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aux ve-vie s. est bien attestée par les textes (5), puisse apporter sa contribution à cette double direction de recherches.

Après avoir brièvement rappelé les données de la stratigraphie, nous étudions trois ensembles d'amphores datés des v« et vie-vu^ s. Un troisième volet est consacré aux comptages et à leurs interprétations.

1. Conditions de l'étude

Les données stratigraphiques des fouilles conduites dans le secteur sud-ouest du chantier de la Bourse ont été exposées à plusieurs reprises et en détail (6). Rappelons simplement que, du ve au vue s., la stratigraphie peut être regroupée en quatre périodes principales : 1, 2 A, 2B et 3, marquées par des constructions successives.

L'abondance du matériel recueilli est telle qu'elle fait obstacle à l'étude de tous les fragments d'amphores de toutes les couches ; pour les besoins de cet article nous avons sélectionné six couches appartenant à trois périodes différentes, en privilégiant les points extrêmes de la stratigraphie :

• Période 1 : couches 2095/097 et 2696

C'est la période 1 qui offre le plus bel ensemble d'amphores. Les fragments de céramiques (mêlés à d'autres matériaux : faune, débris de végétaux, de cuir...) sont enchevêtrés de manière extrêmement serrée dans un sédiment d'origine naturelle (vase compacte, sable) qui se dépose peu à peu contre le quai du Haut-Empire. Ce riche dépotoir est scellé par les couches de construction (déchets de taille) de l'avant-mur d'enceinte et du premier quai tardif. Les couches 2095/097 et 2696 correspondent à un même niveau de vase fouillé de manière indépendante, respectivement aux extrémités sud et nord de l'aire 2 (fîg. 1).

Datation : Nous proposons de dater cette période 1 de la première moitié du v« s. (sigillée claire D formes Hayes 61 B, 81 A et B, 91 A ou B) avec une nette préférence pour le second quart ou le milieu de ce siècle (notamment en raison de la présence majoritaire du type Hayes IIA au sein des lampes africaines) (7). Les formes de sigillée claire C tardive Hayes 82 et 84, associées aux formes Hayes 87 et 104A de sigillée claire D, apparaissent dans les couches immédiatement postérieures.

• Période 2B : couches 1099a, 2524/526, 2843

Pour la période 2B qui regroupe la stratigraphie liée au second quai tardif, nous avons choisi trois couches qui sont certainement postérieures au milieu du vie s. Cette datation repose sur la présence, dans la couche 1099a, d'une monnaie au nom de Theodbert frappée vers 546-548 <8). A l'issue des fouilles de 1980-1981, nous pensions que cette couche était contemporaine de l'édification du second quai tardif <9); aujourd'hui nous aurions plutôt tendance à rapprocher la couche 1099a de la couche 2524/526 (fïg. 2) qui marque, dans l'aire 2, la phase de destruction de ce quai tardif (phase 3). A ce moment-là le mur de quai est partiellement épierré tandis que sont déversés divers détritus parmi lesquels des amphores brisées. A ces deux ensembles nous avons ajouté la couche 2843 qui comble une fosse de spoliation de la surévélation du quai du Haut-Empire et dont nous assumons le rattachement à la même phase stratigraphique.

(5) Cités dans E. Baratier, Histoire de Marseille, Toulouse, 1973, p. 53. (6) M. Bonifay, Céramiques..., p. 289-3032; D. Foy et M. Bonifay, Verreries..., p. 290. Voir également M. Bonifay, Fouilles récentes

sur le chantier de la Bourse : niveaux de l'Antiquité tardive et du haut Moyen-Age, Lettre d'Information du C.R.A. (= Archéologie du Midi Méditerranéen), 1981, 3-4, p. 37-40. Ces données qui concernent l'aire 1 fouillée en 1980-1981, sont également valables pour l'aire 2 fouillée en 1983-1984. Les couches dont le numéro commence par 1... appartiennent à l'aire 1 et celles dont le numéro commence par 2... à l'aire 2.

(7) C. Pavolini, Considerazioni sulla diffusione délie lucerne in terra sigillata prodotte in Tunisia, OPVS, II, 1983, p. 47. (8) Cl. Brenot, Monnaies de cuivre du vi' siècle frappées à Marseille, Mélanges de Numismatique, d'Archéologie et d'Histoire offerts

à Jean Lafaurie, Paris, 1980, p. 181-188. (9) M. Bonifay, Céramiques..., p. 293 et note 34.

OBSERVATIONS SUR LES AMPHORES TARDIVES À MARSEILLE 271

Fig. 1. — Chantier de la Bourse (1981). Aire 2. Période 1 : couche 2097

Fig. 2. — Chantier de la Bourse (1983). Aire 2. Période 2B : couche 2524/526.

Datation : La céramique (sigillée claire D formes Hayes 91 C et D, 99,105 et 109, Late Roman C ware forme Hayes 10) suggère une date plus tardive d'un demi-siècle par rapport au terminus post quem fourni par les monnaies (10), soit la fin du vie s. ou même la première moitié du vue s. On notera que les couches 2843 et 1099 ont toutes deux livré des formes Hayes 109 (n).

• Période 3 : couche 2372 Plusieurs tas d'amphores brisées, dont la couche 2372, recouvraient les vestiges de l'habitat tardif établi sur le

comblement de la corne du port et au pied des remparts. La formation de cette couche intervient après l'abandon des sols d'occupation (dépôt d'une fine couche de sable) et immédiatement avant l'épierrement des murs. C'est pourquoi nous la rattachons à la phase la plus tardive de la période 3 (phase 3).

Datation : Le matériel rare et fragmenté, recueilli sur les sols d'habitats, ne permet pas de préciser la datation de cette période 3, qui doit cependant se situer autour du vile siècle (sigillée claire D formes Hayes 105 et 109). Une monnaie du vue s. a été découverte dans un autre secteur de la destruction de ces bâtiments (12).

(10) Une autre monnaie de Theodbert a été recueillie en 1983 dans les niveaux de destruction du second quai tardif (Identification Cl. Brenot).

(11) Les fouilles de la mission britanique à Carthage semblent confirmer l'apparition de cette forme à la fin du vi« s. : M. G. Fulford et D.P.S. Peacock, The avenue du Président Habib Bourguiba, Salammbô : the Pottery and other Ceramic objects from the site, in Excavations at Carthage : The British Mission Volume I, 2, Sheffield, 1984, p. 75.

(12) Monnaie mérovingienne de Bayeux (670-680), en argent. Cf. J. Lafaurie, Monnaie mérovingienne de Bayeux trouvée à Marseille, B.S.F.N., 41« année, N° 5, mai 1986, p. 49-51.

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2. Etude typologique

Les couches 2095/097 et 2696 (période 1), 1099a, 2524/526 et 2843 (période 2B), 2372 (période 3) ont fourni un échantillonnage de 9 103 tessons d'amphores dont 604 éléments de bords, fonds et anses (cf. Annexe). La plupart des tessons peuvent être rattachés à des typologies existantes qui renvoient elles-mêmes à trois grandes régions productrices : la péninsule ibérique, l'Afrique du Nord et le Proche-Orient. Dans la catégorie « productions d'origine indéterminée » nous avons regroupé des formes connues dont l'origine est incertaine et des formes non répertoriées (13). Les principales typologies utilisées sont Almagro, Carthage (Riley), Egloff, Keay, Ostia (Panella et Manacorda), Robinson (14).

L'étude typologique est conduite séparément pour chacune des trois périodes stratigraphiques. La division du matériel par couches est conservée dans six inventaires simplifiés présentés sous forme d'histogrammes. En raison de la publication récente de plusieurs travaux de synthèse (15), nous n'avons pas jugé utile d'énumérer la totalité des données comparatives actuellement disponibles pour chaque type d'amphore; nous avons préféré mettre l'accent sur les comparaisons régionales.

1. Amphores de la période 1

4 685 tessons, dont 424 bords, fonds et anses. Amorti dans sa chute par la vase, le matériel est ici relativement peu fragmenté : nombreux sont les cols d'amphores

intacts. La vase permet également la conservation des enduits intérieurs de poix mais elle altère parfois l'apect extérieur de la céramique, provoquant des changements de couleur dont il importe de tenir compte à la lecture des descriptions de pâtes.

a) Productions hispaniques (fig. 4, , n° 1)

Trois exemplaires, soit seulement 2 % des bords, fonds et anses de la couche 2095/097 :

• Forme Dressel 23 :

Deux fragments de fonds (non dessinés). Pâte marron-gris à orange, assez fine, feuilletée, avec des inclusions noires et blanches; surface blanchâtre. Intérieur non poissé.

« Avatar de la forme Dressel 20 » (16) et aussi probablement originaire de Bétique, la forme Dressel 23 est attestée du iii« s. au w s. (peut-être vi* s.) (17). En France, elle est présente à Générac (Gard) à la fin du iv« s. (18), en Arles dans un dépotoir du début du ve s.(19), à Lyon dans les couches

(13) Ou que nous n'avons pas su reconnaître. (14) M. Almagro, Las necropolis de Ampurias, vol. I, Barcelone, 1953 et vol. II, Barcelone, 1955; J.A. Riley, The pottery front the

cisterns...; M. Egloff, Kellia, La poterie Copte, Quatre siècles d'artisanat et d'échanges en basse-Egypte, in Recherches Suisses d'Archéologie Copte, vol. III, Genève, 1977; S.J. Keay, Laie Roman Amphorae...; Ostia, IV, Studi Miscellanei, 23, Rome, 1977, p. 1 16-266; H.S. Robinson, The Athenian Agora, V. Pottery of the Roman Period, Princeton, 1959.

(15) Cf. note 3. (16) B. Liou, Informations archéologiques, Gallia, 31, 1973, p. 586. Voir également J. Remesal Rodriguez, Transformaciones en la

esportacion del aceite betico a mediatos del siglo III d.c, Produccion y comercio del aceite en la Antiguedad, II, Madrid, 1983, p. 115-131. (17) S.J. Keay, Late Roman Amphorae..., type XIII, p. 142-146. (18) Cl. Raynaud, Un atelier de potier du iv* s. ap. J.-C. à Générac (Gard), RAN, XV, 1982, p. 343 et fig. 15, M 9. (19) Fouille de sauvetage de l'Esplanade des Lices (1976) dirigée par G. Congés, G. Bertucchi, J. Bremond, J. Piton et

A. Roth-Conges. Sondage BI 9 : couches de dépotoir dans un quartier extra muros, datées du début du v« s. par des monnaies (la plus récente date de 402) et de la sigillée claire africaine formes Hayes 59, 61 A et B, 67, 91 A. Matériel en cours d'étude par G. Congés et M. Leguilloux qui m'ont fait l'amitié de me communiquer leurs résultats.

