Interprétation(s) des verbes anticausatifs en grec et en français: liens entre fréquence et...

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INTERPRéTATION(S) DES VERBES ANTICAUSATIFS EN GREC ET EN FRANçAIS: LIENS ENTRE FRéQUENCE ET DONNéES EMPIRIQUES Georgia Fotiadou et Hélène Vassiliadou De Boeck Supérieur | Travaux de linguistique 2011/1 - n°62 pages 99 127 ISSN 0082-6049 Article disponible en ligne l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-travaux-de-linguistique-2011-1-page-99.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Fotiadou Georgia et Vassiliadou Hélène, Interprétation(s) des verbes anticausatifs en grec et en français : liens entre fréquence et données empiriques, Travaux de linguistique, 2011/1 n°62, p. 99-127. DOI : 10.3917/tl.062.0099 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution ectronique Cairn.info pour De Boeck Supérieur. De Boeck Supérieur. Tous droits rerv pour tous pays. La reproduction ou reprentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autoris que dans les limites des conditions gales d'utilisation du site ou, le cas hnt, des conditions gales de la licence souscrite par votre ablissement. Toute autre reproduction ou reprentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manie que ce soit, est interdite sauf accord prlable et rit de l'iteur, en dehors des cas prus par la lislation en vigueur en France. Il est prisque son stockage dans une base de donns est alement interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 31.39.188.105 - 28/02/2014 00h14. © De Boeck Supérieur Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 31.39.188.105 - 28/02/2014 00h14. © De Boeck Supérieur

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INTERPRéTATION(S) DES VERBES ANTICAUSATIFS EN GREC ET ENFRANçAIS: LIENS ENTRE FRéQUENCE ET DONNéES EMPIRIQUES Georgia Fotiadou et Hélène Vassiliadou De Boeck Supérieur | Travaux de linguistique 2011/1 - n°62pages 99 127

ISSN 0082-6049

Article disponible en ligne l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-travaux-de-linguistique-2011-1-page-99.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Fotiadou Georgia et Vassiliadou Hélène, Interprétation(s) des verbes anticausatifs en grec et en français : liens entre

fréquence et données empiriques,

Travaux de linguistique, 2011/1 n°62, p. 99-127. DOI : 10.3917/tl.062.0099

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interprétation(s) des verbes anticausatifs en grec et en français :

Liens entre fréquence et données empiriques

georgia Fotiadou *

hélène VassiLiadou **

Introduction1.

L’objet de cet article est de traiter de l’anticausativité 1 en grec et en français sous un seul angle d’attaque qui consiste à confronter le rôle de la morpho-logie verbale et la nature du sujet syntaxique [± animé] aux préférences interprétatives des locuteurs natifs. Pour ce faire, notre analyse se fonde sur des données de fréquence issues de différents corpus et sur des données empiriques obtenues à partir d’une expérience psycholinguistique dite de compréhension, notre but étant d’examiner la validité de ces deux appro-ches méthodologiques et de voir si leurs résultats concordent.

Dans cette perspective, nous décrirons rapidement le système de la voix en grec et en français afin de mieux cerner leurs différences et/ou similitudes et nous discuterons les enjeux théoriques de l’anticausativité. Chemin faisant, nous exposerons notre protocole d’étude, à savoir le mon-tage du dispositif expérimental et l’utilisation du corpus. Les résultats, leur analyse ainsi que des pistes d’investigation supplémentaires seront pré-sentés dans la dernière partie de cet article, qui constitue la première étape d’un travail de plus longue haleine.

Nous soulignons par ailleurs que notre contribution, en raison de la masse des données chiffrées, peut soulever des questions quant aux limites de la méthode utilisée pour l’étayage quantitatif et qualitatif des résultats, mais ceci est un débat qui ne prendra pas place ici.

* Université Aristote de Thessalonique** Université de Strasbourg, LiLPa / Scolia

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L’anticausativité : bref aperçu des systèmes 2. verbaux grec / français et enjeux théoriques

Signalons d’emblée que la notion de voix en grec concerne la morphologie verbale et ne correspond pas toujours à celle plus sémantique de diathèse qui décrit le rapport du verbe avec le sujet syntaxique. Le verbe grec a un système morphologique flexionnel qui peut être actif (ACT) ou non actif (NACT) 2, comme le montrent les exemples ci-dessous :

[1] a. To pedhi pleni le enfant lave

-ACT

‘L’enfant lave’

b. To pedhi plenete le enfant lave

-NACT

‘L’enfant se lave / est lavé (par quelqu’un)’

c. O dhromos plenete la route lave

-NACT

‘La route se lave (sous l’effet de la pluie) / est lavée (par quelqu’un)’

La plupart des verbes à morphologie active (ACT) ne peuvent être inter-prétés que transitivement [1a], tandis que ceux à morphologie non active (NACT) peuvent recevoir différentes interprétations selon la nature [±ani-mée] du sujet syntaxique : passive / réfléchie [1b] ou passive / anticausative [1c]. Ces ambiguïtés sont levées en contexte.

Toutefois, les verbes à morphologie active ne s’utilisent pas toujours transitivement (ou encore, pour le grec, de manière causative), mais peuvent donner lieu à des ambiguïtés (du moins temporairement) du type [2a]-[2b] :

[2] a. To koritsi lijise to sidhero / apo ta vasana / jia na di kalitera. la fille plie

-P.C-ACT le fer / par les soucis / pour voir mieux

‘La fille a plié le fer / s’est pliée / écrasée sous le poids des soucis / s’est pliée / s’est penchée pour mieux voir’

b. To dhentro lijise to frahti / apo ton aera. le arbre plie

-P.C-ACT la haie / sous l’effet du vent

‘L’arbre a fait plier la haie / s’est plié sous l’effet du vent’

Le verbe lijizi (‘plieACT’) peut être aussi bien transitif qu’anticausatif, s’il est suivi d’un SP en par-cause, ou en emploi seul avec un sujet animé [2a]. Il peut également être inergatif (et être suivi d’une subordonnée de but) 3. En [2b], c’est-à-dire avec un sujet inanimé, ce type de verbes ne peut recevoir que deux interprétations, l’une transitive, l’autre anticausative. L’interprétation anticausative peut être en somme rendue tantôt par des verbes actifs tantôt par des verbes non actifs. Ainsi, parmi les anticausatifs,

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il existe, d’une part, des verbes qui véhiculent cette interprétation unique-ment en ACT (spai ‘casser

ACT’ vs *spazete ‘casser

NACT’) et, d’autre part, des

verbes qui l’expriment via les deux formes ACT et NACT. Ces derniers sont généralement connus sous l’étiquette de ditypia (litt. ‘de deux types’, Theophanopoulou-Kontou, 2000) :

[3] to forema lerose / lerothike la robe salit

-ACT-NACT

‘la robe (se) salit / est salie’

Ce recouvrement de formes et d’interprétations s’observe également en français, même si le système verbal n’est pas du même type. En effet, le français possède deux voix à proprement parler auxquelles on pourrait ajouter une troisième, la voix pronominale qu’on retrouve souvent dans la littérature sous l’étiquette de voix moyenne. Toutefois, l’intégration des tours pronominaux dans les catégories du verbe ne va pas de soi, car « si le tour pronominal est caractérisé par l’association du pronom réflexif et du verbe comme lexème (…) », on devrait plutôt ranger ces structures dans le lexique et non dans la syntaxe (Melis, 1990 : 139). Suivant Melis (1990 : 140), si on accepte que le tour pronominal est une propriété lexicale du verbe 4, deux solutions se présentent : soit ces tours « entre(nt) dans une série d’oppositions, principalement avec l’actif et le passif » et peuvent alors être regroupés dans le paradigme des voix, soit, on considère qu’il y a une différence « entre le marquage morphologique et le marquage syn-taxique » et que les tours pronominaux font partie des diathèses 5. Le pro-blème est connu et il émane du fait que le paradigme de la voix en français est assez instable et, corollairement, se-Verbe (indice du tour pronominal) peut prendre plusieurs interprétations (cf. Boons, Guillet & Leclère, 1976 ; Desclés & Guentchéva, 1993 ; Zribi-Hertz, 1987, 2008 ; Krötsch & Öster-reicher, 2002). Ainsi, le seul trait constant dans les exemples suivants est la présence du pronom dit réflexif :

[4] Il s’aperçoit dans la glace (réfléchi)[5] Ils s’aperçoivent sur la place (réciproque)[6] La ville s’aperçoit de loin / Le pain se mange à la main (passif)[7] Il s’aperçoit de son erreur (neutre / subjectif)[8] Cette nappe se nettoie facilement (médiopassif)[9] La porte se ferme (anticausatif)

En ce qui concerne l’interprétation anticausative en français, langue qui privilégierait selon Grimshaw (1982) et Haspelmath (1993) ce type de constructions, elle peut se manifester par le biais des formes suivantes :

[10] a. La clé est cassée / la clé s’est cassée (être pp) b. La clé se casse (se V) c. La clé casse (forme active / verbes symétriques) 6.

