Essai sidérurgie (Belgium)

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ECONM865 : Trade policy and international cooperation Essai La sid´ erurgie europ´ eenne en perte de vitesse Auteur : Pierre Elias Noma : 1671-09-00 Professeur : J-C. Jacquemin 29 mai 2013

Transcript of Essai sidérurgie (Belgium)

ECONM865 : Trade policy and international cooperation

Essai

La siderurgie europeenne en perte devitesse

Auteur :

Pierre EliasNoma : 1671-09-00

Professeur :

J-C. Jacquemin

29 mai 2013

1 Introduction

Dans le cadre du cours � Trade policy and international cooperation �, il nous a etedemande d’ecrire un essai sur une industrie au choix. Notre choix s’est tout de suiteporte sur l’industrie siderurgique suite a la fermeture de la phase a chaud liegeoise et deDuferco. Il nous semble donc important de comprendre les enjeux qui se cachent derrierecette industrie dans le contexte de la globalisation.

Afin de bien comprendre l’importance de cette industrie, nous devons nous attardersur le role central qu’elle joue actuellement dans l’economie. Elle fournit les matierespremieres pour la production de nombreux biens industriels. En effet, l’acier est forte-ment utilise dans de nombreux secteurs comme l’industrie automobile, la construction,les transports, etc.

En ce qui concerne la siderurgie europeenne, elle fut longtemps leader dans la pro-duction d’acier. Cependant, elle a ete marquee durant ces 20 dernieres annees par unerelocalisation des grands producteurs vers les regions dotees d’un grand potentiel decroissance, c’est-a-dire les pays emergents et les pays de l’Europe de l’Est. L’indus-trie europeenne est donc considerablement touchee par cette hausse de la competitivitemondiale et doit faire face a de nombreuses pertes d’emploi et de relocalisations dansce secteur. Mais encore, une des specificites de cette industrie est qu’elle est fortementmorcelee et la transformation en multinationale y est recente. Comme nous le verronsdans la section 4, la part dans la production totale des dix plus grosses entreprises dusecteur reste peu elevee.

Nous essayerons donc par cet essai de mettre en lumiere les elements cles de lasiderurgie europeenne par la comprehension du contexte mondiale a l’aide des theoriesprovenant du commerce international et de l’economie geographique. De plus, pour com-prendre cette situation a un niveau plus local, nous nous appuierons sur l’exemple de lasiderurgie liegeoise appartenant a ArcelorMittal, leader sur le marche de l’acier.

L’essai est structure comme suit : la section 2 met en evidence l’histoire de l’acierliegeois afin de comprendre toutes les subtilites de cette industrie et de sa specificite. Lasection 3 analyse le contexte international. La section suivante traite de l’emergence desmultinationales dans le secteur siderurgique et donne les differents courants de penseespar rapport a cette emergence. Ensuite, la section 5 considere le role des normes envi-ronnementales, plus specifiquement le Protocole de Kyoto sur le secteur. La section 6 seconcentre sur une analyse plus theorique de l’industrie. La derniere section traitera del’evolution de la siderurgie de maniere plus globale et du cas specifique de Liege.

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2 Historique de la siderurgie liegeoise

La region liegeoise est dotee d’abondantes ressources minerales. La siderurgie belge ya pris son berceau en 1817. John Cockerill y developpa un groupe siderurgique avec deshauts-fourneaux et des cokeries. Ce groupe fut un des fers de lance de l’industrialisationbelge car il detenait un avantage technologique significatif sur les autres implantations enEurope. La siderurgie liegeoise stimula l’economie par l’implantation et le developpementde nombreuses entreprises liees a la siderurgie.

A la sortie de la premiere guerre mondiale, la siderurgie liegeoise connaitra un developpementet se modernisa. Celle-ci epargnee par les degats de la deuxieme guerre mondiale, putredemarrer en force. Cependant les annees suivantes, l’industrie belge a du faire face aune augmentation de la competition a cause de la creation de nouvelles unites modernesdans les pays avoisinants. De plus, la Belgique connut la fermeture de ses charbonnagesce qui a oblige ses siderurgies a devoir importer les minerais. Cela a donne un avantageaux implantations maritimes. Pour faire face a cette hausse de competition, le groupeCockerill fusionna avec plusieurs de ses concurrents : S.A. D’Ougree-Marihaye, Forges dela Providence et Esperance-Longdoz. En 1974, la Belgique etait le troisieme exportateurde produits siderurgiques apres l’Allemagne (RFA) et le Japon avec 16,2 millions detonnes.

