D’une «nouvelle sorte de rayonnement» à la tomodensitométrie: une histoire du scanner

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IRBM 30 (2009) 33–39 Revue générale D’une « nouvelle sorte de rayonnement » à la tomodensitométrie : une histoire du scanner From a “new kind of radiation” to tomography: A history of the computed tomography M. Vermandel a,,b , X. Marchandise b a Inserm, U703, ThIAIS, pavillon Vancostenobel, CHRU de Lille, 59037 Lille cedex, France b UPRES EA1049, laboratoire de biophysique, faculté de médecine, université de Lille-2, place Verdun, 59000 Lille, France Rec ¸u le 6 janvier 2009 ; accepté le 6 janvier 2009 Disponible sur Internet le 18 f´ evrier 2009 Résumé Dans cet article, les auteurs présentent l’évolution de la radiologie, d’un point de vue historique, de la découverte des rayons X jusqu’à l’invention de la tomodensitométrie. Depuis l’invention des rayons X par W.C. Röntgen, la recherche de la troisième dimension en imagerie a suscité beaucoup de développements tant en physique qu’en mathématiques. Son avènement a finalement eu lieu au début des années 1970 où la tomodensitométrie a été mise au premier plan par G.N. Hounsfield. Ce papier replace les différentes évolutions dans leur contexte historique. © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Abstract In this article, the authors present the evolution of radiology, from the discovery of X-rays until the invention of the CT scan. Since the invention of X-rays by W.C.Röntgen, the search for the third dimension in medical imaging has provided a lot of developments both in physics and in mathematics. This third dimension has finally occurred in the early 1970s when CT was put forward by G.N. Hounsfield. This paper places the developments in their historical context. © 2009 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Mots clés : Radiologie ; Tomodensitométrie ; TDM Keywords: Radiology; Computed tomography; CT 1. Introduction Jusqu’à l’arrivée de la tomodensitométrie (TDM), de nom- breuses parties du corps humain restaient inaccessibles à la radiographie. Seules, dans certains cas, des procédures invasives permettaient l’exploration diagnostique mais au prix d’actes inconfortables pour le patient, voire dangereux. Reposant sur la détection de rayons X tout autour du patient, l’impact de la TDM en radiologie fut tel qu’elle fut reconnue comme la décou- verte la plus importante [1,2] depuis l’invention des rayons X par Wilhelm Conrad Röntgen (Fig. 1) le 8 novembre 1895 [3]. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (M. Vermandel). Nous présentons dans cet article la tomographie axiale en abordant le contexte historique. La première partie revient sur la découverte des rayons X au xix e siècle, la seconde partie détaille l’histoire de la TDM au fil des sauts technologiques. 2. Contexte historique de la radiologie 2.1. Une nouvelle sorte de rayonnement « Si on laisse passer la décharge d’une grosse bobine de Ruhmkorff à travers un tube à vide (...) et que l’on recouvre le tube d’un manteau suffisamment ajusté de carton noir mince, on voit alors, dans la pièce complètement obscure, qu’un écran de papier recouvert de platinocyanure de baryum, amené à 1959-0318/$ – see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.irbm.2009.01.002

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Revue générale

D’une « nouvelle sorte de rayonnement » à la tomodensitométrie :une histoire du scanner

From a “new kind of radiation” to tomography:A history of the computed tomography

M. Vermandel a,∗,b, X. Marchandise b

a Inserm, U703, ThIAIS, pavillon Vancostenobel, CHRU de Lille, 59037 Lille cedex, Franceb UPRES EA 1049, laboratoire de biophysique, faculté de médecine, université de Lille-2, place Verdun, 59000 Lille, France

Recu le 6 janvier 2009 ; accepté le 6 janvier 2009Disponible sur Internet le 18 fevrier 2009

ésumé

Dans cet article, les auteurs présentent l’évolution de la radiologie, d’un point de vue historique, de la découverte des rayons X jusqu’à l’inventione la tomodensitométrie. Depuis l’invention des rayons X par W.C. Röntgen, la recherche de la troisième dimension en imagerie a suscité beaucoupe développements tant en physique qu’en mathématiques. Son avènement a finalement eu lieu au début des années 1970 où la tomodensitométrieété mise au premier plan par G.N. Hounsfield. Ce papier replace les différentes évolutions dans leur contexte historique.2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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In this article, the authors present the evolution of radiology, from the discovery of X-rays until the invention of the CT scan. Since the inventionf X-rays by W.C. Röntgen, the search for the third dimension in medical imaging has provided a lot of developments both in physics and in

athematics. This third dimension has finally occurred in the early 1970s when CT was put forward by G.N. Hounsfield. This paper places the

