Le programme iconographique de la basilique Saint-Paul-hors-les-murs à Rome : état de la question...

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1 REMERCIEMENTS Je souhaite, tout d’abord, exprimer toute ma gratitude à mon professeur Jean-Pierre Caillet, pour la pertinence de ses conseils, pour sa grande disponibilité, et pour m’avoir guidé dans le choix de ce sujet. Je tiens à exprimer ma gratitude au professeur Herbert Kessler, véritable mine d’informations sur Saint-Paul comme sur tant d’autres sujets, qui m’a encouragé et prodigué des conseils avisés sur les programmes de la basilique. Mes plus chaleureux remerciements vont au professeur Alessandro Tomei qui m’a apporté son aide au cours d’inépuisables discussions sur Pietro Cavallini, et qui dans de nombreux cas m’a indiqué les ouvrages de références sur l’artiste romain. Je tiens également à remercier le docteur William Tronzo qui a accepté d’affronter des difficultés sans nombre pour me procurer des articles dont j’avais besoin. Mes pensées vont à Patrice Lerambert qui plus d’une fois m’a ouvert les portes de son bureau pour me permettre d’effectuer mes recherches, non sans oublier de m’apporter une aide matérielle pour que je puisse terminer ce travail. Enfin, je voudrais dire ma reconnaissance aux membres de ma famille dont l’affection et les encouragements ont permis à ce travail de se réaliser, et qui ont bien voulu relire soigneusement les différentes parties de ce mémoire.

Transcript of Le programme iconographique de la basilique Saint-Paul-hors-les-murs à Rome : état de la question...

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REMERCIEMENTS

Je souhaite, tout d’abord, exprimer toute ma gratitude à mon professeur Jean-Pierre

Caillet, pour la pertinence de ses conseils, pour sa grande disponibilité, et pour m’avoir

guidé dans le choix de ce sujet.

Je tiens à exprimer ma gratitude au professeur Herbert Kessler, véritable mine

d’informations sur Saint-Paul comme sur tant d’autres sujets, qui m’a encouragé et

prodigué des conseils avisés sur les programmes de la basilique.

Mes plus chaleureux remerciements vont au professeur Alessandro Tomei qui m’a

apporté son aide au cours d’inépuisables discussions sur Pietro Cavallini, et qui dans de

nombreux cas m’a indiqué les ouvrages de références sur l’artiste romain.

Je tiens également à remercier le docteur William Tronzo qui a accepté d’affronter

des difficultés sans nombre pour me procurer des articles dont j’avais besoin.

Mes pensées vont à Patrice Lerambert qui plus d’une fois m’a ouvert les portes de

son bureau pour me permettre d’effectuer mes recherches, non sans oublier de m’apporter

une aide matérielle pour que je puisse terminer ce travail.

Enfin, je voudrais dire ma reconnaissance aux membres de ma famille dont

l’affection et les encouragements ont permis à ce travail de se réaliser, et qui ont bien

voulu relire soigneusement les différentes parties de ce mémoire.

2

INTRODUCTION

« The search for the original iconography of the nave frescoes of San Paolo fuori

le mura remains one of the most vexing problems in art-historical research1 ». C’est par

cette phrase qu’en 1985 Luba Eleen introduisait son article fondamental sur les peintures

de la Vie de saint Paul ornant la nef de l’une des plus anciennes basiliques chrétiennes.

Il est vrai que les questions que soulève le décor de la basilique Saint-Paul-hors-

les-murs sont d’une importance capitale. De par son ancienneté, elle faisait partie avec

Saint-Pierre des monuments les plus importants de Rome et devait constituer par son

programme iconographique un véritable livre ouvert sur l’évolution des idées et des

manières de penser dans la ville éternelle. Hélas, la basilique devait brûler en 1823,

emportant dans les flammes les secrets de son décor.

Heureusement, des sources précieuses nous sont parvenues afin de reconstituer le

monument. Ce sont tout d’abord les données textuelles. Mais surtout, des dessins et des

gravures réalisés avant et après le sinistre permettent de nous donner une idée à peu près

exacte de l’arrangement et des programmes iconographiques qui se déployaient dans et en

dehors de la basilique.

Depuis la première étude réalisée sur les fragments de peintures au lendemain du

sinistre par G.B de Rossi2 jusqu’aux conclusions les plus récentes d’Anne-Orange

Poilpré3, le programme de Saint-Paul n’a cessé d’intéresser les historiens. La

reconstitution du programme et son attribution ont fait l’objet des principales recherches.

C’est en 1815, dans sa monographie consacrée à la basilique, que Nicolai

reproduit le cycle hagiographique4. Son étude, largement consacrée à l’aspect structurel du

bâtiment, avait quand même précisé que : « In tutta la extensione del muro meridionale

veggonsi pitture rappresentati fatti dell’antico testamento ; nel muro poi opposto, (…)

sono dipinti fatti del testamento nuovo (…)5 ». C’est pourtant à l’historiographie française

que l’on doit les premières avancées significatives sur la reconstitution du décor. En 1823,

1 ELEEN, 1985, p 251.

2 Résumé par KESSLER, 1994, p 397.

3 Voir POILPRE, 2003, pp 127-136 et pp 139-142.

4 Sur la planche intitulée : « Spaccato della basilica ostiense sulla linea A.A ».

5 NICOLAI, 1815, p 29.

3

est publié l’ouvrage de Jean-Baptist Seroux d’Agincourt6 qui fournit quelques

reproductions de scènes de l’Ancien et du Nouveau Testament7. A la fin du XIXème

siècle, Eugène Müntz8 édite un article primordial sur plusieurs points. Tout d’abord, il met

enfin à la disposition des érudits les copies réalisées par le cardinal Barberini en 16349 et

qui, à cette période, étaient encore en la possession de cette famille10

. Ces relevés, qu’il

avait découverts en 187511

, lui avaient permis de reconnaître dans leur élaboration la main

de trois artistes. Il affirme surtout qu’à cause du mauvais état de conservation des

peintures au moment des relevés, les croquis devaient être très souvent infidèles. De plus,

par des descriptions précises, aussi bien iconographiques qu’épigraphiques, il donne en

détail le sujet de toutes les scènes de l’Ancien Testament et de l’arc triomphal ainsi que le

nom de quelques saints et prophètes qui se trouvaient dans la nef. Cependant, s’il s’essaie

à quelques comparaisons (comme par exemple lorsqu’il voit dans les vingt-et-une scènes

de l’Histoire des saints un rapport avec celles de Sant’Apollinare Nuovo à Ravenne qui

date du VIème siècle), ses descriptions restent bien trop vagues pour être tout à fait

convaincantes12

. C’est à la fin de la première guerre mondiale que la recherche allemande

va alors entreprendre une étude de fond de toutes les sources documentaires. En 1917,

Josef Wilpert est le premier à répertorier les différentes inscriptions présentes sur les

dessins de l’arc triomphal. De plus, il se livre à une description des différents portraits des

papes, et cela aussi bien pour les fragments sauvés après l’incendie qu’aux travers des

croquis réalisés au XVIIme siècle et conservés dans le Codex Barberini 440713

. Enfin, il

revient sur les scènes de l’Ancien Testament qu’il compare avec un ivoire de Salerne, dans

lequel il retrouve une parenté thématique14

. Son étude a largement été remise en cause par

une grande partie de l’historiographie, mais elle reste fondamentale dans le long processus

d’identification des figures votives que l’on pouvait apercevoir sur quelques peintures de

6 Alors qu’il venait d’expédier le manuscrit de son ouvrage à Paris, la Révolution arrête l’impression de son

étude. Il ne paraîtra donc qu’en 1823. Le principal intérêt de cette recherche reste une abondante illustration

gravée. Voir BAZIN Germain., Histoire de l’histoire de l’art de Vasari à nos jours, Paris, 1996, pp 87-88. 7 SEROUX d’AGINCOURT, 1823, Tome V, planche XCVI.

8 Sur la carrière d’Eugène Muntz, voir utilement BAZIN Germain., Histoire de l’histoire de l’art de Vasari à

nos jours, Paris, 1996, pp 145-146. 9 Ces copies font partie d’une série d’études documentaires sur Saint-Paul-hors-les-murs, des vues des

mosaïques de Sainte-Marie-Majeure et de Sainte-Marie-du-Transtévère, ainsi que des croquis des fresques

de San Urbano all’Caffarella et de Saint-Laurent-hors-les-murs. 10

La série rentrera dans la collection de la Bibliothèque Vaticane en 1902. 11

MUNTZ, 1895, p 112. 12

MUNTZ, 1898, p 11. 13

WILPERT, 1917, pp 560-579. 14

Ibid, 1917, p 622-623.

4

Saint-Paul. L’année suivante est publié l’ouvrage fondamental de Garber. Cette étude que

nous n’avons pas réussi à consulter nous est quand même restituée dans ses grandes lignes

par les commentaires qu’elle a suscités chez les historiens de l’art postérieurs15

. Il propose

qu’au moins quatre artistes aient participé à l’élaboration des dessins, et donne brièvement

leurs caractéristiques spécifiques16

. Enfin, l’auteur semble pousser à l’extrême l’influence

de Saint-Paul-hors-les-murs et de Saint-Pierre comme sources de toute l’iconographie

italienne17

. En 1961, Stephan Waetzoldt publie une première somme sur le délicat

problème de l’iconographie et de la signification de l’arc triomphal, suivie trois ans plus

tard par un véritable bilan des recherches sur le programme de la basilique. Son ouvrage

se présente comme un catalogue avec de courtes notices analytiques terminées par une

présentation bibliographique des ouvrages importants sur chaque composante du cycle. Il

s’est également attaché de façon plus précise à l’identification de chaque scène en

fonction des textes bibliques. Mais surtout, il présente pour la première fois, rassemblée

dans un même ouvrage, des reproductions en noir et blanc de l’intégralité du programme.

Cet « avantage » se retourne d’ailleurs contre lui, étant donné que Waetzoldt se limite aux

relevés du XVIIème siècle. Quelques années plus tard, Gardner présente et étudie avec

attention un autre dessin du XVIIème siècle qui livre l’iconographie de la façade de Saint-

Paul. Ses conclusions seront reprises en 1979 par Paul Hetherington18

. Quant à ce dernier,

sa reconstitution des cycles présents sur les murs latéraux de la nef et au revers de façade

de Saint-Paul permet d’envisager avec plus de clarté la disposition de ces programmes

dans l’édifice. Enfin, il reprend une par une chaque partie des cycles de la basilique, non

sans proposer pour certaines d’entres elles de nouvelles datations. D’une façon plus

ponctuelle, Luba Eleen concentre son travail sur le cycle néotestamentaire. Après un

rapide bilan des connaissances sur cette partie du cycle, elle s’attache à présenter

quelques scènes qui comportent, selon elle, des témoignages d’une iconographie

proprement paléochrétienne ; cela en ouvrant de nouveaux axes de recherches sur

certaines anciennes coutumes juives illustrées sur quelques folios du Codex Barberini.

Pour elle, il ne fait pas de doute que la confrontation des peintures de Saint-Paul avec des

textes comme la Misnah permettra aux futures recherches de déceler de nouvelles traces

15

L’ouvrage est conservé dans la Bibliothèque Hertzienne à Rome qui, pour des raisons de réfection des

bâtiments, n’effectue plus de prêt entre bibliothèque. 16

GARBER, 1918, pp 18-19. Cité par HETHERINGTON, 1979, p 81. 17

Voir sur ces propos GARRISON, 1993, p 205. 18

Nous renvoyons au résumé de l’ouvrage par GARDNER, Julian., « Pietro Cavallini », dans Burlington

Magazine, vol 72, n°925, Londres, 1980, pp 255-258.

5

de l’iconographie tardo-antique19

. En 1985, H. Kessler continue de suivre les orientations

d’une bonne partie de l’historiographie et, de nouveau, s’intéresse au programme primitif.

Il tente d’élucider le délicat problème de la signification du cycle au travers de

descriptions iconographiques précises20

. Cependant, son analyse se fonde sur des scènes

dont il est certain qu’elles avaient perdu leur composition d’origine, ce qui tend à fausser

la plupart de ses conclusions. Dans un article qui a fait date, Ulrike Koenen revient sur le

folio 41 du Codex Barberini. L’observation minutieuse du Rêve de Joseph lui permet de

remarquer quelques annotations jusqu’alors non prises en compte. En effet, Koenen

indique : « Le T se distingue et doit vouloir dire Tinto donc bleu (…), on remarque aussi

trois V (…) pour vert ce qui devait indiquer le paysage (…), enfin à droite se dégage ce

qui devait être un vase. Ce motif permet d’avancer l’idée que les copistes percevaient les

épis liés vaguement à une gerbe, et ne savaient pas les ranger dans la composition21

». Par

la suite, produisant un bilan des représentations du Rêve de Joseph dans l’Antiquité

tardive, elle reconstitue la peinture qui devait être en place à Saint-Paul, bien différente du

croquis du XVIIème siècle. Enfin, dans une thèse soutenue en 2003, Anne-Orange Poilpré

présente avec pertinence une classification chronologique de la Maiestas Domini. Ce

thème, présent sur l’arc de Saint-Paul, permet à l’auteur de soulever de nouvelles

conclusions quant à sa composition et à sa signification22

. Pourtant, ses hypothèses

négligent plusieurs conclusions de toute première importance présentes dans bon nombre

d’études antérieures. Ce qui, sans remettre en cause la pertinence de son propos, limite la

portée de son interprétation.

L’historiographie a également soulevé le délicat problème de l’attribution de ces

peintures et mosaïques. En étudiant le cycle de Saint-Paul, Seroux d’Agincourt avait

proposé de voir : « (…) dans les sujets des martyres, et en général dans le mouvement et

l’expression des figures, ainsi que dans le jet moins noble des draperies, que l’on peut (…)

observer (…) l’ancien style de l’école grecque, sous le pinceau des maîtres grecs établis

depuis long temps en Italie, ou des élèves italiens travaillant avec eux23

». En 1918,

Garber par son étude des croquis, a remarqué que dans une dizaine de scènes

transparaissait une iconographie de l’Antiquité tardive. Pourtant, il a trop tendance à

19

ELEEN, 1985, p 257. 20

KESSLER, 1985, p 372. 21

KOENEN, 1992, p 188. 22

POILPRE, 2003, pp 141-142. 23

SEROUX d’AGINCOURT, 1823, Tome II, p 117.

6

oublier que chaque scène pose des problèmes différents : à savoir, si nous sommes bien en

présence d’un épisode dont l’iconographie est vraiment paléochrétienne, ou face à une

restauration réalisée à une date postérieure ne reproduisant qu’approximativement le

schéma tardo-antique. En 1934, Léon de Bruyne publie un bilan des connaissances sur la

galerie des portraits des papes tout en formulant de nouvelles propositions sur le travail de

Cavallini pour la seconde galerie. Ce problème de l’intervention de l’artiste médiéval sur

les peintures de la basilique va connaître une avancée tout à fait remarquable avec l’article

de John White paru en 1956. Il a d’abord le mérite de proposer des dates précises quant à

l’intervention de Cavallini sur les peintures de l’Ancien Testament et du Nouveau

Testament. Puis, dans un second temps, sa recherche se concentre sur l’étude formelle des

dessins ce qui lui permet de tirer certaines conclusions sur l’évolution du style de l’artiste.

En revanche, il ne fait pas de doute pour Gardner que ce n’est pas Cavallini qui est

intervenu sur le cycle de la façade. Dans sa monographie sur l’artiste, Hetherington

présente l’intégralité des sources connues de l’artiste, en insistant sur l’abside de Sainte-

Marie-du-Transtévère, dont il pense que c’est l’œuvre la plus autographe. L’auteur ne

tente cependant pas d’approfondir certaines problématiques soulevées par Gardner et

White. Pour lui, les peintures et mosaïques qui décoraient Saint-Paul sont toutes de la

main de Cavallini24

. Avec Serena Romano, l’historiographie italienne revient sur les

problèmes d’attribution de quelques parties du programme réalisé au XIV siècle. Et, dans

un nouveau panorama de l’œuvre de Cavallini, Alessandro Tomei va dans le sens de

l’intervention d’autres artistes que Cavallini sur le programme de Saint-Paul.

Face à cette bibliographie assez pléthorique et aux orientations parfois divergentes,

il apparaît utile de produire un bilan objectif. Nous focaliserons particulièrement

l’attention sur le cycle primitif qui, à quelques exceptions près, ne nous est connu qu’au

travers des études sur Cavallini.

Du fait de la complexité du problème, aucun aspect ne saurait être négligé, à

commencer par ce qui tient à l’historique du monument et à son évolution architecturale.

Tout d’abord, une mise au point sur les commanditaires et le contexte de réalisation

fournira des points d’ancrage incontournables pour la compréhension de l’élaboration du

décor. Nous nous risquerons alors à dresser un nouvel état de la question critique sur le

programme de Saint-Paul. Dans ce sens, le déroulement chronologique permettra de

24

HETHERINGTON, 1979, pp 112-113.

7

souligner au mieux les multiples chantiers qui se sont succédés dans la basilique. Enfin,

nous tenterons d’explorer de nouveaux axes de recherches sur le programme primitif. Pour

ce faire, nous proposons d’aborder encore une fois le délicat problème de restitution de

quelques points particuliers du cycle. Mais surtout, nous reviendrons sur les différents

critères de datation et de signification du programme, qui occupent encore aujourd’hui une

bonne part des publications.

8

PREMIERE PARTIE

Rappel des données historiques et architecturales

9

Chapitre Premier

Aux Origines de Saint-Paul-hors-les-murs

1) Dates et commanditaires

a) Sur les problèmes du premier édifice

C’est en périphérie de Rome, tout près des murs de l’ancienne cité, dans une plaine

située entre les rives du Tibre et la voie d’Ostie, qu’avait été construite à la place d’un

premier édicule25

une église Saint-Paul dans laquelle étaient conservés les restes de

l’apôtre26

. Les fouilles archéologiques ont dégagé un mur absidial dont la cavité devait

s’orienter vers l’est. Etant donné le diamètre de cette abside, évalué à neuf ou dix mètres,

il devait s’agir d’un édifice de moyenne importance. Malgré certaines tentatives de

reconstitution27

, le plan et l’extension du bâtiment en direction de la voie d’Ostie restent

encore aujourd’hui très mal connus28

.

Les circonstances de la fondation de cette église sont également peu claires. A en

croire la biographie du pape Sylvestre contenue dans le Liber Pontificalis, c’est à

Constantin que l’on doit la construction de l’édifice :

« Eodem tempore fecit Augustus Constantinus basilicam Sancto Paulo apostolo ex

suggestione Silvestri episcopi29

».

C’est toujours l’empereur qui offre le cercueil de bronze dans lequel ont été déposé

les restes du saint mais également les nombreuses donations offertes à l’église30

. En plus

de cela, le compilateur du Liber fait mention d’un patrimoine en argent et en objets

précieux à peu près égal à celui offert par Constantin à Saint-Pierre31

. Cependant, face aux

grandes imprécisions que l’on relève ici et là, on peut vraisemblablement être amené à

penser que nous sommes face à une manipulation. Pour Krautheimer, il paraît clair que les

archives de l’Eglise, dans lesquelles puisa au VIème siècle le compilateur du Liber, ne

25

Sa présence nous est confirmée par un certain Gaius qui avait sans doute visité les tombes des apôtres

Pierre et Paul pendant le IIème siècle. Voir DELEHAYE, 1933, p 203. 26

Sur le culte des martyrs, voir utilement MAROU, 1985, pp 101-105. 27

Dans son article, GHETTI propose une restitution « idéale » du mausolée de l’apôtre. Voir GHETTI,

1969, p 24 et 26. 28

Pour l’étude archéologique de ce site, voir KRAUTHEIMER, 1977, p 117-118 et THUMMEL, 1999, pp

98-121. 29

KRAUTHEIMER, 1977, p 97. 30

VOGEL, Liber, 1981, tome I, p 178. 31

KRAUTHEIMER, 1995, p 13-14.

10

conservaient aucun document concernant aussi bien la fondation que la construction de

l’édifice, peu avant 400. Pour pallier les manques de documentation, celui-ci aurait donc

fait état de dons fantaisistes, tout au moins égaux à ceux de la basilique Saint-Pierre.

L’étude du texte nous laisse cependant penser qu’à l’origine l’édifice a bien été

fondé par Constantin qui fit don alors d’une propriété près de Tarse. Pourtant, selon

Krautheimer, il est tout à fait probable que l’église n’a pas été réalisée par l’empereur

après les conquêtes d’Orient (327-337) mais plutôt par ses fils, c’est-à-dire Constantin II,

Constant Ier et Constance II, dans les années 337-34032

. Quoi qu’il en soit, ce premier

bâtiment n’avait rien à voir avec la basilique construite en l’honneur de Pierre richement

dotée par Constantin et qui occupait une vaste terrasse artificielle résultant du comblement

d’un cimetière païen et du premier lieu du culte chrétien.

b) L’intervention de Valentinien II, Théodose et Arcadius

Pour sans doute rivaliser avec la basilique vaticane, c’est au préfet Sallustius

Aventius qu’est envoyée la lettre des Augustes Valentinien II33

(375-392), Théodose (379-

395) et Arcadius (383-408) qui demandent, au vu du nombre des fidèles, de remplacer

l’église originelle par un édifice plus vaste, plus élevé et plus magnifique:

« Valentinianus, Theodosius et Arcadius Augusti Salustio praefecto urbis.

Desiderantibus nobis contemplatione uenerationis antiquitus iam sacratae basilicam

Pauli apostoli pro sanctimonio religionis ornare, pro quantitate conuentus amplificare,

pro studio devotionis attollere34

»

Il semble donc que la fondation de la basilique soit à son origine une fondation

impériale35

, véritable acte d’évergétisme privé acquis à l’Eglise36

et dont les empereurs

semblent vouloir aviser le clergé et la population chrétienne :

32 KRAUTHEIMER, 1995, p 14. 33 Selon André Chastagnol c’est à Valentinien II que l’on doit surtout cette réalisation. Etant à l’origine de sa

construction et malgré l’intermède de l’usurpateur Maxime, elle fut terminée à peu près sous Valentinien II qui

gouvernait de nouveau l’Italie après la victoire de Théodose sur Maxime comme le prouve une brique trouvée à Saint

Paul qui portait l’estampille : D.N FL. VALENTINIANS AVG. CHASTAGNOL, 1966, p 432. Malgré l’initiative de

Valentinien, l’honneur d’avoir élevé la basilique fut revendiqué sans partage par la famille théodosienne. 34 CHASTAGNOL, 1966, p 436. 35 Voila pourquoi, comme le signale KRAUTHEIMER il n’y a aucune explication pour ce qui concerne la fondation de

la basilique dans le Liber, et qu’on en trouve trace qu’au moment de la restauration sous Léon le Grand, quand la

basilique fut placée sous l’autorité de l’évêque de Rome. Voir KRAUTHEIMER, 1995, p 13. 36Voir sur ce point précis, GUYON, Jean., « La Marque de la Christianisation dans la topographie urbaine de Rome »

dans La fin de la cité antique et le début de la cité médiévale de la fin du IIIème siècle à l’avènement de Charlemagne :

Actes du colloque tenu à l’Université de Paris X Nanterre les 1, 2 et 3 avril 1993, Paris, 1996, p 222.

11

« (...) uenerabili sacerdote intimatisque omnibus et magnificentissimo ordini et

Christiano populo(...)37

»

Enfin, ils demandent au préfet d’établir des négociations avec les autorités civiles, afin

de régler les problèmes de situation du site. Mais surtout, ils demandent qu’un plan et un

devis soient dressés pour être portés à leur connaissance :

« Iam illud ipsa res exigit, ut et synopis operis construendi fideli tendatur examine

sumptuumque omnium iuxta praetia rerum, quae in sacratissima urbe, preataxatio

plenius ordinetur atque ad nostram clementiam debita maturitate referatur (…) 38

»

Les mechanici en furent d’abord Cyriade et Auxientus39

. L’entreprise, réalisée à

grand frais, posa des problèmes financiers et se termina par un procès, et ce fut finalement

le notaire Aphrodisius qui finit par prendre la direction du chantier40

. L’aboutissement à

un procès, sans doute précédé par une enquête peut évidemment surprendre. Cependant, il

convient de signaler que ce chantier fut peut-être supporté grâce aux caisses spéciales,

que sont l’arca vinaria ou l’arca frumentaria41

.

Il est vrai qu’auparavant, quand il s’agissait d’élever un édifice destiné au culte

chrétien, l’évêque et/ou les prêtres ordonnaient les travaux sans le recours de l’Etat, en

faisant appel aux ressources de la communauté chrétienne, ou bien en utilisant des fonds

accordés par de généreux donateurs. Cependant, depuis Constantin, l’évêque pouvait, pour

la construction d’édifices onéreux, puiser dans les fonds publics ; dans ce cas, il est normal

qu’un contrôle de l’Etat intervint. Enfin, avec le règne de Gratien (375-383), la

construction (ou bien la réparation) était effectuée par les services officiels des travaux

publics, sous la direction du préfet de la ville42

.

Une autre difficulté, sur laquelle il convient de se pencher maintenant, et largement

traité par l’historiographie, concerne les différents problèmes liés à la chronologie de

réalisation de l’édifice. L’un des plus sérieux consiste à cerner avec plus ou moins

37

CHASTAGNOL, 1966, p 436. 38

CHASTAGNOL, 1966, p 436. 39

On avait d’abord pensé que l’architecte qui avait travaillé à Saint-Paul fut Auxientus et non pas Cyriadès,

comme il a été affirmé auparavant. Voir MARTINEZ-FAZIO, 1972, p 318 et suiv. 40

KRAUTHEIMER, 1995, p 11. 41

CHASTAGNOL, 1966, p 427. 42

Ibid, 1966, p 435.

12

d’exactitude la date du début du chantier43

. L’étude d’André Chastagnol reste sur ce point

d’une importance capitale. S’appuyant sur une inscription, retrouvée mutilée, d’une

colonne de marbre en cipolin (encore aujourd’hui dans le bas-côté nord de la basilique, la

première colonne en partant de l’autel), il propose de situer les travaux entre 383 et la

dédicace du 18 novembre 39144

. Affinant cette étude, Richard Krautheimer s’oriente

plutôt vers une décision qui oscillerait entre 382 et le printemps 383, tout en admettant que

le début du chantier intervint sous le mandat du praefectus Sallustius Aventius au

printemps 38445

. Nous savons que les travaux furent terminés sous le mandat d’Honorius

(après 395) comme nous l’indique une inscription de l’arcus maior46

:

“THEODOSIUS CAEPIT. PER FECIT HONORIUS AULAM DOCTORIS MUNDI

CORPORE PAULI”

et que Prudentius la vit vers 402-403 :

« (…)Regia pompa loci est, princeps bonus has sacravit arces lusitque magnis

ambitum talentis (…) Subdidit et Parias fulius laquecuibus columnas distinguit

illic quas quaterras ordo47

»

C’est donc un chantier d’une vingtaine d’années qu’il fallut pour la construction de

l’édifice. Le personnel attaché à la basilique devait être placé sous l’autorité directe des

empereurs, comme en témoigne l’inscription retrouvée sur une plaque de bronze utilisée

pour identifier un chien de berger ou un esclave :

« AD BASILICA APOSTOLI PAVLI ET DDD NNN FILICISSIMI PECOR48

»

2) Contexte de construction

a) Primauté de Pierre

Les fidèles qui, au cours des quarante dernières années du IIIème siècle, visitaient la

memoria apostolorum ad catacumbas sous l’église Saint-Sébastien, invoquaient dans leurs

43

Pour un bilan exhaustif des nombreuses études à ce sujet : Voir MARTINEZ-FAZIO, 1972, pp 103-105. 44

CHASTAGNOL, 1966, pp 428-432. 45

Cette date a été largement débattue par les spécialistes. Voir la planche récapitulative dans MARTINEZ-

FAZIO, 1972, pp 120-121. 46

Ce n’est que dans les années 820-830 que l’arc qui séparait la nef du transept, qu’on désignait comme

l’arcus maior, devint « arc triomphal ». Voir KRAUTHEIMER, 1999, p 304. 47

PRUDENTIUS, 1951, verset 45-54. 48

VOGEL, Liber, 1981, p 195, note 71.

13

graffiti aussi bien l’apôtre Pierre que Paul, donnant la préséance tantôt à l’un tantôt à

l’autre, ce qui montre bien à quel point les deux apôtres jouissaient de la même

considération49

. C’est dans ce sens que l’Eglise romaine consacra conjointement la

mémoire des deux saints, lors de la fête du 29 juin, peut-être instituée en 258 et confirmée

en 336.

Pourtant, à côté de cette égalité de traitement, une autre conception se faisait jour :

celle du primatus Petri. Cette idée, fondée sur le passage de Matthieu : « Tu es Pierre, et

sur cette pierre je bâtirai mon Eglise » (Mat 16 : 18), permit de réclamer la première place

dans l’Eglise universelle pour l’évêque de Rome, en tant que successeur de l’apôtre Pierre,

désigné par le Christ lui-même. Cette affirmation devint une arme efficace des évêques de

la ville pour consolider tout d’abord leur place prééminente en Occident, puis pour pallier

les manques du soutien impérial quand le souverain vint à quitter Rome, et à contrer les

revendications des patriarches orientaux.

b) Remise à l’honneur de l’apôtre des Gentils

Ce n’est qu’à la fin du IVème siècle que Paul retrouve une place particulière dans

la vie des fidèles. On remarque alors que les deux apôtres se présentent sur un pied

d’égalité, comme le soulignent les thèmes de la traditio legis, où Pierre reçoit la loi tandis

que Paul figure comme celui qui se chargera de la prédication. Parallèlement, vers 360, fut

élaboré à Rome le thème de la concordia apostolorum50

qui attribuait le même rang aux

deux apôtres. A une époque de transition si particulière, ce thème de la concordia

garantissait d’une certaine manière la renaissance de Rome. A l’antique cité se substituait

la nouvelle Rome chrétienne, unie par une même foi religieuse, et où Pierre et Paul

venaient se substituer à Romulus et Remus51

.

