts de travail, il manque également

de communication, on ne sait pas toujours quelles difficultés vivent les autres membres du

personnel et quelles mesures ils ont mis en œuvre pour y répondre. Cela a pour effet de briser la

cohésion au sein de l’équipe de travail et la cohérence des services, et d’aggraver les conflits et

les comportements perturbateurs du résident.

Ces difficultés ne sont pas présentes uniquement dans les centres d’hébergement du CSSS de

Québec-Nord, tant s’en faut. D’ailleurs, selon le plan d’action régional, l’ensemble des CSSS de

la région de Québec doivent s’organiser pour répondre aux problèmes importants

13

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

qu’occasionnent les comportements perturbateurs, afin de les résoudre ou de les atténuer, voire

de les prévenir. L’aide que pourrait fournir l’Institut universitaire en santé mentale de Québec est

à redéfinir. Aussi les CSSS doivent se doter de leur propre service de 1re ligne.

2.3 Mandat et composition de l’équipe de soutien

Le mandat de l’ÉS a été défini conjointement par la Direction de l’hébergement, le commissaire

local aux plaintes et à la qualité des services et la Direction de la qualité des services et des soins

infirmiers du CSSS de Québec-Nord9. Son rôle est d’apporter un soutien aux gestionnaires et aux

équipes soignantes, et plus spécifiquement de :

1) Faire une analyse approfondie des situations conflictuelles, afin d’en comprendre les

causes et de trouver des solutions;

2) Réduire les tensions et le stress du personnel en l’aidant à prendre du recul et en lui

permettant de s’exprimer et de verbaliser les difficultés vécues;

3) Développer un « protocole d’intervention spécifique », définissant l’approche et le cadre

relationnel à l’intérieur duquel les services et les soins seront donnés; ce protocole

s’ajoute ou s’intègre, selon le cas, au plan d’intervention propre à chaque résident;

4) Accompagner le personnel cadre et le personnel soignant dans la mise en application du

protocole d’intervention;

5) Soutenir le personnel dans l’appropriation d’habiletés leur permettant de faire face aux

situations conflictuelles.

Par son action et au moyen du protocole d’intervention, l’ÉS cherche à réduire les tensions

physiques, psychologiques et morales vécues par les intervenants et les gestionnaires, à réduire et

éventuellement à prévenir les conflits et les comportements perturbateurs (diminuer les

demandes, les comportements agressifs et négatifs, apaiser les conflits), à prévenir la

9 Le Guide de prévention lors de situation à risque de conflits impliquant la clientèle (DQSSI, 2007) esquisse le rôle et la composition de l’ÉS.

14

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

désorganisation du travail et des services, à réduire l’épuisement physique et mental des

employés, et ainsi à améliorer la qualité de vie en hébergement, tant pour le personnel que pour

les résidents et leurs proches. Elle intervient lorsque les équipes de travail ne parviennent pas

seules à trouver une solution à leur problème.

L’accompagnement donné par l’équipe de soutien vise également à former le personnel cadre et

le personnel soignant, à les outiller pour faire face aux problèmes présents, mais également aux

situations difficiles et imprévues qui se présenteront à l’avenir (réagir autrement face aux

comportements; prendre des décisions; fixer des limites). On présume que les habiletés qu’ils

vont acquérir pour faire face aux situations plus complexes, les rendront aptes à faire face à la

plupart des situations courantes comportant des risques de conflits impliquant la clientèle et leur

famille.

L’équipe de soutien est composée de deux personnes : une travailleuse sociale, qui a une

expertise et de l’expérience en santé mentale, dans l’intervention auprès des personnes âgées,

ainsi que dans l’analyse des dynamiques familiales et les processus de deuil (touchant

notamment la décision conduisant à une demande d’hébergement); un psychologue, qui possède

également une expertise et de l’expérience en santé mentale, ainsi que des connaissances en

neuropsychologie et sur les troubles de la personnalité.

À ces deux personnes s’ajoute un membre de la Direction de l’hébergement, qui intervient à

certaines étapes : au début du processus surtout, pour recevoir la demande et vérifier ce que les

équipes ont fait et ce qu’elles avaient à faire avant de recourir à l’ÉS, mais parfois également lors

de la présentation du protocole d’intervention aux intervenants, afin de montrer que la direction

de l’établissement entérine le protocole et les actions des intervenants (cf. infra)10. Ancien

infirmier, il a une expérience clinique, mais c’est comme membre de la direction qu’il est perçu

par les intervenants.

10 Actuellement, il n’est pas présent lorsque le protocole est présenté au résident et à ses proches, afin de ne pas donner le sentiment aux familles et aux résidents que leurs menaces d’en appeler à la Direction générale ont fonctionné.

15

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

2.4 Une procédure en étapes

L’équipe de soutien intervient ainsi auprès des intervenants, et non du résident et de sa famille.

En d’autres termes, les clients de l’équipe de soutien sont les équipes d’intervenants elles-

mêmes, auprès desquelles, l’équipe de soutien agit comme consultant.

L’intervention se fait en huit grandes étapes :

1) Dans un premier temps, le chef de l’unité affectée par les comportements d’un résident

dépose une demande de soutien, en remplissant un petit questionnaire dans lequel il

expose brièvement la situation; le gestionnaire membre de l’ÉS en fait un premier

examen, vérifie si le plan d’intervention11 a été fait (ou refait récemment) et quelles sont

les mesures qui ont déjà été prises pour tenter de résoudre le différent sans l’intervention

de l’ÉS (ex : rencontre avec le résident et ses proches pour préciser les services offerts);

2) Une rencontre entre le chef d’unité et l’ÉS a lieu pour préciser la nature des problèmes;

l’ÉS monte un dossier pour le recueil des informations et se donne parfois un plan

d’action ou une stratégie pour intervenir dans ce dossier (étapes, rencontre à faire, etc.)12;

3) L’ÉS rencontre ensuite les équipes de jour, de soir et de nuit (infirmières et préposés)

concernées, afin de leur expliquer son rôle et sa démarche (ce que l’ÉS va faire et dans

quels buts), de créer avec elle une relation de confiance nécessaire à la suite de

l’intervention et d’approfondir sa connaissance et sa compréhension de la situation

problématique; ces rencontres permettent aux membres du personnel non seulement

d’expliquer la situation, mais d’exprimer toutes leurs émotions, leurs frustrations et leurs

difficultés;

11 Il ne faut pas confondre le plan d’intervention, qui est fait pour chaque résident et le protocole d’intervention spécifique que l’ÉS met en place lorsqu’il y a des comportements perturbateurs. Le protocole d’intervention oblige souvent à revoir le plan d’intervention.

12 Ce plan d’action était systématiquement fait au début, puis abandonné. Les membres de l’ÉS pensent cependant devoir y revenir, car il structure et accélère l’intervention.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

4) L’ÉS rédige un protocole d’intervention spécifique pour le résident (ou ses proches), qui

est présenté lors d’une réunion de l’équipe interdisciplinaire réunissant les professionnels

(médecin, ergothérapeute, physiothérapeute, nutritionniste, infirmière); si l’équipe

interdisciplinaire voit des difficultés dans l’application du protocole, on en tient compte

afin de rendre son application la plus simple et la plus réaliste possible pour le personnel;

le protocole est approuvé par la Direction de l’hébergement et le chef d’unité13;

5) le protocole est ensuite présenté aux équipes de préposés de jour, de soir et de nuit par

l’ÉS, qui leur explique la raison du protocole ;

6) le résident et ses proches sont informés du contenu du protocole d’intervention

spécifique; ils en reçoivent une copie; dans quelques rares cas, l’équipe de soutien a

discuté du protocole avec le résident, pour convenir avec lui des règles auxquelles il

devra se soumettre et des engagements de l’établissement à son endroit14;

7) le protocole est appliqué par les équipes; un intervenant pivot est responsable de son

application quand il se présente des problèmes avec le résident;

8) dans les semaines qui suivent, l’ÉS fait la lecture des notes évolutives au dossier du

résident; l’ÉS rencontre parfois le chef d’unité ou l’intervenant pivot pour vérifier si tout

se passe comme prévu, offrir au besoin du soutien ou réviser le protocole; ce suivi se fait

sur une plus longue période dans les cas plus difficiles.

2.5 Le protocole d’intervention spécifique

En quoi consiste le protocole d’intervention spécifique? C’est un document dans lequel sont

spécifiés les comportements perturbateurs du résident ou de ses proches, ainsi que les

interventions requises de la part du personnel et la façon de réagir à ces comportements. Le 13 Le protocole d’intervention est parfois présenté au Commissaire à la qualité des services, afin de le mettre au courant et d’avoir son avis sur l’acceptabilité des mesures retenues au plan éthique et juridique. Il ne s’agit pas de lui faire entériner le protocole, mais il est important de tenir compte de son avis et d’assurer une cohérence dans les actions.

14 Lorsque l’on peut s’entendre ainsi avec le résident, cela facilite beaucoup l’application du protocole et modifie la dynamique entre les intervenants et le résident. Dans la majorité des cas ce ne fut toutefois pas possible, en raison de l’attitude du résident et de l’enlisement du conflit.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

protocole précise aussi l’offre de service et surtout la manière dont ces services seront désormais

offerts et la façon de se comporter avec le résident ou ses proches.

