Modèle de prévision et de gestion des crues - CORE

285
LCH Laboratoire de Constructions Hydrauliques Laboratory of Hydraulic Constructions Editeur : Prof. Dr A. Schleiss Lausanne, 2007 29 Communication Modèle de prévision et de gestion des crues - Optimisation des opérations des aménagements hydroélectriques à accumulation p our la réduction des débits de crue Frédéric Jordan

Transcript of Modèle de prévision et de gestion des crues - CORE

LCH Laboratoire de Constructions Hydrauliques Laboratory of Hydraulic Constructions

Editeur : Prof. Dr A. Schleiss Lausanne, 2007

29Communication

Modèle de prévision et de gestion des crues - Optimisation des

opérations des aménagements hydroélectriques à accumulation

pour la réduction des débits de crue

Frédéric Jordan

Communications du Laboratoire de Constructions Hydrauliques ISSN 1661-1179 Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne Editeur: Prof. Dr A. Schleiss

N° 6 1998 N. Beyer Portner

Erosion des bassins versants alpins suisse par ruissellement de surface

N° 7 1998 G. De Cesare Alluvionnement des retenues par courants de turbidité

N° 8 1998 J. Dubois Comportement hydraulique et modélisation des écoulements de surface

N° 9 2000 J. Dubois, J.-L. Boillat Routing System - Modélisation du routage de crues dans des systèmes hydrauliques à surface libre

N° 10 2002 J. Dubois, M. Pirotton Génération et transfert des crues extrêmes - Le logiciel Faitou

N° 11 2002 A. Lavelli, G. De Cesare, J.-L. Boillat Modélisation des courants de turbidité dans le bassin Nord du Lac de Lugano

N° 12 2002 P. de Almeida Manso Stability of linings by concrete elements for surface protection of overflow earthfill dams

N° 13 2002 E. Bollaert Transient water pressures in joints and formation of rock scour due to high-velocity jet impact

N° 14 2003 D. S. Hersberger Wall roughness effects on flow and scouring in curved channels with gravel bed

N° 15 2003 Ch. Oehy Effects of obstacles and jets on reservoir sedimentation due to turbidity currents

N° 16 2004 J.-L. Boillat, P. de Souza Hydraulic System - Modélisation des systèmes hydrauliques à écoulements transitoires en charge

N° 17 2004 Cycle postgrade en aménagements hydrauliques Collection des articles des travaux de diplôme postgrade

N° 18 2004 S. Emami Erosion protection downstream of diversion tunnels using concrete prisms - Design criteria based on a systematic physical model study

N° 19 2004 Ph. Chèvre Influence de la macro-rugosité d'un enrochement sur le charriage et l'érosion en courbe

N° 20 2004 S. André High velocity aerated flows on stepped chutes with macro-roughness elements

Préface

Dans les vallées alpines fortement urbanisées, la réalisation de mesures constructives pouraugmenter la sécurité en cas de crue devient de plus en plus difficile pour des raisonséconomiques liées à l’aménagement du territoire. En conséquence, la prévision des cruesdevient un élément important pour la sécurité, en particulier dans des bassins versants surlesquels se trouvent des aménagements hydroélectriques à accumulation ayant un grandpotentiel de rétention.

Dans le cadre du projet de recherche MINERVE, le Dr Frédéric Jordan a développé unmodèle de prévision et de gestion des crues en considérant les aménagements hydroélec-triques à accumulation dans un bassin versant complexe avec une courte durée de réponsehydrologique. Pour la première fois, un modèle intégrant les principaux éléments naturels etartificiels du réseau hydraulique a été proposé, qui permet l’optimisation des opérations desaménagements à accumulation dans le but de réduire les conséquences hydrauliques et éco-nomiques des crues à l’aval des retenues. En se basant sur une nouvelle approche combinantmodélisation hydrologique et hydraulique d’un bassin versant comprenant de nombreusescentrales hydroélectriques, une stratégie de gestion optimale des retenues d’accumulationa pu être développée et appliquée avec succès au cas de la vallée du Rhône à l’amont duLéman. La qualité et la performance de l’outil ont été démontrées par une première alertede crue en septembre 2006.

L’aspect le plus novateur du travail de recherche du Dr Frédéric Jordan est certainementle développement et la modélisation d’une stratégie de gestion des crues par des opérationspréventives des aménagements hydroélectriques. La méthodologie développée par ce cher-cheur permet d’obtenir très rapidement des résultats optimisés, de bénéficier d’une visionglobale mais synthétique de la situation d’un bassin versant et de contrôler les décisionsproposées par l’outil d’aide à la décision, même lors de situations très complexes. Le modèleest ainsi capable de fournir les coûts associés aux décisions, aux non-décisions et à une erreurde prévision météorologique.

Nous aimerions remercier le Prof. Dieter Gutknecht de la TU Wien pour son soutienscientifique et les discussions fructueuses lors de sa visite comme hôte académique au LCH.Finalement, nous remercions l’Etat du Valais et l’Office Fédéral de l’Environnement pourle financement du projet de recherche MINERVE.

Prof. Dr Anton Schleiss

Preface

In densely populated Alpine valleys, the realization of river training works for floodprotection becomes more and more difficult because of economical reasons and lack ofspace. As a consequence, flood forecasting is of great interest especially in catchment areascomprising storage hydropower plants with high potential of reservoir routing.

In the frame of the MINERVE research project, Dr. Frédéric Jordan has developed a modelfor forecasting and management of floods considering the effect of storage power plants ina complex catchment area with a short hydrological response. For the first time, a modelhas been proposed for such complex situations, which allows optimizing the operation ofthe storage hydroelectric power plants with the purpose of reducing the hydraulic andeconomical flood consequences downstream in the main valley of the catchment area.

Based on a new approach of hydrological and hydraulic modelling of the catchment areaequipped with storage schemes, a general applicable strategy of the optimum operation ofthe storage power plants could be developed and applied successfully in the case study ofthe Upper Rhone Valley upstream of Lake Geneva. The flood alarm in September 2006 hasproved the quality and performance of the developed tool.

The most innovative aspect of the research work of Dr. Frédéric Jordan is certainly thedevelopment and modelling of a strategy for the management of floods with the help of pre-emptying operations of the storage power plants. The methodology developed by Dr. Jordanallows obtaining optimized results very rapidly, even for very complex conditions. A globaloverview of the hydrological conditions in the catchment area can easily be obtained, whichallows checking the decisions furnished by the implemented decision-making tool. The latteris able to provide the costs related to the decisions or non-decisions as well as for errors inmeteorological forecasts.

We would like to thank Prof. Dieter Gutknecht from TU Vienna for his scientific supportand fruitful discussions during his visit as academic guest at LCH. Finally we would liketo thank the Canton of Wallis and the Federal Office for the Environment for the financialsupport of the research project MINERVE.

Prof. Dr Anton Schleiss

Résumé

Modèle de prévision et de gestion des crues

-Optimisation des opérations des aménagements hydroélectriques à

accumulation pour la réduction des débits de crue

Mots-clés : Crue, Prévision Hydrologique, Modélisation Semi-Distribuée, Optimisation,Aménagement Hydroélectrique, Réservoir, Retenue, Laminage, Vidange Préventive, Aide àla Décision.

Les crues ne sont pas seulement une fatalité. Les dégâts qu’elles engendrent, la peur qu’ellessuscitent et les vies qu’elles emportent ne résultent pas toujours de la puissance seule deséléments, et l’Homme a le devoir de s’en prémunir, dans la mesure de ses possibilités.L’une d’entre elles conduit à exploiter au mieux certains ouvrages issus de son génie :ce sont les grands barrages et leurs retenues d’accumulation. Par leurs capacités, par leurflexibilité, ils offrent un moyen efficace de gérer les débits dans les cours d’eau situés enaval, grâce à la rétention d’importants volumes dans leurs réservoirs. Ils permettent deplus de libérer par avance le volume nécessaire à la protection contre les crues, sans perteséconomiques, au moyen des turbines et des organes de vidange vannés. Cela s’appelle lavidange préventive.

Ce travail de recherche a comme objectif de développer les méthodes d’évaluation desopérations de vidange préventives des retenues d’accumulation, nécessaires à la protectioncontre les crues du Rhône à l’amont du Léman, et d’en extraire un outil d’aide à ladécision. Ce système se compose de plusieurs modèles qui, assemblés bout à bout, fournissentaux décideurs les informations nécessaires pour permettre un choix objectif. Le premiercomposant du système est un modèle de prévision météorologique développé et exploitépar MétéoSuisse, le deuxième un modèle de prévision hydrologique, et le dernier un modèled’optimisation des opérations de vidange préventives des réservoirs.

Le modèle de prévision hydrologique se base sur un concept de modélisation hydrologiquesemi-distribuée, développé à l’HYDRAM-EPFL. Ce concept permet l’intégration de champstridimensionnels de températures, précipitations et évapo-transirations potentielles poursimuler les processus de fonte des glaciers, de constitution et de fonte du manteau neigeux,d’infiltration et de ruissellement de surface. L’outil informatique mis au point et utilisé pourcette modélisation, Routing System II, permet aussi le routage des débits dans les coursd’eau ainsi que l’intégration explicite d’ouvrages hydrauliques tels que prises d’eau en rivière,collecteurs, réservoirs, évacuateurs de crue et turbines. Ces différents outils sont exploitésau mieux dans ce travail de recherche pour la construction d’un modèle de simulation dubassin versant du Rhône à l’amont du Léman, incluant les 10 principaux aménagementshydroélectriques qui s’y trouvent. Il est calé et validé pour un pas de temps horaire sur unepériode totale de 60 mois, et intègre également les données de production hydroélectriquedes aménagements considérés. Sa performance lui permet de représenter les différents cycleshydrologiques, ainsi que les crues dont l’intensité et la phase sont judicieusement reproduites

i

par le modèle. Enfin, le modèle développé dans ce travail est capable d’assimiler en temps réelles observations pour s’ajuster automatiquement et ainsi améliorer ses conditions initialesavant d’effectuer une nouvelle prévision hydrologique.

L’outil d’optimisation des opérations préventives s’appuie sur les prévisions hydrologiqueset fournit des consignes opérationnelles claires, en exploitant de manière déterministe lesprévisions de débit entrant dans les retenues ainsi que les prévisions de débit aux différentspoints de contrôle dans les cours d’eau aval. Il est en outre capable de fournir les coûtsassociés aux décisions, aux non-décisions et à une erreur de prévision. Cet algorithme aété validé par comparaison avec un algorithme évolutif appelé MOO, développé au LENI-EPFL, et offre une performance similaire, tout en nécessitant des temps de calcul largementinférieurs. Les résultats proposés par l’outil d’optimisation sont automatiquement intégrésdans le modèle de simulation hydrologique où ils sont finalement validés.

La performance du modèle de prévision et de gestion des crues a été mesurée sur la base descrues historiques de 1993 et 2000, ainsi que lors de l’alerte crue de septembre 2006 où il a étéutilisé de manière opérationnelle. Les résultats obtenus indiquent que malgré le haut degréd’incertitude entourant les modèles de prévision, les décisions proposées par le système sontproches des décisions optimales prises a posteriori. L’application de ce système au bassinversant du Rhône à l’amont du Léman démontre que l’effet de laminage historiquementproduit par les réservoirs peut être largement augmenté. En effet, la réduction du débit depointe par laminage, observée dans le Rhône à l’exutoire du bassin versant, était de 12% en1993 et de 10% en 2000. Si le modèle de prévision et de gestion des crues avait été exploitélors de ces crues, la réduction du débit de point aurait pu atteindre 26% et 1993 et 21% en2000, ce qui aurait permis d’éviter des dégâts importants à proximité du cours d’eau.

Ce travail recherche a permis d’une part de démontrer le potentiel de protection contreles crues par la gestion optimisée des aménagements hydroélectriques à accumulation. Il ad’autre part abouti à un modèle de gestion théorique utile en phase de planification, et enfin àun modèle opérationnel, appliqué au bassin versant du Rhône, dont l’objectif est maintenantd’exploiter au mieux ce potentiel de protection. Grâce à des outils de modélisation, deprévision, d’assimilation et d’optimisation compacts et performants, le modèle est convivialet utilisable en temps réel.

Bien que ce système soit actuellement opérationnel et convainquant, il serait encoreprofitable d’approfondir le traitement de l’incertitude dans toute la chaîne d’informationdu système, avec en point de mire l’indication, pour chaque décision, de son risque objectifassocié.

ii

Abstract

Flood forecast and flood management model

-Optimization of the operation of storage power plants for flood routing

Key-words : Flood, Hydrological Prediction, Semi-Distributed Modelling, Optimization,Hydropower Plant, Reservoir, Flood Routing, Preventive Gate Operation, Decision Ma-king.

Floods are not only due to fatality. It is the responsibility of the human being to protecthimself from heavy damages due to natural elements, and he sometimes has the chance toprofit from a given situation to influence events. One of these possibilities is to managefloods by using existing dams and reservoirs, which can be efficiently operated to controlthe downstream discharges. Moreover, their retention capabilities may be enhanced bypreventive gate or turbine operations, based on a flood forecast.

The objectives of this research were to develop a new model for flood prediction andmanagement for the Rhone river basin upstream from Lake of Geneva. Also, the underlayingobjective was to create an operational discharge prediction and decision making tool, takingadvantage of 72 hours ahead of the weather forecast provided by MeteoSwiss. A newhydrological model was developed, as well as another optimization tool for the preventiveturbine and gate operations of large hydropower reservoirs.

The new hydrological forecasting tool is based on a concept developed by the HYDRAM-EPFL. This concept allows the model to integrate tri-dimensional rainfall, temperatureand evapo-transpiration fields and to simulate multiple hydrological processes. Indeed, themodel is able to simulate glacier melt, snow pack constitution and melt, soil infiltrationand runoff. The altimetric temperature gradient is considered by subdividing each basininto elevation bands, which allows segregating rainfalls and snowfalls. A new softwarecalled Routing System II was used and improved for modelling the catchment area. Thisobject-oriented modelling tool permits the integration of flood routing in rivers as well ashydraulic structures such as river water intakes, reservoirs, turbines, gates and regulatedsystems. All these new products were used to build a flood prediction model, includingthe 10 major hydropower plants of the Rhone river basin upstream from Lake of Geneva.It has been calibrated and validated over a 60 months’ period for an one hour time stepcontinuous simulation. It also integrates all hydroelectricity production data of the existinghydropower plants. Its performance allows to correctly represent all hydrological cycles, aswell as the observed floods, whose phases and intensities were perfectly simulated. Moreover,a new procedure for real-time data assimilation was developed in the model, in order toautomatically adjust the initial conditions before starting a new hydrological forecast.

The new optimization tool uses the hydrological forecast, especially the inflow forecasts inthe reservoirs and the hydrographs at the numerous control points in the river network.This tool takes into account the mentioned data in order to provide an operational decisionabout any necessary preventive turbine or gate operations. It also allows the decision maker

iii

to obtain an indication on the cost of the decisions and of the non-decisions, as well as of thecost of an inappropriate decision due to an error in the flood forecast. This algorithm wasvalidated against full simulation and against another optimization evolutionary algorithmcalled MOO , developed in the LENI-EPFL. It is able to provide a similar efficiency withoutexcessive computation time, and to forward these results automatically into the simulationmodel for validation.

The operational performance of the flood prediction and management model was evaluatedby simulation of two major flood events occurred in the Rhone river basin in September1993 and October 2000, as well as by a first operational use in September 2006. Theobtained results indicated, that if the decisions relative to the operations of the 10 consideredhydropower plants had been in accordance with the new decision tool, the decision wouldhave been similar to a posteriori optimal solution. The application of the model to the RhoneRiver catchment area demonstrates the possibility to widely increase the protection effectdue to the existing reservoirs. In fact, the observed reduction of the peak flow in the Rhonebasin outlet was 12% in 1993 and 10% in 2000. By using the new model, the reductionwould have reached 26% in 1993 and 21% in 2000. In this case, important damages couldhave been avoided near the riverside.

This research project offers the possibility to highlight the potential of an increased floodrouting into the existing accumulation reservoirs. It leads to a new theoretical optimizationmodel, which can be used at a planification stage to evaluate the optimal flood routinginfluence of a multireservoir system. Finally, a new flood forecast and management modelwas developed for the Rhone River catchment area. This tool is in operation and its aimis now to optimize the existing flood protection potential. Thanks to its new performingforecast, data assimilation and optimization tools, the model is user-friendly and can beused in real-time.

Although the system is now operational and convincing, it would be more profitable toexplore the possibilities of dealing with uncertainty in the whole information path of thesystem. As a main goal, the system should be capable of providing the decision maker withan optimal decision and its associated objective risks.

iv

Zusamenfassung

Modell zur Vorhersage und Bewältigung von Hochwasserereignissen

-Optimaler präventiver Betrieb der Speicherkraftwerke zur Verringerung der

Hochwasserspitzen

Key-words : Hochwasser, Hochwasservorhersage, Optimierung, Staudam, Stausee, Spei-cherkraftwerke, Vorherzunahme.

Hochwasser müssen nicht immer einer Katastrophe gleichkommen. Die durch Hochwasserentstehenden Gefahren, Schäden und Opfer sind nicht immer allein das Ergebnis der Na-turgewalten. Der Mensch hat innerhalb gewisser Grenzen die Möglichkeit, Vorkehrungenund vorbeugende Massnahmen zu treffen. Eine dieser Möglichkeiten, sich vor Hochwassernund Überflutungen zu schützen, besteht in einem vorausschauenden Betriebsmanagementvorhandener Talsperren und Staudämme mit ihren grossen Reservoirs, insbesondere derRegelung der Wasserabgabemangen in sich unterhalb der Anlage anschliessende Gewässer.Darüber hinaus kann das enorme Retentionspotential dieser Anlagen ohne nennenswerte fi-nanzielle Einbussen mittels Vorabsenkungen durch geregelte Entleerungs- und Entlastungs-organe sowie Turbinebetrieb effizient ausgeschöpft werden.

Die Zielsetzung dieses Forschungsvorhabens war es daher, ein neues Modell zur Hochwasser-vorhersage und Management für das Einzugsgebiet der Rhone oberhalb des Genfer Sees zuentwickeln. Darüber hinaus sollte ein funktionsfähiges Werkzeug hinsichtlich erforderlicherpräventiver Staupegelabsenkungen sowie zu treffender Entscheidungen entwickelt werden.Einen ersten Baustein stellt in diesem Zusammenhang ein 72 Stunden Wettervorhersagemo-dell, welches von MeteoSchweiz zur Verfügung gestellt wird, dar. Den zweiten wesentlichenBaustein bildet ein neues hydrologisches Vorhersagemodell. Im letzten Baustein wird einOptimierungswerkzeug bezüglich der Steuerung und Regelung im Sinne eines vorbeugendenEntleerungs- und Turbinebetriebes entwickelt.

Das neue hydrologische Vorhersagemodell basiert auf einem Konzept, welches amHYDRAM-EPFL entwickelt wurde. Dieses Konzept ermöglicht die Integration einer drei-dimensionalen Temperaturverteilung, potentieller Niederschläge sowie Evapotranspirationzur Simulation von Gletscherschmelzprozessen, Aussagen über die Zusammensetzung undBeschaffenheit von Schnee zu treffen sowie Infiltrations- und Oberflächenabflusse zu berück-sichtigen. Die höhenabhängige Temperaturverteilung erfolgt über eine Einteilung jedes Un-tereinzugsgebietes in Höhenbänder. In jedem Höhenband kann zudem zwischen Niederschlagund Schneefall unterschieden werden. Zur Modellierung des Einzugsgebietes wurde eine neueund verbesserte Version der Software Routing System II verwendet. Dieses objektorientierteSimulationswerkzeug ermöglicht die Integration von Routingprozessen in Flüssen sowie dieImplementierung hydraulischer Strukturen wie Wasserfassungen, Vorratsbehälter, Samm-ler, Turbinen und Regelungssystemen. Alle oben genannten Werkzeuge wurden schliesslichdazu verwendet, ein Hochwasservorhersagemodell einschliesslich der zehn im Einzugsgebietvorhandenen Wasserkraftanlagen für das Flussgebiet der Rhone oberhalb des Genfer See zu

v

entwickeln. Das Modell ist in Stundenzeitschritten über einen Zeitraum von 60 Monatenkalibriert und validiert worden. Darüber hinaus sind alle relevanten Daten der vorhandenenWasserkraftanlagen in das Modell integriert. Mit Hilfe des Modells können alle hydrologi-schen Zyklen sowie Hochwasser in Phase und Intensität richtig reproduziert werden. Aus-serdem wurde ein neues Verfahren zur Integration von Echtzeitmessdaten in das Modellimplementiert. Auf diese Weise passt sich das Modell den beobachteten Messdaten automa-tisch an und verbessert und korrigiert die neuen Ausgangsbedingungen, bevor es eine neuehydrologische Prognose beginnt.

Das neue Optimierungsmodell für den präventiven Hochwasserbetrieb stützt sich auf die hy-drologische Prognose und liefert klare betriebliche Anweisungen. Es verwendet hierbei deter-ministisch die Zustromprognosen in die Talsperren sowie die Abflussvorhersagen der zahlrei-chen Messstellen an den Gewässern im Einzugsgebiet. Darüber hinaus ist es ebenfalls in derLage, Aussagen über die Kosten der jeweiligen Entscheidung, Nicht-Entscheidung oder einesVorhersagefehlers zu treffen. Der neue Algorithmus ist mit einem anderen Optimierungs-und Entwicklungsalgorithmus, MOO genannt, der am LENI der EPFL entwickelt wordenist, validiert worden. Hier hat sich gezeigt, dass er eine ähnliche Leistungsfähigkeit besitzt,allerdings wesentlich geringere Berechnungszeiten erfordert. Die Berechnungsergebnisse desOptimierungstools werden automatisch in die hydrologische Simulation integriert, wo sieschliesslich validiert werden.

Die Funktionsfähigkeit des Hochwasservorhersage- und Betriebsmanagementsystems istmittels Simulation zweier Hochwasserereignisse, die im September 1993 und im Oktober2000 im Einzugsgebiet der Rhone abgelaufen sind, sowie dem Septemberhochwasser 2006,wo es zum ersten mal operativ eingesetzt worden ist, getestet und bewertet worden. DieBerechnungsresultate haben gezeigt, dass trotz eines hohen Unsicherheitsfaktors bei denVorhersagemodellen, die vom Programm vorgeschlagenen Entscheidungen sehr nahe an denoptimalen Entscheidungen lagen, die bereits vorher gefällt wurden.

Die Anwendung des Modells im Rhoneeinzugsgebiet oberhalb des Genfer Sees zeigt, dassder Retentionseffekt, den die vorhandenen Speicher bereits in der Vergangenheit bewirkthaben, noch erheblich verbessert werden kann. Die tatsächlich beobachtete Verringerungder Abflussspitzen in der Rhone am Aufluss des Einzugsgebietes betrug im Jahr 1993 12%und im Jahr 2000 10%. Bei Verwendung des neuen Modells hätte eine Verringerung desAbflussscheitels von 26% (1993) bzw. von 21% (2000) erreicht werden können. Auf dieseWeise hätten die grössten Hochwasserschäden in unmittelbarer Nähe zur Rhone vermiedenwerden können.

Dieses Forschungsprojekt hat zum einen die Möglichkeit aufgezeigt, welch grosses Poten-tial die vorhandenen Speicher hinsichtlich Hochwasserschutz bieten. Zum anderen hat dasProjekt zu einem neuen theoretischen Optimierungsmodell geführt, welches sowohl im Pla-nungsstadium als auch im operativen Hochwasserschutz eingesetzt werden kann, um diesesPotential mittels eines optimierten und abgestimmten Betriebes effizient auszuschöpfen undeinen bestmöglichen Retentionseffekt zu erzielen. Auf Grund von kompakten und leistungs-starken Simulations-, Vorhersage-, Anpassungs- und Optimierungswerkzeugen ist das ent-wickelte Modell sehr benutzerfreundlich und kann in Echtzeit betrieben werden.

Obgleich das Modell funktionsfähig und überzeugend ist, wäre es wünschenswert, weitereUnsicherheitsquellen in der Informationskette zu identifizieren und zu verbessern. AmEnde sollte der Blickpunkt darauf gerichtet sein, das System so auszubauen, dass jedeEntscheidung mit einem objektiven Risiko verknüpft ist.

vi

Je dédie ce travail à

Emmanuelle,

mes parents,

ma famille, et

à tous ceux qui, peut-être, en bénéficieront.

vii

viii

Table des matières

Résumé i

Abstract iii

Zusammenfassung v

1 Introduction 11.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11.2 Les crues dans le monde et en Suisse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11.3 Protection contre crues . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2

1.3.1 Mesures passives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.3.2 Mesures actives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41.3.3 Gestion des crues par des retenues existantes . . . . . . . . . . . . . 5

1.4 Contexte du travail de recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61.5 Objectifs du travail de recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61.6 Organisation du document . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

2 Modèles de prévision hydrologique 92.1 Objectifs et potentialités de la prévision de débit . . . . . . . . . . . . . . . 92.2 Prévision de débit à grande échelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

2.2.1 Modèles basés sur la résolution des équations hydrodynamiques . . . 112.3 Prévision de débit à moyenne échelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

2.3.1 Réseaux de neurones artificiels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142.3.2 Modèles statistiques - lissage et décomposition . . . . . . . . . . . . 182.3.3 Modèles statistiques - régressions multiples . . . . . . . . . . . . . . 222.3.4 Modèles statistiques - ARIMA ou Box-Jenkins . . . . . . . . . . . . 262.3.5 Modèles statistiques - ARMAX . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 282.3.6 Modèles adaptatifs - filtre de Kalman . . . . . . . . . . . . . . . . . 292.3.7 Modèles conceptuels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 312.3.8 Modèles conceptuels spatialement distribués . . . . . . . . . . . . . . 34

2.4 Prévision de débit à petite échelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 352.4.1 Reconnaissance de scénarios . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 362.4.2 Radars . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

2.5 Commentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39

3 Optimisation des systèmes dynamiques dédiés 413.1 Préambule . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 413.2 Bases théoriques de l’optimisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42

3.2.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 423.2.2 Méthodes d’optimisation simples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

3.3 Optimisation des ouvrages d’accumulation : formulation typique . . . . . . . 443.4 La programmation linéaire et ses extensions . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45

ix

3.5 Programmation non linéaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 463.6 Programmation dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 483.7 Intelligence artificielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50

3.7.1 Algorithmes évolutifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 503.7.2 Réseaux de neurones artificiels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 513.7.3 Logique floue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 513.7.4 Systèmes experts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

3.8 Autres méthodes dédiées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 553.9 Commentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

4 Modèle hydrologique semi-distribué 594.1 Remarques préliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 594.2 Concept de modélisation hydrologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60

4.2.1 Modélisation semi-distribuée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 604.2.2 Concept hydrologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60

4.3 Modèles hydrologiques conceptuels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 624.3.1 Modèle de fonte de neige . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 624.3.2 Réservoir linéaire de neige . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 634.3.3 Modèle de fonte glaciaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 644.3.4 Réservoir linéaire de glace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 644.3.5 Réservoir-sol : modèle SOCONT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 644.3.6 Transfert de débit dans un cours d’eau . . . . . . . . . . . . . . . . . 674.3.7 Comportement typique d’un sous-bassin versant . . . . . . . . . . . . 72

4.4 Fonctionnement opérationnel du modèle hydrologique et hydraulique . . . . 724.4.1 Logiciel Routing System II . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72

4.5 Spatialisation des variables météorologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . 754.5.1 Spatialisation des mesures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 754.5.2 Spatialisation des prévisions des précipitations . . . . . . . . . . . . 774.5.3 Spatialisation des prévisions des températures . . . . . . . . . . . . . 78

4.6 Calage et validation du modèle hydrologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 804.6.1 Paramètres de calage de GSM-SOCONT . . . . . . . . . . . . . . . . 814.6.2 Critères d’évaluation du modèle hydrologique . . . . . . . . . . . . . 824.6.3 Procédure de calage du modèle hydrologique . . . . . . . . . . . . . . 834.6.4 Choix des données de commande et de contrôle . . . . . . . . . . . . 86

4.7 Procédure de mise à jour du modèle hydrologique . . . . . . . . . . . . . . . 894.7.1 Provenance des incertitudes et stratégies de correction . . . . . . . . 894.7.2 Algorithme de filtrage des variables d’état du modèle hydrologique . 914.7.3 Illustration du fonctionnement de l’algorithme de filtrage . . . . . . . 93

4.8 Application au bassin versant du Rhône . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 944.8.1 Calage des sous-bassins versants non perturbés . . . . . . . . . . . . 964.8.2 Calage des sous-bassins versants perturbés . . . . . . . . . . . . . . . 994.8.3 Validation des sous-bassins versants non perturbés . . . . . . . . . . 1024.8.4 Validation des sous-bassins versants perturbés . . . . . . . . . . . . . 1054.8.5 Estimation de l’incertitude du modèle hydrologique . . . . . . . . . . 1114.8.6 Simulations avec mise à jour du modèle hydrologique . . . . . . . . . 115

4.9 Commentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120

5 Fonctionnement des aménagements hydroélectriques 1235.1 Remarques préliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1235.2 Fonctionnement des aménagements hydroélectriques . . . . . . . . . . . . . 123

x

5.2.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1235.2.2 Marché de l’électricité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1265.2.3 Aménagements au fil de l’eau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1285.2.4 Aménagements à accumulation à haute chute . . . . . . . . . . . . . 130

5.3 Les aménagements à accumulation du Valais . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1345.3.1 Situation sur le bassin versant du Rhône . . . . . . . . . . . . . . . . 1355.3.2 Les aménagements du Valais en chiffres . . . . . . . . . . . . . . . . 137

5.4 Reconstitution des séries temporelles de turbinage et pompage . . . . . . . . 1435.4.1 Contexte politique du projet et données à disposition . . . . . . . . . 1435.4.2 Aménagement Grande Dixence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1455.4.3 Aménagement Emosson . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1475.4.4 Aménagement Mauvoisin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1505.4.5 Aménagement Mattmark . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1505.4.6 Aménagement Gougra . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1515.4.7 Aménagement Salanfe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1525.4.8 Aménagement Pallazuit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1525.4.9 Aménagement Lienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1535.4.10 Aménagement Lötschen . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1535.4.11 Aménagement Bitsch . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153

5.5 Générateur stochastique de turbinage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1545.5.1 Génération de séries journalières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1565.5.2 Désagrégation en séries horaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159

5.6 Commentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160

6 Modèle d’optimisation 1636.1 Remarques préliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1636.2 Objectifs et contraintes de l’optimisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1636.3 Optimisation de la gestion d’un aménagement hydroélectrique lors des crues 165

6.3.1 Estimation du volume entrant dans une retenue . . . . . . . . . . . . 1656.3.2 Estimation du volume disponible dans une retenue . . . . . . . . . . 1666.3.3 Optimisation locale - définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1676.3.4 Maximisation de l’adduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1676.3.5 Exemple de résolution du problème : l’aménagement de Mattmark . 168

6.4 Optimisation de la gestion de plusieurs aménagements lors des crues . . . . 1716.4.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1716.4.2 Définition du problème d’optimisation . . . . . . . . . . . . . . . . . 1726.4.3 Fonctions de coût . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1726.4.4 Variables et espace des solutions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1746.4.5 Evaluation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 174

6.5 Algorithme d’optimisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1776.5.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1776.5.2 Concept de l’algorithme d’optimisation . . . . . . . . . . . . . . . . . 1786.5.3 Commentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180

6.6 Application à un système idéal avec réservoirs multiples . . . . . . . . . . . 1816.6.1 Description du modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1816.6.2 Analyse paramétrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1826.6.3 Espace des solutions à 2 dimensions . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1856.6.4 Validation de l’algorithme d’optimisation . . . . . . . . . . . . . . . 1866.6.5 Concept de borne inférieure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 188

6.7 Conclusions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 188

xi

7 Application du modèle de gestion des crues au bassin versant du Rhône 1917.1 Fonctionnement opérationnel du modèle de gestion des crues . . . . . . . . . 191

7.1.1 Fonctionnement du système à haut niveau . . . . . . . . . . . . . . . 1917.1.2 Fonctionnement du modèle de prévision hydrologique . . . . . . . . . 1927.1.3 Fonctionnement du modèle d’optimisation . . . . . . . . . . . . . . . 1927.1.4 Technologies utilisées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193

7.2 Modèle d’optimisation appliqué au bassin versant du Rhône supérieur . . . 1957.2.1 Architecture du modèle de simulation . . . . . . . . . . . . . . . . . 1957.2.2 Modèle d’optimisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195

7.3 Crue de septembre 1993 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1987.3.1 Prévisions hydrologiques lors de la crue de septembre 1993 . . . . . . 2017.3.2 Optimisation des opérations préventives - validation de l’algorithme 2067.3.3 Performance opérationnelle du système d’aide à la décision . . . . . 2127.3.4 Conclusions - Crue de septembre 1993 . . . . . . . . . . . . . . . . . 212

7.4 Crue d’octobre 2000 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2157.4.1 Prévisions hydrologiques lors de la crue d’octobre 2000 . . . . . . . . 2157.4.2 Performance opérationnelle du système d’aide à la décision . . . . . 2207.4.3 Conclusions - Crue d’octobre 2000 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 226

7.5 Alerte crue de septembre 2006 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2267.5.1 Prévisions météorologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2267.5.2 Prévisions hydrologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2277.5.3 Gestion des aménagements hydroélectriques . . . . . . . . . . . . . . 2317.5.4 Commentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 234

7.6 Conclusions de l’application du modèle sur le bassin versant du Rhône . . . 234

8 Conclusions et perspectives 2378.1 Modélisation hydrologique et hydraulique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2378.2 Modèle d’aide à la décision . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2388.3 Application au bassin versant du Rhône à l’amont du Léman . . . . . . . . 2398.4 Innovations issues de la recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2398.5 Perspectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 240

Remerciements 243

Liste des tableaux 245

Liste des figures 247

Notations 251

Liste des abréviations 255

Références 257

xii

1 Introduction

1.1 Préambule

L’eau, source de vie, source d’énergie aussi, révèle à l’homme son image. Lorsqu’il secontemple, prostré sur le rivage de son lac ou de son océan préféré, l’homme en tire bonheuret quiétude. Mais l’eau a également le don de lui rappeler sa petitesse. Comme l’immensitédu glacier et de ses crevasses dans lesquelles il chute, comme l’infini de l’océan sur lequelil se perd, la crue des rivières et des fleuves est depuis toujours un phénomène aquatiqueque l’homme respecte et dont il a peur. Survenant à la suite de fortes précipitations, parfoisrégulières et durables, parfois intenses et violentes, les crues ne laissent après leur passageque désolation, misère et destruction. Les débordements associés aux dépôts de sédimentsqu’elles engendrent, les vies qu’elles emportent dans leurs flots et les inondations qu’ellesprovoquent incitent l’homme à la plus grande prudence ; qui pourtant disparaît avec samémoire, dans la mesure où les fortes crues ne surviennent que rarement, et ne se comptentparfois en un lieu qu’à quelques épisodes par siècle. La nature se charge pourtant de rappelerà l’homme sa puissance et de réveiller sa mémoire...

1.2 Les crues dans le monde et en Suisse

Dans le monde, les dégâts annuels liés aux crues ont été estimés à 50 milliards de dollarsUS par an durant la décennie 1990-1999 et une augmentation des coûts de 4 % par ansemble se dessiner (ONU, 2002). Si le phénomène n’affecte en général, au niveau mondial,que les classes sociales les plus défavorisées, il provoque annuellement la mort de plus de5000 personnes selon l’ONU (ONU, 2002). En Suisse, les dégâts liés aux crues, ont coûtéplus de CHF 8.6 mia en 30 ans, soit de 1972 à 2002 et 88 personnes en sont mortes pendantcette période (Schmid et al., 2004). Il est également opportun de rappeler les événementsd’août 2005 en Suisse centrale qui ont provoqué des dégâts estimés à CHF 2 Mia, soit lesplus importants jamais enregistrés en Suisse (OFEG, 2005). En outre, la croissance de lapopulation, le développement économique et la progression de la densité des valeurs sur leterritoire sont des facteurs qui augmentent de manière significative les montants des dégâtsd’année en année (Schleiss, 2004). Les processus météorologiques et hydro-géologiques àl’origine des crues sont très variés et chaque région vulnérable connaît un nombre limité deprocessus caractéristiques. Dans les régions de plaine, les crues se révèlent catastrophiquesen raison de l’étendue des inondations provoquées par l’absence de relief et par la longuedurée des précipitations. La Meuse et le Rhin aux Pays-Bas, l’Elbe, le Rhin et le Danubeen Allemagne, la Tamise à Londres et le Mississipi aux Etats-Unis sont les exemples lesplus célèbres de cours d’eau sortant régulièrement de leur lit. La Suisse dont le territoireest essentiellement montagneux n’est pas soumise à de tels processus, mais subit des cruesrapides dont les volumes écoulés proviennent souvent de la fonte du stock de neige. Ainsil’Aar, sortant de son lit au printemps à la suite de longues précipitations associées à la fontede la couverture neigeuse de l’Oberland rappelle bien souvent aux habitants de la ville de

1

Thoune de ne pas ranger leurs biens à la cave. De même, le Rhône quittant localementson lit à la suite du blocage orographique des perturbations venant de la mer Méditerranéerappelle aux Valaisans l’importance de la protection de leur plaine alluviale. De plus, lesfortes précipitations provoquent en Suisse un nombre important de glissements de terrainet de laves torrentielles, phénomènes concommitants aux crues, difficilement prévisibleset provoquant d’innombrables dégâts aux personnes, aux biens et aux infrastructures.Pourtant, les crues ne sont pas seulement une fatalité. Depuis toujours, l’homme essaiede s’en protéger, et ses moyens d’action font l’objet du paragraphe suivant.

1.3 Protection contre crues

L’humanité a retenu du Déluge que l’eau du Ciel, attirée par la Mer, ne franchissait lesmontagnes que par les vallées qu’elle avait creusées. Noé, à l’écoute des recommandationsde Dieu, l’avait bien compris et s’en est allé construire avec sa femme, ses trois enfants,ainsi qu’un mâle et une femelle de chaque espèce animale, une arche sur les flancs du MontArarat au Sud-Est de la Turquie actuelle. Il survécut ainsi aux inondations provoquéespar le Seigneur et permit la renaissance de l’Humanité. Les civilisations qui s’en suivirents’attachèrent à construire leurs villes sur des collines en bordure des fleuves, bien à l’abride leurs écarts de comportement. Mais la croissance des populations et de leurs besoinsen terres cultivables les obligèrent à s’approcher des cours d’eau pour en tirer les bienfaitset construire des systèmes d’irrigation. Ils profitèrent également de leurs crues, tels lesbrillants Egyptiens exploitant les débordements annuels du Nil pour nourrir leurs terres enalluvions fertiles. Ils souffrirent toutefois de l’humidité et des marécages que les inondationsrégulières provoquaient et où les épidémies se développaient. Les Chinois furent peut-êtreles premiers à s’intéresser prioritairement au contrôle des crues, et ceci dès 2200 av. J.-C. lorsque l’Empereur Yu déclara que quiconque contrôlait le fleuve Jaune contrôlerait laChine. L’histoire démontrera plus tard que le contrôle des cours d’eau serait en Chine ladémonstration du pouvoir, exploité fortement dans la deuxième moitié du 20e siècle par lerégime communiste de Mao qui lancera de nombreux projets pharaoniques. Quelles furentalors les mesures techniques permettant le contrôle des crues ?

Différents types de mesures existent, dont l’influence s’exerce à différents niveaux. Ils sontdécrits ici et reprennent la terminologie et la philosophie actuelle suisse (OFEG, 2001).Deux approches complémentaires permettent, selon la situation, d’atteindre les objectifs deprotection. Les mesures passives, intégrées à l’aménagement du territoire, limitent l’implan-tation de l’homme dans des lieux appropriés. Parallèlement à ces mesures sont associées lesmesures d’accompagnement telles que règlements d’urgence et plans d’évacuations. D’uneautre manière, les mesures actives permettent à l’homme de coloniser des zones potentiel-lement dangereuses en limitant le risque par la modification des caractéristiques du coursd’eau. Quelle que soit l’approche retenue, les mesures d’entretien doivent accompagner lesmesures de protection afin de garantir la performance du système au cours du temps.

1.3.1 Mesures passives

Concept de protection intégré à l’aménagement du territoire

Le choix d’une méthode pour assurer la protection contre les crues d’un cours d’eau n’estsouvent pas évident. A cause de la grande échelle spatiale et temporelle du processusde formation des crues, il est nécessaire de combiner plusieurs moyens de protection au

2

travers d’un concept intégré à l’aménagement du territoire. Il est également recommandéde concilier les aspects sécuritaires, écologiques et économiques lors de l’élaboration d’untel projet. La Suisse dispose maintenant d’un arsenal légal pour assurer la cohérence desconcepts de protection contre les crues. Il s’agit de l’intégration, dans les plans directeurs del’aménagement du territoire, de contraintes liées à l’eau telles que zones non constructibles,zones réservées à l’épanchement des crues ou zones soumises à règles constructives strictes.Ces plans prévoient également la localisation de tronçons de cours d’eau renforcés, detronçons laissés à un développement naturel et de terrains inondables. Ils visent égalementune augmentation de l’emprise naturelle du cours d’eau lui permettant d’améliorer sonpropre effet de routage, c’est-à-dire le stockage du volume lors du transit de la crue. LaSuisse est à la pointe de ce mouvement grâce à l’élaboration et à la réalisation de projetstels que le réaménagement de la Thur (Zaugg, 2003), et la 3e Correction du Rhône (DTEE,2000). Il convient toutefois de se rappeler que de tels concepts sont soumis à des difficultéscroissantes. D’une part, le coût des terrains peut se révéler prohibitif et les oppositionsdes riverains freinent la mise en oeuvre d’un concept de protection. D’autre part, lesincertitudes liées au débit de dimensionnement poussent les décideurs à des choix qui soitengageront trop fortement les finances publiques, soit réduiront la marge de sécurité dusystème (Bérod and Consuegra, 1995; Hingray et al., 2006). La protection totale contre lescrues n’est donc pas forcément garantie localement et le risque résiduel subsiste, pour tousles événements sortant du large cadre imaginé par les ingénieurs, mais doit être toutefoisconfiné.

Renforcement temporaire des rives du cours d’eau

La télévision nous montre, lors de chaque crue importante, les soldats et la sécurité civile sebattre à coups de sacs de sable ou de murs gonflables afin d’éviter les débordements locauxdes rivières déchaînées. Ces mesures temporaires par éléments mobiles sont indispensablesdans des situations d’urgence mais ont une efficacité limitée. En effet, seul un réhaussementdes digues de l’ordre du mètre peut être réalisé et lorsque ce dernier n’est pas suffisant, ledébordement peut se développer de manière rapide.

Mesures d’urgence - évacuation des populations

De toute évidence, si aucune des mesures de protection mises en place n’a réussi à contenirles flots, mieux vaut s’enfuir... si c’est encore possible. Pour limiter les pertes humaines,un délai d’intervention doit être envisagé afin de permettre l’évacuation des populations endanger avant que la situation ne dégénère. Ce plan d’intervention nécessite donc certainesinformations en temps réel afin de prendre la décision d’évacuer les personnes en dangeret peut également se baser sur des prévisions (du Plessis, 2002). En général, un tel pland’intervention considère plusieurs niveaux d’alarme et de mobilisation, tel le plan du LandBaden-Württemberg destiné à assurer la gestion d’une telle situation de crise (Homagk,1996). Ainsi, lorsque certains niveaux d’eau mesurés dépassent une première valeur seuil, ilest nécessaire de prévenir les agents de la sécurité civile de se tenir à disposition. Suite à undépassement d’une deuxième valeur seuil, ces derniers doivent se mobiliser, puis procéder àdes réhaussements des rives et autres comblements de passages possibles pour l’eau, avant endernier recours d’ordonner l’évacuation de la population. Des plans d’intervention peuventaussi se baser sur des prévisions de crue, moyen branché actuellement grâce aux récentsdéveloppements des prévisions quantitatives de précipitations par modélisation numériqueou par mesure radar. Ce vaste sujet fera d’ailleurs l’objet d’une part importante de ce travailde recherche.

3

1.3.2 Mesures actives

Augmentation de la capacité hydraulique

Première mesure active employée, l’augmentation de la capacité hydraulique des cours d’eaua pour objectif d’assurer le transit de grands débits sans dégâts sur le voisinage du torrent oude la rivière. Cette augmentation de capacité hydraulique peut être obtenue principalementde deux différentes manières. Premièrement, en augmentant la section mouillée du coursd’eau par l’élargissement ou le réhaussement des rives ou l’abaissement local du fond dulit, et deuxièmement en diminuant la résistance à l’écoulement et donc en permettantl’augmentation de sa vitesse. La Suisse exploita ce moyen à grande échelle dès le débutdu 19e siècle sur le plateau lors de la première Correction des Eaux du Jura et lors dela première Correction du Rhône. Les travaux d’augmentation de la capacité hydrauliquedevaient permettre principalement l’assèchement des marais afin d’augmenter la surfacecultivable et de diminuer l’apparition d’épidémies (Ehrsam, 1974). Des nouveaux travauxfurent toutefois lancés à la suite des premières corrections et mirent en évidence leslacunes de telles solutions dites intégrales. Outre les problèmes environnementaux causéspar la canalisation des rivières et la disparition d’espèces vivantes animales et végétales,qui n’étaient absolument pas d’actualité à cette époque, des lacunes sécuritaires furentidentifiées. En effet, ces stratégies dites de résistance conduisaient, lorsque leurs limitesétaient dépassées, à des catastrophes pires que celles se produisant avant l’interventionhumaine. La cause en était la concentration des zones touchées et par conséquent les plusgrandes rapidités et intensités des débordements, ajoutés à l’impossibilité pour l’écoulementde retourner dans le cours d’eau à cause des digues. Le système hydraulique pouvait ainsipasser sans transition d’un état fonctionnel à un état non fonctionnel catastrophique. On neparle même pas des problèmes extrêmement compliqués posés par le transport solide, dontles dépôts, souvent mal placés lors des crues, entraînaient la surélévation du fond du coursd’eau et la diminution de sa capacité hydraulique.

Laminage des crues par stockage du volume d’eau

Lorsque la capacité hydraulique de la rivière est insuffisante ou le débit de dimensionnementparticulièrement incertain, il est possible d’envisager le stockage du volume excédentairedans des réservoirs artificiels. Il s’agit d’une pratique courante sur de nombreux affluentsdes grands fleuves comme en Allemagne où les réservoirs de ce type sont nombreux(Krainer and Hable, 2004). Un avantage de ce système est de permettre l’utilisation dela retenue artificielle à des fins autres que la sécurité, comme par exemple le stockaged’eau potable, l’irrigation ou même la production hydroélectrique. Il convient toutefois derelativiser l’influence de tels ouvrages sur des cours d’eau très importants tels le Rhin,l’Elbe ou même le Mississippi. Les volumes de stockage disponibles localement dépassentrarement quelques dizaines millions de mètres cubes, tandis que les volumes nécessairesau laminage des crues de ces fleuves atteignent plusieurs centaines de millions de mètrescubes. De plus, il arrive que ces réservoirs soient pleins au début de la crue, ce quianéantit leur effet bénéfique (Schumann, 2004). Il devient dès lors nécessaire de prévoir deszones d’épanchement, également appelées polders au Nord de l’Europe, sortes de réservoirsartificiels temporaires de grande surface pour stocker ces immenses volumes. Surgissent alorsles nombreux problèmes liés à l’utilisation du sol et les coûts importants de non-exploitationde ces terrains. Une récente étude effectuée aux Pays-Bas n’a d’ailleurs pas pu mettre enévidence de réels avantages financiers de ce concept de protection contre les crues (Vis et al.,2003). Cependant, en Suisse, des exemples récents illustrent les succès de ces mesures, enparticulier dans la région de l’Engelberger Aa (Schleiss, 2005).

4

Outre les deux types de mesures présentées dans ce chapitre, au delà des mesures d’entretientoujours importantes et nécessaires peuvent exister des solutions pragmatiques tenantcompte des caractéristiques propres de chaque région, en particulier lorsque des ouvragesd’accumulation sont présents sur le bassin versant.

1.3.3 Gestion des crues par des retenues existantes

Certaines régions de notre planète, et en particulier l’arc alpin, ont la chance d’abriterde nombreux ou d’importantes retenues d’accumulation. En général, ces aménagementsproduisent un effet de laminage protecteur même si leurs réservoirs sont pleins au début dela crue (Biedermann et al., 1996; Hauenstein, 1998). Toutefois, ceux-ci ont la responsabilité,en toutes situations et quels que soient leurs buts, de ne pas péjorer par leur présence lasituation prévalant avant leur construction. Lors des crues, ils sont par conséquent astreints àrespecter certaines procédures qui éviteront un accident grave tel qu’une rupture de la digue.A titre d’exemple, l’aménagement hydroélectrique de Mattmark en Valais est actuellementutilisé pour la protection contre les crues grâce à un volume libre dont l’utilisation nepeut se faire que pour laminer le débit entrant lors de situations extrêmes (Boillat et al.,2000; André and Boillat, 2002; Sander and Haefliger, 2002). Pour résumer ce sujet qui seraabordé en détail au chapitre 3, considérons un aménagement suffisamment important pourêtre soumis à une telle contrainte, c’est-à-dire ayant un règlement d’urgence.

Selon règlement d’urgence

En fonction du débit entrant dans la retenue ou de la vitesse de montée du plan d’eau,différentes procédures devront être entamées. Tout d’abord, le personnel du barrage devrase rendre à la digue pour livrer des informations régulières au centre de commande. Ensuite,les pompages éventuels, puis les captages situés sur d’autres bassins versants devront être mishors service. Le cas échéant, le turbinage sera enclenché, avant et en dernier lieu de recourirà l’ouverture des vidanges ou à l’utilisation des évacuateurs de crue. En cas de catastrophe,le personnel de piquet devra quitter la digue afin de se rendre en sécurité.

Sécurité en aval de la retenue

Lorsque l’aménagement est prévu pour le turbinage à haute chute, la restitution du débitturbiné au réseau hydrographique naturel s’effectue plusieurs kilomètres, parfois dizainesde kilomètres en aval de l’aménagement. Le turbinage intensif pendant la crue permetdonc à l’aménagement d’avoir un effet directement protecteur sur sa vallée en soutirantle débit turbiné et en le restituant beaucoup plus en aval. Il agit alors comme un ouvragede dérivation.

Sécurité de la rivière à l’aval de la restitution

Qu’en est-il de l’influence d’un aménagement sur le cours d’eau en aval de la restitution ? Sil’effet de laminage se produit en toute situation, le turbinage intensif effectué pendant unlaps de temps inopportun peut se révéler néfaste. Si, lors de la pointe de la crue, le débitturbiné s’ajoute au débit naturel, il contribuera à l’augmentation des dégâts provoqués parla crue. Il s’agit ici d’un point essentiel de la gestion des crues qui sera traité dans cetravail.

Concept de vidange préventive

Afin de s’affranchir d’une telle prise de risque, la gestion d’un aménagement hydrauliquelors des crues doit faire l’objet d’une analyse détaillée. En particulier, elle doit considérer

5

le moyen le plus économique et flexible de libérer du volume dans la retenue avant la crueafin de maximiser l’effet de laminage lors de sa pointe. Elle constitue précisément le sujetde ce travail dont les objectifs sont la proposition de stratégies de gestion des crues paropérations préventives des aménagements hydroélectriques. Proposant un concept de calculen temps réel des opérations préventives sur la base de prévisions de débit à 72 heures eten tenant compte de toute la complexité d’un système réel, ce travail offrira au lecteur despistes pour la résolution d’un problème aux objectifs multiples et soumis à un importantniveau d’incertitude.

1.4 Contexte du travail de recherche

Ce travail de recherche s’inscrit dans le cadre du projet MINERVE, acronyme signifiantModélisation des Intempéries de Nature Extrême, des Retenues Valaisannes et de leursEffets. Les premiers balbutiements de ce projet furent une réponse à certains esprits chagrinsprétendant que les aménagements hydroélectriques avaient été la cause d’importants dégâtslors des crues du Rhône en 1987 et 1993. Il fallut alors analyser leur effet réel en comparant lasituation observée avec celle qui aurait prévalu sans la présence des retenues d’accumulation.Certaines études réussirent à prouver que leur influence avait été favorable à la sécurité(projet CONSECRU, Bérod and Consuegra (1995)), voire même qu’elle avait été maximale(Biedermann et al., 1996). Cependant, les conclusions de cette dernière étude stipulaientégalement que rien de plus ne pouvait être entrepris du point de vue des aménagementshydroélectriques pour la gestion des crues du Rhône.

La crue du Rhône d’octobre 2000, d’une ampleur jamais observée en Valais, provoquaà nouveau d’immenses dégâts essentiellement le long des affluents du fleuve. L’occasionétant trop belle, il fallut à nouveau vérifier que les aménagements hydroélectriques avaientbien contribué à la sécurité de la vallée. La modélisation fut effectuée au Laboratoire deConstructions Hydrauliques (LCH) de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL)et mena au développement du programme Routing System (Dubois and Boillat, 2000;Boillat et al., 2002; LCH, 2002). Les résultats de l’étude montrèrent que l’influence desretenues alpines était toujours favorable, mais qu’elle dépendait du niveau de remplissageinitial, c’est-à-dire du volume de stockage disponible avant la crue. Il n’en fallut pas plus pourlancer l’idée de créer ce volume de stockage nécessaire, le cas échéant, avant la crue, sur labase de prévisions hydrologiques (Raboud et al., 2001; Pougatsch and Raboud, 2002).

Le projet MINERVE a donc pour objectif le développement d’un modèle de prévision descrues dans le bassin versant du Rhône à l’amont du Léman, et son utilisation dans unsystème d’aide à la décision pour la gestion des aménagements hydroélectriques lors deces crues. Cet outil devrait permettre aux responsables de la cellule scientifique de crise(CERISE) de fournir des recommandations à la cellule catastrophe (CECA) de l’Etat duValais (Raboud et al., 2001).

1.5 Objectifs du travail de recherche

Ce travail de recherche englobe différents aspects du projet MINERVE. Il s’inscrit égalementdans un cadre plus général, puisque les modèles de prévision et de gestion des crues ne sontpas encore toujours satisfaisants et que de nombreuses améliorations restent nécessaires(figure 1.1).

6

Le premier objectif est de disposer d’un outil de prévision hydrologique de pointe, adaptéaux conditions, à la morphologie et aux ouvrages du bassin versant du Rhône à l’amont duLéman. Dans ce travail de recherche, ce n’est pas le développement du concept hydrologiqueen lui-même qui était l’objectif premier, car ce travail a été réservé à l’équipe du Laboratoired’Hydrologie et Aménagements (HYDRAM) de l’EPFL (Hamdi et al., 2005b). Il s’agitplutôt d’appliquer au bassin versant le modèle hydrologique sur la base du nouveau conceptimaginé, de le caler et le valider, d’en évaluer la performance et la pertinence, en y intégrantles ouvrages hydrauliques d’importance.

Le deuxième objectif de ce travail est l’assimilation des prévisions météorologiques dansle modèle hydrologique et leur utilisation dans un outil de prévision opérationnel. A cetobjectif est également associée la possibilité d’assimiler les observations pour corriger lemodèle hydrologique en temps réel.

Le troisième et principal objectif de ce travail est de développer une méthode d’optimisationde la gestion des aménagements hydroélectriques à accumulation lors des crues pourmaximiser leur effet protecteur de la vallée. En particulier, il s’agit de trouver le moyende modéliser leur influence et d’intégrer ce modèle dans un outil d’optimisation dont lesrésultats doivent pouvoir être validés et intégrés automatiquement par l’outil de prévisionhydrologique. Cet objectif représente le point fort de ce travail de recherche, puisqu’ilintègre les développements du modèle de prévision hydrologique pour leur ajouter une valeurimportante, celle menant à la décision en situation de crise.

Les résultats attendus de cette recherche sont d’abord les développements techniques dumodèle de prévision hydrologique, de son utilisation en prévision et de sa capacité à secorriger automatiquement de manière à simuler au mieux l’observé. Le résultat obtenu estun outil de prévision hydrologique opérationnel, livré à l’Etat du Valais, effectuant cesopérations.

Les résultats scientifiques attendus sont le développement d’une méthodologie pour l’éva-luation et l’optimisation de l’influence des aménagements hydroélectriques lors des crues.Au final, un outil d’aide à la décision déterministe a été réalisé, également appelé systèmeexpert, couplé de manière opérationnelle au modèle de prévision hydrologique.

1.6 Organisation du document

Ce rapport de thèse s’organise autour des deux axes de développement suivis dans lecadre de ce projet de recherche. Le premier axe développe les aspects liés à la prévisionhydrologique, tandis que le deuxième suit les développements de l’outil d’aide à la décisionpour les opérations préventives sur les aménagements hydroélectriques. Bien entendu, leterrain d’application de ces méthodes ne sera pas oublié et le bassin versant du Rhône àl’amont du Léman constituera à ce titre un magnifique terrain de jeu appelé Valais.

Le chapitre 2 présente une revue de littérature des différents moyens de prévoir les crueset de leur performance. Le chapitre 3 effectue le même type d’analyse mais cette fois-ci sur les méthodes d’optimisation dédiées à la gestion des aménagements hydrauliques àaccumulation.

Le chapitre 4 décrit en détail les modèles hydrologiques développés dans ce projet ainsique leur performance sur la base d’une application au bassin versant du Rhône. Il fait état

7

Fig. 1.1: Description des besoins en recherche dans le cadre du développement des modèles degestion des crues.

également des concepts et outils informatiques nécessaire à la réalisation d’un projet decette ampleur.

Les chapitres 5 , 6 et 7 décrivent les connaissances et outils développés pour l’aide àla décision en situation de crue. Le premier volet décrit le contexte économico-politiquedu marché de l’électricité ainsi que l’exploitation des aménagements hydroélectriques àaccumulation. Ces bases sont en effet nécessaires à la compréhension des concepts del’outil d’optimisation présentés dans le chapitre 6, ainsi qu’à son application, objet duchapitre 7.

Enfin, les commentaires finaux et les perspectives offertes par les développements issus dece travail sont présentés dans le chapitre 8.

8

2 Modèles de prévision hydrologique

Le modèle de prévision des crues est l’élément essentiel qui, lorsqu’il est disponible,conditionne la gestion de telles situations de crise. En fonction des valeurs de débit prévuesseront engagées soit des procédures d’urgence, soit des opérations préventives des ouvrageshydrauliques, ou encore des évacuations de population. Une description théorique exhaustivede la prévision des crues n’est pas envisageable dans cet ouvrage, tant les modèles deprévision varient selon les conditions pour lesquelles ils sont développés. En outre, ilconvient de se souvenir que ces modèles ont attendu l’avènement de puissants moyensinformatiques pour voir le jour, tant le nombre de paramètres et d’équations qu’ils intègrentest imposant. Il ne serait par conséquent pas raisonnable de vouloir disséquer les modèlesde comportement de chacun des systèmes existants. Cependant, une revue des technologiesactuellement disponibles, complétée d’un certain nombre d’exemples est proposée dans cechapitre, incluant une description des modèles hydrologiques utilisés ainsi que des techniquesnumériques nécessaires au bon fonctionnement des systèmes de prévision des crues. L’objectifde ce chapitre est de déterminer les forces et faiblesses des différentes technologies pour menerau choix de l’outil le plus approprié dans le cadre de cette recherche.

Ce chapitre sera divisé en cinq parties. Dans la première seront rappelés les objectifs etpotentialités des modèles de prévision de débit. Dans les parties suivantes seront décritsles différents systèmes de prévision de débit selon l’échelle à laquelle ils s’appliquent. Ilest en effet indispensable d’adapter la technologie selon que l’on s’intéresse à un bassinversant ayant une surface d’environ 10-1’000 km2 (petite échelle), à un cours d’eau moyendrainant une surface de 1’000-10’000 km2 (échelle moyenne) ou à un fleuve pouvant avoirune surface contributive de plusieurs dizaines de milliers km2 (grande échelle). Enfin, lacinquième partie récapitulera les informations fournies dans cette étude et proposera unesynthèse des performances et potentialités des modèles de prévision.

Avant d’entrer dans le détail de la revue bibliographique, rappelons que la prévisionhydrologique est la discipline visant à prédire le débit qui devrait se produire à une certaineéchéance. Il peut s’agir de prévoir le débit qui se produira demain, la semaine prochaineou le mois prochain. Ceci n’est en rien comparable avec le développement de méthodesvisant à déterminer des débits ou des hydrogrammes de projet, données utilisées lors dudimensionnement d’ouvrages.

2.1 Objectifs et potentialités de la prévision de débit

Dans ce chapitre sont présentées les technologies de prévision de débit utilisées avec dessystèmes d’aide à la décision, pour l’exploitation des aménagement hydrauliques ou pour lasécurité des populations. Il ne s’agit en aucun cas de méthodes permettant l’établissement dedébits de dimensionnement et utilisées dans le cadre d’avant-projets et de projets d’ouvrageshydrauliques.

9

Quels sont les objectifs des systèmes de prévision de débit ainsi que les performances qu’ilsatteignent ? La prévision de débit poursuit en général deux objectifs distincts : le premierconcerne l’exploitation des aménagements hydrauliques. En effet, l’utilisation régulière dela prévision de débit permet d’optimiser la régulation des aménagements disposant d’unecertaine accumulation, de procéder à des vidanges préventives ou à des non-opérations lorsdes crues, d’éviter des déversements et finalement d’augmenter les performances au senslarge d’un aménagement. Le deuxième objectif de la prévision de débit concerne la sécuritédes populations et des biens. Elle est utilisée comme une aide efficace à la décision lors desituations de crise. Sur la base de cette prévision, il est possible de procéder à l’engagementde la sécurité civile ou encore à la mise en oeuvre de mesures exceptionnelles de sécuritételles que digues provisoires ou évacuations.

La performance d’un système de prévision de débit dépend de nombreux facteurs maisen premier lieu de l’adéquation entre la technologie utilisée et les processus physiques lesplus influents du contexte de prévision. Les grands fleuves de plaine tels que le Rhin, laMeuse ou le Danube, avec leurs temps de réponse de plusieurs jours, seront prévisiblesde manière fiable plusieurs jours à l’avance, sur la base des mesures uniquement. Dansce cas, tant les processus météorologiques que les processus hydrologiques sont réguliers.Les grands fleuves des régions boréales, ayant eux aussi des temps de réponse relativementlongs, sont toutefois soumis à des processus physiques plus complexes incluant la fontede neige au printemps. Une incertitude plus importante sera donc présente et rendra laprévision à moyen terme moins fiable. Les torrents des régions montagneuses, réagissantfortement aux précipitations convectives locales, se mettant en crue en quelques dizaines deminutes suite à des processus hydrologiques complexes incluant l’effet du transport solide.Ils sont pratiquement imprévisibles à cause de la très forte incertitude sur les processusmétéorologiques et hydrologiques. Dans ce cas, seule une prévision à court terme, appelée enanglais nowcasting sera possible sur la base d’imagerie radar et de mesure des précipitations.Cette brève entrée en matière effectuée, passons maintenant à une description détaillée dessystèmes de prévision de débit en fonction de l’échelle spatiale considérée.

En raison du nombre et de la diversité des modèles présentés dans ce chapitre, les notationsne sont pas explicitées de manière exhaustive à la fin du document, mais décrites lorsquecela est nécessaire dans le texte.

2.2 Prévision de débit à grande échelle

Les nombreux systèmes de prévision de débit qui existent sur les grands fleuves peuventêtre considérés comme des modèles à grande échelle, avec des surfaces contributives de plusde 50’000-100’000 km2. Afin de modéliser convenablement de tels systèmes, il est bon de sesouvenir de quelques grands principes. Les écoulements concernés sont fluviaux et les vitessesd’écoulement relativement faibles, même pendant les crues. Par conséquent, le temps deréponse du bassin versant, ou autrement dit la période séparant le début des précipitationsau début de la montée de l’hydrogramme, peut atteindre plusieurs jours. Or, pendant ce lapsde temps peuvent se produire différents phénomènes météorologiques, qui rendront difficileune bonne prévision par modélisation pluie-débit. Ce problème est en général résolu par ladivision du bassin versant en sous-bassins, eux-mêmes faisant l’objet de sous-modèles dedifférents types. Certains systèmes tentent toutefois de réaliser directement des prévisionsà grande échelle et, afin de rester le plus proche possible des processus physiques, se basent

10

sur la résolution des équations de l’hydrodynamique pour propager les ondes de crues del’amont vers l’aval.

2.2.1 Modèles basés sur la résolution des équations hydrodynamiques

Les modèles d’écoulement dynamiques se basent sur le calcul de l’écoulement d’un point Avers un point B situé à l’aval. Si la contribution des affluents du cours d’eau et de la surfaceintermédiaire drainée peut être négligée sur le tronçon AB, l’hydrogramme en B pourra êtrecalculé à partir des mesures effectuées en A et des conditions de bord en B. Les équationsà résoudre sont connues et représentent les équations de base de l’hydraulique classique : ils’agit des équations de Barré de St-Venant appliquées ici à un écoulement unidimensionnel.La première équation exprime la conservation de la masse (équ. 2.1) :

S∂U

∂x+ U

∂S

∂x+ B

∂h

∂t= 0 (2.1)

où S est la surface mouillée, U la vitesse moyenne de l’écoulement, x la coordonnée curvilignedu tronçon, B la largeur de la section, h la hauteur d’eau et t le temps. La deuxième équationexprime la conservation de l’énergie (équ. 2.2) :

1g

∂U

∂t+

U

g

∂U

∂x+

∂h

∂x− Jf + Je = 0 (2.2)

où g est l’accélération terrestre, Jf la pente de fond et Je la pente d’énergie. La résolutiondes équations de St-Venant est extrêmement complexe, et un certain nombre simplificationsdoit être effectué afin de permettre l’introduction des conditions de bord et mener àl’établissement de solutions, et le lecteur intéressé trouvera des exemples de schématisationnumérique dans (Graf and Altinakar, 1996). L’avantage de ce type de modèle est qu’ilpermet de calculer une prévision de débit en ne se basant que sur des mesures de débitsituées à l’amont de l’objectif. Outre l’utilisation de ce modèle mathématique à des finsd’analyse (Thu, 2002), de nombreuses applications dans le domaine de la prévision sontconnues. Des exemples d’utilisation de ces modèles se trouvent en Allemagne dans le landBaden-Württemberg pour ses deux plus importants cours d’eau que sont le Rhin et leDanube. Les responsables de la sécurité civile utilisent les prévisions de débit à un horizonde 24 heures environ (Homagk, 1996; Homagk and Ludwig, 1998). La figure 2.1 illustre uneprévision de débit sur le Neckar effectuée lors de la crue de février 1997.

D’autres exemples d’applications des équations de routage hydrodynamique pour la pré-vision de débit existent sur le Rhin (Steinebach and Wilke, 2000) et sont parfois utiliséespour la gestion des polluants (Schultz and Steinebach, 2002). Les inconvénients de ce sys-tème basé uniquement sur les mesures de débit proviennent d’abord de la difficulté de prévoirles apports provenant des régions situées entre la dernière station de mesure de débit et lepoint de contrôle (objectif de la prévision), et ensuite de la grande difficulté de tenir comptede l’évolution des apports dus au ruissellement et à l’infiltration sur tout le bassin versantpendant la période de prévision. Des prévisions de débit utilisant la résolution des équationshydrodynamiques sur des petits bassins versants (10-1’000 km2) ne sont pas soumises à ceserreurs et seront discutées au paragraphe 2.4. Ces inconvénients majeurs ont orienté lesrécents développements vers des systèmes hybrides intégrant des prévisions des apports dessous-bassins versants intermédiaires. Ces derniers, qui utilisent des mesures des précipita-tions, des températures ou éventuellement des scénarios hydro-météorologiques pré-établis,

11

Fig. 2.1: Prévision de débit du Neckar à Heidelberg à un horizon de 24h, prévision du 26.02.1997(Homagk and Ludwig, 1998).

permettent d’améliorer la fiabilité des prévisions. Notons que le Rhin dispose actuellementde 6 systèmes différents effectuant des prévisions de débit. Parmi ceux-ci, le système helvé-tique, produisant des prévisions de débit jusqu’à Bâle, qui est présenté au paragraphe 2.3.Situé tout à l’aval du fleuve, le centre hollandais de prévision (RIZA - Institute for InlandWater Management and Waste Water Treatment, Arnhem) a développé un système dontl’objectif est la prévision fiable des débits 4 jours à l’avance dès 2005 (Spokkereef, 2001).Lors du projet européen "European Flood Forecasting System" a été développé un systèmeutilisant une modélisation spatialement distribuée (DeRoo et al., 2003). Cette technologiepermet l’utilisation directe d’un modèle numérique de terrain pour le calcul des processushydrologiques. La prévision des débits de grands fleuves tels que la Meuse (Allemagne), lePô (Italie), le Rhin (Allemagne), l’Helga (Suède) la Viska (Suède) et le Severn (Grande Bre-tagne) est obtenue à partir des données hydro-météorologiques introduites dans des modèleshydrologiques. En fin de chaîne seulement sont utilisés des modèles effectuant une résolutiondes équations hydrodynamiques simplifiées (onde cinématique) permettant le calcul des dé-bits dans les cours d’eau tout en tenant compte du comportement des zones inondables. Desrésultats de simulations d’ensembles (prévisions probabilistes) sur la Meuse sont illustrés àla figure 2.2 où le lecteur constatera la forte augmentation de l’imprécision avec l’horizonde prévision. En effet, si les prévisions jusqu’à 4 jours sont encore relativement bonnes,les prévisions à 10 jours ne sont absolument pas exploitables selon les résultats présentésici.

Les systèmes présentés ici permettent le calcul explicite et déterministe d’une prévisions dedébit à partir de différentes entrées. Il est ainsi possible d’obtenir une gamme de prévisions etde tenir compte des différentes sources d’incertitude, mais il est alors nécessaire d’introduireune gamme d’entrées représentatives de l’incertitude, tâche parfois extrêmement difficile.En effet, bien rares sont les fournisseurs de prévisions hydro-météorologiques capables dedonner une estimation de leur erreur de prévision. Bien rares également sont les systèmespermettant l’évaluation de l’imprécision des mesures des précipitations, sources de mesuresponctuelles à partir desquelles sont extrapolées des valeurs surfaciques (spatialisation desprécipitations). Il devient donc nécessaire de subdiviser les bassins versants et de multiplierles sous-modèles.

12

Fig. 2.2: Prévisions de débit à 10 jours sur la Meuse (DeRoo et al., 2003).

La figure 2.3 illustre le fonctionnement typique des modèles de prévision à grande échelle.Le bassin versant fictif présenté a une surface de l’ordre de 100’000 km2 et a été subdiviséen 6 sous-bassins versants et en autant de modèles de simulation des apports. Ce bassinversant comporte 4 stations de mesure de débit Q1, Q2, Q3, Q4 et n stations de mesuredes précipitations et des températures P1, P2,. . ., Pn. Toutes ces stations sont utilisées pourévaluer les débits des sous-bassins versants qui sont considérés comme apports du fleuveprincipal (ligne épaisse). La prévision de débit Q* à l’exutoire du bassin versant est alorscalculée par résolution des équations hydrodynamiques à partir des mesures Q1, Q2, Q3

et Q4, de la géométrie du fleuve et des apports aux sous-bassins versants. Notons que lesmodèles de simulation des sous-bassins versants peuvent être de différents types, pourvuqu’ils permettent l’évaluation des débits à leurs exutoires respectifs.