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Les tours anticausatifs français se confondent souvent avec le passif réfléchi 7, la différence étant que dans le premier cas l’agent disparaît com-plètement [11], tandis que dans le second il reste sémantiquement actif [12], comme le montre le test suivant de Herslund (2000 : 72) :

[11] Les vitres se brisent (*avec enthousiasme)[12] Les vitres (ça) se brise(nt) (avec enthousiasme)

On observe alors que l’anticausativité peut être rendue tant par des for-mes verbales actives que passives ou pronominales (voir surtout les verbes symétriques ou à renversement). Les structures de ce type sont souvent ambiguës momentanément et seul le recours à d’autres facteurs (contex-tuels, sémantiques, etc.) peut dissiper l’hésitation des locuteurs face à telle ou telle lecture, comme c’est également le cas du grec.

En somme, pour illustrer l’anticausativité, le français distingue trois formes ou ‘diathèses’ verbales (active, passive, réflexive), tandis que le grec n’en distingue que deux (active et non active). Toutefois, le problème reste le même pour les deux langues, puisqu’elles utilisent souvent une même forme pour véhiculer des lectures variées. En outre, même s’il existe plusieurs tests 8, il reste assez difficile d’identifier les verbes inaccusatifs. Pour notre part, il ne s’agit pas d’élaborer une typologie des structures anti-causatives en français et en grec ; mission quasi impossible, semble-t-il, puisque les critères (syntaxiques, sémantiques, discursifs) utilisés à cette fin sont hétérogènes d’une part, et ne s’appliquent pas à tous les verbes concernés par l’interprétation anticausative, d’autre part.

On l’aura compris, les tours anticausatifs et/ou inaccusatifs ont donné du fil à retordre à bon nombre de linguistes d’obédiences théoriques diverses 9, sans aboutir à un véritable consensus ni au niveau terminologi-que 10 ni au niveau de leur statut sémantico-syntaxique. Il est par ailleurs difficile de parler d’une classe de verbes anticausatifs, d’où l’utilisation fré-quente de la tournure interprétation anticausative. Il ressort toutefois assez clairement qu’on peut considérer comme anticausatives les structures qui possèdent en surface un seul argument lexicalisé en position de sujet (cf. Perlmutter, 1978 ; Burzio, 1986 ; Levin & Rappaport-Hovav, 1995), ce qui est le cas des réfléchis, des passifs ainsi que des inergatifs. Toutefois, les constructions inaccusatives prendront dans leur structure profonde un objet et non un sujet et sont illustrées dans la littérature anglo-saxonne par la for-mule [VP V NP] vs NP [VP V], pour les inergatifs. En français, nous trou-vons la relation d’équivalence distributionnelle SN1 V SN2 → SN2 (se) V. L’hypothèse inaccusative, dans certaines théories, met en somme l’accent sur deux points importants : a) les verbes intransitifs ne forment pas un ensemble sémantiquement homogène (on distingue les verbes inaccusatifs et les verbes inergatifs et ce sont les premiers qui se prêtent à l’alternance

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causative) ; b) le sens du verbe peut constituer un facteur déterminant pour la structure syntaxique de la phrase (cf. Novakova, 2006).

Pour notre part, nous soutenons à l’instar des défenseurs de l’inac-cusativité (Hale & Keyser, 1993 ; Levin & Rappaport-Hovav, 1995) et plus particulièrement de Tsimpli (2006) que les constructions inaccusatives en ACT (voir ex. [3]) prendront dans leur structure profonde un objet (argu-ment interne) et non un sujet (l’argument externe est supprimé), comme l’illustre [13] 11 :

[13] [TP

DP [vP

lerose [VP

[V<θ> ]]]]

En ce qui concerne les formes non-actives (NACT), l’analyse syntaxique de Tsimpli (2006 : 23) stipule que seules les structures réfléchies ont une dérivation différente de celles non-réfléchies. Et suivant la thèse de Man-zini & Roussou (2000), nous considérons que les rôles thématiques sont des traits qui peuvent être attirés par un syntagme déterminant (DP-clitic) ou par un affixe ; dans la même veine, la tête Voix, en NACT, apparaît en tant que trait du petit v (light v ‘prédicat léger’ 12 ; cf. Alexiadou & Anagnos-topoulou, 2004 ; Labelle et Doron, 2010). Il s’ensuit que le morphème de la NACT a la propriété d’attirer le θ-trait (interne ou externe) et de donner ainsi lieu à une dérivation soit réfléchie soit non-réfléchie. Dans le premier cas, le SDét, en position de sujet, est un vrai sujet, mais il n’en va pas de même dans le second cas où il s’agit, comme le montrent [14] et [15], d’un sujet dérivé qui endosse un θ-trait interne :

[14] [TP

DP [v/Voix

v/Voix <θ1>

[VP

V<θ2>

]]] Passive / Inaccusative / Moyenne

[15] [v/VoixP

DP [v/Voix <θ1>

v/Voix [VP

V<θ2>

]]] Reflexive (Tsimpli, 2006 : 24)

Toutefois, comme la Voix ne possède pas de traits nominaux (cas, genre, personne, etc.), elle ne fait qu’absorber le θ-trait sans le spécifier ; elle ouvre ainsi la voie aux trois lectures disponibles dans la morphologie, à savoir la réflexive, l’anticausative et la passive. Nous postulons à l’instar de Tsimpli (2006) que ces ambiguïtés permises par la grammaire peuvent être réso-lues dans un deuxième temps au niveau des interfaces lexique-grammaire, pragmatique-grammaire, connaissances encyclopédiques-grammaire ou encore grâce à la fréquence d’apparition de telle structure avec telle ou telle lecture. La plupart des travaux sur ce sujet évoquent également l’existence des facteurs pouvant aider à la désambiguïsation interprétative, mais ces facteurs, contrairement à ce que nous avons soutenu ci-dessus, surviennent directement dans les dérivations syntaxiques et apparaissent dans les arbres syntaxiques. Parmi les facteurs les plus cités, on trouve l’aspect verbal, la télicité, le caractère intentionnel (agentif) ou non intentionnel (causal) du premier actant (argument externe), l’état mental (± m), la causation (± c) (cf.

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Borer, 1991, 2004 ; Sorace, 2004 ; Van Hout, 2004 ; Rheinhart & Siloni, 2005 ; Kallulli, 2006 ; Zribi-Hertz, 2008).

Conformément à ce que nous avons annoncé dans l’introduction, nous considérerons pour les besoins de cette étude uniquement le rôle de l’animation du sujet en tant que trait sémantique du référent du SN sujet dans les choix interprétatifs des locuteurs parmi les lectures fournies par les deux dérivations syntaxiques données sous [14] et [15].

Protocole d’étude et hypothèses de travail3.

