Analyse du Livre des Ostz de 1294

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1 Analyse du Livre des Ostz (1294) Par Frédéric Morvan Publié dans dans Jean Kerhervé (sous dir.), Noblesse de Bretagne du Moyen Age à nos jours, Rennes, 1999, p. 37-88. Le climat politique n'est guère serein en 1294. Pour Ferdinand Lot 1 , "la guerre de Cent ans a commencé bien avant la date initiale (1338-1339) qu'on lui attribue couramment". Dès la fin XIII e siècle, en effet, après quatre-vingts ans de paix relative 2 , les Plantagenêts et les Capétiens reprennent leurs vieilles querelles. La cause en est toujours la même : l'Aquitaine anglaise, ou plutôt ce qu'il en reste à la fin du XIII e siècle, la Guyenne, confisquée justement le 19 mai 1294 par Philippe le Bel qui déclenche la guerre de Guyenne (1293-1303) 3 , suivie bientôt de la guerre de Flandre (1297-1302) 4 . La Bretagne est au cœur de ce conflit. L'affaire de Guyenne, en effet, commence au large de la Bretagne. La concurrence est vive entre les marins normands, bretons, poitevins, d'une part, anglais et bayonnais de l'autre pour un lieu de pêche, pour un tour de passage à l'affrètement, pour une affaire de navigation, au Conquet, à la Pointe Saint-Mathieu 5 . En 1293, les Normands prennent et coulent en se rendant en Aquitaine quatre-vingts navires anglais et bayonnais. Au retour, au large des côtes bretonnes, ils sont écrasés par la flotte des Cinq ports dont Édouard I er avait ordonné le rassemblement. Philippe le Bel réplique en exigeant la livraison des officiers et marins coupables. Par le traité de Paris, signé le 3 janvier 1294, le roi d'Angleterre cède, mais Philippe le Bel veut la guerre et obtient tout de même la confiscation du duché de Guyenne le 19 mai 1294. La Bretagne est vitale. Elle est enjeu géostratégique, selon des termes bien d'aujourd'hui. Elle peut être un obstacle à la liaison maritime entre l'Angleterre et l'Aquitaine, ou tout au contraire, une base de ravitaillement et de protection face aux navires pro-français. Le duché et le duc sont riches de population, de terre, de châteaux et peuvent se payer une guerre coûteuse. Pour les deux rois, il est essentiel d'avoir le contrôle des mers, Manche et Atlantique. Édouard I er échoue dans ses tractations avec le roi de Castille. Le duché de Guyenne est donc aussi menacé au sud. Il est en mauvaise posture en Angleterre : les Gallois sont turbulents à l'Ouest, les Écossais sont alliés à la France, la mer du Nord paraît bouclée par l'alliance française avec les comtes de Hollande, de Hainaut et le roi de Norvège, il ne manquerait plus que la route maritime atlantique, reliant l'Angleterre et le duché de Guyenne, soit coupée. Ce serait 1 Voir F. LOT, L'art militaire et les armées au Moyen Âge en Europe et dans le Proche Orient , Paris, 1946. 2 Depuis la victoire de Bouvines, en 1214, par Philippe-Auguste. 3 Voir les Rôles Gascons publiés, tome I par Francisque-Michel, tomes II et III par Charles Brémont (Documents Inédits), Paris, 1885-1905. 4 Voir F. FUNCK-BRENTANO, Les Origines de la guerre de Cent ans, Philippe le Bel en Flandres , Paris, 1897. 5 Dom H. MORICE et dom C. TAILLANDIER, Histoire ecclésiatique et civile de Bretagne , Paris, 1750- 1756, p.213 qui s’appuie sur Thomas Walsingham , Historia anglicana, publiée par Riley (Rolls series) , Londres, 1863-1864, p. 60 : En 1279, l'adjudication des sécheries ducales de poissons de la Pointe Saint-Mathieu à des Bayonnais provoque des conflits avec les Bretons, devenant violents en 1289.

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1

Analyse du Livre des Ostz (1294)

Par Frédéric Morvan

Publ ié dans dans Jean Kerhervé (sous d ir . ) , Noblesse de Bretagne du Moyen

Age à nos jours , Rennes, 1999, p . 37 -88 .

Le cl imat pol i t ique n 'es t guère serein en 1294. Pour Ferdinand Lot1,

"la guerre de Cent ans a commencé bien avant la date ini t iale (1338 -1339)

qu 'on lui at t r ibue couramment". Dès la f in XIIIe s iècle, en effet , après

quatre-vingts ans de paix relative 2

, les Plantagenêts et les Capétiens reprennent

leurs vieilles querelles. La cause en est toujours la même : l 'Aquitaine anglaise,

ou plutôt ce qu'il en reste à la fin du XIIIe siècle, la Guyenne, confisquée

justement le 19 mai 1294 par Phi l ippe le Bel qui déclenche la guerre de

Guyenne (1293-1303)3, suivie bientôt de la guerre de Flandre (1297-1302)

4.

