BALADE @BULLET Le quartier

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BALADE • Le quartier

Le Marais est plein de gens qui ne sont pas plus sages. Il y a du bruissement, dans le marécage. La pluie d’euros y a été abondante. La « gentrification », ô combien imposante.

Le puissant bœuf avance, l’air hâtif, et la grenouille gonfle, au ras-le-rif.Le bourgeois y veut se vêtir comme tout grand seigneur : «Eh, je parle à toi, regarde bien ma sœur. »

Vivre Paris a le Marais dans ses pages, le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages.*Textes Giacomo Leso / Photos Jelena Stajic

LE MARAIS

*Remixé de La Grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf de Jean de La Fontaine.

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BALADE • Le quartier

ui es-tu donc, Marais ? Un marécage peu-plé de marquises flétries ? Le haut site des hôtels aristocrates du XVIIe, des couvents, des immeubles moyenâgeux charpentés à pans-de-bois ? Rade de bricoleurs, ma-roquiniers chinois, juifs ashkénazes, gays, intellos, cadres sup ?

Fantaisie d’un Le Corbusier qui prétendait vouloir te raser pour faire de toi un jardin où pousseraient les 18 tours cruciformes d’un centre d’affaires ? Vision d’André Malraux qui a voulu te sauvegarder de ta piétonisation inéluctable ?

Musée picassien ? Cité-dortoir ? Pied-à-terre des stars hollywoodiennes ou des locataires illégaux d’Airbnb ? Nouveau Saint-Germain-des-Prés ? Champs-Élysées privé d’avenue ? Centre commercial à ciel ouvert ? Duty free shop sans aéroport ?

Question de baise-en-ville et pas telle-ment de luxe ? De prêt-à-porter, assez, ou pas assez, chic ? « Fashion », nous répète-t-on chez les néo-bourgeois ; « Oui, mais non », contrecarre-t-on chez les aristos. Et en expliquant qu’une « femme qui cherche-rait une robe griffée n’aurait même pas l’idée de passer ici ».

Marais du « safari gay», d’une certaine « vision de soi » ou « village identitaire, d’autoprotection contre l’homophobie et les agressions » ? Marais du Cox bar et d’autres Souffleurs, Spices et Quetzals ?

Phare, dans ces ’90 qui gravent ton his-toire dans le corps des militants de la lutte contre le Hiv et encore site de prévention et de dépistage ? Lieu physique qui nargue les ravages des Grindr’s & co. avec ses

pintes, ses DJ à platine, ses performeurs, ses bordels tolérés, ses décos étonnantes ?

Quartier de nuit, aux lumières parfois éteintes à cause des fermetures adminis-tratives de tes bars soumis au joug de chas-seurs insomniaques de nuisances sonores ? Port des coups à boire et des clopes grillées sur les trottoirs, pendant que le monde querelle tout seul, au détour d’un doute, le long d’une nouvelle rencontre ?

Quartier musqué, quartier salope, animé jadis par les putes de la rue du Petit-Musc (au XIIIe siècle, rue Pute y Musse) et par le Watrin dont Balzac fit son admirable Vau-trin, qui habitait rue des Mauvais-Garçons quand Vidocq l’arrêta ?

Rêve, par retour de rayonnement mon-dial, du jeu d’une drague, des baisers à la française d’un garçon en marinière sous un porche ?

Quartier de jour, aux rares poissonne-ries étiquetées « bijouterie », aux choux, macarons et autres beignets classieux, aux parfumeurs, aux lunettiers, aux distributeurs de produits de niche qui remplacent les fines épiceries ?

Lieu idéal, du grignotage spéculatif qui s’y empiffre à l’envi : librairies, petits commerces de bouche, bars ? Hop ! Déglutis. En payant – parfois sur le pouce – des additions, même salées, de 800 000/1 500 000 euros, la portée… Et pour la seule exploitation d’un mini-espace, parfois d’une seule pièce…

Marais, au prix du mètre carré habitation oscillant entre les 10 000 et les 13 000 eu-

ros. Marais, surplombant de très haut le bon ton (27 000) quand il s’agit d’emplace-ments VIP, aménagés dans les hôtels parti-culiers de ce marécage séché ?