Comme nous l’avons annoncé dans l’introduction, deux types de recherche ont été effectués : on a d’abord mis en place un dispositif expérimental appelé SPM (Sentence Picture Matching = Association d’images et de pro-positions) dans le but d’obtenir des informations sur la manière dont les locuteurs natifs interprètent différentes constructions verbales. Ce SPM a été créé pour les besoins d’une recherche sur l’acquisition du grec (L1) afin de tester l’interdépendance entre des préférences interprétatives (passive, réfléchie, anticausative), la morphologie verbale et la nature [± animée] du sujet syntaxique 13 ; il a ensuite été adapté en langue française.

En parallèle, nous avons eu recours aux corpus (écrits et oraux) afin d’identifier la relation qu’entretiennent la fréquence d’apparition des formes verbales et le pourcentage d’interprétations obtenu. Pour ce faire, nous avons eu recours uniquement aux formes verbales ACT/NACT pour le grec et (se)ACT ou être + participe passé pour le français sans prendre en compte les traits sémantiques des verbes examinés (analyse grossière dite coarse grained). Puis, nous avons calculé le pourcentage d’interpré-tation de chaque verbe examiné en considérant la morphologie verbale et la nature du sujet [± animé] dans le but d’effectuer une analyse plus fine (fine grained). Les théories fondées sur l’usage (MacDonald et al., 1994 ; Bybee, 1995 ; Bybee & Hopper, 2001 ; Tomasello, 2003) analysent la fré-quence des expressions très précises (cf. tokens et îlots verbaux). Notre recherche, parce qu’elle traite d’un sujet syntaxique (considéré comme un phénomène abstrait), a recours à des critères plus généraux et universels tels que la morphologie verbale et la nature du sujet. Nous incluons alors la notion de l’animation du sujet au titre de trait qui aide à caractériser une entité en tant qu’Agent (animé) ou Thème (inanimé) (Dowty, 2003). De ce fait, les deux analyses effectuées (‘grossière’ vs ‘fine’) ont été conçues en tant qu’appareils descriptifs rendant compte de l’émergence des formes à partir des régularités et constituant des observables linguistiques à partir des données empiriques issues de l’usage.

À l’instar des théories sur la fréquence, nous faisons l’hypothèse que les préférences interprétatives issues du SPM coïncident avec les fréquen-

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ces obtenues à partir des corpus, soit au niveau général des formes verba-les (en dehors des traits sémantiques des verbes et de la nature du sujet ; analyse grossière), soit au niveau des combinaisons spécifiques de certains verbes (analyse fine), soit aux deux niveaux.

Toutefois, la corrélation entre les données empiriques et la fréquence d’apparition de certaines interprétations se fait en lien avec l’interdépen-dance de la morphologie verbale et de la nature du sujet. Il arrive alors que, dans certains cas de figure, le caractère animé du sujet augmente la fréquence de l’interprétation réfléchie aux dépens d’autres formes verbales (parmi les NACT). De plus, l’interprétation anticausative est aussi fréquente que l’interprétation passive dans les phrases à sujet inanimé, exception faite de quelques variations individuelles pour certains verbes. La tendance esquissée quant aux préférences interprétatives des verbes ne signifie pas pour autant que la fréquence se place au-dessus de la grammaire : par exem-ple, des recherches sur l’acquisition ont fait ressortir des divergences entre la grammaire des enfants et celle des adultes dans les cas de résolution des ambiguïtés. Ces divergences ont été attribuées, non pas à une défaillance grammaticale de la part des enfants, mais plutôt à leur manque de connais-sances pragmatiques et encyclopédiques.

Le dispositif expérimental 4. SPM en grec et en français : méthodologie et résultats

Pour les besoins de l’expérimentation en grec, nous avons d’abord créé 40 phrases avec vingt verbes véhiculant plusieurs interprétations plus ou moins acceptables selon les cas. Les verbes utilisés appartiennent à l’une des quatre classes généralement distinguées dans la littérature :

a cinq verbes appelés anticausatifs employés tant en ACT que NACT (alternance optionnelle) : htipai

ACT/NACT (‘casser’, ‘cogner’, ‘frapper’),

tendoniACT/NACT

(‘tendre’, ‘étirer’), diploniACT/NACT

(‘plier’), leroniACT/NACT

(‘salir’), tripai

ACT/NACT (‘percer’,‘piquer’). Ces verbes étaient accom-

pagnés d’un sujet inanimé quand ils se présentaient sous leur forme active, alors qu’ils pouvaient prendre un sujet animé et/ou inanimé en NACT. Ces derniers répondent d’ailleurs aux caractéristiques des verbes de ditypia mentionnés supra (quinze phrases au total) ;

b cinq verbes anticausatifs toujours en ACT et avec un sujet inanimé : spai (‘(se) casser’), lijizi (‘(se) plier’), lioni (‘(se) fondre’), klini (‘(se) fermer’), stegnoni (‘(se) sécher’) (cinq phrases) ;

c cinq verbes dits réfléchis en ACT et/ou NACT, comme dinete (‘s’ha-biller’), skoupizete (‘s’essuyer’), plenete (‘se laver’), ksirizete (‘se raser’), htenizete (‘se brosser’) (dix phrases) ;

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d cinq verbes d’activité toujours en NACT : krivete, (‘cacher-NACT

’), vafete (‘maquiller

-NACT’, ‘peindre

-NACT’), vrehete (‘mouiller

-NACT’),

stolizete (‘décorer-NACT

’, ‘se mettre X’), metaferete (‘emporter-NACT

’) présentés avec un sujet animé, puis avec un sujet inanimé (dix phra-ses).

Nous avons exposé ensuite aux sujets participants une série d’images (cha-que ensemble contenait trois images) : après avoir énoncé une des quarante phrases, il leur était demandé de l’associer à l’image qui lui correspondait le mieux. Les images ont été dessinées de telle sorte que toutes les interpré-tations possibles soient représentées ; chaque série comprenait une image dite non-target (‘non-cible’), c’est-à-dire correspondant à une réponse agrammaticale dans le sens où un verbe ACT, par exemple, ne pourrait pas recevoir une interprétation passive. Ainsi, les phrases comportant des verbes anticausatifs (a) et des verbes d’activités + inanimé / NACT ont été associées à des images illustrant des interprétations anticausative, passive et transitive (non-target) ; les anticausatifs (classes a et b + inanimé ACT) à des images exprimant l’anticausativité, la transitivité et la passivation (non-target) ; les anticausatifs (a) et les verbes d’activités + animé / NACT à des images correspondant à une interprétation réfléchie, passive et anti-causative. Et, enfin, la classe des réfléchis a été associée à des images pou-vant donner lieu à une lecture réfléchie, passive ou transitive (non-target), quand ils étaient NACT et accompagnés d’un sujet animé et à une lecture réfléchie (non-target), passive (non-target) ou transitive, quand ils étaient ACT et précédés d’un sujet animé :

En ce qui concerne l’adaptation de l’expérimentation en français, nous avons utilisé globalement les mêmes verbes (ou, pour être plus exac-tes, leur traduction en sachant que dans beaucoup de cas de figure un verbe grec pouvait correspondre à deux verbes distincts en français) 14 en modi-fiant alors légèrement le classement proposé supra comme suit :

Image 1 To pedhi krivete-nact

L’enfant se cache

Image 2 To kouti krivete-nact

La boîte est cachée

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Interprétation(s) des verbes anticausatifs en grec et en français

a quatre verbes (avec sujet inanimé) pouvant déclencher l’interpréta-tion anticausative par le biais de plusieurs formes : seV, être + par-ticipe ou en voix active pour les verbes symétriques (se tend / est tendu, se perce / est percé, (se) casse / est cassé(e), (se) plie / est plié(e)). Toutefois, on a dû ajouter dans cette classe encore trois ver-bes (s’étirer, se piquer, se cogner) pour des raisons lexicales : le verbe tendoni (‘tendre’), par exemple, se traduit en français par (se) tendre quand le sujet est inanimé, mais par s’étirer quand le sujet est animé (quinze phrases) ;

b quatre verbes (avec sujet inanimé) véhiculant l’interprétation anti-causative préférentiellement sous une seule forme : soit en voix active (fondre, sécher), soit avec le clitique se (se fermer) soit avec être + pp (salir) (quatre phrases) ;

c cinq verbes réfléchis ACT / NACT (s’essuyer, s’habiller, se laver, se raser, se brosser) toujours employés avec un sujet animé (dix phrases) ;

d cinq verbes d’activité présentés avec la forme être + pp, quand le sujet était inanimé (mouiller, décorer, emporter, cacher, peindre) et avec le clitique se (à l’exception du verbe emporter), quand le sujet était animé (se mouiller, se mettre 15, se cacher, se maquiller 16) (dix phrases).

