Contraintes majeures liées à la croissance des PME marocaines

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Contraintes majeures liées à la croissance des PME marocaines Fait par BAHMAD SAID – MBA ESIG 2012 Introduction Le paysage économique et industriel marocain peut être difficilement dissocié de celui des PME qui constituent environ 95% de son tissu productif. L’atonie actuelle dont souffre la croissance économique nationale puise également ses racines dans les difficultés auxquelles font face les PME. Avec plus de 50% des effectifs employés, 50% de l’investissement, 30% des exportations et 40% de la production, la PME joue un rôle central dans la dynamique économique et sociale du pays en tant que vecteur de la promotion de l’emploi et de la distribution des richesses. Mais, elles ne contribuent qu'à hauteur de 20% à la valeur ajoutée du Maroc. Est considérée comme PME toute entreprise répondant aux conditions suivantes : - Un effectif permanent ne dépassant pas 200 personnes ; - Un chiffre d'affaires hors taxes inférieur à 75 MDH ou un total bilan inférieur à 50 MDH; - un programme d'investissement initial inférieur à 25 MDH. En tout cas, l’une des difficultés qui subsiste à l’heure actuelle réside dans la modélisation économique des profils disparates des PME marocaines,

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Contraintes majeures liées àla croissance des

PME marocaines

Fait par BAHMAD SAID – MBA ESIG 2012

Introduction

Le paysage économique et industriel marocain peut êtredifficilement dissocié de celui des PME qui constituent environ 95% de son tissu productif. L’atonie actuelle dont souffre la croissance économique nationale puise également ses racines dans les difficultés auxquelles font face les PME.

Avec plus de 50% des effectifs employés, 50% de l’investissement, 30% des exportations et 40% de la production, la PME joue un rôle central dans la dynamique économique et sociale du pays en tant que vecteur de la promotion de l’emploi et de la distribution des richesses. Mais, elles ne contribuentqu'à hauteur de 20% à la valeur ajoutée du Maroc.

Est considérée comme PME toute entreprise répondant aux conditions suivantes : - Un effectif permanent ne dépassant pas 200 personnes ;- Un chiffre d'affaires hors taxes inférieur à 75 MDH ou un total bilan inférieur à 50 MDH;- un programme d'investissement initial inférieur à 25 MDH.

En tout cas, l’une des difficultés qui subsiste à l’heure actuelle réside dans la modélisation économique des profils disparates des PME marocaines,

dominées à 97% par les micro-entreprises dont plus de 60% sont occultées dans le secteur informel selon les statistiques du ministère de l’Economie et des Finances en 2010. Il en ressort donc deux types de problématiques. En amont, plusieurs individus, désireux d’échapper à la précarité de leur situation et à la médiocrité de leur rémunération dans le secteur informel, se lancent dans l’entrepreneuriat sans évaluation préalable et du marché et de l’étendu de la demande latente. En aval, la survie de l’entreprise tient de son interaction avec son environnement et son adaptation à un paysage concurrentiel en constante mutation conditionné par uncertain nombre de contraintes.

Quelles contraintes majeures sont à l’origine de la croissance freinées des PME marocaines 

Constat

Il s’agit de faire le bon diagnostic de l’environnement économique marocain caractérisé par laforte présence des PME comme il est le cas dans les pays riches et même ceux qu’on considère comme nos comparables à savoir la Tunisie l’Egypte ou la Turquie.

- Arbre de diagnostic de croissance selon HRV

²

Obstacles à lacroissance des PME

Faibles rendements intrinsèques

Capacité d’appropriation

Faibles rendements privéspour les activités

FinancementEtranger coûteux

Financement

Coût élevé de financement

Cette figure définit bien les défaillances que peut rencontrer l’entreprise quand à son financement qui est coûteux et difficile d’accès comme à sa faiblesse structurelle liées à la compétence humaine, managériale et l’opacité de ses bilans qui rend le risque plus grand encore pour les investisseurs.

1-Contraintes internes à la PME.