Marais, du bouc-émissaire professionnel, escompteur de nos erreurs à tous, Benja-min Malaussène, embauché par Pennac, dans plusieurs de ses romans, tel l’employé maladroit, d’une grande enseigne de la distribution ?

Marais du Bazar de l’Hôtel de Ville dans lequel les Galeries Lafayette ont cru voir un futur Bon Marché avec son épicerie ? Et d’une peu indulgente gentrification perpétuelle ?

Marais de tes quartiers, faudrait-il dire ? Car le haut Marais bobo n’a rien à voir avec le bas-Marais du Cox, de Chez Ma-rianne ou du BHV.En longeant des deux côtés la rue de Turenne, selon les riverains, il arrive au grand large « jusqu’au restaurant à cous-cous squatté par les blogueuses mannequins et journalistes à chaque fashion week : Chez Omar ».

C’est le Marais de la rue de Bretagne, qui dépasse le marché des Enfants-Rouges et le charcutier Caractère de Cochon. Là se sont consommées les emplettes des galeristes, à l’affût d’exceptionnels lieux d’exposition de la vieille époque industrielle. Nous y voici.

Très cher Marais, fini ou Phénix ?

Suivons Vivre Paris, il nous y accompagne avec l’engagement radical de nous fournir toujours une prise de vue à l’affût de ce brin d’authenticité que l’on aime aimer.

C/ CULTUREM/ MODEG/ GOURMAND

Colin Giraud : Il y a des paradoxes dans ce quartier gay

VIVRE PARIS

« Gay ou pas, le Marais gentrifié pose la question des paradoxes de la réanimation urbain », déclare à Vivre Paris le sociologue urbain, expert des dynamiques de stratifica-tion sociale Colin Giraud, 33 ans. Maître de FRQIpUHQFHV�GH�O·XQLYHUVLWp�3DULV�2XHVW�1DQ-terre La Défense, il a mené des recherches en France et en Amérique du Nord (Montréal et New York), en particulier dans les quartiers étiquetés comme « gays ».

Le Marais semble perdre son caractère « gay » HQ�IDYHXU�G·XQH�SXLVVDQWH�SRXVVpH�©�JHQWULIL-catrice »…Si les premiers bars gays ont ouvert en 1979, en inaugurant une longue période de développement sectoriel, la gentrification du quartier avait déjà commencé dès les années 1960. Classé par An-dré Malraux, le vétuste et miteux Marais devenait une zone à sauvegarder. Dans les années 1970, les ravalements étaient avancés et les ouvriers cédaient la place aux classes moyennes et supé-ULHXUHV��&RPPHUFHV�HW�FXOWXUH�V·\�GpYHORSSDLHQW��Dans les années 1990, les prix de l'immobilier explosèrent et amplifièrent le phénomène.

&RPPHQW�pYROXH�DFWXHOOHPHQW�OH�TXDUWLHU"/HV�SUL[�GH�OLPPRELOLHU�Q·RQW�MDPDLV�pWp�DXVVL�pOH-vés, que ce soit pour les locaux commerciaux ou SRXU�OHV�ORJHPHQWV��/·pYROXWLRQ�VRFLRORJLTXH�HVW�

soumise à ces fortes contraintes : habiter le Marais est un privilège réservé aux très riches et aux nom-breux étrangers qui y possèdent un pied-à-terre. Les observateurs dénoncent la marchandisation du commerce : les marques de luxe et les multinatio-nales y deviennent de plus en plus visibles. Dans le nord du quartier subsistent quelques poches préservées, mais le risque de muséification ou de « disneylandisation » est patent.

/D�SURJUHVVLYH�IHUPHWXUH�GHV�EDUV�JD\V�HW�GHV�OLHX[�QRFWXUQHV�HVW�W�HOOH�LQpOXFWDEOH"Comme les autres commerces, les lieux gays sont aussi soumis à la pression financière et parfois poussés à la fermeture pour des raisons écono-miques ou pour une évolution des exigences de fruition. La désaffection de la jeune génération à O·pJDUG�GHV�OLHX[�������JD\V�HVW�DXVVL�XQH�FDXVH��Cela dit, pour le moment le Marais concentre la majorité des bars, restaurants et autres com-merces spécifiques.

