L'élaboration du contenu du texte : de la mémoire à long terme à l'environnement de la tâche

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Elaboration du contenu du texte 1 Runninghead: Elaboration du contenu du texte L’élaboration du contenu du texte: de la mémoire à long terme à l’environnement de la tâche Text content elaboration : from long-term memory to task environment Denis Alamargot * Laboratoire LaCo –CNRS- MSHS Université de Poitiers 99 avenue du recteur Pineau 86000 Poitiers- France Tél. 05 49 45 46 19 Fax. 05 49 45 46 16 E-mail : [email protected] Thème de recherche : analyse des mouvements oculaires du rédacteur Lucile Chanquoy Laboratoire LPEQ Université de Nice Sophia-Antipolis Thème de recherche : développement des processus rédactionnels de formulation et de révision Maria Chuy Laboratoire LaCo –CNRS- MSHS Université de Poitiers 99 avenue du recteur Pineau 86000 Poitiers- France Thème de recherche : mémoire à long-terme et production écrite

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Elaboration du contenu du texte 1

Runninghead: Elaboration du contenu du texte

L’élaboration du contenu du texte: de la mémoire à longterme à l’environnement de la tâche

Text content elaboration : from long-term memory to taskenvironment

Denis Alamargot *Laboratoire LaCo –CNRS-

MSHS Université de Poitiers99 avenue du recteur Pineau

86000 Poitiers- FranceTél. 05 49 45 46 19Fax. 05 49 45 46 16

E-mail : [email protected]ème de recherche : analyse des mouvements oculaires du rédacteur

Lucile ChanquoyLaboratoire LPEQ

Université de Nice Sophia-AntipolisThème de recherche : développement des processus rédactionnels

de formulation et de révision

Maria ChuyLaboratoire LaCo –CNRS-

MSHS Université de Poitiers99 avenue du recteur Pineau

86000 Poitiers- FranceThème de recherche : mémoire à long-terme et production écrite

Elaboration du contenu du texte 2

L’élaboration du contenu du texte : de la mémoire à longterme à l’environnement de la tâche

L’objectif ici est de présenter différentes conceptions de l’élaboration du contenu dutexte. Dans la littérature, les traitements conceptuels ont principalement été envisagés à traversleurs relations avec la mémoire à long terme et le processus de récupération. Il a été montré quela disponibilité et l’organisation des connaissances du domaine exerçaient une influence sur lamise en œuvre des traitements rédactionnels. L’environnement de la tâche, en consignant le texteen cours et des sources documentaires, joue également un rôle déterminant dans l’élaboration ducontenu. La question de la double influence des connaissances en mémoire et des informationsde l’environnement sur la dynamique des traitements est posée. Pour y répondre, la mémoire detravail, les théories d’activation et l’analyse des mouvements oculaires du rédacteur sontenvisagées.

production de texte - mémoire à long terme - environnement de la tâche – lecture/écriture– cognition/métacognition

Text content elaboration : from long-term memory to taskenvironment

This paper aims at analysing different theories about text content elaboration. In theliterature, the conceptual processing is considered through its relationships with long-termmemory and the retrieving process during planning. It has been shown that knowledgeavailability and organisation influenced the writing progress. The task environment, whichcontains both the text that is currently written and documentary sources, equally plays animportant role during text content elaboration. In this framework, the question concerning thedouble influence of knowledge from long term memory and information from environment onthe dynamics of writing processing is raised. The working memory, the activation theories andthe analysis of the writer’s eye movements are studied to answer this crucial question.

text production - long term memory - task environment – reading/writing –cognition/metacognition

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1. Introduction

L’élaboration du contenu d’un texte nécessite la mise en œuvre de traitements conceptuels qui

établissent des propositions sémantiques et déterminent leur enchaînement, aux niveaux macro-

et micro-structural. Ce message pré-verbal est traduit sur le plan linguistique par des traitements

grammaticaux et lexicaux et finalement est matérialisé par le biais de traitements graphomoteurs.

Dans le modèle rédactionnel de Hayes et Flower (1980), les traitements conceptuels s’opèrent au

sein des composantes de planification et de formulation. Lors de la planification, le processus de

génération (generating) récupère des connaissances référentielles en mémoire à long terme

(MLT) et/ou encode des informations extraites de l’environnement de la tâche. Analysées en

mémoire de travail (MDT), ces informations sont d’abord sélectionnées avant d’être organisées

en un plan de texte. Lors de la formulation, la première étape de traitement consiste à développer

chacune des idées principales du plan en élaborant des propositions sémantiques qui constituent

la base de texte (pour une synthèse: Alamargot & Chanquoy, 2001, 2002).

Dans la plupart des études, l’élaboration du contenu du texte a été essentiellement, si ce

n’est exclusivement, abordée sous l’angle de la récupération des connaissances en MLT

(Bereiter, Burtis, & Scardamalia, 1988 ; Bereiter & Scardamalia, 1987 ; Hayes & Nash, 1996 ;

McCutchen, 1986 ; Torrance, Thomas, & Robinson, 1996). Dans ce contexte, il a été montré que

la disponibilité des connaissances en MLT pouvaient influencer la mise en œuvre et le coût des

traitements rédactionnels (Kellogg, 1987 ; Caccamise, 1987). La MLT joue un rôle central dans

l’activité rédactionnelle car elle stocke l’ensemble des connaissances référentielles, linguistiques

et pragmatiques impliquées. Ceci ne doit pas pour autant conduire à négliger le rôle de

l’environnement de la tâche qui consigne au moins deux types d’information déterminantes pour

le rédacteur : des sources documentaires et le texte en cours. Rédiger à partir de sources

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documentaires est une activité fréquente et relativement « naturelle » dans les situations

scolaires, universitaires et professionnelles (activités de résumés, de synthèses, de simplification,

etc.). La question est alors de savoir comment la lecture de ces sources documentaires s’articule

avec les autres processus rédactionnels et contribue à l’élaboration du contenu du texte. Le texte

en cours suscite, quant à lui, des activités de lecture qui ont pour but, d’une part, de réactiver en

MDT ce qui a déjà été écrit afin de poursuivre le texte en assurant sa cohérence et sa cohésion,

et, d’autre part, d’évaluer la pertinence de ce qui a été écrit pour éventuellement en modifier le

fond ou la forme.