On notera également que la lecture transitive illustrée sur une des trois images présentées (Graphes 6 et 7) a souvent été interprétée, en français, comme un état résultatif : quand on a montré, par exemple, les trois images correspondant à la phrase la chaise est pliée / la chaise se plie, les sujets ont souvent montré l’image où « une chaise se pliait en coinçant la nappe d’une table ». Les autres options illustraient (a) une femme qui plie une chaise (l’agent est présent ; pass.) et (b) une chaise qui se plie en tombant (antic). Toutefois, quand les verbes étaient en voix active (la chaise plie / la clé casse / la bougie fond / la nappe sèche), les réponses pointant une lecture transitive exprimaient bien une action du sujet sur l’objet (cf. une bougie qui faisait fondre un sachet en plastique).

Il est enfin important de signaler que l’expérience s’est déroulée en plusieurs séances afin d’éviter que les sujets participants (25 Grecs et 20 Français, hommes et femmes entre 20 et 40 ans) ne développent des stra-tégies interprétatives pouvant biaiser les résultats. Ces derniers ont ensuite été comparés aux valeurs de fréquence que reçoivent dans les corpus les différentes lectures associées aux verbes étudiés.

Afin d’en faciliter la lecture, les résultats qui suivent sont d’abord présentés selon la nature [± animé] du sujet, puis selon la morphologie de chaque classe verbale que nous avons distinguée supra.

Le premier graphe concerne les verbes grecs dont le sujet est animé et la morphologie NACT :

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Graphe 1 : Distribution des interprétations NACT-animé

On observe que les locuteurs grecs interprètent ces verbes comme étant des réfléchis, et cela indépendamment de leur classe d’appartenance (antic : 75,2%, réfl : 98,4%, activ : 68%). Ces premiers résultats confirment la thèse de Tsimpli (2006) selon laquelle le trait sémantique [± animé] du sujet induit une préférence pour l’interprétation réfléchie. Par ailleurs, d’après la répartition des effectifs suivant les interprétations des candidats (antic. vs réfl. : χ2 =40,008, p<0,001 et activ. vs réfl. : χ2 =24,009, p<0,001), on remarque que, contrairement aux verbes des classes a et d, la classe des réfléchis semble être très lexicalisée en grec 17.

Le deuxième graphe porte sur les verbes à sujet inanimé qui sont normalement de voix active, mais qui, selon les contextes, peuvent revêtir la forme NACT (classe b) ou pas (classe a) :

Graphe 2 : Distribution des interprétations ACT-inanimé

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Interprétation(s) des verbes anticausatifs en grec et en français

On voit ici que les verbes de ces deux classements, même s’ils appar-tiennent à la classe des anticausatifs (et devraient donc être lus comme tels) ne donnent pas toujours lieu à une lecture anticausative et qu’une certaine ambiguïté persiste. Toutefois, ceux de la classe b (sans alternance de voix) donnent lieu à une lecture anticausative de manière plus aisée que ceux de la classe a (classe b : 97/125 vs classe a : 60/125 ; χ2 =23,440, p<0,001). Cette observation montre que l’existence de plusieurs formes verbales influence le jugement des locuteurs. En outre, la lecture passive est proposée pour les deux types de classement (classe b : 20/125 vs classe a : 21/125), mais la transitive est plutôt préférée quand le verbe anticausatif entre dans des structures avec alternance de voix (classe b : 8/125 et classe a : 40/125 ; χ2 =27,821, p<0,001).

Enfin le graphe 3 présente les données provenant des verbes de voix NACT, à savoir des anticausatifs avec alternance de voix et des verbes d’activités :

Graphe 3 : Distribution des interprétations NACT-inanimé

La distribution des préférences interprétatives des locuteurs montre que tant les anticausatifs avec alternance de voix (classe a : antic. : 59/125, pass. : 59/125, trans. : 7/125) que les verbes d’activités - qui ne sont pour-tant pas pressentis comme favorisant une lecture anticausative - sont les cas les plus ambigus (antic. : 73/125, pass. : 52/125, trans. : 0/125) (lecture antic. dans les classes a vs. d : χ2 =3,528, p=0,06). Cette ambiguïté pointe en faveur de notre hypothèse selon laquelle les deux lectures ont la même déri-vation syntaxique, mais les préférences interprétatives sont motivées par des raisons non grammaticales, telles que la fréquence, la pragmatique et les informations encyclopédiques attachées à l’entrée lexicale des verbes.

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Au final, les anticausatifs avec alternance de voix ont été perçus en tant que tels indépendamment de la nature de la voix (ACT : 59/125 vs NACT : 60/125 ). La lecture passive est favorisée en NACT, sans être pour autant complètement rejetée en ACT (ACT : 21/125 vs NACT : 59/125 ) 18. Quant à la lecture transitive, elle est surtout déclenchée en ACT (ACT : 44/125 vs NACT : 7/125).

Du côté du français, le graphe 4 illustre globalement les interpréta-tions attribuées à l’ensemble des SEverbes + sujet animé de l’étude (14 au total) en dehors de leurs caractéristiques particulières (surtout lexicales). On remarque que tous ces verbes (antic. : s’étirer, se piquer, se cogner, se plier ; réfl. : s’essuyer, s’habiller, se laver, se raser, se brosser ; activité : se mouiller, se mettre X, se cacher, se maquiller, est emporté) ont reçu l’interprétation réfléchie, comme en grec :

Graphe 4 : Distribution des interprétations : sujet animé + se

Les verbes dits réfléchis ont été considérés comme tels (sauf une lecture passive donnée pour essuyer) 19. De plus, les locuteurs ont opté pour l’interprétation réfléchie plutôt qu’anticausative, quand ils avaient une phrase contenant un verbe anticausatif ou un verbe d’activité (χ2=28,800, p<0,01 et χ2=30,375, p<0,001 respectivement). Enfin, l’interprétation anti-causative 20 est plus fréquente avec les verbes qui expriment une activité qu’avec ceux des classes a et b (mais la différence n’est pas significative).

Comme nous l’avons déjà mentionné ci-dessus, la forme verbale n’était pas toujours la même, lorsque le sujet de la phrase était inanimé. Ainsi, les graphes 5, 6 et 7 montrent la distribution des interprétations d’après la morphologie de chaque verbe.

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Interprétation(s) des verbes anticausatifs en grec et en français

Graphe 5 : Distribution des interprétations : sujet inanimé + ACT

Le graphe 5 illustre les verbes qui expriment l’anticausativité soit par le biais d’une seule forme (classe b), soit via plusieurs formes (classe a). Comparativement aux verbes susceptibles de déclencher une lecture anti-causative à l’aide de formes diverses, ceux avec une seule forme présentent plus aisément cette interprétation (cl. b : 33/40 vs cl. a : 29/40). Cette don-née va à l’encontre des observations faites à propos du grec 21, car il appa-raît que les sujets français ne sont pas perturbés par l’existence de plusieurs formes verbales puisque leurs lectures n’en sont pas influencées.

En ce qui concerne l’interprétation passive, elle est plus fréquente avec les verbes de la classe (a) qu’avec ceux de la classe (b) (χ2=10,400 p=0,006). Nous observons également à propos de ces deux classements que les verbes à plusieurs formes sont interprétés plutôt anticausativement que passivement (χ2=9,256, p=0,002) 22. Le verbe casser est le seul à rece-voir souvent une lecture passive (10/20), mais la lecture anticausative suit de très près (9/20 ) ; plier est interprété comme anticausatif à 100%, fondre et sécher à un degré élevé (16/20 et 17/20 respectivement).