3HQVH]�YRXV�TX·j�O·DYHQLU�OHV�H[LJHQFHV�pFR-logiques sur les typologies de production des PDUTXHV�YHQGXHV�GDQV�OH�TXDUWLHU�SRXUUDLHQW�DXJPHQWHU"-H�Q·DL�SDV�GX�WRXW�HQTXrWp�VXU�FHWWH�TXHV-tion-là. Mais je peux souligner que le Marais pose la question des paradoxes de la « réani-mation urbaine »��'·XQ�F{Wp��RQ�VH�IpOLFLWH�GX�

UHWRXU�GH�OD�YLH�FRPPHUoDQWH��GH�O·DXWUH�RQ�SHXW�déplorer la concurrence foncière. Les armes po-litiques semblent limitées face à la marchandi-sation de la ville. Les habitants aussi expriment GHV�DPELJXwWpV���V·LOV�DSSUpFLHQW�OD�YLH�DX�FHQWUH�GH�3DULV��SUqV�GH�O·DQLPDWLRQ�HW�GHV�DPpQLWpV��ils regrettent et dénoncent parfois les prétendus excès de cette animation ou le paysage urbain XQLIRUPH�TX·HOOH�SURGXLW��&RPPH�VL�O·DXWKHQWLFLWp�de la vie urbaine était remise en question par les logiques de la gentrification, dont certains habitants sont en partie acteurs au quotidien. Là est tout le paradoxe.

/H�0DUDLV�HVW�W�LO�GHVWLQp�j�XQ�DYHQLU�VHP-EODEOH�j�FHOXL�GH�6RKR"/H�0DUDLV�HVW�GpMj�XOWUD�JHQWULILp��&H�Q·HVW�GRQF�SDV�VRQ�GHVWLQ��PDLV�SOXW{W�VRQ�VWDWXW�DFWXHO��-H�QH�VDLV�SDV�VL�O·RQ�SHXW�YUDLPHQW�pWDEOLU�O·DPELWLRQ�G·XQ�TXDUWLHU��RX�V·LO�SHXW�VH�GRQQHU�XQ�REMHFWLI�éthique. Le Marais est le produit de son histoire, des changements socio-économiques, des mi-JUDWLRQV��GH�O·HPERXUJHRLVHPHQW��$X�GHOj�GHV�discours sur la mixité sociale ou sur la diversité urbaine, il faudrait intervenir de façon radicale sur OHV�SUL[�HW�OHV�OR\HUV��,O�PH�VHPEOH�TX·RQ�HQ�HVW�encore très loin.

Quartiers gays, &ROLQ�*LUDXG��38)��&ROOHFWLRQ�Le lien social, 348 p., 2014.

! ÇA GROUILLE... ! 3DU�&255,1(��SHUIRUPHXVH�HW�'-� www.facebook.com/corrineandco

« Ça grouille, hein minou, dans ce Marais-là ! 0DLV�VR\RQV�KRQQrWHV��OD�IDXQH�HW�OD�IORUH�RQW�TXDQG�PrPH�ELHQ�PXWp��QDQ�"��'pMj��IDXW�RX-blier la barque pour le traverser, la poussette et la trottinette sont les nouveaux moyens de WUDQVSRUWV�ORFDX[«�&H�PDUDLV�GDQV�OHTXHO�M·DL�WDQW�DLPp�YHQLU�ERLUH��SrFKHU�HW�FKDVVHU�SHQ-GDQW�GH�QRPEUHXVHV�DQQpHV�V·HVW�ELHQ�GHVVp-ché ces derniers temps. Les libellules, rainettes, KpURQV�FHQGUpV�HW�DXWUHV�SRXOHV�G·HDX��HQILQ��SDV�TXH�G·HDX��TXH�QRXV�pWLRQV�VH�VRQW�VRXU-noisement fait déloger par la vilaine couleuvre immobilière et par les crapauds du costard. Nous sommes désormais dans les marécages dorés ! Nous, les oiseaux de nuit, nous nous sommes lentement fait fermer le bec par des pierrots déplumés. Alors, oui, tous les temples QH�VRQW�SDV�ERXFOpV�HW�OHV�UDJRQGLQV�GH�O·RXUOHW�ne sont pas encore parvenus à détruire tous nos nids, ruches et autres refuges ! Quelques URVHDX[�VDXYDJHV�V·pULJHQW�HQFRUH�oj�HW�Oj��OHV�rizières ont toujours droit de cité, les rosiers résistent… Mais, à ce rythme-là, nous serons WUqV�FHUWDLQHPHQW�ELHQW{W�XQH�pQLqPH�SLqFH�GX�musée, pis encore, tout simplement relégués aux Archives ! »

