La représentation picturale pour dire l'indicible dans Génocidé de Révérien Rurangwa

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LA REPRESENTATION PICTURALE POUR DIRE L'INDICIBLE DANS GENOCIDE DE REVERIEN RURANGWA RA.'-!G1RA BfA GALLIMORE Genocide 1 est Ie temoignage de Reverien Rurangwa, Rwandais survivant du genocide des Tursi de 1994. C'est l'auroportrait lequelle narrateur Rurangwa alterne continuellement la et 1a narration pour peindre l'homme qu'il est devenu a partir de la rupture de sa vie causee par Ie genocide. L'autoportrait est introduit dans Genocide par une de la photo de famille. Dans cet article, nous allons d' abord montrer comment ce document pictural imparfait devient un maillon puissant auquel £inlt par s'imbriquer Ie portrait que Rurangwa nous peint de lui-meme dans une tentative de se rememorer et de se reapproprier un corps morcele et marque par Ie bourreau. Nous allons ensuite examiner comment ce corps cible, marque et confisque par Ie regard de !'autre et la main criminelle va etre par son proprietalre legitime pour se dire et dire Ie Genocide est un texte Oll plusieurs mecanismes et narratifs sont mis en ceuvre. Notre est de ce fait pluridisciplinaire: elle fait appel differents travaux consacres a l' etude de la et a celle du corps, emanant du domaine de la semiotique, de Ia de la psychanalyse et de la communication en general. Elle s' appuie sur la theorie narratologique et plus precisement sur Ie concept de I'intertextualite, vole qui nous est d'ailleurs tracee par Rurangwa dont temoignage fait continuellement appel aux remoignages et etudes sur Ie des et des Tursi. Le narrateur egalement dans Ie recit mythique et Ie texte historique pour nous presenter differents discours inserirs dans sa chair et sur son corps de Tutsi ethnicise. Son portrait se mire dans l' extrait du constat psyehiatrique integralement a la fin de son temoignage. TEM01N CONFRONTE A L'TNDIClBLE Comme tous les autres survivants du Rurangwa se trouve eonfronte ala problematique de l'indidble. Celle-d s'annonee d'abord dans la phrase de Primo Levi en epigraphe au prologue de son temoignage: «11 n' est ni facile ni agreable de sonder eet abime de noirceur, et je pense cependant qu'on cloit Ie faire}) 9). Comme ce survivant de l'Holocauste, Rurangwa, l'"existence a soudainement bascule une horreuT indicible)1 exprime lui aussi son ambivalent PROTEf::' volume 37 nurnero 45

Transcript of La représentation picturale pour dire l'indicible dans Génocidé de Révérien Rurangwa

LA REPRESENTATION PICTURALE POUR DIRE LINDICIBLE

DANS GENOCIDE DE REVERIEN RURANGWA

RA-G1RA BfA GALLIMORE

Genocide 1 est Ie temoignage de Reverien Rurangwa Rwandais survivant du

genocide des Tursi de 1994 Cest lauroportrait

lequelle narrateur Rurangwa alterne continuellement la et 1a narration pour peindre lhomme quil est devenu a partir de la rupture de sa vie causee par Ie

genocide

Lautoportrait est introduit dans Genocide par une de la photo de famille Dans cet article nous allons dabord montrer comment ce document

pictural imparfait devient un maillon puissant auquel poundinlt par simbriquer Ie portrait

que Rurangwa nous peint de lui-meme dans une tentative de se rememorer et de

se reapproprier un corps morcele et marque par Ie bourreau Nous allons ensuite examiner comment ce corps cible marque et confisque par Ie regard de autre et la

main criminelle va etre par son proprietalre legitime pour se dire et dire Ie

Genocide est un texte Oll plusieurs mecanismes et narratifs sont mis en

ceuvre Notre est de ce fait pluridisciplinaire elle fait appel differents travaux consacres a letude de la et a celle du corps emanant du domaine de la

semiotique de Ia de la psychanalyse et de la communication en general Elle s appuie sur la theorie narratologique et plus precisement sur Ie concept

de Iintertextualite vole qui nous est dailleurs tracee par Rurangwa dont temoignage fait continuellement appel aux remoignages et etudes sur Ie des et des

Tursi Le narrateur egalement dans Ie recit mythique et Ie texte historique pour

nous presenter differents discours inserirs dans sa chair et sur son corps de Tutsi ethnicise Son portrait se mire dans lextrait du constat

psyehiatrique integralement a la fin de son temoignage

RURANG~A TEM01N CONFRONTE A LTNDIClBLE

Comme tous les autres survivants du Rurangwa se trouve eonfronte ala problematique de lindidble Celle-d sannonee dabord dans la phrase de Primo Levi

en epigraphe au prologue de son temoignage laquo11 nest ni facile ni agreable de sonder eet abime de noirceur et je pense cependant quon cloit Ie faire) 9)

Comme ce survivant de lHolocauste Rurangwa lexistence a soudainement

bascule une horreuT indicible)1 (ibid)~ exprime lui aussi son ambivalent

PROTEf bull volume 37 nurnero45

de transmettre son expt-rience du et son

impossibilite de ne pa~ pouvoir ta communiquer Comment Vltl~tmiddotil contenter de raconrer JVec des

mots SOllvent maladroit~ CGrllmcnt transmettrc lintransmissible et comment peur-il (penerrer

dans linirnaginabJe avec des mots irnpuis5ant5 it exprimer Phorreur (ibid 29) Telles sont les

questions que se pose continuellement Runmgvva

dans sa tentative tcmoigner Son tcmoignage non seulement ne peut se dire mais it est aUBsi

incomprehensible et intransmissible Dans son entreprise doulourcuse ternoigner Ruran)Iva a la

pretention non pas d expliquer mals d exposer ce qui Son d ailleurs toute

une serie de laquo pourquoiraquo ct de laquocommenrraquo ltluxquels iI n arrive pas an~pondre laquoTenter de savoir est~ce

Je ne Ie crois pas Seulemenr Ie questions

ne demandent pas la pour surgir elles simposenr d elles~memesraquo (ibid)

Devant cette incomnnmicabilite a la transmission et a la

dune experience dene toute imagination Rurangva se trouve dabord face au dilemme du survivant du genocide par Michael Rinn dans son analyse semiotique de lindicible celui de dire Oll

taireraquo Ie genocide Mais Rurangwa choisit de Ie dire

malgre toutraquo (Rinn 1998 1935) Il simpose Ie devoir de temoigner de certe borreur

Je veux la retracer sans meme si je ne pourrai

la decrir dans toute son harreUT Mais il me la dire pour

ne pas maurir Cest une de combattre qui pourrait

me succomber la wine et Ie silence [ J 9-10) let del chassel Ie dem de vengeance cette hete noire qui mord

Ie creur et dont te venin envahit tout letri are IJmn~r (Ibid l4)

Dire le genocide est pour Rurangwa une parole

therapeutique qui lui permet de rompre le silence et de se defaire la haine qui Ie ronge Sa de temoin non seulement se au singulier mais en outre s artieule au pluriel RuranFWa temoigne pour qulaquo hommage soit rendu aux victimes let que]

reparation et respect fsoientl offerts aux rescapesraquo (ibid 10) Comme celIe des aunes survivants du

lson] histoire rejoint lHi5toireraquo (ibId)

propos fom it ceux dun autre

des Tursi Esther ccttc femme declare que

temoigner il titre n est pas la fin ultime

de SOil tCIl111ignagc cUe parce qu elle sait que au laquoRwanda histoire personnelle est devenlle de 1lIistoireraquo (2004 17) Lc devoir de tcmoigncr au nom de tous et de lhumanite nest pas

une panicularite des Tutsi mab cest lin denominatem commun dei tcmoignagc5 nombreux sUTvivants dautres

Dans son dessein de Rurangwa se heurte egalemenr aun autre grand obstacle il

de sa pro pre mort et apartir 11 a ete tue malS il viti il decrit cette dichotomie singuliere

dans la premiere du de son livre laquo ils mont tue mol et toute ma

du Rwanda en awil mais je ne suis pas mortraquo 9) 11 reitere eerte irrealite inoule a

dans Ie texte laquo ils mont we mais je narrive pas etre mort Du nioins je crois que je suis encore en vieraquo 57) j loin il se consldere meme comme laquo un cadavre vivant)) 66) Dans son etude sur les intimlee Sartir du ff~A~jn

TtJ)JIYrITIIIYP avivTe Regine Waintrater

ecdt

HI W1Cii ou rwandai

tentent na

pas pu

Rurangwa a ete physiquement et

psychologiquement demoli decoupe hache et laquomachette pendant Ie son corps morcele et a cede et a ete recupere au milieu clun tas de cadavres dont les charognards se regalaient Cest

aux prisonniers qui couvraiem terre les corps des morts que Rurangwa a ete decouvert et a pu tard reintegrer la vie Mais quelle vie 11 ne peut meme pas la definir aujourdhui sans entrer dans lirreel Son corps est la preuve n est pas mort mais

amait du mourir que son existence avait ete mais que par laquohasard ou miracleraquo

9) il n est pas mort quil porte toutes

vOLYIc]7 numero bull

Ies marques physiques et psychologiques de cette

mort Rurangwa est un homme detruit physiquement et psychologiquement Son statut laquo mort vivantraquo

nous rappelle celui du laquomusulmanraquo2 decrit

plusieurs remoignages des Juifs survivants des camps

de concentration et que Giorgio Agamben definit

comme une vivant laquo1 la limite de la mort et

de la vieraquo (2003 43) Ce qui reste

Agamben elucide cette definition par celIe empruntee

de Jean Amery [1Ie musulman est dam Ie jargon du camp Ie detem

qui cessait de lutter [ J Ce netait cadavre

un de dans leurs

43)

Rurangwa est ce laquocadavre ambulantraquo Dailleurs

les bourreaux aqui il demande une mise a mort

rapide lui lancent toute une serie de sobriquets sadiques et cyniques ( mort laquomort qui

(Genocide 59) Sur Ie de la mort a la

la vie et de la mort il se reconnalt lui-me me comme tel

crOUte ae sang une

immense un bnmatre it la demarche titubante

Estmiddotce que je I Je ne peux pas repondre Man

corps a man coeur a mal Peut-on avoir mal (Ibid)

Par ailleurs 1 propos la figure du laquomusulrnanraquo

Agamben ecrit A cette image sadjoint une autre qui

semble mcme en detenir e veritable sem Le musHlman nest

pas sCHlemem au tant Hne limite entre Ia ie la mort il marque Ie seuil entre lhomme et Ie non-homme (2003 58)

Au-deL de cette mort physique il y a aussi la

destruction de la psyche La survie du temoin du

genocide et indirectement ceUe de son prouvent qu ( il n est pas facile detruire integralement lhumain que toujours reste quelque

chose Le temoin est ce resteraquo (ibid 146)

De ces premisses dAgamben no liS pouvons deduire que Rurangwa est laquoce resteraquo Genocide est

construit par ltIce resteraquo et a de laquoce Testeraquo

lautoportrait physique et psychologique Rurangwa

relate apartir rupture causee par Ie genocide

a de cette brisure fait une peinture

de ce quil est devenu et nous raconte comment il a cesse detre lenfant de quinze ans qugtil etait

Genocide est lautoportrait dans Ie narrateur

rente de transmettre laquola ) inscrite sur son

laquovisage balafreraquo et avec laquelle illui laquofaut cohabitey (Genocide

LIMAGE PHOTOGRAPHIQUE

ESSENCE DUN RECIT DLALOGUE

Le temoin presente est ]homme

la parole laquosuffoqueraquo au moment OU eUe sannonce

comment pOllrra-t-il dire sa memoire Dans eette

partie de notre analyse nous allons montrer comment

Ie motif de la phorographie cree un contexte narratif favorable pour denouer la parole temoin Le deuxieme chapitre de Genocide ne nous jette pas d emblee dans] enfer du genocide mais constitue

un pnltambule au temoignage proprement dit dans Ie temoin raconte des jours heureuxraquo - groupe

nominal qui sert dailleurs de titre au chapitre en

question Le t(~moin pretend sous ce titre prometteur

raconter la joie de vivre a notre grande surprise Ie chapitre s annonce paradoxalement sous un rapport

ambigu dattirance et de repulsion ambiguite

a son tour provo que sentiments de doute et dhesitation

ia [Dis Jai besoin de la saVOlr it

mes cotes mais nose pas la saisir Je crains res orages de

eI de colere peut dechafner en moi (Ibid 15)

II y a chez le narrateur le refus de nommer

ecceurant de son mal refus qui transparait

dans lambiguite grammaticale Ie paragraphe est

introduit par Ie pronom personnel elle)) sans referent apparent Ce pronom semble denoter lin etre feminin cher au narrateur mais qui paralt en meme temps etre lobjet son angoisse Est-ce une amante

une femme 011 une mere Peu Iidentite de cet etre innommable ce semble que Ientreprise de Rurangwa est perilleuse et va se dire dans la douleur lei Iinnommable est done Ie

prolongement lindicible examine precedemment

La double ambiguite syntaxique et semantique

prend fin au debut troisieme paragraphe quand le

bull vlmre 37 nl1ln~ro 2

temain namme enfin l innommalle i) er nous lobJet cause de son mal

cache entre deux cest la lnfl1(lfflJliP jaHnie

dune illanciemleJ) Elle na pas cartonncc

rassurante des tiragcs mais son inconsiswnce

mernc uccwft lu lulcHT Cest linstant cph6mert3 dune

presence sur un support II represente ee que rai de plus cher au ce qllil y a de abominable au monde

(Ibid 15-16 nous soulignom)

Dans cet extrair de texte nsemble que [image

photographique soit sensible aux fluctuations du temps c est une photographique

rcalisee sur un support pn~eaire ) Elle est de qual ite ( trop mediocre) 17) et sa surface dinscription

par Ie temps na pas beaucoup de cest une feuille de papier)) qui na pas llaquoepaisseuf

rassurante des tilflges professionnelsraquo Ie lien est etabli entre limage photographique 1e temps et indirectement la mort

Dans Ie texte de Rurangwa il semble que ce lien it 1a mort est aussi inherent lessence meme de photographique qui ncst quune de

tdinstant ephemere dune presence fragile) (ibid 15)

La mort est ici par lidee de levanescence de Iinstant qui se dissout aussit6t quil cst capte Dans son ouvragc La Chamhre claire Note sur la

Roland Barthes ecrit que [ J non settlement die [ta a communemem Ie sort du

papiey mais meme 5i eUe est

dIe nen est pas moins martelle 145)

Le lien a la mort explique Barthes est issu du rapport

referentiel entre limage phorographique et lobjct represente Le referent photographique est different

celui autres systemes de representation 119-120)

non pas la chose

aurait pas de nl1r)OPYflDnW [n] ckms la Fhnt(7wrhh nier que la chose a

etc la II y a double conjoime de redite et de passe

Et puisque cefte contminte nexiste que pOllr on doit

poar (essence memc k noeme de la

Le non du nobne nl1r)[I1rmi nniP sera done

ou ~ncore llntrait(lble

Plus Barthes ajoutc que [ ]ceqlli la natwe de la cest u Jose Peu importc la duree cene pose meme Ie temps

dun millionieme de seconde [ J un instant si ou une chose reele sest tTOIIVee devant lceil

Limage photographique telle que Barthes nous la exprime son lien a la mort parce quelle

parait immobile er fixe dans un temps revolu pendant

fait conscience de 1a trace par une presence indeniable suppose la mort c est lit sans doure

la cause de leffroi et de l amertullle de Rurangwa quand il parle cet instant ephemere dune presence fragile) Rurangwa tient cependant it ( ce

resteraquo du document en luine de papier se trouc

qHC je

docllment qui me pennet dembrasse1les visages

man histoire ct un jour peut-erre de Tc()lltrer i mes

silhouette leurs aieux assassines

16 nous soulignons)

Le lien a la mort clevient encore bcallcoLJp clair c est (da silhOuette lernpreinte la trace dun autre temps laissee par sa famille exterminee pendant Ie genocide de 1994

Partant notions de symbole eliccme et dindice

avancees par Charles Pierce sa classification des relations que les entreriennent avec

1U-0 Jean-Marie Schaeffer a fait une etude

sur Dans Du Schaeffer montre

que limage photographique est non pas une icone pure mais un laquoindiciel visibleraquo Cest une trace (detnpreinte))) laissee par reel

(ltltlimpregnantraquo) sous leffet dune

action photochimique (Schaeffer 1987 54) Limage

photographique n est donc pas laquoimpregnant mais sa

visuclle Meme si de la famille

de Rurangwa netoit pas une photocopie elle lui

2 bull

offritait simplement une manifestation de Iobjct une

silhouetteraquo comme ilk reconnait Ie texte cite ci-dessus

Rurangwa attribue pourtant Ie double role

de transmission et de reception acette image photographique ilIa jalousement pour que

famille survive dans la memoire de ses descendants

Comment ce document exprime la ruine par sa

materialite et son essence va-t-il restituer 1a realite de

la finnille de Rurangwa La rcmemore pas Ie passe (rien de proustien

dans une photo) sur moi nest pas

restiruer qu i est aboli Ie temps la mais

dattester que cda que je Jois bien ete Demnt une

photO la conscience ne pas necessairement la voie

dlt souvenir (Barthes 1980 129 et 133)

Schaeffer abonde dans Ie meme sens en montrant

que Ie caractere dempreintc de la photographic ne

lui permet pas de restituer Ie (1987 17) En essence elle ne peut done pas restituer Ie souvenir et

Rurangvva en est conscient Dans Ie projet de Rurangwa est de trouver une pour dire

cette memoire et e est apartir de eette photographie quil tente de tecouvrer la parole pour la dire

La photographie fait des arts visuels et y rejoint dautres arts plastiques Elle done softiir lceil elU spectateur Celle de Ia fa mille de

Rurangwa etant absente du texte Ie doit etre mis en valeur par la dun laquojeraquo

qui la prend en charge pour la presenter au lecteur

spectateur Dans dans Ie

narrateur est en contact evident avec Ie narrataire

pour s assurer de son eeoute car que Ia vue e est qui est iei mise en II semble done que Ie

motif de la photographie est choisi par lauteur pour favoriser lecoute necessaire dans lacte de temoigner du genocide Dans Ie texte eette est mise en

ceuvre du presentatif des demonstratifs er de limperatif

Plusieurs critiques et survivants du

ont 1a necessite de lecoute de

lindicible Dans ou la Jorge Semprun

eerit

On peHt rottt dire de penser El de S) iY~ettre Mais peut~on tout eOtU irna~ner

Le pourrcH-on En a1fToniIs la patience fa passion la

compassion la necessaire 26)

Rurangwa lui-meme deplore Ie fait que les Rwandais non nont ni la ni la d ecouter les SLltvivants

On embete tout le Dwnde atcc notre nos

nos morts de memoire de [ J Li seul discours

aurarise Ie resume a laquo reconciiiation raquo mot

dordre si beau en SOl cri des res capes

131) 3

Les survivanrs semmurent dans Ie silence parce

quils n arrivent pas a etre ecoLltes Le temoignage du

genocide lautredu ecritAnny Rosenman dans Les de ta Shoah

Dans eet ouvrage cette montre que laquo tout

ternoignage implique [ oJ de

mediation liberer

entre autres la Mediation veTS [autre qui est requis la bles5ure de

ce sawir de Ie transmettre den erre ie passeur

ewe que dans

IjasSHrance dn Uen Tenoue ertre lui cr cet autre) (lue

soit Ie isage de ses dans ie temps

que son existence soit materielle au ceile dun

lecteur 21)

Ie motif produit un recit dans lequella laquomediation illautreraquo etablit un contact constant entre Ie temoin et Ie lecteur devient (daurre elu comme

e est Ie cas dans Ie passage suivant Si de courage

de vovs detailer fa quinzaine de personnages qui

passe ce

16 nous soulignons)

du pronom personnel laquoTousraquo denote

clairement ladresse au lecteur Ce dernier detient Ie role du raquo que Waintrater considere

comme pilier du laquo pacte Iestimonial

bull vollln1f numero 2

Plus que rom autre texte UUWOW~TUi)mme Ie Ces avertissements s adressent au lecteur pour lui

est une lrin~ udr~sse i un autic qui La

cnnlcicnce Iumaine done Ie temoin a he isoc ii un moment de

son existence par l6enement done vient temoigner

14)

Apillsieurs endroitl du parcours narrarif du

de Rurangwa lecoute de la part du iecteur est sollicitce par ie narrateur Cest notamment Ie cas lorsqlle le recit qui sous lemprise de la sllbjectivite narratif depasse de loin Ie

de la photo entre dans Ie cr digresse Pour mettre fin aune digression trop ie narrateur

revient a la photo et invite Ie a reprendre lhistoire avec lui par Ie truchement de

I associatif laquoReprenons un instant ma photo de famillo 25)

Duns un autre endroit du parcours narratif le souvenir est si insupportable que ie narrateur est

deloigner la photo de sa vue Saehant que quelquun est a lecoute illui expJique 1a necessitc de rompre le til narratif

Mais je mis trop vite Je range la qui me souleve Ie cOur

cette memoire cherie et hannie -) a sa dam

man tas de papemsse entre un livre cJallemand et m lwre

deconornie Je histoire ason debut (Ibid 27)

Conseient de la nnc~nrp du il se

dabuser de sa patience et de sa bonne volonte et reprend le recit la OU il laisse La reconnaissance

de lecuute joue egalement un role dans Ie de la trame narrative et du souvenir La complicite entre Ie narrateur et Ie lecteur est si

tacite encourage Ie temoignage collectif comme

Ie texte suivant Metis avant doser penetreT dars

impuissants Ii exjJrimer

[ J comlncn~ notre voisin est devenu du JOUT au

lendemain notre assassin

Et ce nest pas aise PHflUPT cda Dabord il a mernoire visiter les somcnirs Cest une torture Puis lant de

choses sont melees non seulement rcmonter loin de

[histoire mais aUlsi descendre en nous-memes dans

ies crareres de nos valcans intimes Cest encore bTuant

douloureux (Ibid 29 nous OVltH~HV

apprendre que dire le

dangereuse jalonnee necessitant une

franche Le narrateur cree iei un scenario initi3tique dans il devient Ie guide

qui introduit Ie lecteur neophyte dans Iunivers dl en sadres~ant lui par du pronom

(VOUS raquo mais aussi en sollicirant de sa part Ie courage

lui est neeessaire pour parcourir eet itineraire perilleux Au milieu du texte Ie prunorn laquovousraquo

fait au laquonOLlSraquo Ce ehangement est ICI

JllUll-ClLLJ car Ie narrarellr detinit Ie recepteur de

comme agent participant a la sphere communicative Le Jecteur nest plus un simple laquoagent

raquo de il est et invite aentrer dns 1a sphere diegetique De ee il semble quun

spatial et affectif so it etabli dans Ie texte

Parfois Ie narrateur le lecteur a temoin Face a [image des femmes hunt ctaient pour celehrer Ie Rurangwa exprime son

envers ces voisines de sa famille nont

pas eu Ie courage de les enfants de leurs

voisins Aujourdhui ces femmes de non-assistance a une personne en Elles nont pas

cacher un enfam de notre famille lors du 21) Ce laquojaccuscraquo interpelle Ie

it te11101n Ruranpwa semble accuser

Durant ce moment dramatique la justice en main et

impose aux accusees une sentence en les eliminant du cadre de la ne veux les voir Je les hurds de la et je les eseamore Il y a jours noirs Oil on ne peut pas voir Ia reaht

en face Le retrecissement du cadre photographique provoque ason tour une rupture narrative La description de la sarrete pour ne

pas declencher dautres souvenirs penibles Le rapport et devirement que le narrateur entretient

avec [image sa famille se traduit par Ie va-et-vient continu entre la et la narration mOllvement qui ason tour provoque 1a

nrnrn du tissLl nanmiddotatif II nous semble ici que Ia

du recit augmente la force du du

neit

voiw)) jO

NUllS pouvons meme ajouter que laspecr

dialogue texte provient de nombreuses rhetoriques sur Ia problcmatique de lindicibIe

parcuurs narratif et une celmiddottaine ecoute de Ia part du

lecteur Ces questions bien nexigent pas de reponses ont lavantage de eventuelles du lecreur et de suggerer auditeur

est lecuute lhistoire On peut ansst dire que

1introduction la dans Ie texte en tant innummabIe consideree en

reference a lindicible peut etre interpretee comme

un moyen dexploiter Ie mystere et provoqu er Ie snspens chez Ie lccteur

Grace a toutes ces grammaticales et

Iimage de la photographie a a de Ies membres de sa famille de

parler de leur de leur de vivre avant de

raconter mort

LJ CeUX qui Ie rcjouissent seront jmr leurs toisins et

ceux qui les corlgnuue (~ette ~)hOl0 est le dernier vestige)

lultime inswmane dun moncle de 5erenit~ qui va sombrer

dans la saneantir 22)

Dc CORPS OBJET AU SUJET

LA REPRESENTATION PICTURALE ET INTERTEXTUEL

DANS LA RECONSTRUCTION lDENTlTA1RE

Dans Ia derniere partie de cette nous allons montrer comment Ie corps de Rurangwa est Ie produit

de plusieurs quon peut lire sur la surface

tegurnentaire Ensuite nous examinerons comment son corps objet dll de l autre etre recupere

par son legitime Cest par Ie truchemnt

du intertextuel et la picturale que Rurangwa devient sujet de son pro pre discours et

reconstruit son identite Sur b photo de face a personnage

represente il y a chez Ie narrateur Ie desir dune remuntee en arriere Ce retrospectif lui pennet

dalimenter la narration et donner un aspect

authl1tique ason temoignage Le retour en arriere lui donn loccasion dinterroger Ie texte historique

Le 4 du intitule Du a Ienfepgt a line teneur didactique

sur Ie mythique et

partie la par canographique du Rwanda Le narrateur saisit

cette occasion pour nous donner une de la fimne et de la flore Le mal fait ~CltIclunu

qui

prend la curieuse forme du 30) c est aussi un pays auquel certains

Occidentaux ont attribue Ie sobriquet de trou du

du monderaquo (ibid) La beaute du Rwanda ne peut pas etre sans taire son

a fait de ce pays une souillure sur Ia carte de I~AJrique et celle dl monde Ie est clairement soHicite

Du texte Ie narrateur oriente Ie lecteur

vers lhistoire du Rwanda Le texte historiquc est insere dans Ie recit par une ilustree Comme

ceHe de la familiale eHe est

A de lillustration dun livre Rwanda Ie narrateur prend lallure dun professeur et

Ie devient son eleve Dc Ie recit

llne teneur didactique Sur Ie plan cette image pennet au narrateur de renouer

Ie dialogue avec le Iecteur et au fecit de reprendre son aspect

Cillustration Ie Hutu et Ie Tutsi Ies trois figures de Ia population rwandaise qui cohabitaient comme des doigts de la mainraquo avant

Ie clivage par la colonisation

Ruran~Wa effectue une remontee vers Ie temps primordial en tentant dexpliquer par Ie du recit VltU1VU

comment lharmonie a ete brisee De ce temps mythique il revient a lillustration pour prouver

ethnique a

constitue un resume de 1histoire du Rwanda de

qui suivent racontent Ies details de lassassinat de tous

Ies membres de sa famille et de

vivantraquo A son portrait

12 intitL11e Oser me

37

Tous les manns Ie meme La wynne dll miroY dam

la saUe de baim [ j Ce que je tois horrible mais n~

peUX tuiter cet un visage qui nest

visage Une tete ltnegre J1 qui semble avoir ere sur

UT[J7eTUE atlCc de mauvais ciseaux en son milicu

Une nnlHnl)lW0 part de Iorem drolle ([tme

consignes (Ies ~erOCJaares prccisait de parLer le CQuJ-- ahauteur

de nez cpate et tranche car cJetait

tin nez de Tlttsi Une seconde cicatrice Ii panir de lordl essaie de la ressemble it un

accYUcileDpoundu [ J ou au point que dans la

tete en permanence pourquoi

89)

Tous les coups reus sur Ie lui ant arrache aussi un ceil et son

[J cloute nes[

boule une ala chair Les poimes

eles lances ant laisse sur ma poitrine des styies noires er epaisses (IHd)

Ce portrait nailS est offert en entier atravers que lui renvoie Ie miroir Cornme Ie titre dLl chapitre

lindique Rurangvva veLlr se regarder en face affronter Ie monstre quon a fait de lui Ce objectif tourne soudainement en un il se

mais ref1echit aussi sur sa nouvelle condition de vie Le corps ele est I element matriciel

elu textej il se fait voir et se fait lire Cest un site sur leque1le genocide a laisse ses marques indelebiles

laquoMon corps mon et Ie plus de ma memoire en portent la nn de rna vie

Pour est grave dans

ma peau comme un tatollage sur lavant-bras des condamnes dAuschwitzraquo (ibid 71) Pour

ces marques sur son corps par I armee il essaie de nous expliquer d abard

comment ce corps a ere erhnicise et puis Le mot qui sert de titre au

de la fois tres descriptif et singulier Ce mot invente par lauteur est forme a partir du substantif raquo pour creer un adjectif

verbal issu dun verbe possible laquogenociderraquo Que Ie mot soit invente cela nest pas

surprenant car Ie mot ii ~Vu_ lui-meme est un

recent cree en 1944 apres [extermination et des T ziganes par les nazis Il est bien

vrai que dans lne societe donnee de nouveaux

concepts necessitent de nouveaux motsraquo Ie Rwanda ne fait donc pas Un

nouveau tenne courant ne apres Ie

Tutsi au Rwanda esr Ie substantif Ce est utilise pour celui au celie

a perpetre Ie Bien quil ne so it pas encore

Ie franais Ie substantif

plusieurs temoignages des dans les discours dans

nationaux et internationaux et meme dans publiees en Kinyarwanda

Dans son temoignage Ruranf-Wa cree une autre forme laquogenoddb pour designer son corps ethnidse sur lequella machette du milicien laisse marques visibes et lisibles Le corps du narrateur et par extension Ie corps du Tursi est un carrefour de

et il ne peut se comprencire quen tenant

compte la production la transformation brd

de la reecriture des anterieurs qui lont

fa~onne

Rurangwa a momre par Ie truchement du texte que Ie discours colonial a ere a la base de

la cristallisation des differences physiques entre les trois groupes ethniques du Rwanda De nombreuses etudes sur Ie Rwanda sont daccord sur ce Dans Les Recits du Semujanga a bien explique comment a lepoque coloniale

Ie disco1OS du satoir a par steniotypage des images

de IOccident sur construit un nouteau systeme

axloc)poundt(1ue avec des nidts vaiorisanr posiriement Ie Tutsi et

negatiwment Ie Hutu (1998

et comment a partir de cette les discours

et ont inverse laquoles

du discours colonial tutsi-bon hutu-mauvais (ibid) Le discours colonial a ete recupere et manipule par les Hutu extremistes leur avantage pour eliminer Ie Tutsi qui dait considere comme un dement nodf au

gouvernement Hutu et aleur bien-ene Les parties du corps du Tursi ethnicise par Ie discours colonial

qui etaient all depart enviees ant ere par apres

vojuf~le numero 2 bull PROTCC

et rejetees par Jes Hutll Dans son Le ethnique Benjamin Sehene ecrit a ce propos

ils (res sonl

lf wvm iLs les mitres

Pendant Ie ie est

a lelimination les traits physiques sokHsant

typiqucmcnt tutsi ctaient cibles pour extermination

Rurangwa ten1oin oculaire tel meurtre en fait une description vividc

lis la lui tranchent les (comme

aux Tutsi detre les Huru

prennent un malin plaisir ales (raccourcirraquo au ales ramener

au 54)4

Les du corps de Rurangwa ont egalement subi

Ie meme sort Sibomana en de moi laquoOh voici Iaine

des Tutsi (iui pointe son nez dehorsraquo Et dun coup tres

il me Ie Tuesi nont pas Ie

de

ces demiers ont mis un loin special

naturelie) 56)

Le corps cles femmes a ete atrocement manipule pour mieux parfaire Ie dessein du genocide des Tursi Dans

une note inseree Ie livre nous donne

des eclaircissements la~dessus Sur les les assassins hutu ont les couN

porwnt sur Ie organes de la ventre et ~-agin

allant briser des de bou tdb Jam

leurs sexes aprgt les (lvoir violees Cest [une des marques

dun Jatteindre une race i1

Les coups machette ou de gourdin par

Ie milicien ont suivi methodiquement les marqueurs erhniques etablis par le discours colonial pour

produire un corps raquo 11 semble donc que ce sied mieux au corps de Rurangwa

lensemble ethniquement a ete par Ie bourreau Le titre du livre fait reference plut6t a son

corps qua sa personne Rurangwa a sans

doute voulu commencer son roman par une tension lexicale em plutot semanrique pour nollS faire entrer

lunivers de [indicible a comprendre

Le corps Rurangwfl est

une surface dinscription sur laquelle peuvent se

lire anrerieurs directement Oll

indirecrement ront transforme et lont conduit au supplice du Il ne peut etIe que

par Ie truchement du intertextueL Nous utilisons iei Ie concept dintertextualite selon la definition que lui donnent Kristeva et Gerard c estshy

fait quun texte soit la reecriture autre

texte produit par la transformation ou la reecriture dautres textes anterieurs Le corps laquogenocideraquo de

Rurangwa est donc comme un texte produir par un

double discours Ie discours colonial

racisre occidentale a ete

par les Hum

leur

de haine de lautre Cest cette version qui a produit a son tour Ie Le corps de constitue donc un par excellence Dans son ouvrage

Gerard Genetre Ie palimpseste comme f)crhem dont on a gratte la premiere inscription

pour en tracer une autre qui ne la pas tout a en sorte par transparence lancien sous Ie

Les coups de subis par Ie corps clu narrateur y ont et

des traces indelebiles Le discours de haine dans chair 11 a pas reellement efface Ie cliscours anterieur

mais 1a marque en gras Cest ainsi Cluon peut encore dechiffrer SOllS Ie nouveau Plusieurs annees

marques sur son corps

renforcent sa victimisation de mot une cible ideate Elies

impUque laquo Tratail a qtle je rcntre

a

Face au regard anLn son corps est a eliminer parce quil est accusateur cest un laquotestisraquo

un ( tiersraquo (Agamben 2003 17) qui

PROT[[ bull

entre Ie ct Iaccuse dans un

proccs Carme genocidaire qui devait eli fniner 1e

corps ethnicise elu Tutsi pas reussi a Ie faire mais

plus La plupart des

marques 80nt localisees sur

son visage elIes sautent aux yeux lc et

li501ent Son corps est devenu veereur des donnees

ethniques et un espace all se d autrcs

discours II aisement au discours social Ses

camarades de classc en Suisse au il vit

croient que cicatrices sont des

quil s est volontairement imposes et quJ il a meme pousse de jusquau cicatricing)