Quelques exemples : 1) lorsqu’un résident sonne la cloche constamment pour demander de l’aide

ou un service, les intervenants ne sont pas tenus de lui répondre immédiatement; ils doivent

s’assurer que le résident est en sécurité et l’informer qu’ils vont venir le voir plus tard ; 2)

lorsque le résident est agressif, désagréable ou insultant à l’endroit des intervenants, ceux-ci

doivent lui dire de changer de ton, qu’il n’a pas le droit de les traiter de cette façon, qu’il doit

traiter les autres avec respect et civilité, et qu’ils vont sortir de la chambre et revenir plus tard

lorsqu’il aura changé d’attitude; avant de sortir, ici encore, les intervenants s’assurent que la

personne est en sécurité et confortablement installée; 3) un employé n’entre jamais seul dans la

chambre d’un résident, mais toujours accompagné, afin de ne pas se faire accuser ensuite

injustement par le résident de l’avoir maltraité ; 4) dès qu’un résident dit du mal d’un collègue,

l’intervenant l’arrête et le réfère à l’intervenant pivot avec qui il doit discuter du problème; il

refuse d’en discuter avec lui, d’embarquer dans son jeu et ainsi d’alimenter le conflit. De

manière générale, l’on demeure empathique et l’on continue de veiller à ce que les besoins du

résident soient satisfaits et que sa sécurité est assurée, mais on ne répond plus à toutes ses

demandes, ni ne tolère tous ses comportements.

« M. n’est pas gentil, alors vous n’avez pas à vous laisser insulter, vous n’avez pas à accepter de vous faire chanter des bêtises, encore une fois, c’est correct de ne pas accepter ça et vous en informez les personnes en autorité. » CU

Toutes les équipes (de jour, de soir et de nuit) et tous les membres de chaque équipe doivent

suivre le protocole, c’est un enjeu extrêmement important sur lequel nous reviendrons plus loin.

La rédaction et l’application de ce protocole d’intervention spécifique sont au centre de la plupart

des interventions de l’ÉS. Elles permettent de clarifier avec le résident et ses proches l’offre de

service, ce que le centre d’hébergement est capable d’offrir : repas, fréquence des soins

d’hygiène, disponibilité des intervenants, activités, heures du coucher et journée du bain, etc. On

y précise parfois les conséquences encourues si le résident déroge ou maintient une conduite

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

inacceptable (ex. : il demeure dans sa chambre, il est privé de sorties extérieures). Le protocole

est jugé nécessaire lorsque l’on n’arrive pas à s’entendre avec le résident ou ses proches sur les

services offerts et les comportements à observer de part et d’autre. Il s’agit en somme de fixer

des limites aux conduites et demandes des résidents (ou de leurs proches), et de se faire

davantage respecter. L’idée générale est que les intervenants ne doivent pas acheter la paix en

répondant à toutes les demandes ou en endurant son agressivité et ses remarques désobligeantes,

car à long terme ce sont les intervenants qui en paient le prix (épuisement physique et mental;

désorganisation du travail).

« Ils nous ont donné des consignes, toujours y aller à deux, une qui fait le travail et l’autre qui l’aide à tourner le résident, mais sans lui parler. On avait informé la dame : ‘on va venir faire vos soins, on va vous donner tout ce que vous avez besoin, sauf qu’on n’interviendra pas verbalement avec vous’. » CU

« C’est très catégorique […] Il ne faut pas dévier du protocole. Il ne faut pas lâcher. À chaque fois que l’on rencontrait l’équipe de soutien, on nous le rappelait : soyez fermes; gardez votre énergie pour l’application du protocole, plutôt que de céder et s’épuiser davantage à répondre aux demandes incessantes. » INF

« [Les proches] s’attendent à ce qu’on leur rende le service jusqu’au bout même si c’est quelque chose qui ne fait pas partie de l’offre de service. Ça, c’est quelque chose que l’on a à travailler vraiment très fort au niveau de l’accueil. » CU

La rédaction du protocole d’intervention prend beaucoup de temps, il faut tenir compte de tous

les éléments, autant des limites physiques et cognitives de la personne, que la manière dont le

personnel doit et peut agir avec le résident. Il faut également choisir ses mots afin de ne pas

heurter le résident, ses proches ou les intervenants. Pour chaque cas, un protocole distinct est

rédigé, adapté à la situation particulière du résident.

Si ce protocole est au centre de la majorité des interventions de l’ÉS, ce n’est pas toujours le cas.

Dans certaines situations, un tel protocole n’est pas requis, le conflit se règle autrement (ex. :

clarification de l’offre de service auprès des proches parents). Dans d’autres, l’application d’un

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

protocole serait impossible en raison des problèmes neurologiques du résident qui ne peut le

comprendre, ni le mémoriser (le transfert à l’unité de soins prothétiques peut être la réponse).

2.6 Le rôle de l’intervenant pivot

Il faut s’arrêter au rôle essentiel que joue l’intervenant pivot, désigné responsable de

l’application du protocole. Ce rôle, souvent joué par l’assistante-infirmière-chef (AIC), est

double. D’abord, c’est l’intervenant pivot qui s’assure de l’application du protocole par tous les

intervenants, en informe les nouveaux et leur en explique les raisons, et au besoin rappelle à

l’ordre les intervenants qui y dérogent. C’est à lui que les intervenants se rapportent lorsqu’ils

rencontrent des difficultés et doivent appliquer le protocole. C’est lui qui agit comme personne-

ressource pour le personnel, pour l’écouter lorsqu’il est fatigué, découragé ou abattu, et pour le

conseiller lorsqu’il ne sait plus comment s’y prendre. C’est lui encore qui note au dossier les

interventions touchant l’application du protocole.

Ensuite, c’est à l’intervenant pivot que le résident et ses proches doivent toujours s’adresser

lorsqu’ils veulent faire une demande de services qui sort du plan de service, ou lorsqu’ils veulent

exprimer leurs insatisfactions. Cela évite que, devant un refus, ils s’adressent à un autre

intervenant et obtiennent satisfaction, contrecarrant ainsi l’application du protocole

d’intervention. Cela permet également de s’assurer que ce soit toujours le même message qui est

envoyé au résident et à ses proches. C’est par l’intervenant pivot uniquement que l’information

circule, ce qui favorise la cohérence.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

3. RÉDUIRE LES TENSIONS ET ATTÉNUER LES DIFFICULTÉS

L’équipe de soutien a commencé ses interventions en novembre 2007. Elle a débuté par les

situations jugées les plus urgentes, celles où le personnel éprouvait le plus de difficultés et qui

duraient depuis plus longtemps. Au printemps 2008, 30 situations jugées urgentes avaient fait

l’objet d’une première intervention. 23 situations étaient considérées comme stabilisées et 7

nécessitaient toujours un suivi. L’équipe de soutien a-t-elle atteint pour autant ses objectifs?

Parvient-elle à réduire les tensions et les conflits et à prévenir la désorganisation du travail, et

l’épuisement? Procure-t-elle aux intervenants et aux chefs d’unités les outils adéquats pour faire

face aux troubles de comportement de certains résidents? Répondre plus en détail à ces

questions, y apporter des éléments de réponse, à défaut de pouvoir donner un éclairage complet,

était le 2e objectif de notre étude. Cette section rend compte de nos observations et analyses

touchant les effets à court et à moyen terme de l’équipe de soutien.

3.1 Permettre l’expression des tensions, des frustrations et de la fatigue

Le premier effet perceptible de l’intervention de l’ÉS est de faire baisser la tension au sein des

équipes de travail. Les rencontres permettent au personnel de ventiler, d’exprimer ses

frustrations, son exaspération et son impuissance. Elles leur permettent de parler de leurs

difficultés, de leur fatigue mentale et physique. Certains intervenants en profitent pour dire ce

qu’ils ont sur le cœur et se décharger d’un trop-plein d’émotions. « Ça parlait fort » se souvient

une infirmière. « On a eu beaucoup d’aide. À chaque fois qu’on les rencontrait, ça remontait

notre moral ».

L’ÉS de soutien offre ainsi un moment d’écoute important; une écoute professionnelle par des

personnes spécialisées en relation d’aide (un psychologue et une travailleuse sociale) et avec

21

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

lesquelles les intervenants ne sont, ni dans un rapport de travail (collègue), ni un rapport

d’autorité (supérieur). Ils peuvent s’exprimer sans se sentir évalués ou jugés15.

« Ce n’est pas une approche culpabilisante, j’ai aimé leur approche qui était de dire écoutez on apprend ensemble, on corrige ensemble et on évolue ensemble ». CU

Cette écoute est un véritable soulagement pour plusieurs intervenants et chefs d’unité, parce

qu’elle leur donne l’impression qu’on se soucie de leurs problèmes, que la direction s’en

préoccupe, et qu’elle est prête à faire quelque chose. Les rencontres avec l’ÉS donnent l’espoir

que l’on va peut-être trouver une réponse à leurs difficultés. Cela fait parfois des mois et même

des années que les intervenants étaient aux prises avec le problème, qu’ils ne voyaient plus

comment s’en sortir, sinon en changeant de lieu de travail.

« Ça a apporté un ‘plus’, dans le sens où ça a permis de baisser la tension et les gens ont pu se sentir soutenu sur comment intervenir avec ces gens là. » CU

« Oui, moi j’ai aimé cela et les autres filles […] avaient bien aimé cela. Parce qu’on sentait que l’on avait du soutien. » P

3.2 Comprendre

Le dégagement émotionnel favorisé par l’écoute permet de prendre une distance avec la situation

problématique et de la voir autrement. L’intervention de l’ÉS peut alors aider les intervenants à

mieux comprendre la situation qui leur cause tant de problèmes et de peines. L’intervention

permet d’abord de mieux comprendre les difficultés vécues par le résident ou ses proches, et qui

peuvent expliquer leur conduite : trouble de personnalité, démence, deuils liés à la maladie, à la

perte d’autonomie et à l’hébergement, importantes frustrations liées aux conditions de vie qui lui

sont imposées, etc. Les intervenants avaient déjà conscience en grande partie de ces difficultés,

15 La présence d’un membre de la Direction de l’hébergement à certaines rencontres peut être positive (reconnaissance du problème et appui de la direction), mais peut également intimider (peur d’être évalué et blâmé). Les personnes interrogées cependant en ont fait peu mention.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

mais pouvoir les nommer et en discuter permet de substituer une explication d’ordre

psychologique (deuil, anxiété, révolte, maladie mentale) à un jugement moral (la personne est

méchante, capricieuse, désagréable). Plutôt que de condamner la personne, il s’agit d’intervenir

de manière à atténuer ses difficultés ou les effets indésirables de sa pathologie.