Colin Giraud : Il y a des paradoxes dans ce quartier gay

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BALADE • Le quartier / Culture

C/����18$1&(6�'·$57—Après un moment « très calme », des départs an-xiogènes vers la rue Notre-'DPH�GH�1D]DUHWK��O·RXYHU-ture du nouvel espace Pa-ris-Beijing sur 400 m2 au 62, rue Turbigo, les galeristes de la rue de Turenne, reprennent leur souffle.Dans les Marais entre les stars, les confirmés et les jeunes, il y aurait autour de 150 galeristes. Dont « les meilleures galeries

du monde, nous dit le courtier Louis Geraud Castor, avec des œuvres qui fleurent le million G·HXURV�SLqFH�». « La qualité générale est forcement iné-gale��H[SOLTXH�O·DJHQW�HW�pGLWHXU�G·DUW��(PP\�'H�0DUWHODHUH��qui réside ici depuis trente ans. Les nouveaux arrivés QH�SHXYHQW�SDV�VH�SHUPHWWUH�WRXW�FH�TX·LOV�YRXGUDLHQW��OHV�grandes galeries deviennent locomotives avec les meilleurs DUWLVWHV��OHV�DXWUHV�SUHQQHQW�des risques. »

Trois géolocalisations :1- Rue des Coutures 6DLQW�*HUYDLV : deux espaces vides, le mur du musée Picas-VR�QRQ�UHFRXYHUW�G·DUW��O·$SSD-UHPPHQW�FDIp�IHUPp��7HUQH�"�(UUHXU��3DV�ORLQ�G·LFL�GHYUDLW�surgir la librairie spécialisée G·<YRQ�/DPEHUW�TXL�HQ�Gp-cembre a fermé sa galerie. La peinture est chez Valérie Grais de Convergences.2- Rue Saint-Claude : derrière la Galerie Perrotin – qui raflerait la plus grande partie du chiffre

G·DIIDLUHV��HW�TXH�GpEXW�DYULO�H[SRVH�7HUU\�5LFKDUGVRQ��²�OD�:KL�3URMHFW��(Q�IDFH��OD�6((�Studio avec ses conférences de critiques et artistes émer-JHQWV�VXU�OH�U{OH�GH�O·LPDJH��(Q�avril le jeune Colombien André Ramirez.3- Rues de Montomorency et Chapon : sur les lèvres de tous, Marine Veilleux et Valérie /RXYHW��3RXU�XQ�DFFqV�j�O·DUW�des tout-petits : la Maison des Contes et des Histoires, au 7, rue Pecquay.

Graffiteurs de la rue Chapon

Les hipstéreos plogués de Radio Marais changent la déco d’am-

biance extérieure à leur boutique rue Chapon, tous les mardis.

AtOme, Tetar, Djalouz, Bau Bô, Hoparé, Kashink sont déjà passés

par là. La radio des gens, écoutable sur le Net, se veut le cœur de Paris, avec ses plages, parfois tarifées, et ses hallucinations sur le quartier.

Totem en béton et boîte à photos

Les jours de soleil, le souriant Barth Zebo, tailleur de béton cellulaire, est

sur le parvis du Centre Pompidou avec ses Totems. Certains lui en commandent de grandes dimen-

sions. Plus loin officie Hans Zeeldieb, avec sa chambre Gilles Faller, de fin XIXe : « J’envoie le négatif directement sur papier photo, je crée le positif par

contact et je le vends. »

Le dormeur doit se réveiller

Réveil Paris fleurit en ville. La nou-velle association de Clément Léon R., proclamé par les fêtards maire de la Nuit-bis, prône la convivialité. Son antonyme est Vivre Marais ! : « Les

riverains en ont marre, ils veulent somnoler », souffle le président

d’honneur Gérard Simonet. «Disons stop aux délations de cette minorité

gueulante », réagit le maire-bis.