L’objectif de cette synthèse est de présenter et préciser les facteurs qui influencent la mise

en œuvre et le déroulement de la récupération et de la lecture au cours de la rédaction. Dans une

première partie, les principaux travaux décrivant l’influence des connaissances référentielles sur

le fonctionnement du processus de récupération sont présentées. La seconde partie se centre sur

les recherches relatives à l’influence des caractéristiques des sources et/ou du texte en cours sur

la mise en œuvre de la lecture au cours de l’écriture. La troisième partie aborde la question du

contrôle de la coordination lecture-écriture pendant la composition. En conclusion, des

perspectives de recherche pour préciser l’interaction entre la MLT et l’environnement de la tâche

sont évoquées.

2. Elaboration du contenu à partir de la MLT: rôle de la récupération

La plupart des modèles rédactionnels s’accordent sur le fait que la récupération des

connaissances référentielles s’opère par diffusion d’activation (Cf. Alamargot & Chanquoy,

2001). En s’appuyant sur ce postulat, les travaux expérimentaux ont principalement abordé deux

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questions. La première porte sur l’effet que les connaissances du domaine exercent sur les

traitements conceptuels. La seconde question concerne la nature automatique ou stratégique du

processus de récupération.

2.1. Rôle des connaissances du domaine

Pour analyser l’effet des connaissances référentielles sur l’élaboration du contenu du texte, les

études distinguent généralement deux groupes de rédacteurs, respectivement experts et novices

dans le domaine de référence, et comparent la qualité du contenu des textes produits (Caccamise,

1987 ; Voss, Vesonder, & Spilich, 1980) et/ou la nature et le coût des traitements engagés

(Butterfield, Hacker, & Plumb, 1994 ; Kellogg, 1987). Trois effets majeurs ont été mis en

évidence.

(1) L’expertise référentielle, en suscitant une densité et une intégration des connaissances en

MLT plus importantes, permet au rédacteur de composer un texte au contenu plus riche et mieux

organisé. Voss et al. (1980) ont demandé à deux groupes d’étudiants experts et novices dans le

jeu de baseball de produire un texte présentant les principes et les intérêts de ce jeu. L’analyse du

contenu des textes montre que les experts élaborent un contenu à la fois plus long, plus riche,

plus précis et mieux structuré. Cet effet facilitateur de l’expertise référentielle sur les traitements

conceptuels a été répliqué à maintes reprises chez des rédacteurs de différents niveaux (Benton,

Corkill, Sharp, Downey, & Khramtsova, 1995 ; Dansac & Alamargot, 1999 ; de Groff, 1987 ;

McCutchen, 1986). Caccamise (1987) a repris le principe de ces expériences en manipulant, chez

un même rédacteur, la familiarité du domaine et en enregistrant les pauses d’écriture pendant la

rédaction. L’auteur retrouve les résultats précédents. La familiarité avec le domaine augmente la

richesse du contenu du texte (en termes de nombre d’idées), ainsi que son organisation, se

traduisant par la présence d’un nombre plus important de thèmes et de sous-thèmes (« clusters »

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et « chunks »). De plus, la mise en correspondance des débits d’écriture et de l’organisation

sémantique du texte montre que les pauses sont plus fréquentes aux frontières des thèmes et

sous-thèmes, confirmant leur caractère unitaire au cours de la récupération.

(2) L’expertise référentielle, en rendant les connaissances référentielles plus disponibles (en

termes d’activation), diminue le coût de la récupération et du maintien en MDT de ces unités.

Les ressources libérées peuvent être alors allouées aux autres traitements rédactionnels. Kellogg

(1987), en recourant à la technique de la triple tâche, a comparé la fréquence d’occurrence et le

coût des trois composantes rédactionnelles (planification, formulation et révision) selon que le

thème était familier ou pas au rédacteur. Les résultats indiquent que le degré de familiarité du

domaine n’a pas d’effet sur l’occurrence des trois composantes durant la rédaction. L’hypothèse

de Kellogg selon laquelle les experts consacrent moins de temps à la planification au profit de la

formulation n’est pas confirmée. Quel que soit le degré d’expertise, la planification est fortement

présente dans le premier tiers du temps de rédaction et diminue ensuite progressivement. La

formulation demeure constante alors que la révision augmente et domine dans le dernier tiers-

temps. Si l’expertise référentielle ne semble pas modifier la répartition des composantes

rédactionnelles dans le temps, l’analyse des performances à la tâche secondaire indique toutefois

qu’elle suscite une nette diminution du coût attentionnel associé à chacune des trois

composantes. Pour Kellogg, l’expertise dans le domaine, en réduisant le coût de la planification,

libère des ressources cognitives qui sont allouées aux autres composantes, facilitant leur

fonctionnement.

(3) Bien que l’expertise dans le domaine ne modifie pas l’occurrence des trois composantes

rédactionnelles (Kellogg, 1987), elle influence la façon dont les traitements de planification

peuvent être mis en œuvre à un moment donné. Alamargot (1997) a proposé à des adultes et des

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enfants de rédiger, au cours de plusieurs séances hebdomadaires, un texte décrivant un ensemble

de figures géométriques complexes. La mise en rapport de la durée et de la localisation des

pauses d’écriture avec la complexité de l’organisation du contenu montre que l’établissement de

liens sémantiques complexes (entre les figures décrites) s’opère avant chaque paragraphe lorsque

le rédacteur est novice dans le domaine. En revanche, lorsque l’expertise référentielle du

rédacteur augmente, ce traitement d’organisation s’opère de plus en plus fréquemment au cours

des pauses inter et intra-propositionnelles, c’est-à-dire au cours de l’écriture des phrases (voir

également Dansac & Alamargot, 1999). Ce déplacement des traitements de planification vers des

pauses d’écriture habituellement dédiées à la formulation a été observé par Chanquoy, Foulin et

Fayol (1990) chez des adultes et des enfants lors de la complétion de courtes histoires par une fin

attendue (stockée en MLT) ou inattendue (à inventer ; voir également Chanquoy & van den

Bergh, 2004).