Comprendre la dynamique qui se crée parfois entre le résident, ses proches et les intervenants est

également important. Le résident fait parfois ce que l’on appelle du clivage : il départage les

intervenants entre ceux qu’il juge compétents et ceux qu’il juge incompétents, ceux dont il

accepte l’aide et ceux dont il la refuse, afin d’obtenir ce qu’il veut de la part des premiers. Cette

dynamique contribue non seulement à désorganiser le travail en équipe, mais à dévaloriser les

intervenants dénigrés, qui finissent par se sentir incompétents. Le clivage fait également en sorte

qu’une partie seulement de l’équipe éprouve des difficultés importantes et se sent concernée par

le problème, alors qu’il concerne toute l’équipe. Comprendre ce phénomène et la manière dont il

affecte les rapports entre les intervenants, permet déjà aux intervenants de commencer à sortir de

cette dynamique.

Comprendre le problème permet ainsi de prendre distance et de réduire le désarroi. Comprendre

permet aussi de dépersonnaliser le problème, qui est le troisième effet important de

l’intervention.

3.3 Dépersonnaliser le problème

Avec une compréhension différente de la situation et des comportements du résident,

l’intervention de l’équipe de soutien contribue à dépersonnaliser le problème chez les

intervenants, qui pouvaient attribuer ces comportements à leur manière d’intervenir, leur manque

de compétence ou d’habileté. Ils comprennent qu’ils ne sont pas personnellement responsables

de la situation, qui s’explique davantage par les difficultés vécues par le résident et la dynamique

générale qui s’est instaurée. L’intervention, avant même que le protocole ait été mis en place,

contribue ainsi à déculpabiliser l’intervenant. Il se sent moins responsable de la situation ou de sa

relation conflictuelle avec le résident ou ses proches.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

Certes, les intervenants ne sont pas tous identiques. Tous ne réagissent pas de la même façon aux

comportements du résident. Leurs différentes personnalités, leur expérience ou leur formation

variées font que certains réagissent plus fortement aux comportements du résident, en sont plus

affectés ou sont plus démunis. L’intervention de l’ÉS et le protocole d’intervention spécifique ne

font pas disparaître les différences entre les intervenants, mais ils uniformisent les interventions

et atténuent certaines réactions. Ils contribuent à faire en sorte que l’intervenant qui vit plus de

difficultés ne se sent pas en faute, en raison de son manque d’expérience ou de sa personnalité16.

Le problème est d’abord attribuable aux difficultés du résident ou à une dynamique qui le

dépasse.

Ne pas se sentir entièrement responsable de la conduite et des récriminations du résident et de ses

proches ne fait toutefois pas disparaître toutes les tensions et tous les dilemmes moraux vécus par

les intervenants. Plusieurs demeurent partagés entre une empathie et même de l’affection pour le

résident (on comprend que sa vie et sa condition ne sont pas faciles, qu’il faudrait lui accorder

plus d’attention, de soins et d’aide qu’il n’est actuellement possible de faire) et une certaine

agressivité à son endroit, en raison de ses comportements qui causent fatigue, peine et

frustration. Ils demeurent partagés entre une certaine pitié ou compassion, et un désir de l’ignorer

ou de l’envoyer promener, de partir ou de le voir partir. On comprend la souffrance de l’autre et

on est porté à l’excuser, en même temps qu’on la trouve insupportable. La tension se déplace : on

passe d’une contradiction entre les demandes trop élevées des résidents et les possibilités réelles

d’intervention, à une contradiction entre ce que l’intervenant estime devoir faire pour bien faire

son travail et les limites qui lui sont imposées. Si on comprend la nécessité de ces limites, on a le

sentiment d’être trop dur. La tension est d’autant plus grande que l’on vit au quotidien avec le

résident, huit heures par jour, cinq jours par semaine17.

16 De plus, certains intervenants sont également davantage exposés aux comportements perturbateurs ou négatifs de certains résidents en raison de leur âge, de leur origine ethnique ou de la couleur de leur peau. Ils en sont encore moins responsables.

17 Les tensions entre une demande accrue de travail (quantité de travail et exigences mentales) et une faible autonomie décisionnelle, ou entre un effort plus élevé et une faible récompense (reconnaissance du travail par

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

« C’est sûr que ce n’est pas ma chum, je n’irais pas veiller avec elle le soir. Mais c’est une résidente que… On les aime tous nos résidents, mais c’est ça. […] On est leur deuxième famille, il y en a qui en ont une, il y en a qui n’en ont pas. Ce qui fait qu’on est toujours leur deuxième famille, puis on n’est pas ici pour s’haïr, sinon les journées seraient plates […] Je l’aime bien encore, mais des fois il y a des journées que je ne l’aurais pas prise comme amie. » INF

L’intervenant se sent responsable de la personne et continue à vouloir l’aider, parfois jusqu’à ce

qu’il craque d’épuisement et quitte pour un congé, pour un autre établissement ou pour un autre

métier. Cette tension, l’ÉS ne peut la faire disparaître, mais il est important de la reconnaître et

de pouvoir en parler et en discuter. Il ne s’agit pas non plus de faire disparaitre tout sentiment de

responsabilité chez l’intervenant; il demeure responsable de la personne et des soins qu’il lui

donne. Mais il ne doit pas porter seul cette responsabilité; il la partage avec les autres

intervenants, l’établissement, les proches. Toute intervention a ses limites : on ne peut jamais

faire tout ce que l’on pense qui devrait être fait et accepter les limites de ce qui peut être fait.

Certains estiment que les intervenants parfois, au nom d’un certain idéal de dévouement et de

respect, ne savent pas imposer des limites aux résidents18 :

« Il y a des employés qui sont mal à l’aise de dire au client : ‘vous êtes impoli avec moi, je n’accepte pas vos insultes je vais sortir, je vais revenir plus tard’. [Ils ont] une approche où il faut être très empathique, très doux, très calme et accepter, peu importe les insultes […] les employés ont été habitués comme ça.» ES

« Il fallait que le personnel apprenne à se dégager, que les problèmes de la dame, du monsieur et de leur fille, ne sont pas leurs problèmes, qu’on est là pour les accompagner et qu’on ne peut pas porter le fardeau. » CU

l’employeur soutien, revenu) sont les principales causes de problèmes de santé mentale au travail (Vézina et al., 2006).

18 Les infirmières auxiliaires ont déjà eu comme devise : « s’oublier pour soulager », et la nouvelle devise des services psychosociaux est « je choisis mon avenir, la vie des autres ». Ce n’est rien pour diminuer la charge morale et la trop grande responsabilité que les intervenants peuvent se mettre sur les épaules. Ce n’est pas non plus pour aider au recrutement des nouveaux intervenants ou pour garder les anciens… Ces enjeux moraux demeurent encore peu discutés.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

3.4 Faire équipe ou travailler en collectif

Les rencontres avec l’équipe de soutien et l’application du protocole d’intervention obligent les

intervenants à travailler davantage en équipe et à affronter ensemble la situation. Le problème

concerne désormais toute l’équipe, y compris ceux qui vivent moins de difficultés, il est collectif.

La solution est également collective, avec l’adoption par tous les membres de l’équipe de la

même conduite. La responsabilité est partagée.

Travailler en équipe contribue à diminuer la souffrance et les tensions. On se sent moins seul, on

peut recevoir davantage de soutien et de reconnaissance de ses collègues. Il est plus facile de

parler des difficultés que l’on vit à ses collègues, qui connaissent la situation, et ses supérieurs,

qui en reporteront moins la responsabilité sur l’intervenant.

Travailler en équipe apporte également cohérence et efficacité. Tous ne vivent pas la situation de

la même façon et ne connaissent pas les mêmes tensions ou difficultés. En discutant ensemble,

on a une compréhension commune du problème et on travaille dans le même sens. Si tous

suivent le même protocole ou adoptent la même attitude, la conduite de chaque intervenant

facilite le travail de ses collègues. Cette cohérence contribue à diminuer le sentiment

d’impuissance devant un problème, qui semblait auparavant sans solution. De plus, le fait

d’obliger qu’il y ait un seul répondant de chaque côté – l’intervenant pivot pour l’équipe de

travail et un seul membre de la famille pour le résident – évite les demandes et les réponses

contradictoires, et contribue à apaiser les tensions et conflits. « Tout le monde a le même

discours. », précise un chef d’unité.

Enfin, travailler en équipe apporte une légitimité à la conduite et aux interventions. Ce sont

celles que tous les membres de l’équipe appliquent, elles sont approuvées par la direction et

26

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

même parfois le commissaire aux plaintes et à la qualité des services. L’intervenant doute moins

de ce qu’il fait, et redoute moins les plaintes des usagers ou le blâme de sa direction19.

3.5 Diminution de la charge de travail et des tensions

Les rencontres avec l’ÉS et l’application du protocole d’intervention auprès du résident qui a des

comportements difficiles ont aussi pour effet de diminuer la charge de travail des intervenants et

les tensions vécues au sein de l’équipe. C’est là sans doute l’un des objectifs les plus importants

de l’ÉS.

Les protocoles et leur application par l’ensemble des équipes contribuent en effet à réduire le

nombre d’interventions auprès du résident. On ne répond plus à toutes ses demandes, on ne se

rend plus à sa chambre chaque fois qu’il appelle. Tout en s’assurant que la personne est en

sécurité, on limite les réponses. Intervenir auprès d’elle est physiquement et émotivement moins

lourd : moins de déplacements des intervenants, moins de gestes physiquement difficiles

(manipulations, habillement, etc.), moins de stress et d’exaspération à répondre continuellement

à un appel. Les intervenants ne sont pas obligés non plus d’endurer l’agressivité, les blâmes et les

insultes; ils quittent la chambre en signifiant leur refus d’être ainsi traités. L’application du

protocole a du même coup pour effet de réduire la charge de travail de l’ensemble de l’équipe.