Loin d’être un phénomène purement populaire, on remarque que Paul prend une

dimension considérable chez les érudits de l’époque. Pour Amboise, Paul est le sapiens

architectus. Le Christ, qui avait remis les clés du royaume céleste à Pierre, aurait confié à

Paul les clés de la connaissance :

49

Voir à ce sujet, DE SPIRITO, 2000, pp 37-40. 50

KRAUTHEIMER, 1995, p 16. Voir utilement l’étude majeure de HUSKINSON, J-M., Concordia

Apostolorum: Christian propaganda at Rome in the fourth and fifth centuries: a study in early Christian

iconography and iconologie, Oxford, 1982. 51

KRAUTHEIMER, 1999, p 109.

14

« Clavem a Christo scientiae et Paulus acceptit. Ambo igitur claves a Domino

perceperunt, scientiae iste, ille potentiae52

»

Une prière pour la fête du 29 juin, contenue dans le Sacramentarium Veronense,

marque le lien entre les deux apôtres :

« Hic princeps fidei confitendae (…), ille intelligendae (…) adsortor ; hic Christum

filium dei vivi pronuntiavit (…), ille hunc eundem verbum sapientiam dei (…)

adstruxit ; hic (…) instituens ecclesiam primitivam, ille magister et doctor gentium

vocandarum53

»

La parité entre Pierre et Paul était donc un principe de base, même si la primauté

de Pierre ne fut jamais remise en doute. A la fin du IVème siècle, Paul qui possédait les

clés de la connaissance car il avait percé la signification du Logos, était devenu l’égal de

Pierre, le cofondateur de l’Eglise universelle.

Il fallait donc sans plus attendre construire un édifice en l’honneur de l’apôtre des

Gentils, tout aussi somptueux que la basilique vaticane, et qui devait évoquer aussi bien

son martyre que la double apostolicité de Rome. Il devait être un ultime appel aux païens

pour l’entrée dans une Eglise fondée par Pierre mais aussi par Paul.

Pour ce faire, le pape Damase54

qui sans aucun doute eut le premier l’idée de

construire cette basilique, eut recours aux empereurs55

; cela pour soutenir dans un premier

temps les efforts de financement d’un tel projet mais aussi pour jouer subtilement d’un

moyen de pression efficace envers les derniers groupes païens enracinés au Sénat et dans

les grandes familles romaines. Et en cela, Paul, « philosophe » et dépositaire de la clavis

scientae, devenait pour le pouvoir une personnalité capable de rallier à la foi chrétienne

ces derniers foyers de « résistants » sans que ceux-ci ne perdent de leur dignité

intellectuelle56

.

52

MIGNE, 1844-1890, Supplément III, col 355. 53

Cité dans KRAUTHEIMER, 1995, p 17. Voir aussi PIETRI, 1969, p 199. 54

Son tombeau qu’il réalisa sur la via Tiburtina, véritable témoignage du culte pour saint Laurent marqua

pour Rome un fait nouveau, et capital dans l’histoire de l’Eglise de Rome. Le culte des martyrs localisé

jusque-là sur leur tombe et hors les murs pénétrait au cœur de la ville. Voir sur ce point, KOCI-

MONTANARI, Silvia., Le chiese Papalia a Roma. Sulle trace dei sepolcri dei Papi, Cité du Vatican, 2002,

pp 273-285. 55

Dans sa lutte contre le paganisme Damase est resté très prudent dans sa politique avec le parti de

l’aristocratie sénatoriale. Il avait semble t-il encore besoin de l’appui impérial. Voir PIETRI, 1976, p 427-

431. 56

KRAUTHEIMER, 1995, p 20.

15

Enfin, par la présence des deux basiliques, Rome pouvait de nouveau prétendre à

être le symbole même du catholicisme (dans son sens littéral d’universalisme), en

devenant l’entité qui prépare la cité terrestre à réaliser la ville céleste. La ville qui avait été

rachetée à la vraie foi par le sang des martyrs, et en particulier par celui de Pierre et Paul,

devenait le siège spirituel de la foi dans le Christ.

16

Chapitre second

Genèse structurelle du monument

1) L’édifice paléochrétien

a) Plan

« Le souci de cohérence et de la beauté de chaque détail, le luxe du décor,

l’équilibre des proportions qu’on observe à Saint-Paul-hors-les-murs, (…), dénotent un

renouveau du goût classique dans l’architecture ecclésiastique (…)57

». Il est vrai que

celle-ci devait en quelque sorte rivaliser avec la basilique dédiée à saint Pierre, et aussi

sans aucun doute la dépasser dans beaucoup de domaines. Malgré l’incendie de 1823, et la

reconstruction qui l’a suivi, des plans réalisés au XVIème siècle et des vues intérieures et

extérieures permettent de rendre avec assez d’exactitude ce que devait être la basilique de

la voie d’Ostie.

Il fallait d’abord éviter à la basilique d’empiéter sur l’ancienne voie d’Ostie.

L’architecte prit alors la décision de tourner l’édifice à 180°, ce qui plaçait l’entrée à

l’ouest, et permettait de construire la bâtiment sur la Via Soppressa da Valentiniano, tout

en sauvegardant l’ancienne route romaine (ill.1).

Précédée d’un immense atrium rectangulaire à quadruple portique qui s’ouvrait par

cinq portes sur la basilique, l’édifice se développait sur un plan en forme de T avec une

abside unique58

comme les grandes basiliques antiques. Elle était subdivisée en cinq nefs,

une nef centrale et quatre bas-côtés, et était exceptionnellement dotée comme Saint-Pierre,

d’un transept allongé de la même largeur que la nef principale59

qui venait s’interposer

entre les nefs et l’abside60

, le tout orienté d’Est en Ouest (ill.2). De proportions

gigantesques, elle avait une longueur totale de 128,38 mètres pour une largueur (les cinq

nefs) de 65, 27 mètres. La nef principale, plus large que les collatéraux, était délimitée par

une « forêt » de 40 colonnes.

57

KRAUTHEIMER, 1999, p 113-114. 58

KRAUTHEIMER, 1977, p 29. Ce système cessera d’être exploité à Rome aux environs de 400. 59

BUNSEN, 1872, p 15. 60

Trois basiliques chrétiennes étaient chalcidiques, St-Pierre, St-Paul et le Latran. Cette nef transversale

jetée en travers avait la même hauteur de comble que la nef longitudinale. Avec la disparition des materiaux

de luxe, on remployait énormément. Pendant longtemps dans les pays où les civilisations grecque et romaine

avaient prodigué les édifices on parvint par des démolitions et des arrachements à se procurer des colonnes

dont on égalisait les tailles par des chapiteaux plus ou moins élevés.

17

b) Elévation

Le vaisseau principal présentait de hautes arcades, dont chaque pilier cannelé était

pourvu de chapiteaux composites61

. Ces arcades, décorées selon Prudentius par des

mosaïques de tesselles en pâte de verre62

, soutenaient des murs latéraux qui s’élevaient

sans aucune rupture ni articulation et se terminaient par une claire-voie où quarante deux

fenêtres hautes répondaient à un souci d’éclairage optimal. Cet ajournement était sans

doute permis grâce à l’utilisation d’un système de couvrement léger, ici une charpente à

entraits (ill.3).

Chaque double bas-côté était couvert par un appentis à un seul rampant. Sur chaque

flanc par conséquent, un seul comble partait du mur de la nef et se prolongeait jusqu’au

mur extérieur. Mais comme, en pareil cas, la colonnade intermédiaire devait être relevée

bien au-delà du nécessaire pour aller à la rencontre du comble et offrir son soutien aux

fermes du premiers appentis, on épargna les matériaux en établissant une sorte d’attique

pourvu d’une série de percement semblables à des baies. Enfin, les murs gouttereaux

étaient percés de fenêtres qui correspondaient à chaque entrecolonnement63

.

A l’est chaque bas-côté était terminé par une arcade soutenue par des puissants arcs

de décharge, tandis que la nef était pourvue d’un immense arcus maior qui était soutenu

par des colonnes de granit à chapiteaux ioniques. C’est par ces passages que l’on pouvait

avoir accès au transept (ill.4). Nous savons qu’à l’inverse du transept bas de Saint-Pierre,

celui de Saint-Paul avait été construit à la même hauteur que la nef. Pourtant, le manque

de documentation sur cette partie de l’édifice rend difficile toute interprétation de son

articulation interne. Malgré tout, grâce à un croquis de Ciampani (ill.5) et à certaines

gravures de Nicolai (ill.4), nous pouvons remarquer que les murs étaient percés à divers

endroits de nombreuses ouvertures. Par exemple, sur la gravure de Nicolai, sont

représentés, sur l’un des murs latéraux du transept, des fenêtres obstruées qui sont

surmontées d’arcs de décharges à double extrados que l’on peut sans doute faire remonter

61

DEICHMANN, TSCHIRA, 1969, p 95. Voir également l’étude de BRANDENBURG, Hugo.,

« Beobachtungen zur architektonischen Ausstattung der Basilika von S. Paolo fuori le mura in Rom » dans

Jahrbuch für Antike und Christentum, vol 33, Münster, 2002, pp 83-107. 62

PRUDENTIUS, 1951, chap XII, 45-54. 63

KRAUTHEIMER, 1977, p 107.

18

à une date haute64

. En ce qui concerne les murs pignons, le relevé de Ciampani et certaines

gravures laissent apercevoir de larges baies surmontées d’ouvertures circulaires, que

Nicolaï a reproduites en 1815. La confrontation avec les restitutions de l’ancienne

basilique Saint-Pierre (Fig.1), permet d’affirmer que, dans ce secteur également,

l’architecte de Saint-Paul, avait multiplié, comme dans la nef, des fenêtres hautes pour

assurer le meilleur éclairage possible65

. Il est vrai que se trouvait, dans cet espace, la

memoria apostolique, située juste devant l’abside voûtée en cul-de-four. On peut imaginer

qu’à cette période, la tombe de saint Paul était surmontée d’un ciborium66

protégé par des

chancels comme à Saint-Pierre ; on a d’ailleurs retrouvé une dalle de marbre provenant

peut-être du premier templum et qui portait l’inscription :

« PAOLO APOSTOLO MART(yri)67

»

2) Restauration et restructuration

a) Les interventions pendant le Moyen Age

Il est bien difficile de dresser un état certain des différentes reconstructions ou

embellissements qui ont émaillé l’histoire de la basilique pendant le Moyen Age. Le

croisement des données archéologiques et des renseignements fournis par le Liber, permet

de dégager quelques renseignements sur les changements entrepris68

.

C’est à la suite d’un orage ou d’un tremblement de terre qu’intervinrent, quelques

années après sa construction, les premiers travaux de consolidation. Il semble que Léon le

Grand, à la suite de l’affaissement du sol et de l’effondrement de la toiture, ait été alors

obligé de se lancer dans une vaste campagne de restauration :

«Hic renovavit basilicam beati Petri apostoli et beati Pauli post ignem divinum

renovavit69»

64

On retrouve le même schéma pour l’église Sainte-Praxède, dont on pense qu’il s’est inspiré de Saint-Paul.

Voir KRAUTHEIMER, 1999, p 325. 65

KRAUTHEIMER, 1977, pp 107-108. 66

Sur le mobilier liturgique paléochrétien, nous renvoyons à METZGER, Catherine., « Le mobilier

liturgique », dans Naissance des Arts chrétiens. Atlas des Monuments paléochrétiens de France, Paris, 1991,

pp 262-267. 67

Voir GHETTI, 1969, p 28-30. 68

Sur la somme de ces interventions nous renvoyons des à présent à TOMEI, 1988, pp 55-65. 69

VOGEL, Liber, Tome I, 1981, p 239.

19

Le soin de l’organisation et de la réalisation du chantier ont incombé à deux clercs

majeurs, un prêtre et un diacre :

« Laus ista Felix respicit te presbyter nec te leuites Adeodate praeterit, quorum

fidelis atque peruigil labor decus omne tectis ut rediret institit 70

».

L’intervention ne s’est pas seulement limitée à la réfection de la toiture71

puisqu’il

semble que sur les quarante colonnes de la nef, seize ont été restaurées en marbre blanc72

.

Quoi qu’il en soit, la « somme » des travaux réalisés par le pape était résumée sur une

plaque de marbre, placée à l’envers de la façade au-dessus de la porte d’entrée :

« NAM POTIORA NITENT REPARATA CULMINA TEMPLI

ET SUMPSIT VIRES FIRMIOR AULA NOVAS

DUM XPI ANTITES CUNCTIS LEO PARTIBUS AEDES

CONSULIT ET CELERI TECTA REFORMAT OPE73

»

Après 422, le pape Célestin donne à l’édifice un système d’éclairage avec des

canthara cereostata. Sixte III la pourvoit de matériel liturgique, et le Pape Simplicius

permet que le baptême soit administré à Saint-Paul par le clergé de la Région I74

. C’est

avec le pontificat de Grégoire le Grand (590-640) qu’interviennent des modifications

d’importance. Tout d’abord, le pape permet que la messe soit célébrée autour du corps du

saint :

« Hic fecit ut super corpus beati Petri missas celebrarentur ; item et in ecclesiam

beati Pauli apostoli eadem fecit75 »

Il fit alors de creuser la tombe de saint Paul, afin de créer une crypte comme à

Saint-Pierre (Fig.2), avec l’intention « d’améliorer le site » pour canaliser le flux des

fidèles, comme en témoigne la lettre adressée à l’impératrice Constantina :

70

Voir CAILLET, Jean-Pierre., L’évergétisme monumental chrétien en Italie et à ses marges, Rome, 1993,

p 419. 71

VOGEL, Liber, Tome I, 1981, p 240, note 7. 72

KRAUTHEIMER, 1977, p 156. Cela est confirmé par la présence d’agrafes en métal pour consolider les

colonnes. Voir DEICHMAN, TCHIRA, 1969, p 106. 73

KRAUTHEIMER, 1977, p 99. 74

VOGEL, Liber, tome I, p 249. 75

VOGEL, Liber, Tome I, 1981, p 312.

20

« Sed et ego aliquid…ad sacratissimun corpus sancti Pauli apostoli meliorare

volui, et quia necesse erat, ut iuxta sepulcrum eiusmodi effodiri altius debuisset76 »

Avec Léon III, les travaux furent particulièrement axés sur la charpente du transept

et des collatéraux, sans que l’on sache cependant la teneur exacte de ces restaurations.

Vers 1070, l’abbé Hildebrand fit nettoyer la basilique qui était devenue un abri pour les

animaux77

. Nous savons que, pendant cette période, plusieurs réparations furent réalisées

sur les murs de l’église, et que fut construit le campanile, comme le prouvent des pièces

retrouvées dans plusieurs fondations78

. Les destructions, à la suite d’un orage qui avait

enflammé les poutres du transept79

, obligèrent le pape Innocent II (1130-1143) à

construire un mur d’appui supporté par des colonnes en marbre80

tout le long du transept

pour supporter le toit (ill.6) :

« In ecclesia quoque beati Pauli tectum qui ruinam minabatur, constructo super

columnis marmoreis muro, firmissime roboravit, et partem tecti eiusdem ecclesie

longissimis trabibus resarcivit81 »

Enfin, un tremblement de terre en 1349 causa la chute du campanile et

endommagea fortement l’atrium :

« (...) tremuoti (…) a Roma feciono cadere il campanile della chiesa di San Paolo,

con parte delle loggi in quella chiesa (…)82

»

Face à ce sinistre, l’ensemble fut restauré par Clément VI. Ces premières

campagnes de restauration, quoique documentées incomplètement, permettent de dégager

les grandes lignes des nouvelles dispositions liturgiques et structurelles de l’édifice. Pour

dresser un panorama complet, il convient cependant de considérer plus avant les

bouleversements survenus.

76

MIGNE, 1844-1890, PL LXXVII, col 1318. 77

MIGNE, 1844-1890, PL CXLVIII, col 43. C’est l’abbé qui, pendant son ambassade à Constantinople avec

l’aide de la famille Pantaléon, commanda des portes en bronze pour la basilique. Elles étaient divisées en

cinquante-quatre panneaux représentant des prophètes et plusieurs sujets relatifs aux apôtres. Nous

renvoyons à la monographie de JOSI, 1967, à l’ouvrage de MATTHIAE, 1971, pp 132-143 et à l’article de

RAVERA, Gabriella., « La porta bizantina della Basilica di San Paolo », dans Lazio ieri e oggi, n°36, Rome,

2002, pp 104-105. 78

« Nel 1628 a di 15 Decembre furon trvate nelle muraglie di tal chiesa dieci monete sottili …con lettere

impressevi : et una vi less cosi O(TT)O, cioè Otto che mostra Ottone Imp… ». 79 Voir VOGEL, Liber, Tome II, 1981, p 384. 80

En voir la description dans KRAUTHEIMER, 1977, p 110. 81 VOGEL, LIber, Tome II, 1981, p 384. 82

KRAUTHEIMER, 1977, p 101.

21

b) Les bouleversements de l’époque moderne

Pendant un long moment, la basilique avait été laissée à l’abandon, abritant les

pèlerins de passage, et les bergers pendant la nuit. C’est le cardinal de Sienne, le futur

Eugène IV, qui fit non seulement nettoyer la basilique, mais également entreprendre une

réforme profonde du monastère83

. Aux alentours de 1585-1590, Sixte V décida de

remanier le chancel autour du grand autel, et ferma la crypte en-dessous de l’abside,

vestige de l’époque carolingienne ; enfin il demanda un coffrage pour le plafond du

transept84

.

Avec le XVIIème siècle s’ouvre une ère qui va entraîner de nombreux

bouleversements dans la basilique paléochrétienne. Carlo Maderno est appelé pour la

construction de la chapelle du SS. Sacramento, décorée par la suite par Giovanni

Lanfranco, avec des scènes de l’Ancien et du Nouveau Testament, en accord avec le

vocable de la chapelle85

.

Une première intervention d’Alessandro Specchi sur la façade avait

malheureusement abouti à un écroulement, et avait entraîné la décision de démolir

l’atrium86

. En 1725, on fit appel aux architectes Canevari et Aurelio Saffi pour la

démolition du narthex, afin de le remplacer par un portique occupant tout le devant de la

basilique. Celui-ci était composé de sept arcs articulés par des piliers et des colonnes,

parfois seuls ou allant par paires. La façade fut elle aussi restructurée, avec deux niveaux

de trois fenêtres, dont celles du dessous furent décorées de motifs en stuc (ill.7 et ill.8). Ce

chantier correspondit au dernier grand changement entrepris sur la basilique, puisque

celle-ci brûla dans la nuit du 15 au 16 juillet 1823 ; ce qui inspira ces mots à Stendahl :

« Je visitai Saint-Paul le lendemain de l’incendie. J’y trouvai une beauté sévère et une

empreinte de malheur telle que dans les beaux-arts la seule musique de Mozart peut en

donner l’idée. Tout retraçait l’horreur et le désordre de ce malheureux événement ;

l’église était encombrée de poutres noires fumantes et à demi brûlées ; de grands

83

Voir TRONZO, 2001, p 473. 84

NICOLAI, 1815, p 21. 85

Voir sur ce point TOMEI, 1988, p 56 et l’article de SFERRAZA, Agnese., « Il ciclo di dipinti di Giovanni

Lanfranco per la cappella del Sacramento in San Paolo fuori le mura », dans Paragone, n°53, Rome, 2002,

pp 49-58. 86

NICOLAI, 1815, p 21.

22

fragments de colonnes fendues de haut en bas menaçaient de tomber au moindre

ébranlement. Les Romains qui remplissaient l’église étaient consternés87

».

Si l’incendie de 1823 et la discutable reconstruction88

qui s’en suivit ont largement

mis à mal l’édifice paléochrétien, nous savons que sont conservés au sein même de

l’église de nombreux témoignages architecturaux de la structure primitive. Par contre, le

programme iconographique qui se déployait dans et hors du bâtiment a été en grande

partie perdu, et ce, malgré le sauvetage de quelques fragments mutilés. Toutefois, les

dessins, gravures et peintures réalisés au cours des siècles transmettent un aperçu à peu

près général du décor de la basilique. Bien évidemment, l’historiographie s’est largement

penchée sur ces documents afin de reconstituer et de comprendre la teneur du programme

de Saint-Paul. Une fois de plus, c’est sur le décor originel que notre connaissance semble

la plus limitée, avec de nombreuses interrogations qui ont depuis longtemps fais couler

beaucoup d’encre. Malgré tout, certaines composantes majeures sont maintenant

parfaitement assimilées et peuvent sans trop de risques être présentées.

87

STENDHAL, Promenades dans Rome, Grenoble, 1995, p 288. 88

Voir PALLATINO, 1995, pp 30-59 et CERIONI, 1988, pp 67-84.

23

DEUXIEME PARTIE

LE PROGRAMME ICONOGRAPHIQUE : ETAT DE LA

QUESTION

24

Chapitre Premier

Sources et organisation du programme originel

1) Le décor de la nef

a) Les portraits des papes

Au-dessus des grandes arcades et de l’entablement, se développaient des théories

entières de papes en imagines clipeatae. Les portraits étaient groupés deux à deux, chaque

paire correspondant à l’un des entrecolonnements de la nef (ill.9). Entre les médaillons,

des inscriptions indiquaient les noms des papes et les durées de leur pontificat exprimées

en année, mois, jours89

.

La série commençait sur le mur méridional, d’Est en Ouest ; puis elle passait sur le

mur septentrional pour avancer de l’entrée à l’arcus maior. Ce dernier s’étant écroulé lors

de l’incendie de la basilique, c’est par l’étude du mur sud resté en élévation que l’on

suivait la chronologie de la théorie qui partait de Pierre et qui se terminait par Innocent Ier

(402-417)90

. On peut vraisemblablement penser qu’à l’origine, quarante-deux portraits de

papes étaient peints sur les parois de la nef.

La forme de représentation était celle de l’imago clipeata ; celle-ci prenait donc la

forme d’un bouclier. Les antécédents dans l’art grec classique et l’art romain en étaient

bien connus. On recourait en effet à l’imago clipeata pour représenter les tenants de titres

particuliers91

. Dans l’imagerie chrétienne, son usage fut d’abord funéraire. Les

sarcophages romains en offraient de nombreux exemples, comme le sarcophage dit

« dogmatique » provenant de Saint-Paul-hors-les-murs, qui date des environs de 320, où

au centre du registre supérieur de la cuve, étaient représentés dans un cercle les bustes des

défunts92

. Puis, reprenant un caractère plus officiel, l’imago servit à la représentation des

empereurs ou des consuls et fut par la suite étendue aux évêques (auxquels les empereurs

89

Ces inscriptions sont aujourd’hui perdues ; les ouvriers les ayants détruites pendant le décrochement des

portraits après l’incendie. Voir ANDALORO, 2000, p 41-42. 90

Ils sont conservés dans les corridors du monastère de Saint-Paul, au bout du musée épigraphique de la

basilique. 91

Voir GRABAR, 1979, p 43. 92

Voir CAILLET, 1990, p 14.

25

chrétiens avaient accordé le droit au portrait, à partir de l’instant où ils furent assimilés

aux hauts fonctionnaires de l’Empire)93

.

A Saint-Paul, chaque imago est constituée de trois cercles concentriques, dont

l’interne est souvent vert, celui du milieu rouge et l’externe jaune ; le fond devait être

d’une couleur bleu gris. Les médaillons ont un diamètre qui peut varier de 1,20 à 1, 62

mètres94

. Les personnages portent en général une tunique blanche, ou alors le pallium, les

cheveux et la barbe diversement répartis, et on aperçoit chez la plupart la présence d’une

tonsure.

Pour le pape Sylvestre (ill.10), on remarque que celui est représenté en buste, sans

les bras et les mains95

, très légèrement de trois quart, le regard tourné vers l’extérieur. Il

porte la barbe, et une tonsure. Pour le pape Calixte Ier (ill.11), la position est différente, le

buste est positionné de trois quart vers la droite, alors que sa tête et son regard sont

largement tournés vers l’extérieur du cadre. Enfin, la présentation du pape Léon Ier (ill.12)

est de face, le visage et le regard orienté vers le spectateur.

La composition de ces portraits n’est pas non plus homogène, étant donné que les

artistes semblent s’être employés à jouer avec un cadrage plus ou moins serré. Le centre

de l’imago cliptea est souvent occupé par le menton de la figure ; on ne voit donc que la

poitrine et toute la hauteur du visage. Pour certains portraits cependant, comme celui du

pape Sylvestre, le haut du crâne touche le bord du cercle dans la partie sommitale, alors

qu’à l’inverse d’autres doivent, comme Calixte Ier, se distinguer par une distance entre le

haut de la tête et le bord du cercle.

Quoi qu’il en soit, on remarque qu’aucun médaillon n’est ovale ; ils sont tous ronds

ce qui a sans doute limité l’espace pour représenter le reste du buste. De plus, la réduction

de l’espace dédié au fond a poussé les artistes à faire passer le cercle interne au niveau de

la poitrine, ce qui donne l’impression de voir le personnage au travers d’une ouverture,

comme une fenêtre96

.

Ces portraits ont bien évidemment un sens précis. La présentation des papes dans

des médaillons doit pour le concepteur du programme être un moyen de rendre hommage

93

GRABAR, 1979, p 71. 94

BRUYNE, 1934, p 67. 95

Ces portraits reprennent le type de buste plus ancien. Voir BRUYNE, 1934, p 68. 96

BRUYNE, 1934, p 72.

26

à la mémoire des personnages représentés, tout en légitimant son autorité en se faisant

valoir comme le successeur de cette prestigieuse lignée97

.

b) Thèmes et emplacement du cycle biblique

Sur les murs latéraux, juste au-dessus de la série papale, se déployait, sur 1300m2

de surface, un vaste cycle narratif de quatre-vingt quatre scènes. Sur le mur septentrional,

on trouvait quarante-deux tableaux tirés du Nouveau Testament et, sur le mur sud,

quarante-deux scènes de l’Ancien Testament. Le programme était réparti sur chaque mur

en deux registres composés chacun de vingt-et-une scènes (ill.13). Il est également établi

que les scènes se présentaient dans un format carré98

(ill.14) et étaient séparées les unes

des autres par des colonnettes tridimensionnelles en stuc99

(ill.15).

Les thèmes iconographiques et l’arrangement du programme nous sont également

bien connus : le cycle vétérotestamentaire, qui commentait des scènes tirées de la Genèse

et de l’Exode, débutait au registre supérieur à côté de l’arcus maior en suivant une

progression de gauche à droite jusqu’à l’entrée. Puis, après un parcours aveugle du

spectateur, il reprenait au registre inférieur toujours en suivant un sens de lecture d’Est en

Ouest100

.

En ce qui concerne le mur méridional, les scènes suivaient essentiellement le livre

des Actes des Apôtres et tout particulièrement celles dédiées à la vie de saint Paul, dont la

basilique était placée sous le vocable. Si le programme débutait comme pour le cycle de

l’Ancien Testament au registre supérieur à côté de l’arc, on pourrait raisonnablement

penser qu’il suivait cette fois un sens narratif allant de droite à gauche, même si, au

passage, on observait certaines anomalies101

. Après un retour du spectateur jusqu’à l’autel,

le registre inférieur reprenait le même arrangement.

97

PICARD, 1988, pp 507-509. 98

Voir WAETZOLDT, 1964, Abb 363a. 99

Nous savons, grâce à Nicolai, que ces colonnettes n’étaient pas fictives : « (…) due muri è decorato di due

ordini di pitture a fresco, divise da sottili colonne spirali ». Voir NICOLAI, 1815, p 32.

100 Pour les séquences narratives en général : Voir ARONBERG, G., The place of narrative : mural

décoration in Italian churches, 1431-1600, Chigago-Londres, 1990, p 24. 101

ELEEN a remarqué que sur les quarante deux scènes, dix-sept suivaient un sens de lecture droite-gauche,

treize étaient centralisées et douze allaient de gauche à droite. Voir ELEEN, 1985, p 254.

27

Depuis longtemps, les spécialistes se sont largement penchés sur les folios du

Codex Barberini 4406 et sur les gravures de Seroux d’Agincourt afin d’identifier chaque

scène et ainsi appréhender les sources du décor originel, mais aussi pour tenter de

reconnaître et de souligner les formules iconographiques de caractères véritablement

tardo-antique. Nous dresserons ici un bilan exhaustif des connaissances, tout en

reprécisant à certains moments les sources textuelles de telle ou telle scène.

En ce qui concerne le programme de l’Ancien Testament, celui-ci débute avec La

Création de l’Univers (Gen 1 : 1-2) (ill.16), scène singulière étant donné qu’elle présente

un contraste évident avec les autres peintures, car elle est d’organisation symétrique et de

caractère symbolique au lieu d’être narrative et de suivre un sens de lecture de gauche à

droite. On y remarque des signes de la séparation de la lumière et de l’obscurité

personnifiées par la présence du Soleil et de la Lune ; cela alors que Dieu projette de créer

l’homme et la femme dans une humanité idéale ; enfin, sur un monticule, est figuré un

agneau, avec en-dessous la colombe du Saint Esprit. Il n’y a par ailleurs là aucune trace

des autres Créations de Dieu, que ce soit la Création des Animaux, ou même des végétaux.