En 1975, la siderurgie wallonne a du faire face au premier choc petrolier mais celle-ciy etait mal preparee. En effet, ils ont prefere preserver les anciennes unites de Seraing etd’Ougree alors que de nombreux rapports mettaient en evidence que les infrastructuresetaient vieillissantes et depassees. La siderurgie a connu de nombreuses pertes d’emploiet s’en est suivi de nombreuses aides venant de l’Europe et de l’Etat belge. Malgre lesnombreux subsides et aides octroyees au groupe Cockerill, celui-ci n’arrivait toujours pasetre assez competitif. Son avenir passait par une fusion avec un autre groupe.

En 1998, Usinor (groupe siderurgique francais) prit une participation majoritaire dansCockerill. Ce dernier realisa des investissements dans le bassin liegeois. En 2001, Usinorfusionna avec d’autres industries du secteur pour devenir Arcelor qui est devenu le lea-der mondial en comprenant les siderurgies belges Cockerill, Usinor, Industeel, Sidmar etALZ. Suite a cette fusion, la concurrence interne etait de plus en plus presente notam-ment avec 10 phases a chaud. En 2002, Arcelor lanca son ”plan Apollo” qui definissaitles evolutions des outils industriels du groupe. Le groupe concentrera donc ses inves-tissements sur les lignes a chaud les plus performantes situees a proximite des cotesmaritimes. Arcelor decida de fermer la phase a chaud liegeoise tout en garantissant ledeveloppement de la phase a froid ainsi que de collaborer a la reconversion economiquede la region liegeoise.

En 2006, Mittal Steel Company annonca une offre publique d’achat sur Arcelor. Apresquelques coups de theatre, la creation du groupe ArcelorMittal est annoncee. D’une

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maniere assez inattendue, le groupe decida de relancer la phase a chaud liegeoise. Mais,suite a la crise de 2008 et a la recession qui s’en est suivie, la siderurgie liegeoise fonc-tionna au ralenti et certains hauts-fourneaux ont du fermer temporairement. En octobre2011, ArcelorMittal annonca la fermeture definitive de la phase a chaud dans le cadrede sa strategie. Et, pour la premiere fois, l’avenir de la siderurgie a froid est incertain.

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3 Contexte international

Nous pouvons distinguer plusieurs periodes concernant l’industrie siderurgique maisdans cette section, nous allons nous concentrer sur la periode qui a suivi les deux chocspetroliers. Cette periode est marquee par la globalisation de cette industrie avec saliberalisation ainsi que par la privatisation des entreprises siderurgiques. Les gouver-nements ont toujours eu tendance a essayer de supporter et de controler l’industriesiderurgique nationale car elle est une source d’emploi et un avantage non-negligeablepour la defense du pays. Pour illustrer cette vague de liberalisation et de privatisation,en 1980, 60% de l’industrie etaient controles par les etats alors qu’en en 2005, ceux-cicontrolaient moins de 40%.

Figure 3.1: Crude steel production share accross World Regions

Concernant la distribution mondiale de l’industrie, la majorite de celle-ci se situaitdans les pays de la triade avec 56% dans les annees 60. Ensuite, il y a eu un deplacementde la siderurgie vers les pays emergents (BRIC). Nous expliquerons cela ulterieurementa l’aide de la theorie du commerce international et de l’economie geographique. L’Asieest devenue le cœur de la production siderurgique avec plus de 60% de la productionmondiale en 2010. En effet, l’Asie doit specialement son role central dans la siderurgiegrace a la croissance de cette industrie en Chine et en Inde. Cette croissance provientde la demande grandissante des pays emergents et d’un tassement de la productiond’acier en Europe qui est du notamment a une forte dependance des importations dematieres premieres et a une hausse de la competition mondiale. Les marches emergentssont donc devenus les acteurs principaux de la siderurgie puisque c’est dans ces paysque la demande et la croissance sont et seront les plus fortes dans le futur. Pour donnerl’exemple d’ArcelorMittal, leader sur le marche mondial de l’acier, un tiers de sa demandecourante s’est dirigee vers les marches emergents en 2010.

