MANTENANT J., RICO C., "Introduction au dossier thématique "La recherche en archéologie minière...

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RAN 44 – Dossier Métallurgie – pp. 11-16

– Julien Mantenant – Christian Rico

Introduction

fichier EDITEUR destiné à un usage privé

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revue arChéologique de narbonnaise, tome 44, 2011

Ces travaux s’inscrivent dans une dynamique déjà ancienne et qu’il nous faut maintenant décrire dans ses grandes lignes ; c’est là tout l’objet des quelques pages qui suivent.

C’est, dans une large mesure, le développement in-dustriel de la seconde moitié du XIXe s., reposant en partie sur l’exploitation des ressources minières du territoire, qui entraîne la redécouverte du patrimoine minier et métallurgique français. Ingénieur des mines et membre de l’Institut, Alfred Daubrée devient une référence dans ce domaine lorsqu’il publie deux ar-ticles sans équivalent jusqu’alors dans la Revue Ar-chéologique (Daubrée 1868 ; 1881). Il s’agit là de la première synthèse sur l’exploitation minière en Gaule, établie à partir d’un inventaire des vestiges miniers et métallurgiques anciens découverts depuis l’Ancien Régime, dans lequel les départements méditerranéens figurent en bonne place. À sa suite, plusieurs enquêtes historiques sur les anciennes exploitations minières du Midi méditerranéen, auxquelles participent des cher-cheurs d’horizons divers (Esparseil 1893 ; Jourdanne 1894 ; Esparseil 1896 ; Mingaud 1897 ; Vasseur 1911), sont menées jusqu’à la Première Guerre Mondiale.

Si, à l’échelle du territoire français, cette dynamique est cassée par la Grande Guerre, l’impact de ce conflit est plus nuancé dans le Midi méditerranéen. C’est en effet durant l’Entre-deux-guerres que des hommes de science s’intéressent pour la première fois aux vastes ferriers de la Montagne Noire (Lafitte 1935), au district minier ancien de Fayet, dans le sud-Aveyron (Balsan 1932) et au district minier de la val-lée de l’Orb, voisin du précédent (Gourdiole 1977). À ces travaux s’ajoutent quelques prospections menées par F. Mazauric et J. Barruol, en particulier dans les Cévennes et en Provence (Mazauric 1909 ; Mazauric 1916-1917 ; Barruol 1930). La Seconde Guerre Mon-diale provoque un court temps d’arrêt dans ce mou-vement. Il ne reprend que légèrement durant les deux décennies suivantes, sous la forme de plusieurs syn-thèses (Esparseil R. 1960) et de quelques études ori-ginales (Astre 1947 et 1948 ; Labrousse 1960 ; Martel 1963 ; Martel, Barruol 1968). En accordant une plus large place aux méthodes historiques et archéolo-giques modernes, et en proposant un renouvellement des problématiques, ces enquêtes portent en elles les germes du renouveau de l’étude des mines et métal-lurgies anciennes. Cette évolution, s’appuyant sur les

Figure 1 :Localisation des sites, objets

des articles du présent dossier.


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nombreuses observations de terrain formulées de-puis l’Ancien Régime, favorise l’émergence de l’ar-chéologie des métaux en tant que discipline à part entière à partir des années 1970.

Durant cette décennie, les recherches se poursuivent dans la haute-vallée de l’Orb et le district de Fayet (Gourdiole 1977 ; Hédan, Vernhet 1975), et s’éten-dent à de nouveaux territoires dans les Cévennes ou leur piémont (Verraes, Durand-Tullou 1974, 1977 ; Bessac, Bonnaud 1979 ; Prassl 1997), les Corbières (Rancoule, Solier 1977), et surtout la Montagne Noire. Dans ce massif, une série d’enquêtes archéolo-giques est engagée à partir de 1972, sous la houlette de Claude Domergue. Elles débutent par la fouille de l’imposant ferrier du Domaine des Forges, aux Mar-tys (Pailler et al. 1977), complétée par une première prospection du massif (Guilbaut, Landes, 1977), sui-vie d’une série d’inventaires archéologiques régio-naux. Ceux-ci couvrent alors les monts de Lacaune, les Corbières, le massif du Canigou et le Lodévois (De Filippo et al. 1982 ; Mut et al. 1985 ; Cambon 1989 ; Barrrouillet et al. 1989 ; Lopez 1989), tandis que d’autres programmes, incluant l’exploration de sites d’habitats ou d’aires de traitement, sont démar-rés dans les districts miniers de la haute vallée de l’Orb (Gourdiole 1989), des Cévennes (Bailly-Maître 1989 ; Landes 1989) et des monts de Cabrières (Bailly-Maître et al. 1984 ; Ambert 1999). L’étude du district sidérurgique antique de la Montagne Noire n’est pas abandonnée pour autant. Le complexe sidérurgique du Co d’Espérou (Saint-Denis) fait l’objet d’une série de campagnes de fouilles entre 1979 et 1985, tandis que la découverte, tant attendue, des premiers bas fourneaux romains au domaine des Forges, aux Martys, entraîne une reprise des fouilles en 1989 par l’équipe de Claude Domergue, qui s’est enrichie d’une jeune archéomètre, Catherine Jarrier, formée par le regretté Francis Tol-lon, ce qui a permis d’élargir notablement les perspec-tives dans l’étude de la sidérurgie romaine de la Mon-tagne Noire (Jarrier 1993).