OBSERVATIONS SUR LES AMPHORES TARDIVES À MARSEILLE

lO-i exemplaires

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<0> <2> \* 6- -C

couche 2095/097

20- couche 2696

Fig. 3. — Inventaire (individus, nombre minimum) des amphores de la période 1 (en noir : productions hispaniques, en blanc : africaines, en hachuré : orientales, en tramé : origine

indéterminée)

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Fie 4. — Période 1 : Amphores hispanique (n° 1) et africaines (n°2 à 8). Ech. 1 : 4.

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tardives du chantier de la place Adolphe Max (20). Elle apparaît également dans le gisement sous-marin de l'anse des Catalans à Marseille (21) en association avec des amphores Almagro 51 B.

• Forme Almagro 51 B :

Un fragment de bord (fig. 4, , n° 1). Pâte jaunâtre, nombreuses grosses inclusions noires, inclusions blanches, mica. Traces de poix à l'intérieur.

La datation de cette forme s'inscrit entre la fin du m* s. et le milieu du ve s. (22). En France méridionale, les comparaisons sont les mêmes que pour la forme précédente (23). On y ajoutera un exemplaire découvert sur l'épave du Dramont F à Saint-Raphaël (Var) qui a livré également un chargement d'amphores africaines cylindriques « de moyenne dimension » et qui est datée, par le fouilleur, de la fin du iv* s. (24).

b) Productions africaines (fig. 4 à 6)

L'aspect des amphores africaines est généralement assez caractéristique : pâte orange granuleuse avec quelques inclusions blanches, surface blanche (25). Cependant, nous avons encore des hésitations pour certains fragments assez distincts du reste du matériel par leur pâte et leur forme (spatheion , n° 8 et amphores cylindriques n°* 15 à 18).

Morphologiquement, les productions africaines de la période 1 se répartissent en deux catégories : spatheia et amphores cylindriques. A ces deux types les plus fréquents et probablement originaires de Proconsulaire ou de Byzacène, nous avons ajouté un unique fragment d'amphore tripolitaine.

• Spatheia (fig. 4, nM 2 à 8) :

13 exemplaires, soit 8,5% du total des bords, fonds et anses de la période 1.

Aucun de ces spatheia n'a pu être reconstitué entièrement. Le diamètre à l'ouverture varie entre 10 et 12 cm, la hauteur du col (du bord à la base des anses) entre 14 et 16 cm. Trois variantes typologiques :

— n" 2, 4 et 6 : lèvre épaissie légèrement déversée vers l'extérieur; — n°7 : lèvre tombante à section triangulaire; — n° 8 : lèvre en bandeau et anses de section ovale. Les n" 4 à 7 ne présentent aucune particularité par rapport à la norme des pâtes africaines. En revanche, le n° 8 a

une pâte gris-beige avec de nombreuses inclusions blanches et noires; la surface est blanchâtre; le façonnage est plus grossier (bavures d'argile) (fig. 17). Tous les spatheia examinés ici sont poissés.

Il semble que la diffusion de cette forme intéresse principalement le ve s. (26). Les spatheia n08 2, 4 et 6 se rapprochent beaucoup de ceux découverts en association avec des amphores cylindriques « de grande dimension », sur l'épave du Dramont E à Saint-Raphaël (Var), datée de la première

(20) Fr. Villedieu, Amphores et vaisselle en usage à Lyon du iv* au vi' siècle : Activités économiques et commerciales, in Actes du Congrès de Reims (16-19 mai 1985) de la Société Française d'Etude de la Céramique Antique en Gaule, Supplément à la Revue Archéologique Sites, 27, 1985, p. 43.

(21) B. Liou, Gallia, 1973, p. 585-586. (22) S.J. Keay, Laie Roman Amphorae..., type XIX, p. 160-168. (23) Cl. Raynaud, Un atelier de potier..., p. 343 et fig. 15, 201; Fr. Villedieu, Amphores et vaisselles..., p. 43; B. Liou, Gallia, 1973,

p. 585-586; (24) J.-P. Joncheray, Une épave du Bas-Empire : Dramont F, Cahiers d'Archéologie Subaquatique, IV, 1975, p. 113-114. (25) Cette surface blanche n'est pas due à un engobe mais à une réaction chimique résultant de l'introduction d'eau de mer dans

la pâte. Cf. D.P.S. Peacock, Seawater, Sait and Ceramics in MG. Fulford, D.P.S. Peacock, Excavation al Carthage..., p. 263-264. (26) Cl. Panella, Le anfore africane..., p. 178-180.

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Fie 5. — Période 1 : Amphores africaines. Ech. 1 : 4.

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Fig. 6. — Période 1 : Amphores africaines (?) (dont tripolitaine n° 19). Ech. 1 : 4.

moitié du ve s. (27); les exemplaires d'Arles (28) sont également très voisins. Le type n°7 trouve des comparaisons à Rome (29) et le n° 8 à Carthage (30).

(27) J.-P. Joncheray, L'épave «E» du Cap Dramont, sigillée claire D et amphores rescapées du pillage, Cahiers d'Archéologie Subaquatique, IV, 1975, p. 145, planche II. Pour la datation voir également Cl. Santamaria, Le pied de mât de l'épave E du Cap Dramont (St Raphaël-Var), Archaeonautica, 4, 1984, p. 107.

(28) Voir note 19. (29) P. Pensabene, Nuove acquisizioni nella zona Sud-occidentale del Palatino, Archeologia Laziale, 5, p. 115, fig. 8 n° 7;

D. Whitehouse et ai, The Schola Praeconum I : The coins, pottery, lamp and fauna, Papers of the British Schoot at Rome, L, 1982, p. 76, fig. 10, no 137.

(30) Cl. Panella, Le anfore africane..., p. 181, fig. 22.

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• Amphores cylindriques (fig. 5 et 6)

— Amphores cylindriques « de moyenne dimension » (h° 9) :

Aucun fragment d'amphore cylindrique « de moyenne dimension » (31) n'a été identifié dans les couches 2095/097 et 2696 (le fond n° 3 pourrait éventuellement appartenir à ce type ?). Cependant le col n° 9 qui provient de la couche 2701, également attribuée à la période 1, atteste que cette forme est encore présente à Marseille dans le second quart du ve s., bien qu'en infime proportion. Pâte orange, surface blanche. Intérieur poissé.

— Amphores cylindriques « de grande dimension » (nM 10, 11, 12, 14) :

Les amphores cylindriques les plus nombreuses appartiennent au type Keay XXXV (n08 10, 11, 12) : 8 exemplaires.

Il s'agit de très grandes amphores dont le diamètre varie entre 31 et 36 cm. Le bord, en forme de bec, rejeté vers l'extérieur, est très caractéristique. Le fond n° 13 appartient peut-être à cette forme. Tous ces objets ne présentent aucune particularité par rapport à la norme des pâtes africaines. Ils sont tous poissés.

Il faut peut-être rattacher à cet ensemble le col n° 14 dont le bord est cependant légèrement différent. Pâte orange, mais surface grise granuleuse <32). Intérieur non poissé.

Ce type d'amphore a été récemment identifié par S.J. Keay (33) qui propose une date entre le milieu du ve s. et le milieu du vie s. Dans le midi de la France, on connaît principalement les exemplaires de l'épave du Dramont E à Saint-Raphaël (34).

— Formes Keay XXVII et Keay XXXVI :

Nous avons longuement hésité à classer dans les productions africaines les quatre exemplaires de forme Keay XXVII (n08 17 et 18) et les trois exemplaires de forme Keay XXXVI (n08 15 et 16). En effet, certains caractères, communs à ces deux formes, les distinguent des autres amphores cylindriques (35) (fig. 17) :

— soudure des anses immédiatement sous la lèvre : ce caractère ne se rencontre sur aucun autre type d'amphore cylindrique africaine;

— fréquentes bavures d'argile à la surface extérieure et intérieure (argile « collante ») alors que les spatheia n"4à 7 et les amphores cylindriques nM9 et 14 présentent une surface très propre;

— particularité de pâte : sur cinq exemplaires, elle est orange clair ou beige, granuleuse avec des inclusions noires et blanches, la surface est blanchâtre ou gris-clair. Le n° 18 a une pâte marron extrêmement granuleuse avec de nombreuses et grosses inclusions rouges, noires et blanches ; sa surface est blanche, granuleuse. Enfin la pâte d'un dernier fragment de forme Keay XXVII (non illustré) n'est pas différenciable du reste du matériel africain.

Toutefois, la plupart des auteurs n'émettent aucun doute sur l'origine africaine de ces deux formes, attestées au ve s. en Catalogne et en Italie et au vi* s. à Carthage (36). Ces formes sont connues en Arles dans le dépotoir du début du v<= s. (37).

Nota : un seul exemplaire de forme Keay XXXVI (le n° 15) et deux exemplaires de forme Keay XXVII sont poissés.

(31) Ibid., p. 176-178. (32) Un col de forme identique provenant de Saint Biaise (fonds Rolland, déposé au dépôt de fouilles de Saint-Rémy-de-Provence)

présente la même particularité de pâte. (33) S.J. Keay, Late Roman Amphorae..., type XXXV, p. 235-240. (34) J.-P. Joncheray, Dramont E, p. 144-145, planche II. (35) Je remercie Mme Antoinette Hesnard qui a attiré mon attention sur ces particularités. (36) S.J. Keay, Late Roman Amphorae..., p. 220-224 et 245; M.G. Fulford et D.P.S. Peacock, Excavations at Carthage..., p. 130 et

fig. 39; D. Whitehouse, Schola Praeconum I, p. 76, fig. 10, n° 127 et 128. (37) Voir note 19.