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ots clés : Radiologie ; Tomodensitométrie ; TDM

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. Introduction

Jusqu’à l’arrivée de la tomodensitométrie (TDM), de nom-reuses parties du corps humain restaient inaccessibles à laadiographie. Seules, dans certains cas, des procédures invasivesermettaient l’exploration diagnostique mais au prix d’actesnconfortables pour le patient, voire dangereux. Reposant sura détection de rayons X tout autour du patient, l’impact de la

DM en radiologie fut tel qu’elle fut reconnue comme la décou-erte la plus importante [1,2] depuis l’invention des rayons X parilhelm Conrad Röntgen (Fig. 1) le 8 novembre 1895 [3].

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (M. Vermandel).

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959-0318/$ – see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.oi:10.1016/j.irbm.2009.01.002

Nous présentons dans cet article la tomographie axiale enbordant le contexte historique. La première partie revient sur laécouverte des rayons X au xixe siècle, la seconde partie détaille’histoire de la TDM au fil des sauts technologiques.

. Contexte historique de la radiologie

.1. Une nouvelle sorte de rayonnement

« Si on laisse passer la décharge d’une grosse bobine de

uhmkorff à travers un tube à vide (. . .) et que l’on recouvre

e tube d’un manteau suffisamment ajusté de carton noir mince,n voit alors, dans la pièce complètement obscure, qu’un écrane papier recouvert de platinocyanure de baryum, amené à

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Fig. 1. Wilhelm Conrad Röntgen, inventeur des rayons X.

roximité de l’appareil, s’illumine et devient fluorescent lorse chaque décharge. (. . .) Cette fluorescence est encore visible àeux mètres de l’appareil. On est rapidement convaincu que cetteuorescence provient de l’appareil à décharge et d’aucun autrendroit de la conduite électrique » [3]. L’expérience décrite este fruit des observations faites par Röntgen lorsqu’il étudie lesécharges électriques à travers le gaz. En effet, le tube de Hittorf-rooks, mis au point pour étudier les courants cathodiques,met, à chaque décharge, un rayonnement capable de produirene fluorescence et de traverser « le manteau de carton noir ».rès vite, Röntgen observe que d’autres objets laissent passer ceouveau rayonnement avec cependant une « transparence » dif-érente selon la matière. Il démontre très vite que ces rayons sonti pénétrants qu’ils sont capables de traverser l’air, le verre, leapier, le bois sans déviation et sans réflexion. Même les tissusumains y sont transparents car lorsque Röntgen interpose saain entre l’appareil à décharge et la plaque de platinocyanure,

l voit l’ombre des tissus et celle, plus claire, de ses os [4]. Cetteremière radiographie réalisée 14 jours après sa découverte auraécessité un temps de pose de 20 minutes. Vient ensuite, le2 décembre, le célèbre cliché radiographique de la main dea femme de Röntgen, Bertha (Fig. 2).

Le 28 décembre (le même jour que la première projectionublique des Frères Lumières), Röntgen rend compte de sesxpériences auprès de la Société de physique médicale de

ürzburg. Malgré la faible diffusion des comptes rendus deséances, la découverte va très vite faire le tour du monde. Sixois plus tard, le premier livre consacré à la radiologie paraît.éjà le champ d’application s’étend du diagnostic au traitement

adiothérapeutique. Dès 1897, lorsqu’Antoine Béclère crée leremier service de radiologie à l’hôpital Tenon (Fig. 3), le corps

édical lui reproche de déshonorer la profession en devenantphotographe » [4] : l’imagerie médicale est née.

Röntgen baptise ce rayonnement « rayons X », avec le mêmequi désigne l’inconnu en mathématiques. Il recevra le tout

Fig. 2. Premier cliché radiographique, la main de Bertha Röntgen.

remier prix Nobel de physique en 1901. Ce succès aura sûre-ent stimulé le francais René Bondlot qui présenta à l’académie

es sciences en 1903 ses rayons N (N en hommage à saille de Nancy). Ces rayons ont été découverts à l’occasion’expériences de polarisation des rayons X et avaient des pro-

Fig. 3. Antoine Béclère, premier radiologue.

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Fig. 4. Rayons X et occultisme.

904 : le physicien américain Robert Williams Wood démon-ra que les rayons N que pensaient avoir trouvé Blondlot et sesollègues n’existaient pas.