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En ce qui concerne le commerce mondial de l’acier, il doit faire face a certaines mesuresprotectionnistes ainsi qu’a certaines pratiques commerciales injustes. Celles-ci creentdonc des distorsions sur le marche final de l’acier ainsi que sur le marche des matierespremieres. L’OCDE attire l’attention sur la proliferation des barrieres commerciales no-tamment sous la forme de barrieres non-tarifaires. Selon des estimations du secteur en2011, pres 65% du marche de l’acier est sujet a des mesures de restriction. Suite a lacrise economique de 2008, la production mondiale a souffert et subit encore les effets dela recession. Les prix de l’acier sont encore relativement bas et l’industrie doit faire facea des reductions de la production. Cependant, la surcapacite reste le probleme le plussignificatif dans le secteur de l’acier. Les siderurgistes mondiaux continuent a produiretrop d’acier par rapport a la demande actuelle. Nous pouvons voir sur la figure 3.2 quele taux de la capacite d’utilisation reste en-dessous des 80%. Cela est du en partie a

Figure 3.2: Global steel capacity utilization

Figure 3.3: Real GDP forecast of major steel-producing countries

cause du ralentissement de la demande chinoise pour l’acier (figure 3.3). La diminutionde la demande globale d’acier des pays developpes et aussi des pays emergents, a pro-voque un niveau inferieur de production. Cela a ainsi reduit l’investissement dans lesprojets d’infrastructure a grande echelle. L’Europe a ete la plus touchee par la crise etmaintenant, par la crise de la dette. Pour illustrer cela, les experts s’attendent a unediminution de l’utilisation de l’acier d’environ 5,6% en Europe. Meme l’Allemagne estannoncee en declin. Ernst and Young prevoit une reprise moderee sur le marche mondialde l’acier pour 2014-2015 notamment par une amelioration significative de la demandesur les marches emergents.

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4 Emergence des multinationales

Le deplacement de la demande et de la production d’acier de la Triade vers les paysemergents a ete accompagne par le developpement des multinationales de ce secteur.L’emergence de ce type de multinationale a ete lente, comparee a d’autres secteurscomme le minier ou l’aluminium. C’est la creation d’Arcelor en 2001 qui a lance le re-groupement en multinationale dans le secteur a un niveau superieur. Selon IBM, l’adop-tion des multinationales dans la siderurgie est une reponse naturelle a la dynamiquede l’industrie. En effet, comme vu ci-dessus, la demande a fortement augmente avec lespays emergents. Il en resulte donc un besoin de consolider cette industrie morcelee a uneechelle plus globale. Cette consolidation s’est faite principalement grace a des acquisi-tions et des fusions. Comme nous pouvons voir sur la figure 4.1, il y a en moyenne plusde 100 acquisitions et fusions par annee dans ce secteur. La figure 4.2 montre le rankingdes 10 plus grosses industries et notamment nous pouvons y observer la fusion entreArcelor et Mittal. Neanmoins, ce secteur reste encore fort fragmente. En 2010, les 10plus grosses multinationales du secteur representaient seulement 24% de la part totalede la production d’acier.

Figure 4.1: M&A Deal Activity in the Global Steel Industry

D’un point de vue plus strategique, l’industrie siderurgique s’integre verticalement carles inputs (minerai de fer et charbon) deviennent de plus en plus concentres. L’acces a cesinputs est donc devenu un element cle pour les producteurs d’acier. Mittal a appliquecette integration en rachetant les anciennes mines sovietiques avant de se preoccuperde leur capacite de production. Un autre avantage des grandes multinationales commeArcelorMittal est qu’elles arrivent a exporter les technologies ainsi que les meilleurs

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Figure 4.2: How Megadeals Reshaped Industry Leadership : Top 10 Steel Producers(Million Metric Tonnes)

procedes, souvent situes dans les usines europeennes, a leurs autres unites du reste dumonde. Les multinationales arrivent donc a augmenter leur retour sur investissementgrace au partage de ces procedes et technologies.

Dans le livre de Global Political Economy de T. H. Cown, le chapitre 9 correspond auxmultinationales. Il nous semble interessant d’essayer de rapprocher le cas d’ArcelorMittalaux differentes perspectives discutees dans ce chapitre.