62) Dautres croient quii survecu un rres grave

accident voiture Dans Ie refus de se construire

partir du personnage exterieur quon a fait

Rurangwa a un retrospectif et la tourne

vers Ie du Rwanda pour les

discours qui se superposent sur son corps

Malgre cette demarche son corps reste ]a proie de

sa pwpre perception Hiui est etranger Une distance

s est etablie entre lui et son corps il est associe a la tragedie du avec illui laquofaut

cohabiter

ceiui-ci lui renvoie nne a du mal a assumer

ceUe de I laquoElephant manraquo

89) laquoEst-ce du courage que de sarracher du lit

pour aller planter un naime pas devant

un mimir quon redoute (ibid 101) II interroge

comme Ie faisait laquo Ie miroir qui ne

repond pas

Contrairement au mimir sartrien Ie 8ien nest pas

rassurant

Tout miroir est un ennemi qui me dans lirritation

it [l surgir des reminiscences atroces et des

sentiments violent que je tyreteremis 89)

Rurangva est emmure dans sa sOllffrance et dans

Ihorreur du genocide Le rapport de son evaluaril1n

affirme qllil manifeste laquovisiblement

des sequelles psychiques du rrau rnatisme vecuraquo

171) et quil souffre elu de stress postshy

traumatique (ibid) Rurangwa lui-meme avoue

son a le des souvenirs

sus cites par un bruit un objet une odeuf lIn certain

silence un cri un rienraquo 163) La

neccssite de retrouver Ie souvenir rouvre la blessure

et cause une nouvelle souffrance II est

confronte au la memoire it la photo

qui me soul eve Ie cceur

cette memoire eherie et honnie lJraquo 27) Ce qui leffraie Ie sur cette c est Ie

souvenir du meurtre cie sa mere la pire atrocite a illluil fut dassisterraquo (ibid 47) La

reveille Ie souvenir insupportable la l1e de

sa mere par 1a milice feminine

avant detre eventree par son tortionnaire Cette scene

pr0voque chez lui me blessure quun coup

de macherteraquo 48) et a inscrit en lui une haine

atroce

La haine Ju des de wus les Hutu Tille en

moi a tmtam comme ies dents dun

jam([is elre relire tant it penetre loin dans ta chair Une haine

et cowie qui ne que

Sihomana tout son

temps pour omrir Ie ventre de mel mere LJ (Ibid)

11 compte laquo la haine gt les laquotrois mots clesraquo quil

considere cornme declencheurs de son

]4) Comme nous ravons 1110ntre prealablement

son cst une tentative de pouvoir se defaire

de ceUe haine qui frise la vengeance c est ( line

de combattre ce qui pourrait [tel falre succomber la

haine et Ie silenceraquo 9-10) Malgre Ie souvenir insupportable associe fl

de la c est cette memc qui va lui procurer

Ie pouvoir de se [(concilier avec lui-meme et de

reconquerir son Un detail emane

de Ie lt )j et Iattire laquo llel boubon colore

niveau du ventre)j (ibid 21)

Quelques de

ce

Dans

car clest nwi l))rte Je

suis son prernier eUe a 21 am et dent de se marier

On rna souvent cUt que je h~i ressentblais etonnamment

que rnon t lsage son eme traits de ma nere Ie SOUVenir de amnt

Cest auss fa redoute aCe point

des crireres didentification

naltre molS npres Ie manage

Kambamba Ie 3 juin 1978 au dispensaire de Muginaraquo

(ibid - mais aussi un point de

- la ressemblance avec sa mere Cela est signiflcatif pour lhomme defigure dont lidentitc a ctc eHacce

de la mere lui oHre une nouvelle naissance

a un certain moment dans la description

et de la ccrcmonie du mariage il pense de la danse lors de la cen3monie et se

retrouve dans Ie sein de sa mere

laquoDans Ie ventre de 1a mere je dois sentir cette chaude houle de lenthousiasme qui me porte je

de celie me porteraquo Du souvenir emanent toutes sortes de sensations et

sentiments semblables a ceux engendres par la

mcmoire La ressemblance avec sa mere lui donne Ie

courage dassumer image du miroir quil redoutait

auparavant Ainsi refuse-t-ille suicide qui Ie la de Iimage refletee par la II trouve

la redemption dans cette ressemblance

avec sa mere Iimagc de la mere est Ie mhoir dans

il se voit comme il etait avant la

it la mere nous rappelle Ie

miroin) lacanien Dans Ecrits I Jacques Lacan

faut (flnUmTIIlYP Ie stade du miroir comme une

donne it ce terme asavoir la

it assume une

94)

A travers image de sa mere il forme une

lui-meme et effectue la conquete de son propre

corps laquoMeme si e1Ie est ravagee ma figure est ccUe

offerte ma mere (Genocide 91) Aimi

Ie suicide et meme [operation

II veut egalement conserver son laquovisage balafre parce veut gravees sur [son] corps les marques

(ibid) II considere son corps comme un

memorial difficilement alterable par rapport a sites mcmoriaux On pellt nettoyer laquoles les

d tous les lieux du mais on ne peut

enlever lsesJ balafresraquo (ibid) Ses laquocicatrices

son une attestation vivante charnelle et de ces crimes contre lhumaniteraquo alars que les laquoautres

memoriaux exposent des tapis de cranes ou

empilements soigneux de tibias et de raquo (ibid)

CONCLUSION

Limage photographique a

des siens Cest un long cri de Ihorreu[raquo Le narrateur secrie mals en meme

temps Rurangwa se en face et

un texte qui est a la fois son miroir et son espace dinterrogation

Limage de la mere et indirectement

photographique a joue un dans la

reconstruction de lidentite de Rurangwa Elle a

offert au narrateur dont des

points de repere importants pom une photo de carte didentite OU Ion peut

et la date de naissance et confirmer la

La photo de famille dont recit du genocide ltitrempee dans un de sang)

22) a pu se purifier a de la mere

A la fin du t6moignage elle devient ou l11oin5

une relique sacree Limage de la mere

aRurangwa de se son corps

et de Iassumer A la fin du rejet quil entretenait avec son corps est devenue

une relation damour Son corps survivant a par

la suite acquis un role double de memoire

et dlt genocide Dans Ie livre de photographique a depasse da rp-wcpn~rm

Temps raquo laquoiemphase dechirante du noeme (Barthes 1980 148) pour devenir nne photo souvenir

et une photo didentite

bull voume 37 nlJmero 2

NOTES L Toute reference it cet ouvrage rapporte t~dition de 2006 aux

Pre~8(5 de la Rcnai5sancc Le3 t(~ferences paginales seront clesormais conne-euros dansle texte 1 precedees du de lceuvrlt entre rarenth(ses 2 Le terme fv1u~e1rn(1nn laquo11usuhnan gtI prend origjnc dans

Ie caIUp dtuschvitz dOl ii 6l est prop8ge clautres camps Les

sont diversifies sur sa vraie definition Pour certains lti il reno1c au sens littera1 du terT1e aabe mHsUn ql~i sigrdfie cellii qLt sc sou met sans reserve ~l la volonte divine_ lviais tandi~ que la resignutioll dJ muslim repose sur]a convicrion que la volonte dAlJ8h est i lceuvre chac~ue instant dans moir~drc cvenenlent Ie lllusulman

dAuschwitz semble pedu toute volonte ct toute conscience (Agamben 2003 46) Dautr~s croiem que Ie termc semble provenir

de la posture Ijpique de detenus blottis stub jmnhes replies ala m-lniere orientale e visage riglJe con101e celle Jlun luasqueraquo

(ibid 47) DHutres cfQicnt entin qUe le termc lt faisait aHusion aux

((mouvernents rypiques des nlusulmans l1

CeS allees venues du bustej

du haur vers Ie bas [evoqnanrJ es ricuels de prierc islamiquesgt (Sofsh par Agamben 2003 47) Notre reference ce mot article

evoque tOllt simplement lbomme dont In force nterieure et physique a

de completenrent lriS(c Dans SUniVa(~t~s Esther Viujmvayo souteve egalenlent ccte

problenrique iecoute Ul Rwanda On been les gens quon

assez parle Ju genocide au ltllors laquoils peuvcnt pas suporter demendre LJ Je pouna dire en Ule phrase pourquoi on s est tu apres le genocide on sent(Jit qu)n derangeait [] COfnil1enCeS raconter rac()nter if nlcceptent decouer cr cle-st

terrihle (2005 20) 4 SU1VVanres vuawayo parle de ce corps qui [aliaie

mcttre a la mille standad laide de la machette Les hommcs rutsi ~1Vaient 18 reputatit)n detre trop granrh un ITletre qllatreAdngt~

dix devenait done line faute Les femmes dies commettaicnt dilVoir taHle ~es lnil1(c ph1t denorrnes hanches Avant de les [Uer it faUait June les raluener a une taille st~uldard I~

[J (2C05 90) 5 Couronne symbole de la matcrnite portee tradllmnellement

toures nvandaises

REF~RENCES BIBLIOGRAPHIQUES t-GAMHEK i2003j Ce ~rs[p Paris Rivaglgts BARTHES R [1980] Crambre Claire Note SHY la phowgmfJhie Gallimatd Souil coli Cabiers du cinema

DAYAN ROS~Nl-Hlgt [1007J AijJ~(bes de ta Shoal Sgtlvivre 1tn1Olgrer Paris CNRS ClEt-EnE G [1982) Palimpseste La au secord Paris

Sen colI LACAN J [(966) i9991 Paris Sed MUIAWAYO [(2004) 200SJ SiniVanes Rwanda Historre genocide Paris LAube tIJN lvi [1998 Rccits dL genocide S~mioriqHe lindicib[f)

Delachaux cr Niestjf~ R~RAJGWA R [2006] Genocide de ]a Renaissance SCHAEfFER] M [19871 Lrraglt

Paris SeiJil coIL laquoPoe-tique raquo)

B tI999] ethmqucJ Paris Dagorno SEMPRUl] [19941 L uu la tie Paris Gallimard SEMl]ANGA] [1998] fondaleurs du drane mandais Paris

Jl-ianHttan WAITRATcR R II003J SoniT du genocide Temoigrer pour abprerdrc J

Paris

VOlime rJITIlho 2 bull PRorEL

de transmettre son expt-rience du et son

impossibilite de ne pa~ pouvoir ta communiquer Comment Vltl~tmiddotil contenter de raconrer JVec des

mots SOllvent maladroit~ CGrllmcnt transmettrc lintransmissible et comment peur-il (penerrer

dans linirnaginabJe avec des mots irnpuis5ant5 it exprimer Phorreur (ibid 29) Telles sont les

questions que se pose continuellement Runmgvva

dans sa tentative tcmoigner Son tcmoignage non seulement ne peut se dire mais it est aUBsi

incomprehensible et intransmissible Dans son entreprise doulourcuse ternoigner Ruran)Iva a la

pretention non pas d expliquer mals d exposer ce qui Son d ailleurs toute

une serie de laquo pourquoiraquo ct de laquocommenrraquo ltluxquels iI n arrive pas an~pondre laquoTenter de savoir est~ce

Je ne Ie crois pas Seulemenr Ie questions

ne demandent pas la pour surgir elles simposenr d elles~memesraquo (ibid)

Devant cette incomnnmicabilite a la transmission et a la

dune experience dene toute imagination Rurangva se trouve dabord face au dilemme du survivant du genocide par Michael Rinn dans son analyse semiotique de lindicible celui de dire Oll

taireraquo Ie genocide Mais Rurangwa choisit de Ie dire

malgre toutraquo (Rinn 1998 1935) Il simpose Ie devoir de temoigner de certe borreur

Je veux la retracer sans meme si je ne pourrai

la decrir dans toute son harreUT Mais il me la dire pour

ne pas maurir Cest une de combattre qui pourrait

me succomber la wine et Ie silence [ J 9-10) let del chassel Ie dem de vengeance cette hete noire qui mord

Ie creur et dont te venin envahit tout letri are IJmn~r (Ibid l4)

Dire le genocide est pour Rurangwa une parole

therapeutique qui lui permet de rompre le silence et de se defaire la haine qui Ie ronge Sa de temoin non seulement se au singulier mais en outre s artieule au pluriel RuranFWa temoigne pour qulaquo hommage soit rendu aux victimes let que]

reparation et respect fsoientl offerts aux rescapesraquo (ibid 10) Comme celIe des aunes survivants du

lson] histoire rejoint lHi5toireraquo (ibId)

propos fom it ceux dun autre

des Tursi Esther ccttc femme declare que

temoigner il titre n est pas la fin ultime

de SOil tCIl111ignagc cUe parce qu elle sait que au laquoRwanda histoire personnelle est devenlle de 1lIistoireraquo (2004 17) Lc devoir de tcmoigncr au nom de tous et de lhumanite nest pas

une panicularite des Tutsi mab cest lin denominatem commun dei tcmoignagc5 nombreux sUTvivants dautres

Dans son dessein de Rurangwa se heurte egalemenr aun autre grand obstacle il

de sa pro pre mort et apartir 11 a ete tue malS il viti il decrit cette dichotomie singuliere

dans la premiere du de son livre laquo ils mont tue mol et toute ma

du Rwanda en awil mais je ne suis pas mortraquo 9) 11 reitere eerte irrealite inoule a

dans Ie texte laquo ils mont we mais je narrive pas etre mort Du nioins je crois que je suis encore en vieraquo 57) j loin il se consldere meme comme laquo un cadavre vivant)) 66) Dans son etude sur les intimlee Sartir du ff~A~jn

TtJ)JIYrITIIIYP avivTe Regine Waintrater

ecdt

HI W1Cii ou rwandai

tentent na

pas pu

Rurangwa a ete physiquement et

psychologiquement demoli decoupe hache et laquomachette pendant Ie son corps morcele et a cede et a ete recupere au milieu clun tas de cadavres dont les charognards se regalaient Cest

aux prisonniers qui couvraiem terre les corps des morts que Rurangwa a ete decouvert et a pu tard reintegrer la vie Mais quelle vie 11 ne peut meme pas la definir aujourdhui sans entrer dans lirreel Son corps est la preuve n est pas mort mais

amait du mourir que son existence avait ete mais que par laquohasard ou miracleraquo

9) il n est pas mort quil porte toutes

vOLYIc]7 numero bull

Ies marques physiques et psychologiques de cette

mort Rurangwa est un homme detruit physiquement et psychologiquement Son statut laquo mort vivantraquo

nous rappelle celui du laquomusulmanraquo2 decrit

plusieurs remoignages des Juifs survivants des camps

de concentration et que Giorgio Agamben definit

comme une vivant laquo1 la limite de la mort et

de la vieraquo (2003 43) Ce qui reste

Agamben elucide cette definition par celIe empruntee

de Jean Amery [1Ie musulman est dam Ie jargon du camp Ie detem

qui cessait de lutter [ J Ce netait cadavre

un de dans leurs

43)

Rurangwa est ce laquocadavre ambulantraquo Dailleurs

les bourreaux aqui il demande une mise a mort

rapide lui lancent toute une serie de sobriquets sadiques et cyniques ( mort laquomort qui

(Genocide 59) Sur Ie de la mort a la

la vie et de la mort il se reconnalt lui-me me comme tel

crOUte ae sang une

immense un bnmatre it la demarche titubante

Estmiddotce que je I Je ne peux pas repondre Man

corps a man coeur a mal Peut-on avoir mal (Ibid)

Par ailleurs 1 propos la figure du laquomusulrnanraquo

Agamben ecrit A cette image sadjoint une autre qui

semble mcme en detenir e veritable sem Le musHlman nest

pas sCHlemem au tant Hne limite entre Ia ie la mort il marque Ie seuil entre lhomme et Ie non-homme (2003 58)

Au-deL de cette mort physique il y a aussi la

destruction de la psyche La survie du temoin du

genocide et indirectement ceUe de son prouvent qu ( il n est pas facile detruire integralement lhumain que toujours reste quelque

chose Le temoin est ce resteraquo (ibid 146)

De ces premisses dAgamben no liS pouvons deduire que Rurangwa est laquoce resteraquo Genocide est

construit par ltIce resteraquo et a de laquoce Testeraquo

lautoportrait physique et psychologique Rurangwa

relate apartir rupture causee par Ie genocide

a de cette brisure fait une peinture

de ce quil est devenu et nous raconte comment il a cesse detre lenfant de quinze ans qugtil etait

Genocide est lautoportrait dans Ie narrateur

rente de transmettre laquola ) inscrite sur son

laquovisage balafreraquo et avec laquelle illui laquofaut cohabitey (Genocide

LIMAGE PHOTOGRAPHIQUE

ESSENCE DUN RECIT DLALOGUE

Le temoin presente est ]homme

la parole laquosuffoqueraquo au moment OU eUe sannonce

comment pOllrra-t-il dire sa memoire Dans eette

partie de notre analyse nous allons montrer comment

Ie motif de la phorographie cree un contexte narratif favorable pour denouer la parole temoin Le deuxieme chapitre de Genocide ne nous jette pas d emblee dans] enfer du genocide mais constitue

un pnltambule au temoignage proprement dit dans Ie temoin raconte des jours heureuxraquo - groupe

nominal qui sert dailleurs de titre au chapitre en

question Le t(~moin pretend sous ce titre prometteur

raconter la joie de vivre a notre grande surprise Ie chapitre s annonce paradoxalement sous un rapport

ambigu dattirance et de repulsion ambiguite

a son tour provo que sentiments de doute et dhesitation

ia [Dis Jai besoin de la saVOlr it

mes cotes mais nose pas la saisir Je crains res orages de

eI de colere peut dechafner en moi (Ibid 15)

II y a chez le narrateur le refus de nommer

ecceurant de son mal refus qui transparait

dans lambiguite grammaticale Ie paragraphe est

introduit par Ie pronom personnel elle)) sans referent apparent Ce pronom semble denoter lin etre feminin cher au narrateur mais qui paralt en meme temps etre lobjet son angoisse Est-ce une amante

une femme 011 une mere Peu Iidentite de cet etre innommable ce semble que Ientreprise de Rurangwa est perilleuse et va se dire dans la douleur lei Iinnommable est done Ie

prolongement lindicible examine precedemment

La double ambiguite syntaxique et semantique

prend fin au debut troisieme paragraphe quand le

bull vlmre 37 nl1ln~ro 2

temain namme enfin l innommalle i) er nous lobJet cause de son mal

cache entre deux cest la lnfl1(lfflJliP jaHnie

dune illanciemleJ) Elle na pas cartonncc

rassurante des tiragcs mais son inconsiswnce

mernc uccwft lu lulcHT Cest linstant cph6mert3 dune

presence sur un support II represente ee que rai de plus cher au ce qllil y a de abominable au monde

(Ibid 15-16 nous soulignom)

Dans cet extrair de texte nsemble que [image

photographique soit sensible aux fluctuations du temps c est une photographique

rcalisee sur un support pn~eaire ) Elle est de qual ite ( trop mediocre) 17) et sa surface dinscription

par Ie temps na pas beaucoup de cest une feuille de papier)) qui na pas llaquoepaisseuf

rassurante des tilflges professionnelsraquo Ie lien est etabli entre limage photographique 1e temps et indirectement la mort

Dans Ie texte de Rurangwa il semble que ce lien it 1a mort est aussi inherent lessence meme de photographique qui ncst quune de

tdinstant ephemere dune presence fragile) (ibid 15)

La mort est ici par lidee de levanescence de Iinstant qui se dissout aussit6t quil cst capte Dans son ouvragc La Chamhre claire Note sur la

Roland Barthes ecrit que [ J non settlement die [ta a communemem Ie sort du

papiey mais meme 5i eUe est

dIe nen est pas moins martelle 145)

Le lien a la mort explique Barthes est issu du rapport

referentiel entre limage phorographique et lobjct represente Le referent photographique est different

celui autres systemes de representation 119-120)

non pas la chose

aurait pas de nl1r)OPYflDnW [n] ckms la Fhnt(7wrhh nier que la chose a

etc la II y a double conjoime de redite et de passe

Et puisque cefte contminte nexiste que pOllr on doit

poar (essence memc k noeme de la

Le non du nobne nl1r)[I1rmi nniP sera done

ou ~ncore llntrait(lble

Plus Barthes ajoutc que [ ]ceqlli la natwe de la cest u Jose Peu importc la duree cene pose meme Ie temps

dun millionieme de seconde [ J un instant si ou une chose reele sest tTOIIVee devant lceil

Limage photographique telle que Barthes nous la exprime son lien a la mort parce quelle

parait immobile er fixe dans un temps revolu pendant

fait conscience de 1a trace par une presence indeniable suppose la mort c est lit sans doure

la cause de leffroi et de l amertullle de Rurangwa quand il parle cet instant ephemere dune presence fragile) Rurangwa tient cependant it ( ce

resteraquo du document en luine de papier se trouc

qHC je

docllment qui me pennet dembrasse1les visages

man histoire ct un jour peut-erre de Tc()lltrer i mes

silhouette leurs aieux assassines

16 nous soulignons)

Le lien a la mort clevient encore bcallcoLJp clair c est (da silhOuette lernpreinte la trace dun autre temps laissee par sa famille exterminee pendant Ie genocide de 1994

Partant notions de symbole eliccme et dindice

avancees par Charles Pierce sa classification des relations que les entreriennent avec

1U-0 Jean-Marie Schaeffer a fait une etude

sur Dans Du Schaeffer montre

que limage photographique est non pas une icone pure mais un laquoindiciel visibleraquo Cest une trace (detnpreinte))) laissee par reel

(ltltlimpregnantraquo) sous leffet dune

action photochimique (Schaeffer 1987 54) Limage

photographique n est donc pas laquoimpregnant mais sa

visuclle Meme si de la famille

de Rurangwa netoit pas une photocopie elle lui

2 bull

offritait simplement une manifestation de Iobjct une

silhouetteraquo comme ilk reconnait Ie texte cite ci-dessus

Rurangwa attribue pourtant Ie double role

de transmission et de reception acette image photographique ilIa jalousement pour que

famille survive dans la memoire de ses descendants

Comment ce document exprime la ruine par sa

materialite et son essence va-t-il restituer 1a realite de

la finnille de Rurangwa La rcmemore pas Ie passe (rien de proustien

dans une photo) sur moi nest pas

restiruer qu i est aboli Ie temps la mais

dattester que cda que je Jois bien ete Demnt une

photO la conscience ne pas necessairement la voie

dlt souvenir (Barthes 1980 129 et 133)

Schaeffer abonde dans Ie meme sens en montrant

que Ie caractere dempreintc de la photographic ne

lui permet pas de restituer Ie (1987 17) En essence elle ne peut done pas restituer Ie souvenir et

Rurangvva en est conscient Dans Ie projet de Rurangwa est de trouver une pour dire

cette memoire et e est apartir de eette photographie quil tente de tecouvrer la parole pour la dire

La photographie fait des arts visuels et y rejoint dautres arts plastiques Elle done softiir lceil elU spectateur Celle de Ia fa mille de

Rurangwa etant absente du texte Ie doit etre mis en valeur par la dun laquojeraquo

qui la prend en charge pour la presenter au lecteur

spectateur Dans dans Ie

narrateur est en contact evident avec Ie narrataire

pour s assurer de son eeoute car que Ia vue e est qui est iei mise en II semble done que Ie

motif de la photographie est choisi par lauteur pour favoriser lecoute necessaire dans lacte de temoigner du genocide Dans Ie texte eette est mise en

ceuvre du presentatif des demonstratifs er de limperatif

Plusieurs critiques et survivants du

ont 1a necessite de lecoute de

lindicible Dans ou la Jorge Semprun

eerit

On peHt rottt dire de penser El de S) iY~ettre Mais peut~on tout eOtU irna~ner

Le pourrcH-on En a1fToniIs la patience fa passion la

compassion la necessaire 26)

Rurangwa lui-meme deplore Ie fait que les Rwandais non nont ni la ni la d ecouter les SLltvivants

On embete tout le Dwnde atcc notre nos

nos morts de memoire de [ J Li seul discours

aurarise Ie resume a laquo reconciiiation raquo mot

dordre si beau en SOl cri des res capes

131) 3

Les survivanrs semmurent dans Ie silence parce

quils n arrivent pas a etre ecoLltes Le temoignage du

genocide lautredu ecritAnny Rosenman dans Les de ta Shoah

Dans eet ouvrage cette montre que laquo tout

ternoignage implique [ oJ de

mediation liberer

entre autres la Mediation veTS [autre qui est requis la bles5ure de

ce sawir de Ie transmettre den erre ie passeur

ewe que dans

IjasSHrance dn Uen Tenoue ertre lui cr cet autre) (lue

soit Ie isage de ses dans ie temps

que son existence soit materielle au ceile dun

lecteur 21)

Ie motif produit un recit dans lequella laquomediation illautreraquo etablit un contact constant entre Ie temoin et Ie lecteur devient (daurre elu comme

e est Ie cas dans Ie passage suivant Si de courage

de vovs detailer fa quinzaine de personnages qui

passe ce

16 nous soulignons)

du pronom personnel laquoTousraquo denote

clairement ladresse au lecteur Ce dernier detient Ie role du raquo que Waintrater considere

comme pilier du laquo pacte Iestimonial

bull vollln1f numero 2

Plus que rom autre texte UUWOW~TUi)mme Ie Ces avertissements s adressent au lecteur pour lui

est une lrin~ udr~sse i un autic qui La

cnnlcicnce Iumaine done Ie temoin a he isoc ii un moment de

son existence par l6enement done vient temoigner

14)

Apillsieurs endroitl du parcours narrarif du

de Rurangwa lecoute de la part du iecteur est sollicitce par ie narrateur Cest notamment Ie cas lorsqlle le recit qui sous lemprise de la sllbjectivite narratif depasse de loin Ie

de la photo entre dans Ie cr digresse Pour mettre fin aune digression trop ie narrateur

revient a la photo et invite Ie a reprendre lhistoire avec lui par Ie truchement de

I associatif laquoReprenons un instant ma photo de famillo 25)

Duns un autre endroit du parcours narratif le souvenir est si insupportable que ie narrateur est

deloigner la photo de sa vue Saehant que quelquun est a lecoute illui expJique 1a necessitc de rompre le til narratif

Mais je mis trop vite Je range la qui me souleve Ie cOur

cette memoire cherie et hannie -) a sa dam

man tas de papemsse entre un livre cJallemand et m lwre

deconornie Je histoire ason debut (Ibid 27)

Conseient de la nnc~nrp du il se

dabuser de sa patience et de sa bonne volonte et reprend le recit la OU il laisse La reconnaissance

de lecuute joue egalement un role dans Ie de la trame narrative et du souvenir La complicite entre Ie narrateur et Ie lecteur est si

tacite encourage Ie temoignage collectif comme

Ie texte suivant Metis avant doser penetreT dars

impuissants Ii exjJrimer

[ J comlncn~ notre voisin est devenu du JOUT au

lendemain notre assassin

Et ce nest pas aise PHflUPT cda Dabord il a mernoire visiter les somcnirs Cest une torture Puis lant de

choses sont melees non seulement rcmonter loin de

[histoire mais aUlsi descendre en nous-memes dans

ies crareres de nos valcans intimes Cest encore bTuant

douloureux (Ibid 29 nous OVltH~HV

apprendre que dire le

dangereuse jalonnee necessitant une

franche Le narrateur cree iei un scenario initi3tique dans il devient Ie guide

qui introduit Ie lecteur neophyte dans Iunivers dl en sadres~ant lui par du pronom

(VOUS raquo mais aussi en sollicirant de sa part Ie courage

lui est neeessaire pour parcourir eet itineraire perilleux Au milieu du texte Ie prunorn laquovousraquo

fait au laquonOLlSraquo Ce ehangement est ICI

JllUll-ClLLJ car Ie narrarellr detinit Ie recepteur de

comme agent participant a la sphere communicative Le Jecteur nest plus un simple laquoagent

raquo de il est et invite aentrer dns 1a sphere diegetique De ee il semble quun

spatial et affectif so it etabli dans Ie texte

Parfois Ie narrateur le lecteur a temoin Face a [image des femmes hunt ctaient pour celehrer Ie Rurangwa exprime son

envers ces voisines de sa famille nont

pas eu Ie courage de les enfants de leurs

voisins Aujourdhui ces femmes de non-assistance a une personne en Elles nont pas

cacher un enfam de notre famille lors du 21) Ce laquojaccuscraquo interpelle Ie

it te11101n Ruranpwa semble accuser

Durant ce moment dramatique la justice en main et

impose aux accusees une sentence en les eliminant du cadre de la ne veux les voir Je les hurds de la et je les eseamore Il y a jours noirs Oil on ne peut pas voir Ia reaht

en face Le retrecissement du cadre photographique provoque ason tour une rupture narrative La description de la sarrete pour ne

pas declencher dautres souvenirs penibles Le rapport et devirement que le narrateur entretient

avec [image sa famille se traduit par Ie va-et-vient continu entre la et la narration mOllvement qui ason tour provoque 1a

nrnrn du tissLl nanmiddotatif II nous semble ici que Ia

du recit augmente la force du du

neit

voiw)) jO

NUllS pouvons meme ajouter que laspecr

dialogue texte provient de nombreuses rhetoriques sur Ia problcmatique de lindicibIe

parcuurs narratif et une celmiddottaine ecoute de Ia part du

lecteur Ces questions bien nexigent pas de reponses ont lavantage de eventuelles du lecreur et de suggerer auditeur

est lecuute lhistoire On peut ansst dire que

1introduction la dans Ie texte en tant innummabIe consideree en

reference a lindicible peut etre interpretee comme

un moyen dexploiter Ie mystere et provoqu er Ie snspens chez Ie lccteur

Grace a toutes ces grammaticales et

Iimage de la photographie a a de Ies membres de sa famille de

parler de leur de leur de vivre avant de

raconter mort

LJ CeUX qui Ie rcjouissent seront jmr leurs toisins et

ceux qui les corlgnuue (~ette ~)hOl0 est le dernier vestige)

lultime inswmane dun moncle de 5erenit~ qui va sombrer

dans la saneantir 22)

Dc CORPS OBJET AU SUJET

LA REPRESENTATION PICTURALE ET INTERTEXTUEL

DANS LA RECONSTRUCTION lDENTlTA1RE

Dans Ia derniere partie de cette nous allons montrer comment Ie corps de Rurangwa est Ie produit

de plusieurs quon peut lire sur la surface

tegurnentaire Ensuite nous examinerons comment son corps objet dll de l autre etre recupere

par son legitime Cest par Ie truchemnt

du intertextuel et la picturale que Rurangwa devient sujet de son pro pre discours et

reconstruit son identite Sur b photo de face a personnage

represente il y a chez Ie narrateur Ie desir dune remuntee en arriere Ce retrospectif lui pennet

dalimenter la narration et donner un aspect

authl1tique ason temoignage Le retour en arriere lui donn loccasion dinterroger Ie texte historique

Le 4 du intitule Du a Ienfepgt a line teneur didactique

sur Ie mythique et

partie la par canographique du Rwanda Le narrateur saisit

cette occasion pour nous donner une de la fimne et de la flore Le mal fait ~CltIclunu

qui

prend la curieuse forme du 30) c est aussi un pays auquel certains

Occidentaux ont attribue Ie sobriquet de trou du

du monderaquo (ibid) La beaute du Rwanda ne peut pas etre sans taire son

a fait de ce pays une souillure sur Ia carte de I~AJrique et celle dl monde Ie est clairement soHicite

Du texte Ie narrateur oriente Ie lecteur

vers lhistoire du Rwanda Le texte historiquc est insere dans Ie recit par une ilustree Comme

ceHe de la familiale eHe est

A de lillustration dun livre Rwanda Ie narrateur prend lallure dun professeur et

Ie devient son eleve Dc Ie recit

llne teneur didactique Sur Ie plan cette image pennet au narrateur de renouer

Ie dialogue avec le Iecteur et au fecit de reprendre son aspect

Cillustration Ie Hutu et Ie Tutsi Ies trois figures de Ia population rwandaise qui cohabitaient comme des doigts de la mainraquo avant

Ie clivage par la colonisation

Ruran~Wa effectue une remontee vers Ie temps primordial en tentant dexpliquer par Ie du recit VltU1VU

comment lharmonie a ete brisee De ce temps mythique il revient a lillustration pour prouver

ethnique a

constitue un resume de 1histoire du Rwanda de

qui suivent racontent Ies details de lassassinat de tous

Ies membres de sa famille et de

vivantraquo A son portrait

12 intitL11e Oser me

37

Tous les manns Ie meme La wynne dll miroY dam

la saUe de baim [ j Ce que je tois horrible mais n~

peUX tuiter cet un visage qui nest

visage Une tete ltnegre J1 qui semble avoir ere sur

UT[J7eTUE atlCc de mauvais ciseaux en son milicu

Une nnlHnl)lW0 part de Iorem drolle ([tme

consignes (Ies ~erOCJaares prccisait de parLer le CQuJ-- ahauteur

de nez cpate et tranche car cJetait

tin nez de Tlttsi Une seconde cicatrice Ii panir de lordl essaie de la ressemble it un

accYUcileDpoundu [ J ou au point que dans la

tete en permanence pourquoi

89)

Tous les coups reus sur Ie lui ant arrache aussi un ceil et son

[J cloute nes[

boule une ala chair Les poimes

eles lances ant laisse sur ma poitrine des styies noires er epaisses (IHd)

Ce portrait nailS est offert en entier atravers que lui renvoie Ie miroir Cornme Ie titre dLl chapitre

lindique Rurangvva veLlr se regarder en face affronter Ie monstre quon a fait de lui Ce objectif tourne soudainement en un il se

mais ref1echit aussi sur sa nouvelle condition de vie Le corps ele est I element matriciel

elu textej il se fait voir et se fait lire Cest un site sur leque1le genocide a laisse ses marques indelebiles

laquoMon corps mon et Ie plus de ma memoire en portent la nn de rna vie

Pour est grave dans

ma peau comme un tatollage sur lavant-bras des condamnes dAuschwitzraquo (ibid 71) Pour

ces marques sur son corps par I armee il essaie de nous expliquer d abard

comment ce corps a ere erhnicise et puis Le mot qui sert de titre au

de la fois tres descriptif et singulier Ce mot invente par lauteur est forme a partir du substantif raquo pour creer un adjectif

verbal issu dun verbe possible laquogenociderraquo Que Ie mot soit invente cela nest pas

surprenant car Ie mot ii ~Vu_ lui-meme est un

recent cree en 1944 apres [extermination et des T ziganes par les nazis Il est bien

vrai que dans lne societe donnee de nouveaux

concepts necessitent de nouveaux motsraquo Ie Rwanda ne fait donc pas Un

nouveau tenne courant ne apres Ie

Tutsi au Rwanda esr Ie substantif Ce est utilise pour celui au celie

a perpetre Ie Bien quil ne so it pas encore

Ie franais Ie substantif

plusieurs temoignages des dans les discours dans

nationaux et internationaux et meme dans publiees en Kinyarwanda

Dans son temoignage Ruranf-Wa cree une autre forme laquogenoddb pour designer son corps ethnidse sur lequella machette du milicien laisse marques visibes et lisibles Le corps du narrateur et par extension Ie corps du Tursi est un carrefour de

et il ne peut se comprencire quen tenant

compte la production la transformation brd

de la reecriture des anterieurs qui lont

fa~onne

Rurangwa a momre par Ie truchement du texte que Ie discours colonial a ere a la base de

la cristallisation des differences physiques entre les trois groupes ethniques du Rwanda De nombreuses etudes sur Ie Rwanda sont daccord sur ce Dans Les Recits du Semujanga a bien explique comment a lepoque coloniale