2.3 Prévision de débit à moyenne échelle

La prévision de débit sur des bassins versants ayant une surface comprise entre 1’000et 10’000 km2 est largement décrite dans la littérature et constitue l’un des sujets derecherche majeurs de l’hydrologie actuelle. De nombreuses technologies sont décrites etmême expérimentées dans ce chapitre. Les temps de réponse de ce type de bassins versantsse situent entre 10 et 100 heures et correspondent le mieux aux modèles de prévisionmétéorologiques actuels offrant en général des prévisions quantitatives à 72 heures. Pour cetype de bassins versants, toutes les sources de données peuvent être exploitées, en particulierles prévisions quantitatives des précipitations (QPF - Quantitative Précipitation Forecast)et des températures, les images radar permettant la mesure qualitative des champs deprécipitations, les stations de mesure des précipitations, températures et éventuellementde la pression atmosphérique ou des vents ainsi que les mesures de débit ou de niveaud’eau. Les prévisions hydro-météorologiques servent à déterminer les apports naturels surl’horizon de prévision alors que les mesures sont exploitées afin de permettre la correction

13

Fig. 2.3: Schéma de principe de la prévision de débit sur un bassin versant de grande échelle.

en continu des variables de la simulation. A nouveau, les technologies doivent être choisiespour être adaptées à l’objectif de la prévision de débit. Pour les situations d’exploitation(régulation des ouvrages pour l’irrigation, l’eau potable ou l’hydroélectricité), les modèlesnon paramétriques de type réseaux de neurones artificiels (RNA) ou les modèles statistiqueset autorégressifs seront les plus efficaces tandis que pour les situations de crue, rares pardéfinition, les modèles de type pluie-débit obtiendront les meilleures performances.

2.3.1 Réseaux de neurones artificiels

Lorsque les problèmes à résoudre contiennent des processus difficilement identifiablesou quantifiables, ou lorsque les données sont trop bruyantes (incertaines), les modèlesconceptuels ou à base physique peuvent être difficiles à utiliser. S’ils sont surparamétrés, ilssont trop flexibles mais ne se laissent que difficilement manipuler, alors que s’ils sont tropsimplifiés, leur calage est impossible au-delà d’une certaine gamme de processus clairementidentifiés. Des techniques alternatives sont alors recommandées, avec lesquelles il est possibled’obtenir d’excellentes performances : elles font souvent partie du domaine de l’intelligenceartificielle. L’une d’entre elles, appelée approche connectionniste, a abouti aux réseaux deneurones artificiels (RNA), couramment utilisés pour des tâches telles que classification etreconnaissance de processus. Leurs applications pratiques sont la prévision, la robotiqueou les tâches déductives complexes. S’inspirant de l’architecture et du fonctionnementdu cerveau, les RNA sont composés d’éléments simples effectuant un calcul selon unefonction d’activation (neurones) et des connections reliant les neurones entre eux (synapses).Les différentes couches du réseau permettent la transformation des paramètres d’entrée(variables explicatives ou de commande) en paramètres de sortie par des combinaisonsnon-linéaires (figure 2.4). Pour une architecture donnée, les meilleures combinaisons sontobtenues à la suite d’une phase d’apprentissage pendant laquelle les fonctions d’activation

14

du réseau sont ajustées pour produire une erreur minimale sur la variable de sortie (donnéede contrôle). Ce réseau est alors testé sur un autre set de données (validation) avantcomparaison avec un réseau ayant une architecture différente. La meilleure architectureconstituera finalement le réseau définitif (Nikopoulos, 1997). Le processus de choix dumeilleur RNA pour une application donnée est donc un processus itératif.

Fig. 2.4: Schéma d’un réseau de neurones artificiels à couches multiples.

Le développement de cette technologie a commencé au début des années 1940lorsque Mc Culloch et Pitts cherchèrent à modéliser le fonctionnement du cerveau(McCulloch and Pitts, 1943). Ils proposèrent un modèle appelé neurone formel recevant enentrée plusieurs signaux, traitant ces signaux par une fonction d’activation et fournissanten sortie une valeur d’activation. Ce processus correspondait au fonctionnement du neuroneréel, réagissant à la somme pondérée de ses signaux entrants en fournissant lui-même unsignal de type sigmoïdal. La figure 2.5 illustre le neurone formel et un type de fonctiond’activation. Notons que les fonctions d’activation peuvent être de différents types, allantde -1 à +1 ou de 0 à 1, discrètes ou continues. Les poids associés aux inputs sont fixés àla suite du processus d’apprentissage. Ce processus peut être supervisé ou non supervisé.Dans le premier cas, les vecteurs d’entrée seront donnés avec en dernière position le résultatsouhaité, tandis que dans le second cas le résultat souhaité n’est pas fourni et l’algorithmed’apprentissage discrimine lui-même les différentes combinaisons ou processus (en anglais :pattern recognition et clustering). Mais revenons à la préhistoire des RNA, car le neuroneformel n’avait pas encore de capacité d’apprentissage. C’est Donald Hebb qui eu l’intuitionque plus un neurone était activé souvent par l’un de ses prédécesseurs, plus il était sensibleà ce même prédécesseur (Hebb, 1949). Concrètement, la règle de Hebb permet d’augmenterle poids d’une connection lorsque celle-ci est activée souvent. Elle constitue ainsi le principede base de l’apprentissage.

Rosenblatt a développé cette dernière idée et a proposé un modèle de réseau de neuronesartificiel appelé perceptron (Rosenblatt, 1958). Ce réseau se compose d’une couche d’entréeet d’une couche de sortie, sans couche cachée. Il considère en entrée des valeurs binaires(0 et 1) et fonctionne avec une fonction d’activation à valeurs discrètes (si la somme desentrées pondérées est supérieure à un certain seuil, la valeur de sortie vaut 1, sinon 0).L’apprentissage s’effectue par l’application de la formule 2.3 : soit ii une valeur du vecteur

15

Fig. 2.5: Schéma du neurone formel, d’après McCulloch and Pitts (1943).

d’entrée, soit wij le poids de sa connection avec le neurone j, soit oj la variable de sortie duneurone j et soit tj la valeur de sortie souhaitée. Le nouveau poids wij s’obtient ainsi :

wij = wij + C · (tj − oj) · ii (2.3)

où C est le taux d’apprentissage compris entre 0 et 1. A cause de l’unicité de la couchecontenant les paramètres d’apprentissage, ce type de RNA ne peut discriminer que desprocessus linéairement séparables (Minsky and Papert, 1969). Ce problème a failli causerl’abandon des RNA au profit des systèmes experts, mais lorsque les capacités informatiquesont fortement progressé, au début des années 1980, les recherches ont repris. Ainsi,Rumelhart, Hinton et Williams ont mis au point un RNA appelé Multi-Layered Perceptron(MLP - perceptron à couches multiples) doté d’un algorithme d’apprentissage appelébackpropagation (Rumelhart et al., 1986). La figure 2.4 présente justement un MLP à1 couche cachée. Ces RNA acceptent en entrée des valeurs continues et leurs fonctionsd’activation sont elles aussi continues. Il a été prouvé qu’un MLP à 3 couches (entrée-cachée-sortie) permet la résolution de n’importe quel problème non-linéaire (Rumelhart et al.,1986). Reprenant la terminologie introduite dans l’équation 2.3, l’erreur totale pour unnombre n de neurones et un jeu W de poids initiaux peut être calculée (équ. 2.4) :

E(W ) = 0.5K∑

k=1

n∑

j=1

(tkj − okj ) (2.4)

Le RNA converge lorsque l’erreur tend vers une valeur minimale et les poids restentconstants. Cette erreur peut être calculée pour chaque vecteur d’entrée (K = 1) ou pour unscénario de vecteurs d’entrée (K > 1). En pratique, la convergence la plus rapide est obtenuepar le lancement de l’algorithme de rétropropagation après un scénario et non après chaquevecteur. La correction des poids wij s’effectue par dérivation partielle (équ. 2.5) :

∆wij = η · ∂E(W )∂wij

=K∑

k=1

(δki · ok

i ) (2.5)

où η est le taux d’apprentissage. Le nouveau poids s’obtient ainsi (équ. 2.6) :

wij = wij + ∆wij (2.6)

Pour la correction des poids des connections entre la couche de sortie et la dernière couchecachée on applique la différenciation suivante (équ. 2.7) :

16

δkj = (tkj − ok

j ) · okj · (1− ok

j ) (2.7)

Pour la correction des poids des connections entre deux couches cachées, l’équation 2.8 estappliquée :

δkj = ok

j · (1− okj ) ·

k∑

i=1

(wij · δki ) (2.8)

L’algorithme de rétropropagation peut s’exprimer finalement selon le schéma proposé à lafigure 2.6.

Fig. 2.6: Algorithme de rétropropagation.

L’utilisation des RNA pour la prévision de débit a débuté dans les années 1990 et a étéreportée par les pionniers qu’étaient Zurada (Zurada, 1992), Hall (Hall and Minns, 1993)et Karunanithi (Karunanithi et al., 1994). Pendant cette période a également commencél’utilisation des RNA pour la prévision des précipitations (French et al., 1992). Dès lors, denombreux chercheurs ont exploité le filon et ont pu en tirer une certaine expérience. LesRNA n’ont pas besoin de données stationnaires ni normalement distribuées (Burke, 1991),les modifications lentes du système peuvent être capturées (Dandy and Maier, 1996) et lesprévisions ne sont pas affectées par le bruit des données (Zealand et al., 1999). Dans ledomaine de la prévision de débit, les réseaux de neurones sont utilisés pour la prévisiondes apports journaliers, hebdomadaires ou mensuels en eau, tant pour l’irrigation que pourl’exploitation hydroélectrique. Les résultats obtenus pour de telles applications ont montréune amélioration de la prévision par rapport à d’autres méthodes (modélisation conceptuelleà base physique ou statistique). Les travaux menés en Inde sur le bassin versant de larivière Indravati (2’300 km2) pour la prévision des apports moyens du mois suivant ontmontré que le RNA avait une bonne capacité pour prévoir les hautes eaux mais moins les

17

basses eaux (Jain et al., 1999). Les données d’entrée étaient simplement les débits mensuelsmoyens mesurés jusqu’au début de la prévision. Travaillant toujours sur des prévisions dedébits moyens mensuels, Dolling and Varas (2003) ont exploité des mesures aussi diversesque le numéro du mois, la température moyenne mensuelle, l’humidité relative, la duréed’ensoleillement, la vitesse du vent, la hauteur de neige, le nombre de jours nuageux, lesprécipitations, l’indice de saturation du sol et le volume ruisselé sur la rivière San Juan(20’000 km2). Au Québec, les apports du lac St-Jean devaient être prévus 7 jours à l’avancepar pas de temps journalier sur le bassin versant de Saguenay-Lac-St-Jean, dont la surfacemesure 9’300 km2. Les mesures journalières du débit entrant dans le lac, les mesures desprécipitations et des températures ont permis d’obtenir les résultats présentés à la figure2.7. Toutefois, l’efficacité de cette technologie est à nouveau réduite durant les périodesd’étiage (Coulibaly et al., 2001; Birikundavyi et al., 2002). En Suisse, les RNA sont utiliséspar la société HydroExploitation SA (aménagement de la Grande Dixence) pour les apportshoraires à un horizon de 72 heures de la prise d’eau de la Gornera à Zermatt (Meile,2002).

Fig. 2.7: Comparaisons entre prévisions à 7 jours (MLP : régressions multiples ; IDNN : réseau deneurones artificiels) et observations de débit entrant dans le lac St-Jean (Coulibaly et al., 2001).

On observe pourtant que tous ces systèmes s’intéressent à la prévision de processuscourants. Ils sont en effet consommateurs de quantités importantes de données dont laqualité (homogénéité, pertinence) est déterminante pour la bonne tenue des résultats. Or,ces données ne sont pas forcément disponibles. Une autre remarque qui a été formulée(Birikundavyi et al., 2002) concerne l’incapacité des réseaux de neurones à prédire avecune précision suffisante des situations exceptionnelles telles que précipitations convectives(difficiles à modéliser avec un pas de temps journalier) ou précipitations sous forme de neige(inadapté au pas de temps mensuel). On conclura donc ce chapitre consacré aux RNA enadmettant qu’il est difficile d’utiliser cette technologie pour simuler des situations de crue,où les processus sont par définition inhabituels et pour lesquels les données historiques sontrares.

2.3.2 Modèles statistiques - lissage et décomposition

Les modèles statistiques de prévision, largement répandus dans l’industrie pour l’estimationde la demande future, se basent sur les données historiques afin de prévoir l’évolution d’unsystème (Makridakis et al., 1983). Dans les cas les plus simples, il est possible de ne sebaser que sur les données historiques du paramètre que l’on veut prévoir. Par exemple, une

18

série de 12 n ventes mensuelles (n ≥ 1) pourra être utilisée pour prévoir les ventes des mprochains mois (m ≥ 1), sans tenir compte d’autres paramètres tels que la taille du réseaude distribution ou l’indice mensuel de consommation. Dans le cas de la prévision de débit,cela revient à ne considérer que des mesures de débit sans tenir compte des mesures desprécipitations, des températures ou d’autres paramètres pertinents. Chaque série de donnéeshistoriques peut être caractérisée par 4 composantes principales :

– la tendance– le cycle– la saisonnalité– l’aléa

Par définition, la tendance est une caractéristique de l’évolution de la série de données àlong terme et peut être nulle : les données sont alors considérées comme étant stationnaires.Si au contraire la tendance est linéaire, multiplicative ou variable, le cas devient difficileà traiter. En hydrologie, une tendance ne s’observera que sur de nombreuses années. Lecycle s’observe également sur plusieurs années et correspond à une variation cyclique de lamoyenne des données. La saisonnalité, par opposition au cycle, s’observe annuellement. Lecycle de la fonte des neige est un exemple typique d’une composante saisonnière d’une sériede mesures de débit en milieu alpin. Enfin, l’aléa correspond aux résidus non prévisiblesd’une série de données. Il est caractérisé par différents indicateurs dont en particulier lecarré de l’erreur et l’écart-type. La structure temporelle de l’incertitude n’est toutefois pasconsidérée dans ce type de modèles. Enfin, il convient de rappeler qu’avant de caractériserles composantes d’une série de données, différents tests statistiques doivent être réalisés(stationnarité, homogénéité), tout comme les tests typiques de l’hydrologie (double-cumul,cumul des résidus, etc...)

Les méthodes de lissage et de décomposition permettent d’identifier et de quantifier cescomposantes afin de les utiliser pour l’extrapolation de la série mesurée. Avant d’entrerplus en profondeur dans les détails techniques des modèles de lissage et de décomposition,observons une série fictive de 10 années de débits moyens journaliers entrants dans uneretenue alpine (figure 2.8). On y observe aisément une composante saisonnière, plusdifficilement une composante cyclique et on peine à identifier une tendance.

Fig. 2.8: Série fictive de débits moyens journaliers entrants dans une retenue alpine.

L’identification de la tendance peut s’effectuer simplement selon trois méthodes. La premièreconsiste en une régression sur la série complète, la seconde en une moyenne mobile sur unintervalle pertinent et la dernière en un lissage exponentiel. Considérons une série de n

19

données au temps t (Q1, Q2, . . . , Qn). La droite de régression, ayant par définition l’équation2.9, aura la propriété de minimiser la somme des carrés des écarts (équ. 2.10) :

Q(t) = a0 + a1 · t (2.9)

Min( n∑

t=1

e2(t))

= Min( n∑

t=1

[Q(t)− Q(t)]2)

(2.10)

On obtient alors les coefficients a0 et a1 (équ. 2.11 et 2.12).

a0 =∑n

t=1 Q(t) ·∑nt=1 t2 −∑n

t=1 t ·∑nt=1 Q(t)

n∑n

t=1 t2 −( ∑n

t=1 t)2 (2.11)

Min( n∑

t=1

e2(t))

= Min( n∑

t=1

(Q(t)− Q(t)

)2)(2.12)

Il convient de noter que des régressions polynômiales, exponentielles, logarithmiques oulogistiques peuvent également être appliquées à n’importe quelle série de données. C’esttoutefois l’analyste qui, en imposant la forme de la régression, impose directement la formede la tendance. Il est donc nécessaire de s’assurer de la cohérence entre le processus étudiéet le choix de la courbe de tendance. La méthode des moyennes mobiles simples (MMS)permet aisément la mise en évidence de la tendance. Pour toute série de k données, lamoyenne mobile est définie comme suit (équ. 2.13) :

Qt =1k

k−1∑

n=0

Qt−n (2.13)

Cette méthode peu réactive aux changements brusques ne permet pas une prévision mêmeà moyen terme, c’est-à-dire avec plus de 3 pas de temps d’avance. Les valeurs obtenuesseraient dans ce cas une moyenne des moyennes, ce qui est un résultat sans intérêt. Cetteméthode peut être améliorée par l’introduction de corrections qui permettent de rattraper ledécalage entre la série de données et la série calculée : il s’agit de la méthode des moyennesmobiles doubles (MMD) ne présentant toutefois qu’un intérêt limité dans le cadre de cechapitre (Makridakis et al., 1983). Une variante de la MMS est la moyenne mobile centrée(MMC), calculée comme suit à partir de 2k + 1 valeurs (équ. 2.14) :

Qt =1

2k + 1

t+k∑

n=t−k

Qn (2.14)

La méthode des moyennes mobiles nécessite un nombre élevé de données et assigne le mêmepoids à toutes les données. Si l’on veut renforcer l’influence des données les plus récentes, laméthode du lissage exponentiel (LEX) peut être utilisée (équ. 2.15). Soit P (t) la moyennemobile simple et Q(t) la dernière valeur d’une série de données :

Q(t + 1) = α ·Q(t) + (1− α) · P (t) (2.15)

20

Des valeurs du coefficient α proches de 1 donnent de l’importance à la dernière donnéetandis que des valeurs de α proches de 0 donnent de l’importance à l’historique de lasérie de données. Cependant le LEX, tout comme la MMS, subit un retard et ne doitpas être utilisé pour de la prévision à moyen terme. Le lissage exponentiel double (LEXD)permet également d’introduire une correction et d’obtenir une prévision tenant compte del’historique des données et de leur tendance. Soit P ′(t) un LEX de la série de données etP ′′(t) un LEX appliqué à P ′(t), on obtient pour un horizon δ (équ. 2.16 et 2.17) :

Q(t + δ) = a(t) + δ · b(t) (2.16)

a(t) = 2 · P ′(t)− P ′′(t) (2.17)

b(t) =α (P ′(t)− P ′′(t))

1− α(2.18)

En général, on obtient avec le LEXD des meilleurs résultats qu’avec la MMD (Makridakis,1983). Le cycle peut être mis en évidence par ces mêmes méthodes. Appliquons à la sériefictive (figure 2.8), comportant une forte saisonnalité, une MMS par périodes de 365 joursafin de justement éliminer l’effet de la saisonnalité (figure 2.9), et supposons que cette sériesoit stationnaire ou à tendance nulle.

Fig. 2.9: MMS sur 365 valeurs appliquée à la série fictive de débits moyens journaliers entrants.

La saisonnalité a bel et bien disparu, mais un cycle apparaît et peut être mis en évidencepar la représentation de l’écart e(t) selon l’équation 2.10 entre la série de données et la MMSsur 365 valeurs (figure 2.10).

La quantification de ce cycle (amplitude, fréquence et déphasage) peut être effectuée parune décomposition en séries de Fourier (Makridakis et al., 1983). Les détails de cetteopération ne sont pas traités dans ce rapport. La saisonnalité peut être quantifiée par uneprocédure simple (Makridakis et al., 1983), en effectuant une superposition entre les indicessaisonniers calculés à partir de la série de données et la série désaisonnalisée, c’est-à-dire necomportant que la tendance et le cycle. Les étapes pour effectuer une telle opérations sontles suivantes :

21

Fig. 2.10: Comparaison entre moyenne sur 10 ans et écart journalier superposé à la moyenne.

1. décomposition en tendance (Régression, MMS, LEX)

2. décomposition en cycle (MMS ou LEX + Fourier)

3. calcul de la série désaisonnalisée (MMC sur la série sans cycle)

4. calcul des indices saisonniers (différence moyenne sur plusieurs années entre la sériede données et la série désaisonnalisée)

5. multiplication de la série décomposée (tendance + cycle) par l’indice saisonnier

6. on obtient une série comportant les trois composantes (tendance, cycle, saisonnalité)

L’indice de saisonnalité Ψ peut être calculé par jour, par semaine ou par trimestre (équ.2.19) :

Ψ(t) =Q(t)

QMMC(t)(2.19)

L’exemple de la figure 2.11 présente la décomposition de la série fictive en cycle et en sai-sonnalité, ainsi que sa recomposition fournissant une prévision pour l’année suivante.

2.3.3 Modèles statistiques - régressions multiples

Les régressions multiples permettent l’établissement de prévisions d’une variable dépendanteà partir de plusieurs variables indépendantes, pour autant que des mesures de ces différentesvariables soient disponibles. Les modèles de régressions multiples peuvent être utiliséscomme modèles de référence lors de l’évaluation de nouveaux modèles de prévision dedébit grâce à la simplicité de leur développement. Ils sont aussi utilisés comme modèles deprévision opérationnels sur des bassins versants de taille moyenne (Bürgi, 2002; Bachhiesl,2002).

Soit une série de n mesures de la variable dépendante Y = y1, y2, . . . , yn ainsi que k séries den valeurs des k variables explicatives X1 = x1,1, x1,2, . . . , x1,n, . . . , Xk = xk,1, xk,2, . . . , xk,n.Il est possible de définir une estimation de Y telle que (équ. 2.20) :

Y = b0 + b1X1 + . . . + bkXk (2.20)

22

Fig. 2.11: Illustration de la méthode de décomposition.

23

L’écart e entre l’estimation et l’observation au temps i se calcule par l’équation 2.21 :

ei = Yi − Yi (2.21)

L’objectif de la régression multiple consiste à déterminer le vecteur des coefficients B =b0, b1, . . . , bk de manière à minimiser la somme des carrés des écarts (équ. 2.22).

min( n∑

i=1

(Yi − Yi)2)

(2.22)

Il s’agit dès lors d’un problème aux dérivées partielles. Soit X la matrice de dimension n×k(équ. 2.23) :

X =

1 x1,1 . . . x1,k

1 x2,1 . . . x2,k...

.... . .

...1 xn,1 . . . xn,k

(2.23)

on obtient le vecteur des coefficients B en résolvant l’équation 2.24 (Makridakis et al.,1983) :

B = [XT X]−1 ·XT Y (2.24)

Un modèle de régressions multiples est développé ici en reprenant une partie des mesuresprésentées à la figure 2.8 et en y superposant les mesures de températures T et précipitationsP effectuées à une station voisine (figure 2.12).

On observe sur l’exemple présenté une certaine corrélation entre les températures et lesdébits, alors que les précipitations semblent moins directement corrélées. Cela provient ducomportement du bassin versant mesuré, essentiellement soumis à des processus de fonte deneige et de glace. Il est possible dans le cas des régressions multiples de transformer les sériesde mesures avant de les intégrer dans la prévision. Considérons ainsi une nouvelle série detempératures T (équ. 2.25) :

Ti =

{T 2

i if Ti > 00 if Ti ≤ 0

(2.25)

Considérons également les séries de précipitations P et de débits Q suivantes (équ. 2.26 et2.27) :

Pi = Pi (2.26)

Qi = Qi−1 (2.27)

La prévision de débit au pas de temps suivant devient (équ. 2.28) :

24

Fig. 2.12: Mesures de débits, températures et précipitations à proximité du bassin versant considéré.

25

Qi+1 = b0 + b1Ti + b2Pi + b3Qi (2.28)

En utilisant l’équation 2.24, on obtient la matrice des coefficients B, et en appliquantl’équation 2.28 on trouve la série des débits estimés (figure 2.13).

Fig. 2.13: Comparaison entre débit mesuré et débit prévu 1 jour à l’avance par régressions multiples.

Le choix des variables indépendantes détermine la qualité de la prévision. Lors du dévelop-pement d’un modèle de ce type, plusieurs variantes doivent être élaborées et testées afinde déterminer laquelle sera finalement implémentée dans le système de prévision opération-nel.

2.3.4 Modèles statistiques - ARIMA ou Box-Jenkins

Les modèles autorégressifs à moyennes mobiles pondérées, également appelés modèlesBox-Jenkins (Box and Jenkins, 1976) sont une généralisation des méthodes de lissage etde régression. Ils sont adaptés à de nombreux processus et sont relativement aisés àimplémenter. Plusieurs catégories de modèles ARIMA ainsi que les méthodes d’estimationde leurs paramètres seront décrites succintement dans ce sous-chapitre.

Les processus autorégressifs stationnaires, couramment notés AR ou ARIMA(p, 0, 0),peuvent être décrits comme suit (équ. 2.29) :

Yt = Φ1Yt−1 + Φ2Yt−2 + . . . + µ′ + et (2.29)

On observe que la variable Yt au temps t est calculée par les variables aux pas de tempsprécédents (Yt−i), une valeur moyenne µ′ et un résidu et. L’estimation des coefficients Φi peutêtre obtenue à partir des équations de Yule-Walker (Yule, 1926; Walker, 1931). L’équation2.30 permet le calcul des coefficients d’un modèle AR du 2eordre.

Φ1 = r1(1−r2)1−r2

1

Φ2 = r2−r21

1−r21

(2.30)

où les coefficients ri sont les coefficients d’autocorrélation d’ordre 1 de la variable Y . Lesprocessus à moyennes mobiles pondérées, notés AM ou ARIMA(0, 0, q) peuvent être décritscomme suit (équ. 2.31) :

26

Yt = µ + et − θ1et−1 − θ2et−2 − . . . (2.31)

La variable Yt au temps t est alors calculée à partir de la moyenne de la série µ et des résidusdes pas de temps précédents et−i. L’estimation du coefficient d’un modèle AM du premierordre est aisément possible (équ. 2.32) :

θ 21 +

1r1· θ1 + 1 = 0 (2.32)

Les processus les plus complexes sont de type autorégressifs non stationnaires à moyennesmobiles pondérées, notés AMIMA(p, d, q). Ils doivent être rendus stationnaires pour per-mettre leur analyse et devenir ARMA ou ARIMA(p, 0, q), avant d’être décrits comme suit(1erordre, équ. 2.33) :

Yt = Φ1Yt−1 + µ′ + et − θ1et−1 (2.33)

L’estimation des coefficients est encore aisée pour un modèle ARMA en résolvant le systèmesuivant (équ. 2.34) :

r1 = (1−Φ1θ1)·(Φ1−θ1)1+θ2

1−2·Φ1·Φ2

Φ1 = r2r1

(2.34)

L’estimation des coefficients de modèles plus compliqués est effectuée avec l’algorithmede Marquardt (Marquardt, 1963) qui se résume en un choix de coefficients initiaux etune modification itérative de ceux-ci pour obtenir la meilleure paramétrisation de la sériede données. Notons enfin que ce type de modèle n’exploite que la série de variablesdépendantes et ne considère pas de variables indépendantes d’un autre type pour effectuerune prévision. Grâce à leur facilité de développement, les modèles ARIMA sont parfoisutilisés comme modèles de référence (Jain et al., 1999; Toth et al., 1999). La figure 2.14montre un exemple de prévision de débit moyen 1 jour à l’avance par l’utilisation d’unmodèle ARIMA(1,0,0).

Fig. 2.14: Prévision de débit moyen 1 jour à l’avance avec un modèle ARIMA(1, 0, 0).

27

2.3.5 Modèles statistiques - ARMAX

Les modèles ARMAX sont des modèles de Box-Jenkins pour les cas multivariés. Comme lesrégressions multiples, ils permettent l’établissement de prévisions d’une variable dépendanteà partir de variables indépendantes d’un autre type par le biais d’une fonction de transfertdont la somme des coefficients est appelée gain. Ils sont utilisés comme modèles de prévisionopérationnels (Porporato and Ridolfi, 2001) et comme modèles de référence à battre lorsdu développement de nouveaux systèmes (Zealand et al., 1999; Birikundavyi et al., 2002).Les modèles ARMAX (et non ARIMAX) s’appliquent à des données de commande et decontrôle stationnaires en tendance et en variance.

La procédure généralisée est la suivante dans le cas bivarié (Y = f(X)) :

1. transformation des séries entrantes x(t) et sortantes y(t) en séries stationnairesxsta(t) = f(x(t)) et ysta = g(y(t)) (désaisonnalisation, suppression des tendances)

2. préblanchissage de la série entrante (α(t)), blanchissage de la série sortante (β(t))(anglais : prewhitening)

3. calcul des corrélations croisées et construction de la fonction de transfert

4. calcul de la prévision ARMAX de la série sortante Y (t)

5. transformation inverse de la série sortante ysta = h(Y ) et prévision finale y(t) =g−1(ysta(t)).

L’étape du préblanchissage peut être décrite comme la "suppression de toutes les structuresreconnaissables pour ne conserver que l’aléatoire". Il s’agit donc de transformer la sérieentrante comme suit (équ. 2.35) :

α(t) = ARIMA(p,d,q)(xsta(t)) (2.35)

On obtient la série blanchie sortante en appliquant la même transformation et en conservantexactement les mêmes paramètres (équ. 2.36) :

β(t) = ARIMA(p,d,q)(ysta(t)) (2.36)

Une fois ces opérations terminées arrive enfin l’étape de construction du modèle ARMAX,suivant un processus comme décrit dans l’équation 2.37 :

Y (t) = ν0Xt + ν1Xt−1 + ν2Xt−2 + . . . + νrXt−r + et (2.37)

Le modèle ARMAX est donc lui-même décrit comme suit (2.38) :

Y (t) = ν0Xt + ν1Xt−1 + ν2Xt−2 + . . . + νrXt−r + Nt (2.38)

où N(t) est de type "bruit blanc". Le gain, étant défini comme la somme des coefficients,se calcule aisément (équ. 2.39) :

Gain =r∑

i=0

νi (2.39)

28

Les coefficients ARMAX sont difficiles à déterminer mais de bonnes valeurs initiales peuventêtre tirées des corrélations croisées des séries blanchies. On cherchera donc à calculerl’estimateur de la série N(t) par la formule 2.40 :

N(t) = β(t)− rαβ,0Xt − rαβ,1Xt−1 − rαβ,2Xt−2 − . . .− rαβ,rXt−r (2.40)

où rαβ,i est la corrélation croisée de décalage i entre les séries blanchies. La série ainsicalculée peut être définie comme étant un processus de type ARIMA. Par l’utilisation del’équation 2.38, il est finalement possible de remonter la chaîne et de produire une prévisionde la variable dépendante y(t + 1). Ce processus peut être itératif, en particulier lors duchoix des coefficients ARMAX. L’exemple présenté en figure 2.15 compare la série de débitsentrants mesurés avec la série de débits entrants prévus à l’aide d’un modèle ARMAX du1erordre et de la série des températures mesurées.

Fig. 2.15: Prévision de débit entrant dans une retenue à l’aide d’un modèle ARMAX de 1erordre.

2.3.6 Modèles adaptatifs - filtre de Kalman

Dans les sous-chapitres précédents ont été présentés quelques modèles de prévision baséssur le traitement statistique des mesures. La principale difficulté rencontrée lors de leurdéveloppement survient lors de la procédure de calage des paramètres et coefficients depondération. Une fois ces paramètres déterminés, les modèles peuvent être utilisés telsquels et fournissent des prévisions avec une incertitude constante si elle est évaluée surune longue période (plusieurs mois ou années). Toutefois, lors d’événements particulierstels que les crues importantes, ces modèles peuvent se révéler peu fiables car ils sont engénéral paramétrés pour minimiser l’erreur moyenne sur plusieurs mois ou années. Lesmodèles adaptatifs constituent une alternative intéressante, en particulier pour des bassinsversants de taille moyenne où les temps de réponse sont suffisamment longs pour qu’uneadaptation des paramètres du modèle à la dernière mesure soit efficace. Ces modèles, detype lissage exponentiel adaptatif, filtrage adaptatif ou filtre de Kalman cherchent non pasà minimiser l’erreur moyenne de l’historique mais à minimiser l’erreur moyenne future. Lemodèle adaptatif le plus répandu dans le domaine des prévisions de débit est le filtre deKalman dont le concept pour une prévision multivariée est décrit dans ce sous-chapitre.Le filtre de Kalman (Kalman, 1960) est capable de fournir une prévision d’une série non-stationnaire en tendance et en variance en utilisant un modèle dont les paramètres ou lesvariables d’état peuvent également varier. Il effectue une sorte de pondération entre la

29

prévision "classique" et la prévision obtenue à partir de la dernière mesure disponible : ilcombine donc l’information ancienne et l’information récente. Cette pondération est calculéeà partir d’une mesure de l’évolution des variances par une procédure récursive, mais elle peutse révéler difficile à évaluer en pratique, tant la variance au temps de la dernière mesure estdélicate à estimer. Toutefois, la procédure de filtrage peut être décrite, en se souvenant quece sera l’estimation des valeurs initiales et des variances au temps de la dernière mesure quiseront délicates à évaluer.

Soit Y le vecteur des variables de prévision et de mesure, θ le vecteur d’état du systèmeet Ψ le vecteur des variables indépendantes mesurées. En faisant l’hypothèse que l’état dusystème suit un comportement gaussien, l’état du système peut être écrit par l’équation2.41 :

θt = θt−1 + Wt (2.41)

où Wt est le bruit blanc gaussien. La variance du bruit se calcule comme suit (équ.2.42) :

R1 = E(Wt ·W Tt ) (2.42)

L’équation de mesure est (équ. 2.43) :

Yt = Ψt · θt + et (2.43)

où et est l’erreur modèle.

La variance de l’erreur se calcule par l’équation 2.44 :

R2 = E(et · eTt ) (2.44)

L’estimation du vecteur des variables de prévision au temps t est alors obtenue (équ.2.45) :

Yt = Ψt · θt|t−1 (2.45)

Après mesure des variables , on calcule l’écart total et (équ. 2.46) :

et = Yt − Yt (2.46)

La matrice des gains peut alors être calculée (équ. 2.47) :

Kt = Pt|t−1 ·ΨTt (Ψt · Pt|t−1 ·ΨT

t + R2)−1 (2.47)

L’estimateur filtré devient (équ. 2.48) :

θt|t = θt|t−1 + Kt · et (2.48)

30

avec :

Pt|t = Pt|t−1 −Kt ·Ψt · Pt|t−1 (2.49)

L’état ultérieur est déterminé (équ. 2.50) :

θt+1|t = θt|t (2.50)

Finalement la covariance est propagée (équ. 2.51) :

Pt+1|t = Pt|t + R1 (2.51)

La prévision au pas t + 1 peut finalement être effectuée. Cette procédure doit être répétéeà chaque nouvelle information. Le filtre de Kalman peut être utilisé pour de nombreusesapplications liées à l’automatique (Gustafsson, 2000). En hydrologie, il est appliqué pourle recalage des coefficients de modèles statistiques de type ARMAX (Ribeiro et al., 1998),pour le recalage des paramètres de modèles conceptuels (Andrade-Leal et al., 2002) ou pourle recalage en continu de variables d’état de modèles conceptuels (Young, 2002) tels queceux détaillés au sous-chapitre suivant. Comme il s’agit d’un modèle adaptatif, il pourrapotentiellement surréagir si la procédure de filtrage est trop fortement pondérée sur ladernière mesure.

Les modèles statistiques ont eu leur période de gloire et sont toujours appliqués à d’autresdomaines (études de marché, finance) mais ont été peu à peu délaissés (à part les réseauxde neurones), en raison de leurs limitations, au profit d’autres types de modèles dont enparticulier les modèles conceptuels.

2.3.7 Modèles conceptuels

Les modèles hydrologiques conceptuels constituent une immense famille dont les membrespeuvent être de niveaux de complexité extrêmement variables. Au contraire des modèlesparamétriques ou statistiques, les modèles conceptuels cherchent à représenter les processusphysiques permettant à la goutte d’eau de passer du nuage à l’océan. Ils considèrent etcombinent donc les différents processus que sont les précipitations, l’évapo-transpiration, lafonte de neige, l’infiltration, l’écoulement de surface et de sub-surface ou le routage dansles cours d’eau pour ne citer que les principaux. Ils sont par définition réducteurs, carils représentent une simplification de la réalité et ne sont pas capable de déterminer avecexactitude tous les processus hydrologiques se produisant dans une certaine région. Afin deremédier à ce défaut, un calage adéquat des paramètres des modèles peut permettre unebonne représentation de la réalité, mais sitôt que les processus en jeu se complexifient, lenombre de paramètres et d’équations à résoudre explose et leur calage devient impossible.Le défi est alors de proposer une conceptualisation maximisant la robustesse du modèletout en minimisant le nombre de paramètres à caler. Les modèles conceptuels, appeléségalement modèles pluie-débit sont toutefois incontournables et largement utilisés dansle domaine de la prévision de débit à échelle moyenne. Il serait inutile d’envisager unedescription exhaustive des modèles existants tant ils sont variés, mais quelques exemplescommentés et illustrés permettront au lecteur d’apprécier les différents types de modèles etde processus modélisés. Les différents modèles de répartition spatiale des précipitations, des

31

températures ou d’autres variables exogènes ne sont pas considérés dans cette description. Ilsuffit simplement de se souvenir que des valeurs de ces variables indépendantes peuvent êtredéduites à partir de mesures ponctuelles ou distribuées (radars) ou de prévisions distribuées(modèles numériques de prévisions quantitatives des précipitations) disponibles auprès desservices météorologiques de la région d’intérêt.

Le modèle conceptuel le plus simple est le modèle du coefficient de débit (appelé couram-ment méthode rationnelle), où le débit ruisselé dans le cours d’eau est une fonction desprécipitations, du coefficient de ruissellement et de la surface du bassin versant. Seuls sontalors considérés les processus de précipitation et d’infiltration réduits à leur plus simpleexpression (équ. 2.52).

Q = Cr · imoy · S (2.52)

où Q est le débit dans le cours d’eau, Cr le coefficient de ruissellement, imoy l’intensitémoyenne et S la surface du bassin versant à l’amont du point de contrôle.

Les modèles d’infiltration peuvent être améliorés, en considérant par exemple la variationtemporelle du coefficient de ruissellement durant un événement, en tenant compte du degréde saturation initial du sol pour ne citer que les plus simples. Le développement de cesmodèles constitue une des tâches principales de l’hydrologie de base et de nombreusesréférences sont disponibles (Maidment, 1993; Chow et al., 1983; Drabek et al., 2002).

Les modèles conceptuels actuels sont en général constitués de réservoirs connectés en sérieou en parallèle, dont les propriétés de chacun sont le volume total de stockage et la loi devidange. Ils peuvent être de formes diverses : ainsi, un plan incliné aura-t-il une capacité destockage, une loi de vidange et sera par conséquent considéré comme un réservoir. L’exempleprésenté à la figure 2.16 est le modèle pluie-débit HBV-ETHZ utilisé par l’Office Fédéralde l’Environnement (OFEV) depuis 1998 pour effectuer les prévisions de débit horaire à unhorizon de 72 heures sur plusieurs tronçons du Rhin jusqu’à Bâle (Bürgi, 2002). Ce modèlea pour entrées les précipitations solides et liquides. Il considère les processus d’infiltrationen fonction de la saturation du sol, d’évapo-transpiration, de fonte de neige, d’écoulementde surface, d’écoulement de sub-surface et de percolation. Il fournit finalement un débit àl’exutoire, après un filtrage selon la méthode de Kalman. Le bassin versant du Rhin à Bâlea une superficie de 36’000 km2 et est subdivisé en 40 sous-bassins versants dans la zone deplaine et donc en autant de modèles pluie-débit HBV-ETHZ. Il est par conséquent possibled’effectuer des prévisions de débit à 40 endroits différents de ce réseau hydrographique àl’aval des Alpes.

Un autre exemple du même type est le modèle PREVIS (figure 2.17) utilisé dans lesystème opérationnel de prévision de débit de l’aménagement du Lac-St-Jean au Québec(Ribeiro et al., 1998). Il s’agit d’un bassin versant d’une surface totale de 75’000 km2 diviséen 11 sous-bassins. Les prévisions journalières peuvent être obtenues à un horizon de 7jours.

Un modèle hydrologique conceptuel développé à l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanneest le modèle ORAGE (Bérod, 1994), applicable à des sous-bassins versants alpins de taillemoyenne. Il a depuis évolué, a été rebaptisé SOCONT (Bérod and Consuegra, 1995) etappliqué au bassin versant du Rhône supérieur. Ce modèle est constitué d’un réservoir-solproduisant un débit de base et un débit rapide en fonction de l’intensité des précipitations,de l’évapo-transpiration potentielle et de la saturation du sol (taux initial de remplissagedu réservoir-sol). L’écoulement rapide est calculé par résolution d’une onde cinématique

32

Fig. 2.16: Modèle hydrologique HBV, modèle conceptuel à cascade de réservoirs (Bürgi, 2002).

Fig. 2.17: Structure du modèle conceptuel PREVIS (Ribeiro et al., 1998).

33

sur plan. Ce modèle a été amélioré afin de considérer les processus de fonte de neige et deglace et a été renommé GSM-SOCONT (LCH, 2003). Le réservoir de glace est un réservoirlinéaire qui produit un débit glaciaire en fonction de la température extérieure selon unmodèle de type degré-jour. Le réservoir de neige est également un réservoir linéaire dedimension variable qui produit un débit de fonte selon un modèle degré-jour qui produit undébit de saturation lorsque la teneur en eau du réservoir de neige dépasse sa teneur en eaucritique.

2.3.8 Modèles conceptuels spatialement distribués

Les modèles de prévision de débit spatialement distribués ont connu un développement ré-cent grâce aux progrès informatiques et des systèmes d’information géographiques (SIG). Aulieu de découper les sous-bassins versants en entités conceptuelles, ils utilisent directementles données topographiques des sous-bassins sous forme de modèles numériques de terrain(MNT). Chaque pixel du sous-bassin versant est lui-même un modèle hydrologique qui reçoitune certaine quantité d’eau des pixels situés en amont et qui fournit une quantité d’eau aupixel situé en aval. Les hauteurs d’eau sur chaque pixel sont calculées à chaque pas de tempset déterminent le débit qui transitera vers le prochain pixel. Les hydrogrammes à l’exutoiredu sous-bassin versant sont finalement naturellement formés par concentration des contribu-tions des pixels amont. Le modèle FAITOU est un modèle relativement simple considérantune loi d’infiltration selon le modèle de Horton et des fonctions de transfert calculées parl’onde cinématique (Dubois, 1998). Un modèle spatialement distribué largement utilisé est lemodèle appelé TOPMODEL (Beven and Kirby, 1979). Il considère des processus d’infiltra-tion et d’exfiltration, et modélise les écoulements de surface et surtout de sub-surface (figure2.18). Il est adapté aux régions pour lesquelles la modélisation conceptuelle en réservoir-solne fonctionne pas (Obled and Zin, 2004). Il a été développé en particulier pour le Nord-Estde l’Angleterre (Beven and Kirby, 1979).

Fig. 2.18: Principe de fonctionnement du modèle hydrologique TOPMODEL (Obled and Zin, 2004).

Lors des derniers développement effectués dans le cadre d’un projet européen de prévision dedébit sur le Rhin a été mis au point un modèle hydrologique spatialement distribué tenantcompte de la topographie, des précipitations, du degré de saturation du sol, de l’utilisationet du type de sol (DeRoo et al., 2003). Les prévisions de débit des sous-bassins versantsélémentaires sont introduites comme données d’un modèle hydrodynamique présenté auparagraphe 2.2 (figure 2.2).

34

Enfin, un dernier exemple de modèle spatialement distribué est le modèle PREVAH(Gurtz et al., 1999, 2003) qui a été appliqué au bassin versant de la Thur en Suisse orientale.Pas encore exploité comme modèle de prévision opérationnel, il comprend une descriptiontrès détaillée des processus liés à l’interception et l’évapo-transpiration. Pour ce faire,un découpage du bassin versant en une grill régulière de haute résolution est appliqué,ce qui augmente significativement la complexité du modèle. Afin de limiter le nombred’opérations nécessaires, le modèle suit se base sur le concept d’hydrotopes (en anglaishydrologic response units HRUs) qui permet de virtuellement déstructurer le bassin versantet de calculer parallèlement les contributions de chacune des HRUs (Moore et al., 1993). Lapartie permettant la génération de débit est quant à elle fortement inspirée du modèle HBVillustré à la figure 2.16.

2.4 Prévision de débit à petite échelle

Les technologies de prévision de débit à petite échelle (bassins versants jusqu’à 1’000 km2)sont les mêmes que pour les prévisions à échelle moyenne. Naturellement, les pas de tempsde calcul doivent être adaptés au temps de réponse des sous-bassins versants, généralementde l’ordre de quelques heures au plus. Certains auteurs rapportent des expériences effectuéesavec des RNA, notamment en Angleterre où des prévisions à pas de temps de 15 minuteset à un horizon de 6 heures sont effectuées sur des bassins versants ayant une surfaced’environ 140 km2 (Dawson and Wilby, 1998). Des comparaisons ont été effectuées àTaiwan (Chang and Hwang, 1999) sur un bassin versant de 260 km2 pour des prévisionsfaites 1 heure à l’avance par l’utilisation de RNA, de modèles conceptuels et de type Box-Jenkins. Les RNA ont produit les meilleurs résultats. Dans les 2 cas, seules les mesures desprécipitations et éventuellement des températures ont été exploitées. Pour de tels bassinsversants, la difficulté provient de la rapidité de la réponse hydrologique : afin d’augmenterl’horizon de prévision, des prévisions quantitatives de précipitations (QPF) deviennentnécessaires.

Des prévisions de débit horaire à 48 heures en avance ont été obtenues sur un bassin versantde 370 km2 à Athènes, malgré des temps de réponse de quelques heures dans le cadre duprojet de recherche européen TELEFLEUR (Koussis et al., 2003). La technologie utiliséecomprend une QPF horaire à un horizon de 6 heures ainsi qu’une QPF à pas de tempsde 6 heures à un horizon de 72 heures. Ces précipitations sont ensuite introduites dans unmodèle hydrologique spatialement distribué. Les précipitations observées aux stations demesure ne sont pas utilisées et aucun ajustement du modèle en temps réel n’est effectué.Comme illustré à la figure 2.19, il ressort que la plus importante part de l’incertitude dela prévision est due à l’imprécision de la QPF, tandis que l’erreur de modélisation est plusfaible.

Le lecteur observera combien les difficultés de prévoir des débits sur des petits bassinsversants sont importantes (Gutknecht, 2003). La prévision basée sur les mesures en tempsréel ne permet pas d’obtenir un horizon de prévision intéressant, alors que la prévision baséesur les QPF est soumise à une importante incertitude. Le filtrage ne peut être appliqué enraison du temps de réponse trop court. Des alternatives ont toutefois été développées et sontprésentées dans les deux sous-chapitres suivants.

35

Fig. 2.19: Résultats de simulations sur le bassin versant du Kifissos à Athènes (Koussis et al., 2003).

2.4.1 Reconnaissance de scénarios

Parmi les modèles statistiques non encore décrits dans ce rapport se trouvent les modèlesde type "plus proches voisins" qui permettent une approche pragmatique et efficace dela prévision. Ils font d’ailleurs partie de la grande famille des systèmes experts "cased-based" au même titre que les moteurs de recherche internet par exemple. S’appuyantsur une base de données importante dont la constitution sera la principale difficulté, lemodèle de prévision comparera un certain nombre d’indicateurs mesurés (état actuel) avecles indicateurs stockés dans la base de données pour chaque situation. Classant les casretenus par ressemblance décroissante, le modèle retiendra un certain nombre de cas les plussimilaires et en extraira les séries sortantes. Par combinaison, transformation ou simplementpublication de ces séries, une prévision sera fournie, qui ne nécessitera pas l’utilisationde QPF : les prévisions découleront directement de l’évolution connue des scénarios. Uneapplication prometteuse de la méthode, appelée "méthode des analogues" a été effectuéeen France (Obled and Djerboua, 1999) sur des bassins versants ayant des surfaces jusqu’à2’000 km2. Le système ne fournit en réalité pas de prévisions de débit mais plutôt desprévisions de précipitations remplaçant les QPF et qui peuvent être introduites ensuite dansdes modèles hydrologiques adaptés. La figure 2.20 illustre le fonctionnement du système quifournit des prévisions des précipitations journalières jusqu’à 6 jours à l’avance. Il a été parailleurs démontré que ce système, offrant des valeurs statistiques sous forme de quantiles,réalisait des performances nettement supérieures aux QPF. Il convient cependant de retenirqu’un tel modèle sera surtout performant pour des situations similaires à celles contenuesdans la base de données. L’extrapolation à des situations non référencées ne sera pas fiable,tout comme la prise en compte de la non-stationnarité des données météorologiques, enparticulier les phénomènes liés aux modifications climatiques.

Une application de cette méthode dans le cadre du projet de la Troisième Correctiondu Rhône a également apporté des informations intéressantes (Hingray et al., 2006). Il nes’agissait pas ici de prévoir des débits, mais de déterminer un catalogue d’hydrogrammes

36

Fig. 2.20: Schéma de fonctionnement du système de prévision des précipitations par analogues(Obled and Djerboua, 1999).

crédibles en différents points du bassin versant du Rhône à l’amont du Léman pour le choixdes débits de dimensionnement de ce grand projet.

2.4.2 Radars

Avant de conclure la description des différents systèmes de prévision, il est intéressantd’inclure une technique moderne de prévision à court terme (appelée nowcasting), baséesur des mesures de précipitations avec les radars (Vivoni et al., 2006). Ces mesures peuventêtre ensuite introduites dans différents types de modèles hydrologiques, mais en pratiqueseuls des modèles conceptuels ou spatialement distribués y sont associés. Ces appareilssont capables de mesurer la réflexivité de l’air jusqu’à quelques centaines de kilomètresde leur emplacement avec une précision se dégradant linéairement avec la distance. Lesradars permettent de visualiser avec précision la répartition spatiale des précipitations etproposent des valeurs quantitatives des intensités moyennes toutes les 15 minutes environselon les modèles. Lorsque les temps de réponse des bassins versants sont courts, les radarsapportent alors une contribution importante à la prévision de débit à court terme.

Le signal envoyé par le radar est réfléchi et sa "performance" Pr est mesurée, à partir delaquelle on tire la réflexivité z par l’équation du radar (équ. 2.53) :

Pr =Cl· | K2 | ·z

r2(2.53)

37

où Pr est la "performance reçue", Cl une constante basée sur les caractéristiques techniquesdu radar, K la variable dépendant des caractéristiques du milieu mesuré (neige, pluie, etc...),z la réflexivité et r la distance entre le radar et la mesure.

L’intensité des précipitations peut être en théorie déterminée à partir de la réflexivité (équ.2.54) :

z =∑

i

ni ·Di (2.54)

où ni est le nombre de gouttes de la classe i et Di le diamètre des gouttes de la classei.

La distribution des gouttes et des diamètres varie en fonction du type d’événement mesuré(pluie tropicale, orage convectif, précipitations frontales, orographiques). Il est en pratiqueplus courant d’utiliser une relation empirique dont les coefficients sont calés à la suite decomparaisons avec des mesures au sol (équ. 2.55).

z = a ·Rb (2.55)

où a est une constante ayant une valeur comprise entre 250 (type frontal) et 500 (typeconvectif), R l’intensité moyenne des précipitations et b une constante.

Les intensités ainsi mesurées peuvent être introduites dans des modèles hydrologiquesspatialement distribués et contribuer ainsi à l’élaboration d’une prévision de débit. Desrésultats encourageants ont été obtenus sur des bassins versants de petite taille où cetteinformation de répartition spatiale des précipitations améliore considérablement la précisiondu débit de pointe (phase et amplitude). Il convient cependant de mentionner quelqueslimitations liées à cette technologie : d’une part, "l’ombre" produite par l’orographie (enanglais "beam blocage") empêche parfois le radar d’obtenir de l’information sur certaineszones et des phénomènes météorologiques comme le stratus brouillent fortement le signalet empêchent le radar d’obtenir de l’information sur la couche de nuages située au-dessus.D’autre part, l’amortissement du signal augmente l’incertitude de la mesure avec la distanceet finalement, l’intensité des précipitations ne peut être calculée que sur la base d’unehypothèse sur le milieu mesuré : il faut donc pouvoir déterminer la température du milieu(autour de 0 ◦C : effet de barrière, le radar aura des problèmes), et le type de gouttes (pluie,grésil, grêle, neige).

Un système encore non opérationnel sur un bassin versant de 334 km2 à Houston, à pas detemps de 30 min a été développé (Bedient et al., 2000), tandis que des prévisions faites 1heure à l’avance sont disponibles au Colorado sur un bassin de 130 km2 (Yates et al., 2001).Pour ce système, un modèle de prévision du champ de réflexivité est utilisé pour offrirune QPF, elle-même exploitée à travers un modèle hydrologique de type TOPMODEL.L’exemple illustré à la figure 2.21 provient d’un système ambitieux de prévision de débit àun horizon de 4 heures sur un bassin versant de 545 km2 ayant un temps de réponse de 5heures (Dolciné et al., 2001). Les résultats comparent des prévisions à 2 heures effectuéesavec l’aide du radar (MOD), les observations (OBS) et des prévisions de référence baséessur la persistance (PERS). Notons enfin que le radar peut être utilisé pour des prévisionsde débit à échelle moyenne, mais la forte incertitude sur les intensités de précipitationincitera le prévisionniste à n’exploiter que l’information concernant la répartition spatialedes précipitations (Bürgi, 2002).

38

Fig. 2.21: Résultats de prévisions à un horizon de 2 h sur le bassin versant du Gardon d’Anduze enFrance (Dolciné et al., 2001).

2.5 Commentaires

A la lecture de ce chapitre consacré aux modèles de prévision de débit, le lecteur aura eutout loisir d’apprécier la diversité des technologies existantes. Lors du développement d’untel système, il est impératif de choisir une technologie adaptée à l’échelle géographique, àl’horizon de prévision souhaité, aux processus en jeu et aux données disponibles. Le tableau2.1 tente de faire la synthèse des systèmes existants et de leurs compétences en termesd’échelle et d’horizon de prévision.

Pour les modèles de prévision de débit utilisant des variables exogènes ou indépendantes, unsoin particulier doit être pris lors de l’estimation des précipitations futures, des températuresou de la couverture neigeuse. En effet, l’incertitude liée aux modèles hydrologiques est bienréelle, mais elle est bien inférieure à l’incertitude liée aux variables exogènes.

Tab. 2.1: Utilisation des systèmes de prévision de débit en fonction de l’échelle géographique et del’horizon de prévision (RNA : réseaux de neurones artificiels ; MLR : régressions multiples ; ARIMA :Box-Jenkins univariés ; ARMAX : Box-Jenkins avec variables exogènes).

Long terme Moyen terme Court terme4-10 jours 12-72 heures 1-6 heures

HydrodynamiqueGrande échelle RNA

50’000 km2 Box-Jenkins (ARIMA)RNA

Moyenne échelle RNA Box-Jenkins (ARMAX) Kalman10’000 km2 Box-Jenkins (ARIMA) Conceptuels MLR Radar

ConceptuelsPetite échelle Spatialement distribués

1’000 km2 Analogues Radar

Actuellement, la demande pour des prévisions hydrologiques à haute résolution émerge. Celasignifie que les modèles statistiques sont peu à peu délaissés au profit d’approches numériques

39

permettant la prise en compte de plus nombreuses variables, pour éventuellement aboutirau calcul des surfaces inondées en temps réel (Dietrich et al., 2006). Les forces des modèlesstatistiques, essentiellement leur simplicité et rapidité de développement, ne compensentdonc plus leurs faiblesses qui sont leur mauvaise flexibilité et transportabilité.

Les réseaux de neurones sont très performants pour des situations courantes et particuliè-rement adaptés aux prévisions hydrologiques de bassins versants non perturbés. De l’avisde l’auteur, leur utilisation n’est toutefois pas recommandée lorsqu’il s’agit d’intégrer desouvrages hydrauliques dans la simulation. En effet, le nombre d’entrées nécessaires à la mo-délisation d’un bassin versant comme celui du Rhône, en y incluant encore le comportementparticulier des aménagements hydroélectriques, rendrait extrêmement délicat la constructiond’un réseau de neurones. Il faudrait pour cela réaliser en modèle formé d’une combinaisonde réseaux de neurones, faisant ainsi perdre toute possibilité de contrôle du modèle à causede son manque de réalité physique.

Finalement, les modèles conceptuels sont très flexibles, transportables et peuvent êtreutilisés dans dés régions où les données de contrôle sont manquantes. Ils permettentde plus l’intégration explicite des ouvrages hydrauliques. Ces deux raisons expliquent àelles seules le choix du concept de modélisation employé dans le projet MINERVE, oùd’importantes surfaces ne sont pas jaugées et où l’objectif est de déterminer les meilleuresopérations des aménagements hydroélectriques lors des crues. Ces modèles peuvent de plusêtre couplés avec des techniques de type analogues, ce qui offre des perspectives intéressantesde développement.

Enfin, les techniques liées aux radars sont d’un usage limité. Elles peuvent être utiles pourla prévision à court terme (nowcasting) ou pour l’évaluation du champ des précipitationsen temps réel, mais ne permettent pas d’établir des prévisions hydrologiques à moyen terme(Bürgi, 2002; Haiden, 2006).

Au final, et même si la recherche porte actuellement sur tous ces différents conceptsen fonction des régions concernées, les besoins d’un modèle de prévision à moyenneéchelle, intégrant de manière explicite les aménagements hydroélectriques, et dont larégion à modéliser présente une grande variabilité dans sa topographie et ses processuspeuvent typiquement être appréhendés par des modèles conceptuels. En effet, par leurcapacité de s’adapter aux différents processus hydrologiques et à la réalité locale d’un sous-bassin versant, par leur capacité à extrapoler certains comportements vers des sous-bassinsversants non jaugés, les modèles conceptuels seront choisis pour la suite de ce travail derecherche.

40

3 Optimisation des systèmes dynamiquesdédiés

3.1 Préambule

Un des principaux objectifs du travail de recherche est le développement d’une méthodologiepour l’optimisation de la gestion des aménagements hydroélectriques à accumulation lorsdes crues. Cela constitue donc une motivation suffisante pour tenter de défricher quelquepeu la forêt des méthodes d’optimisation appliquées à la gestion des resources en eau. Avantde s’introduire plus profondément dans les fourrés des techniques numériques, un rappel desnotions générales de l’optimisation est proposé, en commençant par une définition du PetitLarousse :

Optimiser : donner à quelque chose les meilleures conditions d’utilisation, de fonctionnementou de rendement.

Si l’on s’en réfère à la théorie darwinienne de l’évolution, l’optimisation est une conditionnécessaire à la prospérité des êtres vivants, puisque les individus possédant les caractéris-tiques les plus adaptées à leur environnement (optimales) auront les meilleures chances desurvie. Il en va de même pour les systèmes issus du génie de l’Homme, dont la pérennité nepeut être assurée que par des structures et un fonctionnement optimaux.

Du point de vue mathématique, un problème d’optimisation est défini par différentscomposants :

– un modèle du système à optimiser– des variables– des contraintes– une ou des fonctions objectif

La solution optimale est un vecteur dont chaque composante représente la valeur optimalede chacune des variables. Ce terme ne doit pas être confondu avec l’optimum qui représentela valeur de la fonction objectif (cas simple) lorsque ces variables sont précisément à leurvaleur optimale.

En pratique, la première tâche consiste à modéliser le système, c’est-à-dire déterminerl’ensemble de ses composantes, leur comportement ainsi que les liens entre elles. Une foiscette difficile étape réalisée, il s’agit de déterminer quelles sont les variables. Par variables,on entend les leviers sur lesquels il sera possible d’agir afin de modifier le comportement dusystème. Il est ensuite nécessaire de définir les contraintes, soit le domaine de validité deces variables ou des composantes du système. Finalement, il est recommandable de réfléchirsérieusement aux buts de l’optimisation en définissant les fonctions objectif. S’agit-il parexemple de maximiser un profit ? De minimiser une dépense ? A quelle échéance ? Pourquels bénéficiaires ?

41

Ce chapitre n’a pas la prétention d’exposer la théorie mathématique de l’optimisation. Il selimitera à la description et à l’analyse des différentes méthodes d’optimisation développéesou pouvant être appliquées dans le cadre du problème spécifique de l’exploitation desaménagements hydrauliques à accumulation. Ces ouvrages de stockage d’eau sont utiliséspour l’irrigation, la production hydroélectrique, le contrôle des crues, le soutien d’étiage oules loisirs. Il est ainsi nécessaire d’utiliser les capacités de ces ouvrages de la meilleure manièrepossible au cours du temps afin d’en tirer profit. L’analyse et l’évaluation détaillée de cesméthodes d’optimisation appliquées aux réservoirs a également été reportée par différentsauteurs (Yeh, 1985; Labadie, 2004).

3.2 Bases théoriques de l’optimisation

3.2.1 Introduction

Une fonction objectif peut contenir de nombreux optima, qu’ils soient maxima (sommets)ou minima (fosses). Dans tous les cas il s’agira d’optima locaux. La difficulté majeurede l’optimisation réside dans le repérage de l’optimum global, c’est-à-dire la valeur de lafonction objectif qui surpasse toutes les autres dans l’absolu. Nombreuses sont en effet lesméthodes qui trouveront des optima locaux et qui s’y accrocheront. Tel l’exemple présentéà la figure 3.1, il est remarquable de constater que de nombreux sommets sont visibles. Ilest par contre plus difficile d’en repérer le plus élevé.

Fig. 3.1: Modèle numérique de terrain de la région d’Aletsch.

Une deuxième difficulté survient lorsque le système doit être optimisé selon plusieursfonctions objectifs. Outre le terme d’optimisation multi-objectifs qui doit être employé, lacomplication provient de l’évaluation globale de solutions apparemment fort différentes. Pourillustrer ce problème, examinons l’exemple (trivial ?) du choix auquel peut être confronté

42

l’acheteur d’un nouveau véhicule. Ce véhicule peut être compact et écologique, puissant,ou simplement esthétique. Lequel sera le meilleur véhicule ? Une compacte écologique est-elle meilleure qu’une belle sportive ? Quid d’une compacte sportive ou d’une belle voitureà faible consommation ? Leurs prix peuvent être différents, tout comme leurs performanceset leurs impacts sur l’environnement. Ces trois critères d’évaluation sont bien réels, maiscomment les comparer ?

Pareto a proposé une réponse à la question (Pareto, 1896). Une solution est optimalesi aucune autre solution ne l’égale ou la surpasse de tout point de vue simultanément.Tous les exemples de véhicules cités plus hauts seraient donc des optima au regard de sadéfinition.

La méthode économétrique peut être appliquée dans le cas où il est possible de ramenerles différents critères à une unité commune. Les méthodes multicritères mesureront lesperformances en points, les autres les évalueront de manière monétaire. Il en ira ainsi dansle cas présenté dans ce mémoire, car les objectifs de l’exploitation et de la protection contreles crues peuvent se chiffrer sans grandes contorsions.

3.2.2 Méthodes d’optimisation simples

La résolution analytique d’un problème d’optimisation peut être effectuée sur des modèlessimples. Si la fonction objectif f peut être représentée sous forme de fonction à une ouplusieurs variables, il suffit de rechercher les solutions pour lesquelles la dérivée totale estnulle. Ces points correspondent aux extrema de la fonction : les minima et maxima sontles points dont la deuxième dérivée est positive, respectivement négative. Il est néanmoinsnécessaire d’évaluer chacun des extrema afin de déterminer l’optimum global (la fonctionobjectif est en général formulée de manière à ce que l’optimum soit un minimum).

L’optimisation analytique est malheureusement d’un usage limité. Lorsque la dérivée ne peutêtre décrite, il devient nécessaire d’utiliser des méthodes itératives. La méthode du gradient(ou de la skieuse) recherche les extrema locaux en suivant le chemin déterminé par le plusfort gradient ou la pente la plus raide. La direction de descente dk est donnée par l’opposéde la dérivée totale −∇f(xk). La largeur du pas αk est calculée de manière à atteindre lavaleur minimale sur l’axe partant de xk dans la direction dk en posant (équ. 3.1) :

min(f(xk + αkdk)) (3.1)

L’extremum calculé avec la méthode du gradient sera conditionné par le point de départdu calcul. Il est également nécessaire de prévoir un critère de convergence afin d’arrêter lecalcul au moment le plus opportun.

La méthode de Newton converge plus rapidement vers l’optimum local mais nécessite lecalcul du Hessien de la fonction objectif et de son inverse. La direction de descente estdéterminée par l’équation 3.2 et la largeur du pas est unitaire (αk = 1).

dk = −H−1(xk)∇f(xk) (3.2)

De nombreuses autres méthodes d’optimisation ont été développées pour différents pro-blèmes. Le lecteur retiendra de ce paragraphe la nécessité de formuler en une expression

43

mathématique l’entièreté de la fonction objectif afin de déterminer l’optimum local de ma-nière analytique ou avec les méthodes de descente.

Il existe naturellement une méthode permettant d’atteindre avec certitude l’optimum globald’une fonction objectif unique, appelée énumération. Celle-ci mémorise et évalue la fonctionobjectif sur tout l’espace des solutions pour n’en retenir finalement que la valeur minimale.Le nombre N d’évaluations nécessaires dépend du nombre k de variables et n d’incrémentsdans le domaine de chaque variable (équ. 3.3).

N = nk (3.3)

Le lecteur sera ici épargné de la traditionnelle évaluation du temps de calcul nécessairepour effectuer l’optimisation par une telle méthode d’un problème à 20 variables et 100incréments...

3.3 Optimisation des ouvrages d’accumulation : formulationtypique

L’optimisation de l’exploitation d’un ou plusieurs réservoirs est un problème qui intéresse deprès les propriétaires de ces aménagements hydrauliques. De nombreuses méthodes essayantde proposer les meilleures opérations ont été développées pour analyser la performance desystèmes futurs ou pour optimiser la performance de systèmes existants. Malgré la multitudeet la spécificité de chaque réseau hydraulique, les formulations des problèmes d’optimisationassociés sont souvent similaires.

Les objectifs traditionnels de l’exploitation des réservoirs sont l’irrigation, l’eau potable, laprotection contre les crues, la production hydroélectrique, le soutien d’étiage et les loisirs,les variables étant le débit turbiné et le débit lâché à travers des vannes ou un organe dedécharge. Ces objectifs sont en général exprimés sous forme de fonction du débit. Il s’agitdonc de déterminer, pour chaque réservoir du système et à chaque pas de temps, le débitturbiné ou libéré par un organe vanné. En résumé, voici les objectifs concrets visés parl’exploitation des réservoirs et leurs variables associées :

– maximiser la production hydroélectrique (débit turbiné QT , hauteur turbinée hT )– minimiser l’écart entre la production hydroélectrique et la demande (QT )– minimiser les pertes d’eau (débit libéré Qs)– minimiser les dégâts lors des crues, ou la différence entre le débit effectif et la capacité du

cours d’eau (Qs)– minimiser l’écart entre le débit minimum et le débit effectif (QT , Qs)

La contrainte essentielle est l’équation de bilan de chaque retenue (équ. 3.4) :

St = St−1 + Qe −Qs

St ≤ Smax

St ≥ Smin

(3.4)

St est le volume stocké dans la retenue au temps t, Qe et Qs le débit total entrant,respectivement sortant de la retenue. La continuité doit également être assurée en tout pointselon la topologie du réseau hydrographique. De nombreuses autres contraintes peuvent être

44

introduites en fonction du système étudié (capacités de turbinage ou d’évacuation, etc...). Ilconvient de noter que certains objectifs prioritaires peuvent être transformés en contraintes,ce qui sera démontré plus tard dans ce chapitre.

3.4 La programmation linéaire et ses extensions

La programmation linéaire (linear programming - LP) permet la résolution de problèmesd’optimisation dont la fonction objectif et les contraintes peuvent s’exprimer sous formed’équations linéaires. Le problème doit pouvoir être formulé de la manière suivante (équ.3.5, forme matricielle) :

Maximiser f(X) = cT X

avec AX ≤ b

et x ≥ 0(3.5)

Dans le cas d’une fonction objectif à deux variables, une résolution graphique est possible.Au-delà, l’algorithme du simplexe découvert par Dantzig en 1947 permet la résolution desystèmes plus compliqués (Dantzig, 1982). L’espace des solutions d’un système d’équationslinéaires a une forme polyhedrale et l’optimum se trouve toujours en un point particulier,à une intersection entre hyperplans ou contraintes. Enfin, l’optimum global est toujoursatteint par le solveur.

La LP exige une formulation du problème sous forme d’équations linéaires continues quine représentent pas toujours correctement le comportement du système. Des extensions decette méthode permettent de corriger ce défaut : la programmation linéaire en nombresentiers (Integer Linear Programming, ILP), mixte (Mixed ILP, MILP) permet d’imposerdes solutions discrètes et leurs algorithmes associés se nomment Branch and Bound ouBranch and Cut. Ces derniers s’appuient sur des solutions initiales en nombres réels et surdes nouveaux problèmes PL associés en fixant les variables choisies à des valeurs entières.Ainsi, un problème MILP devient une arborescence de plusieurs problèmes LP.

La LP peut également être utilisée pour l’optimisation multi-objectifs moyennant quelquessimplifications. La méthode la plus simple consiste à créer une fonction objectif linéairepondérée f en fonction des i objectifs de poids wi selon l’équation 3.6 (Barros et al., 2003;Draper et al., 2004) :

f =n∑

i=0

wi · fi (3.6)

S’il est possible de dégager des objectifs prioritaires, il est également possible de lesexprimer sous forme de contraintes (Yeh and Becker, 1982). D’autres variantes existent,tels l’introduction de relations entre objectifs (Kumar et al., 2001).

De nombreux auteurs ont utilisé cette technique d’optimisation dans le cadre de l’exploita-tion de systèmes d’aménagements hydroélectriques à accumulation, à l’exemple du modèleSISOPT au Brésil (Barros et al., 2003) présenté à la figure 3.2. Ce modèle utilise la LPpour la génération d’une bonne solution initiale avant de formuler le problème de manièrenon linéaire dans la région choisie. Cette combinaison n’est pas nouvelle (Yeh et al., 1979) etpossède toujours de nombreux adeptes (Westphal et al., 2003). La rapidité de l’optimisation

45

par la LP la rend aussi intéressante en phase de planification (Barros et al., 2003) et pourl’analyse de variantes.

En général, la LP résout le problème de manière déterministe : les données d’entrée sontconsidérées comme fiables et l’incertitude est négligée. Or, dans le cas de la gestion desréservoirs, l’apport en eau varie de manière particulièrement aléatoire. Il est donc importantd’inclure une composante stochastique dans les modèles afin de déterminer la solutionoptimale au sens probabiliste du terme, celle dont la fonction objectif aura l’espérance laplus élevée. Des balbutiements proposant un modèle théorique d’un réservoir dont l’apportétait un processus Makovien (Manne, 1962) aux modèles plus élaborés de LP stochastiquerécursive ou Chance-Constrained LP (ReVelle et al., 1969), ces méthodes utilisent en généraldes règles d’exploitation rigides des réservoirs optimisées pour le long terme appelées LinearDecision Rules (Yeh, 1985). Certains auteurs en ont profité pour traiter l’incertitude par lalogique floue (Zadeh, 1965). Dans ce domaine, Jairaj and Vedula (2003) ont utilisé la LPpour définir les bornes de la fonction d’appartenance, elles-mêmes à nouveau introduitesdans le problème LP, tandis que Kumar et al. (2001) ont introduit la logique floue (décriteplus loin dans ce chapitre) pour définir la fonction objectif.

En résumé, la LP est fréquemment utilisée pour les raisons suivantes :

– résolution efficace et rapide des problèmes à grande échelle– calcul de l’optimum global– pas besoin de solution initiale– théorie de dualité permettant d’effectuer facilement une analyse de sensibilité de la

solution optimale– nombreux algorithmes et codes disponibles

Il ressort cependant des exemples présentés dans ce chapitre quelques observations relativesà la programmation linéaire :

– application pour la planification à long terme, pas de temps hebdomadaires ou mensuels– nécessité de linéariser la fonction objectif et les contraintes– nécessité de simplifier suffisamment le système pour avoir une formulation mathématique

continue– sinon, emploi de la méthode MILP et explosion du nombre de problèmes à résoudre– prise en compte de l’incertitude délicate, augmentant considérablement la complexité de

la modélisation

3.5 Programmation non linéaire

La programmation non linéaire (non-linear programming - NLP) a été développée pouréviter de trop grandes simplifications lors de la formulation du problème d’optimisation. Sile système peut être mieux décrit par des relations non linéaires, il se révèle d’autant plusdifficile à optimiser. En effet, aucune méthode NLP ne garantit la découverte de l’optimumglobal du problème si la fonction objectif n’est par convexe. De plus, la convergence estbeaucoup plus lente que pour la LP.