Les liberaux croient que la mobilite des MNCs leur donne un avantage important surles gouvernements nationaux. Nous pensons que la vision liberale des MNCs s’appliquebien au cas de la region wallonne dans le cas des � obsolescing bargain �. En effet,ArcelorMittal domine le gouvernement belge dans les negociations concernant l’arretde la phase a chaud liegeoise. Concernant les effets des multinationales, nous sommesd’accord avec la vision liberale (= FDI augmentent l’efficacite des firmes en stimulantl’innovation, la competition, la croissance economique et l’emploi) mais dans certainscas, nous sommes egalement d’accord avec celle des structuralistes historiques ou les

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MNCs sont vu comme des predateurs recherchant le monopole. Cela peut donc avoir unimpact negatif sur certains pays. Concernant le secteur de la siderurgie, nous assistonsa une integration horizontale ainsi que verticale des multinationales. Prenons l’exempled’ArcelorMittal, cette multinationale etend ses operations a l’etranger en produisantles memes produits pour augmenter sa part de marche (grace aux couts de transport,technologie, etc) et profite de certaines politiques etrangeres (subsides, impots, etc). Deplus, comme nous l’avons vu ci-dessus, ArcelorMittal integre en amont son industrie encontrolant les inputs dont elle a besoin pour reduire ses couts et d’essayer de limiter lacompetition.

Il existe plusieurs autres visions concernant les effets des multinationales sur les tra-vailleurs domestiques. Les realistes et structuralistes partagent une vision negative tandisque pour les liberaux, les MNCs sont sources de creation d’emploi. Nous pouvons in-terpreter le cas de Liege par la vision liberale et ensuite structuraliste. ArcelorMittal arelance la phase a chaud ce qui a permis la creation d’emploi mais dans un second temps,a delocaliser une partie de sa production et donc, les travailleurs souffrent d’un revenuplus faible et certains du chomage. Cette situation se rapproche de la vue liberale quisoutient que les MNCs cherchent des opportunites profitables et qu’elles n’ont pas deliens avec la nation ou une partie de sa production y est implantee.

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5 La siderurgie par rapport au Protocole deKyoto

Le principal but du Protocole de Kyoto est de diminuer l’emission de gaz a effet deserre. Chaque pays s’est vu attribuer un taux a atteindre entre la periode 2008-2012. Ila ete ensuite prolonge jusqu’en 2020 suite a la conference de Doha. Dans le cadre duProtocole de Kyoto, ce sont les pays qui essayent d’augmenter la responsabilite socialedes entreprises. Neanmoins des pays comme les Etats-Unis n’ont pas signe le protocoleet d’autres pays ne l’ont pas prolonge comme la Russie. Les pays europeens, quant a eux,ont ete obliges d’y participer avec l’application de la directive europeenne 2003/87/EC.

L’industrie siderurgique est fortement concernee par ces quotas car elle represente uncinquieme des emissions de CO2. Mais vu la complexite de la tache, il est difficile demesurer l’impact de ces quotas d’emission de gaz a effet de serre sur la structure descouts industriels.

Figure 5.1: Distribution of world steel production bu country’s Kyoto Protocol status(2006, percentages)

De plus, 63% (en 2006) de la production mondiale de l’acier provient de pays qui nesont pas tenus par le Protocole de Kyoto. Ces pays avec l’absence de normes environne-mentales ont donc un avantage comparatif par rapport a ceux tenus par le Protocole deKyoto. La mise en place de ce dernier affecte la competitivite des industries europeennes,ce qui peut encourager la relocalisation des industries europeennes.

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6 La siderurgie d’un point de vue theorique

Dans cette section, nous allons tenter d’expliquer les faits marquants de l’industriesiderurgique a l’aide de theories. Ensuite, nous allons appliquer ces theories au cas liegeoispar rapport au contexte mondial du secteur siderurgique. Comme nous l’avons vu au-paravant, la majorite de la siderurgie se situait en Europe avant les annees 1960. Nouspouvons expliquer cela grace au modele de Heckscher-Ohlin. Selon ce dernier, le com-merce peut etre explique par les differences de ressources entre les pays. Les pays sontcaracterises par une abondance differente de matieres premieres. Nous allons combinercette theorie avec l’economie geographique pour expliquer la concentration de cette in-dustrie et par la suite la dispersion de celle-ci. Premierement, nous pouvons utiliser unefonction de production pour analyser la distribution inegale des activites entre les pays :

Y = F(A, K, L)

Ou la richesse (Y) d’un pays provient de la difference d’accumulation entre les facteursde production (capital K, le capital humain et les travailleurs L) ainsi que la producti-vite de ces facteurs qui depend notamment de la technologie (A). Pour un niveau plusregional, nous allons utiliser differentes theories de l’economie geographique qui prennenten compte les forces d’agglomeration et de dispersion. Les deux elements importants dansces theories sont les economies d’echelle et les couts de transports.

