Comportement des consommateurs et produits d’origine en Afrique de l’Ouest : la perception de...

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1 Titre = Comportement des consommateurs et produits d’origine en Afrique de l’Ouest : la perception de la qualité liée à l’origine géographique du riz de Kovié au Togo Title = Consumer behavior and origin products in West Africa: The perception of quality link to geographical origin of Kovie-rice in Togo Auteur: GLE Koffi Emmanuel, Université de Lausanne- Suisse, [email protected]

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 Titre = Comportement des consommateurs et produits

d’origine en Afrique de l’Ouest : la perception de la qualité liée à l’origine géographique du riz de Kovié au Togo

Title = Consumer behavior and origin products in West

Africa: The perception of quality link to geographical origin of

Kovie-rice in Togo

Auteur:

GLE Koffi Emmanuel, Université de Lausanne- Suisse, [email protected]

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RESUME Cet article examine la perception de la qualité liée à l’origine géographique et le

comportement d’achat des consommateurs sur les marchés en Afrique de l’Ouest. Nous

étudions le cas du riz de Kovié au Togo. La collecte des données a été effectuée auprès de 292

consommateurs tirés au hasard sur les marchés locaux du Togo et l’analyse à partir des outils

économétriques et la microéconomie de l’information des consommateurs de Nelson, Darby

et Karni considérant les biens comme un panier de caractéristiques de recherche, d’expérience

et de croyance.

Les résultats montrent que les consommateurs différencient les riz locaux des riz importés et

attachent une importance à l’origine géographique du produit. Leur demande et comportement

d’achat pour le riz de Kovié sont basés sur la recherche des attributs de qualité liée à l’origine

géographique, la valeur nutritive, l’arôme, le goût, le caractère naturel et la fraicheur de ce riz.

Une meilleure valorisation de ce riz par une indication géographique est possible sous

réserve d’une évaluation des coûts de ce processus et du consentement à payer des

consommateurs.

Mots Clés : Indications géographiques, qualité, marché, comportement des consommateurs,

riz de Kovié, Togo

ABSTRACT

This paper examines the perception of quality link to geographical origin and the purchasing

behavior of consumers in West Africa’s markets . We study the case of Kovie rice from Togo

.Data was collected from 292 consumers in local market in Togo and was analyzed theories of

microeconomics of consumers’ information of Nelson, Darby and Karni which considered

product as sum of characteristics of research, experience and faithless and descriptive

statistics.

The results show that consumers make difference between local and imported rice and give

consideration to geographical origin of the product. Their demand and purchase behavior for

Kovie rice are based on attributes link to geographical area, nutritious, aroma, taste, natural

and freshness of the rice. Valorization of this rice through geographical indication process is

possible after evaluation of the cost of this process and consumers’ willingness to pay.

Keywords: Geographical Indications, quality, market, Consumer behavior, Kovie-Rice,

Togo

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Sommaire  Introduction ................................................................................................................................ 4  Economie de l’information et de la consommation ................................................................... 5  Méthodes de collecte et d’analyse des données .......................................................................... 6  Connaissance et fréquence de consommation des riz locaux et importés .................................. 7  Part des différents marchés du riz de Kovié .............................................................................. 8  Relations qualité-prix entre riz locaux et riz importés .............................................................. 10  Valorisation des attributs de qualité du riz de Kovié au Togo ................................................. 12  Hiérarchisation des attributs de qualité du riz de Kovié par les consommateurs ..................... 12  Discussion des résultats ............................................................................................................ 13  Conclusion ................................................................................................................................ 15  Bibliographie ............................................................................................................................ 17  

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Introduction   L’origine géographique est, en Afrique de l’ouest, un critère distinctif pour de nombreux

produits agricoles. Parmi les plus connus nous pouvons citer l’oignon de Galmi, l’ananas de

Notsé, l’igname de Bassar, le gari de Savalou. Pour certains produits de base tels que le riz,

les productions locales sont fortement concurrencées par les importations à bas coûts. Au

Togo, la moitié de la consommation nationale de riz sont fournis par des importations en

provenance principalement de Thaïlande, des Etats Unies, d’Inde et du Nigeria. Ces riz sont

vendus, sur les marchés et dans les magasins d’alimentation, sous diverses appellations

commerciales telles que (Patron, Chériz, Uncle Sam, Alizé, ibo), dans des conditionnements

de 5 et 50 Kg. La commercialisation de ces appellations est appuyée par des campagnes de

publicité notamment à la télévision nationale. Une partie de la production nationale est

commercialisée par l’Entreprise Territoire et Développement sous l’appellation Délice du

Togo dont les paddy sont collectés auprès des riziculteurs de plusieurs zones géographiques.