Dans le cas de fonctions convexes sans contraintes, les méthodes de descente (paragraphe3.2) peuvent être utilisées. Si des contraintes linéaires sont introduites, la méthode desdirections admissibles (generalized reduced gradient - GRG) permet encore de s’en sortir. Ilsuffit de garantir que la largeur du pas dans la direction choisie soit inférieure à la distance

46

Fig. 3.2: Schéma du réseau hydraulique SISOPT au Brésil (Barros et al., 2003).

47

entre la solution actuelle et la contrainte. Pour cela, la direction déterminée par LP n’estplus forcément celle de la plus grande pente mais celle menant à la valeur la plus faiblede la fonction objectif. Des applications au contrôle des crues (Unver and Mays, 1990) et àla production hydroélectrique (Peng and Buras, 2000) ont été proposées, mais elles se sontrévélées peu performantes. Il faut cependant noter que la manière la plus courante d’exploiterles algorithmes NLP est de transformer les contraintes en pénalités dans la fonction objectif(Rosenthal, 1980).

La programmation quadratique (Successive Quadratic Programming - SQP) exploite lapropriété de certains algorithmes de mieux approcher les problèmes non-linéaires queles linéaires, mais elle nécessite que les contraintes restent linéaires. Cette méthode pluscomplexe peut se révéler efficace pour l’optimisation de sous-problèmes (Barros et al., 2003),mais devient difficilement utilisable pour une approche stochastique. De plus, le tempsde calcul en SQP augmente de manière exponentielle avec le nombre de pas de temps(Tejada-Guibert et al., 1990).

Outre ces méthodes NPL, il est possible de résoudre des problèmes d’optimisation non-linéaires sans abandonner la formulation initiale. Une première possibilité est l’approxima-tion linéaire d’une partie de la fonction non-linéaire (linéarisation) en ne retenant que leterme de premier ordre aux alentours d’un point connu. La deuxième possibilité réside dansla LP séquentielle (Sequencial LP - SLP) qui génère un nouveau problème LP à chaqueitération, mais dans un domaine limité (Barros et al., 2003). Il s’agit d’introduire une per-turbation à une solution connue, d’en déduire une relation linéaire entre les solutions per-turbée et connue et de résoudre le nouveau problème LP ainsi créé. De l’amplitude de laperturbation dépend la rapidité de convergence de la solution. Cette méthode est devenuepopulaire, car de nombreux codes LP existent et peuvent être utilisés. De plus, elle convergeenviron dix fois plus rapidement que les méthodes NLP (Hiew, 1987), mais pas forcémentvers l’optimum global (Bazarra et al., 1993).

Les principales caractéristiques de la NLP peuvent se résumer comme suit :

– formulation exacte d’un problème non linéaire– bonne précision du calcul de l’optimum (local)– calcul de l’optimum global non garanti– temps de calcul prohibitif, complexité exponentielle avec le nombre de pas de calcul– possibilité de linéariser le problème par sous-régions

3.6 Programmation dynamique

La programmation dynamique (dynamic programming - DP) est adaptée aux problèmes deminimisation des coûts dans un espace d’états, ou les transitions entre états (trajectoires)sont déterminées par des décisions (commandes). Les problèmes d’opération des réservoirsappartiennent sans doute à cette catégorie, les états étant typiquement les niveaux deremplissage au cours du temps, les commandes étant liées au turbinage ou à la vidange (figure3.3). Pour être employée, la DP nécessite que le problème respecte le principe d’optimalitéde Bellman (Bellman, 1957) : une sous-trajectoire d’une trajectoire optimale est elle-mêmeoptimale pour la fonction objectif restreinte aux trajectoires ayant pour origine celle de cettesous-trajectoire. Il s’agit donc de prouver que le système puisse être optimisé par périodessuccessives sans que la perte de mémoire du système ne nuise à la solution optimale.Si c’est le cas, un problème d’optimisation peut être décomposé en sous-problèmes plus

48

simples à résoudre de manière récursive, ce qui allège considérablement le calcul et permetl’introduction de relations non-linéaires ou de stochasticité. La formulation de base est lasuivante (équ. 3.7) :

fn(xn) = max[rn(xn, dn) + fn−1(xn−1)] (3.7)

x représente l’état, d la décision, r la fonction de retour et n le pas de calcul. Lacondition initiale f0(x0) doit être donnée en tout point du système. Pour être applicable,la DP nécessite un découpage des pas de calcul de telle sorte que les valeurs de lafonction f soient séparables et monotones. Dans le cas des fonctions de retour additives,multiplicatives, minimax ou maximin, il suffit de vérifier que leurs événements soientindépendants. L’application de cette technique aux problèmes d’opération des réservoirsdate de la fin des années 1950 (Little, 1955).

Fig. 3.3: DP - optimisation d’un système de réservoirs de manière séquentielle (Labadie, 2004).

Elle est généralement exploitée de deux manières : la première permet le calcul des opérationsoptimales pour l’établissement de règles d’exploitation rigides. Cancelliere et al. (2005)utilisent la DP pour le calcul des débits mensuels optimaux pour l’irrigation en fonctiondu débit entrant et de la demande. Ces lâchers d’eau optimaux sont ensuite exploités pourle développement d’un système de type neuro-fuzzy, combinaison entre réseaux de neuroneset logique floue. D’autres auteurs ont utilisé la DP de la sorte, tels Rao et al. (2001)pour des objectifs d’irrigation et de protection contre les crues à pas de temps mensuel,Russel and Campbell (1996) pour la production hydroélectrique mensuelle, Stam et al.(1998) pour la production hydroélectrique mensuelle et la protection contre les crues jusqu’à1 année en avance, et Lobbrecht et al. (2005) pour la gestion du remplissage de polders àtrès court terme (6 pas de 15 min en avance).

La deuxième façon d’employer la DP est son utilisation directe pour déterminer l’opérationoptimale d’un réservoir en temps réel. Yeh et al. (1979) s’en est servi pour optimiser unsystème de plusieurs réservoirs à pas de temps horaire et 24 h en avance pour la productionhydroélectrique, tandis que Karamouz et al. (2005) l’utilise pour le choix des débits mensuelsd’irrigation, d’eau potable, et de production d’électricité.

Il est possible de résumer les principales caractéristiques de la DP comme suit :

– rapidité du calcul– complexité linéaire avec le nombre de pas de calcul

49

– implémentation aisée de la méthode– nécessité d’indépendance de la solution optimale entre les pas de calcul– aucune garantie de convergence vers l’optimum local et global– approche déterministe pour l’optimisation à court terme, stochastique à long terme

3.7 Intelligence artificielle

L’intelligence artificielle (artificial intelligence - AI) se base sur les capacités informatiquesdéveloppées depuis les années 1950 et recouvre de nombreux domaines dont l’optimisation, lecontrôle-commande, l’opération de systèmes en temps réel, la reconnaissance de structures(pattern recognition) et le diagnostic. La description exhaustive des méthodes existantesétant une tâche disproportionnée dans le cadre de ce travail, seuls quelques repères ainsique les principales applications de l’AI dans le domaine de l’exploitation des aménagementshydrauliques seront décrites dans ce chapitre.

3.7.1 Algorithmes évolutifs

Dès le début des années 1960, les termes stratégie évolutive, programmation évolutive, algo-rithme génétique (GA) sont apparus en Allemagne dans la recherche et l’ingénierie (Schwefel,1965; Rechenberg, 1973). S’inspirant de la théorie de l’évolution de Darwin, ces théories ontpermis le développement d’algorithmes efficaces pour l’optimisation de fonctions ou de sys-tèmes complexes. Le fonctionnement de ces algorithmes est relativement simple (figure 3.4),mais de nombreuses stratégies différentes d’évaluation des solutions ou de génération denouvelles solutions à partir des anciennes existent et permettent d’adapter l’algorithme enfonction du problème traité (Leyland, 2002). Le principe général de fonctionnement desalgorithmes évolutifs consiste à générer un certain nombre d’individus dans l’espace dessolutions. L’ensemble des individus (solutions) créés en même temps est alors appelé géné-ration. Ces individus sont évalués par rapport aux objectifs, puis classés en fonction de leurperformance relative. Finalement, certains d’entre eux serviront éventuellement à créer lagénération suivante par mutation, élitisme ou génération stochastique. Lorsque la perfor-mance d’une solution est jugée suffisante, ou quand le nombre de générations créées atteintune valeur limite, le processus s’interrompt et les meilleures solutions disponibles sont pré-sentées.

Les algorithmes évolutifs ne sont pas utilisés couramment dans le domaine de l’exploitationdes aménagements hydrauliques, mais quelques exemples ont démontré la possibilité de lesutiliser pour définir des règles d’exploitation (Otero et al., 1995; Oliveira and Loucks, 1997)ou comme alternative à la DP (Sharif and Wardlaw, 2000). Les caractéristiques essentiellesdes GA sont les suivantes :

– convergence vers l’optimum local ou global non garantie– difficulté d’intégrer des contraintes d’inégalité sans utilisation des fonctions de pénalité– temps de calcul important, peu adapté pour le calcul stochastique– pas nécessité de simplifier le modèle d’évaluation– capacité à optimiser des problèmes hautement non-linéaires et non-convexes– capacité à fournir des solutions multiples du type optima de Pareto

50

Fig. 3.4: Schéma de fonctionnement d’un algorithme évolutif.

3.7.2 Réseaux de neurones artificiels

Le fonctionnement de ces systèmes a déjà été décrit au chapitre 2. Dans le domaine desbarrages, ils sont typiquement utilisés pour la génération de règles d’exploitation implicitesdes réservoirs grâce à leurs performances pour la reconnaissance des structures. Pour cela,ils doivent subir un processus d’apprentissage possible uniquement si un autre modèled’optimisation déterministe existe (LP, NLP, DP). Quelques auteurs se sont penchés sur cesujet et ont obtenu des résultats particulièrement intéressants (Raman and Chandramouli,1996; Chandramouli and Raman, 2001; Rao et al., 2001; Cancelliere et al., 2005). Bienqu’en général non dédiés à l’optimisation, les réseaux de neurones artificiels présentent lescaractéristiques suivantes pour cette tâche :

– besoin d’un set d’entrées-sorties pour l’entraînement– forte dépendance du contenu du set de données pour la performance future (extrapolation

délicate)– pas de règle générale pour définir la meilleure structure du réseau de neurones– rapidité de calcul, adapté au calcul stochastique– prise en compte implicite de l’incertitude

3.7.3 Logique floue

La logique floue (fuzzy logic ou fuzzy sets theory - FS) a été développée dans les années1960 et a été reportée pour la première fois dans le fameux article de Zadeh (1965). Cetteméthode est particulièrement performante pour la modélisation de problèmes fortement non-linéaires, dont les lois de comportement sont mal connues, dont les données de calage ou devalidation manquent, ou lorsque les données d’entrée et de sortie font appel à l’appréciationet l’expertise humaine. Elle se base sur la théorie des ensembles (logique booléenne) verslaquelle elle converge, mais étend la réflexion en proposant des règles d’appartenance(membership functions) plus souples. Ainsi, en logique floue, un objet de couleur grisepourrait appartenir à 50% à la classe de couleur noire et à 50 % à la classe de couleur blanche.Par contre, la logique floue constitue une approche radicalement différente de la théorie desprobabilités, puisqu’elle n’associe pas d’espérance à une variable mais bel et bien une valeur.

51

Elle sied donc particulièrement aux problèmes de prise de décision dans un environnementoù les paramètres à considérer ainsi que leurs incertitudes sont importantes et difficilementquantifiables. Ses applications sont nombreuses, bien que tardivement apparues, dans lesdomaines du contrôle-commande, de la régulation d’appareils, de la détection, du diagnosticou de la reconnaissance de caractères.

Le développement d’un modèle en logique floue doit suivre les étapes suivantes :

1. création des fonctions d’appartenance des variables d’entrée et de sortie (fuzzification)2. définition des règles du moteur d’inférences (nécessite une base de règles et de

définitions)3. choix d’une méthode de défuzzification

Le choix des types de fonction d’appartenance, des opérateurs entre les différentes règlesdu moteur d’inférence et des méthodes de défuzzification nécessite un certain nombred’itérations et l’expertise du développeur.

Fig. 3.5: Exemple de fonction d’appartenance, tiré de Abebe et al. (2000).

Le lecteur n’a maintenant plus aucune peine à imaginer les nombreuses applicationspossibles de la logique floue pour la gestion des aménagements hydrauliques avec réservoirs(régulation). Les plus récents exemples concernent la gestion de réservoirs uniques à butsmultiples : Kumar et al. (2001) détermine la production mensuelle à atteindre du réservoirHirakud en Inde pour l’irrigation et la production hydroélectrique, Jairaj and Vedula(2003) l’utilisation mensuelle du Krishna basin en Inde pour l’irrigation avec un modèleoù l’évapo-transpiration potentielle est évaluée de manière floue, et Russel and Campbell(1996) la production hydroélectrique mensuelle d’un réservoir sur la rivière Powell auCanada en fonction des apports et du prix du marché. Shrestha et al. (1996) présentedans son article de référence un système d’aide à la décision pour le Tenkiller Lake enOklahoma, où la production journalière doit satisfaire des objectifs multiples (production

52

hydroélectrique, irrigation, protection contre les crues et navigation) en fonction des entréesque sont les apports dans la retenue, son niveau actuel, le mois et la demande énergétiqueprévue. D’autres applications de la logique floue dans ce domaine ont été reportées parCancelliere et al. (2005), où les rejets journaliers du réservoir de Pozzillo en Italie pourl’irrigation sont évalués par combinaison linéaire des sorties d’un moteur d’inférences detype fuzzy. Lobbrecht et al. (2005) a utilisé la logique floue pour l’optimisation du pompagede multiples polders de manière similaire à un ANN pour produire les mêmes résultatsque par DP, mais plus rapidement (figure 3.5). Enfin, Karaboga et al. (2004) a comparéun système fuzzy à des règles rigides et un système classique de contrôle d’écarts pour lagestion horaire du réservoir Catalan en Turquie. Malheureusement, peu ou pas d’exemplesde systèmes d’aide à la décision pour des réservoirs multiples existent. En bref, voici doncles principales spécificités des méthodes de logique floue :

– intégration possible d’informations de mauvaise qualité ou difficilement quantifiables– rapidité de calcul– nécessite des jeux de données d’entraînement et de validation– ne nécessite pas d’hypothèse sur les données d’entrée (distribution)– expertise nécessaire pour le choix de la structure du modèle– développement du modèle compliqué et non généralisable

3.7.4 Systèmes experts

Certaines des méthodes décrites plus haut sont parfois assimilées aux systèmes experts(expert systems - ES), en particulier les ANN et la logique floue. Dans ce mémoire, le motsystème expert sera toutefois seulement attribué à deux technologies bien particulières : lessystèmes à cas (case-based, par exemple le moteur de recherche Google) et les systèmes àrègles (rule-based).

Un système expert fonctionne selon le schéma présenté à la figure 3.6. Il nécessite unebase de connaissances constituée directement de différents cas référencés (case-based) ou derègles déterminées à l’avance (rule-based, dont le célèbre MYCIN développé en 1974 pour lediagnostic d’infections sanguines) déduites d’une analyse des cas. Ainsi, le système experttentera de reproduire le raisonnement d’un humain (cognition) et devra de plus être capablede le justifier.

Pour développer un système expert, il est nécessaire de disposer d’une importante base dedonnées de cas, comportant également des cas relativement extrêmes afin de disposer d’unspectre aussi large que possible de situations décrites. Dans le cas des aménagements à ac-cumulation, un outil de simulation fera généralement l’affaire et permettra la génération desuffisamment de situations. Ainsi, Ahmad and Simonovic (2000) ont développé un systèmed’aide à la décision pour l’optimisation des lâchers d’eau à la retenue de Shellmouth auCanada pour la protection contre les crues. Ce modèle se constitue d’un outil de simulationbasé sur une approche de dynamique des système, qui est utilisé pour la création des règlesde gestion du réservoir. L’avantage de ce système est que ces règles sont explicites et doncaisément communicables aux opérateurs. Le même auteur a proposé un an plus tard un"système intelligent de gestion des crues" (Ahmad and Simonovic, 2001) qui propose desstratégies de planification de mesures de protection contre les crues incluant la constructionde digues, de dérivations, de réservoirs, de zones d’épanchement et de changements d’affec-tation. Les entrées vont des caractéristiques hydrologiques, morphologiques et géotechniquesdu bassin versant à la géométrie du cours d’eau et aux coûts de construction des ouvrages.

53

Fig. 3.6: Schéma de fonctionnement d’un système expert.

Au travers de règles heuristiques, le modèle fournit une analyse financière des mesures ainsiqu’une recommandation finale sur les mesures à mettre en oeuvre. Il est délicat de choisir lesmeilleures règles lorsqu’il s’agit de la gestion d’une retenue. Cette recherche, appelée parfoisdécouverte de connaissance, reconnaissance ou en anglais data mining fait aussi l’objet dedéveloppements. Une approche en arbre de décision a été décrite par Bessler et al. (2003)et donne les différents niveaux seuils pour la production de débit mensuel d’irrigation enfonction de l’apport dans la retenue et de la période. Cette technique permet également deretrouver explicitement les raisons de la décision.

Une application de systèmes experts à grande échelle a été présentée par Cheng and Chau(2004) au travers d’un outil de prévision-simulation-optimisation de 60 barrages sur le fleuveYangtze en Chine. León et al. (2000) a développé un modèle pour la gestion en temps réel duréseau d’eau potable de Séville en Espagne. Les objectifs sont la satisfaction de la demandeau moindre coût de pompage, atteints à l’aide de quelques 500 règles. Il est enfin possible dementionner la méthode des analogues, présentée au chapitre 2 en tant que système expertcase-based. Cette méthode est toutefois employée pour la prévision des crues et non pourl’optimisation d’un réservoir.

Les principales caractéristiques des systèmes experts peuvent se résumer ainsi :

– besoin d’une base de connaissances fournie– difficulté de déduire automatiquement les règles du moteur d’inférences– peu ou pas d’exemples de systèmes experts pour l’optimisation de systèmes à plusieurs

réservoirs– grand confort d’utilisation– résultats justifiés explicitement par description des règles utilisées

54

3.8 Autres méthodes dédiées

Il est parfois difficile de classer les modèles d’optimisation dans une catégorie bien précise.Des modèles hybrides et des combinaisons de modèles sont maintenant développés grâce auxnouvelles capacités informatiques. Le niveau de conceptualisation et de simplification requisa diminué et les approches de type simulation-optimisation se sont largement développées(Stam et al., 1998). Toutefois, d’autres modèles simplifiant judicieusement le problèmevalent le détour et proposent des alternatives efficaces aux programmes informatiquescomplexes. Ces derniers modèles sont surtout efficaces pour la résolution de problèmes oùles méthodes mentionnées dans ce chapitre sont plutôt lourdes et peu flexibles. Il s’agitessentiellement des problèmes de contrôle en temps réel pour la protection contre les cruesou la production hydroélectrique pour le marché ouvert, où les objectifs à long terme nesont pas considérés.

Karbowski et al. (2005) ont développé un outil hybride analytique et rule-based pour lecontrôle d’un réservoir de protection contre les crues. Plusieurs scénarios de débits entrants120 heures à l’avance sont considérés et une approche baysienne permet de déterminer lavidange préventive appropriée. Celle-ci évitera en effet qu’une erreur sur la prévision de débitconduise à des manoeuvres péjorant la situation. Des règles d’expert sont ensuite utiliséeset permettent encore de limiter les dégâts créés par de trop forts lâchers d’eau. Ces règlesportent d’abord sur le choix des probabilités associées aux débits prévus, puis sur les valeursrelatives à la capacité des cours d’eau à l’aval.

La méthode du preemptive goal programming (GP) est une combinaison d’algorithmes LP etde règles dans le choix des objectifs à atteindre, formalisée par Charnes and Cooper (1961). Ils’agit de déterminer des objectifs prioritaires à atteindre qui, une fois atteints, deviennent descontraintes du problème d’optimisation pour les objectifs suivants. Des applications ont étéreportés par Yeh et al. (1979) pour l’optimisation de la production hydroélectrique horairede plusieurs aménagements du Central Valley Project en Californie. Can and Houck (1984)ont proposé une approche similaire pour l’exploitation de 4 aménagements à buts multiplessur le Green River au Kentucky sur un horizon de 1 à 3 jours. Finalement, Eschenbach et al.(2001) a publié une application du GP pour l’exploitation hebdomadaire des retenues de laTennessee Valley (pas de temps de 6 heures). Cette approche présente deux défauts :

– la solution optimale d’un objectif prioritaire doit être multiple– le risque existe de se priver de solutions alternatives améliorant significativement les

objectifs secondaires

Si la hiérarchisation entre objectifs apparaît clairement, cette méthode permet de diminuerle nombre de calculs nécessaires de manière drastique.

3.9 Commentaires

L’étude des méthodes d’optimisation existantes révèle leur multitude, leur variété et leurscompétences particulières. Comme pour les modèles de prévision, il est possible de tenterun classement de ces techniques de gestion des aménagements à accumulation en fonctiondes objectifs visés et de l’horizon temporel de calcul (figure 3.7).

La nature stochastique des problèmes d’exploitation des retenues provient essentiellement del’hydrologie et du marché de l’électricité. En effet, les variables liées aux prévisions de débit

55

Fig. 3.7: Performance relative des méthodes d’optimisation de la gestion des aménagements àaccumulation, selon l’auteur. foncé : approprié ; moyen : possible ; clair : déconseillé

entrant dans les retenues et de la demande en électricité sont soumises à une importanteincertitude. Leur prise en compte de manière déterministe peut donc se révéler dangereuseet même si certaines méthodes d’optimisation permettent de minimiser ce risque, la plupartd’entre elles ne le considèrent pas explicitement (Philbrick and Kitanidis, 1999).

Les conditions théoriquement nécessaires garantissant l’optimisation déterministe d’unsystème de réservoirs suivent le principe de certitude équivalente (certainty equivalentproblem) et sont les suivantes :

– les fonctions de coût sont quadratiques– la dynamique du système est linéaire– pas de contraintes sous forme d’inégalité– les entrées sont indépendantes et normalement distribuées

En général, les problèmes d’optimisation des systèmes de réservoirs ne respectent pasces conditions. Les fonctions de coût des dégâts comportent souvent plusieurs seuils, ladynamique hydrologique lors des crues n’est pas linéaire, les contraintes sont de toustypes et la distribution statistique des événements extrêmes n’est jamais normale maissuit des lois différentes. Seuls les problèmes dont l’objectif prioritaire est la productionhydroélectrique sont certainement équivalents. Se basant sur un système théorique simplede quatre réservoirs en parallèle et en série, Philbrick and Kitanidis (1999) ont montré leslimites de l’utilisation d’une prévision de débit déterministe. Il est ainsi préférable d’utiliserdes scénarios de débit entrant permettant de mettre en relation les coûts et les bénéfices deplusieurs stratégies avant de déterminer lesquelles employer.

Pour conclure cette analyse, il peut être utile de rappeler qu’il n’existe pour l’instant aucuneméthode d’optimisation idéale et universelle. Avant d’opter pour l’une ou l’autre d’entre elles,il est nécessaire de déterminer les objectifs de l’optimisation, la précision de modélisationrequise ainsi que l’étendue et le comportement général du système à optimiser. Ces élémentsseront autant d’informations facilitant le choix de l’option la plus judicieuse.

Dans le cadre de ce projet de recherche, des problèmes spécifiques se posent. Tout d’abord,la nature du problème est hautement non-linéaire. Ensuite, seules peu de données d’appren-

56

tissage sont disponibles, car les crues sont rares. De plus, il serait opportun de garder unecertaine transparence dans le modèle d’optimisation afin de pouvoir le vérifier, lui assurerune crédibilité suffisante auprès des utilisateurs finaux et l’adapter à la situation réelle.Enfin, il doit permettre de fournir rapidement une solution de bonne qualité en raison carle temps passe très vite en situation de crise. Ces différentes contraintes ont donc orientél’auteur vers des solutions de type système expert et goal programming qui seront décritesen détail dans le chapitre 6.

57

58

4 Modèle hydrologique semi-distribué

4.1 Remarques préliminaires

Comme mentionné dans le chapitre 1, ce travail de recherche porte sur la modélisation et lagestion d’un bassin versant alpin lors des crues, et s’inscrit dans le cadre du projetMINERVEdont les objectifs sont le développement d’un modèle de prévision de crue et de gestion desaménagements hydroélectriques du bassin versant du Rhône à l’amont du lac Léman. Lesoutils et méthodes mis au point pour ce projet ont été orientées de manière à présenterun fonctionnement optimal pour cette région particulière. Ils sont cependant applicables àd’autres régions ayant des caractéristiques similaires. Les méthodes développées n’ont doncpas la prétention d’avoir un caractère universel : c’est le cas, en particulier, des modèleshydrologiques qui ont été développés pour reproduire les processus spécifiques de bassinsversants alpins ayant une forte composante de fonte de neige et de glace.

La modélisation hydrologique n’était pas l’objectif premier du travail de recherche décritici. Il s’agit toutefois d’un élément essentiel pour le développement d’un outil de gestion desaménagements hydroélectriques lors des crues. Les concepts de modélisation hydrologiquen’ont pas été créés par l’auteur, mais par des chercheurs du Laboratoire d’Hydrologie etAménagements (HYDRAM) de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL). Ils sonttoutefois présentés en détail dans ce chapitre afin de permettre au lecteur d’en comprendreles spécificités. Ils ont été exploités par l’auteur et appliqués au bassin versant étudié, àla suite d’un long travail de création des bases de données des caractéristiques du bassinversant, de construction du modèle hydrologique semi-distribué, de calage et de validationdes paramètres. Autres travaux importants décrits dans ce chapitre, l’adaptation des outilset le développement des méthodes de spatialisation des variables météorologiques pour laprévision hydrologique, ont été réalisés par Javier Garcia Hernandez au sein du Laboratoirede Constructions Hydrauliques (LCH) dans le cadre d’un travail de master, avec l’aide del’auteur.

Enfin, la construction du modèle hydrologique a été rendue possible grâce au développementd’un logiciel dédié par Jérôme Dubois pour le compte du LCH et du bureau HydroCosmosSA. Ce programme appelé Routing System II a été codé en Microsoft VB.NET et amélioréau cours des années 2004 à 2006 (Dubois, 2005).

Ce chapitre présente d’abord le concept de modélisation hydrologique semi-distribuée, lefonctionnement du modèle construit et son flux d’informations, les méthodes de spatialisa-tion des variables météorologiques, la procédure de calage et de validation du modèle ainsique la performance obtenue. Finalement, une procédure de mise à jour des variables d’étatdu modèle hydrologique est présentée.

59

4.2 Concept de modélisation hydrologique

Le concept de modélisation semi-distribuée a été choisi pour sa flexibilité et son niveau dedétail permettant la modélisation simultanée d’éléments naturels et artificiels. En effet, ilétait nécessaire de réaliser un modèle dont le comportement pouvait s’adapter aux différentesrégions, aux différents processus hydrologiques locaux et aux aménagements hydrauliquesprésents sur le bassin versant. Il devait également permettre des modifications ultérieuressans remettre en cause la construction et le paramétrage initial du modèle.

4.2.1 Modélisation semi-distribuée

Quelques uns des nombreux types de modèles hydrologiques ont été présentés au chapitre 2.Parmi ceux-ci, les modèles conceptuels tentent de représenter les processus hydrologiques,en se permettant cependant certaines simplifications. Les modèles conceptuels peuvent êtreexploités à différentes échelles, avec un modèle hydrologique pour un grand bassin versantou pour chaque pixel d’un modèle spatialement distribué. La situation intermédiaire a étéchoisie dans ce projet et justifie l’appellation de modélisation semi-distribuée.

Le bassin versant est ainsi divisé en entités hydrologiques homogènes plus petites selonla morphologie du terrain et le réseau hydrographique. Ce découpage doit égalementtenir compte des ouvrages hydrauliques d’importance à modéliser. Il est ainsi possibled’attribuer des paramètres différents aux sous-bassins versants déterminés et donc de varierle comportement du modèle en fonction des régions qu’il représente.

Enfin, la prise en compte des processus hydrologiques liés à la température est primordialesur un terrain montagneux avec une forte proportion de glaciers et un enneigement hivernalimportant. Les sous-bassins versants ont donc été divisés en bandes d’altitude qui sontautant de modèles hydrologiques avec leur paramétrage propre.

Un bassin versant de plusieurs milliers de km2 se retrouve finalement divisé en dizainesde sous-bassins versants. Si les différences d’altitude entre sommet et exutoire de chaquesous-bassin sont fortes, ce nombre augmente et le modèle complet se compose alors decentaines de sous-modèles hydrologiques. Cela permet toutefois de conserver un certaincontrôle des paramètres, au contraire d’un modèle distribué où le nombre de sous-modèlesest supérieur d’un ordre de grandeur au moins et où le paramétrage doit être réaliséautomatiquement.

4.2.2 Concept hydrologique

Pour représenter le plus fidèlement possible les processus d’accumulation et de fonte deneige, de fonte de glace, d’infiltration et de ruissellement de surface, différents types demodèles en réservoirs ont été développés, qui permettent le fonctionnement du modèle ensimulation continue. Cela signifie que le modèle n’est pas uniquement apte à reproduiredes événements particuliers, mais qu’il résiste à une simulation multi-annuelle en continu.Les différentes variables produisent donc des cycles journaliers, saisonniers ou annuels selonleurs particularités, en n’étant initialisées qu’une seule fois au début de la simulation.

Le concept hydrologique se base sur le modèle SOCONT développé à l’HYDRAM dans lecadre d’un projet d’estimation des crues extrêmes du Rhône en Valais appelé CONSECRU(Bérod and Consuegra, 1995; Consuegra et al., 1998). Le concept hydrologique a été étendu

60

(Schäfli et al., 2005; Hamdi et al., 2003, 2004, 2005a) et se nomme maintenant GSM-SOCONT (Glacier Snow Melt - Soil CONTribution model). Ce modèle a été utilisé lorsdu projet européen SWURVE pour l’estimation de l’impact des changements climatiquesdans les Alpes. Il a été appliqué à la prévision des apports dans la retenue de Mauvoisin enValais (Schäfli, 2005). GSM-SOCONT a également été employé lors du projet CONSECRU2(Hingray et al., 2006) pour l’établissement des débits de projet de la Troisième Correctiondu Rhône, et enfin dans le cadre du projet MINERVE présenté ici.

Selon le concept de modélisation semi-distribuée avec GSM-SOCONT, les données d’entrée(variables météorologiques) sont des précipitations, des températures et des valeurs d’évapo-transpiration potentielle (ETP) et les variables de sortie sont des débits. Chaque banded’altitude est une entité hydrologique avec ses entrées et sorties propres, qui peuvent êtresoit glaciaires soit non-glaciaires (figure 4.1).

Fig. 4.1: Concept du modèle semi-distribué GSM-SOCONT. Exemple d’un sous-bassin versant avec3 bandes d’altitude glaciaires et 2 bandes non-glaciaires.

Dans le cas glaciaire, un modèle de fonte de neige (Neige) reçoit en entrée les variablesmétéorologiques des précipitations P et des températures T . Il est connecté en série à unmodèle de fonte glaciaire (Glacier). La pluie équivalente Peq produite par la fonte de neigeest transférée au réservoir linéaire de neige RN qui produit un débit de fonte de neigeQNGL. Si la hauteur de neige HN sur le glacier est nulle, le modèle de fonte de glace produitune pluie équivalente glaciaire PeqGL acheminée vers le réservoir linéaire de glace RGL. Cedernier fournit le débit de fonte glaciaire QGL.

Dans le cas non-glaciaire, le modèle de fonte de neige transfère la pluie équivalente Peq auréservoir-sol (Sol). Ce dernier accepte également en entrée l’ETP et fournit à l’exutoire ledébit Qs, somme d’une composante d’infiltration et de ruissellement de surface. Finalement,le débit à l’exutoire de la bande d’altitude Qtot est la somme de Qs, QNGL et QGL.

.

61

4.3 Modèles hydrologiques conceptuels

4.3.1 Modèle de fonte de neige

Le modèle de fonte de neige accepte en entrée les précipitations brutes P et la températureT , et il fournit en sortie une pluie équivalente Peq. Le modèle est composé de deux réservoirs(figure 4.2), dont le premier représente le stock de neige et le deuxième le contenu en eau dela neige. Les deux réservoirs sont exprimés en équivalent-eau, ce qui signifie que la densitéde la neige est supposée égale à celle de l’eau.

Fig. 4.2: Modèle de fonte de neige avec ses deux réservoirs.

Avant d’être introduite dans le modèle, la précipitation brute doit être séparée en une partieliquide P ∗ (pluie) et une autre solide N (neige). Cette opération est réalisée par une relationtri-linéaire entre la température de l’air et la proportion liquide de la précipitation totale α(équ. 4.1 et 4.2).

P ∗ = α · P (4.1)

N = (1− α) · P (4.2)

Le facteur α se calcule en fonction des températures critiques inférieure Tcp1 et supérieureTcp2 de séparation pluie-neige (équ. 4.3).

α = 0 si T ≤ Tcp1

α =T − Tcp1

Tcp2 − Tcp1si Tcp1 < T < Tcp2

α = 1 si T ≥ Tcp2

(4.3)

La précipitation solide N vient directement fournir le stock de neige HN . Le bilan duréservoir de neige est ainsi contrôlé par cet apport et l’intensité de fonte ou de regel vers le

62

réservoir d’eau dans la neige MN (équ. 4.4). Bien entendu, la fonte ne peut être supérieureau stock initial, et le regel ne peut être supérieur à la quantité d’eau dans la neige WN .

dHN/dt = N −MN

MN ≤ N + HN/dt

MN ≥ −WN/dt

(4.4)

L’intensité de fonte ou de regel MN est évaluée selon le principe du degré-jour et estproportionnelle à la différence entre la température de l’air T et la température critiquede fusion de la neige Tcr (équ. 4.5). En cas de pluie, l’intensité de fonte de neige estaugmentée d’un facteur bp pour tenir compte de la chaleur apportée par la pluie ainsique du rayonnement solaire diffus supplémentaire réfléchi par l’atmosphère.

{MN = AN · (1 + bp · P ∗) · (T − Tcr) si T ≥ Tcr

MN = −AN · (T − Tcr) si T < Tcr(4.5)

C’est le réservoir d’eau dans la neige qui contrôle finalement la production de pluieéquivalente Peq en fonction du stock de neige, de sa saturation et de son coefficient devidange. Soit θ la part d’eau dans la neige (équ. 4.6) :

θ = WN/HN (4.6)

La pluie équivalente se calcule comme suit (équ. 4.7) :

Peq = P ∗ + WN/dt si HN = 0Peq = 0 si HN > 0 et θ < θcr

Peq = 1/Kf · (θ − θcr) ·HN/dt si HN > 0 et θ ≥ θcr

(4.7)

Finalement, le bilan du réservoir d’eau dans la neige peut être effectué (équ. 4.8) :

dWN/dt = P ∗ + MN − Peq (4.8)

4.3.2 Réservoir linéaire de neige

Le réservoir linéaire de neige fonctionne sur une bande glaciaire uniquement et transformela pluie équivalente produite par le modèle de neige en débit de neige sur glace QNGL. Ilpermet d’amortir le signal de pluie équivalente qui est relativement nerveux. Le bilan duréservoir linéaire se calcule selon l’équation 4.9 :

dhNGL/dt = Peq − hNGL/KN (4.9)

hNGL est le niveau du réservoir linéaire de neige et KN sa constante de vidange. Le débitsortant du réservoir linéaire de neige se calcule à l’aide de la surface de la bande glaciaireSGL (équ. 4.10) :

QNGL = SGL · hNGL/KN (4.10)

63

Les comportements du modèle de neige et du réservoir linéaire sont illustrés à la figure 4.3avec l’exemple d’une bande d’altitude glaciaire du bassin versant d’Aletsch située à 2200m.L’intensité brute des précipitations, la température et la pluie équivalente du 1.10.1999au 31.12.2000 sont présentés en-haut, tandis qu’en-bas se trouvent l’évolution du stock deneige et le débit sortant du réservoir linéaire. En hiver, lorsque les températures T sontinférieures à 0 C, les précipitations brutes P servent à constituer le stock de neige HN .Dans l’exemple présenté, le stock maximal atteint 0.50m en équivalent-eau à la fin avril,ce qui représente une hauteur réelle de neige de 3m pour une densité de 0.166. La haussedes températures en mai engendre la fonte du stock en 3 semaines environ et produit uneimportante précipitation équivalente Peq atteignant 3mm/h. Cette précipitation équivalenteest amortie par le réservoir linéaire de neige qui produit au plus fort de la période de fonteun débit QNGL de 2.5m3/s pour une surface de 6 km2. Le faible débit estival est produitpar les précipitations uniquement car le stock de neige est nul. De plus, la composante defonte glaciaire provenant du réservoir linéaire de glace n’est pas considérée dans cet exemple.Enfin, la crue du 15.10.2000 provoque un débit de 2.6m3/s qui n’est dû dans cet exemplequ’à la précipitation.

4.3.3 Modèle de fonte glaciaire

Le modèle de fonte glaciaire simule la fonte estivale des glaciers par un modèle de typedegré-jour sans conservation de la masse, pour autant qu’il n’y ait pas de neige sur la banded’altitude glaciaire considérée (HN = 0). Une pluie équivalente glaciaire PeqGL est produiteen fonction de la température et de la présence de neige (équ. 4.11) :

{PeqGL = AGL · (T − Tcr) si T > Tcr et HN = 0PeqGL = 0 si T ≤ Tcr ou HN > 0

(4.11)

Cette pluie équivalente de glace est acheminée vers un réservoir linéaire de glace fonctionnantselon le même principe que le réservoir linéaire de neige.

4.3.4 Réservoir linéaire de glace

Le bilan du réservoir linéaire de glace se calcule comme suit (équ. 4.12) :

dhGL/dt = PeqGL − hGL/KGL (4.12)

hGL est le niveau du réservoir linéaire de neige et KGL sa constante de vidange. Le débitsortant du réservoir linéaire de glace se calcule directement par l’équation 4.13 :

QGL = SGL · hGL/KGL (4.13)

4.3.5 Réservoir-sol : modèle SOCONT

L’écoulement dans le sol est simulé par le modèle SOCONT et ses deux réservoirs GR3 etSWMM. Les entrées du modèle sont la précipitation liquide P ∗ ou la pluie équivalente Peq

64

Fig. 4.3: Comportement annuel du modèle de neige : exemple d’une bande d’altitude glaciaire dubassin versant d’Aletsch située à 2200m.

65

Fig. 4.4: Modèle SOCONT et ses deux réservoirs GR3 et SWMM.

ainsi que l’ETP, alors que la sortie du modèle est un débit Qs, somme du débit de base deGR3 Qb et du runoff produit par SWMM Qr (figure 4.4).

L’infiltration iinf se calcule en fonction de la saturation du réservoir GR3 (équ. 4.14) :

{iinf = Peq · (1− h/hmax) si h < hmax

iinf = 0 si h ≥ hmax(4.14)

h est le niveau dans le réservoir GR3 et hmax sa capacité de rétention. L’évapo-transpirationréelle ETR se calcule en fonction de la saturation en eau du sol et de l’ETP (équ.4.15) :

{ETR = ETP · h/hmax

1/2 si h < hmax

ETR = ETP si h ≥ hmax(4.15)

Le débit de base s’obtient par une relation de vidange fonction d’une constante k et de lasurface de la bande non-glaciaire S (équ. 4.16) :

Qb = S · h/k (4.16)

Finalement, le bilan du réservoir GR3 est effectué par l’équation 4.17 :

dh/dt = iinf − ETR−Qb/S (4.17)

L’intensité nette inet est la part de pluie brute non infiltrée (équ. 4.18) :

inet = Peq − iinf (4.18)

L’intensité nette est transformée en débit ruisselé Qr dans le réservoir SWMM après uncalcul de rétention sur un plan incliné (équ. 4.19, 4.20 et 4.21). hr est la hauteur d’eau àl’aval du plan et ir l’intensité nette à l’exutoire du plan (figure 4.4).

66

dhr/dt = inet − ir (4.19)

ir = Ks · J0 · h5/3r ·B/S (4.20)

Qr = ir · S (4.21)

où Ks est le coefficient de rugosité selon Strickler, J0 la pente du plan incliné et B la largeurdu plan. Finalement, le débit sortant du réservoir-sol est la somme des contributions de GR3et SWMM (équ. 4.22) :

Qs = Qb + Qr (4.22)

4.3.6 Transfert de débit dans un cours d’eau

La fonction de transfert est un élément indispensable de la modélisation hydrologique semi-distribuée. En effet, le transfert des débits d’un sous-bassin versant vers l’aval se produitdans la nature grâce aux cours d’eau qui provoquent un décalage temporel et une atténuationde la pointe de l’hydrogramme (effet de routage). Plusieurs modèles de calcul ont ainsi étédéveloppés et leurs schémas numériques sont présentés dans ce chapitre.

Modèle de routage hydrodynamique

Le modèle de routage hydrodynamique résout les équations complètes de St-Venant pré-sentées au début du chapitre 2 pour un écoulement unidimensionnel non stationnaire. Leséquations complètes de St-Venant qui décrivent le modèle sont à nouveau présentées ici sousune autre forme (équ. 4.23 et 4.24) :

∂A

∂t+

∂Q

∂x= 0 (4.23)

∂Q

∂t+

∂x

(Q2

A+ g · I1

)= g ·A · (J0 − Jf ) + g · I2 (4.24)

où A est la surface mouillée du profil en travers, Q le débit, x l’abscisse curviligne ducours d’eau, g l’accérération terrestre, J0 la pente de fond du cours d’eau, Jf la pente defrottement, I1 le coefficient de profil, I2 le coefficient de variation de la section. L’équation4.23 exprime la conservation de masse tandis que l’équation 4.24 assure la conservation dela quantité de mouvement. Le terme I1 tient compte de la forme du profil en travers et secalcule par l’équation 4.25 :

I1 =∫ h

0(h− η) · b(η) · dη (4.25)

Le terme b désigne la largeur de la section à la cote η, qui est en fait une variable d’intégrationprésentée à la figure 4.5.

67

Fig. 4.5: Description schématique des paramètres utilisés dans le calcul de I1.

Actuellement le modèle n’est capable de résoudre les équations de St-Venant que pour unprofil trapézoïdal tel que présenté à la figure 4.6.

Pour cette section trapézoïdale, l’équation 4.25 devient (équ. 4.26) :

I1 =B · h2

2+

m · h3

3(4.26)

où B est la base de la section trapézoïdale et m le fruit de la section.

La pente de frottement Jf se calcule selon l’équation de Manning-Strickler (équ. 4.27) :

Jf =Q · |Q|

A2 ·K2s ·R4/3

h

(4.27)

où Rh est le rayon hydraulique, défini par l’équation 4.28, et où Lp est le périmètremouillé.

Rh = A/Lp (4.28)

Le terme I2 tient compte de la variation de la section le long du cours d’eau. Il est nul dansle cas d’un canal prismatique. D’une manière générale, il s’écrit (équ. 4.29) :

I2 =∫ h

0(h− η)

∂b

∂x

∣∣∣h=η

(4.29)

Fig. 4.6: Profil en travers trapézoïdal et ses paramètres descriptifs.

68

Les équations 4.23 et 4.24 sont résolues ici par la méthode d’Euler de premier ordre. Bien quela stabilité de cette méthode soit mauvaise, son utilisation dans ce projet de recherche estapproprié car les pas de temps sont courts (10 min). Pour un canal prismatique, le schémanumérique est le suivant (équ. 4.30 et 4.31) :

An+1j+1 = An

j+1 −∆t

∆x(Qn

j+1 −Qnj ) (4.30)

Qn+1j+1 = Qn

j+1 −∆t

∆x·((Qn

j+1)2

Anj+1

− (Qnj )2

Anj

+ g · In1,j+1 − g · In

1,j

)+

+∆t · g · (Anj + An

j+1)2 · J0 −∆t · g ·An

j+1 · Jnf,j+1

(4.31)

où les indices j et j + 1 représentent la position dans l’espace, les exposants n et n + 1 laposition dans le temps.

La philosophie générale de modélisation dans le cadre de ce projet est de ne pas tenir comptede l’influence exercée par l’aval. Lorsque celle-ci est négligeable, ce qui est le cas dans unegrande majorité de problèmes de routages de crues, cette hypothèse de calcul reste sansconséquences. Ainsi, la condition limite aval imposée dans le modèle est la hauteur normale.De plus, selon la situation physique à modéliser, certains termes des équations dynamiquescomplètes peuvent effectivement être négligés pour aboutir à des expressions simplifiées,sans pour autant perdre en qualité, ce qui fait l’objet des deux paragraphes suivants.

Modèle de routage selon Muskingum-Cunge

En négligeant les deux premiers termes de l’équation 4.24, celle-ci devient (équ. 4.32) :

∂I1

∂x= A · (J0 − Jf ) + I2 (4.32)

Cette équation correspond à l’approximation de l’onde diffusive. En admettant le canalprismatique (Cunge, 1991), il est possible d’écrire l’équation 4.24 sous la forme (équ.4.33)

∂Q

∂t+

( Q

BD· dD

dh

)· ∂Q

∂x− D2

2B|Q| ·∂2Q

∂x2= 0 (4.33)

où D est la débitance, définie par l’équation 4.34 :

Q = D · J1/20 (4.34)

L’équation 4.33 est une équation aux dérivées partielles de type parabolique, représentantla convection et la diffusion de la variable Q. Ainsi, le débit est transporté à une vitesse c(équ. 4.35) et diffusé avec un coefficient de diffusion δ (équ. 4.36) :

c =Q

BD· dD

dh(4.35)

69

δ =D2

2B|Q| (4.36)

En faisant encore l’hypothèse d’une relation univoque entre le débit Q et la hauteur d’eauh, l’équation 4.33 se réduit à (équ. 4.37) :

∂Q

∂t+

(dQ

dA

)x0

· ∂Q

∂x= 0 (4.37)

Cette équation est appelée "équation de l’onde cinématique". Elle décrit la convection simpledu débit à la vitesse c, telle que définie par l’équation 4.35. Elle peut être résolue par leschéma numérique en différences finies suivant (équ. 4.38 à 4.44) :

∂Q

∂t=

X(Qn+1j −Qn

j ) + (1 + X)(Qn+1j+1 −Qn

j+1)∆t

(4.38)

∂Q

∂x=

1/2 · (Qn+1j+1 −Qn+1

j ) + 1/2 · (Qnj+1 −Qn

j )x

(4.39)

Appliqué à l’équation 4.37, ce schéma permet d’écrire l’équation 4.40 :

X(Qn+1j −Qn

j ) + (1 + X)(Qn+1j+1 −Qn

j+1)c∆t +

+1/2 · (Qn+1

j+1 −Qn+1j ) + 1/2 · (Qn

j+1 −Qnj )

x = 0

(4.40)

La résolution de cette équation pour l’inconnue Qn+1j+1 aboutit à (équ. 4.41) :

Qn+1j+1 = C1Q

n+1j + C2Q

nj + C3Q

nj+1 (4.41)

où on applique :

C1 = − KX −∆t/2K(1−X) + ∆t/2

C2 = − KX + ∆t/2K(1−X) + ∆t/2

C3 = −K(1−X)−∆t/2K(1−X) + ∆t/2

(4.42)

avec :

K =∆x

c(4.43)

c =Qn

j+1 −Qnj

Anj+1 −An

j

(4.44)

70

L’hydraulicien reconnaît ici la formule de Muskingum, du nom de la rivière des Etats Unis surlaquelle cette méthode a été appliquée pour la première fois. Ainsi, la méthode Muskingumreprésente une approximation en différences finies de l’équation de l’onde cinématique. Cecin’est qu’une apparence car en fait, en développant les termes de l’équation 4.40 en sériede Taylor autour du point (j, n), en admettant que ∆x/∆t = c et en négligeant les termesdu deuxième ordre et supérieur, cette équation peut être écrite sous la forme (équ. 4.45 et4.46) :

∂Q

∂t+ c · ∂Q

∂x− c ·B · ∂2Q

∂x2= 0 (4.45)

B = ∆x · (1/2−X) (4.46)

Il ressort de cette analyse, proposée par Cunge (1969), que l’équation de Muskingum est uneécriture en différences finies de l’équation de l’onde diffusive (équ. 4.33) à condition de posercorrectement la valeur des paramètres K et X. K est défini par l’équation 4.43 et X doits’écrire, en utilisation la définition de la célérité c (équ. 4.44) selon l’équation 4.47 :

X = 1/2− D3

2∆x · |Q| ·QdD

dh

(4.47)

Modèle de routage par onde cinématique

Le modèle de l’onde cinématique est le modèle de routage le plus simple. Les termesd’inertie et de pression des équations complètes de St-Venant sont négligés. Par conséquent,l’hypothèse cinématique postule que les forces de gravité sont identiques, mais de signeopposé, aux forces de frottement. En clair, cela signifie que la pente de frottement estsupposée égale à la pente de fond. Cela implique qu’il existe une relation unique entre ledébit et la hauteur d’eau, à savoir la hauteur normale. L’équation de l’onde cinématiques’écrit donc (équ. 4.48) :

∂Q

∂t+

(dQ

dA

)x0

· ∂Q

∂x= 0 (4.48)

Il s’agit d’une équation de convection simple qui indique que le débit Q est transporté versl’aval avec une célérité c qui vaut (équ. 4.49) :

c =∂Q

∂A(4.49)

Ce modèle très simple transporte à la vitesse c chaque point de l’hydrogramme amont jusqu’àl’aval du cours d’eau. Puisqu’il n’apparaît plus de terme diffusif dans cette équation, le débitde pointe reste strictement constant et n’est pas diminué. Par contre, l’aspect général de lacrue est modifié puisque les grands débits sont transférés vers l’aval à une vitesse plus grandeque les petits. Les paramètres d’entrée sont identiques à ceux du modèle d’onde diffusive etcette fonction considère aussi la même géométrie pour les profils en travers que celle décritedans le paragraphe consacré à la méthode de Muskingum-Cunge. Contrairement au modèlede l’onde diffusive, aucune réduction du débit de pointe n’est produite, pour autant que le

71

schéma de résolution ne produise pas de diffusion numérique. La résolution est faite selonles équations 4.50 à 4.52 :

c =Qn

j+1 −Qnj

Anj+1 −An

j

(4.50)

α = c · ∆t

∆L(4.51)

Qn+1j+1 = α ·Qn

j + (1− α) ·Qnj+1 si α ≤ 1

Qn+1j+1 = 1

α ·Qnj + (1− 1

α) ·Qn+1j si α > 1

(4.52)

4.3.7 Comportement typique d’un sous-bassin versant

Le modèle hydrologique permet la modélisation de bassins versants glaciaires ou non-glaciaires. L’exemple de la figure 4.7 illustre le cas d’Aletsch, un bassin versant alpin de198 km2 avec 54% de surface glaciaire et situé à une altitude moyenne de 2930m. Les troiscomposantes principales de l’écoulement (sous-bassins non-glaciaires, neige sur glacier etglacier) sont présentées et leur enveloppe donne le débit total. Dans le cas analysé, le bassinversant a été découpé en 5 bandes d’altitude non-glaciaires et 4 bandes glaciaires. Le débithivernal est presque nul car les températures sont inférieures à la température critique defonte de neige Tcr. Dès le mois de mai, la fonte des neiges se produit et le débit provient duréservoir-sol restituant l’eau de fonte des bandes non-glaciaires et du réservoir linéaire deneige sur glacier. A partir de la mi-juin, le stock de neige sur certaines bandes glaciaires estnul et la fonte des glaciers commence, fournissant tout l’été la part prépondérante du débit,alors qu’un débit de base estival est également produit par les bandes non-glaciaires. Enautomne, la fonte glaciaire diminue et la crue d’octobre est essentiellement produite par lesréservoirs-sol des bandes non-glaciaires. Le cycle hydrologique annuel se termine et l’hiverpermet à nouveau la constitution des stocks de neige.

4.4 Fonctionnement opérationnel du modèle hydrologique ethydraulique

La modélisation hydrologique semi-distribuée permet la simulation des écoulements sur desbassins versants complexes grâce à la flexibilité de ce concept. Cependant, l’organisation desflux de données représente un défi de pour le développeur, dont la difficulté augmente avecle nombre de régions non homogènes à simuler. Ce sous-chapitre présente l’architecture etl’outil informatiques utilisés pour la modélisation hydrologique et hydraulique.

4.4.1 Logiciel Routing System II

Les grands concepts de Routing System II sont présentés dans cette section, dont l’ambitionest d’initier le lecteur aux outils utilisés dans ce travail de recherche. Tous les fluxd’information relatifs à la modélisation hydrologique et hydraulique sont gérés par cet outil,

72

Fig. 4.7: Comportement annuel d’un bassin versant à forte proportion glaciaire : exemple d’Aletschdu 1.10.1999 au 1.12.2000.

73

même si les concepts peuvent se généraliser et fonctionner sous n’importe quel environnementde programmation orienté objets.

RS2 a été développé pour PC dans l’environnement informatiqueMicrosoft VB.NET, qui estune plate-forme gratuite permettant la programmation orientée objets (OOP) et favorisantl’interaction entre de nombreux logiciels de la marque et Internet. RS2 est un outil demodélisation hydrologique et hydraulique fonctionnelle, où chaque processus est représentésous forme de fonction, dont les principales sont mentionnées ci-dessous :

– recherche des variables météorologiques d’entrée– spatialisation des variables météorologiques– transformation pluie-débit (fonte de neige, fonte de glace, infiltration, ruissellement de

surface)– transfert de débit dans les cours d’eau– addition de débits (jonction)– séparation de débits (dérivation)– stockage de débit (réservoir)– soutirage de débit (turbine, pompe)– évacuation de débit (relation niveau-débit)– régulation de systèmes

L’algorithme de résolution employé est un schéma d’Euler de premier ordre progressif(équ. 4.53). Ce schéma simple permet la résolution explicite des équations du modèle maisnécessite le choix d’un pas de temps suffisamment court pour respecter la condition decourant. Dans le cadre de ce projet, un pas de temps de 10 minutes a été employé etgarantit le respect de la condition de courant pour les tronçons de cours d’eau considérés.Ce schéma ne permet pas le calcul d’écoulements en charge ou des systèmes hydrauliquesmaillés. De plus, et comme son nom l’indique, ce modèle a été développé pour calculer lagénération et le transfert des débits à travers un bassin versant. Il n’est donc pas capable deréaliser de calculs hydrauliques comme par exemple le calcul de lignes d’eau ou de transportsolide.

xt+1 = xt + dt · x′t (4.53)

RS2 organise le flux des données selon le schéma présenté à la figure 4.8. Les variablesmétéorologiques d’entrée sont conservées dans une base de données Microsoft ACCESS(BD) selon une structure à 4 tables. La table Stations contient les noms des points demesure et leurs coordonnées x,y et z (stations de mesure météorologiques ou points decalcul des modèles météorologiques). La table Capteurs contient les variables mesurées parchaque station et l’unité associée, la table Datagroup est un résidu et contient les méta-informations de chaque capteur. Finalement, la table Valeurs contient la série temporelledes dates et valeurs associées de chaque datagroup.

Après mémorisation de la BD en mémoire vive, RS2 ne peut effectuer une simulation quesi les paramètres de calcul sont configurés correctement. Comme la BD contient des sériesde dates, RS2 débute le calcul à partir d’une date de départ et se termine à une dated’arrivée, selon une incrémentation de calcul et d’archivage. Dès cet instant, l’objet Stationvirtuelle effectue la spatialisation des variables météorologiques pour s’attribuer des variablesd’entrées propres selon ses coordonnées et celles des stations considérées dans la BD. Lastation virtuelle fournit des séries P , T , ETP aux modèles hydrologiques aval, qui réalisentla transformation pluie-débit. Dans l’exemple présenté sont modélisés une bande d’altitude

74

non-glaciaire et une bande glaciaire. Les différentes contributions sont additionnées parl’objet jonction pour finalement fournir le débit total Qtot à l’exutoire du bassin versant,dont un résultat est également présenté. Une fois le calcul terminé, toutes les variables decalcul sont disponibles.

Ce concept de modélisation permet donc d’assembler aisément les différents objets hydro-logiques et hydrauliques et de représenter n’importe quel bassin versant, aussi complexesoit-il, pour autant qu’un calcul bouclé ne soit pas nécessaire.

4.5 Spatialisation des variables météorologiques

La spatialisation des variables météorologiques a fait l’objet d’études appliquées au projetMINERVE et porte principalement sur deux types de problèmes. Le premier problème estl’utilisation des variables météorologiques disponibles à différentes stations de mesure situéessur une surface de calcul pour alimenter le modèle hydrologique. Ce point a été étudiéen particulier par Faivre (2004), qui a analysé différentes méthodes de spatialisation desmesures ponctuelles de précipitation et température sur le bassin versant du Rhône à l’amontdu Léman. Le deuxième problème réside dans l’exploitation des variables météorologiquesfournies par un modèle numérique en de nombreux points de calcul répartis dans un volumede calcul. Ce travail a également fait l’objet d’une étude approfondie (Hernandez, 2006) eta permis d’identifier les méthodes de spatialisation des variables météorologiques du modèleaLMo (Kaufmann et al., 2003) les plus adaptées. Les méthodes choisies pour la suite duprojet seront donc présentées dans cette section.

4.5.1 Spatialisation des mesures

La méthode décrite ici permet de répondre approximativement à une question difficile :« Quelle sont les précipitations et les températures effectives en un instant et un lieudonnés, si ces dernières ont été mesurées au même instant en des lieux différents situésà des kilomètres ? » La réponse est d’autant plus délicate que la distance entre les mesureset les points de calcul est grande, que les événements météorologiques sont de type convectifou orographique, ou que le relief est important.

Faivre (2004) a proposé comme meilleure méthode les polygones de Thiessen, qui attribuentdes poids relatifs aux stations entourant le point de calcul en fonction de leurs surfacesd’influence polygonales sur le bassin versant. Cette méthode, basée sur une analyse bi-dimensionnelle, ne tient pas compte des effets orographiques qui peuvent être importants,comme par exemple les effets de barrage et les phénomènes convectifs alpins estivaux. Elles’est étonnamment révélée plus efficace sur le bassin versant du Rhône que des méthodesavec prise en compte du relief. Toutefois, les polygones de Thiessen ne peuvent pas êtreappliqués de manière flexible dans un outil tel que RS2, car la géométrie exacte desbassins versants devrait être introduite en plus des coordonnées des stations virtuelles.Il convient de se souvenir qu’en général, le gradient altimétrique des précipitations est unphénomène bien réel. En effet, l’intensité moyenne annuelle des précipitations augmenteavec l’altitude (Gurtz et al., 1999). Toutefois, les analyses effectuées sur le bassin versantdu Rhône supérieur n’ont pas permis de mettre en évidence ce gradient, essentiellement enraison de sa grande variabilité lors de chaque épisode pluvieux.

75

Fig. 4.8: Architecture simplifiée du logiciel Routing System II et exemple de modélisation d’unbassin versant avec 1 bande d’altitude non-glaciaire et une bande glaciaire.

76

La méthode finalement choisie pour la spatialisation des précipitations et des températuresest la méthode de Shepard (Shepard, 1968). L’évaluation d’une variable Xs, à partir de nstations situés dans les lieux i = 1, 2, . . . , n, peut être obtenue selon le carré de la distanceeuclidienne di,s entre la station i et le point de calcul s, typiquement le centre de gravitéd’un bassin versant (4.54 et 4.55) :

di,s =√

(xi − xs)2 + (yi − ys)2 (4.54)

Xs =

n∑

i=1

Xi1

d 2i,s

n∑

i=1

1d 2

i,s

(4.55)

Cette méthode a été étendue pour tenir compte de l’évolution de certaines variablesmétéorologiques en fonction de l’altitude. Ainsi, les variables Xi situées à l’altitude zi

peuvent être remplacées par leurs équivalents X∗i au niveau de la mer z0 = 0 m s.m.

selon une relation linéaire avec un gradient altimétrique constant dXsdz associé au point de

calcul s (4.56) :

X∗i = Xi − dXs

dz(zi − z0) (4.56)

Le résultat de la méthode de Shepard au niveau de la mer fournit l’équivalent X∗s de la

variable Xs qui doit être remonté à l’altitude zs du point de calcul en fonction du gradientaltimétrique (4.57) :

Xs = X∗s +

dXs

dz(zs − z0) (4.57)

Les n stations pour effectuer l’interpolation spatiale en s sont choisies si elles respectent lacondition (4.58). n est donc variable pour chaque couple (s, rs).

di,s ≤ rs (4.58)

La figure 4.9 illustre la densité relative des stations de mesure des températures et desprécipitations ainsi que les centres de gravité des sous-bassins versants. Dans l’exempleprésenté, le bassin versant du Rhône à l’amont du Léman a une surface de 5521 km2 etse compose de 239 sous-bassins versants d’une surface moyenne de 23 km2. Les variablesmétéorologiques doivent être interpolées à partir des 82 stations de mesure en servicereprésentant une surface couverte moyenne de 67 km2 par station.

4.5.2 Spatialisation des prévisions des précipitations

La méthode de spatialisation des prévisions des précipitations est similaire à la méthode deShepard avec gradient constant car les variables calculées par le modèle aLMo sont fourniesau sol. Il s’agit donc à nouveau d’un problème de répartition bi-dimensionnelle des variables.Dans ce projet, les points de grille du modèle météorologiques ont été assimilés à des stations

77

Fig. 4.9: Répartition spatiale des stations météorologiques et des centres de gravité (CdG) des sous-bassins versants, exemple du bassin versant du Rhône à l’amont du Léman, coordonnées nationalessuisses.

de mesure et les équations 4.54 à 4.57 ont été utilisées avec un gradient altimétrique desprécipitations nul. Cette hypothèse est raisonnable car c’est bien le modèle aLMo lui-mêmequi calcule les effets orographiques, et pas le modèle hydrologique. Il aurait également étépossible de considérer les effets de l’orientation des sous-bassins versants sur l’intensité desprécipitations, mais cela sortait du cadre de cette recherche.

La différence provient du choix des n stations de mesure déterminé non pas en fonction d’unrayon de recherche mais fixé à la suite d’une analyse de performance. Dans le cas étudié ici,le nombre optimal de stations de mesure est n = 6 où les stations i = 1, 2, . . . , 6 sont lesplus proches de s selon l’équation 4.54.

4.5.3 Spatialisation des prévisions des températures

La méthode de spatialisation des prévisions des températures doit fournir des valeurs ausol à partir de multiples valeurs dans l’atmosphère fortement conditionnées par un gradientaltimétrique variable, et diffère donc de la méthode présentée au-dessus. Les données detempérature du modèle aLMo, selon une maille régulière de 49 km2, sont fournies tous les500m environ. Il s’agit des variables suivantes :

– température de l’air à 2m du sol T2m

– température de l’air à 30m du sol T30m

– température de l’air à 1000m s.m. T1000

– température de l’air à 2000m s.m. T2000

– température de l’air à 3000m s.m. T3000

– température de l’air à 4000m s.m. T4000

78

– température de l’air à 5000m s.m. T5000

– température de l’air au niveau 850 hPa T850

– température de l’air au niveau 700 hPa T700

– température de l’air au niveau 500 hPa T500

Les altitudes relatives sont calculées à partir d’un modèle numérique de terrain (MNT)propre au modèle aLMo, et seules les variables dont l’altitude est supérieure au niveau duMNT sont considérées. Ce MNT est un modèle relativement grossier (maille de 7 km) pourdes raisons propres à la numérique du modèle aLMo. Il peut donc y avoir d’importantesdifférences entre l’altitude d’un point du MNT aLMo et celle d’une bande d’altitude dumodèle hydrologique et cet aspect est considéré dans l’algorithme de spatialisation décritici. Enfin, les données de température sont complétées par l’indication, pour chaque point,de l’altitude du niveau de pression :

– altitude du niveau de pression 850 hPa z850

– altitude du niveau de pression 700 hPa z700

– altitude du niveau de pression 500 hPa z500

De nombreuses méthodes ont été testées et finalement l’algorithme retenu combine deuxméthodes en fonction de la couverture neigeuse calculée par le modèle météorologique aLMo.Le pseudocode est le suivant :

1. Choix des 4 points i les plus proches de la station virtuelle s

2. pour chaque point i, déterminer sa température équivalente à l’altitude de la stationvirtuelle Ts,i :– si HN,i ≤ HN,max (si la couverture neigeuse au point i est inférieure à un seuil, ici

0.05m) : extrapoler à partir de la température à 2m T2m,i (équ. 4.59) :

Ts,i = T2m,i − dTs

dz(z2m,i − zs) (4.59)

avec un gradient dTsdz fixé à −0.0065 ◦C/m

– si HN,i > HN,max (si la couverture neigeuse au point i est supérieure à la hauteurseuil) : l’algorithme d’interpolation utilise n valeurs de température au point i etévalue le gradient altimétrique moyen dTi

dz par approximation linéaire des pointssitués au moins 100m au-dessus du MNT du modèle aLMo. La températureéquivalente à l’altitude de la station virtuelle Ts,i se calcule en extrapolant la droitede régression jusqu’à l’altidude zs.

3. une fois les 4 températures Ts,i calculées, trouver la température à la station virtuelleTs par la méthode de Shepard étendue (4.60) :

Ts =

n∑

i=1

Ts,i · 1d2

i,s · dz2i,s

n∑

i=1

1d2

i,s · dz2i,s

(4.60)

avec :

dzi,s = zi − zs (4.61)

Cette méthode permet de fournir des prévisions de température en toute station virtuelledu modèle hydrologique en exploitant le maximum d’information disponible du modèle

79

météorologique aLMo. Les vérifications effectuées par Hernandez ont montré qu’aucun biaisn’était à craindre suite aux procédures de spatialisation. La figure 4.10 présente la densitérelative en plan des points de calcul du modèle météorologique aLMo et des centres degravité des sous-bassins versants du Rhône à l’amont du Léman. Il y a 513 points aLMocouvrant, selon une maille régulière de 49 km2, une surface totale de 25’100 km2.

Fig. 4.10: Répartition spatiale des points de calcul du modèle météorologique aLMo et des centresde gravité des sous-bassins versants, exemple du bassin versant du Rhône à l’amont du Léman,coordonnées nationales suisses.

Pour conclure cette section, remarquons que le bassin versant du Rhône à l’amont duLéman est une région morphologiquement complexe, ce qui n’incite pas à l’optimismepour la performance des méthodes de spatialisation décrites. Cependant, les exemplesprésentés montrent que la densité des stations de mesure est forte et que toutes les régionssont relativement bien couvertes, ce qui diminue l’incertitude liée à cette opération. Lesprincipales difficultés proviendront certainement de l’orographie et des fortes variations desgradients de température consécutives, comme de la non prise en compte de l’exposition dessous-bassins versants, en particulier pour le calcul de la fonte de neige.

4.6 Calage et validation du modèle hydrologique

Le modèle hydrologique est une représentation de la réalité qui peut se révéler plus oumoins satisfaisante selon les processus à décrire et les technologies choisies. Même si parfoisla modélisation semble parfaitement appropriée, des réglages sont toujours nécessaires pouradapter le comportement du modèle aux observations faites sur le terrain. Ces réglages sontréalisés en pratique par la procédure de calage du modèle hydrologique, qui permettent dedéterminer le paramétrage optimal pour une structure du modèle choisie. Ce paramétrageest ensuite testé lors de la procédure de validation et, s’il fournit des résultats suffisamment

80

robustes, est finalement adopté. Le calage est alors un nouveau problème d’optimisationd’autant plus complexe que le nombre de paramètres à fixer est important. Pour réalisercette opération, il est nécessaire de :

1. déterminer les paramètres qui sont à caler2. choisir les critères d’évaluation de la performance d’un jeu de paramètres3. trouver une procédure qui permette de rapidement converger vers un jeu de paramètres

optimal4. sélectionner les données de commande (variables météorologiques) et de contrôle

(mesures de débit) du calage, tout en conservant une partie d’entre elles pour lavalidation

Ces étapes importantes font l’objet de cette section et leur application au modèle hydrolo-gique GSM-SOCONT est présentée.

4.6.1 Paramètres de calage de GSM-SOCONT

Le modèle hydrologique GSM-SOCONT se compose de 4 modèles différents pour 7 ré-servoirs. La liste exhaustive des paramètres de calage potentiels est présentée au tableau4.1

Tab. 4.1: Liste des paramètres potentiels de calage du modèle hydrologique.

modèle paramètre unité descriptionNeige AN m/ C/s facteur degré-jour de la neige

θcr - teneur en eau critique de la neigeKf - constante de vidange du réservoir d’eau dans la neigeTcp1 C température inférieure de séparation pluie-neigeTcp2 C température supérieure de séparation pluie-neigeTcr C température critique de fusion de la neigebp s/m facteur d’augmentation de fonte lors des pluies

RN KN 1/s constante de vidange du réservoir linéaire de neigeRGL KGL 1/s constante de vidange du réservoir linéaire de glaceGlace AGL m/ C/s facteur degré-jour de la glaceGR3 hmax m capacité de rétention du réservoir GR3

k 1/s constante de vidange du réservoir-solSWMM Ks m1/3/s coefficient de Strickler

Le tableau 4.2 présente la liste des autres paramètres à fournir au modèle hydrologiquequi ne font pas l’objet d’un calage mais qui doivent être mesurés ou obtenus à partird’une analyse sur système d’information géographique (GIS). Il est évident qu’une analyseexhaustive des jeux de paramètres serait impossible, ne serait-ce que pour 1 sous-bassinversant, car une bande glaciaire contient 10 paramètres de calage et une bande non-glaciaireen contient également 10. Il est d’autant plus difficile de tester toutes les combinaisons pourune multitude de bandes d’altitude. Des analyses ont été effectuées afin de choisir des valeursconstantes pour certains paramètres et ainsi réduire la taille du jeu de paramètres à caler(Hamdi et al., 2003). Sur cette base, 6 paramètres issus du modèle de fonte de neige ontété fixés et les valeurs choisies sont présentées au paragraphe 4.3. Il reste donc pour chaquebande d’altitude glaciaire et non-glaciaire un jeu de 4 paramètres à caler. Il convient enfinde déterminer l’intervalle de valeurs admissible pour chaque paramètre afin de limiter lenombre de combinaisons possibles et de conserver un paramétrage conforme aux concepts

81

du modèle hydrologique. Toutefois, ce travail n’a pas eu sa raison d’être car la procédure decalage présentée au paragraphe 4.6.3 permet d’éviter l’obtention de valeurs trop extrêmesou irréalistes.

Tab. 4.2: Liste des paramètres géométriques ne nécessitant pas de calage

modèle paramètre unité descriptionGlace SGL m2 surface de la bande glaciaireGR3 S m2 surface de la bande non-glaciaireSWMM B m largeur moyenne du plan incliné

J0 - pente moyenne du plan incliné

Tab. 4.3: Paramètres du modèle de neige exclus du jeu de paramètres de calage

paramètre unité Valeurθcr - 0.1Kf - 1Tcp1 C 0Tcp2 C 2Tcr C 0bp s/m 1.08 · 106

4.6.2 Critères d’évaluation du modèle hydrologique

L’évaluation de la performance d’un modèle peut être effectuée de multiples manières.La formule la plus couramment utilisée est l’erreur carrée moyenne (RMSE) calculée àpartir de la régression linéaire de la relation entre valeurs observées et valeurs simulées. Enhydrologie cependant, le critère de Nash permet de représenter l’adéquation d’un modèlepar une formule simple et répandue (Nash and Sutcliffe, 1970; McCuen et al., 2006). Cecritère permet de pondérer plus fortement les pointes de débit lors de l’évaluation et lerend particulièrement adapté pour analyser la performance de modèles dédiés aux crues(équ. 4.62). Il est également bien indiqué pour l’estimation de la performance de modèlesde simulation continue tels que celui présenté dans ce travail.