2.2. Récupération automatique vs. contrôlée

La seconde question à laquelle se sont intéressés les chercheurs pour préciser le rôle de la MLT

au cours de la production de texte relève du mode de gestion de la récupération: s’agit-il d’un

processus automatique ou au contraire contrôlé par les buts rédactionnels? Pour Hayes et Flower

(1980), la récupération des connaissances référentielles au cours de la rédaction est automatique.

Elle débute sous l’effet d’une sonde mémorielle (Raaijmakers & Shiffrin, 1981) qui, élaborée à

partir de la consigne, active une première unité dans le réseau de connaissances. Cette unité

constitue à son tour une sonde qui active une nouvelle unité, etc. Cette chaîne associative est

conçue pour fonctionner sans contrôle a priori et l’étendue des connaissances récupérées dépend

intrinsèquement de la structure et de la disponibilité des connaissances. L’évaluation et la

sélection des unités de connaissances récupérées et maintenues en MDT s’effectueraient a

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posteriori, sur la base de critères linguistiques, rhétoriques et pragmatiques (« goal setting »).

Selon Bereiter et Scardamalia (1987), ce mode de récupération automatique sous-tend la

stratégie des connaissances rapportées (knowledge telling strategy). Il permet d’élaborer des

textes au contenu relativement simple, basé sur la formulation des idées au fur et à mesure

qu’elles sont récupérées et sélectionnées, sans réorganisation ou modification majeure.

Economique, ce mode d’élaboration est approprié pour les rédacteurs novices ou pour composer

des types de textes basés sur la succession d’informations ou d’événements (listes, instructions,

narration, etc.).

Un autre mode de gestion du processus de récupération peut être également envisagé. Selon cette

conception, le recouvrement des connaissances en MLT ne s’opère pas de façon automatique

mais stratégique, sous le contrôle d’un plan ou d’un schéma de récupération (Walker & Kintsch,

1985). Dans le cas de la production de texte, ce sont les buts rhétoriques et pragmatiques qui

exercent ce contrôle à un niveau métacognitif. Bereiter et Scardamalia (1987) ont formalisé ce

mode de récupération stratégique dans le cadre de la stratégie des connaissances transformées

(« knowledge transforming strategy »). De multiples sondes mémorielles sont élaborées dans

l’espace rhétorique, sur la base des contraintes pragmatiques et linguistiques (définissant ce qui

doit être écrit et comment l’écrire). Cet ensemble de sondes contrôle la diffusion de l’activation

dans le réseau de connaissances référentielles (espace des contenus) et seuls les contenus

pertinents au regard des contraintes rhétoriques sont récupérés. Selon ce mode de récupération, la

sélection des contenus n’est pas effectuée a posteriori comme dans le cas de la récupération

automatique mais a priori. Peu accessible au rédacteur novice car complexe et coûteuse, cette

stratégie d’élaboration des contenus serait utilisée par les rédacteurs experts pour produire des

textes nécessitant une profonde réorganisation des idées (argumentation, synthèse, par exemple),

Elaboration du contenu du texte 9

voire la création de nouvelles connaissances référentielles au cours de la composition

(Scardamalia & Bereiter, 1991 ; voir également Eigler, Jechle, Merziger & Winter, 1991).

Les modes de récupération automatique et contrôlé ne sont pas antagonistes (Horton, Wilson &

Evans, 2001) et les stratégies des connaissances rapportées et transformées peuvent co-exister.

Selon Bereiter et Scardamalia (1987), les rédacteurs experts peuvent recourir à l’une ou l’autre

des deux stratégies selon le type de texte à produire et le degré d’exigence de la tâche.

A travers une série d’expériences, Torrance et ses collaborateurs se sont intéressés au décours

des deux modes de récupération automatique et contrôlé lors de la composition. Dans une

première expérience, Torrance, Thomas et Robinson (1996) ont demandé à 10 étudiants de

composer un texte argumentatif en verbalisant leurs pensées. Les idées énoncées dans les

protocoles verbaux pendant la période de préécriture ont été classées en trois catégories selon

qu’elles découlaient de la consigne, de l’espace des contenus (plan « to say »: idées du rédacteur

sur le thème) ou de l’espace rhétorique (plan « to do »: idées du rédacteur sur la façon

d’exprimer le contenu ; voir Flower & Hayes, 1980). Les résultats indiquent que le nombre

d’idées récupérées sous le contrôle de l’espace rhétorique est relativement faible pendant la

phase de préécriture. Les auteurs concluent à un fonctionnement essentiellement automatique de

la récupération, basé sur l’espace des contenus, durant cette période. Dans une deuxième

expérience, Torrance, Bouayard-Agha et Galbraith (sous presse) ont précisé la mise en œuvre

des deux modes de récupération en comparant les protocoles verbaux recueillis pendant la

période de pré-écriture et celle de composition. En classant les idées produites dans les

protocoles selon les catégories proposées par Mann et Thompson (1988 ; théorie de la structure

rhétorique), les auteurs montrent que les idées générées lors de la phase de pré-écriture sont

essentiellement informationnelles – c’est-à-dire basées sur le contenu – alors que les idées

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produites lors de la phase d’écriture sont majoritairement interpersonnelles – c’est-à-dire

orientées par les buts rhétorique et pragmatique de l’argumentation. Ce résultat semble indiquer

que le contenu du texte est élaboré en deux phases complémentaires. Une récupération

automatique des contenus, engagée durant la phase de préécriture, fournirait un vaste ensemble

d’idées. Durant l’écriture, ces idées seraient sélectionnées sur la base du plan rhétorique et

pragmatique élaboré à la fin de la période de préécriture, en fonction du contenu précédemment

récupéré.

2.3. Conclusion sur le rôle de la MLT

La MLT occupe une place privilégiée dans la rédaction de texte car elle contient les

connaissances du domaine nécessaires à l’élaboration du contenu du texte. En relation étroite

avec la composante de planification et le processus de récupération, la MLT influence

l’ensemble des traitements rédactionnels ainsi que la qualité du contenu du texte. Des

connaissances référentielles plus disponibles et mieux organisées en MLT conduisent à un

contenu plus structuré, à une réduction du coût cognitif des composantes rédactionnelles et à une

gestion différente de la planification au cours des pauses d’écriture. Le caractère automatique ou

contrôlé de la récupération des connaissances semble largement dépendre du type de stratégie

rédactionnelle, qui dépend elle-même du niveau d’expertise du rédacteur, du type de texte, ou

encore de l’étape rédactionnelle (préécriture, écriture).