En présence du clitique se (graphe 6), l’interprétation anticausative est fréquente que le verbe soit à la forme active (72,5%) ou non (75%) et, cette fois, elle est nettement plus fréquente que les autres interprétations proposées (χ2=8,100, p=0,004 et χ2=15,000, p<0,001) :

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Graphe 6 : Distribution des interprétations : sujet inanimé + se

Si l’on considère les différences lexicales des verbes pris en compte, on relève l’ambiguïté de se casser qui accepte les deux interprétations, anticausative et passive (12/20 vs 8/20), tandis que se plier est surtout anticausatif (17/20). Les autres verbes examinés sont tous vus comme des anticausatifs, à l’exception de se percer qui est également ambigu (ant. vs pass. : 13/20 vs 7/20). Il apparaît donc une fois encore que l’existence de plusieurs formes verbales n’influence pas les lectures choisies par les locuteurs.

En ce qui concerne la combinaison être + participe (Graphe 7), elle a reçu des lectures préférentiellement anticausatives indépendamment de la classe d’appartenance des verbes (ant. à multiples formes 36/80 et activ. 48/100). Cependant, nous n’observons pas la même chose, quand on exa-mine chaque verbe individuellement.

En effet, si on examine chaque verbe séparément, on remarque d’un côté que est cassé et est tendu sont ambigus entre passif et anticausatif, est plié entre passif et transitif (préférence pour une lecture résultative) et est percé est surtout anticausatif. D’un autre côté, est mouillé, est emporté et est caché sont interprétés anticausativement et est décoré et est peint passivement.

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Interprétation(s) des verbes anticausatifs en grec et en français

Graphe 7 : Distribution des interprétations : sujet inanimé + être pp

Au final, quand nous comparons les données grecques aux françai-ses, nous remarquons que les locuteurs se comportent différemment vis-à-vis de la disponibilité de plusieurs formes verbales véhiculant la lecture anticausative : le grec préfère la voix ACT, tandis que la NACT oscille entre lecture passive et anticausative. Nous n’observons pas le même phénomène pour le français qui distingue plus clairement les lectures des différentes formes verbales d’après les traits sémantiques des verbes (à l’exception du passif être+pp qui a été majoritairement interprété comme résultatif ; ceci découle probablement de sa lecture occurrentielle perfective). Quand on examine les phrases à sujet animé, on remarque que la fréquence de la lecture réflexive augmente, que le verbe examiné soit traditionnellement caractérisé comme réfléchi ou pas. Cette observation vaut pour les deux langues et peut trouver son explication dans la dérivation syntaxique du réfléchi (cf. supra).

La fréquence de l’interprétation anticausative 5. dans les corpus

Pour l’étude des données grecques, nous avons eu recours, d’une part, au ILSP Corpus (http://hnc.ilsp.gr/) qui relève du discours écrit et formel et nous avons créé, d’autre part, un corpus Google 23 contenant des occurrences du langage quotidien. Ce dernier - appelé également Web-Based corpus - contient un large éventail de styles d’écriture et possède des caractéristiques similaires à celles des corpus dits balancés (Sharoff, 2006). En cohérence

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georgia Fotiadou, Hélène VassiLiadou

avec le SPM, nous nous limitons aux données provenant de verbes anti-causatifs avec alternance de voix, tels que htipai

-(N)ACT (‘frapper’ / ‘casser’),

tendoni-(N)ACT

(‘tendre’ / ‘étirer’), leroni-(N)ACT

(‘salir’), dhiploni-(N)ACT

(‘plier’) et tripai

-(N)ACT (‘percer’ / ‘piquer’).

Pour la partie française, nous avons également exploité des bases de données représentatives de différents registres de la langue (Frantext et Clapi) et nous y avons effectué deux types de requêtes : nous avons d’abord cherché la totalité des occurrences de s’ / se pronom dans Frantext catégorisé (tout genre confondu pour la période 2000-2010, 28365 occur-rences) dans le but de mesurer la distribution des interprétations du clitique se en général (recherche grossière / ‘coarse grained’). Toutefois, pour les besoins de cet article, nous n’allons présenter que les données provenant des 6000 premières occurrences afin d’esquisser quelques tendances. Puis, nous nous sommes concentrées sur la fréquence des verbes utilisés pour l’expérience SPM, à savoir casse, se casse, est cassé(e), plie, se plie, est plié(e) (tout genre confondu pour la période 1990-2010, 904 occurrences). Les mêmes types de recherche ont été menés dans la base orale (http://clapi.univ-lyon2.fr, 35 heures de données pour une centaine de transcrip-tions, 18 occurrences).

En dernier lieu, nous présenterons comparativement le verbe fermer en grec (6944 occurrences) et en français (1122 occurrences) dans une perspective d’analyse plus fine (fine grained) : comme il est quasiment impossible d’examiner la fréquence d’apparition de combinaisons très pré-cises, nous ne prenons en compte que la nature [± animé] du sujet syntaxi-que et la forme du verbe.

Si on considère d’abord les données obtenues via la recherche grossière (en ne tenant compte que des formes verbales examinées), on remarque que tant en grec (Tableau 1) qu’en français (Tableau 2) la morphologie active est utilisée pour illustrer l’interprétation transi-tive (5306/6817 soit 77,83% pour le grec et 366/500 soit 73,2% pour le français). Les autres formes verbales (NACT) véhiculent avec presque la même fréquence toutes les interprétations possibles de la grammaire (pass. : 1152/3018 ; antic. : 1048/3018 ; réfl. : 729/3018 pour le grec et pass. : 48/422 ; antic. : 200/422 ; réfl. : 90/422 et trans. (se datif) : 83/422 pour le français). On voit alors que ces premiers résultats ne coïncident pas avec ceux du SPM.

Les pourcentages changent quand on considère la nature [± animé] du sujet : ainsi, quand le sujet est animé, seule l’utilisation transitive est fréquente parmi les occurrences contenant des verbes en ACT en français et en grec. En NACT, l’interprétation réfléchie est la plus fréquente pour le grec (46,1%), tandis qu’en français, les utilisations réfléchies (38,3%) et transitives (se dat) (35,3%) se suivent de très près. Lorsque le sujet est

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Interprétation(s) des verbes anticausatifs en grec et en français

inanimé, les lectures transitives semblent aussi fréquentes que les anti-causatives aussi bien en français qu’en grec (trans. : 58,8% vs antic. : 41,2% pour le grec et trans. : 48,23% vs. antic. : 51,77% pour le français). Ce type de résultats n’est pas pris en compte dans les études fondées sur l’usage ; ils apparaissent néanmoins plus représentatifs des préférences interprétatives des locuteurs, étant donné qu’ils s’alignent souvent à ceux du SPM.

En ce qui concerne l’analyse fine, chaque verbe a été examiné en fonction de sa morphologie verbale et l’animation du sujet. En grec 24, les verbes actifs des deux corpus ont tendance à recevoir une lecture transitive quand le sujet syntaxique est animé, à l’exception du verbe htipai ‘frapper’ qui, dans l’ILSP, est interprété de manière anticausative 25. Quant au corpus Web, on remarque en plus que la moitié des verbes actifs accompagnés d’un sujet inanimé (tendoni ‘tendre’ et htipai ‘frapper’) oscillent entre lec-ture anticausative et transitive. En voix NACT, dans l’ILSP, le verbe le plus fréquent est htipai ‘frapper’+ sujet inanimé et sa lecture privilégiée est la passive. Dans le Web, la plupart des verbes sont réfléchis quand le sujet est animé, à l’exception du verbe leroni ‘salir’ qui est anticausatif. Hti-pai ‘frapper’ est réfléchi, mais les lectures anticausative et passive suivent de près (réfl. vs antic. : χ2=77,781, p<0,001 et réfl. vs pass. : χ2=13,370, p<0,001).