La premiere theorie interessante pour ce secteur est celle de l’Home Market Effect(= effet de la taille du marche). Celle-ci predit que la production se localise dispropor-tionnement dans la region ou la majorite de la population vit qui represente dans cecas-ci la demande. Une diminution des couts de transport favorise l’agglomeration desentreprises dans la plus � grosse region �. En effet, les entreprises veulent se situer ou lademande est la plus forte et ainsi de pouvoir jouir d’economies d’echelle en amortissantau mieux ses couts fixes. De plus, plus les couts de transports sont bas, plus les entreprisessavent exporter leurs biens aux autres region a un cout reduit. Le deuxieme modele estcelui de Krugman (1991), ”the core-periphery model”. Dans celui-ci, on prend en comptela mobilite des travailleurs. Les forces d’agglomeration sont encore plus presentes dansce modele que celui du Home Market Effect avec la mobilite des travailleurs. En effet,les entreprises attirent les travailleurs mais ceux-ci attirent ces dernieres. Il y a donc uneffet boule de neige.

Apres le rappel de ces theories, nous allons essayer de les appliquer au cas de lasiderurgie liegeoise.

Avec le modele d’Heckscher-Ohlin, nous pouvons expliquer pourquoi John Cockerilla decide de s’implanter sur les bords de la Meuse en region liegeoise. La Wallonie etaitsource de richesses minieres grace au charbon et aux minerais de fer. Liege etait egalement

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proche d’autres mines comme celle de Lorraine. Cela lui donnait donc un avantagenon-negligeable ainsi que la presence d’une voie maritime pour y debuter l’industriesiderurgique belge. La presence de Cockerill a Liege a donc ete le fer de lance de l’in-dustrialisation belge et de nombreuses entreprises s’y sont installees car la demande enmain-œuvre y etait forte. Avec le Home Market Effect, nous pouvons expliquer l’ag-glomeration des firmes dans la region liegeoise depuis 1830. En effet, la Wallonie est,avant 1930, la plus grosse region de Belgique et attire la majorite des entreprises indus-trielles car la demande y est plus grande. L’agglomeration fut encore plus forte avec lamobilite des travailleurs. En effet, au 19eme siecle, de nombreux flamands venaient tra-vailler dans les industries wallonnes. Apres la premiere guerre mondiale, la Belgique a eubesoin de main d’œuvre et plus de 170000 travailleurs etrangers sont arrives. Neanmoins,avec la crise des annees 30, le gouvernement a limite l’entree des etrangers. Grace a ces3 modeles, nous pouvons donc expliquer comment la siderurgie liegeoise etait l’une desmeilleures jusque 1960 et pourquoi elle etait le berceau de l’economie wallonne.

Pour comprendre la perte de vitesse de la siderurgie liegeoise, nous pouvons l’expliquerpar les forces de dispersion. Comme nous l’avons vu dans la section sur le contexteinternational, il y a eu une augmentation de la competitivite dans le secteur. Les coutsde production ont egalement augmente a cause de l’epuisement des mines de charbon etde minerais de fer sur le sol wallon et la distance de Liege par rapport a la mer. De plus,les installations devenaient de plus en plus vetustes. Neanmoins, Liege restait attractifcar la ville regorgeait de travailleurs qualifies dans le secteur de la siderurgie notammentgrace a l’Universite de Liege.

Concernant le cas de l’Europe, nous pouvons expliquer cette situation par le modeledu commerce international de Heckscher-Ohlin. La demande d’acier s’est en partiedelocalisee notamment avec l’integration des pays de l’Est dans l’Union Europeenneet l’emergence des pays asiatiques comme la Chine et l’Inde. L’industrie a donc des in-citants a s’implanter dans ces pays afin de profiter de la demande grandissante d’acieret aussi jouir de la main d’œuvre bon marche. L’Asie est donc devenue le continent quiproduit le plus d’acier. Les multinationales importent les meilleurs procedes et les tech-nologies europeennes a leurs unites asiatiques. En resume, l’Europe a perdu son avantagecomparatif dans la production de l’acier au detriment de l’Asie. L’Asie est plus efficienteau niveau de ses facteurs de production notamment grace a la main d’œuvre moins cheret a la disponibilite des matieres premieres.