La place fondamentale de la MLT dans les traitements rédactionnels a conduit à concevoir la

production du texte comme résultant d’un traitement « top down » ; c’est-à-dire allant des

connaissances en MLT vers la trace écrite. La MLT n’est pourtant pas la seule source

d’informations à partir de laquelle le contenu du texte peut être élaboré. Le texte en cours et les

éventuelles sources documentaires, présents dans l’environnement de la tâche, peuvent être

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également utilisés pour rédiger. La partie suivante analyse l’influence ascendante (e.g., du bas

vers le haut ou « bottom up ») de l’environnement de la tâche dans l’élaboration du contenu du

texte.

3. Elaboration du contenu à partir de l’environnement de la tâche: rôle de la lecture

Au cours de l’écriture, le rédacteur est amené à consulter le texte en cours et, selon la situation,

les sources documentaires disponibles dans l’environnement de la tâche. Ces consultations

peuvent être dirigées par plusieurs objectifs: (a) évaluer le texte en cours pour le réviser ; (b) lire

ce qui a été précédemment écrit pour réactiver ce contenu en MDT ; (c) appréhender de

nouvelles informations à partir des sources ; (d) vérifier l’adéquation entre les contenus du texte

et les sources. L’atteinte de ces objectifs suppose la mise en œuvre d’une activité de lecture

pouvant prendre plusieurs formes allant, d’une part, de la lecture linéaire à la recherche

ponctuelle d’information et, d’autre part, de l’analyse de la forme de surface (attention portée sur

le décodage) à l’analyse du sens (lecture pour comprendre).

La partie suivante aborde le rôle que joue la lecture des sources documentaires et du texte en

cours, dans l’élaboration du contenu du texte. Dans le cas du texte en cours, les relations entre

révision et élaboration sont spécifiées.

3.1. Lecture des sources documentaires

Rédiger à partir de sources suppose de sélectionner dans les documents des informations

pertinentes, d’organiser ces informations et de les compléter si besoin pour créer un texte

original et pertinent. Ce type de rédaction est qualifié « d’hybride » car il suppose la mise en

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œuvre coordonnée de la lecture et de l’écriture (O’Hara, Taylor, Newman, & Sellen, 2002 ;

Segev-Miller, 2004 ; Spivey & King, 1989). Les traitements rédactionnels en jeu peuvent être

plus ou moins complexes, au même titre que la rédaction « de mémoire ». Flower (1990) a décrit

trois stratégies de rédaction à partir de sources. La première stratégie, appelée « Gist and list »

(saisir l’essentiel et faire une liste) suppose de sélectionner les points centraux dans les sources

puis de les organiser en recherchant des relations. Cette stratégie permet de rédiger de façon

simple et rapide. Toutefois, elle ne permet pas de créer de nouveaux contenus car elle se limite à

rendre compte objectivement du contenu des sources. La deuxième stratégie rédactionnelle, dite

« True, Important and I Agree » (ceci est vrai, important et je suis d’accord), est fortement

dépendante de l’intérêt du rédacteur pour le thème. Les informations sont sélectionnées et

exploitées sur la base des connaissances préalables et selon les critères rhétoriques du rédacteur.

Cette stratégie conduit souvent à une profonde réorganisation des informations mais ne remet pas

en cause les sources ni ne dépasse le contenu initial. La troisième stratégie, nommée

« dialogue », serait l’équivalent de la stratégie des connaissances transformées (Bereiter &

Scardamalia, 1987). Le rédacteur procède à une analyse profonde des sources qui entraîne, en

retour, une modification de ses propres connaissances sur le thème. Le contenu du texte rédigé

est fortement structuré et présente des informations originales, élaborées à partir des sources.

Alors que la rédaction de mémoire est influencée par l’expertise référentielle et le mode de

contrôle du processus de récupération, la rédaction à partir de sources est influencée par les

caractéristiques des sources et par l’expertise en lecture du rédacteur.

3.1.1. Caractéristiques des sources

Les caractéristiques des sources, c’est-à-dire l’organisation et le format des documents qui les

composent, influencent les traitements rédactionnels. Nash, Schumacher et Carlson (1993) ont

Elaboration du contenu du texte 13

analysé l’impact de l’organisation du contenu des sources sur l’organisation du contenu du texte.

Ils ont demandé à des étudiants de lire deux textes, décrivant chacun la vie d’une tribu indienne,

avant de rédiger une synthèse comparative. Les auteurs ont manipulé l’ordre de présentation des

documents ainsi que l’organisation (thématique ou chronologique) des informations dans les

documents. Les résultats montrent que l’organisation globale (organisation thématique ou

chronologique) et locale (la thématisation sur l’une ou l’autre des tribus dans la phrase) du

contenu du texte est influencée par les caractéristiques des sources, à deux niveaux. D’une part,

les rédacteurs adoptent de façon privilégiée l’organisation du premier document lu pour

organiser le contenu de leur propre texte. Dans la mesure où les documents ont été présentés les

uns après les autres et que la synthèse est rédigée de mémoire (sans pouvoir consulter à nouveau

les sources), cette influence peut être due à l’effet de primauté. D’autre part, l’organisation du

texte produit est plus élaborée lorsque l’organisation des deux documents sources est similaire

(soit chronologique, soit thématique).

Pour analyser l’effet du format des sources sur la richesse et l’organisation du texte, O’Hara et al.

(2002) ont observé les stratégies mises en œuvre par différents experts (avocats, chercheurs en

littérature, en histoire, etc.) lorsqu’ils composaient des textes (compte-rendus, chapitre d’un livre,

thèse, etc.) à partir de documents papiers et électroniques. La description de l’activité (filmée)

montre que les rédacteurs utilisent de façon privilégiée le support papier. L’analyse des

interviews rétrospectifs indique que le support papier facilite la mémorisation et le rappel des

informations contenues dans les sources. Selon les auteurs, les caractéristiques visuo-spatiales du

support papier (couleur, taille et forme des livres, des documents, etc.) sont plus variées que

celles des supports électroniques. Elles constitueraient des indices mémoriels supplémentaires

aidant la recherche ultérieure et la rétention des informations des sources. Le support papier

Elaboration du contenu du texte 14

exerce également un effet sur l’organisation du contenu du texte. Les documents papiers peuvent

être facilement manipulés et répartis dans l’environnement de la tâche. Ainsi, la classification

stratégique de ces documents en différentes piles permettrait d’organiser préalablement

l’information en fonction des thématiques abordées. A l’inverse, les contraintes imposées par la

taille de l’écran d’ordinateur limite ce type de classification et rend peu aisée la consultation

simultanée de plusieurs documents.

