\"La personne amputée dans les médias : quand l'ambiguité des images bouleverse la compréhension...

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La personne amputée dans les médias : quand l'ambiguité des images bouleverse la compréhension du handicap et des technologies de compensation/restauration. 4ème Conférence annuelle ALTER Interroger les sociétés contemporaines à la lumière du handicap Paris – France, 2-3 juillet 2015 Valentine Gourinat UMR 7367 Dynamiques Européennes, CNRS-Université de Strasbourg; Unité d'éthique du CHUV, Université de Lausanne Nathanaël Jarrassé Equipe AGATHE (INSERM U- 1150), Institut des Systèmes Intelligents et de Robotique (ISIR- UMR 7222), CNRS - Univ. Pierre et Marie Curie, Paris VI

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La personne amputée dans les médias : quand l'ambiguité des imagesbouleverse la compréhension du handicap et des technologies de

compensation/restauration.

4ème Conférence annuelle ALTERInterroger les sociétés contemporaines à la

lumière du handicapParis – France, 2-3 juillet 2015

Valentine Gourinat

UMR 7367 DynamiquesEuropéennes, CNRS-Université de

Strasbourg; Unité d'éthique duCHUV, Université de Lausanne

Nathanaël Jarrassé

Equipe AGATHE (INSERM U-1150), Institut des Systèmes

Intelligents et de Robotique (ISIR-UMR 7222), CNRS - Univ. Pierre et

Marie Curie, Paris VI

2 juillet 2015Gourinat V., Jarrassé N. 2

Avant-propos

Une étude tirée d'uneobservation mixtePrégnance du terrain.

Deux champs disciplinaires endialogue : L'ingénierie

prothétique et les scienceshumaines et sociales.

Observations de terrain menéesau sein de l'IRR de Nancy et de

l'IURC de Strasbourg.

Recherches fondamentalesmenées dans le cadre d'unethèse en éthique et d'un projetDéfi-SENS/ « Mission pourl'interdisciplinarité du CNRS »(robotique/neurophysiologie)

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Introduction :Un décalage entre les images de l'appareillage

et la réalité de l'amputation

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Introduction : Un décalage entre les images de l'appareillage et laréalité de l'amputation.

Une fantasmagorie des corps appareillés

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Une fantasmagorie des corps appareillés :Des amputés peu représentatifs

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Une fantasmagorie des corps appareillés :Des prothèses spécifiques et peu communes

2 juillet 2015Gourinat V., Jarrassé N. 7

Une fantasmagorie des corps appareillés :Des œuvres de fiction qui marquent les esprits

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Un décalage entre les images de l'appareillage et la réalité del'amputation

Une réalité plus modeste et pragmatique

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Une réalité plus modeste et pragmatiqueDes profils de patients bien différents

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Une réalité plus modeste et pragmatiqueDes patients essentiellement âgés et malades

Âge moyen des patientsamputés : 69 ans

Plus d'un tiers des amputés aplus de 70 ans.

Amputations mineures : prèsde 60 %

Amputations du membresupérieur : entre 10 % et 15 %

Amputations liées à unaccident : environ 10 %

Autres causes (cancer, malformation congénitale,etc.) : moins de 10 %

Amputations liées à unemaladie vasculaire : plusde 80 %,

dont 50 % relatives au diabète.

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Une réalité plus modeste et pragmatiqueDes dispositifs prothétiques plus simples et modestes

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Une réalité plus modeste et pragmatiqueDes dispositifs prothétiques plus simples et modestes

Beaucoup de prothèsesesthétiques (prothèsesinertes), et de prothèsesmécaniques (prothèsespassives).

Les prothèses myoélectriquesou robotisées (prothèsesactives) sont en réalitéminoritaires (sauf en MS)

Les prothèses sont prescritesen fonction du profil dupatient, de ses capacités,de son projet de vie, etc.

Elles sont donc calées sur le« paysage type » despatients (capacitésréduites, âge avancé, etc).

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Une image déformée par des données malcomprises.

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Une image déformée par des données mal comprises

La question du rapport au temps

La prothèse dans l'imaginaire médiatique : un « produit fini »,à l'usage abouti et détaché de toute notion temporelle.

Et pourtant...

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La question du rapport au temps

Temps de l'apprentissage :

Une démarche longue etcomplexe, jamais achevée.

Temps de l'usage :

Une utilisation limitée dans ladurée et dans le temps.

- Pas de port permanentpossible.

- Obsolescence du matériel.

- Vieillissement du corps.