Un ou deux intervenants ne sont plus monopolisés par un seul résident, ce qui augmentait la

charge de leurs collègues auprès des autres résidents. Avec le protocole, la répartition du travail

et la collaboration au sein de l’équipe d’intervenants sont meilleures.

Le protocole trace les limites de l’intervention, précise ce que les intervenants sont tenus de faire,

la fréquence à laquelle ils doivent répondre aux demandes, les conditions (politesse, respect) que

19 L’importance du collectif de travail a été soulignée par de nombreuses études sur la santé mentale au travail. Avec l’autonomie décisionnelle et la reconnaissance du travail par l’employeur, le fait de former un collectif de travail est l’un des grands déterminants d’une bonne santé mentale au travail. Le soutien et le respect des collègues et de l’employeur, l’écoute et la communication, la responsabilisation de chacun et un leadership adéquat des gestionnaires réduisent le stress et les tensions (Bourbonnais et Gauthier, 2004).

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

le résident doit respecter lorsqu’il formule une demande ou reçoit un service. Il identifie les

services que le résident est en droit de recevoir et ceux que l’établissement ne peut lui offrir, et

parfois détermine même un horaire. En précisant ses obligations, l’établissement les limite du

même coup. Les comportements du résident vont changer, l’agressivité ou la frustration vont

diminuer.

Cependant, le protocole d’intervention ne change pas toujours la conduite du résident ou de ses

proches. Ils peuvent continuer à exiger sans cesse des services ou de l’attention, à sonner

constamment pour appeler un intervenant. Dans certains cas, on n’espère d’ailleurs pas beaucoup

de changements dans l’attitude de la personne en raison de son état de santé (ex. : démence; santé

mentale), de son histoire (rapports conflictuels depuis de nombreuses années) ou de la

dynamique qui s’est créée avec le personnel et qui dure depuis longtemps (la personne est

habituée à ce qu’on réponde à toutes ses demandes). Le problème s’est en quelque sorte

cristallisé. Dans certains cas le conflit a disparu seulement lorsque la personne est décédée… Le

protocole ne fait donc pas disparaître entièrement le problème, mais il en atténue les effets

négatifs sur les intervenants. Il permet de contenir le problème. Ceux-ci savent mieux comment

réagir et quelles limites faire respecter.

« Je pourrais vous dire qu’il y a toujours une bonne période où cela fonctionne bien et après cela le naturel revient au galop. Je ne pourrais pas dire que ça a été… efficace à 100 % … c’est une dame qui est continuellement, toujours en demande ». CU

3.6 Faire appliquer le protocole

Le protocole d’intervention est utile et aidant pourvu qu’il soit appliqué par tous les intervenants.

Son efficacité repose sur la cohérence au sein des équipes et entre les équipes de jour, de soir et

de nuit. Le respect du protocole pose cependant des difficultés et des défis.

L’application du protocole est parfois compromise par le roulement de personnel, fort important

en centre d’hébergement. Les congés, les vacances, le départ d’intervenants et leur remplacement

28

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

par de nouveaux occasionnent des changements continuels. Les nouveaux, embauchés sur une

base permanente ou temporaire, ne connaissent pas le protocole à leur arrivée. Ils n’ont pas non

plus participé aux rencontres avec l’ÉS, qui leur aurait permis de mieux en comprendre les

raisons et la nécessité. Le protocole leur est expliqué rapidement, sans qu’ils en comprennent

toujours les tenants et les aboutissants, ce qui ne facilite pas son respect complet et systématique.

Les nouveaux employés, qui n’ont pas connu la situation antérieure, peuvent trouver le protocole

très sévère, punitif ou infantilisant pour le résident, et ne pas être portés à l’appliquer

intégralement.

Les intervenants n’ont pas tous les mêmes difficultés avec le résident, certains ont moins de

difficultés, composent plus facilement avec lui (en raison notamment du clivage, ou parce que sa

conduite les heurte moins), et trouvent les mesures prévues dans le protocole excessives. Ils

seront alors portés à les appliquer moins rigoureusement. Sous prétexte qu’ils n’ont

personnellement pas de problème avec le résident, certains n’assistent pas aux réunions avec

l’ÉS ou ne s’impliquent pas dans les discussions. Un désaccord entre les intervenants devant le

résident contribue également à miner leur crédibilité et leur capacité de faire respecter le

protocole. Il semble y avoir aussi de la résistance au changement, certains n’aiment pas modifier

leurs habitudes de travail ou doutent de l’efficacité des mesures prises.

« Le protocole a été appliqué pendant 3-4 semaines, après il y a eu un relâchement soit parce qu’il y a eu des maladies, des vacances, du nouveau personnel. Et là les gens revenaient à leurs anciens patterns, ils achetaient la paix. » ES

« Ils [l’ÉS] ont fait ce qu’ils étaient capables de faire avec les moyens qu’ils ont eus et puis la collaboration qu’ils ont eu. » CU

Et puis, comme l’explique une infirmière, ce n’est pas facile de dire « non » au résident. Il est

plus facile de dire oui, on n’a pas besoin de discuter et d’argumenter avec le résident, alors que

lorsque l’on dit non, il faut se justifier, et c’est fatigant mentalement. Alors, on est porté à dire

oui. « Lorsque le personnel est fatigué, on a plus de difficulté à appliquer le protocole », note un

autre intervenant.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

Un certain relâchement chez les intervenants plus anciens compromet également l’application du

protocole. La situation s’est améliorée, les comportements difficiles du résident se sont atténués,

ça va mieux, et on sent moins le besoin d’appliquer le protocole. Au premier relâchement

toutefois, les difficultés parfois reprennent, le résident se met à exiger, à faire du clivage ou à être

désagréable. Dans certains cas, il a fallu faire de nombreux rappels et même afficher certains

passages du protocole dans la chambre du résident. L’intervention de l’ÉS, ne l’oublions pas, ne

fait pas toujours disparaître les comportements problématiques.

« Il y a bien des affaires qu’elle nous a conseillées et cela a bien fonctionné. Aujourd’hui, on le fait encore. Mais quand ça fait longtemps, on oublie […] sur le coup on le fait, mais on dirait qu’après …on relâche. » P

On a souligné l’importance de faire équipe et de la cohérence des interventions. L’application

non systématique et uniforme du protocole compromet ce travail en équipe et cette cohérence.

L’efficacité de l’intervention et du protocole pose ici plusieurs défis. D’abord l’enseignement

aux intervenants du protocole, des règles à appliquer et mais aussi de leurs justifications, afin

qu’ils en comprennent la nécessité. Il faut que le protocole fasse sens, qu’on en comprenne les

raisons pour le suivre scrupuleusement. Dans certaines situations, les équipes d’intervenants, les

préposés particulièrement, n’ont pas toutes été rencontrées par l’ÉS, ce qui n’a pas favorisé la

compréhension et l’adhésion au protocole. Ensuite, un rappel périodique du protocole et de la

nécessité de le respecter est nécessaire. Les intervenants pivots ont ici un rôle important à jouer.

Ils sont en quelque sorte la mémoire de l’équipe de soutien, une fois que celle-ci a terminé son

intervention et s’est retirée. Par les notes qu’elle inscrit au dossier, l’ÉS peut également prendre

connaissance des difficultés dans l’application du protocole et intervenir.

« Plus il y a d’intervenants d’impliqués, plus il y a d’acteurs, et plus c’est compliqué d’avoir la cohérence, que tout le monde aille dans la même direction. C’est déjà difficile quand on est juste une personne à l’appliquer, être cohérent avec soi-même, donc imaginez quand on a une trentaine de personnes qui interagissent. C’est de s’assurer que tout le monde va dans la même direction. D’autant plus qu’il y a souvent des remplaçants, qui ne sont pas très au courant de la problématique, de la mise en place du protocole. » ÉS

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

La question se pose ici de l’opportunité d’un suivi plus grand par l’équipe de soutien. Ne serait-il

pas opportun de réunir à intervalles réguliers ou sur demande, les équipes d’intervenants et

l’équipe de soutien pour faire le point sur la situation et son évolution, ainsi que sur les effets du

protocole d’intervention et son application? Cela permettrait également aux intervenants qui ont

des réserves à l’égard du protocole de les exprimer et d’en discuter, et au besoin de revoir le

protocole.

Il semble que les chefs d’unité et les intervenants ne soient pas tous informés de la possibilité

d’avoir ce suivi. Les intervenants devraient en être informés, et les chefs d’unité devraient

prendre l’initiative de les demander si des intervenants connaissent des difficultés ou

s’interrogent sur l’opportunité de certains aspects du protocole. Non seulement le protocole n’est

jamais définitif et peut être revu, mais comme le dit l’un des membres de l’équipe de soutien, il

ne remplace pas le jugement professionnel des intervenants, ni la nécessité de confronter leurs

points de vue. Une rencontre avec l’ÉS peut être l’occasion de réfléchir sur les pratiques dans

certaines situations particulières.

« Quand il y a un problème, la fille se sent déprimée et pas écoutée par ses supérieurs, qu’elle puisse au moins en discuter avec l’ÉS, ça diminuerait peut-être son agressivité. Quand tu vis ton agressivité toute seule, ce n’est pas évident. Alors moi je trouve que ça serait bon qu’on ait une équipe qui vienne régulièrement nous rencontrer. (…) Je ne crois pas qu’en venant 2 ou 3 fois dans la bâtisse, ça règle le problème. » P

3.7 Apprentissages des intervenants et prévention des problèmes

On se souvient que l’équipe de soutien a pour mandat de contribuer au développement

d’habiletés et de compétences chez les intervenants et les gestionnaires, et ce, de manière à réagir

aux problèmes de comportement. Les apprentissages qui sont faits lors de l’intervention de l’ÉS

devraient en principe aider les intervenants dans d’autres situations semblables à celles pour

laquelle se fait l’intervention. Ces apprentissages devraient permettre aux intervenants

d’anticiper les difficultés et de réagir d’une façon qui prévient les conflits et l’aggravation des

problèmes, par exemple en précisant bien l’offre de service, en ne permettant pas certains

31

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

comportements ou attitudes ou en évitant des réactions qui enveniment les conflits ou favorisent

les comportements problématiques.