3.1.2. Expertise en lecture-compréhension

Les caractéristiques des sources ne sont pas le seul facteur à exercer une influence sur

l’élaboration du texte. Selon Jacobs (2003), les compétences en lecture du rédacteur –

notamment ses capacités de compréhension, d’évaluation et de sélection des informations dans

les sources – joueraient aussi un rôle déterminant dans l’élaboration, en aval, du contenu du

texte.

Pour évaluer l’influence des capacités de compréhension des rédacteurs, Spivey et King (1989)

ont demandé à deux groupes de bons et mauvais compreneurs de rédiger un texte informatif

(traitant du rodéo) à partir de trois sources documentaires. Ils ont analysé le contenu des textes

produits en classifiant les idées selon leur degré d’importance ; une idée était considérée comme

importante lorsqu’elle était présente dans les trois sources. Les résultats montrent que la

proportion d’informations importantes est plus forte chez les bons compreneurs que chez les

mauvais compreneurs. Selon les auteurs, cette différence proviendrait du fait que seuls les bons

compreneurs sont capables de détecter une information importante dans les sources en se basant

sur le fait qu’elle se répète d’un document à l’autre.

L’effet des compétences en lecture-compréhension sur la production ne se limite pas à la

sélection des informations pertinentes. Kennedy (1985) a montré que les capacités de lecture

Elaboration du contenu du texte 15

entraînaient un mode d’exploitation différent des sources. L’auteur a proposé à six étudiants

(trois bons et trois mauvais compreneurs) de rédiger une synthèse à partir de trois documents

scientifiques. L’analyse des protocoles verbaux concomitants montre l’existence de trois

périodes dans la rédaction: une phase de lecture des sources, une phase de pré-composition

(écriture de notes, de commentaires) et une phase de composition. Pendant la phase de lecture,

les bons compreneurs s’engagent plus fréquemment dans des traitements du haut niveau (relier,

évaluer, interpréter les informations des sources), en utilisant un éventail plus large de techniques

de lecture (souligner, commenter, entourer, relecture d'ensemble, etc.). Durant la phase de pré-

composition, les bons compreneurs exploitent plus activement les sources en prenant et relisant

des notes, ou en recopiant des citations. Ces activités préalables les conduisent à très peu

consulter les sources originales durant la phase d’écriture. Ils utilisent majoritairement leurs

propres notes qu’ils modifient et intègrent dans leur texte. A l’inverse, les mauvais compreneurs

s’engagent très peu dans des activités de pré-composition, ce qui les conduit à effectuer de

multiples relectures des documents sources au cours de la composition, et à en insérer des

segments entiers dans leurs propres textes. Selon Kennedy (1985), ces stratégies rédactionnelles

opposées entre bons et mauvais compreneurs témoigneraient d’une différence dans le

fonctionnement du processus de planification. Seuls les bons lecteurs seraient capables

d’effectuer une planification globale et préalable de leur texte, en appréhendant l’ensemble des

informations des sources.

Finalement, les sources documentaires influencent, au même titre que les connaissances en MLT,

l’élaboration du contenu du texte. Les caractéristiques des sources (format, organisation, ordre de

présentation) constituent des indices mémoriels qui facilitent la consultation tout au long la

Elaboration du contenu du texte 16

rédaction. De meilleures capacités de compréhension permettent une sélection accrue des

informations appropriées dans les sources et une réorganisation plus marquée de ces

informations, grâce à des activités intermédiaires de notes et de commentaires.

Outre les sources, le texte en cours est toujours présent dans l’environnement de la tâche et joue

un rôle majeur dans l’élaboration des contenus, notamment à travers la lecture qu’en fait le

rédacteur.

3.2. Lecture du texte en cours

La (re)lecture du texte en cours est une activité fréquente lors de la rédaction (Breetvelt, van den

Bergh, & Rijlaarsdam, 1994). Jusqu’à présent, ce type de lecture a surtout été envisagé dans le

contexte de la révision du texte. Les travaux dans ce domaine se sont principalement intéressés

au coût de la lecture au cours de la révision et au fait que la lecture de son propre texte peut

biaiser la détection des erreurs. Le rôle de la lecture pour poursuivre le texte – et non forcément

pour le réviser – reste encore très peu connu. Dans la partie qui suit, ces différents points sont

tour à tour présentés et discutés.

3.2.1. Lecture du texte en cours et révision.

La révision consiste à évaluer le texte produit et à le modifier si nécessaire. Reconsidérer le texte

déjà produit implique nécessairement une activité de lecture (Temple, Nathan, Temple, & Burris,

1993). Cette activité est indiquée dans tous les modèles, qu’il s’agisse des modèles généraux de

production (Hayes & Flower, 1980 ; Kellogg, 1996 ; Hayes, 1996) ou des modèles spécifiques de

révision (Butterfield, Hacker & Albertson, 1996 ; Flower, Hayes, Carey, Schriver, & Stratman,

1986 ; Scardamalia & Bereiter, 1983). La lecture y est conçue comme un processus autonome et

récursif, pouvant apparaître à n’importe quel moment au cours de la production écrite et

Elaboration du contenu du texte 17

contribuant à une analyse métacognitive du texte en cours. Selon Hacker (1994), la lecture du

texte en cours permet au rédacteur de construire une représentation mentale cohérente et

compréhensible de son propre texte et de modifier le texte si cette représentation ne correspond

plus à ses intentions (voir également Butterfield et al., 1996). Cette lecture évaluative,

métacognitive, peut être soit linéaire (lecture de l’ensemble du texte), soit ponctuelle (lecture

d’une portion du texte). Dans ce dernier cas, la lecture est proche d’une activité de recherche

d’informations. Quelle que soit sa forme, la lecture évaluative doit permettre de détecter les

erreurs de surface (orthographe, ponctuation) et les erreurs sémantiques (incohérences). Dans le

premier cas, les traitements de décodage inhérents à la lecture suffisent. Dans le second cas, des

traitements de compréhension, parfois relativement coûteux doivent être mobilisés en plus du

décodage. Enfin, le déclenchement de l’activité de lecture peut être contrôlé (le rédacteur se

lance dans une campagne de révision en relisant son texte) ou automatique (le rédacteur peut

avoir automatisé des procédures de lecture de son texte).