Définition des combinaisons posturales (Touch Bionics)

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Une image déformée par des données mal comprises

Une conception partielle et orientée de laperformance

La prothèse apparaît efficiente, porteuse d'un pouvoirperformatif sur le corps (efficacité « en soi », désincarnée).

Et pourtant...

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Une conception partielle et orientée de la performanceUne performance situationnelle et toujours dépendante des

capacités corporelles initiales.

La prothèse est limitée à desfonctions précises et situées, làoù le corps est polyvalent.Efficacité toujours relative etsituationnelle.

L'appareillage n'a d'effet que si lecorps lui en donne la ressource.Ne fonctionne pas en soi.

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Quelles conséquences sur le patient et lemonde de l'appareillage ?

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Quelles conséquences sur le patient et le monde de l'appareillage ?

La problématique des influences.

Ces images répétées et ces conceptions mal comprises sontprogressivement intégrées par des acteurs indirects (voire

directs) du milieu.

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La problématique des influencesL'influence sur la recherche fondamentale

Exemple page appel financement UE : “FET Open funds projects on new ideas for radically new future technologies.“

- Accélération temporelle du rythme de la recherche- Réponse à des attentes de l'imaginaire collectif

- Production culturelle > production industrielle- Influence jusqu'aux politiques de recherche et financement- Propositions scientifiques rejoignent productions culturelles

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La problématique des influencesQuels impacts dans les usages et les applications ?

un objet de laboratoire… qui reste au laboratoire un symbole de l'innovation… déconnecté du besoin

Des événements... «loin» des patients

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Quelles conséquences sur le patient et le monde de l'appareillage ?

Du côté des patients ?

La plupart des patients subit l'influence de ces conceptions surles autres (préjugés des interlocuteurs ou du grand public).

Certains patients, par manque d'information, sont eux-mêmeinfluencés par cet imaginaire.

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Des attentes déçues.Espoirs insatisfaits, choc de la réalité.

Une envie de bénéficierd'appareillages qui ne sontpas toujours adaptés(exemple du nomadisme).

Une perspective de mobilitéqui ne peut être atteintepar tout un chacun(« douche froide » à lasortie du CRF).

Un usage quotidien difficile etrigoureux qui décourage( problématique de la« prothèse placard »).

Une difficulté d'apprentissagesource de souffrance et defrustration.

2 juillet 2015Gourinat V., Jarrassé N. 24

Que tout cela nous dit-il sur le corps et lehandicap dans le monde contemporain ?

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Le corps et le handicap dans le monde contemporain.Sur-estimation des technologies et sous-estimation du corps

handicapé.

Scientisme contemporain,mythe technicien, etenchantementtechnologique.

Le dispositif d'appareillageapparaît comme« magique », autonome,désincarné.

Réductionnisme corporeldisparition du corps.

Un handicap simplifié etdésubjectivé. Le corpshandicapé est éludé, il est« avalé » par le dispositiftechnique.

La fascination technologique et l'adieu au corps

2 juillet 2015Gourinat V., Jarrassé N. 26

Le corps et le handicap dans le monde contemporain.Le corps handicapé, toujours et encore objet de craintes et de

fantasmes.

Une persistance du monstrueux

La condition de la personne amputée appareillée cristallise etexacerbe toutes les ambiguïtés et les questions que soulève le

corps hybride et hors-normes.

2 juillet 2015Gourinat V., Jarrassé N. 27

Une persistance du monstrueux

Double clivage :

1) Handicapé ≠ « une personne comme tout les autres »

2) Homme bionique ≠ « une personne comme les autres »

Comment réussir à s'intégrer pleinement lorsqu'on est mis en marge detoute part ?

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Ouvertures

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Se réapproprier les préjugés pour mieux penser la condition descorps handicapés.

Une figure de la liminarité, del'hybridité et de l'effacementdes limites et des genres.

Vient questionner le rapport aucorps, aux techniques, auxnormes et à l'identité.

La personne amputéeappareillée est finalementun cyborg au sensphilosophique et non ausens physique oufantasmagorique.

Le cyborg, une figure à penser les dispositifs d'appareillage descorps handicapés dans le monde contemporain ?

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Pour une reconsidération de la personne et du corps handicapé danssa complexité et sa subjectivité :

« Le dispositif, c'est bien ; la personne, c'est mieux ! »

Revenir aux problématiques réelles, au plus proche desbesoins et du ressenti du patient.

Intégration, considération, modération (à l'opposé de lacouverture médiatique actuelle => catégorisation,

mécompréhension, fascination).

2 juillet 2015Gourinat V., Jarrassé N. 31

Merci pour votre attention !