! (1�/,(8�(7�3/$&(�'·81(�$*25$

©�/·LGHQWLWp�KRPR�V·HVW�FRQVWUXLWH�LFL��GqV�OD�GpSpQD-OLVDWLRQ�GH�O·KRPRVH[XDOLWp�, raconte Sébastien Grisez, gérant de la librairie Les mots à la bouche. Nous avons gagné ELHQ�GHV�EDWDLOOHV��GHSXLV��'·DXWUHV�PR\HQV�G·DFFqV�j�OD�lecture sont arrivés et les bars JD\V�GX�FRLQ�VRQW�GHYHQXV�une bijouterie et un commerce de fringues. Mais nous allons bien, merci. » Presse théma-tique, littérature française et in-ternationale, références queer, bdsm, gay ou gender, beaux OLYUHV�G·DUW��VH[H��VWUHHW�DUW����©�/D�IHUPHWXUH�G·$JRUD�SUHVVH�HQ�IDYHXU�GH�7KH�.RRSOHV�HVW�XQ�FRXS�GXU��QRXV�UHVWRQV�le seul lieu de lecture du Vil-lage. » La mairie va protéger OD�GHVWLQDWLRQ�G·XVDJH�GH�FHWWH�librairie spécialisée du 6, rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie, et de la Librairie du Temple, au 52, rue des Rosiers.

7, rue Pecquay.

VIVRE PARIS

1 — <YHV�&KDJQHDX��UHJDUG�UHYrFKH��VXUYHLOOH�OD�VDOOH�GH�la bibliothèque historique de OD�9LOOH�GH�3DULV��GDQV�O·K{WHO�GH�/DPRLJQRQ��O·XQ�GHV�SOXV�anciens du quartier. Guettez Diane sur les frontons.

2 — 6DLVLU�O·RFFDVLRQ�GH�V·DO-longer sur scène aux goûters G·pFRXWH�GH�OD�MHXQH�FUpDWLRQ�UDGLRSKRQLTXH�G·$UWH�5DGLR�à la Maison de la poésie du passage Molière mérite une sortie de route.

3 — Le gâteau suédois GDQV�OH�MDUGLQ�GH�O·,QVWLWXW�GX�11, rue Payenne est inévi-table, tout comme le mirage urbain de la ruelle en colom-bages qui emmène au Centre culturel Suisse, impasse des Arbalétriers.

4 — /D�PDLVRQ�G·RFWURLV�HW�des marchandises Les Nautes du 1, quai des Célestins, voit passer bien des DJ expé-rimentaux en live tous les PHUFUHGLV��/·DSUqV�PLGL��RQ�\�ERLW�VRQ�WKp�HQ�WHQDQW�j�O·±LO�OH�niveau de la Seine.

5 — Magie, anges et démons dans la tradition juive HVW�OH�WLWUH�GH�O·H[SRVLWLRQ�VXU�la « Kabbale pratique » au PXVpH�G·$UW�HW�G·+LVWRLUH�GX�judaïsme de la rue du Temple. Le jardin intérieur est aussi un régal.

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BALADE • Le quartier / Mode

HAUT BOBO, BAS LUXE—/D�3HUOH��MHXGL����K��FLHO�FODLU�Deux bobos avec leur chapeau melon et des barbes bien taillées. Les clients de la Perle sirotent bières ou chardonnays dans des ricanements étouffés. Mots : ©�-H�ERJXH��SV\��EORJ��enfermement, marre de la VWXSHXU�FRQVWDQWH��PLVRJ\QLH�de base ». Casquette Nike, pompes de sport, sac à dos.

Skate-border. Une roumaine avec matelas en mousse sous le bras et sa fille à la main. Des écoliers et leurs parents bobos. Deux tour-istes japonaises pretty et per-dues avec un sac du musée 3LFDVVR��(OOHV�FKHUFKHQW�.DUO�Lagerfeld, un client indique : « Tout droit sur la droite. » Pantalons à mi-mollets avec chaussettes et baskets noires, puis blanches. Deux WRWDO�ORRN�QRLUV��O·XQ�SHXW�rWUH�

VRUWL�GX�1RLU�.HQQHG\��O·DXWUH�plus discret. Un Perfecto. Coiffures phénoménales. Rares sacs de shopping. Lunettes choisies.