Deux caractéristiques spécifiques de la lecture évaluative au cours de la révision peuvent être

soulignées. D’une part, les capacités de lecture (décodage et compréhension) du rédacteur

peuvent influencer la mise en œuvre de l’ensemble des traitements de révision car les ressources

mobilisées par la lecture ne sont plus disponibles pour mener à bien les détections et les

corrections. D’autre part, la lecture évaluative peut être biaisée par le fait que le rédacteur est

confronté à son propre texte et lit ce qu’il croit avoir écrit plutôt que ce qu’il a effectivement

produit.

3.2.2. Expertise en lecture-évaluation

Lire pour comprendre et/ou pour évaluer est une activité plus ou moins coûteuse selon le degré

d’expertise du lecteur ou du rédacteur. Pour Hacker (1994), si la lecture du texte en cours

Elaboration du contenu du texte 18

consomme trop de ressources cognitives, la mise en œuvre de la révision peut devenir difficile.

Le rédacteur privilégierait alors les révisions de surface au détriment des révisions de sens, plus

coûteuses. Dans le cadre de la théorie de la capacité, McCutchen, Francis et Kerr (1997) ont

étudié les relations existant entre capacités de lecture et capacités de révision chez des rédacteurs

novices. Ils ont analysé les discussions menées par des dyades de collégiens de 5ème, lors de la

révision d’un texte dont les erreurs étaient ou non indicées (erreurs soulignées ou écrites en

caractères gras). Les dyades ont été formées sur la base du niveau en production écrite (fort,

moyen et faible). Les verbalisations révèlent que les enfants de haut niveau ont peu de difficultés

pour détecter et diagnostiquer les erreurs, qu’ils corrigent rapidement lorsqu’il s’agit d’erreurs de

surface. Ils opèrent une lecture d’ensemble du texte, assez longue, pour détecter les erreurs liées

au sens et à la cohérence. A l’opposé, les enfants de niveau faible présentent des difficultés pour

détecter et diagnostiquer. Ils opèrent une lecture phrase à phrase, rendant difficile l’analyse de la

cohérence et la détection des erreurs de sens (voir également Cameron, Edmunds, Wigmore,

Hunt & Linton, 1997).

3.2.3. Efficacité de la lecture-évaluation

La lecture évaluative et la détection d’erreurs sont sous la dépendance de deux représentations: la

représentation construite à partir de ce qui est lu et la représentation initiale du texte et des

intentions. Il est possible que la lecture évaluative du texte en cours soit parfois inefficace car le

rédacteur se base plus sur ce qu’il croit avoir écrit que sur ce qu’il a écrit effectivement. Dans ce

cadre, Perl (1979) a demandé à des rédacteurs adultes de lire à haute voix le texte qu’ils venaient

de rédiger et a remarqué que ceux-ci lisaient des expressions ne figurant pas dans leur propre

texte. Cameron, Edmunds, Wigmore, Hunt et Linton (1997) ont observé que les rédacteurs

détectaient plus d’erreurs dans les textes d’autrui que dans leurs propres textes, notamment

Elaboration du contenu du texte 19

lorsqu’il s’agit de jeunes rédacteurs (voir également Chanquoy, 1997). Il semble toutefois que

cet effet cesse lorsque le délai temporel entre écriture et lecture augmente. Daneman et Stainton

(1993) ont demandé à des étudiants de produire un essai pendant 30 minutes puis, après un

intervalle de 20 minutes (expérience 1) ou de 2 semaines (expérience 2), les participants devaient

corriger leur propre essai ou, avec ou sans familiarisation préalable, l’essai d’un autre. La

familiarisation consistait simplement à lire une version sans erreur de l’essai avant sa correction.

Les résultats de l’expérience 1 montrent que, d’une part, les étudiants peuvent plus facilement

détecter des erreurs dans des essais jamais vus que dans leur propre texte et, d’autre part, qu’ils

réussissent mieux à détecter les erreurs après familiarisation. A l’opposé, dans l’expérience 2, le

délai introduit supprime les effets notés lors de la première expérience. Lorsque le délai entre

l’écriture et la lecture est long, les détections sont facilitées.

Finalement, si la lecture a été relativement bien étudiée dans le cadre de la révision, il peut être

envisagé que lire pour réviser exerce également une influence sur l’élaboration du contenu du

texte. En effet, l’évaluation métacognitive d’un écart entre intention et réalisation amène le

rédacteur soit à modifier le texte en cours (modification effective de la trace), soit à changer la

représentation initiale du texte. Dans les deux cas, il est nécessaire de réélaborer l’espace

problème (Scardamalia & Bereiter, 1991) et de créer de nouvelles sondes mémorielles, et/ou de

modifier les contraintes et critères rhétoriques. Abordée sous cet angle, la révision contribue,

avec la planification, à l’élaboration du contenu du texte et toute relecture, qu’elle soit assortie

ou non de modifications, amène à reconsidérer ou à modifier la représentation du texte.

3.2.4.Lire pour réviser et lire pour poursuivre

La lecture du texte en cours ne sert pas seulement la révision. Elle permet également, au cours de

l’activité, de réaliser des traitements liés à la cohésion (retrouver l’antécédent lorsqu’il faut

Elaboration du contenu du texte 20

produire une anaphore, par exemple) et à la cohérence (analyser le sens de la phrase précédente

pour articuler le sens de la suivante, par exemple). Les caractéristiques et le rôle des retours dans

le texte ont été souvent décrits dans le cadre de la lecture. Par exemple, Baccino et Pynte (1998)

ont étudié les paramètres qui influencent la trajectoire oculaire assurant le retour sur l’antécédent

lors de la résolution d’une anaphore. Binder, Duffy, et Rayner (2001) ont étudié les paramètres

qui suscitent le retour oculaire sur le texte préalable lors de la compréhension de phrases

syntaxiquement ambiguës. Just et Carpenter (1980) ont étudié les rapports entre les fixations

oculaires, les saccades de régression et la compréhension des textes.