Quand le sujet est inanimé, la majorité des verbes reçoivent une lec-ture anticausative, sauf tripai ‘percer’ et htipai ‘frapper’ qui sont plutôt passifs (pass. vs antic. : χ2=55,538, p<0,001 et χ2=22,947, p<0,001 respec-tivement). (Voir tableau 1.)

En somme, dans l’ILSP, la nature du sujet ne semble pas guider les préférences interprétatives des locuteurs, puisque presque tous les ver-bes sont vus comme transitifs. En revanche, la possibilité d’une double morphologie a des répercussions sur le choix entre lecture anticausative et passive, cette dernière étant la plus fréquente quand le verbe est en NACT (antic. vs pass. : χ2=518,098, p<0,001), sachant que seule l’inter-prétation anticausative est possible avec un verbe en ACT. Dans le Web, au contraire, l’interprétation anticausative est plutôt préférée en NACT quand le sujet est animé, tandis que, quand le sujet est inanimé, la distri-bution des lectures anticausatives divergent en fonction du verbe : htipai ‘frapper’ et tripai ‘percer’ apparaissent majoritairement en ACT mais ten-doni et leroni en NACT.

En ce qui concerne la totalité des verbes dans les corpus français, l’analyse grossière étant en cours, nous n’avançons ici que les tendances esquissées. Nous observons ainsi, sans grande surprise, que les seVerbes combinés avec un sujet animé sont majoritairement réfléchis (quelques-uns sont réciproques). Dans le cas du sujet animé, la lecture anticausative

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apparaît plutôt dans les constructions se faire + verbe. En revanche, les interprétations anticausative et passive, lectures génériques incluses, sont plus fréquentes, quand le sujet est inanimé.

Corpus sujet intérpr ACT NACT

tendoni htipai tripai leroni tendonete htipiete tripiete leronete

ILSP anim trans 42 770 52 25

antic 0 48 0 0 0 24 1 7

inerg 0 1 0 0

pass 0 85 3 0

réfl 7 18 2 0

récip 0 5 0 0

inan trans 9 275 58 9

antic 1 306 6 1 9 30 1 4

inerg 0 1 0 0

pass 3 271 5 0

réfl 2 2 0 0

récip 0 3 0 0

Web anim trans 470 1404 359 269

antic 0 62 0 2 1 215 17 42

inerg 0 3 3 0

pass 0 331 8 0

réfl 183 432 49 3

récip 0 78 0 0

inan trans 115 658 564 227

antic 170 667 159 32 323 200 14 160

inerg 0 49 0 0

pass 84 272 90 0

réfl 12 19 0 0

récip 0 3 0 0

Tableau 1 GrecDistribution des interprétations des verbes anticausatifs

avec alternance de voix (prise en compte des facteurs [± animé] / morphologie verbale)

Du côté de l’analyse fine, rappelons-le, nous nous sommes concen-trées sur les données provenant des verbes qui, lors de l’expérimentation du SPM, ont déclenché la lecture anticausative via plusieurs formes ver-bales :

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Interprétation(s) des verbes anticausatifs en grec et en français

Corpus sujet interpr ACT seVerbes être + p.passé

plier casser plier casser plier casser

frantext anim trans 77 221

se-inalién. 0 81

antic 27 9 36 7 0 2

inerg 3 0

pass 0 0 7 0 0 1

réfl 20 69 1 0

inan trans 20 48

antic 33 40 34 85 2 23

pass 13 6 6 4 4 25

Clapi anim trans 3

se-trans 2

antic 8

pass 1

inan antic 3

pass 1

Tableau 2 françaisDistribution des interprétations des verbes à formes multiples

([±animé] / morphologie verbale)

Ainsi, plier en ACT est majoritairement transitif quand le sujet est animé, mais les lectures transitive et anticausative se neutralisent quand le sujet est inanimé : cf. des phrases du type […] dans le fauteuil de rotin qui plie sous son poids. La nature [± animé] du sujet n’influence pas pour autant le déclenchement d’une lecture anticausative (27 anim. et 33 inan.). De même, quand plier apparaît sous sa forme réfléchie, la lecture anticau-sative ne semble pas être influencée par la nature [±animé] du sujet (anim vs inan : χ2=0,057, p=0,811). Toutefois, quand le sujet est animé, la lecture réfléchie (ex. Cécile se plie au jeu parce qu’elle croit que cela me fait plaisir) suit de près (réfl vs antic : χ2=4,571, p=0,033). Enfin, les formes être + pp ne sont pas du tout fréquentes. Rappelons ici que, dans le SPM, les formes SeV et active ont été interprétées anticausativement, tandis que ‘être + pp’ était ambigu entre lecture passive et transitive.

Le verbe casser est majoritairement accompagné d’un sujet animé et, dans ce cas, il s’interprète transitivement (La porte est fermée de l’inté-rieur. On la casse en se servant d’un canapé comme bélier, on entre...). En revanche, quand le sujet est inanimé, il n’y a pas de différences significatives entre les lectures transitive (T’as qu’à voir ses lectures ça casse des barreaux d’chaise) et anticausative (la théorie casse, lorsqu’elle est appliquée par des mains inhabiles). Lors du SPM, l’ambiguïté s’est située entre les lectures pas-sive et anticausative. Se casser + sujet animé est vu comme transitif (structu-

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res du type il se casse la jambe) et la lecture réfléchie arrive de très près en deuxième position (on y inclut des expressions avec un sens figuré : Je me lève : « On se casse ! »). On ne trouve que de très rares utilisations anticau-satives (C’est un esclave qui se casse… On le remplace par un autre). Quand le sujet est inanimé, se casser reçoit fréquemment une lecture anticausative (La dent se casse, le crac !). Etre cassé, quant à lui, est fréquent avec un sujet inanimé et, dans ce cas, les lectures se partagent entre passive (Le calcaire est cassé en morceaux aussi réguliers que possible qui sont ensuite portés aux fours) et anticausative (Le chronomètre est cassé. Il manque une éponge pour le coin d’en face). Ici, nos résultats concordent avec ceux du SPM.

Pour terminer ce petit tour d’horizon, nous mettons en parallèle la distribution des interprétations des verbes klini

ACT / se ferme qui ont reçu

pendant le SPM la lecture anticausative sous une seule forme : la voix active pour le grec et la forme pronominale pour le français :

Corpus sujet interpr ACT NACT formes

klini ferme klinete se ferme

ILSP/

frantextanim trans 1199 745

se-trans 7

antic 6 5

pass 20

réfl 38 17

inan trans 267 116

antic 1727 41 6 131

inacc 11

inerg 6

pass 6 53 22

réfl 1

Web/Clapi anim trans 805 1

se-trans

antic 21

pass 284

réfl 706

inan trans 147

antic 837 2 70 1

inacc 2

pass 509 2

réfl 8

Tableau 3Distribution des interprétations du verbe klini-fermer en grec

et en français ([±animé] / morphologie verbale)

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Interprétation(s) des verbes anticausatifs en grec et en français

Les données tirées des corpus ne corroborent ce choix que partiel-lement. En grec (pour les deux corpus), la forme active n’est utilisée anti-causativement que quand le sujet est inanimé, alors qu’en présence d’un sujet animé, elle est utilisée transitivement. Quant à la forme NACT, rare-ment utilisée dans l’ILSP, elle est réservée aux lectures réfléchie et passive, quand le sujet est animé, et quasi uniquement à la lecture passive quand le sujet est inanimé (6 cas d’anticausatif seulement). Au contraire, dans le Web, les formes NACT (1598) sont employées presque aussi fréquem-ment que les formes ACT (1789). Quand le sujet est animé, elles illustrent en premier lieu une lecture réfléchie, en deuxième lieu une lecture pas-sive et en troisième lieu une lecture anticausative (réfl vs pass et antic : χ2=159,051, p<0,001). Quand le sujet est inanimé, l’interprétation la plus fréquente est la passive, suivie de loin des interprétations anticausative et réfléchie (pass vs antic et réfl : χ2=316,458, p<0,001). En résumé, bien que klini soit susceptible de déclencher une lecture anticausative par le biais de deux formes, il le fait de préférence en voix active (ACT vs NACT : χ2=599,664, p<0,001).