Le cycle continue, en suivant le récit biblique par la Création d’Adam (Gen 2 : 7)

(ill.17) et La Création d’Eve (Gen 2 : 21-22) (ill.18), suivies immédiatement par le Pêché

originel (Gen 3 : 6) (ill.19) et par la scène où Dieu prend conscience du péché de l’homme

(Gen 3 : 8-10) (ill.20). Dans le tableau suivant, Adam semble dénoncer la culpabilité

d’Eve, qui a trop écouté les conseils du serpent mis à l’index par Dieu (Gen 3 : 11-13)

(ill.21) ce qui a engendré immédiatement après l’Expulsion du Paradis (Gen 3 : 24)

(ill.22) et la Condamnation au travail (Gen 3 : 17) (ill.23) où Adam en train de cultiver la

terre, est accompagné d’Eve qui tient sur ses genoux un enfant nu que l’on peut identifier,

suivant les textes bibliques, comme étant Caïn (Gen 4 : 1).

L’histoire se poursuit avec l’Offrande d’Abel et Caïn (Gen 4 : 3-4) (ill.24), où de

part et d’autre d’un autel couvert de marbres, les frères offrent à Dieu des cadeaux pour lui

plaire. La peinture suivante commente tout d’abord le meurtre d’Abel par Caïn (Gen 4 : 8)

(ill.25) puis toujours dans le même tableau La condamnation de ce crime par Dieu (Gen

4 :10-15). Toujours en suivant chronologiquement le texte de la Genèse, intervient alors

l’histoire de Noé, concentré en seulement trois scènes. La première voit Noé avertit par

Dieu du déluge (Gen 6 : 13) (ill.26), la seconde met en scène la Construction de l’arche

(Gen 6 : 22) (ill.27) et la dernière passe sans intermédiaire à la fin du déluge et à la sortie

28

de la famille du patriarche (Gen 8 : 11) (ill.28). Par la suite, le cycle s’ouvre sur les

péripéties d’Abraham. Le premier tableau présente Le patriarche et les trois anges au

chêne de Menbré (Gen 18 : 2-5) (ill.29), les trois scènes suivantes disparues102

sont suivis

par le Départ d’Isaac et Abraham pour le sacrifice (Gen 22 : 3) (ill.30) et terminé par le

Sacrifice d’Isaac (Gen 22 : 10-13) (ill.31) où en haut d’une montagne on retrouve le

patriarche qui tient dans sa main droite la tête d’Isaac et dans la gauche une épée. Le geste

est élancé est particulièrement marqué par l’envol du manteau. Isaac est placé sur un autel

parallélépipédique bas, de base carrée et à encadrement marbré sur les faces et recouvert

de rondins de bois. Isaac représenté à genoux est nu, la tête baissée et les mains attachées

dans le dos ; un bandeau semble retenir ses cheveux103

.

Enfin, le registre se termine par deux tableaux représentant l’Histoire de Jacob. La

première scène que l’on présente comme Isaac bénissant Jacob104

(Gen 28 : 1) (ill.32),

figure le vieux patriarche assis dans un lit confortable les yeux fermés pour bien marquer

qu’il a pratiquement perdu la vue. Il réalise le geste de bénédiction de la main droite. A

droite du tableau, on remarque que Jacob soutenu par Rébecca présente à son père ses

mains recouvertes de poils de chevreau pour mieux le tromper sur son identité (Gen 27 :

21). Enfin, le registre se termine par le Songe de Jacob et la Bénédiction de la pierre de

Béthel (Gen 28 : 10-19) (ill.33).

Le registre inférieur débute à côté de l’arcus maior par le Rêve de Joseph105

(Fig.3). Dans la partie inférieure gauche du tableau se démarque Joseph endormi, couché

devant une architecture. A droite se trouvent représenté plusieurs gerbes, souvenirs du

premier songe du patriarche (Gen 37 : 5-6). Dans la partie supérieure dans un segment

semi-circulaire, sont présentées onze étoiles et des représentations du Soleil et de la Lune,

apparus cette fois pendant le second rêve du patriarche (Gen 37 : 9).

Le cycle continue avec des scènes où l’on voit successivement Joseph en train

d’interpréter ses visions (Gen 37 : 10) (ill.35), la peinture suivante montre Le patriarche

rejoignant ses frères à Dotân (Gen 37 : 15-17) (ill.36). Enfin, après la scène où Joseph est

jeté dans le puits (Gen 37 : 24) (ill.37), puis Joseph vendu par ses frères aux Madianites

102

HETHERINGTON identifie ces scènes disparues, sans malheureusement indiquer ses sources. Voir

HETHERINGTON, 1979, p 100. 103

MOUNIER, 2000, p 17. 104

WAETZOLDT, 1969, p 58 et HETHERINGTON, 1979, p 100. 105

Pour cette image voir KOENEN, 1992, p 185-194 et particulièrement la reconstitution qu’elle propose p

193 repris dans KOENEN, 1995, fig 27.

29

(Gen 37 : 28) (ill.38), le cycle se termine par Le songe de Pharaon (Gen 41 : 1-4) (ill.41)

et Pharaon qui faisant appel à Joseph pour l’aider à interpréter son rêve (Gen 41 : 14-36)

(ill.42).

Après l’histoire de Joseph commence le récit tiré de l’Exode. La première scène

représente Moïse devant le buisson ardent (Ex 3 : 2) (ill.43), ou bien la Rencontre de

Moïse et d’Aaron (Ex 4 : 27) (ill.45). Puis, le cycle se termine par les plaies infligées par

Dieu pour convaincre Pharaon de libérer le peuple d’Israël. Par exemple, dans la scène où

Moïse change l’eau en sang (Ex 7 : 20) (ill.48), se détache à gauche de l’image derrière un

massif rocheux le buste d’Araon, alors que Moïse trempe le bâton de Dieu dans une

représentation du Nil. A gauche, assis dans un trône à fond semi-circulaire, Pharaon

assiste à la puissance divine et esquisse un geste de la main droite. Dans le tableau

représentant la Mise à Mort des Premiers nés (Ex 12 : 33) (ill.53), on remarque au second

plan, les bustes d’Araon et de Moïse, alors qu’au premier plan, se trouvent à gauche deux

anges dont les mains levées lancent des flèches en direction des personnages couchés au

milieu de l’image. A droite, Pharaon assis sur un trône avec dans sa main droite un

sceptre, assiste là aussi à la mort des Egyptiens.

Sur le mur nord, le programme néotestamentaire débute par quelques

représentations de la vie de saint Etienne. Le cycle s’ouvre avec Le choix des sept diacres

(Actes 6 : 1-6) (ill.54) et continue par la scène où l’on voit Le saint avec le haut Conseil

(Actes 6 : 12-15) (ill.55) ; ce premier récit se termine par la Lapidation du saint (Actes 7 :

58-60) (ill.56) dans lequel on peut remarquer qu’un groupe de personnages lancent des

pierres sur le saint agenouillés déjà en conversation avec Dieu représenté dans le segment

en haut à gauche.

Ensuite, vient le récit dédié à saint Paul. Si la première met en avant encore le Saül

persécuteur des chrétiens (Actes 8 : 3) (ill.57), son histoire prend une orientation décisive

avec la scène bien connue de la Révélation de Saül (Actes 9 : 10) (ill.58). On remarque le

général romain au centre de l’image, agenouillé et les yeux fermés, les mains sont tendues

vers le ciel, alors qu’à gauche deux personnages semblent se diriger vers celui qui a perdu

la vue à cause de sa vision. Les scènes suivantes montrent ce qui doit être Ananie faisant

recouvrer la vue à Saül106

(Actes 9 : 10) (ill.59) et Le baptême du saint (Actes 9 : 18)

(ill.60). Malgré le mauvais état de conservation au moment des copies, on remarque que le

106

Voir sur ce point BUCHTAL, 1966, p 46.

30

sacrement a lieu dans un environnement naturel, ce qui témoigne d’une iconographie issue

de l’Antiquité tardive. En effet, ce n’est qu’au XIIIème siècle qu’on représente le saint

installé dans un baptistère comme en témoigne le folio 92 du Cod. Vat.lat 39107

(Fig.4).

Par la suite est peut-être illustrée la Prédication de Paul à la Synagogue (Actes 9 : 20)

(ill.61) et le moment beaucoup moins obscur où Paul s’échappe de la ville de Damas108

(Actes 9 : 25) (ill.62) reconnaissable à la position du saint étendu dans un panier et

descendu hors des murs de la ville. Dans la scène suivante, un personnage, allongé au

milieu du tableau à côté d’un personnage assis devant une architecture, représente le

Songe de Paul à Troas109

(Actes 16 : 9) (ill.63), suivi Du voyage vers la Macédoine, si on

s’en réfère au livres des Actes (Actes 16 : 11-12) (ill.64). S’ensuit la scène de La guérison

d’Eutyque (Actes 20 : 10-12) (ill.65) dans laquelle, après la chute de l’enfant du troisième

étage de sa maison, Paul à gauche ramasse le garçon et le présente ressuscité aux membres

de sa famille. Le tableau suivant nous montre une scène dans laquelle Paul est battu par

deux personnages. L’identification pose un véritable problème car elle est pour les

spécialistes le moment où Le saint est frappé à Philippes110

(Actes 16 : 22) (ill.66)

marquant ici un retour en arrière dans la chronologie des textes bibliques. Le récit reprend

ensuite un cours normal avec La rencontre de Paul et d’Agabus (Actes 21 : 10-14) (ill.67),

immédiatement suivi par une scène où l’on peut apercevoir Paul qui prophétise à

Jérusalem (Actes 21 : 17) (ill.68).

Toujours en essayant de suivre l’ordre chronologique des textes, le tableau suivant

doit représenter Paul frappé à Jérusalem111

(Actes 22 : 25) (ill.69). Il est vrai que le

peuple s’est soulevé contre les prédications du saint et que le tribun a fait introduire Paul

dans la forteresse, ici peut-être matérialisée par l’architecture au second plan de l’image,

afin de le questionner par le fouet. A gauche, le tribun, semble esquisser un geste de la

main droite comme pour mettre fin à la punition, suivant là aussi les textes puisque le

dignitaire fait arrêter les fouets pour demander à Paul si il est citoyen romain.

Le récit continue par la pérégrination de Paul vers Césarée (Actes 23 : 31-33)

(ill.71) et par la Traversée de la mer vers Sidon (Actes 27 : 2-3) (ill.72). Le registre

107

Voir ELEEN, 1985, p 259. 108

Ce thème est répertorié dans l’article de DINKLER VON SCHUBERT, 1967, pp 79-92. 109

WAETZOLDT, 1964, p 60. 110

Voir tout particulièrement ELEEN, 1985, p 256. 111

WAETZOLDT, 1964, p 60.

31

supérieur se termine par la Guérison de Publius (Actes 28 : 8) (ill.73) et par la Prédication

à Rome112

(Actes 28 : 23) (ill.74).

Le registre inférieur débute avec la scène énigmatique de La Division des juifs à

Iconium113

(Actes 14 -4) (ill.75) puis continue avec la Lapidation de Paul à Lystra (Actes

14 : 19) (ill.76) ou bien l’aveuglement d’Elymas (Actes 13 : 9 – 11) (ill.81) marquant ici

de nouveau un retour en arrière par rapport à la chronologie du livre des Actes. Quelques

scènes plus loin, le tableau renvoie sans doute au Baptême du gardien de la prison et de sa

famille (Actes 16 : 33) (ill.86) où, au centre de la composition, un personnage nu reçoit le

sacrement par Paul debout sur un monticule circulaire et qui, malgré les détérioration de la

peinture, doit tendre son bras vers la tête du personnage. A gauche, Barnabé assiste à la

scène alors qu’à droite une matrone symbolise sans doute la femme du geôlier. Les

dernières images nous dévoilent des scènes avec Paul devant un autel dédié à un Dieu

inconnu à Athènes (Actes 17 : 22-23) (ill.87), ou bien encore une peinture qui montre Dieu

apparaissant en rêve à Paul (Actes 23 : 11) (ill.90). Le programme se conclut par une

scène dans un mauvais état de conservation et admis par les différents chercheurs comme

étant La rencontre de Pierre et Paul à Rome114

(ill.95).

c) Les portraits des saints et prophètes

Au-dessus des scènes bibliques se trouvaient quarante-quatre figures en pied (dont

une a disparu au XVIIème siècle), peintes entre les embrasures des fenêtres hautes. La

distribution des personnages nous est bien connue grâce à certaines annotations des

copistes aux moments des relevés : au folio 1 est noté : « Figure 22 nella parte fra la

finestre a mano diritta nel entrare in chiesa115

», au folio 2v : « manca un propheta », au

folio 22 : « facciata ne… il crocifisso figura 1 » et au folio 61 : « Figure 22 poste fra la

finestre a mano manca nell entrare116

».

La difficulté devient plus aiguë pour ce qui concerne la datation de ces peintures :

doit-on les intégrer dans le groupe programmatique de l’Ancien et du Nouveau Testament,

112

Voir sur ce point l’identification de WAETZOLDT, 1964, p 60, sur laquelle n’est pas d’accord

HETHERINGTON, 1979, p 100. 113

C’est la proposition de WAETZOLDT, 1964, p 60 et HETHERINGTON, 1979, p 100. 114

WAETZOLDT, 1964, p 61 et HETHERINGTON, 1979, p 100. 115

WAETZOLDT, 1964, p 61. 116

Ibid, 1964, p 61.

32

ou bien les considérer comme quelque chose d’isolé, peint à une date ultérieure ? Deux

pistes ont permis de balayer certaines incertitudes. La première nous est une fois de plus

donnée par les copistes du XVIIème siècle. On peut vraisemblablement admettre que lors

de l’élaboration des relevés, si des différences stylistiques avaient été remarquées sur

certaines, ou même sur l’intégralité des figures, cela aurait été dûment noté par les artistes.

La deuxième nous est fournie par l’apparence originale des figures de Saint-Paul dont

nous savons qu’elles sont similaires à celles qui se trouvent dans la nef de S. Apollinare-

Nuovo à Ravenne117

. Dans le vaisseau médian, au-dessus d’un double cortège qui à

gauche illustre la théorie des Vierges se dirigeant vers la Madone et à droite des martyrs

marchant vers le Christ, sont représentés des saints, apôtres et prophètes qui tiennent des

codices ou des volumina. L’ensemble a été peint au VIème siècle. Le recoupement de ces

réflexions conforte notre hypothèse selon laquelle les figures de Saint-Paul furent peintes

au même moment que les scènes de l’Ancien et du Nouveau Testament.

L’observation des figures nous apprend que sur l’ensemble des personnages

quarante-trois sont nimbés sur le mur méridional (ill.96 et ill.97), sept tiennent un

parchemin ou un livre (ill.98), alors que deux autres portent distinctement des robes. Sur le

mur septentrional, on discerne que l’un écrit sur un livre comme un évangéliste (ill.99) et

deux autres portent des robes ecclésiales. Face à ces constatations, on ne peut que tendre

vers l’idée que nous sommes en face de chefs de l’Ancien Testament, de saints et

d’apôtres.

Pour en être certain, il convient bien évidemment de se tourner vers le délicat

problème de l’identification des personnages. Le sujet est pour le moins complexe, étant

donné que le corpus a tendance à se réduire car sur les quarante-trois figures, quatorze

comprennent d’importantes lacunes, rendant une partie du programme inexploitable. Les

seules informations disponibles sont les quelques noms donnés par les copistes et par des

personnes qui se sont servis postérieurement des relevés118

. Elles ont bien évidemment été

largement reprises à leurs comptes par une bonne partie de l’historiographie qui a reconnu

sur certains folios Eléazar, Hosea, Nathan, Joël, Aaron et David119

(ill.100). Pourtant, ces

117

Erigée sur l’ordre de Théodoric, elle fut construite sur l’emplacement de l’ancienne chapelle Palatine.

C’est seulement au IXe siècle qu’elle prit son nom actuel, lorsque les reliques de saint Apollinaire, fondateur

de l’église de Ravenne, furent transférées de la basilique de Classis dans la basilique actuelle.

HETHERINGTON, 1979, pp 48-49. 118

Au folio 1 est inscrit le nom du prophète Eleazar. Voir WAETZOLDT, 1964, p 61. 119

MATTHIAE 1965, p 58, HETHERINGTON, 1979, p 96.

33

dernières propositions se doivent d’être appréhendées avec une certaine prudence. En

effet, il n’est absolument pas certain que les sources sur lesquelles se basent ces

identifications soient tenues comme assurées. A cela, ajoutons que la physionomie et les

attributs de l’ensemble des figures de la nef n’offrent pas de témoignages suffisamment

significatifs pour permettre des confrontations avec d’autres représentations de saints et

prophètes120

, ou bien de retrouver leurs traces par une étude des textes bibliques. Il

convient donc peut-être d’abandonner les propositions d’identifications formulées plus

haut, en conservant cependant l’hypothèse selon laquelle nous serions en face de

prophètes, de saints et d’apôtres.

2) L’arcus maior et l’abside

a) Le débat sur le programme de l’arc

Le programme qui se développait sur l’arc qui séparait la nef du transept nous est

transmis par une gravure de Ciampini121

(ill.101), au folio 139 et 140 du Codex

Barberini122

(ill.102), et par un relevé du Christ dans son médaillon conservé au folio 29 v

du Barb. Lat. 2161 (ill.103). Ces relevés parfois différents ont été largement étudiés et

interprétés.

Pour certains la gravure de Ciampani doit être à considérer comme celle qui se

rapproche le plus de la composition d’origine123

. Yves Christe se tient dans une position

beaucoup plus neutre, puisqu’il remarque des différences entre les deux schémas, mais se

garde de trancher de façon précise. Enfin, Anne-Orange Poilpré s’est davantage axée sur

l’interprétation des folios du Cod.Barb.lat. 4406 comme relevant de la composition

originelle124

.

Une première confrontation entre le schéma de Ciampani et le folio 29 v du Barb.

Lat. 2161 permet de penser que se trouve, au centre du sommet de l’arc, un Christ en

buste, représenté de face, le visage barbu et la tête pourvue d’un nimbe dardant des

120

Citons l’exemple de Saint-Apolinaire ou bien les représentations de saints sur la coupole de la chapelle

Saint-Victor-in-ciel-d’Oro qui fait partie de l’église Saint-Ambroise. 121

Dans Ciampinis Vetera Monimenta, I, Rome, 1690, tab 68. L’artiste se serait inspiré d’un dessin de la

Royal Library du château de Windsor (n°9056, WAETZOLDT, 1964, tab 836), lui-même une copie du

Cod.Bar.lat.4406. Voir WAETZOLDT, 1964, p 64 et CHRISTE, 1996, p 72. 122

Avec en bas cette inscription : « pitture dell’arco grande di mosaico in faccia alla porta ». 123

Voir MUNTZ, 1898, p 14, WAETZOLDT, 1961, p 21 et KESSLER, 1994, p 123. 124

POILPRE, 2003, pp 128-129.

34

rayons125

. Il tient peut-être, selon le copiste du folio 29 v, une croix à longue hampe, dont-

on aperçoit quelques fragments sur la gravure de Ciampani et au folio 140.

Un petit peu au-dessus du médaillon, et à gauche du Christ, sont présentés les

quatre Vivants, dont deux seulement sont encore visibles sur l’œuvre de Ciampani et sur le

folio 140 de la Bibliothèque Vaticane. Représentés à mi-corps en position centripète, et

émergeant de petits nuages, le lion et l’aigle, sont tous les deux pourvus d’un nimbe et de

deux ailes sur les relevés. Cependant, le lion est placé au-dessus de l’ange sur la gravure

de Ciampani, alors qu’il est installé plus à gauche sur le croquis du XVIIème siècle126

. A

ces premières différences, on remarque que les deux Vivants tiennent un livre sur le folio

140 qui ont disparu sur la gravure. Yves Christe, n’est pas certain que les codices soient

presentés sur le programme primitif127

. Alors que pour Anne-Orange Poilpré, cette version

de la Maiestas Domini en ligne avec des Vivants qui tiennent chacun un codex est inédite

pour cette période tardo-antique128

.

Précédée de deux anges qui s’inclinent devant la gloire de Dieu, une double théorie

de Vieillards en deux files étagées s’avance cérémonieusement vers le centre de l’arc.

Douze sont esquissés sur le folio 140 et dix au folio 139 du Codex Barberini alors que la

gravure de Ciampani dévoile à la gauche du Christ dix vieillards et à sa droite onze. Ils

tiennent tous une couronne disposée verticalement. Elles sont constituées d’une série

d’anneaux dans la gravure, alors que dans les dessins, elles se composent d’un simple

cercle.

Les relevés s’accordent pour retranscrire les vieillards de droite couverts d’un voile

tandis que ceux de gauche ont la tête nue129

. Au registre inférieur, est figuré Pierre précédé

de cette inscription :

« Ianitor hic caeli est fgidei petra culmen honoris

Sedis apostolicae rector et omne devcus. »

Et à gauche Paul avec cette mention :

« Persequiturdum vasa Dei fit Paulus et ipse

Vas fidei electum Gentibus et populis 130

»

125

Voir sur ce point les discussions de WARLAND, 1986, pp 41-43 et GRABAR, 1982, pp 5-24. 126

Voir MUNTZ, 1898, p14. 127

CHRISTE, 1996, p 72. 128

Voir POILPRE, 2003, p 129. 129

WAETZOLDT, 1961, p 22, CHRISTE, 1996, p 73. 130

IHM, 1960, p 136.

35

Les saints, qui n’ont pas la même physionomie sur la gravure et les dessins, lèvent

la main droite en direction du Sauveur. La présence des deux saints fondateurs de la Rome

chrétienne correspond selon Anne-Orange Poilpré à la première « occurrence de cette

disposition en ligne à l’arc de triomphe131

».

Bien que très proches sur certains points, on remarque que les deux compositions

comportent beaucoup de différences sur certains détails précis du programme. Ces

dissemblances sont pour le moins surprenantes étant donné que la gravure de Ciampani

s’inscrit comme étant une filiation des deux folios du Codex Barberini132

. Quoi qu’il en

soit, face aux arguments des uns et des autres, il est bien difficile de trancher avec

certitude sur l’un ou l’autre des schémas et de dégager une position certaine sur le cycle

iconographique qui ornait l’arc.

Afin d’y voir plus clair, on peut éventuellement s’aider de cycles paléochrétiens où

l’on retrouve la représentation du Tétramorphe. Le plus ancien exemple se trouve

aujourd’hui présenté sur le cul-de-four de l’abside de Sainte-Pudentienne133

. Il est

aujourd’hui attesté que le début des travaux remonte au pontificat de Sirice vers 387-398

pour s’achever sous Innocent Ier (401-417) (Fig.37). Au registre inférieur, le Christ siège

sur un trône surélevé avec à ses pieds une colombe et un agneau placé sur un monticule

d’où s’échappent les quatre fleuves du paradis. A sa gauche et à sa droite sont illustrés les

apôtres, auxquels se joint la personnification des juifs et des gentils couronnant Pierre et

Paul. Les personnages se tiennent devant un mur percé d’ouvertures que l’on peut

appréhender comme la représentation d’une ville. Dans l’axe de l’abside est figurée une

grande croix gemmée avec de part et d’autre, dans un ciel rempli de nuées, la figuration du

Tétramorphe. Comme sur la gravure de Ciampani, les Vivants ne tiennent ni rouleau ni

codex. On retrouve le même genre de représentation à la porte de Sainte-Sabine (Fig.38)

réalisée sous le pontificat de Célestin (422-432) 134

et au revers de façade de Sainte-Marie-

Majeure (422-432) 135

. Pourtant, on remarque la présence des livres sur la façade de Saint-

131

POILPRE, 2003, p 128. 132

CHRISTE renvoie à WAETZOLDT, 1969, p 64, n°836, qui malheureusement ne reproduit pas le dessin

de Windsor, ce qui ne permet pas de certifier si le dessin de la Royal Library est bien une copie du Codex

Barberini. 133

Voir POILPRE, 2003, pp 85-110. 134

POILPRE, 2003, pp 110-114. 135

SAXER, 2001, pp 56-59.

36

Pierre dont-il semble certain, malgré les nombreuses restaurations au Moyen Age, qu’elle

avait gardé son décor réalisé par Léon le Grand au milieu du Vème siècle136

.

On le voit, le renvoi à des cycles iconographiques contemporains n’offre pas plus

de solutions que la confrontation des différents schémas de l’arc. C’est donc par d’autres

voies, et particulièrement par l’étude des critères de datation et aussi de restauration que

nous étudierons plus tard, que s’ébauche peut-être la solution. Sans anticiper sur cela, il

semble bien que le décor de l’arc de Saint-Paul s’inscrive dans un groupe programmatique

homogène. La gravure de Ciampani pourrait alors transcrire le programme primitif de

Saint-Paul alors que les dessins du Codex Barberini représenteraient le décor mis en place

par Galla Placidia sœur des empereurs Arcadius et Honorius sous Léon le Grand comme

nous l’apprend l’inscription 137

:

« Placidia pia mens operis decus hoc favebat svadet pontificis studio splendere Leonis ».

b) Hypothèse sur le cycle de l’abside

On demeure mal informé pour ce qui concerne le cycle iconographique qui ornait

le cul-de-four de l’abside de la basilique. Pourtant, il semble que la décoration en ait été

élaborée sous le pape Symnaque (498-514)138

. Les chercheurs s’accordent à penser,

malgré l’absence de toute source iconographique de cette période, que le cycle qui s’y

déployait doit plus ou moins s’approcher de celui de la basilique Saint-Pierre. Ce décor,

aujourd’hui perdu, nous est transcrit par un dessin du XVIème siècle sur lequel est

présenté le programme mis en place à l’époque d’Innocent III (1198-1216), dont certaines

composantes sont restées paléochrétiennes139

(Fig.5). On peut y observer une des

premières représentations de la Traditio Legis140

. Le Christ debout et non pas trônant,

entre les princes des Apôtres, remet la loi à Pierre à droite tandis que Paul à gauche assiste

à la scène en simple spectateur. Ils sont encadrés par deux palmiers, au-dessus d’un

136

RICHE, 2001, p 241 et POILPRE, 2003, p 137. 137

Nous renvoyons ici au travail de Jean-Pierre CAILLET sur la basilique Nord du groupe épiscopal de

Salone. Il remarque dans l’abside une inscription qui évoque ceux de l’arc de Saint-Paul-hors-les-murs. Voir

CAILLET, Jean-Pierre., L’évergétisme monumental chrétien en Italie et à ses marges, Rome, 1993, p 384. 138

TOMEI, 1988, p 57. 139

Une reproduction de l’abside réalisée par Giacomo Grimaldi est conservée à la Bibliothèque Vaticane,

Arch.S.Pietro, Album, folio 50. Voir WAETZOLDT, 1964, Fig 490, Kat 943. 140

KRAUTHEIMER, 1995, p 16. Voir également ANDALORO, SERENA, 2000, p 38.

37

paysage « nilotique », au milieu duquel jaillit une rivière. Enfin, à la naissance de la voûte,

court une frise de douze agneaux sortant de Jérusalem et de Bethléem141

.

Cette première incursion dans le cycle iconographique de la basilique Saint-Paul

nous rappelle les nombreuses zones d’ombres qui grèvent encore aujourd’hui la

connaissance de quelques parties du cycle. Du fait de la complexité de ces problèmes,

aucun aspect ne saurait être négligé, au premier rang duquel les travaux qui vont se porter

sur l’édifice. Ces campagnes de restauration, bien loin de ne s’arrêter qu’à l’aspect

structurel du bâtiment, concerneront en même temps ou de façon propre l’ensemble du

décor. Bien évidemment, il convient de ne pas écarter les compositions nouvelles,

rajoutées au fil du temps, et qui s’imposeront comme complément aux peintures et

mosaïques de l’Antiquité tardive.

141

Sur l’évolution du thème de la Traditio-Legis, voir DAVIES-MAYER, Cäcilia., « Das Traditio-Legis

Bild und seine Nachfolioge », dans Müncher Jahrbuch, n°12, Munich, 1961, pp 7-45. Pour une description

précise de l’ancienne iconographie qui se développait dans l’abside, voir ANDALORO, ROMANO, 2000, p

38.

38

Chapitre second

Les restaurations et contributions du Moyen Age

1) Le Haut Moyen Age

a) Les peintures du revers de la façade

Les copies du XVIIème siècle, les relevés réalisés par Seroux d’Agincourt à la fin

du XVIIIème siècle et la reconstitution proposée par Hetherington (Fig.6) permettent

aujourd’hui de mieux connaître la teneur du programme qui se dévoilait sur le revers du

mur ouest de la basilique de la voie d’Ostie. Huit compartiments y étaient groupés, divisés

en deux rangées de quatre images juste en-dessous des six fenêtres de la façade et qui

étaient séparés par des inscriptions que les copistes du XVIIème siècle avaient ignorées et

que d’Agincourt n’avait pas pu retranscrire.

Dans le registre supérieur, les peintures représentent les quatre évangélistes et

leurs symboles. Les deux portraits intérieurs sont séparés par un monogramme. De gauche

à droite se distinguent Luc, Matthieu, Jean, et Marc. Chaque panneau est divisé en deux, la

partie supérieure étant légèrement plus petite que la partie inférieure. Dans la partie

sommitale, on retrouve l’animal qui représente chaque évangéliste. En ce qui concerne

Luc, le taureau est présenté de profil et coupé à mi corps, la tête nimbée, avec une aile sur

son flanc droit et retenant sous sa patte droite un codex (ill.104). Pour Matthieu, l’ange est

de face, la tête nimbée avec des ailes déployées et avec un objet difficilement identifiable

dans sa main droite (ill.105). Après le monogramme, se détache Jean dont l’aigle est

comme pour Luc de profil, la tête nimbée et orientée vers le haut, avec les ailes bien

représentées (ill.106). Enfin, le lion de Marc suit à peu près la même composition sauf que

la tête est tournée dans la direction du spectateur (ill.107).