Sur le plan de l’écriture, il s’agit là d’un champ de recherches encore quasiment vierge. Chesnet

et Alamargot (2005) ont récemment discuté de la nécessité et de la possibilité de recourir à

l’analyse des mouvements oculaires en production écrite, pour préciser le rôle du texte en cours.

Leurs propositions sont reprises en conclusion générale.

3.3. Conclusion sur l’environnement de la tâche

L’environnement de la tâche, à l’instar de la MLT, exerce une influence sur l’élaboration du

contenu du texte. La nature et le format des sources conduisent le rédacteur à privilégier

certaines informations ou adopter préférentiellement certains modes d’organisation. Le texte en

cours, présent en permanence « sous les yeux du rédacteur », est le support d’activités de

révision mais également de planification locale et globale. Dans tous les cas, qu’il s’agisse des

sources documentaires ou du texte en cours, les capacités de lecture (décodage et

compréhension) du rédacteur jouent un rôle déterminant dans l’appréhension des informations ou

la détection des anomalies. Selon la théorie de la capacité, de faibles capacités en lecture

gêneraient la mise en œuvre des autres traitements rédactionnels.

Elaboration du contenu du texte 21

Considérer le rôle de l’environnement de la tâche au cours de la composition conduit à redéfinir

les traitements rédactionnels et à envisager la lecture comme une activité centrale dans

l’élaboration du texte et de son contenu. Les traitements rédactionnels ne consistent pas

seulement en l’alternance des composantes de planification, formulation et révision mais

également en l’alternance de phases de lecture et d’écriture. Se pose alors la question de la

dynamique des traitements et notamment de la gestion de la coordination lecture-écriture au

cours de la composition.

4. Coordination de la lecture et de l’écriture au cours de la composition

L’élaboration du contenu du texte s’effectue sous l’influence conjuguée de la MLT et de

l’environnement de la tâche. Les traitements conceptuels seraient doublement contrôlés par les

structures de connaissances et de buts (knowledge driven) et par les indices contextuels (data

driven) de l’environnement de la tâche. De ce fait, l’écriture et la lecture peuvent être

considérées comme deux activités interdépendantes et récursives. La question est alors de

déterminer comment ces deux activités se coordonnent et quelles sont les règles de leur

alternance.

Considérant l’ensemble de la situation de rédaction, plusieurs formes de lecture et d’écriture

peuvent être décrites, selon qu’il s’agit de rédiger un brouillon, le texte définitif ou de lire les

sources ou le texte en cours. Dans le cas de la production d’un texte argumentatif à partir de

sources documentaires, McGinley (1992) a montré l’existence de différentes formes de lecture et

d’écriture et a décrit l’évolution de leur enchaînement tout au long de l’activité. L’auteur a filmé

sept étudiants produisant un texte argumentatif à partir de sources et a enregistré leurs protocoles

verbaux. L’analyse de ces protocoles indique la présence de deux formes d’écriture (écriture de

notes et écriture du texte) et de quatre formes de lecture (lecture des sources, lecture des notes,

Elaboration du contenu du texte 22

lecture du texte en cours et lecture finale du texte achevé). Chacune de ces formes est sous-

tendue par un ensemble différent de processus. Par exemple, la lecture des sources met en jeu des

processus d’analyse des informations, d’évaluation de la pertinence, de mémorisation des

informations nouvelles et de création éventuelle de nouveaux contenus. A l’opposé, la lecture du

texte en cours fait plutôt intervenir des traitements de révision des contenus déjà transcrits, de

planification du contenu à venir et d’établissement de la cohérence.

Sur le plan de la dynamique des traitements, la répartition de ces formes évolue au fur et à

mesure de la composition. McGinley a partagé le temps de rédaction en quatre périodes pour

analyser la progression des traitements. Le premier quart du temps est consacré à la lecture des

sources et, dans une moindre mesure, à la prise de notes. Le second quart est caractérisé par la

mise en œuvre d’un ensemble varié de formes d’écriture (du texte et des notes) et de lecture (des

sources, du texte et des notes). Si l’écriture du texte domine dans les troisième et quatrième

quarts de temps, la lecture des sources diminue au profit de la lecture du texte en cours.

Le point important est que si l’une des formes de lecture ou d’écriture domine pendant une

période donnée, toutes ces différentes formes sont récursives et des transitions sont privilégiées

selon la phase de production. Pour cerner les règles d’enchaînement, McGinley (1992) a procédé

à des interviews rétrospectifs. Ils indiquent que c’est le résultat de l’activité précédente qui

détermine le plus souvent l’activité suivante.

Ce système de contrôle local des différentes formes de lecture et d’écriture, décrit ici dans le cas

des sources documentaires, a été également envisagé par van den Bergh et Rijlaarsdam (1999),

dans le cas du texte en cours. Les auteurs ont proposé à des étudiants de rédiger un texte

argumentatif et ont analysé le décours de l’élaboration du contenu en combinant le recueil des

pauses et des protocoles verbaux concomitants. L’analyse des activités qui précédent

Elaboration du contenu du texte 23

immédiatement les traitements de génération montre que le processus de génération du contenu

assure plusieurs fonctions selon l’activité qui le précède. Les auteurs distinguent la « génération

guidée par la consigne », la « génération guidée par la relecture du texte » et la « génération

guidée par la révision effective du texte ». Ainsi, un processus n’aurait plus un rôle spécifique

mais assurerait différentes fonctions selon la nature du contexte le précédant immédiatement. Les

auteurs proposent d’interpréter ce contrôle local en développant une conception probabiliste de

l’engagement des processus rédactionnels. La réalisation d’un processus n augmenterait la

probabilité d’apparition du processus n+1. En reprenant les principes de la théorie rationnelle

d’Anderson (1993: modèle ACT-R), van den Bergh et Rijlaarsdam (1999) considèrent que le

texte en cours représente une source d’activation à l’instar des connaissances stockées en MLT.