Dans Frantext, fermer apparaît plus souvent en forme active (909 occ.) qu’en forme pronominale (192 occ.). La totalité des actifs + sujet animé sont utilisés transitivement ; en présence d’un sujet inanimé on relève toutefois un faible taux de lectures anticausative (La porte de notre gîte enfumé ne ferme pas) et passive (Il y a une pharmacie qui ne ferme 26 pas de la nuit). Se fermer est surtout accompagné d’un sujet inanimé (animé vs inan: χ2=99,905, p<0,001) et reçoit dans la plupart des cas une lecture anti-causative (130/170) (Et maintenant, voici le passage qui se ferme devant nous). On a également rencontré un petit nombre de lectures inaccusati-ves (qu’on aurait pu intégrer aux anticausatifs) uniquement avec des ter-mes médicaux (Un organe interne l’hydrocoele, dérivé de l’entérocoele, se ferme en un anneau émettant cinq branches) et passives (Le marché allemand se ferme pour protéger les éleveurs nationaux). L’interprétation anticausative en français est alors préférée avec la forme seV, sans être complètement exclue en ACT (130 seV et 42 ACT).

En ce qui concerne enfin Clapi, les données sont si peu nombreuses qu’elles ne nous permettent pas de nous exprimer en termes statistiques et/ou de formuler des généralisations.

Pour conclure, nous retenons des résultats présentés que les ver-bes grecs de ditypia (‘symétriques’) privilégient la lecture anticausative en ACT. Les locuteurs grecs préfèrent réserver la forme NACT pour les lectures passives. Ces résultats vont à l’encontre de la thèse traditionnelle qui stipule que la forme verbale (ACT / NACT) des verbes symétriques n’influence pas la disponibilité de la lecture anticausative. En français, au contraire, la lecture anticausative est choisie tant en ACT qu’avec des

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SeVerbes (cf. tableau 2). On voit alors que l’existence de trois formes (active, passive, SeVerbes) facilite les décisions des locuteurs français lors du choix d’une lecture. Il est enfin intéressant de noter que, selon nos résul-tats, les SeVerbes sont rarement employés pour véhiculer une lecture pas-sive ; or ce faible pourcentage est quand même significatif, car il indique que les locuteurs ne rejettent pas totalement cette possibilité.

Discussion générale et pistes de recherche6.

Au terme de cette étude, nous pouvons dire que les hypothèses émises dans la section 2 sont plus convaincantes pour le français que pour le grec au niveau de l’analyse grossière. En effet, tandis que cette dernière se véri-fie pour le français à tous les niveaux (coïncidence des données issues du SPM et des corpus), elle ne l’est pour le grec que partiellement : elle est vérifiée pour les verbes NACT mais pas pour les ACT (dans les corpus, l’interprétation la plus fréquente pour les verbes actifs est la transitive avec 5306/6817 verbes ; dans le SPM, les lectures anticausative et transitive arrivent respectivement en première et deuxième position).

Ces résultats doivent toutefois être nuancés, car ils sont issus de l’ad-dition des données de deux corpus de nature différente (discours formel vs informel). Les résultats du SPM sont plus en accord avec le Web corpus, et dans ce cas notre hypothèse de départ est vérifiée à un degré plus élevé. En d’autres termes, c’est soit l’intervalle chronologique qui influence les chif-fres (le Web corpus est plus récent que l’ILSP), soit le genre discursif. Pour le français le problème est autre : d’une part, le corpus oral n’a pas fourni de données suffisantes pour procéder à des généralisations et, d’autre part, il est difficile de dire si les données obtenues reflètent ou non l’état actuel de la langue. Le cas échéant, ceci pourrait signifier que, contrairement au français, la morphologie du grec est sur le point de se modifier. Il est évident que nous devons poursuivre nos recherches en élargissant le nombre de ver-bes testés, les périodes chronologiques ainsi que les types de corpus.

En dépit de ces obstacles, une chose apparaît clairement : dès qu’on procède à une étude fine, des divergences entre les corpus et le SPM com-mencent à apparaître dans les deux langues. Ainsi, en grec, les données ne coïncident que pour leroni, klini, tendoni / tendonete, tripai / tripiete, htipai / htipiete + sujet inanimé et pour tendonete + sujet animé ; et en français, pour se plie, se ferme, être plié, être cassé + sujet inanimé. Là encore on peut nuancer notre propos en disant que certes les données ne coïncident pas entièrement, mais elles ne sont pas non plus contradictoires (la lecture qui occupe la deuxième position dans les corpus, occupe la première dans le SPM ou oscille entre les deux, mais n’est jamais loin derrière).

En fin de compte, notre étude montre que le poids de l’interaction entre la composante morphologique et la nature du sujet n’est pas négli-

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Interprétation(s) des verbes anticausatifs en grec et en français

geable et que si l’usage joue un rôle dans l’émergence des formes linguis-tiques, ce n’est pas le seul facteur décisif. La fréquence a ainsi un effet sur nos interprétations d’adultes, cela va sans dire, mais ceci apparaît comme secondaire, car, on l’a vu, la prise en compte de traits supplémentaires pour chaque verbe étudié influence nos décisions interprétatives. De ce fait, les structures avec un sujet inanimé étaient plus ambiguës que celles avec un sujet animé : les anticausatives en particulier étaient très proches des passi-ves, quand justement le sujet était inanimé. Finalement, il se pourrait que, dans ce cas, il n’y ait pas lieu de postuler l’existence de différences pure-ment syntaxiques. Dans la foulée, d’autres questions surgissent : à l’instar des structures intransitives, y a-t-il différentes sortes de transitivité ou est-ce que tous les verbes transitifs forment du coup une classe homogène ?

Par ailleurs, la nature de notre protocole d’étude ne nous permet pas de valider la thèse selon laquelle l’usage serait une sorte de « banque » à partir de laquelle les locuteurs abstraient cognitivement leur grammaire ; pour ce faire, il aurait fallu procéder à des expérimentations en ligne (on-line sentence processing, cf. Friedmann et al., 2008) consistant à mesurer le temps de réaction des locuteurs natifs face à des structures. Dans le présent article, nous avons uniquement étudié « la performance » des locuteurs en leur laissant le temps qu’ils voulaient pour répondre. Afin de confirmer ou d’infirmer la thèse citée ci-dessus, notre analyse devrait être associée à des études portant sur l’acquisition du langage pour mesurer les différences entre les réponses d’adultes (qui sont normalement influencés par l’usage) et d’enfants dont la « grammaire » est en cours de formation.

NOTES

1. Notre analyse sera toutefois assez limitée, car on ne considérera pour l’ins-tant que quelques verbes symétriques (ou ditypias en grec) ainsi que des verbes qui reçoivent une lecture anticausative sous une seule forme verbale, quelle qu’elle soit.

2. Nous utilisons le terme de morphologie Non-Active (NACT) au sens de Rivero (1990) qui l’a introduit à la place de celui de médio-passif afin de décrire la variété des structures dans lesquelles il peut être utilisé. Plusieurs études ont été menées sur la morphologie mediopassive / non-active du grec. Cf., entre autres, Vassilaki (1988), Tsimpli (1989), Ralli (1999), Papastathi & Tsimpli (2004), Rous-sou (2008).

3. On ne prétend pas que l’occurrence d’une subordonnée finale prouve la pré-sence d’un θ-rôle Agent (cf. l’exemple de Fellbaum & Zribi-Hertz (1989) signalé par l’un de nos relecteurs : Ce siège est rembourré pour permettre d’y rester assis longtemps, où le contrôle est réalisé par l’agent implicite). Cf. aussi pour l’an-glais : The ship was sunk to collect the insurance (+agent) vs * The ship sunk to

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collect the insurance. En outre, dans le cas de l’interprétation réfléchie, le contrôle est réalisé par le sujet.