Depuis la crise de 2008 et la recession qui s’en est suivie, les multinationales ont changeleur strategie a cause de la surcapacite de l’industrie et du faible prix de l’acier. LesMNCs comme ArcelorMittal reduisent donc leur volume de production, essentiellementen fermant les usines les moins performantes.

C’est ce qui s’est passe avec la fermeture definitive de la phase a chaud de Liege. Elleest l’une des unites d’ArcelorMittal les moins competitives ; cela est du aux retards d’in-vestissements de modernisation et a sa localisation concernant l’importation des matierespremieres.

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7 Evolution de la siderurgie

Cette section sera divisee en deux parties : l’evolution de l’industrie siderurgique a unniveau plus global et l’avenir de la siderurgie liegeoise.

Concernant l’industrie a un niveau plus global, le marche est dans une position affaibliesuite a la crise de 2008 et a la diminution de la croissance de la demande chinoise. Eneffet, celui-ci est sensible aux fluctuations de la conjoncture economique, aux couts desmatieres premieres et aux couts de l’energie. Les multinationales et differentes entreprisesdu secteur doivent donc reduire leurs couts afin de survivre et de se positionner pourune eventuelle croissance de la demande dans le futur notamment grace a la croissancedu marche indien. Les entreprises doivent s’assurer que les diminutions des couts restentdans le cadre de leur strategie a long terme et que ces reductions ne les mettent pas endifficulte dans le futur. Pour ce faire, les entreprises siderurgiques suivent trois approchesdifferentes.

La premiere est la reduction des volumes de production ce qui concernent surtoutles implantations les moins efficientes (cfr ArcelorMittal et Liege), la seconde est larestructuration de la main d’œuvre et la derniere est la reduction des contrats d’appro-visionnement. La premiere approche consiste a reconcentrer la production dans certainesregions afin de gagner en efficacite et de diminuer ses couts auxiliaires. Pour la deuxieme,les entreprises essayent de substituer la main d’œuvre par du capital. Cela concerne es-sentiellement, les pays developpes car les salaires de la main d’œuvre y sont eleves. Enplus des delocalisations, l’industrie europeenne est menacee par le manque de travailleurshautement qualifies dans le secteur vu la moyenne d’age elevee des travailleurs.

La siderurgie a chaud liegeoise semble condamnee. Ses infrastructures sont devenuesobsoletes au fil des ans et il a ete estime par des experts qu’il faudrait investir au moinsun milliard d’euros pour rendre la phase a chaud a nouveau competitive. Aucun inves-tisseur ne prendrait ce risque avec un marche deja surcapacitaire et ou la majorite dela demande se situant en Asie. De plus, Liege commence a connaıtre une penurie detravailleurs qualifies dans ce domaine. L’avenir de la phase a froid est lui aussi menacecar elle n’est pas suffisamment competitive. Par contre, la cokerie d’Ougree n’est pasmenacee car ArcelorMittal l’utilise toujours pour fournir la coke a ses sites de Gand etde Dunkerque.

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8 Conclusion

Dans cet essai, nous avons developpe l’industrie siderurgique sous differents angles.Nous avons essaye d’expliquer les differents changements survenus dans la siderurgie ense basant sur des theories du commerce internationales et de l’economie geographique.Nous avons egalement mis en lumiere l’effet de la globalisation sur cette industrie qui amene a l’emergence des multinationales.

En conclusion, la structure de cette industrie a fortement evoluee depuis 20 ans. Eneffet, les principaux producteurs d’acier se situant auparavant sur le vieux continent, ontdelocalise leurs capacites de production dans des regions avec un grand potentiel, en par-ticulier l’Inde, la Chine et certains pays de l’Europe de l’Est. Ces delocalisations ont eterenforcees par la demande croissante d’acier dans ces pays et par le faible cout de produc-tion dans ces regions. L’Europe a donc perdu une partie de son industrie siderurgiqueau profit de l’Asie. L’industrie siderurgique europeenne est donc aussi touchee par ladesindustrialisation.

De plus, ce secteur est marque par de nombreuses fusions et acquisitions mais resteneanmoins morcele. La concurrence entre les multinationales s’est intensifiee durant lesdeux dernieres decennies. Nous pouvons aussi noter que le Protocole de Kyoto joue en ladefaveur de la competitivite de l’industrie europeenne par rapport aux pays asiatiquesqui n’y ont pas souscrits.

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