Nash = 1−

n∑

t=1

(Qobs(t)−Qsim(t)

)2

n∑

t=1

(Qobs(t)−Qobs

)2(4.62)

Qobs(t) et Qsim(t) sont les débits observé, respectivement simulé au temps t ; Qobs est le débitobservé moyen sur la période d’évaluation. Une valeur de Nash = 1 signifie que le modèle estparfait, une valeur de Nash = 0 signifie que le débit moyen serait un indicateur équivalentau modèle et une valeur inférieure sanctionne un modèle plus mauvais encore.

L’autre critère d’évaluation utilisé est le rapport des volumes permettant d’évaluer si lemodèle présente un biais volumétrique sur une période donnée (équ. 4.63) :

82

V ol =

n∑

t=1

Qsim(t) · dt

n∑

t=1

Qobs(t) · dt

=Vsim

Vobs(4.63)

Vsim et Vobs sont les volumes simulé et observé durant la période d’évaluation. A nouveau,un critère V ol = 1 signifie que le modèle n’est pas biaisé en volume, tandis qu’une valeurV ol > 1 sanctionne un modèle produisant trop d’eau et V ol < 1 pas assez d’eau. S’il estvrai qu’en général, le modèle devra être capable de produire un bilan parfaitement équilibré,cela ne constitue ici pas l’objectif prioritaire, car les périodes choisies ne permettent pas devalider le bilan avec certitude.

4.6.3 Procédure de calage du modèle hydrologique

Pour être certain de posséder le meilleur jeu de paramètres de calage au sens mathématiquedu terme, il faudrait énumérer l’ensemble des possibilités ou utiliser une autre procédured’optimisation, et ainsi déterminer le paramétrage optimal. Cela n’est pas possible dans lecas du modèle semi-distribué GSM-SOCONT développé pour le projet MINERVE, car lenombre de paramètres à caler est de 7350. Le calage doit donc être opéré différemment demanière à minimiser l’effort numérique et garantir la cohérence du paramétrage.

Un réseau hydrographique naturel est en général de type arborescent et non maillé. Il arrivecependant que des réseaux maillés existent, par exemple dans les milieux karstiques, lorsqueles écoulements souterrains sont importants et leurs cheminements différents de l’écoulementgravitaire de surface. Les aménagements hydrauliques peuvent également produire desécoulements maillés, mais leur relation à l’écoulement peut être déterminée autrement etpermettre un calage comparable à celui d’un modèle arborescent. Dans ce cas, lorsqueplusieurs stations de mesure de débit sont disponibles, le calage peut s’effectuer de l’amontvers l’aval en plusieurs étapes.

Soit un réseau hydrographique arborescent d’ordre 3 selon la classification d’Horton,composé de 4 affluents d’ordre 1 jaugés, 2 affluents d’ordre 2 dont 1 jaugé et le cours d’eauprincipal également jaugé sur le tronçon d’ordre 3 (figure 4.11). Les stations de mesure sontnommées a1, b1, c2 et a3, et les bassins versants selon la même logique. Le calage s’effectuedans ce cas dans l’ordre suivant :

1. caler les bassins versants a1, b1 et c2 séparément2. introduire les mesures en a1, b1 et c2 pour caler la portion intermédiaire du sous-

bassin versant a33. évaluer la performance globale du modèle en a3 en n’introduisant aucune mesure dans

le modèle.

Si des mesures de turbinage des aménagements hydroélectriques sont disponibles, celles-cipeuvent être intégrées directement au modèle hydrologique. Il n’est donc pas nécessaire decréer une nouvelle série de mesures dont les rejets des aménagements seraient exclus pourcaler le modèle. Si aucune mesure de turbinage n’est disponible, il peut être nécessairede créer une série de rejets fictive construite à partir d’autres indicateurs, tels le cycle deremplissage de la retenue ou la production journalière. Ce sujet fait d’ailleurs l’objet d’unparagraphe complet dans le chapitre 5.

83

Fig. 4.11: Exemple de bassin versant d’ordre 3 selon Horton.

La procédure de calage du modèle hydrologique s’appuie sur la particularité du modèle GSM-SOCONT dont les processus d’écoulement ne se produisent pas souvent simultanément.Les paramètres de fonte de neige peuvent être isolés au printemps et ceux de glace dejuillet à septembre. La réponse du réservoir-sol GR3 du printemps à l’automne agit enparallèle à la fonte glaciaire mais sans produire de cycle journalier et peut donc être ajustée,tout comme sa constante de tarissement qui agit également en hiver avec l’écoulement debase. Enfin, les petites et moyennes crues permettent en dernier ressort d’ajuster le modèlede ruissellement SWMM. Ce type de procédure, cherchant plutôt à suivre les processushydrologiques séparément, permet en outre de garantir la cohérence du modèle hydrologique(Sivapalan et al., 2003).

La fonte de neige intervenant essentiellement au printemps, elle peut être calée par le biaisdu contrôle de deux éléments :

– la réactivité du modèle hydrologique au printemps– la durée de la période de fonte de neige printanière

Un paramètre AN trop faible ne produira pas de cycle journalier de fonte et prolongera lapériode de fonte, pourtant identifiable visuellement. Le coefficient de Nash réagit fortementà ce paramètre et permet de déterminer sa valeur optimale. Le premier paramètre est donccalé.

Le contrôle du bilan hydrique du bassin versant est un élément important de la procédurede calage. En effet, trois paramètres ont une influence directe sur ce dernier :

– le facteur degré-jour du modèle de fonte glaciaire AGL

– la capacité du réservoir-sol hmax

– la constante de tarissement du réservoir-sol k

Le degré-jour du modèle de fonte glaciaire introduit directement un volume dans le modèleindépendamment des précipitations. La période de production est cependant dépendante dustock de neige contrôlé par le degré-jour de la neige AN . L’ETR dépend, elle, de la capacité duréservoir-sol. Toutefois, ce processus produisant des pertes hydriques du modèle agit surtout

84

en été lorsque l’ETP est importante. Il est donc négligeable en hiver et peut être compenséen été par la fonte glaciaire. Il n’a finalement pas été considéré lors du calage présenté danscette section. La capacité du réservoir-sol et la constante de tarissement peuvent égalementinfluencer le bilan hydrique du modèle si elles sont mal ajustées, car elles pourraient conduireà un stockage d’eau inter-annuel du modèle ou au contraire à une vidange du stock initial.Ce phénomène peut être éliminé en effectuant des simulations multi-annuelles qui mettenten évidence les effets de stockage ou de vidange se produisant au début de la période.Toutefois, la période de calage de 15 mois utilisée dans cette recherche est trop courte pourpermettre la détection de ces effets indésirables. Dans ce cas, un contrôle visuel du stockdans le réservoir-sol est nécessaire : le cycle annuel de saturation du réservoir-sol ne doitpas présenter de tendance marquée. Ainsi, pour des valeurs des paramètres du réservoir-solne produisant pas de stockage ou vidange marquées et sans considération de l’ETR, seul ledegré-jour du modèle de fonte glaciaire contrôle le bilan. Il peut donc être calé de manièreunivoque.

Les deux autres paramètres du modèle de fonte glaciaire sont les constantes de vidange desréservoir linéaires de neige et de glace. Ils n’agissent pas sur le bilan hydrique mais sur laréponse horaire du modèle hydrologique. Si leurs valeurs sont trop élevées, ils ont un effetamortisseur et ne produisent aucun cycle journalier. Dans le cas contraire, ils produisentune réponse nerveuse mais risquant d’accentuer les incertitudes liées à la température. Enpratique, les meilleurs coefficients de Nash sont réalisés avec un paramétrage mou du modèlede fonte glaciaire, ne produisant aucun cycle de fonte. Ce critère doit alors être négligé et lechoix des meilleures valeurs doit être effectuée par l’appréciation visuelle du comportementdu modèle. Cette approche a d’ailleurs également été choisie en phase de développement dumodèle hydrologique (Hingray et al., 2006).

Les paramètres du réservoir-sol GR3 ont une influence directe sur la réaction du modèlesuite aux précipitations, et par conséquent sur le coefficient de Nash. Ils ne sont pourtant pasindépendants et doivent être ajustés de manière couplée en surveillant d’une part la valeurdu coefficient de Nash et d’autre part la capacité du modèle à produire des crues.

Enfin, la violence de la réponse du modèle lors des crues est directement influencée par lecoefficient de Strickler Ks du modèle SWMM. Une valeur faible de ce paramètre amortira lespointes de crue tandis qu’une valeur trop élevée provoquera des débits de pointe irréalisteslors de petites et moyennes crues.

La procédure de calage de chaque sous-bassin versant peut donc être synthétisée commesuit :

1. implémentation des séries de turbinage des aménagements hydroélectriques si néces-saire

2. initialisation des paramètres du modèle hydrologique à des valeurs moyennes3. calage du degré-jour de la neige AN

4. calage du paramètre de fonte glaciaire AGL

5. calage des constantes de vidange des réservoirs linéaire de neige sur glace KN et deglace KGL

6. calage des paramètres du réservoir-sol GR3 k et hmax

7. calage du coefficient de Strickler Ks du modèle SWMM

Il est nécessaire de rappeler que les valeurs optimales des paramètres du modèle hydrologiquedépendent de la quantité et de la qualité des données d’entrée. Le paramétrage pourra en effet

85

être modifié pour compenser les processus locaux, mais sera alors plus éloigné des processusphysiques que le modèle cherche à reproduire. Ainsi, une modification de la méthode despatialisation des mesures météorologiques, l’ajout ou la suppression de stations de mesuredes précipitations ou des températures peuvent remettre en cause le choix des meilleuresvaleurs des paramètres, et une procédure de validation robuste doit permettre de s’assurerde la stabilité du paramétrage.

En autre phénomène doit encore être considéré dans le cadre du modèle hydrologique GSM-SOCONT : il s’agit du réchauffement systématique de l’atmosphère, qui pourrait induire lafonte des masses glaciaires. Or, le modèle de fonte de glace ne tient pas compte du bilande masse du glacier. Un glacier ayant diminué de manière importante pourrait donc ne pasproduire autant de fonte qu’en période de calage. Il est donc également nécessaire d’ajusterla surface glaciaire considérée lors d’une utilisation du modèle à long terme.

4.6.4 Choix des données de commande et de contrôle

L’utilisation d’un nombre maximum d’informations est souvent la meilleure solution pouroptimiser la performance d’un modèle hydrologique, en particulier lorsque plusieurs proces-sus sont modélisés et que le comportement régional du bassin versant varie fortement. Detrop grandes simplifications conduisent à d’importantes incertitudes, en particulier liées àla spatialisation des variables météorologiques. Il s’agit donc de sélectionner un maximumde données de commande, à savoir des stations de mesure des précipitations et des tem-pératures fournissant des données de qualité à la résolution minimale nécessaire. Dans lecadre du projet MINERVE, le pas horaire est utilisé : il s’agit d’un compromis satisfaisantentre précision et limitations techniques liées à la mémoire informatique nécessaire. Il estégalement important de disposer d’un nombre important de données de contrôle que sontles observations de débit. En effet, ces dernières permettent de réduire le nombre d’incon-nues et de limiter la sur-détermination des problèmes lors du calage. Comme expliqué auparagraphe précédant, plus le nombre de mesures de débit des sous-bassins versants de têteest important, plus le calage du modèle hydrologique est fiable dans ces régions. Il est alorspossible de repérer les zones les plus incertaines de manière précise.

La figure 4.12 illustre le réseau de mesure des précipitations et des températures utilisé sur labassin versant du Rhône à l’amont du Léman. 48 stations de mesure des précipitations et 11stations de mesure des températures ont été utilisées pour le calage du modèle hydrologique.Les stations proviennent des réseaux ANETZ (MétéoSuisse, 10 min., précipitations, tem-pératures et autres variables, connexion en temps réel), IMIS (réseau intercantonal, 10min,précipitations, températures et hauteurs de neige, connexion en temps réel), MétéoSuisseprécipitations (MétéoSuisse, 24h, précipitations, connexion irrégulière). Les stations du ré-seau MétéoSuisse précipitations ne disposaient pas de mesures horaires, mais journalières.Un travail de reconstitution de séries horaires à partir des séries journalières disponibles etdes mesures ANETZ a donc été effectué (Hingray et al., 2006). Le faible nombre de sta-tions de mesure des températures est également un problème majeur de la procédure decalage, car la spatialisation de ces variables devient plus incertaine. Cette situation n’estpas idéale et la performance du modèle hydrologique lors du calage en sera certainementaffectée, en particulier dans les régions éloignées des stations et où la fonte glaciaire estimportante.

Les données de contrôle disponibles sont nombreuses : 103 stations de mesure de débitont pu être exploitées. Ces stations appartiennent soit au réseau SHGN (OFEV, 10min,

86

Fig. 4.12: Carte du bassin versant avec sa discrétisation, les stations de mesure météorologiques etles principaux réservoirs.

débit, connexion en temps réel), soit à des réseaux privés appartenant aux exploitants desaménagements hydroélectriques. Ces dernières stations effectuent des mesures de débit auxcaptages en rivière ou permettent d’estimer le débit entrant dans les retenues sur la basedes mesures de niveau des retenues. A partir de ces données, le calage a été directementréalisé sur 51 sous-bassins versants différents. Parmi ceux-ci, 13 étaient perturbés par lesrejets des turbines et sont situés le long du Rhône ou de ses principaux affluents, 33 étaientnon perturbés (sous-bassins versants de tête) et 5 étaient non perturbés mais peu fiables cardéduits à partir des mesures de niveau des retenues.

Pour des raisons techniques liées aux bases de données, le calage n’a pu être effectué sur despériodes multi-annuelles. Une année caractéristique a donc été sélectionnée pour le calage ettrois autres pour la validation. Les simulations ont donc été réalisées sur les périodes décritesau tableau 4.4. Ces périodes débutent en octobre pour permettre au stock de neige de seconstituer pendant l’hiver et ainsi produire un débit de fonte correct au printemps. Ce choixest judicieux, car la fonte de neige est un processus qui n’évolue pas sur plusieurs années etdont les conditions initiales sont évidemment connues en automne, lorsqu’il n’y a pas encorede neige. Il est toutefois nécessaire d’adapter les conditions initiales des réservoirs-sol et desréservoirs linéaires de neige sur glace et de glace pour ne pas pénaliser la performance dumodèle. Selon l’avis de l’auteur, et u vu de la faible sensibilité du modèle aux différentsparamètres, un nouveau calage effectué sur une période multi-annuelle ne conduirait pas àd’importants changements du paramétrage. Le choix des périodes, pouvant parfois porter àconséquences sur la qualité du paramétrage, est ici relativement peu influent.

87

Fig. 4.13: Carte du bassin versant avec les points de calage perturbés, non perturbés et leurssous-bassins versants associés.

Tab. 4.4: Périodes choisies pour le calage et la validation du modèle hydrologique.

date début date fin procédure01.10.1999 31.12.2000 calage01.10.1986 31.12.1987 validation01.10.1992 31.12.1993 validation01.10.1993 31.12.1994 validation

88

4.7 Procédure de mise à jour du modèle hydrologique

La simulation continue permet la modélisation de processus différents sur de longues périodessans nécessité de modifier les paramètres du modèle. Bien que gourmande en données, cetteméthode fournit des résultats nombreux et de manière confortable, puisque les différentsprocessus ou cycles hydrologiques peuvent être repérés aisément de manière visuelle. Lasimulation continue présente toutefois quelques risques qu’il convient de minimiser.

Le premier risque est la dérive du modèle hydrologique par rapport à la réalité. Il s’agitalors d’une tendance du modèle à s’éloigner en moyenne de plus en plus de l’observation.Ce problème peut survenir si le calage n’a pas été effectué sur une période couvrant tous lescycles hydrologiques connus. Le modèle peut ainsi stocker continuellement de l’eau ou aucontraire vider lentement tous ses stocks, ce qui a pour effet de compenser les éventuelleserreurs sur le bilan hydrique annuel. Une procédure de calage et de validation appropriéeainsi qu’un contrôle du comportement multi-annuel des stocks des réservoirs-sol permetcependant de supprimer ce risque.

Le deuxième risque apparaît lors de l’utilisation d’un modèle de simulation continue pourl’évaluation d’une courte période. Il s’agit pourtant de l’utilisation typique des modèles deprévision de débit, où les stocks des réservoirs-sol sont estimés par la simulation continue etservent de conditions initiales pour une simulation en prévision ou événementielle. Dans cecas, il est pratiquement impossible de détecter ou de prévoir avec précision l’incertitude dela prévision hydrologique, car le niveau des stocks est supposé bien représenté par le modèle,alors que le niveau de saturation réel n’est pas connu. Une solution consiste alors à comparerla simulation et l’observation sur une période précédant la période de prévision ou d’analyseafin de déterminer la provenance de l’erreur. Une correction appropriée des données d’entrée,du paramétrage ou des variables d’état permet alors au modèle de se rapprocher de l’observésur la période de contrôle (procédure de filtrage, LCH (2006)). Il suffit d’espérer ensuite quecette correction soit également appropriée pour la période de prévision puisque que lesrésultats du modèle seront extrapolés sur la base du modèle nouvellement corrigé.

4.7.1 Provenance des incertitudes et stratégies de correction

Dans un modèle hydrologique conceptuel tel que celui décrit dans ce travail, les incertitudessont propagées et accentuées à de multiples niveaux de la chaîne d’information. Leursprincipales sources sont listées ci-dessous selon le groupe auquel elles appartiennent. Il estsupposé ici que le modèle est construit correctement et qu’aucune erreur de construction dumodèle n’est à déplorer.

Erreurs liées à la donnée d’entrée– erreur de mesure d’une variable de commande– erreur de spatialisation d’une variable de commande– non-mesure ou mauvaise estimation d’une variable de commandeErreurs liées à la modélisation– concept de modélisation inadapté– processus hydrologique manquant, non modélisé, négligé ou non repéré– degré de simplification trop important (sous-détermination)– degré de complexité trop important (sur-détermination)– incertitude liée au paramétrage du modèleErreurs liées à la simulation continue

89

– erreur dans les conditions initiales (impact temporaire)– mauvaise estimation de l’état du modèle (variables d’état)Erreur liée à la variable de contrôle– erreur de mesure d’une variable de contrôle– mauvaise estimation de la part du débit due à l’intervention humaine (turbinage, vidange,

purge) ou à un événement exceptionnel (rupture de digue, embâcle, débâcle)La multiplicité des sources d’incertitude rend l’estimation et la réduction de ces erreursdélicate. Il conviendrait, en effet, de limiter l’ampleur de chaque source d’incertitude, maiscela demanderait une quantité énorme d’informations, non disponibles ou non gérables.Différents remèdes existent pour réduire l’incertitude, qui ont un coût, une performanceou des contingences fort différentes. Voici quelques exemples d’améliorations toujourssouhaitables avec leurs particularités, par ordre décroissant d’efficacité supposée :

– augmentation de la densité du réseau de mesure des variables de commande (diminue leserreurs de spatialisation et d’estimation de ces variables)

– augmentation de la densité du réseau de mesure des variables de contrôle (diminueles erreurs de modélisation, permet le développement de concepts de modélisation plusperformants)

– filtrage du modèle hydrologique (ajustement temporaire du modèle sur l’observation,diminue l’erreur d’estimation de l’état du modèle ou des conditions initiales)

– amélioration du calage du modèle (amélioration du paramétrage)– augmentation de la précision des mesures des variables de commande et de contrôle

(réduction de l’erreur liée aux mesures)

Les stratégies les plus efficaces pour réduire l’incertitude sont bien entendu les plus difficilesà réaliser en raison des coûts et des délais d’installation. Si l’amélioration du calage neva pas beaucoup améliorer la situation (le calage initial pouvant être supposé satisfaisantsi le développeur a correctement effectué son travail), le filtrage du modèle est par contreune stratégie intéressante et souvent mise en oeuvre pour compenser temporairement lesincertitudes du modèle hydrologique. Trois niveaux peuvent être filtrés, mais pas en mêmetemps, afin d’éviter des problèmes de compensation des corrections :

– filtrage des variables de commande– filtrage des variables d’état– adaptation du paramétrage

Dans le cadre de ce travail, le filtrage des variables d’état du modèle hydrologique aété implémenté pour différentes raisons. Tout d’abord, la modification des variables decommande (champs des précipitations, des température et de l’ETP) est extrêmementcompliquée et difficilement contrôlable. Les valeurs des variables de commande ne pouvantpas être vérifiées, il est dangereux de les modifier subjectivement. De plus, l’impact d’unemodification de ces champs (dans le temps et/ou dans l’espace) est fortement non-linéaire etdifficilement prévisible. Ensuite, la modification du paramétrage pourrait fonctionner pourun modèle plutôt sous-déterminé, c’est-à-dire où des processus ne seraient clairement pasreprésentés et où le calage ne serait pas adapté à certaines périodes de l’année. Ce n’est pas lecas du modèle semi-distribué présenté ici, puisque les principaux processus sont considérés.Il serait même possible que la modification du paramétrage n’ait que très peu d’influence surles résultats à court terme (quelques heures) et une forte influence à long terme (plusieursjours). Le filtrage des variables d’état du modèle permet, quant à lui, d’agir simultanémentsur le front des variables de commande et sur celui des conditions initiales, puisqu’uneaugmentation du niveau d’un réservoir aura presque le même effet que l’augmentation dela précipitation supposée (opération à proscrire absolument) et permettra au modèle de

90

produire plus de volume à court terme, sans péjorer la situation à long terme en raison dutemps de réponse du modèle.

4.7.2 Algorithme de filtrage des variables d’état du modèle hydrologique

L’application de la procédure de mise à jour du modèle hydrologique, développée dans cetravail, est relativement similaire à la procédure de calage. En effet, il s’agit d’abord d’éviterque les incertitudes ne puissent se compenser aléatoirement. Il faut donc réaliser le filtragede l’amont vers l’aval. Le calcul de l’ajustement à un point de contrôle doit se faire sansinfluence de l’ajustement effectué en amont, si celui-ci est imparfait, en y injectant desmesures là où cela est possible et selon le schéma présenté à la figure 4.11. Les données decontrôle sont presque les mêmes que pour le calage, avec une restriction toutefois : seules lesmesures de débit disponibles en temps réel doivent être exploitée en mode opérationnel. Lebassin versant est donc à nouveau décomposé en différentes zones sur lesquelles le modèlehydrologique est mis à jour séparément.

Pour chaque zone considérée à l’amont d’un point de contrôle (mesure de débit en tempsréel), l’algorithme de filtrage des variables d’état est lancé. Ce dernier suit un principed’ajustement du volume produit par le modèle sur une période donnée. Il ne cherchedonc pas à obtenir le meilleur débit à une heure donnée mais plutôt à simuler un volumecorrespondant au volume mesuré sur une période de plusieurs heures. Cette méthode éviteainsi une importante erreur sur l’estimation de l’état du modèle malgré une productiond’un débit conforme à l’observation. En particulier, la tendance de l’hydrogramme est ainsicorrectement modélisée.

L’algorithme est itératif car l’influence d’une modification des niveaux dans les réservoirs-solest non-linéaire. Les principales hypothèses sur lesquelles est basée la méthode de filtragesont les suivantes :

1. le modèle est "bon" : le rapport entre les différentes composantes de débit à l’amontd’un point de contrôle peut être conservé. En pratique, cela signifie que tous lesniveaux des réservoirs des différents sous-bassins versants sont modifiés dans la mêmeproportion.

2. il n’y a pas de préférence dans le choix du processus hydrologique à corriger : lesniveaux des réservoirs linéaires de glace et de neige ainsi que des réservoirs GR3 etSWMM sont ajustés.

3. une période d’analyse des volumes minimale de 12 heures doit permettre de négligerl’effet du temps de transfert de l’onde de crue de l’amont vers l’aval de la zoneconsidérée. Cette durée permet également de réduire les incertitudes dues au turbinage.

4. le temps de transfert d’une zone à l’autre peut être négligé : si l’ajustement du volumed’une zone située à l’amont est bon, le débit simulé peut être directement introduitdans le modèle et non la mesure.

Le déroulement de l’algorithme de filtrage suit plusieurs étapes. En outre, plusieurs zonespeuvent être filtrées en parallèle, pour autant qu’elles n’aient pas d’influence les unes sur lesautres. Ainsi, les sous-bassins versants de tête peuvent être filtrés simultanément (zones deniveau 1), puis les sous-bassins intermédiaires (zones de niveau 2), et ainsi de suite jusqu’àl’exutoire du bassin versant. L’algorithme de filtrage est le suivant :

91

1. définition des conditions initiales (hini) du modèle hydrologique au début de la périodede filtrage

2. i = 1

3. pour chaque zone de niveau i :

a) extraction des mesures de débit des sous-bassins versants de zone i sur la périodede filtrage

b) n = 1

c) simulation sur la période de filtrage

d) comparaison entre volumes mesurés et observés et calcul des coefficients decorrection de niveau i

e) si tous les coefficients de correction de niveau i sont égaux à 1+ε, ou si n > nmax,aller à 4)

f) multiplication du niveau initial des réservoirs (RN, RGL, GR3, SWMM) de zonei par leur coefficient de correction de zone i correspondant

g) n = n + 1

h) retour à c)

4. i = i + 1

5. si i > imax, fin de l’algorithme et sauvegarde des nouvelles conditions initiales desréservoirs.

Il s’agit donc d’un algorithme à double boucle. La première boucle concerne les niveaux dezone et ne fait pas l’objet d’itération. La deuxième boucle est une itération sur le calculdu coefficient de correction avec pour critère de sortie la convergence de la solution ou lenombre d’itérations. Ce coefficient de correction CMAJ peut se calculer selon la formule4.64 :

CMAJ = 1 + η · Vobs − Vsim

Vsim(4.64)

η est un coefficient d’amortissement et évite à l’algorithme de filtrage de diverger, Vsim

et Vobs sont les volumes simulés sur la période de filtrage tels que définis par l’équation4.63.

Une fois le coefficient de correction calculé à l’itération n, la nouvelle condition initiale d’unréservoir pour l’itération n + 1 s’obtient facilement (équ. 4.65) :

hini,n+1 = CMAJ · hini,n (4.65)

Les 4 réservoirs sont corrigés simultanément afin de ne pas discriminer un processushydrologique au détriment d’un autre. La correction d’une partie seulement des réservoirsrésulterait d’une hypothèse sur la source de l’erreur, qui n’est pourtant pas vérifiable. Eneffet, le débit observé servant de mesure de contrôle ne permet pas de séparer les différentsprocessus de formation de l’écoulement. Il serait ainsi dangereux de prétendre qu’un déficiten eau du modèle lors d’une crue proviendrait plus de la fonte que du ruissellement desurface (donc de la précipitation).

92

4.7.3 Illustration du fonctionnement de l’algorithme de filtrage

Un exemple d’application de l’algorithme de filtrage des variables d’état du modèle hydro-logique est présenté afin de permettre au lecteur de visualiser son fonctionnement. Il s’agitde la Lonza à Blatten, dont le bassin versant est en tête, non perturbé, à forte proportionglaciaire et situé au Nord du bassin versant du Rhône. Il a une surface totale de 77.6 km2

dont 33.6% de glaciers, son altitude varie entre 1519m s.m. à Blatten et 3889m s.m. ausommet du Bietschhorn avec une moyenne à 2613m s.m. Le modèle hydrologique de cebassin versant se compose de 18 bandes d’altitude dont 6 sont des bandes glaciaires, ce quireprésente 36 niveaux de réservoirs à corriger simultanément. Les données météorologiquesutilisées sont les observations (prévisions parfaites).

La figure 4.14 présente le comportement du modèle hydrologique avec mise à jour des niveauxdes réservoirs comparé à la simulation continue sans filtrage et l’observation. L’exempleprésenté montre les étapes durant lesquelles le filtrage est effectué. Tout d’abord, unepremière correction est effectuée le 14.10.2000 à 00 h en comparant les volumes des 24 heuresprécédantes (a). L’hydrogramme obtenu par simulation continue qui sous-estime le débitobservé est modifié grâce à l’augmentation appropriée du niveau des réservoirs. Le dernierdébit simulé correspond même au dernier débit mesuré, mais cela n’est qu’un hasard. Unenouvelle correction est effectuée 12 heures plus tard (b) et améliore aussi significativement lecomportement du modèle hydrologique. Le dernier filtrage est opéré le 15.10 à 00 h, toujourssur une période de 24 heures. La comparaison entre les différentes simulations est présentéeen (d) jusqu’au 16.10 à 00 h à la fin de la crue. Le débit maximum observé est de 50m3/s,tandis que le débit de pointe obtenu par simulation continue est seulement de 23m3/s. Lepremier filtrage du 14.10 à 00 h permet au modèle d’atteindre 38m3/s, tandis que les deuxfiltrages suivants donnent des résultats similaires aux observations et des débits de pointede 51 et 53m3/s. Le cas de la Lonza est un exemple où le filtrage permet bien de corrigerune mauvaise estimation des niveaux dans les réservoirs au début de la crue malgré un débitde base simulé similaire au débit observé avant la crue.

Dans le cas où ce ne sont pas les niveaux dans les 4 réservoirs qui sont la cause del’imprécision mais l’estimation de la quantité des précipitations, l’algorithme de filtragefonctionnera également. Cependant, si une erreur dans l’estimation des températures està déplorer, il faut s’attendre à un comportement décevant de l’algorithme. L’exemple duTriftbach, présenté à la figure 4.15, illustre ce fait lors de la même période de crue en octobre2000. Son bassin versant est situé dans la vallée de la Viège en rive gauche, juste à l’amontde Zermatt. C’est également un bassin versant de tête, non perturbé, et à forte proportionglaciaire. Il a une surface totale de 10.6 km2 dont 51% de glaciers, son altitude varie entre2449m s.m. à la prise d’eau de Grande Dixence et 4221m s.m. au sommet du Zinalrothornavec une moyenne à 2613m s.m. Le modèle hydrologique de ce bassin versant se composede 6 bandes d’altitude dont 3 sont des bandes glaciaires. Au début de la période étudiée,la simulation continue sous-estime le débit observé en régime de base et de fonte glaciaire.Le premier filtrage du 14.10.2000 à 00 h rétablit parfaitement le débit (a), tout comme ledeuxième filtrage 12 heures plus tard (b). Les premières difficultés apparaissent le 15.10 à00 h (c), lorsque le modèle ne parvient pas à simuler une montée en crue. La synthèse del’événement (d) montre que malgré les précipitations considérées par le modèle hydrologique,aucune réaction du bassin versant n’a pu être simulée. L’augmentation artificielle des niveauxdes réservoirs n’a pas non plus eu l’effet escompté. La raison est la vraisemblable sous-estimation des températures empêchant toute formation d’hydrogramme de crue par lemodèle. En effet, la température moyenne journalière estimée à l’altitude du centre de

93

gravité du bassin versant est passée de 0.38˚C le 13.10 à 0.85˚C le 14.10 pour chuter à -2.32˚C le 15.10 lors de la crue. C’est la station de Zermatt qui, dans ce cas, avait la plus fortepondération, mais elle est située 1600m plus bas, et le gradient employé de -0.0054˚C/m estcertainement la cause de cette sous-estimation des températures dans la région. Il y a en effetparfois lors des fortes précipitations une réduction du gradient altimétrique qui provoqueune uniformisation des températures. Ce phénomène n’a pas été modélisé et empêche ainsile modèle hydrologique de réagir lors de telles situations.

(a) (b)

(c) (d)Fig. 4.14: Comparaison entre observations et simulations avec et sans mise à jour du modèlehydrologique lors de la crue du 13 au 16.10.2000 de la Lonza à Blatten. (a) état le 14.10 00 h,mise à jour sur 24 h du 13.10 00 h au 14.10 00 h ; (b) état le 14.10 12 h, mise à jour sur 24h du13.10 12 h au 14.10 12 h ; (c) état le 15.10 00 h, mise à jour sur 24 h du 14.10 00 h au 15.10 00 h ; (d)état le 16.10 00 h et comparaison entre les simulations avec différentes mises à jour.

La procédure de mise à jour du modèle hydrologique offre une possibilité d’adapter le modèleet de lui permettre de mieux simuler l’observé. Dans les situations de mauvaise estimationdes niveaux des réservoirs par la simulation continue ou des précipitations, l’algorithme defiltrage fournit des résultats satisfaisants. L’interaction de la température provoque toutefoisdes situations où il peut devenir inefficace.

4.8 Application au bassin versant du Rhône

Ce chapitre présente les résultats de la modélisation hydrologique du bassin versant duRhône à l’amont du Léman (LCH, 2004, 2005). Les hypothèses relatives aux aménagementshydroélectriques ne sont pas décrites ici mais leur influence est toutefois discutée. Uneséparation des résultats est opérée selon le régime hydrologique des sous-bassins versants(perturbé ou non) et la procédure (calage ou validation). La performance est évaluée surl’entier de la période de calage, y compris le premier hiver. Les données de commande et de

94

(a) (b)

(c) (d)Fig. 4.15: Comparaison entre observations et simulations avec et sans mise à jour du modèlehydrologique lors de la crue du 13 au 16.10.2000 à Trift. (a) état le 14.10 00 h, mise à jour sur 24 h du13.10 00 h au 14.10 00 h ; (b) état le 14.10 12 h, mise à jour sur 24 h du 13.10 12 h au 14.10 12 h ; (c) étatle 15.10 00 h, mise à jour sur 24 h du 14.10 00 h au 15.10 00 h ; (d) état le 16.10 00 h et comparaisonentre les simulations avec différentes mises à jour.

95

contrôle sont celles décrites au chapitre précédant, et la topologie du modèle hydrologiqueest décrite dans le chapitre 7.2.

4.8.1 Calage des sous-bassins versants non perturbés

Le calage des 38 sous-bassins non perturbés a été réalisé selon la procédure décrite auchapitre 4.6. Quelques résultats sont présentés sous forme graphique pour des points choisis(figures 4.16 et 4.17). Les caractéristiques des sous-bassins présentés sont résumées autableau 4.5. Les hydrogrammes simulés et observés sont comparés sous forme brute (1re

colonne), sous forme de graphe de corrélation (2e colonne) et sous forme relative (figure4.17), où l’erreur relative est définie comme suit (équ. 4.66) :

E =Qsim −Qobs

Qobs(4.66)

Tab. 4.5: Caractéristiques des sous-bassins versants choisis.

Massa Gletsch Coll. Est Emosson Grande-Eau

surface (km2)198.5 39.4 76.4 154

part glaciaire (%)54 42.8 38.4 0.3

altitude moyenne (m s.m.)2927 2710 3187 1484

Les sous-bassins versants non perturbés sont typiquement de régime glaciaire ou glacio-nival.Le modèle hydrologique est capable de représenter correctement ces comportements et lesperformances sont bonnes, avec des coefficients de Nash ayant des valeurs comprises entre0.75 et 0.85.

Dans le cas de la Massa, le modèle reproduit correctement le début de la période de fontede neige du mois de mai. Le débit simulé chute toutefois rapidement, car le stock de neigeest épuisé sur les bandes d’altitude les plus basses du bassin versant. La deuxième périodede fonte de neige du mois de juin est à nouveau bien reproduite par les bandes d’altitudeplus élevées, tout comme les cycles de fonte des glaciers durant l’été. La crue du 15 octobren’est, par contre, pas bien simulée. Le modèle a donc sous-estimé la formation du stock deneige durant l’hiver, suite à une sous-estimation des précipitations durant cette période. Il ya en effet de nombreuses stations considérées, mais les plus proches sont à plus de 12 km ducentre de gravité du bassin versant. Compte tenu de l’importance du relief dans cette région,il est probable que l’incertitude sur les volumes précipités durant l’hiver soit importante. Lamauvaise performance du modèle lors de la crue d’octobre s’explique plutôt par une sous-estimation des températures. La station la plus proche se trouve en effet à plus de 19 km età une altitude de 2450 m, soit 500 m plus bas que l’altitude moyenne du bassin versant dela Massa. Cette erreur induit d’une part une fonte de neige et de glace trop faible et réduitla surface contributive des précipitations liquides responsables de la crue. Pour conclure,l’erreur relative la plus importante se produit pour des débits très faibles durant l’hiver.

96

Massa : Nash = 0.76 r2 = 0.88 V ol = 0.93

Gletsch : Nash = 0.81 r2 = 0.90 V ol = 0.96

Collecteur Est Emosson : Nash = 0.74 r2 = 0.88 V ol = 1.02

Grande Eau : Nash = 0.43 r2 = 0.75 V ol = 1.24Fig. 4.16: Résultats du calage des sous-bassins versants Massa, Gletsch, Collecteur Est Emosson etGrande Eau.

97

Massa Gletsch

Collecteur Est Grande EauFig. 4.17: Erreur relative des sous-bassins versants Massa, Gletsch, Collecteur Est Emosson etGrande Eau.

98

Ces derniers proviennent du réservoir-sol GR3 et sont mal reproduits par le modèle. Leurajustement pour l’hiver entraînerait toutefois une dégradation importante des résultats enété et lors des crues, ce qui n’est pas souhaitable.

Les observations sont similaires dans le cas du bassin versant de Gletsch, égalementfortement glaciaire. Le débit hivernal est cependant parfaitement reproduit, mais les erreursrelatives les plus importantes sont observées pour des faibles débits au début de la périodede fonte de neige et à la fin de la période de fonte des glaciers. Le modèle est trop sensibledans ce cas et produit des variations de débit très importantes.

La région du collecteur Est de l’aménagement d’Emosson est également fortement glaciaire.Les résultats sont présentés au pas de temps journalier car les observations sont disponiblesà cette résolution uniquement. La crue d’octobre 2000 est ici reproduite de manièresatisfaisante. Le réseau de mesures est dans cette région relativement dense et les erreursdues à la spatialisation des variables météorologiques sont faibles. Il n’y a pas d’erreurrelative systématique dans les faibles débits et la performance globale est bonne.

Finalement, le bassin versant de la Grande Eau est un exemple de régime hydrologiquenival où le modèle peine à produire des résultats satisfaisants. La performance du modèleest moyenne durant toute l’année, avec une erreur systématique en hiver, une période defonte de neige sous-estimée, un régime de hautes eaux estival pendant lequel les petites cruesne sont pas reproduites, tout comme la crue d’octobre. Il s’agit pourtant du meilleur calageobtenu. La structure actuelle du modèle hydrologique ne permet donc pas de représentercorrectement les processus de fonte de neige ou de ruissellement en milieu fortementboisé typiques de ce bassin versant. Des résultats similaires ont également été observéspour d’autres sous-bassins versants présentant les mêmes caractéristiques et indiquentune mauvaise modélisation des régions pré-alpines où l’apport des glaciers est faible voireinexistant.

La synthèse des résultats du calage des sous-bassins versants non perturbés ainsi que leurparamétrage sont présentés au tableau 4.6. Le coefficient de Nash moyen est µNash = 0.64et l’écart-type est σNash = 0.12. Le bilan moyen est µV ol = 1.03 avec un écart-typede σV ol = 0.15. Ces résultats sont relativement moyens, mais l’objectif n’est pas ici demaximiser le coefficient de Nash. Avec un paramétrage mou (cycle de fonte journalier peumarqué), le coefficient de Nash moyen augmente en effet à µNash,mou = 0.75 et son écart-type diminue à σNash,mou = 0.08. Toutefois, le modèle doit, pour être crédible du pointde vue de l’utilisateur, reproduire le cycle de fonte journalier au printemps et en été,aspect difficile à réaliser avec un paramétrage mou. Enfin, les plus grands sous-bassinsversants (S > 50 km2) ont la meilleure performance car ils sont moins sensibles auxincertitudes dues à la spatialisation des variables météorologiques. C’est en particulier lecas de Gletsch (Nash=0.81), de la Massa (Nash=0.75), de Reckingen (Nash=0.83) ou de laSaltina (Nash=0.84). Les sous-bassins présentant les plus mauvaises performances sont lesplus petits (S < 10 km2) ou ceux ayant une très faible surface glaciaire.

4.8.2 Calage des sous-bassins versants perturbés

Les sous-bassins perturbés sont ceux situés le long du Rhône et de ses principaux affluents.Les hydrogrammes simulés sont donc fortement conditionnés, d’une part par la partieamont du modèle et ses sous-bassins non perturbés, et d’autre part par l’influence desaménagements hydroélectriques. Une part importante du débit des affluents est captée etenvoyée vers les retenues et n’arrive donc pas dans le Rhône selon un écoulement naturel.

99

Tab. 4.6: Résultats du calage des sous-bassins versants non perturbés et paramétrage associé.

Nom station Nash V ol AGL KGL KN AN hmax k Ks

( mm

C·j ) (j) (j) ( mm

C·j ) (m) (h) (m1/3/s)

Alphubel 0.61 0.91 4 0.25 0.25 5 0.8 0.005 0.5Arb 0.65 0.99 6.5 0.5 0.5 7 2 0.0015 2

Arolla 0.62 0.99 1 0.5 0.2 5.3 1.2 0.0001 0.5Bertol 0.60 0.96 12 0.4 0.63 6 1.2 0.002 1

Blatten Lonza 0.64 1.04 7 0.4 0.4 10 0.5 0.0003 0.2Chennaz 0.62 1.17 6 0.35 0.35 4 1.2 0.001 1

Collecteur Est 0.75 1.04 4 0.6 0.6 5.5 0.8 0.0002 0.2Collecteur Ouest 0.60 1.02 3 0.6 0.6 4 0.8 0.00015 0.2

Dent Blanche 0.64 1.10 1.8 0.2 0.2 4 1.2 0.00015 2Edelweiss 0.65 0.97 9 0.7 0.7 9.5 1.2 0.0002 0.5Ferpècle 0.59 1.07 8 0.24 0.24 5.8 0.8 0.00005 0.2

Festi 0.65 1.02 3 0.1 0.1 5.9 0.4 0.0001 0.2Findelen 0.66 0.99 6 0.2 0.4 5 1.2 0.0005 1

Fontanesses 0.51 0.97 8 4 3 12 1.4 0.00005 1Furgg 0.57 0.95 6 0.5 0.5 6 1.2 0.001 0.5

Gletsch 0.81 0.96 5.5 0.73 0.73 4.2 1.5 0.0001 0.2Grande Eau 0.43 1.24 0.5 4 2 7 0.9 0.00025 0.14

Goneri 0.61 0.82 15 0.63 0.63 3 0.2 0.0004 0.2Gornera 0.72 0.90 5 0.63 0.63 5 0.8 0.0015 1Massa 0.76 0.93 9 0.8 0.8 5 1.1 0.00015 0.5

Mattmark 0.70 0.96 3.2 0.35 0.35 5.6 0.9 0.00015 2Mauvoisin 0.75 1.03 6 0.5 0.5 5.5 0.8 0.00015 0.2

Moiry 0.59 1.05 2 0.54 0.54 4 0.25 0.0004 0.1Mottec 0.72 0.95 5 1 1 6 0.25 0.0004 0.1Mourti 0.30 1.05 5 2 2 5 1.2 0.00015 0.2

Reckingen 0.83 1.07 6 0.25 0.25 4.5 1.4 0.0002 0.6Saltina 0.84 1.13 8 0.63 0.63 10 0.8 0.00025 0.1Stafel 0.71 0.90 5 0.63 0.63 5 0.3 0.0015 0.2Triège 0.49 1.01 4 0.6 0.6 6 0.8 0.00025 0.2Trift 0.68 0.96 10 1 1 12 1.2 0.0015 1

Turtmann 0.77 0.99 4 0.38 0.38 4 0.25 0.0005 0.1Vouasson 0.68 1.27 3 0.63 0.63 4 1.6 0.00015 1

Vuibe 0.47 1.68 1 1 1 1 0.35 0.00005 2

100

Par contre, les rejets des turbines n’ont aucune corrélation avec le cycle hydrologiquenaturel et ne dépendent que de la politique de production des exploitants. Par conséquent,les hypothèses relatives aux aménagements hydroélectriques ont un grand impact sur laperformance du modèle hydrologique aux points de calage perturbés. Enfin, les sous-bassinsintermédiaires n’ont ni un régime glaciaire, ni nival. Ils sont donc délicats à modéliser selonle concept GSM-SOCONT.

Treize sous-bassins versants perturbés ont été calés. Quatre d’entre eux sont présentés danscette section et leurs caractéristiques sont décrites au tableau 4.7. Les résultats completssont présentés au tableau 4.8. Les résultats du calage sont légèrement moins bons que ceuxdes sous-bassins non perturbés. Le coefficient de Nash moyen est µNash = 0.56 et l’écart-type est σNash = 0.20. Le bilan moyen est µV ol = 1.11 avec un écart-type de σV ol = 0.14.A noter que Vissoie n’a pas été considéré dans le calcul de la performance moyenne. Quatresous-bassins ont une mauvaise performance : Biel, Châble, Dranses et Viège. Il s’agit debassins versants dont une part très importante de l’écoulement naturel est soustraite parde nombreux captages en rivière. L’écoulement produit par la fonte glaciaire n’est donc pasacheminé dans la rivière et l’étiage n’est dû qu’à l’infiltration ou à la fonte de neige en forêtau printemps. Il s’agit de morphologies pour lesquelles le modèle est le moins performant.De plus, la négligence de l’ETP dans ces régions ne favorise pas le résultat.

Tab. 4.7: Caractéristiques des sous-bassins versants perturbés choisis.

Dranses Brigue Sion Porte du Scex

surface (km2)699 907 3340 5347

part glaciaire (%)14.3 20.2 16.3 12.4

altitude moyenne (m s.m.)2210 2339 2282 2086

Tab. 4.8: Résultats du calage des sous-bassins versants perturbés et paramétrage associé.

Nom station Nash V ol AGL KGL KN AN hmax k Ks

( mm

C·j ) (j) (j) ( mm

C·j ) (m) (h) (m1/3/s)

Biel 0.24 1.00 5 1 0.00015 2Branson 0.72 1.03 4 0.8 0.00025 0.5Brigue 0.78 1.14 6 0.3 0.3 4.5 1.2 0.00020 0.2Châble 0.30 1.37 7 0.5 0.00050 0.5

Cheilon collecteur 0.77 1.08 5 0.8 0.00025 0.5Dranses 0.42 1.37 4 0.8 0.00025 0.2Fionnay 0.51 1.02 8 0.25 0.25 10 0.5 0.00100 0.2

Porte du Scex 0.71 1.06 3.8 0.8 0.00025 0.5Saas Balen 0.52 1.09 0.5 0.28 0.28 5.2 0.8 0.00005 2

Sion 0.73 1.06 4 0.8 0.00025 0.5Viège 0.36 1.19 6 0.2 0.4 5.5 0.8 0.00050 2

Vissoie -1.98 2.02 0.5 2 0.00010 0.1Zermeiggern 0.71 0.94 20 0.18 0.18 5.3 0.8 0.00050 2

Les figures 4.18 et 4.19 illustrent les résultats obtenus aux 4 sous-bassins sélectionnés.

101

Quelques commentaires peuvent être émis : tout d’abord, il convient de rappeler que lecritère de Nash est particulièrement sévère pour les simulations horaires, car un décalagetemporel de débit péjore fortement sa valeur. En effet, un événement de crue ou un cyclede turbinage déphasé produira toujours une erreur sur la reproduction d’un débit, même sil’information fournie au décideur est presque totalement valide. Ce comportement expliqueégalement la forme des fonctions d’erreur relative, systématiquement positives pour les trèsfaibles débits et négatives pour les débits faibles à moyen. Définie comme la différencerelative entre simulation et observation, elle est positive en période d’étiage car le modèlene sous-estime presque jamais les débits pendant ces périodes. Ce biais est encore accentuépar les imprécisions sur les cycles de turbinage particulièrement visibles lors des très faiblesdébits. D’ailleurs, ce comportement était beaucoup moins systématique sur les sous-bassinsnon perturbés. Pour les débits faibles à moyens, l’erreur relative est moins systématique :la fonte de neige printanière est sous-estimée mais le reste de l’été est modélisé de manièreconvenable. Le résultat le plus important de la modélisation est la production de la crued’octobre qui est conforme à l’observation. En effet, l’erreur relative sur les grands débitsest minimale, sauf sur le sous-bassin des Dranses. De même, il n’y a pas de déphasage entrela pointe de crue simulée et observée. Ces résultats confirment la robustesse du modèle pourla simulation des grands débits.

L’analyse détaillée des exemples présentés met en évidence les problèmes du modèlehydrologique, en particulier sur les bassins versants fortement perturbés et dont les surfacescontributives restantes sont en basse altitude. C’est le cas des Dranses, que le modèle neparvient pas à bien représenter. Le débit hivernal est systématiquement sur-estimé, tandisque la fonte de neige ne crée pas d’augmentation marquée du débit. La crue est produite maisfortement sous-estimée et la période qui suit ne présente pas de récession suffisante. Unecause de ce comportement non satisfaisant est l’insuffisance des mesures des températuresdans ce secteur et par conséquent une mauvaise estimation du gradient altimétrique. Eneffet, le modèle produisant trop de fonte en hiver (ou pas assez de stockage sous forme deneige) ne peut évidemment plus en produire au bon moment, c’est-à-dire au printemps. Larétention d’eau dans les forêts et le déplacement de la période de fonte ne sont pas prisen considération par le modèle, tout comme l’ETP, dont l’influence est plus forte sur cetype de terrain. La crue d’octobre a été bien reproduite dans la région des Dranses, maisà l’ouest du bassin versant et non à l’Est. La grande partie du débit de crue a donc étécaptée et dirigée vers un aménagement. L’Est du bassin versant des Dranses est par ailleursmal couvert par le réseau de mesures. La dernière raison pour ce résultat est la mauvaiseestimation du stock dans le réservoir-sol avant la crue et donc l’attribution d’une trop fortepart des précipitations à l’infiltration et non au ruissellement.

La modélisation des écoulements du Rhône est très satisfaisante. Les résultats à Brigue, Sionet la Porte du Scex l’attestent. Le cycle hydrologique annuel est reproduit, l’influence desaménagements hydroélectriques est identifiable et la crue d’octobre apparaît à l’heure et avecl’amplitude observée. Le débit de pointe à la Porte du Scex est un peu trop faible : une grandepart de cette erreur provient des Dranses où la crue a été fortement sous-estimée.

4.8.3 Validation des sous-bassins versants non perturbés

La performance réelle du modèle hydrologique ne peut être évaluée qu’à la suite d’unevalidation, c’est-à-dire par la simulation de périodes n’ayant pas servi à l’établissement duparamétrage du modèle. 3 périodes de 15 mois ont été utilisées pour la validation, dont lesrésultats sont synthétisés au tableau 4.9.

102

Dranses : Nash = 0.42 r2 = 0.80 V ol = 1.37

Brigue : Nash = 0.78 r2 = 0.90 V ol = 1.14

Sion : Nash = 0.73 r2 = 0.86 V ol = 1.06

Porte du Scex : Nash = 0.71 r2 = 0.85 V ol = 1.06Fig. 4.18: Résultats du calage des sous-bassins versants des Dranses, Brigue, Sion et Porte du Scex.

103

Dranses Brigue

Sion Porte du ScexFig. 4.19: Erreur relative des sous-bassins versants des Dranses, Brigue, Sion et Porte du Scex.

104

Le coefficient de Nash moyen est µNash = 0.67 et l’écart-type est σNash = 0.15. Le bilanmoyen est µV ol = 1.03 avec un écart-type de σV ol = 0.18. Ces résultats de 30 sous-bassins ne tiennent pas compte des régions du collecteur Ouest d’Emosson, Mourti et Vuibe,dont les résultats étaient particulièrement mauvais ou inexistants par manque de données.Les performances moyennes en validation sont équivalentes au calage et la dispersion estlégèrement augmentée. Il en va de même pour l’indicateur de bilan légèrement trop élevéen validation. Ces résultats prouvent la robustesse du modèle hydrologique, capable deconserver son niveau de performance sur plusieurs années différentes. Les résultats détailléssont à nouveau présentés aux figures 4.20 et 4.21 pour les 4 sous-bassins de la Massa (1987),de Gletsch (1993), du collecteur Est d’Emosson (1994) et de la Grande-Eau (1994). Desannées différentes sont choisies pour illustrer d’autres situations. Les commentaires sur lesrésultats présentés sont similaires que pour le calage. En effet, les sous-bassins avec uneforte proportion glaciaire sont les mieux modélisés. Les étiages sont sur-estimés et l’erreurrelative s’en ressent pour les très faibles débits. L’erreur relative diminue pour les débitsmoyens et grands. La figure 4.22 illustre la similitude des résultats des coefficients de Nashen calage et en validation. Les sous-bassins pour lesquels les performances sont fortementdégradées sont ceux de Festi, de Vuibe et de la Saltina. La raison de cette dégradation estle manque de données en provenance du réseau de mesures des températures IMIS, qui aété étendu entre les années 1994 et 2000. Ces sous-bassins versants, calés en 2000 avec leréseau IMIS existant, utilisent ces données avec une forte pondération (Festi : 68%, Vuibe :100% et Saltina : 70%) car elles se trouvent à proximité, alors qu’ils ne disposent d’aucunemesure de température IMIS en phase de validation. Ce résultat renforce donc l’explicationde la part importante de l’incertitude par manque de mesures locales précises et soulignel’importance d’un réseau de mesures dense en milieu alpin.

4.8.4 Validation des sous-bassins versants perturbés

Les résultats de validation des sous-bassins perturbés résument finalement la performanceglobale du modèle hydrologique. Ils sont présentés de manière détaillée au tableau 4.10 etles 4 sous-bassins choisis aux figures 4.23 et 4.24. Le bassin versant des Dranses est remplacépar celui de la Viège, car aucune mesure de débit des Dranses à Martigny n’était disponibleavant 1996.

La validation des sous-bassins perturbés illustre la performance du concept hydrologiquechoisi pour la modélisation des écoulements du bassin versant du Rhône. Tous les élémentsdu cycle hydrologique sont reproduits sans erreur systématique : les basses comme les hauteseaux sont modélisées. Les différents processus de fonte sont produits en phase avec lesobservations, malgré quelques imprécisions sur leur amplitude. Les crues rares qui se sontproduites pendant les années simulées ont également toujours été modélisées en phase etavec des vitesses de montée et de descente conformes à la réalité. Ces observations effectuées,il est désormais nécessaire d’analyser les résultats globalement pour quantifier l’incertitudemodèle et éventuellement en identifier les différences régionales. Ces points font l’objet duparagraphe suivant. La comparaison entre calage et validation est présentée à la figure 4.25où les coefficients de Nash pour les sous-bassins perturbés sont calculés. Il est intéressant deconstater que les résultats de la validation sont en général meilleurs que ceux du calage, saufpour deux sous-bassins (Châble et Saas Balen). Ces derniers sont situés dans des régionsoù peu de stations de mesure étaient implantées jusqu’en 1996, mais où de nombreusesstations de mesure de température IMIS étaient installées en 2000. Les performancesdu modèle hydrologique semi-distribué sont fortement conditionnées par la précision des

105

Tab. 4.9: Résultats de la validation des sous-bassins versants non perturbés.

Nom station Nash V ol

Alphubel 0.630 1.10Arb 0.720 1.00

Arolla 0.480 1.06Bertol 0.683 1.15

Blatten Lonza 0.756 1.11Chennaz 0.535 1.59

Collecteur Est 0.769 0.82Collecteur Ouest -1.61 2.49

Dent Blanche 0.650 1.24Edelweiss 0.719 0.90Ferpècle 0.754 1.18

Festi 0.154 1.26Findelen 0.676 1.04

Fontanesses 0.796 1.12Furgg 0.616 1.08

Gletsch 0.826 0.79Grande Eau 0.530 0.98

Goneri 0.447 0.48Gornera 0.738 0.98Massa 0.865 1.05

Mattmark 0.734 0.97Mauvoisin 0.781 0.99

Moiry 0.723 0.86MourtiMottec 0.795 0.97

Reckingen 0.871 1.08Saltina 0.490 1.11Stafel 0.724 1.02Triège 0.489 0.95Trift 0.728 1.09

Turtmann 0.830 1.01Vouasson 0.695 1.03

Vuibe 0.076 1.75

Tab. 4.10: Résultats de la validation des sous-bassins versants perturbés.

Nom station Nash V ol

Biel 0.434 1.03Branson 0.797 1.11Brigue 0.854 1.03Châble 0.096 1.30

Cheilon collecteur 0.857 1.14Dranses 0.11 1.21Fionnay -1.800 0.54

Porte du Scex 0.736 1.12Saas Balen 0.296 0.68

Sion 0.833 1.06Viège 0.603 1.00

Vissoie -0.470 1.36Zermeiggern 0.810 0.98

106

Massa 1987 : Nash = 0.86 r2 = 0.94 V ol = 1.04

Gletsch 1993 : Nash = 0.77 r2 = 0.92 V ol = 0.73

Collecteur Est Emosson 1994 : Nash = 0.78 r2 = 0.92 V ol = 0.77

Grande Eau 1994 : Nash = 0.45 r2 = 0.68 V ol = 0.93Fig. 4.20: Résultats de la validation des sous-bassins versants Massa, Gletsch, Collecteur EstEmosson et Grande Eau.

107

Massa Gletsch

Collecteur Est Emosson Grande-EauFig. 4.21: Erreur relative de validation des sous-bassins versants de la Massa, de Gletsch, duCollecteur Est d’Emosson et de la Grande-Eau.

Fig. 4.22: Comparaison des performances des sous-bassins non perturbés en calage et validation,critère de Nash.

108

Viège 1987 : Nash = 0.59 r2 = 0.77 V ol = 1.02

Brigue 1987 : Nash = 0.87 r2 = 0.94 V ol = 1.02

Sion 1993 : Nash = 0.81 r2 = 0.91 V ol = 1.08

Porte du Scex 1994 : Nash = 0.76 r2 = 0.90 V ol = 1.11Fig. 4.23: Résultats de la validation des sous-bassins versants Viège, Brigue, Sion et Porte du Scex.

109

Viège 1987 Brigue 1987

Sion 1993 Porte du Scex 1994Fig. 4.24: Erreur relative de validation des sous-bassins versants Viège, Brigue, Sion et Porte duScex.

110

variables météorologiques dans chaque région. Il n’y a, dans notre cas, aucune compensationsystématiquement possible d’une erreur locale par une autre, comme pourraient parfois ensouffrir les modèles hydrologiques conceptuels. En effet, le calage d’un bassin versant avalayant été effectuée En outre, cela signifie qu’une amélioration locale de la modélisationhydrologique entraînera directement une amélioration de la performance globale, et que lemodèle peut être amélioré sans nécessité de modifier le concept de modélisation.

Fig. 4.25: Comparaison des performances des sous-bassins perturbés en calage et validation, critèrede Nash.

4.8.5 Estimation de l’incertitude du modèle hydrologique

Tout d’abord, la distribution spatiale de la performance du modèle hydrologique estprésentée à la figure 4.26, où les coefficients de Nash de tous les sous-bassins versantssont représentés sous forme de carte. Il s’agit des valeurs obtenues lors du calage, car ellesreprésentent mieux la performance opérationnelle du modèle hydrologique avec le réseau demesure le plus actuel.

Les régions les moins bien modélisées sont mises en évidence par leur couleur claire. Ils’agit soit de vallées dont la part de l’écoulement glaciaire est faible (Grande-Eau), soit derégions dont les écoulements naturels sont modifiés par les captages vers les aménagementshydroélectriques (Vièges, Dranses, Navisence). Il convient de noter également que la régionde la Dovéria n’a pas de performance associée car aucune mesure de contrôle n’est disponible.Il semble donc que les apports vers les retenues alpines soient correctement modélisés, maisque les écoulements à l’aval des captages posent plus de problèmes. La performance globaleayant été estimée précédemment, il est nécessaire de vérifier l’influence de ces disparités decomportement lors des crues.

Le meilleur résumé du comportement du modèle hydrologique lors des crues est l’hydro-gramme à l’exutoire du bassin versant du Rhône. Le débit à la Porte du Scex représenteen effet la somme de toutes les contributions hydrologiques et donc la performance globale

111

Fig. 4.26: Carte des coefficients de Nash des sous-bassins versants non perturbés et perturbés.

112

du modèle. Les 4 derniers événements de crues modélisés sur une durée de 5 jours sontprésentés à la figure 4.27. L’observation des résultats montre une bonne correspondanceentre les simulations et les observations en termes de phase et de forme, mais indique unesous-estimation systématique des débits de pointe. La crue de septembre 1994 semble par-ticulièrement mal modélisée, puisqu’un déficit de 200 sur 700 m3/s est observé. En outre, lamontée en crue du modèle est molle. Une analyse plus fine de la provenance des erreurs esteffectuée à l’aide du tableau 4.11 où les rapports entre les débits de pointe et les volumessimulés et observés sont synthétisés pour 8 points de contrôles choisis. Les 4 premiers pointsde contrôle concernent des sous-bassins versants affluents du Rhône importants.

En général, les rapports des débits de pointe et des volumes sont relativement similaires pourchaque point de contrôle le long du Rhône autour d’une valeur de 0.8. Toutefois, les affluentssemblent être moins bien modélisés lors des crues. En effet, les simulations de la Massa, dela Viège, de la Lonza et des Dranses sous-estiment en général les crues observées. La crue deseptembre 1994 est particulièrement mal représentée puisque les rapports des volumes sontlargement supérieurs aux rapports des débits, indiquant un aplatissement de l’hydrogramme.Cela provient du processus de fonte de neige dominant cet événement, au contraire des autrescrues dont l’origine était les fortes précipitations orographiques. L’hydrogramme résultant àl’exutoire montre les stigmates de ces imprécisions et est également aplati (figure 4.27).

août 1987 septembre 1993

septembre 1994 octobre 2000Fig. 4.27: Hydrogrammes de crue à la Porte du Scex, comparaison entre valeurs observées etsimulées.

Cette analyse confirme les observations effectuées lors des procédures de calage et devalidation du modèle hydrologique. Les sous-bassins versants de la Viège et des Dransessont particulièrement difficiles à modéliser mais la performance globale du modèle dans le

113

Tab. 4.11: Performance du modèle lors des crues historiques pour quelques sous-bassins versantschoisis. Q? = Qsim/Qobs est le rapport entre débit de pointe simulé et observé, et V ? = Vsim/Vobs

le rapport entre volume simulé et observé sur une durée de 48 heures lors de l’événement de crue.

1987 1993 1994 2000Stations Q? V ? Q? V ? Q? V ? Q? V ?

Massa 0.80 0.72 0.74 0.63 0.61 1.14 0.38 0.34Viège 0.36 0.41 0.28 0.30 0.52 0.53 0.74 0.64Lonza 0.75 0.86 0.69 0.88 1.11 1.15 0.50 0.49Dranses 0.54 1.06 0.38 0.62 0.57 0.69Brigue 0.83 0.89 0.91 0.80 1.33 1.05 0.84 0.80Sion 0.73 0.79 0.80 0.84 0.76 0.85 0.99 0.86Branson 0.80 0.88 0.79 0.90 0.74 0.89 1.01 0.92Porte du Scex 0.79 0.90 0.78 0.90 0.83 0.90 0.85 0.87

Rhône reste très bonne. Le fait nouveau provient des grands bassins versants glaciaires dontles crues peuvent être mal simulées, en particulier lorsque les processus de fonte de neigeou de glace sont prépondérants où en raison de l’incertitude sur l’isotherme 0 C. Cettedernière information conditionne en effet les surfaces glaciaires concernées par la fonte oula production de débit par ruissellement de surface lors des fortes précipitations.

Le dernier point portant sur l’incertitude du modèle hydrologique étudié dans ce travailconcerne sa quantification. Il est en effet intéressant de fournir une estimation moyenne del’erreur modèle à chaque point de contrôle. La méthodologie employée permet de supprimerle biais lié à une éventuelle sous-estimation ou sur-estimation systématique du débit. Elleexprime tout d’abord le débit horaire observé par transformation linéaire du débit horairesimulé et permet ensuite l’évaluation de l’incertitude par l’analyse de l’écart relatif entredébit observé et simulé.

Soit Qobs(t) et Qsim(t) les débits observés et simulés en un point au temps t, a et b lesparamètres de la droite d’ajustement (équ. 4.67) :

Qobs = a ·Qsim + b + ε(t) (4.67)

L’erreur ε(t) de l’ajustement au temps t peut être exprimée sous forme relative er(t) (équ.4.68) :

er(t) =Qobs(t)− a ·Qsim − b

a ·Qsim + b(4.68)

En admettant que cette erreur soit une variable aléatoire homoscédastique (dont chaquecomposante a la même variance) et distribuée selon une loi normale centrée de variance σ2

r

(équ. 4.69), il est possible de déterminer l’intervalle de confiance, à 80% par exemple (équ.4.70).

er(t) ∼ N(0, σ2r ) (4.69)

[(a ·Qsim + b) · (1− 1.28 · σr); (a ·Qsim + b) · (1 + 1.28 · σr)] (4.70)

La détermination de l’intervalle de confiance a été effectuée pour 6 stations importantes dubassin versant. Les différentes mesures de l’erreur sont mises en relation avec le débit moyen

114

observé du cours d’eau au point de contrôle dans le tableau 4.12. L’analyse a été effectuéesur les données horaires du 1erjanvier au 31 décembre de 4 années complètes (1987, 1993,1994 et 2000). Les années de calage et de validation ont été considérées sans distinction carla performance du modèle est comparable dans les deux situations.

Tab. 4.12: Tableau récapitulatif de l’incertitude modèle. Qobs,m est le débit observé moyen sur toutela période d’analyse, a et b les paramètres d’ajustement de la droite, εm l’erreur d’ajustement, σl’écart-type de l’erreur d’ajustement ε(t), er,m l’erreur d’ajustement relative moyenne et σr l’écart-type de l’erreur d’ajustement relative.

Station Qobs,m a b εm σ er,m σr

Dranses 10.71 1.15 -3.80 -1.96 4.74 0.07 0.50Viège 19.40 1.12 -2.19 0.07 10.21 0.07 0.70Brigue 47.49 1.08 -4.67 -1.02 18.71 0.00 0.37Sion 116.19 1.15 -20.52 -3.06 36.78 0.03 0.35

Branson 151.82 1.08 -24.03 -10.97 39.19 0.00 0.26Porte du Scex 197.62 1.05 -29.18 -17.85 49.99 0.00 0.25

Dans le cas d’une estimation de l’intervalle de confiance à 80%, l’incertitude de modélisationvarie entre ±64% du débit simulé sur les Dranses, ±90% à Viège mais ±47% à Brigue et±32% à la Porte du Scex. Le Rhône est donc bien mieux simulé que ses grands affluentsque sont les Dranses et la Viège. Les performances du modèle en période de crue présentéesau tableau 4.11 montrent toutefois que l’erreur relative sur le Rhône se situe plutôt entre 0et 20% lorsque les débits sont très importants.

4.8.6 Simulations avec mise à jour du modèle hydrologique

La procédure de mise à jour des variables d’état du modèle hydrologique telle que décrite auparagraphe 4.7 a été implémentée dans le modèle hydrologique. 23 stations de mesure ont étéutilisées comme données de contrôle, et donc 23 zones ont été mises à jour séparément. Ceszones sont réparties en 6 niveaux, ce qui permet de limiter les temps de calcul (figure 4.28).Le tableau 4.13 présente les zones ainsi que leurs principales caractéristiques. 4 zones nesont pas filtrées mais sont tout de même considérées dans le calcul en simulation continue,car elles ne disposent d’aucun point de contrôle fiable et présentent des caractéristiquestrop différentes des zones voisines. La zone 0 (Dovéria) est située hors du bassin versantdu Rhône et n’est pas contrôlée, la zone 8 (Steg) se trouve le long du Rhône entre Viègeet Sierre mais il est en l’état impossible d’isoler sa production de débit propre. Les zones9 (Anniviers) et 15 (Trient) ne disposent d’aucune mesure de débit en temps réel, ce quirend également impossible la vérification par le modèle de la production de débit. Ces zonesne peuvent par ailleurs pas vraiment être traitées comme leurs voisines car les phénomènesmétéorologiques qui s’y produisent peuvent être très différents. Il vaut donc mieux ne pasmodifier leur paramétrage ni modifier leurs conditions initiales.

115

Fig. 4.28: Carte des niveaux de zones avec leurs points de contrôle. Les niveaux de zone 0 ne sontpas mis à jour.

116

Tab. 4.13: Tableau récapitulatif des caractéristiques des zones de filtrage. La surface est en km2 etl’altitude moyenne de la zone en m s.m.

Niv. Zone Zone Perturbé Surface % glacier Altitude moyenne1 1 39.4 42.8 2’7181 3 198.5 54.0 2’9461 6 13.7 39.5 3’2151 7 136.9 29.6 2’4911 10 414.7 16.7 2’4621 13 168.8 42.7 2’9431 17 123.1 31.7 3’0011 20 77.1 3.7 2’0181 22 159.9 4.1 1’5401 23 39.6 2.1 2’3871 24 79.9 73.8 3’2481 25 21.0 80.7 3’3111 26 59.4 48.6 3’3261 27 50.9 44.5 2’9441 28 13.5 55.9 3’0302 2 152.1 6.6 2’2043 4 perturbé 399.8 11.4 2’1383 5 perturbé 385.1 6.0 2’3523 14 perturbé 508.8 5.4 2’0294 11 perturbé 812.7 0.5 1’5795 12 perturbé 110.0 0.0 1’1466 16 perturbé 549.7 0.5 1’324

pas de filtrage 0 perturbé 172.0 10.1 2’254pas de filtrage 8 perturbé 335.0 4.5 1’853pas de filtrage 9 perturbé 349.8 13.6 2’467pas de filtrage 15 perturbé 160.6 10.2 2’075

117

Les 4 principales crues disponibles ont été simulées intégralement avec la procédure de miseà jour. Les calculs ont été réalisés de la manière suivante : une simulation d’initialisation aété effectuée 5 jours avant la pointe de la crue, la première mise à jour a été réalisée 3 joursavant la pointe à 00 h, puis répétée toutes les 12 heures jusqu’au moment de la pointe de crueobservée. La mise à jour et l’évaluation de sa performance pour les différentes simulationsont été établies comme suit :

– période de mise à jour de 24 heures– facteur d’amortissement : 0.95– nombre maximum d’itérations : 5– période d’évaluation : 48 heures de 00 h à 00 h autour de la pointe de crue– calcul du critère de Nash sur la période d’évaluation (équ. 4.62)– calcul du biais volumétrique sur la période d’évaluation (équ. 4.63)– calcul du rapport entre débit maximum observé et débit maximum simulé

Différents paramétrages de l’algorithme de filtrage ont été testés. En particulier, la durée dela période de filtrage a été étudiée et les performances les plus satisfaisantes ont été obtenuespour des durées de 24 heures. En effet, un filtrage sur une durée de 12 heures par exemple nepermet pas de discriminer avec certitude les ondes dues au turbinage ou les cycles journaliersde fonte de neige et de glace. L’algorithme risquerait ainsi de corriger des différences non pasdues aux niveaux dans les réservoirs mais à d’autres phénomènes de plus grande fréquence.Le filtrage sur une période de 36 ou 48 heures n’est pas non plus souhaitable car il retardetrop fortement la correction. En effet, il faudrait attendre la pointe de la crue pour bénéficierde la première mise à jour efficace du modèle. Le facteur d’amortissement η n’est pas trèssensible mais permet d’éviter que l’algorithme ne tourne indéfiniment autour de la valeurCMAJ = 1. Il a enfin été observé que 5 itérations suffisent pour obtenir une bonne adéquationentre volume simulé et volume observé sur la période de filtrage (imprécision moyenne de1-3% lorsque la mise à jour est possible).

La figure 4.29 présente les résultats des simulations de la crue d’octobre 2000 à la Portedu Scex avec mise à jour du modèle hydrologique. L’heure du début de la prévision, quicorrespond avec l’heure de la fin de la période de mise à jour, est indiquée en bas de chaquegraphe. Les différents hydrogrammes présentés permettent d’analyser le comportement del’algorithme de filtrage au cours du temps. Les premières mises à jour des 13.10. et 14.10.entraînent une dégradation de la performance du modèle par rapport à la simulation continuesans filtrage. En effet, le débit simulé entre le 12.10. et le 14.10. étant légèrement supérieurau débit observé, l’algorithme à tendance à réduire les niveaux des réservoirs-sol. Cela setraduit par une sous-estimation des débits lors de la pointe de la crue car les précipitationsn’ont vraisemblablement pas été surestimées. Une nette amélioration de la performancede la mise à jour est visible dès le 14.10. à 12 h lorsque la montée en crue débute, etl’hydrogramme avec mise à jour du 15.10. à 00 h offre le meilleur résultat. Dans la plupartdes situations modélisées et pour de nombreux points de contrôle, de telles observations ontpu être faites. La mise à jour du modèle hydrologique semble dégrader la performance parrapport à la simulation continue en période d’étiage, mais elle l’améliore dès qu’une tendanced’augmentation du débit observé se dessine. Il semble donc que les stocks des réservoirs dumodèle hydrologique soient relativement bien estimés par la simulation continue et que lefiltrage corrige surtout une mauvaise estimation des précipitations.