Ie disco1OS du satoir a par steniotypage des images

de IOccident sur construit un nouteau systeme

axloc)poundt(1ue avec des nidts vaiorisanr posiriement Ie Tutsi et

negatiwment Ie Hutu (1998

et comment a partir de cette les discours

et ont inverse laquoles

du discours colonial tutsi-bon hutu-mauvais (ibid) Le discours colonial a ete recupere et manipule par les Hutu extremistes leur avantage pour eliminer Ie Tutsi qui dait considere comme un dement nodf au

gouvernement Hutu et aleur bien-ene Les parties du corps du Tursi ethnicise par Ie discours colonial

qui etaient all depart enviees ant ere par apres

vojuf~le numero 2 bull PROTCC

et rejetees par Jes Hutll Dans son Le ethnique Benjamin Sehene ecrit a ce propos

ils (res sonl

lf wvm iLs les mitres

Pendant Ie ie est

a lelimination les traits physiques sokHsant

typiqucmcnt tutsi ctaient cibles pour extermination

Rurangwa ten1oin oculaire tel meurtre en fait une description vividc

lis la lui tranchent les (comme

aux Tutsi detre les Huru

prennent un malin plaisir ales (raccourcirraquo au ales ramener

au 54)4

Les du corps de Rurangwa ont egalement subi

Ie meme sort Sibomana en de moi laquoOh voici Iaine

des Tutsi (iui pointe son nez dehorsraquo Et dun coup tres

il me Ie Tuesi nont pas Ie

de

ces demiers ont mis un loin special

naturelie) 56)

Le corps cles femmes a ete atrocement manipule pour mieux parfaire Ie dessein du genocide des Tursi Dans

une note inseree Ie livre nous donne

des eclaircissements la~dessus Sur les les assassins hutu ont les couN

porwnt sur Ie organes de la ventre et ~-agin

allant briser des de bou tdb Jam

leurs sexes aprgt les (lvoir violees Cest [une des marques

dun Jatteindre une race i1

Les coups machette ou de gourdin par

Ie milicien ont suivi methodiquement les marqueurs erhniques etablis par le discours colonial pour

produire un corps raquo 11 semble donc que ce sied mieux au corps de Rurangwa

lensemble ethniquement a ete par Ie bourreau Le titre du livre fait reference plut6t a son

corps qua sa personne Rurangwa a sans

doute voulu commencer son roman par une tension lexicale em plutot semanrique pour nollS faire entrer

lunivers de [indicible a comprendre

Le corps Rurangwfl est

une surface dinscription sur laquelle peuvent se

lire anrerieurs directement Oll

indirecrement ront transforme et lont conduit au supplice du Il ne peut etIe que

par Ie truchement du intertextueL Nous utilisons iei Ie concept dintertextualite selon la definition que lui donnent Kristeva et Gerard c estshy

fait quun texte soit la reecriture autre

texte produit par la transformation ou la reecriture dautres textes anterieurs Le corps laquogenocideraquo de

Rurangwa est donc comme un texte produir par un

double discours Ie discours colonial

racisre occidentale a ete

par les Hum

leur

de haine de lautre Cest cette version qui a produit a son tour Ie Le corps de constitue donc un par excellence Dans son ouvrage

Gerard Genetre Ie palimpseste comme f)crhem dont on a gratte la premiere inscription

pour en tracer une autre qui ne la pas tout a en sorte par transparence lancien sous Ie

Les coups de subis par Ie corps clu narrateur y ont et

des traces indelebiles Le discours de haine dans chair 11 a pas reellement efface Ie cliscours anterieur

mais 1a marque en gras Cest ainsi Cluon peut encore dechiffrer SOllS Ie nouveau Plusieurs annees

marques sur son corps

renforcent sa victimisation de mot une cible ideate Elies

impUque laquo Tratail a qtle je rcntre

a

Face au regard anLn son corps est a eliminer parce quil est accusateur cest un laquotestisraquo

un ( tiersraquo (Agamben 2003 17) qui

PROT[[ bull

entre Ie ct Iaccuse dans un

proccs Carme genocidaire qui devait eli fniner 1e

corps ethnicise elu Tutsi pas reussi a Ie faire mais

plus La plupart des

marques 80nt localisees sur

son visage elIes sautent aux yeux lc et

li501ent Son corps est devenu veereur des donnees

ethniques et un espace all se d autrcs

discours II aisement au discours social Ses

camarades de classc en Suisse au il vit

croient que cicatrices sont des

quil s est volontairement imposes et quJ il a meme pousse de jusquau cicatricing)

62) Dautres croient quii survecu un rres grave

accident voiture Dans Ie refus de se construire

partir du personnage exterieur quon a fait

Rurangwa a un retrospectif et la tourne

vers Ie du Rwanda pour les

discours qui se superposent sur son corps

Malgre cette demarche son corps reste ]a proie de

sa pwpre perception Hiui est etranger Une distance

s est etablie entre lui et son corps il est associe a la tragedie du avec illui laquofaut

cohabiter

ceiui-ci lui renvoie nne a du mal a assumer

ceUe de I laquoElephant manraquo

89) laquoEst-ce du courage que de sarracher du lit

pour aller planter un naime pas devant

un mimir quon redoute (ibid 101) II interroge

comme Ie faisait laquo Ie miroir qui ne

repond pas

Contrairement au mimir sartrien Ie 8ien nest pas

rassurant

Tout miroir est un ennemi qui me dans lirritation

it [l surgir des reminiscences atroces et des

sentiments violent que je tyreteremis 89)

Rurangva est emmure dans sa sOllffrance et dans

Ihorreur du genocide Le rapport de son evaluaril1n

affirme qllil manifeste laquovisiblement

des sequelles psychiques du rrau rnatisme vecuraquo

171) et quil souffre elu de stress postshy

traumatique (ibid) Rurangwa lui-meme avoue

son a le des souvenirs

sus cites par un bruit un objet une odeuf lIn certain

silence un cri un rienraquo 163) La

neccssite de retrouver Ie souvenir rouvre la blessure

et cause une nouvelle souffrance II est

confronte au la memoire it la photo

qui me soul eve Ie cceur

cette memoire eherie et honnie lJraquo 27) Ce qui leffraie Ie sur cette c est Ie

souvenir du meurtre cie sa mere la pire atrocite a illluil fut dassisterraquo (ibid 47) La

reveille Ie souvenir insupportable la l1e de

sa mere par 1a milice feminine

avant detre eventree par son tortionnaire Cette scene

pr0voque chez lui me blessure quun coup

de macherteraquo 48) et a inscrit en lui une haine

atroce

La haine Ju des de wus les Hutu Tille en

moi a tmtam comme ies dents dun

jam([is elre relire tant it penetre loin dans ta chair Une haine

et cowie qui ne que

Sihomana tout son

temps pour omrir Ie ventre de mel mere LJ (Ibid)

11 compte laquo la haine gt les laquotrois mots clesraquo quil

considere cornme declencheurs de son

]4) Comme nous ravons 1110ntre prealablement

son cst une tentative de pouvoir se defaire

de ceUe haine qui frise la vengeance c est ( line

de combattre ce qui pourrait [tel falre succomber la

haine et Ie silenceraquo 9-10) Malgre Ie souvenir insupportable associe fl

de la c est cette memc qui va lui procurer

Ie pouvoir de se [(concilier avec lui-meme et de

reconquerir son Un detail emane

de Ie lt )j et Iattire laquo llel boubon colore

niveau du ventre)j (ibid 21)

Quelques de

ce

Dans

car clest nwi l))rte Je

suis son prernier eUe a 21 am et dent de se marier

On rna souvent cUt que je h~i ressentblais etonnamment

que rnon t lsage son eme traits de ma nere Ie SOUVenir de amnt

Cest auss fa redoute aCe point

des crireres didentification

naltre molS npres Ie manage

Kambamba Ie 3 juin 1978 au dispensaire de Muginaraquo

(ibid - mais aussi un point de

- la ressemblance avec sa mere Cela est signiflcatif pour lhomme defigure dont lidentitc a ctc eHacce

de la mere lui oHre une nouvelle naissance

a un certain moment dans la description

et de la ccrcmonie du mariage il pense de la danse lors de la cen3monie et se

retrouve dans Ie sein de sa mere

laquoDans Ie ventre de 1a mere je dois sentir cette chaude houle de lenthousiasme qui me porte je

de celie me porteraquo Du souvenir emanent toutes sortes de sensations et

sentiments semblables a ceux engendres par la

mcmoire La ressemblance avec sa mere lui donne Ie

courage dassumer image du miroir quil redoutait

auparavant Ainsi refuse-t-ille suicide qui Ie la de Iimage refletee par la II trouve

la redemption dans cette ressemblance

avec sa mere Iimagc de la mere est Ie mhoir dans

il se voit comme il etait avant la

it la mere nous rappelle Ie

miroin) lacanien Dans Ecrits I Jacques Lacan

faut (flnUmTIIlYP Ie stade du miroir comme une

donne it ce terme asavoir la

it assume une

94)

A travers image de sa mere il forme une

lui-meme et effectue la conquete de son propre

corps laquoMeme si e1Ie est ravagee ma figure est ccUe

offerte ma mere (Genocide 91) Aimi

Ie suicide et meme [operation

II veut egalement conserver son laquovisage balafre parce veut gravees sur [son] corps les marques

(ibid) II considere son corps comme un

memorial difficilement alterable par rapport a sites mcmoriaux On pellt nettoyer laquoles les

d tous les lieux du mais on ne peut

enlever lsesJ balafresraquo (ibid) Ses laquocicatrices

son une attestation vivante charnelle et de ces crimes contre lhumaniteraquo alars que les laquoautres

memoriaux exposent des tapis de cranes ou

empilements soigneux de tibias et de raquo (ibid)

CONCLUSION

Limage photographique a

des siens Cest un long cri de Ihorreu[raquo Le narrateur secrie mals en meme

temps Rurangwa se en face et

un texte qui est a la fois son miroir et son espace dinterrogation

Limage de la mere et indirectement

photographique a joue un dans la

reconstruction de lidentite de Rurangwa Elle a

offert au narrateur dont des

points de repere importants pom une photo de carte didentite OU Ion peut

et la date de naissance et confirmer la

La photo de famille dont recit du genocide ltitrempee dans un de sang)

22) a pu se purifier a de la mere

A la fin du t6moignage elle devient ou l11oin5

une relique sacree Limage de la mere

aRurangwa de se son corps

et de Iassumer A la fin du rejet quil entretenait avec son corps est devenue

une relation damour Son corps survivant a par

la suite acquis un role double de memoire

et dlt genocide Dans Ie livre de photographique a depasse da rp-wcpn~rm

Temps raquo laquoiemphase dechirante du noeme (Barthes 1980 148) pour devenir nne photo souvenir

et une photo didentite

bull voume 37 nlJmero 2

NOTES L Toute reference it cet ouvrage rapporte t~dition de 2006 aux

Pre~8(5 de la Rcnai5sancc Le3 t(~ferences paginales seront clesormais conne-euros dansle texte 1 precedees du de lceuvrlt entre rarenth(ses 2 Le terme fv1u~e1rn(1nn laquo11usuhnan gtI prend origjnc dans

Ie caIUp dtuschvitz dOl ii 6l est prop8ge clautres camps Les

sont diversifies sur sa vraie definition Pour certains lti il reno1c au sens littera1 du terT1e aabe mHsUn ql~i sigrdfie cellii qLt sc sou met sans reserve ~l la volonte divine_ lviais tandi~ que la resignutioll dJ muslim repose sur]a convicrion que la volonte dAlJ8h est i lceuvre chac~ue instant dans moir~drc cvenenlent Ie lllusulman

dAuschwitz semble pedu toute volonte ct toute conscience (Agamben 2003 46) Dautr~s croiem que Ie termc semble provenir

de la posture Ijpique de detenus blottis stub jmnhes replies ala m-lniere orientale e visage riglJe con101e celle Jlun luasqueraquo

(ibid 47) DHutres cfQicnt entin qUe le termc lt faisait aHusion aux

((mouvernents rypiques des nlusulmans l1

CeS allees venues du bustej

du haur vers Ie bas [evoqnanrJ es ricuels de prierc islamiquesgt (Sofsh par Agamben 2003 47) Notre reference ce mot article

evoque tOllt simplement lbomme dont In force nterieure et physique a

de completenrent lriS(c Dans SUniVa(~t~s Esther Viujmvayo souteve egalenlent ccte

problenrique iecoute Ul Rwanda On been les gens quon

assez parle Ju genocide au ltllors laquoils peuvcnt pas suporter demendre LJ Je pouna dire en Ule phrase pourquoi on s est tu apres le genocide on sent(Jit qu)n derangeait [] COfnil1enCeS raconter rac()nter if nlcceptent decouer cr cle-st

terrihle (2005 20) 4 SU1VVanres vuawayo parle de ce corps qui [aliaie

mcttre a la mille standad laide de la machette Les hommcs rutsi ~1Vaient 18 reputatit)n detre trop granrh un ITletre qllatreAdngt~

dix devenait done line faute Les femmes dies commettaicnt dilVoir taHle ~es lnil1(c ph1t denorrnes hanches Avant de les [Uer it faUait June les raluener a une taille st~uldard I~

[J (2C05 90) 5 Couronne symbole de la matcrnite portee tradllmnellement

toures nvandaises

REF~RENCES BIBLIOGRAPHIQUES t-GAMHEK i2003j Ce ~rs[p Paris Rivaglgts BARTHES R [1980] Crambre Claire Note SHY la phowgmfJhie Gallimatd Souil coli Cabiers du cinema

DAYAN ROS~Nl-Hlgt [1007J AijJ~(bes de ta Shoal Sgtlvivre 1tn1Olgrer Paris CNRS ClEt-EnE G [1982) Palimpseste La au secord Paris

Sen colI LACAN J [(966) i9991 Paris Sed MUIAWAYO [(2004) 200SJ SiniVanes Rwanda Historre genocide Paris LAube tIJN lvi [1998 Rccits dL genocide S~mioriqHe lindicib[f)

Delachaux cr Niestjf~ R~RAJGWA R [2006] Genocide de ]a Renaissance SCHAEfFER] M [19871 Lrraglt

Paris SeiJil coIL laquoPoe-tique raquo)

B tI999] ethmqucJ Paris Dagorno SEMPRUl] [19941 L uu la tie Paris Gallimard SEMl]ANGA] [1998] fondaleurs du drane mandais Paris

Jl-ianHttan WAITRATcR R II003J SoniT du genocide Temoigrer pour abprerdrc J

Paris

VOlime rJITIlho 2 bull PRorEL

Ies marques physiques et psychologiques de cette

mort Rurangwa est un homme detruit physiquement et psychologiquement Son statut laquo mort vivantraquo

nous rappelle celui du laquomusulmanraquo2 decrit

plusieurs remoignages des Juifs survivants des camps

de concentration et que Giorgio Agamben definit

comme une vivant laquo1 la limite de la mort et

de la vieraquo (2003 43) Ce qui reste

Agamben elucide cette definition par celIe empruntee

de Jean Amery [1Ie musulman est dam Ie jargon du camp Ie detem

qui cessait de lutter [ J Ce netait cadavre

un de dans leurs

43)

Rurangwa est ce laquocadavre ambulantraquo Dailleurs

les bourreaux aqui il demande une mise a mort

rapide lui lancent toute une serie de sobriquets sadiques et cyniques ( mort laquomort qui

(Genocide 59) Sur Ie de la mort a la

la vie et de la mort il se reconnalt lui-me me comme tel

crOUte ae sang une

immense un bnmatre it la demarche titubante

Estmiddotce que je I Je ne peux pas repondre Man

corps a man coeur a mal Peut-on avoir mal (Ibid)

Par ailleurs 1 propos la figure du laquomusulrnanraquo

Agamben ecrit A cette image sadjoint une autre qui

semble mcme en detenir e veritable sem Le musHlman nest

pas sCHlemem au tant Hne limite entre Ia ie la mort il marque Ie seuil entre lhomme et Ie non-homme (2003 58)

Au-deL de cette mort physique il y a aussi la

destruction de la psyche La survie du temoin du

genocide et indirectement ceUe de son prouvent qu ( il n est pas facile detruire integralement lhumain que toujours reste quelque

chose Le temoin est ce resteraquo (ibid 146)

De ces premisses dAgamben no liS pouvons deduire que Rurangwa est laquoce resteraquo Genocide est

construit par ltIce resteraquo et a de laquoce Testeraquo

lautoportrait physique et psychologique Rurangwa

relate apartir rupture causee par Ie genocide

a de cette brisure fait une peinture

de ce quil est devenu et nous raconte comment il a cesse detre lenfant de quinze ans qugtil etait

Genocide est lautoportrait dans Ie narrateur

rente de transmettre laquola ) inscrite sur son

laquovisage balafreraquo et avec laquelle illui laquofaut cohabitey (Genocide

LIMAGE PHOTOGRAPHIQUE

ESSENCE DUN RECIT DLALOGUE

Le temoin presente est ]homme

la parole laquosuffoqueraquo au moment OU eUe sannonce

comment pOllrra-t-il dire sa memoire Dans eette

partie de notre analyse nous allons montrer comment

Ie motif de la phorographie cree un contexte narratif favorable pour denouer la parole temoin Le deuxieme chapitre de Genocide ne nous jette pas d emblee dans] enfer du genocide mais constitue

un pnltambule au temoignage proprement dit dans Ie temoin raconte des jours heureuxraquo - groupe

nominal qui sert dailleurs de titre au chapitre en

question Le t(~moin pretend sous ce titre prometteur

raconter la joie de vivre a notre grande surprise Ie chapitre s annonce paradoxalement sous un rapport

ambigu dattirance et de repulsion ambiguite

a son tour provo que sentiments de doute et dhesitation

ia [Dis Jai besoin de la saVOlr it

mes cotes mais nose pas la saisir Je crains res orages de

eI de colere peut dechafner en moi (Ibid 15)

II y a chez le narrateur le refus de nommer

ecceurant de son mal refus qui transparait

dans lambiguite grammaticale Ie paragraphe est

introduit par Ie pronom personnel elle)) sans referent apparent Ce pronom semble denoter lin etre feminin cher au narrateur mais qui paralt en meme temps etre lobjet son angoisse Est-ce une amante

une femme 011 une mere Peu Iidentite de cet etre innommable ce semble que Ientreprise de Rurangwa est perilleuse et va se dire dans la douleur lei Iinnommable est done Ie

prolongement lindicible examine precedemment

La double ambiguite syntaxique et semantique

prend fin au debut troisieme paragraphe quand le

bull vlmre 37 nl1ln~ro 2

temain namme enfin l innommalle i) er nous lobJet cause de son mal

cache entre deux cest la lnfl1(lfflJliP jaHnie

dune illanciemleJ) Elle na pas cartonncc

rassurante des tiragcs mais son inconsiswnce

mernc uccwft lu lulcHT Cest linstant cph6mert3 dune

presence sur un support II represente ee que rai de plus cher au ce qllil y a de abominable au monde

(Ibid 15-16 nous soulignom)

Dans cet extrair de texte nsemble que [image

photographique soit sensible aux fluctuations du temps c est une photographique

rcalisee sur un support pn~eaire ) Elle est de qual ite ( trop mediocre) 17) et sa surface dinscription

par Ie temps na pas beaucoup de cest une feuille de papier)) qui na pas llaquoepaisseuf

rassurante des tilflges professionnelsraquo Ie lien est etabli entre limage photographique 1e temps et indirectement la mort

Dans Ie texte de Rurangwa il semble que ce lien it 1a mort est aussi inherent lessence meme de photographique qui ncst quune de

tdinstant ephemere dune presence fragile) (ibid 15)

La mort est ici par lidee de levanescence de Iinstant qui se dissout aussit6t quil cst capte Dans son ouvragc La Chamhre claire Note sur la

Roland Barthes ecrit que [ J non settlement die [ta a communemem Ie sort du

papiey mais meme 5i eUe est

dIe nen est pas moins martelle 145)

Le lien a la mort explique Barthes est issu du rapport

referentiel entre limage phorographique et lobjct represente Le referent photographique est different

celui autres systemes de representation 119-120)

non pas la chose

aurait pas de nl1r)OPYflDnW [n] ckms la Fhnt(7wrhh nier que la chose a

etc la II y a double conjoime de redite et de passe

Et puisque cefte contminte nexiste que pOllr on doit

poar (essence memc k noeme de la

Le non du nobne nl1r)[I1rmi nniP sera done

ou ~ncore llntrait(lble

Plus Barthes ajoutc que [ ]ceqlli la natwe de la cest u Jose Peu importc la duree cene pose meme Ie temps

dun millionieme de seconde [ J un instant si ou une chose reele sest tTOIIVee devant lceil

Limage photographique telle que Barthes nous la exprime son lien a la mort parce quelle

parait immobile er fixe dans un temps revolu pendant

fait conscience de 1a trace par une presence indeniable suppose la mort c est lit sans doure

la cause de leffroi et de l amertullle de Rurangwa quand il parle cet instant ephemere dune presence fragile) Rurangwa tient cependant it ( ce

resteraquo du document en luine de papier se trouc

qHC je

docllment qui me pennet dembrasse1les visages

man histoire ct un jour peut-erre de Tc()lltrer i mes

silhouette leurs aieux assassines

16 nous soulignons)

Le lien a la mort clevient encore bcallcoLJp clair c est (da silhOuette lernpreinte la trace dun autre temps laissee par sa famille exterminee pendant Ie genocide de 1994

Partant notions de symbole eliccme et dindice

avancees par Charles Pierce sa classification des relations que les entreriennent avec

1U-0 Jean-Marie Schaeffer a fait une etude

sur Dans Du Schaeffer montre

que limage photographique est non pas une icone pure mais un laquoindiciel visibleraquo Cest une trace (detnpreinte))) laissee par reel

(ltltlimpregnantraquo) sous leffet dune

action photochimique (Schaeffer 1987 54) Limage

photographique n est donc pas laquoimpregnant mais sa

visuclle Meme si de la famille

de Rurangwa netoit pas une photocopie elle lui

2 bull

offritait simplement une manifestation de Iobjct une

silhouetteraquo comme ilk reconnait Ie texte cite ci-dessus

Rurangwa attribue pourtant Ie double role

de transmission et de reception acette image photographique ilIa jalousement pour que

famille survive dans la memoire de ses descendants

Comment ce document exprime la ruine par sa

materialite et son essence va-t-il restituer 1a realite de

la finnille de Rurangwa La rcmemore pas Ie passe (rien de proustien

dans une photo) sur moi nest pas

restiruer qu i est aboli Ie temps la mais

dattester que cda que je Jois bien ete Demnt une

photO la conscience ne pas necessairement la voie

dlt souvenir (Barthes 1980 129 et 133)

Schaeffer abonde dans Ie meme sens en montrant

que Ie caractere dempreintc de la photographic ne

lui permet pas de restituer Ie (1987 17) En essence elle ne peut done pas restituer Ie souvenir et

Rurangvva en est conscient Dans Ie projet de Rurangwa est de trouver une pour dire

cette memoire et e est apartir de eette photographie quil tente de tecouvrer la parole pour la dire

La photographie fait des arts visuels et y rejoint dautres arts plastiques Elle done softiir lceil elU spectateur Celle de Ia fa mille de

Rurangwa etant absente du texte Ie doit etre mis en valeur par la dun laquojeraquo

qui la prend en charge pour la presenter au lecteur

spectateur Dans dans Ie

narrateur est en contact evident avec Ie narrataire

pour s assurer de son eeoute car que Ia vue e est qui est iei mise en II semble done que Ie

motif de la photographie est choisi par lauteur pour favoriser lecoute necessaire dans lacte de temoigner du genocide Dans Ie texte eette est mise en

ceuvre du presentatif des demonstratifs er de limperatif

Plusieurs critiques et survivants du

ont 1a necessite de lecoute de

lindicible Dans ou la Jorge Semprun

eerit

On peHt rottt dire de penser El de S) iY~ettre Mais peut~on tout eOtU irna~ner

Le pourrcH-on En a1fToniIs la patience fa passion la

compassion la necessaire 26)

Rurangwa lui-meme deplore Ie fait que les Rwandais non nont ni la ni la d ecouter les SLltvivants

On embete tout le Dwnde atcc notre nos

nos morts de memoire de [ J Li seul discours

aurarise Ie resume a laquo reconciiiation raquo mot

dordre si beau en SOl cri des res capes

131) 3

Les survivanrs semmurent dans Ie silence parce

quils n arrivent pas a etre ecoLltes Le temoignage du

genocide lautredu ecritAnny Rosenman dans Les de ta Shoah

Dans eet ouvrage cette montre que laquo tout

ternoignage implique [ oJ de

mediation liberer

entre autres la Mediation veTS [autre qui est requis la bles5ure de

ce sawir de Ie transmettre den erre ie passeur

ewe que dans

IjasSHrance dn Uen Tenoue ertre lui cr cet autre) (lue

soit Ie isage de ses dans ie temps

que son existence soit materielle au ceile dun

lecteur 21)

Ie motif produit un recit dans lequella laquomediation illautreraquo etablit un contact constant entre Ie temoin et Ie lecteur devient (daurre elu comme

e est Ie cas dans Ie passage suivant Si de courage

de vovs detailer fa quinzaine de personnages qui

passe ce

16 nous soulignons)

du pronom personnel laquoTousraquo denote

clairement ladresse au lecteur Ce dernier detient Ie role du raquo que Waintrater considere

comme pilier du laquo pacte Iestimonial

bull vollln1f numero 2

Plus que rom autre texte UUWOW~TUi)mme Ie Ces avertissements s adressent au lecteur pour lui

est une lrin~ udr~sse i un autic qui La

cnnlcicnce Iumaine done Ie temoin a he isoc ii un moment de

son existence par l6enement done vient temoigner

14)

Apillsieurs endroitl du parcours narrarif du

de Rurangwa lecoute de la part du iecteur est sollicitce par ie narrateur Cest notamment Ie cas lorsqlle le recit qui sous lemprise de la sllbjectivite narratif depasse de loin Ie

de la photo entre dans Ie cr digresse Pour mettre fin aune digression trop ie narrateur

revient a la photo et invite Ie a reprendre lhistoire avec lui par Ie truchement de

I associatif laquoReprenons un instant ma photo de famillo 25)

Duns un autre endroit du parcours narratif le souvenir est si insupportable que ie narrateur est

deloigner la photo de sa vue Saehant que quelquun est a lecoute illui expJique 1a necessitc de rompre le til narratif

Mais je mis trop vite Je range la qui me souleve Ie cOur

cette memoire cherie et hannie -) a sa dam

man tas de papemsse entre un livre cJallemand et m lwre

deconornie Je histoire ason debut (Ibid 27)

Conseient de la nnc~nrp du il se

dabuser de sa patience et de sa bonne volonte et reprend le recit la OU il laisse La reconnaissance

de lecuute joue egalement un role dans Ie de la trame narrative et du souvenir La complicite entre Ie narrateur et Ie lecteur est si

tacite encourage Ie temoignage collectif comme

Ie texte suivant Metis avant doser penetreT dars

impuissants Ii exjJrimer

[ J comlncn~ notre voisin est devenu du JOUT au

lendemain notre assassin

Et ce nest pas aise PHflUPT cda Dabord il a mernoire visiter les somcnirs Cest une torture Puis lant de

choses sont melees non seulement rcmonter loin de

[histoire mais aUlsi descendre en nous-memes dans

ies crareres de nos valcans intimes Cest encore bTuant

douloureux (Ibid 29 nous OVltH~HV

apprendre que dire le

dangereuse jalonnee necessitant une

franche Le narrateur cree iei un scenario initi3tique dans il devient Ie guide

qui introduit Ie lecteur neophyte dans Iunivers dl en sadres~ant lui par du pronom

(VOUS raquo mais aussi en sollicirant de sa part Ie courage

lui est neeessaire pour parcourir eet itineraire perilleux Au milieu du texte Ie prunorn laquovousraquo

fait au laquonOLlSraquo Ce ehangement est ICI

JllUll-ClLLJ car Ie narrarellr detinit Ie recepteur de

comme agent participant a la sphere communicative Le Jecteur nest plus un simple laquoagent

raquo de il est et invite aentrer dns 1a sphere diegetique De ee il semble quun

spatial et affectif so it etabli dans Ie texte

Parfois Ie narrateur le lecteur a temoin Face a [image des femmes hunt ctaient pour celehrer Ie Rurangwa exprime son

envers ces voisines de sa famille nont

pas eu Ie courage de les enfants de leurs

voisins Aujourdhui ces femmes de non-assistance a une personne en Elles nont pas

cacher un enfam de notre famille lors du 21) Ce laquojaccuscraquo interpelle Ie

it te11101n Ruranpwa semble accuser

Durant ce moment dramatique la justice en main et

impose aux accusees une sentence en les eliminant du cadre de la ne veux les voir Je les hurds de la et je les eseamore Il y a jours noirs Oil on ne peut pas voir Ia reaht

en face Le retrecissement du cadre photographique provoque ason tour une rupture narrative La description de la sarrete pour ne

pas declencher dautres souvenirs penibles Le rapport et devirement que le narrateur entretient

avec [image sa famille se traduit par Ie va-et-vient continu entre la et la narration mOllvement qui ason tour provoque 1a

nrnrn du tissLl nanmiddotatif II nous semble ici que Ia

du recit augmente la force du du

neit

voiw)) jO

NUllS pouvons meme ajouter que laspecr

dialogue texte provient de nombreuses rhetoriques sur Ia problcmatique de lindicibIe

parcuurs narratif et une celmiddottaine ecoute de Ia part du

lecteur Ces questions bien nexigent pas de reponses ont lavantage de eventuelles du lecreur et de suggerer auditeur

est lecuute lhistoire On peut ansst dire que

1introduction la dans Ie texte en tant innummabIe consideree en

reference a lindicible peut etre interpretee comme

un moyen dexploiter Ie mystere et provoqu er Ie snspens chez Ie lccteur

Grace a toutes ces grammaticales et

Iimage de la photographie a a de Ies membres de sa famille de

parler de leur de leur de vivre avant de

raconter mort

LJ CeUX qui Ie rcjouissent seront jmr leurs toisins et

ceux qui les corlgnuue (~ette ~)hOl0 est le dernier vestige)

lultime inswmane dun moncle de 5erenit~ qui va sombrer

dans la saneantir 22)

Dc CORPS OBJET AU SUJET

LA REPRESENTATION PICTURALE ET INTERTEXTUEL

DANS LA RECONSTRUCTION lDENTlTA1RE

Dans Ia derniere partie de cette nous allons montrer comment Ie corps de Rurangwa est Ie produit

de plusieurs quon peut lire sur la surface

tegurnentaire Ensuite nous examinerons comment son corps objet dll de l autre etre recupere

par son legitime Cest par Ie truchemnt

du intertextuel et la picturale que Rurangwa devient sujet de son pro pre discours et

reconstruit son identite Sur b photo de face a personnage

represente il y a chez Ie narrateur Ie desir dune remuntee en arriere Ce retrospectif lui pennet

dalimenter la narration et donner un aspect

authl1tique ason temoignage Le retour en arriere lui donn loccasion dinterroger Ie texte historique

Le 4 du intitule Du a Ienfepgt a line teneur didactique

sur Ie mythique et

partie la par canographique du Rwanda Le narrateur saisit

cette occasion pour nous donner une de la fimne et de la flore Le mal fait ~CltIclunu

qui

prend la curieuse forme du 30) c est aussi un pays auquel certains

Occidentaux ont attribue Ie sobriquet de trou du

du monderaquo (ibid) La beaute du Rwanda ne peut pas etre sans taire son

a fait de ce pays une souillure sur Ia carte de I~AJrique et celle dl monde Ie est clairement soHicite

Du texte Ie narrateur oriente Ie lecteur

vers lhistoire du Rwanda Le texte historiquc est insere dans Ie recit par une ilustree Comme

ceHe de la familiale eHe est

A de lillustration dun livre Rwanda Ie narrateur prend lallure dun professeur et

Ie devient son eleve Dc Ie recit

llne teneur didactique Sur Ie plan cette image pennet au narrateur de renouer

Ie dialogue avec le Iecteur et au fecit de reprendre son aspect

Cillustration Ie Hutu et Ie Tutsi Ies trois figures de Ia population rwandaise qui cohabitaient comme des doigts de la mainraquo avant

Ie clivage par la colonisation

Ruran~Wa effectue une remontee vers Ie temps primordial en tentant dexpliquer par Ie du recit VltU1VU

comment lharmonie a ete brisee De ce temps mythique il revient a lillustration pour prouver

ethnique a

constitue un resume de 1histoire du Rwanda de

qui suivent racontent Ies details de lassassinat de tous

Ies membres de sa famille et de

vivantraquo A son portrait

12 intitL11e Oser me

37

Tous les manns Ie meme La wynne dll miroY dam

la saUe de baim [ j Ce que je tois horrible mais n~

peUX tuiter cet un visage qui nest

visage Une tete ltnegre J1 qui semble avoir ere sur

UT[J7eTUE atlCc de mauvais ciseaux en son milicu

Une nnlHnl)lW0 part de Iorem drolle ([tme

consignes (Ies ~erOCJaares prccisait de parLer le CQuJ-- ahauteur

de nez cpate et tranche car cJetait

tin nez de Tlttsi Une seconde cicatrice Ii panir de lordl essaie de la ressemble it un

accYUcileDpoundu [ J ou au point que dans la

tete en permanence pourquoi

89)

Tous les coups reus sur Ie lui ant arrache aussi un ceil et son

[J cloute nes[

boule une ala chair Les poimes

eles lances ant laisse sur ma poitrine des styies noires er epaisses (IHd)