La préférence des consommateurs sur les marchés pour les riz d’origine géographique est -elle

un facteur déterminant dans leur choix? Alors qu’il existe des objections selon lesquelles

l’origine ne serait pas intéressante à valoriser en Afrique compte tenu du pouvoir d’achat

faible des producteurs, le riz de Kovié fait cependant exception. Ce dernier est vendu en vrac

dans l’aire de production sur les marchés de Kovié et de Mission Tové ainsi que sur les

marchés de la ville de Lomé et de sa périphérie à un prix sensiblement supérieur à celui de ces

concurrents des filières structurées par des femmes rurales de ces localités et des revendeuses

de riz de Lomé mais est absent des superettes faute de conditionnement adéquat. Ce riz est

produit par 529 riziculteurs de Kovié, de Mission Tové, de Assomé et de Ziovonou organisés

en groupements et qui disposent d’un Comité de gestion du périmètre et de l’eau. La part des

revenus rizicoles dans le revenu total de ces riziculteurs est supérieure ou égale à 75% et une

quantité estimée à 1200 tonnes de riz blanc a été produite et commercialisée en 2010. Quel

type de conditionnement et à quel coût pour permettre à ce riz d’avoir une part des marchés

des superettes ? Quelle place peuvent occuper les riz locaux dans un objectif d’autosuffisance

alimentaire en riz en Afrique de l’Ouest et quelle perception des attributs de qualité par les

consommateurs lors de leurs choix ?

Cet article analyse les attributs de qualité et le comportement d’achat expliquant le maintien

du riz de Kovié sur les marchés à partir d’une analyse par l’économie de l’information et de la

consommation.

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Economie  de  l’information  et  de  la    consommation  

L’étude s’est inspirée du modèle des économistes de l’information et de la consommation,

Nelson (1970), Darby et Karni (1973). Selon cette approche, la recherche des attributs de

qualité d’un bien par les consommateurs en cas d’imperfection des marchés et d’asymétrie

d’information entre producteurs/ vendeurs et consommateurs/ acheteurs conduit à trois types

d’attributs ou caractéristiques : les attributs de recherche ; d’expérience et de croyance.

Les attributs de recherche correspondent à des propriétés des produits que les consommateurs

peuvent vérifier avant l’achat. L’information est symétrique entre le vendeur et l’acheteur.

Les attributs de recherche peuvent être validés par les consommateurs lors de l’investigation

initiale. Ainsi les procédures de qualification de tels produits sont directes car elles mettent

l’agent économique, le consommateur en contact direct avec le produit.

Les attributs d’expérience ne sont mesurables qu’après consommation. Ils nécessitent donc

l’acte d’achat et d’expérimentation pour vérifier la qualité.

En effet, l’information relative aux qualités organoleptiques n’est accessible qu’après achat et

consommation du produit. Ce cas est fréquent pour les produits agro- alimentaires qui font

souvent l’objet d’achats répétitifs. Ainsi, un vendeur malhonnête sur des attributs

d’expérience risque d’être sanctionné par la détérioration de sa réputation et par le choix d’un

autre vendeur.

Les attributs de croyance sont ceux impossibles à évaluer même après consommation. Ainsi,

dans les pays développés, les progrès technologiques de la production agricole, et agro-

alimentaires ont abouti à une offre de produits de plus en plus sophistiquée et très éloignée

des compétences des consommateurs. Cette offre comporte de plus en plus d’attributs de

croyance, tels l’origine géographique du produit, les produits biologiques respectant

l’environnement ou encore des offres du commerce équitable. Ces attributs de croyance

échappent complètement aux moyens de jugement du consommateur (Brunso et al. 2002).

Dans les pays en voie de développement, les attributs de croyance sont plutôt utilisés pour

différencier les produits sur un marché saturé avec des produits importés avec ou sans

marque ; marché sur lesquels il existe une asymétrie d’information. Ainsi, les attributs de

croyance présentent la particularité de n’être pratiquement jamais vérifiés par l’acheteur avant

ou après l’achat du bien.