Le Carrefour, samedi 19 h, FLHO�FRXYHUW�Sacs orange, chapeaux G·KRPPH��SDUDSOXLHV��une pipe à tabac, e-cig, la VRQQHULH�G·XQ�VPDUWSKRQH��terrasse bondée. Sancerre. Travaux devant Givenchy

et Gucci, encore fermés. Moncler et Fendi ouverts et illuminés, aucun client. Mots entendus : ©�7X�W·HV�FDOPp��W·DLPHV�SDV�VD�WrWH��F·HVW�SDV�EHDX�Oj���ª�8QH�SXQN�YrWXH�de poils synthétiques et jeans délavés. Un Roumain HW�XQ�6UL�/DQNDLV��"��HVVD\-ent sans succès de vendre des roses. Deux couples mixtes, deux couples de lesbiennes, des groupes de gays, des militants

célèbres. Un bomek tous les 45 secondes. Une collision HQWUH�SLpWRQV��/·DIILFKHXU�GH�Scream. Aboiements entre caniches, leurs maîtres qui tirent sur la laisse. Homme en commissaire Maigret, dame âgée avec canne, qui court. Vélib', voitures, bicyclettes, le bus 75 pour porte de Pantin, la dame est à bord.

�&OLQ�G·±LO�j�7HQWDWLYH�G·pSXLVHPHQW�G·XQ�OLHX�SDULVLHQ�GH�*HRUJHV�3HUHF��

M/

Le Marais des papillons

C’est l’histoire de Rémi, qui un jour se demandait s’il était jap,

liberty ou pointu. C’est l’his-toire de son nœud, qu’un jour de mariage, il ne trouvait pas. C’est l’histoire du Colonel Moutarde, expert des questions de nœuds. Les papillons de Lille, se posent

chez Valentin, rue Quincampoix. Ils sont faits main.

Parfois à la commande.

Le mariage, le cuir et Paris Fetish

Avec le mariage, les « dangereux rebelles » homos sont deve-

nus partie intégrante du foyer sociétale. Le mot « fetish » est

entré dans le langage publicitaire et sert désormais aussi à vendre

des gâteaux. Du 28 au 31 mai, Paris Fetish vient combler l’absence d’un

grand club fétichiste gay dans la capitale. Pour le cuir, créations sur

mesure chez Rexx.

Les vestiges solidaires

Le meilleur rapport qualité/prix des friperies chics parisiennes. Chez Emmaüs au 35, rue Quin-

campoix, on trouve des vestes de créateur à partir de 50 euros, des

escarpins, des sacs, des robes, des fourrures. Haute couture, ba-siques vintage, upcycling, détour-

nement pour mettre à jour une belle chose. C’est du shopping

philanthropique.

! /$�92,;�'8�3$7521�(DU BHV)Le samedi après midi, Alex-andre Liot, le directeur que les Galeries Lafayette ont nommé pour le BHV Marais, dégote ses idées en discutant avec les clients dans les rayons du magasin. Le luxe rue des Ar-FKLYHV�"�©�&·HVW�XQH�H[LJHQFH�GH�OD�FOLHQWqOH��ª Le sport, rue GX�7HPSOH�"�©�$X�GHOj�GH�QRV�HVSpUDQFHV��%LHQW{W�j�OD�SODFH�GX�%+9�0RWR��XQH�DXWUH�H[FOX-VLYLWp�VSRUWLYH��ª Le Marais se sent envahi… « Nous faisons SDUWLH�GH�O·$'1�GX�TXDUWLHU��Nous étions en retard et nous nous sommes mis au boulot en investissant 35 millions. » <�DXUD�W�LO�G·DXWUHV�VSRWV�OX[H�"�« Non. Maintien de la diversification. » Pensez-vous à un assaut spéculatif sur O·LPPHXEOH�YRLVLQ�GHV�FRP-PHUFHV�JD\V�"�« Non, nous aimons cette différence. Nous YLVRQV�SDULVLHQV�HW�WRXULVWHV��ª�0DUTXHV�pWKLTXHV�"�« On en UHSDUOH�HQ�VHSWHPEUH��ª

VIVRE PARIS

1 — Étrangement exclus GH�O·H[SR�VXU�O·H[LO�FUpDWLI�GX�PXVpH�GH�O·,PPLJUDWLRQ��OH�futuriste couturier-star des années 1960, Pierre Cardin, 92 ans, déménage son musée rue Saint-Merri.