FinancementEtranger coûteux

Financement

Segment S CA(millions de

DHs)

NBentrepris

es

MoyenneCA

MoyenneCapitauxpropres

Moyenne ActifImmobilise

MoyenneResultat

Net0 < CA < 1 24 854 3,24 8,82 4,65 -0,261 < CA < 3 9 184 18,05 17,70 10,67 0,313 < CA < 5 3 623 38,81 29,78 16,24 1,195 < CA < 10 4025 71,00 43,56 27,49 0,6510 < CA < 50 5299 219,60 110,61 85,31 7,4050 < CA <75 495 615,75 235,59 246,59 28,4375 < CA < 10 301 864,88 315,27 495,84 88,33100 < CA < 150 308 1 210,03 438,79 684,33 61,37150 < CA < 200 171 1 736,14 450,08 770,20 60,50200 < CA < 250 94 2 250,00

250 < CA 367 10 438,93 1 412,68 3 248,41 909,59

En analysant ces deux figures, on remarque que le poids des PME dans le tissu économique marocain est très dominant, et que la part des TPE (entreprises

dont le chiffre d’affaire est à 3 millions de dh) avoisine les 60%.

Les PME /TPE font face à des obstacles matérialisés par une faiblesse des moyens humains et techniques renforcée par une absence de politique managériale incitative et conjuguée à un manque de maîtrise de l’évolution des marchés, de lenteurs au niveau des procédures administratives, d’une faible capacité d’investissement et d’un manque de formation.

La PME se caractérise par la propriété familiale du capital et par un système d’objectifs qui intègre les intérêts de la famille à ceux de l’entreprise, il en résulte une forte concentration du pouvoir de management entre les mains des entrepreneurs propriétaires et dirigeants. Propriété et management sont donc conjoints et ce ne sont pas les bonnes pratiques pour une bonne gouvernance.

Dans une entreprise familiale la croissance vient en concurrence avec le souci de constituer et de préserver le patrimoine familial, cette préoccupation est souvent prioritaire incite à la prudence et à des déplacements (terrains, bâtiments) plutôt qu’à des investissements industriels toujours risqués.

La PME se heurte également aux problèmes de l’acquisition et de la maîtrise technique et technologique. Par ailleurs, les locaux sont sauvent inadaptés et les équipements sont anciens, ce qui ne contribue pas à l’amélioration de la productivité sur le plan technique. Les PME qui font appel à la technologie nouvelle se heurtent à des difficultés

d’assistance technique et de service après-vente remettant parfois en cause la rentabilité de l’entreprise du fait des interruptions répétées et coûteuses.

Cette situation est aggravée par la structure des mentalités des entreprises fuyant les investissements risqués de l’industrie, du commerce de toute autre activité non stérile au profit d’un comportement économique rentier axé sur la recherche du gain facileet rapide et le maximum de sécurité.

L’accès aux informations sur l’environnement sont souvent plus modestes que dans les grandes entreprises, faute de moyens et de disponibilité des dirigeants, parfois complètement accaparés par le fonctionnement “au jour le jour“.

La faiblesse, des petites et moyennes entreprises PME dans le domaine de gestion de trésorerie vient pour accentuer les problèmes dont elles souffrent déjà.

Cette ignorance de la gestion de la trésorerie commence souvent par l’absence d’un responsable clairement identifié pour assurer cette fonction. “ Elle se traduit par un défaut de prévision des besoinsnette de trésorerie et une absence de suivi en valeur des positions des comptes en banque ; Plus coûteuses sans doute et la mauvaise maîtrise des supports et descircuits de recouvrement de l’entreprise (facturation,encaissement,…etc.), notamment à l’exportation.

Autant de contraintes pouvant sembler rédhibitoires lorsque l’on tient compte de l’accroissement des

exigences en termes de qualité et de compétitivité desexportations dans une économie libérale.

2-Contraintes externes à la PME  :

a.Accès au financement bancaires : Les PME marocaines pâtissent-elles réellement de difficultés d'accès au financement ?

Les banques constituent la source de financement externe privilégiée des PME à cause des difficultés d’accès aux autres modes de financement disponibles malgré la panoplie de produits financiers proposés tels que le crédit-bail ou plus récemment le capital-risque.

Positionner le Maroc par rapport à un benchmark de pays comparables (Tunisie, Turquie, Egypte) en matièred'accès au financement permet d'évaluer le degré d'intensité de cette problématique dans ces pays et par conséquent d'affirmer ou d’infirmer ladite problématique au Maroc.

Pour la Tunisie : Le financement bancaire reste le principal instrument de financement de ses entreprises. La part des concours bancaires aux PME représente en moyenne annuelle près de 49% de l'ensemble des concours. Le recours aux marchés des capitaux demeure négligeable.

Afin de promouvoir la création des PME, l'Etat tunisien a promulgué la loi 95 sur les sociétés à capital risque. Dans ce sens, la Tunisie est devenue

le seul pays du sud de la Méditerranée à avoir développé un cadre juridique approprié au développement des sociétés à capital risque avec d'importants avantages fiscaux.