Avec la reprise des travaux archéologiques au do-maine des Forges, c’est une nouvelle phase de la re-cherche qui s’ouvre, marquée par une diversification des axes d’étude et un plus grand perfectionnement des méthodes d’investigations. Désormais, celles-ci intègrent pleinement la notion d’interdisciplina-rité : archéomètres, paléoenvironnementalistes et forgerons épaulent archéologues et historiens dans la résolution des problèmes auxquels ils se trouvent confrontés. De nouveau, le district de la Montagne Noire constitue l’épicentre de la recherche en archéo-logie des métaux antiques dans le Midi méditerra-néen. À la suite de l’opération Les forges de Vulcain (Dars, Papillault 1992), au cours de laquelle deux fourneaux romains sont remis en fonctionnement (1991), plusieurs campagnes d’expérimentations sont

menées, afin notamment de préciser les techniques mises en œuvre par les sidérurgistes romains sur le site des Martys et d’évaluer l’ampleur de la produc-tion de fer dans ce complexe sidérurgique, l’un des plus imposants de la Gaule méditerranéenne (Do-mergue 1993). Les prospections menées au tournant des années 1990 et 2000 en constituent le prolon-gement logique, et permettent désormais de rendre compte de l’organisation et de l’importance de la pro-duction romaine de fer dans la Montagne Noire (De-combeix et al. 2002).

La fin des années 1990 et le début de la décennie suivante sont marqués par la mise en place de plu-sieurs programmes de recherche à forte dimension paléoenvironnementale. Couvrant en particulier les Pyrénées orientales (Izard 1999) et le Mont Lozère (Baron 2005 ; Baron et al. 2010 ; Lavoie et al. 2005), ils tentent d’éclairer l’impact des activités minières et métallurgiques anciennes sur le paysage. Dans le même temps, d’autres programmes voient le jour à l’est du Rhône, en particulier dans les Alpes du Sud et en Provence (Barge 2002 ; Morin et al. 2002).

L’étude du commerce antique des métaux constitue un autre axe de recherche privilégié ces dernières années. Associant plus étroitement archéomètres et archéologues, ces investigations mettent à profit les résultats de plusieurs décennies de recherches, aus-si bien dans le district sidérurgique de la Montagne Noire que sur les cargaisons de barres de fer antiques découvertes dans des épaves gisant au large de la Ca-margue (Long et al. 2002 ;Coustures et al. 2006 ; Pa-gès et al. 2008) ou encore sur les lingots de cuivre et de plomb repêchés au large des côtes du Langue-doc-Roussillon, entre Agde et Les Saintes-Maries-de-le-Mer (Lamy 1988 ; Klein et al. 2007 par ex.). La traçabilité des métaux est au cœur de la problé-matique, que les seuls arguments archéologiques et épigraphiques ne suffisent pas toujours à résoudre ; deux des articles de ce dossier (Baron, Coustures et Jézégou et al.) s’en font clairement l’écho et démon-trent tout le profit que l’Histoire a trouvé dans l’asso-ciation entre Sciences Humaines et Sciences dures.

Concernant la métallurgie du fer antique, une pre-mière synthèse régionale sur l’économie du fer dans l’Antiquité et le haut Moyen Âge voit le jour en 2011 (Pagès 2011). Ce travail couvrant près d’un millé-naire d’activité sidérurgique constitue une nouvelle étape plutôt qu’un aboutissement. En effet, les la-cunes de la recherche, malgré les progrès enregistrés ces trente dernières années, sont encore trop nom-breuses pour proposer une vision claire et précise de l’exploitation et de la production du fer en Gaule mé-diterranéenne sur une aussi grande période. Encore aujourd’hui, malgré les récents développements de l’archéologie du fer dans les Alpes, et la mise en évi-




dence de nombreux sites de production sur tout l’arc méditerranéen (Pagès 2008 : II, 16-17), du massif des Albères au Mercantour en passant par le Causse de Sauveterre, l’état des connaissances sur la sidérur-gie antique souffre d’un déséquilibre certain en fa-veur du bassin de l’Aude et des Pyrénées. Qui plus est, dans la plupart des régions de production antique connues à ce jour, cette activité a le plus souvent été étudiée sous l’angle d’inventaires archéologiques, à l’instar des recherches en cours dans les Corbières, dont les premiers résultats sont présentés dans ce dossier. Ces inventaires ne sont certes pas à remettre en question, tellement ils fournissent d’informations, mais ils montrent leurs limites faute d’être prolon-gés par des opérations plus approfondies (sondages, fouilles). De ce fait, bien des zones d’ombre demeu-rent quant aux modalités techniques et économiques de l’exploitation du fer durant l’Antiquité entre Alpes et Pyrénées.

De son côté, l’exploitation antique des minerais non-ferreux, si elle a tôt intéressé les archéologues, est encore mal connue. Certes, l’hypothèse d’un essor important de cette activité à partir de la Conquête ro-maine est depuis longtemps envisagée. Mais force est de constater qu’elle s’appuie sur des données par trop parcellaires, anciennes ou issues de simples prospec-tions pédestres. Or, les récentes découvertes faites à la mine de cuivre des Barrencs (Aude), fruit d’une fouille programmée en cours et objet de l’un des articles de ce dossier, démontre que l’évolution de cette activité pourrait s’avérer nettement plus complexe.

Julien Mantenant traces-umr 5608 – CNRS

Université de Toulouse II-Le Mirail chercheur associé à l’UMR 5140 – Lattes,

« Archéologie des Sociétés Méditerranéennes » Equipe TP2C

[email protected]

Christian Rico traces-umr 5608 – CNRS

Université de Toulouse II-Le Mirail [email protected]


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◤ Références bibliographiques

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