Les rayons X nourrissent également très vite les fantasmesusqu’à être utilisés lors des séances de « néo-occultisme »Fig. 4).

Le développement commercial est considérable. Il est courantl’époque de disposer, dans un laboratoire de physique, d’uneobine de Ruhmkorff et d’un tube de Crooks, ainsi les fabricantsxistent-ils déjà quand le marché de la radiologie (médicale ouon !) s’ouvre (Fig. 5).

L’engouement pour les rayons X est tel qu’ils concurrencente « cinématographe » au travers de séances telles qu’en pro-ose le théâtre Robert-Houdin connu pour ses spectacles deagie basés sur les lois de la physique [5] (Fig. 6). Le cinéma

’approprie lui aussi le thème, comme en témoigne le filmayons-X de Méliès en 1896.

.2. Les débuts de la radiologie interventionnelle

En 1914, Marie Curie percoit clairement le bénéfice qu’offrea radiologie dans la prise en charge des blessés de la premièreuerre mondiale. L’éclatement du conflit ayant mobilisé la majo-ité des hommes, l’institut du radium à peine aménagé ne peut

onctionner [4]. Refusant l’inactivité contrainte, Marie Curiemagine un service de radiologie des armées. Elle est nom-

ée « Directeur du service radiologique de la Croix-Rouge ».insi, des unités radiologiques mobiles vont équiper des véhi-

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ig. 5. Affiche vantant les mérites des appareils de l’ingénieur Radiguet etémonstration publique de la radioscopie.

ules – les petites Curies – permettant aux médecins de faireeurs diagnostics au plus près du front, garantissant une prisen charge rapide des blessés. Les rayons X sont alors produitsoit à partir d’un groupe électrogène soit à partir d’une dynamoouplée au moteur du véhicule. L’urgence des interventionsonduits les chirurgiens à intervenir directement à partir desnformations radiographiques. Ces premiers pas de « l’imagerienterventionnelle » sont rappelés par Marie Curie qui décrit leontexte où les blessés « sont opérés sous le contrôle des rayons »6].

Le principe de précaution n’existant peu ou pas, l’utilisationntensive des rayons X voit apparaître les radiodermites chezes sujets sains. Elles sont observées sous forme de « brûluresui peuvent être incurables » [6]. La prévention se traduitlors par l’utilisation de protections à base de plomb et la

écessité de personnels spécialisés, formés aux techniques’acquisitions radiologiques. La profession de manipulateurpparaît. Les premiers seront formés par Marie et Irèneurie afin de soutenir l’effort de guerre et répondre aux

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ddtéi(c[graphie (computerized tomography). Allan McLeod Cormack,chercheur à l’université Harvard puis professeur de physique àl’université Tufts de Boston, n’était pas au courant des travauxd’Oldendorf puisque malheureusement, et malgré l’activisme

ig. 6. Affiche d’un spectacle présenté au théâtre Robert-Houdin vers 1896.

esoins du front. Ainsi, 150 manipulatrices seront forméesntre 1914 et 1917 à l’institut du radium. Marie Curie, elle-ême, sera victime des rayonnements puisqu’elle décédera

’une leucémie suite aux multiples expositions. Sa maladieut longtemps attribuée à la manipulation d’éléments radio-ctifs mais les études n’ont jamais permis d’établir uneontamination suffisante et à l’heure actuelle la leucémieemble plus probablement imputable à son activité des « petitesuries ».

. La tomographie

.1. Naissance de la tomographie

Vers 1920, les limitations de la radiographie planaireommencent à réellement apparaître et une recherche de laroisième dimension commence. André Bocage [7,8] imaginelors les mouvements d’une source de rayons X et d’un filmadiographique dans des directions opposées. En gardant unlan focal fixe sur l’objet imagé, il apparaît rehaussé alors quees structures avoisinantes deviennent floues (Fig. 7 et 8(a)).e principe de visualisation en coupe constitue la premièrexpérience d’imagerie tomographique. Bocage protège son

nvention qui permet « d’isoler dans les tissus la région inté-essante ». D’autres inventeurs contribuent également à laomographie tel Vallebona [9–11] qui présente vers 1930ne invention similaire à celle de Bocage et propose la

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stratigraphie » en ajoutant un mouvement de rotation parapport au système de Bocage [12] (Fig. 8(b)). Grossman13,14] et Des Plantes [15] ajoutent également leur pierre à’édifice.