La qualité liée à l’origine géographique étant un attribut de qualité de croyance, le modèle

des économistes de l’information et de la consommation a servi d’approche théorique pour

l’évaluation des attributs de qualité perçus par les consommateurs.

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Méthodes  de  collecte  et  d’analyse  des  données   Le comportement d’achat des consommateurs de riz de Kovié, a fait l’objet d’une enquête

auprès de 292 personnes dont 198 sur les marchés de Lomé et de sa périphérie ( Agoe,

Zanguera) , et sur les marchés de Tsévié (32) , Kovié (47) et de Mission Tové (15) entre 2008

et 2009. . Ces enquêtes ont été menées par questionnaires administrés. Elles sont à la fois de

nature quantitative et qualitative pour appréhender et comprendre les procédures de

qualification des riz ainsi que les attributs de qualité perçues par les consommateurs. Les

consommateurs ont été sélectionnés de manière aléatoire sur les points de vente. La vente du

riz sur ces marchés est essentiellement assurée par des femmes qui détiennent le commerce

des produits alimentaires.

La carte de ces différents lieux de l’enquête se présente comme suit.

Carte 1: lieux d’enquête consommateurs

La zone de production du riz de Kovié se situe dans la vallée de Zio et comprends les cantons

de Kovié, de Mission Tové, d’Assomé et de Ziowonou .

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Carte 2: Zones de production du riz de kovié

 L’analyse a porté sur la reconnaissance et la différenciation des riz locaux et importés ainsi

que sur la reconnaissance et l’hiérarchisation des attributs de qualité du riz de Kovié.

Connaissance  et  fréquence  de  consommation  des  riz  locaux  et  importés  10- Parmi les consommateurs interrogés, 88% connaissent le riz de Kovié . De ces derniers,

79% citent spontanément ce riz comme riz local. Le riz « Délice du Togo », un autre riz local

dont les paddy proviennent de plusieurs zones rizicoles et qui est conditionné avec marque

commerciale par une entreprise locale est aussi cité spontanément par 31% des

consommateurs enquêtés. En dehors de ces riz mentionnés, les consommateurs interviewés

ont reconnu parmi les riz importés sur le marché local, les riz Patron (cité par 79% des

consommateurs) ; Alizé (56%) ; Uncle Sam (36%) ; Gino (47%) et Loy (15%).

Les autres riz locaux cités sont : les riz de Kpalimé (12%) ; Dapaong (8%) ; Akposso (6%),

Notsè (4%), Kpele Akata,( 4%), Notsè (4%) et Agome glozou (4%).Assomé (3%), Anié

(0,34%) ; Kara (0,34%),

L’analyse de la fréquence de consommation des riz montre que 83% des enquêtés

consomment les riz locaux et 91% les riz importés. Parmi eux, 74% consomment à la fois les

riz locaux et importés alors que respectivement 10% et 17% ne consomment que le local ou

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l’importé. En ce qui concerne le riz de Kovié, objet du cas d’étude, la fréquence de

consommation est très variée : 31% des enquêtés ne consomment pas le riz de Kovié ; 36% le

consomment une fois par semaine, 30% le prennent deux fois par semaine et 3% de temps en

temps.

Une analyse de la production et des importations de riz a été faite en vue de les comparer.

Ce graphique montre que le Togo ne couvre qu’environ 50% de ses besoins en riz d’ou le

recours aux importations.

Graphique 1 : Production  et  importation  de  riz  au  TOGO  de    2006  à  2011  

Il ressort de cette analyse que 40% à 50% du riz consommé au Togo provient des

importations . Bien que les riz importés à bas prix fournissent une large proportion des

approvisionnements, les riz locaux conservent une part appréciable du marché. Dans ces

conditions, les choix des consommateurs entre riz locaux et riz importés seront déterminés

par plusieurs facteurs et ces derniers adoptent différentes stratégies lors de

l’approvisionnement.

Part  des  différents  marchés    du  riz  de  Kovié  Les consommateurs s’approvisionnent directement pour 53% des cas sur les marchés de

Kovié et de Mission Tové situés dans la zone de production. Les 47% de consommateurs

restants l’achètent sur les marchés urbains de Lomé, de Tsévié, d’Agoe et sur les marchés

ruraux avoisinants. Le tableau 1 ci-dessous résume les différents lieux d’approvisionnement

du riz de Kovié par les consommateurs enquêtés.