Plusieurs intervenants et gestionnaires nous ont dit avoir tiré un enseignement de l’intervention

de l’ÉS qu’ils ont pu mettre en application dans d’autres situations : lors de l’accueil d’un

nouveau résident ou devant les comportements des proches d’un résident.

Cet enseignement et ce transfert des apprentissages à d’autres situations ont cependant des

limites. D’abord, l’application de ce savoir-faire et de ce savoir être ne peut se faire

individuellement. On a vu l’importance du travail en équipe et la nécessité de la concertation et

de la cohérence. Si tous les intervenants ne font pas le même apprentissage et ne l’applique pas

en même temps à la même situation, il sera peu utile. Ensuite, toutes les situations sont

singulières, aucun résident, ni aucun proche ne se comportent de la même façon et ne réagissent

de la même manière à la maladie, à l’hébergement ou à la conduite des intervenants. Il y a des

limites au transfert d’un protocole d’un cas à un autre. Il faut faire l’examen de la nouvelle

situation et trouver une manière adaptée d’intervenir. On ne peut simplement appliquer à une

nouvelle situation un élément tiré d’un protocole d’intervention conçu pour une autre situation.

Chaque situation exige une intervention particulière, ce qui demande souvent une nouvelle

intervention de l’ÉS. Si les apprentissages sont utiles, s’ils permettent d’anticiper ou de

minimiser les problèmes, ils ne dispensent d’une nouvelle intervention de l’ÉS.

Cette question des apprentissages nous conduit à la question de la prévention des problèmes et

des conflits. Jusqu’à présent l’ÉS a agit dans l’urgence. Elle est intervenue pour des situations où

les relations entre le résident, ses proches et les intervenants s’étaient détériorées (conflits,

plaintes, fortes tensions) et où les intervenants et les chefs d’unité étaient souvent à bout, parfois

découragés, épuisés, en souffrance. Est-il possible d’agir davantage en amont, avant que les

conflits s’enveniment, que les relations deviennent pénibles et que les intervenants s’épuisent?

Les équipes ne pourraient-elles pas faire appel à l’ÉS lorsqu’elles pressentent des difficultés ou

que des comportements perturbateurs commencent à se manifester? Il faudrait que l’ÉS en

examine la possibilité. Cela implique non seulement une disponibilité plus grande de l’équipe,

32

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

mais possiblement des interventions différentes (ex. : une forme de médiation). Il faudra veiller

également à ne pas cataloguer trop rapidement des résidents et leurs proches comme

« problématiques » ou « conflictuels », et ainsi les stigmatiser. L’ÉS ne doit pas devenir un

instrument pour contrôler les comportements, mais une aide pour améliorer les rapports entre les

résidents et les intervenants.

Si l’équipe de soutien veut adopter une approche plus préventive, il faudra le préciser dans son

mandat, lui donner les moyens de le faire (disponibilité de l’équipe) et informer les chefs d’unité

que ses interventions ne se limitent pas aux situations graves et urgentes, mais portent sur toute

situation que les équipes ne parviennent pas à résoudre par elles-mêmes ou dont elles redoutent

une détérioration.

3.8 Appréciations générales

« C’est important, il faut faire appel à d’autres compétences. On ne sait pas tout […] on fait notre première démarche, au niveau du plan de soins avec le médecin et le pharmacien, on fait tout cela, mais quand ça devient des problématiques surtout de comportements et d’attitudes, des fois c’est plus dur, on a tous encore besoin de l’aide de cette équipe-là. » CU

« Ça monsieur, ça a été une grâce totale, moi j’ai trouvé que l’ÉS, avec le chef d’unité, ils ont fait un progrès extraordinaire! Le contrat qui s’est fait avec cette dame nous a soulagés énormément. Je sais qu’il y avait des rencontres avec le couple et le chef d’unité, nous on avait toujours des beaux résumés de ces rencontres. […] J’espère que ça va rester comme ça! » P

« C’est formidable. C’est excellent. Ça nous aide beaucoup. Même moi, j’étais découragé. » INF

« Ça a été un souffle extraordinaire, mon Dieu quel bonheur, quand j’ai vu arriver ça je me suis sentie comme si j’avais un poids de moins, un énorme poids parce que je le savais que l’ÉS ferait les liens avec l’équipe là où moi je n’étais pas capable de faire c'est-à-dire avec l’équipe de soir, de nuit, de jour aussi en appui avec ce que je disais ». CU

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

Dans la plupart des situations où l’ÉS est intervenue, les problèmes se sont sensiblement atténués

et les difficultés des intervenants ont diminué. Ces derniers savent qu’on a pris des moyens pour

les aider, qu’ils ne sont pas seuls face au problème, et que les mesures ont une efficacité certaine

(mais non absolue). Ils parlent davantage des situations problématiques et de leurs propres

difficultés, ils communiquent mieux avec les résidents et les familles, et ils hésitent moins à fixer

leurs limites. Si l’intervention de l’ÉS ne fait pas toujours disparaître les problèmes de

comportement, le protocole change cependant la manière avec laquelle on intervient. Il prévient

la désorganisation des services, l’exposition du personnel aux plaintes et demandes continuelles,

ainsi qu‘au dénigrement et aux blâmes. Il prévient ou réduit l’épuisement physique et

psychologique. Sans l’équipe de soutien, « j’aurais perdu toutes mes compagnes de travail »,

nous dira une infirmière. La très grande majorité des intervenants et des gestionnaires rencontrés

ferait de nouveau appel à l’ÉS si une difficulté se présentait.

L’intervention est efficace dans la mesure où elle ne se situe pas au plan individuel (aider les

individus à composer avec le stress et à s’adapter aux situations), mais touche à l’organisation

générale du travail, mobilise les équipes dans leur ensemble et engage la responsabilité de la

direction. Les approches centrées sur l’organisation du travail et la réduction des contraintes

pesant sur les travailleurs ont généralement plus de succès sur les problèmes de santé mentale au

travail, que les mesures individuelles, particulièrement les approches qui ont le soutien de la

haute direction et dans lesquelles les travailleurs participent à la discussion sur les problèmes et à

l’élaboration des solutions (Vézina et al., 2006).

34

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

4. POUVOIR INTERVENIR

Durant les premiers mois, une quinzaine de dossiers ont été traités simultanément, ce qui

nécessita de nombreuses rencontres. L’ÉS fonctionnait à temps plein. Par la suite le nombre de

dossiers a progressivement diminué, ainsi que l’implication des membres de l’ÉS. À l’hiver

2009, l’ÉS fonctionnait à un autre rythme : un de ses membres y consacrait une journée par

semaine et l’autre, à peine une journée par mois. Le troisième objectif de notre étude consistait à

vérifier si l’équipe de soutien disposait – et dispose encore – des moyens nécessaires pour mener

à bien son intervention : mandat clair, collaboration des gestionnaires et des intervenants,

compétences, disponibilité. C’est ce que nous allons examiner dans cette dernière partie.

4.1 Mandat

L’équipe de soutien a commencé ses interventions en ayant un mandat défini de manière assez

large. Il n’était défini avec précision dans aucun document, et il s’est progressivement clarifié.

Cela n’a pas empêché l’équipe d’agir, et avec un succès certain, on l’a vu. Mais tout comme le

suivi, certains aspects du mandat de l’ÉS doivent encore être clarifiés pour agir efficacement.

L’intervention de l’ÉS porte sur des situations où les rapports entre le résident, ses proches et les

intervenants sont conflictuels, dans lesquels les problèmes de comportements du résident

(demandes répétées, agressivité, conduites désagréables ou dangereuses pour soi ou les autres)

désorganisent le travail, mettent le personnel sous pression et dégénèrent en conflit. L’ÉS

intervient lorsque les équipes de travail sont dans l’impasse, ne parvenant pas à trouver de

solution aux problèmes qu’elles rencontrent.

Or, l’équipe est intervenue, durant la première année de son fonctionnement, dans des situations

qui ne mettaient pas directement en cause les rapports entre un résident et les intervenants, au

point de rendre le travail difficile et de perturber l’organisation des soins. La première situation

était un conflit persistant entre l’équipe de jour et l’équipe de soir, au sein d’une même unité. Les

deux équipes ne parvenaient pas semble-t-il à collaborer de manière efficace et se reprochaient

35

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

mutuellement leur mode de fonctionnement, notamment dans l’utilisation de la cuisine. L’équipe

de soutien a été appelée pour aider le gestionnaire à résoudre le conflit. La seconde situation

touchait la vie personnelle du conjoint d’une résidente, qui avait une liaison, et on craignait que

cette liaison affecte sa femme si elle l’apprenait. On s’inquiétait ici des perturbations que la

conduite du mari pouvait avoir sur sa femme, mais on se sentait inconfortable d’intervenir,

estimant qu’on outrepassait son rôle. Devait-on se mêler de cette histoire? La situation à été

soumise à l’attention de l’ÉS et au comité d’éthique clinique.

On peut se demander s’il était du mandat de l’ÉS d’intervenir dans ces deux situations. Il ne

s’agissait pas de conflit entre un résident, ses proches et les intervenants. Dans le premier cas, il

s’agit plutôt d’un conflit entre des intervenants, qui doit être en principe résolu par la direction de

l’établissement; les gestionnaires peuvent avoir besoin d’aide pour résoudre ce type de conflit

lorsqu’ils perdurent, mais on peut se demander si l’ÉS est l’instance la mieux placée pour le

faire. Dans le second cas, le problème touchait la limite de l’intervention : jusqu’où le personnel

d’un centre d’hébergement doit-il intervenir dans la vie privée d’une personne? Dans un milieu

de vie, comme l’est un centre, où l’ensemble de la vie du résident est pris en charge selon des

modalités relativement réglées, la question n’est pas simple. Mais la question relevait peut-être

davantage du comité d’éthique clinique – où elle fut finalement soumise – que de l’ÉS. Le chef

d’unité faisait d’ailleurs une évaluation mitigée de l’intervention de l’ÉS dans ces deux

situations.