Ce portrait nailS est offert en entier atravers que lui renvoie Ie miroir Cornme Ie titre dLl chapitre

lindique Rurangvva veLlr se regarder en face affronter Ie monstre quon a fait de lui Ce objectif tourne soudainement en un il se

mais ref1echit aussi sur sa nouvelle condition de vie Le corps ele est I element matriciel

elu textej il se fait voir et se fait lire Cest un site sur leque1le genocide a laisse ses marques indelebiles

laquoMon corps mon et Ie plus de ma memoire en portent la nn de rna vie

Pour est grave dans

ma peau comme un tatollage sur lavant-bras des condamnes dAuschwitzraquo (ibid 71) Pour

ces marques sur son corps par I armee il essaie de nous expliquer d abard

comment ce corps a ere erhnicise et puis Le mot qui sert de titre au

de la fois tres descriptif et singulier Ce mot invente par lauteur est forme a partir du substantif raquo pour creer un adjectif

verbal issu dun verbe possible laquogenociderraquo Que Ie mot soit invente cela nest pas

surprenant car Ie mot ii ~Vu_ lui-meme est un

recent cree en 1944 apres [extermination et des T ziganes par les nazis Il est bien

vrai que dans lne societe donnee de nouveaux

concepts necessitent de nouveaux motsraquo Ie Rwanda ne fait donc pas Un

nouveau tenne courant ne apres Ie

Tutsi au Rwanda esr Ie substantif Ce est utilise pour celui au celie

a perpetre Ie Bien quil ne so it pas encore

Ie franais Ie substantif

plusieurs temoignages des dans les discours dans

nationaux et internationaux et meme dans publiees en Kinyarwanda

Dans son temoignage Ruranf-Wa cree une autre forme laquogenoddb pour designer son corps ethnidse sur lequella machette du milicien laisse marques visibes et lisibles Le corps du narrateur et par extension Ie corps du Tursi est un carrefour de

et il ne peut se comprencire quen tenant

compte la production la transformation brd

de la reecriture des anterieurs qui lont

fa~onne

Rurangwa a momre par Ie truchement du texte que Ie discours colonial a ere a la base de

la cristallisation des differences physiques entre les trois groupes ethniques du Rwanda De nombreuses etudes sur Ie Rwanda sont daccord sur ce Dans Les Recits du Semujanga a bien explique comment a lepoque coloniale

Ie disco1OS du satoir a par steniotypage des images

de IOccident sur construit un nouteau systeme

axloc)poundt(1ue avec des nidts vaiorisanr posiriement Ie Tutsi et

negatiwment Ie Hutu (1998

et comment a partir de cette les discours

et ont inverse laquoles

du discours colonial tutsi-bon hutu-mauvais (ibid) Le discours colonial a ete recupere et manipule par les Hutu extremistes leur avantage pour eliminer Ie Tutsi qui dait considere comme un dement nodf au

gouvernement Hutu et aleur bien-ene Les parties du corps du Tursi ethnicise par Ie discours colonial

qui etaient all depart enviees ant ere par apres

vojuf~le numero 2 bull PROTCC

et rejetees par Jes Hutll Dans son Le ethnique Benjamin Sehene ecrit a ce propos

ils (res sonl

lf wvm iLs les mitres

Pendant Ie ie est

a lelimination les traits physiques sokHsant

typiqucmcnt tutsi ctaient cibles pour extermination

Rurangwa ten1oin oculaire tel meurtre en fait une description vividc

lis la lui tranchent les (comme

aux Tutsi detre les Huru

prennent un malin plaisir ales (raccourcirraquo au ales ramener

au 54)4

Les du corps de Rurangwa ont egalement subi

Ie meme sort Sibomana en de moi laquoOh voici Iaine

des Tutsi (iui pointe son nez dehorsraquo Et dun coup tres

il me Ie Tuesi nont pas Ie

de

ces demiers ont mis un loin special

naturelie) 56)

Le corps cles femmes a ete atrocement manipule pour mieux parfaire Ie dessein du genocide des Tursi Dans

une note inseree Ie livre nous donne

des eclaircissements la~dessus Sur les les assassins hutu ont les couN

porwnt sur Ie organes de la ventre et ~-agin

allant briser des de bou tdb Jam

leurs sexes aprgt les (lvoir violees Cest [une des marques

dun Jatteindre une race i1

Les coups machette ou de gourdin par

Ie milicien ont suivi methodiquement les marqueurs erhniques etablis par le discours colonial pour

produire un corps raquo 11 semble donc que ce sied mieux au corps de Rurangwa

lensemble ethniquement a ete par Ie bourreau Le titre du livre fait reference plut6t a son

corps qua sa personne Rurangwa a sans

doute voulu commencer son roman par une tension lexicale em plutot semanrique pour nollS faire entrer

lunivers de [indicible a comprendre

Le corps Rurangwfl est

une surface dinscription sur laquelle peuvent se

lire anrerieurs directement Oll

indirecrement ront transforme et lont conduit au supplice du Il ne peut etIe que

par Ie truchement du intertextueL Nous utilisons iei Ie concept dintertextualite selon la definition que lui donnent Kristeva et Gerard c estshy

fait quun texte soit la reecriture autre

texte produit par la transformation ou la reecriture dautres textes anterieurs Le corps laquogenocideraquo de

Rurangwa est donc comme un texte produir par un

double discours Ie discours colonial

racisre occidentale a ete

par les Hum

leur

de haine de lautre Cest cette version qui a produit a son tour Ie Le corps de constitue donc un par excellence Dans son ouvrage

Gerard Genetre Ie palimpseste comme f)crhem dont on a gratte la premiere inscription

pour en tracer une autre qui ne la pas tout a en sorte par transparence lancien sous Ie

Les coups de subis par Ie corps clu narrateur y ont et

des traces indelebiles Le discours de haine dans chair 11 a pas reellement efface Ie cliscours anterieur

mais 1a marque en gras Cest ainsi Cluon peut encore dechiffrer SOllS Ie nouveau Plusieurs annees

marques sur son corps

renforcent sa victimisation de mot une cible ideate Elies

impUque laquo Tratail a qtle je rcntre

a

Face au regard anLn son corps est a eliminer parce quil est accusateur cest un laquotestisraquo

un ( tiersraquo (Agamben 2003 17) qui

PROT[[ bull

entre Ie ct Iaccuse dans un

proccs Carme genocidaire qui devait eli fniner 1e

corps ethnicise elu Tutsi pas reussi a Ie faire mais

plus La plupart des

marques 80nt localisees sur

son visage elIes sautent aux yeux lc et

li501ent Son corps est devenu veereur des donnees

ethniques et un espace all se d autrcs

discours II aisement au discours social Ses

camarades de classc en Suisse au il vit

croient que cicatrices sont des

quil s est volontairement imposes et quJ il a meme pousse de jusquau cicatricing)

62) Dautres croient quii survecu un rres grave

accident voiture Dans Ie refus de se construire

partir du personnage exterieur quon a fait

Rurangwa a un retrospectif et la tourne

vers Ie du Rwanda pour les

discours qui se superposent sur son corps

Malgre cette demarche son corps reste ]a proie de

sa pwpre perception Hiui est etranger Une distance

s est etablie entre lui et son corps il est associe a la tragedie du avec illui laquofaut

cohabiter

ceiui-ci lui renvoie nne a du mal a assumer

ceUe de I laquoElephant manraquo

89) laquoEst-ce du courage que de sarracher du lit

pour aller planter un naime pas devant

un mimir quon redoute (ibid 101) II interroge

comme Ie faisait laquo Ie miroir qui ne

repond pas

Contrairement au mimir sartrien Ie 8ien nest pas

rassurant

Tout miroir est un ennemi qui me dans lirritation

it [l surgir des reminiscences atroces et des

sentiments violent que je tyreteremis 89)

Rurangva est emmure dans sa sOllffrance et dans

Ihorreur du genocide Le rapport de son evaluaril1n

affirme qllil manifeste laquovisiblement

des sequelles psychiques du rrau rnatisme vecuraquo

171) et quil souffre elu de stress postshy

traumatique (ibid) Rurangwa lui-meme avoue

son a le des souvenirs

sus cites par un bruit un objet une odeuf lIn certain

silence un cri un rienraquo 163) La

neccssite de retrouver Ie souvenir rouvre la blessure

et cause une nouvelle souffrance II est

confronte au la memoire it la photo

qui me soul eve Ie cceur

cette memoire eherie et honnie lJraquo 27) Ce qui leffraie Ie sur cette c est Ie

souvenir du meurtre cie sa mere la pire atrocite a illluil fut dassisterraquo (ibid 47) La

reveille Ie souvenir insupportable la l1e de

sa mere par 1a milice feminine

avant detre eventree par son tortionnaire Cette scene

pr0voque chez lui me blessure quun coup

de macherteraquo 48) et a inscrit en lui une haine

atroce

La haine Ju des de wus les Hutu Tille en

moi a tmtam comme ies dents dun

jam([is elre relire tant it penetre loin dans ta chair Une haine

et cowie qui ne que

Sihomana tout son

temps pour omrir Ie ventre de mel mere LJ (Ibid)

11 compte laquo la haine gt les laquotrois mots clesraquo quil

considere cornme declencheurs de son

]4) Comme nous ravons 1110ntre prealablement

son cst une tentative de pouvoir se defaire

de ceUe haine qui frise la vengeance c est ( line

de combattre ce qui pourrait [tel falre succomber la

haine et Ie silenceraquo 9-10) Malgre Ie souvenir insupportable associe fl

de la c est cette memc qui va lui procurer

Ie pouvoir de se [(concilier avec lui-meme et de

reconquerir son Un detail emane

de Ie lt )j et Iattire laquo llel boubon colore

niveau du ventre)j (ibid 21)

Quelques de

ce

Dans

car clest nwi l))rte Je

suis son prernier eUe a 21 am et dent de se marier

On rna souvent cUt que je h~i ressentblais etonnamment

que rnon t lsage son eme traits de ma nere Ie SOUVenir de amnt

Cest auss fa redoute aCe point

des crireres didentification

naltre molS npres Ie manage

Kambamba Ie 3 juin 1978 au dispensaire de Muginaraquo

(ibid - mais aussi un point de

- la ressemblance avec sa mere Cela est signiflcatif pour lhomme defigure dont lidentitc a ctc eHacce

de la mere lui oHre une nouvelle naissance

a un certain moment dans la description

et de la ccrcmonie du mariage il pense de la danse lors de la cen3monie et se

retrouve dans Ie sein de sa mere

laquoDans Ie ventre de 1a mere je dois sentir cette chaude houle de lenthousiasme qui me porte je

de celie me porteraquo Du souvenir emanent toutes sortes de sensations et

sentiments semblables a ceux engendres par la

mcmoire La ressemblance avec sa mere lui donne Ie

courage dassumer image du miroir quil redoutait

auparavant Ainsi refuse-t-ille suicide qui Ie la de Iimage refletee par la II trouve

la redemption dans cette ressemblance

avec sa mere Iimagc de la mere est Ie mhoir dans

il se voit comme il etait avant la

it la mere nous rappelle Ie

miroin) lacanien Dans Ecrits I Jacques Lacan

faut (flnUmTIIlYP Ie stade du miroir comme une

donne it ce terme asavoir la

it assume une

94)

A travers image de sa mere il forme une

lui-meme et effectue la conquete de son propre

corps laquoMeme si e1Ie est ravagee ma figure est ccUe

offerte ma mere (Genocide 91) Aimi

Ie suicide et meme [operation

II veut egalement conserver son laquovisage balafre parce veut gravees sur [son] corps les marques

(ibid) II considere son corps comme un

memorial difficilement alterable par rapport a sites mcmoriaux On pellt nettoyer laquoles les

d tous les lieux du mais on ne peut

enlever lsesJ balafresraquo (ibid) Ses laquocicatrices

son une attestation vivante charnelle et de ces crimes contre lhumaniteraquo alars que les laquoautres

memoriaux exposent des tapis de cranes ou

empilements soigneux de tibias et de raquo (ibid)

CONCLUSION

Limage photographique a

des siens Cest un long cri de Ihorreu[raquo Le narrateur secrie mals en meme

temps Rurangwa se en face et

un texte qui est a la fois son miroir et son espace dinterrogation

Limage de la mere et indirectement

photographique a joue un dans la

reconstruction de lidentite de Rurangwa Elle a

offert au narrateur dont des

points de repere importants pom une photo de carte didentite OU Ion peut

et la date de naissance et confirmer la

La photo de famille dont recit du genocide ltitrempee dans un de sang)

22) a pu se purifier a de la mere

A la fin du t6moignage elle devient ou l11oin5

une relique sacree Limage de la mere

aRurangwa de se son corps

et de Iassumer A la fin du rejet quil entretenait avec son corps est devenue

une relation damour Son corps survivant a par

la suite acquis un role double de memoire

et dlt genocide Dans Ie livre de photographique a depasse da rp-wcpn~rm

Temps raquo laquoiemphase dechirante du noeme (Barthes 1980 148) pour devenir nne photo souvenir

et une photo didentite

bull voume 37 nlJmero 2

NOTES L Toute reference it cet ouvrage rapporte t~dition de 2006 aux

Pre~8(5 de la Rcnai5sancc Le3 t(~ferences paginales seront clesormais conne-euros dansle texte 1 precedees du de lceuvrlt entre rarenth(ses 2 Le terme fv1u~e1rn(1nn laquo11usuhnan gtI prend origjnc dans

Ie caIUp dtuschvitz dOl ii 6l est prop8ge clautres camps Les

sont diversifies sur sa vraie definition Pour certains lti il reno1c au sens littera1 du terT1e aabe mHsUn ql~i sigrdfie cellii qLt sc sou met sans reserve ~l la volonte divine_ lviais tandi~ que la resignutioll dJ muslim repose sur]a convicrion que la volonte dAlJ8h est i lceuvre chac~ue instant dans moir~drc cvenenlent Ie lllusulman

dAuschwitz semble pedu toute volonte ct toute conscience (Agamben 2003 46) Dautr~s croiem que Ie termc semble provenir

de la posture Ijpique de detenus blottis stub jmnhes replies ala m-lniere orientale e visage riglJe con101e celle Jlun luasqueraquo

(ibid 47) DHutres cfQicnt entin qUe le termc lt faisait aHusion aux

((mouvernents rypiques des nlusulmans l1

CeS allees venues du bustej

du haur vers Ie bas [evoqnanrJ es ricuels de prierc islamiquesgt (Sofsh par Agamben 2003 47) Notre reference ce mot article

evoque tOllt simplement lbomme dont In force nterieure et physique a

de completenrent lriS(c Dans SUniVa(~t~s Esther Viujmvayo souteve egalenlent ccte

problenrique iecoute Ul Rwanda On been les gens quon

assez parle Ju genocide au ltllors laquoils peuvcnt pas suporter demendre LJ Je pouna dire en Ule phrase pourquoi on s est tu apres le genocide on sent(Jit qu)n derangeait [] COfnil1enCeS raconter rac()nter if nlcceptent decouer cr cle-st

terrihle (2005 20) 4 SU1VVanres vuawayo parle de ce corps qui [aliaie

mcttre a la mille standad laide de la machette Les hommcs rutsi ~1Vaient 18 reputatit)n detre trop granrh un ITletre qllatreAdngt~

dix devenait done line faute Les femmes dies commettaicnt dilVoir taHle ~es lnil1(c ph1t denorrnes hanches Avant de les [Uer it faUait June les raluener a une taille st~uldard I~

[J (2C05 90) 5 Couronne symbole de la matcrnite portee tradllmnellement

toures nvandaises

REF~RENCES BIBLIOGRAPHIQUES t-GAMHEK i2003j Ce ~rs[p Paris Rivaglgts BARTHES R [1980] Crambre Claire Note SHY la phowgmfJhie Gallimatd Souil coli Cabiers du cinema

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Sen colI LACAN J [(966) i9991 Paris Sed MUIAWAYO [(2004) 200SJ SiniVanes Rwanda Historre genocide Paris LAube tIJN lvi [1998 Rccits dL genocide S~mioriqHe lindicib[f)

Delachaux cr Niestjf~ R~RAJGWA R [2006] Genocide de ]a Renaissance SCHAEfFER] M [19871 Lrraglt

Paris SeiJil coIL laquoPoe-tique raquo)

B tI999] ethmqucJ Paris Dagorno SEMPRUl] [19941 L uu la tie Paris Gallimard SEMl]ANGA] [1998] fondaleurs du drane mandais Paris

Jl-ianHttan WAITRATcR R II003J SoniT du genocide Temoigrer pour abprerdrc J

Paris

VOlime rJITIlho 2 bull PRorEL

temain namme enfin l innommalle i) er nous lobJet cause de son mal

cache entre deux cest la lnfl1(lfflJliP jaHnie

dune illanciemleJ) Elle na pas cartonncc

rassurante des tiragcs mais son inconsiswnce

mernc uccwft lu lulcHT Cest linstant cph6mert3 dune

presence sur un support II represente ee que rai de plus cher au ce qllil y a de abominable au monde

(Ibid 15-16 nous soulignom)

Dans cet extrair de texte nsemble que [image

photographique soit sensible aux fluctuations du temps c est une photographique

rcalisee sur un support pn~eaire ) Elle est de qual ite ( trop mediocre) 17) et sa surface dinscription

par Ie temps na pas beaucoup de cest une feuille de papier)) qui na pas llaquoepaisseuf

rassurante des tilflges professionnelsraquo Ie lien est etabli entre limage photographique 1e temps et indirectement la mort

Dans Ie texte de Rurangwa il semble que ce lien it 1a mort est aussi inherent lessence meme de photographique qui ncst quune de

tdinstant ephemere dune presence fragile) (ibid 15)

La mort est ici par lidee de levanescence de Iinstant qui se dissout aussit6t quil cst capte Dans son ouvragc La Chamhre claire Note sur la

Roland Barthes ecrit que [ J non settlement die [ta a communemem Ie sort du

papiey mais meme 5i eUe est

dIe nen est pas moins martelle 145)

Le lien a la mort explique Barthes est issu du rapport

referentiel entre limage phorographique et lobjct represente Le referent photographique est different

celui autres systemes de representation 119-120)

non pas la chose

aurait pas de nl1r)OPYflDnW [n] ckms la Fhnt(7wrhh nier que la chose a

etc la II y a double conjoime de redite et de passe

Et puisque cefte contminte nexiste que pOllr on doit

poar (essence memc k noeme de la

Le non du nobne nl1r)[I1rmi nniP sera done

ou ~ncore llntrait(lble

Plus Barthes ajoutc que [ ]ceqlli la natwe de la cest u Jose Peu importc la duree cene pose meme Ie temps

dun millionieme de seconde [ J un instant si ou une chose reele sest tTOIIVee devant lceil

Limage photographique telle que Barthes nous la exprime son lien a la mort parce quelle

parait immobile er fixe dans un temps revolu pendant

fait conscience de 1a trace par une presence indeniable suppose la mort c est lit sans doure

la cause de leffroi et de l amertullle de Rurangwa quand il parle cet instant ephemere dune presence fragile) Rurangwa tient cependant it ( ce

resteraquo du document en luine de papier se trouc

qHC je

docllment qui me pennet dembrasse1les visages

man histoire ct un jour peut-erre de Tc()lltrer i mes

silhouette leurs aieux assassines

16 nous soulignons)

Le lien a la mort clevient encore bcallcoLJp clair c est (da silhOuette lernpreinte la trace dun autre temps laissee par sa famille exterminee pendant Ie genocide de 1994

Partant notions de symbole eliccme et dindice

avancees par Charles Pierce sa classification des relations que les entreriennent avec

1U-0 Jean-Marie Schaeffer a fait une etude

sur Dans Du Schaeffer montre

que limage photographique est non pas une icone pure mais un laquoindiciel visibleraquo Cest une trace (detnpreinte))) laissee par reel

(ltltlimpregnantraquo) sous leffet dune

action photochimique (Schaeffer 1987 54) Limage

photographique n est donc pas laquoimpregnant mais sa

visuclle Meme si de la famille

de Rurangwa netoit pas une photocopie elle lui

2 bull

offritait simplement une manifestation de Iobjct une

silhouetteraquo comme ilk reconnait Ie texte cite ci-dessus

Rurangwa attribue pourtant Ie double role

de transmission et de reception acette image photographique ilIa jalousement pour que

famille survive dans la memoire de ses descendants

Comment ce document exprime la ruine par sa

materialite et son essence va-t-il restituer 1a realite de

la finnille de Rurangwa La rcmemore pas Ie passe (rien de proustien

dans une photo) sur moi nest pas

restiruer qu i est aboli Ie temps la mais

dattester que cda que je Jois bien ete Demnt une

photO la conscience ne pas necessairement la voie

dlt souvenir (Barthes 1980 129 et 133)

Schaeffer abonde dans Ie meme sens en montrant

que Ie caractere dempreintc de la photographic ne

lui permet pas de restituer Ie (1987 17) En essence elle ne peut done pas restituer Ie souvenir et

Rurangvva en est conscient Dans Ie projet de Rurangwa est de trouver une pour dire

cette memoire et e est apartir de eette photographie quil tente de tecouvrer la parole pour la dire

La photographie fait des arts visuels et y rejoint dautres arts plastiques Elle done softiir lceil elU spectateur Celle de Ia fa mille de

Rurangwa etant absente du texte Ie doit etre mis en valeur par la dun laquojeraquo

qui la prend en charge pour la presenter au lecteur

spectateur Dans dans Ie

narrateur est en contact evident avec Ie narrataire

pour s assurer de son eeoute car que Ia vue e est qui est iei mise en II semble done que Ie

motif de la photographie est choisi par lauteur pour favoriser lecoute necessaire dans lacte de temoigner du genocide Dans Ie texte eette est mise en

ceuvre du presentatif des demonstratifs er de limperatif

Plusieurs critiques et survivants du

ont 1a necessite de lecoute de

lindicible Dans ou la Jorge Semprun

eerit

On peHt rottt dire de penser El de S) iY~ettre Mais peut~on tout eOtU irna~ner

Le pourrcH-on En a1fToniIs la patience fa passion la

compassion la necessaire 26)

Rurangwa lui-meme deplore Ie fait que les Rwandais non nont ni la ni la d ecouter les SLltvivants

On embete tout le Dwnde atcc notre nos

nos morts de memoire de [ J Li seul discours

aurarise Ie resume a laquo reconciiiation raquo mot

dordre si beau en SOl cri des res capes

131) 3

Les survivanrs semmurent dans Ie silence parce

quils n arrivent pas a etre ecoLltes Le temoignage du

genocide lautredu ecritAnny Rosenman dans Les de ta Shoah

Dans eet ouvrage cette montre que laquo tout

ternoignage implique [ oJ de

mediation liberer

entre autres la Mediation veTS [autre qui est requis la bles5ure de

ce sawir de Ie transmettre den erre ie passeur

ewe que dans

IjasSHrance dn Uen Tenoue ertre lui cr cet autre) (lue

soit Ie isage de ses dans ie temps

que son existence soit materielle au ceile dun

lecteur 21)

Ie motif produit un recit dans lequella laquomediation illautreraquo etablit un contact constant entre Ie temoin et Ie lecteur devient (daurre elu comme

e est Ie cas dans Ie passage suivant Si de courage

de vovs detailer fa quinzaine de personnages qui

passe ce

16 nous soulignons)

du pronom personnel laquoTousraquo denote

clairement ladresse au lecteur Ce dernier detient Ie role du raquo que Waintrater considere

comme pilier du laquo pacte Iestimonial

bull vollln1f numero 2

Plus que rom autre texte UUWOW~TUi)mme Ie Ces avertissements s adressent au lecteur pour lui

est une lrin~ udr~sse i un autic qui La

cnnlcicnce Iumaine done Ie temoin a he isoc ii un moment de

son existence par l6enement done vient temoigner

14)

Apillsieurs endroitl du parcours narrarif du

de Rurangwa lecoute de la part du iecteur est sollicitce par ie narrateur Cest notamment Ie cas lorsqlle le recit qui sous lemprise de la sllbjectivite narratif depasse de loin Ie

de la photo entre dans Ie cr digresse Pour mettre fin aune digression trop ie narrateur

revient a la photo et invite Ie a reprendre lhistoire avec lui par Ie truchement de

I associatif laquoReprenons un instant ma photo de famillo 25)

Duns un autre endroit du parcours narratif le souvenir est si insupportable que ie narrateur est

deloigner la photo de sa vue Saehant que quelquun est a lecoute illui expJique 1a necessitc de rompre le til narratif

Mais je mis trop vite Je range la qui me souleve Ie cOur

cette memoire cherie et hannie -) a sa dam

man tas de papemsse entre un livre cJallemand et m lwre

deconornie Je histoire ason debut (Ibid 27)

Conseient de la nnc~nrp du il se

dabuser de sa patience et de sa bonne volonte et reprend le recit la OU il laisse La reconnaissance

de lecuute joue egalement un role dans Ie de la trame narrative et du souvenir La complicite entre Ie narrateur et Ie lecteur est si

tacite encourage Ie temoignage collectif comme

Ie texte suivant Metis avant doser penetreT dars

impuissants Ii exjJrimer

[ J comlncn~ notre voisin est devenu du JOUT au

lendemain notre assassin

Et ce nest pas aise PHflUPT cda Dabord il a mernoire visiter les somcnirs Cest une torture Puis lant de

choses sont melees non seulement rcmonter loin de

[histoire mais aUlsi descendre en nous-memes dans

ies crareres de nos valcans intimes Cest encore bTuant

douloureux (Ibid 29 nous OVltH~HV

apprendre que dire le

dangereuse jalonnee necessitant une

franche Le narrateur cree iei un scenario initi3tique dans il devient Ie guide

qui introduit Ie lecteur neophyte dans Iunivers dl en sadres~ant lui par du pronom

(VOUS raquo mais aussi en sollicirant de sa part Ie courage

lui est neeessaire pour parcourir eet itineraire perilleux Au milieu du texte Ie prunorn laquovousraquo

fait au laquonOLlSraquo Ce ehangement est ICI

JllUll-ClLLJ car Ie narrarellr detinit Ie recepteur de

comme agent participant a la sphere communicative Le Jecteur nest plus un simple laquoagent

raquo de il est et invite aentrer dns 1a sphere diegetique De ee il semble quun

spatial et affectif so it etabli dans Ie texte

Parfois Ie narrateur le lecteur a temoin Face a [image des femmes hunt ctaient pour celehrer Ie Rurangwa exprime son

envers ces voisines de sa famille nont

pas eu Ie courage de les enfants de leurs

voisins Aujourdhui ces femmes de non-assistance a une personne en Elles nont pas

cacher un enfam de notre famille lors du 21) Ce laquojaccuscraquo interpelle Ie

it te11101n Ruranpwa semble accuser

Durant ce moment dramatique la justice en main et

impose aux accusees une sentence en les eliminant du cadre de la ne veux les voir Je les hurds de la et je les eseamore Il y a jours noirs Oil on ne peut pas voir Ia reaht

en face Le retrecissement du cadre photographique provoque ason tour une rupture narrative La description de la sarrete pour ne

pas declencher dautres souvenirs penibles Le rapport et devirement que le narrateur entretient

avec [image sa famille se traduit par Ie va-et-vient continu entre la et la narration mOllvement qui ason tour provoque 1a

nrnrn du tissLl nanmiddotatif II nous semble ici que Ia

du recit augmente la force du du

neit

voiw)) jO

NUllS pouvons meme ajouter que laspecr

dialogue texte provient de nombreuses rhetoriques sur Ia problcmatique de lindicibIe

parcuurs narratif et une celmiddottaine ecoute de Ia part du

lecteur Ces questions bien nexigent pas de reponses ont lavantage de eventuelles du lecreur et de suggerer auditeur

est lecuute lhistoire On peut ansst dire que

1introduction la dans Ie texte en tant innummabIe consideree en

reference a lindicible peut etre interpretee comme

un moyen dexploiter Ie mystere et provoqu er Ie snspens chez Ie lccteur

Grace a toutes ces grammaticales et

Iimage de la photographie a a de Ies membres de sa famille de

parler de leur de leur de vivre avant de

raconter mort

LJ CeUX qui Ie rcjouissent seront jmr leurs toisins et

ceux qui les corlgnuue (~ette ~)hOl0 est le dernier vestige)

lultime inswmane dun moncle de 5erenit~ qui va sombrer

dans la saneantir 22)

Dc CORPS OBJET AU SUJET

LA REPRESENTATION PICTURALE ET INTERTEXTUEL

DANS LA RECONSTRUCTION lDENTlTA1RE

Dans Ia derniere partie de cette nous allons montrer comment Ie corps de Rurangwa est Ie produit

de plusieurs quon peut lire sur la surface

tegurnentaire Ensuite nous examinerons comment son corps objet dll de l autre etre recupere

par son legitime Cest par Ie truchemnt

du intertextuel et la picturale que Rurangwa devient sujet de son pro pre discours et

reconstruit son identite Sur b photo de face a personnage

represente il y a chez Ie narrateur Ie desir dune remuntee en arriere Ce retrospectif lui pennet

dalimenter la narration et donner un aspect

authl1tique ason temoignage Le retour en arriere lui donn loccasion dinterroger Ie texte historique

Le 4 du intitule Du a Ienfepgt a line teneur didactique

sur Ie mythique et

partie la par canographique du Rwanda Le narrateur saisit

cette occasion pour nous donner une de la fimne et de la flore Le mal fait ~CltIclunu

qui

prend la curieuse forme du 30) c est aussi un pays auquel certains

Occidentaux ont attribue Ie sobriquet de trou du

du monderaquo (ibid) La beaute du Rwanda ne peut pas etre sans taire son

a fait de ce pays une souillure sur Ia carte de I~AJrique et celle dl monde Ie est clairement soHicite

Du texte Ie narrateur oriente Ie lecteur

vers lhistoire du Rwanda Le texte historiquc est insere dans Ie recit par une ilustree Comme

ceHe de la familiale eHe est

A de lillustration dun livre Rwanda Ie narrateur prend lallure dun professeur et

Ie devient son eleve Dc Ie recit

llne teneur didactique Sur Ie plan cette image pennet au narrateur de renouer

Ie dialogue avec le Iecteur et au fecit de reprendre son aspect

Cillustration Ie Hutu et Ie Tutsi Ies trois figures de Ia population rwandaise qui cohabitaient comme des doigts de la mainraquo avant

Ie clivage par la colonisation

Ruran~Wa effectue une remontee vers Ie temps primordial en tentant dexpliquer par Ie du recit VltU1VU

comment lharmonie a ete brisee De ce temps mythique il revient a lillustration pour prouver

ethnique a

constitue un resume de 1histoire du Rwanda de

qui suivent racontent Ies details de lassassinat de tous

Ies membres de sa famille et de

vivantraquo A son portrait

12 intitL11e Oser me

37

Tous les manns Ie meme La wynne dll miroY dam

la saUe de baim [ j Ce que je tois horrible mais n~

peUX tuiter cet un visage qui nest

visage Une tete ltnegre J1 qui semble avoir ere sur

UT[J7eTUE atlCc de mauvais ciseaux en son milicu

Une nnlHnl)lW0 part de Iorem drolle ([tme

consignes (Ies ~erOCJaares prccisait de parLer le CQuJ-- ahauteur

de nez cpate et tranche car cJetait

tin nez de Tlttsi Une seconde cicatrice Ii panir de lordl essaie de la ressemble it un

accYUcileDpoundu [ J ou au point que dans la

tete en permanence pourquoi

89)

Tous les coups reus sur Ie lui ant arrache aussi un ceil et son

[J cloute nes[

boule une ala chair Les poimes

eles lances ant laisse sur ma poitrine des styies noires er epaisses (IHd)

Ce portrait nailS est offert en entier atravers que lui renvoie Ie miroir Cornme Ie titre dLl chapitre

lindique Rurangvva veLlr se regarder en face affronter Ie monstre quon a fait de lui Ce objectif tourne soudainement en un il se

mais ref1echit aussi sur sa nouvelle condition de vie Le corps ele est I element matriciel

elu textej il se fait voir et se fait lire Cest un site sur leque1le genocide a laisse ses marques indelebiles

laquoMon corps mon et Ie plus de ma memoire en portent la nn de rna vie

Pour est grave dans

ma peau comme un tatollage sur lavant-bras des condamnes dAuschwitzraquo (ibid 71) Pour

ces marques sur son corps par I armee il essaie de nous expliquer d abard

comment ce corps a ere erhnicise et puis Le mot qui sert de titre au

de la fois tres descriptif et singulier Ce mot invente par lauteur est forme a partir du substantif raquo pour creer un adjectif

verbal issu dun verbe possible laquogenociderraquo Que Ie mot soit invente cela nest pas

surprenant car Ie mot ii ~Vu_ lui-meme est un

recent cree en 1944 apres [extermination et des T ziganes par les nazis Il est bien

vrai que dans lne societe donnee de nouveaux

concepts necessitent de nouveaux motsraquo Ie Rwanda ne fait donc pas Un

nouveau tenne courant ne apres Ie

Tutsi au Rwanda esr Ie substantif Ce est utilise pour celui au celie

a perpetre Ie Bien quil ne so it pas encore

Ie franais Ie substantif

plusieurs temoignages des dans les discours dans

nationaux et internationaux et meme dans publiees en Kinyarwanda

Dans son temoignage Ruranf-Wa cree une autre forme laquogenoddb pour designer son corps ethnidse sur lequella machette du milicien laisse marques visibes et lisibles Le corps du narrateur et par extension Ie corps du Tursi est un carrefour de

et il ne peut se comprencire quen tenant

compte la production la transformation brd

de la reecriture des anterieurs qui lont

fa~onne

Rurangwa a momre par Ie truchement du texte que Ie discours colonial a ere a la base de

la cristallisation des differences physiques entre les trois groupes ethniques du Rwanda De nombreuses etudes sur Ie Rwanda sont daccord sur ce Dans Les Recits du Semujanga a bien explique comment a lepoque coloniale

Ie disco1OS du satoir a par steniotypage des images

de IOccident sur construit un nouteau systeme

axloc)poundt(1ue avec des nidts vaiorisanr posiriement Ie Tutsi et

negatiwment Ie Hutu (1998

et comment a partir de cette les discours

et ont inverse laquoles

du discours colonial tutsi-bon hutu-mauvais (ibid) Le discours colonial a ete recupere et manipule par les Hutu extremistes leur avantage pour eliminer Ie Tutsi qui dait considere comme un dement nodf au

gouvernement Hutu et aleur bien-ene Les parties du corps du Tursi ethnicise par Ie discours colonial

qui etaient all depart enviees ant ere par apres

vojuf~le numero 2 bull PROTCC

et rejetees par Jes Hutll Dans son Le ethnique Benjamin Sehene ecrit a ce propos

ils (res sonl

lf wvm iLs les mitres

Pendant Ie ie est

a lelimination les traits physiques sokHsant

typiqucmcnt tutsi ctaient cibles pour extermination

Rurangwa ten1oin oculaire tel meurtre en fait une description vividc

lis la lui tranchent les (comme

aux Tutsi detre les Huru

prennent un malin plaisir ales (raccourcirraquo au ales ramener

au 54)4

Les du corps de Rurangwa ont egalement subi

Ie meme sort Sibomana en de moi laquoOh voici Iaine

des Tutsi (iui pointe son nez dehorsraquo Et dun coup tres

il me Ie Tuesi nont pas Ie

de

ces demiers ont mis un loin special

naturelie) 56)