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Il ressort de ce tableau que 32% des consommateurs s’approvisionnent via des réseaux

sociaux alors que 16% et 5% vont respectivement à Kovié à Mission Tové). Le reste du

marché est détenu par Lomé ( 20%) des consommateurs , Agoè ( 13%) des consommateurs) et

Tsévié (11%) des consommateurs.

Tableau 1 : Nombre d’enquête par marché

Lieux d’approvisionnement des consommateurs (marchés)

Nombre de consommateurs sur n=292

%

Marché de Kovié

47 16%

Marché de Mission Tové

15 5%

Marchés de Lomé (Commande via réseaux sociaux allant dans la zone de production Kovié

et Mission Tové)

93 32%

Marché de Lomé

58 20%

Marché de Tsévié

32 11%

Marché d’Agoé

38 13%

Marchés de Noepé et de Zanguera

6 2%

Achat à domicile auprès d’une revendeuse

3 1%

Total

292 100%

Source : Résultats d’enquête consommateurs, 2009

La part de ces différents marchés se présente comme suit :

Diagramme 1 : Part des différents marchés de vente du riz de Kovié

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Il ressort de l’analyse de ce diagramme que le plus grand marché en volume du riz du

périmètre rizicole de Kovié se retrouve dans sa zone de production soit 53% si l’on regroupe

l’approvisionnement par commande à travers les réseaux sociaux dans la zone de production

et les parts des marchés de Kovié et de Mission Tové, les deux principaux marchés de la zone.

L’achat de ce riz auprès des revendeuses s’observe sur les marchés où les revendeuses

utilisent différentes mesures pour différencier le prix du produit et selon sa qualité à défaut

d’un produit pré emballé et étiqueté comme le montre l’image ci-dessous.

Photo 1 : vente du riz avec différentes mesures sur le marché de Kovié

Cette différenciation du prix du produit en fonction des mesures et de sa qualité est il pris en

compte par les consommateurs lors de l’achat et ce par rapport aux riz importés ?

Relations  qualité-­‐prix  entre  riz  locaux  et  riz  importés  

L’achat du riz par les consommateurs sur les marchés est déterminé par plusieurs critères de

choix.

Tableau 02: Critères de Choix des consommateurs (n=292) Critères de choix Est très

accueillante Vend du riz de bonne qualité

Pratique de bon prix

Beaucoup de gens achètent chez elle

Classement par les consommateurs

oui % oui % oui % oui %

1ère position 150 51% 69 24% 36 12% 23 8% 2ème position 60 21% 104 36%

68 23% 39 13%

3ème position 54 18% 48 16% 95 33% 29 10% 4ème position 6 2% 20 7% 39 13% 64 22% 5ème position 1 0% 2 1% 0 0% 3 1% Total 271 93% 243 83% 238 82% 158 54% Source : Résultats d’enquête auprès des consommateurs au Togo, 2009

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L’analyse de ces critères de choix montre que 51% des consommateurs se privilégie le critère

revendeuse très accueillante (qualité « service-client ») , 24% se base sur la bonne qualité

(qualité matérielle ou qualité intrinsèque du produit) et 12% sur le prix alors 8% observe

d’abord si beaucoup de gens achètent chez cette revendeuse .

Il apparait que le prix ne vient qu’en troisième position dans les critères de choix. En effet,,

67% des consommateurs déclarent négocier le prix avec la revendeuse après que celle-ci ait

donné son prix.

L’analyse du différentiel de prix entre ces produits importés et les produits locaux en ce qui

concerne le riz, objet de cette recherche, donne les résultats suivants :

Tableau 3: Prix des riz locaux et importés

Type de Riz

Et (origine)

Prix calculé

en FCFA /kg

Ecart de prix (FCFA)

Avec le riz de Kovié

Riz de Kovié

(local- Togo)

467

-

riz local d’Agome

glozou)

367

- 22,6%

Riz de Kpele Akata

(riz local)

333

- 28,6%

Riz Alizé ((importé de

Thaïlande)

390

- 2,5%

Riz Patron (importé de

Thaïlande)

370

- 7,5%

Riz IBO

(importé du Nigéria)

220

- 45%

Source : Résultats d’observation des prix de riz sur les marchés de Lomé (2009)

L’analyse du tableau permet de faire deux types de comparaisons : le riz de Kovié par rapport

aux riz locaux d’Agome Glozou et de Kpele Akata et le riz de Kovié par rapport aux riz

importés Alizé, Patron et IBO selon les modalités de conditionnement du riz.