Dans la partie inférieure est figuré chaque évangéliste, vêtu d’une tunique à

manches longues avec un manteau jeté au-dessus de l’épaule. Ils sont assis à côté de leur

pupitre dont certains ont des formes trapézoïdales et des pieds crénelés, alors que celui de

Mathieu est rectangulaire. Ce dernier a son regard dirigé vers le livre posé sur ses genoux

sur lequel il semble ajouter des annotations. Dans la peinture suivante, Luc, assis et

représenté de profil, tient dans sa main droite une plume et dans sa gauche un rouleau.

39

L’attitude de Matthieu et de Luc renvoie à l’image d’un évangéliste écrivant ou bien

réfléchissant devant la première page de son Evangile.

Dans la partie droite, l’attitude des deux autres évangélistes est beaucoup plus

difficile à appréhender au vu du mauvais état de conservation au moment de la réalisation

des copies. On remarque néanmoins qu’il est placé à droite du lutrin et non pas à gauche

comme sur les peintures précédentes. Sur l’image de Jean, la perte couvre en grande partie

les bras de l’évangéliste. Les copies permettent quand même d’apercevoir dans sa main

gauche un objet : peut-être un encrier dans lequel il peut tremper sa plume ? Comme pour

Matthieu et Luc, la tête du personnage est pourvue d’un nimbe. Sa position dénote une

attitude méditative qui doit se rapprocher de celle de Luc. La dégradation de la peinture

sur le tableau de Marc ne permet pas de définir son comportement étant donné que le

visage et les bras du personnage ont malheureusement disparu au XVIIème siècle.

Dans le registre inférieur, les quatre compartiments montrent des scènes de la

Passion. Dans la première, subdivisée en deux images égales, se démarque en haut le

Christ en conversation avec un ange. Le Seigneur est représenté barbu, la tête nimbée,

assis sur un rocher et légèrement penché en avant. Il semble tendre les mains vers un ange

aux traits juvéniles qui, debout, posé sur un monticule, les jambes croisées, tient dans sa

main droite un bâton et semble écouter les paroles du Christ. En-dessous est illustré ce que

Hetherington a reconnu comme L’agonie dans le jardin142

(ill.108). Pour être plus précis,

on remarque que le Christ esquisse un geste envers le personnage presque assis alors que

les deux autres individus sont encore profondément endormis.

Les scènes suivantes montrent dans un premier temps Le portement de Croix

(ill.109) où le Christ, qui occupe le centre de la composition est représenté la tête pourvue

d’un nimbe gemmé, le corps penché en avant, avec la croix sur son épaule gauche. Au

second plan est figurée une foule de personnages en armes dont les lances, selon la

transcription du copiste, sortent du cadre de la peinture. En-dessous se trouvent deux

portraits et une inscription en bas à gauche :

« BDT

HIVIII

NEOPP »

142

HETHERINGTON, 1979, p 97.

40

Ce qui a permis d’identifier le personnage coiffé de la tiare comme étant soit Boniface

VIII soit Jean XXII143

.

La troisième image semble beaucoup plus complexe étant donné qu’elle nous

montre ce qui peut être une combinaison singulière entre la Descente de Croix et la

Crucifixion144

(ill.110). Malgré les nombreuses restaurations qu’ont sans doute subi les

peintures avant le XVIIème et XVIIIème siècle, on peut vraisemblablement penser que les

copistes ont tenté de retranscrire avec précision l’iconographie de cette image. On y

découvre en-dessous de la personnification du Soleil et de la Lune une immense croix,

surmontée d’un large titulus, qui est plantée dans le sol. Le Christ y est représenté la tête,

pourvue d’un nimbe crucifère, retombant sur son épaule droite. Le visage est barbu, le

corps est rigide et amaigri puisque le torse laisse largement apercevoir les côtes. Son bras

gauche est tendu, la paume de la main ouverte laissant d’ailleurs apercevoir le clou qui le

maintient à la croix. Le bras droit quant à lui, semble tomber sans vie sur le dos du

personnage qui le tient par la hanche. Enfin, les jambes, l’une à côté de l’autre, ont les

pieds cloués et posés sur un bout de bois carré.

De part et d’autre de la croix, se tiennent la Vierge et saint Jean l’Evangéliste.

Marie est représentée de face et habillée d’une robe, d’un voile et pourvue d’un large

nimbe. Saint Jean tient dans sa main gauche un livre et sa tête nimbée repose sur sa main

droite. Le personnage situé au centre de la composition entretient ici une position bien

particulière puisqu’il tient le Christ par la hanche, représenté comme en lévitation. On

remarque néanmoins que son pied droit est posé sur un petit monticule. Enfin, tout de suite

à la droite de saint Jean, un petit personnage est tout aussi difficilement identifiable : il est

représenté debout et les jambes à demi fléchies ; seul son bras droit est parfaitement

perceptible. Il semble tenir dans sa main un outil avec lequel il travaille. Est-il en train de

planter les clous dans les pieds du Christ ou bien de les enlever avec une pince ?

La dernière image présente une iconographie originale. Un ange est assis sur un

coffre dont la construction oblique nous laisse largement apercevoir le fond de ce qui doit

être le tombeau (ill.111). L’ange les jambes croisées et les ailes déployées semble songer à

la destinée du Christ. Sur ses genoux est figuré le Seigneur, allongé, les jambes fléchies et

le bras droit tombant sur le coffre. Sur la gauche de l’image, une femme, représentée à

143

Voir HETHERINGTON, 1979, p 97 qui propose une restauration au XIVème et XVème siècle.

TRONZO date l’intervention début XVème siècle. Voir TRONZO, 2001, pp 467 et 473. 144

HETHERINGTON, 1979, p 98, TRONZO, 2001, pp 469 et 471.

41

plus petite échelle, le corps couvert d’une longue robe et les mains jointes dans l’attitude

de la prière, assiste discrètement à la scène. Sommes-nous en face d’une image

correspondant à une représentation singulière de la Pietà ? A la représentation habituelle

de la Vierge Marie pleurant son fils, est substitué ici un ange à l’aspect bien particulier145

.

Le monogramme situé entre Matthieu et Jean, que seul d’Agincourt a tenté de

reproduire, a été diversement interprété. On y remarque dans un médaillon circulaire une

inscription qui de gauche à droite transcrit: S. R. G. I. (Fig.6). Si Léon de Bryune opte

pour Grégoire VII (1073-1085) 146

, il semble néanmoins que l’on se penche dorénavant sur

la retranscription SERGIo que l’on identifie aujourd’hui comme SERGE IV (1009-

1012)147

.

On le voit, le programme iconographique qui est situé sur le revers de la façade

comporte de nombreuses incertitudes quant à l’identification des scènes et à sa datation,

étant donné qu’il semble avoir été restauré sous Jean XXII, et, qu’à la proposition de

Serge IV, peut d’une manière tout aussi probante être substituée celle de Serge III (904-

911).

Dans la peinture identifiée par Hetherington comme étant l’Agonie au Jardin, il est

possible de situer la scène dans le domaine de Gethsémani. Les textes Bibliques qui ne

s’accordent pas sur certains points, précisent que le Christ s’y retira avec Pierre et les deux

fils de Zébédée (Mat 26 : 37) ou bien avec Pierre, Jacques et Jean (Mar 14 : 33). Dans ce

lieu, le Christ commença à ressentir de la tristesse et de l’angoisse et finit par quitter ses

compagnons pour prier son père. Revenant vers ses disciples, il les trouva endormis et

réveilla Pierre pour lui signifier qu’ils devaient tous veiller et prier pour éviter la tentation

(Mat 26 : 38-40, Mar 14 : 35-38). On le voit, le texte explicite l’action du Seigneur pour

sortir Pierre du sommeil où il était plongé. C’est, semble-t-il, cette scène que le concepteur

du programme a voulu nous expliciter ici. Les deux personnages endormis pourraient être

les deux fils de Zébédée, Jacques et Jean, et le personnage dont le Christ tient l’épaule

serait alors Pierre qu’il vient de réveiller. C’est donc un instant bien précis qui peut être

représenté ici ; l’identification de Hetherington étant bien trop générique.

145

BELTING, 1998, p 122. 146

BRYUNE, 1934, p 139. 147

HETHERINGTON, 1979, p 98 et TRONZO, 2001, p 468.

42

Dans le même sens, il convient maintenant de se pencher sur la peinture

représentant sur la même image la Crucifixion et la Déposition de Croix. Il est vrai que

l’on y retrouve certaines composantes iconographiques alliant ces deux moments précis de

la Passion du Christ. Au-dessus de la Croix est bien représentée la personnification du

Soleil et de la Lune que l’on retrouve par ailleurs sur la Crucifixion des Evangiles dit de

François II (seconde moitié du IX siècle)148

(Fig.7). En revanche, la représentation de la

croix et la position du Christ dont le corps est couvert par un perizonium n’évoquent en

rien la peinture de Saint-Paul.

C’est par la confrontation avec un triptyque de la Bibliothèque Nationale de

France (seconde moitié du Xème siècle) (Fig.8), que l’on peut trouver sur ce point

quelques analogies avec le folio 136 du Codex Barberini. La Crucifixion qui occupe le

centre de la composition est surmontée, comme dans les Evangiles de François II, à

gauche de la personnification du Soleil et à droite de celle de la Lune. La croix est pourvue

du même titulus que celle de Saint-Paul et le Christ présente la même physionomie. Les

muscles sont bien dessinés, les bras sont tendus et la paume est ouverte pour bien laisser

apparaître le clou au milieu de la main. Sur ses hanches, est bien figuré un pagne court qui

retombe jusqu’aux genoux et qui laisse apparaître des jambes figurées l’une à côté de

l’autre. De chaque côté, on retrouve bien la Vierge à gauche et saint Jean à droite qui,

malgré une attitude différente de la peinture de Saint-Paul, témoignent d’un répertoire

traditionnel d’illustration de la Crucifixion.

Cependant, le folio.136 laisse clairement apparaître un personnage qui retient le

Christ par la hanche et un autre à côté de Jean qui semble travailler. Ceux-ci se retrouvent

sur un autre ivoire conservé au Dumbarton Oaks de Washington représentant cette fois

une Descente de Croix (Fig.9). On retrouve, là aussi, de part et d’autre de la croix, la

Vierge à gauche qui baise la main du Christ et saint Jean à droite qui tient dans sa main

droite un livre. Au centre de l’ivoire, un personnage à plus grande échelle, identifié

comme Joseph d’Arimathie (Mat 27 : 59), retient lui aussi le Christ par la taille. Enfin, à

droite on retrouve un individu en train de retirer les clous des pieds du Christ à l’aide

d’outils. Il reprend le même mouvement que celui du folio 136. Ces dernières

observations, ajoutées aux premières, ont tendance à conforter la proposition d’

Hetherington. Néanmoins, on peut également formuler l’hypothèse que, dans un premier

148

Paris, B.N.F, ms.Lat.257, folio 12v°.

43

temps, a été peinte une Crucifixion qui plus tard fut transformée en Descente de Croix.

L’artiste se serait alors gardé de toucher à la composition d’ensemble et aurait juste

introduit quelques légères transformations. Le personnage qui tient le Christ par la hanche

et celui qui semble lui retirer les clous des pieds sont figurés à plus petite échelle que le

Christ, la Vierge et Jean et apparaissent avoir été introduits dans les derniers espaces

disponibles au moment de la mutation de cette scène.

Pour terminer, il convient de se pencher une nouvelle fois sur la scène que Belting

a considérée comme une Pietà. Il est vrai qu’ici on retrouve une figure qui en soutient une

autre. Ce type de représentation assez rare se retrouve néanmoins sous une autre forme sur

le Reliquaire de Montalto (vers 1400) conservé au Museo Sistino Vescovile (Fig.10). Le

panneau rectangulaire central montre là aussi l’Homme de douleur soutenu par un ange

(Engelspietà)149

. Si le Christ est bien représenté en figure entière, il est cette fois de face et

pas de profil comme sur la peinture de Saint-Paul. Mais surtout, la scène est figurée devant

une Croix ornée de perles et de pierres précieuses et entourée d’anges, alors que sur la

peinture se retrouvent distinctement le tombeau et une femme en prière au second plan.

Le problème est qu’aucune source textuelle ne parle du cadavre du Christ et de l’ange.

C’est dans une autre scène que l’on figure un ange assis sur un tombeau et accompagné,

comme à Saint-Paul, d’une ou de plusieurs femmes. Ce thème se retrouve souvent dans

l’art médiéval sous le dénomination de la Visite des saintes femmes au tombeau (Mat 28 :

1-8 ; Mar 16 : 1-7 ; Luc : 24 : 1-8). On représente généralement l’ange assis sur le

tombeau vide, accompagné des saintes femmes qui viennent faire révérence au Seigneur.

Que vient alors faire le Christ dans les bras de l’ange ? Fait-il partie du programme

originel ?

Si, comme nous venons de le voir, l’identification des scènes reste largement

sujette à caution, il en est de même pour ce qui concerne la datation de ce programme.

149

Cette représentation du Christ de douleur sortant du tombeau, dénommé « Pitié Nostre Seigneur » dans

les textes de Charles V et Charles VI n’est pas une simple expression en France du courant de la Devotio

moderna. Ce thème semble t-il était déjà courant sous Charles V et peut-être sous Jean le Bon. Il est en tout

cas établi que Charles VI avait une dévotion personnelle à la Croix. Il n’est pas impossible que sous l’action

de personnalités liées à la cour comme Jean Gerson, les souffrances du roi malade et la « grande pitié du

royaume » aient contribué à la diffusion de la dévotion du Christ souffrant. Voir TABURET-DELAHAYE,

Elisabeth., Paris 1400. Les arts sous Charles VI, catalogue de l’exposition, Paris, Louvre, 22 Mars 2004-12

Juillet 2004, Paris, 2004, p 179-180. Sur ce thème voir également SCHILLER, 1968, p 229.

44

D’après les dernières conclusions, il aurait été peint aux alentours du IXème ou du Xème

siècle et aurait subi une restauration sous le pontificat de Jean XXII150

.

Pour revenir sur ce propos, on remarque que les peintures des évangélistes se

situent à certains égards dans la même mouvance que certains manuscrits carolingiens.

Les vêtements que portent les figures de Saint-Paul et qui rappellent le costume romain, se

retrouvent dans de nombreuses représentations des évangélistes. Par exemple au folio 15

v° du ms.lat.17968 de la BNF (Fig.11), on retrouve saint Matthieu avec la même tunique

qui lui arrive au bord du poignet, le corps couvert par un manteau jeté sur l’épaule. De

plus, sur le frontispice, des Evangiles d’Aix-la-Chapelle151

(début du IXème siècle)

(Fig.12), attribués à une école de la Cour d’influence byzantine, on découvre d’autres

analogies avec les copies des tableaux de Saint-Paul. Le lutrin est posé à côté des

évangélistes occupés à la rédaction des livres. Au-dessus d’eux est figuré leur attribut qui

reprend, là aussi, le même schéma qu’à Saint-Paul. Le taureau de Luc est représenté de

profil, pourvu de deux ailes, la tête nimbée avec sa patte avant droite posée sur un rouleau

qu’il semble conserver près de lui.

On peut également ajouter que le traitement de l’espace admet quelques parallèles.

Aussi bien sur le manuscrit d’Aix que sur les peintures de Saint-Paul, les évangélistes sont

présentés sur un fond aéré et non plus surchargé d’architectures comme sur la

représentation de Matthieu dans les Evangiles dits d’Ada152

(vers 800), où le siège du

personnage occupe l’intégralité de l’espace (Fig.13).

Cependant, d’autres correspondances peuvent s’entrapercevoir avec la

représentation des évangélistes sur un Tétraévangile dit Manuscrit Coislin 195 (Xème

siècle) conservé à la Bibliothèque Nationale de France (Fig.14).

Les évangélistes sont là aussi assis, écrivant la première page de leur Evangile, et

même pour certains, comme Luc, dans une attitude de méditation comme on peut le

supposer pour la représentation de Jean au folio 132.

Au folio 386 v° du BNF.ms.lat. 1 dite Première Bible de Charles le Chauve (vers

846) (Fig.15), sur le registre inférieur au bas de la page, est illustrée la scène bien connue

de Saint Paul enseignant. De chaque côté du saint, sont représentés des soldats qui portent

150

WAETZOLDT, 1964, p 55, HETHERINGTON, 1979, p 98, TRONZO, 2001, p 471. 151

Aix-la-Chapelle, Trésor de la cathédrale, sans n°, folio 14 v°. 152

Trèves, Stadtbibliothek, Cod. 22, folio 15 v°.

45

tous, une tunique courte, une chlamyde sur les épaules et des bottes qui montent jusqu’à

mi-mollet. Certaines de ces caractéristiques se retrouvent sur le soldat devant le Christ

dans la scène du Portement de Croix (ill.110). Outre cela, le Christ porte à peu près les

mêmes vêtements que les évangélistes du registre supérieur et du folio 15 v° de la BNF, ce

qui tend à suggérer une souche iconographique carolingienne.

Au registre inférieure, nous avons précédemment soulevé bon nombre de

correspondances entre la supposée Descente de Croix et le triptyque de la Bibliothèque

Nationale de France, produit à Constantinople dans la seconde moitié du Xème siècle.

D’autres sont à percevoir, comme par exemple, dans la figuration de la Vierge à droite du

Seigneur. Elle a les bras tendus et les mains couvertes par un voile. A gauche du Christ est

figuré saint Jean avec la main droite sur le visage et la gauche occupée par un livre, que

l’on perçoit sur la peinture de L’abbé Epifanio au pied du Christ en croix dans l’église San

Vincenzo al Volturno (IXème siècle) (Fig.16).

Cette position de saint Jean au folio 136 se retrouve sur le revers d’une plaque

d’ivoire du Musée de l’Ermitage, attribuée à un atelier de Constantinople aux environs du

Xème ou du XIème siècle (Fig.17). L’œuvre qui présente sur sa face des scènes tirées de

la vie de la Vierge, commente au revers des images inspirées de la vie du Christ dont l’une

au registre médian présente la Crucifixion. A la gauche du Christ en croix est représenté

saint Jean qui, comme sur les peintures de Saint-Paul et de San Vincenzo, tient un livre

dans sa main gauche et semble se tenir la tête avec la main droite ; attitude plus

douloureuse que l’on peut voir illustrée sur la Croix dite aux émaux (fin du Xème siècle)

conservée à Essen (Fig.18).

En conclusion, plusieurs hypothèses peuvent être formulées. Il est envisageable

qu’un premier programme ait été peint au IXème siècle comme nous l’a révélé la

confrontation des évangélistes avec des manuscrits carolingiens. De plus, l’attitude des

personnages sur la Crucifixion de San Vincenzo et certaines dispositions iconographiques

témoignent encore d’une influence antique dont nous savons qu’elle était très vivace à

cette période153

. En admettant que ce cycle ait existé, on ne peut que souligner le caractère

exceptionnel de celui-ci. Face à nos connaissances actuelles sur la peinture monumentale

de cette période, on s’attend plutôt à retrouver à la place des Evangélistes et de la Passion

153

Sur l’influence des modèles paléochrétiens sur la peinture carolingienne, voir KOEHLER, Wilhelm., Die

karolingische Miniaturen, tome I, Die Schule von Tours, Berlin, 1933, réed 1963, p 245.

46

du Christ, une représentation du Jugement Dernier. Ce thème est en effet, plus en accord

avec la composante spatiale de l’édifice et surtout il se situe dans le prolongement des

usages carolingiens qui tendent à représenter, dans ce secteur, une iconographie préparant

l’avènement final du royaume divin. Ce serait alors dans un souci d’association des

images avec les différents pôles cultuels de cette partie de l’édifice qu’aurait été élaboré ce

programme.

On peut également formuler l’idée que certains compartiments auraient été

repeints aux alentours de l’an mil comme en témoignerait le monogramme relevé par

d’Agincourt et que Hetherington transcrit comme étant Serge IV, et certaines analogies

entraperçues entre le folio 136 et les ivoires de Paris et de l’Ermitage. Dans un contexte

marqué par une fascination pour Byzance, il est envisageable que le souverain pontife se

soit alors attaché les services d’artistes byzantins itinérants, ou alors d’artistes italiens

s’inspirant de modèles orientaux. Quoi qu’il en soit, la campagne n’avait pas dû toucher

au programme originel étant donné qu’aux regards des quelques témoignages

iconographiques relevés entre les ivoires et le folio 136, on peut penser que la troisième

peinture du registre inférieur pouvait encore présenter, après leurs interventions, une

Crucifixion. C’est alors sous le pontificat de Jean XXII (1245-1334), qu’aurait été

entreprise une restauration complète du programme. Pour ce faire, les artistes se seraient

basés sur des schémas iconographiques et des procédés formels qu’avait développés l’art

byzantin à partir du Xème siècle.

Dans un premier temps, les artistes auraient simplement repris les quatre

compartiments du registre supérieur en suivant les dessins originels. Puis dans un second

temps, ils seraient plus longuement intervenus sur les deux premiers compartiments du

registre inférieur en reprenant le même thème tout en modernisant l’iconographie. Enfin,

la Crucifixion et la Visite des saintes femmes au tombeau dont on peut vraisemblablement

imaginer la présence depuis l’époque carolingienne, auraient été transformées en Descente

de Croix et en Engelspietà154

afin d’insister sur le sacrifice du Sauveur et les moments qui

précèdent sa résurrection. Pour ce faire, il est alors probable que le concepteur du

154

Selon TABURET-DELAHAYE, ce thème relève d’une iconographie caractéristique de l’art français et

peut-être élaboré pour l’auteur sous Jean le Bon (1350-1364) ou Charles V (1364-1380). Voir TABURET-

DELAHAYE, Elisabeth., Paris 1400. Les arts sous Charles VI, catalogue de l’exposition, Paris, Louvre, 22

Mars 2004-12 Juillet 2004, Paris, 2004, p 180. Il convient de signaler que cette formule existait sans doute

depuis quelques années dans la basilique de Saint-Paul.

47

programme se soit basé sur certaines spéculations savantes des docteurs de l’époque ou

qu’il ait été tenté de répondre une fois de plus à des besoins cultuels155

.

b) La possible restauration de l’arcus maior

Afin de ne négliger aucune piste, il est important de se pencher sur un point

essentiel et pourtant mal exploré : celui de la réfection de l’arcus maior qu’aurait réalisé

Léon III pendant une énorme campagne de travaux à l’intérieur de la basilique. Cette

proposition a été formulée dans un premier temps par Eugène Muntz156

mais elle n’a pas

soulevé de commentaire et est restée en quelque sorte en suspens. Elle a pourtant son

importance car elle permet d’expliquer les différences entre la gravure de Ciampani et les

dessins du Codex Barberini.

Nous savons grâce au Liber que Léon III, aux alentours de 801157

, est largement

intervenu dans la basilique de la voie d’Ostie. Celle-ci, en partie détruite par un

tremblement de terre, a alors subi une énorme réfection. Il est possible, en suivant la

proposition de Müntz, qu’une restauration soit intervenue sur l’arcus maior de la basilique

même si aucune documentation ne vient entériner cette proposition.

Pour tenter d’y voir plus clair, il convient de se tourner vers un autre grand chantier

de Léon III, celui de l’arc absidal du second Triclinium appelé « Salle des conciles du

Latran ». Il a été construit dans un contexte particulier qui traduit les inquiétudes de

l’Eglise en matière dogmatique et christologique. Hans Belting a dans un premier temps

émis l’hypothèse que le programme de l’arcus maior de Saint-Paul aurait servi de modèle

aux mosaïstes de Léon III158

. Dans ce sens, Anne-Orange Poilpré remarque que la

présentation d’une Maiestas Domini en ligne ainsi que la disposition des Vieillards qui

tiennent une couronne verticale rappellent en effet la Maiestas Domini et la disposition des

Anciens de Saint-Paul-hors-les-murs. Elle conclut son commentaire en insistant sur le fait

que Léon III aurait voulu au Latran souligner la continuité de son église avec celle des

papes de l’époque paléochrétienne159

.

155

BELTING, 1998, pp 122-123. 156

MUNTZ, 1898, p 14. 157

VOGEL, Liber, 1981, Tome II, p 2 et 8. 158

BELTING, 1976, p 172-173. 159

POILPRE, 2003, p 292.

48

Un dessin de l’arc réalisé par Ugonio160

nous est conservé à la Bibliothèque

Vaticane dans le Cod.lat. 2160 au folio 157161

(Fig.19). On y aperçoit il est vrai au registre

supérieur le Christ en médaillon, avec de part et d’autres, les Vivants dont le taureau,

l’ange et le lion qui tiennent un livre alors que l’aigle n’en est pas pourvu. Dans le registre

inférieur, de chaque côté du cul de four de l’abside, se déploient les Vieillards présentant

une couronne. Au registre inférieur, Ugonio inclut dans son dessin deux autres assemblées

représentées à une échelle plus petite, faisant le geste de l’acclamation, qu’il nomme

« poveri ». Face à ces premières observations on ne peut que suivre l’idée générale d’une

dépendance du programme du Latran à l’égard de celui de Saint-Paul.

Malgré tout, s’il est en effet possible d’apercevoir des parallèles dans la

composition d’ensemble, le problème se pose d’une tout autre manière lorsqu’on observe

plus en détails les folios du Codex Barberini et le dessin d’Ugonio. A l’attitude

cérémonieuse de l’assemblée de Saint-Paul, répond au Latran une allure beaucoup plus

rigide. Les anciens ont le corps droit et les bras tendus pour présenter une couronne, alors

qu’à Saint-Paul ils sont légèrement penchés en avant et les bras sont à demi fléchis. Si la

disposition reprend le même schéma qu’à Saint-Paul, l’attitude est bien différente. De

plus, la distinction que nous avions remarquée plus haut entre les Vieillards voilés au-

dessus de Pierre et les Vieillards tête nue au-dessus de Paul ne se retrouve pas sur le dessin

d’Ugonio162

.

Déjà s’esquisse ici une légère variante entre la supposée dépendance du cycle du

Latran et le programme de la basilique, étant donné que les artistes de Léon semblent

suivre un schéma beaucoup plus proche de la création contemporaine, puisque l’on

retrouve la même formule iconographique pour les Vieillards de l’arc de l’église Sainte-

Praxède de Rome dont la décoration date des années 817-824 (Fig.20). Cette remarque a

son importance étant donné qu’elle nous renvoie immédiatement à la représentation du

Tétramorphe figuré dans la partie sommitale de l’arc. Yves Christe admet la présence d’un

livre près des Vivants au Latran, suivi par Anne-Orange Poilpré qui ajoute que comme

dans la basilique Saint-Paul, les Vivants du Latran apparaissent à mi-corps et tiennent un

codex163

. Ce qui n’est pas tout fait le cas, puisque comme nous l’avons observé, l’aigle de

160

Qui est plutôt un croquis permettant de proposer une reconstitution. Voir POILPRE, 2003, p 291. 161

CHRISTE, 1996, p 73. 162

Ibid, 1996, p 73. 163

POILPRE, 2003, p 291.

49

Jean n’en est pas pourvu au Latran alors qu’il est bien représenté sur le folio 140 du Codex

Barberini. En acceptant sur ce point qu’Ugonio transcrive mal cette partie de l’édifice, il

convient de garder une certaine distance face à la théorie selon laquelle le programme du

Latran se serait largement inspiré de celui de Saint-Paul. S’il est clair que les artistes

carolingiens ont repris certaines composantes générales qu’ils savaient issues de

l’Antiquité tardive, on peut néanmoins penser qu’ils ont puisé pour certains détails

iconographiques dans un répertoire beaucoup moins ancien, dont ils ne font que reprendre

la formule. Cette dernière objection soulève immédiatement la question de l’arcus maior :

Léon III a-t-il suivi à la lettre le programme paléochrétien ?

Grâce à une lettre du pape Adrien Ier (772-795) écrite à Charlemagne en 791, nous

savons que la mosaïque est sans doute encore en bon état de conservation et a gardé sa

composition d’origine :

« …sanctus Leo papa…in basilica beati Pauli apostoli, arcum ibidem maiorem

faciens, et musivo depingens salvatorem dominum nostrum Iesum Christum seu

viginti quatuor seniores nomini suo versibus decoravit 164 »

Nous avons relevé plus haut les différences entres les dessins de Ciampani et les

folio 139 et folio 140 du Codex Barberini, et relevé certaines différences entre ces derniers

et le folio 157 du Cod. Lat. 2160. Nous rappelons qu’Yves Christe n’est pas certain de la

présence des codices sur l’arc de Saint-Paul. En admettant que la gravure suive le

programme originel, il est alors possible que les croquis du Codex Barberini transcrivent

un cycle qui avait subi une réfection. Ce qui nous ramène à l’hypothèse de Müntz et à la

supposée restauration de l’arc sous Léon III.

Le sinistre qui a alors endommagé la basilique doit avoir été d’une grande ampleur

étant donné que le pape décide de faire réparer la charpente, le transept et les

collatéraux165

. On peut raisonnablement penser que son intervention ne s’est pas limitée à

la structure du bâtiment mais aussi à certains endroits du programme iconographique dont

l’arc en liaison avec le transept a dû lui aussi être abîmé. Bien évidemment, nous ne

savons rien à ce propos, mais on peut néanmoins émettre l’hypothèse que les autorités

ecclésiales auraient décidé de garder le schéma général de la composition en préservant la

Maiestas Domini accompagnée d’un cortège d’Anciens. Iconographiquement parlant,

164

BRUYNE, 1934, p 88 et CLAUSE, 1893, p 306. 165

Voir VOGEL, Liber, 1981, Tome II, pp 9, 10 et 13.