Le corps cles femmes a ete atrocement manipule pour mieux parfaire Ie dessein du genocide des Tursi Dans

une note inseree Ie livre nous donne

des eclaircissements la~dessus Sur les les assassins hutu ont les couN

porwnt sur Ie organes de la ventre et ~-agin

allant briser des de bou tdb Jam

leurs sexes aprgt les (lvoir violees Cest [une des marques

dun Jatteindre une race i1

Les coups machette ou de gourdin par

Ie milicien ont suivi methodiquement les marqueurs erhniques etablis par le discours colonial pour

produire un corps raquo 11 semble donc que ce sied mieux au corps de Rurangwa

lensemble ethniquement a ete par Ie bourreau Le titre du livre fait reference plut6t a son

corps qua sa personne Rurangwa a sans

doute voulu commencer son roman par une tension lexicale em plutot semanrique pour nollS faire entrer

lunivers de [indicible a comprendre

Le corps Rurangwfl est

une surface dinscription sur laquelle peuvent se

lire anrerieurs directement Oll

indirecrement ront transforme et lont conduit au supplice du Il ne peut etIe que

par Ie truchement du intertextueL Nous utilisons iei Ie concept dintertextualite selon la definition que lui donnent Kristeva et Gerard c estshy

fait quun texte soit la reecriture autre

texte produit par la transformation ou la reecriture dautres textes anterieurs Le corps laquogenocideraquo de

Rurangwa est donc comme un texte produir par un

double discours Ie discours colonial

racisre occidentale a ete

par les Hum

leur

de haine de lautre Cest cette version qui a produit a son tour Ie Le corps de constitue donc un par excellence Dans son ouvrage

Gerard Genetre Ie palimpseste comme f)crhem dont on a gratte la premiere inscription

pour en tracer une autre qui ne la pas tout a en sorte par transparence lancien sous Ie

Les coups de subis par Ie corps clu narrateur y ont et

des traces indelebiles Le discours de haine dans chair 11 a pas reellement efface Ie cliscours anterieur

mais 1a marque en gras Cest ainsi Cluon peut encore dechiffrer SOllS Ie nouveau Plusieurs annees

marques sur son corps

renforcent sa victimisation de mot une cible ideate Elies

impUque laquo Tratail a qtle je rcntre

a

Face au regard anLn son corps est a eliminer parce quil est accusateur cest un laquotestisraquo

un ( tiersraquo (Agamben 2003 17) qui

PROT[[ bull

entre Ie ct Iaccuse dans un

proccs Carme genocidaire qui devait eli fniner 1e

corps ethnicise elu Tutsi pas reussi a Ie faire mais

plus La plupart des

marques 80nt localisees sur

son visage elIes sautent aux yeux lc et

li501ent Son corps est devenu veereur des donnees

ethniques et un espace all se d autrcs

discours II aisement au discours social Ses

camarades de classc en Suisse au il vit

croient que cicatrices sont des

quil s est volontairement imposes et quJ il a meme pousse de jusquau cicatricing)

62) Dautres croient quii survecu un rres grave

accident voiture Dans Ie refus de se construire

partir du personnage exterieur quon a fait

Rurangwa a un retrospectif et la tourne

vers Ie du Rwanda pour les

discours qui se superposent sur son corps

Malgre cette demarche son corps reste ]a proie de

sa pwpre perception Hiui est etranger Une distance

s est etablie entre lui et son corps il est associe a la tragedie du avec illui laquofaut

cohabiter

ceiui-ci lui renvoie nne a du mal a assumer

ceUe de I laquoElephant manraquo

89) laquoEst-ce du courage que de sarracher du lit

pour aller planter un naime pas devant

un mimir quon redoute (ibid 101) II interroge

comme Ie faisait laquo Ie miroir qui ne

repond pas

Contrairement au mimir sartrien Ie 8ien nest pas

rassurant

Tout miroir est un ennemi qui me dans lirritation

it [l surgir des reminiscences atroces et des

sentiments violent que je tyreteremis 89)

Rurangva est emmure dans sa sOllffrance et dans

Ihorreur du genocide Le rapport de son evaluaril1n

affirme qllil manifeste laquovisiblement

des sequelles psychiques du rrau rnatisme vecuraquo

171) et quil souffre elu de stress postshy

traumatique (ibid) Rurangwa lui-meme avoue

son a le des souvenirs

sus cites par un bruit un objet une odeuf lIn certain

silence un cri un rienraquo 163) La

neccssite de retrouver Ie souvenir rouvre la blessure

et cause une nouvelle souffrance II est

confronte au la memoire it la photo

qui me soul eve Ie cceur

cette memoire eherie et honnie lJraquo 27) Ce qui leffraie Ie sur cette c est Ie

souvenir du meurtre cie sa mere la pire atrocite a illluil fut dassisterraquo (ibid 47) La

reveille Ie souvenir insupportable la l1e de

sa mere par 1a milice feminine

avant detre eventree par son tortionnaire Cette scene

pr0voque chez lui me blessure quun coup

de macherteraquo 48) et a inscrit en lui une haine

atroce

La haine Ju des de wus les Hutu Tille en

moi a tmtam comme ies dents dun

jam([is elre relire tant it penetre loin dans ta chair Une haine

et cowie qui ne que

Sihomana tout son

temps pour omrir Ie ventre de mel mere LJ (Ibid)

11 compte laquo la haine gt les laquotrois mots clesraquo quil

considere cornme declencheurs de son

]4) Comme nous ravons 1110ntre prealablement

son cst une tentative de pouvoir se defaire

de ceUe haine qui frise la vengeance c est ( line

de combattre ce qui pourrait [tel falre succomber la

haine et Ie silenceraquo 9-10) Malgre Ie souvenir insupportable associe fl

de la c est cette memc qui va lui procurer

Ie pouvoir de se [(concilier avec lui-meme et de

reconquerir son Un detail emane

de Ie lt )j et Iattire laquo llel boubon colore

niveau du ventre)j (ibid 21)

Quelques de

ce

Dans

car clest nwi l))rte Je

suis son prernier eUe a 21 am et dent de se marier

On rna souvent cUt que je h~i ressentblais etonnamment

que rnon t lsage son eme traits de ma nere Ie SOUVenir de amnt

Cest auss fa redoute aCe point

des crireres didentification

naltre molS npres Ie manage

Kambamba Ie 3 juin 1978 au dispensaire de Muginaraquo

(ibid - mais aussi un point de

- la ressemblance avec sa mere Cela est signiflcatif pour lhomme defigure dont lidentitc a ctc eHacce

de la mere lui oHre une nouvelle naissance

a un certain moment dans la description

et de la ccrcmonie du mariage il pense de la danse lors de la cen3monie et se

retrouve dans Ie sein de sa mere

laquoDans Ie ventre de 1a mere je dois sentir cette chaude houle de lenthousiasme qui me porte je

de celie me porteraquo Du souvenir emanent toutes sortes de sensations et

sentiments semblables a ceux engendres par la

mcmoire La ressemblance avec sa mere lui donne Ie

courage dassumer image du miroir quil redoutait

auparavant Ainsi refuse-t-ille suicide qui Ie la de Iimage refletee par la II trouve

la redemption dans cette ressemblance

avec sa mere Iimagc de la mere est Ie mhoir dans

il se voit comme il etait avant la

it la mere nous rappelle Ie

miroin) lacanien Dans Ecrits I Jacques Lacan

faut (flnUmTIIlYP Ie stade du miroir comme une

donne it ce terme asavoir la

it assume une

94)

A travers image de sa mere il forme une

lui-meme et effectue la conquete de son propre

corps laquoMeme si e1Ie est ravagee ma figure est ccUe

offerte ma mere (Genocide 91) Aimi

Ie suicide et meme [operation

II veut egalement conserver son laquovisage balafre parce veut gravees sur [son] corps les marques

(ibid) II considere son corps comme un

memorial difficilement alterable par rapport a sites mcmoriaux On pellt nettoyer laquoles les

d tous les lieux du mais on ne peut

enlever lsesJ balafresraquo (ibid) Ses laquocicatrices

son une attestation vivante charnelle et de ces crimes contre lhumaniteraquo alars que les laquoautres

memoriaux exposent des tapis de cranes ou

empilements soigneux de tibias et de raquo (ibid)

CONCLUSION

Limage photographique a

des siens Cest un long cri de Ihorreu[raquo Le narrateur secrie mals en meme

temps Rurangwa se en face et

un texte qui est a la fois son miroir et son espace dinterrogation

Limage de la mere et indirectement

photographique a joue un dans la

reconstruction de lidentite de Rurangwa Elle a

offert au narrateur dont des

points de repere importants pom une photo de carte didentite OU Ion peut

et la date de naissance et confirmer la

La photo de famille dont recit du genocide ltitrempee dans un de sang)

22) a pu se purifier a de la mere

A la fin du t6moignage elle devient ou l11oin5

une relique sacree Limage de la mere

aRurangwa de se son corps

et de Iassumer A la fin du rejet quil entretenait avec son corps est devenue

une relation damour Son corps survivant a par

la suite acquis un role double de memoire

et dlt genocide Dans Ie livre de photographique a depasse da rp-wcpn~rm

Temps raquo laquoiemphase dechirante du noeme (Barthes 1980 148) pour devenir nne photo souvenir

et une photo didentite

bull voume 37 nlJmero 2

NOTES L Toute reference it cet ouvrage rapporte t~dition de 2006 aux

Pre~8(5 de la Rcnai5sancc Le3 t(~ferences paginales seront clesormais conne-euros dansle texte 1 precedees du de lceuvrlt entre rarenth(ses 2 Le terme fv1u~e1rn(1nn laquo11usuhnan gtI prend origjnc dans

Ie caIUp dtuschvitz dOl ii 6l est prop8ge clautres camps Les

sont diversifies sur sa vraie definition Pour certains lti il reno1c au sens littera1 du terT1e aabe mHsUn ql~i sigrdfie cellii qLt sc sou met sans reserve ~l la volonte divine_ lviais tandi~ que la resignutioll dJ muslim repose sur]a convicrion que la volonte dAlJ8h est i lceuvre chac~ue instant dans moir~drc cvenenlent Ie lllusulman

dAuschwitz semble pedu toute volonte ct toute conscience (Agamben 2003 46) Dautr~s croiem que Ie termc semble provenir

de la posture Ijpique de detenus blottis stub jmnhes replies ala m-lniere orientale e visage riglJe con101e celle Jlun luasqueraquo

(ibid 47) DHutres cfQicnt entin qUe le termc lt faisait aHusion aux

((mouvernents rypiques des nlusulmans l1

CeS allees venues du bustej

du haur vers Ie bas [evoqnanrJ es ricuels de prierc islamiquesgt (Sofsh par Agamben 2003 47) Notre reference ce mot article

evoque tOllt simplement lbomme dont In force nterieure et physique a

de completenrent lriS(c Dans SUniVa(~t~s Esther Viujmvayo souteve egalenlent ccte

problenrique iecoute Ul Rwanda On been les gens quon

assez parle Ju genocide au ltllors laquoils peuvcnt pas suporter demendre LJ Je pouna dire en Ule phrase pourquoi on s est tu apres le genocide on sent(Jit qu)n derangeait [] COfnil1enCeS raconter rac()nter if nlcceptent decouer cr cle-st

terrihle (2005 20) 4 SU1VVanres vuawayo parle de ce corps qui [aliaie

mcttre a la mille standad laide de la machette Les hommcs rutsi ~1Vaient 18 reputatit)n detre trop granrh un ITletre qllatreAdngt~

dix devenait done line faute Les femmes dies commettaicnt dilVoir taHle ~es lnil1(c ph1t denorrnes hanches Avant de les [Uer it faUait June les raluener a une taille st~uldard I~

[J (2C05 90) 5 Couronne symbole de la matcrnite portee tradllmnellement

toures nvandaises

REF~RENCES BIBLIOGRAPHIQUES t-GAMHEK i2003j Ce ~rs[p Paris Rivaglgts BARTHES R [1980] Crambre Claire Note SHY la phowgmfJhie Gallimatd Souil coli Cabiers du cinema

DAYAN ROS~Nl-Hlgt [1007J AijJ~(bes de ta Shoal Sgtlvivre 1tn1Olgrer Paris CNRS ClEt-EnE G [1982) Palimpseste La au secord Paris

Sen colI LACAN J [(966) i9991 Paris Sed MUIAWAYO [(2004) 200SJ SiniVanes Rwanda Historre genocide Paris LAube tIJN lvi [1998 Rccits dL genocide S~mioriqHe lindicib[f)

Delachaux cr Niestjf~ R~RAJGWA R [2006] Genocide de ]a Renaissance SCHAEfFER] M [19871 Lrraglt

Paris SeiJil coIL laquoPoe-tique raquo)

B tI999] ethmqucJ Paris Dagorno SEMPRUl] [19941 L uu la tie Paris Gallimard SEMl]ANGA] [1998] fondaleurs du drane mandais Paris

Jl-ianHttan WAITRATcR R II003J SoniT du genocide Temoigrer pour abprerdrc J

Paris

VOlime rJITIlho 2 bull PRorEL

offritait simplement une manifestation de Iobjct une

silhouetteraquo comme ilk reconnait Ie texte cite ci-dessus

Rurangwa attribue pourtant Ie double role

de transmission et de reception acette image photographique ilIa jalousement pour que

famille survive dans la memoire de ses descendants

Comment ce document exprime la ruine par sa

materialite et son essence va-t-il restituer 1a realite de

la finnille de Rurangwa La rcmemore pas Ie passe (rien de proustien

dans une photo) sur moi nest pas

restiruer qu i est aboli Ie temps la mais

dattester que cda que je Jois bien ete Demnt une

photO la conscience ne pas necessairement la voie

dlt souvenir (Barthes 1980 129 et 133)

Schaeffer abonde dans Ie meme sens en montrant

que Ie caractere dempreintc de la photographic ne

lui permet pas de restituer Ie (1987 17) En essence elle ne peut done pas restituer Ie souvenir et

Rurangvva en est conscient Dans Ie projet de Rurangwa est de trouver une pour dire

cette memoire et e est apartir de eette photographie quil tente de tecouvrer la parole pour la dire

La photographie fait des arts visuels et y rejoint dautres arts plastiques Elle done softiir lceil elU spectateur Celle de Ia fa mille de

Rurangwa etant absente du texte Ie doit etre mis en valeur par la dun laquojeraquo

qui la prend en charge pour la presenter au lecteur

spectateur Dans dans Ie

narrateur est en contact evident avec Ie narrataire

pour s assurer de son eeoute car que Ia vue e est qui est iei mise en II semble done que Ie

motif de la photographie est choisi par lauteur pour favoriser lecoute necessaire dans lacte de temoigner du genocide Dans Ie texte eette est mise en

ceuvre du presentatif des demonstratifs er de limperatif

Plusieurs critiques et survivants du

ont 1a necessite de lecoute de

lindicible Dans ou la Jorge Semprun

eerit

On peHt rottt dire de penser El de S) iY~ettre Mais peut~on tout eOtU irna~ner

Le pourrcH-on En a1fToniIs la patience fa passion la

compassion la necessaire 26)

Rurangwa lui-meme deplore Ie fait que les Rwandais non nont ni la ni la d ecouter les SLltvivants

On embete tout le Dwnde atcc notre nos

nos morts de memoire de [ J Li seul discours

aurarise Ie resume a laquo reconciiiation raquo mot

dordre si beau en SOl cri des res capes

131) 3

Les survivanrs semmurent dans Ie silence parce

quils n arrivent pas a etre ecoLltes Le temoignage du

genocide lautredu ecritAnny Rosenman dans Les de ta Shoah

Dans eet ouvrage cette montre que laquo tout

ternoignage implique [ oJ de

mediation liberer

entre autres la Mediation veTS [autre qui est requis la bles5ure de

ce sawir de Ie transmettre den erre ie passeur

ewe que dans

IjasSHrance dn Uen Tenoue ertre lui cr cet autre) (lue

soit Ie isage de ses dans ie temps

que son existence soit materielle au ceile dun

lecteur 21)

Ie motif produit un recit dans lequella laquomediation illautreraquo etablit un contact constant entre Ie temoin et Ie lecteur devient (daurre elu comme

e est Ie cas dans Ie passage suivant Si de courage

de vovs detailer fa quinzaine de personnages qui

passe ce

16 nous soulignons)

du pronom personnel laquoTousraquo denote

clairement ladresse au lecteur Ce dernier detient Ie role du raquo que Waintrater considere

comme pilier du laquo pacte Iestimonial

bull vollln1f numero 2

Plus que rom autre texte UUWOW~TUi)mme Ie Ces avertissements s adressent au lecteur pour lui

est une lrin~ udr~sse i un autic qui La

cnnlcicnce Iumaine done Ie temoin a he isoc ii un moment de

son existence par l6enement done vient temoigner

14)

Apillsieurs endroitl du parcours narrarif du

de Rurangwa lecoute de la part du iecteur est sollicitce par ie narrateur Cest notamment Ie cas lorsqlle le recit qui sous lemprise de la sllbjectivite narratif depasse de loin Ie

de la photo entre dans Ie cr digresse Pour mettre fin aune digression trop ie narrateur

revient a la photo et invite Ie a reprendre lhistoire avec lui par Ie truchement de

I associatif laquoReprenons un instant ma photo de famillo 25)

Duns un autre endroit du parcours narratif le souvenir est si insupportable que ie narrateur est

deloigner la photo de sa vue Saehant que quelquun est a lecoute illui expJique 1a necessitc de rompre le til narratif

Mais je mis trop vite Je range la qui me souleve Ie cOur

cette memoire cherie et hannie -) a sa dam

man tas de papemsse entre un livre cJallemand et m lwre

deconornie Je histoire ason debut (Ibid 27)

Conseient de la nnc~nrp du il se

dabuser de sa patience et de sa bonne volonte et reprend le recit la OU il laisse La reconnaissance

de lecuute joue egalement un role dans Ie de la trame narrative et du souvenir La complicite entre Ie narrateur et Ie lecteur est si

tacite encourage Ie temoignage collectif comme

Ie texte suivant Metis avant doser penetreT dars

impuissants Ii exjJrimer

[ J comlncn~ notre voisin est devenu du JOUT au

lendemain notre assassin

Et ce nest pas aise PHflUPT cda Dabord il a mernoire visiter les somcnirs Cest une torture Puis lant de

choses sont melees non seulement rcmonter loin de

[histoire mais aUlsi descendre en nous-memes dans

ies crareres de nos valcans intimes Cest encore bTuant

douloureux (Ibid 29 nous OVltH~HV

apprendre que dire le

dangereuse jalonnee necessitant une

franche Le narrateur cree iei un scenario initi3tique dans il devient Ie guide

qui introduit Ie lecteur neophyte dans Iunivers dl en sadres~ant lui par du pronom

(VOUS raquo mais aussi en sollicirant de sa part Ie courage

lui est neeessaire pour parcourir eet itineraire perilleux Au milieu du texte Ie prunorn laquovousraquo

fait au laquonOLlSraquo Ce ehangement est ICI

JllUll-ClLLJ car Ie narrarellr detinit Ie recepteur de

comme agent participant a la sphere communicative Le Jecteur nest plus un simple laquoagent

raquo de il est et invite aentrer dns 1a sphere diegetique De ee il semble quun

spatial et affectif so it etabli dans Ie texte

Parfois Ie narrateur le lecteur a temoin Face a [image des femmes hunt ctaient pour celehrer Ie Rurangwa exprime son

envers ces voisines de sa famille nont

pas eu Ie courage de les enfants de leurs

voisins Aujourdhui ces femmes de non-assistance a une personne en Elles nont pas

cacher un enfam de notre famille lors du 21) Ce laquojaccuscraquo interpelle Ie

it te11101n Ruranpwa semble accuser

Durant ce moment dramatique la justice en main et

impose aux accusees une sentence en les eliminant du cadre de la ne veux les voir Je les hurds de la et je les eseamore Il y a jours noirs Oil on ne peut pas voir Ia reaht

en face Le retrecissement du cadre photographique provoque ason tour une rupture narrative La description de la sarrete pour ne

pas declencher dautres souvenirs penibles Le rapport et devirement que le narrateur entretient

avec [image sa famille se traduit par Ie va-et-vient continu entre la et la narration mOllvement qui ason tour provoque 1a

nrnrn du tissLl nanmiddotatif II nous semble ici que Ia

du recit augmente la force du du

neit

voiw)) jO

NUllS pouvons meme ajouter que laspecr

dialogue texte provient de nombreuses rhetoriques sur Ia problcmatique de lindicibIe

parcuurs narratif et une celmiddottaine ecoute de Ia part du

lecteur Ces questions bien nexigent pas de reponses ont lavantage de eventuelles du lecreur et de suggerer auditeur

est lecuute lhistoire On peut ansst dire que

1introduction la dans Ie texte en tant innummabIe consideree en

reference a lindicible peut etre interpretee comme

un moyen dexploiter Ie mystere et provoqu er Ie snspens chez Ie lccteur

Grace a toutes ces grammaticales et

Iimage de la photographie a a de Ies membres de sa famille de

parler de leur de leur de vivre avant de

raconter mort

LJ CeUX qui Ie rcjouissent seront jmr leurs toisins et

ceux qui les corlgnuue (~ette ~)hOl0 est le dernier vestige)

lultime inswmane dun moncle de 5erenit~ qui va sombrer

dans la saneantir 22)

Dc CORPS OBJET AU SUJET

LA REPRESENTATION PICTURALE ET INTERTEXTUEL

DANS LA RECONSTRUCTION lDENTlTA1RE

Dans Ia derniere partie de cette nous allons montrer comment Ie corps de Rurangwa est Ie produit

de plusieurs quon peut lire sur la surface

tegurnentaire Ensuite nous examinerons comment son corps objet dll de l autre etre recupere

par son legitime Cest par Ie truchemnt

du intertextuel et la picturale que Rurangwa devient sujet de son pro pre discours et

reconstruit son identite Sur b photo de face a personnage

represente il y a chez Ie narrateur Ie desir dune remuntee en arriere Ce retrospectif lui pennet

dalimenter la narration et donner un aspect

authl1tique ason temoignage Le retour en arriere lui donn loccasion dinterroger Ie texte historique

Le 4 du intitule Du a Ienfepgt a line teneur didactique

sur Ie mythique et

partie la par canographique du Rwanda Le narrateur saisit

cette occasion pour nous donner une de la fimne et de la flore Le mal fait ~CltIclunu

qui

prend la curieuse forme du 30) c est aussi un pays auquel certains

Occidentaux ont attribue Ie sobriquet de trou du

du monderaquo (ibid) La beaute du Rwanda ne peut pas etre sans taire son

a fait de ce pays une souillure sur Ia carte de I~AJrique et celle dl monde Ie est clairement soHicite

Du texte Ie narrateur oriente Ie lecteur

vers lhistoire du Rwanda Le texte historiquc est insere dans Ie recit par une ilustree Comme

ceHe de la familiale eHe est

A de lillustration dun livre Rwanda Ie narrateur prend lallure dun professeur et

Ie devient son eleve Dc Ie recit

llne teneur didactique Sur Ie plan cette image pennet au narrateur de renouer

Ie dialogue avec le Iecteur et au fecit de reprendre son aspect

Cillustration Ie Hutu et Ie Tutsi Ies trois figures de Ia population rwandaise qui cohabitaient comme des doigts de la mainraquo avant

Ie clivage par la colonisation

Ruran~Wa effectue une remontee vers Ie temps primordial en tentant dexpliquer par Ie du recit VltU1VU

comment lharmonie a ete brisee De ce temps mythique il revient a lillustration pour prouver

ethnique a

constitue un resume de 1histoire du Rwanda de

qui suivent racontent Ies details de lassassinat de tous

Ies membres de sa famille et de

vivantraquo A son portrait

12 intitL11e Oser me

37

Tous les manns Ie meme La wynne dll miroY dam

la saUe de baim [ j Ce que je tois horrible mais n~

peUX tuiter cet un visage qui nest

visage Une tete ltnegre J1 qui semble avoir ere sur

UT[J7eTUE atlCc de mauvais ciseaux en son milicu

Une nnlHnl)lW0 part de Iorem drolle ([tme

consignes (Ies ~erOCJaares prccisait de parLer le CQuJ-- ahauteur

de nez cpate et tranche car cJetait

tin nez de Tlttsi Une seconde cicatrice Ii panir de lordl essaie de la ressemble it un

accYUcileDpoundu [ J ou au point que dans la

tete en permanence pourquoi

89)

Tous les coups reus sur Ie lui ant arrache aussi un ceil et son

[J cloute nes[

boule une ala chair Les poimes

eles lances ant laisse sur ma poitrine des styies noires er epaisses (IHd)

Ce portrait nailS est offert en entier atravers que lui renvoie Ie miroir Cornme Ie titre dLl chapitre

lindique Rurangvva veLlr se regarder en face affronter Ie monstre quon a fait de lui Ce objectif tourne soudainement en un il se

mais ref1echit aussi sur sa nouvelle condition de vie Le corps ele est I element matriciel

elu textej il se fait voir et se fait lire Cest un site sur leque1le genocide a laisse ses marques indelebiles

laquoMon corps mon et Ie plus de ma memoire en portent la nn de rna vie

Pour est grave dans

ma peau comme un tatollage sur lavant-bras des condamnes dAuschwitzraquo (ibid 71) Pour

ces marques sur son corps par I armee il essaie de nous expliquer d abard

comment ce corps a ere erhnicise et puis Le mot qui sert de titre au

de la fois tres descriptif et singulier Ce mot invente par lauteur est forme a partir du substantif raquo pour creer un adjectif

verbal issu dun verbe possible laquogenociderraquo Que Ie mot soit invente cela nest pas

surprenant car Ie mot ii ~Vu_ lui-meme est un

recent cree en 1944 apres [extermination et des T ziganes par les nazis Il est bien

vrai que dans lne societe donnee de nouveaux

concepts necessitent de nouveaux motsraquo Ie Rwanda ne fait donc pas Un

nouveau tenne courant ne apres Ie

Tutsi au Rwanda esr Ie substantif Ce est utilise pour celui au celie

a perpetre Ie Bien quil ne so it pas encore

Ie franais Ie substantif

plusieurs temoignages des dans les discours dans

nationaux et internationaux et meme dans publiees en Kinyarwanda

Dans son temoignage Ruranf-Wa cree une autre forme laquogenoddb pour designer son corps ethnidse sur lequella machette du milicien laisse marques visibes et lisibles Le corps du narrateur et par extension Ie corps du Tursi est un carrefour de

et il ne peut se comprencire quen tenant

compte la production la transformation brd

de la reecriture des anterieurs qui lont

fa~onne

Rurangwa a momre par Ie truchement du texte que Ie discours colonial a ere a la base de

la cristallisation des differences physiques entre les trois groupes ethniques du Rwanda De nombreuses etudes sur Ie Rwanda sont daccord sur ce Dans Les Recits du Semujanga a bien explique comment a lepoque coloniale

Ie disco1OS du satoir a par steniotypage des images

de IOccident sur construit un nouteau systeme

axloc)poundt(1ue avec des nidts vaiorisanr posiriement Ie Tutsi et

negatiwment Ie Hutu (1998

et comment a partir de cette les discours

et ont inverse laquoles

du discours colonial tutsi-bon hutu-mauvais (ibid) Le discours colonial a ete recupere et manipule par les Hutu extremistes leur avantage pour eliminer Ie Tutsi qui dait considere comme un dement nodf au

gouvernement Hutu et aleur bien-ene Les parties du corps du Tursi ethnicise par Ie discours colonial

qui etaient all depart enviees ant ere par apres

vojuf~le numero 2 bull PROTCC

et rejetees par Jes Hutll Dans son Le ethnique Benjamin Sehene ecrit a ce propos

ils (res sonl

lf wvm iLs les mitres

Pendant Ie ie est

a lelimination les traits physiques sokHsant

typiqucmcnt tutsi ctaient cibles pour extermination

Rurangwa ten1oin oculaire tel meurtre en fait une description vividc

lis la lui tranchent les (comme

aux Tutsi detre les Huru

prennent un malin plaisir ales (raccourcirraquo au ales ramener

au 54)4

Les du corps de Rurangwa ont egalement subi

Ie meme sort Sibomana en de moi laquoOh voici Iaine

des Tutsi (iui pointe son nez dehorsraquo Et dun coup tres

il me Ie Tuesi nont pas Ie

de

ces demiers ont mis un loin special

naturelie) 56)

Le corps cles femmes a ete atrocement manipule pour mieux parfaire Ie dessein du genocide des Tursi Dans

une note inseree Ie livre nous donne

des eclaircissements la~dessus Sur les les assassins hutu ont les couN

porwnt sur Ie organes de la ventre et ~-agin

allant briser des de bou tdb Jam

leurs sexes aprgt les (lvoir violees Cest [une des marques

dun Jatteindre une race i1

Les coups machette ou de gourdin par

Ie milicien ont suivi methodiquement les marqueurs erhniques etablis par le discours colonial pour

produire un corps raquo 11 semble donc que ce sied mieux au corps de Rurangwa

lensemble ethniquement a ete par Ie bourreau Le titre du livre fait reference plut6t a son

corps qua sa personne Rurangwa a sans

doute voulu commencer son roman par une tension lexicale em plutot semanrique pour nollS faire entrer

lunivers de [indicible a comprendre

Le corps Rurangwfl est

une surface dinscription sur laquelle peuvent se

lire anrerieurs directement Oll

indirecrement ront transforme et lont conduit au supplice du Il ne peut etIe que

par Ie truchement du intertextueL Nous utilisons iei Ie concept dintertextualite selon la definition que lui donnent Kristeva et Gerard c estshy

fait quun texte soit la reecriture autre

texte produit par la transformation ou la reecriture dautres textes anterieurs Le corps laquogenocideraquo de

Rurangwa est donc comme un texte produir par un

double discours Ie discours colonial

racisre occidentale a ete

par les Hum

leur

de haine de lautre Cest cette version qui a produit a son tour Ie Le corps de constitue donc un par excellence Dans son ouvrage

Gerard Genetre Ie palimpseste comme f)crhem dont on a gratte la premiere inscription

pour en tracer une autre qui ne la pas tout a en sorte par transparence lancien sous Ie

Les coups de subis par Ie corps clu narrateur y ont et

des traces indelebiles Le discours de haine dans chair 11 a pas reellement efface Ie cliscours anterieur

mais 1a marque en gras Cest ainsi Cluon peut encore dechiffrer SOllS Ie nouveau Plusieurs annees

marques sur son corps

renforcent sa victimisation de mot une cible ideate Elies

impUque laquo Tratail a qtle je rcntre

a

Face au regard anLn son corps est a eliminer parce quil est accusateur cest un laquotestisraquo

un ( tiersraquo (Agamben 2003 17) qui

PROT[[ bull

entre Ie ct Iaccuse dans un

proccs Carme genocidaire qui devait eli fniner 1e

corps ethnicise elu Tutsi pas reussi a Ie faire mais

plus La plupart des

marques 80nt localisees sur

son visage elIes sautent aux yeux lc et

li501ent Son corps est devenu veereur des donnees

ethniques et un espace all se d autrcs

discours II aisement au discours social Ses

camarades de classc en Suisse au il vit

croient que cicatrices sont des

quil s est volontairement imposes et quJ il a meme pousse de jusquau cicatricing)

62) Dautres croient quii survecu un rres grave

accident voiture Dans Ie refus de se construire

partir du personnage exterieur quon a fait

Rurangwa a un retrospectif et la tourne

vers Ie du Rwanda pour les

discours qui se superposent sur son corps

Malgre cette demarche son corps reste ]a proie de

sa pwpre perception Hiui est etranger Une distance

s est etablie entre lui et son corps il est associe a la tragedie du avec illui laquofaut

cohabiter

ceiui-ci lui renvoie nne a du mal a assumer

ceUe de I laquoElephant manraquo

89) laquoEst-ce du courage que de sarracher du lit

pour aller planter un naime pas devant

un mimir quon redoute (ibid 101) II interroge

comme Ie faisait laquo Ie miroir qui ne

repond pas

Contrairement au mimir sartrien Ie 8ien nest pas

rassurant

Tout miroir est un ennemi qui me dans lirritation

it [l surgir des reminiscences atroces et des

sentiments violent que je tyreteremis 89)

Rurangva est emmure dans sa sOllffrance et dans

Ihorreur du genocide Le rapport de son evaluaril1n

affirme qllil manifeste laquovisiblement

des sequelles psychiques du rrau rnatisme vecuraquo

171) et quil souffre elu de stress postshy

traumatique (ibid) Rurangwa lui-meme avoue

son a le des souvenirs

sus cites par un bruit un objet une odeuf lIn certain

silence un cri un rienraquo 163) La

neccssite de retrouver Ie souvenir rouvre la blessure

et cause une nouvelle souffrance II est

confronte au la memoire it la photo

qui me soul eve Ie cceur

cette memoire eherie et honnie lJraquo 27) Ce qui leffraie Ie sur cette c est Ie

souvenir du meurtre cie sa mere la pire atrocite a illluil fut dassisterraquo (ibid 47) La

reveille Ie souvenir insupportable la l1e de

sa mere par 1a milice feminine

avant detre eventree par son tortionnaire Cette scene

pr0voque chez lui me blessure quun coup

de macherteraquo 48) et a inscrit en lui une haine

atroce

La haine Ju des de wus les Hutu Tille en

moi a tmtam comme ies dents dun

jam([is elre relire tant it penetre loin dans ta chair Une haine

et cowie qui ne que

Sihomana tout son

temps pour omrir Ie ventre de mel mere LJ (Ibid)

11 compte laquo la haine gt les laquotrois mots clesraquo quil

considere cornme declencheurs de son

]4) Comme nous ravons 1110ntre prealablement

son cst une tentative de pouvoir se defaire

de ceUe haine qui frise la vengeance c est ( line

de combattre ce qui pourrait [tel falre succomber la

haine et Ie silenceraquo 9-10) Malgre Ie souvenir insupportable associe fl

de la c est cette memc qui va lui procurer

Ie pouvoir de se [(concilier avec lui-meme et de

reconquerir son Un detail emane

de Ie lt )j et Iattire laquo llel boubon colore

niveau du ventre)j (ibid 21)

Quelques de

ce

Dans

car clest nwi l))rte Je

suis son prernier eUe a 21 am et dent de se marier

On rna souvent cUt que je h~i ressentblais etonnamment

que rnon t lsage son eme traits de ma nere Ie SOUVenir de amnt

Cest auss fa redoute aCe point

des crireres didentification

naltre molS npres Ie manage

Kambamba Ie 3 juin 1978 au dispensaire de Muginaraquo

(ibid - mais aussi un point de

- la ressemblance avec sa mere Cela est signiflcatif pour lhomme defigure dont lidentitc a ctc eHacce

de la mere lui oHre une nouvelle naissance

a un certain moment dans la description

et de la ccrcmonie du mariage il pense de la danse lors de la cen3monie et se

retrouve dans Ie sein de sa mere

laquoDans Ie ventre de 1a mere je dois sentir cette chaude houle de lenthousiasme qui me porte je

de celie me porteraquo Du souvenir emanent toutes sortes de sensations et

sentiments semblables a ceux engendres par la

mcmoire La ressemblance avec sa mere lui donne Ie

courage dassumer image du miroir quil redoutait

auparavant Ainsi refuse-t-ille suicide qui Ie la de Iimage refletee par la II trouve

la redemption dans cette ressemblance

avec sa mere Iimagc de la mere est Ie mhoir dans

il se voit comme il etait avant la

it la mere nous rappelle Ie

miroin) lacanien Dans Ecrits I Jacques Lacan

faut (flnUmTIIlYP Ie stade du miroir comme une

donne it ce terme asavoir la

it assume une

94)