.2. L’apport des mathématiciens

Simultanément aux développements de Bocage, un mathé-aticien autrichien, Johan Radon [16], pose les bases de ce qui

eviendra plus tard la reconstruction tomographique. Sa théorie,ui n’est à cette époque qu’un exercice mathématique purementhéorique, propose la reconstitution d’une information à partir’acquisitions partielles obtenues à partir de plusieurs projec-ions. L’une des premières utilisations n’apparaîtra qu’à la fin desnnées 1950 quand Ronald N. Bracewell, ingénieur australien,xploite la théorie de Radon pour la reconstruction d’imagespartir de signaux issus de l’espace [17,18] afin d’identifier

es régions solaires émettant des radiations micro-ondes. Leséthodes de reconstruction seront l’objet de nombreux déve-

oppements [19], quel que soit la discipline – physique [20–27],édecine nucléaire, biologie moléculaire [28].

.3. Premier pas vers un « scanner moderne »

En 1961, un neurologue américain, Oldendorf [29–32]émontre une solution pour acquérir des images transverses’objets composés de tissus mous par retroprojection et recons-ruction. À partir de matériaux trouvés chez lui, tels que le trainlectrique de son fils, un tourne disque, le moteur d’un réveil. . .l monte une expérience démontrant la faisabilité de la TDMFig. 9). Dans son article référence [29], Oldendorf décrit leoncept de base utilisé plus tard par Allan McLeod Cormack21,22] pour développer les solutions mathématiques de la tomo-

Fig. 7. André Bocage dermatologue francais, père de la tomographie.

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Fig. 8. Schéma des premiers systèmes de tomographie de Bocage (a) et Vallebona (b). (a) : système de Bocage : la source bouge d’A’ vers A” en passant par Ap de déa ce boc ; le bu

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endant que le détecteur suit un mouvement antiparallèle à une distance du planlors que les autres points deviennent flous ; (b) : système de Vallebona : la sourouple source–film corresponde à un mouvement de pendule autour du point O

’Oldendorf auprès des constructeurs, ses travaux sont restésrès confidentiels : moins de dix tirés à parts lui ont été demandés30,31].

En 1965, bien avant Hounsfield (Fig. 10) et l’Electric andusic Industry (EMI), les chercheurs Kuhl, Ane et Eaton de

’hôpital universitaire de Pennsylvanie obtiennent la premièremage axiale du thorax d’un patient grâce au système Mark II33] basé sur des détecteurs à scintillations et une source radio-

ctive d’américium 241. Suite à ces travaux, le système Mark III34] est mis au point. Il s’agit d’un scanner compact intégrantn ordinateur et un écran cathodique pour la visualisation.

Fig. 9. Expérience proposée par Oldendorf.

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placement de la source constante ; tous les points du plan LOM reste focalisésuge du point A au point A’ et le film suit le mouvement de manière à ce que let étant que le plan L–M reste dans le focus et soit donc accentué sur l’image.

Malgré le succès des expériences du Mark III, aucun modèlee scanner clinique n’est développé jusqu’en 1971 où Houns-eld, ingénieur en informatique travaillant pour le Centralesearch Laboratory for EMI en Angleterre, produit lesremières images de patients cliniquement exploitables. Ce sys-ème, décrit dans un article de 1973 [35,36], permet l’acquisition’images cérébrales grâce à l’apport technologique de la combi-aison de détecteurs couplés à l’ordinateur. Principalementppliqué dans l’investigation cérébrale, le scanner est très rapi-ement étendu au corps entier à partir de 1975.

.4. All you need is. . . a CT scan

L’anecdote associant l’histoire des Beatles à la découverte’Hounsfield revient régulièrement dans les historiques de’imagerie. Loin d’être fantaisiste, cette relation est indéniable.

ig. 10. G. Hounsfield et J. Ambrose devant une version du l’Electric and Musicndustry (EMI) CAT scanner (computerized axial tomography).

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Fig. 11. Chronologie de la tomodensitométrie (TDM) et jalons historiques.

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n 1967, Hounsfield travaille alors pour EMI depuis 16 ans, sures thèmes allant des radars au guidage de missiles. Cette année,MI s’enrichit considérablement grâce aux ventes réalisées par

es « Fab’s Four » (environ 200 millions de disques 45 tours ven-us à travers le monde). L’EMI accorde donc à Hounsfield lesonds nécessaires pour développer l’idée qu’il a eu lors d’unee ses nombreuses randonnées en campagne. Ainsi, à partir deon prototype réalisé en 1968, il pourra consacrer quatre anse ses recherches pour obtenir finalement la première machinetilisable en clinique.