Toutefois, les interventions de l’ÉS n’ont pas été entièrement inutiles. Dans le premier cas, il

semble qu’elle ait contribué à diminuer les tensions et à améliorer la collaboration entre les

équipes de travail. Dans le second cas, l’ÉS a contribué à fixer une limite dans l’intervention et à

soulager les intervenants. Elle a également contribué à préparer le dossier soumis au comité

d’éthique clinique.

Ces deux interventions invitent à réfléchir sur le mandat de l’ÉS et à le préciser, afin de mieux

filtrer ou sélectionner les demandes, et au besoin de référer les équipes vers des instances plus

appropriées. La question est d’autant plus importante, que la disponibilité de l’ÉS est limitée, et

36

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

qu’elle doit investir ses énergies et ses compétences là où elles seront les plus utiles. Dans

certaines autres situations où l’équipe est intervenue, une meilleure connaissance de l’offre de

service de l’établissement et de ce que le résident et ses proches sont en droit d’attendre a suffi à

régler un différend touchant des demandes jugées excessives. L’intervention de l’ÉS était-elle, là

encore, opportune?

L’équipe de soutien doit continuer de travailler en liaison plus étroite avec d’autres instances

comme le bureau du commissaire local aux plaintes et à la qualité des services ou avec le comité

d’éthique clinique20. Il n’est pas non plus nécessaire que l’ÉS intervienne toujours de la même

façon ou que cette intervention conduise à l’implantation d’un protocole d’intervention

spécifique. Elle peut moduler ses interventions selon les situations. Parfois les gestionnaires

craignent de prendre certaines décisions ou les intervenants d’agir d’une certaine façon; ils ne

sont pas sûrs de ce qu’ils ont le droit de faire ou de ce qui est préférable de faire; ils ont

uniquement besoin d’en discuter et d’avoir un avis.

4.2 Accueil et collaboration

Chez les chefs d’unité et les intervenants que nous avons rencontrés, l’ouverture à l’égard de

l’équipe de soutien est très grande. On juge de manière positive ses interventions passées, et on

est tout à fait disposé à travailler avec elle à l’avenir, pour résoudre de nouveaux problèmes ou

pour faire le suivi pour les situations déjà traitées. Il ne semble pas que les gestionnaires se

sentent obligés de recourir à l’ÉS du fait que ce soit une initiative de la direction générale et

qu’un cadre supérieur soit étroitement associé à l’équipe. Comme on l’a vu, l’intervention de

l’ÉS fut pour plusieurs un soulagement et a suscité beaucoup d’espoirs. En outre, une certaine

20 Dans l’un des centres où nous a conduits notre recherche, il semble que la conseillère en milieu de vie exerce en partie le rôle dévolu à l’ÉS. En plus de s’occuper de l’accueil et de l’intégration du résident à son arrivée pour l’aider à s’installer, elle est identifiée comme la personne-ressource s’il y a des problèmes sur l’étage avec les résidents ou son intégration. C’est elle qui présente le résident à la réunion interdisciplinaire, son histoire de vie, ses habitudes, les précautions à prendre, ce que la personne a vécu dans sa vie. C’est elle également qui désamorce les conflits s’il en survient. Son travail peut contribuer, sinon à résoudre les conflits importants, du moins à en prévenir plusieurs.

37

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

latitude était laissée aux chefs d’unité et les interventions variaient en fonction de leurs

approches et méthodes de travail.

La collaboration est également très bonne. Les équipes semblent bien accepter le processus et la

démarche. Nous n’avons eu l’écho d’aucune résistance ou d’aucuns mécontentements touchant la

manière dont l’ÉS intervient. Il importe chaque fois cependant de créer un climat de confiance

entre l’ÉS et les intervenants. Cette confiance s’obtient par l’écoute des intervenants, le caractère

professionnel des analyses et des propositions de l’ÉS et les explications et justifications qu’elle

donne touchant le protocole. Avec l’expérience et l’expertise développée au cours de la première

année, les membres de l’ÉS ont su gagner la confiance des équipes et asseoir leur crédibilité,

laquelle n’était pas d’emblée acquise. Des changements dans l’équipe obligeraient à rebâtir en

partie cette confiance et cette expertise.

Malgré cette ouverture et cette collaboration, l’ÉS se heurte à une difficulté permanente lorsqu’il

s’agit de réunir les équipes pour discuter de la situation problématique ou de présenter le

protocole d’intervention spécifique. Il est difficile de réunir les équipes au complet. Il ya toujours

des absents, d’autres qui quittent au milieu de la rencontre pour répondre à un appel. Cela rend

les rencontres parfois difficiles et ne facilite pas l’appropriation et l’application du protocole.

Libérer le personnel pour participer aux rencontres est nécessaire au succès de l’intervention.

De plus, les changements fréquents dans le personnel cadre (les chefs d’unité ou les

coordonnateurs) ont nui dans quelques cas à l’intervention de l’ÉS. Le départ du gestionnaire a

retardé l’implantation du protocole ou compromis le suivi. Son remplaçant n’est pas toujours très

au fait du dossier. Nous ne savons pas si des initiatives comme l’ÉS peuvent contribuer à

diminuer le roulement de personnel – cadres ou intervenants. Les difficultés liées au roulement

de personnel peuvent cependant être atténuées par une meilleure transmission de l’information et

un suivi plus systématique de l’ÉS.

38

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

4.3 Compétences de l’équipe de soutien

Touchant plus spécifiquement la compétence des membres de l’ÉS, plusieurs intervenants ont

souligné le fait que les compétences d’une travailleuse sociale et d’un psychologue étaient très

utiles, car elles leur permettaient une meilleure compréhension des problèmes vécus. Ce sont des

compétences qui sont rares en hébergement et elles sont très précieuses. Autant les intervenants

que les chefs d’unité ont souligné l’importance de mieux comprendre les dynamiques psycho-

sociales.

« Ils sont très professionnels la TS et le psy sont très professionnels et très positifs pour l’organisation. Je n’ai pas un mot à redire au niveau de leur intervention, de leur professionnalisme et de leur expérience et tout ça. Je pense que c’est des gens qui peuvent apporter beaucoup à l’équipe. » CU

« Je trouve que c’est numéro un au point de vue échanges et soutien […] C’est la première fois que je vois une travailleuse sociale s’impliquer, ça nous aide. » INF

Les intervenants et les gestionnaires rencontrés ont également beaucoup apprécié la possibilité

d’avoir un avis juridique ou légal de la part l’ÉS touchant les mesures envisagées. Bien que les

membres de l’ÉS ne soient pas spécialisés en droit ou en éthique, ils ont pu apporter des éléments

d’informations, parfois après s’être eux-mêmes documenté ou avoir demandé un avis. Il faut

comprendre ici que les intervenants et les chefs d’unité se retrouvent parfois devant un dilemme

moral ou un problème légal : ils ne savent pas s’ils ont le droit de refuser à un résident les

services qu’il demande, si leur éthique professionnelle ne les oblige pas à les donner, ou si ces

services sont requis pour donner des soins de qualité. Ils craignent, on l’a vu, les poursuites ou

les plaintes dont les menacent parfois certains proches; ils ne savent pas si la direction de

l’établissement les appuie dans leur décision ou peut les blâmer pour leurs actions. L’ÉS donne

le droit aux intervenants d’agir autrement.

Aussi il est nécessaire que l’ÉS ait accès à certaines informations, qu’elle ait les moyens et le

temps de faire des recherches (ex. : les conventions collectives et les conditions de travail des

employés) ou de les faire faire (ex. : demander un avis juridique, consulter un éthicien ou la

39

Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

corporation professionnelle). L’ÉS a elle-même besoin de soutien dans ses recherches et sa

propre formation touchant ces questions. Le droit est complexe, les textes nombreux et sujets à

interprétation, quant ils ne sont pas contradictoires. La question des coûts de ces consultations et

avis n’est certes pas négligeable, et l’ÉS pourrait continuer à tirer profit des compétences au sein

de l’établissement, en consultant au besoin la commissaire aux plaintes ou le comité d’éthique

clinique. Sur la question des droits de la personne, l’équipe a d’ailleurs suivi une formation de

l’AQESSS au tout début de ses activités.

L’ÉS doit également pouvoir bénéficier de certaines formations cliniques, touchant par exemple

les troubles de comportements, la démence ou les modes d’intervention. Durant sa première

année de fonctionnement, la travailleuse sociale de l’équipe a suivi une formation d’une journée

sur les troubles de personnalité limite (TPL). De son côté, le psychologue membre de l’équipe a

consulté son superviseur ayant de l’expérience en neuropsychologie clinique aux personnes

âgées en perte d’autonomie. Une infirmière en psychiatrie fut également consultée par l’ÉS.

Internet, les lectures et les collègues demeurent des sources utiles.

Il n’est pas non plus interdit d’imaginer que l’ÉS dispense elle-même de la formation au

personnel du CSSS-QN (voire dans d’autres établissements). Une expérience fut d’ailleurs

tentée. Le psychologue membre de l’équipe a organisé avec un collègue une formation en deux

blocs de 45 minutes sur les troubles de personnalité. Bien qu’elle semble avoir été très appréciée,

elle ne fut donnée que dans une seule unité, les chefs des autres unités ne trouvant pas les

moyens pour libérer leur personnel afin de recevoir la formation. Pareille formation exige un

certain investissement (de la recherche et de la préparation de la part de l’ÉS, une disponibilité

des intervenants) et donc un appui de l’établissement, mais elle peut s’avérer bénéfique à moyen

terme, en contribuant à améliorer les soins, à renforcer la confiance des intervenants et leur

appartenance à l’établissement, et à prévenir des problèmes.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

4.4 Disponibilité et suivi

L’équipe était disponible dans la première année de son fonctionnement pour s’attaquer aux

situations les plus graves et les plus urgentes. Depuis, la disponibilité de l’équipe a été réduite, ce

qui n’est pas sans créer une incertitude quant à sa disponibilité ou laisser planer un doute quant à

son avenir. Certains gestionnaires pensent qu’elle est débordée et hésitent à faire appel à ses

services; d’autres croient qu’elle a même cessé ses activités. Toutes les personnes rencontrées

s’inquiètent de son avenir, redoutent qu’elle disparaisse et espèrent qu’elle demeura en activité.