A travers image de sa mere il forme une

lui-meme et effectue la conquete de son propre

corps laquoMeme si e1Ie est ravagee ma figure est ccUe

offerte ma mere (Genocide 91) Aimi

Ie suicide et meme [operation

II veut egalement conserver son laquovisage balafre parce veut gravees sur [son] corps les marques

(ibid) II considere son corps comme un

memorial difficilement alterable par rapport a sites mcmoriaux On pellt nettoyer laquoles les

d tous les lieux du mais on ne peut

enlever lsesJ balafresraquo (ibid) Ses laquocicatrices

son une attestation vivante charnelle et de ces crimes contre lhumaniteraquo alars que les laquoautres

memoriaux exposent des tapis de cranes ou

empilements soigneux de tibias et de raquo (ibid)

CONCLUSION

Limage photographique a

des siens Cest un long cri de Ihorreu[raquo Le narrateur secrie mals en meme

temps Rurangwa se en face et

un texte qui est a la fois son miroir et son espace dinterrogation

Limage de la mere et indirectement

photographique a joue un dans la

reconstruction de lidentite de Rurangwa Elle a

offert au narrateur dont des

points de repere importants pom une photo de carte didentite OU Ion peut

et la date de naissance et confirmer la

La photo de famille dont recit du genocide ltitrempee dans un de sang)

22) a pu se purifier a de la mere

A la fin du t6moignage elle devient ou l11oin5

une relique sacree Limage de la mere

aRurangwa de se son corps

et de Iassumer A la fin du rejet quil entretenait avec son corps est devenue

une relation damour Son corps survivant a par

la suite acquis un role double de memoire

et dlt genocide Dans Ie livre de photographique a depasse da rp-wcpn~rm

Temps raquo laquoiemphase dechirante du noeme (Barthes 1980 148) pour devenir nne photo souvenir

et une photo didentite

bull voume 37 nlJmero 2

NOTES L Toute reference it cet ouvrage rapporte t~dition de 2006 aux

Pre~8(5 de la Rcnai5sancc Le3 t(~ferences paginales seront clesormais conne-euros dansle texte 1 precedees du de lceuvrlt entre rarenth(ses 2 Le terme fv1u~e1rn(1nn laquo11usuhnan gtI prend origjnc dans

Ie caIUp dtuschvitz dOl ii 6l est prop8ge clautres camps Les

sont diversifies sur sa vraie definition Pour certains lti il reno1c au sens littera1 du terT1e aabe mHsUn ql~i sigrdfie cellii qLt sc sou met sans reserve ~l la volonte divine_ lviais tandi~ que la resignutioll dJ muslim repose sur]a convicrion que la volonte dAlJ8h est i lceuvre chac~ue instant dans moir~drc cvenenlent Ie lllusulman

dAuschwitz semble pedu toute volonte ct toute conscience (Agamben 2003 46) Dautr~s croiem que Ie termc semble provenir

de la posture Ijpique de detenus blottis stub jmnhes replies ala m-lniere orientale e visage riglJe con101e celle Jlun luasqueraquo

(ibid 47) DHutres cfQicnt entin qUe le termc lt faisait aHusion aux

((mouvernents rypiques des nlusulmans l1

CeS allees venues du bustej

du haur vers Ie bas [evoqnanrJ es ricuels de prierc islamiquesgt (Sofsh par Agamben 2003 47) Notre reference ce mot article

evoque tOllt simplement lbomme dont In force nterieure et physique a

de completenrent lriS(c Dans SUniVa(~t~s Esther Viujmvayo souteve egalenlent ccte

problenrique iecoute Ul Rwanda On been les gens quon

assez parle Ju genocide au ltllors laquoils peuvcnt pas suporter demendre LJ Je pouna dire en Ule phrase pourquoi on s est tu apres le genocide on sent(Jit qu)n derangeait [] COfnil1enCeS raconter rac()nter if nlcceptent decouer cr cle-st

terrihle (2005 20) 4 SU1VVanres vuawayo parle de ce corps qui [aliaie

mcttre a la mille standad laide de la machette Les hommcs rutsi ~1Vaient 18 reputatit)n detre trop granrh un ITletre qllatreAdngt~

dix devenait done line faute Les femmes dies commettaicnt dilVoir taHle ~es lnil1(c ph1t denorrnes hanches Avant de les [Uer it faUait June les raluener a une taille st~uldard I~

[J (2C05 90) 5 Couronne symbole de la matcrnite portee tradllmnellement

toures nvandaises

REF~RENCES BIBLIOGRAPHIQUES t-GAMHEK i2003j Ce ~rs[p Paris Rivaglgts BARTHES R [1980] Crambre Claire Note SHY la phowgmfJhie Gallimatd Souil coli Cabiers du cinema

DAYAN ROS~Nl-Hlgt [1007J AijJ~(bes de ta Shoal Sgtlvivre 1tn1Olgrer Paris CNRS ClEt-EnE G [1982) Palimpseste La au secord Paris

Sen colI LACAN J [(966) i9991 Paris Sed MUIAWAYO [(2004) 200SJ SiniVanes Rwanda Historre genocide Paris LAube tIJN lvi [1998 Rccits dL genocide S~mioriqHe lindicib[f)

Delachaux cr Niestjf~ R~RAJGWA R [2006] Genocide de ]a Renaissance SCHAEfFER] M [19871 Lrraglt

Paris SeiJil coIL laquoPoe-tique raquo)

B tI999] ethmqucJ Paris Dagorno SEMPRUl] [19941 L uu la tie Paris Gallimard SEMl]ANGA] [1998] fondaleurs du drane mandais Paris

Jl-ianHttan WAITRATcR R II003J SoniT du genocide Temoigrer pour abprerdrc J

Paris

VOlime rJITIlho 2 bull PRorEL

Plus que rom autre texte UUWOW~TUi)mme Ie Ces avertissements s adressent au lecteur pour lui

est une lrin~ udr~sse i un autic qui La

cnnlcicnce Iumaine done Ie temoin a he isoc ii un moment de

son existence par l6enement done vient temoigner

14)

Apillsieurs endroitl du parcours narrarif du

de Rurangwa lecoute de la part du iecteur est sollicitce par ie narrateur Cest notamment Ie cas lorsqlle le recit qui sous lemprise de la sllbjectivite narratif depasse de loin Ie

de la photo entre dans Ie cr digresse Pour mettre fin aune digression trop ie narrateur

revient a la photo et invite Ie a reprendre lhistoire avec lui par Ie truchement de

I associatif laquoReprenons un instant ma photo de famillo 25)

Duns un autre endroit du parcours narratif le souvenir est si insupportable que ie narrateur est

deloigner la photo de sa vue Saehant que quelquun est a lecoute illui expJique 1a necessitc de rompre le til narratif

Mais je mis trop vite Je range la qui me souleve Ie cOur

cette memoire cherie et hannie -) a sa dam

man tas de papemsse entre un livre cJallemand et m lwre

deconornie Je histoire ason debut (Ibid 27)

Conseient de la nnc~nrp du il se

dabuser de sa patience et de sa bonne volonte et reprend le recit la OU il laisse La reconnaissance

de lecuute joue egalement un role dans Ie de la trame narrative et du souvenir La complicite entre Ie narrateur et Ie lecteur est si

tacite encourage Ie temoignage collectif comme

Ie texte suivant Metis avant doser penetreT dars

impuissants Ii exjJrimer

[ J comlncn~ notre voisin est devenu du JOUT au

lendemain notre assassin

Et ce nest pas aise PHflUPT cda Dabord il a mernoire visiter les somcnirs Cest une torture Puis lant de

choses sont melees non seulement rcmonter loin de

[histoire mais aUlsi descendre en nous-memes dans

ies crareres de nos valcans intimes Cest encore bTuant

douloureux (Ibid 29 nous OVltH~HV

apprendre que dire le

dangereuse jalonnee necessitant une

franche Le narrateur cree iei un scenario initi3tique dans il devient Ie guide

qui introduit Ie lecteur neophyte dans Iunivers dl en sadres~ant lui par du pronom

(VOUS raquo mais aussi en sollicirant de sa part Ie courage

lui est neeessaire pour parcourir eet itineraire perilleux Au milieu du texte Ie prunorn laquovousraquo

fait au laquonOLlSraquo Ce ehangement est ICI

JllUll-ClLLJ car Ie narrarellr detinit Ie recepteur de

comme agent participant a la sphere communicative Le Jecteur nest plus un simple laquoagent

raquo de il est et invite aentrer dns 1a sphere diegetique De ee il semble quun

spatial et affectif so it etabli dans Ie texte

Parfois Ie narrateur le lecteur a temoin Face a [image des femmes hunt ctaient pour celehrer Ie Rurangwa exprime son

envers ces voisines de sa famille nont

pas eu Ie courage de les enfants de leurs

voisins Aujourdhui ces femmes de non-assistance a une personne en Elles nont pas

cacher un enfam de notre famille lors du 21) Ce laquojaccuscraquo interpelle Ie

it te11101n Ruranpwa semble accuser

Durant ce moment dramatique la justice en main et

impose aux accusees une sentence en les eliminant du cadre de la ne veux les voir Je les hurds de la et je les eseamore Il y a jours noirs Oil on ne peut pas voir Ia reaht

en face Le retrecissement du cadre photographique provoque ason tour une rupture narrative La description de la sarrete pour ne

pas declencher dautres souvenirs penibles Le rapport et devirement que le narrateur entretient

avec [image sa famille se traduit par Ie va-et-vient continu entre la et la narration mOllvement qui ason tour provoque 1a

nrnrn du tissLl nanmiddotatif II nous semble ici que Ia

du recit augmente la force du du

neit

voiw)) jO

NUllS pouvons meme ajouter que laspecr

dialogue texte provient de nombreuses rhetoriques sur Ia problcmatique de lindicibIe

parcuurs narratif et une celmiddottaine ecoute de Ia part du

lecteur Ces questions bien nexigent pas de reponses ont lavantage de eventuelles du lecreur et de suggerer auditeur

est lecuute lhistoire On peut ansst dire que

1introduction la dans Ie texte en tant innummabIe consideree en

reference a lindicible peut etre interpretee comme

un moyen dexploiter Ie mystere et provoqu er Ie snspens chez Ie lccteur

Grace a toutes ces grammaticales et

Iimage de la photographie a a de Ies membres de sa famille de

parler de leur de leur de vivre avant de

raconter mort

LJ CeUX qui Ie rcjouissent seront jmr leurs toisins et

ceux qui les corlgnuue (~ette ~)hOl0 est le dernier vestige)

lultime inswmane dun moncle de 5erenit~ qui va sombrer

dans la saneantir 22)

Dc CORPS OBJET AU SUJET

LA REPRESENTATION PICTURALE ET INTERTEXTUEL

DANS LA RECONSTRUCTION lDENTlTA1RE

Dans Ia derniere partie de cette nous allons montrer comment Ie corps de Rurangwa est Ie produit

de plusieurs quon peut lire sur la surface

tegurnentaire Ensuite nous examinerons comment son corps objet dll de l autre etre recupere

par son legitime Cest par Ie truchemnt

du intertextuel et la picturale que Rurangwa devient sujet de son pro pre discours et

reconstruit son identite Sur b photo de face a personnage

represente il y a chez Ie narrateur Ie desir dune remuntee en arriere Ce retrospectif lui pennet

dalimenter la narration et donner un aspect

authl1tique ason temoignage Le retour en arriere lui donn loccasion dinterroger Ie texte historique

Le 4 du intitule Du a Ienfepgt a line teneur didactique

sur Ie mythique et

partie la par canographique du Rwanda Le narrateur saisit

cette occasion pour nous donner une de la fimne et de la flore Le mal fait ~CltIclunu

qui

prend la curieuse forme du 30) c est aussi un pays auquel certains

Occidentaux ont attribue Ie sobriquet de trou du

du monderaquo (ibid) La beaute du Rwanda ne peut pas etre sans taire son

a fait de ce pays une souillure sur Ia carte de I~AJrique et celle dl monde Ie est clairement soHicite

Du texte Ie narrateur oriente Ie lecteur

vers lhistoire du Rwanda Le texte historiquc est insere dans Ie recit par une ilustree Comme

ceHe de la familiale eHe est

A de lillustration dun livre Rwanda Ie narrateur prend lallure dun professeur et

Ie devient son eleve Dc Ie recit

llne teneur didactique Sur Ie plan cette image pennet au narrateur de renouer

Ie dialogue avec le Iecteur et au fecit de reprendre son aspect

Cillustration Ie Hutu et Ie Tutsi Ies trois figures de Ia population rwandaise qui cohabitaient comme des doigts de la mainraquo avant

Ie clivage par la colonisation

Ruran~Wa effectue une remontee vers Ie temps primordial en tentant dexpliquer par Ie du recit VltU1VU

comment lharmonie a ete brisee De ce temps mythique il revient a lillustration pour prouver

ethnique a

constitue un resume de 1histoire du Rwanda de

qui suivent racontent Ies details de lassassinat de tous

Ies membres de sa famille et de

vivantraquo A son portrait

12 intitL11e Oser me

37

Tous les manns Ie meme La wynne dll miroY dam

la saUe de baim [ j Ce que je tois horrible mais n~

peUX tuiter cet un visage qui nest

visage Une tete ltnegre J1 qui semble avoir ere sur

UT[J7eTUE atlCc de mauvais ciseaux en son milicu

Une nnlHnl)lW0 part de Iorem drolle ([tme

consignes (Ies ~erOCJaares prccisait de parLer le CQuJ-- ahauteur

de nez cpate et tranche car cJetait

tin nez de Tlttsi Une seconde cicatrice Ii panir de lordl essaie de la ressemble it un

accYUcileDpoundu [ J ou au point que dans la

tete en permanence pourquoi

89)

Tous les coups reus sur Ie lui ant arrache aussi un ceil et son

[J cloute nes[

boule une ala chair Les poimes

eles lances ant laisse sur ma poitrine des styies noires er epaisses (IHd)

Ce portrait nailS est offert en entier atravers que lui renvoie Ie miroir Cornme Ie titre dLl chapitre

lindique Rurangvva veLlr se regarder en face affronter Ie monstre quon a fait de lui Ce objectif tourne soudainement en un il se

mais ref1echit aussi sur sa nouvelle condition de vie Le corps ele est I element matriciel

elu textej il se fait voir et se fait lire Cest un site sur leque1le genocide a laisse ses marques indelebiles

laquoMon corps mon et Ie plus de ma memoire en portent la nn de rna vie

Pour est grave dans

ma peau comme un tatollage sur lavant-bras des condamnes dAuschwitzraquo (ibid 71) Pour

ces marques sur son corps par I armee il essaie de nous expliquer d abard

comment ce corps a ere erhnicise et puis Le mot qui sert de titre au

de la fois tres descriptif et singulier Ce mot invente par lauteur est forme a partir du substantif raquo pour creer un adjectif

verbal issu dun verbe possible laquogenociderraquo Que Ie mot soit invente cela nest pas

surprenant car Ie mot ii ~Vu_ lui-meme est un

recent cree en 1944 apres [extermination et des T ziganes par les nazis Il est bien

vrai que dans lne societe donnee de nouveaux

concepts necessitent de nouveaux motsraquo Ie Rwanda ne fait donc pas Un

nouveau tenne courant ne apres Ie

Tutsi au Rwanda esr Ie substantif Ce est utilise pour celui au celie

a perpetre Ie Bien quil ne so it pas encore

Ie franais Ie substantif

plusieurs temoignages des dans les discours dans

nationaux et internationaux et meme dans publiees en Kinyarwanda

Dans son temoignage Ruranf-Wa cree une autre forme laquogenoddb pour designer son corps ethnidse sur lequella machette du milicien laisse marques visibes et lisibles Le corps du narrateur et par extension Ie corps du Tursi est un carrefour de

et il ne peut se comprencire quen tenant

compte la production la transformation brd

de la reecriture des anterieurs qui lont

fa~onne

Rurangwa a momre par Ie truchement du texte que Ie discours colonial a ere a la base de

la cristallisation des differences physiques entre les trois groupes ethniques du Rwanda De nombreuses etudes sur Ie Rwanda sont daccord sur ce Dans Les Recits du Semujanga a bien explique comment a lepoque coloniale

Ie disco1OS du satoir a par steniotypage des images

de IOccident sur construit un nouteau systeme

axloc)poundt(1ue avec des nidts vaiorisanr posiriement Ie Tutsi et

negatiwment Ie Hutu (1998

et comment a partir de cette les discours

et ont inverse laquoles

du discours colonial tutsi-bon hutu-mauvais (ibid) Le discours colonial a ete recupere et manipule par les Hutu extremistes leur avantage pour eliminer Ie Tutsi qui dait considere comme un dement nodf au

gouvernement Hutu et aleur bien-ene Les parties du corps du Tursi ethnicise par Ie discours colonial

qui etaient all depart enviees ant ere par apres

vojuf~le numero 2 bull PROTCC

et rejetees par Jes Hutll Dans son Le ethnique Benjamin Sehene ecrit a ce propos

ils (res sonl

lf wvm iLs les mitres

Pendant Ie ie est

a lelimination les traits physiques sokHsant

typiqucmcnt tutsi ctaient cibles pour extermination

Rurangwa ten1oin oculaire tel meurtre en fait une description vividc

lis la lui tranchent les (comme

aux Tutsi detre les Huru

prennent un malin plaisir ales (raccourcirraquo au ales ramener

au 54)4

Les du corps de Rurangwa ont egalement subi

Ie meme sort Sibomana en de moi laquoOh voici Iaine

des Tutsi (iui pointe son nez dehorsraquo Et dun coup tres

il me Ie Tuesi nont pas Ie

de

ces demiers ont mis un loin special

naturelie) 56)

Le corps cles femmes a ete atrocement manipule pour mieux parfaire Ie dessein du genocide des Tursi Dans

une note inseree Ie livre nous donne

des eclaircissements la~dessus Sur les les assassins hutu ont les couN

porwnt sur Ie organes de la ventre et ~-agin

allant briser des de bou tdb Jam

leurs sexes aprgt les (lvoir violees Cest [une des marques

dun Jatteindre une race i1

Les coups machette ou de gourdin par

Ie milicien ont suivi methodiquement les marqueurs erhniques etablis par le discours colonial pour

produire un corps raquo 11 semble donc que ce sied mieux au corps de Rurangwa

lensemble ethniquement a ete par Ie bourreau Le titre du livre fait reference plut6t a son

corps qua sa personne Rurangwa a sans

doute voulu commencer son roman par une tension lexicale em plutot semanrique pour nollS faire entrer

lunivers de [indicible a comprendre

Le corps Rurangwfl est

une surface dinscription sur laquelle peuvent se

lire anrerieurs directement Oll

indirecrement ront transforme et lont conduit au supplice du Il ne peut etIe que

par Ie truchement du intertextueL Nous utilisons iei Ie concept dintertextualite selon la definition que lui donnent Kristeva et Gerard c estshy

fait quun texte soit la reecriture autre

texte produit par la transformation ou la reecriture dautres textes anterieurs Le corps laquogenocideraquo de

Rurangwa est donc comme un texte produir par un

double discours Ie discours colonial

racisre occidentale a ete

par les Hum

leur

de haine de lautre Cest cette version qui a produit a son tour Ie Le corps de constitue donc un par excellence Dans son ouvrage

Gerard Genetre Ie palimpseste comme f)crhem dont on a gratte la premiere inscription

pour en tracer une autre qui ne la pas tout a en sorte par transparence lancien sous Ie

Les coups de subis par Ie corps clu narrateur y ont et

des traces indelebiles Le discours de haine dans chair 11 a pas reellement efface Ie cliscours anterieur

mais 1a marque en gras Cest ainsi Cluon peut encore dechiffrer SOllS Ie nouveau Plusieurs annees

marques sur son corps

renforcent sa victimisation de mot une cible ideate Elies

impUque laquo Tratail a qtle je rcntre

a

Face au regard anLn son corps est a eliminer parce quil est accusateur cest un laquotestisraquo

un ( tiersraquo (Agamben 2003 17) qui

PROT[[ bull

entre Ie ct Iaccuse dans un

proccs Carme genocidaire qui devait eli fniner 1e

corps ethnicise elu Tutsi pas reussi a Ie faire mais

plus La plupart des

marques 80nt localisees sur

son visage elIes sautent aux yeux lc et

li501ent Son corps est devenu veereur des donnees

ethniques et un espace all se d autrcs

discours II aisement au discours social Ses

camarades de classc en Suisse au il vit

croient que cicatrices sont des

quil s est volontairement imposes et quJ il a meme pousse de jusquau cicatricing)

62) Dautres croient quii survecu un rres grave

accident voiture Dans Ie refus de se construire

partir du personnage exterieur quon a fait

Rurangwa a un retrospectif et la tourne

vers Ie du Rwanda pour les

discours qui se superposent sur son corps

Malgre cette demarche son corps reste ]a proie de

sa pwpre perception Hiui est etranger Une distance

s est etablie entre lui et son corps il est associe a la tragedie du avec illui laquofaut

cohabiter

ceiui-ci lui renvoie nne a du mal a assumer

ceUe de I laquoElephant manraquo

89) laquoEst-ce du courage que de sarracher du lit

pour aller planter un naime pas devant

un mimir quon redoute (ibid 101) II interroge

comme Ie faisait laquo Ie miroir qui ne

repond pas

Contrairement au mimir sartrien Ie 8ien nest pas

rassurant

Tout miroir est un ennemi qui me dans lirritation

it [l surgir des reminiscences atroces et des

sentiments violent que je tyreteremis 89)

Rurangva est emmure dans sa sOllffrance et dans

Ihorreur du genocide Le rapport de son evaluaril1n

affirme qllil manifeste laquovisiblement

des sequelles psychiques du rrau rnatisme vecuraquo

171) et quil souffre elu de stress postshy

traumatique (ibid) Rurangwa lui-meme avoue

son a le des souvenirs

sus cites par un bruit un objet une odeuf lIn certain

silence un cri un rienraquo 163) La

neccssite de retrouver Ie souvenir rouvre la blessure

et cause une nouvelle souffrance II est

confronte au la memoire it la photo

qui me soul eve Ie cceur

cette memoire eherie et honnie lJraquo 27) Ce qui leffraie Ie sur cette c est Ie

souvenir du meurtre cie sa mere la pire atrocite a illluil fut dassisterraquo (ibid 47) La

reveille Ie souvenir insupportable la l1e de

sa mere par 1a milice feminine

avant detre eventree par son tortionnaire Cette scene

pr0voque chez lui me blessure quun coup

de macherteraquo 48) et a inscrit en lui une haine

atroce

La haine Ju des de wus les Hutu Tille en

moi a tmtam comme ies dents dun

jam([is elre relire tant it penetre loin dans ta chair Une haine

et cowie qui ne que

Sihomana tout son

temps pour omrir Ie ventre de mel mere LJ (Ibid)

11 compte laquo la haine gt les laquotrois mots clesraquo quil

considere cornme declencheurs de son

]4) Comme nous ravons 1110ntre prealablement

son cst une tentative de pouvoir se defaire

de ceUe haine qui frise la vengeance c est ( line

de combattre ce qui pourrait [tel falre succomber la

haine et Ie silenceraquo 9-10) Malgre Ie souvenir insupportable associe fl

de la c est cette memc qui va lui procurer

Ie pouvoir de se [(concilier avec lui-meme et de

reconquerir son Un detail emane

de Ie lt )j et Iattire laquo llel boubon colore

niveau du ventre)j (ibid 21)

Quelques de

ce

Dans

car clest nwi l))rte Je

suis son prernier eUe a 21 am et dent de se marier

On rna souvent cUt que je h~i ressentblais etonnamment

que rnon t lsage son eme traits de ma nere Ie SOUVenir de amnt

Cest auss fa redoute aCe point

des crireres didentification

naltre molS npres Ie manage

Kambamba Ie 3 juin 1978 au dispensaire de Muginaraquo

(ibid - mais aussi un point de

- la ressemblance avec sa mere Cela est signiflcatif pour lhomme defigure dont lidentitc a ctc eHacce

de la mere lui oHre une nouvelle naissance

a un certain moment dans la description

et de la ccrcmonie du mariage il pense de la danse lors de la cen3monie et se

retrouve dans Ie sein de sa mere

laquoDans Ie ventre de 1a mere je dois sentir cette chaude houle de lenthousiasme qui me porte je

de celie me porteraquo Du souvenir emanent toutes sortes de sensations et

sentiments semblables a ceux engendres par la

mcmoire La ressemblance avec sa mere lui donne Ie

courage dassumer image du miroir quil redoutait

auparavant Ainsi refuse-t-ille suicide qui Ie la de Iimage refletee par la II trouve

la redemption dans cette ressemblance

avec sa mere Iimagc de la mere est Ie mhoir dans

il se voit comme il etait avant la

it la mere nous rappelle Ie

miroin) lacanien Dans Ecrits I Jacques Lacan

faut (flnUmTIIlYP Ie stade du miroir comme une

donne it ce terme asavoir la

it assume une

94)

A travers image de sa mere il forme une

lui-meme et effectue la conquete de son propre

corps laquoMeme si e1Ie est ravagee ma figure est ccUe

offerte ma mere (Genocide 91) Aimi

Ie suicide et meme [operation

II veut egalement conserver son laquovisage balafre parce veut gravees sur [son] corps les marques

(ibid) II considere son corps comme un

memorial difficilement alterable par rapport a sites mcmoriaux On pellt nettoyer laquoles les

d tous les lieux du mais on ne peut

enlever lsesJ balafresraquo (ibid) Ses laquocicatrices

son une attestation vivante charnelle et de ces crimes contre lhumaniteraquo alars que les laquoautres

memoriaux exposent des tapis de cranes ou

empilements soigneux de tibias et de raquo (ibid)

CONCLUSION

Limage photographique a

des siens Cest un long cri de Ihorreu[raquo Le narrateur secrie mals en meme

temps Rurangwa se en face et

un texte qui est a la fois son miroir et son espace dinterrogation

Limage de la mere et indirectement

photographique a joue un dans la

reconstruction de lidentite de Rurangwa Elle a

offert au narrateur dont des

points de repere importants pom une photo de carte didentite OU Ion peut

et la date de naissance et confirmer la

La photo de famille dont recit du genocide ltitrempee dans un de sang)

22) a pu se purifier a de la mere

A la fin du t6moignage elle devient ou l11oin5

une relique sacree Limage de la mere

aRurangwa de se son corps

et de Iassumer A la fin du rejet quil entretenait avec son corps est devenue

une relation damour Son corps survivant a par

la suite acquis un role double de memoire

et dlt genocide Dans Ie livre de photographique a depasse da rp-wcpn~rm

Temps raquo laquoiemphase dechirante du noeme (Barthes 1980 148) pour devenir nne photo souvenir

et une photo didentite

bull voume 37 nlJmero 2

NOTES L Toute reference it cet ouvrage rapporte t~dition de 2006 aux

Pre~8(5 de la Rcnai5sancc Le3 t(~ferences paginales seront clesormais conne-euros dansle texte 1 precedees du de lceuvrlt entre rarenth(ses 2 Le terme fv1u~e1rn(1nn laquo11usuhnan gtI prend origjnc dans

Ie caIUp dtuschvitz dOl ii 6l est prop8ge clautres camps Les

sont diversifies sur sa vraie definition Pour certains lti il reno1c au sens littera1 du terT1e aabe mHsUn ql~i sigrdfie cellii qLt sc sou met sans reserve ~l la volonte divine_ lviais tandi~ que la resignutioll dJ muslim repose sur]a convicrion que la volonte dAlJ8h est i lceuvre chac~ue instant dans moir~drc cvenenlent Ie lllusulman

dAuschwitz semble pedu toute volonte ct toute conscience (Agamben 2003 46) Dautr~s croiem que Ie termc semble provenir

de la posture Ijpique de detenus blottis stub jmnhes replies ala m-lniere orientale e visage riglJe con101e celle Jlun luasqueraquo

(ibid 47) DHutres cfQicnt entin qUe le termc lt faisait aHusion aux

((mouvernents rypiques des nlusulmans l1

CeS allees venues du bustej

du haur vers Ie bas [evoqnanrJ es ricuels de prierc islamiquesgt (Sofsh par Agamben 2003 47) Notre reference ce mot article

evoque tOllt simplement lbomme dont In force nterieure et physique a

de completenrent lriS(c Dans SUniVa(~t~s Esther Viujmvayo souteve egalenlent ccte

problenrique iecoute Ul Rwanda On been les gens quon

assez parle Ju genocide au ltllors laquoils peuvcnt pas suporter demendre LJ Je pouna dire en Ule phrase pourquoi on s est tu apres le genocide on sent(Jit qu)n derangeait [] COfnil1enCeS raconter rac()nter if nlcceptent decouer cr cle-st

terrihle (2005 20) 4 SU1VVanres vuawayo parle de ce corps qui [aliaie

mcttre a la mille standad laide de la machette Les hommcs rutsi ~1Vaient 18 reputatit)n detre trop granrh un ITletre qllatreAdngt~

dix devenait done line faute Les femmes dies commettaicnt dilVoir taHle ~es lnil1(c ph1t denorrnes hanches Avant de les [Uer it faUait June les raluener a une taille st~uldard I~

[J (2C05 90) 5 Couronne symbole de la matcrnite portee tradllmnellement

toures nvandaises

REF~RENCES BIBLIOGRAPHIQUES t-GAMHEK i2003j Ce ~rs[p Paris Rivaglgts BARTHES R [1980] Crambre Claire Note SHY la phowgmfJhie Gallimatd Souil coli Cabiers du cinema

DAYAN ROS~Nl-Hlgt [1007J AijJ~(bes de ta Shoal Sgtlvivre 1tn1Olgrer Paris CNRS ClEt-EnE G [1982) Palimpseste La au secord Paris

Sen colI LACAN J [(966) i9991 Paris Sed MUIAWAYO [(2004) 200SJ SiniVanes Rwanda Historre genocide Paris LAube tIJN lvi [1998 Rccits dL genocide S~mioriqHe lindicib[f)

Delachaux cr Niestjf~ R~RAJGWA R [2006] Genocide de ]a Renaissance SCHAEfFER] M [19871 Lrraglt

Paris SeiJil coIL laquoPoe-tique raquo)

B tI999] ethmqucJ Paris Dagorno SEMPRUl] [19941 L uu la tie Paris Gallimard SEMl]ANGA] [1998] fondaleurs du drane mandais Paris

Jl-ianHttan WAITRATcR R II003J SoniT du genocide Temoigrer pour abprerdrc J

Paris

VOlime rJITIlho 2 bull PRorEL

NUllS pouvons meme ajouter que laspecr

dialogue texte provient de nombreuses rhetoriques sur Ia problcmatique de lindicibIe

parcuurs narratif et une celmiddottaine ecoute de Ia part du

lecteur Ces questions bien nexigent pas de reponses ont lavantage de eventuelles du lecreur et de suggerer auditeur

est lecuute lhistoire On peut ansst dire que

1introduction la dans Ie texte en tant innummabIe consideree en

reference a lindicible peut etre interpretee comme

un moyen dexploiter Ie mystere et provoqu er Ie snspens chez Ie lccteur

Grace a toutes ces grammaticales et

Iimage de la photographie a a de Ies membres de sa famille de

parler de leur de leur de vivre avant de

raconter mort

LJ CeUX qui Ie rcjouissent seront jmr leurs toisins et

ceux qui les corlgnuue (~ette ~)hOl0 est le dernier vestige)

lultime inswmane dun moncle de 5erenit~ qui va sombrer

dans la saneantir 22)

Dc CORPS OBJET AU SUJET

LA REPRESENTATION PICTURALE ET INTERTEXTUEL

DANS LA RECONSTRUCTION lDENTlTA1RE

Dans Ia derniere partie de cette nous allons montrer comment Ie corps de Rurangwa est Ie produit

de plusieurs quon peut lire sur la surface

tegurnentaire Ensuite nous examinerons comment son corps objet dll de l autre etre recupere

par son legitime Cest par Ie truchemnt

du intertextuel et la picturale que Rurangwa devient sujet de son pro pre discours et

reconstruit son identite Sur b photo de face a personnage

represente il y a chez Ie narrateur Ie desir dune remuntee en arriere Ce retrospectif lui pennet

dalimenter la narration et donner un aspect

authl1tique ason temoignage Le retour en arriere lui donn loccasion dinterroger Ie texte historique

Le 4 du intitule Du a Ienfepgt a line teneur didactique

sur Ie mythique et

partie la par canographique du Rwanda Le narrateur saisit

cette occasion pour nous donner une de la fimne et de la flore Le mal fait ~CltIclunu

qui

prend la curieuse forme du 30) c est aussi un pays auquel certains

Occidentaux ont attribue Ie sobriquet de trou du

du monderaquo (ibid) La beaute du Rwanda ne peut pas etre sans taire son

a fait de ce pays une souillure sur Ia carte de I~AJrique et celle dl monde Ie est clairement soHicite

Du texte Ie narrateur oriente Ie lecteur

vers lhistoire du Rwanda Le texte historiquc est insere dans Ie recit par une ilustree Comme

ceHe de la familiale eHe est

A de lillustration dun livre Rwanda Ie narrateur prend lallure dun professeur et

Ie devient son eleve Dc Ie recit

llne teneur didactique Sur Ie plan cette image pennet au narrateur de renouer

Ie dialogue avec le Iecteur et au fecit de reprendre son aspect

Cillustration Ie Hutu et Ie Tutsi Ies trois figures de Ia population rwandaise qui cohabitaient comme des doigts de la mainraquo avant

Ie clivage par la colonisation

Ruran~Wa effectue une remontee vers Ie temps primordial en tentant dexpliquer par Ie du recit VltU1VU

comment lharmonie a ete brisee De ce temps mythique il revient a lillustration pour prouver

ethnique a

constitue un resume de 1histoire du Rwanda de

qui suivent racontent Ies details de lassassinat de tous

Ies membres de sa famille et de

vivantraquo A son portrait

12 intitL11e Oser me

37

Tous les manns Ie meme La wynne dll miroY dam

la saUe de baim [ j Ce que je tois horrible mais n~

peUX tuiter cet un visage qui nest

visage Une tete ltnegre J1 qui semble avoir ere sur

UT[J7eTUE atlCc de mauvais ciseaux en son milicu

Une nnlHnl)lW0 part de Iorem drolle ([tme

consignes (Ies ~erOCJaares prccisait de parLer le CQuJ-- ahauteur

de nez cpate et tranche car cJetait

tin nez de Tlttsi Une seconde cicatrice Ii panir de lordl essaie de la ressemble it un

accYUcileDpoundu [ J ou au point que dans la

tete en permanence pourquoi

89)