Parmi les riz locaux qui sont vendus en bols et en vrac sur le marché. le prix du riz de Kovié

est supérieur au prix des autres riz locaux vendus sur le marché. Le prix du riz de Kovié est

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plus élevé de 28,6% par rapport au riz de Kpele Akata et 22,6% par rapport à celui d’Agome

Glozou. Cet écart de prix rend compte de la disposition à payer pour la spécificité et ceci

serait lié aux attributs de qualité perçus.

Entre le riz de Kovié et les riz importés, le prix au kg du riz de Kovié est encore le plus élévé.

Son prix est respectivement de 45 % et 7,5% plus élevé que ceux des riz IBO et Patron

importés respectivement du Nigéria et de Thaillande. Malgré la concurrence, le riz de Kovié

se maintient sur le marché grâce à son attribut de qualité liée à l’origine géographique. La

valorisation des attributs de qualité de ce riz de Kovié par les consommateurs a été analysée.

Valorisation  des  attributs  de  qualité  du  riz  de  Kovié  au  Togo  

La qualité du riz est importante pour les consommateurs enquêtés. Les résultats montrent que

le riz de Kovié a un bon goût et est naturellement parfumé. Son arôme se sent sur le sentier

du périmètre rizicole qui donne un beau paysage à voir. Il est reconnu comme un riz

originaire de Kovié , unique par ses attributs de qualité meilleurs par rapport aux autres riz.

C’est un riz qui fait la fierté de ses producteurs et des ressortissants de ce territoire

géographique. Cependant, on peut trouver parfois mais rarement quelques petits débris

végétaux. Autres spécificités, il faut savoir le préparer car si l’on ne sait mettre de l’eau, il

risaue de se transformer en pâte. La quantité d’eau doit être mesurée correctement

L’importance des attributs de qualité diffère selon les consommateurs.

Pour ces derniers, les attributs les plus connus du le riz de Kovié sont sa valeur nutritive

(71% des consommateurs) ; son bon goût (47% de consommateurs) ; son caractère naturel (

sans pesticides ni résidus d’insecticides) et frais( provient directement du champ, non stocké

pendant longtemps)(41%) ; son origine géographique Kovié (24% de consommateurs) ainsi

que son arôme parfumé (23%).

Hiérarchisation   des   attributs   de   qualité   du   riz   de  Kovié   par  

les  consommateurs  

Les consommateurs privilégient pour la première position la valeur nutritive, suivie de

l’arôme parfumé, du bon goût , de l’aspect naturel et frais, et du lien à l’origine à Kovié.

Ces résultats montrent que les consommateurs reconnaissent pour le riz de Kovié plusieurs

caractéristiques. Ce riz peut être considéré comme un panier de caractéristiques qui procurent

de l’utilité à ces consommateurs au sens de Lancaster (1966a ; 1996b).

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En considérant tous les attributs cités par les consommateurs, une classification selon la

typologie des biens de Nelson (1970, 1974) et de Darby et Karni ( 1973) peut être obtenue

suivant que l’attribut de qualité cité par le consommateur relève d’une caractéristique de

recherche, d’expérience ou de croyance.

Classification des attributs de qualité du riz selon la typologie de Nelson; Darby et Karni. Les principaux attributs de qualité reconnus par les consommateurs pour le riz de Kovié

peuvent se classer en trois groupes de caractéristiques : les caractéristiques de recherche, les

caractéristiques d’expérience et les caractéristiques de croyance.

Les caractéristiques de recherche du riz de Kovié

Ce sont les attributs de qualité ayant trait à l’apparence du riz et qui sont recherchés par les

consommateurs. Il s’agit du « bien blanc » (9%) ; du « long grain » (11%), du « grain

moyen » (1%) et de la présence ou non de cailloux ou débris végétaux (2%). Ces

caractéristiques sont en effet identifiables par le consommateur avant l’achat de ce riz.