Pour quelques-uns, c’est encore une initiative de plus qui meurt peu de temps après avoir

débutée. La situation devra être rapidement clarifiée, et la visibilité de l’équipe accrue.

« Moi je vois la différence entre avant quand l’ÉS était très présente et maintenant où on a une équipe de soutien qui est restreinte avec des disponibilités restreintes. Les besoins sont là mais je n’aurai pas cette réponse là, va falloir que je me contente de leur disponibilité actuelle ». CU

« Tu as beau leur dire c’est quoi le problème, mais s’ils ne le voient pas… Ils ne sont pas assez dans la bâtisse. S’ils se promenaient sur les étages, ce serait plus facile, ils auraient plus de contacts et ils pourraient discuter avec le personnel. » P

« Je pense que si on veut que les gens nous fassent confiance, il faut qu’ils nous voient. Il faudrait être présents sur les unités, pouvoir faire le tour, aller dans les autres établissements plus souvent. Mais ça prend du temps. » ES

Le suivi des interventions par l’ÉS, après l’implantation du protocole d’intervention spécifique,

est un autre point à clarifier, et possiblement à améliorer. Faute de temps, la lecture des notes

évolutives au dossier du résident n’est plus toujours faite. La possibilité de rencontrer le chef

d’unité ou l’intervenant pivot est limitée et n’est d’ailleurs pas systématiquement offerte. Le

suivi se fait parfois de manière informelle, lors d’une rencontre dans le corridor, qui donne lieu à

un échange d’information ou quelques conseils. Or, un suivi plus systématique est nécessaire

afin de mieux asseoir l’intervention, d’assurer une meilleure continuité et cohérence dans

l’application du protocole, de faire un retour critique sur l’intervention avec les équipes et de

revoir au besoin le protocole. Ce suivi peut d’ailleurs varier d’une situation à l’autre, toutes ne

nécessitant pas la même intervention, mais il est important de faire un minimum de suivi et que

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

soit offerte aux équipes la possibilité de les rencontrer davantage. Cela permettrait en outre de

sécuriser le personnel (chefs d’unité et intervenants). Il faut donc préciser et publiciser les

disponibilités de l’équipe de soutien en matière de suivi, et lui donner les moyens de le faire.

Dans certains cas, le suivi ne s’est pas fait en raison du décès du résident avec lequel les

intervenants éprouvaient d’importantes difficultés ; la disparition de la personne signe la fin du

protocole et de l’intervention de l’ÉS. Il aurait cependant été pertinent de faire un bilan avec les

employés sur cette intervention, afin d’améliorer le travail de l’ÉS et de renforcer les habiletés et

la réflexion des intervenants.

On l’a vu à propos de l’application du protocole, l’intervention ne peut se faire rapidement. L’ÉS

doit prendre le temps de rencontrer toutes les équipes pour bien comprendre la situation, de les

rencontrer à nouveau par la suite pour bien expliquer le protocole, et de faire un suivi. On ne peut

se contenter de rencontrer les gestionnaires ou encore de transmettre le protocole par écrit. Ça

demande une grande disponibilité du personnel, comme de l’ÉS. Et si on va trop vite,

l’intervention donne peu de résultats, l’intervenant n’ose pas appliquer le protocole ou ne croit

pas à son efficacité :

« Ce n’est pas la faute de l’ÉS, c’est juste qu’on les a fait venir en catastrophe puis on leur a dit de présenter le général parce qu’on ne peut pas aller en profondeur parce qu’on manque de temps, ce qui fait que ça s’est terminé comme cela ». CU

4.5 Entendre les résidents et leurs proches?

L’équipe de soutien ne rencontre pas le résident ou ses proches pour faire son évaluation et son

intervention21. Bien qu’elle fasse une lecture du dossier du résident et qu’elle tienne compte de

21 À part quelques tentatives au début, qui ne se sont pas révélées concluantes, en raison notamment des résistances du résident à rencontrer et à discuter avec l’un des membres de l’ÉS. Les résidents et leur famille ne connaissent généralement pas l’existence de l’équipe de soutien.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

son histoire (par le biais notamment de l’outil d’évaluation multiclientèle), son analyse du

problème et la construction du protocole d’intervention reposent principalement sur les

témoignages des intervenants et des gestionnaires. Est-ce une lacune? Leur analyse serait-elle

plus complète et le protocole plus adapté s’ils prenaient en compte la vision du résident et de ses

proches? L’ÉS n’en est pas certaine. Ses membres se perçoivent comme des consultants, qui

donnent un avis ou un conseil de collègue à collègue, et non comme un médiateur ou un arbitre,

comme l’est parfois le commissaire aux plaintes et à la qualité des services. Les relations avec le

résident sont l’affaire des intervenants, et l’ÉS n’a pas voulu s’y substituer.

Évaluer les résidents ou recueillir leur point de vue (ce n’est pas la même chose) modifierait

certainement leur travail, en plus d’allonger l’intervention. Rencontrer les résidents et ses

proches permettrait cependant à l’ÉS de mieux connaître le résident, ses besoins, ses

préoccupations, son histoire, et les raisons de ses demandes ou insatisfactions. Les habitudes,

modes de vie et aspirations des personnes ne sont pas toujours compatibles avec le

fonctionnement du centre d’hébergement et les exigences des soins qui y sont donnés (en matière

d’hygiène, notamment). À considérer celles-ci uniquement comme les manifestations d’un

problème de nature psychosociale, on peut oublier qu’elles peuvent aussi avoir des raisons et une

certaine légitimité.

En outre, on peut se demander si le point de vue des résidents et des familles peut être

entièrement écarté, dans la mesure où les interventions de l’ÉS contribuent à définir de nouvelles

normes en hébergement. En effet, les protocoles d’intervention spécifique introduisent de

nouvelles règles, prescrivent ou proscrivent certaines conduites ou attitudes de la part des

intervenants, qui risquent d’avoir des conséquences, non seulement sur les résidents aux

comportements problématiques, mais sur l’ensemble des résidents. Au moment où l’on cherche à

faire des centres d’hébergement des « milieux de vie », où on révise les manières de faire, de

donner les soins et de cohabiter, l’ÉS introduit ou renforce certaines règles et normes de

conduites. Si l’absence de règles favorise les conflits et les différends, si un certain encadrement

est nécessaire, celui-ci ne peut se faire de manière unilatérale. Il y a un risque d’une forte

normalisation des conduites.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

Dans le fonctionnement actuel de l’ÉS, le point de vue des intervenants domine entièrement la

lecture des situations et le choix des modes d’intervention. Nous ne savons pas s’il faut apporter

un changement, et si oui lequel, mais nous croyons que la question doit être posée.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

CONCLUSION

Dans l’ensemble, le bilan que l’on peut faire de l’équipe de soutien est très positif. Les

gestionnaires et les intervenants, outre les réserves signalées, se sont tous dits très satisfaits et ils

espèrent tous que l’équipe va demeurer en fonction. L’ÉS apporte non seulement des solutions

concrètes aux problèmes (le protocole d’intervention spécifique, principalement), mais elle

permet aux gestionnaires et aux intervenants d’exprimer leurs émotions, de faire entendre leurs

doutes, leurs difficultés et les dilemmes auxquels ils sont confrontés dans leur travail. Si

l’intervention de l’ÉS ne résout jamais entièrement les problèmes, ni ne fait disparaître tous les

comportements perturbateurs, elle permet toutefois d’en limiter les impacts négatifs sur les

employés (désorganisation du travail, épuisement physique et mental, estime de soi,

individualisation des problèmes). Elle peut également contribuer à redonner un sens au travail

dans un contexte qui ne le favorise pas toujours : alourdissement de la clientèle, réorganisation

des équipes, augmentation des demandes, de la charge de travail et des contraintes, sans toujours

un soutien et une reconnaissance plus grande.

Gestionnaires et intervenants ont clairement besoin de conseils, mais aussi de se sentir écoutés et

appuyés, par une équipe compétente, ouverte et disponible. La disponibilité réduite de l’ÉS

inquiète déjà ; sa disparition décevrait beaucoup.

Après une année de fonctionnement, les demandes adressées à l’ÉS ont diminué. Est-ce parce

qu’il y a moins de problèmes, et que les plus importants ont été résolus? Ou est-ce parce que l’on

sait que l’ÉS est moins disponible et qu’on n’ose pas solliciter ses services? La situation globale

semble s’être améliorée, mais on a vu que l’accessibilité de l’ÉS pose un peu de problème. Les

besoins de soutien de la part des équipes en hébergement sont encore bien réels, si on se fie à

l’appréciation qu’en font les membres de l’équipe de soutien, et aux besoins exprimés par les

gestionnaires et intervenants interrogés. Une enquête, semblable à celle réalisée à l’automne

2007 serait sans doute nécessaire, afin d’évaluer le nombre de cas nouveaux ou non encore

traités, ainsi que les suivis à faire.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

L’équipe de soutien est une pratique innovatrice, une expérience qui demande à être poursuivie,

mais aussi à être améliorée. Plusieurs changements peuvent être apportés en ce sens :

• Accroître le nombre d’heures que les membres de l’équipe y consacrent, afin de répondre

aux besoins;

• Préciser le mandat de l’ÉS, le type de problème sur lequel elle intervient et sa

disponibilité pour un suivi;

• Mieux faire connaître le mandat et la disponibilité de l’ÉS auprès des gestionnaires;

• Stabiliser le personnel de l’équipe, afin de ne pas perdre l’expérience, les compétences et

la crédibilité acquises, et de pouvoir répondre aux demandes;

• Accorder aux membres de l’ÉS le temps nécessaire pour répondre aux demandes et

surtout faire davantage le suivi de ses interventions, afin de s’assurer de la

compréhension du protocole par tous les intervenants concernés, de favoriser leur

application ou leur révision au besoin, de permettre aux intervenants de s’exprimer et de

faire valoir leurs doutes et leurs idées, ainsi que de faire un bilan de l’intervention;

• Développer des approches préventives, afin de ne pas rester dans une attitude uniquement

réactive et de ne pas laisser les situations se détériorer;

• Donner les moyens à l’équipe de soutien de se former et de s’informer, de faires des

recherches au besoin et de pouvoir solliciter des avis compétents (sur des aspects

cliniques, éthiques et juridiques).