Les résultats des quatre événements de crue analysés sont présentés à la figure 4.30, oùla situation de référence est la simulation continue sans filtrage. Les indicateurs présentéssont la moyenne arithmétique des indicateurs des 23 points de contrôle. Il n’y a donc pasde pondération particulière en fonction de la contribution de chaque zone au débit total

118

Fig. 4.29: Hydrogrammes de crue à la Porte du Scex, comparaison entre valeurs observées et simuléesavec mise à jour du modèle hydrologique.

119

par exemple. Pour chacun des indicateurs considérés, la meilleure valeur est 1, raison pourlaquelle elle est mise en évidence dans les graphes présentés. Il est à nouveau remarquableque les deux premières mises à jour du modèle n’améliorent en moyenne pas la performancede la simulation, mais que les suivantes y parviennent. Les résultats indiquent une sous-estimation systématique de 20% à 40% du volume des crues et des débits de pointe. Lesvaleurs des coefficients de Nash sont particulièrement mauvaises car cet indicateur estextrêmement sensible lorsque la période d’évaluation est très courte. Il augmente tout demême significativement avec les mises à jour au début de la crue.

Suite à l’analyse de ces résultats, quelques recommandations peuvent être émises :

– la mise à jour du modèle hydrologique n’est pas souhaitable lors des périodes d’étiage– elle peut en revanche apporter une amélioration significative des résultats dès qu’une

légère tendance de montée en crue apparaît (24-36 heures avant la pointe de la crue).

4.9 Commentaires

Dans ce chapitre ont été présentés les différents modèles hydrologiques développés dans lecadre du projet MINERVE, ainsi que leurs performances. Bien entendu, tous les conceptsdécrits dans ce chapitre peuvent prêter à discussion, mais un rappel des objectifs est iciindispensable avant de remettre en cause ces développements.

Tout d’abord, l’objectif du modèle numérique était de fournir des prévisions hydrologiquesen tout point du bassin versant, en particulier aux endroits où se trouvent des prises d’eau enrivière, des ouvrages hydrauliques importants, des centrales hydroélectriques et des tronçonsde cours d’eau critiques. Cela signifiait qu’un modèle unique devait être capable de produireen un seul calcul la situation hydrologique d’un bassin versant complexe. De plus, en raisonde la quantité de points de contrôle à disposition, il fallait être capable de fournir des valeursen des lieux où le modèle ne pouvait être directement calé.

Pour ces deux raisons, le choix s’est porté sur un concept hydrologique semi-distribué,avec possibilité de choisir les unités hydrologiques de manière individuelle, de déterminerle paramétrage de chacune de ces unités et de l’extrapoler là où les points de contrôlemanquent.

Les conséquences de ce choix sont en fait que la performance globale a été privilégiée audétriment de la performance locale. Evidemment, la performance globale est directement liéeà la performance de chacun des sous-modèles puisqu’elle en est la composition. Cela expliquedonc que les indicateurs de performance locaux soient relativement moyens par rapportaux possibilités d’autres technologies de modélisation exploitées dans d’autres régions.Toutefois, la performance du modèle hydrologique, fournissant des valeurs de débit heurepar heure en de très nombreux points du bassin versant du Rhône à l’amont du Léman,est particulièrement impressionnante. En effet, les processus de production de débit sontactivés automatiquement et de manière différenciée en fonction de la saison et des variablesmétéorologiques, ceci en permettant également la modélisation explicite des aménagementshydroélectriques.

La performance locale du modèle hydrologique est bonne, en particulier lorsque la fonteglaciaire exerce une influence prépondérante : les coefficients de Nash se situent entre 0.70et 0.80. La performance du modèle est similaire en validation, ce qui confirme la robustessede ce concept de modélisation. Enfin, les sous-bassins versants situés à l’aval des captages,

120

Fig. 4.30: Synthèse des résultats des simulations lors des crues de 1987, 1993, 1994 et 2000 avecmise à jour du modèle hydrologique. La référence est la simulation continue sans filtrage.

121

généralement non glaciaires, raides et boisés, de taille inférieure à 10 km2, sont les plusdélicats à représenter avec le modèle GSM-SOCONT. Pour ces derniers, il serait souhaitabled’augmenter le nombre de processus considérés par le modèle hydrologique.

L’incertitude du modèle hydrologique en simulation continue se situe autour de +/- 25%à 35% dans le Rhône (intervalle de confiance à 80%). Sur cette base, il est possible dedéterminer avec une bonne fiabilité si une crue est à craindre, pour autant que la prévisionmétéorologique soit elle-même fiable. De plus, l’incertitude peut être réduite par la mise àjour des variables d’état du modèle en début de crue. En effet, les nombreux teste effectuésmontrent que la performance moyenne de la prévision hydrologique augmente lorsque lemodèle hydrologique est mis à jour 24-48 heures avant la pointe de crue.

Finalement, si le retour d’expérience manque encore pour évaluer convenablement laperformance du modèle hydrologique, certains points méritent d’être soulignés. Le modèlepeut aisément être calé différemment selon les processus à privilégier, l’incertitude du modèleà été décrite et permet déjà de définir des scénarios de prévision. Enfin, la procédure de miseà jour des variables d’état fonctionne et améliore le comportement du modèle hydrologiquelors des crues. Dès lors, les éléments les plus importants sont en place pour fonder lesdéveloppements du système d’aide à la décision sur des bases saines.

122

5 Fonctionnement des aménagementshydroélectriques

5.1 Remarques préliminaires

Les résultats présentés dans le chapitre précédent, portant sur l’hydrologie du bassinversant du Rhône à l’amont du Léman, prennent tous en considération le fonctionnementdes aménagements hydroélectriques. En effet, l’influence de ces derniers sur le débit duRhône est extrêmement importante tout au long de l’année, même si les aménagementshydroélectriques ne sont pas créateurs de débit mais n’en sont que des répartiteurs.

Les aménagements à accumulation stockent des volumes importants dès le printemps jusqu’àl’automne et les restituent en hiver par turbinage. Cela a pour effet une réduction dudébit moyen d’avril à septembre et une augmentation de ce dernier le reste de l’année,par rapport à une situation sans aménagements à accumulation. Il en va d’ailleurs de mêmepour la modification des températures des rivières, qui sont artificiellement diminuées d’avrilà septembre, et augmentées en été puisque l’eau froide de fonte des glaciers ne parvient pasà la rivière.

L’influence des retenues alpines lors des crues est également significative et les travauxeffectués sur le sujet seront brièvement décrits dans ce chapitre. Il convient ici de se rappelerque la rétention du débit par les retenues, lors des pointes de crue, a toujours eu en Valaisun effet bénéfique et que des réductions de l’ordre de 10% à 15% du débit de pointe duRhône à Sion ont été obtenues grâce au laminage.

Ces différents effets doivent être considérés avec attention dans la modélisation hydrologique,raison pour laquelle ce chapitre est présenté. Il introduit, en premier, lieu les bases nécessairesà la compréhension des hypothèses de modélisation et des contraintes de l’optimisation, c’est-à-dire la situation actuelle du marché de l’électricité et les fonctionnalités des aménagementshydroélectriques. Il décrit en deuxième lieu la situation locale du bassin versant et lesdifférents aménagements hydroélectriques qui s’y trouvent par l’analyse d’indicateurs. Ilprésente enfin les méthodes de reconstitution des séries de turbinage et de pompage tellesqu’elles ont été implémentées dans les modèles hydrologique et d’optimisation.

5.2 Fonctionnement des aménagements hydroélectriques

5.2.1 Généralités

Les aménagements hydroélectriques ont pour objectif la production d’électricité par l’utili-sation de la force hydraulique, c’est-à-dire la transformation de l’énergie potentielle d’unemasse d’eau en énergie électrique. Ce processus est rendu possible par l’acheminement del’eau par gravité, par la récupération de son énergie cinétique de translation par turbinage

123

et finalement par la transformation de l’énergie cinétique de rotation en énergie électriqueau travers d’un alternateur (figure 5.1).

Fig. 5.1: Processus de production d’hydroélectricité pour un aménagement à haute chute.

L’énergie électrique produite dépend du débit turbiné, de la hauteur de la chute, de ladurée de turbinage, de la masse volumique de l’eau et du rendement des installations(équ. 5.1) :

Eel(dt) = γw ·Qt ·Hn · ηt · ηel · dt (5.1)

où Eel est l’énergie électrique, γw la masse volumique de l’eau, Qt le débit turbiné, Hn

la chute nette, ηt le rendement de la turbine, ηel le rendement des équipements électro-mécaniques et dt la durée pendant laquelle est effectuée le turbinage.

Les aménagements hydroélectriques peuvent être décrits de façon hydraulique et fonction-nelle : ainsi, leurs trois principales fonctions hydrauliques sont l’adduction, le stockage etla restitution. Ces fonctions correspondent aux entrées et sorties hydrauliques de l’aména-gement, et par conséquent également aux soutirages et restitutions au système naturel. Lestrois fonctions hydrauliques élémentaires sont les cas généraux des nombreuses fonctionshydrauliques qui composent un aménagement hydroélectrique (figure 5.2).

– Dérivation : dérivation d’une partie de l’eau d’un cours d’eau naturel pour l’acheminerdans une retenue ou dans un système d’adductions et de turbines. Cette fonction impliqueun transfert de l’eau d’un sous-bassin versant vers un autre. L’ouvrage de dérivation estappelé captage ou prise d’eau : il peut parfois être régulé à distance (ouverture / fermeture)et peut être mis hors service pendant les crues suite à un bouchon créé par des sédimentscharriés ou éventuellement des corps flottants.

124

Fig. 5.2: Schéma des fonctions hydrauliques de base.

– Adduction : concentration des débits dérivés dans des galeries d’amenée et acheminementvers la retenue ou la chambre de mise en charge pour turbinage ou pompage.

– Stockage ou accumulation : rétention de l’eau dans une retenue ou un réservoir avantson turbinage à une période plus favorable. Cette fonction a pour conséquence unemodification majeure du cycle naturel de l’eau : diminution des débits naturels à l’avaldes captages, augmentation du marnage à l’aval des turbines, blocage partiel du transitdes sédiments.

– Turbinage : production d’électricité par l’exploitation de l’énergie potentielle de l’eau,incluant un transfert instantané du volume de la retenue vers la restitution (la conduiteforcée est toujours en charge).

– Pompage : transfert instantané de volume de la centrale de pompage à la retenue parl’utilisation d’énergie électrique.

– Evacuation : restitution d’un débit d’eau à l’aval de la retenue par un ouvrage spécifique(déversoir de sécurité, couronnement, etc...) sans le turbiner ou le pomper, effectuée dansles cas d’urgence (crues, pannes). L’évacuateur est souvent un système de sécurité noncontrôlé par des ouvrages vannés.

– Vidange : restitution d’un débit d’eau à l’aval de la retenue par une vanne (vanneintermédiaire ou vanne de fond) sans le turbiner ou le pomper, effectuée lors de situationsspéciales (crues, purges, abaissement du niveau de la retenue pour contrôle, etc...). Lesvannes sont des systèmes actifs, mobiles, et ne sont par conséquent pas absolument fiables.Restitution : remise du débit turbiné au réseau hydrographique naturel via un bassin decompensation ou un canal de restitution, provoquant une modification locale du régimehydraulique de la rivière. En situation de crue, la restitution peut être influencée par laremontée de la courbe de remous de la rivière vers la centrale.

– Dotation : restitution particulière à l’aval d’un captage ou d’une retenue pour doter le

125

cours d’eau naturel d’un débit minimal visant à assurer la survie de la faune et de la florede l’écosystème.

5.2.2 Marché de l’électricité

Ce sous-chapitre n’a pas la prétention de décrire en détail le fonctionnement du marché del’électricité. Il se bornera simplement à fournir les informations élémentaires et nécessairesà la compréhension des travaux présentés dans ce rapport.

Structure de la demande

La demande en électricité sur le marché européen suit depuis un siècle une tendance haussièremais varie selon plusieurs cycles : saisonnier, hebdomadaire, journalier. Elle est directementliée à la consommation, car l’électricité produite ne peut pas être stockée (outre les batteriesou accumulateurs de faible capacité). En moyenne, la demande en électricité est supérieureen hiver en raison de la consommation de chauffage. Au cours d’une même semaine, lademande est plus faible le samedi et minimale le dimanche en raison des horaires del’industrie et du secteur tertiaire. Enfin, la demande journalière est maximale durant lamatinée et à midi puis atteint un deuxième pic vers 18 h. Les prix du European EnergyExchange (EEX) sont un indicateur de la demande en électricité et illustrent bien lescycles journaliers (figure 5.3) et hebdomadaires (prix variables d’heure en heure à la boursed’échange d’électricité, www.eex.de).

Fig. 5.3: Prix du marché spot au European Energy Exchange EEX, mercredi 13.10.2004

Structure de l’offre

L’offre en énergie est disponible à partir de différents types de production : centrales nu-cléaires, centrales thermiques, hydroélectricité au fil de l’eau, hydroélectricité d’accumula-tion, centrales éoliennes et solaires, etc... Ces différents producteurs contribuent aux diffé-rents niveaux énergétiques qui sont l’électricité de base (centrales nucléaires, thermiques),l’électricité intermédiaire (fil de l’eau, accumulation) et l’électricité de pointe (accumula-tion) (OFEN, 2001). On observe à la figure 5.4 le cycle de production journalier, tandisqu’apparaît une production maximale en été (au contraire de la demande minimale en été),provenant de la forte production d’hydroélectricité suisse qui est exportée à cette saison(Sarlos et al., 2003). Lors d’étés particulièrement chauds (2003, 2005), l’offre en électricité

126

provenant d’autres sources peut faiblir. En particulier, les centrales nucléaires sont en ré-vision annuelle, mais ce sont surtout des restrictions d’exploitation qui peuvent survenir,afin de limiter le refroidissement des centrales thermiques dans les cours d’eau (pour ne pasréchauffer l’eau de manière disproportionnée lorsque le débit est faible). Les producteursd’hydroélectricité à accumulation peuvent alors modifier leur schéma de vente traditionnelet exploiter leur retenue lorsque les prix sont suffisamment élevés.

Fig. 5.4: Structure de l’offre en électricité pour 4 jours types en Suisse en 2001 (OFEN, 2001)

Structure des échanges d’électricité

Les échanges d’électricité varient selon les échéances des contrats. Au niveau national,un pays comme la Suisse est importateur d’électricité en hiver et exportateur en été,globalement exportateur en bilan annuel. Cela provient du taux élevé de productionhydroélectrique dépendant fortement du cycle hydrologique naturel (neige en hiver et faibleproduction, fonte en été et forte production). Ne pouvant pas changer fondamentalementce phénomènes, les exploitants d’aménagements hydroélectriques engagent leur productionsur des contrats à long terme où le risque est minimal, tout comme les prix. Les exploitantsd’ouvrages à accumulation disposant d’une grande flexibilité dans la mise à disposition deleur énergie (quelques minutes), ils peuvent également vendre leur énergie sur le spot marketoù des contrats à court terme (quelques heures) sont conclus, comme à la bourse EEX. Lesprix y seront plus élevés. Les exploitants pourront finalement proposer leur électricité àd’autres producteurs ne pouvant réaliser leur part du contrat (manque d’eau, manque devent, manque de soleil, etc...) : il s’agit alors d’électricité de réglage. On comprend désormaisle sens de l’évolution des prix EEX comme indicateur de la demande à court terme et nonpas de la demande totale qui comprend les contrats à long terme.

127

5.2.3 Aménagements au fil de l’eau

Description

Les aménagements au fil de l’eau ne disposent pas de retenue d’accumulation et ne peuvent,par conséquent, pas stocker l’eau dérivée. Ils doivent la turbiner directement, en général à lafaveur d’une chute de faible hauteur (figure 5.5). Ils se composent donc d’un barrage mobileet d’une centrale avec des turbines ayant un débit installé en général élevé.

Fig. 5.5: Schéma d’un aménagement hydroélectrique au fil de l’eau type (EER, 2001).

Les aménagements comportant de petits bassins de compensation (quelques centaines demilliers de m3) sont également considérés comme aménagements au fil de l’eau dans cetravail en raison de leur mode de production. Ces derniers peuvent en effet bénéficier deplusieurs captages et drainer plusieurs bassins versants simultanément avant de regroupertoutes les adductions au bassin de compensation. En raison du faible volume de ce dernier,ils ne pourront bénéficier de l’effet de rétention et devront également turbiner en continuune quantité importante du débit capté. De nombreux aménagements au fil de l’eau sontconstruits en plaine, en Suisse, sur le Rhin, l’Aar, le Rhône, et ont typiquement despuissances entre 10 et 50MW. Ils ont des débits équipés de 100-500m3/s pour des chutes de5-40m. Des aménagements à moyenne chute sans accumulation existent également dans lesAlpes, avec des débits équipés jusqu’à 20m3/s et des chutes de 40-200m, pour des puissancesinstallées de 5-40MW.

Exploitation des aménagements au fil de l’eau

Comme illustré à la figure 5.4, ces aménagements produisent la part intermédiaire del’électricité. Ils sont directement dépendants du régime hydrologique et produiront unmaximum d’électricité lors des périodes de hautes eaux, au printemps et en été (Europe).De manière générale, leurs exploitants chercheront à turbiner la totalité du débit dérivéjusqu’à concurrence du débit équipé. L’exploitation de ces aménagements ne relève pas

128

d’une complexité extrême et peut se résumer à la phrase suivante "on turbine tout ce quivient".

Comportement des aménagements au fil de l’eau lors des crues

Les aménagements hydroélectriques au fil de l’eau sont conçus de manière à ne pas perturberl’écoulement au-delà de leur limite de concession amont, en particulier lors des crues. Celasignifie que le plan d’eau ne doit en aucun cas être surélevé à cause des vannes lors de débitsimportants. En pratique, les débits de projet avec l’utilisation partielle des ouvrages vannés(règle n − 1) correspondent à des temps de retour de 1’000 ans. Il s’agit de valeurs plusrestrictives que pour le dimensionnement du gabarit du cours d’eau lui-même.

L’exploitation de ces aménagements lors des crues est par contre plus délicate. Le transportsolide étant en général très important lors de telles situations, ils ne peuvent pas forcémentturbiner l’eau afin d’éviter une usure excessive des turbines. En réalité, les aménagements aufil de l’eau situés en plaine n’ont pratiquement aucun effet bénéfique lors des crues. Ils sonten général soumis à des règlements d’exploitation dans lesquels sont décrites les procédureslors des situations de crue. L’exemple illustré (figure 5.6) décrit un règlement d’exploitationtype d’une double-vanne segment permettant le passage de l’eau par-dessus et par-dessousla vanne. Cette procédure met en relation la mesure de débit (ou de niveau) à l’amont avecles cotes des membrures de la vanne à respecter afin de limiter la surélévation du plan d’eaulors des crues. Il convient de noter que ce type d’aménagement ne constitue en aucun casun danger excessif en cas de défaillance ou de rupture du barrage en cas de crue. Etantsitué au milieu du cours d’eau et ne permettant pas le stockage de volumes importants,il ne représente pas un danger potentiel trop important. En Suisse, ils sont soumis à unelégislation particulière si leur hauteur dépasse 5mètres ou le volume 50’000m3.

Fig. 5.6: Exemple fictif de règlement d’exploitation pour une vanne d’un aménagement au fil del’eau. Ce règlement fictif est tiré d’un document original dont la confidentialité doit être respectée.

Par contre, les aménagements à moyenne ou haute chute, sans accumulation, peuvent contri-buer à la protection contre les crues. Ne bénéficiant pas de volumes de stockage importants,

129

ils ne pourront pas laminer les hydrogrammes de crue. Ils seront néanmoins capables de dé-river une partie de l’écoulement et de l’acheminer directement à la restitution. Pour réussircette manoeuvre, leurs captages ainsi que leurs turbines devront être fonctionnels. Dans cecas, ils permettront une réduction du débit du cours d’eau entre le captage et la restitutiond’une valeur correspondant au débit d’équipement de la prise d’eau, et soutireront au réseauhydrographique un débit correspondant au débit équipé des turbines fonctionnelles jusqu’àla restitution. Le bilan hydrique global n’est pas affecté par une telle manoeuvre, mais ceteffet peut quand même être intéressant dans le cas de crues localisées (orages, effets orogra-phiques locaux), lorsque la restitution ne pose pas de problèmes particuliers. Lors de cruesgénéralisées, cet effet est négligeable, la majeure partie des dégâts pouvant se produire dansla zone de restitution. Malheureusement, les limitations relatives au transport solide et enparticulier au turbinage lors des crues se révèlent en pratique souvent prépondérantes.

5.2.4 Aménagements à accumulation à haute chute

Description

Les aménagements hydroélectriques à accumulation à haute chute disposent d’une ouplusieurs retenues artificielles ou même naturelles. Ces dernières leur confèrent une flexibilitéd’exploitation importante qui croît avec leur volume utile. Ils se composent de captages etde galeries d’adduction menant à la retenue, de galeries d’amenée, de conduites forcéesou puits blindés acheminant l’eau à la centrale de turbinage et d’un canal de restitution(figure 5.7). Ils possèdent de plus des ouvrages de sécurité de la retenue : l’évacuateur decrue permet l’évacuation du débit entrant excédentaire. Il permet d’éviter une surélévationtrop importante du plan d’eau qui pourrait éventuellement mener à des déversementsnon contrôlés et, en situation extrême, à la rupture du barrage. Les évacuateurs peuventêtre munis de vannes ou fonctionner de manière passive. Les ouvrages de vidange actifs(vidange de fond, vidange intermédiaire) peuvent être utilisés pour le contrôle des crues,mais également pour effectuer des manoeuvres d’abaissement du plan d’eau pour contrôlesou des purges.

Les aménagements à accumulation peuvent produire des puissances très importantes dansles Alpes en raison des grandes chutes exploitables. Certains aménagements produisentdes puissances allant jusqu’à 1000MW, soit l’équivalent d’une centrale nucléaire de taillemoyenne, grâce à des chutes nettes de près de 2000m et des débits équipés de plus de50m3/s. Ils ont de plus l’avantage de s’enclencher et se déclencher en quelques secondes àquelques minutes.

Exploitation des aménagements à accumulation

L’exploitation des aménagements à accumulation n’est dépendante du cycle de l’eau qu’àl’échelle annuelle. En milieu alpin, la saison de remplissage débute au printemps avec lafonte des neiges. La fonte des glaciers contribue encore fortement au remplissage en été,avant le rafraîchissement climatique de l’automne produisant des précipitations sous formede neige, qui bien entendu n’amènent pas d’eau dans la retenue. La figure 5.8 illustre ce cycleet présente le taux de remplissage moyen des retenues d’accumulation suisses en 2000-01 deseptembre à septembre (année moyenne). L’enveloppe bleue représente les valeurs minimaleset maximales de 1973 à 2001 (OFEN, 2001).

Si l’on admet une production hydroélectrique d’accumulation relativement stable tout aulong de l’année (figure 5.4, voir la part d’électricité d’accumulation), on en déduit qu’en

130

Fig. 5.7: Schéma type d’aménagement à accumulation (EER, 2001).

131

Fig. 5.8: Taux de remplissage moyen des retenues d’accumulation en Suisse en 2000-01 (OFEN,2001)

132

moyenne les aménagements suisses turbinent plus qu’ils ne captent d’octobre à avril etqu’ils captent plus qu’ils ne turbinent le reste de l’année. C’est bien grâce à leur volumestocké qu’ils peuvent produire toute l’année. Grâce à leur grande flexibilité d’exploitation, lesaménagements à accumulation ne produisent que lorsque les prix sont élevés, en particulierl’hiver, même si le débit capté est négligeable. Dans ce cas, leurs exploitants chercheront àturbiner lors des heures de pointe (figure 5.9). On observe ainsi que la puissance produitepeut varier fortement d’une heure à l’autre.

Fig. 5.9: Taux de puissance produit par un aménagement à accumulation en hiver (journée desemaine type, février 2000). Cet exemple provient d’un aménagement suisse dont les données ontété normalisées pour la protection du secret commercial.

Certains aménagements disposent d’équipements de pompage, qui leur permettent deremonter de l’eau captée à une altitude moins élevée que le niveau de la retenue. Lorsqueles débits captés sont faibles, une régulation automatique permet l’enclenchement despompes lorsque le niveau du bassin de compensation est au maximum et le déclenchementdes pompes lorsque le niveau de ce bassin est trop bas. Les aménagements disposant decapacités de pompage importantes (5-30m3/s) ou devant remonter de l’eau sur une grandedénivellation ne peuvent fonctionner de même. Leurs centrales de pompage sont alors situéesà proximité d’un bassin de compensation au volume permettant un stockage journalier.Ainsi, les pompes seront mises en service durant la nuit, lorsque les prix sont au plus bas.Les aménagements disposant de bassins de compensation à accumulation hebdomadairepourront même ne pomper que le week end. D’autres, dont la retenue principale est situéeà haute altitude, pourront n’utiliser le pompage que l’hiver afin d’améliorer le taux deremplissage hivernal et ainsi augmenter leur production hivernale.

Comportement des aménagements à accumulation lors des crues

Les aménagements hydroélectriques à accumulation présentent un intérêt majeur lors descrues : ils peuvent être utilisés pour laminer la crue, c’est-à-dire pour permettre le stockagedu volume entrant pendant plusieurs heures avant de le restituer à l’aval une fois la crueterminée. Cette capacité à contrôler les crues représente une protection importante pour lesrégions situées à l’aval de l’aménagement et sera développée dans la suite de ce travail. Cesaménagements peuvent toutefois constituer un danger majeur lors de situations extrêmes, etdonc particulièrement peu probables : en cas de déversement subit ou de rupture, ils peuventprovoquer des crues rapides et extrêmement violentes menant à des inondations importanteset éventuellement des pertes humaines et économiques. Ils doivent donc être soumis à des

133

règles de sécurité drastiques qui s’ajoutent aux contrôles réguliers du comportement desstructures sollicitées. Ces règles de sécurité sont inscrites, pour chaque aménagement, dansun règlement d’urgence dont la description fait l’objet du paragraphe suivant.

Règlement d’urgence

Les règlements d’urgence contiennent les procédures d’exploitation en cas de crue. Dèsque les conditions d’application de ces règlements sont remplies, plus aucune dérogationaux procédures prévues n’est autorisée. La marge de manoeuvre de l’exploitant est alorsnulle. Les règlements d’urgence proposent des opérations de régulation des débits entrantset sortants en fonction du niveau de la retenue et du débit entrant ou de la vitesse demontée du plan d’eau. L’exemple de la figure 5.10 décrit un règlement d’urgence typiquepour un aménagement hydroélectrique composé d’une retenue, de captages et d’installationsde pompage situés sur des bassins versants limitrophes, de turbines, d’une vidange de fondet d’un évacuateur de crues. Plus le débit entrant dans la retenue est important ou plus leniveau de la retenue augmente, plus les apports doivent être limités et plus les lâchers d’eaudoivent être favorisés afin de stabiliser le niveau de la retenue. Par soucis d’économie, lespompages sont interrompus en premier, puis les captages sont mis hors service, le turbinageest ensuite enclenché et, le cas échéant, la vidange est ouverte. L’évacuateur de crues, systèmepassif, fonctionne naturellement selon le niveau atteint.

Fig. 5.10: Règlement d’urgence type et consignes en cas de crue, tiré d’un aménagement suisse.

5.3 Les aménagements à accumulation du Valais

De nombreux aménagements hydroélectriques jalonnent le réseau hydrographique naturelà l’amont du lac Léman. Il s’agit parfois d’aménagements à accumulation disposant deréservoirs importants, ou encore d’installations au fil de l’eau le long du Rhône lui-même.Il convient dès lors, et avant de s’engager dans une modélisation trop compliquée, dedéterminer lesquels pourraient avoir une importance particulière pour la justesse de lamodélisation et surtout pour le contrôle des crues. L’analyse quantitative sur la base desdonnées structurelles des aménagements permet précisément ce choix.

134

5.3.1 Situation sur le bassin versant du Rhône

Les principaux aménagements hydroélectriques du Valais sont présentés dans la figure 5.11.Ces derniers captent les eaux de la plupart des sous-bassins versants de tête tant sur la riveNord que la rive Sud du Rhône. C’est en effet dans ces régions que se trouvent les glaciersfournissant d’importants volumes d’eau en période estivale et permettant l’exploitationd’ouvrages à accumulation. Les restitutions se trouvent en général en plaine, à proximitédu Rhône pour bénéficier de la grande dénivellation offerte par les vallées suspendues. Lesaménagements les plus connus de cette région sont Grande Dixence qui fut le plus hautbarrage en béton du monde, Mauvoisin qui fut le plus haut barrage voûte du monde,Emosson qui se trouve à la frontière franco-suisse et est exploité par les deux pays et enfinMattmark, malheureusement connu pour la chute de séracs qui endeuilla sa construction le30 août 1965 et fit 88 victimes.

Dans la figure 5.11 sont également présentés quelques aménagements au fil de l’eau, tels queceux de Lavey, Simplon, Gommer et Ernen-Mörel. Ils exploitent les eaux du Rhône ou deses affluents mais ne disposent d’aucun ouvrage de stockage. Les caractéristiques techniquesdes principaux aménagements hydroélectriques valaisans sont résumées dans le tableau 5.1.Certaines caractéristiques ont été agrégées : l’aménagement de la Grande Dixence comprendcelui de la Dixence, l’aménagement d’Emosson comprend celui de Vernayaz CFF. De plus,seules les centrales de turbinage ont été considérées. Enfin, le débit équipé considère le débitmaximum des différents paliers, construits en parallèle, de chaque aménagement. Il ne s’agitdonc pas de la somme des deux paliers typiques des aménagements du Valais. Par contre,la puissance électrique totale de l’aménagement est indiquée.

Fig. 5.11: Situation des principaux aménagements hydroélectriques sur le bassin versant du Rhôneà l’amont du Léman

135

Tab. 5.1: Caractéristiques des principaux aménagements hydroélectriques du Valais. L’aménage-ment Grande Dixence inclut Dixence, et Emosson inclut Vernayaz CFF. Seul le nombre de centralesde turbinage est considéré, le débit équipé correspond à la capacité maximale en parallèle (palier leplus important).

Aménagement Réserv. Vol. total Pompage Nb Débit équipé Puissanceet BC (Mio m3) centrales (m3/s) él. (MW)

Grande Dixence 7 721.70 Oui 4 130.2 2090.0Emosson 7 239.00 Oui 5 46.4 568.0

Mauvoisin 2 206.76 - 2 34.5 363.0Bitsch 1 8.50 - 1 55.0 340.0

Mattmark 2 100.10 Oui 2 20.0 235.5Gougra 4 78.30 Oui 3 12.0 158.0

Lötschen 1 1.70 - 1 22.0 110.0Lienne 2 50.70 - 2 11.0 82.8Salanfe 1 40.00 Oui 1 4.8 80.0

Ackersand 1 0.21 - 1 16.0 63.0Simplon 3 0.26 Oui 3 18.3 61.7

Lizerne et Morge 2 0.91 - 1 8.0 50.0Ernen-Mörel 2 0.18 - 2 8.3 40.0

Pallazuit 1 20.00 - 1 10.0 40.0Susten 1 - - 1 64.0 40.0Lavey 1 0.40 - 1 220.0 31.0

Illsee-Turtmann 4 6.95 Oui 3 4.6 28.9Bramois-Sauterot 2 0.05 - 2 10.4 28.2Orsières-Niollet 2 0.12 - 2 8.0 27.0

GKW1 1 0.05 - 2 4.5 26.0GKW2 1 0.17 - 2 7.0 26.0Aegina 1 18.00 - 1 2.8 9.7

Bortelalp 1 3.76 Oui 2 1.0 7.4Vouvry 1 2.20 - 1 0.9 7.0Fully 2 4.17 Oui 1 0.4 5.7

Hospitalet 1 0.00 - 1 1.0 1.5Totensee 1 2.55 - 0 - -

136

5.3.2 Les aménagements du Valais en chiffres

Pour permettre une meilleure compréhension des capacités des différents aménagements, uneanalyse chiffrée est proposée dans cette section. Un certain nombre d’indicateurs simples ontété développés qui résument les capacités de ces aménagements à influer sur le cours naturelde l’eau dans le bassin versant. Ils sont adaptés aux données fournies par les exploitants eux-mêmes. L’utilité d’une telle analyse se démontre par la possibilité de sélectionner un nombrelimité d’aménagements hydroélectriques pour effectuer une première optimisation de leurexploitation pendant les crues. Cela permettra de conserver une complexité de modélisationet de recherche de solutions acceptables.

Les critères d’analyse décrits ci-dessous permettent le tri des aménagements hydroélectriquesou des vallées en fonction de leurs capacités de stockage, de drainage et de dérivation.

– Surface drainée pour accumulation : il s’agit de la somme des contributions de surfacesà partir desquelles l’eau est acheminée en direction d’un réservoir d’accumulation. Lessurfaces contributives des captages destinés à l’exploitation au fil de l’eau ne sont pasprises en compte. Par exemple, la prise en compte du captage de Lavey influenceraitfortement les résultats avec sa surface contributive de 4’820 km2, équivalent à près de90% de la surface du bassin versant. La surface de drainage totale considérée est donc de1’430 km2, tandis que le bassin versant du Rhône à l’amont du Léman a une surface de5’500 km2.

– Volume stocké : cet indicateur est calculé en effectuant la somme par aménagement ou parvallée des volumes des retenues au niveau normal d’exploitation, y compris les bassins decompensation. Le niveau normal correspond, en général, à la cote de crête des évacuateursde crues. Le volume de stockage total pris en compte dans cette analyse est pour le Valaisde 1’203Miom3.

– Volume stocké 2m : cet indicateur est plus représentatif du potentiel de laminage dechaque retenue. En effet, en situation de crue automnale typique de ce bassin versant, lesretenues sont généralement bien remplies et ne disposent donc que d’un volume réduitpour effectuer un stockage. Ce volume correspond à la tranche de 2mètres située sous leniveau normal d’exploitation. Le volume total considéré est de 36Miom3.

– Débit dérivé entrant : il s’agit de la somme des débits pouvant arriver dans un bassinversant en provenance d’un autre bassin versant. Sont pris en compte pour ce calculles capacités des collecteurs et des captages ainsi que les débits équipés des pompes. Lasomme des débits entrants (indirects) pour les retenues du bassin versant du Rhône vaut150m3/s.

– Débit dérivé sortant : il s’agit de la somme des débits quittant un bassin versant pour êtreacheminés vers un autre bassin versant. En plus des éléments utilisés pour le calcul dudébit dérivé entrant, les capacités de turbinage de certains aménagements sont considérées.La somme des débits sortants vaut 359m3/s à St-Maurice et est supérieure à la somme desdébits entrants. Cela est dû au choix de ne pas considérer le Rhône comme bassin versantrecevant de l’eau. Le calcul aurait en effet été faussé, la plupart des débits turbinés arrivantdirectement dans le Rhône. De plus, dériver de l’eau se révèle efficace pour protéger unevallée latérale ou un certain tronçon du Rhône mais pas le cours d’eau dans son ensemble.

– Potentiel de dérivation : il s’agit de la somme des débits captés, pompés ou turbinésd’un bassin versant vers un autre et qu’il est possible de considérer simultanément. Parexemple, pour l’aménagement Grande Dixence, le calcul prend en compte la capacité ducollecteur (70m3/s) acheminant les débits provenant des bassins de Mattervispa, Ferpècleet Arolla, ainsi que les capacités de turbinage de Nendaz, Bieudron mais pas Chandoline

137

(aménagement Dixence) ni Fionnay (en série avec Nendaz). Le potentiel de dérivationainsi obtenu est de 200m3/s pour un potentiel total considéré de 346m3/s. La légèredifférence avec le débit dérivé sortant total s’explique par l’exemple de l’aménagement dela Gougra qui a un potentiel de dérivation de 3+6=9m3/s (pompage Moiry + siphonageMoiry) alors que le débit sortant maximum du bassin versant Turtmänna vers Navisenceest de 9m3/s, et que le débit sortant maximum dans l’autre direction est de 6m3/s(pompage Turtmann), la somme des deux valant 15m3/s est différente des 9m3/s calculésprécédemment.

– Potentiel de dégâts : il s’agit ici d’une évaluation sommaire du potentiel de dégâts de lavallée située à l’aval d’un aménagement hydroélectrique. Cela permet de mettre en relationle potentiel technique de protection de l’aménagement pour sa vallée avec son efficacitééconomique. Dans l’état actuel, le potentiel de dégâts est estimé selon trois classes (0-1-2)avec un potentiel maximum pour la classe 2.

La figure 5.12 suscite de nombreux commentaires. Tout d’abord, elle montre que certainesvallées ont de très importantes surfaces de drainage dont les débits ne peuvent être stockés(Mattervispa, Massa, Lonza, Dranse de Ferret, Turtmänna). Certaines peuvent cependantêtre sauvées par leur débit dérivé sortant (Mattervispa, Turtmänna). Il devient donc toutnaturellement possible d’imaginer des stratégies de dérivation des eaux de la Mattervispavers la Grande Dixence ou de celles de la Turtmänna vers Moiry par siphonage ou versOberems. Il apparaît également que certaines vallées disposent d’un important volumede stockage mais n’ont que peu d’eau à stocker (Salanfe, Lienne, Navisence, Illbach).Finalement, certaines vallées disposent d’une situation plus équilibrée du point de vue de laprotection contre les crues. Les vallées de Bagnes, Trient, Entremont, Printse et Saaservispa(grande surface de drainage, important volume de stockage), sont dans cette situation. Ilconvient de terminer l’analyse de cette figure par l’exemple peu courant de la vallée de laDixence ayant une surface de drainée moyenne, un immense volume de stockage (retenuede Grande Dixence) et des capacités de dérivation extrêmement importantes. Cela permetà l’aménagement situé sur cette vallée de se positionner comme le principal régulateur dedébits de la vallée du Rhône.

La figure 5.13 présente trois caractéristiques techniques des aménagements hydroélectriqueset montre les différents aménagements classés selon le volume de stockage 2m. Six amé-nagements ont une part relative de capacité de stockage 2m supérieure à 5% : il s’agitdans l’ordre d’importance de Grande Dixence, Emosson, Mauvoisin, Mattmark, Salanfe, etGougra. D’autres aménagements semblent pouvoir apporter une contribution plus faible austockage de débit lors de crues tels ceux de Lienne, Pallazuit, Aegina, Illsee et Bortelalp. Ily a enfin deux autres aménagements qui seront difficiles à exploiter pour leur capacité destockage lors des crues, malgré parfois des surfaces de drainage parfois immenses (Bitsch,Lötschen). Il n’est toutefois pas exclu que leur utilité soit grande selon leur capacité à êtrepresque complètement vidés avant une grande crue.

La figure 5.14 présente les potentiels de dérivation de chaque aménagement en relation avecla surface drainée et le potentiel de dégâts de leur vallée respective. Grande Dixence peutamener de l’eau depuis la Mattervispa, Ferpècle et Arolla pour la turbiner directement dansla vallée du Rhône ; Emosson (sans le collecteur Ouest provenant du bassin versant de l’Arve)amène de l’eau depuis la Dranse de Ferret pour la turbiner vers Martigny ; Mauvoisin captel’eau de la Dranse de Bagnes et l’amène directement dans la vallée du Rhône ; GKW1 peutrécolter les eaux de la Binna pour les turbiner vers Ernen (Rhône) ; Gougra stocke les eauxde la Turtmänna et peut les turbiner jusqu’à Chippis ; Aegina collecte les eaux de la Ägeneet les renvoie directement au Tessin ; Illsee prélève un faible débit de la Turtmänna pour le

138

Fig. 5.12: Classement des vallées en fonction de leur surface de drainage relative pour accumulation,avec indication du volume de stockage 2m relatif, des débits dérivés relatifs entrant et sortant ainsique du nombre de captages (valeurs relatives par rapport à la somme cumulée des aménagements).

139

Fig. 5.13: Classement des aménagements par volume de stockage relatif de la tranche supérieure,avec indication de la capacité de stockage relative totale et de la surface de drainage relative (valeursrelatives par rapport à la somme cumulée des aménagements).

140

turbiner à Tourtemagne (Rhône) ; enfin, Salanfe capte une partie des eaux de la Vièze pourles turbiner à Miéville (Rhône). A nouveau, les aménagements qui semblent les plus à mêmede réussir à interférer sur le cours de la crue par réallocation de débit sont Grande Dixence,Emosson et Mauvoisin.

Il convient tout de même de rappeler que ces capacités de dérivation sont théoriques.En situation de crue, de nombreuses prises d’eau sont susceptibles d’être mises horsservice à cause de la turbidité de l’écoulement ou de la présence de sédiments charriésou éventuellement de corps flottants. Il sera donc nécessaire de tenir compte de la fiabilitédes ouvrages lors de l’établissement de stratégies d’urgence.

Par ordre d’importance, retenons comme manoeuvres possibles pour la protection contreles crues le turbinage préventif et la libération d’un volume de stockage, la dérivation deseaux pour le stockage, la dérivation des eaux pour le turbinage et enfin le laminage passifpar retenue pleine. Au vu des résultats présentés, une première sélection peut être opéréeintuitivement. Les aménagements potentiellement efficaces pour la protection contre lescrues doivent donc être capables de stocker des volumes importants, d’être flexibles dansleur exploitation pour libérer rapidement du volume supplémentaire et surtout couvrir dessurfaces de drainage importantes. Les aménagements avec une grande surface drainée, maisun faible volume de stockage, devront être inclus dans l’analyse, les aménagements avec unefaible surface drainée ne seront pas retenus. Selon ce raisonnement, les 10 aménagementssuivants seront à priori considérés dans le développement du modèle d’optimisation, et leurscaractéristiques techniques résumées dans le tableau 5.2.

Tab. 5.2: Caractéristiques techniques des 10 aménagements sélectionnés dans le modèle d’optimisa-tion. Emosson inclut Vernayaz, Grande Dixence (GD) inclut Dixence et ne considère pas Cleuson-Dixence, actuellement hors service ; BC : bassin de compensation

Vol. Surf. tot. Surf. Capacité CapacitéRéservoirs total réservoirs drainée pompes turbines

Aménagement et BC [mio m3] [km2] [km2] Centrales [m3/s] [m3/s]Grande Dixence 6 420 3.73 384 8 42.7 130.2

Emosson 4 229 3.13 106 4 18 29Mauvoisin 2 206 2.14 169 2 - 28.8Mattmark 2 100 1.76 94 3 9.5 19

Moiry 4 77 1.05 167 6 9 12.9Zeuzier 2 50 0.8 26 2 - 11Salanfe 1 40 1.76 46 1 - 4.8

Les Toules 2 20 0.57 74 2 - 10Gebidem 1 5.8 0.19 199 1 - 55Ferden 1 1.9 0.09 137 1 - 21.3Total 25 1’126.7 15.55 1’402 30 79.2 321.95

Pour ces 10 aménagements, la capacité de stockage à réservoirs vides est de plus de 1 milliardde m3, la surface drainée de 1’402 km2, soit plus de 25% de la surface totale du bassinversant. La surface totale des réservoirs donne une indication de la capacité de stockage àlacs pleins, puisque la valeur indiquée multipliée par une tranche de 1mètre donne un volumede stockage par mètre disponible de 15.55Miom3, ce qui est une valeur très élevée. Enfin, ilpeut être relevé que la capacité totale de turbinage de 321.95m3/s est également importanteet permet théoriquement de libérer 27.8Miom3 en 24 heures, soit l’équivalent d’une tranchede 2mètres. Cela représente au total près de 30% du volume de la crue d’octobre 2000 àl’exutoire du bassin versant.

Les aménagements Aegina, Illsee, Fully, Bortelalp, Totensee, Vouvry, et Lizerne avaient

141

Fig. 5.14: Classement des aménagements par potentiel de dérivation relatif, avec indication de lasurface de drainage relative et du potentiel de dégâts (valeurs relatives par rapport à la sommecumulée des aménagements).

142

d’abord été considérés dans la modélisation mais leur influence lors des crues du Rhônes’était révélée insignifiante. Ils ne seront donc pas détaillés dans ce travail.

Pour conclure, n’oublions pas que tous les aménagements hydroélectriques, s’ils ne sontpas nécessairement utiles pour la réduction des pointes de crue, peuvent se révéler d’utilessources de données pour le développement du modèle hydrologique et son ajustement entemps réel.

5.4 Reconstitution des séries temporelles de turbinage etpompage

Ce sous-chapitre présente les différentes données et méthodes de reconstitution employéespour la prise en compte des aménagements hydroélectriques dans la modélisation. Il éclaircitégalement la méthode de génération stochastique de séries temporelles de turbinage pourle modèle de prévision de débit. La raison pour laquelle ces données sont de premièreimportance est mise en évidence à la figure 5.15. Un grand nombre de sous-bassins versantsont pu être calés grâce aux mesures de débits captés, mais pour le calage des sous-bassinsperturbés il a fallu évaluer au mieux les nombreux rejets des centrales, toujours situés enamont de l’un des points de contrôle.

5.4.1 Contexte politique du projet et données à disposition

Les développements des modèles hydrologiques et d’optimisation se sont déroulés dansun contexte tendu, en particulier du point de vue des acteurs du marché de l’électricité.En effet, les années 2000-2006 ont été marquées par la profonde mutation de ce marchéen Europe, mais également en Suisse. La loi du marché européen a pris le pas sur lesarrangements locaux et les sociétés propriétaires des aménagements hydroélectriques ontdû se restructurer. La première conséquence a été la séparation des infrastructures entrepropriétaires et exploitants. La deuxième a été la privatisation progressive des différentsacteurs et le développement d’un environnement de plus en plus concurrentiel.

Dans ce contexte, des négociations difficiles ont été menées entre l’Etat, garant de la sécuritéde la population, et les propriétaires et exploitants des aménagements hydroélectriques. Ils’agissait en effet de définir les relations entre l’Etat et les exploitants dans le cadre duprojet MINERVE. Les discussions ont abouti aux résultats suivants :

– respect inconditionnel des règlements d’urgence relatifs aux grands barrages– accord des propriétaires et exploitants de modifier leur programme d’opération suite à un

ordre de police, s’il n’entre pas en conflit avec le règlement d’urgence– accord d’échange de données en temps réel en fonction de la sévérité pressentie de la crise

(crue) entre les propriétaires, les exploitants et l’Etat– aucune prévision de production ne sera publiée ni transmise aux utilisateurs du modèle

hydrologique

Ces aspects extrêmement positifs des discussions ont ouvert la porte à la mise en oeuvre duconcept de vidange préventive planifiée sur la base de prévisions hydrologiques. Toutefois,certains acteurs n’ont pas trouvé un intérêt à échanger des données en temps réel. Ilen a résulté un manque d’informations relatives à l’exploitation de certains ouvragesd’accumulation, raison pour laquelle des reconstitutions ont dû être réalisées. De plus,

143

Fig. 5.15: Situation des bassins versants non perturbés calés, des points de calage perturbés et nonperturbés mis en relation avec les rejets des 10 principaux aménagements hydroélectriques du Valais

144

l’impossibilité de disposer de prévisions de turbinage complique la production de prévisionshydrologiques de bonne qualité : il est dès lors indispensable de disposer d’un générateurstochastique de production, ce qui augmente l’incertitude du modèle hydrologique.

Finalement, le tableau 5.3 résume l’état des données à disposition pour le développement desmodèles. Selon les aménagements, différentes données pertinentes ont été rendues disponiblesdès 1980 pour des périodes et fréquences déterminées. Les archivages papier n’ont pas étéexploités. Les données reçues portaient typiquement sur les aspects hydrauliques et nonélectro-mécaniques de l’exploitation des retenues :

– débit turbiné et pompé– niveau de la retenue– débit capté

Tab. 5.3: Liste des données disponibles (tous paramètres confondus) et de leurs caractéristiques enfonction des aménagements. Les données ont été fournies en général dès 1980.

Aménagement Exploitant principal Période FréquenceGrande Dixence Energie Ouest Suisse (EOS) toute l’année horaireDixence Energie Ouest Suisse (EOS) 3 mois par année horaireEmosson ATEL - Energie de France (EDF) toute l’année journalièreMauvoisin Energie Gesellschaft Laufenburg (EGL) toute l’année journalièreGougra ATEL toute l’année journalièreMattmark Energie Gesellschaft Laufenburg (EGL) toute l’année journalièreSalanfe Energie Ouest Suisse (EOS) 3 mois par année horaireLienne Electricité de la Lienne SA - -Bitsch Energie Ouest Suisse (EOS) 3 mois par année horairePallazuit Energie Ouest Suisse (EOS) 3 mois par année horaireLötschen EnAlpin AG - -Orsières-Niollet Forces Motrices d’Orsières (FMO) toute l’année journalièreGondo-Gabi-Tannuwald Energie Ouest Suisse (EOS) non pertinentes

Lorsque des données horaires étaient à disposition, elles ont pu être utilisées telles quellesdans les modèles, qu’il s’agisse de données de commande (turbinage, pompage) ou de contrôle(débit capté). Lorsque des données journalières étaient disponibles, des reconstitutionshoraires ont été effectuées pour les données de commande mais pas pour les données decontrôle. En l’absence de données, des reconstitutions horaires ont été réalisées sur labase de l’analyse du cycle de remplissage annuel de la retenue. Les paragraphes suivantsdécrivent brièvement chacun des 10 aménagements sélectionnés et les données utilisées dansla modélisation.

5.4.2 Aménagement Grande Dixence

L’aménagement de Grande Dixence est le plus important du bassin versant (figure 5.16). Ilcollecte les eaux de la Viège à l’Est, des Borgnes, de la Dixence et de la Printze à l’Ouest. Ilse compose d’un réservoir principal (Grande Dixence, 400Miom3), d’un réservoir secondaire(Cleuson, 20Miom3), de 4 bassins de compensation de pompage (Zmutt, Stafel, Ferpècleet Arolla) et d’un bassin de compensation de turbinage (Fionnay). Le réservoir principalest essentiellement alimenté par le système de collecteurs faisant la liaison avec les autressous-bassins versants drainés par l’aménagement à l’altitude de 2400m s.m. environ. Leseaux glaciaires des bassins de la région de Findelen sont acheminées par gravité à Hohwängoù le Grand Collecteur les transfère vers le bassin versant des Borgnes. A cet endroit setrouve un limitateur de débit d’une capacité de 55m3/s. Les eaux de Schali-Bis et Gornera

145

sont acheminées vers Zmutt où elles sont pompées dans le Grand Collecteur (17.8m3/s) àl’amont de Hohwäng, tout comme les eaux collectées à Stafel (9.9m3/s). Les eaux collectées àFerpècle sont pompées vers Arolla (8.4m3/s) où elles s’ajoutent aux eaux d’Arolla pompéesvers le Grand Collecteur (12.6m3/s). Les eaux des régions de Bertol et Vouasson sontacheminées par gravité vers le Grand Collecteur et la retenue respectivement. La capacitétotale du Grand Collecteur à Cheilon (amont de Grande Dixence) est de 85m3/s. Les eaux dela région de Cleuson sont collectées dans la retenue puis soit pompées vers Grande Dixence(2m3/s), soit directement turbinées à la centrale de Chandoline (10.2m3/s). Finalement, laproduction hydroélectrique est également effectuée à partir de la retenue de Grande Dixencedans les centrales de Fionnay et Nendaz (45m3/s) ou Bieudron (75m3/s, actuellement enréparation).

Fig. 5.16: Situation de l’aménagement Grande Dixence.

Données pour la modélisation

De nombreuses données horaires ont été mises à disposition pour le développement desmodèles de simulation. Les mesures horaires du débit capté ont été utilisées pour le calageet la validation du modèle hydrologique. Les mesures horaires de turbinage (centrales deFionnay, Nendaz et Bieudron) ont également été utilisées pour le calage et la validation dessous-bassins versants perturbés (Branson, Porte du Scex), tandis que les mesures horairesde pompage à Stafel, Ferpècle et Arolla ont pu être utilisées directement dans le modèle desimulation.

Les mesures horaires des niveaux des retenues Grande Dixence, et Zmutt ont été utiliséesindirectement en se basant sur l’équation de bilan de la retenue (équ. 5.2), où V (z) est levolume d’eau dans la retenue, Qin et Qout les débits entrant, respectivement sortant de laretenue.

146

dV (z)dt

= Qin −Qout (5.2)

V (z) se calcule par l’équation 5.3, où S(z) est la surface du plan d’eau à la cote z. Ce calculs’effectue sur la base de la relation niveau-volume de la retenue propre à la retenue étudiée,où zmin et zmax correspondent au niveaux minimum et maximum de la retenue.

V (z) =∫ zmax

zmin

S(z) · dz (5.3)

Le débit entrant dans la retenue de Zmutt a ainsi été déduit à partir des mesures de niveauet de débit sortant.

Le débit entrant dans la retenue de Cleuson, ainsi que le débit pompé vers Grande Dixence,ont été grossièrement estimés sur la base du niveau de la retenue de Cleuson, uniquementdisponible du 1eraoût au 31 octobre de chaque année. La reconstitution pour l’année 2000du niveau de Cleuson est présentée en figure 5.17. Les valeurs de débit entrant simulées sontune moyenne mobile centrée sur 12 heures.

Fig. 5.17: Reconstitution des séries horaires de débit entrant dans la retenue de Cleuson pourl’année 2000.

Le débit turbiné à Bieudron (horaire et toute l’année) a été ensuite reconstitué de la mêmemanière en fonction du niveau de Grande Dixence, du débit entrant (mesure à Cheilon),du débit turbiné vers Nendaz et du débit pompé depuis Cleuson (estimé précédemment).Les données reconstituées sont présentées à la figure 5.18. La désagrégation horaire aété déterminée a priori sur la base des statistiques (figure 5.4) et fixée selon l’horairesuivant :

– pas de turbinage le week end– si turbinage à 25m3/s : de 10 h à 12 h– si turbinage à 50m3/s : de 08 h à 18 h– si turbinage à 75m3/s : de 06 h à 20 h

5.4.3 Aménagement Emosson

L’aménagement d’Emosson (incluant celui de Vernayaz) se situe entre la Suisse et la France(figure 5.19) et capte les eaux de plusieurs bassins versants (Dranse de Ferret, Trient)et celui de l’Arve qui n’est pas un affluent du Rhône à l’amont du Léman mais à l’aval

147

Fig. 5.18: Reconstitution des séries horaires de débit turbiné à Bieudron pour l’année 2000.

de ce dernier. Il se compose de la retenue d’Emosson (229Miom3), de Vieux Emosson(Vernayaz, 13Miom3) qui fonctionne comme prise d’eau et des bassins de compensationdes Esserts, du Châtelard, de Châtelard CFF (Vernayaz), et des Marécottes (Vernayaz).Les eaux de la Dranse sont captées dans la région de La Fouly et de Saleinaz et sontacheminées par le Collecteur Est vers les Esserts d’où elles sont soit turbinées au fil del’eau (Châtelard, 15m3/s) ou pompées vers Emosson (18m3/s). Les eaux de l’Arve sontacheminées par gravité, puis siphonnées directement vers Emosson (12m3/s), les eaux duTriège sont pompées vers Emosson (Vernayaz, 1.8m3/s) et les eaux du Trient sont récupéréesà Vallorcine pour être turbinées à la Bâtiaz (29m3/s). Bien entendu, la retenue d’Emossonest également exploitée à Vallorcine (27m3/s) sur le palier supérieur. Un deuxième réseaude turbinage est exploité par l’aménagement de Vernayaz avec un palier supérieur Emosson-Châtelard CFF (18m3/s) et le palier inférieur à Vernayaz (17.4m3/s) dans lequel peuventêtre ajoutées les eaux captées à Vallorcine ou aux Marécottes. Les subtilités d’exploitationne sont pas décrites ici car elles ne jouent aucun rôle dans le cadre de la protection contreles crues.

De nombreuses données à fréquence journalière ont été fournies par l’exploitant de l’aména-gement Emosson, tandis qu’aucune donnée de l’aménagement Vernayaz n’était disponible.Les débits captés journaliers moyens ont ainsi pu être utilisés pour le calage des sous-bassinsversants (La Fouly, Saleina, Esserts, Châtelard) et les débits pompés ont été utilisés à lafréquence d’origine (journalière) et les débits turbinés ont été désagrégés en séries horairespour être introduits dans le modèle hydrologique. La désagrégation horaire est présentée àla figure 5.20 et a été effectuée comme suit :

– selon le volume turbiné journalier moyen, choix des heures de début et fin du turbinage– heure de début de turbinage typique : 07 h– heure de fin de turbinage selon volume journalier et débit turbiné constant– si le volume journalier est inférieur à l’équivalent de 6 heures d’exploitation, le débit

considéré est diminué de moitié et la durée d’exploitation doublée– si le volume journalier correspond à plus de 17 heures de turbinage, l’heure de début est

avancée en conséquence et l’heure de fin est 24 h

Le débit turbiné à Vernayaz, dont aucune donnée n’était disponible, a été reconstitué selonla méthode expliquée au paragraphe Grande Dixence par calage du niveau d’Emosson.

148

Fig. 5.19: Situation des aménagements Emosson et Salanfe.

Fig. 5.20: Désagrégation horaire du débit turbiné à la Bâtiaz (année 2000).

149

5.4.4 Aménagement Mauvoisin

L’aménagement de Mauvoisin (figure 5.21) a détenu le record du plus grand barrage voûtedu monde avec sa hauteur de 250mètres. La retenue ainsi constituée a un volume utile de205Miom3 et est alimentée par trois collecteurs : le collecteur Sud qui achemine les eauxdu glacier d’Otemma vers la centrale au fil de l’eau de Chanrion (10m3/s) et les rejettedirectement dans le lac, le collecteur de Corbassière à l’Ouest (10m3/s) et le collecteur deLouvie à l’Est (10m3/s). Le palier supérieur est turbiné à Fionnay (34.5m3/s) où se trouveencore une prise d’eau sur la Dranse de Bagnes, et le palier inférieur à Riddes (27.5m3/s). AFionnay se trouve également un bassin de compensation permettant d’absorber la différencede débit équipé entre les deux paliers.

Fig. 5.21: Situation des aménagements Mauvoisin et Pallazuit.

Toutes les données liées à cet aménagement étaient disponibles à la fréquence journalière.Les débits entrants dans la retenue ont permis le calage des sous-bassins versants, tandisque les débits turbinés à Fionnay et Riddes ont été désagrégés en séries horaires selon laméthode expliquée au paragraphe Emosson.

5.4.5 Aménagement Mattmark

L’aménagement de Mattmark est composé d’une retenue de 100 mio m3 (Mattmark) et d’unbassin de compensation à Zermeiggern (figure 5.22). Le collecteur Est achemine les eaux dela région du Furggbach (10m3/s) et le collecteur Ouest les eaux de l’Allalin (6.5m3/s) vers lelac de Mattmark. Le palier supérieur se trouve entre Mattmark et Zermeiggern et est équipépour le turbinage (19m3/s) et le pompage (9m3/s). Cela signifie que la même conduite estemployée et que les opérations ne peuvent être menées simultanément. Le palier inférieur

150

entre Zermeiggern et Stalden est équipé pour le turbinage uniquement (20m3/s) et les eauxcaptées à Zermeiggern et dans la région du Riedbach y sont ajoutées. Il est utile de rappelerque cet aménagement dispose depuis l’année 1999 d’un volume libre limité par un déversoirlatéral pour la protection contre les crues (Sander and Haefliger, 2002).

Fig. 5.22: Situation de l’aménagement de Mattmark.

Toutes les données liées à cet aménagement étaient également disponibles à la fréquencejournalière. Les débits entrant dans la retenue ont ainsi permis le calage des sous-bassinsversants, tandis que les débits turbinés à Zermeiggern et Stalden ainsi que les débitspompés vers Mattmark ont été désagrégés en séries horaires selon la méthode expliquéeau paragraphe Emosson et introduits dans le modèle hydrologique.

5.4.6 Aménagement Gougra

L’aménagement de la Gougra est relativement complexe (figure 5.23). Il se compose de saretenue principale (Moiry, 76Miom3), d’une retenue d’adduction (Turtmann, 0.7Miom3)et de deux bassins de compensation (Mottec et Vissoie). Les eaux de la Turtmänna etde ses affluents sont captées à Turtmann et siphonées (6m3/s) ou pompées (3m3/s) versMoiry selon le niveau relatif des deux retenues. Elles peuvent également être turbinées àMottec (4.3m3/s). Les eaux de la Navisence sont captées à Moiry ou pompées depuis lecollecteur Ouest (Lona, 0.4m3/s). Elles peuvent également être pompées depuis Mottec(3m3/s, même machine que depuis Turtmann) où se trouve un captage. La conduite depompage est indépendante des conduites de turbinage ou siphonage. Le palier supérieur estdonc composé du turbinage depuis Moiry (12.9m3/s) ou depuis Turtmann (4.3m3/s) versMottec. Le deuxième palier va de Mottec à Vissoie (12.9m3/s) où se trouve aussi un captageet le dernier palier va de Vissoie à Chippis (10m3/s).

151

Fig. 5.23: Situation des aménagements Gougra, Lienne et Lötschen.

Toutes les données liées à l’aménagement Gougra étaient disponibles à la fréquence journa-lière. A nouveau, les données relatives aux débits entrants ou captés ont été utilisées tellesquelles pour le calage et la validation tandis que les mesures de débit turbiné ou pompé ontété désagrégées en séries horaires selon la méthode présentée au paragraphe Emosson.

5.4.7 Aménagement Salanfe

L’aménagement de Salanfe (figure 5.19) est caractérisé par sa grande retenue (40Miom3)pour un petit bassin versant (31 km2). Une partie de ses eaux provient du bassin versant dela Vièze à Clusanfe où des pompes sont installées (2.6m3/s). L’aménagement ne comportequ’un palier à Miéville équipé pour un débit de 5.8m3/s.

Seules les données de niveau de la retenue et de débit turbiné étaient disponibles à fréquencehoraire mais pendant 3 mois par année. Il a fallu reconstituer les années entières en estimantle débit entrant par simulation puis en ajustant la production pour obtenir un cycle annuelde remplissage du réservoir plausible. Il y a par conséquent une forte incertitude sur le débitentrant et turbiné à Salanfe, mais il s’agit d’une très faible proportion du débit équipé totaldu modèle.

5.4.8 Aménagement Pallazuit

L’aménagement de Pallazuit (figure 5.21) se situe vers le col du Grand-St-Bernard bienconnu pour son hospice et son climat particulièrement rude. Il se compose d’une retenue de

152

20Miom3, d’une galerie d’adduction en rive droite d’une capacité de 4.5m3/s (Valsorey) etd’un palier jusqu’au bassin de compensation de Pallazuit équipé pour un débit de 10m3/s.Dès cet endroit, les eaux appartiennent à l’aménagement d’Orsières-Niollet et sont soitturbinées (4m3/s) à Orsières, soit directement déversées dans la Dranse d’Entremont.

La situation au niveau des données disponibles est comparable à celle de l’aménagement deSalanfe et les mêmes méthodes de reconstitution des apports et de la production ont étéutilisées. Pour les périodes pendant lesquelles les données de production étaient disponibles,ces dernières ont été introduites directement dans le modèle hydrologique.

5.4.9 Aménagement Lienne

L’aménagement de la Lienne est un aménagement à 2 paliers, composé d’une retenueprincipale (Zeuzier, 50Miom3) et d’un bassin de compensation à Croix (figure 5.23). Laretenue est remplie par son bassin versant naturel et une adduction en rive gauche (Vatseret,0.85m3/s). Le palier supérieur est équipé avec un débit de 9m3/s et le palier inférieur(centrale de St-Léonard) à 10m3/s, et un captage est installé au bassin de compensation deCroix.

Aucune donnée n’était à disposition pour cet aménagement. Le modèle hydrologiquerégionalisé a été utilisé pour simuler les apports et une série horaire de turbinage à Croix aété reconstituée de manière à produire un cycle de remplissage annuel plausible de la retenuede Zeuzier. A nouveau, il s’agit d’un aménagement n’ayant que peu d’influence sur le débitdans le Rhône et cette situation n’est par conséquent pas critique pour la modélisation.

5.4.10 Aménagement Lötschen

L’aménagement de Lötschen (figure 5.23) se situe le long de la Lonza, en rive droite duRhône. Il se compose d’un petit réservoir de 1.75Miom3 et d’un palier unique à la centralede Steg, équipée pour un débit de 21.3m3/s. Il produit donc essentiellement de l’électricitéau fil de l’eau sauf en hiver où il parvient à faire de l’accumulation hebdomadaire.

Malheureusement, aucune donnée n’était à disposition pour effectuer de la simulationcontinue. Son bassin versant a été calé sur les mesures de la station de Blatten située àquelques kilomètres en amont de la retenue. La modélisation du turbinage a été réalisée parrégulation automatique selon le niveau de la retenue. Cela signifie que si la retenue atteintun niveau haut déterminé, le turbinage s’enclenche. Au moment ou la retenue atteint unniveau bas déterminé, le turbinage s’arrête. Ce modèle n’est pas très bien ajusté en hivermais est très satisfaisant en été où le turbinage s’effectue presque tout au long de la journéeet de la nuit. Pour les scénarios de crue 1993 et 2000 présentés au chapitres suivants, desmesures horaires (débit entrant, niveau de la retenue, turbinage, débit aux ouvrages) surune période de 3 jours ont pu être utilisées et permettent une estimation précise de cessituations particulières.

5.4.11 Aménagement Bitsch

L’aménagement de Bitsch se trouve juste à l’aval du plus grand glacier des Alpes, leglacier d’Aletsch (figure 5.23). Son bassin versant, essentiellement glaciaire d’une surfacede 198 km2, lui assure un remplissage estival constant mais lui empêche presque tout apport

153

hivernal. La retenue de Gebidem dispose d’un volume utile de 8.7Miom3 et son unique palierse compose de trois groupes d’une capacité totale de 55m3/s. En hiver, l’aménagement neproduit que l’équivalent de son volume utile, tandis que le reste de l’année son mode deproduction oscille entre accumulation hebdomadaire (printemps), journalière (début d’étéet fin d’automne) et au fil de l’eau (été et début d’automne).

Seules des données horaires de niveau et de débit turbiné sur une période de 3 mois parannée étaient disponibles. Par contre, les mesures de débit entrant dans la retenue sontsimilaires aux mesures de la station de Blatten sur la Massa qui ont donc été exploitéespour caler et valider le sous-bassin versant.

La production hivernale a été déduite à partir des mesures du débit du Rhône à Brig, dontla station est située juste à l’aval du rejet de la centrale de Bitsch. Le débit équipé étanttrès important, le turbinage peut être filtré par une méthode de lissage. La procédure dereconstitution du turbinage horaire annuel a été effectuée comme suit (figure 5.24) :

– données : débit entrant dans la retenue (débit de la Massa à Blatten), débit du Rhône àBrig

– moyenne mobile sur 24 heures du débit à Brigue– si la différence entre la moyenne mobile et la mesure est supérieure à une valeur limite,

alors le turbinage est activé sur le groupe 1 (25m3/s)– dès que la différence précitée est inférieure à la valeur limite, le turbinage est arrêté– le turbinage ainsi estimé est introduit dans le modèle hydrologique– le complément de turbinage (groupes 2 et 3, 30m3/s) est calculé par régulation automa-

tique sur le niveau de Gebidem

5.5 Générateur stochastique de turbinage

Ce chapitre présente brièvement la méthodologie utilisée pour le développement d’ungénérateur stochastique de production hydroélectrique. La méthodologie suit la propositionde Schäfli (2005) développée dans le cadre d’une analyse de l’aménagement de Mauvoisin,également considéré dans ce travail. Il s’agissait pour l’auteur d’estimer sa productionjournalière sur une période de 100 ans en vue d’analyser les impacts des changementsclimatiques sur la production d’hydroélectricité en Suisse. Les bases méthodologiquescomplètes du générateur stochastique ne sont pas explicitées dans ce chapitre mais pourrontêtre consultées dans Schäfli (2005).

Le générateur développé dans le cadre de cette recherche peut raisonnablement s’appuyersur cette méthodologie, car le fonctionnement des aménagements à considérer est similaire(ouvrages à accumulation annuelle). Les principales similarités et différences entre la métho-dologie originale et celle développée ici (méthode étendue) sont exposées ci-dessous :

– même type d’ouvrage– deux saisons considérées (remplissage et vidange)– début des saisons légèrement différents– trois modèles hebdomadaires pour la méthode étendue (lundi au vendredi, samedi,

dimanche) et non deux (lundi au vendredi, samedi et dimanche)– après la génération de séries journalières, désagrégation horaire.

154

Fig. 5.24: Reconstitution du débit turbiné horaire du groupe 1 à Bitsch pendant l’année 2000 : lesséquences de turbinage sont visibles surtout pendant l’hiver sur les mesures à Brigue.

155

5.5.1 Génération de séries journalières

Concept du générateur stochastique

Le concept du générateur stochastique est le suivant : sur la base de données de productionfournies sur une période suffisamment longue, il est possible de modéliser le comportementtypique de production d’un aménagement hydroélectrique à accumulation alpin. Le géné-rateur produit alors une production journalière qui est ensuite désagrégée à une fréquencehoraire.

Il s’agit d’abord, pour une période s donnée, de considérer la production journalière rn

du jour n comme une production moyenne Ms et un écart θs dont il faudra modéliser lecomportement statistique (équ. 5.4) :

rn = Ms + θs (5.4)

En pratique, les valeurs de production moyenne calculées, ainsi que les résidus, sont desestimateurs de la production réelle. Afin d’optimiser la performance du générateur, il estimportant de définir les différentes périodes à partir desquelles seront tirées les modèlesstatistiques de production journalière et d’écart.

Choix des paramètres du modèle de génération stochastique de turbinage

Le comportement annuel d’un aménagement hydroélectrique à accumulation dans les Alpesse caractérise par deux saisons d’exploitation différentes. Le première est la saison deremplissage de la retenue qui débute au printemps, pendant laquelle la production est moinsélevée que les apports, ce qui permet l’augmentation du niveau du lac. La période de vidangedébute en fin d’été et se caractérise par une production supérieure aux apports, effectuéede manière à pouvoir exploiter le volume disponible tout au long de l’hiver. Il s’agit de lasaison pendant laquelle la demande est plus élevée (chauffage) et les prix sont égalementplus élevés. La figure 5.25 illustre ce comportement mesuré sur un aménagement en Valais.Il est peut-être judicieux de rappeler ici que les valeurs sont normalisées afin de masquer leschiffres réels pour préserver leur confidentialité.

Sur la base de cette analyse, on remarque que le niveau minimal de la retenue est atteintautour du 1ermai de chaque année, tandis que le niveau maximum est atteint en septembre.On remarque également que la production est pratiquement égale aux apports au moisde septembre pour éviter un déversement de la retenue. Cette production n’est donc plusdictée par le marché mais plutôt par l’hydrologie et ne doit donc pas être considérée dansla période de remplissage. Sur cette base, les limites des périodes ont été définies, tout enétant arrondies au premier jour de la semaine suivante dans le calcul des moyennes :

– période de remplissage : 1ermai au 31 août– période de vidange : 1erseptembre au 30 avril

Sur la base de l’analyse de la production journalière des années 1989-1999 de 5 aména-gements (figure 5.26), le comportement hebdomadaire moyen peut être aisément découpéen 3 périodes : lundi-vendredi (semaine), samedi et dimanche. La différence de productionmoyenne entre les deux saisons d’exploitation est également remarquable. Il devient doncnécessaire de diviser l’année en fonction de deux saisons d’exploitation et trois catégories dejours (semaine, samedi, dimanche), pour un total de 6 périodes. L’estimateur de la produc-tion moyenne Ms aura donc pour chaque aménagement 6 valeurs Ms,j ou s ε (rempl., vid.)et j ε (sem, sa, di).