.5. La validation clinique : un tour de force. . .

En octobre 1971, l’EMI installe un scanner à l’hôpital Atkin-on Morley situé à une quinzaine de kilomètres du laboratoire deounsfield. Cet hôpital ayant peu de visiteurs garantissait de neas attirer les curieux si bien que seuls l’intendant et Ambrose, leeuroradiologue collaborant avec Hounsfield, étaient au courante cette installation [2].

Dans les six mois qui suivirent, pour valider clinique-ent l’intérêt du scanner, Ambrose et Hounsfield ont acquis

0 examens cérébraux et ont obtenu une confirmation histolo-ique de la présence d’une lésion dans presque tous les cas.

l’époque, le fait d’acquérir 70 examens en six mois consti-uait un véritable tour de force si l’on considère que, sure système, quatre minutes étaient nécessaires à l’acquisition’une seule coupe et que les données enregistrées sur bandesagnétiques nécessitaient deux jours de traitement en labora-

oire afin de reconstituer un examen. La TDM clinique étaitée. . .

Finalement GodFrey N. Hounsfield et Allan M. Cormackuront conjointement le prix Nobel de médecine en 1979.ounsfield restera le seul prix Nobel de l’histoire à ne pas avoire doctorat. Par ailleurs, dans son discours devant le comité, ilnnoncera l’arrivée d’une nouvelle modalité d’imagerie promet-euse : l’imagerie par résonance magnétique nucléaire (Fig. 11)ui vaudra leur prix Nobel en 2003 à Paul Lauterbur et Peteransfield.

. Conclusion

Dès la présentation par Ambrose de leurs résultats auSNA en novembre 1972, la TDM a immédiatement sus-ité l’engouement du monde médical. Depuis, la TDM’a cessé d’évoluer. D’abord le statif qui du mouvementranslation–rotation de l’ensemble tube-détecteur est passé au

ouvement dit rotation–rotation [37] dès la troisième géné-ation. Ce mouvement rendu possible grâce à une meilleuretilisation du tube, permettant un faisceau de rayons X en éven-ail, combinée au passage d’un détecteur (première génération) àlusieurs détecteurs (deuxième génération), a considérablementiminué le temps d’acquisition pour permettre l’explorationn corps entier. Plus tard, la quatrième génération proposera

’utilisation d’une couronne de détecteurs fixes qui permet deupprimer le risque d’artefacts circulaires [37]. D’autres progrèsechnologiques, tels que l’utilisation de détecteurs multibar-ettes associée à un mouvement hélicoïdal [38], ont contribué

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M. Vermandel, X. Marcha

l’amélioration de la qualité des images et l’augmentation de laitesse d’acquisition.

Encore aujourd’hui, la TDM bénéficie d’avancées techno-ogiques augmentant sans cesse l’étendue des applications.insi, la grande vitesse d’acquisition, grâce notamment à laultiplication des détecteurs, la rotation continue, le mouve-ent hélicoïdal. . . rendent possible les examens dynamiques

par exemple, acquisitions synchronisées dans les applicationsardiaques). Aujourd’hui, l’exploration fonctionnelle et mor-hologique simultanément est même rendue possible grâce à’association à d’autres modalités d’imagerie (tomographie parmission de positons – tomographie par émission monophoto-iques couplées à la TDM).

Nous ne pouvons pas détailler ici toutes les innovationse ces dernières années, quelques unes sont néanmoins par-iculièrement intéressantes et prometteuses. Par exemple, unonstructeur a récemment proposé l’utilisation de deux tubesrayons X en simultané. Ces derniers, en plus d’une acquisi-

ion extrêmement rapide, améliorent la différentiation des tissusous grâce à la visualisation en double énergie. Cette possibilitéégalement été mise à profit en absorptiométrie double énergie

ous forme de peripheral Quantitative Computerized Tomogra-hy (pQCT) pour la mesure absolue de la densité osseuse. Unutre exemple d’innovation concerne la radioprotection. Danse cadre, les contraintes de limitation de la dose recue par leatient ont amené le développement de technologies permet-ant d’adapter en temps réel le faisceau à la morphologie pouriminuer l’irradiation. Finalement, pour ne citer qu’un dernierxemple, le scanner devient appareil de traitement grâce à laomothérapie qui, basée sur un principe dual de la TDM, la plani-cation inverse, propose une nouvelle philosophie d’irradiation

hérapeutique.

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