2 — (FOHFWLF�GH�)UDQFN�Maleg conçoit des vestes G·KRPPH�HQ�PDWpULDX[�QD-turels et techniques montées par un artisan de Trévise. Au F±XU�GX�0DUDLV������UXH�GHV�$UFKLYHV��SRXUUDLHQW�DUULYHU�Armani ou Vuitton.

3 — Alexia et Sophie sont les conceptrices de la ligne GH�OXQHWWHV�G·$OVR��LQVSLUpHV�GH�O·DYDQW�JDUGH�©�PDUD-isienne ». Le dessin et la IDEULFDWLRQ�j�O·DQFLHQQH�VRQW�français. Mais la clientèle est internationale.

4 — Le plus beau concept store du Marais est Uniqlo. Le magasin japonais a conservé la cheminée de 35 mètres GH�OD�)RQGHULH�G·RU�HW�DXWUHV�PpWDX[�GDQV�ODTXHOOH�LO�V·HVW�installé. Les machines sont visibles au sous-sol.

5 — « Nous sommes tous GDQV�QRWUH�WrWH��ª�(W�QH�VDYRQV�rien de notre Dosha dominant. Pour en sortir et retrouver le corps, on peut sonner chez M. Wannebroucq, masseur D\XUYHGLTXH��&·HVW�DX� 15, rue des Tournelles.

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BALADE • Le quartier / Gastronomie

G/e3,&(5,(�'(�1,&+(�� /(�021232/< '·26&$5�)$5,1(77,—©�%RXFKHULHV��SRLVVRQQHULHV��FUqPHULHV��ODLVVHQW�OD�SODFH�DX[�FRPPHUFHV�GH�QLFKH���FKRFRODWHULHV��EU�OHULHV�GH�FDIp��FDYLVWHV��VXSHUPDUFKpV�bio », constatent les urban-LVWHV�GH�O·DWHOLHU�SDULVLHQ�$SXU�Cette métamorphose va V·DFFpOpUHU��(Q������GDQV�OH�YLOODJH�DUULYHUD�(DWDO\��le seul retailer global de produits locaux italiens. /·HQVHLJQH�SLpPRQWDLVH��

qui depuis 2007 a ouvert 27 magasins dans le monde �,VWDQEXO��7RN\R��1HZ�<RUN��'XEDw�HW�ELHQW{W�/RQGUHV�HW�0RVFRX��FKHUFKDLW�XQ�OLHX�à Paris. Lafayette Gour-met aurait signé la master franchise. « En ligne avec les consommateurs globalisés, OH�PRGqOH�pYRTXH�O·DQFLHQQH�tradition culinaire italienne HW�OD�GpFOLQH�HQ�SDUWDJH�HW�art »��H[SOLTXH�(OHQD�1RYHOOL��professeur de management à la Cass Business School de Londres. Disposant G·XQ�PDUNHWLQJ�TXL�UHODWH�

sa philosophie, de produits de niche à un prix défiant OD�FRQFXUUHQFH��DFKDW�SDU�centrale sans intermédiaires, PDUJHV�LQIHULHXUHV���(DWDO\�affiche une croissance de �����HQ�����������PLOOLRQV�GH�FKLIIUH�G·DIIDLUHV��XQH�valeur estimée à 1,2 milliard. Son moustachu patron, Oscar Farinetti, a été classé meilleur entrepreneur italien GH������SDU�(UQVW��<RXQJ��Les négociations confirmées, les travaux ont commencé GDQV�OHV�DQFLHQV�HQWUHS{WV�GX�'DLO\�0RQRS·�HW�GHYUDLHQW�

VH�SRXUVXLYUH�GDQV�O·H[�FDQ-tine du BHV entre les rues de la Verrerie et Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie. Au WRWDO��LO�V·DJLUDLW�GH�������P2 de restaurants et épiceries. Tant pis pour les commerces de bouche, les pizzeria et DXWUHV�JODFLHUV�GX�TXDUWLHU�"�La « vie » du village avec ses commerces et artisans, est protégés par le PSMV mais O·pYROXWLRQ�VpYLW��/·HQWUpH�HQ�ERXUVH�G·(DWDO\�HVW�SUpYXH�pour 2017. Le temps de dire « au revoir » à quelques épiciers.