50

certains détails semblent plus révélateurs d’une éventuelle restauration. Les couronnes que

tiennent les Vieillards dans les relevés du Codex Barberini sont certes circulaires mais on

observe que le copiste a reconnu sur certaines d’entre elles la présence de pierres

précieuses. Ces éléments se retrouvent non seulement sur le relevé d’Ugonio mais

également sur la coupole de la chapelle Palatine d’Aix-la-Chapelle166

. Dans cette dernière,

un Christ occupe le centre de la composition. Assis sur son trône, il a les épaules couvertes

par un long manteau, et éleve sa main droite dans un geste de bénédiction. Derrière son

trône, apparaît le globe du monde rendu par cinq zones circulaires. A ses pieds, répartis

sur tout le pourtour de la coupole, les vingt-quatre Vieillards figurés à l’échelle humaine

se dressent de leur trône pour tendre au Christ leur couronne enrichie de gemmes (Fig.41).

Le problème reste cependant entier en ce qui concerne la présence de codex à côté

des évangélistes. On ne peut bien sûr admettre une simple intervention ponctuelle sur le

programme de l’arc. Si, toujours en suivant le fil conducteur de notre analyse, les relevés

du copiste présentent bien une iconographie légèrement transformée sous Léon III et si on

considère que le programme de l’arc absidial du Latran s’inscrit bien dans une relation

complexe alliant composition paléochrétienne et iconographie contemporaine, on peut

alors être amené à penser que les codices furent introduits sur l’arcus maior de Saint-Paul

à l’époque carolingienne ; peut-être après la catastrophe de 801 ?

2) Les interventions du XIIIème siècle

a) Réfection du programme de l’abside

Largement endommagée par l’incendie de 1823, l’iconographie qui se déploie

encore aujourd’hui sur le cul-de-four de l’abside de la basilique Saint-Paul-hors-les-murs,

est le résultat d’une restauration entreprise en 1836 qui a voulu reprendre les grandes

lignes iconographiques d’un décor précédent, lui-même restauré une première fois sous le

pontificat de Benoît XIV (1740-1758)167

.

La mosaïque d’origine fut sans doute élaborée et commencée sous le pontificat

d’Innocent III168

mais elle date pour l’essentiel d’Honorius III, même si elle fut sans doute

166

L’ancienne mosaïque ne nous est connue que par un dessin de Ciampani, puisque celle-ci a subi une

restauration de 1870 à 1873 par l’entreprise Salviati de Venise. 167

TOMEI, 1988, p 57. 168

Son initiative est documentée par les Gesta Innocentii (col CCVI), qui mentionnent un don de 117 onces

d’or pour la basilique de Saint-Paul. Voir KRAUTHEIMER, 1999, pp 544 et 600.

51

achevée après sa mort169

. Par une lettre écrite le 23 janvier 1218, nous savons que le pape

Honorius III remercie le doge de Venise Pietro Ziani de lui avoir envoyé un mosaïste et lui

demande l’aide de deux autres artistes pour réaliser le décor de l’abside de Saint-Paul :

« Tue nobilitatis litteras benigne recepimus (…). Ad hec nobilitati tue gratias

referentes de magistro, quem nobis misisti pro mosaico opere in beati Pauli

ecclesie faciendo. Rogamus devotionem tuam quia cum ipsum tante sit

magnitudinis quod per illum non posit extra longi temporis spatium consumari,

duos alios in iamdicti operas arte peritos nobis destinare procures, ut et nos

liberalitati tue grates reddere teneamur et tu per hoc specialiter desiderandum

ipsius gloriosissmi apostoli patrocianium assquaris (…)170 “

L’œuvre fut sans doute terminée par des Vénitiens peut-être formés par les ateliers

byzantins qui avaient travaillé à Saint-Marc de Venise171

. Elle présente au centre de la

composition un Christ Pantocrator avec un livre ouvert dans sa main gauche et qui

esquisse avec sa main droite un geste de bénédiction (ill.112). De part et d’autre du Christ,

sont figurés quatre personnages debout avec, dans une main, un parchemin ouvert alors

que l’autre désigne le Sauveur. Les inscriptions à côté des protagonistes ont permis

d’identifier, à la gauche du Christ, saint Pierre et saint André et à sa droite saint Paul et

l’évangéliste Luc. Posés sur une zone de terre fleurie peuplée de nombreux animaux, les

personnages sont encadrés par deux énormes palmiers (ill.113).

Dans le registre inférieur, on pouvait découvrir certains compagnons de Paul dont

les figures sont accompagnées d’une légende. A gauche Jacques, Thomas, Simon et sans

doute l’évangéliste Marc, et à droite, l’évangéliste Jean, Jacques le Mineur ou bien

Barnabé (ill.114). Au centre, entre les archanges Michel et Gabriel, se trouve représenté

l’Hétimasie, le trône couvert de pierres précieuses sur lequel est posé le livre des Ecritures

symbolise l’attente du Jugement Dernier et donc le retour du Christ sur la Terre à la fin

des temps. Le trône est surmonté d’une immense Croix latine ornée de pierres précieuses,

dont les bras s’évasent légèrement vers leur extrémité. Sur sa face, l’intersection des bras

est occupée par un médaillon où est représenté un Christ trônant. A côté, la lance, la

couronne d’épines, l’éponge et le calice dans lequel semblent posés les clous rappellent la

169

L’étude de l’abside a été reprise par TOMEI, 1988, pp 153-156. Avec un renvoi à la bibliographie

concernant ce sujet. 170

TOMEI, 1988, p 153-154. 171

LADNER, 1981, p 80.

52

Passion (ill.115). En contrebas apparaissent, à plus petite échelle, cinq personnages

debout tenant dans leur main gauche un rouleau fermé et dans la droite un rameau

d’olivier, ce qui permet d’affirmer que ce sont sans aucun doute des martyrs, dont les

restes ont du être conservés dans la basilique (ill.117). Martyrisés au nom du Christ, les

cinq saints attendent le prix de leurs combats et la promesse des Ecritures que représente

le Livre installé sur le trône.

Les inscriptions qui complètent le programme iconographique ont permis de

reconnaître le pape Honorius III vêtu d’une tunique blanche et prosterné à côté du pied

droit du Christ (ill.116). Quant aux personnages en-dessous de l’Hétimasie, à gauche, se

démarque le sacristain Adinolfo, et à droite l’abbé Giovanni Caetani (ill.117) qui

achevèrent la mosaïque après la mort d’Honorius en 1227, comme nous le commente cette

inscription située en-dessous du trône :

« Totius orbis honor quod Honorius artis honore/Papa prius fecit fulget fulgente

decore/Abbas post papam, quem Christus, ad alta vocavit,/Omne Ioannes opus

mira beata soavi172

»

Pour terminer, signalons que la restauration initiée par Innocent III à l’abside de

Saint-Pierre (Fig.5) prouvait que le pontife glorifiait sa propre personne et également toute

les institutions qu’il représentait. En effet, on remarque que le pape occupe une place tout

à fait particulière, proche de l’Agneau juché sur un monticule, donc du monde de

l’Incarnation et du sacrifice de l’Agneau de Dieu. Il semble tenir dans ses mains un

étendard où l’on peut lire Ecclesia Romana. Ici, Innocent III ne figure pas en tant que

simple donateur, il est au même titre que l’Eglise de Rome représenté sur la mosaïque de

l’autre côté de l’Agneau, le successeur des apôtres figurés au registre supérieur.

A l’inverse, à Saint-Paul, cette dimension politique semble avoir disparu ;

Honorius III est représenté à une échelle réduite, hors de la sphère céleste et aux pieds du

Christ, preuve sans doute qu’il se situe à ce moment comme un simple mortel et en simple

donateur173

.

Si Honorius III fait encore appel à des artistes byzantins pour effectuer le décor de

l’abside, c’est à un artiste romain, peintre et mosaïste que va être confiée plus tard la

restauration d’une grande partie du programme. Bien évidemment, nous savons qu’à cette

172

NICOLAI, 1815, p 28, planche VIII et PACE, 1991, pp 182-183. 173

LADNER, 1984, p 80.

53

période travaillent à Rome de nombreuses personnalités. Torriti exécuta entre 1290 et

1295 la voûte de l’abside de Sainte-Marie-Majeure alors que Filippo Rusuti, pratiquement

au même moment, entre 1292 et 1297, s’occupa des mosaïques de la partie supérieure de

la façade174

.

Cependant, c’est sur un autre artiste qu’il faut porter son attention ; un maître à qui

l’on devait les mosaïques de la vie de la Vierge dans l’abside de Sainte-Marie-du-

Transtévère, à savoir Pietro Cavallini. Retracer la carrière et l’évolution du style de

l’artiste a été un des éléments moteurs d’une grande partie de l’historiographie. Pour ce

faire, il a fallu se pencher sur l’un de ses plus grands chantiers, celui de Saint-Paul-hors-

les-murs.

b) La restauration des peintures de la nef

Son intervention sur les peintures et les mosaïques de la basilique nous est certifiée

par un passage de Ghiberti tiré de ses Commentarii qui indique:

« in santo Pagolo era di musaico la faccia dinanzi ; dentro nella chiesa tutte le

pariete delle nave de meço erano dipinte storie del testamento vecchio. Era dipinto

el capitolo tutto di sua mano egregiamente fatte175 »

Après avoir trouvé confirmation de son passage sur le chantier de Saint-Paul, il

convient d’essayer de déterminer à quel moment le maître est intervenu. Pour essayer de

résoudre cet épineux problème, les historiens se sont alors penchés sur les inscriptions

perceptibles sur différents folios du Codex Barberini. Cette étude épigraphique a permis

d’identifier les personnages votifs que l’on retrouve sur certaines compositions et de

proposer une chronologie relative des travaux sur le programme de la basilique.

Au folio 111, a été retrouvée l’inscription « VRSUS SACER ET MONACHUS »

avec sur la marge blanche de la feuille cette annotation : « PLETA EST PARS

ECCLESIE » (ill.78). Sur le folio 112 a été découverte cette légende : « RIBVS DOM

IHOIS SEXTVS ABBAS » avec une indication supplémentaire rajoutée par le copiste :

« riverdersi meglio : ma è monaco in ginocchioni » (ill. 79).

174

Sur l’intervention des deux artistes à Sainte-Marie-Majeure, voir utilement SAXER, 2001, pp 191-192. 175

Voir SCHLOSSER, 1912, p 39, PARRONCHI, 1994, p 15, WHITE, 1984, p 84.

54

Sur le folio 121, en bas de l’image, entre l’escalier et le personnage agenouillé a

été portée cette mention : « IHS LEVITA » (ill.88). Enfin, au folio 137 est indiqué

« ABBAS BARTHOLOMEVS176

» (ill.118).

Il est aujourd’hui certain que le personnage aux pieds de Paul au folio 110 est

l’abbé Jean VI, qui a été élu abbé en 1278 et qui décéda l’année d’après177

.

La formulation retrouvée au folio 111 a été décrypté en « (com) PLETA EST (haec)

PARS ECCLESI(a)E ». En tenant compte de la séquence narrative qui court dans cette

partie de l’édifice, il est clair que le folio 112 précède le folio 111, ce qui a permis de

proposer cette lecture :

“(In tempo)RIBVS DOM(ini) IOH(ann)IS SEXTVS ABBAS (com)PLETA EST(haec) PARS

ECCLESI(a)E”

Grâce à l’autre partie de l’inscription retrouvée au folio 111, transcrite en « VRSVS

SACER (dos) ET MONACHVS », on a proposé de dater l’intervention de l’artiste sous le

pontificat de Nicolas III (1277-1280) et cela malgré les quelques interrogations en suspens

pour ce qui concerne le MONACHVS.

Le problème est plus aigu pour le folio 121. On y retrouve « I (O) H (ANNES)

LEVITA178

». Certains ont proposé de reconnaître le pape Nicolas III au temps où il a été

cardinal de S. Nicola-in-Cancere. On se place donc ici avant l’accession de Nicolas III au

trône pontifical. D’autres voient plutôt « HAS (…) fecit PORTAS LEVITA Iohannes ». Ce

qui identifie ici Giovanni Gaetano Orsini avant son pontificat et explique qu’il est sur la

peinture en habit de moine. Enfin, certains supposent que le copiste, au moment du relevé,

a opéré une erreur et que nous sommes ici en face de Jean VI179

.

L’inscription du folio 137 a autorisé l’identification de l’abbé Barthélemy, abbé de

la basilique de 1282 à 1297, qui a entrepris de nombreuses restaurations dans la basilique

et commandé en 1285 un nouveau ciborium à Arnolfo di Cambio pour abriter l’autel de la

Confession180

où l’on a porté cette inscription :

176

Voir HETHERINGTON, 1979, p 86, TOMEI se trompe puisqu’il indique le folio 135, TOMEI, 2000, p

136. 177

WHITE, 1984, p 86, HETHERINGTON, 1979, p 86, TOMEI, 2000, p 136. 178

WILPERT, 1917, p 622 et WAETZOLDT, 1964, p 60. 179

Voir sur ce point TOMEI, 2000, p 137. 180

Pour une description précise voir MOSKOWITZ, 1998, pp 88-103. Pour l’intervention d’Anorlfo di

Cambio à Saint-Paul-hors-les-murs et sur sa carrière romaine, voir GARDNER, Julian., The Tomb and the

Tiara, Oxford, 1992, p 43 et 50 et spécialement pp 95-109.

55

« ANNO MILLENO CENTUM BIS ET OCTAVEGO/QVINTO…/ HOC FECIT

ARNULPHUS CUM SUO SOCIO PETRO181

»

Pour conclure, la confrontation de ces différentes données nous apprend que la

campagne de restauration des peintures de la nef, et tout particulièrement celles du cycle

du Nouveau Testament, a été entreprise pendant la brève carrière de Jean VI et sous le

pontificat de Nicolas III avec peut-être le concours d’un autre membre de la famille Orsini

comme en témoigne l’inscription « VRSVS SACER(dos) et MONACHV(s) ». Pour

Gardner, il ne fait aucun doute que le pape Nicolas III a largement participé au

financement des travaux182

. Il est vrai que la réfection des basiliques paléochrétiennes est

au centre de sa politique, comme en témoigne la mention de Ptolémée de Lucques qui

décrit les charges du pape dans ses nombreuses campagnes :

« Hic ecclesiam beati Petri quasi totam renovavit et numerun summorun

pontificium fecit describi secundum imagines in ecclesia Beati Petri in loco

eminenti et Beati Pauli ac Sancti Ioannis in laterano183 »

Après cette première campagne, il semble qu’une seconde fut entreprise sous

l’abbé Barthélemy, qui s’est lui aussi investi dans un programme de rénovation de la

basilique. C’est donc en deux temps que se sont réalisés les travaux de restauration sur les

murs latéraux de la nef de Saint-Paul : une première phase, dont le projet remonte à 1270

mais qui commença en 1277 pour se poursuivre jusqu’en 1279, date de la mort de Jean VI,

et qui fut peut-être terminée par un de ses successeurs ; puis une seconde phase, dont la

fourchette peut se situer entre le début de l’abbatiat de Barthélemy en 1282 et la date de

dédicace du ciborium d’Arnolfo di Cambio en 1285184

.

Après avoir levé le voile sur la chronologie et les protagonistes des restaurations du

programme de la basilique, les chercheurs ont essayé de comprendre à quel moment

Cavallini est intervenu sur le cycle vétéro- et néotestamentaire, non sans rechercher les

scènes qu’il ne fit que restaurer, ou bien celles que l’artiste remplaça par des compositions

de son crû. L’étude des copies du XVIIème siècle a permis de suivre l’évolution de

l’artiste aussi bien dans sa manière de traiter la disposition des personnages que dans les

progrès qu’il a réalisé quant aux styles architecturaux.

181

KRAUTHEIMER, 1977, p 100. 182

GARDNER, 1971, p 246. 183

Ibid, 1971, p 240. 184

BEAUSCEANUS, 1925, p 263, HETHERINGTON, 1979, p 94, WHITE, 1984, p 85.

56

White a remarqué que dans certaines aquarelles du Nouveau Testament, certains

personnages sont confinés dans un espace peu profond ne permettant qu’une perspective

tridimensionnelle limitée. Au folio 103 par exemple (ill.70) : à droite, trois personnages

forment le premier groupe et les deux autres à gauche sont seulement séparés par le

changement de plan. Au contraire, dans la scène où Paul est mordu par un serpent (ill.94),

le saint est représenté devant trois personnages assis sur une pierre et rangés en diagonale,

ce qui engendre un effet de profondeur. Cela s’avère plus ambitieux au folio 99 puisque la

façon dont le saint semble prosterné ne suit pas exactement le plan (ill. 66). A cela, les

deux figures à la gauche de Paul sont comme au folio 127 rangées en diagonale marquant

également un effet de profondeur (ill.94). Le second plan est cette fois, enfin, déterminé,

puisque deux personnages sont placés à droite du bâtiment. La scène la plus réussie est,

selon White, l’image qui commente la Prédication de saint Paul à Jérusalem (ill.68). Une

bonne vingtaine de personnages déterminent une sorte d’élan demi-circulaire dans

l’espace et entourent le saint qui occupe le centre de la composition. La disposition des

figures est accompagnée par d’importantes variations dans la profondeur et la relation

entre les figures et l’architecture est plus claire. Toutefois, sur le mur opposé, dans La

Plaie des Serpents (ill.46), les personnages sont en liaison avec l’architecture. L’artiste

semble vouloir attirer l’attention sur le premier plan où sont représentés les serpents.

En plus du traitement des figures dans l’espace, intervient également une évolution

dans le traitement des styles architecturaux. Si certains bâtiments se sont largement basés

sur ceux de l’Antiquité, comme en témoigne la scène de Joseph en Prison (ill.40), ou celle

du folio 112 (ill.79) que White rapproche de certaines mosaïques de Pompeï185

, dans

d’autres cas, Cavallini utilise des constructions frontales simples où il ne montre qu’un

seul côté sans aucune déformation comme au folio 112, ou complexe comme dans la

peinture de saint Paul en prison (ill.85). Dans d’autres scènes, il utilise des constructions

frontales en raccourci, isolées comme au folio 42 (ill.35) ou bien couplées dans La Plaie

des sauterelles, mais dont on a du mal à comprendre les articulations (ill.52). Si sa

maîtrise commence à s’affirmer dans l’image de La Révélation de Saül186

(ill.58), c’est

tout particulièrement dans les scènes de l’Ancien Testament que les progrès sont les plus

nets comme en témoigne le trône de Pharaon au folio 54 (ill.47).

185

WHITE, 1984, p 87. 186

WHITE, 1992, p 42.

57

La scène la plus étonnante est celle qui représente Joseph et la femme de Putiphar

(ill.39). L’échelle qui est différente des autres peintures de l’Ancien Testament et que l’on

avait déjà aperçu au folio 91 (ill.58), est ici une construction oblique extrême. Un

bâtiment isolé dont on ne peut voir que l’intérieur occupe une grande partie de l’espace.

On le voit, Cavallini s’intéresse cette fois aussi bien à des vues extérieures qu’à des scènes

se déroulant dans un espace clos187

.

L’examen des copies de la Vie de saint Paul et des scènes de l’Ancien Testament

nous amène à plusieurs axes de réflexions. Tout d’abord, on peut supposer que Cavallini a

sans doute travaillé lors de la première campagne sur le mur gauche de la basilique, ce qui

induit que c’est dans un second temps que le cycle de l’Ancien Testament a été effectué188

.

De plus, il apparaît clairement, face aux changements stylistiques et quelquefois

iconographiques, que Cavallini fut sans doute influencé par des fragments du programme

paléochrétien189

. On peut même dans certains cas affirmer que l’artiste s’est arrangé pour

ne pas trop bouleverser le schéma déjà existant, comme nous le prouve la disposition des

personnages votifs sur quelques scènes du Nouveau Testament. Les spécialistes ont depuis

longtemps soulevé le caractère fondamental de la rencontre de l’artiste romain avec le

cycle tardo-antique de Saint-Paul-hors-les-murs190

. Il est vrai que dans la scène de la

Nativité à Sainte-Marie-du-Transtévère, on retrouve dans le personnage qui joue de la

flûte un emprunt direct à des scènes pastorales issues de l’Antiquité tardive191

. Pourtant, ce

type de motifs était rentré depuis longtemps dans le répertoire byzantin, qui avait connu un

regain d’intérêt à la fin du XIIIème siècle. Il n’a alors fallu qu’un pas pour proposer que

Cavallini s’est plutôt fondé sur des carnets de modèles orientaux192

.

Cette hypothèse renvoie immédiatement aux scènes du Nouveau Testament dont

certaines laissent apercevoir une iconographie de souche grecque. Afin de déterminer la

source sur laquelle auraient travaillé plusieurs artistes de la fin du XIIIème siècle, les

187

WHITE, 1992, p 43. 188

Ibid, 1992, p 40. 189

WHITE, 1984, p 89. 190

Voir notamment les travaux d’Ulrike Koenen sur la Croix de Constantin. Elle propose une restitution de la

disposition originelle des différentes scènes qui ornaient la Croix. Mais surtout elle suppose que cette

iconographie est l’aboutissement de la réception d’une tradition paléochrétienne ; réception visible dans une

quinzaine d’églises de Rome et de ses environs du XIIème siècle au XIIIème siècle. Sur l’influence de Saint-

Paul sur la peinture monumentale : Voir KOENEN, 1995, pp 126-155. 191

VITALIANO, 1996, pp 123-179 et surtout pp 131-146. 192

Sur l’influence de modèles byzantins sur l’œuvre de Cavallini : Voir KESSLER, 1965, pp 112-115, et

GEAHDE, 1971, pp 359-400 et surtout p 390. Pour comprendre l’influence des manuscrits sur la peinture

monumentale de cette période. Voir WEITZMANN, 1971, pp 48-49.

58

regards se sont portés sur les trois manuscrits dans lesquels sont illustrés le Nouveau

Testament : le Vat. Lat.39, le Chigi A. IV. 74 et le Codex Giustiniani qui selon Eleen date

de 1200. Weitzmann a remarqué qu’il existe des manuscrits très illustrés fondés sur les

Actes des Apôtres193

. Eleen a largement démontré que les trois manuscrits ne dépendent

pas les uns et des autres mais qu’ils ont tous copié un quatrième manuscrit, sans doute

originaire de Vérone, et qui a été réalisé entre le début et le milieu du XIIIème siècle.

Outre cela, nous savons que le Rotulus de Verceil qui date du début du XIIIème siècle

déploie des schémas tirés des actes canoniques, exécutés en prévision de la restauration

des peintures autrefois dans la nef de San Eusebio de Verceil. Malgré quelques variations,

il est aujourd’hui admis que le Rotulus doit se situer dans le groupe de Vérone. Dans la

scène de La Révélation de Paul, Eleen a remarqué que le saint était en position de

proskynèse et a, pour corroborer cette proposition, confronté cette position avec le folio

126 v° du MS 1186 conservé au monastère Sainte-Catherine (Fig.21). Le saint entretient à

peu près la même posture que sur le ms. Vat.Lat. 39 et sur le Codex Giustiniani.

Les analogies perceptibles avec les mosaïques de la chapelle Palatine de Palerme

en Sicile194

, et en tout premier lieu avec la scène de La Révélation de Saül ont permis à

Eleen de conclure que certaines scènes du Nouveau Testament de Saint-Paul-hors-les-

murs se groupent dans une famille italo-byzantine dont les sources peuvent venir d’un

ancien manuscrit enluminé des Actes qui doit s’inscrire dans le même schéma que certains

manuscrits véronais195

.

La confrontation de l’artiste avec des courants artistiques antiques et sans doute

avec des modèles d’Italie du Nord, qu’il décide parfois d’assimiler et tantôt de rejeter, font

de Cavallini un des chefs de file de l’art romain du XIIIème siècle. Doit-on pour autant

voir une influence réciproque entre Cimabue et Cavallini ou entre Cavallini et Giotto ?

Cavallini a-t-il exercé une influence sur Torriti196

?

Au cours de ces dernières décennies, les historiens de l’art ont apporté certaines

solutions convaincantes à ces importantes questions. Il n’y a plus de doute qu’il existe des

différences stylistiques entre Torriti, Cavallini et Rusuti, mais aussi entre leurs ateliers.

193

WEITZMANN, The miniatures of the sacra Parallela, Parisinus Graecus 923, Princeton, 1979, pp 191-

193. 194

Voir sur ce point DEMUS, 1949, p 298 et les conclusions de GARRISSON, 1993, p 205. 195

ELEEN, 1982, p 32. 196

Voir les remarques pertinentes de Koenen, avec renvoi à une bibliographie sélective sur ce sujet.

KOENEN, 1995, p 151.

59

C’est sur ce point que se concentre l’historiographie actuelle. Pour ce faire, celle-ci essaye

de distinguer dans l’œuvre de Cavallini ce qui est de sa propre main de ce qui revient à ses

élèves et pourquoi pas à ses successeurs ; ces recherches tentant d’ailleurs, ces derniers

temps, de retrouver l’identité des artistes de grande qualité restés jusqu’ici anonymes.

Le Christ en buste dans la Création de l’Univers (ill.16), qui se retrouve pourvu

d’un nimbe triangulaire au folio 31 figurant L’Offrande de Caïn et Abel, traduit pour

certains la main de Cavallini197

(ill.24). White a fortuitement soulevé le problème de

l’atelier. Hetherington, pour sa part, a proposé que l’artiste romain se soit tout d’abord

formé dans l’ombre d’un artiste auquel la commission papale a commandé la réfection

d’une partie du cycle de Saint-Paul, sans pour autant abandonner l’idée de l’intervention

d’élèves sur le cycle de l’Ancien Testament198

. C’est aux historiens de l’art italiens que

l’on doit les études les plus significatives sur ce sujet, en soulevant de nouveaux axes de

réflexions sur les artistes qui ont travaillé à Saint-Paul-hors-les-murs.

c) Le problème de l’atelier

L’iconographie qui a orné la façade de la basilique est connue par un dessin du

XVIIème siècle et des gravures du XVIIIème et du XIXème siècle. L’observation générale

du dessin du XVIIème (ill.119) laisse transparaître de larges pertes qui ont disparu sur la

gravure de Nicolai (ill.120), ce qui indique une restauration entre ces périodes que l’on

peut vraisemblablement situer en 1720, au moment où a été menée une campagne de

travaux dans l’abside199

. Il reste à envisager la date d’élaboration du programme que l’on

peut deviner sur le dessin du XVIIème siècle.

C’est par l’analyse du relevé du Vat. Lat 5507 (ill.121) que notre connaissance de

la campagne de réalisation du cycle a largement évolué. Sur le dessin, on trouve un

personnage à genoux, la tête coiffée d’une tiare, pourvu d’une longue robe ecclésiale, avec

cette inscription du copiste :

« IOANNES XII PP EX opere musivo seu vermiculato, quod ipsius iussu factum

supra porticum basilicae S. PAULI quam ipse renovavit collabentum et ornavit200

».

197

HETHERINGTON, 1979, p 94. 198

Dont la restauration semble avoir commencé avec l’abbé Barthélemy en 1282. La commande du ciborium

en 1285 marque son achèvement dans la seconde partie de cette décade. 199

HETHERINGTON, 1979, p 107. 200

Vat. Lat. 55O7, p 118. WAETZOLDT,1964, p 55, Kat. 577, Abb 317.

60

Il est alors tout à fait probable que le programme a été élaboré sous le pontificat de

Jean XXII (1316-1334). Plus particulièrement, nous savons qu’après la nomination de

l’abbé Grégoire en 1322 fut entreprise une remise à neuf de la basilique. Les sources

textuelles nous apprennent que le souverain pontife avait en septembre 1323 offert mille

florins pour restaurer l’édifice :

« reparationi fabricae monasterii Sancti Pauli201 »

Outre cela, le pape demande à l’abbé Grégoire qu’une mosaïque soit placée sur la

façade :

« opus Mosaicum sit inceptum202 »

Face à cela certains chercheurs ont formulé l’hypothèse que le chantier aurait

commencé en 1325 et se serait terminé aux alentours de 1330 alors que pour d’autres, le

cycle aurait été terminé dès 1325203

. Cependant, ils ont laissé de côté quelques

informations d’importance. En 1332, Philippe de Camberhalc rapporte que la basilique

était dans un état de dégradation importante :

« …inter et extra collapsum et desolatum…et iam ruinosam204 ».

L’édifice a été sinistré par un tremblement de terre en septembre 1349 et donc de

nouveau restauré jusqu’en dans les années 1360, comme nous le prouvent les armes de

Clément VI présentes sur la façade205

(ill.120).

Le programme est divisé en deux grandes zones. Dans la partie supérieure, juste

au-dessus de la fenêtre centrale est figuré un Christ en buste dans un médaillon (ill.7).

Présenté de face, le visage barbu et pourvu d’un nimbe crucifère, il lève sa main droite, la

paume ouverte vers le spectateur, alors que la gauche tient un livre ouvert. L’imago

cliptea est soutenue par six anges tous représentés la tête nimbée et le regard dirigé vers le

Christ. De chaque côté est illustré le Tétramorphe avec le taureau et l’ange de Matthieu à

la droite du Christ, l’aigle et le lion à sa gauche ; tous pourvus de quatre ailes, d’un nimbe

et d’un codex.