La Bretagne est au cœur de ce confl i t . L'affai re de Guyenne, en effet ,

commence au large de la Bretagne. La concurrence est vive entre les

marins normands, bretons, poi tevins , d 'une part , anglais e t bayonnais de

l 'autre pour un l ieu de pêche, pour un tour de passage à l 'a ffrètement , pour

une affai re de navigat ion, au Conquet , à la Pointe Saint -Mathieu5. En 1293,

les Normands prennent et coulent en se rendant en Aqui taine quatre -vingts

navires anglais et bayonnais . Au retour , au large des côtes bretonnes, i l s

sont écrasés par la f lot te des Cinq ports dont Édouard Ie r

avai t ordonné le

rassemblement . Phi l ippe le Bel répl ique en ex igeant l a l ivraison des

off iciers et marins coupables . Par le t rai té de Paris , s igné le 3 janvier

1294, le roi d 'Anglet erre cède, mais Phi l ippe le Bel veut la guerre et

obt ient tout de même la confiscat ion du duché de Guyenne le 19 mai 1294.

La Bretagne est vi ta le. El le es t enjeu géostratégique, selon des termes bien

d 'aujourd 'hui . El le peut êt re un obs tacle à la l iaison m ari t ime entre

l 'Angleterre et l 'Aqui taine, ou tout au contrai re, une base de ravi tai l lement

et de protect ion face aux navires pro -français . Le duché et le duc sont

r iches de populat ion, de terre, de châteaux et peuvent se payer une guerre

coûteuse. Pour les deux rois , i l es t essent iel d 'avoir le contrôle des mers ,

Manche et At lant ique. Édouard Ie r

échoue dans ses t ractat ions avec le roi

de Cast i l le . Le duché de Guyenne est donc aussi menacé au sud. Il es t en

mauvaise posture en Angleterre : les Gal lois sont turbulents à l 'Ouest , les

Écossais sont al l iés à la France, la mer du Nord paraî t bouclée par

l 'a l l iance f rançaise avec les comtes de Hollande, de Hainaut et le roi de

Norvège, i l ne manquerai t plus que la route mari t ime at lant ique, rel iant

l 'Angleterre e t l e duché de Guyenne, soi t coupée. Ce serai t

1 Vo i r F . LOT , L 'a r t m i l i t a i re e t l e s a rmées a u Mo yen Âg e en Eu ro p e e t d a n s l e Pro ch e

Or ien t , P a r i s , 1 9 46 . 2 Depuis la victoire de Bouvines, en 1214, par Philippe -Auguste.

3 Vo i r l e s Rô les Ga scon s p ub l i é s , t o me I p a r F ranc i sq ue -Mic he l , t o me s I I e t I I I p ar

Cha r l e s B ré mo nt (Do cu men t s Inéd i t s ) , P a r i s , 18 8 5 -1 9 05 . 4 Vo i r F . FUNCK -B REN T ANO, Les Or ig in es d e la gu erre d e Cen t a ns , Ph i l ip p e l e Be l

en F la n d res , P a r i s , 1 897 . 5 Do m H. MORI CE e t d o m C. T AILLAN DIER, H i s to i re ecc lé s ia t iq u e e t c i v i l e d e

Bre ta g n e , P a r i s , 17 5 0 -1 7 5 6 , p .2 13 q u i s ’ap p uie sur T ho mas W al s in g ha m , H i s to r ia

a n g l i ca na , p ub l i ée p ar Ri l e y (Ro l l s se r i e s ) , Lo nd res , 1 8 6 3 -1 86 4 , p .60 : En 1 27 9 ,

l ' ad j ud ica t io n d es séc he r i e s d uca le s d e p o i s so n s d e l a P o in te Sa in t -Mat h ieu à d e s

B ayo nna i s p ro vo q ue d es co nf l i t s a vec l e s B re to ns , d evena nt v io len t s en 1 2 8 9 .

2

immanquablement la f in de toutes possibi l i tés de défendre ce terr i toi re,

ainsi que l 'é touffement économique de l 'Angleterre. Le roi Édouard Ie r

d 'Angleterre doi t fa i re entrer impérat ivement dans sa zone d ' influ ence la

Bretagne6. Edouard d 'Angleterre a deux atouts : le duc de Bretagne est

t i tulai re du t rès r iche comté anglais de Richemont ; son neveu, Jean de

Bretagne, f i ls cadet du duc, vi t auprès de lui . Édouard, ayant reçu

l 'assent iment de son parlement (8 jui n) , réussi t à réunir des t roupes et

l 'argent nécessaire. La f lot te anglaise doi t part i r de Plymouth pour

t ransporter l 'a rmée de secours en Guyenne. La date de départ es t prévue au

1e r

septembre 1294, mais es t repoussée ensui te jusqu 'au 30 du même mois7.