OBSERVATIONS SUR LES AMPHORES TARDIVES À MARSEILLE 279

• Amphore tripolitaine (fig. 5, n° 19)

Un col a été attribué à la forme Tripolitaine III (38). Pâte brun-gris, légèrement granuleuse avec des inclusions blanches, grises, quelques grains de mica; surface

blanchâtre. Intérieur non poissé. Inscription peinte sur le col <39). Ce type est habituellement daté des iiiMVe s. (38). Cependant, plusieurs exemplaires en ont été

récemment découverts dans des niveaux tardifs (40).

c) Productions orientales

• Forme Carthage Late Amphora 1 (fig. 7, n08 20 et 21)

C'est le type le mieux représenté parmi toutes les amphores de la période 1 : 29 exemplaires, soit 17 à 22% du total des bords, fonds et anses.

Ces amphores forment un groupe homogène. Cependant, les nw 20 et 21 diffèrent légèrement l'un de l'autre par le diamètre de leur ouverture (6,5 et 7,6 cm). On observe également deux catégories de pâte :

— la plupart des exemplaires ont une pâte grisâtre (décoloration due à la vase ?), très granuleuse avec de nombreuses petites inclusions noires, des petits grains rouges ou blancs, quelques points de mica;

— d'autres (dont le n° 20) ont une pâte marron-rosé plus compacte et plus fine ; la surface est beige. Tous les tessons sont poissés. Ces amphores, dont le diamètre à l'embouchure ne dépasse jamais 8 cm, appartiennent à une

variante précoce (Dressel 34 ou Egloff 169) du type L.R.A. 1. Certains auteurs réservent cette dernière appellation à une amphore dont le col est plus large et le corps moins globulaire (Egloff 164), qui est attestée à Marseille dans la période 2B (n° 56). P. Pensabene (41) a proposé pour ce type d'amphore une évolution dans le sens d'une augmentation progressive du diamètre du col. Dans cette hypothèse, les exemplaires de Marseille appartiennent à la première génération diffusée principalement au ve s.

Le type L.R.A. 1 (Egloff 169 tout autant que 164) est également caractérisé par la fréquence de ses inscriptions peintes. Aucune n'a été retrouvée sur les exemplaires de Marseille (effacées ?).

Dans le midi de la France, on connaît ce type d'amphore, probablement originaire de Syrie (infra, note 88), en Arles (42), à Saint-Martin-de-Crau (43), à Beaucaire (44), à Saint-Biaise (45)...

• Forme Carthage Late Amphora 3 (fig. 7, n08 22 et 23)

Très fréquente : 25 exemplaires, 10 à 13 % du total des bords, fonds et anses.. La pâte marron à grise (décoloration ?) est fine, feuilletée, extrêmement micacée. L'intérieur est poissé.

(38) D. Manacorda, Anfore, in Ostia IV, Studi Miscellanei, 23, 1977, p. 154-156. Cependant les amphores décrites ici sont plus massives que notre exemplaire.

(39) Cette inscription a été confiée pour lecture à M.B. Liou. Elle fera l'objet d'une publication spécifique. (40) Par exemple D. Whitehouse, Schola Praeconum I, p. 79, fig. 13, n° 175. (41) P. Pensabene, Le anfore con iscrizioni cristiane, Appendice 1 in D. Whitehouse, et ai, Schola Praeconum II, p. 190. (42) Voir note 19. (43) G. Congés, M. Bonifay, J.-P. Brun et M. Pasqualini, Un dépotoir de la fin de l'Antiquité dans la grotte de la Fourbine,

Saint-Martin-de-Crau (Bouches-du-Rhône), RAN, XVI, 1983, p. 352 et fig. 5. (44) Cl. Raynaud, Les Amphores, in Les fouilles du Clos de la Lombarde à Narbonne, ouvrage collectif, supplément à la Revue

Archéologique de Narbonnaise (sous presse), fig. 10. Idem, L'occupation de l'Antiquité tardive au château de Beaucaire, Etudes sur Beaucaire (Gard), ouvrage collectif, (sous presse), fig. 4.

(45) Un exemplaire complet provenant des fouilles de M. Rolland, est présenté dans le Musée de site de l'Association des Amis de Saint Biaise (temporairement fermé au public). Cf. M. Euzennat, Informations archéologiques, Gallia, XXVII, 1968, p. 435, fig. 16.

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Fie 7. — Période 1 : Amphores orientales. Ech. 1 : 4.

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Deux variantes : — n°22 : col tronconique, petites anses au profil très arrondi (un seul exemplaire); — n° 23 : col cylindrique, anses massives au profil plus élancé. Ces deux variantes sont illustrées à l'Agora d'Athènes (Robinson M 307 et M 373) et paraissent

se succéder dans le temps (46). En Arles, dans le dépotoir du début du ve s. (47) c'est la variante n° 22 qui est majoritaire. Elle est également attestée vers la fin du ive s. à Mandelieu (Alpes-Maritime) (48).

Les deux variantes sont fréquentes à Saint-Biaise (49). Cette amphore est aussi connue à Port-Vendres (50) et à Lyon(51). Son origine demeure encore imprécise (Asie mineure ?).

• Forme Carthage Late Amphora 4 (fig. 7, n™ 24-25)

6 exemplaires, un pourcentage modeste (1 à 7%) du total des bords, fonds et anses. Pâte brune ou grise (décoloration ?), lourde, compacte, micacée avec quelques inclusions blanches; surface beige,

micacée. Finition extérieure très grossière (larges bavures de pâte à l'embouchure). La forme représentée en période 1 est assez globulaire, les anses sont très rapprochées du bord,

ce dernier ne comporte pratiquement pas de lèvre. Ces caractéristiques ne se conservent pas sur les exemplaires plus tardifs de la période 2B (n° 59-60). Cinq exemplaires sur six sont poissés.

Ce type, probablement originaire de la région de Gaza en Palestine, apparaît dès le milieu du ive s. (52). En France, on en connaît des exemplaires à Bordeaux (53), Lyon (54) et Tours (55); sur le littoral méditerranéen, cette forme est attestée à Narbonne et Beaucaire (56). En Arles, le dépotoir du début du ve s. (57) en a livré de nombreux exemplaires, tout à fait identiques à ceux de Marseille.

• Forme Carthage Late Amphora 6 (fig. 7, n08 26) Seulement deux exemplaires. Pâte brun-rouge, sableuse avec des inclusions grises et blanches, quelques particules

de mica; surface grise. Intérieur poissé. Il s'agit de l'une des nombreuses variantes des amphores « en forme de sac » peut-être

originaires de Palestine (infra, note 101). La pâte et la forme du n°26 diffèrent de celles des exemplaires plus tardifs de la période 2B (n08 61 à 65). En outre, le fragment de la période 1 porte un décor peint de bandes verticales blanches.

(46) S. Robinson, Athenian Agora..., p. 17. (47) Voir note 19. (48) Fouilles du mithraeum (L. Aygeparse, M. Fixot, Y. Coudou, Un temple de Mithra à Mandelieu, Histoire et archéologie, n° 57,

octobre 1981, p. 85-86). Matériel en cours d'étude par L. Rivet qui a eu l'amabilité de me communiquer ce renseignement. Un exemplaire de la variante monoansée de cette production (iii« s. ?) a été découvert dans la tombe 100 de la nécropole du Pauvadon à Fréjus : I. Beraud, J.-P. Brun, G. Congés, Ch. Gebara, M. Pasqualini, Les nécropoles gallo-romaines de Fréjus, trois années d'action du service archéologique municipal, Catalogue de l'exposition (Fréjus septembre-novembre 1985), Fréjus, 1985, p. 34, n° 50.

(49) Fouilles récentes dirigées par M"e G. Demians d'Archimbaud. (50) Y. Chevalier et Cl. Santamaria, L'épave de l'Anse Gerbal à Port-Vendres (Pyrénées Orientales), RELig., XXXVII, 1971, p. 16,

% 11- (51) Fr. Villedieu, Amphores et vaisselle..., p. 44. (52) J.A. Riley, Coarse potterv, in Excavations al Sidi Khrebishi Benghazi (Bérénice) II, Supplément à Lybia Antique 5, 1979,

p. 219-222. Pour une origine dans le delta du Nil. Voir J.Y. Empereur et M. Ricon, A la recherche des fours d'amphores, in Recherches sur les

amphores grecques. B.CH., suppl. XIII, 1986, p. 108, fig. 10. (53) B. Wattier, Les amphores funéraires de la nécropole de Saint-Seurin à Bordeaux, L'information de l'Histoire de l'Art, XVIII, 1973,

p. 113-118. (54) Fr. Villedieu, Amphores et vaisselle..., p. 44. (55) Cité par J.A. Riley, Benghazi..., p. 220. (56) Cl. Raynaud, Beaucaire..., fig. 4 et Idem, Narbonne..., fig. 10. (57) Voir note 19.

282 M. BONIFAY

Ce type connaît en Orient une longue évolution depuis le n* s. et jusqu'aux viie-vnie s. (58). Il apparaît à Carthage dès le second quart du Ve s. (59) mais ne connaît pratiquement pas de comparaison sur le littoral français (60).

• Forme Robinson M 273 (fig. 7, ri* 21 et 28, flg. 17)

5 exemplaires. Nous avons attribué à cette forme des fragments de cols dont la pâte est rougeâtre, assez fine, avec de petites inclusions noires, blanches et grises ainsi que du mica; la surface est grise ou rouge, très micacée. L'intérieur est poissé.

Cette attribution paraît satisfaisante pour le n° 27 <61). Mais le n° 28 présente quelques particularités typologiques <62) : gorge interne du bord, larges cannelures du col. Ne doit-on pas plutôt rapprocher cet exemplaire de la forme Kuzmanov XVII (63) ?

Malgré l'imprécision des données comparatives, il semble que ce type d'amphores est surtout fréquent au ive s. dans l'espace istro-pontique. Parmi ses attestations récentes en Méditerranée occidentale, on citera les découvertes de Rome et de Canosa(64). En France, un exemplaire isolé provient de la rade de Port-Vendres (65).

d) Productions d'origine indéterminée

Dans cette catégorie, une forme est relativement bien connue tandis que six autres ne paraissent entrer dans aucune des classifications actuelles.