156

Fig. 5.25: Apports et production journaliers moyens (moyenne mobile sur 10 heures) et niveaud’une retenue alpine typique, période de 1995 à 1999.

157

Fig. 5.26: Production journalière normalisée de 5 aménagements hydroélectriques à accumulationen fonction de la saison d’exploitation et du jour de la semaine.

Estimation de l’écart

Comme la production journalière moyenne a été évaluée sur 6 périodes dans l’année, ilest également nécessaire de paramétrer le modèle d’écart selon ces 6 périodes différentes.Pour chacune des périodes choisies, les écarts observés doivent d’abord être calculés avecl’équation 5.3. En les considérant comme des variables aléatoires, leur distribution statistiquepeut alors être approchée par une fonction Log-Weibull de type II exprimée sous la formede l’équation 5.5 (Schäfli, 2005). L’avantage de cette fonction réside dans le fait qu’elle évitela génération d’écarts absolus infiniment grands.

H(θs) = 1− exp {−[−ln(1− θs)/as]bs} où 0 < θ < 1 (5.5)

H(θ) est la fonction de distribution de l’écart θs, as et bs étant les paramètres de la fonctionpour la période s.

La figure 5.27 présente la fonction de distribution des écarts normalisés et son estimateurpour un aménagement à accumulation en période de vidange et en situation semaine, samediet dimanche. Les corrélations obtenues sont très élevées (r2 > 0.997).

Pour générer une valeur de production journalière QTs, il suffit à présent de générer unnombre aléatoire X compris entre 0 et 1 selon une loi uniforme pour en calculer sa nouvellevaleur sur une loi Log-Weibull II paramétrée selon la période considéré en appliquantl’équation 5.6 :

θs = 1− exp {−as · [−ln(1−X)]1/bs} (5.6)

Cet écart normalisé θs doit enfin être redimensionné pour donner la production journalièremoyenne estimée.

Contraintes techniques

En situation particulière, il est possible que le débit journalier proposé par le générateurstochastique ne soit pas compatible avec les capacités techniques de l’aménagement. Pre-mièrement, en situation de lac vide au printemps, la production sera limitée à la quantitéd’eau à disposition. A l’inverse, en situation de lac plein, celle-ci sera effectuée au fil del’eau pour éviter tout déversement intempestif. Ces contraintes doivent donc être prises en

158

Fig. 5.27: Comparaison entre écarts normalisés mesurés et estimés pour la production en périodede vidange en fonction des jours semaine, samedi et dimanche.

compte dans la modélisation par l’ajout d’une régulation telle qu’expliquée dans la sectionprécédente imposant des règles d’exploitation strictes à lac plein ou lac vide.

5.5.2 Désagrégation en séries horaires

Il est également possible de générer stochastiquement des séries horaires de turbinage à partirde séries mesurées pour en tirer la loi statistique. Une approche plus simple a toutefois étéutilisée par la définition d’un schéma type de turbinage en fonction du débit journaliergénéré.

Analyse de la production horaire d’un aménagement hydroélectrique

5 années de mesures de production horaire ont été analysées. Le débit journalier mesuré aainsi été divisé en 5 classes régulières de 20% du débit équipé et pour chacune d’entre ellesun classement de l’heure de début de turbinage et de la durée du turbinage a été effectué.Les résultats partiels de l’analyse sont présentés à la figure 5.28. Ils présentent les horairesmoyens de turbinage en fonction de la classe de production (% du débit équipé). hini estl’heure de début de turbinage et Nb est le nombre d’heures de turbinage par jour. Les classesde 60% à 80% du débit équipé ne sont pas présentées car le turbinage s’effectue alors 24heures sur 24.

L’analyse de la figure 5.28 montre que selon la classe de production, l’heure de début deturbinage oscille entre 05 h et 07 h et les durées entre 13 et 20 heures. Les règles suivantesont finalement été déterminées pour le générateur stochastique :

– 0-20% de production : pas de turbinage– 20-40% de production : début à 06 h, durée 18 heures, QTs · 24/18– 40-60% de production : début à 05 h, durée 19 heures, QTs · 24/19– 60-100% de production : turbinage de 00 h à 24 h, QTs

Pour la classe 0-20%, l’absence de turbinage évite l’introduction de signaux trop violentsdans le modèle hydrologique. Il est vrai que parfois la production horaire observée s’établit

159

Fig. 5.28: Horaires typiques de turbinage, moyennes sur 5 ans. hini : heure de début de turbinage ;Nb : nombre d’heures de turbinage par jour.

selon deux périodes (matinée, soirée), mais ce phénomène a été négligé dans le générateurstochastique.

5.6 Commentaires

Dans ce chapitre ont été définies les bases de modélisation des aménagements hydroélec-triques à accumulation alpins. L’approche utilisée a consisté en l’utilisation du maximumde données à disposition et en la reconstitution des manquants par diverses approches. Lesnombreuses simplifications apportées au problème ont permis de modéliser, même parfoisapproximativement, 10 aménagements relativement complexes du bassin versant. Il est cer-tain que le gain apporté par cet élément compense l’incertitude due aux simplifications.Ainsi, la désagrégation horaire de mesures journalières a permis d’éviter des trop grandeserreurs en phase de calage et de validation, tandis que l’analyse statistique d’une dizained’années de mesures de production a permis le développement d’un générateur stochastiquepour compenser le déficit de données en phase de prévision.

Il est évident que les profondes mutations futures du marché de l’énergie et de l’électricitéen particulier auront une influence sur le comportement des exploitants et que les modèlesdéveloppés ici devront être remis au goût du jour. Toutefois, le marché n’a pas la compétenced’influencer l’heure des repas, les congés hebdomadaires dans l’industrie et encore moinsle cycle hydrologique naturel, qui explique une part importante du cycle de productionhydroélectrique. De plus, malgré le passage des programmes horaires aux programmes auquart d’heure en 2006, le coût d’enclenchement et de déclenchement des turbines ainsique les limites des systèmes hydrauliques (coûts de bélier, chambre d’équilibre) limiterontéconomiquement leur flexibilité. Néanmoins, les nouveaux projets d’aménagements depompage-turbinage ont précisément pour objectif d’augmenter la flexibilité de la production

160

d’hydroélectricité et de réduire ses contraintes techniques. Il conviendra donc de surveiller lesnouveaux horaires de production pour affiner le générateur stochastique de turbinage.

161

162

6 Modèle d’optimisation

6.1 Remarques préliminaires

Dans le cadre du projet MINERVE, le modèle d’aide à la décision représente pour lesresponsables politiques la cerise sur le gâteau : il constitue en effet le dernier niveaud’information devant permettre la prise de décisions importantes lors des crues. Ce modèledoit en outre s’appuyer sur tous les développements effectués dans le projet, qu’ils portentsur l’acquisition de données en temps réel, la spatialisation des variables météorologiques,la modélisation hydrologique et hydraulique.

Pourtant, la cerise a dû être mangée bien avant l’heure du dessert, puisque pour des raisonsd’organisation il était impossible d’attendre les résultats des autres développements pourproduire un outil d’optimisation des opérations sur les aménagements hydroélectriques. Leprocessus de création de cet outil s’est donc fortement appuyé sur les projections et lesformats des résultats futurs fournis par le modèle hydrologique.

Un modèle d’aide à la décision pour l’opération préventive des aménagements hydroélec-triques lors des crues a donc été développé pour le bassin versant du Rhône à l’amont duLéman (Jordan, 2005; Jordan et al., 2005b,a). Cela signifie que ce modèle n’est pas universelmais qu’il est au contraire particulièrement bien adapté à la région du Valais. Cependant,tout espoir de déploiement d’un tel système dans d’autres régions est bien permis, puisqueson fonctionnement pour des bassins versants sur lesquels sont situés des aménagements àaccumulation disposés en parallèle peut être généralisé.

Ce chapitre introduit en premier lieu les bases nécessaires à la compréhension des objectifset des contraintes de l’optimisation, qui sont en quelque sorte la synthèse des informationsprésentées au chapitre 5 ainsi que quelques éléments de protection contre les crues. Il éclairciten deuxième lieu le concept général de la fonction objectif et les moyens opérationnelspour l’atteindre. La méthode de calcul de l’optimisation de l’exploitation d’une retenue(optimisation locale) est ensuite présentée avant d’enchaîner sur sa généralisation à unsystème composé de plusieurs réservoirs d’accumulation en parallèle (optimisation globale).Enfin, l’analyse et la performance potentielle de l’optimisation d’un système fictif composéde multiples aménagements est présentée.

6.2 Objectifs et contraintes de l’optimisation

Avant d’entrer dans les détails de la formalisation du problème, rappelons que lors des crues,l’objectif principal des responsables de la sécurité civile est de limiter les pertes humaineset les dégâts matériels. Dans le cas du bassin versant du Rhône à l’amont du Léman, lesnombreux aménagements hydroélectriques représentent une chance à cet égard et peuventservir de levier efficace pour le contrôle des débits dans le fleuve (Jordan et al., 2004).

163

Les aménagements hydroélectriques à accumulation ont la possibilité de stocker un certainvolume d’eau durant les crues grâce au volume libre du réservoir. Ce volume stocké n’iradonc pas couler dans le cours d’eau aval pendant la crue et il convient dès lors de maximiserle volume de stockage au moment opportun pour minimiser le volume d’écoulement. Parailleurs, tout volume d’eau lâché vers l’aval par saturation ou fermeture des captages, pardépassement des capacités de pompage, par déversement par-dessus la digue ou par lesvannes de vidange coulera immanquablement dans le cours d’eau aval, éventuellement auplus mauvais moment. Il convient donc de minimiser les lâchers d’eau, en particulier pendantla pointe de la crue. Par extension de la réflexion précédente, il paraît nécessaire, pourmaximiser l’effet de laminage produit par les retenues d’accumulation, que ces dernières nese trouvent pas en situation d’application du règlement d’urgence. En effet, le règlementd’urgence, qui s’applique lorsque le niveau de la retenue augmente dangereusement etrisque de compromettre la sécurité de l’ouvrage de rétention, donne des recommandationsimpératives et il est alors nécessaire d’arrêter les pompages, de fermer les captages, deturbiner et finalement d’ouvrir les vannes de vidange. Ces manoeuvres ont pour effet deslâchers d’eau pendant la pointe de la crue en différents endroits du réseau tels les rétentionspour pompage, les captages, les restitutions des turbines et la digue elle-même. Par uneopération préventive, il est possible de libérer du volume de rétention avant la crue pourl’utiliser pendant. Cette opération est réussie si, à la fin de la crue, le niveau de la retenueest aussi haut que possible sans avoir conduit à l’application du règlement d’urgence del’ouvrage.

Finalement, rappelons que l’objectif de l’optimisation est la minimisation du coût des dégâtsdus à la crue. Ceci peut être obtenu par la réduction du débit de pointe de crue, précisémentau travers du laminage des crues par les aménagements hydroélectriques. Dans le cas d’unecapacité de stockage probablement insuffisante, le turbinage préventif peut être effectué,mais il doit s’arrêter avant la pointe de l’hydrogramme de crue afin justement de ne pasaugmenter le débit de pointe à ce moment crucial.

Les grands principes énoncés ici se résument comme ci-dessous et peuvent être considéréscomme des objectifs partiels de l’optimisation :

– maximisation de l’effet de laminage et donc du volume capté– minimisation des lâchers d’eau– en cas de capacité de stockage insuffisante, opérations préventives (turbinage et/ou

vidange) effectuées avant la pointe de la crue– effectuer les opérations préventives de manière à ne pas être contraint d’appliquer le

règlement d’urgence– réaliser l’opération la plus économique possible– objectif final de l’optimisation : minimisation du coût des dégâts et réduction du débit de

pointe de crue

Avant de détailler la méthode d’optimisation sont rappelés ici les principales contraintes duproblème d’optimisation :

– équation de bilan de la retenue et limites physiques des ouvrages de rétention– caractéristiques techniques des ouvrages (prises d’eau, collecteurs, turbines, pompes,

ouvrages d’évacuation)– règlements d’urgence– caractéristiques de l’écoulement dans les cours d’eau– topologie du réseau hydrographique incluant les aménagements hydroélectriques

164

6.3 Optimisation de la gestion d’un aménagementhydroélectrique lors des crues

Avant de calculer les opérations préventives optimales pour minimiser les dégâts dans le coursd’eau aval, il est nécessaire de déterminer quelles devraient être les opérations préventiveseffectuées indépendamment du cours d’eau aval par un aménagement hydroélectrique. Cesopérations peuvent être déduites d’un calcul de bilan volumétrique mettant en relation levolume entrant dans la retenue, le volume disponible et le volume à évacuer de manièrepréventive. Cette méthode de calcul appelée ici optimisation locale est présentée dans cesous-chapitre.

6.3.1 Estimation du volume entrant dans une retenue

L’estimation du volume entrant dans une retenue ne peut s’effectuer que sur la base d’uneprévision de débit. Cette dernière peut être obtenue à partir d’un scénario hydrologique oud’un modèle de prévision, qu’il soit conceptuel, spatialement distribué ou de type stochas-tique. Dans le cadre du projet MINERVE, un modèle de prévision de débit déterministesemi-distribué a été développé et présenté au chapitre 4 (Hamdi et al., 2005b; Schäfli et al.,2005). Ce modèle servira donc de base à l’estimation du volume entrant. D’après ce modèle,il est possible d’obtenir une prévision de débit horaire à un horizon de 3 jours en tout pointdu système : à l’amont des captages et des retenues, mais également le long du Rhône.Cependant, afin de généraliser au mieux la méthode d’optimisation, la notion d’efficacitéE est introduite, qui représente le rapport entre un volume d’eau déterminé et le volumeruisselé total à l’exutoire du système. Soient Vi et Vtot les volumes ruisselés au point i et àl’exutoire du bassin versant, définis comme suit (équ. 6.1 et 6.2) :

Vi =∫ tf

t0Qi · dt (6.1)

Vtot =∫ tf

t0Qtot · dt (6.2)

où Qi et Qtot sont les débits à l’exutoire du sous-bassin versant i et du bassin versantrespectivement. Dans le cadre de ce travail, il s’agira en réalité de prévisions de débit. t0 ettf sont les bornes temporelles de l’intervalle d’optimisation. Ei représente donc une prévisiond’efficacité de ruissellement du sous-bassin versant i (équ. 6.3).

Ei =Vi

Vtot(6.3)

Comme il s’agit d’une méthode de bilan, il est possible de raisonner en valeurs moyennes surune période. Il est ainsi possible de calculer le coefficient de répartition spatiale des débitspour chaque sous-bassin versant i. Il correspond au rapport des débits spécifiques moyensqs et s’obtient comme suit (équ. 6.4) :

αi =qs,i

qs,tot(6.4)

avec :

165

qs,i =Vi

Si · (tf − t0)(6.5)

A partir des équations 6.3 et 6.4, l’efficacité Ei peut également s’exprimer par l’équation6.6 :

Ei = αi · Si

Stot(6.6)

L’efficacité calculée avec l’équation 6.6 représente le volume maximum parvenant à l’exutoired’un sous-bassin versant pendant une certaine durée. Cela ne représente pas encore levolume entrant dans la retenue et provenant de ce même sous-bassin versant. Pour un sous-bassin versant i indirect (dont les eaux ne s’écoulent pas naturellement dans la retenue), levolume dépend également de la capacité du captage i, éventuellement du pompage de i etdu collecteur à l’aval de i. Ainsi, il est indispensable de séparer les diverses contributionsen apports directs (eau arrivant naturellement dans la retenue), et apports indirects. Cesapports indirects peuvent donc eux-mêmes être limités par les capacités de pompage ou descollecteurs. Pour tenir compte de ces contingences, l’efficacité d’adduction d’une retenue j(Eadd,j) peut être calculée comme la somme des m contributions directes (indice d) et des ncontributions indirectes (indice c) limitées par les capacités des captages et des p collecteursou stations de pompage (indice k, équ. 6.7) :

Eadd,j =∑m

i=1 αi · Sd,i

Stot+

+∑p

k=1 min[∑n

i=1 min[αi · Sc,i

Stot; γc,i · Qc,i·βc,i·(tf−t0)

Vtot] ; γk · Qk·βk·(tf−t0)

Vtot

] (6.7)

où γi ε [0; 1] représente le taux de fonctionnement du captage ou du collecteur i, βi ε [0; 1]est un coefficient tenant compte de la forme de l’hydrogramme au captage et permettant decorriger le volume capté.

L’équation 6.7 constitue donc une approximation du volume entrant dans la retenue. Elleprésente l’avantage de fournir rapidement une valeur fiable pour la détermination desopérations préventives. Cette formule permet en outre l’analyse de scénarios d’abattementdes précipitations ou des volumes ruisselés qui peuvent être ajustés sur des volumesdéterminés. Notons enfin que si un modèle hydrologique permet de déterminer directementces volumes, il peut être inutile d’utiliser cette dernière formule.

6.3.2 Estimation du volume disponible dans une retenue

Il est prévu dans le cadre du projet MINERVE d’obtenir les niveaux des retenue en tempsréel. A partir de ces niveaux, il est possible d’obtenir le volume disponible par approximationde la relation niveau-volume disponible de la retenue par un polynôme du 3edegré. Soit ηj

le taux de remplissage de la retenue j défini par l’équation 6.8 :

ηj =Nj −Nmin,j

Nmax,j −Nmin,j(6.8)

166

où Nj est le niveau de la retenue j mesuré en t0, Nmin,j est le niveau minimum d’exploitationet Nmax,j le niveau maximum d’exploitation qui correspond en général au niveau de la crêtedu déversoir de l’évacuateur de crue. Le volume disponible se calcule ainsi (équ. 6.9) :

Vdisp,j = c0 + c1 · ηj + c2 · η2j + c3 · η3

j (6.9)

où c0, c1, c2 et c3 sont des coefficients d’ajustement d’un polynôme de 3edegré.

6.3.3 Optimisation locale - définition

Connaissant les volumes entrants prévu et disponible, il est désormais possible de déterminersi une opération préventive est nécessaire et de la quantifier. L’objectif de l’optimisationlocale consiste à déterminer l’opération préventive adaptée à un seul aménagement sansconsidérer son influence ni sur le cours d’eau aval, ni sur d’autres aménagements.

Les objectifs de gestion d’un aménagement pendant les crues sont pour l’exploitant contra-dictoires : il s’agit, en premier lieu, de remplir au maximum la retenue et de profiter ainsi decette eau "gratuitement" offerte. En second lieu, il convient d’éviter tout dégât à la digueet donc de respecter scrupuleusement le règlement d’urgence afin de ne pas trop remplir laretenue.

L’unique objectif du décideur responsable de la sécurité du bassin versant est de minimiserles dégâts dans les cours d’eau aval, donc de maximiser la rétention. Il s’agit alors pour ledécideur d’éviter absolument d’entrer en situation de règlement d’urgence, cette situationpouvant provoquer des gros débits à l’aval pendant la pointe de la crue. Il aura donc intérêtà proposer une vidange préventive de la retenue afin que celle-ci puisse stocker suffisammentde volume d’eau pendant la pointe de la crue.

En termes techniques, l’objectif de gestion satisfaisant ces trois contraintes peut se résumerainsi : atteindre le niveau maximum d’exploitation par le bas lors de la crue en ayantmaximisé l’adduction.

6.3.4 Maximisation de l’adduction

La capacité d’adduction dépend directement des caractéristiques de l’aménagement, commeexprimé dans l’équation 6.7. Afin de la maximiser, quelques règles générales peuvent êtresuivies :

1. stocker toute l’eau provenant des sous-bassins versants directs

2. collecter le maximum d’eau provenant des captages gravitaires des sous-bassinsversants indirects

3. collecter le maximum d’eau provenant des captages pompés des sous-bassins versantsindirects

On constate ainsi que pour maximiser la capacité d’adduction, il est important de fiabiliserles captages et de permettre leur fonctionnement pendant la pointe de la crue. Il estégalement important de pomper le maximum possible pendant la pointe : le débit pompéest ainsi directement soustrait à l’hydrogramme de crue aval.

167

Le problème de maximisation de l’adduction se transforme dans la méthode des bilansen un problème de maximisation de l’efficacité de stockage pendant une période donnée.Soit Eadd,max,j l’efficacité d’adduction maximale de l’aménagement j calculée à l’aide del’équation 6.7 et Eadd,j son efficacité réelle. On détermine les opérations préventives par larésolution du problème non-linéaire suivant :

max(Eadd,j) (6.10)

soumis aux contraintes :

Eadd,j ≤ Eadd,max,j

Eadd,j ≤ Estock,j

Estock,j = Edisp,j + ETP,j

(6.11)

Estock,j représente l’efficacité de rétention totale (stockage) de l’aménagement j, Edisp,j

l’efficacité de rétention du volume disponible de j et ETP,j l’efficacité de rétention desopérations préventives sur j.

Les équations 6.10 et 6.11 peuvent être commentées de la manière suivante : il s’agit demaximiser la rétention des eaux drainées par l’aménagement, sachant que cette rétentionne peut excéder la limite physique du système. La rétention ne peut également excéderle volume disponible dans la retenue additionné du volume gagné par turbinage préventif.Pour l’aménagement j, la solution est un vecteur dont les variables représentent les heuresd’enclenchement et de déclenchement du pompage, du turbinage et de la vidange de tousses ouvrages opérationnels.

6.3.5 Exemple de résolution du problème : l’aménagement de Mattmark

Les bases théoriques de l’optimisation de la gestion pour un objectif de protection local ontété établies. Il convient dès lors de résoudre le problème non-linéaire posé en y intégrant lescaractéristiques d’un aménagement. L’aménagement hydroélectrique de Mattmark constitueun exemple idéal puisqu’il se compose de deux collecteurs (Est et Ouest) menant les eauxà la retenue, d’un bassin de compensation collectant les eaux de plusieurs cours d’eau(Mattervispa, Feevispa, Schweibach et Riedbach) et duquel il est possible de pomper du débitvers la retenue en utilisant la même conduite forcée que le turbinage. La retenue de Mattmarkdispose en outre d’une vanne de fond, d’une vanne intermédiaire et d’un évacuateur de cruespassif. La figure 6.1 présente une description simplifiée de l’aménagement. Les donnéeshydrologiques du problème ont été tirées des mesures de la crue d’octobre 2000 et le calculdes opérations préventives sur un horizon de 72 heures est présenté à la figure 6.2 (fichierExcel). Le volume total ruisselé Vtot considéré à l’exutoire (lac Léman) est de 401.65Miom3

(cellule B9), alors que le niveau initial de la retenue a été défini à 2192.00m s.m. (cellule I3).Les surfaces des bassins versants Si sont données aux cellules E14 à E27. Les coefficientsαi de répartition spatiale des débits spécifiques ont été tirés des volumes ruisselés auxdifférents sous-bassins versants (cellules F14-F27). Les coefficients de pointe des captagesβc,i ont été admis identiques pour tous les captages avec une valeur de 0.6, calculée àpartir de comparaisons avec des simulations Routing System II (cellule J10). Les taux defonctionnement γi des captages, collecteurs, turbines et pompes ont été choisis à 1 (étatpleinement fonctionnel) (cellules I14-I27, R15-R27).

168

Fig. 6.1: Schéma de l’aménagement de Mattmark.

169

Fig. 6.2: Feuille de calcul Excel utilisée pour le calcul des opérations préventives de l’aménagementde Mattmark.

170

Les résultats du calcul sont les suivants :

– Edisp = 0.021 (D30), soit un volume disponible de 8.62Mio m3 dans la retenue (H4)– Eadd,max = 0.029 correspondant à 11.63Miom3 (C30 et E30)– Eadd,Zermeiggern = 0.0058 soit 2.33Mio m3 (F30)– ETP souhaité : 0.029− 0.021 = 0.08, soit VTP = 11.63− 8.62 = 3.01Miom3

– solution finale : Eadd = 0.027 et ETP = 0.005 soit 29.77 h de turbinage à 19m3/s (G30)et 42 h de pompage à 9m3/s (H30).

La priorité est donnée à la gestion des apports gravitaires et le pompage n’est considéréqu’une fois que tous les apports gravitaires sont stockés ou évacués préventivement. Dansl’exemple, VTP,gravitaire = 11.63−2.33−8.62 = 0.68Miom3. Avec une capacité de turbinageMattmark-Stalden de 19m3/s, il faut 9.76 h de turbinage (I30).

La durée de pompage se calcule ensuite comme suit : comme le turbinage et le pompagesont effectués sur la même conduite forcée, ils ne peuvent être accomplis simultanément. Letemps disponible étant de 72-9.76=62.24 h, il doit être partagé entre pompage et turbinage,dont le volume doit être équivalent. L’équation 6.12 peut être résolue :

QT · (62.24−QP ) = QP · TQP(6.12)

où QT est le débit turbiné, QP le débit pompé et TQPla durée de pompage. On obtient

TQP= 42.23h (H30), et donc TQT

= 72 − 42.23 = 29.77h (G30). Au final, 0.96Mio m3

sont déversés à Zermeiggern car ils ne peuvent être stockés dans les délais d’optimisation(M30). La retenue de Mattmark est au niveau normal d’exploitation à la fin de la crue et lerèglement d’urgence ne s’applique pas.

Toutes les stratégies de gestion des aménagements sont calculées selon cette méthode. Lapossibilité de calculer différentes stratégies de gestion selon des objectifs locaux différents aégalement été prévue : il suffit de modifier les priorités d’affectation des volumes. Dans le casde Grande Dixence par exemple, il est normalement prévu de stocker d’abord les apportsgravitaires des Borgnes, puis les apports gravitaires de la Vispa, puis enfin les apportspompés de la Vispa et de Cleuson. S’il est nécessaire de protéger la Vispa et que l’efficacité destockage nécessaire est insuffisante, il est possible de laisser déverser les captages gravitairesdes Borgnes afin de permettre aux apports provenant de la Vispa de remplir la retenueprincipale. Il est également possible de calculer l’utilisation d’une vidange hors règlementd’urgence, dans le cas où le turbinage préventif ne permettrait pas de libérer le volumenécessaire dans le laps de temps déterminé. On obtient ainsi les durées de pompage, deturbinage et de vidange optimales pour chaque aménagement.

6.4 Optimisation de la gestion de plusieurs aménagements lorsdes crues

6.4.1 Généralités

La gestion d’un aménagement hydroélectrique pendant les crues présente toujours un risquepour le cours d’eau aval. Une ouverture des vannes de vidange peut provoquer des dégâtsà l’aval si le cours d’eau n’a qu’une faible capacité hydraulique. Il en va de même pour undéversement par-dessus l’évacuateur de crues. En outre, le turbinage pendant la pointe de

171

la crue est susceptible de contribuer à l’augmentation du débit à l’aval de la restitutionet peut ainsi également provoquer des dégâts. La gestion des opérations préventives estsoumise aux mêmes risques de dégâts, en particulier dans le cas de la vidange préventive :il faut éviter de turbiner pendant la pointe de crue du cours d’eau situé à l’aval de larestitution et de devoir trop ouvrir les vannes d’une vidange. Ces réflexions mènent auconstat que pour protéger un cours d’eau à l’aval de plusieurs aménagements il n’est pastoujours opportun de turbiner ou vidanger aussi longtemps que le requiert la protectionlocale (optimisation locale). L’ordonnancement et le séquençage des opérations préventivessont dont primordiales pour que celles-ci soient vraiment bénéfiques pour tout le bassinversant lors des crues.

6.4.2 Définition du problème d’optimisation

La fonction objectif présentée au paragraphe 6.3 était la maximisation de l’efficacité d’ad-duction d’un aménagement. Cette maximisation était soumise aux contraintes techniquesdes aménagements hydroélectriques et le vecteur solution se composait des durées optimalesde turbinage et de vidange. Dans le cas de la gestion des crues du Rhône, il s’agit de maxi-miser l’efficacité d’adduction totale moyennant une contrainte supplémentaire, le contrôledu débit de pointe de l’hydrogramme en différents points du réseau hydrographique. Il s’agitmême d’une optimisation multi-objectifs dans la mesure où plusieurs objectifs de protectiondoivent être choisis, qu’ils soient placés le long des affluents ou du cours d’eau principallui-même. Par chance, l’évaluation de la fonction objectif et l’intégration de la contraintesur l’hydrogramme aval peuvent être effectuées de manière économétrique : il suffit alors deminimiser une fonction de coût dépendant du coût des dégâts et des pertes économiquesrésultant des opérations de vidange préventive. Pour un bassin versant avec K points decontrôle k où sont évalués les hydrogrammes et J aménagements hydroélectriques à accu-mulation j, on peut donc définir le problème de la manière suivante (équ. 6.13)

min(K∑

k=1

coût(k) +J∑

j=1

coût(j)) (6.13)

soumis aux contraintes, pour tout aménagement j (équ. 6.14) :

{Eadd,j ≤ Eadd,max,j

Eadd,j ≤ Estock,j(6.14)

où coût(k) est la fonction de coût à l’objectif k et coût(j) la fonction des coûts liés àl’aménagement j.

6.4.3 Fonctions de coût

Différentes fonctions de coût ont été considérées à différents niveaux. Elles doivent êtreaffinées selon chaque situation locale pour représenter au mieux la réalité des dommages,mais une approximation seule permet de se faire une bonne idée de la logique d’optimisationet d’obtenir une solution de qualité convenable. Les fonctions de coût locales sont décritesci-dessous :

172

– Coût du déversement ou de la vidange coûtdev,j : fonction du débit maximum dans larivière à l’aval de la retenue, fonction quadratique du débit avec seuil (équ. 6.15). Objectif :limiter le débit dans la rivière à l’aval de la retenue et donc limiter l’usage de la vidangede fond et de l’évacuateur de crue.

coût(dev, j) = cdev,j · (max(Qdev,max,j ; Qvid,j)−Qlim,j)2 (6.15)

pour autant que max(Qdev,max,j ; Qvid,j) > Qlim,j et où cdev,j est un coefficient lié au coursd’eau aval de l’aménagement j, Qdev,max,j le débit déversé maximum par j, Qvid,j le débitvidangé par j et Qlim,j la capacité du cours d’eau j.

– Coût du volume perdu : coût du volume d’eau perdu par déversement, coût unitaire parm3. Objectif : favoriser une évacuation du débit par turbinage plutôt que par déversement,opération toujours plus risquée.

– Coût d’une restriction de turbinage : coût du kWh (selon programme d’exploitation, tarifhoraire maximum) promis mais non produit. Il s’agit d’un coût virtuel en pratique, carsans déversement ou vidange de la retenue, ce kWh sera vendu à un autre moment aprèsla crue.

– Revenu d’un turbinage supplémentaire non prévu : revenu (tarif horaire minimum) dukWh produit hors programme d’exploitation en cas de retenue pleine à la fin de la crue.Cette production aurait sinon été perdue par déversement.

Les fonctions de coût globales sont décrites ci-dessous :

– Coût d’un excédent de débit coût(k) au point de contrôle k : fonction du débit maximumdans la rivière au point de contrôle, fonction quadratique du débit avec seuil (équ. 6.16).Objectif : limiter le débit dans la rivière à une valeur acceptable qui ne produit aucundégât.

coût(k) = ck · (Qmax,k −Qlim,k)2 (6.16)

où ck est un coefficient lié au point de contrôle k, Qmax,k le débit de pointe de crue en ket Qlim,k la capacité du cours d’eau dans la région de k.

– Coût global de la crue : somme de tous les coûts mentionnés ci-dessus. Considère égalementles coûts à tous les points de contrôle simultanément.

La définition des fonctions de coût permet de contrôler complètement le type de solutionrecherchée. Dans ce travail, les coûts associés aux débordements du cours d’eau aux pointsde contrôle k ont été fixés à une grande valeur, afin de contrôler les aménagementshydroélectriques, par tous les moyens, de manière à réduire les inondations dans la vallée.L’ordre de grandeur de ces coûts est environ 10 fois supérieur à celui des coûts dus auxsurverses des barrages ou à l’utilisation des vidanges de fond. Enfin, les coûts liés au manqueà gagner suite à une interdiction de turbiner sont de loin les plus faibles.

La sensibilité du modèle d’optimisation aux coûts des débordements est donc faible si lesrègles mentionnées ici sont respectées. Par contre, il est tout à fait envisageable d’associeraux coûts dus aux surverses ou à l’utilisation des vidanges de fond des valeurs comparablesaux coûts des débordements du cours d’eau principal aux points de contrôle k. Dans ce cas,l’utilisation des vidanges sera fortement réduite et la gestion des crues dans les affluents (àl’aval des retenues) sera favorisée au détriment de la vallée principale.

173

Pour terminer, il semble pour l’auteur inapproprié de choisir des fonctions de coût des perteséconomiques trop élevées. En effet, ces montants sont de toute façon bien inférieurs aux coûtsdes dégâts lors des crues et il cela conduirait à sous-exploiter le potentiel de protection contreles crues offert par les retenues alpines.

6.4.4 Variables et espace des solutions

Les variables du problème d’optimisation sont nombreuses. Pour chaque aménagementhydroélectrique, la série temporelle de turbinage doit être définie, tout comme les sériestemporelles de pompage et de vidange. Selon la forme de ces signaux, de nombreuxparamètres doivent être définis. Il est donc nécessaire de simplifier quelque peu le problèmeet de restreindre le nombre des variables, en se basant sur les hypothèses suivantes :

1. l’opération préventive n’est décidée que relativement tard, soit peu de temps avant lapointe de crue (entre 24 et 48 h avant la pointe de crue)

2. au vu des capacités de turbinage et vidange, il est risqué d’attendre avant decommencer le turbinage ou de perdre du temps de turbinage avant la crue

3. l’utilisation de la vidange de fond doit en général être évitée à tout prix.

Les simplifications qui découlent de ces hypothèses sont :

1. démarrer le turbinage tout de suite (suppression de la variable heure de début duturbinage)

2. optimiser en premier lieu le turbinage sans tenir compte de l’utilisation de la vidange

3. si nécessaire, considérer la vidange et adapter le turbinage en conséquence.

Les variables sont donc pour chaque aménagement l’heure de fin de turbinage TTP (qui seraappelée durée de turbinage), l’heure de début de la vidange Tvid,ini et l’heure de fin de lavidange Tvid,fin.

Le vecteur solution a donc une dimension 3 J , où J représente le nombre d’aménagementsinclus dans la gestion des crues. Différents problèmes techniques et mathématiques sontsoulevés par une définition pourtant simple de l’optimisation. Ils proviennent de la définitiondes multiples fonctions de coût, éventuellement contradictoires, et du grand nombre devariables de l’ensemble des solutions. Ces problèmes font l’objet des paragraphes suivants, enconsidérant que l’optimisation est déterministe et qu’elle n’est pas soumise à une incertitudeliée à la prévision de débit.

6.4.5 Evaluation

L’évaluation est la phase qui consiste à calculer le coût total d’une solution proposée. Ladéfinition de nombreux coûts se base sur l’estimation de débits en différents points dubassin versant. Ces débits doivent donc être estimés le plus exactement possible et deshydrogrammes doivent être calculés aux points de contrôle, à l’amont des retenues (débitentrant), à l’aval des retenues (débit déversé et vidangé) en tenant compte également duturbinage. Les données nécessaires à l’évaluation de l’hydrogramme en chaque point decontrôle aval sont plus nombreuses qu’en phase d’optimisation locale. Elles sont décritesci-dessous, pour chaque aménagement :

174

– hydrogramme entrant dans la retenue avec maximisation de l’adduction (captages fonc-tionnels, pompage maximum)

– hydrogramme aval sans aménagements (réseau hydrographique naturel uniquement, sansinfluence des aménagements hydroélectriques)

– niveau initial de la retenue– temps de transit de l’onde entre le lieu d’adduction principal et le point de contrôle aval– temps de transit de l’onde entre le rejet de la centrale et le point de contrôle aval– temps de transit de l’onde entre le rejet du déversoir et de la vidange, et le point de

contrôle aval.

Les hydrogrammes entrants sans aménagements peuvent être tirés d’un modèle de simu-lation, les niveaux initiaux des retenues extraites de mesures en temps réel. Les temps detransit sont des paramètres fixés dans le modèle et sont considérés indépendants du dé-bit.

La méthode de calcul proposée suit de plus près le trajet de l’écoulement capté. L’eau quia été captée ne va pas vers le point de contrôle, mais vers la retenue. Elle doit donc êtresoustraite à l’hydrogramme sans aménagements en tenant compte du temps de transit entreles lieu d’adduction et le point de contrôle. Le niveau de la retenue augmente à cause decet apport et diminue à cause des rejets qui sont ajoutés à l’hydrogramme aval en tenantcompte du temps de transit entre le point de rejet et le point de contrôle. Le cas échéant,la retenue déborde et déverse (calcul de laminage) et la vidange est ouverte, produisantun débit supplémentaire à l’aval après transit entre le déversoir ou la vidange et le pointde contrôle (figure 6.3). L’équation de bilan d’une retenue j peut ainsi être évaluée par(équ. 6.17) :

∂Vj

∂t= Qin,j(t)−Qout,j(t)−QTP,j(t) (6.17)

où Vj est le volume stocké dans la retenue j, Qin,j(t) l’hydrogramme (maximum) entrantdans la retenue j, Qout,j(t) l’hydrogramme déversé par l’évacuateur de la retenue j, QTP,j(t)le débit turbiné et évacué par la vidange depuis j.

Le débit Qk(t) au point de contrôle k dépend du débit prévu sans aménagements Qnat,k(t),du débit entrant dans la retenue j Qin,j(t), située à l’amont de k, et de son temps de transitadduction - point de contrôle tt,in,jk du débit turbiné QTP,j(t) à la centrale de l’aménagementj (rejet situé à l’amont de k) , du temps de transit centrale - point de contrôle tt,TP,jk. Ildépend également du débit déversé Qout,j(t) et du temps de transit évacuateur - point decontrôle tt,out,jk (équ. 6.18) :

Qk(t) = Qnat,k(t)−J∑

j=1

(Qin,j(t− tt,in,jk)−QTP,j(t− tt,TP,jk)−Qout,j(t− tt,out,jk)) (6.18)

Les hydrogrammes en tout point du modèle d’optimisation étant connus, il est désormaispossible d’en extraire les valeurs maximales pour évaluer les coûts associés à chaqueopération préventive.

175

Fig. 6.3: Schéma de la méthode d’estimation de l’hydrogramme aval : exemple de la retenue deGebidem (aménagement de Bitsch) évalué à Brigue.

176

6.5 Algorithme d’optimisation

6.5.1 Généralités

La solution optimale est le vecteur contenant, pour chaque aménagement, la durée duturbinage préventif, l’heure d’ouverture des ouvrages de vidange et l’heure de fermeturede ces ouvrages. Ces valeurs conduiront à un coût minimum de l’opération préventive,c’est-à-dire à une limitation du débit de pointe dans le cours d’eau et principaux sesaffluents ainsi qu’à une limitation des pertes économiques. L’établissement de la solutionoptimale n’est pas une opération triviale, car les opérations préventives effectuées par lesaménagements hydroélectriques ne sont pas indépendantes. Par exemple pour le Rhône,un turbinage préventif effectué par Grande Dixence pourrait interdire à Mattmark de fairede même. La méthode la plus fiable de détermination de la solution optimale serait uneénumération exhaustive de tout l’espace des solutions et le choix de la solution produisantun coût minimum. Cependant, le temps nécessaire à une telle opération ne relèverait pasdes possibilités humaines.

Avant d’entrer dans les détails de la méthode d’optimisation, relevons quelques caractéris-tiques propres au problème des opérations préventives :

1. l’optimisation est multi-objective (points de contrôle) mais peut être effectuée par uneméthode économétrique

2. le modèle de calcul est fortement non-linéaire, discret et discontinu

3. les variables de calcul sont certainement de sensibilité très différente

4. le nombre de variables peut être important

5. l’horizon d’optimisation est court (entre 24 et 48 h)

6. il s’agit d’un modèle d’aide à la décision pour la gestion en temps réel : les temps decalcul sont donc fortement limités (quelques minutes)

Suite à ces observations, il est nécessaire de déterminer la méthode d’optimisation la plusadaptée en se référant à l’analyse effectuée au chapitre 3.

– la programmation linéaire n’est, par définition, pas appropriée : même une tentative delinéarisation du problème relèverait de la témérité

– la programmation non linéaire pourrait être intéressante mais la multiplicité des optimalocaux de l’espace des solutions et l’efficacité du calcul sont des désavantages importants

– la programmation dynamique est plutôt adaptée à des problèmes d’optimisation à longterme où la condition initiale n’est pas déterminante

– les programmations séquencielles ne sont pas appropriées car le modèle de calcul est non-linéaire et discontinu

– les algorithmes génétiques sont intéressants pour leur réalisme, leur probabilité d’atteindreun optimum global, leur capacité à déterminer plusieurs solutions optimales au sens dePareto, mais ils sont peu efficaces en termes de temps de calcul. Ils peuvent être utiliséscomme méthode de référence pour tester un algorithme utilisable en temps réel

– les réseaux de neurones sont peu adaptés aux problèmes de réservoirs multiples car ilest difficile de représenter un tel système de la sorte : il faudrait les entraîner à partird’un modèle d’évaluation et des situations types (crues), qui ne sont malheureusementpas assez nombreuses

177

– les méthodes de logique floue sont adaptées à l’optimisation en situation de forteincertitude, ce qui n’est pas le cas d’une optimisation déterministe telle que proposéeici. Cependant, elles pourraient être utilisées ultérieurement, après le développement d’unmodèle d’évaluation et de solutions de référence

– les systèmes experts sont des bases de règles ou de cas qui peuvent parfaitement êtreutilisées, même s’il est nécessaire d’adapter la solution proposée à chaque situation hydro-météorologique

– le goal programming et pre-emptive goal programming sont des approches permettantd’exploiter directement le modèle de calcul en limitant le nombre de combinaisons àcalculer et peuvent également être utilisées.

Le modèle d’évaluation de chaque solution a été développé dans les chapitres 6.3 et6.4. L’optimisation locale permet de déterminer les opérations préventives de chaqueaménagement indépendamment, l’évaluation des débits et des coûts associés permet dedéterminer la valeur de la fonction objectif pour chaque solution. Pour déterminer lameilleure d’entre ces solutions, il faut donc exploiter une méthode qui soit rapide (utilisationen phase opérationnelle) et fiable. Les algorithmes génétiques, trop lents, sont donc excluspour la phase opérationnelle et les réseaux de neurones seront difficiles à calibrer dans lamesure où le catalogue des événements historiques est très limité. Il reste donc la logiquefloue, les systèmes experts et le pre-emptive goal programming qui semblent appropriés, lacombinaison des deux dernières méthodes pouvant produire des résultats suffisants à peude frais. Elles sera donc testée dans la suite de ce travail.

6.5.2 Concept de l’algorithme d’optimisation

Le concept central de l’optimisation a déjà été décrit : il s’agit d’abord d’effectuer uneoptimisation locale puis une évaluation. Toutefois, l’optimisation locale s’effectue de manièreexplicite et "instantanée". L’évaluation nécessite le calcul des hydrogrammes et c’est danscette phase qu’interviennent les variables. A chaque itération sont effectuées les calculsd’optimisation locale et d’évaluation.

L’algorithme développé s’appuie fortement sur la structure du problème d’optimisation etcomme déjà mentionné n’a pas la prétention d’être universel. Les impératifs d’efficacité etde robustesse ont pris le pas sur la précision de la solution. L’algorithme d’optimisation estdonc basé sur le concept de simulation-optimisation par énumération dont la convergenceest accélérée par des règles décrivant l’ordre dans lequel sont modifiées les variables et parun concept de type pre-emptive goal programming.

Tous les points de contrôle sont évalués par ordre amont-aval et seuls les variables desaménagements situés en amont d’un point de contrôle sont alors considérées. Le point decontrôle situé à l’exutoire du bassin versant est l’objectif final de l’optimisation et sa solutioncorrespondante est la solution optimale. Pour obtenir le coût total, les coûts aux autrespoints de contrôle sont bien entendu également évalués. La prise en compte des vidangesn’est réalisée que si cela est jugé nécessaire par le décideur (figure 6.4).

Le principe de l’optimisation des turbines est le même que celui de l’optimisation desvidanges pour un point de contrôle donné. L’algorithme est expliqué ici pour le turbinageet un système avec 2 aménagements.

Une astuce permet le contrôle direct de ces opérations de turbinage : il s’agit du facteur depointe FP,j de l’aménagement j, défini comme suit (équ. 6.19) :

178

Fig. 6.4: Schéma du fonctionnement à haut niveau de l’algorithme d’optimisation

FP,j = tTP,j/ttot (6.19)

où tTP,j est la durée de turbinage et ttot la période d’optimisation. Une valeur de FP,j = 1autorise l’aménagement j à turbiner pendant toute la durée considérée pour l’optimisation.Une valeur FP,j = 0 signifie l’interdiction totale de turbiner pendant toute la période. FP,j

est donc une contrainte imposée à l’aménagement j et toute réduction de sa valeur entraîneun durcissement de cette contrainte.

L’algorithme d’optimisation à bas niveau est expliqué sur la base de l’exemple fictif à deuxvariables (FP1 et FP2) présenté à la figure 6.5.

optimisation préliminaire optimisation 2 sensibilitéFig. 6.5: Schéma du fonctionnement à bas niveau de l’algorithme d’optimisation

– Optimisation préliminaire : l’objectif est de déterminer le rang de chaque aménagement(sa performance relative pour la protection). Les contraintes initiales de tous les amé-nagements sont complètement relaxées (FP = 1). Un aménagement est choisi au hasard(dans l’exemple, le n 2) et ses contraintes sont progressivement durcies (a), FP2 est doncdiminué. La meilleure solution est conservée (tTP2) et l’aménagement suivant (le n 1) voitses propres contraintes durcies (b) et sa meilleure solution mémorisée (tTP1). Il en va demême pour les aménagements suivants.

– Détermination du rang de chaque aménagement

– Optimisation 2 : l’espace des solutions est à nouveau balayé mais l’ordre dans lequelles aménagements sont optimisés dépend de leur rang. Tous les aménagements ont à

179

nouveau leurs contraintes relaxées (FP = 1). L’aménagement le moins performant (Eadd

minimale) voit ses contraintes durcies en premier (le n 1, phase a), ses variables optimalessont conservées. L’aménagement suivant est ensuite optimisé (le n 2, phase b), sa solutionoptimale mémorisée et ainsi de suite.

– Détermination du rang de chaque aménagement

– Sensibilité : cette étape permet de se rapprocher définitivement de la solution finale ensuivant les optima partiels définis dans l’optimisation 2. A nouveau, l’aménagement lemoins performant (le n 1) voit ses contraintes durcies en premier (a), les autres ayant leurniveau de contrainte optimal déterminé à l’étape optimisation 2. Après mémorisation dela solution optimale du n 1, l’aménagement n 2 est optimisé (b).

Les solutions optimales de turbinage sont mémorisées et l’optimisation des vidanges estdésormais possible. Cette étape diffère légèrement de l’optimisation du turbinage. En effet,les variables de commande sont maintenant les heures de début et de fin de vidange.Lorsqu’elles sont variées, la durée de turbinage est adaptée en conséquence. Voici les règlesqui régissent l’optimisation des vidanges :

1. si le turbinage seul suffit pour éviter tout déversement, la vidange de fond ne fonctionnepas

2. les débits de vidange sont supérieurs aux débits de turbinage : il est nécessaire de nepas vidanger tous les aménagements en même temps, raison pour laquelle l’heure dedébut de vidange est variée

3. le balayage de la solution suit une double boucle heure de début - heure de fin devidange

4. par principe, la vidange évacue le surplus de volume qui ne peut être évacué parturbinage

5. un aménagement équipé de pompes verra son pompage favorisé grâce à l’utilisationde la vidange

6. la vidange est une opération risquée et son coût associé est élevé

6.5.3 Commentaires

L’algorithme d’optimisation a été développé pour un bassin versant dans lequel le turbinagesimultané à plein régime des principaux aménagements hydroélectrique est courant. Celasignifie que des dégâts dus au turbinage préventif avant la crue ne sont pas à craindre et quecette opération est finalement peu risquée du point de vue de la sécurité. Pour cette raisonprécise, un concept de sécurité rigide basé sur des règles d’exploitation très restrictives n’estpas approprié. Il s’agit donc d’un concept extrêmement flexible.

On comprend à présent la dimension de simulation-optimisation de l’algorithme qui ef-fectue à chaque itération une simulation complète pour déterminer les coûts associés à lasolution testée. Les règles dures sont essentiellement implémentées dans le modèle d’opti-misation locale où l’expérience du fonctionnement des aménagements est introduite. Enfin,la hiérarchisation entre variables et la protection des variables les plus influentes pour leurlaisser la plus grande marge de manoeuvre possible est la caractéristique du pre-emptivegoal programming où chaque variable optimisée se transforme en contrainte. Cette méthodeest acceptable si la solution optimale n’est pas unique, ce qui est le cas dans ce modèle(Eschenbach et al., 2001).

180

6.6 Application à un système idéal avec réservoirs multiples

Ce chapitre présente le fonctionnement de l’algorithme d’optimisation appliqué à unsystème fictif et idéal de bassin versant avec 10 réservoirs. Une analyse de sensibilitédes paramètres déterminant le potentiel protecteur des réservoirs à accumulation estprésentée. La description de l’espace des solutions est également abordée, puis une validationde l’algorithme par des méthodes d’énumération complète et algorithmes génétiques esteffectuée.

6.6.1 Description du modèle

Le modèle idéal est un bassin versant d’une surface totale Stot sur lequel se trouvent10 aménagements à accumulation, tous identiques, disposés en parallèle le long du coursd’eau principal à une distance d les uns des autres (figure 6.6). Ce sont des aménagementshydroélectriques à un palier composés d’une retenue avec évacuateur passif en déversoirlatéral à l’exutoire du sous-bassin versant, d’une conduite forcée et d’une centrale placée àproximité du cours d’eau principal. Ils ont chacun une surface drainée S, une surface duréservoir Sres, une capacité de turbinage QT et une largeur de réservoir Bdev dont la crêtese trouve au niveau normal d’exploitation. La relation niveau-volume de chaque retenue estsupposée linéaire (retenue cubique) et la surface du réservoir définit ainsi directement levolume d’une tranche d’eau.

Fig. 6.6: Schéma du modèle théorique de bassin versant avec 10 aménagements hydroélectriquesdisposés en parallèle le long du cours d’eau principal.

Afin de permettre une analyse systématique des paramètres du modèle, les données decommande doivent être uniformes. La précipitation nette est donc supposée uniforme surtout le bassin versant, les hydrogrammes entrant dans les retenues sont également tousidentiques et en phase. L’hydrogramme à l’exutoire (hydrogramme "sans aménagements") a

181

un volume égal au volume précipité et l’hydrogramme entrant dans une retenue a le volumetotal multiplié par le rapport entre surface drainée et surface totale.

Le tableau 6.1 présente les paramètres du modèle ainsi que les valeurs typiques utilisées.Ces valeurs se situent dans une gamme correspondant à la plupart des aménagements de cetype dans les Alpes.

Tab. 6.1: Liste des paramètres du modèle de bassin versant idéal.

paramètre description valeur typiqueStot surface totale 10’000 km2

S surface drainée (par aménagement) 50 - 800 km2

Vtot volume total des précipitations nettes 36mmCprec coefficient de précipitations 1Vres,tot volume total de stockage dans un réservoir 100Miom3

Sres surface du réservoir 2 km2

Bres largeur du déversoir 30mQT capacité de turbinage 50m3/sTaux taux de remplissage 1tt temps de transit 1 h

Grâce à ce modèle, il est possible de valider l’algorithme d’optimisation et d’analyser lasensibilité de différents paramètres sur l’influence des aménagements lors des crues.

6.6.2 Analyse paramétrique

Les objectifs de cette analyse sont de démontrer la sensibilité de l’hydrogramme aval àdifférents paramètres du système. Les paramètres fixés sont la durée de l’événement de72 heures, le volume précipité, l’hydrogramme à l’exutoire sans aménagements, la relationniveau-volume des réservoirs qui ont des valeurs telles que fournies au tableau 6.1. La surfacedrainée par aménagement est systématiquement variée de 50 à 800 km2 et est toujoursreprésentée en abscisse dans les graphes.

Capacité de turbinage

Les résultats de l’analyse paramétrique sont présentés à la figure 6.7. Cet exemple illustre laperformance du système pour différents débits équipés de 0 à 200 m3. Les autres paramètresont les valeurs proposées dans le tableau 6.1 et les retenues sont supposées pleines au débutde la simulation.

Dans tous les cas analysés, la performance du système augmente si la surface drainée parchaque aménagement augmente. En effet, pour que les retenues produisent un laminageintéressant pour le cours d’eau aval, il faut qu’elles récoltent un volume suffisant d’eau lorsde la crue. Dans ce cas, un trop petit sous-bassin versant ne produira pas ce volume et laretenue sera "inutile". La performance atteint un maximum pour une relation surface drainée- capacité de turbinage bien définie, car lorsque la surface drainée est trop importante, levolume disponible de la retenue devient insuffisant. Une augmentation de la capacité deturbinage permet de palier à ce problème pour autant que le turbinage préventif ne viennepas augmenter le débit dans le cours d’eau aval. Il est intéressant de constater que le systèmeprésentant la meilleure performance est celui avec une surface drainée de 800 km2 paraménagement et un débit équipé de 150m3/s. Le débit maximum à l’exutoire est réduit de3’112 à 1’628m3/s, soit un gain de 48%. Pour une surface drainée totale de 40% (ou 400 km2

par aménagement), un débit équipé de 50m3/s permet une protection optimale. Enfin, l’effet

182

Fig. 6.7: Débit maximum à l’exutoire du bassin versant en fonction de la surface drainée paraménagement et du débit équipé.

de laminage passif par les retenues (déversement) produit une réduction maximale du débitde pointe de 15% pour une surface drainée totale de 50% (500 km2).

183

Temps de transit

La figure 6.8 représente les résultats de systèmes dans lesquels les aménagements sont plus oumoins répartis dans le bassin versant. Le temps de transit tt a été varié de 0 h à 6 h, le débitéquipé fixé à 50m3/s. Un temps de transit de 0 h signifie que tous les rejets des aménagementsarrivent instantanément à l’exutoire du bassin versant. Cela permet de maximiser la duréedu turbinage préventif en limitant les conflits entre aménagements. Un temps de transit de6h pénalise fortement les aménagements placés en tête de bassin versant car il faut 60 h pourque le front de l’onde de turbinage de l’aménagement 10 parvienne à l’exutoire. Les graphesprésentés confirment ces remarques et l’on observe que les systèmes où les aménagementssont très proches de l’exutoire sont les plus performants pour la réduction du débit de pointe.Les débits de pointe minimaux sont obtenus pour une surface drainée totale de 40% et untemps de transit de 1h (2049m3/s, gain de 44%) ou pour une surface drainée totale de 50%et un temps de transit nul (2027m3/s, gain de 45%).

Fig. 6.8: Débit maximum à l’exutoire du bassin versant en fonction de la surface drainée et dutemps de transit.

Largeur du déversoir de l’évacuateur de crues non contrôlé

La largeur du déversoir influence le potentiel de laminage d’une retenue. Trop large, il nepermet pas au niveau de monter lors d’une crue et empêche la retenue de stocker du débit.Trop étroit, il favorise au contraire une montée du niveau qui pourrait éventuellement mettreen danger l’ouvrage lui-même.

La figure 6.9 montre qu’il est possible de gagner en efficacité de rétention par le rétrécisse-ment du déversoir. Ce concept est cependant bien théorique, car l’élévation du plan d’eaunécessaire peut être très importante. Par exemple, dans le cas d’un déversoir de 10m etd’une surface drainée de 400 km2, l’élévation du plan d’eau atteint 2.68m en tenant comptedes autres paramètres décrits dans le tableau 6.1. Dans ce cas, il est nécessaire de garantirla sécurité de l’ouvrage pour de tels niveaux. De plus, cet effet est très important pour lesgrandes retenues, mais il devient négligeable pour les plus petites retenues.

Commentaires

Bien entendu, il n’est pas intéressant de tirer des conclusions chiffrées de ces résultats.En effet, il est très improbable de trouver un jour un bassin versant comparable à cesystème idéal où tous les aménagements sont similaires et disposés régulièrement. Il estencore moins réaliste d’imaginer une précipitation homogène sur de grandes surfaces et une

184

Fig. 6.9: Débit maximum à l’exutoire du bassin versant en fonction de la surface drainée et de lalargeur du déversoir de l’évacuateur de crues.

réponse hydrologique identique pour une surface donnée. Toutefois, quelques observationspeuvent être mises en évidence :

– le rapport entre surface drainée et surface totale est déterminant pour l’efficacité delaminage par les retenues

– la capacité de turbinage des aménagements détermine leur réactivité et donc leur capacitéà stocker du volume lors des crues malgré des taux de remplissage initiaux très élevés

– si la sécurité de la structure le permet, la réduction du débit évacué pour un niveau deretenue donné augmente la capacité de stockage de la retenue, pour autant que sa surfacesoit grande par rapport au sous-bassin versant.

D’autres paramètres auraient aussi pu être variés, mais l’intérêt d’une telle analyse auraitété limité. En effet, des hypothèses liées à la répartition spatiale des précipitations, destempératures ou de la saturation du sol se résument au choix du débit entrant dansles retenues et dans le cours d’eau principal (effet identique à la surface drainée paraménagement). Le volume de chaque réservoir ou le taux de remplissage pourraient êtreégalement variés, cela permettrait seulement de montrer que les barrages complètementvides sont les plus efficaces pour contrôler les crues, ce qui est trivial.

6.6.3 Espace des solutions à 2 dimensions

Le bassin versant décrit au paragraphe précédant est conservé, mais il est supposé icique seuls les deux aménagements les plus proches de l’exutoire existent. Une énumérationde l’espace des solutions peut alors être représentée graphiquement à la figure 6.10, oùl’axe X représente le facteur de pointe FP1, l’axe Y FP2 et l’axe Z le débit maximum àl’exutoire.

La forme de l’espace des solutions est particulière : sa surface est composée de zones courbes(déversements de l’une, l’autre ou deux retenues), d’une zone en forme de cube (les ondes deturbinage s’additionnent au débit dans le cours d’eau au mauvais moment) et d’un plancher(minimum de la fonction objectif). Lorsque les facteurs de pointe FP sont trop faibles, lesaménagements ne turbinent pas assez et il se produit un déversement excessif en fin de crue.Lorsqu’ils sont trop grands, l’onde de turbinage augmente le débit de pointe. La solution

185

optimale est alors multiple, car les coûts dépendent essentiellement du débit maximum àl’exutoire et plusieurs durées de turbinage permettent de les minimiser. Dans l’exempleprésenté, des valeurs FP = 0.5 − 0.7 sont optimales. Lorsque le nombre d’aménagementsaugmente, la zone du "plancher" se réduit et le nombre de solutions optimales diminue.

Fig. 6.10: Espace des solutions pour un bassin versant avec 2 aménagements.

6.6.4 Validation de l’algorithme d’optimisation

L’algorithme d’optimisation présenté dans ce chapitre est basé sur des hypothèses parfoisfortes. La plus délicate conduit l’algorithme à suivre les lignes des optima partiels, ce quilimite fortement le nombre de solutions testées. Au vu de la surface de réponse pour deuxaménagements, cette hypothèse semble raisonnable puisque les valeurs des variables auxminima partiels semblent correspondre à leurs valeurs au minimum global de la fonction.Cependant, une telle analyse ne suffit pas à garantir que l’algorithme trouve la meilleuresolution au problème d’optimisation.

Leyland (2002) a développé un algorithme d’optimisation appelé Queuing Multi-ObjectiveOptimization (MOO) basé sur le concept des algorithmes génétiques. Cet algorithme aété développé dans le cadre de la planification industrielle (Molyneaux, 2002), mais il aégalement été utilisé par Schäfli (2005) pour l’optimisation des paramètres de calage deson modèle hydrologique et par Heller et al. (2006) pour l’optimisation des variables deprojet d’un aménagement hydraulique à buts multiples. L’objectif n’est pas ici de décrirecet algorithme, mais simplement de l’utiliser comme validation du modèle développé danscette recherche.

Le fonctionnement de l’algorithme génétique est le suivant : un vecteur de valeurs initialesaléatoires est d’abord généré. Il s’agit dans notre cas des 10 facteurs de pointe de turbinageFP . Ce vecteur est envoyé au modèle de calcul pour optimisation locale et évaluation. Lerésultat obtenu (le coût associé à ce vecteur) est ensuite rendu à l’algorithme génétique quigénère une nouvelle solution en tenant compte de la précédente. Le processus se poursuitainsi jusqu’à obtenir au minimum 5000 évaluations, desquelles sont retenues les meilleures.

186

La procédure d’optimisation globale présentée dans ce chapitre est ainsi remplacée parl’algorithme génétique dont le fonctionnement est complètement différent.

La comparaison entre les deux méthodes a été effectuée et les objectifs comparés sont le débitmaximum à l’exutoire et le coût total de la crue pour différents scénarios. Les résultats sontsynthétisés au tableau 6.2. Dans toutes les simulations, la surface drainée S était de 800km2 et les autres paramètres conformes au tableau 6.1. L’erreur relative ∆ se calcule commesuit (équ. 6.20) :

∆ =QmaxGP −QmaxMOO

QmaxMOO(6.20)

Une valeur ∆ négative signifie que l’algorithme Goal Programming est meilleur. Les résultatsmontrent que les performances sont très similaires : la marge d’erreur est inférieure à 2%. Ilest de plus intéressant de comparer les solutions proposées en montrant la somme des débitsturbinés à l’exutoire pour chacune des méthodes (figure 6.11). Les solutions proposées sontremarquablement similaires et seules quelques différences apparaissent juste avant la pointede crue aux heures 55-60.

Tab. 6.2: Synthèse des résultats des optimisations selon la méthode Goal Programming (GP) etalgorithme génétique MOO

No QT tt Qmax GP Qmax MOO Coût GP Coût MOO ∆ (%)1 25 6 2719.30 2718.50 2.22E+08 2.22E+08 0.032 50 6 2554.63 2559.65 1.96E+08 1.97E+08 -0.203 100 6 2521.70 2569.49 1.91E+08 1.98E+08 -1.864 50 0 2006.54 1989.63 1.21E+08 1.19E+08 0.855 50 1 1993.04 1977.35 1.19E+08 1.18E+08 0.796 50 2 2129.61 2107.01 1.36E+08 1.33E+08 1.077 50 3 2237.92 2217.84 1.51E+08 1.48E+08 0.91

Fig. 6.11: Comparaison entre les débits turbinés totaux à l’exutoire selon GP ou MOO

Optimisation des vidanges

L’optimisation des opérations préventives avec utilisation des vidanges est également pos-sible, même si ce type d’opération ne sera en pratique que rarement effectué en raison desrisques de dégâts directs aux cours d’eau situés juste en aval de la retenue. Il existe toutefoisun potentiel de gain certain par une augmentation importante de la réactivité de l’amé-nagement. Tout d’abord, en cas de situation difficile où d’énormes volumes sont attendus,

187

l’utilisation des vidanges avant la crue permettra d’éviter de trop grands déversements. En-suite, la meilleure réactivité de l’aménagement permet de retarder la prise de décision pourdisposer de mesures et d’une prévision hydrologique plus récentes, donc plus fiable.

L’optimisation des vidanges n’a pourtant pas été analysée dans ce chapitre mais leurutilisation et contrôle sera décrit dans le chapitre 7.

6.6.5 Concept de borne inférieure

Le concept de borne inférieure permet de vérifier si le calcul d’optimisation a permis dedéterminer l’optimum global. Grâce à ce concept, il est parfois possible de garantir laperformance d’une solution (optimum global), mais il n’est pas toujours possible de certifierque la meilleure solution n’est pas trouvée.

Le concept est le suivant : il s’agit de calculer la performance d’un modèle virtuel de structureidentique au modèle en cours d’optimisation, à quelques différences près :

– les réservoirs ont un volume disponible infini– le turbinage et la vidange ne sont pas réintroduits dans le modèle hydrologique

En clair, cela signifie que l’efficacité d’adduction est maximisée avec certitude, mais queles réservoirs ne débordent jamais. Le turbinage ou la vidange préventifs ne sont parconséquent jamais effectués et les hydrogrammes résultant aux différents points de contrôlesont minimaux.

Si la meilleure solution résultant de l’optimisation s’approche de la borne inférieure, elle estdonc optimale. Dans le cas contraire, on ne peut pas dire qu’elle ne l’est pas. On peut doncidentifier ici une solution suffisante, permettant de garantir les objectifs de protection etne nécessitant donc pas de vérification supplémentaire. Ce concept sera systématiquementexploité dans le chapitre suivant où le système d’optimisation complet sera appliqué aubassin versant du Rhône à l’amont du Léman.

6.7 Conclusions

La gestion des crues par opérations de vidange préventives sur les aménagements à accu-mulation peut apporter une aide significative pour le contrôle des débits et la réduction desdégâts. En effet, les résultats présentés dans ce chapitre pour des situations fictives indiquentdes réductions des débits de pointe atteignant 40% selon le paramétrage du bassin versant.Cependant, l’efficacité d’une telle méthode dépend largement de la composition du bassinversant, en particulier de la surface drainée par rapport à la surface totale, des capacités destockage résiduelles à retenues pleines et de la réactivité des aménagements.

L’approche proposée pour évaluer les besoins en opérations préventives ainsi que leurrépartition temporelle permet rapidement de dégager une solution de bonne qualité. Laméthode des bilans pour l’optimisation locale ne souffre d’aucun problème puisqu’un calculde laminage est effectué pour chaque retenue. Par contre, la méthode d’optimisation globaleconsidérant le routage des ondes de crue, de turbinage, de vidange et de débit captérepose sur quelques hypothèses fortes. En particulier, les durées de transit ne dépendentpas du débit et les débits entrants dans les retenues sont brutalement soustraits auxdébits totaux. Ces hypothèses seront vérifiées en détail dans le chapitre suivant puisque les

188

solutions proposées par l’outil d’optimisation seront directement introduites dans le modèlede simulation pour y être comparées.

L’algorithme d’optimisation repose sur une approche hybride de type rule-based et pre-emptive goal programming. Elle ne garantit pas l’optimum global mais possède deuxavantages majeurs : sa rapidité et la possibilité de calculer une borne inférieure auproblème. La méthode d’optimisation a cependant été comparée à une méthode de typealgorithme génétique et s’est révélée parfaitement concurrentielle puisqu’elle n’a pas étésystématiquement battue. La méthode développée ici permet donc d’obtenir une solutionsuffisante tout en économisant les moyens pour l’obtenir, ce qui garantit son fonctionnementen phase opérationnelle (temps réel).

Enfin, rappelons que ce chapitre traite d’une méthode d’optimisation déterministe qui cachecertains dangers : l’influence d’une grande imprécision dans les données d’entrée, qui serontdes prévisions hydrologiques, peut conduire à des stratégies complètement erronées ensituation de crise. Il convient dès lors de déterminer la sensibilité de la solution optimale auxconditions hydrologiques, travail également présenté dans le chapitre suivant pour le cas dubassin versant du Rhône. Cependant, une approche probabiliste permettant de tenir comptede l’incertitude de la prévision hydrologique serait souhaitable, mais nécessite justement lapossibilité de disposer de prévisions hydrologiques probabilistes, ce qui n’est, pour l’heure,pas possible dans le domaine d’application de cette recherche.

189

190

7 Application du modèle de gestion descrues au bassin versant du Rhône

Dans les chapitres précédents, un modèle hydrologique et un outil d’optimisation ont étéprésentés. La performance du modèle hydrologique a pu être démontrée au travers de sonapplication sur le bassin versant du Rhône supérieur, mais l’outil d’optimisation n’a pasencore été appliqué à ce même bassin versant. De plus, le montage du système complet etson fonctionnement opérationnel n’ont pas été décrits.

L’objectif de ce chapitre est de présenter d’abord le fonctionnement du système complet et lesrelations entre le modèle hydrologique et l’outil d’optimisation. Il s’agit ensuite de démontrerl’efficacité du modèle d’optimisation appliqué au bassin versant du Rhône supérieur avec ses10 grands aménagements hydroélectriques et d’en valider la performance par comparaisonavec une méthode d’optimisation alternative (algorithme génétique). Il s’agit également, àce stade, de vérifier le bien-fondé des hypothèses de calcul en comparant les valeurs desfonctions objectives proposées par l’outil d’optimisation avec les valeurs obtenues par lemodèle de simulation numérique.

Enfin, il reste à démontrer la performance opérationnelle du système et l’influence del’incertitude du modèle météorologique sur la prévision hydrologique et la gestion des cruesen situation de crise.

7.1 Fonctionnement opérationnel du modèle de gestion descrues

7.1.1 Fonctionnement du système à haut niveau

Le fonctionnement à haut niveau du modèle de gestion des crues peut être décrit par quatrefonctions principales (figure 7.1). La première fonction est l’acquisition des données chezles fournisseurs et leur archivage dans une base de données centrale, colonne vertébralede tout le système. La deuxième fonction est le calcul de la prévision hydrologique (lessens du système), la troisième étant l’optimisation des opérations préventives (le cerveau).Finalement, la dernière fonction est la publication des résultats aux différents clients dusystème (la parole).

Les fournisseurs de données sont les différents partenaires du projet, à savoir MétéoSuissepour les prévisions météorologiques et les mesures hydro-météorologiques (complétées parles mesures du réseau IMIS appartenant aux cantons), l’Office Fédéral de l’Environnementpour les mesures de débit dans les cours d’eau et les gestionnaires des aménagements hydro-électriques pour les mesures associées. Toutes ces données suffisent à effectuer un bilan de lasituation hydrologique du bassin versant, de la situation des aménagements hydroélectriqueset une évaluation de la situation hydrologique future (Jordan et al., 2006a,b).

191

Fig. 7.1: Fonctionnement à haut niveau du modèle de gestion des crues.

Les résultats issus de ce système sont d’une part les prévisions hydrologiques et d’autre partles horaires des opérations préventives recommandées par le modèle. Les clients du systèmeque sont les responsables de la sécurité civile ainsi que les gestionnaires des aménagementshydroélectriques sont ainsi associés aux résultats et responsabilisés (Boillat, 2005).

7.1.2 Fonctionnement du modèle de prévision hydrologique

Le modèle de prévision hydrologique s’approvisionne dans la base de données et utilisetrois types de données (figure 7.2) : les mesures hydro-météorologiques et les mesuresdes aménagements hydroélectriques (données de commande) permettent de simuler lesécoulements jusqu’à l’heure actuelle, les mesures de débit (données de contrôle) permettentd’effectuer un filtrage du modèle hydrologique, améliorant momentanément ses conditionsinitiales, et enfin les prévisions météorologiques quantitatives qui sont indispensables pourl’établissement d’une prévision hydrologique à court terme (72 heures).

En fonctionnement opérationnel, deux prévisions hydrologiques sont effectuées : la premièretient compte de tous les paramètres du modèle et fournit le débit prévu en tout point dubassin versant, tandis que la deuxième, soumise aux mêmes conditions initiales et de bord,ne considère pas l’influence des retenues et de leurs ouvrages annexes, fournissant donc ledébit prévu sans influence des aménagements hydroélectriques (Chapitre 6).

7.1.3 Fonctionnement du modèle d’optimisation

Le modèle d’optimisation des opérations préventives des aménagements hydroélectriquesse nourrit également de nombreuses données fournies par le modèle hydrologique et labase de données (figure 7.3). Les hydrogrammes aux points de contrôle (pour informationuniquement) ainsi que les hydrogrammes entrants dans les retenues sont directement tirésdu modèle hydrologique. Les hydrogrammes sans aménagements sont tirés du deuxième

192

Fig. 7.2: Fonctionnement opérationnel du modèle de prévision hydrologique.

modèle de prévision et sont également nécessaires au calcul d’optimisation, tout comme lesvolumes ruisselés sur tous les sous-bassins versants du modèle.