201

HETHERINGTON, 1979, p 109. 202

Ibid, 1979, p 109. 203

BOTTI, MANACORDA, 1999, p 501. 204

HETHERINGTON, 1979, p 114. 205

Voir GALBREATH, 1983, pp 23 et 77.

61

Au registre inférieur se trouve à gauche saint Paul, qui semble assis sur un trône

dans le dessin du XVIIème siècle, alors qu’il est debout sur la gravure de Nicolai. La tête,

qui a disparu sur le relevé d’Edimbourg, a dû reprendre certains traits caractéristiques du

saint : mèches de cheveux sur les côtés au-dessus des oreilles, tempes dégarnies, avec un

toupet de cheveux central ramené en avant au milieu du front206

. Pourvu d’un nimbe, il

tient dans ses mains un livre et une épée. La figure suivante montre une Vierge à l’enfant

en majesté. Marie est assise sur un trône richement sculpté soutenu par deux anges. Elle

est sur le dessin d’Edimbourg présentée de face, avec le visage couvert d’un long voile et

pourvue d’une couronne. Sur ses genoux, est figuré l’enfant au nimbe crucifère.

Après la fenêtre se trouve saint Jean l’Evangéliste encadré par deux palmiers. Le

saint est là aussi représenté de face, la tête nimbée et tournée vers la droite. Il semble tenir

dans sa main gauche un objet difficilement identifiable sur le dessin du XVIIème siècle

mais que Nicolai transcrit comme étant un globe. A l’extrême droite est figuré saint Pierre

qui reprend les mêmes caractéristiques que saint Paul, sauf qu’il semble debout et tient

dans ses mains une immense clef. Toutes ces figures ont, au-dessus d’elles, des

inscriptions qui ont permis d’entériner leur identification. Pour Paul on trouve cette

mention :

« S PAVLVS VAS ELECTIONIS ET DOCTOR GENTINVM »

alors que pour la Vierge est marqué :

« REGINA COELI MARIA MATER DOMINI »

Pour saint Jean est transcrit :

« S IOHANNES BAPTISTA PRECUSOR DOMINI »

Enfin pour Pierre se trouve noté :

« S PETRUS PASTOR OVIVM ET PRINCEPS APOSTOLORUM207 »

L’ensemble du programme est décoré par des bandes ornées des tiares papales ou

bien par des têtes de chérubins et des blasons. Iconographiquement parlant, certains détails

renvoient à des formulations acquises depuis longtemps. Citons par exemple la

représentation de Paul pourvu d’une épée, qui a été introduite vers le milieu du XIIème

siècle sur un tympan du transept de la cathédrale de Maguelone en Languedoc (Fig.22),

206

ELEEN, 1985, pp 2-3. 207

Pour ces transcriptions voir HETHERINGTON, 1979, pp 112-113.

62

pour être reprise à la fin du siècle ou bien au début du XIIIème siècle sur certaines

enluminures comme au folio 1 v du ms. Lat. 12004 de la BNF208

(Fig.23). Cette mutation

de l’iconographie a un double but. Tout d’abord, renvoyer au martyre du saint qui a été

décapité et ensuite insister sur l’illustration d’un personnage qui est considéré comme

l’incarnation du militant aux qualités chevaleresques. Enfin, et malgré le mauvais état de

la mosaïque au XVIIème siècle, la position des jambes de Paul laisse à penser que le saint

était représenté assis. Afin de reconstituer sa position, on peut s’imaginer que celui-ci a du

être représenté de la même manière que sur la peinture du Jugement Dernier au revers de

façade de Sainte-Cécile peinte par Cavallini où il siège à côté de la Vierge (Fig.24).

En ce qui concerne saint Jean-Baptiste, la gravure de Nicolai laisse clairement

transparaître qu’il porte un globe crucifère alors que le dessin du XVIIème siècle nous

montre le saint pourvu de l’Agneau crucifère posé sur un disque. Cet attribut était déjà

présent depuis une longue période puisqu’on le retrouve sur la chaire de Maximien de

Ravenne qui date du VIème siècle (Fig.25). D’autres part, il est vêtu du manteau du

philosophe sur la chaire ; mode d’habillement que l’on retrouve sur la figure de la façade

de Saint-Paul.

L’aspect général du programme est là aussi pour le moins singulier, étant donné

que se trouvent combinées à la fois une Maiestas Domini en ligne et une Deesis. Pour

cette dernière, on ne peut qu’être frappé par sa figuration. Dans cette image trimorphe,

dont l’iconographie se révèle d’ascendance byzantine, on trouve généralement la mère de

Dieu et saint Jean-Baptiste en prière autour d’un Christ souvent trônant. C’est le cas sur le

Triptyque dit Triptyque Harbaville où, à l’intérieur, dans la partie centrale, est figuré le

Christ sur un trône avec à sa droite la Vierge et sa gauche saint Jean-Baptiste ; l’ensemble

étant surmonté du buste de deux archanges (Fig.26). Nous connaissons toute la portée de

ce thème par lequel on a demandé l’intercession de la Vierge et du saint pour son bien-

être sur terre et le salut des âmes209

. Pourtant, il semble bien qu’à Saint-Paul la

représentation de la Vierge donne priorité à la Mère de Dieu. Le Christ n’est pas trônant

puisque c’est le médaillon d’un vainqueur que les anges semblent monter au ciel. En fait,

seul saint Jean-Baptiste reprend une attitude conventionnelle dans la Deesis.

208

C’est aussi à cette période que sont illustrés conjointement Pierre et Paul avec leur attribut respectif.

C'est-à-dire pour Paul l’épée et pour Pierre la clef. Voir ELEEN, 1982, pp 38-39. 209

GRABAR, 1979, p 153.

63

La restauration du XVIIIème siècle et la mauvaise conservation des mosaïques au

XVIIème siècle, ont rendu presque impossible toute confrontation stylistique avec des

programmes contemporains.

C’est pourquoi la littérature a depuis longtemps accepté l’idée qu’étant donné que,

dans la seconde moitié du XIIIème siècle, Jacopo Torriti travaillait aux mosaïques de la

façade du Latran, il est alors possible que Cavallini soit intervenu sur la façade de Saint-

Paul.

Pour ce faire, certains ont vu dans le modelé des robes la même main que sur la

Vierge trônant ou sur la scène de l’Annonciation de Sainte-Marie-du-Transtévère où les

corps sont tout aussi charnus, drapés dans des étoffes pesantes et souples. Gardner a

d’abord privilégié la piste d’un artiste de Venise étant donné que l’iconographie renvoie à

des modèles courants depuis longtemps à Byzance210

pour finalement opter pour un artiste

romain arrivé à sa maturité, et que Hetherington identifie comme étant bien Cavallini211

.

Plus récemment, Serena Romano est revenue sur l’attribution de cette œuvre, pour

la donner à un certain Lello da Orvieto. Après la déposition de Boniface VIII en 1303

consécutive à sa défaite contre la France et les Colonna, il est fort possible, face à la baisse

croissante des commandes, que Cavallini se soit réfugié à la cour angevine de Naples aux

alentours de 1308. C’est lui, avec l’aide de collaborateurs, dont Lello da Orvieto, qui a

travaillé à l’église de Santa-Maria-Donnaregina212

. Nous savons que ce même Lello a

abandonné Naples en 1325 pour venir travailler à Rome, où son intervention est attestée

sur le cycle dédié à saint Benoît dans l’église Sainte-Agnès-hors-les-murs213

. Alors,

Serena Romano voit dans la Vierge à l’enfant qui ornait jadis la façade (ill.122), et

aujourd’hui placée sur l’arc absidal, et celle peinte par l’artiste à l’abbaye de Fassanova

(Fig.27), des liens stylistiques qui peuvent dénoter l’intervention de l’artiste dans le

programme de Saint-Paul214

. Enfin, pour Tomei, si l’intervention de Lello est bien

attestée, il remarque encore de nombreuses similitudes avec l’art de Cavallini ce qui, pour

210

GARDNER, 1973, p 588. 211

HETHERINGTON, 1979, pp112-113. 212

Pour l’étude du travail de Cavallini à Naples voir TOMEI, 2000, pp 121-133. 213

ROMANO, 1992, pp 170-174. 214

Ibid, 1992, p 114.

64

lui, est une preuve supplémentaire des liens importants qui ont dû exister entre l’artiste et

son atelier215

.

Ces interrogations essentielles peuvent également se transposer sur d’autres parties

du programme. Pendant la première campagne des travaux, sous le pontificat de Nicolas

III, à la première série paléochrétienne qui sans doute avait été restaurée et complété au

VIIè et au IXè siècle216

, a été ajoutée dans les écoinçons des arcades une nouvelle galerie

de portraits allant de Pierre à Boniface Ier217

. Seul quatre portraits ont survécu au sinistre

de 1823, dont un est conservé dans le musée de la basilique. Il s’agit des papes Sixte Ier

(v. 117-127), Télesphore (v. 117-137), Hygin (v. 137-140) et Anaclet (v.154-166)

(ill.123).

Il ne fait aucun doute que cette deuxième série s’inspire de la galerie

paléochrétienne située au-dessus de l’arcature puisque les portraits sont insérés dans un

médaillon d’où ne transparaît que le buste du pontife.

D’une forme plus ou moins ovale, et de dimension plus petite que les médaillons

paléochrétiens, on retrouve les papes habillés du pallium représentés de face, le visage

barbu et pourvus d’une tonsure dont la tête, à la différence de la série antique, est pourvue

d’un nimbe. Ces portraits ont bien évidemment beaucoup apporté à la connaissance du

travail de l’artiste. Quant à la mise en œuvre, il a dû entre autres tracer à la pointe dure le

dessin préparatoire de la tête puis il a repassé sur cette ligne avec une couleur rouge. Pour

le nimbe, on remarque que dans la partie basse celui-ci se fond avec l’arrière plan du

portrait alors que dans la partie haute il déborde d’un demi centimètre en avant.

Indépendamment de cela, par l’emploi des tons, on observe une bonne connaissance des

jeux d’ombres et de lumières et une volonté d’un rendu réaliste du personnage218

.

Là aussi, l’attribution de ces portraits a été largement discutée. Certains les ont

donnés sans équivoque à Cavallini tout en y incluant une influence d’Arnolfo di Cambio

qui a travaillé au même moment sur le ciborium219

. D’autres pensent être face à des

215

TOMEI, 2000, p142. 216

LADNER, 1984, p 41. 217

Nicolas III fit également peindre à Saint-Pierre, au-dessus de chaque colonne de la nef, une galerie de

portraits (des croquis en sont conservés dans le Cod.Barb.Lat. 2733) qui commençait là aussi au début de la

papauté. Il est admis que ce schéma fut reproduit au Latran mais les portraits ont du disparaître pendant

l’incendie de 1308. Enfin, on pense que Cavallini aurait peint une quatrième série pour Sainte-Cécile, sur le

modèle de Saint-Paul. Voir KRAUTHEIMER, 1999, p 590. 218

BRUYNE, 1934, pp 168-169. 219

Ibid, 1934, p 165.

65

peintures réalisées par Cimabue qui est arrivé à Rome en 1272 et qui a dû collaborer à la

galerie de portraits220

. Enfin, les dernières restaurations entreprises sur le portrait

d’Anaclet ont permis de dégager un style byzantinisant, fort loin de la manière de

Cavallini221

.

Dans sa monographie sur Cavallini, Tomei est revenu lui aussi sur les peintures

néotestamentaires. Pour lui, si Ghiberti mentionne bien l’intervention de Cavallini sur le

cycle de l’Ancien Testament, il est moins certain que le maître ait travaillé sur le mur

septentrional. Pour ce faire, il publie une lettre de l’abbé Giuseppe Giustino, conservée à

la Bibliothèque Vaticane au folio 45 r du Vat.Lat. 9672, qui nous apprend :

« In tutta la vasta estensione del muro meridionale della gran nave di mezzo, dal

principio di esso, sino alla scrostatura, che ancora si vede per apporvi un nuovo

stabilimento, veggonsi dipinti vari fatti dell’antico testamento, attribuiti al

Cavallini, il quale essendo giunto co’suoi pennelli fino a questo luogo, cesso di

vivere, e fu sepolto in questa Basilica. Le altre, caratterizzate di gusto greco

dall’intelligentissimo P. Costanzo, presentano al septentrione fatti del nuovo, e

specialmente degli apostoli 222»

Ce qui permet à Tomei de soulever de nouveaux problèmes : peut-on alors

envisager que ce soit un autre maître qui ait travaillé au cycle néotestamentaire ? Peut-on

soulever l’hypothèse que le cycle vétérotestamentaire soit alors plus classique que le

Nouveau ? Malheureusement, Tomei n’étend pas le débat à d’autres questions essentielles.

Qui est ce P. Costanzo ? Est-ce le maître qu’a reconnu Hetherington et avec lequel aurait

peut-être collaboré Cavallini ? Ou alors sommes nous en face d’un élève qui a peint sous

la direction du maître, sur le cycle du Nouveau Testament, et pourquoi pas sur la seconde

galerie des portraits des papes ?

Il ne fait aucun doute que sur ce point le débat ne fait que commencer. On ne peut

bien évidemment pas écarter l’intervention d’un élève à côté du maître. On le sait,

Cavallini était le mosaïste et le fresquiste le plus demandé à Rome dans le dernier quart du

220

KRAUTHEIMER, 1999, p 552. 221

ROMANO, 1989, pp 211-218. 222

TOMEI, 2000, p 142.

66

XIIIème siècle223

. La multiplication des commandes a sans aucun doute décidé l’artiste à

s’entourer d’un vaste atelier. Certains s’accordent à penser que Cavallini a collaboré avec

ses élèves ou assistants dans les huit effigies placées entre les fenêtres du revers de façade

de Saint-Pierre où l’on peut découvrir saints Pierre et Paul accompagnés d’apôtres et de

quatre évangélistes224

. On peut de la même manière imaginer qu’il fit de même à Saint-

Paul. Doit-on pour autant écarter l’idée selon laquelle ce serait des artistes indépendants

qui auraient travaillé dans la basilique ?

Dans les années 1290, c’est un artiste proche de Torriti, de Cavallini et de Giotto,

mais ayant sa propre personnalité, qui exécuta pour la loggia supérieure de l’abbaye des

Trois-Fontaines un programme comprenant des scènes profanes et l’histoire de

Barlaam225

. Peut-être est-ce l’un d’entre eux qui a œuvré à la façade et au revers de façade

de Saint-Paul-hors-les-murs ?

Au terme de ce parcours sur nos connaissances actuelles du programme

iconographique de Saint-Paul, il s’avère que le cycle a pour le moins été largement

transformé au fil des siècles. En dernier lieu, nous savons que les peintures de la nef

centrale ont été de nouveau restaurées sur ordre de Benoît XIV (1740-1758) sous la

direction du peintre Salvatore Monosilio226

. C’est sans doute à cette période que l’on a

orné les scènes bibliques d’un fond bleu avec une base rouge sur laquelle a été inscrit un

titre en blanc afin de les rendre visibles du sol. Cela engendrant, comme le signale

Gardner, un contraste très net entre la mosaïque de l’abside, celle de l’arc227

et le reste du

programme228

.

La présentation des interventions sur le programme de Saint-Paul s’évalue, comme

nous venons de le voir, dans le cadre d’une documentation dont l’ampleur découle des

aléas de l’histoire. C’est pourtant sur le cycle primitif qu’il convient de se reporter

223

On lui doit par exemple la nef de Saint-Chrysogone. Ghiberti mentionne son travail à Saint-Pierre. Il

participe aux travaux sur le revers de façade de Sainte-Cécile. A la demande du cardinal-diacre Pietro

Peregrosso, il exécuta le Christ flanqué de trois saints et de la Vierge Marie sur la voûte de Saint-Georges-

au-Vélabre. 224

Voir MATTHIAE, 1972, pp 121-123, HETHERINGTON, 1979, p 122, KRAUTHEIMER, 1999, p 556,

TRONZO, 2001, p 465. 225

Voir utilement la monographie de MULLAZANI, Germano., L’abbazia delle Tre Fontane, Milan, 1988,

p 264. 226

TOMEI, 1988, p 57. 227

Restaurée sous Clément XI (1730-1740). Voir sur ce point WILPERT, 1917, p 517, WARLAND, 1986, p

41, TRONZO, 2001, p 472 note 31. 228

GARDNER, 1999, pp 245-254 et particulièrement pp 251-254.

67

maintenant. Car, force est de constater que sur ce point, les résultats d’un siècle de

recherche sont encore fragilisés par de nombreuses incertitudes.

68

TROISIEME PARTIE

NOUVELLES HYPOTHESES DE TRAVAIL

69

Chapitre Premier

Retour sur le programme paléochrétien

1) Une restitution délicate

a) Nouvelles propositions d’identification de scènes

Sur l’intégralité du programme qui orne la basilique, c’est tout particulièrement

dans les peintures à thème biblique que l’on trouve encore de nombreux points

d’interrogation quant à leur identification. Si certains ne peuvent être résolus, comme

l’image du folio 111, d’autres méritent qu’on s’y arrête. En tout premier lieu, c’est à la fin

de l’histoire de l’Exode que sont représentées deux scènes illustrant la Mise à mort des

premiers nés d’Egypte (ill.47 et 53). Dans ces deux dessins très proches on retrouve deux

anges dont les flèches frappent deux personnages allongés qui symbolisent l’ensemble des

nouveaux nés. Il ne fait plus de doute que Cavallini est intervenu sur l’image que transcrit

le folio 54 du Codex Barberini. On ne trahira sans doute pas la vérité en affirmant que

l’on ne sait toujours pas pourquoi Cavallini a effectué une réplique de l’iconographie qui

se trouve dans la dernière scène de l’Ancien Testament. Cependant, si certaines analogies

sont perceptibles entre les deux folios, on remarque également que Moïse n’entretient pas

le même comportement sur le folio 54 et sur le folio 60. Dans le premier, Moïse et Aaron

sont figurés à mi-corps, et ont le regard orienté vers le haut dignitaire, avec lequel Moïse

semble entretenir une conversation puisqu’il pointe son index dans sa direction. Au folio

60, Moïse et Aaron sont figurés au deuxième plan, là aussi à mi-corps, avec cette fois le

regard dirigé vers l’action du premier plan qui marque le dernier fléau de Dieu.

Indépendamment de cela, on remarque que Moïse tient dans sa main droite un bâton qu’il

dirige vers le ciel.

Hetherington a avancé l’idée qu’au folio 54, Cavallini a largement repris

l’iconographie primitive tout en la modernisant pour la rendre plus compréhensible à

l’assistance de son époque229

; cela étant donné que tout le monde s’accorde pour voir une

iconographie issue de l’Antiquité tardive au folio 60. Dans ce cas, la peinture pourrait

reprendre le schéma d’ensemble que l’on trouve sur la scène de La mise à mort des

premiers nés Egyptiens, c'est-à-dire : au premier plan, deux anges décochant des flèches

229

HETHERINGTON, 1979, p 92.

70

en direction des deux personnages qui occupent le centre de la composition ; et à droite,

Pharaon assis sur son trône, qui assiste impuissant à la scène. Au second plan, derrière une

montagne, à mi-corps, Moïse, au lieu d’indiquer par le geste de son bâton l’ordre du début

du fléau, signifie de sa main l’ultime avertissement. Ce sont donc deux moments bien

précis que devaient transcrire ces deux images.

La lecture du livre de l’Exode nous apprend que le patriarche s’était rendu une

dernière fois chez le Pharaon pour lui annoncer la future mise à mort des Premiers nés (Ex

11 : 1 : 9). Le geste du doigt qu’a reproduit Cavallini, et qui pouvait exister sur l’image

paléochrétienne, permet de croire que c’était bien l’Annonce de la mort des Premiers nés

qui était illustrée sur cette peinture.

Cependant, cette nouvelle identification ne résout pas un autre problème majeur.

Alors que l’intégralité du cycle de l’Ancien Testament suit chronologiquement les textes

bibliques, il est étonnant que cette scène s’insère entre Le miracle des serpents devant

Pharaon (Ex 7 : 10-12) et L’eau changée en sang (Ex 7 : 20). L’hypothèse la plus

commode est de percevoir ici une erreur du compilateur du Codex Barberini qui aurait

mal placé cette image dans le manuscrit230

. Dans ce cas, et au regard de la reconstitution

de Hetherington, on pourrait situer cette scène juste avant celle du folio 60. Pourtant, la

gravure de Seroux d’Agincourt que l’on retrouve au folio 4.r du Cod. Vat. Lat. 9843

(ill.124) indique qu’à la fin du XVIIIème siècle, se plaçait à cet endroit La plaie des

sauterelles (Ex 10 : 13-14). Il apparaît donc que le concepteur du programme primitif n’ait

pas voulu à cet emplacement suivre strictement le livre de l’Exode. Pour notre part, et en

admettant que cette scène ait existé, il ne fait pas de doute qu’elle aurait dû précéder celle

de La mise à mort des premiers nés d’Egypte. Sur ce point, il se pourrait que Cavallini ait

décidé du sujet de cette scène en restaurant cette partie du mur qui devait être en mauvais

état de conservation. Prenant alors une liberté par rapport à la suite chronologique du

texte, il aurait situé cet épisode en « introduction » à la suite de scènes de l’Exode pour le

rendre plus explicite à ses contemporains.

Au folio 43 est figurée La rencontre de Joseph et de ses frères à Dotân (Gen 37 :

17-20) (ill.36). C’est bien Joseph qui apparaît sur la gauche de l’image devant ses frères

qui, déjà en pleine discussion, complotent contre lui. Pourtant, personne ne s’est intéressé

230

White avait déjà indiqué que plusieurs dessins avaient été classés par hasard dans la série du Nouveau

Testament. Voir WHITE, 1992, p 41.

71

à la scène figurée dans le registre supérieur de l’image. On y voit à droite un homme

accroupi dirigeant sa main droite en direction de deux personnages, le regard dirigé vers

un troupeau de moutons qu’ils semblent garder. Nous savons qu’avant de retrouver ses

frères à Dotân, Joseph avait demandé son chemin à un homme (Gen 37 : 15-17). Il se

pourrait donc que l’image nous renseigne sur deux moments différents de la Genèse. En

haut de l’image était figuré Joseph demandant son chemin à un homme dans la campagne

et en bas La rencontre de Joseph et de ses frères à Dotân.

Le problème est tout aussi délicat dans les scènes néotestamentaires. De nombreux

tableaux sont encore à l’heure actuelle largement discutés. Au folio 94, on trouve une

image où l’on voit Paul prêchant dans une synagogue231

(ill.61). On y remarque, malgré

de larges pertes, le saint sans doute en discussion avec un jeune homme et esquissant un

geste de la main droite. Sur la gauche de l’image on distingue un groupe de personnages

devant des architectures qui semble attendre ou bien écouter le témoin du Christ. Ces

maigres indices rendent toute tentative d’identification extrêmement délicate. La solution

pourrait venir des travaux de Luba Eleen. Celle-ci a réussi à démontrer que la scène qui

précède le folio 94 pourrait bien figurer le Baptême de Paul (Actes 9 : 18). Malgré le

mauvais état de conservation de la peinture au moment des copies, elle remarque des

analogies entre cette image et le folio 119 illustrant Le baptême de la famille du geôlier

(Actes 16 : 33) qui se situent tous deux à l’extérieur et à proximité d’un cours d’eau,

suivant ainsi d’anciennes méthodes de représentation issues de l’Antiquité tardive232

. Si

Luba Eleen ne se trompe pas, il est fort possible d’identifier, en suivant le livre des Actes,

l’image du folio 94 comme étant La prédication de Saül à Damas (Actes 9 : 19-21). Le

saint semble se tenir devant la représentation d’une synagogue et tente de convaincre un

personnage que Jésus est bien le Fils de Dieu. A gauche, les individus représenteraient ces

nombreux curieux qui assistent stupéfaits aux prédications de Saül et dont font mention les

Actes.

D’une tout autre manière, le folio 103 du Codex Barberini illustre pour Waetzoldt

le moment où Le tribun se rend compte de la citoyenneté de Paul (Actes 22 : 22-29) alors

que Hetherington voit plutôt Le châtiment de Paul et Le capitaine libérant Paul (Actes

231

WAETZOLDT, 1964, p 60 et HETHERINGTON, 1979, p 101. 232

ELEEN, 1985, p 259.

72

22 : 28 -28 ; 23 : 23-32), enfin pour Eleen l’image montre Paul battu par les juifs233

(ill.70). Au centre de la composition, le saint est figuré couché et les bras tendu devant

lui. Derrière, deux personnages le fouettent avec des verges alors qu’à gauche un homme

et un enfant assistent calmement à la scène. Dans la scène qui précède, Paul est reçu à

Jérusalem (Actes 21 : 17) et celle qui la suit présente Le voyage pour Césarée (Actes 23 :

23-32). Il est donc fort probable que la scène du folio 103 se situe entre ces deux instants.

Les Saintes Ecritures nous rapportent que dans la ville de Jérusalem, le saint avait été

lourdement molesté par la foule avant d’être libéré par les soldats romains : « La ville

entière fut en effervescence, et le peuple accouru de toutes parts. On s’empara de Paul, on

se mit à le traîner hors du Temple (…). On cherchait à le mettre à mort, quand cet avis

parvint au tribun de la cohorte : « Tout Jérusalem est sens dessus dessous ! ». Aussitôt,

prenant avec lui des soldats et des centurions, il se précipita sur les manifestants (…) qui

cessèrent de frapper Paul » (Actes 21 : 30-32). Cependant, aucune partie de l’image ne

représente une foule en colère, ni même l’intervention de soldats. On le sait, Cavallini est

largement intervenu sur cette peinture qui devait, au moment de son intervention, être en

partie détruite. En suivant l’analyse de Luba Eleen, il est possible que la position du saint

couché pour recevoir la punition suive une iconographie de l’Antiquité tardive234

. Pour le

reste, le rapport entre texte et image reste difficilement exploitable. Eleen reste surprise

que le saint soit figuré à demi nu. Peut-être avait-on voulu, à une période ancienne,

marquer toute la violence de la foule envers Paul en le présentant les vêtements déchirés ?

Quoi qu’il en soit, l’iconographie de cette image est encore largement sujette à caution,

même si, en suivant le livre des Actes, on peut situer l’épisode d’une façon plus précise

qu’auparavant en proposant de l’identifier comme étant Paul battu par les juifs à

Jérusalem (Actes 21 : 30-32).

b) Questions sur l’iconographie de la façade

Dans les pages précédentes, nous avons relevé que l’articulation du programme de

la façade était complexe étant donné qu’elle présentait dans le registre supérieur une

Maiestas Domini et une Deesis à l’iconographie étonnante avec, de part et d’autre, la

présence de Pierre et Paul. Si l’historiographie s’est largement penchée sur le cycle du

233

ELEEN, 1985, p 256, fig 8. 234

Ibid, 1985, p 257.

73

XIVème siècle, elle est restée étrangement silencieuse au sujet du programme primitif. Le

chapitre consacré par Serena Romano et l’ouvrage de Tomeï sur Cavallini s’accordent

pour voir dans l’intervention du pape Jean XXII plus qu’une simple restauration. Cela

induit qu’il existait auparavant un programme que l’on avait peut-être suivi au XIVème

siècle. En 1635, un certain Torrigio, en analysant le programme de la façade de Saint-

Paul, voyait une fois de plus le travail de Cavallini tout en soulignant que le cycle avait été

élaboré à la fin du Vème siècle :

« Ancora fece la facciata di Mosaico della Basilica di S. Paolo, commenciata da

Innocentio III, assignativi scudi 490, e finita da Gregorio IX235

»

En admettant que le programme vienne bien du Vème siècle, peut-être élaboré sous

le pontificat de Félix III (483-492), il convient ici d’en comprendre la teneur. Pour ce

faire, il faut tout d’abord se pencher sur une autre réalisation de cette période, la façade de

Saint-Pierre.

La mosaïque réalisée sous le pontificat de Léon le Grand entre 423 et 448236

nous

est connue par de nombreux dessins. Le décor avait été de nombreuses fois restauré. Le

commentaire du pontificat de Serge Ier par le Liber Pontificalis fait remonter à la fin du

VIIème siècle la première restauration. Il ne s’agit que d’une simple hypothèse, mais il est

tout de même intéressant de remarquer que cette transformation est à peu près

contemporaine du concile de Constantinople (692) interdisant la représentation de

l’Agneau. La nouvelle iconographie serait alors un exemple remarquable de l’influence

d’un concile sur la création artistique de cette période237

. C’est à cette époque que le Christ

aurait été substitué à l’Agneau. Une autre campagne de restauration est connue sous le

pontificat d’Innocent III et une dernière sous Grégoire IX (1227-1241).

Les historiens s’accordent pour voir au folio 122 du Codex de Farfa, qui date du

XIème siècle et qui est conservé au Collège d’Eaton, la représentation la plus fidèle du

235

HETHERINGTON, 1979, p 108. Nous tenons à remercier le professeur Alessandro Tomeï de nous avoir

certifié de toute la valeur de cette source. 236

KESSLER, 1999, p 263. 237

Il faut toutefois être très prudent sur cette proposition car les exemples de non-observation d’un interdit

ne manquent pas.

74

décor du Vème siècle238

(Fig.28). Le programme nous montre l’Agneau dans un

médaillon au sommet du fronton, flanqué des bustes des Vivants : le lion ou le bœuf à

gauche, l’homme, le bœuf ou le lion et à droite l’aigle. En contrebas, sur les côtés

apparaissent des groupes supplémentaires que Kessler identifie comme des représentants

du novus populus Christianus en adoration devant le Seigneur alors que Yves Christe

s’oriente plutôt vers la figuration des vingt-quatre Vieillards de l’Apocalypse239

,

accompagnés selon Anne-Orange Poilpré de Pierre et Paul.