Pour la Turquie : Les PME turques étaient affectées par un environnement économique défavorable. Au cours des années 80 et 90, l'économie souffrait d'une inflation chronique due à un désordre des finances publiques. Les taux d'intérêt réels étaient excessivement élevés, impactant la croissance.

Depuis la restructuration et la recapitalisation des banques durant les années 2000 et 2001, celles-ci tendent à rationner massivement les entreprises privées, suite à l'application des normes prudentielles. Seulement 5% des crédits bancaires sontoctroyés à des PME industrielles, les banques préférant investir dans des obligations d'Etat ou dansles grandes entreprises. Ceci laisse apparaître la problématique du financement de la PME.

Pour l’Egypte : En dépit de la réforme du secteur financier et de la libéralisation des taux d'intérêt, les PME égyptiennes pâtissent des difficultés en matière d'accès au financement. La proportion des crédits distribués au secteur privé s'établit à 3,5% du total des crédits à l'économie. Cette proportion devrait augmenter à 10 ou 15% dans les prochaines années. De plus, le secteur bancaire égyptien fait preuve d'une certaine discrimination vis-à-vis des petites et moyennes entreprises. Ainsi, 0,19% des clients des banques égyptiennes accapare 52% des

encours de crédits à l'économie. De ce fait, seules 13% des PME ont eu accès au crédit bancaire, contre 36% pour les grandes entreprises.

La problématique du financement de la PME est omniprésente dans les pays concurrents du Maroc. En cequi concerne la proportion des crédits distribués au secteur privé et au secteur public non-financier par rapport au PIB, le Maroc devance l'Egypte et se situe derrière la Tunisie avec 56,7% en 2004. Dès lors, le Maroc est relativement bien positionné par rapport auxpays comparables en matière d'octroi de prêt.

Au Maroc, la première difficulté souvent mise en avantà la fois par les concernés et les analystes, a trait à l’accès au financement. Le constat n’est cependant pas partagé par l’ensemble des acteurs (les opérateurs, les financiers, les pouvoirs publics, etc.). Lors du dernier conseil de Bank Al-Maghreb. En effet, sur l’ensemble des crédits bancaires distribués, 30% ont été alloués aux PME. En 2008, ce taux était de 18% selon une étude du Conseil déontologique des valeurs mobilières qui se réfère auxstatistiques de la direction de la supervision bancaire de Bank Al-Maghreb. Il y a donc, en quatre ans, une progression énorme sur la question de l’accèsau financement.

Si la difficulté d'accès au financement est citée comme une contrainte récurrente par les entreprises, et plus particulièrement par les PME (80% des entreprises perçoivent (le coût élevé du crédit et la difficulté d'accès au financement comme de réels

obstacles à l'investissement), la réalité du terrain est en contradiction avec la perception des chefs d'entreprises. La majorité des entreprises maintient de bonnes relations avec leurs banques. 68% des entreprises bénéficient d'une autorisation de facilitéde caisse. La plupart des entreprises ayant demandé unprêt l'ont obtenu. Enfin, 79% des entreprises sont confiantes dans la capacité de leur banque à leur octroyer un prêt si une opportunité d'investissement se présentait.

Une frilosité des banques en raison de la non-transparence des entreprises. En effet, l'existence d'une asymétrie de l'information entre la banque et l'emprunteur, la mauvaise qualité des dossiers de crédit et le manque de transparence des états financiers sont autant d'éléments provoquant la réticence des banques à financer les PME.

En conséquence, les banques se couvrent contre le risque de défaut des PME, en imposant des taux d'intérêt élevés, des coûts de traitement, de gestion et de suivi des dossiers de crédit onéreux et des garanties réelles importantes. Dès lors, le comportement des banques et des entreprises ne favorise pas l'efficience du marché de crédit.

Le vrai problème vient de la Sous-exploitation des différentes sources de financement. En effet Les lignes de financement bilatérales sont sous utilisées par les PME. A titre d'exemple, la ligne PME/PMI française n'a été engagée qu'à hauteur de 53%, la ligne espagnole qu'à 37% et la ligne italienne qu'à

26%. Cette faible part est imputable à la méconnaissance de ces mécanismes de financement par lamajorité des PME marocaines, d'une part, et à l'inéligibilité des PME aux critères de financement, d'autre part.

b.Le capital-investissement :

Il constitue un moyen de financement alternatif pour les PME. Il n'a toutefois contribué qu’au financement de 85 entreprises à fin 2004 pour un montant de décaissements de 31 millions d'euros, soit 38,3% du montant total de la ligne capital-risque gérée par la Banque Européenne d'Investissement.