Exploitant les données selon la méthode décrite au chapitre 6, l’outil d’optimisation cal-cule les opérations préventives optimales pour différentes fonctions objectives ou points decontrôle. Une différence avec le modèle théorique subsiste cependant : les règlements d’ur-gence des aménagements hydroélectriques ont été implémentés dans l’outil d’optimisation.Les règles d’urgence sont les mêmes que celles implémentées dans le modèle de simulationRouting System II et sont considérées comme rigides : elles ne peuvent par conséquent pasêtre modifiées par l’outil d’optimisation. Les consignes d’exploitation optimisées sont ensuiteautomatiquement renvoyées au modèle hydrologique et une simulation de validation est ef-fectuée, qui permet de comparer les hydrogrammes calculés par le modèle d’optimisationavec ceux simulés à l’aide du modèle hydrologique Routing System II.

Si les hydrogrammes calculés (modèle d’optimisation) et simulés (modèle de simulation)sont similaires, le processus complet a correctement fonctionné et des décisions peuvent êtreprises en toute objectivité.

7.1.4 Technologies utilisées

En septembre 2006, l’état d’avancement du projet MINERVE était le suivant :

– opérationnel : modèle d’acquisition et de spatialisation des prévisions météorologiques,outil Microsoft VB.NET

193

Fig. 7.3: Fonctionnement du modèle d’optimisation des opérations préventives.

194

– opérationnel : modèles hydrologiques avec et sans aménagements incluant procédurede filtrage, programme Routing System II, version 1.301 en environnement MicrosoftVB.NET

– opérationnel : outil d’optimisation des opérations préventives incluant procédures auto-matiques d’acquisition des données et exportation des résultats, classeur Microsoft Excel2003 et routines Visual Basic

– non opérationnel : acquisition automatique et en temps réel des mesures hydro-météorologiques (précipitations, températures, ETP, débits).

Il était en l’état possible de réaliser des prévisions hydrologiques et de déterminer lesconsignes d’exploitation en situation de crue, mais la procédure de filtrage du modèle hydro-logique ne pouvait être appliquée en raison du manque de mesures hydro-météorologiquesen temps réel.

7.2 Modèle d’optimisation appliqué au bassin versant duRhône supérieur

7.2.1 Architecture du modèle de simulation

Le modèle de simulation Routing System II est l’outil permettant d’abord de créer desprévisions hydrologiques sur lesquelles se basent les décisions (Dubois, 2005). Il doitintégrer toutes les composantes du bassin versant et est, par conséquent, d’une remarquablecomplexité. Pour permettre son utilisation avec la meilleure convivialité possible, le modèlea été découpé en régions connectées les unes aux autres. Le schéma directeur du modèle,ainsi que sa représentation dans le logiciel, sont présentées aux figures 7.4 et 7.5.

Le modèle de simulation a donc été découpé en 15 régions. Il se compose de 239 sous-bassinsversants pour un total de 1’054 bandes d’altitude, dont 196 sont des bandes glaciaires. 140tronçons de cours d’eau et 20 tronçons de collecteurs ont été modélisés, en plus des 85prises d’eau. Finalement, 28 retenues et bassins de compensation ont été implémentés. Lesprincipaux paramètres de ces aménagements ont été considérés, comme les relations niveau-volume des retenues, relations niveau-débit sortant des ouvrages d’évacuation, capacitéset caractéristiques géométriques des prises d’eau et collecteurs, capacités des turbines etpompes, en plus des règlements d’urgence propres à chaque retenue.

7.2.2 Modèle d’optimisation

10 aménagements hydroélectriques ont été intégralement modélisés dans l’outil d’optimi-sation. Il s’agit des aménagements décrits en détail dans le chapitre 5 et dont la surfacedrainée représente plus de 25% de la surface totale du bassin versant du Rhône supérieur(tableau 5.2). Leurs règlements d’urgence ont été modélisés de manière identique dans lesoutil de simulation et d’optimisation.

Les aménagements sont modélisés par leur relation niveau-volume, niveau-débit évacué auxouvrages (relation de déversoir vanné ou non-vanné), capacité des prises d’eau en rivière,des collecteurs, fonctionnement des ouvrages (turbines, pompes, prises d’eau, limitateursde débit, vidanges). Les principes de l’optimisation (priorités, fonctions de coût) sont ceux

195

Fig. 7.4: Schéma directeur du modèle de simulation du bassin versant du Rhône supérieur.

196

Fig. 7.5: Modèle de simulation Routing System II, vue à haut niveau.

197

décrits en détail dans le chapitre 6. Les objectifs de l’optimisation sont au nombre de sept(figure 7.6).

Ce modèle d’optimisation est donc capable de déterminer les opérations préventives pourn’importe quel scénario de crue, qu’il provienne du modèle hydrologique Routing System IIou de n’importe quel autre modèle, pour autant que les données minimales requises soientfournies. Il n’est pourtant pas intéressant de l’exploiter à blanc, raison pour laquelle savalidation est proposée pour trois événements de crue récents et particulièrement biendocumentés.

7.3 Crue de septembre 1993

La crue du 25 septembre 1993 a causé d’importants dégâts dans le bassin versant du Rhôneet surtout sur certains de ses principaux affluents. La ville de Brigue en a particulièrementsouffert, puisque la Saltina, affluent du Rhône située en rive gauche, a débordé et inondé laville, causant 2 victimes et laissant 250’000m3 de sédiments et de boue dans les rues. Lesdégâts causés par cette catastrophe se sont montés à CHF500Mio (OFEG, 2002).

Les précipitations ont été produites par une perturbation provenant du Sud-Est du bassinversant et de la mer adriatique. Les masses humides ont été bloquées plusieurs jours sur lacrête principale des Alpes et l’effet de barrage résultant a conduit à d’intenses précipitationssur le versant Sud des Alpes, mais également sur leur flanc Nord et le bassin versant duRhône. Du mercredi 22 au dimanche 25 septembre, 375mm ont été mesurés à SimplonDorf, 381mm à Binn, 218mm à Saas Almagell et également 140mm au Gd-St-Bernard. Lacarte représentant les volumes cumulés moyens par sous-bassin versant (figure 7.7) illustrela distribution spatiale des précipitations et montre clairement la provenance Sud-Est desprécipitations.

Les conséquences hydrologiques de cet événement ont été les crues rares observées entre le24 et le 25 septembre sur la Saltina (env. 80m3/s) et la Viège (330m3/s), contributeursmajeurs du Rhône (figure 7.8). Les précipitations ont débuté le 22 septembre et ont connuplusieurs périodes intenses autour du 23 en matinée, dans la nuit du 23 au 24 et dans l’après-midi du 24 (figure 7.9). La chute des températures amorcée dès le début de la crue n’a paspermis de limiter le ruissellement, car la température autour de 2500m était toujours situéeau-dessus de 0 C.

L’intérêt de l’analyse d’un événement historique réside dans la connaissance des processuspassés et dans leur extrapolation. Toutefois, dans le cadre du développement d’un outilde prévision et d’aide à la décision, il est encore plus instructif d’essayer d’étudier quelleinformation aurait été disponible avec un pareil instrument. Cette étude, présentée dansles paragraphes suivants, se compose donc d’une analyse de la prévision hydrologique,des résultats proposés par le modèle d’aide à la décision et finalement de sa performanceopérationnelle, en comparant la situation avec application de ses résultats avec la situationhistorique. Les prévisions hydrologiques ont été réalisées par M. Javier Garcia Hernandez(Hernandez, 2006), leur analyse et utilisation dans le cadre du système d’aide à la décisionayant été effectuées dans ce travail.

198

Rhône à Brigue Viège à Viège

Dranses à Martigny Rhône à Sion

Rhône à Branson Rhône à Lavey

Rhône à la Porte du ScexFig. 7.6: Description des 7 objectifs de l’optimisation et des aménagements hydroélectriquesoptimisés correspondants.

199

Fig. 7.7: Carte des précipitations totales mesurées du 22 au 25 setpembre 1993.

Fig. 7.8: Mesures de débit à Brigue, Viège, Martigny-Dranses et à Sion, 22-25 septembre 1993.

200

Fig. 7.9: Mesures de précipitations à Binn, Brigue et Gd-St-Bernard, mesures de températures àUlrichen, 22-25 septembre 1993.

7.3.1 Prévisions hydrologiques lors de la crue de septembre 1993

La performance du modèle hydrologique lors de la crue de septembre 1993 a déjà été pré-sentée au chapitre 4. La simulation, en utilisant des prévisions parfaites, avec et sans miseà jour du modèle, avait été analysée. Dans ce paragraphe, la même analyse est proposée,mais avec l’utilisation des prévisions hydro-météorologiques fournies par MétéoSuisse. Cesdernières ont été obtenues à partir de re-simulations avec le modèle météorologique aLMo(Kaufmann et al., 2003), version opérationnelle 2005, dont les conditions de bord prove-naient des archives du modèle météorologique européen ECWMF. 5 prévisions différentesont été utilisées, de 72 heures chacune, dont les dates de début de simulation étaient :

– 22.09.1993 00 h– 22.09.1993 12 h– 23.09.1993 00 h– 23.09.1993 12 h– 24.09.1993 00 h

Les résultats des prévisions hydrologiques synthétisés sont présentés à la figure 7.10. Anouveau, les indicateurs de Nash, rapport des volumes et rapport des débits de pointe sontutilisés. Ils sont calculés à chaque fois sur les 72 heures de la prévision, sauf la référence,calculée sur la base des observations du 23.09.93 à 00 h au 25.09.93 à 00 h. Les valeurs sontcalculées par la moyenne arithmétique des 26 points de contrôle choisis (chapitre 4). Lesrésultats indiquent que les premières prévisions ont conduit à d’importantes sur-estimationsdes débits, mais que les dernières prévisions se sont révélées de bonne qualité. Un aperçu desdébits prévus à l’exutoire du bassin versant (Porte du Scex) permet également de constatercette évolution (7.11).

Les différences entre débits prévus et observés, parfois importantes, peuvent provenir detrois sources :

– prévision des volumes précipités– prévision des températures– évaluation des stocks du modèle hydrologique en début de prévision (conditions initiales)

Une analyse des volumes précipités prévus et mesurés est présentée à la figure 7.12. Lesrésultats indiquent clairement que les précipitations prévues ont été d’abord largement sur-estimées (plus de 100% d’erreur), puis qu’elles se sont révélées plus conforme à la réalité.

201

Fig. 7.10: Synthèse de la performance du modèle de prévision hydrologique pour la crue deseptembre 1993.

Fig. 7.11: Prévision hydrologique à la Porte du Scex, prévisions du 22 au 24 septembre 1993.

202

La première prévision météorologique fournissant un résultat réaliste est celle du 23.09.93 à12 h, soit 36 heures avant l’observation de la pointe de la crue.

(a)

(b)Fig. 7.12: Comparaison entre volumes précipités cumulés sur 12 heures prévus et observés(Hernandez, 2006). (a) Volumes totaux cumulés sur l’entier du bassin versant du Rhône supérieur,cumul effectué sur les 12 heures précédant le point de calcul. (b) Différence entre volumes prévus etobservés.

Une analyse plus fine de ces différences a également été effectuée, afin de déterminerdans quelles régions ces dernières étaient les plus marquées. La figure 7.13 illustre cetterépartition des différences pour deux prévisions. La première prévision du 22.09.93 à 00 h atrès fortement sur-estimé les volumes précipités, surtout sur la région du Bas-Valais (jusqu’à400%), mais également dans la vallée de Conches (jusqu’à 200%). Les températures enaltitude étaient également sur-estimées (entre 1.5 et 1.85˚C). La prévision du 23.09.93 à12 h est clairement meilleure, puisque les volumes précipités prévus sont plus réalistes maisfortement surestimés uniquement dans le val d’Anniviers (200%). A part quelques exceptionslocales en altitude, les températures prévues sont bonnes.

203

Fig. 7.13: Répartition spatiale des différences entre valeurs prévues et observées sur la durée d’uneprévision. (a) Précipitations totales du 22.09.93 00 h au 25.09.93 00 h. (b) Températures moyennesdu 22.09.93 00 h au 25.09.93 00 h. (c) Précipitations totales du 23.09.93 12 h au 26.09.93 12 h. (d)Températures moyennes du 23.09.93 12 h au 26.09.93 12 h.

204

Une analyse des erreurs provenant des conditions initiales peut être effectuée en comparantles prévisions effectuées avec mise à jour des variables d’état du modèle hydrologique. Poureffectuer cette opération, les observations ont été utilisées à chaque fois jusqu’à la date dudébut de la prévision hydrologique et le filtrage a été effectué sur une période de 24 heures etsur les 26 régions prévues. Les résultats indiquent une amélioration des performances surtouten début de crue puisque le biais volumétrique ainsi que le rapport des débits de pointe sontinférieurs à la situation sans mise à jour du modèle hydrologique (figures 7.14 et 7.15). Sil’on s’en réfère aux analyses proposées dans le chapitre 4, la mise à jour effectuée trop tôten début de crue avait tendance à dégrader la performance du modèle hydrologique. Eneffet, les ajustements sur les débits d’étiage provoquaient un abaissement général du niveaudes stocks et finalement leur sous-estimation. Cet effet se révèle finalement "bénéfique"avec l’utilisation des prévisions météorologiques, puisqu’il compense la sur-estimation desvolumes précipités. Mais que ce résultat n’enthousiasme pas trop le lecteur : comme il estabsolument impossible de prédire à l’avance si une prévision météorologique est sur-estiméeou au contraire sous-estimée, il est probable que le filtrage du modèle hydrologique effectuétrop tôt contribué à augmenter l’incertitude totale du modèle.

Fig. 7.14: Synthèse de la performance du modèle de prévision hydrologique pour la crue deseptembre 1993, avec mise à jour du modèle hydrologique.

Fig. 7.15: Prévision hydrologique à la Porte du Scex, prévisions du 22 au 24 septembre 1993, avecmise à jour du modèle hydrologique.

205

7.3.2 Optimisation des opérations préventives - validation de l’algorithme

Ce paragraphe n’entre pas encore dans le processus de décision en situation de crue,mais présente plutôt le fonctionnement de l’outil d’aide à la décision appliqué au bassinversant du Rhône supérieur (algorithme GP) et compare sa performance avec l’algorithmegénétique MOO (Leyland, 2002). Pour ce faire, la prévision du 22.09.1993 à 12 h aété considérée, car elle couvre l’ensemble de la crue et produit des volumes ruisselésparticulièrement importants. Cela conduit à une situation virtuellement délicate du point devue des aménagements hydroélectriques et l’optimisation des opérations préventives devientdifficile.

Données d’entrée

Les données d’entrée du modèle sont la prévision du 22.09.1993 à 12 h jusqu’au 25.09.1993à 12 h sans filtrage du modèle hydrologique. Les niveaux initiaux des réservoirs sont ceuxobservés le 22.09 à 12 h et les données de fonctionnement des ouvrages sont conformesà la situation historique : tout a fonctionné, sauf le palier inférieur de l’aménagementde Mattmark (sans incidence sur la vidange préventive). Ces données provenant d’unesimulation avec Routing System II ont donc été importées dans l’outil d’optimisation etdeux optimisations ont été effectuées : turbinage préventif seul et turbinage avec utilisationdes ouvrages vannés (vidanges). Les objectifs de l’optimisation sont les 7 points de contrôlesimplémentés dans le modèle et l’objectif global est la Porte du Scex où est effectuée lasomme des coûts des 7 objectifs (figure 7.6).

3 scénarios prévisionnels sont étudiés et correspondent aux bornes de l’intervalle de confianceà 80% du modèle hydrologique à la Porte du Scex (tableau 4.12). Le scénario MIN aété obtenu en modifiant les prévisions hydro-météorologiques de manière à atteindre laborne inférieure du débit de pointe du modèle sans aménagements. L’intensité prévue parMétéoSuisse a donc été réduite de manière uniforme de 15% et la température de -0.5˚C.Le scénario MOY correspond à la prévision déterministe, et le scénario MAX est obtenu enmodifiant les prévisions hydro-météorologiques de manière à obtenir la borne supérieure à laPorte du Scex. L’intensité prévue par MétéoSuisse a donc été augmentée de manière uniformede 15% et la température de 0.8˚C. Les hydrogrammes sans aménagements hydroélectriquesà Brigue, Viège et la Porte du Scex sont présentés à la figure 7.16.

Fig. 7.16: Hydrogrammes sans aménagements prévus le 22.09.1993 à 12 h, scénarios de l’intervallede confiance à 80%.

Résultats de l’optimisation

206

Pour chaque scénario considéré, l’optimisation a été réalisée avec les algorithmes GP etMOO. Le premier algorithme, utilisé dans le système opérationnel, fournit rapidementune solution, après 1 à 5 minutes sans ou avec optimisation des vidanges respectivement.L’algorithme génétique a besoin d’environ 20 h de calcul pour fournir une solution optimale(processeur Pentium de 3.40GHz, 1GB de mémoire vive).

Les opérations proposées par l’outil d’aide à la décision ont été validées par simulationavec Routing System II. La figure 7.17 présente les résultats de l’optimisation à la Portedu Scex, où sont calculés l’hydrogramme sans aménagements, la borne inférieure, leshydrogrammes optimisés sans utilisation des vidanges et validés ainsi que la somme desrejets des aménagements. Les indicateurs de performance sont également calculés entreles différents hydrogrammes (tableau 7.1) et permettent de chiffrer les différences entrehydrogrammes calculés dans l’outil d’optimisation et simulés, ainsi qu’entre les deuxméthodes d’optimisation. Les résultats indiquent que la différence entre hydrogrammesoptimisés calculés et simulés est très faible et l’erreur absolue moyenne ne dépasse pas 9m3/s,soit au maximum 0.6% du débit de pointe. Cette différence provient essentiellement du débutde l’événement lorsque les débits simulés sont plus élevés que les débits calculés, car lesconditions initiales dans les cours d’eau ne sont pas considérées dans l’outil d’optimisation.La différence entre les deux méthodes d’optimisation est par contre minime lorsque lesvidanges ne sont pas utilisées pour les opérations préventives.

Tab. 7.1: Indicateurs de performance entre les différents hydrogrammes calculés et simulés. Lecoefficient de Nash ainsi que l’erreur absolue moyenne (RMSE ) sont utilisés.

Nash RMSE (m3/s)Scénario GP-RS2 MOO-RS2 GP-MOO GP-RS2 MOO-RS2 GP-MOO

MIN 0.965 0.964 0.997 8.28 8.48 2.65MIN + vid 0.969 0.962 0.989 6.63 7.42 4.26

MOY 0.981 0.981 1.000 8.62 8.66 0.78MOY + vid 0.986 0.985 0.990 6.49 6.50 5.52

MAX 0.990 0.990 1.000 9.02 9.00 0.99MAX + vid 0.990 0.987 0.993 7.75 8.11 6.02

Tab. 7.2: Synthèse des résultats de l’optimisation sans et avec utilisation des vidanges selon laméthode Goal Programming (GP) et algorithme génétique MOO pour la prévision du 22.09.1993 à12 h.

No Date Scénario Vid. Qmax Qmax Coût Coût ∆ BorneFJ MOO FJ MOO (%) inf.

1 22.09.93 12h MIN NON 1392.20 1401.38 5.93E+06 5.78E+06 -0.655 -2 22.09.93 12h MIN OUI 1338.70 1307.10 1.51E+06 1.25E+06 2.418 -3 22.09.93 12h MOY NON 1879.38 1879.38 4.94E+07 4.93E+07 0.000 -4 22.09.93 12h MOY OUI 1682.32 1608.32 2.34E+07 1.64E+07 4.601 QMOO5 22.09.93 12h MAX NON 2497.32 2503.80 1.79E+08 1.74E+08 -0.259 -6 22.09.93 12h MAX OUI 2211.00 2106.22 9.49E+07 8.17E+07 4.975 QMOO

Une synthèse des performances des deux algorithmes d’optimisation avec utilisation des vi-danges est également présentée dans le tableau 7.2, où les débits de pointe ainsi que lesfonctions objectives sont récapitulés. Les résultats confirment que l’algorithme GP parvientà la même solution optimale que MOO lorsque seules les turbines sont employées poureffectuer une opération préventive. Lorsque les vidanges sont employées, des différences sen-sibles apparaissent. Les limites de l’algorithme d’optimisation sont atteintes et l’hypothèseméthodologique propre au pre-emptive goal programming devient défavorable.

207

Fig. 7.17: Résultats de l’optimisation sur la base des prévisions du 22.09.1993 à 12 h pour lesscénarios MIN, MOY et MAX sans ou avec utilisation des vidanges. Les hydrogrammes sansaménagements, borne inférieure, optimisés avec GP et MOO, validés ainsi que la somme des rejetsdes aménagements sont présentés.

208

En effet, dans l’algorithme GP, les turbines sont optimisées avant les vidanges. Cela signifieque, pour la plupart des aménagements (sauf Mattmark et Emosson), les durées de turbinagesont fixées à la suite de l’optimisation du turbinage, et elles ne varient plus lors del’optimisation des vidanges. Lors de cette phase, les durées de vidange sont ajustées (pour desdurées de turbinage déterminées) dans l’optimisation locale, de manière à libérer un volumesuffisant pour stocker les débits de crue dans la retenue. Du point de vue mathématique,il y a dépendance entre les variables liées au turbinage et celles liées à l’utilisation desvidanges. L’algorithme est par conséquent incapable de favoriser la vidange au détrimentdu turbinage, ce que permet par définition l’algorithme MOO, dans lequel toutes les 30variables sont indépendantes.

Ce défaut de l’algorithme d’optimisation n’a toutefois que peu d’impact sur la prise dedécision, pour trois raisons. D’abord, l’incertitude de la prévision hydrologique est siimportante que l’éventuelle perte de performance de la gestion des aménagements lors d’unecrue ne sera pas due à l’optimisation, mais bien à la décision prise sur la base de la prévisionhydrologique. Ensuite, les décisions qui auront le plus d’impact sur les dégâts sont relatives àl’enclenchement ou le déclenchement des turbines et l’ouverture ou la fermeture des vidangessuffisamment tôt et non à l’ajustement précis des opérations. Enfin, la décision d’ouvrir lesvidanges de fond est extrêmement difficile à prendre, car des dégâts seront créés à coup sûrà l’aval des aménagements en cas d’ouverture importante des vannes. Elle ne sera donc prisequ’en dernier recours, lorsque l’incertitude relative à la prévision hydrologique sera réduite,et sortira du cadre de l’optimisation.

Analyse de sensibilité

Les risques lors d’une optimisation déterministe sont en général liés à l’incertitude desdonnées d’entrée. En effet, la solution optimale est susceptible de varier considérablementen cas de faible variation des données d’entrée, qui sont ici les hydrogrammes aux objectifset les volumes entrants dans les retenues. Une analyse de sensibilité permet donc de mieuxcerner ces risques en étudiant la variabilité de la solution optimale pour différents scénarioshydrologiques.

La prévision du 22.09.1993 à 12 h a donc été utilisée comme référence, et les scénariosassociés sont ceux présentés au paragraphe précédent. La figure 7.18 illustre les opérationsde turbinage préventif associées à ces trois scénarios hydrologiques. Malgré une fourchetted’incertitude hydrologique de l’ordre de 50% autour du débit de pointe moyen (figure 7.16),les différences entre les opérations de turbinage préventif sont relativement faibles. En effet,seules les opérations préventives des aménagements de Mauvoisin et de Pallazuit (dans unemoindre mesure) diffèrent selon le scénario hydrologique.

Les débits sortants des retenues par turbinage et déversement sont mis en relation avec leshydrogrammes optimaux dans le Rhône à la Porte du Scex (figure 7.19). Selon le scénariocalculé, les rejets totaux à la Porte du Scex varient entre 250 et 500m3/s. Cependant, cesdifférences proviennent essentiellement des déversements qui se produisent lors de la pointede la crue. A nouveau, les rejets calculés avant la montée de la crue (48 premières heures)sont similaires entre les différents scénarios.

Sur la base de ces prévisions, le choix des opérations préventives est facilité lorsque pourchaque scénario la consigne optimale ne varie pas. C’est le cas ici pour la plupart desaménagements dont le turbinage préventif optimal est très peu sensible à la prévision.Dans le cas de l’aménagement de Mauvoisin, le choix de turbiner ou de ne pas turbinerest par contre directement lié à l’appréciation du risque du décideur. En effet, dans lescénario MIN, aucun turbinage préventif ne semble nécessaire, alors qu’une opération de

209

Fig. 7.18: Opérations de turbinage préventif associées aux 3 scénarios hydrologiques, prévision du22.09.1993 à 12 h.

18 h est déjà nécessaire pour le scénario MOY et 44 h pour le scénario MAX. Des nouveauxéléments doivent alors être intégrés dans la réflexion afin de permettre la meilleure prisede décision possible. Parmi ceux-ci, il convient de noter que l’aménagement de Mauvoisinprévoit certainement de produire de l’électricité dans cette fenêtre de 44 h avant la crue.Il s’agit donc de s’assurer qu’une production de 18 h au minimum soit effectuée dans cettefenêtre horaire pour que l’opération préventive des scénarios MIN et MOY soit réalisée. Ils’agira ensuite de vérifier que l’heure d’arrêt du turbinage soit également respectée. Enfin, lesuivi en temps réel des mesures de débit, de précipitations et des températures ainsi que lerenouvellement des prévisions toutes les 12 h permettent d’adapter la stratégie et de limiterl’impact de mauvaises décisions.

Fig. 7.19: Hydrogrammes rejetés par les aménagements et totaux à la Porte du Scex pour troisscénarios hydrologiques, prévision du 22.09.1993 à 12 h.

Analyse de sensibilité avec optimisation des vidanges

L’objectif de cette analyse est similaire au précédent, mais l’utilisation des vidanges et desouvrages vannés est possible si nécessaire pour l’abaissement préventif plus rapide du niveaud’eau dans les retenues. Les consignes optimales sont présentées à la figure 7.20 où la duréeminimale de vidange est également fournie. Les résultats indiquent à nouveau une faiblesensibilité des consignes optimales à l’incertitude hydrologique. Les aménagements GrandeDixence, Mauvoisin, Emosson, Salanfe, Lienne et Pallazuit n’ont de toute évidence pasbesoin d’utiliser leurs organes de vidange, tandis que les aménagements Mattmark, Bitsch,

210

Lötschen et éventuellement Gougra en auraient l’usage. Des indications supplémentairespeuvent être tirées des hydrogrammes présentés à la figure 7.21, où la fenêtre horaire de 36 à48 heures avant la pointe de crue peut être exploitée pour effectuer les opérations préventives.Pour tous les scénarios, les débits évacués atteignent 360m3/s pendant une durée de 24 à36 h et permettent une réduction du débit de pointe dans le Rhône sans provoquer dedéversements importants des retenues. Le gain en sécurité, grâce à l’utilisation des ouvragesde vidange pour l’abaissement préventif du niveau d’eau, peut être conséquent : il suffit,pour s’en convaincre, de comparer les hydrogrammes à la Porte du Scex avec ceux présentésà la figure 7.19 et d’observer que les débits de pointe avec utilisation des vidanges sont prèsde 300m3/s inférieurs à ceux obtenus sans leur utilisation. Cette réduction correspond à ungain de 10% à 12% sur le débit de pointe.

Fig. 7.20: Opérations de turbinage et vidange préventifs associées aux 3 scénarios hydrologiques,prévision du 22.09.1993 à 12 h.

Fig. 7.21: Hydrogrammes rejetés par les aménagements et totaux à la Porte du Scex pour troisscénarios hydrologiques, prévision du 22.09.1993 à 12 h, avec optimisation des vidanges.

7.3.3 Performance opérationnelle du système d’aide à la décision

Ce chapitre traite du processus de décision tout au long d’un événement de crue durantplusieurs jours et de l’impact des décisions prises sur la protection du bassin versant.L’analyse est toujours appliquée à la crue de septembre 1993 et les prises de décisionsse sont déroulées comme suit :

211

1. Prévision du 22.09.93 à 12 h et décision2. Prévision du 23.09.93 à 00 h et décision3. Prévision du 23.09.93 à 12 h et décision4. Prévision du 24.09.93 à 00 h et décision5. Mise à jour du 24.09.93 à 06 h et décision6. Prévision du 24.09.93 à 12 h et décision7. Mise à jour du 24.09.93 à 15 h et décision8. Mise à jour du 24.09.93 à 18 h et décision9. Mise à jour du 24.09.93 à 21 h et décision

Le tableau 7.3 synthétise les principales variables liées aux aménagements hydroélectriques.Le niveau (Niv) et le volume disponible (V disp) présentent l’état actuel de la retenueprincipale de chaque aménagement, le volume de turbinage préventif (V TP) et le volumeentrant (V in) permettent de déterminer le nouvel état actuel lors de la période de simulationsuivante. Le volume de turbinage préventif est de plus l’indicateur de la décision prise pourun aménagement.

Il est ensuite nécessaire de comparer les hydrogrammes observés, optimaux et opérationnelspour déterminer la performance du système d’aide à la décision. Les hydrogrammesoptimaux correspondent aux opérations préventives optimales à prévisions parfaites tandisque les hydrogrammes opérationnels correspondent aux opérations préventives qui auraienteffectivement pu être effectuées avec l’information prévisionnelle disponible. La figure 7.22illustre les différents hydrogrammes et rejets à la Porte du Scex en fonction de l’informationdisponible. Les résultats indiquent que sur la base des prévisions hydro-météorologiquesréelles, les décisions conduisant à une consigne optimale auraient été prises. En effet, lesdécision de turbiner dès le 22.09.1993 à 12 h sur Grande Dixence, Mauvoisin, Gougra,Mattmark, Bitsch, Pallazuit et Lötschen étaient adéquates. Cela aurait permis l’arrêt desopérations préventives dès le 24.09.1993 à 15 h (basé sur l’analyse des mesures de débit) etla protection maximale du Rhône et de ses principaux affluents pendant la pointe de la crue(nuit du 24 au 25.09.1993).

Dans ce cas, la performance opérationnelle du système d’aide à la décision est conforme àsa performance théorique.

7.3.4 Conclusions - Crue de septembre 1993

La prévision hydrologique est soumise à une important incertitude. En effet, il n’est pasimpossible d’obtenir une erreur totale de prévision de l’ordre de 100% 60 h avant la pointede la crue. Toutefois, les prévisions hydrologiques de la crue de septembre 1993 se sontaméliorées au cours du temps et les prévisions calculées 48 h à l’avance étaient déjà de trèsbonne qualité. Lors de cet événement, la procédure de mise à jour des variables d’état dumodèle hydrologique aurait également amélioré la qualité des prévisions, surtout pour deshorizons de prévision de 48 à 72 h.

L’algorithme d’optimisation est performant, puisqu’il est capable en quelques dizaines desecondes de fournir une solution de qualité similaire à celle obtenue à la suite d’un algorithmeévolutif nécessitant un dizaine d’heures de calcul. La performance de l’outil d’optimisationest un peu moins bonne lorsque la situation prévue est trop extrême et que les vidangesdoivent être également optimisées. Par ailleurs, cette incertitude est faible en regard de

212

Tab. 7.3: Récapitulatif des variables liées aux aménagements hydroélectriques lors de l’optimisationdes opérations préventives, simulations débutant le 22.09.1993 à 12 h.

GD FMM ESA FMG KWM Sal EM EL GSB KWL22.09.93 12 h

Niv 2362.3 1972.0 1925.8 2248.9 2194.4 1908.7 1433.0 1775.0 1808.0 1306.0V disp 7.40 6.30 13.00 0.37 4.60 26.07 0.72 1.66 1.33 0.44V TP 2.38 1.19 0.00 0.52 0.86 0.00 2.38 0.00 0.43 0.92V in 3.68 1.03 0.88 0.08 0.82 0.09 0.88 0.00 0.12 0.37

23.09.93 00 hNiv 2362.5 1971.9 1926.1 2247.9 2194.4 1908.7 1425.1 1775.0 1807.5 1298.3V disp 6.09 6.46 12.12 0.81 4.64 25.98 2.21 1.66 1.64 0.99V TP 2.38 1.19 0.00 0.52 0.86 0.00 2.38 0.00 0.43 0.92V in 4.73 1.33 1.15 0.31 2.08 0.10 1.08 0.00 0.22 0.53

23.09.93 12 hNiv 2363.1 1972.0 1926.5 2247.7 2195.1 1908.8 1417.3 1775.0 1807.2 1291.0V disp 3.74 6.32 10.97 1.02 3.42 25.88 3.51 1.66 1.86 1.38V TP 2.38 0.00 0.00 0.52 0.86 0.00 2.38 0.00 0.14 0.92V in 4.27 1.30 1.38 0.53 1.93 0.10 1.34 0.00 0.29 0.60

24.09.93 00 hNiv 2363.6 1972.6 1926.9 2247.8 2195.7 1908.9 1410.1 1775.0 1807.4 1281.7V disp 1.85 5.02 9.59 1.01 2.36 25.78 4.54 1.66 1.71 1.70V TP 1.19 0.00 0.00 0.26 0.43 0.00 1.19 0.00 0.22 0.46V in 2.15 1.24 0.99 0.27 1.76 0.07 0.76 0.00 0.16 0.26

24.09.93 06 h2363.8 1973.2 1927.3 2247.8 2196.5 1909.0 1406.8 1775.0 1807.3 1280.0

Niv 0.88 3.78 8.60 0.99 1.03 25.71 4.97 1.66 1.77 1.90V disp 1.85 5.02 9.59 1.01 2.36 25.78 4.54 1.66 1.71 1.70V TP 2.78 1.53 1.23 0.29 2.02 0.15 0.96 0.00 0.34 0.34V in -0.71 2.25 7.37 0.96 -0.56 25.56 5.20 1.66 1.43 2.02

24.09.93 12 hNiv 2364.0 1973.9 1927.7 2247.8 2197.0 1909.1 1405.0 1775.0 1807.9 1280.0V disp -0.71 2.25 7.37 0.96 -0.56 25.56 5.20 1.66 1.43 2.02V TP 0.59 0.30 0.00 0.00 0.22 0.00 0.59 0.00 0.00 0.23V in 1.46 0.63 0.61 0.10 0.67 0.08 0.56 0.00 0.25 0.33

24.09.93 15 hNiv 2364.0 1974.0 1927.9 2247.9 2197.0 1909.1 1404.7 1775.0 1808.2 1280.0V disp -1.57 1.91 6.76 0.86 -1.01 25.48 5.23 1.66 1.18 1.92V TP 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00V in 1.40 0.52 0.59 0.09 0.49 0.07 0.70 0.00 0.27 0.60

24.09.93 18 hNiv 2364.0 1974.3 1928.0 2247.9 2197.0 1909.2 1410.2 1775.0 1808.6 1292.2V disp -2.97 1.39 6.17 0.77 -1.50 25.41 4.53 1.66 0.91 1.32V TP 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00V in 1.28 0.43 0.55 0.09 0.31 0.05 0.76 0.00 0.20 0.55

24.09.93 21 hNiv 2364.0 1974.5 1928.2 2248.0 2197.0 1909.2 1415.6 1775.0 1809.0 1301.6V disp -4.25 0.96 5.62 0.68 -1.81 25.36 3.77 1.66 0.71 0.77V TP 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00V in 1.10 0.47 0.69 0.11 0.37 0.06 1.16 0.00 0.16 0.54

25.09.93 00 hNiv 2364.0 1974.7 1928.5 2248.1 2197.0 1909.3 1422.8 1775.0 1809.2 1308.5V disp -5.35 0.49 4.93 0.57 -2.18 25.30 2.61 1.66 0.55 0.23V TP 0.00 0.00 0.00 0.00 0.22 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00V in 1.00 0.41 0.65 0.07 0.37 0.05 1.19 0.00 0.12 0.41V disp -6.35 0.08 4.28 0.50 -2.34 25.25 1.42 1.66 0.43 -0.18

213

Fig. 7.22: Comparaison entre hydrogrammes et rejets sans aménagements, observés, optimaux etopérationnels.

l’incertitude de la prévision hydrologique. Cependant, les opérations proposées par cet outilpermettent de réduire significativement les débits dans le Rhône même en cas de crue"extrême".

L’analyse de sensibilité montre que la solution ne varie que peu en fonction de l’incertitudehydrologique et que certaines situations douteuses peuvent être réglées par une exploitationnormale de la retenue et évitent une prise de risque excessive au décideur. L’utilisation denouvelles prévisions toutes les 12 h permet enfin d’ajuster la stratégie de gestion des cruesen consultant les dernières informations disponibles.

Enfin, la performance opérationnelle du système est excellente. En effet, les décisionsprises sur la base des prévisions hydrologiques auraient conduit à l’opération optimale desaménagements hydroélectriques lors de la crue de septembre 1993, malgré des erreurs deprévision hydrologique importantes. Cela confirme la robustesse du modèle d’optimisation,capable d’identifier les aménagements critiques pour la protection contre les crues, même sid’importantes erreurs dans les inputs sont à attendre. Il convient néanmoins de rappeler quedans les dégâts liés aux débordements de la Saltina à Brigue n’auraient pas pu être évités,car aucune retenue importante ne se trouve en amont de ce cours d’eau.

7.4 Crue d’octobre 2000

Le dimanche 15 octobre 2000, le Valais se réveilla les pieds dans l’eau et les larmes auxyeux. Les intenses précipitations qui avaient débuté à nouveau dans la région du Simplon levendredi 13 octobre s’étaient répandues sur tout le bassin versant du Rhône et provoquèrentde nombreux dommages aux biens et causèrent la mort de 16 personnes en différents lieux.Dans la région du Simplon tout d’abord, une coulée de boue traversa le village de Gondoet emporta plusieurs personnes. Puis ce fut au tour de Stalden à l’amont de Viège de subirune lave torrentielle également mortelle. Juste en face, le village de Baltschieder se retrouva

214

recouvert de 1 à 2mètres de sédiments déposés par le torrent du Baltschiederbach sorti deson lit. Toute cette eau ne put bien entendu pas être totalement transportée par le Rhône,dont les digues se rompirent à la hauteur de Chamoson à l’aval de Sion et provoquèrentl’inondation de la plaine. Les dégâts continuèrent à être recensés à Martigny lorsque laDranse déborda à l’entrée de la ville, puis dans le Chablais vaudois situé juste à l’amont del’embouchure du fleuve dans le Léman. Les dégâts assurés totaux se sont montés à plus deCHF500Mio (OFEG, 2002). Si ces événements tragiques marquèrent les esprits, il convientde se rappeler que les habitants de la vallée d’Aoste, au Sud de la crête principale des Alpes,payèrent un tribut encore plus lourd au ciel déchaîné.

Les intenses précipitations provenant de masses humides issues de la mer Adriatique furentassociées à des températures relativement élevées, puisque l’isotherme 0 C se situait autourde 2700m s.m. Du 13.10.2000 au 15.10.2000, 646mm furent mesurés à Simplon-Dorf, 511mmà Binn, 377mm à Robiei, 245mm au Gd-St-Bernard, mais encore 75mm à Sion et àMartigny. Contrairement à l’événement de 1993 où les précipitations se produisirent surtoutdans les vallées de la Viège et de Conches, les intempéries frappèrent tout le Valais. La figure7.23 illustre la distribution spatiale des précipitations cumulées sur 72 h du 13.10.2000 au15.10.2000.

Les précipitations ont débuté le 13 octobre et ont connu deux périodes intenses d’abord dansla journée de 13 où il neiga en altitude, puis dans la nuit du 14 au 15 octobre (figure 7.25).La fonte de la neige associée à ces fortes pluies augmenta fortement le ruissellement, qui futheureusement réduit dans la vallée de la Viège grâce au refroidissement de 2-4 C durant lanuit du 14 au 15.

Fig. 7.23: Carte des précipitations totales mesurées du 13 au 15 octobre 2000.

Les débits mesurés dans les principaux affluents ont été particulièrement élevés (figure 7.24) :545m3/s à Brigue, 188m3/s à Viège, mais surtout 166m3/s (pointe estimée à 200m3/s) à

215

Martigny, 905m3/s à Sion et 1360m3/s à la Porte du Scex. Les temps de retour ont étéd’environ 100 ans à Martigny, Sion et à la Porte du Scex.

Fig. 7.24: Mesures de débit à Brigue, Viège, Martigny-Dranses, Sion et à la Porte du Scex, 13-16octobre 2000.

Fig. 7.25: Mesures de précipitations à Simplon-Dorf, Binn et Gd-St-Bernard, mesures de tempéra-tures à Ulrichen, 12-15 octobre 2000.

A nouveau, des fortes crues se sont produites en automne à la suite d’une situation de barragedurablement installée sur la crête principale des Alpes. Les précipitations réparties sur toutle bassin versant ont atteint des valeurs encore jamais mesurées dans le Sud-Est du bassinversant. Les retenues alpines étaient à nouveau presque pleines et leur influence, bien quebénéfique pour la protection contre les crues, ne fut pas optimale. Les paragraphes suivantsprésentent donc les apports d’un modèle de prévision hydrologique couplé à un outil d’aideà la décision pour l’opération des aménagements hydroélectriques lors des crues.

7.4.1 Prévisions hydrologiques lors de la crue d’octobre 2000

Comme dans le chapitre consacré à la crue de septembre 1993, la performance du modèlehydrologique est présentée sur la base des prévisions hydro-météorologiques du modèle aLMo(Kaufmann et al., 2003) version opérationnelle 2005 de MétéoSuisse, dont les conditions debord provenaient des archives du modèle météorologique européen ECWMF. 7 prévisionsdifférentes de 72 heures chacune ont été utilisées, dont les dates de début de simulationétaient :

216

– 12.10.2000 00 h– 12.10.2000 12 h– 13.10.2000 00 h– 13.10.2000 12 h– 14.10.2000 00 h– 14.10.2000 12 h– 15.10.2000 00 h

Les résultats des prévisions hydrologiques synthétisés sont présentés à la figure 7.26. Anouveau, les indicateurs de Nash, rapport des volumes et rapport des débits de pointe sontutilisés. Ils sont calculés à chaque fois sur les 72 h de la prévision, sauf la référence, calculéedu 13.09.93 à 00 h au 16.09.93 à 00 h. Les valeurs sont calculées par la moyenne arithmétiquedes 26 points de contrôle choisis (chapitre 4).

Les résultats montrent qu’en moyenne les prévisions ont toujours été relativement conformesà la réalité des observations. En effet, malgré une légère surestimation des débits maximauxlors des premières prévisions des 12.10.2000 à 00 h jusqu’au 13.10.2000 à 00 h, les rapportsdes volumes étaient en moyenne proches de 1. Si l’on analyse cependant les hydrogrammesprévus à la Porte du Scex sans mise à jour du modèle hydrologique (figure 7.27), il sembleque le modèle ait d’abord généré une montée en crue trop tôt (prévisions du 12.10.2000 à00 h et 12 h), puis sous-estimé le débit de pointe.

Fig. 7.26: Synthèse de la performance du modèle de prévision hydrologique pour la crue d’octobre2000.

Il est maintenant intéressant d’analyser la performance des prévisions hydro-météorologiquespar comparaison entre volumes précipités prévus et observés pour les 7 prévisions disponibles(figure 7.28). On observe que les volumes précipités prévus ont d’abord été fortementsurestimés sur la période du 14.10. à 00 h au 15.10. à 12 h par toutes les prévisionsdisponibles. Les différences se situaient entre 15 et 30mm sur 12 h. Ensuite, elles ont toutesété revues à la baisse pour sous-estimer la précipitation totale de près de 50mm le 15.10. à12 h. La fin de l’épisode de précipitations est par contre bien modélisé. Au vu de ces résultats,il semble qu le modèle de prévision météorologiques ait surtout considéré la période des fortesprécipitations environ 24 h en avance, car les volumes totaux et l’allure des courbes desvolumes ressemblent bien à la courbe des observations. Il n’a donc pas produit un fort biais.La meilleure prévision semble être celle du 13.10. à 00 h, avec une faible surestimation duvolume précipité de moins de 5mm pour les 12 h précédant le 15.10. à 12 h. Cette prévision ad’ailleurs permis de réaliser une excellente prévision hydrologique (figure 7.27), où la montéeen crue est bien représentée par le modèle hydrologique et où le débit de pointe dépasse ledébit observé de 124m3/s, soit 9% d’excès.

217

Fig. 7.27: Prévision hydrologique à la Porte du Scex, prévisions du 12 au 16 octobre 2000, sansmise à jour du modèle hydrologique.

L’analyse spatiale des différences entre précipitations cumulées et températures moyennesprévues et observées est présentée aux figures 7.29 et 7.30. Ces différences sont moinsmarquées que lors de l’événement de crue de septembre 1993. En effet, les prévisions deprécipitations du 12.10.2000 à 00 h étaient légèrement surestimées (20% à 40% en Haut-Valais, plus de 100% en Valais central), mais les températures prévues étaient relativementconformes aux observations. La prévision météorologique du 13.10.2000 à 00 h est cellequi présente la meilleure adéquation avec les observations. C’est d’ailleurs cette prévisionqui a conduit à la meilleure estimation du débit à la Porte du Scex. La surestimationdes précipitations est ici située entre 0% et 20% sur une grande partie du bassin versant,et les températures prévues en altitude (bassins versants glaciaires) sont très proches destempératures mesurées. La prévision du 15.10.2000 à 00 h a par contre systématiquementsous-estimé tant les précipitations que les températures, ce qui a conduit naturellement aune importante sous-estimation du débit dans le Rhône.

La procédure de mise à jour du modèle hydrologique n’apporte pas d’amélioration significa-tive à la prévision de débit dans le Rhône (figure 7.31). En effet, comme illustré à la figure7.32, les indicateurs de performance moyens sont similaires à ceux obtenus sans filtrage.Cette similitude signifie que les conditions initiales des réservoirs des modèles hydrologiquesétaient très bien estimées par le modèle de simulation continue et que le filtrage n’était pasindispensable. En outre, la prévision hydrologique du 13.10. à 00 h a été fortement dégradéepar la procédure.

7.4.2 Performance opérationnelle du système d’aide à la décision

Ce chapitre présente l’analyse de l’événement de crue d’octobre 2000 du point de vuede la gestion des aménagements hydroélectriques en se concentrant sur la performanceopérationnelle du modèle d’aide à la décision. La validation de l’algorithme d’optimisationpar comparaison avec un algorithme évolutif n’est par présentée ici, car elle a déjà étéeffectuée pour le modèle théorique et pour la crue de septembre 1993.

L’analyse à de nouveau été effectuée en admettant une prévision hydrologique réelle, c’est-à-dire obtenue avec des re-simulations des intempéries par le modèle aLMo sur la base des

218

(a)

(b)Fig. 7.28: Comparaison entre volumes précipités cumulés sur 12 h prévus et observés (Hernandez,2006). (a) Volumes totaux cumulés sur l’entier du bassin versant du Rhône supérieur, cumul effectuésur les 12 h précédant le point de calcul. (b) Différence entre volumes prévus et observés.

219

(a)

(b)

(c)Fig. 7.29: Répartition spatiale des différences entre valeurs prévues et observées sur la durée d’uneprévision. (a) Précipitations totales du 12.10.00 00 h au 15.10.00 00 h. (b) Précipitations totales du13.10.00 00 h au 16.10.00 00 h. (c) Précipitations totales du 14.10.00 00 h au 17.10.00 00 h.

220

(a)

(b)

(c)Fig. 7.30: Répartition spatiale des différences entre valeurs prévues et observées sur la durée d’uneprévision. (a) Températures moyennes du 12.10.00 00 h au 15.10.00 00 h. (b) Températures moyennesdu 13.10.00 00 h au 16.10.00 00 h. (c) Températures moyennes du 14.10.00 00 h au 17.10.00 00 h.

221

Fig. 7.31: Prévision hydrologique à la Porte du Scex, prévisions du 12 au 16 octobre 2000, avecmise à jour du modèle hydrologique.

Fig. 7.32: Synthèse de la performance du modèle de prévision hydrologique pour la crue d’octobre,avec mise à jour du modèle hydrologique.

222

conditions de bord provenant du modèle ECMWF. Les étapes de simulation et de décisionsse sont déroulées comme suit :

1. Prévision du 13.10.00 à 00 h et décision2. Prévision du 13.10.00 à 12 h et décision3. Prévision du 14.10.00 à 00 h et décision4. Prévision du 14.10.00 à 12 h et décision5. Prévision du 15.10.00 à 00 h et décision6. mise à jour du 15.10.00 à 06 h et décision7. prévision du 15.10.00 à 12 h et décision

Le tableau 7.5 présente la situation des principales retenues d’accumulation toutes les 12 h.Pour rappel, les décisions ont été prises dans cette analyse sur la base des prévisionshydrologiques (incluant les prévisions météorologiques), mais la situation des aménagementsà la fin de chaque période de 12 h a été évaluée en fonction des volumes effectivement entrésdans les retenues, conformément à ce qui se passerait en réalité.

Les résultats indiquent que lors de la crue d’octobre 2000 seule 4 aménagements devaienteffectuer un abaissement préventif du plan d’eau. Il s’agissait des aménagements Mattmark(KWM), Bitsch (EM), Lötschen (KWL) et dans une moindre mesure Pallazuit (GSB). Leturbinage effectué suffisamment tôt à partir de ces retenues permettait alors de garantirun remplissage optimal à la fin de la crue tout en assurant la protection des cours d’eausitués à l’aval. Seule la retenue de Ferden (aménagement Lötschen) était en situation desurverse à la à partir du 15.10.2000 à 02 h, son volume de stockage total étant relativementpeu important (1.7Miom3).

Sur la base des observations, d’autres décisions pouvaient être prises qui assuraient laréduction du débit dans le Rhône : dès le 15.10.2000 à 06h, il était indispensable d’arrêtertoute production d’électricité sur les aménagements dont le volume de stockage résiduelétait suffisant (ce qui n’a pas systématiquement été fait lors de la crue). Il s’agissait alors deGrande Dixence (GD), Mauvoisin (FMM), Emosson (ESA), Gougra (FMG), Salanfe (Sal)et Lienne (EL), en plus des aménagements Mattmark et Bitsch, dont les niveaux avaientété suffisamment abaissés. Dès le 15.10.2000 à 12 h, il était encore possible d’arrêter laproduction à Pallazuit.

Finalement, la crue étant passée à Sion le 15.10.2000 dans la soirée, il était possible derelaxer totalement les contraintes sur les aménagements dès le 16.10.2000 à 00 h. Le résultatde la gestion des aménagements hydroélectrique sur la base du système d’aide à la décisionest présenté à la figure 7.33. Les hydrogrammes sans aménagements, observé, optimal etopérationnel sont présentés à la Porte du Scex, en plus des rejets observés, optimaux etopérationnels. La réduction observée du débit de pointe grâce à l’influence des aménagementshydroélectriques était de 150m3/s. Elle aurait pu être de 306m3/s (opérationnel), proche dela réduction optimale de 322m3/s. Dans ce cas, le système d’aide à la décision aurait doncpermis de doubler l’effet protecteur des aménagements hydroélectriques. L’ampleur de cerésultat s’explique par l’analyse des rejets. En effet, les rejets observés étaient de 223m3/sà la Porte du Scex pendant le passage de la pointe de la crue (15.10.2000 à 17 h), alors queles rejets opérationnels auraient été de 63m3/s. On retrouve ici une différence de 160m3/sentre rejets observés et opérationnels.

Tout comme lors de la crue de septembre 1993, l’application de principes simples sur labase d’une prévision quantitative de volumes entrant dans les retenues aurait permis une

223

gestion quasi-optimale des aménagements hydroélectriques lors de la crue et une réductionsignificative des dégâts dans les cours d’eau aval.

Tab. 7.4: Récapitulatif des variables liées aux aménagements hydroélectriques lors de l’optimisationdes opérations préventives, simulations débutant le 13.10.2000 à 00 h.

GD FMM ESA FMG KWM Sal EM EL GSB KWL13.10.00 00 h

Niv 2359.4 1969.6 1917.6 2247.3 2194.2 1913.1 1433.7 1775.0 1808.7 1307.0V disp 18.65 11.39 37.22 1.99 4.87 19.98 0.57 1.66 0.88 0.36V TP 0.00 0.00 0.00 0.00 0.86 0.00 2.38 0.00 0.43 0.92V in 0.59 0.20 0.61 0.06 0.44 0.05 0.22 0.00 0.19 0.16

13.10.00 12 hNiv 2359.5 1969.7 1917.8 2247.0 2194.0 1913.1 1422.1 1775.0 1808.3 1296.1V disp 18.06 11.19 36.61 1.93 5.29 19.93 2.73 1.66 1.12 1.12V TP 0.00 0.00 0.00 0.00 0.86 0.00 2.38 0.00 0.43 0.92V in 0.72 0.64 1.19 0.08 0.64 0.07 0.42 0.00 0.28 0.58

14.10.00 00 hNiv 2359.7 1970.0 1918.3 2247.1 2193.9 1913.2 1409.1 1775.0 1808.1 1289.1V disp 17.34 10.55 35.42 1.85 5.51 19.86 4.68 1.66 1.27 1.46V TP 0.00 0.00 0.00 0.00 0.86 0.00 0.40 0.00 0.43 0.92V in 1.54 1.88 2.71 0.14 1.95 0.27 1.01 0.00 0.65 0.97

14.10.00 12 hNiv 2360.1 1970.9 1919.2 2247.2 2194.5 1913.4 1413.6 1775.0 1808.4 1290.3V disp 15.80 8.67 32.71 1.71 4.43 19.59 4.07 1.66 1.06 1.41V TP 0.00 0.00 0.00 0.00 0.86 0.00 0.79 0.00 0.43 0.92V in 3.15 2.23 2.96 0.20 1.76 0.36 1.28 0.00 0.63 0.98

15.10.00 00 hNiv 2360.87 1971.94 1920.19 2247.36 2195.03 1913.59 1416.84 1775.00 1808.72 1291.65V disp 12.66 6.44 29.75 1.51 3.53 19.23 3.58 1.66 0.86 1.35V TP 0.00 0.00 0.00 0.00 0.43 0.00 1.19 0.00 0.22 0.46V in 2.10 1.14 1.63 0.12 0.70 0.21 1.33 0.00 0.29 0.72

15.10.00 06 hNiv 2361.4 1972.5 1920.7 2247.5 2195.2 1913.7 1417.8 1775.0 1808.8 1296.6V disp 10.56 5.30 28.12 1.39 3.26 19.02 3.44 1.66 0.78 1.09V TP 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.22 0.00V in 2.00 0.88 1.41 0.10 0.51 0.16 2.20 0.00 0.25 1.73

15.10.00 12 hNiv 2361.9 1972.9 1921.2 2247.5 2195.5 1913.8 1430.3 1775.0 1808.9 1311.0V disp 8.56 4.42 26.71 1.29 2.75 18.86 1.24 1.66 0.75 -0.64

7.4.3 Conclusions - Crue d’octobre 2000

L’analyse de la crue d’octobre 2000 confirme les observations faites dans les paragraphesconsacrés à la crue de septembre 1993. Premièrement, le type d’événement était similaire,avec des masses humides provenant du Sud-Est (Grebner et al., 2000). Le modèle deprévision météorologique a bien mis en évidence la structure spatiale des précipitations,tout comme leur intensité, malgré un décalage d’un jour environ en avance. L’erreur deprévision hydrologique a donc été fortement conditionnée par cet état de fait et le modèlea produit des hydrogrammes de crue en avance par rapport à la situation réelle, mais quiétaient relativement bons en amplitude.

La procédure de mise à jour des variables d’état n’a pas contribué à l’amélioration desrésultats. A nouveau, son application a conduit à une réduction des stocks dans les réservoirs-

224

Fig. 7.33: Comparaison entre hydrogrammes et rejets sans aménagements, observés, optimaux etopérationnels lors de la crue d’octobre 2000.

sol avant la prévision hydrologique. Les débits de pointe ont ainsi été réduits, ceci d’autantplus que les prévisions de précipitations étaient largement sous-estimées dès le 15.10.2000 à00 h.

Exploitant les prévisions hydrologiques de manière déterministe, l’algorithme d’optimisationde la gestion des aménagements aurait de nouveau conduit à de bonnes décisions et l’hy-drogramme optimisé dans le Rhône sur la base des prévisions hydrologiques (opérationnel)aurait été pratiquement optimal (c’est-à-dire minimal).

7.5 Alerte crue de septembre 2006

L’alerte crue de septembre 2006 a constitué le premier véritable test opérationnel du systèmed’aide à la décision. En effet, suite à une alerte MétéoSuisse déclenchée le 13 septembre 2006à 11 h, des prévisions hydrologiques ont été réalisées. En raison de l’état de développement dusystème, il n’était pas possible de réaliser le filtrage du modèle hydrologique en continu et desmises à jour manuelles ont été effectuées afin de déterminer au mieux les conditions initialesde la simulation. Les prévisions suivantes ont été effectuées par intervalles de 12 h :

1. prévision du 13.09.2006 à 00 h2. prévision du 13.09.2006 à 12 h3. prévision du 14.09.2006 à 00 h avec mise à jour manuelle du modèle hydrologique4. prévision du 14.09.2006 à 12 h avec mise à jour manuelle du modèle hydrologique5. prévision du 15.09.2006 à 00 h6. prévision du 15.09.2006 à 12 h7. prévision du 15.09.2006 à 00 h8. prévision du 16.09.2006 à 00 h

225

9. prévision du 16.09.2006 à 12 h

10. prévision du 17.09.2006 à 00h

7.5.1 Prévisions météorologiques

La situation météorologique était la suivante : des importantes masses humides en prove-nance de la mer Méditerranée allaient provoquer d’intenses précipitations le long de la crêteprincipale des Alpes, en particulier dans les régions du Val d’Aoste et du col du Simplon.Les intensités prévues varieraient entre 100 et 250mm en 48 h, alors que les températuresrelativement chaudes pour la saison allaient empêcher la formation de chutes de neige.

Les différentes prévisions fournies par MétéoSuisse sont synthétisées à la figure 7.34 sousforme de sommes des précipitations par sous-bassin versant sur les 72 h suivant la prévision.Les valeurs des précipitations prévues étaient extrêmement élevées avec des pics à plus de200mm en 72 h dans les régions des Vièges et du Simplon (Sud-Est du bassin versant). Latempérature moyenne prévue sur 72 h pour la prévision du 14.09.2006 à 00 h était élevée etmêmes les bassins versants situés en altitude avaient des températures moyennes supérieuresà 0˚C (figure 7.35).

La comparaison entre prévisions hydro-météorologiques et observations est déjà discutée iciet laisse ainsi présager de la performance de la prévision hydrologique. La différence entrevolumes précipités prévus et observés est très importante et immédiatement visible (figure7.34). Les précipitations observées sont toutefois sous-estimées dans la région des Viègeset du Simplon en raison du manque de données à disposition. En effet, des stations IMISsituées dans cette régions ont indiqué des valeurs de précipitations atteignant 140mm en24 h, mais elles n’ont pu être exploitées dans ce travail. Il semble malgré tout probable quel’influence de cette différence soit certainement très marquée sur qualité de la prévisionhydrologique. L’analyse des prévisions et observations des températures permet égalementde tirer quelques enseignements pour la compréhension du comportement du modèlehydrologique. La température moyenne observée sur la période de 72 h dès le 14.09.2006à 00 h est présentée à la figure 7.35. Les différences entre prévisions et observations sontici nettement moins marquées et peuvent être considérées comme négligeables. Il est doncprobable que les différences entre débits prévus et observés (paragraphe suivant) ne serontpas influencées par la qualité des prévisions de température, et encore moins réduites, cardans ce cas il aurait fallu une prévision des températures plus fraîches pour réduire laquantité des précipitations liquides introduites dans le modèle et donc le débit dans lescours d’eau.

7.5.2 Prévisions hydrologiques

Les prévisions hydrologiques ont été calculées toutes les 12 heures dès le 13.09.2006 à 00 hde manière déterministe. Les prévisions hydro-météorologiques fournies par MétéoSuisseont donc été utilisées directement. La figure 7.36 présente les principaux résultats de cesprévisions hydrologiques aux stations de mesure de Brigue (Rhône), Viège (Viège) et Sion(Rhône).

Les différences entre débits prévus et débits observés sont très importantes. Bien entendu,en raison de l’impossibilité de rapatrier les mesures en temps réel, aucune mise à jourautomatique du modèle hydrologique n’a pu être effectuée. Cependant, les simulations

226

Fig. 7.34: Prévisions des précipitations du modèle aLMo, cumul sur 72 heures (mm).

227

Prévisions du 14.09.2006 à 00h

Observations du 14.09.2006 à 00hFig. 7.35: Températures moyennes sur 72 heures prévues et observées.

228

effectuées après la crue avec un nombre limité de mesures (9 stations de précipitations ettempératures pour l’ensemble du bassin versant) ont montré une bonne correspondanceavec les observations. Cela indique que les conditions initiales du modèle hydrologiquen’étaient pas si mal estimées et n’ont par conséquent pas forcément contribué à augmenterl’incertitude de prévision.

Aucune mesure de la performance de la prévision hydrologique n’est proposée dans ceparagraphe, car l’évaluation visuelle suffit amplement à estimer les erreurs de prévision.Les bassins versants situés en rive gauche du Rhône sont les principaux contributeurs dedébit. La figure 7.37 illustre en effet cette situation et présente les rapports entre volumesruisselés (intensité nette totale), prévus et observés, cumulés sur 72 h dès le 14.09.2006 à 00 h.L’intensité nette totale considérée ici est la somme des sorties des modèles hydrologiquesde GSM-SOCONT, à savoir SWMM, GR3, fonte de neige et de glace. Ces rapports sontsystématiquement supérieurs à 1 et même bien supérieurs plus près de la crête principaledes Alpes (Sud et Sud-Est du bassin versant).

7.5.3 Gestion des aménagements hydroélectriques

Quel a été l’impact de ces importantes erreurs de prévision sur la gestion des aménagementshydroélectrique pendant la période de l’alerte crue ? Les nombreux problèmes liés au dé-dommagement des exploitants en cas de pertes d’eau ou de dégâts causés par des opérationspréventives effectuées sur ordre de police sont en effet implicitement contenus dans cettequestion. La survie du système de gestion des crues par opérations préventives est égale-ment l’un des enjeux cachés derrière cette question, puisque les conséquences de mauvaisesdécisions seraient politiquement difficilement supportables. L’alerte météorologique de lapériode du 13 au 17 septembre 2006 a constitué à cet égard un test important.

A la base de toute décision ou ordre de police se trouve la modélisation et l’évaluationchiffrée des opérations préventives optimales. Le modèle de gestion des crues présentédans ce mémoire se base sur une optimisation déterministe, et peut être, par conséquent,particulièrement vulnérable aux importantes erreurs de prévision météorologiques.

Les conditions initiales relatives aux aménagements hydroélectriques ont été définies à lasuite de nombreux téléphones aux services de piquet des centrales. Elles sont résumées dansle tableau 7.5 avec les opérations préventives supposées optimales à la suite de la prévisiondu 14.09.2006 à 00 h.

Tab. 7.5: Situation initiale des aménagements hydroélectriques le 14.09.2006 à 06 h.

GD FMM ESA FMG KWM Sal EM EL GSB KWL14.09.2006 06h

Niv 2359.72 1972.50 - 2248.60 2194.60 - 1415.92 - 1800.00 -V disp 16.02 5.23 - 0.20 2.59 - 3.81 - 6.21 -V TP 0.00 2.38 0.00 1.71 4.92 0.00 10.39 0.00 0.00 4.87V in* 10.64 7.61 5.28 2.73 10.54 0.82 15.41 0.14 1.73 5.75

Les données présentées indiquent que certains réservoirs étaient presque pleins avant le débutdes précipitations. Il s’agissait en particulier des retenues de Moiry (FMG) et de Mattmark(KWM), qui étaient donc susceptibles de rapidement se trouver en situation délicate. Lesretenues pour lesquelles aucune donnée de niveau initial n’était fournie ne présentaient pasde danger particulier : elles se trouvent en effet dans des régions où les précipitations prévuesétaient plus faibles. L’optimisation a donc pu être réalisée pour déterminer l’influence

229

Prévisions hydrologiques à Brigue

Prévisions hydrologiques à Viège

Prévisions hydrologiques à SionFig. 7.36: Prévisions hydrologiques à Brigue, Viège et Sion.

230

Fig. 7.37: Carte des rapports entre intensité nette totale prévue et observée, volume cumulé sur72 h dès le 14.09.2006 à 00 h.

protectrice des retenues, et les opérations préventives optimales présentées dans le tableau7.5 conduisent aux hydrogrammes de la figure 7.38.

Fig. 7.38: Débits prévus et optimisés à Viège et à Sion, calul débuté le 14.09.2006 à 06 h.

Les résultats indiquent que la situation pouvait se révéler critique à Viège et à Sion, puisqueles débits prévus sans opération préventive particulière pouvaient localement dépasser lescapacités des cours d’eau (400m3/s à Viège et 800m3/s à Sion). Par contre, les opérationspréventives permettaient de garantir le transit de la crue à Sion, mais pas à Viège.

A ce stade de l’alerte le 14.09.2006 à 06 h, aucune augmentation du débit n’était observée(figure 7.36) et aucune précipitation n’avait pu être mesurée sur le bassin versant. De plus,la pointe de la crue se profilait pour le 15.09.2006 vers 16 h à Sion, soit dans 34 heures.La connaissance du bassin versant et de l’efficacité des opérations préventives était alorsnécessaire pour déterminer l’opportunité de provoquer des opérations préventives, car lerisque était important d’effectuer des opérations inutiles, et par conséquent coûteuses.

En général, des opérations préventives lancées 24 h avant la pointe de la crue peuventsuffire à réduire significativement le débit de pointe de la crue dans le Rhône. Ensuite,

231

les prévisions de débit ont été obtenues avec d’importants volumes de précipitations tombésdès le 14.09.2006 à 12 h, à mettre en relation avec le temps de réponse du bassin versantdu Rhône d’environ 24 à 30 h. Dans cette situation où il est fort probable que la crue nese produise plus ou soit retardée, il est plus prudent d’attendre au moins le début desprécipitations avant de décider d’abaisser le niveau des retenues.

Le contrôle des observations radar et des mesures de précipitations en temps réel a permisde comprendre que la perturbation annoncée ne parvenait pas à franchir la barrière desAlpes et à arroser le bassin versant du Rhône (figure 7.39). Il était désormais inutile deprécipiter une opération préventive et risquer de perdre de l’eau ou de l’énergie inutilement.Finalement, l’alerte crue de MétéoSuisse a été levée le 14.09.2006 dans la soirée, lorsque laperturbation a commencé à se disloquer et perdre ainsi de sa puissance.

7.5.4 Commentaires

La première mise à disposition d’un modèle de prévision hydrologique et d’optimisation dela gestion des aménagements lors des crues a permis de soulager les décideurs. En effet,tant par sa gourmandise en données que par sa capacité à synthétiser l’information, lesystème a permis d’obtenir une vision globale de la situation actuelle du bassin versant duRhône et d’en proposer une évolution pour les 72 heures suivantes. Ce premier apport dumodèle d’aide à la décision est extrêmement important puisqu’il pose le problème à résoudreautomatiquement, tâche difficile à réaliser correctement en situation de crise.

Les résultats fournis par le modèle se sont révélés erronés à cause de l’importante erreurde prévision hydro-météorologique introduite tout à l’amont de la procédure de calcul.Cependant, la robustesse du modèle d’optimisation a permis de définir les aménagementshydroélectriques critiques et de déterminer également dans quelles régions les apportshydriques devaient être particulièrement importants pour générer une crue. Par comparaisonavec les observations radar et les mesures en temps réel des précipitations, il a été possiblede réduire la probabilité d’un événement de crue et donc de ne pas lancer d’opérationspréventives.

La notion de risque est importante dans la gestion des crues et les décisions qui endécoulent. Le risque est couramment défini comme la probabilité qu’un événement seproduise multipliée par son coût. Il s’agit donc, pour le décideur, d’estimer si le risquelié à une crue non gérée est supérieur au risque de mener à des pertes économiques etd’éventuels dégâts locaux dus aux opérations préventives. Dans ce cadre, la probabilitéassociée à une prévision hydrologique devient une notion essentielle et doit être obtenuepar simulation de prévisions hydro-météorologiques probabilistes. La figure 7.40 illustre lesrésultats du modèle COSMO-LEPS, modèle météorologique probabiliste, où des cartes desprobabilités qu’un certain volume de précipitation se produise sont présentées (Walser et al.,2005a,b).

L’analyse de ces cartes montre que la probabilité d’avoir d’intenses précipitations au Nordde la crête principale des Alpes était relativement faible (0-20%) et que le risque de crueétait peu élevé, même si le modèle aLMo avait quant à lui estimé des volumes précipitéstrès importants dans le bassin versant du Rhône.

232

(a)

(b)

Fig. 7.39: Images radar fournies par MétéoSuisse du 14.09.2006 à 12 h 20 (a) et 15 h 50 (b).

233

Fig. 7.40: Prévisions probabilistes issues du modèle COSMO-LEPS, somme des précipitations sur24 h jusqu’au 15.09.2006 à 00 h, prévision du 13.09.2006 à 12 h.

7.6 Conclusions de l’application du modèle sur le bassinversant du Rhône

Dans ce chapitre a été présenté le modèle de prévision et de gestion des crues du Rhôneà l’amont du Léman. Son fonctionnement ainsi que sa performance opérationnels ont étédémontrés sur la base de 3 situations passées. Les crues de septembre 1993 et octobre 2000 sesont bel et bien produites, mais le modèle n’était alors malheureusement pas disponible. Enseptembre 2006, il a été utilisé effectivement dans le cadre d’une alarme, mais c’est l’eau quiétait finalement la grande absente (heureusement)... Pour conclure les analyses présentéesdans ce chapitre, quelques éléments doivent être soulignés.

Premièrement, le modèle de prévision et de gestion des crues est un ensemble cohérentd’éléments simples, mais traitant absolument toute l’information disponible actuellement.Si sa performance semble excellente, c’est précisément par la conception de ce système quine se prive d’aucune donnée existante.

Deuxièmement, le modèle de prévision hydrologique a été largement décrit dans le chapitre 4,ses performances ainsi que ses limites ont été exhaustivement discutées. Relevons cependantun élément majeur manquant encore au modèle : il s’agit de l’aspect probabiliste qui devraprioritairement être inclu dans le modèle.

Troisièmement, l’outil d’optimisation des aménagements a été valablement appliqué aubassin versant du Rhône et aux principaux ouvrages hydrauliques qui s’y trouvent. Ce n’estpas une surprise qu’il fonctionne de manière satisfaisante puisqu’il a été dédié à cette région.

234

Sa transportabilité dans une autre région n’est cependant pas compromise et gageons qu’ilsera bientôt testé dans d’autres bassins versants sur lesquels se trouvent des aménagementshydroélectriques. L’algorithme d’optimisation, mathématiquement simple, a été développépour être exploité en temps réel. Ses contraintes d’utilisation étaient donc très fortes, maissa performance est largement suffisante, d’autant plus que la base de l’optimisation estdéterministe et qu’il n’est donc pas nécessaire de viser la perfection lorsque l’imprécisiondes entrées flirte l’unité. Cependant, l’algorithme a été validé par comparaison avec unalgorithme évolutif et si des améliorations sont encore possibles pour l’optimisation desvidanges, elles ne doivent pas être traitées de manière prioritaire. Finalement, les hypothèsehydrauliques de l’outil d’optimisation qui pouvaient paraître lourdes se sont en fait révéléesminimes et rudement efficaces, dans la mesure où une évaluation d’hydrogrammes effectuéeen une fraction de seconde produit les mêmes résultats que la simulation complète avecRouting System II.

Au final, l’application d’un modèle de gestion des crues sur la base d’une prévisionhydrologique apportera à n’en point douter à l’Etat du Valais une sécurité supplémentaire.Le modèle de prévision hydrologique permet de déterminer en tout point le débit prévu72 heures en avance, avec une incertitude de l’ordre de 25-50% lors des crues.

L’utilisation de l’outil d’optimisation pour les décisions relatives aux opérations préventivessur les aménagements hydroélectriques est efficace. En effet, tant d’un point de vue théoriqueque du point de vue événementiel, l’apport de cet outil est important. L’algorithmed’optimisation, malgré ces simplifications, fournit une solution d’excellent qualité comptetenu du contexte de l’optimisation. De plus, son application à une prévision déterministe nepénalise pas la situation finale dans la mesure où le décideur doit évaluer en tout temps lasituation réelle sur le terrain et contrôler l’adéquation du modèle avec la réalité.