Pour cette dernière, la mosaïque de Saint-Pierre souligne l’importance de la

primauté du siège romain sur l’ensemble des évêchés. Il est vrai que le décor renforce

l’idée de l’importance institutionnelle de Rome par l’éminence de son fondateur, l’apôtre

le plus proche du Christ. Enfin, la présence de l’Agneau insiste sur le fait que Saint-Pierre

était la gardienne de l’orthodoxie en matière de liturgie et surtout pour l’eucharistie ;

l’expression rituelle de l’Eglise terrestre.

En ce qui concerne la façade de la basilique Saint-Paul, l’iconographie qui pouvait

se déployer à l’époque paléochrétienne est pour le moins difficile à appréhender. On peut

néanmoins supposer, en se fondant sur le programme de Saint-Pierre, que le cycle de

Saint-Paul présentait à la place du Christ en médaillon porté par six anges une figuration

de l’Agneau lui aussi inséré dans une imago cliptea. A sa droite pouvaient être illustrés,

comme sur le dessin d’Edimbourg, le bœuf et l’homme, et à sa gauche l’aigle et le lion.

Peut-être étaient-ils représentés à mi-corps, pourvus de deux ailes et d’un codex comme

sur la mosaïque de Saint-Pierre.

Au registre inférieur, la présence de certains personnages a fait l’objet de

nombreux débats. Par exemple, Hetherington propose que Paul en tant que saint patron de

l’Eglise devait être figuré à la place de saint Jean-Baptiste, à côté de Pierre240

. Mais

l’absence de toute documentation ne permet pas d’être certain de la présence de tous ces

personnages à la période tardo-antique. On peut déjà avancer l’hypothèse que n’est pas

représenté dans ce registre le cortège de Vieillards comme à Saint-Pierre, étant donné que

cette formule est déjà présente sur l’arcus maior de la basilique. En se fondant sur la

238

CHRISTE, 1996, p 75. CAILLET, Jean-Pierre., « Le décor monumental », dans RICHE (dir.)., L’Europe

de l’an mil, Paris, 2001, pp 240-241. POILPRE, 2003, p 137. 239

CHRISTE, 1996, p 75. 240

HETHERINGTON, 1979, p112.

75

proposition d’Hetherington, le cycle peut alors présenter de gauche à droite : saint Jean-

Baptiste, la Vierge Marie, saint Paul et saint Pierre.

Dans tous les cas, cette disposition des personnages, associée à la supposée

présence de l’Agneau, permet de « gommer » la présence de la Deesis au centre de la

composition. L’existence de ce thème à une date aussi haute était pour le moins

surprenante étant donné que la plus ancienne illustration connue de la Deesis se trouve sur

l’arcus maior du monastère du Mont Sinaï que l’on date généralement du VIème siècle241

.

On peut y découvrir l’Agneau dans un médaillon au sommet de l’arc, avec plus bas et à sa

droite le buste de la Vierge et à sa gauche le buste de saint Jean-Baptiste.

Cette hypothétique restitution amène à s’interroger sur le contexte d’élaboration et

sur la signification de ce décor. En 451, sur ordre du pape Léon Ier, se réunit le concile de

Chalcédoine. Celui-ci a pour but d’annuler les décisions du prétendu faux synode

d’Ephèse et de mettre un terme à la controverse eutychienne. Ce concile condamna le

monophysisme, doctrine selon laquelle Jésus-Christ n’aurait possédé qu’une seule nature

divine et n’aurait pas de nature humaine. La définition chalcédonienne, fondée sur la

formulation du pape Léon dans son Tome à Flavien et les lettres synodales de saint Cyrille

d’Alexandrie à Nestor, revint à affirmer la réalité d’ « un seul et même Christ Fils,

Seigneur, Monogène, sans confusion, sans mutation, sans division, sans répartition, la

différence de nature n’étant nullement supprimée par l’Union, mais plutôt les propriétés

de chacune étant sauvegardées et réunies en une seule personne et une seule

hypostase242

».

De fait, loin d’apporter une conclusion au problème soulevé par Eutychès, le

concile de Chalcédoine s’est trouvé ouvrir une longue crise qui remplit la fin du Vème

siècle. Il est vrai que dans le milieu oriental s’organisa rapidement une opposition anti-

chalcédonienne. Le monophysisme, sans jamais rallier l’unanimité, était tout même bien

présent en Egypte ou bien dans l’Orient Syrien. Rapidement s’est organisée une politique

d’intervention vigoureuse envers les récalcitrants. Toutefois, l’empereur Léon a cru devoir

revenir sur les décisions du concile de Chalcédoine, en consultant l’épiscopat à son sujet

(octobre 457) ; les réponses ont été en faveur de la fidélité au concile. L’empereur Zénon

241

Voir WEITZMANN, Kurt., « Introduction to the Mosaics and Monumental Paintings », dans The

Monastery of Saint Catherine at Mount Sinai. The Church and fortress of Justinian, Princeton, 1965, pp 11-

20. 242

MARROU, 1985, p 142.

76

l’Isaurien promulgua ensuite en 482 un édit d’union, Hénotikon, qui concluait par un appel

à l’unité autour du Symbole de Nicée considéré comme seule définition de la Foi.

Rapidement, l’Hénotique parut inadmissible aux chalcédoniens d’Egypte, de

Constantinople et d’Antioche. Mais surtout à Rome, le pape Félix III maintint la doctrine

de Léon Ier et condamna l’Hénotique243

. Ce serait alors dans une situation difficile

provoquant un schisme entre Rome et Constantinople qu’aurait été réalisé le décor de la

façade de Saint-Paul.

Il semble que la présence de l’Agneau accompagné des Vivants renvoie à

Apocalypse 5 : 6 dans lequel est décrit l’intronisation et l’Epiphanie glorieuse de

l’Agneau. Dans le registre inférieur, on trouve à la droite de l’Agneau saint Jean-Baptiste,

considéré par les Evangélistes comme le dernier prophète et celui qui précède et annonce

l’arrivée du Messie. A côté de lui, la représentation de la Vierge distingue celle qui sera la

mère de Jésus. Enfin, à la gauche de l’Agneau sont figurés les deux grands martyrs de

Rome, véritables modèles de vie ascétique, gardiens de l’orthodoxie, et qui ont assuré la

prédication de la parole du Christ chez les Juifs et les Gentils.

Alors que le message politique de la façade de Saint-Pierre témoignait du

militantisme de l’Eglise romaine pour la reconnaissance de sa primauté244

, sur le mur

pignon de l’autre grande basilique de Rome était donc commentée au registre supérieur la

nature Divine du Christ, et au registre inférieur se trouvaient des personnages rappelant sa

nature humaine ; les deux assemblées étant, selon les Chalcédoniens, inséparables.

2) Mode d’élaboration de l’image

a) Les scènes bibliques

Dans son ouvrage sur les Voies de la création en iconographie chrétienne, André

Grabar est revenu à plusieurs reprises sur la relation entre l’iconographie et le langage. Il a

alors démontré que l’on pouvait construire une image comme on structurait une phrase, en

utilisant et en combinant entre eux des éléments d’origines différentes. Au chapitre II de

son livre, il s’est longuement penché sur la définition des termes correspondant aux mots

et aux phrases d’une langue qui était employée dans l’art paléochrétien. Il a également

243

Sur la réception et l’opposition du concile de Chalcédoine, voir utilement GRILLMEIER, 1990. 244

POILPRE, 2003, p 141.

77

souligné que la part créative des artistes était en fait minime et qu’ils puisaient dans un

répertoire visuel déjà constitué, dont ils étaient certains qu’ils seraient reconnus par

tous245

.

C’est sur la base de ces remarques que nous tenterons de définir, au travers des

folios du Codex Barberini, les emprunts ou même les innovations des artistes de

l’Antiquité tardive qui ont travaillé à la basilique de Saint-Paul-hors-les-murs.

Nous débuterons cette démonstration par les emprunts des artistes à des éléments

courants depuis un long moment dans l’iconographie chrétienne. Dans la scène qui

représente Le péché originel (ill.19), on remarque que l’artiste a représenté Adam et Eve

juste avant qu’ils ne goûtent au fruit défendu. Et pourtant, l’homme et la femme sont

figurés de part et d’autre de l’Arbre de la Connaissance avec le serpent tentateur. Ce

schéma se retrouve au registre inférieur du sarcophage du préfet de la ville, Junius Bassus,

vers 359 et conservé dans les Grottes Vaticanes (Fig.29). Comme sur la peinture de Saint-

Paul, Adam est à gauche de l’Arbre sur lequel s’enroule le serpent et Eve à droite.

De la même manière, la peinture qui représente La rencontre d’Aaron et de Moïse

(ill.45) reprend également un schéma déjà élaboré dans la sculpture funéraire. L’artiste

place les protagonistes l’un en face de l’autre ce qui engendre une composition

pyramidale ; motif que l’on trouve dans le Baiser de Judas sur le sarcophage dit « Des

saints Simon et Jude Thaddée », daté de la fin du IVème siècle et aujourd’hui conservé à

Vérone dans l’église San Giovanni in Valle (Fig.30). Au folio 121, reconnu comme La

prédication de Paul à Jérusalem (ill.88), le saint au centre est figuré debout esquissant un

geste du bras droit. A droite et à gauche de Paul sont représentés de nombreux

personnages qui se placent avec le saint au premier plan de l’image. Cet arrangement est

assez conventionnel dans l’iconographie chrétienne puisqu’on le retrouve sur de

nombreuses scènes de la Traditio Legis. C’est en tout cas ce genre de langage qui est

exploité sur le sarcophage de Saint-Ambroise de Milan que l’on date de la fin du IVème

siècle. Au centre du registre est figuré le Christ debout sur un monticule qui remet la Loi à

Pierre. De part et d’autre de la figure centrale, les apôtres sont représentés au premier plan

les uns à côtés des autres devant des architectures (Fig.31).

A côté de ces premiers véritables poncifs, l’artiste exploite les Saintes Ecritures

pour illustrer des épisodes en rapport étroit avec le texte. Dans le tableau qui présente

Dieu en discussion avec Adam et Eve, l’image reconstituée par Ulrike Koenen nous

245

GRABAR, 1979, p 33.

78

dévoile quelques changements par rapport au folio 27 du Codex Barberini246

. L’un est de

taille, étant donné qu’Adam et Eve sont cette fois représentés derrière des frondaisons qui

ne figurent pas sur le croquis du XVIIème siècle (Fig.32). Ce détail qui peut paraître

minime est pourtant bien explicité dans la Genèse qui nous apprend :

« Ils entendirent le pas de Yahvé Dieu qui se promenait dans le jardin à la brise du

jour, et l’homme et la femme se cachèrent devant Yahvé Dieu parmi les arbres du

jardin. Yahvé Dieu appela l’homme : « Où es-tu ? » dit-il. « J’ai entendu ton pas

dans le jardin, répondit l’homme ; j’ai eu peur parce que je suis nu et je me suis

caché » » (Gen 3 : 8-10).

Si ces premières images témoignent d’emprunts à un mode d’élaboration plus ou

moins courant dans l’imagerie paléochrétienne, d’autres dénotent une certaine évolution

dans le langage formel.

Dans le tableau représentant Le sacrifice d’Isaac (ill.31), Abraham est figuré

l’arme au poing et engagé à frapper son fils. Celui-ci, sur un autel recouvert de bois, est

montré nu et à genoux, les mains attachées dans le dos et les cheveux retenus par un

bandeau247

. Le tout premier exemple de représentation d’Isaac à genoux sur du bois se

trouve sur une peinture du IIIème siècle dans la catacombe de Saint-Pierre-et-Saint-

Marcellin à Rome (Fig.33). Parfois, il est figuré sur un autel, un genou posé à terre et les

mains liées dans le dos comme sur un sarcophage conservé à Saint-Pierre du Vatican (fin

du IVème siècle) ou bien encore à genoux aux pieds du patriarche, les yeux couverts par

un bandage sur le sarcophage dit « de Leocadius » à Tarragone (début du Vème siècle)

(Fig.34). Face à ces observations, il semble que l’artiste de Saint-Paul ait intégré tous ces

éléments pour illustrer cet épisode. Par exemple, Mounier a reconnu la présence d’un

bandeau dans les cheveux d’Isaac, qui peut-être à l’origine devait couvrir les yeux de la

victime.

La scène du Rêve de Joseph, remise au jour par Ulrike Koenen, marque une étape

importante dans l’élaboration des peintures de Saint-Paul (Fig.3). Le rêve est ici traduit à

la droite de l’image, avec la représentation du premier et du deuxième rêve du patriarche.

Ce genre de cohabitation de plusieurs images dans le même tableau s’est déjà vu dans le

cubiculum B de la catacombe de la Via Latina à Rome qui date du IVème siècle, où est

246

KOENEN, 1995, p 109. 247

MOUNIER, 2000, p 17.

79

illustrée l’Ascension du prophète Elie avec le Bon pasteur (Fig.35). Alors que dans le

tableau de la catacombe les images sont associées du fait de leur complémentarité, la

scène de Saint-Paul commente d’une façon synthétique deux moments distincts de la

Genèse. Ces deux instants qui cohabitent dans la même peinture marquent une évolution

importante dans le langage figuratif des artistes de Saint-Paul aussi bien par rapport aux

autres peintures du programme qu’au regard du champ iconographique paléochrétien.

Il serait difficile d’allonger cette liste composée d’exemples isolés, mais qui

témoignent déjà d’une belle manière de l’assimilation et de l’évolution du langage

iconographique dans la basilique de Saint-Paul. Dans la plupart des cas, les schémas

devaient puiser dans un répertoire de formes répandues. Il est vrai que face à la complexité

du programme qui devait viser à développer de manière cohérente le message de l’Ancien

Testament et du livre des Actes, on avait peut-être eu recours alors à un système narratif

coutumier dans l’iconographie païenne, avec succession parfois très serrée d’épisodes en

rapport avec le texte. Dans La révélation de Paul, Eleen a reconnu de droite à gauche :

Saül qui reçoit la lettre du haut conseil, la révélation de saint Paul, et Paul conduit à

Damas248

; système que l’on peut retrouver dans La rencontre de Joseph et de ses frères à

Dotân où nous avons remarqué la juxtaposition de deux passages de la Genèse. Ce parti,

qui semble être ébauché à Saint-Paul, est beaucoup mieux développé dans les mosaïques

de la nef de Sainte-Marie-Majeure (432-440). L’un des tableaux y montre Abraham

recevant les trois anges, puis ordonnant à son épouse Sarah de leur apprêter le repas et

enfin servant lui-même ses hôtes attablés (Fig.36)249

.

Enfin, d’autres peintures se démarquent par des ambitions nouvelles. Plusieurs

schémas iconographiques sont rassemblés dans le Sacrifice d’Isaac et une nouvelle

syntaxe est élaborée dans le Rêve de Joseph. Pour autant, les multiples interventions sur

les peintures et la fidélité relative des croquis réalisés par les artistes du XVIIème siècle

limitent en partie notre champ d’étude. La solution ne pourra sans doute venir que par une

nouvelle étude des aquarelles du Codex Barberini. Dans cette perspective, les travaux

inaugurés par Ulrike Koenen nous semblent les plus pertinents. Ses études,

malheureusement cantonnées à quelques scènes de l’Ancien Testament, mériteraient de

248

ELEEN, 1985, fig 16. 249

Sur ce point voir utilement KINTZINGER, 1975, p 121 et SPAIN, 1979, pp 518-540. Sur les rapports

entre les mosaïques de Sainte-Marie-Majeure et la colonne Trajane : Voir BRENK, 1975, p 160 et

TRONZO, 2001, p 461.

80

s’étendre à l’ensemble du programme ; voie incontournable pour percevoir de nouvelles

traces d’une iconographie chrétienne.

b) le cycle de l’arc

Parmi ses nombreuses hypothèses, André Grabar avait soulevé l’idée que l’arcus

maior de Sainte-Marie-Majeure (Fig.39) présentait une organisation que l’on pouvait

retrouver dans les monuments impériaux250

. Sur la base d’une colonne élevée par Arcadius

en l’honneur de son père Théodose aux alentours de 400 (Fig.40), on peut distinguer de

bas en haut des thèmes bien particuliers. Dans la partie sommitale se trouve la

représentation de l’Empereur dans une attitude trônante et glorieuse, puis en-dessous est

figuré l’Hommage des peuples qu’il a sauvés, puis les campagnes militaires qu’il a menées

contre les ennemis. C’est peut-être ce même schéma qui aurait été élaboré sur l’arc de

Saint-Paul. Au sommet de l’arc était figuré un Christ en gloire accompagné des Evangiles,

dont la présence était une preuve de ce que le christianisme tenait pour sa vérité

fondatrice : l’Incarnation, la Résurrection et la présence de tout temps du Christ dans la

Création. Au registre médian était illustrée la vénération de l’Eglise universelle qu’il avait

sauvée par son sacrifice rédempteur. En bas étaient figurés les personnages qui avaient été

chargés de la prédication de la Parole du Sauveur chez les Juifs et les Gentils. Mais

surtout, ils étaient considérés comme les défenseurs de Rome et de toute la chrétienté

contre les derniers foyers païens et les déviations hérétiques251

.

250

GRABAR, 1979, pp 46-47. Pour connaître plus en détail le programme iconographique et sa

signification : Voir BRENK, 1975, pp 107-109. 251

Voir utilement MARCEL, 1972, pp 265-269.

81

Chapitre Second

Repères chronologiques et significations du programme

1) Retour sur certaines estimations

Etant donné que la basilique de Saint-Paul-hors-les-murs constitue, avec Saint-

Pierre, l’un des bâtiments majeurs de l’époque paléochrétienne, l’historiographie a depuis

longtemps tenté de déterminer avec plus ou moins d’exactitude la date de réalisation de

son décor. Dans un premier temps, Eugène Müntz, en étudiant les folios du Codex

Barberini avait déclaré que le cycle de l’Ancien Testament et quelques scènes tirées des

Actes « respiraient je ne sais quelle saveur antique »252

. A sa suite, Nibby avait proposé

de voir dans ces peintures une commande de Léon le Grand (440-461)253

. Dans son article

suivant, Müntz acceptait toujours l’idée que les dessins transmettaient une iconographie à

la « saveur » antique, tout en refusant de les dater aussi haut que les portraits des papes.

Par exemple, les scènes de la Genèse lui apparaissaient être antérieures à l’an mil254

.

Par la suite, les investigations avaient dégagé deux grands axes de recherches. La

plupart des chercheurs s’accordaient à penser que les peintures qui se déployaient sur le

mur de droite de la basilique présentaient une iconographie du Vème siècle sans doute

mise en place par Léon le Grand255

. Par contre, pour le mur de gauche, certains, en suivant

de façon surprenante une prétendue affirmation de Müntz256

, avaient vu un témoignage de

l’iconographie primitive dans les croquis du XVIIème siècle257

. D’autres, comme Josef

Garber, avaient refusé l’idée que la nef principale de la basilique de Saint-Paul ait été

décorée avec des scènes de la vie du saint titulaire étant donné que cet honneur n’avait pas

été accordé à saint Pierre dans sa basilique258

. Suivant la théorie de Garber, Erika Dinkler-

von Schubert avait même proposé qu’à l’origine, le mur ait reçu des peintures aux thèmes

christologiques, suivant dans ce cas le modèle de Saint-Pierre, remplacées ensuite par un

programme dédié à saint Paul259

. Cette hypothèse a été mise à mal par Tronzo qui avait

252

MUNTZ, 1875, p 112. 253

NIBBY, 1839-41, p 579. 254

MUNTZ, 1898, p 12. 255

GARBER, 1918, p 57, BRYUNE, 1934, p 13, DEMUS, 1949, p 258, WAETZOLDT, 1964, p 56,

HETHERINGTON, 1979, p 92, WHITE, 1992, p 50, ELEEN, 1985, p 252. 256

ELEEN, 1985, p 252. 257

WAETZOLDT, 1964, p 58, BUCHTAL, 1966, p 44, HETHERINGTON, 1979, p 92, ELEEN, 1985, p

252, WHITE, 1984, p 87. 258

GARBER, 1918, pp 27-28. 259

DINKLER-VON SCHUBERT, 1966, pp 82 et 90 note 29.

82

soulevé la possibilité d’un cycle présentant la vie de saint Pierre dans la basilique Vaticane

peint sous le pontificat de Léon le Grand, et ainsi par analogie supposé la présence des

peintures pauliniennes à Saint-Paul260

. Dans un autre registre, Belting avait proposé qu’un

premier programme ait été complètement réalisé en stuc, et transposé en peinture au

milieu du Vème siècle261

. Cette argumentation a été largement contredite par Herbert

Kessler. Pour lui, non seulement le cycle primitif était bien réalisé en peinture mais, en

plus, il se proposait de revenir une nouvelle fois sur sa datation. Pour ce faire, il rappelait

que Prudentius dans le Peristephanon avait écrit :

« Regia pompa loci est, princeps bonus has sacravit arces lusitque magnis

ambitum talentis262

»

Il se pourrait donc que celui-ci parle de la décoration qui pouvait orner les murs du

vaisseau médian de Saint-Paul263

. A cela, il ajoutait que saint Augustin, dans l’un de ses

sermons, faisait mention de scènes où l’on pouvait voir La lapidation de saint Etienne et

des scènes tirées des Actes des Apôtres où Paul était mis à l’honneur :

« Dulcissima pictura est haec ubi videtis sanctum Stephanum lapidari, videtis

Saulum lapidantium vestimenta servantem. Iste est Paulus apostolus… Bene

auditis vocem : Quid me persequeris ? Stratus es, erectus es : Prostatus

persecutor, erectus praedicator264 »

La confrontation de ces sources textuelles, dont on pouvait raisonnablement

admettre qu’elles étaient plus ou moins contemporaines, avait permis à Kessler de tendre

vers un programme élaboré aux environs de 400265

.

Le constat est tout aussi délicat en ce qui concerne la mosaïque de l’arcus maior.

Depuis de nombreuses années, les inscriptions qui se lisaient sur l’arc avaient donné lieu à

de nombreuses controverses. Ainsi celles qui se rapportaient à Théodose et Honorius ne se

trouvaient pas primitivement au sommet de l’arc, mais occupaient primitivement un

260

TRONZO, 1985, pp 97-98. 261

BELTING, 1977, p 155. 262

PRUDENTIUS, 1951, chap XII, 46. 263

Il remarque que Prudentius utilise le mot « ludere » pour signifier la peinture illusionniste ; verbe

qu’utilise Polin de Nole pour décrire les décors qu’il mettait en place dans les églises : « propterea uisium

nobis opus utile totis Felicis dominus pictura ludere sancta » (Carmen, 27, 581-582). Voir KESSLER, 1989,

p 122. 264

KESSLER, 1989, p 122 qui cite le sermon 314 alors qu’il s’agit du 315. Voir MIGNE, 1844-1890, PL 38,

col 1431. 265

KESSLER, 1999, p 532.

83

diptyque qui ornait l’abside266

. Pour certains, il était fort possible que Placidia ou bien

Léon le Grand ait, lors de la restauration, reproduit ou même introduit cette inscription au

sommet de l’arc267

. Pourtant, Uggeri avait déjà opté pour un décor réalisé sous Léon le

Grand, et daté celui-ci vers 450268

. Waetzoldt s’était plutôt dirigé vers une fourchette se

situant entre 440-450269

. Quoi qu’il en soit, il semblait établi que le décor fut mis en place

par Galla Placidia et le pape Léon270

, d’où le titulus :

« PLACIDIAE PIAMENS OPERIS DECUS HOMNE PATERNI GAUDET

PONTIFICIS STUDIO SPLENDERE LEONIS271

»

Cette tendance devait être remise en cause par Kessler dont les conclusions

s’orientent plutôt vers une œuvre réalisée sous Théodose (379-395) et Honorius (395-

423)272

.

Quel regard porter sur ces diverses propositions ? Il est possible qu’un premier

décor peint aux environs de 400 ait orné les murs latéraux du vaisseau médian, dont le

programme était sans doute fondé sur les livres des deux Testaments. Les épisodes de

l’Ancien Testament et ceux des Actes des Apôtres devaient former un ensemble

soigneusement distingué du point de vue topographique. Il devait s’organiser selon une

composition binaire, dont chaque cycle devait se conformer au texte narratif des Ecritures

suivant un sens de lecture allant de l’arcus maior à l’entrée. C’est peut-être à cette période

qu’avaient été élaborées des scènes comme Le Rêve de Joseph, Le pêché originel, ou bien

La rencontre de Pierre et Paul à Rome.

Ce ne serait alors que sous Léon le Grand que les cycles auraient été restaurés et

complétés par la galerie des papes. Sur ce point, bien des zones d’ombre subsistent.

Néanmoins, il y a de grandes chances pour que le personnage en charge du chantier ait

décidé de garder le même arrangement que ses prédécesseurs273

; organisation que l’on

266

KRAUTHEIMER, 1977, p 98. 267

MUNTZ, 1898, p 14. 268

UGGERI, 1827, p 114. CLAUSE penche vers la date de 441. Voir CLAUSE, 1893, p 306. 269

WAETZOLDT, 1961, p 20 et WAETZOLDT, 1964, p 56. 270

MATTHAIE, 1965, pp 55 et 59, BISCONTI, 1995, p 85, CHRISTE, 1996, p 7, ANDALORO,

ROMANO, 2000, p 39, TRONZO, 2001, p 481, POILPRE, 2003, p 127. 271

KRAUTHEIMER, 1977, p 99. 272

Nous renvoyons à la nouvelle contribution de Herbert Kessler dont l’article est toujours en cours

d’élaboration. Nous tenons tout particulièrement à remercier le professeur Kessler d’avoir bien voulu nous

livrer quelques conclusions de son futur article. 273

Nous ne nous accordons pas avec les conclusions de Herbert Kessler qui avait proposé qu’à cette période

avait été élaboré un arrangement complexe, permettant de suivre l’histoire sainte sans aller retour afin de

transcrire une histoire vraie et non plus typologique. KESSLER, 1994, p 373. Il est vrai que dans le cycle du

Nouveau Testament, on remarque des scènes placées aux hasards et qui ne suivent pas l’ordre chronologique

84

pouvait retrouver d’une certaine manière à Sainte-Marie-Majeure ou bien à Saint-

Apollinaire-le-Neuf à Ravenne274

. C’est plutôt sur la piste d’une modernisation

iconographique des images qu’il faudrait se tourner. Nous avions remarqué que, dans

certaines images, les artistes avaient puisé dans le large répertoire paléochrétien.

L’exemple du Sacrifice d’Isaac est à cet égard tout à fait remarquable. Dans d’autres, le

système narratif s’était pour le moins complexifié. Dans l’épisode de Meurtre d’Abel,

l’image développe à gauche le moment où Caïn va frapper son frère ; à droite est

représenté le jugement de Dieu après le délit de Caïn. Dans d’autres, comme La rencontre

de Joseph et des frères à Dotân, la scène semble cette fois coupée dans sa hauteur. Au

sommet, Joseph demande son chemin à des bergers et, en bas, il retrouve ses frères.

Enfin, quelques peintures ne présentaient qu’un seul sujet, comme par exemple La

lapidation de saint Etienne ou l’Assemblée à Jérusalem. S’agit-il d’hésitations de

l’imagier dans sa recherche d’un nouveau vocabulaire iconographique ? Sans doute

s’exprime ici une même volonté de cohérence que sur les scènes de Sainte-Marie-

Majeure ; traduction d’épisodes que les artistes de Saint-Paul essayent pourtant de

dépasser en ambition.

De la même manière, un retour s’impose sur le programme de l’arc. Dans les

pages précédentes, nous avons souligné les problèmes soulevés par la gravure de

Ciampani et les folios 139 et 140 du Codex Barberini, dont il est bien difficile de

reconnaître avec certitude celui qui représente le programme mis en place par Léon le

Grand. C’est sur une autre base de travail qu’il convient de se pencher maintenant. Sans

rien affirmer, on peut néanmoins supposer que le programme primitif mis en place aux

alentours de 400 doit dans ses grandes lignes être reproduit sur le croquis de Ciampani

(ill.101). Nous avons remarqué que les Vivants sur la gravure ne sont pas pourvus de

codex. Ce schéma s’est retrouvé dans des compositions contemporaines de Saint-Paul ;

citons par exemple la représentation du Tétramorphe dans l’abside de Sainte-Pudentienne

(Fig.37) et sur la porte de Sainte-Sabine (Fig.38).

En suivant la théorie d’Anne-Orange Poilpré, il se peut que les folios 139 et 140 du

Codex de la Bibliothèque Vaticane traduisent bien une iconographie du Vème siècle

(ill.102) ; époque à laquelle on ajoute le diptyque sur le sommet de l’arc et on transforme

légèrement l’iconographie, comme en témoigne l’ajout des livres aux Vivants. C’est ce

des textes. Il semblerait bien que ce désordre soit le fait de Cavallini et de son atelier. Voir WAETZOLDT,

1964, p 59 et ELEEN, 1985, p 253. 274

ELEEN, 1985, pp 254-255.

85

schéma, que l’on retrouve sur la façade de Saint-Pierre et peut-être plus tard sur celle de

Saint-Paul.

2) Message du décor

Quel peut-être le message du programme primitif de Saint-Paul ? En nous aidant

du relevé de Ciampani, il apparaît que le décor originel de l’arcus maior présente une

Maiestas Domini en ligne, avec sans doute le cortège des vingt-quatre Vieillards divisés

en deux groupes, portant des couronnes. Au registre inférieur, aux retombées de l’arc,

Pierre et Paul lèvent la main dans un geste d’acclamation en direction du Sauveur.