• Forme Keay LU (fig. 8 et 17)

Très abondante : 24 exemplaires, soit 15-16% du total des bords, fonds et anses. Les exemplaires marseillais offrent trois variétés de pâte : — A : pâte beige-rosé, granuleuse avec de grosses inclusions blanches, de très nombreuses petites inclusions noires,

du mica; suface beige-verdâtre à beige-rosé, granuleuse, micacée (n"29 et 32). — B : pâte beige-gris, encore plus granuleuse, avec de nombreuses et grosses inclusions blanches, de nombreuses

petites inclusions noires, du mica ; surface beige-blanchâtre très granuleuse, micacée (n°* 31 et 34). — C : pâte beige-marron, plus fine, sableuse, avec quelques rares petites inclusions blanches, de petites inclusions

noires et du mica très abondant; surface beige-gris, plus douce au toucher, très micacée (vFW et 33). Ces différences de pâtes ne correspondent pas aux variations de forme : — n°* 29 et 30 : lèvre très irrégulière à section triangulaire, anses à section ronde ou ovale, corps tronconique étroit; — n°31 : se distingue par la gorge sur la face externe du bord; — n° 33 : bord comparable aux nos 30 et 3 1 mais anses rubannées et corps plus globulaire ; — n° 34 : col très étroit, anses nervurées au profil plus arrondi. Tous les tessons sont poissés. La typologie de ces amphores n'est pas encore bien arrêtée.

(58) C. Scorpan, Contribution à la connaissance de certains types céramiques romano-byzantins (îv-vu* s.) dans l'espace istro- pontique, Dacia, XXI, 1977, p. 273-274, type VI.

(59) J.A. Riley, New light on relations..., p. 117. (60) Peut-être un fragment sur l'épave St-Gervais II à Fos-sur-Mer mais dans un contexte vi'-vn* siècles : M.-P. Jezegou, L'épave II

de l'Anse Saint-Gervais à Fos-sur-Mer, Thèse de IIIe cycle dactylographiée, Aix-en-Provence, 1983, p. 239-240 et pi. 115, n° 693 B. (61) Quatre exemplaires dans les couches 2095/97 et 2696. (62) Le col dessiné fig. 7 appartient à la couche 1024 également attribuée à la période 1. Dans les couches 2095/097 et 2696 : un

seul exemplaire. (63) G. Kuzmanov, Tipologia chronologia na ranovizantiiskie amfori, Arkheologiya, I, p. 14-23. (64) D. Whitehouse, Schola Praeconum /..., p. 80, fig. 14 n° 198, G. Volpe, Canosa : due anfore tardo-imperiali con iscrizioni,

Vetera Christianorum, 1985, 1, p. 220-226. (65) M. L'Hour, et ai. Archéologie Sous-Marine sur les côtes de France. Vingt ans de recherche. Catalogue de l'exposition de Nantes

(28 juin-1" décembre 1985), Nantes, 1985, p. 106-107, n°461.

OBSERVATIONS SUR LES AMPHORES TARDIVES À MARSEILLE 283

31 32 34

Fig. 8. — Période 1 : Amphores d'origne indéterminée (type Keay LII). Ech. 1 : 4.

284 M. BONIFAY

II est possible que les nombreuses variations de pâtes et de formes correspondent à des productions diverses. L'un des premiers ensembles publiés est également l'un des plus abondants : il s'agit des amphores de l'Agora d'Athènes (formes Robinson M230, M302 et M323) datées du ive s. au vie s. (66). Toujours en Orient, un exemplaire provient de l'épave de Yassi-Ada II, datée de la deuxième moitié du iv» s. (67), et un autre des fouilles d'Argos, dans un contexte de la deuxième moitié du vie s. (68). A Ostie, cette forme n'est pas clairement identifiée : le fragment Ostia IV, n° 284 en fait probablement partie mais un exemplaire de comparaison provenant du Vatican (Ostia IV, n° 577) a été choisi pour illustrer la forme Ostia I, 453-454 (69).

Les fouilles récentes de la Schola Praeconum et du Temple de Cybèle sur le Palatin montrent que le type Keay LU est très abondant à Rome au cours du v* s. (70). En France, un exemplaire a été découvert sur l'épave du Dramont F à Saint- Raphaël (Var) (7I). Plus à l'Ouest, on en connaît maintenant des spécimens en Catalogne et en Andalousie (72).

On ne connaît pas encore le lieu de production de ces amphores; certains auteurs ont proposé une origine orientale (73).

• Forme indéterminée n° 35 (fïg. 9 et 17)

Deux exemplaires. Pâte chamois à strates brun foncé, très fine et compacte, légère, avec de nombreuses petites inclusions noires, quelques inclusions blanches; surface chamois ou beige-orangé, douce au toucher, très légèrement micacée.

Les deux exemplaires sont poissés. L'un porte sur l'épaulement une inscription peinte fragmentaire <74). Diamètre à l'ouverture : 8,5 cm.

• Forme indéterminée n° 36 (fig. 9 et 17)

Trois exemplaires. Pâte chamois, très fine et très légère, rares et petites inclusions noires et blanches, mica; surface chamois, douce au toucher, mica apparent. Intérieur poissé.

Diamètre à l'ouverture : 8 cm.

• Forme indéterminée n° 37 (fig. 9 et 17)

Cinq exemplaires. Pâte marron-beige, sableuse, constellée de minuscules particules blanches et noires; mica en surface. Intérieur poissé.

Diamètre à l'ouverture : 8,3 cm. Morphologiquement cette petite amphore présente des analogies avec le type Robinson M 273, ainsi qu'avec la forme précédente (n° 36) et la forme suivante (n° 38).

• Forme indéterminée n° 38 (fig. 9)

Deux exemplaires. Pâte gris-beige, granuleuse, avec de nombreuses petites inclusions blanches et noires; mica en surface. Intérieur poissé.

Diamètre à l'ouverture : 9,1 cm.

(66) H.S. Robinson, Athenian Agora..., p. 105-106, 112 et 114, pi. 23, 31 et 32. (67) G. F. Bass et G. H. Van Doorninck, A Fourth Century Shipwreck at Yassi Ada, AJA, 75, 1977, pi. 3 fig. 289. (68) P. Aupert, Objets de la vie quotidienne à Argos en 585, BCH, Supplément VI, Etudes Argiennes, 1980, p. 441-442 et fig. 46,

n° 328 a. (69) Ostia, IV, p. 230-235. (70) D. White house, Schola Praeconum /..., p. 77, fig. 11, n° 147, 153 et 158; Fr. Pacetti, Anfore tardoantiche prodoue in Oriente

provenienti da alcunti saggi di scavo effectuati presso il tempio délia Magna Mater sul Palatino, Tesi di Laurea, dactylographiée, Rome, 1984, p. 154-170 (anfore con orlo sagomato a « spigolo »). Pour ces deux sites j'ai pu examiner le matériel et vérifier ses similitudes avec celui de Marseille; je remercie MM. Simon Pratt, Fr. Pacetti et A. Carignani pour leur accueil.

(71) J.P. Joncheray, Dramont F..., p. 113-114, n° DF 73 x 2. (72) S.J. Keay, Late Roman Amphorae..., p. 267-268. (73) Fr. Pacetti, Anfore tardoantichi prodotte in Oriente...; S.J. Keay, Late Roman Amphorae... (74) Voir note 39.

OBSERVATIONS SUR LES AMPHORES TARDIVES À MARSEILLE 285

35 36

37 38

39 41

40 42 43

Fie 9. — Période 1 : Amphores d'origne indéterminée. Ech. 1 : 4.

286 M. BONIFAY

• Forme indéterminée n° 39-40 (fig. 9 et 17)

Deux exemplaires. Pâte orange, dure, compacte et lourde, avec de grosses et petites inclusions noires, quelques grosses inclusions blanches; surface orange granuleuse, inclusions apparentes. Un seul exemplaire poissé.

Diamètre à l'ouverture : 6,5 cm, fond plat (diamètre : 5,6 cm). La forme générale du col et celle du pied rappellent un peu le type Egloff 171 <75>.

• Forme indéterminée n° 41 (fîg. 9)

Deux exemplaires. Pâte beige ou brune, assez fine mais avec de grosses inclusions blanches et noires apparentes en surface. Intérieur poissé.

Diamètre à l'ouverture : 5,3 cm.

• Fragments isolés (fig. 9) — n° 42 : fond. Aspect général proche des productions africaines mais pâte assez particulière : beige-orangé, dure,

aspect plastique, nombreuses et grosses inclusions blanches et noires; surface blanche. — n° 43 : fond. Pâte brune, sableuse, micacée.

2. Amphores de la période 2B

2 333 tessons, dont 138 bords, fonds et anses. Bien qu'extrêmement fragmenté, ce matériel s'est prêté à de nombreux collages à l'intérieur de chacune des trois

couches. Le sédiment terreux n'a pas permis la conservation des enduits intérieurs de poix.

a) Productions africaines

Dans cette période, les productions africaines offrent une grande variété de pâtes. A côté d'une argile orange, dure et compacte, à surface blanche, que l'on pourrait qualifier de classique, dominent trois autres types de fabrication :

— A : pâte rose-orangé, poreuse mais dure, avec de petites inclusions blanches, noires et rouges; surface blanc-jaunâtre ;

— B : pâte orange à rouge-brique, compacte et dure, avec de rares petites inclusions blanches et rouges; surface jaune vif;

— C : pâte rouge-orangé claire, plus tendre, légèrement feuilletée, avec de très nombreuses petites inclusions blanches et quelques inclusions noires; surface blanchâtre usée et pulvérulente.

Il semblerait que ces différents groupes de pâtes correspondent à certaines variations typologiques :

• Spatheia (fig. 1 1 , n° 44)

Seulement 4 exemplaires, soit 2 à 4 % du total des bords, fonds et anses. Pâte africaine classique. Ces spatheia paraissent plus petits que ceux de la période 1 (cf. fig. 4, n08 2-8). Les spatheia

tardifs de petite dimension sont attestés jusqu'au vu* s. (76). En France méridionale, on en connaît des exemplaires à Saint-Etienne-de-Candau (Gard), à Saint-Rémy-de-Provence, à Saint-Biaise, à Gémenos (Bouches-du-Rhône) (77).