235

236

8 Conclusions et perspectives

8.1 Modélisation hydrologique et hydraulique

Le point de départ de ce travail de recherche a été la volonté de l’Etat du Valais de disposerd’ou outil de prévision des crues, intégrant les principales composantes hydrologiques ethydrauliques du bassin versant du Rhône à l’amont du Léman. Dans ce contexte où desprocessus météorologiques alliant fortes précipitations et températures relativement élevéesen altitude étaient à prévoir, il était nécessaire de développer un concept hydrologique adaptéet performant.

La surface de la région à modéliser, d’environ 5’500 km2, confère au bassin versant des tempsde réponse de l’ordre de 24 à 36 heures. En raison de sa morphologie alpine, les processushydrologiques les plus influents sont la fonte des glaciers et la fonte des neiges lorsque lestempératures sont élevées, et le ruissellement de surface, sur des pentes raides, lorsque lesprécipitations sont très importantes. L’intensité de ces processus est par ailleurs variable enfonction de la situation de chaque sous-bassin versant, à nouveau en raison de la très forteinfluence des Alpes sur la distribution spatiale des précipitations et des températures.

Enfin, le bassin versant comprend quelques aménagements hydroélectriques à accumulationdont les caractéristiques permettent aux exploitants d’influencer considérablement les écou-lements dans le réseau hydrographique. Cela signifie qu’il était impératif de modéliser cesouvrages de manière adéquate, et le choix d’une modélisation explicite des aménagementshydroélectriques a été fait.

Le concept de modélisation semi-distribuée, développé par l’HYDRAM-EPFL, intègre lesprocessus hydrologiques de fonte des glaciers, de fonte de neige, d’infiltration, d’évapo-transiration, et de ruissellement de surface. Il permet en outre l’intégration explicite desaménagements hydroélectriques et des cours d’eau, tout comme la prise en compte de larépartition spatiale des variables météorologiques.

Ce concept a été appliqué au bassin versant du Rhône à l’amont du Léman, grâce àl’utiliation du logiciel Routing System II, développé pour le LCH et la société HydroCosmospar Jérôme Dubois. Ce travail d’application a consisté en l’élaboration du schéma directeurdu modèle, sa construction, puis enfin son calage et sa validation. Ces étapes ont été réaliséesen s’appuyant sur une particularité du modèle hydrologique, qui est de séparer les processusde production de débit dans le temps. Cela a permis de limiter l’espace des solutions desparamètres de calage pour rapidement converger vers un calage satisfaisant. De plus, ceparamétrage s’est révélé particulièrement robuste, puisque la performance du modèle envalidation était équivalente à celle du calage.

Afin de tenir compte de l’influence des aménagements hydroélectriques dans la modélisation,l’utilisation de toutes les données disponibles a été réalisée. Cela a permis d’établir, pourchaque aménagement considéré, des séries temporelles horaires sur plusieurs années deturbinage ou de pompage. Ces séries ont été construites de manière à représenter descaractéristiques statistiques conformes aux données de production observées.

237

Au final, le modèle hydrologique développé dans ce travail permet de calculer les débitsen tout point du bassin versant du Rhône à l’amont du Léman. Il offre une performanceremarquable, compte tenu de la complexité du bassin versant : les indicateurs de Nashvarient entre 0.85 et 0.70 de l’amont à l’aval du Rhône, et le bilan hydrique est équilibré.Tous les principaux cycles hydrologiques et de production hydroélectriques sont modélisés,de même que les crues historiques qui ont pu être reproduite de manière très satisfaisante.Cet outil permet maintenant d’aborder en toute confiance la prévision hydrologique en yintégrant les prévisions météorologiques.

8.2 Modèle d’aide à la décision

Le développement d’un modèle de prévision hydrologique était la première étape de la réali-sation d’un système d’aide à la décision pour la gestion des aménagements hydroélectriquesà accumulation lors des crues. Les objectifs de ce système étaient l’exploitation optimaledes retenues lors des crues, de manière à réduire les dégâts dans le bassin versant.

Un outil d’optimisation des opérations de vidange préventives des retenues hydroélectriquesa été développé dans ce travail. Considérant les 10 principaux aménagements hydroélec-triques valaisans, il permet de déterminer, sur la base d’une prévision hydrologique, lesdurées optimales de turbinage et d’ouverture des vannes des vidanges de fond des bar-rages.

Les hypothèses du calcul hydraulique se sont révélées judicieuses, car la validation desopérations préventives ainsi que la validation de l’évaluation de leur influence sur les coursd’eau ont été réalisées. Les résultats indiquent que la différence entre l’évaluation simplifiéede l’outil d’optimisation et la simulation numérique complète est minime.

L’algorithme d’optimisation lui-même (appelé GP) a été validé par comparaison avec unalgorithme évolutif appelé MOO développé au LENI-EPFL. Les résultats obtenus sontexcellents : lors de l’optimisation du turbinage, la performance de l’algorithme GP estsimilaire à celle de MOO, pour des temps de calcul incomparables. En effet, une procédured’optimisation telle que développée dans ce travail ne nécessite que quelques dizaines desecondes, contre 12-24 heures pour MOO. Lors de l’optimisation des vidanges, le nouvelalgorithme montre quelques faiblesses et se révèle légèrement moins performant que MOO,mais cela ne porte pas à conséquence dans le cadre de ce projet. Bien entendu, cet outild’optimisation doit uniquement être utilisé pour la gestion d’aménagements hydroélectriquesà accumulation lors des crues. Il n’a donc pas la prétention d’universalité, contrairement àl’algorithme MOO, dont le champ d’application est vaste.

La performance de la gestion optimisée des aménagements hydroélectriques à accumulationlors des crues a été largement démontrée dans ce travail. Tout d’abord, sur la base d’unmodèle théorique, où des réductions des débits de pointe sans aménagements de l’ordre de40% peuvent être atteintes selon la disposition et les caractéristiques des ouvrages sur lebassin versant. Ensuite, sur la base de l’application du bassin versant du Rhône à l’amontdu Léman, où des réductions des débits de pointe sans aménagements de 25-30% peuventêtre attendues.

238

8.3 Application au bassin versant du Rhône à l’amont duLéman

L’application complète du système d’aide à la décision a été réalisée sur le bassin versantdu Rhône à l’amont du Léman. Intégrant les prévisions météorologiques fournies parMétéoSuisse, le système est maintenant capable de fournir des prévisions hydrologiquesen tout point du bassin versant, 72 heures en avance.

Le modèle hydrologique est de plus capable d’assimiler en temps réel les observations,grâce au développement d’une procédure automatique de mise à jour des variables d’état.Cette dernière effectue un ajustement itératif des conditions initiales de la simulation, demanière à reproduire un volume sur une certaine période similaire au volume observé. Laprocédure permet actuellement l’assimilation des données en 26 points de calcul du modèlehydrologique et fournit des débits proches des débits observés avant de lancer une prévisionhydrologique.

En situation opérationnelle, le système d’aide à la décision est capable d’ajuster ses condi-tions initiales en assimilant les observations en temps réel, d’effectuer une prévision hydro-logique à un horizon de 72 heures, d’optimiser la gestion des 10 principaux aménagementshydroélectriques valaisans et de valider la solution proposée par une simulation numérique.Toutes ces opérations peuvent être réalisées automatiquement.

Le système complet a été validé sur les deux crues historiques de 1993 et 2000, et les résultatsobtenus sont similaires aux résultats obtenus par l’utilisation de prévisions parfaites. Celasignifie que malgré des incertitudes importantes liées aux prévisions météorologiques, etdans une moindre mesure au modèle hydrologique, le système d’aide à la décision fournitau décideur une proposition très proche de l’optimum absolu.

Le système complet a également été exploité lors de l’alerte crue de 2006. Il a offert auxdécideurs une vision globale de la situation du bassin versant et a permis de rapidementdésigner les points chauds, c’est-à-dire les lieux critiques des débordements possibles etla provenance des écoulements les plus importants. Par comparaison du modèle avec lesobservations en temps réel, et en particulier avec les images radar, les décisions les plusjudicieuses ont été prises. Il est vrai que le modèle indiquait des débits très élevés, maisl’analyse critique de son fonctionnement a permis d’en tirer les informations importantes etfiables. Sur cette base, il a été possible de ne pas demander de vidanges préventives à certainsaménagements, puisque les délais jusqu’à l’arrivée probable de la pointe de la crue étaientconnus. Les mêmes décisions auraient pu être prises sans ce modèle, dans ce cas précis, maisles risques pris par les décideurs auraient été bien supérieurs car le niveau d’informationdisponible aurait été insuffisant.

8.4 Innovations issues de la recherche

Le projet MINERVE se situe à l’avant-garde de la gestion des bassins versants dans différentsdomaines. Le premier domaine à avoir bénéficié de cette recherche est la collaborationentre l’Etat et les producteurs d’hydroélectricité. En effet, réussir à influencer de manièrecoordonnée la production hydroélectrique d’entreprises privées en situation de crue pourréduire les dommages est un défi que cette recherche a largement contribué à relever.Grâce aux outils de modélisation, d’analyse et d’optimisation de la gestion des retenuesd’accumulation, une information objective a pu être communiquée à tous les partenaires,

239

pour lesquels la participation à l’effort de sécurité devenait du même coup une évidence. Cesnouveaux liens de confiance et de partenariat entre ces acteurs sont le résultat d’un travailde précurseur.

Le deuxième domaine touché par ce travail est la prévision hydrologique, dont le conceptsemi-distribué n’est pas complètement nouveau, mais dont l’application à un niveau de détailet de description fonctionnelle est très élevé et dont les performances sont remarquables.Ces développements ont permis de fournir au modèle d’aide à la décision l’information dequantité et de qualité suffisante pour son application en situation opérationnelle.

Enfin, le développement et la modélisation d’une stratégie de gestion des crues par opérationspréventives des aménagements hydroélectriques ont été généralisés et ont été menés jusqu’aufond du problème. La démonstration théorique du potentiel de protection contre les cruesselon les différents paramètres du bassin versant et des aménagements qui s’y trouvent estpossible, tout comme l’application opérationnelle de cette stratégie au bassin versant duRhône à l’amont du Léman. La méthodologie développée dans cette recherche permet eneffet d’obtenir des résultats rapidement, de bénéficier d’une vision globale mais synthétiquede la situation d’un bassin versant et de contrôler les décisions proposées pour l’outil d’aideà la décision.

8.5 Perspectives

Le domaine de l’incertitude est celui dans lequel réside le plus grand potentiel d’amélio-ration du système. A tous les niveaux, l’incertitude risque de mener à la perte de confiancedans ce modèle. Qu’il s’agisse de la prévision météorologique, dumodèle hydrologiqueou du risque lié aux opérations de vidange préventives des retenues, il subsiste actuellementun manque d’information et de traitement relatif aux inconnues du système.

Tout d’abord, les prévisions météorologiques peuvent depuis peu être fournies avec unindicateur de pertinence (prévisions probabilistes). Il sera donc bientôt possible de l’exploiterpour en tirer des prévisions hydrologiques probabilistes, elles-mêmes à la source de ladécision de turbiner ou de ne pas turbiner. Le jour où chaque décision sera assortie d’unindicateur de risque associé fiable, le décideur pourra objectivement justifier ses choix etles communiquer à la population. Il en va donc de la survie d’un tel système, et l’intégrationou la quantification, à tous les niveaux de modélisation, de la notion d’incertitude devraimpérativement être envisagée.

Les défis seront alors multiples : d’abord, assortir un indice de confiance au modèle mé-téorologique, et éventuellement lui trouver des alternatives. Ensuite, réaliser des prévisionshydrologiques pour de nombreux scénarios hydro-météorologiques et en effectuer la syn-thèse, sans oublier de réduire les imprécisions dues au concept hydrologique, en particulierdans les régions de moyenne et basse altitude. Enfin, aller au-delà du concept d’optimisationdéterministe pour tirer profit des opérations préventives communes aux multiples scénarioset en extraire celles qui sauront minimiser l’espérance du coût des dégâts.

240

Ensuite, certains aspects du système pourront également être améliorés. L’objet du para-graphe suivant n’est cependant pas de toutes les recenser, mais plutôt de proposer les pistesde recherche les plus profitables. Parmi celles-ci, en voici certaines qui mériteraient que l’ons’y promène :

Météorologie

– utilisation d’approches météorologiques complémentaires : méthodes de reconnais-sance de scénarios, méthodes des analogues, combinaison avec une génération stochastiquede scénarios météorologiques

– exploitation des mesures radar des précipitations et intégration de ces observations pourla modification des champs de précipitations observés ou prévus à court terme

– densification du réseau de mesures en temps réel des variables météorologiques– exploitation de technologies de mesure alternatives telles que réseaux de téléphoniemobile

Hydrologie

– amélioration du concept hydrologique pour les régions de basse et moyenne altitude– intégration dans les modèles de fonte de neige de processus liés à l’exposition des pentes

ou à la sublimation

Gestion des aménagements hydroélectriques

– amélioration de l’algorithme d’optimisation– définition plus précise des fonctions de coût

Il s’agira donc en priorité de s’attacher à améliorer la fiabilité du système (traitement del’incertitude), avant d’en améliorer la performance pure (exactitude des prévisions). Au grédes nouvelles informations disponibles et des progrès des modèles météo, les développementsdevront toujours poursuivre le but de rassembler tous les indices permettant d’accéder enavance à une décision se révélant judicieuse après coup.

Les nombreuses pistes mentionnées ici pourront ainsi être explorées et offrir aux chercheursdes destinations mathématiques passionnantes, dans toute la chaîne de l’information d’unsystème de prévision et de gestion des crues, de l’atmosphère jusqu’à l’océan.

241

242

Remerciements

Ce travail de recherche a été réalisé sous la direction du Prof. Dr Anton Schleiss. En tantque chef d’orchestre, il m’a permis d’exprimer en toute confiance et liberté cette partitionqui n’était pas encore écrite, et je le remercie chaleureusement pour son soutien sans faille.Ces années passées au laboratoire ont été un plaisir et une passion.

J’associe à ces remerciements le Dr. Jean-Louis Boillat, responsable du projet MINERVE,pour ses conseils et la confiance qu’il m’a toujours témoignée, me permettant de découvrirpersonnellement le microcosme de l’hydroélectricité.

Le projet MINERVE a été financé par l’Etat du Valais et par feu l’Office Fédéral desEaux et de la Géologie, maintenant dénommé Office Fédéral de l’Envronnement. Lesoutien inconditionnel et les propositions de Pierre-Benoît Raboud du Service des ForcesHydrauliques, la confiance de Dominique Bérod du Service des Routes et Cours d’Eau ainsique les remarques de Jean-Pierre Jordan ont toujours été écoutées et analysées dans cetravail et ont certainement contribué à sa réalisation.

Les prévisions météorologiques, sans lesquelles ce travail serait vain, ont été gracieusementfournies par MétéoSuisse et son délégué Didier Ulrich, toujours à l’aise pour proposer despistes d’analyse des erreurs, qui par ailleurs ne provenaient pas toujours du concept hydro-logique développé à l’HYDRAM par Yasser Hamdi et Benoît Hingray. Notre collaborationa été très agréable et productive, tout comme elle l’a été avec Jérôme Dubois, artiste dulogiciel qui hanta mes nuits. Il convient d’ajouter encore ici Javier Garcia Hernandez qui,ne dormant pas non plus la nuit, s’est largement occupé de comprendre les prévisions deMétéoSuisse.

Je tiens à remercier encore ceux avec qui j’ai pu collaborer sur ce projet, qu’ils viennentde l’Etat, des producteurs d’hydroélectricité dont les données qu’il m’ont fournies furent unprécieux sésame, ou de bureaux privés associés au projet.

Différents travaux de diplôme ou de semestre ont été effectués autour de ce projet et leursauteurs ont toujours contribué à étendre la réflexion et apporter des idées nouvelles. Je re-mercie Annelyse Meyenhofer, Rémi Martinerie, Pierre-Olivier Spagnol, Thomaz Fernandez,Claire Sauthier, Cédric Thévenaz et Javier Neves Da Silva pour leur travail.

Il y a de ceux qui m’ont supporté et côtoyé au Laboratoire, et avec qui les discussions ontété parfois animées, dont en particulier Stéphanie, Philippe, Sélim et Daniel avec qui unlong bout de chemin a été accompli.

Enfin, je souhaite associer à mes plus chaleureuses pensées ceux qui ont permis que ce travails’effectue dans un cocon protecteur, les grimpeurs pour l’évasion, ma famille et mes parentspour leurs valeurs, leur écoute, et leurs corrections...

Mais surtout, je veux remercier celle sans qui la faim et le froid m’auraient rongé, celle sansqui la passion m’aurait quitté, merci Emmanuelle pour ta confiance, ton soutien et ton aideinestimables, qui m’auront accompagnés chaque seconde.

243

244

Liste des tableaux

2.1 Systèmes de prévision de débit selon l’échelle et l’horizon . . . . . . . . . . . 39

4.1 Liste des paramètres de calage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 814.2 Liste des paramètres géométriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 824.3 Paramètres du modèle de neige . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 824.4 Périodes choisies pour le calage et la validation . . . . . . . . . . . . . . . . 884.5 Caractéristiques des sous-bassins versants choisis . . . . . . . . . . . . . . . 964.6 Calage des sous-bassins versants non perturbés . . . . . . . . . . . . . . . . 1004.7 Caractéristiques des sous-bassins versants perturbés . . . . . . . . . . . . . . 1014.8 Calage des sous-bassins versants perturbés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1014.9 Validation des sous-bassins versants non perturbés . . . . . . . . . . . . . . 1064.10 Validation des sous-bassins versants perturbés . . . . . . . . . . . . . . . . . 1064.11 Performance du modèle lors des crues historiques . . . . . . . . . . . . . . . 1144.12 Tableau récapitulatif de l’incertitude modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1154.13 Tableau récapitulatif des caractéristiques des zones de filtrage . . . . . . . . 117

5.1 Caractéristiques des principaux aménagements hydroélectriques du Valais . 1365.2 Caractéristiques techniques de 10 aménagements . . . . . . . . . . . . . . . 1415.3 Liste des données disponibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145

6.1 Liste des paramètres du modèle de bassin versant idéal . . . . . . . . . . . . 1826.2 Synthèse des résultats des optimisations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187

7.1 Indicateurs de performance de l’optimisation, crue 1993 . . . . . . . . . . . 2077.2 Synthèse des résultats de l’optimisation, crue 1993 . . . . . . . . . . . . . . 2077.3 Récapitulatif des variables liées aux aménagements, crue 1993 . . . . . . . . 2137.4 Variables liées aux aménagements, crue 2000 . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2247.5 Situation initiale des aménagements, alerte 2006 . . . . . . . . . . . . . . . . 229

245

246

Table des figures

1.1 Description des besoins en recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

2.1 Prévision de débit du Neckar à Heidelberg . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122.2 Prévisions de débit à 10 jours sur la Meuse . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132.3 Schéma de principe de la prévision de débit . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142.4 Schéma d’un réseau de neurones artificiels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152.5 Schéma du neurone formel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162.6 Algorithme de rétropropagation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172.7 Comparaisons entre prévisions à 7 jours au Québec . . . . . . . . . . . . . . 182.8 Débits moyens journaliers entrants dans une retenue alpine . . . . . . . . . 192.9 MMS sur 365 valeurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 212.10 Comparaison entre moyenne et écart journalier . . . . . . . . . . . . . . . . 222.11 Illustration de la méthode de décomposition . . . . . . . . . . . . . . . . . . 232.12 Mesures de débits, températures et précipitations . . . . . . . . . . . . . . . 252.13 Comparaison entre débit mesuré et débit prévu . . . . . . . . . . . . . . . . 262.14 Prévision de débit moyen avec un modèle ARIMA . . . . . . . . . . . . . . 272.15 Prévision de débit à l’aide d’un modèle ARMAX . . . . . . . . . . . . . . . 292.16 Modèle hydrologique HBV . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 332.17 Structure du modèle conceptuel PREVIS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 332.18 Fonctionnement du modèle hydrologique TOPMODEL . . . . . . . . . . . . 342.19 Résultats de simulations sur le Kifissos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 362.20 Schéma de fonctionnement des analogues . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 372.21 Prévisions à 2 h sur le Gardon d’Anduze . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39

3.1 Modèle numérique de terrain de la région d’Aletsch . . . . . . . . . . . . . . 423.2 Schéma du réseau hydraulique SISOPT au Brésil . . . . . . . . . . . . . . . 473.3 Optimisation d’un système de réservoirs de manière séquentielle . . . . . . . 493.4 Schéma de fonctionnement d’un algorithme évolutif . . . . . . . . . . . . . . 513.5 Exemple de fonction d’appartenance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 523.6 Schéma de fonctionnement d’un système expert . . . . . . . . . . . . . . . . 543.7 Performance relative des méthodes d’optimisation . . . . . . . . . . . . . . . 56

4.1 Concept du modèle semi-distribué GSM-SOCONT . . . . . . . . . . . . . . 614.2 Modèle de fonte de neige . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 624.3 Comportement annuel du modèle de neige . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 654.4 Modèle SOCONT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 664.5 Description schématique des paramètres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 684.6 Profil en travers trapézoïdal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 684.7 Comportement annuel d’un bassin versant à forte proportion glaciaire . . . 734.8 Architecture simplifiée du logiciel Routing System II . . . . . . . . . . . . . 764.9 Répartition spatiale des stations météorologiques . . . . . . . . . . . . . . . 784.10 Répartition spatiale des points de calcul du modèle aLMo . . . . . . . . . . 80

247

4.11 Exemple de bassin versant d’ordre 3 selon Horton . . . . . . . . . . . . . . . 844.12 Carte du bassin versant avec sa discrétisation . . . . . . . . . . . . . . . . . 874.13 Carte du bassin versant avec les points de calage . . . . . . . . . . . . . . . 884.14 Comparaison entre observations et simulations, Lonza . . . . . . . . . . . . 944.15 Comparaison entre observations et simulations, Trift . . . . . . . . . . . . . 954.16 Calage des sous-bassins versants non perturbés . . . . . . . . . . . . . . . . 974.17 Erreur relative des sous-bassins versants non perturbés . . . . . . . . . . . . 984.18 Calage des sous-bassins versants perturbés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1034.19 Erreur relative des sous-bassins versants perturbés . . . . . . . . . . . . . . 1044.20 Validation des sous-bassins versants non perturbés . . . . . . . . . . . . . . 1074.21 Erreur relative des sous-bassins non perturbés . . . . . . . . . . . . . . . . . 1084.22 Performances des sous-bassins non perturbés en calage et validation . . . . . 1084.23 Validation des sous-bassins versants perturbés . . . . . . . . . . . . . . . . . 1094.24 Erreur relative des sous-bassins perturbés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1104.25 Performances des sous-bassins perturbés en calage et validation . . . . . . . 1114.26 Carte des coefficients de Nash . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1124.27 Hydrogrammes de crue à la Porte du Scex . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1134.28 Carte des niveaux de zones . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1164.29 Hydrogrammes de crue à la Porte du Scex . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1194.30 Synthèse des résultats des simulations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121

5.1 Processus de production d’hydroélectricité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1245.2 Schéma des fonctions hydrauliques de base . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1255.3 Prix du marché spot au European Energy Exchange . . . . . . . . . . . . . 1265.4 Structure de l’offre en électricité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1275.5 Schéma d’un aménagement hydroélectrique au fil de l’eau type . . . . . . . 1285.6 Exemple fictif de règlement d’exploitation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1295.7 Schéma type d’aménagement à accumulation . . . . . . . . . . . . . . . . . 1315.8 Taux de remplissage moyen des retenues d’accumulation . . . . . . . . . . . 1325.9 Taux de puissance produit par un aménagement . . . . . . . . . . . . . . . . 1335.10 Règlement d’urgence type . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1345.11 Situation des principaux aménagements hydroélectriques . . . . . . . . . . . 1355.12 Classement des vallées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1395.13 Classement des aménagements par volume de stockage . . . . . . . . . . . . 1405.14 Classement des aménagements par potentiel de dérivation . . . . . . . . . . 1425.15 Situation des bassins versants non perturbés calés . . . . . . . . . . . . . . . 1445.16 Situation de l’aménagement Grande Dixence . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1465.17 Reconstitution des séries horaires à Cleuson . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1475.18 Reconstitution des séries horaires à Bieudron . . . . . . . . . . . . . . . . . 1485.19 Situation des aménagements Emosson et Salanfe . . . . . . . . . . . . . . . 1495.20 Désagrégation horaire du débit turbiné à la Bâtiaz . . . . . . . . . . . . . . 1495.21 Situation des aménagements Mauvoisin et Pallazuit . . . . . . . . . . . . . . 1505.22 Situation de l’aménagement de Mattmark . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1515.23 Situation des aménagements Gougra, Lienne et Lötschen . . . . . . . . . . . 1525.24 Reconstitution du débit turbiné horaire à Bitsch . . . . . . . . . . . . . . . 1555.25 Apports et production journaliers moyens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1575.26 Production journalière normalisée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1585.27 Comparaison entre écarts normalisés mesurés et estimés . . . . . . . . . . . 1595.28 Horaires typiques de turbinage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160

248

6.1 Schéma de l’aménagement de Mattmark . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1696.2 Feuille de calcul Excel utilisée pour le calcul des opérations préventives . . . 1706.3 Schéma de la méthode d’estimation de l’hydrogramme . . . . . . . . . . . . 1766.4 Schéma du fonctionnement de l’algorithme d’optimisation . . . . . . . . . . 1796.5 Fonctionnement à bas niveau de l’algorithme d’optimisation . . . . . . . . . 1796.6 Modèle théorique de bassin versant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1816.7 Débit à l’exutoire du bassin versant en fonction du débit équipé . . . . . . . 1836.8 Débit à l’exutoire du bassin versant en fonction du temps de transit . . . . . 1846.9 Débit à l’exutoire du bassin versant en fonction de la largeur du déversoir . 1856.10 Espace des solutions pour 2 aménagements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1866.11 Comparaison entre les débits turbinés totaux à l’exutoire . . . . . . . . . . . 187

7.1 Fonctionnement du modèle de gestion des crues . . . . . . . . . . . . . . . . 1927.2 Fonctionnement opérationnel du modèle de prévision hydrologique . . . . . 1937.3 Fonctionnement du modèle d’optimisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1947.4 Schéma du modèle du bassin versant du Rhône . . . . . . . . . . . . . . . . 1967.5 Modèle de simulation Routing System II . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1977.6 Description des 7 objectifs de l’optimisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1997.7 Précipitations mesurées du 22 au 25 setpembre 1993 . . . . . . . . . . . . . 2007.8 Mesures de débit, 22-25 septembre 1993 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2007.9 Mesures de précipitations, 22-25 septembre 1993 . . . . . . . . . . . . . . . 2017.10 Performance du modèle de prévision hydrologique pour la crue de 1993 . . . 2027.11 Prévision hydrologique à la Porte du Scex, 1993 . . . . . . . . . . . . . . . . 2027.12 Comparaison entre volumes précipités prévus et observés . . . . . . . . . . . 2037.13 Répartition spatiale des différences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2047.14 Performance du modèle de prévision, crue 1993 . . . . . . . . . . . . . . . . 2057.15 Prévision à la Porte du Scex, crue 1993, avec mise à jour . . . . . . . . . . . 2057.16 Hydrogrammes sans aménagements, crue 1993 . . . . . . . . . . . . . . . . . 2067.17 Résultats de l’optimisation, crue 1993 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2087.18 Opérations de turbinage préventif, crue 1993 . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2107.19 Hydrogrammes rejetés par les aménagements, crue 1993 . . . . . . . . . . . 2107.20 Opérations de turbinage et vidange préventifs, crue 1993, sensibilité . . . . . 2117.21 Hydrogrammes rejetés par les aménagements avec vidanges, crue 1993 . . . 2117.22 Performance opérationnelle, crue 1993 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2147.23 Précipitations totales, crue 2000 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2157.24 Mesures de débit, crue 2000 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2167.25 Mesures de précipitations et températures, crue 2000 . . . . . . . . . . . . . 2167.26 Performance du modèle de prévision, crue 2000 . . . . . . . . . . . . . . . . 2177.27 Prévision hydrologique à la Porte du Scex, crue 2000 . . . . . . . . . . . . . 2187.28 Comparaison entre volumes précipités prévus et observés, crue 2000 . . . . . 2197.29 Répartition spatiale des différences, crue 2000 . . . . . . . . . . . . . . . . . 2207.30 Répartition spatiale des différences (températures), crue 2000 . . . . . . . . 2217.31 Prévision à la Porte du Scex avec mise à jour, crue 2000 . . . . . . . . . . . 2227.32 Performance avec mise à jour, crue 2000 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2227.33 Performance opérationnelle, crue 2000 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2257.34 Prévisions aLMo, alerte 2006 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2277.35 Températures observées, alerte 2006 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2287.36 Prévisions hydrologiques, alerte 2006 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2307.37 Rapports entre intensité nette totale prévue et observée, alerte 2006 . . . . 2317.38 Débits prévus et optimisés, alerte 2006 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 231

249

7.39 Images radar, alerte 2006 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2337.40 Prévisions Cosmo-Leps, alerte 2006 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 234

250

Notations

Les symboles ci-dessous sont utilisés dans ce document :

Symboles romainsA surface mouillée (m2)a pente de la droite d’ajustementAGL facteur degré-jour de la glace (m/ C/s)AN facteur degré-jour de la neige (m/ C/s)as paramètre de Log-Weibull II pour la période s

B base de la section trapézoïdale (m)B largeur moyenne du plan incliné (m)b ordonnée à l’origine de la droite d’ajustement (m3/s)bp facteur d’augmentation de fonte de neige lors de précipitations liquides (s/m)bs paramètre de Log-Weibull II pour la période s

c coefficient de la fonction de coût (CHF/m3/s)c célérité de l’onde (m/s)CMAJ coefficient de correction des niveaux des réservoirs en procédure de filtrageD débitance (m3/s)di,s distance projetée sur un plan horizontal entre une station de mesure i et une

station virtuelle s (m)dt pas de temps (s)Eadd,max efficacité d’adduction maximaleEadd efficacité d’adductionEdisp efficacité de rétention du volume disponibleEel énergie électrique (kJ)er erreur relative de l’ajustementEstock efficacité de rétention totaleETP efficacité de rétention due au turbinage préventifETP évapo-transpiration potentielle (m/s)ETR évapo-transpiration réelle (m/s)FP facteur de pointe de turbinage ou de vidangeg accélération terrestre (m/s2)Glacier modèle de fonte de glaceh niveau du réservoir GR3 (m)hGL niveau du réservoir linéaire de glace (m)hmax capacité de rétention du réservoir GR3 (m)hNGL niveau du réservoir linéaire de neige (m)HN stock de neige (m)

251

Hn hauteur de chute nette (m)hr hauteur d’eau sur le plan incliné (m)I1 coefficient de profil (m3)I2 coefficient de variation de la section (m2)inet intensité nette (m/s)ir intensité nette à l’exutoire du plan incliné (m/s)J0 pente de fond du cours d’eauJ0 pente moyenne du plan inclinéJf pente de frottementk constante de vidange du réservoir-sol (s)Kf constante de vidange du réservoir d’eau dans la neigeKGL constante de vidange du réservoir linéaire de glace (s)KN constante de vidange du réservoir linéaire de neige (s)Ks coefficient de frottement de Strickler (m1/3/s)Lp périmètre mouillé (m)m fruit du talusMN intensité de fonte ou regel (m/s)Ms production journalière moyenne en période s (m3/s)N précipitation solide (m/s)Nmax niveau maximum d’exploitation (m s.m.)Nmin niveau minimum d’exploitation (m s.m.)Neige modèle de fonte de neigeP intensité des précipitations (m/s)P ∗ précipitation liquide (m/s)PeqGL pluie équivalente de fonte glaciaire (m/s)Peq pluie équivalente (m/s)Q débit (m3/s)QGL débit de fonte glaciaire (m3/s)Qin débit entrant dans la retenue (m3/s)Qlim débit à partir duquel des dégâts se produisent (m3/s)Qnat débit dans le cours d’eau sans les retenues (m3/s)QNGL débit de fonte de neige sur glace (m3/s)Qobs débit observé (m3/s)Qout débit sortant de la retenue (m3/s)Qr débit ruisselé sortant de SWMM (m3/s)qs,i débit spécifique moyen du sous-bassin versant i (m3/s/km2)Qsim débit simulé (m3/s)Qs débit sortant du réservoir-sol (m3/s)Qtot débit total à l’exutoire du bassin versant (m3/s)QTP débit de turbinage ou vidange préventifs (m3/s)QT débit turbiné (m3/s)QTs production moyenne journalière reconstituée pour la période s (m3/s)Rh rayon hydraulique (m)rn production journalière moyenne du jour n (m3/s)

252

rs rayon de recherche attribué à la station virtuelle s (m)RGL réservoir linéaire de glaceRN réservoir linéaire de neigeS surface de la bande non-glaciaire (m2)SGL surface de la bande glaciaire (m2)Sol modèle d’écoulement dans le solT température de l’air ( C)t temps (s)Tcp1 température critique inférieure de séparation pluie-neige ( C)Tcp2 température critique supérieure de séparation pluie-neige ( C)Tcr température critique de fusion de la neige ( C)ttot durée de l’horizon d’optimisation (s)tTP durée du turbinage préventif (s)V volume d’eau dans la retenue (m3)Vi volume d’eau à l’exutoire du sous-bassin versant i (m3)Vobs volume observé sur la période d’évaluation (m3)Vsim volume simulé sur la période d’évaluation (m3)Vtot volume d’eau à l’exutoire du bassin versant (m3)WN contenu en eau de la neige (m)X nombre aléatoire entre 0 et 1 généré selon une loi uniformex abscisse curviligne du cours d’eau (m)x coordonnée absolue x (m)y coordonnée absolue y (m)z coordonnée d’altitude absolue z (m)

Symboles grecsα proportion de précipitation liquideβ coefficient de correction du volume captéδ coefficient de diffusion (m/s)η coefficient d’amortissement en procédure de filtrageηel rendement des équipements électro-mécaniquesηj taux de remplissage de la retenue jηt rendement de la turbineγ taux de fonctionnement d’un captage, d’un collecteur ou d’une station de

pompageγw masse volumique de l’eau (kg/m3)σ écart-type d’une distribution statistiqueσr écart-type relatif d’une distribution statistiqueθ proportion d’eau dans la neigeθcr proportion critique d’eau dans la neigeθs écart de production journalière en période s (m3/s)ε(t) erreur de l’ajustement (m3/s)

253

254

Liste des abréviations

AI intelligence artificielleANETZ réseau de mesures de MétéoSuisseARIMA autoregressive integrated moving averageCECA centrale d’engagement du canton du ValaisCERISE cellule scientifique de crise du canton du ValaisDP programmation dynamiqueECMWF Ensemble Continental Meteorological Weather ForecastEEX European Energy eXchangeEPFL Ecole Polytechnique Fédérale de LausanneETP évapo-transpiration potentielleETR évapo-transpiration réelleFS logique floueGA algorithme génétiqueGP goal programmingGR3 modèle de production à 3 paramètresGSM-SOCONT Glacier Snow Melt SOil CONTribution modelHBV hydrologiska byrans vattenbalansavdelning

(Hydrological Bureau Water balance)HYDRAM Laboratoire d’Hydrologie et AménagementsIMIS Intercantonal Measurement and Information SystemLCH Laboratoire de Constructions HydrauliquesLEX lissage exponentielLP programmation linéaireMINERVE Modélisation des Intempéries de Nature Extrême,

des Rivières Valaisannes et de leurs EffetsMMC moyenne mobile centrésMMD moyenne mobile doubleMMS moyenne mobile simpleMNT modèle numérique de terrainNLP programmation non linéaire

255

OFEV Office Fédéral de l’EnVironnementQMOO Queueing Multi-Objective OptimiserQPF prévisions quantitatives de précipitationsRNA réseau de neurones artificielsSFH Service des Forces Hydrauliques, canton du ValaisSIG système d’information géographiqueSISOPT SYStem for OPTimizationSLP programmation linéaire séquentielleSOCONT SOil CONTribution modelSRCE Service des Routes et Cours d’Eau, canton du ValaisSWMM Stormwater and Wastewater Management ModelTELEFLEUR TELEmatics assisted handling of FLood Emergencies in URban areas

256

Bibliographie

Abebe, A. J., Solomatine, D. P. and Venneker, R. G. W. (2000). Application of adaptativefuzzy rule-based models for reconstruction of missing precipitation events, Hydrologicalsciences journal-Journal des sciences hydrologiques 45(3) : 425–430.

Ahmad, S. and Simonovic, S. (2000). System dynamics modeling of reservoir operations forflood management, Journal of Computing in Civil Engineering 14(3) : 190–198.

Ahmad, S. and Simonovic, S. P. (2001). Integration of heuristic knowledge with analyticaltools for the selection of flood damage reduction measures, Canadian Journal of CivilEngineering 28 : 208–221.

André, S. and Boillat, J.-L. (2002). Schaffung eines Rückhaltevolumens im StauseeMattmark für den Hochwasserschutz, Mitteilung der Versuchsanstalt für Hydrologie undGlaziologie (VAW), N˚175, Band 2, ETH, Zürich, pp. 509–518.

Andrade-Leal, R., M, M. B., Drabek, U., Gutknecht, D., Haiden, T., Holzmann, H., Hebens-treit, K., Kirnbauer, R., Nachtnebel, H. and Precht, J. (2002). Hydrologische Vorhersa-gemodelle im operationellen Betrieb der Wasserkraftwirtschaft, Österreiche Wasser- undAbfallwirtschaft 9-10.

Bachhiesl, M. (2002). Zuflussvorhersage für den Kraftwerkseinsatz als Grundlage des EPV- Energiewirtschaftliches Planungssystem Verbund, Mitteilung der Versuchsanstalt fürHydrologie und Glaziologie (VAW), N˚174, Band 1, ETH, Zürich, pp. 261–270.

Barros, M. T. L., Tsai, F. T. C., Yang, S. L., Lopes, J. E. G. and Yeh, W. W. G. (2003).Optimization of large-scale hydropower system operations, Journal of Water ResourcesPlanning and Management 129(3) : 178–188.

Bazarra, M., Sherali, H. and Shetty, C. (1993). Nonlinear programming : Theory andalgorithms, New York.

Bedient, P. B., Hoblit, B. C., Gladwel, D. C. and Vieux, B. E. (2000). NEXRAD Radar forFlood Prediction in Houston, Journal of Hydrologic Engineering 5(3) : 269–277.

Bellman, R. E. (1957). Dynamic Programming, Princeton N.J.

Bessler, F. T., Savic, D. A. and Walters, G. A. (2003). Water Reservoir Control with DataMining, Journal of Water Resources Planning and Management 129(1) : 26–34.

Beven, K. and Kirby, M. (1979). A physically based, variable contributing area model ofbasin hydrology, Hydrological sciences bulletin 24(1) : 43–69.

Biedermann, R., Pougatsch, H., Darbre, G., Raboud, P.-B., Fux, C., Hagin, B. and Sander,B. (1996). Aménagements hydro-électriques à accumulation et protection contre lescrues - Speicherkraftwerke und Hochwasserschutz, Wasser Energie Luft - Eau EnergieAir 10 : 221–266.

257

Birikundavyi, S., Labib, R., Trung, H. and Rousselle, J. (2002). Performance of NeuralNetwork in Daily Streamflow Forecasting, Journal of Hydrologic Engineering 7(5) : 392–398.

Boillat, J.-L. (2005). L’influence des retenues valaisannes sur les crues Le projet MINERVE,Communication LCH N 21, Conférence sur la recherche appliquée en relation avec la 3eCorrection du Rhône - Nouveaux développements dans la gestion des crues, Martigny,pp. 87–101.

Boillat, J.-L., Dubois, J. and Schleiss, A. (2000). Utilisation possible de la retenue deMattmark pour la protection contre les crues et la production d’énergie, Proc., XXeCongrès des Grands Barrages, CIGB/ICOLD, Vol. Q.77 - R.23, Beijing, China, pp. 339–355.

Boillat, J.-L., Dubois, J. and Schleiss, A. (2002). Flood Modeling and Prevention inthe Rhone Basin upstream of Lake Geneva, Proc., International Conference on FloodEstimation, Bern.

Box, G. E. and Jenkins, G. M. (1976). Time-Series Analysis, Forecasting and Control, Rev.ed. Holden Day, San Fransisco.

Bürgi, T. (2002). Wasserstands- und Abflussvorhersagen für den Rhein, Wasser EnergieLuft - Eau Energie Air 7/8 : 199–205.

Bérod, D. (1994). Contribution à l’estimation des crues rares à l’aide de méthodesdéterministes. Apport de la description géomorphologique pour la simulation des processusd’écoulement, Ph.D. Thesis N 1319, Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne.

Bérod, D. and Consuegra, D. (1995). Etude CONSECRU, Traitements statistiques des sériesde débit, Unpubl. Technical Report, EPFL, Lausanne.

Burke, L. I. (1991). Clustering Characterization of Adaptative Resonance, Neural Networks4(4) : 485–491.

Can, E. K. and Houck, M. H. (1984). Real-time reservoir Operations by goal programming,Journal of Water Resources Planning and Management 110(3) : 297–309.

Cancelliere, A., Giuliano, G., Rossi, G. and Nicolosi, V. (2005). A Reservoir OperationDSS based on Optimization and Neuro-Fuzzy Techniques, Proc., XXXI IAHR Congress,Water Engineering for the Future : Choices and Challenges, Seoul, pp. 271–279.

Chandramouli, V. and Raman, H. (2001). Multireservoir modeling with dynamic pro-gramming and neural networks, Journal of Water Resources Planning and Management127(2) : 89–98.

Chang, F. J. and Hwang, Y. Y. (1999). A self-organization algorithm for real-time floodforecast, Hydrological Processes 13(2) : 123–138.

Charnes, A. and Cooper, W. W. (1961). Management Models and Industrial Applicationsof Linear Programing, Vol. 1, Wiley and Sons, New York.

Cheng, C.-T. and Chau, K. (2004). Flood control management system for reservoirs,Environmental Modelling and Software 19 : 1141–1150.

Chow, V. T., Maidment, D. R. and Mays, L. W. (1983). Applied Hydrology, McGraw-Hill,New York.

258

Consuegra, D., Niggli, M. and Musy, A. (1998). Concepts méthodologiques pour le calculdes crues. Application au bassin versant supérieur du Rhône, Wasser Energie Luft - EauEnergie Air 9/10 : 223–231.

Coulibaly, P., Anctil, F. and Bobée, B. (2001). Multivariate Reservoir Inflow ForecastingUsing Temporal Neural Networks, Journal of Hydraulic Engineering 6(5) : 367–376.

Cunge, J. A. (1969). Au sujet d’une méthode de calcul de propagation des crues (MéthodeMuskingum), Journal of Hydraulic Research 7(2) : 205–230.

Cunge, J. A. (1991). Polycopié, Simulation des écoulements non-permanents dans les rivièreset canaux, Institut National Polytechnique de Grenoble, Ecole Nationale Supérieured’Hydraulique et de Mécanique de Grenoble.

Dandy, G. and Maier, H. (1996). Use of artificial neural networks for real time forecasting ofwater quality, Proc.„ International Conference on Water Resources and EnvironementalResearch, Vol. II, Kyoto.

Dantzig, G. B. (1982). Reminiscences about the origins of linear programming, OperationalResearch Letters 1(2) : 43–48.

Dawson, C. W. and Wilby, R. (1998). An artificial neural network approach to rainfall-runoffmodelling, Hydrological sciences journal-Journal des sciences hydrologiques 43(1) : 47–66.

DeRoo, A. P., Gouweleeuw, B., Thielen, J., Bartholmes, J., Bongioannini-Cerlini, P., Todini,E., Bates, P. D., Horritt, M., Hunter, N., Beven, K., Pappenberger, F., Heise, E., Rivin,G., Hils, M., Hollingsworth, A., Holst, B., Kwadijk, J., Reggiani, P., Dijk, M. V., Sattler,K. and Sprokkereef, E. (2003). Development of a European flood forecasting system,International Journal of River Basin Management 1(1) : 49–59.

Dietrich, J., Voss, F., Wang, Y., Lechthaler, E. and Schumann, A. (2006). OperationalFlood Risk Management Based on Ensemble Predictions - The Mulde Case Study, Proc.,3rd Symposium on Integrated Water Resources Management, Bochum.

Dolciné, L., Andrieu, H., Sempere-Torres, D. and Creutin, D. (2001). Flash-Flood Forecas-ting with Coupled Precipitation Model in Mountainous Mediterranean Basin, Journal ofHydrologic Engineering 6(1) : 1–10.

Dolling, O. R. and Varas, E. A. (2003). Artificial neural network for streamflow prediction,Journal of Hydraulic Research 40(5) : 547–554.

Drabek, U., Kirnbauer, R., Gutknecht, D. and Andrade-Leal, R.-N. (2002). Das Durch-flussprognosesystem HYSIM als Teil des EPV-Energiewirtschaftliches PlanungssystemVerbund, Mitteilung der Versuchsanstalt für Hydrologie und Glaziologie (VAW), N˚174,Band 1, ETH, Zürich, pp. 301–311.

Draper, A. J., Munévar, A., Arora, S. K., Reyes, E., Parker, N. L., Chung, F. I. and Peterson,L. E. (2004). CalSim : Generalized Model for Reservoir System Analysis, Journal of WaterResources Planning and Management 130(6) : 480–489.

DTEE (2000). 3e Correction du Rhône, Sécurité pour le futur, Rapport de synthèse, Etatdu Valais - Département des transports, de l’équipement et de l’environnement.

du Plessis, L. A. (2002). A review of effective flood forecasting, warning and response systemfor application in South Africa, Water SA 28(2) : 129–137.

259

Dubois, J. (1998). Comportement hydraulique et modélisation des écoulements de surface,Communications du Laboratoire de Constructions Hydrauliques N 8, Ed. A. Schleiss,Lausanne.

Dubois, J. (2005). Simulation des systèmes hydrauliques et hydrologiques complexes :Routing System II, Communication du Laboratoire de Constructions Hydrauliques N 21,Conférence sur la recherche appliquée en relation avec la 3e Correction du Rhône -Nouveaux développements dans la gestion des crues, Ed. A. Schleiss, Lausanne, pp. 133–145.

Dubois, J. and Boillat, J.-L. (2000). Routing System - Modélisation du routage descrues dans des systèmes hydrauliques à surface libre, Communications du Laboratoirede Constructions Hydrauliques N 9, Ed. A. Schleiss, Lausanne.

EER (2001). Nos centrales hydroélectriques, Les Electriciens Romands, Sion.

Ehrsam, E. (1974). Exposé général des deux corrections des eaux du Jura, Technical report,Commission Intercantonale des Travaux.

Eschenbach, E. A., Magee, T., Zagona, E., Goranflo, M. and Shane, R. (2001). Goalprogramming decision support system for multiobjective operation of reservoir systems,Journal of Water Resources Planning and Management 127(2) : 108–120.

Faivre, G. (2004). Etude comparative de méthodes de spatialisation des précipitations enrégion montagneuse. Application à la région du Valais, Master Thesis Report, EcolePolytechnique Fédérale de Lausanne.

French, M., Krajewski, W. and Cuykendall, R. (1992). Rainfall forecasting in space andtime using neural network, Journal of Hydrology 137 : 1–31.

Graf, W. H. and Altinakar, M. S. (1996). Hydraulique fluviale, Tome 2, Traité de Géniecivil, Vol. 16, René Walther, Lausanne.

Grebner, D., Aschwanden, H., Steinegger, U. and Zimmermann, M. (2000). Charakteristikdes Hochwassers vom 9. bis 16. Oktober 2000 auf der Alpensüdseite und im Wallis,WasserEnergie Luft - Eau Energie Air 92(11/12) : 369–377.

Gurtz, J., Baltensweiler, A. and Lang, H. (1999). Spatially distributed hydrotope-basedmodelling of evapotranspiration and runoff in mountainous basins, Hydrological Processes13 : 2751–2768.

Gurtz, J., Zappa, M., Jasper, K., Lang, H., Verbunt, M., Badoux, A. and Vitvar, T.(2003). A comparative study in modelling runoff and its components in two mountainouscatchments, Hydrological Processes 17 : 297–311.

Gustafsson, F. (2000). Adaptive Filtering and Change Detection, Wiley and Sons, Chichester.

Gutknecht, D. (2003). Extreme runoff events in small catchments - the need for a propermodelling strategy for early warning systems, Proc., Early Warning Systems for NaturalDisaster Reductions, Berlin, pp. 265 – 269.

Haiden, T. (2006). Niederschlagsprognosen mit hoher zeitlicher und räumlicher Auflösung :Fortschritte und Probleme, Hochwasservorhersage, Erfahrungen, Enticklungen und Rea-lität, Wiener Mitteilungen, Band 199, TU Wien, pp. 199–207.

260

Hall, M. and Minns, A. (1993). Rainfall-runoff modelling as a problem in artificialintelligence : experience with a neural network, in B. H. Society (ed.), 4th NationalHydrology Symposium, British Hydrological Society, Cardiff.

Hamdi, Y., Hingray, B. and Musy, A. (2003). Projet MINERVE, rapport intermédiaireN 1, volet B : Modélisation hydrologique, Unpubl. Technical Report, HYDRAM-EPFL,Lausanne.

Hamdi, Y., Hingray, B. and Musy, A. (2004). Projet MINERVE, rapport intermédiaireN 2, volet B : Modélisation hydrologique, Unpubl. Technical Report, HYDRAM-EPFL,Lausanne.

Hamdi, Y., Hingray, B. and Musy, A. (2005a). Projet MINERVE, rapport intermédiaireN 3, volet B : Modélisation hydrologique, Unpubl. Technical Report, HYDRAM-EPFL,Lausanne.

Hamdi, Y., Hingray, B. and Musy, A. (2005b). Un modèle de prévision hydro-météorologiquepour les crues du Rhône supérieur en Suisse, Communication du Laboratoire de Construc-tions Hydrauliques N 21, Conférence sur la recherche appliquée en relation avec la 3e Cor-rection du Rhône - Nouveaux développements dans la gestion des crues, Ed. A. Schleiss,Martigny, pp. 103–116.

Hauenstein, W. (1998). Talsperren und Hochwasserschutz in der Schweiz, Wasser EnergieLuft - Eau Energie Air 9/10 : 241–245.

Hebb, D. O. (1949). The Organization of Behavior, Wiley and Sons, New York.

Heller, P., Bollaert, E., Schleiss, A. J., Pellaud, M. and Schlaepfer, R. (2006). Multi-purposeshallow reservoir : Synergies between ecology and energy production, Proc., Riverflow2006, Lisbon.

Hernandez, J. G. (2006). Exploitation des prévisions météorologiques pour la prévisionhydrologique opérationnelle du bassin versant du Rhône, Master Thesis Report, EcolePolytechnique Fédérale Lausanne.

Hiew, K. (1987). Optimization algorithms for large scale multi-reservoir hydropower systems,PhD dissertation, Colorado State University.

Hingray, B., Mezghani, A., Schaefli, B., Niggli, M., Faivre, G., Guex, F., Hamdi, Y. andMusy, A. (2006). Projet CONSECRU2 - Estimation des débits de crue du Rhône à la Portedu Scex et autres points amont caractéristiques, Unpubl. Technical Report, Technicalreport, EPFL.

Homagk, P. (1996). Hochwasserwarnsystem am Beispiel Baden-Würtenberg, Geowissen-schaften 14(12).

Homagk, P. and Ludwig, K. (1998). Operationeller Einsatz von Flussgebietsmodellen bei derHochwasser-Vorhersage-Zentrale Baden-Würtemberg, Wasserwirtschaft 88(4) : 160–167.

Jain, S., Das, A. and Srivastava, D. (1999). Application of ANN for Reservoir Inflow Predic-tion and Operation, Journal of Water Resources Planning and Management 125(5) : 263–271.

Jairaj, P. and Vedula, S. (2003). Modeling Reservoir Irrigation in Uncertain HydrologicEnvironment, Journal of Irrigation and Drainage Engineering 129(3) : 164–172.

261

Jordan, F. (2005). Gestion des crues par opérations préventives sur les aménagementshydroélectriques à accumulation, Vol. 21, Communication du Laboratoire de ConstructionsHydrauliques N 21, Conférence sur la recherche appliquée en relation avec la 3e Correctiondu Rhône - Nouveaux développements dans la gestion des crues, Ed. A. Schleiss, Martigny.

Jordan, F., Boillat, J.-L., Dubois, J. and Schleiss, A. (2004). MINERVE, a tool for floodprediction and management of the Rhone river catchment area, Proc., Risks in Design andManagement of Rivers and Reservoirs, Vol. 17, Institut für Wasserbau und TechnischeHydromechanik, Technische Universität Dresden, pp. 227–236.

Jordan, F., Boillat, J.-L., Dubois, J. and Schleiss, A. (2005a). A new model for real-timeflood management by preventive operations on multiple hydropower schemes, Proc.,Hydro2005 - Policy into practice, Sess. 5, Hydropower and Dams, Villach.

Jordan, F., Boillat, J.-L., Dubois, J. and Schleiss, A. (2005b). Real-time flood managementby preventive operations on multiple alpine hydropower schemes, Proc., 31th IAHRCongress, Seoul, pp. 3235–3245.

Jordan, F., Boillat, J.-L., Dubois, J. and Schleiss, A. (2006a). Prévision et gestion des cruespar opérations préventives sur les retenues alpines, Proc., XXIIe Congrès des GrandsBarrages, CIGB/ICOLD, Barcelone, pp. 497–510.

Jordan, F., Boillat, J.-L., Dubois, J., Schleiss, A. and Hingray, B. (2006b). Modellzur Hochwasservorhersage und Hochwassermanagement der Rhone, Proc., Symposium :Stauhaltung und Speicher - von der Tradition zur Moderne, Schriftenreihe zur Wasserkraft,46/2, TU Graz, pp. 218–232.

Kalman, R. E. (1960). A New Approach to Linear Filtering and Prediction Problems,Journal of Basic Engineering D83(March) : 95–107.

Karaboga, D., Bagis, A. and Haktanir, T. (2004). Fuzzy Logic Based Operation of SpillwayGates of Reservoirs during Floods, Journal of Hydrologic Engineering 9(6) : 544–549.

Karamouz, M., Zahraie, B. and Araghinejad, S. (2005). Decision Support System forMonthly Operation of Hydropower Reservoirs : A Case Study, Journal of Computingin Civil Engineering 19(2) : 194–207.

Karbowski, A., Malinowski, K. and Niewiadomska-Szynkiewicz, E. (2005). A hybridanalytic/rule-based approach to reservoir system management during flood, DecisionSupport Systems 38.

Karunanithi, N., Genney, W. and Whitley, D. (1994). Neural networks for river flowprediction, Journal of Computing in Civil Engineering 8(2) : 201–220.

Kaufmann, P., Schubiger, F. and Binder, P. (2003). 2003 Precipitation forecasting bya mesoscale numerical weather prediction (NWP) model : eight years of experience,Hydrology and Earth System Sciences 7(6) : 812–832.

Koussis, A. D., Buzzi, A. and Malguzzi, P. (2003). Flood Forecasts for Urban Basin withIntegrated Hydro-Meteorological Model, Journal of Hydrologic Engineering 8(1) : 1–11.

Krainer, R. and Hable, O. (2004). Bewertung von Hochwasserrückhaltebecken mit Hilfeeines Risikoorientierten Ansatzes, Proc., Risks in Design and Management of Rivers andReservoirs, Mitteilung N 27, Institut für Wasserbau und Technische Hydromechanik, TUDresden.

262

Kumar, N. D., Prasad, D. and Raju, S. K. (2001). Optimal Reservoir Operation UsingFuzzy Approach, Proc., Int. Conf. on Civil Engineering (ICCE-2001), pp. 377–384.

Labadie, J. W. (2004). Optimal Operation of Multireservoir Systems : State-of-the-ArtReview, Journal of Water Resources Planning and Management 130(2) : 93–111.

LCH (2002). Modélisation Interdisciplinaire Numérique de l’Effet des Retenues Valaisannesà but Energétique - Projet MINERVE, Rapport N 5/02, Unpubl. Technical Report, LCH-EPFL, Lausanne.

LCH (2003). Modèle de prévision et de gestion des crues, Rapport intermédiaire N 1,Unpubl. Technical Report, LCH-EPFL, Lausanne.

LCH (2004). Modèle de prévision et de gestion des crues, Rapport intermédiaire N 2,Unpubl. Technical Report, LCH-EPFL, Lausanne.

LCH (2005). Modèle de prévision et de gestion des crues, Rapport intermédiaire N 3,Unpubl. Technical Report, LCH-EPFL, Lausanne.

LCH (2006). Modèle de prévision et de gestion des crues, Rapport intermédiaire N 4,Unpubl. Technical Report, LCH-EPFL, Lausanne.

León, C., Martín, S., Elena, J. and Luque, J. (2000). EXPLORE-hybrid expert systemfor water networks management, Journal of Water Resources Planning and Management126(2) : 65–74.

Leyland, G. B. (2002). Multi-objective optimisation applied to industrial energy problems,PhD Thesis N 2572, Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne.

Little, J. D. C. (1955). The use of storage water in hydroélectric system, OperationnalResearch 3(2) : 187–197.

Lobbrecht, A. H., Dibike, Y. B. and Solomatine, D. P. (2005). Neural Networks and FuzzySystems in Model Based Control of the Overwaard Polder, Journal of Water ResourcesPlanning and Management 131(2) : 135–145.

Maidment, D. R. (1993). Handbook of Hydrology, McGraw-Hill, New York.

Makridakis, S., Wheelwright, S. C. and McGee, V. E. (1983). Forecasting - Methods andApplications, 2nd ed., John Wiley and Sons, New York.

Manne, A. S. (1962). Product mix alternatives : Flood control, electric power and irrigation,International Economical Revue 8(1) : 30–54.

Marquardt, D. W. (1963). An Algorithm for Least Square Estimation of NonlinearParameters, Journal of the Society for Industrial and Applied Mathematics 11 : 431–441.

McCuen, R. H., Knight, Z. and Cutter, A. G. (2006). Evaluation of the Nash-SutcliffeEfficiency Index, Journal of Hydrologic Engineering 11(6) : 597–602.

McCulloch, W. and Pitts, W. (1943). A logical calculus of the ideas immanent in nervousactivity, Bulletin of mathematical biophysics 5 : 115–133.

Meile, T. (2002). Prévision à court terme des débits de fonte des glaciers alpins à l’aide deréseaux de neurones artificiels, Master Thesis Report, Ecole Polytechnique Fédérale deLausanne.

Minsky, M. and Papert, S. (1969). Perceptrons, MIT Press, Cambridge.

263

Molyneaux, A. K. (2002). A Methodology for Optimizing Complex Systems with TimeDependant Demand Variations Applied to Real World Cases, PhD Thesis N 2636, EcolePolytechnique Fédérale de Lausanne.

Moore, I., Turner, A., Jenson, J. and Band, E. (1993). GIS and land-surface-subsurfaceprocess modelling, in Goodchild, M.F. et al. (Eds), Environmental modeling with GIS,Oxford University Press, New York.

Nash, J. E. and Sutcliffe, J. V. (1970). River flow forecasting through conceptual models,part 1 - A discussion of principles, Journal of Hydrology 10(3) : 282–290.

Nikopoulos, C. (1997). Expert Systems, Marcel Dekker Inc., Basel.

Obled, C. and Djerboua, A. (1999). Mise en alerte météorologique par détection à échéancede 1,2,3 jours des pluies journalières intenses sur de petits bassins versants, Rapport duProjet Interreg II France-Italie.

Obled, C. and Zin, I. (2004). TOPMODEL : principes de fonctionnement et application, LaHouille Blanche 1(2004) : 65–77.

OFEG (2001). Protection contre les crues des cours d’eau, Technical Report , Directives del’OFEG, Office Fédéral des Eaux et de la Géologie.

OFEG (2002). Les crues 2000 - Analyse des événements / cas exemplaires, Technical ReportRapports de l’OFEG, Série Eaux, No2, Office Fédéral des Eaux et de la Géologie.

OFEG (2005). Bericht über die Hochwasserereignisse 2005, Technical Report , Rapport auconseil fédéral du 21.12.05, Office Fédéral des Eaux et de la Géologie.

OFEN (2001). Statistique suisse de l’électricité, Technical report, Office Fédéral de l’Energie.

Oliveira, R. and Loucks, D. (1997). Operating rules for multireservoir systems, WaterResources Research 33(4) : 839–852.

ONU (2002). Guidelines for reducing flood losses, Rapport de synthèse, Organisation desNations Unies.

Otero, J., Labadie, J. and Haunert, D. (1995). Optimization of managed runoff to the St.Lucie estuary, Proc., First Int. Conf. of the Water Resources Engineering Division, SanAntonio.

Pareto, V. (1896). Cours d’Economie Politique, Vol. I et II, F. Rouge, Lausanne.

Peng, C.-S. and Buras, N. (2000). Practical estimation of inflows into multireservoir system,Journal of Water Resources Planning and Management 126(5) : 331–334.

Philbrick, C. and Kitanidis, P. (1999). Limitations of deterministic optimization applied toreservoir operations, Journal of Water Resources Planning and Management 125(3) : 135–142.

Porporato, A. and Ridolfi, L. (2001). Multivariate nonlinear prediction of river flows, Journalof Hydrology 248(1-4) : 109–122.

Pougatsch, H. and Raboud, P.-B. (2002). Analyse de l’effet de rétention des ouvragesd’accumulation valaisans et tessinois pendant les crues d’octobre 2000, Wasser EnergieLuft - Eau Energie Air 5/6(2002) : 165–171.

264

Raboud, P.-B., Dubois, J., Boillat, J.-L., Costa, S. and Pitteloud, P.-Y. (2001). ProjetMINERVE-Modélisation de la contribution des bassins d’accumulation lors des crues enValais, Wasser Energie Luft - Eau Energie Air 11/12 : 313–317.

Raman, H. and Chandramouli, V. (1996). Deriving a general operating policy for re-servoirs using neural network, Journal of Water Resources Planning and Management122(5) : 342–347.

Rao, Z., Moore, I., O’Connel, P. and Jamieson, D. (2001). An interactive management sys-tem for operational control of Kirazdere reservoir (Turkey), Water resources management15(4) : 223–234.

Rechenberg, I. (1973). Evolutionsstrategie : Optimierung technischer Systeme nach Prinzi-pien der biologischen Evolution, Frommann-Holzboog, Stuttgart.

ReVelle, C., Joeres, E. and Kirby, W. (1969). The linear decision rule in reservoirmanagement and design, 1, Development of the stochastic model, Water ResourcesResearch 5(4) : 767–777.

Ribeiro, J., Lauzon, N., Rousselle, J., Trung, H. and Salas, J. (1998). Comparaison dedeux modèles pour la prévision journalière en temps réel des apports naturels, CanadianJournal of Civil Engineering 25 : 291–304.

Rosenblatt, F. (1958). The Perceptron : A Probabilistic Model for Information Storage andOrganization in the Brain, Psychological Review 65(6) : 386–408.

Rosenthal, R. E. (1980). The status of optimization models for the operation of multi-reservoir systems with stochastic inflows and nonseparable benefits, Research Report 75,Tennessee Water Resources Research Center.

Rumelhart, D., Hinton, G. and Williams, R. (1986). Learning Internal Representationsby Error Propagation, Vol. I of Parallel Distributed Processing : Explorations in theMicrostructures of Cognition, MIT Press, Cambridge.

Russel, S. O. and Campbell, P. F. (1996). Reservoir Operating Rules with Fuzzy Program-ming, Journal of Water Resources Planning and Management 122(3) : 165–170.

Sander, B. and Haefliger, P. (2002). Umbau der Stauanlage Mattmark für den Hochwasser-schutz, Tec21 36(2002) : 20–26.

Sarlos, G., Haldi, P.-A. and Verstraete, P. (2003). Systèmes énergétiques, Vol. 21, Traité deGénie Civil, Lausanne.

Schäfli, B. (2005). Quantification of Modelling Uncertainties in Climate Change ImpactStudies on Water Resources : Application to a Glacier-fed Hydropower Production Systemin the Swiss Alps, Th. Report N 3225, Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne.

Schäfli, B., Hingray, B., Niggli, M. and Musy, A. (2005). A conceptual glacio-hydrologicalmodel for high mountainous catchments, Hydrology and Earth System Sciences Discus-sions 2 : 73–117.

Schleiss, A. (2004). Augmentation du risque de dégâts liés aux inondations, Tracés - Risquesnaturels 19 : 13–16.

Schleiss, A. (2005). Siedlungsdruck erhöht Risiko für Hochwasserschäden, SVG-Schweizerische Vereinigung für Gesundheits- und Umwelttechnik 4 : 47–48.

265

Schmid, F., Fraefel, M. and Hegg, C. (2004). Unwetterschäden in der Schweiz 1972-2002 :Verurteilung, Ursachen, Entwicklung, Wasser Energie Luft - Eau Energie Air 1/2.

Schultz, M. and Steinebach, G. (2002). Two-dimensional modelling of the river Rhine,Journal of Computational and Applied Mathematics 145 : 11–20.

Schumann, A. (2004). Das Hydrologische Risiko bei der Bemessung und der Bewirtschaf-fungsplannung von Talsperren, Proc., Risks in Design and Management of Rivers andReservoirs, Vol. 27, Institut für Wasserbau und Technische Hydromechanik, TU Dresden.

Schwefel, H.-P. (1965). Kybernetische Evolution als Strategie der experimentellen Forschungin der Strömungstechnik, Master Thesis Report, Technische Universität Berlin.

Sharif, M. and Wardlaw, R. (2000). Multireservoir systems optimization using geneticalgorithms : Case study, Journal of Computing in Civil Engineering 14(4) : 255–263.

Shepard, D. (1968). A two-dimensionnal interpolation function for irregularly-spaced data,Proc., 23th Conference ACM, pp. 517–524.

Shrestha, B. P., Duckstein, L. and Stakhiv, E. Z. (1996). Fuzzy Rule-Based Modeling of Re-servoir Operation, Journal of Water Resources Planning and Management 122(4) : 262–269.

Sivapalan, M., Blöschl, G., Zhang, L. and Vertessy, R. (2003). Downward approach tohydrological prediction, HYDROLOGICAL PROCESSES 17 : 2101–2111.

Spokkereef, E. (2001). Extension of the Flood Foracasting Model FloRIJN, Final ReportN 12-2001, Institute for Inland Water Management and Waste Water Treatment, Lelys-tad, Netherlands.

Stam, A., Salewicz, K. and Aronson, J. (1998). An interactive reservoir management systemfor lake Kariba, European journal of operational research 107(1) : 119–136.

Steinebach, G. and Wilke, K. (2000). Flood forecasting and warning on the River Rhine,Journal of the Chartered Institution of Water and Environmental Management 14(1) : 39–44.

Tejada-Guibert, J., Stedinger, J. and Staschus, K. (1990). Optimization of the value ofCVP’s hydropower production, Journal of Water Resources Planning and Management116(1) : 52–70.

Thu, P. T. M. (2002). A Hydrodynamic-Numerical Model of the Rhine River, PhD ThesisReport, Mitteilungen des Instituts für Wasserwirtschaft und Kulturtechnik der UniversitätKarlsruhe (TH).

Toth, E., Montanari, A. and Brath, A. (1999). Real-time flood forecasting via combineduse of conceptual and stochastic models, Physics and Chemistry of the Earth Part B-Hydrology Oceans and Atmosphere 24(7) : 793–798.

Unver, O. and Mays, L. (1990). Model for real-time optimal flood control operation of areservoir system, Water Resources Management 4 : 21–46.

Vis, M., Klijn, F., Bruijn, K. D. and Buuren, M. V. (2003). Resilience strategies for floodrisk management in the Netherlands, International Journal of River Basin Management1(1) : 33–40.

266

Vivoni, E., Entekhabi, D., Bras, R., Ivanov, V., Horne, M. V., Grassotti, C. and Hoffman,R. (2006). Extending the predictability of hydrometeorological flood events using radarrainfall nowcasting, Journal of Hydrometeorology 7(4) : 660–677.

Walker, A. M. (1931). On the Periodicity in Series of Related Terms, Vol. 131 pp. 518-532,Royal Society of London.

Walser, A., Arpagaus, M. and Liniger, M. (2005b). Regionale Wetterprognosen mit Wahr-scheinlichkeiten - Jahresbericht der MeteoSchweiz 2004, Technical report, MeteoSwiss,Zurich.

Walser, A., Rotach, M. W., Arpagaus, M., Appenzeller, C., Marsigli, C. and Montani, A.(2005a). A Limited-Area Ensemble Prediction System, Technical report, MeteoSwiss,Zurich.

Westphal, K., Vogel, R., Kirshen, P. and Chapra, S. (2003). Decision support systemfor adaptative water supply management, Journal of Water Resources Planning andManagement 129(3) : 165–177.

Yates, D., Warner, T., Brandes, E., Leavesley, G., Sun, J. and Mueller, C. (2001). Evaluationof Flash-Flood Discharge Forecasts in Complex Terrain Using Precipitation, Journal ofHydrologic Engineering 6(4) : 265–274.

Yeh, W. W.-G. (1985). Reservoir Management and Operations Models : A State-of-the-ArtReview, Water Resources Research 21(12) : 1797–1818.

Yeh, W. W.-G. and Becker, L. (1982). Multiobjective analysis of multireservoir operations,Water Resources Research 18(5) : 1326–1336.

Yeh, W. W.-G., Becker, L. and Chu, W.-S. (1979). Real-Time Hourly Reservoir Operation,Journal of the Water Resources Planning and Management Division 105(WR2) : 187–203.

Young, P. C. (2002). Advances in real-time flood forecasting, Philosophical Transactionsof the Royal Society of London Series a-Mathematical Physical and Engineering Sciences360(1796) : 1433–1450.

Yule, G. U. (1926). Why do we sometimes get non-sense-correlations between time-series ?a study in sampling and the nature of time series, Journal of the Royal Statistical Society89 : 1–64.

Zadeh, L. A. (1965). Fuzzy sets, Information and Control 8 : 338–353.

Zaugg, M. (2003). Mehr Raum den Fliessgewässern - Der Weg zu einem nachhaltigenHochwasserschutz, GAIA 3 : 201–207.

Zealand, C. M., Burn, D. H. and Simonovic, S. P. (1999). Short Term Streamflow Forecastingusing Artificial Neural Networks, Journal of Hydrology 214 : 32–48.

Zurada, J. (1992). Introduction to Artificial Neural Networks - Application of a neuralnetwork technique to rainfall-runoff modelling, West Publishing Co, New York.

267

Communications du Laboratoire de Constructions Hydrauliques ISSN 1661-1179 Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne Editeur: Prof. Dr A. Schleiss

© 2007 - LCH-Communication 29

N° 21 2005 Conférence sur la recherche appliquée en relation avec la troisième correction du Rhône - Nouveaux développements dans la gestion des crues

N° 22 2005 INTERREG IIIB - Projet ALPRESERV. Conférence sur la problématique de la sédimentation dans les réservoirs - Gestion durable des sédiments dans les réservoirs alpins

N° 23 2005 Master of Advanced Studies (MAS) in hydraulic schemes Collection des articles des travaux de diplôme

N° 24 2006 S. Sayah Efficiency of brushwood fences in shore protection against wind-wave induced erosion

N° 25 2006 P. Manso The influence of pool geometry and induced flow patterns in rock scour by high-velocity plunging jets

N° 26 2006 M. Andaroodi Standardization of civil engineering works of small high-head hydropower plants and development of an optimization tool

N° 27 2006 Symposium érosion et protection des rives lacustres Bases de dimensionnement des mesures de protection des rives lacustres

N° 28 2007 A. Vela Giró Bank protection at the outer side of curved channels by an undulated concrete wall

N° 29 2007 F. Jordan Modèle de prévision et de gestion des crues - Optimisation des opérations des aménagements hydroélectriques à accumulation pour la réduction des débits de crue

Prof. Dr A. Schleiss Laboratoire de constructions hydrauliques - LCH EPFL, Bât. GC, Station 18, CH-1015 Lausanne

http://lchwww.epfl.ch e-mail: [email protected]

ISSN 1661-1179