Le secteur du capital investissement marocain compte 20 sociétés de gestion (19 membres de l’AMIC) et 34 fonds sous gestion. Ces fonds ont levé 480 MDH en 2011portant le cumul des fonds levés depuis le lancement de cet outil de financement et d’accompagnement des entreprises à 8 milliards de dirhams. Pour leur part, les investissements cumulés du secteur se sont établisà 3,3 milliards de dirhams à fin 2011 pour 135 entreprises.

A noter que le taux de croissance annuel moyen du chiffre d’affaires des entreprises investies s’élève à19 %. De même, l’intervention du capital investissement a contribué à la création d’emplois. Eneffet, le taux de croissance annuel moyen des effectifs des entreprises investies est de 11 %.

Toutefois, la part du capital investissement dans l’économie marocaine reste encore marginale. Elle s’établit à 0,10 % du PI contre 0,38 % au niveau mondial et 0,17 % pour les marchés émergents. Il serait judicieux de développer ce mode de financement envers les PME pour accroitre leur compétitivité et leur performance.

Si le secteur présente quelques risques, il n’en demeure pas moins que les TRI (Taux de rendement Interne) dégagés sont très intéressants. Ainsi, le TRIbrut moyen pondéré global ressort à 20 %.

c.Accès au Marché boursier :

D’autre part, la plus part des petites et moyennes entreprises PME nationales ne remplissent pas les conditions d’accès au marché boursier. De ce fait, leschances de voir une petite et moyenne entreprise PME bénéficiaire des avantages accordés par le financementauprès du marché boursier sont extrêmement minimes et cela en dépit de la création d’un compartiment dédié àla PME mais qui reste cependant inadapté à la réalité du marché économique marocain et à la spécificité de ses entreprises.

3-Conclusion   :

En réalité, même si l’accès au financementapparaît en effet comme le problème numéro un dela PME, l’origine de la difficulté est àrechercher moins dans le secteur financier quedans la structure même de la PME marocaine.Celle-ci, de l’avis de nombreux analystes, se

caractérise par un sous-encadrement manifeste,une faiblesse des fonds propres et une sous-capitalisation «généralement due à un manque deréinvestissement dans l’entreprise». Souvent, leschefs de ces entreprises, préfèrent se payer desvoitures de luxe, acheter des maisons plutôt quede réinvestir les bénéfices. Les experts, eux,parlent de la faiblesse de l’actif immobilisédans les PME, de l’importance de l’actifcirculant, en liaison avec la nature desactivités de ces PME, davantage consommatrices defonds de roulement. D’autre part, de nombreusesPME, par manque de ressources humaines qualifiéesou par négligence, ne semblent pas attacher unegrande importance au respect des règles detransparence, comme la tenue d’une comptabilitéconforme. Celles qui répondent aux critères,notamment de transparence, n’ont pas dedifficulté à se financer auprès des banques. Lavérité est que la plus part des PME qui fontpreuve de frilosité, d’une aversion au risque nefont pas les investissements qu’il faut,notamment dans l’innovation et la recherchedéveloppement. Et si ce manque d’investissementrésultait justement de la difficulté à sefinancer ?Une chose est sûre cependant, il y a des avancéescertaines sur le front du financement et de lagarantie de financement « à travers la caissecentrale de garantie notamment », même si pour lemoment, compte tenu de leurs structures mêmes,

les PME n’ont véritablement accès qu’à un segmentdu marché financier, celui des banques.Dès lors, la problématique de développement dela PME, au Maroc, se cristallise autour de deuxfacteurs interdépendants, la structure spécifiquede la PME marocaine et la difficulté d’accès auxmodes de financement existants quand ces dernierssont mis en avant par une politique decommunication et une flexibilité administrative.

Fait par BAHMAD SAID – MBA ESIG 2012

SOURCES BIBLIOGRAPHIQUES

- “Evaluation du climat de l'investissement”, BanqueMondiale, 2005

- “Financement des PME au Maroc : contraintes, enjeuxet perspectives”, Mohamed Boussetta, 2006

- Access to finance for SMEs of the Middle East and North Africa Region”, Commission of the European Communities, 2006

- http://www.lavieeco.com/news/economie/acces-au- financement

- http://www.lnt.ma/finance/3-eme-journee-du-capital- investissement-le-financement-de-linnovation-au-centre-des-debats

- Getting the Diagnosis Right - Finance & Development, March 2006

- CDVM Le Financement des PME au Maroc Mai 2011