(75) M. Egloff, Kellia..., p. 114 : « argile orange très dure » . (76) Cl. Panella, Le anfore africane..., p. 184. (77) Saint-Etienne-de-Candau : S. Gagniere, Les sépultures à inhumation dans la basse vallée du Rhône, Cahiers Rhodaniens, XII,

1965, p. 79-80 et fig. 26. — Saint-Rémy-de-Provence : plusieurs exemplaires visibles dans les salles d'exposition du dépôt de fouilles de l'Hôtel de Sade. — Saint-Biaise : fragments dans les fouilles récentes de M"e Demians d'Archimbaud. — Gemenos : deux exemplaires dans la nécropole de Saint-Jean-de-Garguier (renseignement : J.B. Feraud).

OBSERVATIONS SUR LES AMPHORES TARDIVES À MARSEILLE 287

10-1

5-

exemplaires )-• exemplaires

couche 2524/526

1 * <o

• y -f

couche 1099 a

10-i exemplaires

Fig. 10. — Inventaire (individus, nombre minimum) des amphores de la période 2B.

couche 2843

• Amphores cylindriques (fig. 11, n08 45-53; fig. 12)

Ce sont les amphores les plus abondantes de la période 2B : 21 exemplaires, soit 38 à 46 % du total des bords, fonds et anses.

Il s'agit exclusivement d'amphores cylindriques « de grande dimension ». Un tesson est attribuable à la forme Keay LV; tous les autres se rattachent aux types Keay LXI/LXII. Cinq variantes principales :

— n°45 : lèvre à section triangulaire, étranglement du col sous bord; correspond à la variante Keay LXIIA; pâte africaine classique.

— n° 46 et 54 : lèvre triangulaire très effilée, col tronconique; peut correspondre aux types Keay LX ou LXIIJ; pâte du groupe A (4 exemplaires).

— n°47 : lèvre à section en amande, col tronconique, anses au profil arrondi; correspond à la variante LXIC; pâte du groupe B (2 exemplaires).

— n° 48 et 49 : lèvre massive en bandeau, col tronconique très large ; pâte du groupe C (7 exemplaires). — n°55 : bord convexe et lèvre en léger bandeau, étranglement du col; correspond à la variante Keay LXIIB ou

LXIIA n°3; pâte du groupe B (3 exemplaire) (fig. 17).

288 M. BONIFAY

44

47

49

45

46

48

V V •S 50 ^zJ 51

53 Fie 11. — Période 2B : Amphores africaines. Ech. 1 : 4.

OBSERVATIONS SUR LES AMPHORES TARDIVES A MARSEILLE 289

Fie 12. — Période 2B : Amphores africaines. Ech. 1 : 6.

Les fonds sont de deux types : — n°50 : fond cylindrique à base renflée (1 exemplaire); — n° 5! et 53 : fonds coniques à renflement annulaire (7 exemplaires).

290 M. BONIFAY

Ces amphores constituent un ensemble assez hétérogène dans le détail de leurs variantes mais cependant cohérent dans leurs caractéristiques générales : grandes dimensions (diamètre maximum entre 36 et 37 cm), lèvre en bandeau, col tronconique, anses massives, renflement annulaire du fond.

La documentation la plus abondante pour ce type d'amphores provient de Catalogne. Elle a été regroupée récemment par SJ. Keay sous les nos LX à LXII à la suite des travaux de Pascual Guasch, Almagro et Beltran Llorris (78). La provenance africaine de ces amphores est assumée par la plupart des auteurs (79).

Ces formes semblent apparaître dès la deuxième moitié du ve s. et sont attestées durant tout le vie s. (80). En France, des exemplaires en sont connus à Fos-sur-Mer, en particulier sur l'épave Saint-Gervais II (81), Saint-Biaise (82), Pommègues (83), Toulon (84), Port-Cros (85), etc. (86).

b) Productions orientales

• Forme Carthage Late Amphora 1 (fig. 13, n°56)

5 exemplaires, 3 à 13 % du total des bords, fonds et anses. Pâte marron-beige, extrêmement granuleuse, avec de nombreuses et grosses inclusions noires et blanches; surface beige-clair, granuleuse, inclusions apparentes.

Il s'agit du type Late Amphora 1 classique, équivalent de la forme Egloff 164. Le n°56(87) constitue probablement une évolution tardive des nos20 et 21 (fig. 6). Cette amphore est très probablement originaire de la région d'Antioche (Syrie) (88).

La forme Egloff 164 apparaît au début du vie s. en Egypte <89) et dès la deuxième moitié du ve s. à Carthage (90). Aux deux endroits elle est attestée jusqu'à la fin du vile s. En France, cette amphore se rencontre à Saint-Biaise (91), Toulon (92), Saint-Raphaël (93).

• Forme Carthage Late Amphora 2 (fig. 13, n08 57 et 58)

3 exemplaires. Pâte orange clair, assez fine, vacuolaire, avec de grosses inclusions beiges et de petites inclusions blanches et noires; surface intérieure orange, micacée, surface extérieure beige-jaunâtre, micacée et percée par des inclusions blanches.

Les trois couches étudiées ici ne nous ont livré que des fragments de panses, souvent décorés d'un peignage profond ondulé (n°58). Le tesson de bord n° 57. provient de la couche 1097, qui appartient également à la période 2B, phase 3.

Cette amphore apparaît à Carthage vers la fin du ve s. (94). Elle est surtout attestée aux vie-vue s.

(78) M. Almagro, Las necropolis de Ampurias..., vol. I et II; R. Pascual Guasch, Las anfora de la Plaza del Rey, Ampurias, XXV, 1963, p. 224-234; M. Beltran Lloris, Las anforas romanas en Espana, Saragoza, 1970.

(79) S.J. Keay, Late Roman Amphorae..., p. 348. (80) Cl. Panella, Le anfore africane..., p. 184. (81) M. P. Jezegou, L'épave II de l'Anse Saint-Gervais..., p. 202-205 et pi. 91-949. (82) Fouilles anciennes et récentes. (83) B. Liou, Informations archéologiques, Gallia, 33, 1975, p. 582-583 et fig. 13. (84) M. Pasqualini, Les fouilles de Toulon, 2, Quartier de Besogne, Le matériel des niveaux de l'Antiquité tardive du sondage 15, DAM,

9, 1986, (sous presse), fig. 5 et 6. (85) M. L'Hour et al., Archéologie Sous-Marine, p. 63-64, n° 248. (86) Saint-Jean-de-Garguier à Gémenos (Bouches-du-Rhône) : renseignement J.-B. Feraud; Oppidum de Bayonne à Bagnols-en-Forêt

(Var) : renseignement G. Désirât. (87) Ce col provient de la couche 1 100 attribuée à la période 2 B phase 2; les fragments des couches 2524/526, 1099 et 2843 sont

moins complets. (88) J.A. Riley, New light on relations..., p. 116. (89) M. Egloff, Kellia..., p. 112. (90) J.A. Riley, New light on relations..., p. 116. (91) Fouilles récentes de M"e G. Demains d'Archimbaud. (92) Voir note 84. (93) P. Fiori, Le mouillage antique du Cap Gros, Cahiers d'Archéologie subaquatique, III, 1974, p. 91 et planches III 8 et II, 10. (94) J.A. Riley, New light on relations..., p. 117.

OBSERVATIONS SUR LES AMPHORES TARDIVES À MARSEILLE 291

60

65

61

64

67

Fig. 13. — Période 2B : Amphores orientales (n° 56 à 66) et d'origine indéterminée (n° 67). Ech. 1 : 4.

292 M. BONIFAY

dans l'espace istro-pontique (95). En France, quelques tessons sont signalés à Saint-Biaise (96), Psalmodi (97), Toulon (98) et peut-être un exemplaire complet isolé à Antibes (99).

• Forme Carthage Late Amphora 3

Un tesson de panse, peut-être résiduel.

• Forme Carthage Late Amphora 4 (fig. 13, n08 59-60)

8 exemplaires, soit 7 à 14% du total des bords, fonds et anses. C'est l'un des deux types d'amphores orientales les plus fréquents en période 2B. Pâte orange clair à brun foncé, granuleuse, avec de nombreuses et grosses inclusions translucides, des inclusions blanches et noires, et peu de mica; surface marron ou beige, assez douce au toucher.

Il s'agit d'une variante tardive du type Late Amphora 4 corps étroit, anses éloignées du bord, lèvre verticale (comparer avec les n08 24-25, fig. 7). La distinction entre les deux variantes de ce même type d'amphore, apparu au ive s. et encore attesté au vue s., n'est pas toujours faite. L'exemplaire trouvé aux alentours de l'Ile du Grand Ribaud (Var) appartient à la variante tardive (100).

• Forme Carthage Late Amphora 5 (fig. 13, n08 61-65)

9 exemplaires, soit 7 à 9 % du total des bords, fonds et anses. Second type d'amphore orientale le mieux attesté en période 2B.

Pâte beige-orangé, sableuse, nombreuses petites inclusions rouges, translucides, blanches, noires; surface beige orangé, rugueuse, parfois traces d'un engobe (?) beige-blanchâtre.

Apparentées au type Late Amphora 6 (fig. 7, n° 26), les amphores « en forme de sac » de la période 2B s'en distinguent par leur taille, plus petite, et l'aspect de leur pâte. Cependant, la forme Late Amphora 5 apparaît comme une catégorie « fourre-tout » qui laisse place à de nombreuses variations typologiques (nM 61 à 64).

Ces petites amphores sont très fréquentes en Orient aux vie, vue et vnie s. (101). Il est possible que la Palestine, origine suggérée par certains auteurs (102), ne soit pas le seul lieu de fabrication de cette forme d'amphores (103). En France, les comparaisons sont rares (104).

• Forme Carthage Late Amphora 7 (fig. 13, n°66) 2 tessons. La pâte est caractéristique : marron-chocolat, assez tendre, sableuse, vacuolaire et micacée "05). Le tesson n° 66, profondément cannelé, pourrait appartenir à l'épaulement d'une amphore Egloff 173 ou 174, datées

du vu» s. Les amphores égyptiennes apparaissent à Carthage au courant du ve s. (106). Quelques fragments

sont présents en Arles au début du ve s. (107).