4. Les études diachroniques ont montré qu’en ancien français, se était lié au sujet et n’intégrait le réseau actanciel du verbe qu’occasionnellement. A partir du moment où cela devient possible, on observe une extension des interprétations (réfléchie, réciproque, passive ou anticausative). Cf. Stéfanini (1962) et Heidinger (2008).

5. Cf. le jeu de mots dans le titre du livre de Melis entre voix et voie. Melis (1990 : 128-130) propose de traiter le tour pronominal dans le cadre de la transiti-vité verbale, même s’il admet qu’une question subsiste : est-ce que tous les verbes transitifs peuvent figurer dans un tour pronominal (et vice versa) ?

6. Heidinger (2008) note que la forme réfléchie a tendance actuellement à pren-dre le pas sur la construction active (et non marquée), même si c’est cette dernière qui a d’abord existé seule en ancien français. Ces remarques vont dans le sens des statistiques dressées par Zribi-Hertz (1987 : 35).

7. On a affaire ici à un tout autre sujet touchant la question de ce qui doit ou ne doit pas être considéré comme passif (cf. Gaatone, 2000 ; Buchard & Carlier, 2008). Voir aussi l’exemple [9] qui peut être en emploi réfléchi passif ou en emploi réfléchi neutre / moyen (la porte se ferme discrètement vs se ferme bien).

8. Cf. les différents tests proposés pour le français, entre autres, par Geniušiene (1987), Zribi-Hertz (1987 ; 2008), Cummins (1996), Labelle (1989). Il s’agit prin-cipalement de la possibilité d’avoir une construction impersonnelle, l’enchâsse-ment dans une structure croire + Inf, le choix entre l’auxiliaire être ou avoir, l’in-sertion de être en train de, la possibilité d’une lecture événementielle vs générique, la nature du sujet [± animé], etc. Il est intéressant de noter que, pour certains auteurs, les faits échappant à toute explication sont rangés parmi les emplois dits idiosyncrasiques ou résiduels.

9. Cf. entre autres Perlmutter (1978), Fellbaum & Zribi-Hertz (1989), Labelle (1989), Legendre (1989), Lagae (1990), Fagan (1992), Chierchia (2004), Alexiadou et al. (2004), Reinhart & Siloni (2005), Tsimpli (2006), Zribi-Hertz (2008). On fait souvent référence au phénomène de l’anticausativité en ces termes : l’hypothèse anticausative ou encore le puzzle inaccusatif.

10. Nous trouvons souvent les termes de ergativité (cf. la mention habituelle anticausatif / ergatif, Zribi-Hertz, 1987), de neutre (Ruwet, 1972), de médiopas-sif / moyen / middle (Desclés et al., 1986 ; Lamiroy, 1993 ; Zribi-Hertz, 2008) ou, plus rarement, de inaccusatif (Herslund, 2000).

11. Les structures profondes qui prennent un sujet (argument externe) NP [VP

V] concernent les inergatifs dans le sens de Perlmutter (1978) et de Burzio (1986).

12. « Les constructions à prédicats légers (light verbs) désignent généralement des structures syntaxiques de type [ypV NP] dont la tête est un prédicat défectif du point de vue thématique » (Di Sciullo & Thomas Rosen, 1991 : 13).

13. Les résultats de cette première recherche ont montré que les locuteurs adul-tes interprètent les données en lien avec la fréquence de leur utilisation, tandis que les choix des enfants sont dirigés par la grammaire. Cf. Fotiadou (2010) et Fotiadou & Tsimpli (2010).

14. La différence de classement répond à des contraintes distributionnelles et lexicales. Par exemple, aux formes grecques anticausatives sans alternance de voix

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Interprétation(s) des verbes anticausatifs en grec et en français

et anticausatives avec alternance de voix correspondait un seul verbe français : casser (la clé casse vs la table casse / se casse / est cassée). En outre, alors qu’en grec on peut utiliser un verbe unique indépendamment de la nature du sujet, en français les verbes correspondants sont différents (tripai

-(N)ACT vs percer (-inan) /

piquer (+anim)). Enfin, un verbe tel que salir est considéré en grec comme anti-causatif avec alternance de voix et a été par conséquent présenté sous ses trois formes possibles : ACT + inan, NACT + anim et NACT + inan (cf. la classe a de ditypia ; 5 verbes x 3 formes = 15 phrases). Le cas est visiblement différent pour le français où le correspondant de leroni (avec interprétation anticausative) ne peut être que se salir + sujet animé ou être+p.p + sujet inanimé ; ce dernier a finalement été inclus dans le classement (b) et présenté une seule fois (avec sujet inanimé). En somme, nous avons dû construire les différentes classes de verbes selon les traits pertinents pour chaque langue.

15. On a remplacé le verbe décorer par la structure se mettre des paillettes, quand le sujet était animé.

16. Le verbe grec vafi(N)ACT

se traduit par peindre ou par se maquiller selon la nature du sujet.

17. L’interprétation anticausative (25/125) (classe a) concerne surtout les ver-bes tripai (13/25) et htipai (5/25) et l’interprétation passive (32/125) (classe d) les verbes metaferi (22/32) et stolizi (6/32).

18. La lecture passive est, comme attendu, favorisée en NACT grâce aux pro-priétés de la voix (qui peut attirer le θ-rôle). On trouve toutefois également des cas en ACT, choix pourtant agrammatical.

19. Notons que la troisième possibilité interprétative, la lecture transitive, était bien illustrée par une image, mais elle ne figure pas dans le graphe, car aucun sujet ne l’a choisie.

20. L’interprétation anticausative pour les verbes considérés comme anticausa-tifs (à savoir pour la classe a : 16 réponses sur 80) découle surtout du verbe se piquer qui lui seul obtient 11 réponses pour la lecture anticausative sur les 16 (11/16) ; dans la classe des verbes d’activités, on a obtenu 21 lectures anticausatives, dont 18 proviennent du verbe emporter.

21. Nous devrions toutefois nuancer nos propos, car la différence de valeurs peut reposer sur la différence de verbes comparés : dans le cas du grec, on a testé cinq verbes, tandis que, pour le français, on a utilisé deux verbes pour chaque catégorie.

22. Nous n’avons eu qu’une seule réponse transitive pour casser, tandis que les formes actives utilisées pour les réfléchis avec sujet animé étaient sans ambiguïté transitives (100%). Rappelons, toutefois, qu’il s’agit d’une possibilité évoquée dans les recherches sur l’acquisition du langage (cf. Verrips, 2000 pour le hollan-dais et Fotiadou & Tsimpli, 2010 pour le grec).

23. Pour la création de ce corpus, nous avons fait des recherches avec Google Web APIs sur des Pages Actives. Nous avons ensuite codifié les résultats sur la base des critères morphosyntaxiques et nous les avons enregistrés sous forme de MSAccess (Fotiadou, 2010). http://my.enl.auth.gr/langlab/google_corpus.htm.

24. Pour faute de place, nous n’avons pas cité d’exemples grecs ; on se contente de présenter les cas du français les plus frappants (illustrant grosso modo la même idée pour le grec aussi).

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25. Toutefois la différence des valeurs entre l’interprétation anticausative et l’in-terprétation transitive n’est pas statistiquement significative (χ2=1,654, p=0,198).

26. Ces verbes sont normalement caractérisés comme des ergatifs parce qu’ils sont en ACT ; nous optons toutefois pour l’étiquette de passif (indépendamment de la forme morphologique) parce que les effets interprétatifs sont les mêmes : la notion d’un agent est présupposée. La pharmacie dans l’exemple cité ne peut pas fermer toute seule. En revanche, dans la porte se ferme on peut comprendre qu’elle se ferme toute seule ou par une cause externe (le vent par exemple).

RéféRences bibliogRaphiques

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