Tous les coups reus sur Ie lui ant arrache aussi un ceil et son

[J cloute nes[

boule une ala chair Les poimes

eles lances ant laisse sur ma poitrine des styies noires er epaisses (IHd)

Ce portrait nailS est offert en entier atravers que lui renvoie Ie miroir Cornme Ie titre dLl chapitre

lindique Rurangvva veLlr se regarder en face affronter Ie monstre quon a fait de lui Ce objectif tourne soudainement en un il se

mais ref1echit aussi sur sa nouvelle condition de vie Le corps ele est I element matriciel

elu textej il se fait voir et se fait lire Cest un site sur leque1le genocide a laisse ses marques indelebiles

laquoMon corps mon et Ie plus de ma memoire en portent la nn de rna vie

Pour est grave dans

ma peau comme un tatollage sur lavant-bras des condamnes dAuschwitzraquo (ibid 71) Pour

ces marques sur son corps par I armee il essaie de nous expliquer d abard

comment ce corps a ere erhnicise et puis Le mot qui sert de titre au

de la fois tres descriptif et singulier Ce mot invente par lauteur est forme a partir du substantif raquo pour creer un adjectif

verbal issu dun verbe possible laquogenociderraquo Que Ie mot soit invente cela nest pas

surprenant car Ie mot ii ~Vu_ lui-meme est un

recent cree en 1944 apres [extermination et des T ziganes par les nazis Il est bien

vrai que dans lne societe donnee de nouveaux

concepts necessitent de nouveaux motsraquo Ie Rwanda ne fait donc pas Un

nouveau tenne courant ne apres Ie

Tutsi au Rwanda esr Ie substantif Ce est utilise pour celui au celie

a perpetre Ie Bien quil ne so it pas encore

Ie franais Ie substantif

plusieurs temoignages des dans les discours dans

nationaux et internationaux et meme dans publiees en Kinyarwanda

Dans son temoignage Ruranf-Wa cree une autre forme laquogenoddb pour designer son corps ethnidse sur lequella machette du milicien laisse marques visibes et lisibles Le corps du narrateur et par extension Ie corps du Tursi est un carrefour de

et il ne peut se comprencire quen tenant

compte la production la transformation brd

de la reecriture des anterieurs qui lont

fa~onne

Rurangwa a momre par Ie truchement du texte que Ie discours colonial a ere a la base de

la cristallisation des differences physiques entre les trois groupes ethniques du Rwanda De nombreuses etudes sur Ie Rwanda sont daccord sur ce Dans Les Recits du Semujanga a bien explique comment a lepoque coloniale

Ie disco1OS du satoir a par steniotypage des images

de IOccident sur construit un nouteau systeme

axloc)poundt(1ue avec des nidts vaiorisanr posiriement Ie Tutsi et

negatiwment Ie Hutu (1998

et comment a partir de cette les discours

et ont inverse laquoles

du discours colonial tutsi-bon hutu-mauvais (ibid) Le discours colonial a ete recupere et manipule par les Hutu extremistes leur avantage pour eliminer Ie Tutsi qui dait considere comme un dement nodf au

gouvernement Hutu et aleur bien-ene Les parties du corps du Tursi ethnicise par Ie discours colonial

qui etaient all depart enviees ant ere par apres

vojuf~le numero 2 bull PROTCC

et rejetees par Jes Hutll Dans son Le ethnique Benjamin Sehene ecrit a ce propos

ils (res sonl

lf wvm iLs les mitres

Pendant Ie ie est

a lelimination les traits physiques sokHsant

typiqucmcnt tutsi ctaient cibles pour extermination

Rurangwa ten1oin oculaire tel meurtre en fait une description vividc

lis la lui tranchent les (comme

aux Tutsi detre les Huru

prennent un malin plaisir ales (raccourcirraquo au ales ramener

au 54)4

Les du corps de Rurangwa ont egalement subi

Ie meme sort Sibomana en de moi laquoOh voici Iaine

des Tutsi (iui pointe son nez dehorsraquo Et dun coup tres

il me Ie Tuesi nont pas Ie

de

ces demiers ont mis un loin special

naturelie) 56)

Le corps cles femmes a ete atrocement manipule pour mieux parfaire Ie dessein du genocide des Tursi Dans

une note inseree Ie livre nous donne

des eclaircissements la~dessus Sur les les assassins hutu ont les couN

porwnt sur Ie organes de la ventre et ~-agin

allant briser des de bou tdb Jam

leurs sexes aprgt les (lvoir violees Cest [une des marques

dun Jatteindre une race i1

Les coups machette ou de gourdin par

Ie milicien ont suivi methodiquement les marqueurs erhniques etablis par le discours colonial pour

produire un corps raquo 11 semble donc que ce sied mieux au corps de Rurangwa

lensemble ethniquement a ete par Ie bourreau Le titre du livre fait reference plut6t a son

corps qua sa personne Rurangwa a sans

doute voulu commencer son roman par une tension lexicale em plutot semanrique pour nollS faire entrer

lunivers de [indicible a comprendre

Le corps Rurangwfl est

une surface dinscription sur laquelle peuvent se

lire anrerieurs directement Oll

indirecrement ront transforme et lont conduit au supplice du Il ne peut etIe que

par Ie truchement du intertextueL Nous utilisons iei Ie concept dintertextualite selon la definition que lui donnent Kristeva et Gerard c estshy

fait quun texte soit la reecriture autre

texte produit par la transformation ou la reecriture dautres textes anterieurs Le corps laquogenocideraquo de

Rurangwa est donc comme un texte produir par un

double discours Ie discours colonial

racisre occidentale a ete

par les Hum

leur

de haine de lautre Cest cette version qui a produit a son tour Ie Le corps de constitue donc un par excellence Dans son ouvrage

Gerard Genetre Ie palimpseste comme f)crhem dont on a gratte la premiere inscription

pour en tracer une autre qui ne la pas tout a en sorte par transparence lancien sous Ie

Les coups de subis par Ie corps clu narrateur y ont et

des traces indelebiles Le discours de haine dans chair 11 a pas reellement efface Ie cliscours anterieur

mais 1a marque en gras Cest ainsi Cluon peut encore dechiffrer SOllS Ie nouveau Plusieurs annees

marques sur son corps

renforcent sa victimisation de mot une cible ideate Elies

impUque laquo Tratail a qtle je rcntre

a

Face au regard anLn son corps est a eliminer parce quil est accusateur cest un laquotestisraquo

un ( tiersraquo (Agamben 2003 17) qui

PROT[[ bull

entre Ie ct Iaccuse dans un

proccs Carme genocidaire qui devait eli fniner 1e

corps ethnicise elu Tutsi pas reussi a Ie faire mais

plus La plupart des

marques 80nt localisees sur

son visage elIes sautent aux yeux lc et

li501ent Son corps est devenu veereur des donnees

ethniques et un espace all se d autrcs

discours II aisement au discours social Ses

camarades de classc en Suisse au il vit

croient que cicatrices sont des

quil s est volontairement imposes et quJ il a meme pousse de jusquau cicatricing)

62) Dautres croient quii survecu un rres grave

accident voiture Dans Ie refus de se construire

partir du personnage exterieur quon a fait

Rurangwa a un retrospectif et la tourne

vers Ie du Rwanda pour les

discours qui se superposent sur son corps

Malgre cette demarche son corps reste ]a proie de

sa pwpre perception Hiui est etranger Une distance

s est etablie entre lui et son corps il est associe a la tragedie du avec illui laquofaut

cohabiter

ceiui-ci lui renvoie nne a du mal a assumer

ceUe de I laquoElephant manraquo

89) laquoEst-ce du courage que de sarracher du lit

pour aller planter un naime pas devant

un mimir quon redoute (ibid 101) II interroge

comme Ie faisait laquo Ie miroir qui ne

repond pas

Contrairement au mimir sartrien Ie 8ien nest pas

rassurant

Tout miroir est un ennemi qui me dans lirritation

it [l surgir des reminiscences atroces et des

sentiments violent que je tyreteremis 89)

Rurangva est emmure dans sa sOllffrance et dans

Ihorreur du genocide Le rapport de son evaluaril1n

affirme qllil manifeste laquovisiblement

des sequelles psychiques du rrau rnatisme vecuraquo

171) et quil souffre elu de stress postshy

traumatique (ibid) Rurangwa lui-meme avoue

son a le des souvenirs

sus cites par un bruit un objet une odeuf lIn certain

silence un cri un rienraquo 163) La

neccssite de retrouver Ie souvenir rouvre la blessure

et cause une nouvelle souffrance II est

confronte au la memoire it la photo

qui me soul eve Ie cceur

cette memoire eherie et honnie lJraquo 27) Ce qui leffraie Ie sur cette c est Ie

souvenir du meurtre cie sa mere la pire atrocite a illluil fut dassisterraquo (ibid 47) La

reveille Ie souvenir insupportable la l1e de

sa mere par 1a milice feminine

avant detre eventree par son tortionnaire Cette scene

pr0voque chez lui me blessure quun coup

de macherteraquo 48) et a inscrit en lui une haine

atroce

La haine Ju des de wus les Hutu Tille en

moi a tmtam comme ies dents dun

jam([is elre relire tant it penetre loin dans ta chair Une haine

et cowie qui ne que

Sihomana tout son

temps pour omrir Ie ventre de mel mere LJ (Ibid)

11 compte laquo la haine gt les laquotrois mots clesraquo quil

considere cornme declencheurs de son

]4) Comme nous ravons 1110ntre prealablement

son cst une tentative de pouvoir se defaire

de ceUe haine qui frise la vengeance c est ( line

de combattre ce qui pourrait [tel falre succomber la

haine et Ie silenceraquo 9-10) Malgre Ie souvenir insupportable associe fl

de la c est cette memc qui va lui procurer

Ie pouvoir de se [(concilier avec lui-meme et de

reconquerir son Un detail emane

de Ie lt )j et Iattire laquo llel boubon colore

niveau du ventre)j (ibid 21)

Quelques de

ce

Dans

car clest nwi l))rte Je

suis son prernier eUe a 21 am et dent de se marier

On rna souvent cUt que je h~i ressentblais etonnamment

que rnon t lsage son eme traits de ma nere Ie SOUVenir de amnt

Cest auss fa redoute aCe point

des crireres didentification

naltre molS npres Ie manage

Kambamba Ie 3 juin 1978 au dispensaire de Muginaraquo

(ibid - mais aussi un point de

- la ressemblance avec sa mere Cela est signiflcatif pour lhomme defigure dont lidentitc a ctc eHacce

de la mere lui oHre une nouvelle naissance

a un certain moment dans la description

et de la ccrcmonie du mariage il pense de la danse lors de la cen3monie et se

retrouve dans Ie sein de sa mere

laquoDans Ie ventre de 1a mere je dois sentir cette chaude houle de lenthousiasme qui me porte je

de celie me porteraquo Du souvenir emanent toutes sortes de sensations et

sentiments semblables a ceux engendres par la

mcmoire La ressemblance avec sa mere lui donne Ie

courage dassumer image du miroir quil redoutait

auparavant Ainsi refuse-t-ille suicide qui Ie la de Iimage refletee par la II trouve

la redemption dans cette ressemblance

avec sa mere Iimagc de la mere est Ie mhoir dans

il se voit comme il etait avant la

it la mere nous rappelle Ie

miroin) lacanien Dans Ecrits I Jacques Lacan

faut (flnUmTIIlYP Ie stade du miroir comme une

donne it ce terme asavoir la

it assume une

94)

A travers image de sa mere il forme une

lui-meme et effectue la conquete de son propre

corps laquoMeme si e1Ie est ravagee ma figure est ccUe

offerte ma mere (Genocide 91) Aimi

Ie suicide et meme [operation

II veut egalement conserver son laquovisage balafre parce veut gravees sur [son] corps les marques

(ibid) II considere son corps comme un

memorial difficilement alterable par rapport a sites mcmoriaux On pellt nettoyer laquoles les

d tous les lieux du mais on ne peut

enlever lsesJ balafresraquo (ibid) Ses laquocicatrices

son une attestation vivante charnelle et de ces crimes contre lhumaniteraquo alars que les laquoautres

memoriaux exposent des tapis de cranes ou

empilements soigneux de tibias et de raquo (ibid)

CONCLUSION

Limage photographique a

des siens Cest un long cri de Ihorreu[raquo Le narrateur secrie mals en meme

temps Rurangwa se en face et

un texte qui est a la fois son miroir et son espace dinterrogation

Limage de la mere et indirectement

photographique a joue un dans la

reconstruction de lidentite de Rurangwa Elle a

offert au narrateur dont des

points de repere importants pom une photo de carte didentite OU Ion peut

et la date de naissance et confirmer la

La photo de famille dont recit du genocide ltitrempee dans un de sang)

22) a pu se purifier a de la mere

A la fin du t6moignage elle devient ou l11oin5

une relique sacree Limage de la mere

aRurangwa de se son corps

et de Iassumer A la fin du rejet quil entretenait avec son corps est devenue

une relation damour Son corps survivant a par

la suite acquis un role double de memoire

et dlt genocide Dans Ie livre de photographique a depasse da rp-wcpn~rm

Temps raquo laquoiemphase dechirante du noeme (Barthes 1980 148) pour devenir nne photo souvenir

et une photo didentite

bull voume 37 nlJmero 2

NOTES L Toute reference it cet ouvrage rapporte t~dition de 2006 aux

Pre~8(5 de la Rcnai5sancc Le3 t(~ferences paginales seront clesormais conne-euros dansle texte 1 precedees du de lceuvrlt entre rarenth(ses 2 Le terme fv1u~e1rn(1nn laquo11usuhnan gtI prend origjnc dans

Ie caIUp dtuschvitz dOl ii 6l est prop8ge clautres camps Les

sont diversifies sur sa vraie definition Pour certains lti il reno1c au sens littera1 du terT1e aabe mHsUn ql~i sigrdfie cellii qLt sc sou met sans reserve ~l la volonte divine_ lviais tandi~ que la resignutioll dJ muslim repose sur]a convicrion que la volonte dAlJ8h est i lceuvre chac~ue instant dans moir~drc cvenenlent Ie lllusulman

dAuschwitz semble pedu toute volonte ct toute conscience (Agamben 2003 46) Dautr~s croiem que Ie termc semble provenir

de la posture Ijpique de detenus blottis stub jmnhes replies ala m-lniere orientale e visage riglJe con101e celle Jlun luasqueraquo

(ibid 47) DHutres cfQicnt entin qUe le termc lt faisait aHusion aux

((mouvernents rypiques des nlusulmans l1

CeS allees venues du bustej

du haur vers Ie bas [evoqnanrJ es ricuels de prierc islamiquesgt (Sofsh par Agamben 2003 47) Notre reference ce mot article

evoque tOllt simplement lbomme dont In force nterieure et physique a

de completenrent lriS(c Dans SUniVa(~t~s Esther Viujmvayo souteve egalenlent ccte

problenrique iecoute Ul Rwanda On been les gens quon

assez parle Ju genocide au ltllors laquoils peuvcnt pas suporter demendre LJ Je pouna dire en Ule phrase pourquoi on s est tu apres le genocide on sent(Jit qu)n derangeait [] COfnil1enCeS raconter rac()nter if nlcceptent decouer cr cle-st

terrihle (2005 20) 4 SU1VVanres vuawayo parle de ce corps qui [aliaie

mcttre a la mille standad laide de la machette Les hommcs rutsi ~1Vaient 18 reputatit)n detre trop granrh un ITletre qllatreAdngt~

dix devenait done line faute Les femmes dies commettaicnt dilVoir taHle ~es lnil1(c ph1t denorrnes hanches Avant de les [Uer it faUait June les raluener a une taille st~uldard I~

[J (2C05 90) 5 Couronne symbole de la matcrnite portee tradllmnellement

toures nvandaises

REF~RENCES BIBLIOGRAPHIQUES t-GAMHEK i2003j Ce ~rs[p Paris Rivaglgts BARTHES R [1980] Crambre Claire Note SHY la phowgmfJhie Gallimatd Souil coli Cabiers du cinema

DAYAN ROS~Nl-Hlgt [1007J AijJ~(bes de ta Shoal Sgtlvivre 1tn1Olgrer Paris CNRS ClEt-EnE G [1982) Palimpseste La au secord Paris

Sen colI LACAN J [(966) i9991 Paris Sed MUIAWAYO [(2004) 200SJ SiniVanes Rwanda Historre genocide Paris LAube tIJN lvi [1998 Rccits dL genocide S~mioriqHe lindicib[f)

Delachaux cr Niestjf~ R~RAJGWA R [2006] Genocide de ]a Renaissance SCHAEfFER] M [19871 Lrraglt

Paris SeiJil coIL laquoPoe-tique raquo)

B tI999] ethmqucJ Paris Dagorno SEMPRUl] [19941 L uu la tie Paris Gallimard SEMl]ANGA] [1998] fondaleurs du drane mandais Paris

Jl-ianHttan WAITRATcR R II003J SoniT du genocide Temoigrer pour abprerdrc J

Paris

VOlime rJITIlho 2 bull PRorEL

Tous les manns Ie meme La wynne dll miroY dam

la saUe de baim [ j Ce que je tois horrible mais n~

peUX tuiter cet un visage qui nest

visage Une tete ltnegre J1 qui semble avoir ere sur

UT[J7eTUE atlCc de mauvais ciseaux en son milicu

Une nnlHnl)lW0 part de Iorem drolle ([tme

consignes (Ies ~erOCJaares prccisait de parLer le CQuJ-- ahauteur

de nez cpate et tranche car cJetait

tin nez de Tlttsi Une seconde cicatrice Ii panir de lordl essaie de la ressemble it un

accYUcileDpoundu [ J ou au point que dans la

tete en permanence pourquoi

89)

Tous les coups reus sur Ie lui ant arrache aussi un ceil et son

[J cloute nes[

boule une ala chair Les poimes

eles lances ant laisse sur ma poitrine des styies noires er epaisses (IHd)

Ce portrait nailS est offert en entier atravers que lui renvoie Ie miroir Cornme Ie titre dLl chapitre

lindique Rurangvva veLlr se regarder en face affronter Ie monstre quon a fait de lui Ce objectif tourne soudainement en un il se

mais ref1echit aussi sur sa nouvelle condition de vie Le corps ele est I element matriciel

elu textej il se fait voir et se fait lire Cest un site sur leque1le genocide a laisse ses marques indelebiles

laquoMon corps mon et Ie plus de ma memoire en portent la nn de rna vie

Pour est grave dans

ma peau comme un tatollage sur lavant-bras des condamnes dAuschwitzraquo (ibid 71) Pour

ces marques sur son corps par I armee il essaie de nous expliquer d abard

comment ce corps a ere erhnicise et puis Le mot qui sert de titre au

de la fois tres descriptif et singulier Ce mot invente par lauteur est forme a partir du substantif raquo pour creer un adjectif

verbal issu dun verbe possible laquogenociderraquo Que Ie mot soit invente cela nest pas

surprenant car Ie mot ii ~Vu_ lui-meme est un

recent cree en 1944 apres [extermination et des T ziganes par les nazis Il est bien

vrai que dans lne societe donnee de nouveaux

concepts necessitent de nouveaux motsraquo Ie Rwanda ne fait donc pas Un

nouveau tenne courant ne apres Ie

Tutsi au Rwanda esr Ie substantif Ce est utilise pour celui au celie

a perpetre Ie Bien quil ne so it pas encore

Ie franais Ie substantif

plusieurs temoignages des dans les discours dans

nationaux et internationaux et meme dans publiees en Kinyarwanda

Dans son temoignage Ruranf-Wa cree une autre forme laquogenoddb pour designer son corps ethnidse sur lequella machette du milicien laisse marques visibes et lisibles Le corps du narrateur et par extension Ie corps du Tursi est un carrefour de

et il ne peut se comprencire quen tenant

compte la production la transformation brd

de la reecriture des anterieurs qui lont

fa~onne

Rurangwa a momre par Ie truchement du texte que Ie discours colonial a ere a la base de

la cristallisation des differences physiques entre les trois groupes ethniques du Rwanda De nombreuses etudes sur Ie Rwanda sont daccord sur ce Dans Les Recits du Semujanga a bien explique comment a lepoque coloniale

Ie disco1OS du satoir a par steniotypage des images

de IOccident sur construit un nouteau systeme

axloc)poundt(1ue avec des nidts vaiorisanr posiriement Ie Tutsi et

negatiwment Ie Hutu (1998

et comment a partir de cette les discours

et ont inverse laquoles

du discours colonial tutsi-bon hutu-mauvais (ibid) Le discours colonial a ete recupere et manipule par les Hutu extremistes leur avantage pour eliminer Ie Tutsi qui dait considere comme un dement nodf au

gouvernement Hutu et aleur bien-ene Les parties du corps du Tursi ethnicise par Ie discours colonial

qui etaient all depart enviees ant ere par apres

vojuf~le numero 2 bull PROTCC

et rejetees par Jes Hutll Dans son Le ethnique Benjamin Sehene ecrit a ce propos

ils (res sonl

lf wvm iLs les mitres

Pendant Ie ie est

a lelimination les traits physiques sokHsant

typiqucmcnt tutsi ctaient cibles pour extermination

Rurangwa ten1oin oculaire tel meurtre en fait une description vividc

lis la lui tranchent les (comme

aux Tutsi detre les Huru

prennent un malin plaisir ales (raccourcirraquo au ales ramener

au 54)4

Les du corps de Rurangwa ont egalement subi

Ie meme sort Sibomana en de moi laquoOh voici Iaine

des Tutsi (iui pointe son nez dehorsraquo Et dun coup tres

il me Ie Tuesi nont pas Ie

de

ces demiers ont mis un loin special

naturelie) 56)

Le corps cles femmes a ete atrocement manipule pour mieux parfaire Ie dessein du genocide des Tursi Dans

une note inseree Ie livre nous donne

des eclaircissements la~dessus Sur les les assassins hutu ont les couN

porwnt sur Ie organes de la ventre et ~-agin

allant briser des de bou tdb Jam

leurs sexes aprgt les (lvoir violees Cest [une des marques

dun Jatteindre une race i1

Les coups machette ou de gourdin par

Ie milicien ont suivi methodiquement les marqueurs erhniques etablis par le discours colonial pour

produire un corps raquo 11 semble donc que ce sied mieux au corps de Rurangwa

lensemble ethniquement a ete par Ie bourreau Le titre du livre fait reference plut6t a son

corps qua sa personne Rurangwa a sans

doute voulu commencer son roman par une tension lexicale em plutot semanrique pour nollS faire entrer

lunivers de [indicible a comprendre

Le corps Rurangwfl est

une surface dinscription sur laquelle peuvent se

lire anrerieurs directement Oll

indirecrement ront transforme et lont conduit au supplice du Il ne peut etIe que

par Ie truchement du intertextueL Nous utilisons iei Ie concept dintertextualite selon la definition que lui donnent Kristeva et Gerard c estshy

fait quun texte soit la reecriture autre

texte produit par la transformation ou la reecriture dautres textes anterieurs Le corps laquogenocideraquo de

Rurangwa est donc comme un texte produir par un

double discours Ie discours colonial

racisre occidentale a ete

par les Hum

leur

de haine de lautre Cest cette version qui a produit a son tour Ie Le corps de constitue donc un par excellence Dans son ouvrage

Gerard Genetre Ie palimpseste comme f)crhem dont on a gratte la premiere inscription

pour en tracer une autre qui ne la pas tout a en sorte par transparence lancien sous Ie

Les coups de subis par Ie corps clu narrateur y ont et

des traces indelebiles Le discours de haine dans chair 11 a pas reellement efface Ie cliscours anterieur

mais 1a marque en gras Cest ainsi Cluon peut encore dechiffrer SOllS Ie nouveau Plusieurs annees

marques sur son corps

renforcent sa victimisation de mot une cible ideate Elies

impUque laquo Tratail a qtle je rcntre

a

Face au regard anLn son corps est a eliminer parce quil est accusateur cest un laquotestisraquo

un ( tiersraquo (Agamben 2003 17) qui

PROT[[ bull

entre Ie ct Iaccuse dans un

proccs Carme genocidaire qui devait eli fniner 1e

corps ethnicise elu Tutsi pas reussi a Ie faire mais

plus La plupart des

marques 80nt localisees sur

son visage elIes sautent aux yeux lc et

li501ent Son corps est devenu veereur des donnees

ethniques et un espace all se d autrcs

discours II aisement au discours social Ses

camarades de classc en Suisse au il vit

croient que cicatrices sont des

quil s est volontairement imposes et quJ il a meme pousse de jusquau cicatricing)

62) Dautres croient quii survecu un rres grave

accident voiture Dans Ie refus de se construire

partir du personnage exterieur quon a fait

Rurangwa a un retrospectif et la tourne

vers Ie du Rwanda pour les

discours qui se superposent sur son corps

Malgre cette demarche son corps reste ]a proie de

sa pwpre perception Hiui est etranger Une distance

s est etablie entre lui et son corps il est associe a la tragedie du avec illui laquofaut

cohabiter

ceiui-ci lui renvoie nne a du mal a assumer

ceUe de I laquoElephant manraquo

89) laquoEst-ce du courage que de sarracher du lit

pour aller planter un naime pas devant

un mimir quon redoute (ibid 101) II interroge

comme Ie faisait laquo Ie miroir qui ne

repond pas

Contrairement au mimir sartrien Ie 8ien nest pas

rassurant

Tout miroir est un ennemi qui me dans lirritation

it [l surgir des reminiscences atroces et des

sentiments violent que je tyreteremis 89)

Rurangva est emmure dans sa sOllffrance et dans

Ihorreur du genocide Le rapport de son evaluaril1n

affirme qllil manifeste laquovisiblement

des sequelles psychiques du rrau rnatisme vecuraquo

171) et quil souffre elu de stress postshy

traumatique (ibid) Rurangwa lui-meme avoue

son a le des souvenirs

sus cites par un bruit un objet une odeuf lIn certain

silence un cri un rienraquo 163) La

neccssite de retrouver Ie souvenir rouvre la blessure

et cause une nouvelle souffrance II est

confronte au la memoire it la photo

qui me soul eve Ie cceur

cette memoire eherie et honnie lJraquo 27) Ce qui leffraie Ie sur cette c est Ie

souvenir du meurtre cie sa mere la pire atrocite a illluil fut dassisterraquo (ibid 47) La

reveille Ie souvenir insupportable la l1e de

sa mere par 1a milice feminine

avant detre eventree par son tortionnaire Cette scene

pr0voque chez lui me blessure quun coup

de macherteraquo 48) et a inscrit en lui une haine

atroce

La haine Ju des de wus les Hutu Tille en

moi a tmtam comme ies dents dun

jam([is elre relire tant it penetre loin dans ta chair Une haine

et cowie qui ne que

Sihomana tout son

temps pour omrir Ie ventre de mel mere LJ (Ibid)

11 compte laquo la haine gt les laquotrois mots clesraquo quil

considere cornme declencheurs de son

]4) Comme nous ravons 1110ntre prealablement

son cst une tentative de pouvoir se defaire

de ceUe haine qui frise la vengeance c est ( line

de combattre ce qui pourrait [tel falre succomber la

haine et Ie silenceraquo 9-10) Malgre Ie souvenir insupportable associe fl

de la c est cette memc qui va lui procurer

Ie pouvoir de se [(concilier avec lui-meme et de

reconquerir son Un detail emane

de Ie lt )j et Iattire laquo llel boubon colore

niveau du ventre)j (ibid 21)

Quelques de

ce

Dans

car clest nwi l))rte Je

suis son prernier eUe a 21 am et dent de se marier

On rna souvent cUt que je h~i ressentblais etonnamment

que rnon t lsage son eme traits de ma nere Ie SOUVenir de amnt

Cest auss fa redoute aCe point

des crireres didentification

naltre molS npres Ie manage

Kambamba Ie 3 juin 1978 au dispensaire de Muginaraquo

(ibid - mais aussi un point de

- la ressemblance avec sa mere Cela est signiflcatif pour lhomme defigure dont lidentitc a ctc eHacce

de la mere lui oHre une nouvelle naissance

a un certain moment dans la description

et de la ccrcmonie du mariage il pense de la danse lors de la cen3monie et se

retrouve dans Ie sein de sa mere

laquoDans Ie ventre de 1a mere je dois sentir cette chaude houle de lenthousiasme qui me porte je

de celie me porteraquo Du souvenir emanent toutes sortes de sensations et

sentiments semblables a ceux engendres par la

mcmoire La ressemblance avec sa mere lui donne Ie

courage dassumer image du miroir quil redoutait

auparavant Ainsi refuse-t-ille suicide qui Ie la de Iimage refletee par la II trouve

la redemption dans cette ressemblance

avec sa mere Iimagc de la mere est Ie mhoir dans

il se voit comme il etait avant la

it la mere nous rappelle Ie

miroin) lacanien Dans Ecrits I Jacques Lacan

faut (flnUmTIIlYP Ie stade du miroir comme une

donne it ce terme asavoir la

it assume une

94)

A travers image de sa mere il forme une

lui-meme et effectue la conquete de son propre

corps laquoMeme si e1Ie est ravagee ma figure est ccUe

offerte ma mere (Genocide 91) Aimi

Ie suicide et meme [operation

II veut egalement conserver son laquovisage balafre parce veut gravees sur [son] corps les marques

(ibid) II considere son corps comme un

memorial difficilement alterable par rapport a sites mcmoriaux On pellt nettoyer laquoles les

d tous les lieux du mais on ne peut

enlever lsesJ balafresraquo (ibid) Ses laquocicatrices

son une attestation vivante charnelle et de ces crimes contre lhumaniteraquo alars que les laquoautres

memoriaux exposent des tapis de cranes ou

empilements soigneux de tibias et de raquo (ibid)

CONCLUSION

Limage photographique a

des siens Cest un long cri de Ihorreu[raquo Le narrateur secrie mals en meme

temps Rurangwa se en face et

un texte qui est a la fois son miroir et son espace dinterrogation

Limage de la mere et indirectement

photographique a joue un dans la

reconstruction de lidentite de Rurangwa Elle a

offert au narrateur dont des

points de repere importants pom une photo de carte didentite OU Ion peut

et la date de naissance et confirmer la

La photo de famille dont recit du genocide ltitrempee dans un de sang)

22) a pu se purifier a de la mere

A la fin du t6moignage elle devient ou l11oin5

une relique sacree Limage de la mere

aRurangwa de se son corps

et de Iassumer A la fin du rejet quil entretenait avec son corps est devenue

une relation damour Son corps survivant a par

la suite acquis un role double de memoire

et dlt genocide Dans Ie livre de photographique a depasse da rp-wcpn~rm

Temps raquo laquoiemphase dechirante du noeme (Barthes 1980 148) pour devenir nne photo souvenir

et une photo didentite

bull voume 37 nlJmero 2

NOTES L Toute reference it cet ouvrage rapporte t~dition de 2006 aux

Pre~8(5 de la Rcnai5sancc Le3 t(~ferences paginales seront clesormais conne-euros dansle texte 1 precedees du de lceuvrlt entre rarenth(ses 2 Le terme fv1u~e1rn(1nn laquo11usuhnan gtI prend origjnc dans

Ie caIUp dtuschvitz dOl ii 6l est prop8ge clautres camps Les

sont diversifies sur sa vraie definition Pour certains lti il reno1c au sens littera1 du terT1e aabe mHsUn ql~i sigrdfie cellii qLt sc sou met sans reserve ~l la volonte divine_ lviais tandi~ que la resignutioll dJ muslim repose sur]a convicrion que la volonte dAlJ8h est i lceuvre chac~ue instant dans moir~drc cvenenlent Ie lllusulman

dAuschwitz semble pedu toute volonte ct toute conscience (Agamben 2003 46) Dautr~s croiem que Ie termc semble provenir

de la posture Ijpique de detenus blottis stub jmnhes replies ala m-lniere orientale e visage riglJe con101e celle Jlun luasqueraquo

(ibid 47) DHutres cfQicnt entin qUe le termc lt faisait aHusion aux

((mouvernents rypiques des nlusulmans l1

CeS allees venues du bustej

du haur vers Ie bas [evoqnanrJ es ricuels de prierc islamiquesgt (Sofsh par Agamben 2003 47) Notre reference ce mot article

evoque tOllt simplement lbomme dont In force nterieure et physique a

de completenrent lriS(c Dans SUniVa(~t~s Esther Viujmvayo souteve egalenlent ccte

problenrique iecoute Ul Rwanda On been les gens quon

assez parle Ju genocide au ltllors laquoils peuvcnt pas suporter demendre LJ Je pouna dire en Ule phrase pourquoi on s est tu apres le genocide on sent(Jit qu)n derangeait [] COfnil1enCeS raconter rac()nter if nlcceptent decouer cr cle-st

terrihle (2005 20) 4 SU1VVanres vuawayo parle de ce corps qui [aliaie

mcttre a la mille standad laide de la machette Les hommcs rutsi ~1Vaient 18 reputatit)n detre trop granrh un ITletre qllatreAdngt~

dix devenait done line faute Les femmes dies commettaicnt dilVoir taHle ~es lnil1(c ph1t denorrnes hanches Avant de les [Uer it faUait June les raluener a une taille st~uldard I~

[J (2C05 90) 5 Couronne symbole de la matcrnite portee tradllmnellement

toures nvandaises

REF~RENCES BIBLIOGRAPHIQUES t-GAMHEK i2003j Ce ~rs[p Paris Rivaglgts BARTHES R [1980] Crambre Claire Note SHY la phowgmfJhie Gallimatd Souil coli Cabiers du cinema

DAYAN ROS~Nl-Hlgt [1007J AijJ~(bes de ta Shoal Sgtlvivre 1tn1Olgrer Paris CNRS ClEt-EnE G [1982) Palimpseste La au secord Paris

Sen colI LACAN J [(966) i9991 Paris Sed MUIAWAYO [(2004) 200SJ SiniVanes Rwanda Historre genocide Paris LAube tIJN lvi [1998 Rccits dL genocide S~mioriqHe lindicib[f)

Delachaux cr Niestjf~ R~RAJGWA R [2006] Genocide de ]a Renaissance SCHAEfFER] M [19871 Lrraglt

Paris SeiJil coIL laquoPoe-tique raquo)

B tI999] ethmqucJ Paris Dagorno SEMPRUl] [19941 L uu la tie Paris Gallimard SEMl]ANGA] [1998] fondaleurs du drane mandais Paris