(95) C. Scorpan, Contribution à la connaissance..., p. 274 et fig. 10 (type VII). (96) Fouilles récentes. (97) Renseignement B.K. Young. (98) Voir note 84. (99) J.P. Joncheray, Nouvelle classification des amphores découvertes lors de fouilles sous-marines, Supplément aux Cahiers

d'Archéologie subaquatique, Seconde édition 1976, p. 41 pi. II, n° 111. (100) F. Carrazé. A propos de quelques découvertes sous-marines de Carqueiranne aux Iles d'Hyères, Cahiers d'Archéologie

Subaquatique, III, 1974, p. 169, n° 72-H3-02. (101) C. Scorpan, Contribution à la connaissance..., p. 273 et fig. 9. (102) J.A. Riley, New light on relations..., p. 117; D.P.S. Peacock, Petrology and origins, in M. G. Fulford et D.P.S. Peacock,

Excavations at Carthage..., p. 22-24. (103) M. Egloff, Kellia..., p. 117, n° 186 : « Amphore sphéroïde jaune fabriquée à Abou Mina (à 50 km des Kellias) ». (104) Un exemplaire isolé déposé à la Direction des Recherches Archéologies sous-marines sous le n° 3481 provient de la rade de

Marseille (renseignement FI. Richez, D.R.A.S.M.). (105) M"e Françoise Bonnet, chargée de l'étude de la céramique de la mission suisse des Kellia, m'a confirmé cette identification. (106) J.A. Riley, New light on relations..., p. 117. (107) Voir note 19.

OBSERVATIONS SUR LES AMPHORES TARDIVES À MARSEILLE

exemplaires

293

15-1

10-

5-

couche 2372

Fig. 14. — Inventaire (individus, nombre minimum) des amphores de la période 3.

c) Productions indéterminées

13 petits fragments de formes (dont 7 anses) n'ont pu être identifiés et certains sont peut-être résiduels. En revanche, 70 tessons appartiennent à une même amphore dont on a pu reconstituer la partie supérieure (fig. 13, n°67) : pâte orange clair à beige, assez fine, plutôt tendre, avec quelques rares inclusions blanches et noires ; surface extérieure blanchâtre, usée, pulvérulente, surface intérieure rosé, très micacée.

Il s'agit d'une grande amphore (diamètre maximum : 40 cm) au col tronconique surmonté d'un bord à section triangulaire. Les anses sont plates, nervurées à l'extérieur. Le col et l'épaulement portent un décor peigné.

Certaines de ces caractéristiques rapprochent l'amphore n° 67 des productions africaines. Mais la proportion de mica contenue dans la pâte fait obstacle à cette attribution.

3. Amphores de la période 3

2 085 tessons dont 42 fragments de bords, anses et fonds. Le matériel, très fragmenté, se prête cependant à quelques remontages.

a) Productions africaines (fig. 15)

Avec 13 exemplaires, soit 90% du total des bords, fonds et anses, ce sont les seules amphores nettement attestées en période 3.

Comme en période 2B, les amphores attribuées aux productions africaines présentent une grande diversité de pâtes. A côté de la pâte africaine classique, très faiblement représentée, et des groupes A, B et C reconnus en période 2B, on rencontre ici deux autres catégories :

— D : pâte brune, très granuleuse, avec de nombreuses et grosses inclusions translucides ; surface orangée avec des traces blanches.

— E : pâte brune verdâtre, granuleuse, avec quelques rares et grosses inclusions blanches, quelques petites inclusions translucides, surface blanche, usée.

294 M. BONIFAY

68 69

71

70 72

Fie 15. — Période 3 : Amphores africaines. Ech. 1 : 4.

Mis à part un seul fragment de spatheion, ces amphores sont toutes à rattacher aux types Keay LXI/LXII. Quatre variantes :

— n° 68 : lèvre massive en bandeau, col tronconique, anses striées à l'extérieur; rappelle les n"48 et 49 (fig. 11); pâte du groupe D; 1 exemplaire (4 exemplaires appartiennent plutôt à la variante n™ 48/49 et ont une pâte du groupe C).

— n° 69 : bord convexe et lèvre en léger bandeau, étranglement du col, anses au profil arrondi ; similaire au n° 55 (fig. 12); pâte du groupe B; 4 exemplaires.

— n°70 : lèvre en bandeau très large; pâte proche du groupe A; 2 exemplaires. — n°71 : lèvre en bandeau compact; pâte du groupe E; 1 exemplaire. Nous avons hésité à attribuer cette amphore

aux productions africaines. Les fonds sont tous du type conique à renflement annulaire (n° 72). Nos données de fouilles tendent à prouver que ce type d'amphores cylindriques « de grande

dimension » est encore utilisé au vu* s.

b) Productions orientales

Elles se résument à peu de choses : — Forme Carthage Late Amphora 1 : 3 tessons dont 1 seul bord; — Forme Carthage Late Amphora 2 : 1 fragment de panse;

OBSERVATIONS SUR LES AMPHORES TARDIVES À MARSEILLE 295

— Forme Carthage Late Amphora 4 : 9 tessons dont 2 anses; — Forme Carthage Late Amphora 5 : 27 fragments de panses. Ces éléments sont peut être déjà résiduels.

c) Productions d'origine indéterminée

26 tessons, aucun élément de forme.

3. Etude quantitative et interprétation

II est courant, dans la littérature archéologique actuelle, de procéder à des études quantitatives de céramique. Ces calculs sont tout particulièrement appliqués aux amphores dans le but de parvenir à une histoire économique.

• Remarques préliminaires

Nous n'avons pas la prétention de remettre ici en question le bien fondé de cette démarche (l08) : il est indéniable que les amphores, mieux que tout autre catégorie de matériel archéologique, sont susceptibles d'éclairer certains aspects du commerce de l'Antiquité. Cependant, en tant que technicien de l'archéologie, nous souhaitons attirer l'attention des lecteurs qui ne sont pas familiers des chantiers ou des dépôts de fouilles, sur les difficultés que suscitent les comptages d'amphores comme d'ailleurs tout comptage de céramique. La plus grande prudence s'impose en effet lorsqu'on désire comparer des statistiques faites sur des sites différents, ceci pour quatre raisons principales :

— Subjectivité de l'identification des types d'amphores L'identification d'un fragment d'amphore à un type déterminé et l'attribution de ce type à une région productrice

précise ne font pas toujours l'accord de tous les archéologues. La multiplication et la superposition des typologies, les différences de formation ou d'habitudes des chercheurs sont autant de sources de distorsions entre les comptages <109).

— Imprécision et subjectivité des datations L'intérêt est de pouvoir comparer des lots de matériel « contemporains ». Or, en Méditerranée occidentale, la

datation des niveaux tardifs repose principalement sur la céramique sigillée claire africaine dont les problèmes de chronologie (qui subsistent, surtout au v« s., malgré les récents progrès) sont trop souvent occultés. Il est donc très important de connaître en détail les bases de la datation du contexte archéologique (stratigraphie, monnaies, répertoire de formes des céramiques fines...) afin de pouvoir éventuellement les critiquer"10'.

— Diversités des contextes archéologiques Pour ne pas risquer de comparer ce qui n'est pas comparable, il est souvent utile de pouvoir se reporter au terrain

dont est issu le matériel (un dépotoir n'est pas un remblai, un sol d'habitat n'est pas une couche d'utilisation de citerne...). D'autre part, il faut rappeler que l'échantillonnage sur lequel nous travaillons est souvent très réduit : en quoi les amphores trouvées en un point seulement de la corne du port sont-elles significatives de la situation générale des importations à Marseille ?

(108) Pour l'historique du débat sur les amphores tardives, se reporter à S.J. Keay, Late Roma Amphorae..., p. 309-401. (109) H est probable que les progrès constants de la typologie des amphores tardives rendront rapidement caduques bien des études

quantitatives actuelles. Pour donner un exemple, la classification des amphores orientales ne remonte réellement qu'à une dizaine d'années, tandis que l'origine du type Keay LU demeure encore sujette à discussion.

(110) Prenons par exemple le cas du dépotoir de la Schola Praeconum /à Rome, que les fouilleurs proposent de dater des années 430-440 (voir note 29). Grâce à la publication intégrale et détaillée du matériel, il est loisible à chaque lecteur d'avoir une opinion personnelle sur cette datation : si j'avais eu le même matériel à Marseille, je lui aurais attribué une date légèrement plus tardive.

296 M. BONIFAY

— Hétérogénéité des méthodes de comptage Une certaine anarchie règne actuellement dans les méthodes de comptage des amphores : les expériences menées

depuis dix ans en la matière sont parfois assez différentes les unes des autres"1" et peuvent également fausser les comparaisons.

Ces quelques remarques sont des lieux communs pour la plupart des archéologues. Cependant, la lecture de quelques publications récentes nous donne à penser qu'il n'est pas inutile de les rappeler, dans le but, principalement, de relativiser nos propres comptages.

• Proportion des amphores par rapport au reste du matériel céramique

Les amphores constituent la catégorie de matériel la plus abondante dans les couches tardives du chantier de la Bourse. Par exemple pour l'aire de fouille n° 1, il est possible de dresser le tableau suivant (112) :

Périodes

3

2B

2A

1

Vaisselle

721 fragments, 8%

1 903 fragments, 19 %

3 389 fragments, 38 %

1 596 fragments, 40 %

Amphores

8 292 fragments, 92 %

8 255 fragments, 81 %

5 463 fragments, 62 %

2 441 fragments, 60 %

Ce rapport, nettement favorable aux amphores, mérite cependant d'être nuancé. Tout d'abord il ne faut pas accorder trop de crédit à l'augmentation de la proportion des amphores dans les couches récentes de la stratigraphie : les périodes 2B et 3 comportent plusieurs couches de remblai qui peuvent fausser les comparaisons. D'autre part ce rapport ne se conserve pas avec le calcul du nombre minimum de vases comme on peut le voir pour les deux couches de la période 1 étudiées dans cet article :

Couche 2 095/097

Fragments

Nombre minimum de vases

Couche 2 696

Fragments

Nombre minimum de vases

256

72

482

106

Vaisselle

Vaisselle

13%

58%

14%

50%

1772

53

2913

107

Amphores

Amphores

87%

42%

86%

50%

Ces deux séries de pourcentages sont assez stables : les amphores représentent 86-87 % du total des tessons mais seulement 42 à 50 % du nombre estimé de vases. En somme, pour une même quantité de tessons, la vaisselle donne un nombre plus important de vases différents.