Parce qu’il est en évolution permanente, le texte en cours modifierait constamment les différents

potentiels d’activation en jeu dans le système cognitif et conduirait à modifier l’engagement et le

déroulement des processus rédactionnels. Ce mode de contrôle par activation est intéressant car il

tient compte de la double influence des connaissances et du texte (double activation) et spécifie

le rôle bas-haut du texte en cours.

5. Conclusion générale

L’élaboration du contenu du texte a essentiellement été abordée sous l’angle de la récupération

des connaissances en MLT. Cette synthèse montre que l’environnement de la tâche joue

également un rôle important, en raison de la présence de sources documentaires et du texte en

cours. Cela conduit à considérer l’activité de lecture, dans ses différentes formes, comme un

traitement rédactionnel à part entière. Tenir compte dans les recherches à venir de la double

influence de la MLT et de l’environnement de la tâche, suppose d’approfondir au moins trois

points.

Elaboration du contenu du texte 24

(1) La présence conjointe de la MLT et de l’environnement de la tâche soulève la question du

traitement simultané de plusieurs unités d’information, émanant de différentes sources. Parce

qu’elle peut être considérée comme une interface entre la MLT et l’environnement de la tâche, la

MDT doit jouer un rôle central dans l’articulation des informations internes et externes. Plus

précisément, il peut être envisagé que les capacités de maintien et de traitement de la MDT

exercent une influence déterminante quant au choix de la stratégie d’élaboration du contenu du

texte et notamment le recours aux sources documentaires. Sur ce dernier point, Chuy, Alamargot

et Passerault (2004) ont montré que les rédacteurs caractérisés par un empan faible de MDT

n’étaient pas en mesure de traiter à la fois les connaissances issues de la MLT et les informations

des sources documentaires, notamment lorsque les deux types d’informations étaient en

contradiction (interférence entre ce qui est appris et ce qui est lu). Pour limiter la quantité

d’information en MDT, les rédacteurs à empan faible focalisent leur attention sur les sources

documentaires au détriment de la récupération des connaissances. Ils élaborent alors le texte plus

rapidement, en limitant la réflexion pendant les pauses (voir également Alamargot, Dansac, Ros

& Chuy, 2005). S’il ne fait pas de doute que la capacité limitée de la MDT influence

l’élaboration du contenu du texte, et notamment l’accès aux sources documentaires et au texte en

cours, les travaux empiriques demeurent encore rares et les effets peu connus (McCutchen,

1996 ; Swanson & Berninger, 1996 ; pour une synthèse, Chanquoy & Alamargot, 2002). Les

perspectives de recherche dans ce domaine sont par conséquent relativement nombreuses.

(2) La notion d’activation est souvent évoquée dans les modèles rédactionnels et les travaux

s’intéressant à l’élaboration des contenus. Les principes de diffusion de l’activation ont été

envisagés de longue date pour rendre compte des aspects automatiques de la récupération des

connaissances en MLT (Bereiter & Scardamalia, 1987). Comme évoqué plus haut, van den

Elaboration du contenu du texte 25

Bergh et Rijlaarsdam (1999) ont utilisé la théorie rationnelle d’Anderson (1993) pour rendre

compte du potentiel d’activation des informations émanant de l’environnement de la tâche. La

notion d’activation est particulièrement intéressante dans le cas de l’élaboration des contenus car

elle permet à la fois: (i) de tenir compte de la triple influence de la MLT, des sources

documentaires et du texte en cours et (ii) d’envisager une évolution dynamique de l’influence

respective de ces trois sources d’activation tout au long de la rédaction. Cependant, sur le plan

théorique, l’intégration des principes d’activation dans les modèles rédactionnels reste encore

floue et très hypothétique (voir Chanquoy & Alamargot, 2002 pour une discussion). Sur le plan

expérimental, la question de la mise en évidence des effets de l’activation au cours de l’activité

rédactionnelle reste posée. Il existe peu de recherches visant à valider les principes de diffusion

de l’activation au cours de l’écriture, ou à analyser l’influence des réseaux sémantiques, comme

Power (1985) a pu le faire dans le cas de la production orale. Des recherches sont donc à

effectuer dans cette direction.

(3) L’étude de la coordination de la lecture et de l’écriture au cours de la production doit

permettre de préciser la dynamique les traitements en jeu dans l’élaboration du contenu du texte.

L’essentiel des investigations menées jusqu’à présent recourt aux protocoles verbaux

concomitants ou rétrospectifs. La méthode est pertinente lorsqu’il s’agit de décrire les différentes

activités et les principales phases de traitement dans lesquelles le rédacteur s’engage. Elle s’avère

toutefois inappropriée pour analyser plus finement et directement les caractéristiques de la

lecture du texte en cours et des sources. En revanche, parce que l’activité rédactionnelle implique

fortement la composante visuelle, l’analyse des mouvements oculaires du rédacteur dans

l’environnement de la tâche fournit des indications particulièrement riches et précises sur la

nature et la succession des informations perçues. Le dispositif « Eye and Pen » a été conçu en ce

Elaboration du contenu du texte 26

sens (Alamargot, Chesnet, Dansac & Ros, sous presse ; Chesnet et Alamargot, 2005). En

couplant un oculomètre avec une tablette à digitaliser, Eye and Pen permet d’enregistrer et

d’analyser conjointement les paramètres oculaires (saccades et fixations) et le décours temporel

de l’écriture (périodes de pauses et d’écriture). Grâce à ce dispositif, il est possible : (i) de mettre

en évidence l’alternance des activités d’écriture et de lecture, et (ii) de préciser les

caractéristiques de la lecture (lecture linéaire, recherche d’information) ainsi que sa localisation

(sur le texte, sur les sources documentaires). Les expérimentations conduites avec ce dispositif

ont d’ores et déjà permis de préciser les stratégies d’exploration visuelles des sources

documentaires au cours des pauses d’écriture (Alamargot, Dansac, Ros & Chuy, 2005 ;

Caporossi, Alamargot & Chesnet, 2004) et parallèlement aux périodes d’écriture (Alamargot,

Dansac & Chesnet, sous presse). Il ne fait pas de doute que la généralisation des études

s’appuyant sur ce dispositif devrait permettre, à terme, de progresser dans la compréhension des

traitements conceptuels et de leur mise en œuvre pour élaborer le contenu du texte.

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Elaboration du contenu du texte 30

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