Au sommet de l’arc, autour du médaillon du Christ, se déploie le Tétramorphe. Les

créatures ne tiennent ni rouleau ni codex. Il semble que ce genre de représentation

corresponde à une interprétation littéraire des Vivants comme personnification des textes

des Evangiles plutôt que les Evangélistes eux-mêmes. Ambroise a discuté du

rapprochement des animaux avec le contenu de chacun des récits ainsi que l’unité qu’ils

partagent avec le Christ :

« Beaucoup cependant pensent que c’est Notre Seigneur qui, dans les quatre

évangiles, est figuré par les symboles des quatre animaux. C’est Lui l’homme, Lui

le lion, Lui le taureau, Lui l’aigle ; l’homme puisqu’il né de Marie ; le lion, parce

qu’Il est fort, le taureau, parce qu’Il est résurrection. Or, les traits des animaux

sont dessinés dans chaque livre de telle sorte que le contenu de chacun s’accorde

avec leur caractère merveilleux. Sans doute, tout cela se rencontre dans tous ces

livres ; et pourtant dans chacun d’eux il y a comme une plénitude de telle ou telle

caractéristique. L’un a raconté plus au long l’origine humaine et formé la moralité

de l’homme par des préceptes plus abondants ; un autre commence par exprimer

la puissance divine de ce Roi fils de Roi, force de force, vérité de vérité, dont les

ressources vitales ont défié la mort ; le troisième prélude par un sacrifice

sacerdotal et s’étend plus abondamment sur l’immolation même du taureau ; le

quatrième a détaillé plus que les autres les prodigues de la résurrection divine.

« Tous ne sont qu’un, et Il est unique en tous, comme on vient de le lire ; Il ne

varie pas l’un de l’un à l’autre, mais Il est vrai chez tous » »275

.

275

AMBROISE DE MILAN., Traité sur l’évangile de saint Luc, Prologue 8. Voir POILPRE, 2003, pp 99-

100.

86

Il se peut que l’iconographie de l’arc de Saint-Paul rende avec fidélité cette

complémentarité des Evangiles. A Saint-Paul, cette vérité se concentre de manière

immédiate autour de la figure du Christ pourvu d’un nimbe radié et d’une croix à longue

hampe sur l’épaule gauche. Selon Yves Christe, il ne fait pas de doute que ce genre de

représentation renvoie au Christ ressuscité dont le visage resplendit comme le Soleil276

et

que l’on retrouve dans les visions de Jean :

« Sa tête, avec ses cheveux blancs, est comme de la laine blanche, comme de la

neige, ses yeux comme yeux comme une flamme ardente (…) et son visage, c’est

comme le soleil qui brille dans tout son éclat ». (Ap 1 : 12-20)

A cette première représentation du Christ et des Vivants est ajoutée la présence des

Anciens issus du chapitre quatre de l’Apocalypse :

« Et chaque fois que les Vivants offrent gloire, honneur et action de grâces à celui

qui siège sur le trône et qui vit dans les siècles et les siècles, les vingt-quatre

Vieillards se prosternent devant Celui qui siège sur le trône pour adorer celui qui

vit dans les siècles des siècles ; ils lancent leurs couronnes devant le trône en

disant : « Tu es digne, ô notre Seigneur et Dieu (…) » ». (Ap 4 : 9-11)

Les Anciens sont présentés au-dessus de Pierre avec la tête voilée alors qu’ils ont

la tête nue au-dessus de Paul. Cette figuration renvoie à la représentation de l’Ancien et

du Nouveau Testament dans la personnification des douze apôtres et prophètes et

patriarches277

. Ce procédé singulier se trouve également sous une forme littéraire dans le

commentaire de l’Apocalypse de Victorin de Petau278

:

« Les vingt-quatre vieillards assis avec leurs vingt-quatre trônes sont les livres des

Prophètes et de la Loi, qui rapportent les témoignages sur le jugement. D’autres

part, il y a vingt-quatre pères : douze apôtres et douze patriarches 279

».

276

WAETZOLDT, 1961, p 23 et CHRISTE, 1996, p 73. 277

WAETZOLDT, 1961, p 22, CHRISTE, 1996, p 73. 278

Ce texte écrit vers 300 en Pannonie, dans le contexte des persécutions de Dioclétien, a ensuite été corrigé

par saint Jérôme en 398, après la paix de l’Eglise. Comme tous les commentateurs paléochrétiens et

médiévaux de l’Apocalypse interprètent le texte de Jean comme une succession de récapitulation de

l’histoire sacrée, depuis le temps des patriarches jusqu’au temps futur de l’Eglise et à la Parousie, la

correction de Jérôme est emprunte d’une autre influence, celle de Ticonius, donastique d’Afrique du Nord à

la fin du IVème siècle. Son œuvre rédigée vers 385, est perdue mais son influence permanente pour grand

nombre d’auteurs jusqu’à l’époque romane permet d’en connaître les principales orientations. Voir

CHRISTE, 1996, pp 21-22. 279

VICTORIN DE POETOVIO, Sur l’Apocalypse, traduction française par DULAEY, Paris, 1997, IV, 10.

Voir POILPRE, 2003, p 119. Voir également KESSLER, 1994, p 371 qui avait déjà remarqué cette

correspondance.

87

C’est donc une image allégorique de l’Ecclesia ex Judaeis et de l’Ecclesia ex

Gentibus figurées au-dessus de leur apôtre respectif qui offre au Christ l’aurum oblicatum

réservé au perpétuel vainqueur280

. Debout, les mains sous le pallium ils s’avancent avec

révérence de chaque côté de l’arc tendant au Seigneur une couronne d’or.

Ainsi, il se peut que le décor de l’arc inaugure les tempora novissima, le Règne

définitif du Christ et de l’Eglise. L’illustration du Tétramorphe renvoie ici aux textes

comme fondations de l’Eglise qui exprime un point dogmatique central : l’humanité, la

royauté, le sacrifice et la résurrection du Christ, figurés dans le médaillon central. Cette

réunion des Evangiles et d’un Christ, vainqueur recevant l’hommage du cortège des

Anciens est une sorte de récapitulation des fondements sacrés et prophétiques de l’Eglise,

de son existence éternelle à travers tous les temps de l’histoire vétéro- et néotestamentaire.

Elle exprime également, comme le relève Kessler, une expression symbolique de la

proclamation de l’Eglise universelle281

. Enfin, au registre inférieur, se trouvent représentés

Paul qui a conduit les Gentils à l’Eglise chrétienne et Pierre qui s’est chargé de donner la

bonne parole au peuple juif. C’est par leur action conjointe que l’Eglise s’est unifiée et

marquait dorénavant sa présence dans les temps actuels et futurs.

Ces dernières hypothèses renvoient immédiatement à l’œuvre de Galla Placidia et

de Léon le Grand. Anne-Orange Poilpré a récemment proposé que le décor ait été

constitué de plusieurs formulations iconographiques inédites. La première, et la plus

importante, est l’introduction de codices à côté du Tétramorphe. Selon elle, il est possible

que la signification des personnages se modifie pour évoluer du texte évangélique vers

l’auteur. Pour autant, elle écarte l’idée d’une rupture entre le « type de Vivant-Evangile et

un autre, celui du Vivant-évangéliste282

». L’iconographie de l’arc de Saint-Paul marque

donc la volonté d’une synthèse entre le contenu des livres et les auteurs. Ainsi, en ce

milieu du Vème siècle, le sens du Tétramorphe connaît une nouvelle évolution par

laquelle le texte et l’auteur fusionnent. La question reste plus problématique en ce qui

concerne la présence du cortège d’Anciens en-dessous de la Maiestas Domini. Pour

Anne-Orange Poilpré, il s’agit là aussi d’un schéma nouveau dans l’art paléochrétien. Au

stade actuel de nos connaissances, il est probable que ce système ait été mis au point à une

280

Christe propose que cette attitude se rapproche de la figuration des sénateurs qui, sur la colonne

d’Arcadius au troisième registre, viennent rendre hommage aux deux empereurs victorieux. Voir CHRISTE,

1996, p 73. 281

KESSLER, 1994, p 371. 282

POILPRE, 2003, p 130.

88

époque antérieure à celle de Léon le Grand et qu’ici, les artistes n’aient voulu en fait qu’en

moderniser l’iconographie. C’est peut-être le contexte politique de l’époque qui a modifié

ici le sens de ces personnages. Effectivement, et en suivant la thèse formulée par Anne-

Orange Poilpré, il semble que le programme ait été réalisé à la suite des tensions soulevées

par le concile de Chalcédoine. Selon elle, ce décor marque la volonté de l’épiscopat

romain de voir reconnaître sa primauté. Pour ce faire, elle en date l’élaboration après

457283

. Cette hypothèse, quoique séduisante, doit être néanmoins nuancée. En effet, la

plupart des spécialistes qui ont travaillé sur l’arc de Saint-Paul et qui y voient une œuvre

du pape Léon, le datent entre 440-450. Et n’oublions pas, en suivant le témoignage du

Liber, que l’intervention fait suite à un sinistre en 441. A notre avis, si le programme de

Saint-Pierre tend à véhiculer un message politique de Léon, il convient peut-être de garder

une certaine distance quant au message appréhendé par Galla Placidia et Léon Ier sur un

décor antérieur de quelques années à cette crise institutionnelle et politique.

Malgré les nombreuses incertitudes sur le programme de l’arc, il ne fait pas de

doute que celui-ci tient une place prépondérante au regard de la structure du bâtiment en

tant que véritable passage entre le quadratum populi et l’espace réservé à l’eucharistie284

.

Au-delà de ce point de jonction capital, il semble que l’arc entretienne un rapport tout

particulier avec l’ensemble du programme. En effet, il doit en être la clef ; véritable point

focal de tout l’édifice servant de prologue aux histoires du vaisseau médian285

.

Sur ce point seul Herbert Kessler s’est risqué à vraiment interpréter le message de

cycle. Pour lui, les peintures expriment l’Alliance de Dieu avec le peuple élu. Le cycle

commence par des épisodes qui commentent le contrat entre Dieu et Israël ; thème qui

s’achève avec le tableau du Songe de Jacob (ill.33). A droite de l’image, on remarque un

personnage en train de répandre de l’huile sur la pierre qui lui a servi de chevet. Cette

onction par Jacob de la pierre de Béthel marque une étape nouvelle dans le destin d’Israël

étant donné que Dieu lui concède un territoire propre286

. Au registre inférieur est illustré le

thème de la rencontre des Juifs et des Gentils figuré par l’histoire de Joseph qui se termine

en Egypte et par des scènes représentant l’histoire de Moïse. Celle-ci commence avec

Moïse et le buisson ardent, le Miracle du serpent et La rencontre de Moïse et Aaron. Pour

Kessler, ces épisodes marquent le renouveau de la Loi d’Abraham, où Moïse a le pouvoir

283

POILPRE, 2003, pp 140-142. 284

Ibid, 2003, p 136. 285

KESSLER, 1985, p 371 et TRONZO, 2001, p 480. 286

KESSLER, 1985, p 372.

89

de réaliser des miracles et reçoit l’autorité de Dieu pour libérer son peuple287

. Cette

confrontation se retrouve sur le mur opposé, étant donné que le programme déploie là des

épisodes de la Vie de saint Etienne. L’auteur indique que des peintures comme

L’Institution des sept (Actes 6 : 1-5) et Saint Etienne chez le haut conseil (Actes 6 : 12-15)

marquent la volonté du concepteur du programme de Saint-Paul d’établir une continuité

entre le cycle vétérotestamentaire et le programme néotestamentaire. C’est à partir de

l’image qui représente La lapidation de saint Etienne (Actes 7 : 58-60) que débute le

schisme entre les Juifs et les Gentils. Cette séparation se retrouve ensuite dans des scènes

comme Paul et Barnabé prêchant à Iconium (Actes 14 : 4) et se termine par la scène de

La lapidation de Paul à Lystra (Actes 14 : 19).

Dans le tableau suivant, où figure l’Assemblée des Apôtres à Jérusalem (Actes 15 :

6), débute l’évangélisation des Gentils. Par la suite, les scènes suivent le ministère de Paul

à Antioche (ou bien à Athènes) et s’achèvent sur la rencontre de Pierre à Rome. H. Kessler

a tenté de prouver que la superposition sur deux registres permettait d’établir des liens

typologiques entre les scènes. Par exemple, alors qu’au registre supérieur du mur

septentrional se déploient Le pêché originel (Gen 3 : 6-7) et Adam et Eve chassés du

Paradis (Gen 3 : 24), juste en-dessous, on trouve Joseph faussement accusé par ses frères

et même mis en prison288

. De même, au folio 41, le personnage le doigt tendu vers le ciel

représenté derrière le patriarche endormi est une préfiguration de l’Adoration des

vieillards de l’arc289

. Enfin, en suivant le livre de l’Exode, Kessler remarque que le texte

parle de dix plaies alors que l’Apocalypse n’en exprime que sept. Pour lui l’artiste de

Saint-Paul a choisi le nombre des plaies en fonction de l’Apocalypse290

.

Certaines des conclusions proposées par Herbert Kessler ont été réfutées. Dans son

étude sur le Rêve de Joseph, Ulrike Koenen a démontré que le personnage derrière le

patriarche au folio 41 (ill.34) n’existait pas à la période paléochrétienne291

. Cette remarque

a son importance, étant donné que Kessler raisonne sur la base des dessins du Codex

Barberini qui transcrivent des images largement transformées et dont il n’est pas certain

287

KESSLER, 1985, p 372. 288

Ibid, 1985, p 373. 289

Ibid,1985, p 375. 290

Ibid, 1985, p 376. 291

KOENEN, 1992, pp 182-194.

90

que le dernier état reprenne véritablement ce qui pouvait se voir sur les murs292

. A ces

premières objections, ajoutons que la typologie observée par Kessler entre l’histoire de la

Création et l’histoire de Joseph n’est pas évidente. Pour nous, le programme constitue une

grande phrase dont l’introduction est l’arcus maior. Sur les deux registres du mur nord

nous est exposé linéairement le livre de l’Ancien Testament. Le cycle reprend alors sur le

mur opposé, avec ces « scènes-tampons » qu’a justement remarquées Kessler, pour

continuer peut-être en suivant chronologiquement le texte des Actes, aux registres

supérieur et inférieur jusqu’à l’entrée.

Néanmoins, il ne fait pas de doute que certaines images du cycle renvoient par

écho à des peintures « jumelles » sur le mur opposé. Par exemple, sur le mur septentrional

est représenté La rencontre de Moïse et Aaron, alors que l’image qui commente La

rencontre de Pierre et Paul se trouve sur la partie méridionale. Pour Kessler, le folio 51

souligne avec force la rencontre entre les Juifs et les Gentils et marque la complicité des

deux protagonistes pour libérer le peuple d’Israël. C’est le même schéma qui est employé

au folio 128 où l’apôtre des Juifs et des Gentils rassemble ses forces pour établir

l’unification de l’Eglise293

.

Ces dernières observations nous amènent tout naturellement à reconsidérer le

message qui se déploie dans la nef. Sur ce point, le découpage réalisé par Kessler est

semble t-il tout à fait pertinent. L’arc supporte l’idée de l’installation et de l’unification de

l’Eglise sous un Christ-roi. C’est l’histoire de cette unification qui est racontée sur les

murs. Pour autant, nous avons remarqué qu’au folio 121 l’imagier de la basilique a repris,

pour représenter saint Paul, la même figuration employée par les sculpteurs paléochrétiens

pour représenter le Christ enseignant entouré de ses apôtres. Ce genre de détail se retrouve

dans la scène où Paul ressuscite Eutychus (Actes 20 : 10-12) (ill.65) ou encore dans

l’image qui commente La Guérison du paralysé à Lystra (Actes 14 : 8-10) (ill.82). Il

292

Nous avions déjà remarqué dans nos pages précédentes que Kessler pensait que les artistes de Saint-Paul

n’avaient pas suivi l’ordre chronologique du texte dans certaine partie du programme et particulièrement

dans les scènes du Nouveau Testament pour éviter au spectateur de réaliser un aller retour. On se demande

alors pourquoi ce n’est pas le même système qui a été choisi sur les peintures vétérotestamentaire ? Et

pourquoi se système ne s’est pas répercuté sur d’autres cycles plus tardifs ? Il semble en tous cas certain que

la conception linéaire prévalait à cette période. Voir BASCHET, Jérôme., « Logique narrative, nœuds

thématiques et localisation des peintures murales. Remarques sur un livre récent et sur un cas célèbre de

boustrophédon » dans L’emplacement et la fonction des images dans la peinture murale du Moyen

Age :Actes du 5ème

séminaire International d’Art Mural, Saint-Savin, 16-18 Septembre 1992, cahier n°2,

Saint-Savin, 1992 pp 103-195 et spécialement p 104. 293

KESSLER, 1999, p 536.

91

semble ici que Paul manifeste des capacités à l’égal de celle du Christ294

. En considérant

le contexte de production du programme que l’on peut dater de la fin du IVème siècle, il

se peut qu’à la signification découverte par Kessler s’en ajoute une autre, plus implicite.

Dans l’édifice construit pour rallier à la foi chrétienne les derniers foyers païens, le

programme peut exprimer ce passage de saint Paul dans sa Première Epître aux

Corinthiens :

« Montrez-vous mes imitateurs, comme je le suis moi-même du Christ »

(Cor 11 : 1).

De la même manière, les scènes vétérotestamentaire mettent en valeur la foi

exemplaire des patriarches ; vertu également explicitée par saint Paul dans son Epître aux

Hébreux :

« Par la foi, Abel offrit à Dieu un sacrifice de plus grande valeur que celui de

Caïn ; aussi fut-il reconnu comme juste, Dieu ayant rendu témoignage à ses dons,

et par elle aussi, bien que mort, il en parle encore. (…). Par la foi, Noé divinement

avertit de ce qui n’était pas encore visible, saisi d’une crainte religieuse,

construisit une arche pour sauver sa famille. Par la foi, il condamna le monde et il

devint l’héritier de la justice qui s’obtient par la foi. (…) Par la foi, Abraham mis

à l’épreuve a offert Isaac, et c’est son fils unique qu’il offrait en sacrifice, lui qui

était le dépositaire des promesses, lui à qui il avait dit : « C’est par Isaac que tu

auras une postérité ». Dieu, pensait-il, est capable même de ressusciter les

morts ; c’est pour cela qu’il recouvrera son fils, et ce fut un signe. (…) Par la foi,

Isaac donna à Jacob et à Esaü des bénédictions assurant l’avenir. (…) Par la foi,

il (Moïse) célébra la Pâques et fit l’aspersion du sang, afin que l’Exterminateur ne

touchât point leurs premiers-nés» (Héb : 11 : 1-28).

Comme nous l’avons vu, la mosaïque de l’arc renferme l’espoir eschatologique qui

va installer le Christ roi et prêtre ; décor qui évoque déjà le triomphe de la Foi nouvelle

dans la plus vieille capitale du monde. Sur les murs latéraux, le décor commente l’histoire

de l’unification de l’Eglise tout en célébrant le saint auquel est dédié la basilique.

A la gauche du Christ est illustré le début de l’histoire des peuples. Après avoir

opposé aux bontés du Dieu créateur les infidélités de l’Homme pécheur, le récit

294

On retrouve la même signification pour Pierre dans la sculpture funéraire. Voir CAILLET, 1990, pp 66-

67.

92

développe, au travers de l’histoire des Patriarches l’évolution des relations entre Dieu et

son peuple. C’est pendant cette pérégrination qu’ont été jetées les bases des principales

vertus de la foi chrétienne, dont Dieu a reconnu la valeur.

A la droite du Christ se trouve évoqué le difficile chemin de l’unification de

l’Eglise. Mais surtout, ce cycle figure l’histoire d’un homme d’abord dans l’erreur et qui

par la suite a connu la révélation du Christ. Son itinéraire l’a conduit à réunir toute les

Nations sous la bannière du Seigneur. Pour mener à bien cette mission, il a traversé de la

même manière que Jésus de nombreuses épreuves pour prodiguer la bonne parole. Ce

destin parallèle est particulièrement valorisé par les pouvoirs dont use le saint pour asseoir

son autorité et marquer la véracité de ces propos. Enfin, ce programme se conclut d’une

façon magistrale par une image qui résume la teneur de l’intégralité du programme. En

effet, la scène qui figure la Rencontre de Pierre et Paul marque selon Bisconti un retour

du thème de la Concordia Apostolorum ; instrument de la renovatio Imperii, qui constitue

un véritable témoignage de l’entourage impérial pour encourager les derniers foyers

païens à se convertir au christianisme295

.

295

BISCONTI, 1995, p 88.

93

CONCLUSION

Au terme de ce périlleux parcours, on peut sans risque avancer l’idée que les

documents aujourd’hui en notre possession nous donnent un ensemble assez représentatif

du programme qui a pu exister dans la basilique Saint-Paul-hors-les-murs. Mais les

questions sur celui-ci restent nombreuses. Il est aujourd’hui certain qu’avait été mis en

place pendant l’Antiquité tardive un décor de peintures et de mosaïques qui ornaient les

composantes spatiales majeures de l’édifice. En ce qui concerne les peintures qui se

trouvaient sur les murs latéraux de la nef, la littérature s’accorde à penser que les cycles

avaient été élaborés aux alentours de 400, sous le règne d’Honorius. Il est également établi

que ces programmes prenaient leurs sources dans les livres de l’Ancien Testament et des

Actes des Apôtres. Ces cycles narratifs étaient composés, sur chacun des murs, de deux

registres juxtaposés, suivant un sens de lecture qui partait de l’arcus maior jusqu’à

l’entrée, de gauche à droite pour les scènes vétérotestamentaire et de droite à gauche pour

les tableaux tirés du livre du Nouveau Testament. Enfin, les tableaux devaient adopter un

format carré et étaient séparés les uns des autres par des colonnettes tridimensionnelles en

stuc.

A la suite de l’incendie, les épisodes ont été restaurés sous le pontificat de Léon

Ier. Le pape, sans aucun doute, apporta une contribution nouvelle en ajoutant au-dessous

des scènes bibliques et au-dessus de la corniche une galerie de portraits de ses

prédécesseurs. Cette série, qui suivait un sens chronologique, commençait avec Pierre et

courait jusqu’à Boniface Ier. Chaque portrait présentait dans un médaillon circulaire un

portrait d’un personnage en buste. A la fin du Vème siècle, il est fort possible que l’abside

ait été décorée avec le thème de la Traditio Legis suivant sur ce point l’iconographie qui

se déployait dans l’abside de Saint-Pierre.

Par la suite, pendant le haut Moyen Age, le programme fut complété par

l’adjonction au revers de façade de peintures représentant les Evangélistes et des épisodes

de la Passion du Christ. Puis au XIIIème siècle, sous le pontificat d’Innocent III et

Honorius III, fut réalisé un nouveau décor sur le cul-de-four de l’abside. Aux alentours de

1277 jusqu’à 1279 fut entreprise sous l’abbatiat de Jean VI et avec l’aide de Nicolas III,

une première campagne de restauration sur les scènes néotestamentaires. C’est pendant

cette même période que fut peinte la seconde galerie de portraits de papes sur les

écoinçons des colonnes. Puis de 1282 à 1285, Cavallini intervint sur les tableaux du cycle

94

de l’Ancien Testament pendant qu’Arnolfo di Cambio travaillait au ciborium. Enfin, c’est

sous le pontificat de Jean XXII que fut ouvert un nouveau chantier sur la façade et son

revers. Il ne fait pas de doute que le programme présentait sur la façade au registre

supérieur une Maiestas Domini et au registre inférieur de gauche à droite la représentation

de saint Paul, de la Vierge, de saint Jean-Baptiste et de saint Pierre. Le problème est plus

aigu pour le revers de façade. Nous ne sommes absolument pas certain que le personnage

en charge du chantier avait demandé à l’artiste de reprendre l’intégralité du cycle, s’il

n’est intervenu que ponctuellement sur certains épisodes du programme.

Ce genre de débat se retrouve tout particulièrement pour la mosaïque de l’arcus

maior. Pour certains, cette œuvre aurait été réalisée par Léon le Grand, peut-être à cause

du sinistre de 441, ou bien après le concile de Chalcédoine (451) qui avait engendré une

grave crise institutionnelle. Pour d’autres, il ne fait pas de doute que le programme fut mis

en place à la même période que les cycles bibliques, c'est-à-dire sous le règne de Théodose

et terminé par Honorius. Ce problème, d’une importance capitale, engendre plusieurs sens

de lecture en fonction de son contexte de création. Marque t-il l’intronisation de l’Eglise

universelle pour tous les temps ? Ou alors est-il une expression de l’Eglise romaine

militante en quête de la reconnaissance de sa primauté ? Pour notre part, nous retiendrons

seulement qu’il serait pour le moins étonnant que ce point focal de l’édifice n’ait pas été

décoré à la même période que les murs latéraux du vaisseau médian.

Autre source de discussions, et qui occupe encore aujourd’hui une partie de

l’historiographie italienne, l’intervention de Pietro Cavallini sur le programme

néotestamentaire, la deuxième série de portraits pontificaux et sur la façade. Nous l’avons

vu, il est tout à fait possible que l’artiste se soit entouré d’un atelier, ou bien ait travaillé

sous la direction d’un autre artiste sur le mur septentrional. Ce serait ce même atelier, ou

sous la direction du même maître, qu’aurait été réalisé le portrait d’Anaclet et également le

reste de la seconde galerie des portraits des pontifes. Le problème se pose aussi pour la

mosaïque de la façade. Si l’intervention de Lello da Orvieto est envisagée, il convient de

ne pas écarter l’idée que celui-ci ait peut-être travaillé sur des cartons de Cavallini, ou

alors ce serait un artiste indépendant, travaillant suivant les mêmes schémas que le

désormais grand artiste romain qui est venu se joindre à l’énorme chantier de la basilique

de la voie d’Ostie.

Pour le reste, les hypothèses que nous avons soulevées en ce qui concerne le

programme primitif de la façade sont bien évidemment à prendre avec précaution. Elles

95

constituent une première étude qui, nous l’espérons, en appellera d’autres. C’est d’ailleurs

sur ce point et sans doute sur beaucoup d’autres que se situent les limites de la présente

étude. La solution ne peut venir que d’une nouvelle étude des aquarelles, des dessins et

des gravures qui commentent toutes les parties du programme iconographique et par un

décryptage complet des textes patristiques et exégétiques de l’époque. Mais surtout, il

faudrait confronter davantage encore cet immense programme avec d’autres productions

de l’Antiquité tardive. C’est donc une étude d’une autre envergure qu’il faudrait réaliser

pour appréhender et comprendre la signification du programme iconographique tardo-

antique de la basilique Saint-Paul-hors-les-murs.

96

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111

TABLES DES MATIERES

Remerciements…………………………………………………………………………....1

Introduction……………………………………………………………………………….2

PREMIERE PARTIE : RAPPEL DES DONNEES HISTORIQUES ET ARCHITECTURALES

Chapitre premier : Aux origines de Saint-Paul-hors-les-murs.....................................9

1) Dates et commanditaires………………………………………………………..9

a) Sur le problème du premier édifice…………………………………......9

b) L’intervention de Valentinien II, Théodose et Arcadius……………...10

2) Contexte de Construction……………………………………………………..12

a) Primauté de Pierre……………………………………………………..12

b) Remise à l’honneur de l’apôtre des Gentils…………………………...13

Chapitre second : Genèse structurelle du monument……………………………......16

1) L’Edifice paléochrétiens……………………………………………………....16

a) Plan…………………………………………………………………….16

b)Elévation…………………………………………………………….....17

2) Restauration et restructuration..........................................................................18

a) Les interventions pendant le Moyen Age..............................................18

b) Les bouleversements à l’époque moderne.............................................21

DEUXIEME PARTIE : LE PROGRAMME ICONOGRAPHIQUE : ETAT DE LA QUESTION

Chapitre premier : Sources et organisations du décor originel.................................23

1) Le décor de la nef..............................................................................................23

a) Les portraits des papes..........................................................................23

b) Thèmes et emplacement du cycle biblique............................................26

c) Les saints et les prophètes.....................................................................31

112

2) L’arcus maior et l’abside..................................................................................33

a) Le débat sur le programme de l’arc.......................................................33

b) Hypothèse sur le cycle de l’abside.........................................................36

Chapitre second : Les restaurations et contributions du Moyen Age.........................37

1) Le Haut Moyen Age..........................................................................................38

a) Les peintures du revers de façade..........................................................38

b) La possible restauration de l’arcus maior.............................................47

2) Les interventions du XIIIème siècle..................................................................50

a) Réfection du programme de l’abside.....................................................50

b) La restauration des peintures de la nef..................................................53

c) Le Problème de l’atelier........................................................................59

TROISIEME PARTIE : NOUVELLES HYPOTHESES DE TRAVAIL

Chapitre premier : Retour sur le programme paléochrétien.....................................68

1) Une restitution délicate..................................................................................... 68

a) Nouvelles propositions d’identification de scènes.................................68

b) Questions sur l’iconographie de la façade.............................................71

2) Mode d’élaboration de l’image..........................................................................75

a) Les scènes bibliques...............................................................................75

b) Le cycle de l’arc.....................................................................................79

Chapitre second : Repère chronologique et signification du programme..................80

1) Retour sur certaines estimations........................................................................80

2) Message du décor..............................................................................................84

Conclusion.........................................................................................................................92

Bibliographie......................................................................................................................95