(111) Par exemple J. Riley (Mission américaine à Carthage) utilise tout à la fois la pesée et le comptage des tessons. Cl. Panella (Mission italienne à Carthage) calcule ses statistiques d'une part sur la totalité des tessons, d'autre part sur les éléments significatifs (bords, anses, fonds). Fr. Pacetti (voir note 70) privilégie le comptage des bords. S.J. Keay, en Catalogne, utilise une méthode complexe où, pour chaque tesson de bord, est calculé le pourcentage conservé de la conférence totale du bord; etc.

(112) Comparer ce tableau à celui publié dans D. Foy et M. Bonifay, Verreries..., p. 307.

OBSERVATIONS SUR LES AMPHORES TARDIVES À MARSEILLE 297

Malgré ces quelques réserves, on ne peut constater aucun fléchissement de la proportion des amphores par rapport à la vaisselle entre le ve et le vu* s. (113).

• Proportion des différentes régions productrices

L'étude typologique {supra, p. 272) a montré que de la période 1 à la période 3 la plupart des amphores se rattachent aux productions africaines et orientales. Qu'en est-il de l'évolution respective de ces deux principaux flux commerciaux ?

Le détail des comptages a été renvoyé en annexe (cf. Annexe, p. 302) avec l'explication de la méthode utilisée. Les chiffres obtenus pour les différentes couches de chaque période restent suffisamment stables pour autoriser l'établissement des moyennes suivantes :

(N.B. : Le chiffre de gauche correspond au pourcentage par rapport au total des tessons et le chiffre de droite au pourcentage par rapport aux fragments de bords, fonds et anses).

Production africaine

Production orientale

Origine indéterminée

Totaux

(2«

20%

44%

34%

3 685 fgts

Période quart v

1 -s.)

22%

37%

35%

324 b,f,a,

Période (fin vi'-vii

61%

22,5 %

15%

2 333 fgts

2B • s.)

47%

25%

12%

138 b,f,a

97%

2%

1%

2 085 fgts

Période 3 (Vile S.)

90%

9,5 %

0%

42 b,f,a

Ce tableau amène plusieurs observations : • Les importations orientales sont largement majoritaires à Marseille dès le 2e quart du ve s.

(période 1) : environ 40% d'amphores orientales pour seulement 20% d'amphores africaines. Il se peut même que ce chiffre soit en réalité beaucoup plus élevé : une bonne part des amphores actuellement classées en production d'origine indéterminée sont peut être attribuables à l'Orient. Notamment, en comptabilisant comme le font certains auteurs (114), les amphores de type Keay LU parmi les productions orientales on obtient un chiffre situé entre 54 et 52 % (les amphores indéterminées ne représentent plus alors que 26% à 19% du matériel).

• A la fin du vi* ou au début du vn<= s. (période 2B, 3) on trouve une situation totalement inversée : 47 à 61 % d'amphores africaines pour 22 à 25 % d'amphores orientales.

• Au vin s. (période 3), les seules amphores réellement attestées sont africaines (?); les productions orientales ne paraissent subsister qu'à l'état de tessons résiduels.

Le phénomène de l'expansion des importations orientales a été mis en évidence à Carthage pour le début du vi* s. et à Rome pour le milieu ou le troisième quart du v* s. (ll5). A Marseille, dès le deuxième quart de ce siècle, la proportion d'amphores orientales est plus importante que celle observée plus tard dans chacune de ces deux villes (1I6). Le fléchissement du pourcentage des amphores orientales constaté à Marseille vers la fin du vie s. est également noté à Carthage à la même

(113) Ce qui ne veut pas dire, évidemment, que la quantité réelle des amphores importées à Marseille ne fléchit pas. (114) Fr. Pacetti, Anfore tardoantiche podotte in Oriente..., p. 156; S.J. Keay, Late Roman Amphorae..., p. 267. (115) Données statistiques résumées dans D. Whitehouse et al, The Schola Praeconum H, p. 267. Même phénomène en Sardaigne :

Fr. Villedieu, Tunis Libisonis, Fouille d'un site romain tardif à Porto Torres, Sardaigne, B.A.R. International Séries 224, Oxford, 1984, p. 233.

(116) II semble que la proportion d'amphores orientales soit déjà importante dès le début du ve s. en Arles. Renseignement G. Congés et M. Leguilloux (voir note 19).

298 M. BONIFAY

époque (U7). En ce qui concerne l'importance respective des différentes régions productrices de méditerranée orientale, les amphores les plus fréquentes en période 1 sont de type Carthage Late Amphora 1 (probablement région d'Antioche) et 3 (Asie Mineure, Sardis ?). En revanche, dans la période 2 B, les seules productions qui dépassent 10% de tessons appartiennent aux types Carthage Late Amphora 4 (Gaza ou delta du Nil) et 5 (Palestine ?). Toutefois subsiste encore à cette époque une certaine variété de productions puisque les types Carthage Late Amphora 2 (Bodrum ?) et 7 (Egypte) sont également attestés, bien qu'en infime proportion. Le type Keay LU (provenance orientale non prouvée) n'est présent qu'en période 1 mais en grande quantité.

Le monopole (restauré ?) des amphores africaines à la fin du vie s. et au vue s. trouve un parallèle dans l'abondance des types Keay LXI-LXII en Catalogne (118) mais s'oppose résolument aux résultats des fouilles de Naples où, dès le début du vi* s., ces amphores ne représentent plus que 20 % du matériel (119). Du point de vue typologique, il apparait que les amphores cylindriques « de grande dimension » succèdent dès le deuxième quart du ve s. aux amphores cylindriques de « moyenne dimension » tandis que les spatheia semblent surtout caractéristiques du ve s. (120). Les productions tripolitaines se réduisent à un seul exemplaire.

Enfin, les autres régions productrices sont très peu représentées : aucun élément n'a pu être attribué à une production gauloise des v*-viie s. La péninsule ibérique, avec trois exemplaires d'amphores de Bétique (?), totalise seulement 2 % des fragments de bords, fonds et anses en période 1. Il est toutefois intéressant de noter que les productions d'origine indéterminée sont plus abondantes dans la période 1 que dans les périodes 2 B et 3 : cette diversité typologique témoigne peut-être d'une activité commerciale globalement plus intense — en tout cas plus diversifiée — au Ve S. qu'aUX VIe-VIIe S.

• Comparaison entre les données des amphores et celles de la vaisselle

En 1983 nous considérions la première moitié du ve s. (période 1) comme une période de « moindre activité » commerciale par rapport aux vi*-viie s. (période 2B) (121). Cette opinion était fondée sur la seule observation des importations de vaisselle c'est-à-dire essentiellement de la céramique sigillée claire africaine. L'étude des amphores permet d'inverser complètement les termes de cette assertion. Cependant il demeure qu'à la faible proportion des sigillées claires africaines au 2e quart du ve s., répond, à la même époque, une proportion également réduite d'amphores africaines.

Il semble donc y avoir une corrélation directe, et cela a déjà été souligné par de nombreux auteurs (122), entre l'arrivée des amphores africaines et celle de la sigillée claire D. Mais ce fameux « dyptique » (123) entre vase — conteneur et vaisselle n'est pas systématique puisqu'à l'afflux d'amphores orientales en période 1 ne correspond pas un afflux de vaisselle orientale : ainsi l'importation du Late Roman C ware((m) et du Late Roman D ware (fig. 16, n°73) ne débute pas à Marseille avant la période 2A.1 (après le milieu du ve s.). Il en est de même pour un type de marmite (fig. 16, n° 75) qui est généralement (l25) considéré comme d'origine égéenne. De fait, il est remarqua-

(117) Cl. Panella, Le anfore di Carthagine..., p. 55 (après le milieu du vie s.); M. G. Fulford, The long distance trade and communications of Carthage c.A.D. 400 to c.A.D. 650, in M. G. Fulford et D.P.S. Peacock, Excavations at Carthage, p. 261 (depuis la fin du vie s.).

(118) S.J. Keay, Late Roman Amphorae..., p. 424 et fig. 185. Ces observations paraissent confirmer les hypothèses de P.-A. Février, Approches récentes de l'Afrique bysantine, Revue de l'Occident Musulman et de la Méditerranée, 35, 1983-1, p. 42.

(119) P. Arthur, Naples..., p. 252-255. (120) Ces deux observations confirment celles de Cl. Panella, Le anfore africane..., p. 184. (121) M. Bonifay, Céramiques..., p. 345. (122) A. Carandini, Ceramica africana, introduzione, in Atlante délie forme ceramiche, 1, Enciclopedia dell'Arte Antica, Rome, 1981,

p. 15. (123) J.P. Morel, La céramique comme indice du commerce antique (réalités et interprétations), in P. Garnsey et C.R. Whittaker (Ed.),

Trade and Famine in Classical Antiquity, Cambridge Philogical Society, supplementary volume n° 8, 1983, p. 71. (124) M. Bonifay, Céramiques..., p. 322-32 et fig. 30. (125) P. Arthur, Naples..., p. 251 et fig. 16.2., n° 1; J.A. Riley, Coarse pottery, in Excavations at Sidi Khrebish Benghazi (Bérénice),

II, Supplément à Lybia Antiqua, 5, 1978, p. 270-272 et fig. 106 n° 547-550.