Jl-ianHttan WAITRATcR R II003J SoniT du genocide Temoigrer pour abprerdrc J

Paris

VOlime rJITIlho 2 bull PRorEL

et rejetees par Jes Hutll Dans son Le ethnique Benjamin Sehene ecrit a ce propos

ils (res sonl

lf wvm iLs les mitres

Pendant Ie ie est

a lelimination les traits physiques sokHsant

typiqucmcnt tutsi ctaient cibles pour extermination

Rurangwa ten1oin oculaire tel meurtre en fait une description vividc

lis la lui tranchent les (comme

aux Tutsi detre les Huru

prennent un malin plaisir ales (raccourcirraquo au ales ramener

au 54)4

Les du corps de Rurangwa ont egalement subi

Ie meme sort Sibomana en de moi laquoOh voici Iaine

des Tutsi (iui pointe son nez dehorsraquo Et dun coup tres

il me Ie Tuesi nont pas Ie

de

ces demiers ont mis un loin special

naturelie) 56)

Le corps cles femmes a ete atrocement manipule pour mieux parfaire Ie dessein du genocide des Tursi Dans

une note inseree Ie livre nous donne

des eclaircissements la~dessus Sur les les assassins hutu ont les couN

porwnt sur Ie organes de la ventre et ~-agin

allant briser des de bou tdb Jam

leurs sexes aprgt les (lvoir violees Cest [une des marques

dun Jatteindre une race i1

Les coups machette ou de gourdin par

Ie milicien ont suivi methodiquement les marqueurs erhniques etablis par le discours colonial pour

produire un corps raquo 11 semble donc que ce sied mieux au corps de Rurangwa

lensemble ethniquement a ete par Ie bourreau Le titre du livre fait reference plut6t a son

corps qua sa personne Rurangwa a sans

doute voulu commencer son roman par une tension lexicale em plutot semanrique pour nollS faire entrer

lunivers de [indicible a comprendre

Le corps Rurangwfl est

une surface dinscription sur laquelle peuvent se

lire anrerieurs directement Oll

indirecrement ront transforme et lont conduit au supplice du Il ne peut etIe que

par Ie truchement du intertextueL Nous utilisons iei Ie concept dintertextualite selon la definition que lui donnent Kristeva et Gerard c estshy

fait quun texte soit la reecriture autre

texte produit par la transformation ou la reecriture dautres textes anterieurs Le corps laquogenocideraquo de

Rurangwa est donc comme un texte produir par un

double discours Ie discours colonial

racisre occidentale a ete

par les Hum

leur

de haine de lautre Cest cette version qui a produit a son tour Ie Le corps de constitue donc un par excellence Dans son ouvrage

Gerard Genetre Ie palimpseste comme f)crhem dont on a gratte la premiere inscription

pour en tracer une autre qui ne la pas tout a en sorte par transparence lancien sous Ie

Les coups de subis par Ie corps clu narrateur y ont et

des traces indelebiles Le discours de haine dans chair 11 a pas reellement efface Ie cliscours anterieur

mais 1a marque en gras Cest ainsi Cluon peut encore dechiffrer SOllS Ie nouveau Plusieurs annees

marques sur son corps

renforcent sa victimisation de mot une cible ideate Elies

impUque laquo Tratail a qtle je rcntre

a

Face au regard anLn son corps est a eliminer parce quil est accusateur cest un laquotestisraquo

un ( tiersraquo (Agamben 2003 17) qui

PROT[[ bull

entre Ie ct Iaccuse dans un

proccs Carme genocidaire qui devait eli fniner 1e

corps ethnicise elu Tutsi pas reussi a Ie faire mais

plus La plupart des

marques 80nt localisees sur

son visage elIes sautent aux yeux lc et

li501ent Son corps est devenu veereur des donnees

ethniques et un espace all se d autrcs

discours II aisement au discours social Ses

camarades de classc en Suisse au il vit

croient que cicatrices sont des

quil s est volontairement imposes et quJ il a meme pousse de jusquau cicatricing)

62) Dautres croient quii survecu un rres grave

accident voiture Dans Ie refus de se construire

partir du personnage exterieur quon a fait

Rurangwa a un retrospectif et la tourne

vers Ie du Rwanda pour les

discours qui se superposent sur son corps

Malgre cette demarche son corps reste ]a proie de

sa pwpre perception Hiui est etranger Une distance

s est etablie entre lui et son corps il est associe a la tragedie du avec illui laquofaut

cohabiter

ceiui-ci lui renvoie nne a du mal a assumer

ceUe de I laquoElephant manraquo

89) laquoEst-ce du courage que de sarracher du lit

pour aller planter un naime pas devant

un mimir quon redoute (ibid 101) II interroge

comme Ie faisait laquo Ie miroir qui ne

repond pas

Contrairement au mimir sartrien Ie 8ien nest pas

rassurant

Tout miroir est un ennemi qui me dans lirritation

it [l surgir des reminiscences atroces et des

sentiments violent que je tyreteremis 89)

Rurangva est emmure dans sa sOllffrance et dans

Ihorreur du genocide Le rapport de son evaluaril1n

affirme qllil manifeste laquovisiblement

des sequelles psychiques du rrau rnatisme vecuraquo

171) et quil souffre elu de stress postshy

traumatique (ibid) Rurangwa lui-meme avoue

son a le des souvenirs

sus cites par un bruit un objet une odeuf lIn certain

silence un cri un rienraquo 163) La

neccssite de retrouver Ie souvenir rouvre la blessure

et cause une nouvelle souffrance II est

confronte au la memoire it la photo

qui me soul eve Ie cceur

cette memoire eherie et honnie lJraquo 27) Ce qui leffraie Ie sur cette c est Ie

souvenir du meurtre cie sa mere la pire atrocite a illluil fut dassisterraquo (ibid 47) La

reveille Ie souvenir insupportable la l1e de

sa mere par 1a milice feminine

avant detre eventree par son tortionnaire Cette scene

pr0voque chez lui me blessure quun coup

de macherteraquo 48) et a inscrit en lui une haine

atroce

La haine Ju des de wus les Hutu Tille en

moi a tmtam comme ies dents dun

jam([is elre relire tant it penetre loin dans ta chair Une haine

et cowie qui ne que

Sihomana tout son

temps pour omrir Ie ventre de mel mere LJ (Ibid)

11 compte laquo la haine gt les laquotrois mots clesraquo quil

considere cornme declencheurs de son

]4) Comme nous ravons 1110ntre prealablement

son cst une tentative de pouvoir se defaire

de ceUe haine qui frise la vengeance c est ( line

de combattre ce qui pourrait [tel falre succomber la

haine et Ie silenceraquo 9-10) Malgre Ie souvenir insupportable associe fl

de la c est cette memc qui va lui procurer

Ie pouvoir de se [(concilier avec lui-meme et de

reconquerir son Un detail emane

de Ie lt )j et Iattire laquo llel boubon colore

niveau du ventre)j (ibid 21)

Quelques de

ce

Dans

car clest nwi l))rte Je

suis son prernier eUe a 21 am et dent de se marier

On rna souvent cUt que je h~i ressentblais etonnamment

que rnon t lsage son eme traits de ma nere Ie SOUVenir de amnt

Cest auss fa redoute aCe point

des crireres didentification

naltre molS npres Ie manage

Kambamba Ie 3 juin 1978 au dispensaire de Muginaraquo

(ibid - mais aussi un point de

- la ressemblance avec sa mere Cela est signiflcatif pour lhomme defigure dont lidentitc a ctc eHacce

de la mere lui oHre une nouvelle naissance

a un certain moment dans la description

et de la ccrcmonie du mariage il pense de la danse lors de la cen3monie et se

retrouve dans Ie sein de sa mere

laquoDans Ie ventre de 1a mere je dois sentir cette chaude houle de lenthousiasme qui me porte je

de celie me porteraquo Du souvenir emanent toutes sortes de sensations et

sentiments semblables a ceux engendres par la

mcmoire La ressemblance avec sa mere lui donne Ie

courage dassumer image du miroir quil redoutait

auparavant Ainsi refuse-t-ille suicide qui Ie la de Iimage refletee par la II trouve

la redemption dans cette ressemblance

avec sa mere Iimagc de la mere est Ie mhoir dans

il se voit comme il etait avant la

it la mere nous rappelle Ie

miroin) lacanien Dans Ecrits I Jacques Lacan

faut (flnUmTIIlYP Ie stade du miroir comme une

donne it ce terme asavoir la

it assume une

94)

A travers image de sa mere il forme une

lui-meme et effectue la conquete de son propre

corps laquoMeme si e1Ie est ravagee ma figure est ccUe

offerte ma mere (Genocide 91) Aimi

Ie suicide et meme [operation

II veut egalement conserver son laquovisage balafre parce veut gravees sur [son] corps les marques

(ibid) II considere son corps comme un

memorial difficilement alterable par rapport a sites mcmoriaux On pellt nettoyer laquoles les

d tous les lieux du mais on ne peut

enlever lsesJ balafresraquo (ibid) Ses laquocicatrices

son une attestation vivante charnelle et de ces crimes contre lhumaniteraquo alars que les laquoautres

memoriaux exposent des tapis de cranes ou

empilements soigneux de tibias et de raquo (ibid)

CONCLUSION

Limage photographique a

des siens Cest un long cri de Ihorreu[raquo Le narrateur secrie mals en meme

temps Rurangwa se en face et

un texte qui est a la fois son miroir et son espace dinterrogation

Limage de la mere et indirectement

photographique a joue un dans la

reconstruction de lidentite de Rurangwa Elle a

offert au narrateur dont des

points de repere importants pom une photo de carte didentite OU Ion peut

et la date de naissance et confirmer la

La photo de famille dont recit du genocide ltitrempee dans un de sang)

22) a pu se purifier a de la mere

A la fin du t6moignage elle devient ou l11oin5

une relique sacree Limage de la mere

aRurangwa de se son corps

et de Iassumer A la fin du rejet quil entretenait avec son corps est devenue

une relation damour Son corps survivant a par

la suite acquis un role double de memoire

et dlt genocide Dans Ie livre de photographique a depasse da rp-wcpn~rm

Temps raquo laquoiemphase dechirante du noeme (Barthes 1980 148) pour devenir nne photo souvenir

et une photo didentite

bull voume 37 nlJmero 2

NOTES L Toute reference it cet ouvrage rapporte t~dition de 2006 aux

Pre~8(5 de la Rcnai5sancc Le3 t(~ferences paginales seront clesormais conne-euros dansle texte 1 precedees du de lceuvrlt entre rarenth(ses 2 Le terme fv1u~e1rn(1nn laquo11usuhnan gtI prend origjnc dans

Ie caIUp dtuschvitz dOl ii 6l est prop8ge clautres camps Les

sont diversifies sur sa vraie definition Pour certains lti il reno1c au sens littera1 du terT1e aabe mHsUn ql~i sigrdfie cellii qLt sc sou met sans reserve ~l la volonte divine_ lviais tandi~ que la resignutioll dJ muslim repose sur]a convicrion que la volonte dAlJ8h est i lceuvre chac~ue instant dans moir~drc cvenenlent Ie lllusulman

dAuschwitz semble pedu toute volonte ct toute conscience (Agamben 2003 46) Dautr~s croiem que Ie termc semble provenir

de la posture Ijpique de detenus blottis stub jmnhes replies ala m-lniere orientale e visage riglJe con101e celle Jlun luasqueraquo

(ibid 47) DHutres cfQicnt entin qUe le termc lt faisait aHusion aux

((mouvernents rypiques des nlusulmans l1

CeS allees venues du bustej

du haur vers Ie bas [evoqnanrJ es ricuels de prierc islamiquesgt (Sofsh par Agamben 2003 47) Notre reference ce mot article

evoque tOllt simplement lbomme dont In force nterieure et physique a

de completenrent lriS(c Dans SUniVa(~t~s Esther Viujmvayo souteve egalenlent ccte

problenrique iecoute Ul Rwanda On been les gens quon

assez parle Ju genocide au ltllors laquoils peuvcnt pas suporter demendre LJ Je pouna dire en Ule phrase pourquoi on s est tu apres le genocide on sent(Jit qu)n derangeait [] COfnil1enCeS raconter rac()nter if nlcceptent decouer cr cle-st

terrihle (2005 20) 4 SU1VVanres vuawayo parle de ce corps qui [aliaie

mcttre a la mille standad laide de la machette Les hommcs rutsi ~1Vaient 18 reputatit)n detre trop granrh un ITletre qllatreAdngt~

dix devenait done line faute Les femmes dies commettaicnt dilVoir taHle ~es lnil1(c ph1t denorrnes hanches Avant de les [Uer it faUait June les raluener a une taille st~uldard I~

[J (2C05 90) 5 Couronne symbole de la matcrnite portee tradllmnellement

toures nvandaises

REF~RENCES BIBLIOGRAPHIQUES t-GAMHEK i2003j Ce ~rs[p Paris Rivaglgts BARTHES R [1980] Crambre Claire Note SHY la phowgmfJhie Gallimatd Souil coli Cabiers du cinema

DAYAN ROS~Nl-Hlgt [1007J AijJ~(bes de ta Shoal Sgtlvivre 1tn1Olgrer Paris CNRS ClEt-EnE G [1982) Palimpseste La au secord Paris

Sen colI LACAN J [(966) i9991 Paris Sed MUIAWAYO [(2004) 200SJ SiniVanes Rwanda Historre genocide Paris LAube tIJN lvi [1998 Rccits dL genocide S~mioriqHe lindicib[f)

Delachaux cr Niestjf~ R~RAJGWA R [2006] Genocide de ]a Renaissance SCHAEfFER] M [19871 Lrraglt

Paris SeiJil coIL laquoPoe-tique raquo)

B tI999] ethmqucJ Paris Dagorno SEMPRUl] [19941 L uu la tie Paris Gallimard SEMl]ANGA] [1998] fondaleurs du drane mandais Paris

Jl-ianHttan WAITRATcR R II003J SoniT du genocide Temoigrer pour abprerdrc J

Paris

VOlime rJITIlho 2 bull PRorEL

entre Ie ct Iaccuse dans un

proccs Carme genocidaire qui devait eli fniner 1e

corps ethnicise elu Tutsi pas reussi a Ie faire mais

plus La plupart des

marques 80nt localisees sur

son visage elIes sautent aux yeux lc et

li501ent Son corps est devenu veereur des donnees

ethniques et un espace all se d autrcs

discours II aisement au discours social Ses

camarades de classc en Suisse au il vit

croient que cicatrices sont des

quil s est volontairement imposes et quJ il a meme pousse de jusquau cicatricing)

62) Dautres croient quii survecu un rres grave

accident voiture Dans Ie refus de se construire

partir du personnage exterieur quon a fait

Rurangwa a un retrospectif et la tourne

vers Ie du Rwanda pour les

discours qui se superposent sur son corps

Malgre cette demarche son corps reste ]a proie de

sa pwpre perception Hiui est etranger Une distance

s est etablie entre lui et son corps il est associe a la tragedie du avec illui laquofaut

cohabiter

ceiui-ci lui renvoie nne a du mal a assumer

ceUe de I laquoElephant manraquo

89) laquoEst-ce du courage que de sarracher du lit

pour aller planter un naime pas devant

un mimir quon redoute (ibid 101) II interroge

comme Ie faisait laquo Ie miroir qui ne

repond pas

Contrairement au mimir sartrien Ie 8ien nest pas

rassurant

Tout miroir est un ennemi qui me dans lirritation

it [l surgir des reminiscences atroces et des

sentiments violent que je tyreteremis 89)

Rurangva est emmure dans sa sOllffrance et dans

Ihorreur du genocide Le rapport de son evaluaril1n

affirme qllil manifeste laquovisiblement

des sequelles psychiques du rrau rnatisme vecuraquo

171) et quil souffre elu de stress postshy

traumatique (ibid) Rurangwa lui-meme avoue

son a le des souvenirs

sus cites par un bruit un objet une odeuf lIn certain

silence un cri un rienraquo 163) La

neccssite de retrouver Ie souvenir rouvre la blessure

et cause une nouvelle souffrance II est

confronte au la memoire it la photo

qui me soul eve Ie cceur

cette memoire eherie et honnie lJraquo 27) Ce qui leffraie Ie sur cette c est Ie

souvenir du meurtre cie sa mere la pire atrocite a illluil fut dassisterraquo (ibid 47) La

reveille Ie souvenir insupportable la l1e de

sa mere par 1a milice feminine

avant detre eventree par son tortionnaire Cette scene

pr0voque chez lui me blessure quun coup

de macherteraquo 48) et a inscrit en lui une haine

atroce

La haine Ju des de wus les Hutu Tille en

moi a tmtam comme ies dents dun

jam([is elre relire tant it penetre loin dans ta chair Une haine

et cowie qui ne que

Sihomana tout son

temps pour omrir Ie ventre de mel mere LJ (Ibid)

11 compte laquo la haine gt les laquotrois mots clesraquo quil

considere cornme declencheurs de son

]4) Comme nous ravons 1110ntre prealablement

son cst une tentative de pouvoir se defaire

de ceUe haine qui frise la vengeance c est ( line

de combattre ce qui pourrait [tel falre succomber la

haine et Ie silenceraquo 9-10) Malgre Ie souvenir insupportable associe fl

de la c est cette memc qui va lui procurer

Ie pouvoir de se [(concilier avec lui-meme et de

reconquerir son Un detail emane

de Ie lt )j et Iattire laquo llel boubon colore

niveau du ventre)j (ibid 21)

Quelques de

ce

Dans

car clest nwi l))rte Je

suis son prernier eUe a 21 am et dent de se marier

On rna souvent cUt que je h~i ressentblais etonnamment

que rnon t lsage son eme traits de ma nere Ie SOUVenir de amnt

Cest auss fa redoute aCe point

des crireres didentification

naltre molS npres Ie manage

Kambamba Ie 3 juin 1978 au dispensaire de Muginaraquo

(ibid - mais aussi un point de

- la ressemblance avec sa mere Cela est signiflcatif pour lhomme defigure dont lidentitc a ctc eHacce

de la mere lui oHre une nouvelle naissance

a un certain moment dans la description

et de la ccrcmonie du mariage il pense de la danse lors de la cen3monie et se

retrouve dans Ie sein de sa mere

laquoDans Ie ventre de 1a mere je dois sentir cette chaude houle de lenthousiasme qui me porte je

de celie me porteraquo Du souvenir emanent toutes sortes de sensations et

sentiments semblables a ceux engendres par la

mcmoire La ressemblance avec sa mere lui donne Ie

courage dassumer image du miroir quil redoutait

auparavant Ainsi refuse-t-ille suicide qui Ie la de Iimage refletee par la II trouve

la redemption dans cette ressemblance

avec sa mere Iimagc de la mere est Ie mhoir dans

il se voit comme il etait avant la

it la mere nous rappelle Ie

miroin) lacanien Dans Ecrits I Jacques Lacan

faut (flnUmTIIlYP Ie stade du miroir comme une

donne it ce terme asavoir la

it assume une

94)

A travers image de sa mere il forme une

lui-meme et effectue la conquete de son propre

corps laquoMeme si e1Ie est ravagee ma figure est ccUe

offerte ma mere (Genocide 91) Aimi

Ie suicide et meme [operation

II veut egalement conserver son laquovisage balafre parce veut gravees sur [son] corps les marques

(ibid) II considere son corps comme un

memorial difficilement alterable par rapport a sites mcmoriaux On pellt nettoyer laquoles les

d tous les lieux du mais on ne peut

enlever lsesJ balafresraquo (ibid) Ses laquocicatrices

son une attestation vivante charnelle et de ces crimes contre lhumaniteraquo alars que les laquoautres

memoriaux exposent des tapis de cranes ou

empilements soigneux de tibias et de raquo (ibid)

CONCLUSION

Limage photographique a

des siens Cest un long cri de Ihorreu[raquo Le narrateur secrie mals en meme

temps Rurangwa se en face et

un texte qui est a la fois son miroir et son espace dinterrogation

Limage de la mere et indirectement

photographique a joue un dans la

reconstruction de lidentite de Rurangwa Elle a

offert au narrateur dont des

points de repere importants pom une photo de carte didentite OU Ion peut

et la date de naissance et confirmer la

La photo de famille dont recit du genocide ltitrempee dans un de sang)

22) a pu se purifier a de la mere

A la fin du t6moignage elle devient ou l11oin5

une relique sacree Limage de la mere

aRurangwa de se son corps

et de Iassumer A la fin du rejet quil entretenait avec son corps est devenue

une relation damour Son corps survivant a par

la suite acquis un role double de memoire

et dlt genocide Dans Ie livre de photographique a depasse da rp-wcpn~rm

Temps raquo laquoiemphase dechirante du noeme (Barthes 1980 148) pour devenir nne photo souvenir

et une photo didentite

bull voume 37 nlJmero 2

NOTES L Toute reference it cet ouvrage rapporte t~dition de 2006 aux

Pre~8(5 de la Rcnai5sancc Le3 t(~ferences paginales seront clesormais conne-euros dansle texte 1 precedees du de lceuvrlt entre rarenth(ses 2 Le terme fv1u~e1rn(1nn laquo11usuhnan gtI prend origjnc dans

Ie caIUp dtuschvitz dOl ii 6l est prop8ge clautres camps Les

sont diversifies sur sa vraie definition Pour certains lti il reno1c au sens littera1 du terT1e aabe mHsUn ql~i sigrdfie cellii qLt sc sou met sans reserve ~l la volonte divine_ lviais tandi~ que la resignutioll dJ muslim repose sur]a convicrion que la volonte dAlJ8h est i lceuvre chac~ue instant dans moir~drc cvenenlent Ie lllusulman

dAuschwitz semble pedu toute volonte ct toute conscience (Agamben 2003 46) Dautr~s croiem que Ie termc semble provenir

de la posture Ijpique de detenus blottis stub jmnhes replies ala m-lniere orientale e visage riglJe con101e celle Jlun luasqueraquo

(ibid 47) DHutres cfQicnt entin qUe le termc lt faisait aHusion aux

((mouvernents rypiques des nlusulmans l1

CeS allees venues du bustej

du haur vers Ie bas [evoqnanrJ es ricuels de prierc islamiquesgt (Sofsh par Agamben 2003 47) Notre reference ce mot article

evoque tOllt simplement lbomme dont In force nterieure et physique a

de completenrent lriS(c Dans SUniVa(~t~s Esther Viujmvayo souteve egalenlent ccte

problenrique iecoute Ul Rwanda On been les gens quon

assez parle Ju genocide au ltllors laquoils peuvcnt pas suporter demendre LJ Je pouna dire en Ule phrase pourquoi on s est tu apres le genocide on sent(Jit qu)n derangeait [] COfnil1enCeS raconter rac()nter if nlcceptent decouer cr cle-st

terrihle (2005 20) 4 SU1VVanres vuawayo parle de ce corps qui [aliaie

mcttre a la mille standad laide de la machette Les hommcs rutsi ~1Vaient 18 reputatit)n detre trop granrh un ITletre qllatreAdngt~

dix devenait done line faute Les femmes dies commettaicnt dilVoir taHle ~es lnil1(c ph1t denorrnes hanches Avant de les [Uer it faUait June les raluener a une taille st~uldard I~

[J (2C05 90) 5 Couronne symbole de la matcrnite portee tradllmnellement

toures nvandaises

REF~RENCES BIBLIOGRAPHIQUES t-GAMHEK i2003j Ce ~rs[p Paris Rivaglgts BARTHES R [1980] Crambre Claire Note SHY la phowgmfJhie Gallimatd Souil coli Cabiers du cinema

DAYAN ROS~Nl-Hlgt [1007J AijJ~(bes de ta Shoal Sgtlvivre 1tn1Olgrer Paris CNRS ClEt-EnE G [1982) Palimpseste La au secord Paris

Sen colI LACAN J [(966) i9991 Paris Sed MUIAWAYO [(2004) 200SJ SiniVanes Rwanda Historre genocide Paris LAube tIJN lvi [1998 Rccits dL genocide S~mioriqHe lindicib[f)

Delachaux cr Niestjf~ R~RAJGWA R [2006] Genocide de ]a Renaissance SCHAEfFER] M [19871 Lrraglt

Paris SeiJil coIL laquoPoe-tique raquo)

B tI999] ethmqucJ Paris Dagorno SEMPRUl] [19941 L uu la tie Paris Gallimard SEMl]ANGA] [1998] fondaleurs du drane mandais Paris

Jl-ianHttan WAITRATcR R II003J SoniT du genocide Temoigrer pour abprerdrc J

Paris

VOlime rJITIlho 2 bull PRorEL

des crireres didentification

naltre molS npres Ie manage

Kambamba Ie 3 juin 1978 au dispensaire de Muginaraquo

(ibid - mais aussi un point de

- la ressemblance avec sa mere Cela est signiflcatif pour lhomme defigure dont lidentitc a ctc eHacce

de la mere lui oHre une nouvelle naissance

a un certain moment dans la description

et de la ccrcmonie du mariage il pense de la danse lors de la cen3monie et se

retrouve dans Ie sein de sa mere

laquoDans Ie ventre de 1a mere je dois sentir cette chaude houle de lenthousiasme qui me porte je

de celie me porteraquo Du souvenir emanent toutes sortes de sensations et

sentiments semblables a ceux engendres par la

mcmoire La ressemblance avec sa mere lui donne Ie

courage dassumer image du miroir quil redoutait

auparavant Ainsi refuse-t-ille suicide qui Ie la de Iimage refletee par la II trouve

la redemption dans cette ressemblance

avec sa mere Iimagc de la mere est Ie mhoir dans

il se voit comme il etait avant la

it la mere nous rappelle Ie

miroin) lacanien Dans Ecrits I Jacques Lacan

faut (flnUmTIIlYP Ie stade du miroir comme une

donne it ce terme asavoir la

it assume une

94)

A travers image de sa mere il forme une

lui-meme et effectue la conquete de son propre

corps laquoMeme si e1Ie est ravagee ma figure est ccUe

offerte ma mere (Genocide 91) Aimi

Ie suicide et meme [operation

II veut egalement conserver son laquovisage balafre parce veut gravees sur [son] corps les marques

(ibid) II considere son corps comme un

memorial difficilement alterable par rapport a sites mcmoriaux On pellt nettoyer laquoles les

d tous les lieux du mais on ne peut

enlever lsesJ balafresraquo (ibid) Ses laquocicatrices

son une attestation vivante charnelle et de ces crimes contre lhumaniteraquo alars que les laquoautres

memoriaux exposent des tapis de cranes ou

empilements soigneux de tibias et de raquo (ibid)

CONCLUSION

Limage photographique a

des siens Cest un long cri de Ihorreu[raquo Le narrateur secrie mals en meme

temps Rurangwa se en face et

un texte qui est a la fois son miroir et son espace dinterrogation

Limage de la mere et indirectement

photographique a joue un dans la

reconstruction de lidentite de Rurangwa Elle a

offert au narrateur dont des

points de repere importants pom une photo de carte didentite OU Ion peut

et la date de naissance et confirmer la

La photo de famille dont recit du genocide ltitrempee dans un de sang)

22) a pu se purifier a de la mere

A la fin du t6moignage elle devient ou l11oin5

une relique sacree Limage de la mere

aRurangwa de se son corps

et de Iassumer A la fin du rejet quil entretenait avec son corps est devenue

une relation damour Son corps survivant a par

la suite acquis un role double de memoire

et dlt genocide Dans Ie livre de photographique a depasse da rp-wcpn~rm

Temps raquo laquoiemphase dechirante du noeme (Barthes 1980 148) pour devenir nne photo souvenir

et une photo didentite

bull voume 37 nlJmero 2

NOTES L Toute reference it cet ouvrage rapporte t~dition de 2006 aux

Pre~8(5 de la Rcnai5sancc Le3 t(~ferences paginales seront clesormais conne-euros dansle texte 1 precedees du de lceuvrlt entre rarenth(ses 2 Le terme fv1u~e1rn(1nn laquo11usuhnan gtI prend origjnc dans

Ie caIUp dtuschvitz dOl ii 6l est prop8ge clautres camps Les

sont diversifies sur sa vraie definition Pour certains lti il reno1c au sens littera1 du terT1e aabe mHsUn ql~i sigrdfie cellii qLt sc sou met sans reserve ~l la volonte divine_ lviais tandi~ que la resignutioll dJ muslim repose sur]a convicrion que la volonte dAlJ8h est i lceuvre chac~ue instant dans moir~drc cvenenlent Ie lllusulman

dAuschwitz semble pedu toute volonte ct toute conscience (Agamben 2003 46) Dautr~s croiem que Ie termc semble provenir

de la posture Ijpique de detenus blottis stub jmnhes replies ala m-lniere orientale e visage riglJe con101e celle Jlun luasqueraquo

(ibid 47) DHutres cfQicnt entin qUe le termc lt faisait aHusion aux

((mouvernents rypiques des nlusulmans l1

CeS allees venues du bustej

du haur vers Ie bas [evoqnanrJ es ricuels de prierc islamiquesgt (Sofsh par Agamben 2003 47) Notre reference ce mot article

evoque tOllt simplement lbomme dont In force nterieure et physique a

de completenrent lriS(c Dans SUniVa(~t~s Esther Viujmvayo souteve egalenlent ccte

problenrique iecoute Ul Rwanda On been les gens quon

assez parle Ju genocide au ltllors laquoils peuvcnt pas suporter demendre LJ Je pouna dire en Ule phrase pourquoi on s est tu apres le genocide on sent(Jit qu)n derangeait [] COfnil1enCeS raconter rac()nter if nlcceptent decouer cr cle-st

terrihle (2005 20) 4 SU1VVanres vuawayo parle de ce corps qui [aliaie

mcttre a la mille standad laide de la machette Les hommcs rutsi ~1Vaient 18 reputatit)n detre trop granrh un ITletre qllatreAdngt~

dix devenait done line faute Les femmes dies commettaicnt dilVoir taHle ~es lnil1(c ph1t denorrnes hanches Avant de les [Uer it faUait June les raluener a une taille st~uldard I~

[J (2C05 90) 5 Couronne symbole de la matcrnite portee tradllmnellement

toures nvandaises

REF~RENCES BIBLIOGRAPHIQUES t-GAMHEK i2003j Ce ~rs[p Paris Rivaglgts BARTHES R [1980] Crambre Claire Note SHY la phowgmfJhie Gallimatd Souil coli Cabiers du cinema

DAYAN ROS~Nl-Hlgt [1007J AijJ~(bes de ta Shoal Sgtlvivre 1tn1Olgrer Paris CNRS ClEt-EnE G [1982) Palimpseste La au secord Paris

Sen colI LACAN J [(966) i9991 Paris Sed MUIAWAYO [(2004) 200SJ SiniVanes Rwanda Historre genocide Paris LAube tIJN lvi [1998 Rccits dL genocide S~mioriqHe lindicib[f)

Delachaux cr Niestjf~ R~RAJGWA R [2006] Genocide de ]a Renaissance SCHAEfFER] M [19871 Lrraglt

Paris SeiJil coIL laquoPoe-tique raquo)

B tI999] ethmqucJ Paris Dagorno SEMPRUl] [19941 L uu la tie Paris Gallimard SEMl]ANGA] [1998] fondaleurs du drane mandais Paris

Jl-ianHttan WAITRATcR R II003J SoniT du genocide Temoigrer pour abprerdrc J

Paris

VOlime rJITIlho 2 bull PRorEL

NOTES L Toute reference it cet ouvrage rapporte t~dition de 2006 aux

Pre~8(5 de la Rcnai5sancc Le3 t(~ferences paginales seront clesormais conne-euros dansle texte 1 precedees du de lceuvrlt entre rarenth(ses 2 Le terme fv1u~e1rn(1nn laquo11usuhnan gtI prend origjnc dans

Ie caIUp dtuschvitz dOl ii 6l est prop8ge clautres camps Les

sont diversifies sur sa vraie definition Pour certains lti il reno1c au sens littera1 du terT1e aabe mHsUn ql~i sigrdfie cellii qLt sc sou met sans reserve ~l la volonte divine_ lviais tandi~ que la resignutioll dJ muslim repose sur]a convicrion que la volonte dAlJ8h est i lceuvre chac~ue instant dans moir~drc cvenenlent Ie lllusulman

dAuschwitz semble pedu toute volonte ct toute conscience (Agamben 2003 46) Dautr~s croiem que Ie termc semble provenir

de la posture Ijpique de detenus blottis stub jmnhes replies ala m-lniere orientale e visage riglJe con101e celle Jlun luasqueraquo

(ibid 47) DHutres cfQicnt entin qUe le termc lt faisait aHusion aux

((mouvernents rypiques des nlusulmans l1

CeS allees venues du bustej

du haur vers Ie bas [evoqnanrJ es ricuels de prierc islamiquesgt (Sofsh par Agamben 2003 47) Notre reference ce mot article

evoque tOllt simplement lbomme dont In force nterieure et physique a

de completenrent lriS(c Dans SUniVa(~t~s Esther Viujmvayo souteve egalenlent ccte

problenrique iecoute Ul Rwanda On been les gens quon

assez parle Ju genocide au ltllors laquoils peuvcnt pas suporter demendre LJ Je pouna dire en Ule phrase pourquoi on s est tu apres le genocide on sent(Jit qu)n derangeait [] COfnil1enCeS raconter rac()nter if nlcceptent decouer cr cle-st

terrihle (2005 20) 4 SU1VVanres vuawayo parle de ce corps qui [aliaie

mcttre a la mille standad laide de la machette Les hommcs rutsi ~1Vaient 18 reputatit)n detre trop granrh un ITletre qllatreAdngt~

dix devenait done line faute Les femmes dies commettaicnt dilVoir taHle ~es lnil1(c ph1t denorrnes hanches Avant de les [Uer it faUait June les raluener a une taille st~uldard I~

[J (2C05 90) 5 Couronne symbole de la matcrnite portee tradllmnellement

toures nvandaises

REF~RENCES BIBLIOGRAPHIQUES t-GAMHEK i2003j Ce ~rs[p Paris Rivaglgts BARTHES R [1980] Crambre Claire Note SHY la phowgmfJhie Gallimatd Souil coli Cabiers du cinema

DAYAN ROS~Nl-Hlgt [1007J AijJ~(bes de ta Shoal Sgtlvivre 1tn1Olgrer Paris CNRS ClEt-EnE G [1982) Palimpseste La au secord Paris

Sen colI LACAN J [(966) i9991 Paris Sed MUIAWAYO [(2004) 200SJ SiniVanes Rwanda Historre genocide Paris LAube tIJN lvi [1998 Rccits dL genocide S~mioriqHe lindicib[f)

Delachaux cr Niestjf~ R~RAJGWA R [2006] Genocide de ]a Renaissance SCHAEfFER] M [19871 Lrraglt

Paris SeiJil coIL laquoPoe-tique raquo)

B tI999] ethmqucJ Paris Dagorno SEMPRUl] [19941 L uu la tie Paris Gallimard SEMl]ANGA] [1998] fondaleurs du drane mandais Paris

Jl-ianHttan WAITRATcR R II003J SoniT du genocide Temoigrer pour abprerdrc J

Paris

VOlime rJITIlho 2 bull PRorEL