Le restau d’étage de la confrérie

Le restaurant scolaire des apprentis du bâtiment de la renommée École de travail-ORT (4 bis, rue des Ros-

iers) est depuis peu ouvert au public. La volonté du flamboyant Claude

Journo, directeur des salons Bench est la mixité sociale : « Je veux que ce soit un lieu d’échange et de mixité. Mes serveurs sont des acteurs et nous avons

une scène. »

Tata Monique et son hankburger

Manger végétalien en étant allumé par une catcheuse, un

petit nerveux ou Tata Monique ? Les veggie’s de Hank (55, rue des

Archives) sont bio, légers, copieux, safe pour l’environnement, non testés sur les souris et sans pro-

duits d’origine animale. Le mobil-ier ? Œuvre de récup d’un artisan français. C’est qui qui dit mieux ?

Dans la vie il n’y a pas que des cactus...

…mais aussi les Orchidées de Charles : l’élève du botaniste Lecou-fle, tient depuis 20 ans son boudoir tropical au 17, rue des Blancs-Man-teaux. …mais aussi une plantation (au 35, rue des Francs-Bourgeois)

dans le jardin caché des Rosiers Jo-seph-Migneret. …et puis les meilleurs

cactus des producteurs du Sud-Ouest, chez Les Succulents Cactus

(111, rue de Turenne).

! EN GUISE DE CHIFFRESLe Marais de Vivre Paris V·pWDOH�HQWUH�OH��e et le 3e. Il est desservi par moult stations, GRQW�OD�VWDWLRQ�5DPEXWHDX��(Q�partant de la Seine, il arrive rue de Bretagne et, de la rue des Rosiers rejoint la rue Chapon.&H�FKRL[�HVW�Qp�GH�O·HVSULW�GX�TXDUWLHU�HW�GHV�SRVVLELOLWpV�G·LQ-WHUDFWLRQV�XUEDLQHV�TX·LO�RIIUH�/H�0DUDLV�Q·HVW�SDV�XQ�OLHX�DGPLQLVWUDWLI��/H�3609��SODQ�de sauvegarde et de mise HQ�YDOHXU��G·$QGUp�0DOUDX[�protège depuis 1964 la valeur historique de ses 126 hect-DUHV��VXU�OHV�����KHFWDUHV�des 3e et 4e���/D�SRSXODWLRQ�GX�0DUDLV��HQYLURQ��������KDEL-WDQWV���HQ�FRQVWDQWH�EDLVVH�pour cause de paupérisation, est en majorité composée G·LQWHOOHFWXHOV��FDGUHV�VXS��FRPPHUoDQWV��HQWUH��������HW���������½�DQ���/D�proportion de célibataires y est supérieure à la moyenne nationale.

VIVRE PARIS

1 — Pains au cumin ou UD]RZ\��JkWHDX[�DX�IURPDJH��strudels. Le meilleur de la boulangerie ashkénaze à La %RXWLTXH�MDXQH������UXH�GHV�5RVLHUV���$X�����UXH�3DYpH��D�DWWHUUL�UpFHPPHQW�O·eFODLU�de Génie.

2 — (OOH�VHUD�pWRQQDQWH�G·DQWLSDWKLH�OD�GDPH�TXL�calculera les regards qui se SRVHQW�VXU�O·XQH�GH�VHV�IUDLVHV�confites... Qui connaît, aime. &·HVW�FKH]�,]UDHO��pSLFHULH�GX�0RQGH������UXH�0LURQ��

3 — Les cuisses de grenouille à la provençale, OH�FROLPDoRQ�G·(LIIHO��OH�EDU�rangé aux pommes vapeur, OD�QDSSH�VXU�OD�WDEOH��(Q�contrebas, la Seine. Dans La 1HXYLqPH�3RUWH aussi, Johnny Depp attendait au restaurant Louis-Philippe.

4 — Nous avons eu HQYLH�G·HVVD\HU�XQH�SRWLRQ�énergétique. Le créateur Stéphane Gilet chez Herbéus présente des essences de fleurs et minéraux. Le règne végétal en huiles essentielles, infusions et compléments alimentaires.

5 — La movida parisienne, entre bars et bordels gays, Q·HVW�SDV�ILQLH��0DLV�SRXU�OHV�poussées de transcendance, le dimanche la messe est dite au Freedj : « On est mieux ici que dans le Marais. » $PHQ��WRL�GRQF��