OBSERVATIONS SUR LES AMPHORES TARDIVES A MARSEILLE 299

73 76

74 77

f

75 Fie 16. — Vaisselles importées. Ech. 1 : 3. ble que la seule vaisselle orientale identifiée en période 1 soit une vaisselle culinaire : il s'agit de marmites à anses horizontales (fig. 16, n°74) vraisemblablement d'origine palestinienne (l26). Cette production apparaît toutefois en très faible quantité (3 ou 4 tessons). Par ailleurs, la poursuite de l'étude de la vaisselle permet de nuancer la vision que l'on pouvait avoir en 1983 des importations de vaisselle africaine. En effet d'autres productions africaines, en dehors de la sigillée, sont attestées en période 1 : il s'agit d'une part de mortiers (fig. 16, n°77) dont l'aspect (pâte orange, surface blanche) rappelle beaucoup celui des amphores africaines (127) et d'autre part de marmites cannelées (fig. 16, n°78) à pâte orange et surface grise (128). Cependant ces productions apparaissent en très faible quantité. M. Fulford pense que la diffusion des vaisselles culinaires témoigne d'une plus grande densité de trafic commercial (l29). A cet égard on doit noter que des vaisselles culinaires orientales sont encore attestées en période 2B au moment où la proportion des amphores orientales diminue : il s'agit notamment de « bouilloires » à bec tubulaire (pâte beige-rosé, granuleuse avec des inclusions noires, (126) Nombreuses comparaisons dans P. Delougaz, A Byzantine Church at Khirbat Al-Karak. The Objects. University of Chicago Oriental Institute Publications, vol. 85, Chicago, 1960. En Egypte : M. Egloff, Kellia..., planche 47. Quelques fragments à Carthage : M. G. Fulford, The Coarse and painted wares, in M.G. Fulford et D.P.S. Peacock, Excavations at Carthage..., p. 189 et fig. 70 n° 38. Identification confirmée par Mlle Fr. Bonnet (cf. note 105). (127) Ibid., p. 173 et fig. 63, n° 22. Largement répandu : D. Whitehouse, Schola Praeconum I, fig. 13, n° 183-184; C.B. Rùger, Rômische Keramik as dem Kreuzgang der Kathedrale von Tarragona, Madrider Mitteilungen, IX, 1968, fig. 13, n° 8; F. Fiumi et L. Pratti, Note sulla ceramica comune, in G. Bermond Montanari, Ravenna e il porto di Classe, venti anni di ricerche archeologiche tra Ravenna e Classe, (Catalogue de l'exposition), Ravenne, 1983, p. 120 et fig. 6-7. (128) M.G. Fulford et D.P.S. Peacock, Excavations at Carthage..., p. 185 et fig. 69 n° 19-1 et 2. (124) Ibid., p. 257.

300 M. BONIFAY

rouges et blanches, du mica; surface marron noircie par le feu; intérieur couvert de calcite) pour lesquelles on trouve des comparaisons en Egypte et en Palestine (130) (fig. 16, n°76).

• Autres données

Les comptages de céramique, par leur rassurante technicité, ne donnent des échanges commerciaux qu'une image théorique, abstraite, qui peut être tempérée par d'autres observations :

— Capacité des amphores

Nous n'avons raisonné jusqu'ici qu'en nombre de fragments ou en nombre minimum d'exemplaires. Or le volume des denrées transportées est extrêmement différent selon le type d'amphore considéré.

Notamment les amphores orientales, si fréquentes en période 1, ont une capacité souvent modeste : 26 litres pour le type Late Amphora 1, 12 litres pour le type Late Amphora 3, 14 litres pour le type Late Amphora 4(13I). L'amphore Keay LU reconstituée à Marseille mesure environ 5,5 litres (132).

A la même époque les amphores africaines, moins nombreuses, sont représentées par le type Keay XXXV, cylindrique de « grande dimension », dont la capacité atteint 70 litres (133). Cette observation peut nuancer l'impression de tassement des importations africaines que donnent les comptages de tessons. En effet, il semblerait que le nombre des amphores africaines diminue au même moment où leur contenance passe d'environ 20 litres (amphores cylindriques de « moyenne dimension ») à 70 litres (amphores cylindriques de « grande dimension »).

— Contenu des amphores

Même en l'absence d'analyses biochimiques, les amphores de la période 1 donnent quelques informations sur leur contenu en raison de la conservation des enduits intérieurs de poix.

Il apparaît ainsi que 90 % des amphores de la période 1 sont poissées (134) : toutes les amphores orientales et la plupart des amphores africaines. Ceci semble exclure l'huile des produits les plus fréquemment importés à Marseille au ve s.

Cette observation étonnante amène deux remarques : • II faut se méfier de l'assimilation qui est souvent faite entre les amphores africaines et

l'huile (l35). A Marseille, les seules amphores africaines qui ont pu transporter de l'huile appartiennent aux types Keay XXVII, Keay XXXVI et Tripolitaine III (voir supra, p. 278). Mais tous les spatheia sont enduits de poix. Certains auteurs ont également pensé à l'huile pour quelques amphores orientales : ainsi le type Late Amphora 1 aurait transporté de l'huile syrienne (I36). A cet égard nous ne pouvons pas juger du contenu du véritable type Late Amphora 1 (Egloff 164) : les conditions

(130) Palestine : Nombreuses comparaisons chez P. Delougaz, A Byzantine Church...; voir également FI. Diez Fernandez, Ceramica commun romana de la Galilea, Madrid, 1983, p. 146, n° 154-158. Egypte : M. Egloff, Kellia..., pi. 71, n° 9. Identification confirmée par M"e Fr. Bonnet (cf. note 105).

(131) Capacités relevées chez M. Egloff, Kellia..., p. 109-119. (132) Capacité calculée selon la méthode exposée par G. Bertucchi, Amphore et demi-amphore de Marseille au /<■ siècle avant J.-C,

RAN, XVI, 1983, p. 94, note 8. Je tiens à remercier G. Bertucchi pour son aide. (133) Voir notre précédente. Le calcul a été fait à partir de l'exemplaire du Dramont E publié par J.-P. Joncheray, Dramont £...,

p. 144 et planche II. Cependant notre résultat est inférieur à celui obtenu (90 litres) par cet auteur. (134) Comptage établi en nombre d'exemplaires. (135) A. Carandini, Produzione agricola e produzione ceramica nell'Africa di et à impériale, Appunti sull'economia délia Zeugitana

e délia Byzacena, Studi Miscellanei, 15, Rome, 1970, p. 105-107; S.J. Keay, Late Roman Amphorae..., p. 408-428. En revanche, Cl. Panella, Le anfore africane..., p. 171-180, démontre l'interchangeabilité des contenus à l'intérieur d'un même type d'amphore. Pour les amphores africaines poissées on peut penser à des conserves de poissons ou même de viandes.

(136) J.A. Riley, New light on relations..., p. 116.

OBSERVATIONS SUR LES AMPHORES TARDIVES À MARSEILLE 301

d'enfouissement (période 2B) n'ont pas permis la conservation éventuelle des traces de poix. En revanche nous devons exclure un contenu oléagineux pour sa variante précoce Egloff 169.

• Des textes placent l'huile au premier plan des importations du port de Marseille durant le Haut-Moyen- Age (137). Certes il s'agit de textes plus tardifs, pour la plupart du vie s., or nous ne pouvons juger du contenu des amphores des périodes 2B et 3. Toutefois, cette marginalisation au ve s. de l'huile en tant qu'objet de commerce est surprenante et peut suggérer diverses hypothèses : soit l'huile occupe alors une place moins importante qu'auparavant dans l'alimentation et les autres usages (luminaires); soit la production d'huile du terroir de Marseille suffit à l'approvisionnement de la ville (138), soit encore l'huile d'importation lointaine, même conditionnée en amphores, ne fait que transiter par le port de Marseille pour gagner, en rupture de charge, l'intérieur des terres; soit enfin cette rareté des amphores non poissées tient seulement à la spécificité de l'échantillonnage considéré.

• Comparaison entre les données archéologiques et les textes

Le problème soulevé par le contenu des amphores révèle bien la distance qui existe entre les données archéologiques et les textes. En effet, en dehors de l'huile qui, au ve s., apparaît peu archéologiquement et du vin(139) qui pourrait en revanche convenir à la plupart des amphores poissées, les textes mentionnent toute une série de marchandises qui ne voyagent pas en amphores : le blé d'Italie (140), le papyrus d'Egypte (141), les épices et autres matières précieuses (soie, encens, ivoire...) des contrées orientales (142). La persistance des vaisselles orientales aux vie-vue s. pourrait être un indice confirmant la continuité de ces échanges. En revanche, on peut encore noter un décalage entre l'absence des amphores hispaniques à partir du milieu du ve s. et le passage de Grégoire de Tours (l43) mentionnant un navire revenant d'Espagne « avec sa cargaison habituelle » en 588.

Il semble donc plus sage, en ce qui concerne l'apport de ce matériel à l'histoire du commerce dans l'Antiquité tardive, de s'en tenir à quelques grandes lignes :

— la présence indubitable des denrées orientales sur le marché gaulois au ve s.; — la continuité des échanges avec l'Afrique du Nord aux vi^-viie s. Ces données archéologiques terrestres pallient utilement la carence actuelle de la documentat

ion en archéologie sous-marine : il est remarquable que les épaves de l'Antiquité tardive sont rares sur le littoral français (144) et qu'aucune n'a encore livré un chargement d'amphores orientales.

Michel Bonifay *.

(137) R. Pernoud, Le commerce de Marseille depuis le haut Moyen Age jusqu'à la fin du xiw s. Histoire du commerce de Marseille, I, Paris, 1949, p. 121-122. L'un de ces textes (Grégoire de Tours, Historia Francorum, IV, 43) mentionne le vol, après l'arrivée à Marseille de navires d'outre-mer, de soixante-dix récipients d'huile et de liquide : s'agit-il de « jarres », selon la traduction habituelle du mot orca, ou bien d'amphores ?

(138) J.-P. Brun, Recherches sur les huileries antiques dans le Var, thèse de IIIe cycle dactylographiée, Toulon/Aix-en-Provence 1982, p. 307-308 pense à « une certaine reprise de la production oléicole en Provence durant l'Antiquité tardive ». Or même au moment fort (il* siècle) de cette production on ignore quel était le contenant destiné au transport de cette huile : amphores de petites séries non encore déterminées, outres ? (p. 10-11).

(139) R. Pernoud, Histoire du commerce de Marseille, I, p. 122. (140) Ibid., p. 123. (141) Ibid., p. 122. (142) Ibid, p. 122-123. (143) Grégoire de Tours, Historia Francorum, IX, 22. (144) Cf. le Catalogue Archéologie sous-marine sur les côtes de France, Nantes, 1985. * Direction des Antiquités de Provence, Alpes, Côte-d'Azur, 21-23 boulevard du Roy René, 13617 Aix-en-Provence Cedex 1. Le

lavage et le marquage du matériel ont été effectués par M. Francis Nin, vacataire scientifique. La plupart des dessins ont été relevés par Mlle Catherine Bazin, T.U.C. La composition des planches de dessins est due à MM. Christian Hussy et Jean Prodhomme, Laboratoire d'Arts graphiques de la Direction régionale des Antiquités. Article écrit en avril 1986.