Les caractéristiques d’expérience du riz de Kovié

Les caractéristiques que le consommateur ne peut réellement connaître qu’après achat, usage

et consommation de ce riz sont : le « bon goût » (47%) ; le « savoir préparer » (3%), le « bien

collant » (8%) ; « trop collant, pâteux ou très amidonné » (13%) ; « gonfle bien » (11%) ;

« très doux» (3%) et le « caractère nutritif ou très nutritif » ( 71%).

Les caractéristiques de croyance du riz de Kovié

Parmi les attributs de qualité du riz de Kovié, certains ne peuvent être perçus ni avant ni après

l’achat et la consommation de ce riz. Ce sont des attributs qui relèvent de la croyance du

consommateur. Ce sont le « caractère naturel et frais » (41% de consommateurs l’ont

évoqué) ; le « lien à l’origine Kovié » (24% des consommateurs s’y réfèrent), « l’attribut local

et traditionnel » (5%). « L’attribut nutritif et très nutritif » (71%) peut également appartenir à

cette classe de caractéristiques de croyance.

Discussion  des  résultats  

La connaissance et la différenciation des riz locaux et importés par les consommateurs

montrent qu’il existe une identification des produits sur les marchés ouest africains et que les

consommateurs malgré leur pouvoir d’achat faible porte l’attention sur la qualité lors de leur

achat. Les riz locaux sont plus achetés et consommés par des consommateurs connaisseurs ou

pour qui ces riz rappellent un certain attachement à leur territoire d’origine. Le comportement

marketing des revendeuses sur les marchés urbains de Lomé, qui évoquent « Riz de Kovié »

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pour l’écoulement rapide de ce riz se justifie pour informer les consommateurs et les rassurer

de la qualité de ce riz

Mais, les achats par certains consommateurs dans la zone de production montre également

qu’il existe une méfiance à l’égard de certaines revendeuses de Lomé qui usurperaient ce nom

pour la vente d’autres riz. Le désir d’éviter cette usurpation de nom par certaines

revendeuses a été signalé par 27% des 41 producteurs enquêtés.

La caractéristique « valeur nutritive » du riz de Kovié est à la fois d’expérience et de

croyance. Elle est donc bivalente car si une personne consomme un produit et qu’à l’issu, elle

trouve satisfaction ou elle arrive à satiété et ne tombe pas malade, elle peut dire que ce produit

est nutritif. Elle obtient ainsi une information sur sa qualité qui, dans ce cas, relève des

caractéristiques d’expérience. Par contre, si elle tombe malade par la suite, elle peut lier les

effets de cette maladie à ce qu’elle avait consommé et dire que ce produit était contaminé.

Cela relève dans ce cas de la croyance si d’autres analyses ne sont pas faites. De plus,

l’attribut nutritif apparaît plus du domaine de la croyance étant donné que le consommateur

ignore la composition nutritionnelle exacte de son produit. Puisqu’il est difficile au

consommateur dans ce cas de connaître la qualité du produit même après consommation,

l’attribut de qualité nutritive évoqué peut être aussi considéré comme une caractéristique de

croyance.

Les résultats sur le riz de Kovié ont été comparés à ceux des études sur la qualité et la

compétitivité des riz locaux et importés sur les marchés urbains en Afrique de l’ouest de

Lançon et al (2004). Les études de ces auteurs ont montré que « à Bouaké, la capacité de

gonflement et la propreté sont les facteurs déterminants dans le choix des riz importés. Le

prix n’est mentionné comme premier facteur que pour 30% des consommateurs interrogés.

L’achat des riz locaux est largement déterminé par la recherche des propriétés

organoleptiques particulières telles que le goût et la perception d’une qualité nutritive. Au

Nigeria, les propriétés organoleptiques jouent un moindre rôle et les choix des

consommateurs sont essentiellement déterminés par les attributs de marché (prix,

disponibilité) et par les attributs acquis au cours du processus de transformation et de

commercialisation notamment la propreté et l’apparence.» (Lançon, F. et al. (2004)).

Par rapport aux travaux de Lançon et al. (2004) sur les marchés ouest africains, cette étude

montre que les consommateurs sont à la recherche de produits de qualité liée à l’origine

géographique.

Les riz locaux sont appréciés pour qualité liée à l’origine géographique par rapport aux riz

importés. Ces derniers ne sont recherchés que pour leur propreté et caractère de gonflement.