Par ailleurs, si nous recommandons la poursuite des activités de l’ÉS, il serait opportun qu’un

bilan de ses actions soit également fait chaque année afin de réajuster le tir ou d’apporter les

changements requis; un bilan auquel des chefs d’unité et des intervenants pourraient participer. À

certaines questions, nous n’avons pas non plus de réponse. L’ÉS doit-elle intervenir dans les

conflits entre les intervenants? Doit-elle entendre les résidents et leur famille? Ces questions,

croyons-nous, doivent être soulevées et discutées. Il revient à l’ÉS et la direction de

l’établissement d’y réfléchir.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

Enfin, nous aimerions en terminant revenir sur deux questions, qui dépassent largement le travail

de l’équipe de soutien, mais que celle-ci contribue à faire émerger. La première touche aux

responsabilités et dilemmes moraux des intervenants, dont nous avons discuté plus haut (section

3.3) pour lesquels il n’y a pas de solution technique, mais qui mettent en cause le sens même de

leur travail, la finalité des soins et la mission d’un centre d’hébergement. Elles exigent une

réflexion à laquelle les intervenants doivent participer. La seconde question concerne les attentes

à l’endroit des résidents. Une intervention comme celle de l’ÉS contribue à définir des attentes et

des normes de conduites en hébergement, au moment même où l’on s’interroge sur la manière

d’en faire des milieux de vie. On parle beaucoup dans les médias des résidents et des soins qu’ils

reçoivent, mais très peu des travailleurs, de leurs conditions de travail parfois difficiles et de

leurs responsabilités. À l’inverse, on ne peut non plus se limiter à considérer les problèmes du

point de vue du travail, où tout ce qui fait obstacle à l’organisation est pathologie et dysfonction

chez le résident. Entre la préoccupation pour le bien-être et l’autonomie des résidents et un souci

à l’endroit des travailleurs, la voie n’est pas toujours facile à trouver. L’équilibre entre milieu de

travail et milieu de vie est encore à trouver.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

Bourbonnais, R. et N. Gauthier (2005). « Optimisation de l’environnement psychosocial et organisationnel du travail du personnel soignant », Coup s’œil sur la recherche et l’évaluation, no 33, Ministère de la Santé et des Services sociaux, direction générale adjointe de l’évaluation, de la recherche et des affaires extérieures.

Bourbonnais, R., C. Brisson, A. Vinet, M. Vézina et A. Lower (2006). « Development and Implementation of a Participative Intervention to Improve the Psychosocial Work Environment and Mental Health in an Acute Care Hospital », Occup. Environ. Med., vol. 63, p. 326-334.

Bowers, B. J. (1988). «Family Perceptions of Care in a Nursing Home», The Gerontologist, vol. 28, no 3, p. 361-368.

Direction de la qualité des services et des soins infirmiers (DQSSI) (2007). « Guide de prévention lors de situations à risque de conflits impliquant la clientèle », Centre de santé et services sociaux de Québec-Nord, septembre.

Ducharme, F. (2006). « Familles et soins aux personnes âgées. Enjeux, défis, stratégies », Montréal, Éditions Beauchemin.

Keefe, J. et Fancey, P. (2000). « The Care Continues : Responsability for Elderly relatives Before ans After Admission to a Long Terme Care Facility », Family Relations, vol. 49, p. 235-244.

Vézina, A. et D. Pelletier, avec la collaboration de P. Durand et S. Lauzon (2001). « Du domicile au centre d’hébergement et de soins de longue durée », Québec, Centre de recherche sur les services communautaires, Université Laval.

Vézina, M., R. Bourbonnais, C. Brisson et L. Trudel (2006). « Définir les risques. Sur la prévention des problèmes de santé mentale », Actes de la recherche en sciences sociales, no 163, p. 32-38.

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

ANNEXES

Schéma d’entrevue avec équipe de soutien 1) Les problèmes à l’origine de l’équipe

Nature des problèmes, des conflits, qui sont impliqués? Qui a identifié les problèmes? Inspections et visites du ministère ont-elles joué un rôle? Des plaintes des familles? des dénonciations publiques?

2) Qui a eu l’idée de l’équipe?

Déroulement des démarches pour former l’équipe Est-ce que vous aviez un modèle? Inspiration d’une autre équipe à l’interne ou à

l’externe; si oui, nous décrire brièvement ce modèle et identifier une source documentaire.

Qui a défini son mandat? Les personnes et leur statut dans le CSSS. Réponse de la Direction générale

3) La constitution de l’équipe

Le choix des membres : leur formation, l’intérêt et l’expérience des individus, est-ce Leur unique mandat au CSSS?

La durée de vie de l’équipe. Mandat limité dans le temps? L’équipe relève de qui? Autorité et reddition de compte

4) Fonctionnement de l’équipe

Son mandat. Commenter chacun des points du mandat écrit Horaire type d’une semaine : les rencontres de l’équipe, les interventions, etc. D’où viennent les problèmes à résoudre? Comment la demande d’intervention est

acheminée Qui peut faire une demande à l’équipe de soutien? Quelle est la procédure? Comment le personnel (cadres et intervenants) a-t-il été informé de l’existence de

l’équipe? Publicité, lettre, rencontres du personnel cadre, etc. Est-ce que les résidents et les familles sont informés de l’intervention? Qui sont informés de l’intervention de l’équipe de soutien auprès d’une équipe?

Uniquement l’équipe? L’ensemble du centre d’hébergement? La Direction générale? 5) Description d’une intervention

Une ou plusieurs rencontres? Qui participe aux rencontres? Les objectifs des rencontres? Déroulement des rencontres

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

La rédaction du plan d’intervention. Qui l’écrit? Qui l’approuve? L’équipe de soutient?

Le suivi par l’équipe de soutien 6) Évaluation du fonctionnement de l’équipe

Formation des membres de l’équipe. Adéquate? Lacunes? Moyens mis à leur disposition : temps, ressources, dégagement, mandat clair Changements apportés en cours de route, depuis la création :

− Composition de l’équipe − Mandat − Déroulement des rencontres

7) Rapports avec les intervenants

Est-ce que les équipes ou les cadres sont obligés de recevoir le soutien? La collaboration des cadres et intervenants lors des rencontres? Différences entre les sites d’hébergement? Entre les équipes?

− Ouverture, disponibilité. Plus ou moins de collaboration ou résistance − Déroulement des rencontres − Résultats obtenus

8) Appréciation des résultats des interventions

Comment les intervenants vivent les interventions? Le personnel se sent-il soutenu, aidé? Distinguer les cadres et les intervenants

Réactions et appréciations des résidents et des familles? 9) Facteurs qui facilitent le succès d’une intervention

Au plan de l’organisation de l’équipe de soutien Au plan des équipes d’intervenants : attitude, leur fonctionnement, leur ouverture Au plan des liens avec la Direction générale

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Évaluation de l’équipe de soutien en hébergement du Centre de santé et de services sociaux de Québec-Nord

Schéma d’entrevue avec personnel cadre et le personnel soignant 1) Décrire brièvement, l’histoire des problèmes ou conflits qui ont conduit à l’intervention du

groupe de soutien (la première intervention, s’il y en a eu plusieurs) Les impacts des problèmes ou conflits sur le personnel, l’organisation du travail, les

relations avec le résident et les co-résidents 2) L’histoire de l’intervention (la première)

Qui a eu l’idée de faire appel à l’équipe la première fois? D’où vient l’initiative? Déroulement de l’intervention, les étapes, les actions faites Plusieurs rencontres pour un même cas? Un suivi après la rencontre? Étiez-vous présente lors des rencontres? Quels ont été les effets de l’intervention? Résolution du conflit? Apaisement des

tensions? Ou persistance du problème? Résolution à la satisfaction de tous ou d’une partie seulement des acteurs?

Est-ce que ça amené un changement dans vos pratiques? Un changement dans l’ensemble de l’établissement (au-delà du cas particulier et au-delà de l’équipe concernée?)

Qu’est-ce que l’intervention vous a appris? vous a permis de comprendre? Quels outils elle vous a permis d’acquérir?

3) Selon vous, quel est le rôle de l’équipe de soutien?

A quoi sert-elle? Ses fonctions? 4) Les autres interventions (s’il y a lieu)

Même déroulement? Mêmes actions? Mêmes effets? Quels apprentissages ou enseignements vous en tirez? Pourquoi une seconde intervention était nécessaire? Le cas était très différent?

5) Votre appréciation de l’équipe de soutien

Dans la résolution des cas en particulier? Dans la capacité à moyen et long terme de l’équipe à faire face à certaines situations? Sur le fonctionnement de l’équipe de soutien ? Sur la manière dont l’équipe procède? Sur la composition de l’équipe, formation et compétence Sur la présence d’un cadre supérieur au sein de l’équipe? Aidant?

6) À votre avis, qu’est-ce qui facilite le succès d’une intervention? 7) Quelle appréciation d’ensemble faites-vous de l’équipe de soutien?

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