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Conclusion  

Cette étude sur le choix des consommateurs selon les attributs de qualité du riz de Kovié au

Togo montre que les consommateurs qui achètent sur les marchés locaux connaissent et

différencient les riz, selon qu’ils sont locaux ou importés. Le riz de Kovié est vendu en vrac.

Le prix n’est pas le premier facteur de choix, par contre l’origine est un déterminant de la

qualité qui vient avant le prix pour les consommateurs.

Les résultats posent plusieurs questions dont celles de la valorisation de l’origine avec ou sans

identifiant de son origine. Une valorisation des attributs par une identification pourraient

permettre un meilleur positionnement des produits locaux dans les superettes dont ils sont

absents, ce qui pourrait leur faire gagner des parts de marchés face à la concurrence des

produits importés à bas coûts.

Certains produits de base comme les riz locaux sont fortement concurrencés par les

importations à bas coûts. Le riz local n’a pas encore réussi à pénétrer les marchés urbains de

superettes où les riz importés sont vendus, malgré le fait que de nombreux africains marquent

une préférence pour les variétés locales (Saartje et al, 2013), et notamment, en Afrique de

l’Ouest, pour une fraîcheur parfaite et l’appréciation des propriétés intrinsèques du riz local.

Un système de vente aux enchères organisé par AfricaRice à l’aveugle a par ailleurs montré

que les ménagères de plusieurs pays ouest africains étaient systématiquement disposées à

payer une somme significativement plus importante pour acheter du riz produit localement

pour son odeur (le riz issu de stocks asiatiques vieux de plus d’un an n’a pas d’odeur) et son

goût.

Face à cette situation, il existe un défi, celui de valoriser autant que possible le riz local avec

l’objectif que les produits dont l’origine géographique est un critère distinctif puissent gagner

des parts de marchés et une plus value. Ces riz locaux ont un potentiel de croissance qui

semble avoir été sous-estimé dans les politiques agricoles et commerciale et dans les

politiques de coopération pour une souveraineté alimentaire en Afrique de l’Ouest (Barjolle et

al., 2014).

Cependant, les filières locales devraient pour atteindre ce but, se structurer au niveau

commercial, et au niveau de la gestion de la qualité. Une démarche de qualification peut les

aider dans ce sens, tout en entraînant les coûts supplémentaires du contrôle et de la

certification si un enregistrement dans le cadre du système légal de protection des IG est

envisagé (Barjolle et al. 2014). Dans l’optique de l’obtention de cette reconnaissance

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officielle qui apporte des garanties élevées de protection aux producteurs et d’authenticité aux

consommateurs, la définition des caractéristiques liées au terroir et la construction collective

du cahier des charges sont des étapes nécessaires. Le renforcement de la gouvernance

collective de la filière et des actions communes pour une promotion collective, la protection

du nom et la lutte contre les usurpations sont des éléments importants à mettre également en

place.

Toutes ces démarches nécessitent des investissements plus ou moins importants, avec des coûts de définition du cahier des charges, d’adoption, de mise en conformité, de vérification (contrôles et certification), de promotion, de surveillance des marchés et de lutte contre les usurpations.

L’objectif de développer les filières locales pose, au-delà de la qualification et de la

protection, d’autres défis en terme de commercialisation à plus large échelle, par exemple

dans les supérettes urbaines. Par exemple, le conditionnement est un point crucial : le riz de

Kovié devrait être conditionné dans des sacs ou cartons avec indication claire de l’origine, et

d’une manière qui informe le consommateur. Les consommateurs ont une reconnaissance

spontanée de l’origine du produit, un simple conditionnement permettrait la vente dans les

superettes mais il y a une crainte d’usurpation sans protection. Quel serait alors le coût de la

labélisation, de la protection et du contrôle qualité ? Les consommateurs seraient-ils prêts à

payer un prix plus élevé pour couvrir ces nouveaux coûts ? Les institutions publiques seront-

elles prêtes à adopter une politique de riz forte pour la souveraineté alimentaire à travers une

politique de qualité et de l’information et des règlementations commerciales en faveur des

productions locales pour assurer leur compétitivité et la qualité des produits aux

consommateurs ? L’évaluation des coûts et consentement à payer des consommateurs pour la

qualité liée à l’origine permettrait aux décideurs de prendre des orientations stratégiques pour

la valorisation des produits de qualité liée à l’origine en tenant compte de leur valeur ajoutée

économique.

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Bibliographie  

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