Le premier jui l let , soi t un mois avant l 'Assemblée de Ploermel , i l nomme

Jean de Bretagne chef des t roupes angla ises et gasconnes8 e t mets le duc et

le duché dans une s i tuat ion intenable. Le duc se doi t de chois i r son camp.

Jean II n 'a jamais paru vouloir se mêler de ce confl i t entre ses deux

puissants vois ins9. Jusque là, les ducs de Bretagne avaient mené une

pol i t ique de neutral isme nuancé dominée par des al l i ances famil iales

prat iques10

.

Le premier soin du duc est donc d 'es t imer ses forces en assemblant11

à la mi

août 1294 à Ploermel , alors sa capi tale , ses vassaux directs . Le Livre des

Ostz en perpétue la mémoire. Il es t une source de première importance car

dans bien des cas , i l const i tue la seule référence sur l 'o r igine et l 'ex is tence

au XIIIe s iècle de t el ou tel f ief , mais aussi sur l 'ex is tence de tel ou tel

seigneur. Émanant de la récente chancel ler ie de Bretagne, i l at tes te des

grandes divis ions adminis t rat ives de la "Bretagne féodale" . Il fourni t une

sorte d ' instanné du sys tème féodo -vassal ique en Bre tagne à l 'ex trême f in du

XIIIe s iècle. Hélas , s t ructures mil i tai res et gens de guerre y sont révélés de

manière peut -êt re t rop obscure car le t emps a effacé beaucoup de t races . Ce

qui paraissai t l impide aux contemporains es t pour nous, parfois , un

véri table mystère. Mais avant de poursuivre, rappelons brièvement , puisque

6 Y . RENO U AR D, " Le gr and co mmerce d es v ins d e Gas go g ne a u M o ye n Age" , d a n s

Revu e h i s to r iq u e , t . CCXXI , 1 9 59 , p .2 . 7 I . LUB IMENKO, Jea n d e Bre ta g n e , co mte d e R ich emo n t . S a v i e e t so n a c t i v i t é en

An g le t e rre , en Eco sse e t en Fra n ce , Li l l e , 1 9 08 , p . 5 . 8 La t hèse d ' I n na LUB I MENKO d o nt l e s r é fé r ences o n t é t é c i t ée s p a r R . F AW T IER,

(L 'Eu ro p e o cc id en ta le d e 1 2 70 à 1 3 80 , so us l a d i r ec t io n d e G . G LOT Z, His to i re d u

Mo yen Ag e , P ar i s , 1 9 40 , t . VI , p r e miè re p a r t i e , p . 3 1 4 ) a mo nt r é l a co nfus io n fa i t e p a r

Do m Mo r ice (His to i re … , o p . c i t . , t . I , p . 2 14 ) e t A. d e LA B O RDER IE e t B . P OCQUET

DU H AUT -J USSE, His to i re d e la B re ta g n e , Ren nes -P a r i s , 1 8 9 6 -1 9 14 , Ma yen ne , 1 9 7 5 ,

t . I I I , p . 3 60 , no te n°2 ) en t r e J ean I I e t so n f i l s cad e t , J ean d e B re tagne . En a ucu n cas ,

J ean I I ne d i r ige l ' exp é d i t io n ang la i se e n Gu y enne . En effet, dom Morice en 1750 écrivait

" i l (Éd o ua rd Ie r

) a ssemb la u n e g ro sse a rmée , d on t i l d on n a l e co mma n d emen t a u Duc

d e Bre ta g n e , so n n eveu a vec o rd re d e p ren d re co n se i l d e Jea n d e S a in t Jean , de

Ro b er t Tyb o to t e t d 'Amen io n d 'A lb re t " . A. d e L A B O R D E R IE r a j o u te q ue " d an s ces

l e t t re s , Éd o u a rd Ie r

ap p e l l e Jea n I I so n n eveu (n ep o s n o s te r ) ; c ' é ta i t en réa l i t é so n

b ea u - f rè re" . En c ro ya nt co r r ige r une e r r eur , A. d e La B o rd er i e en fa i t une p l us g r ave . 9 LA B ORDE RIE , His to i re d e la Bre ta g n e , o p . c i t . , t . I I I , p . 36 0 .

10 J ean I I e s t u n p r ince c ap é t i en ( i l e s t l e p e t i t - f i l s d e P ie r r e d e Dreux , d i t Mauc le r c ) e t

co us i n ge r ma in d e P h i l ip p e l e B e l . Co mte d e Riche mo nd , i l e s t l ' un d es p l us r i che s

se ig ne ur s d 'An gle t e r r e . So n ép o use e s t l a so eu r d 'Éd o ua rd Ie r

d 'Ang le t e r r e . So n seco nd

f i l s , J ean e s t é l evé à l a co ur d 'An gle t e r r e . 11

E s t -ce une mo n t r e , c ' e s t -à -d i r e u ne r ev ue mi l i t a i r e ? Ce n 'e s t guè r e év id en t ca r l e s

o f f i c i e r s ne co mp tab i l i sen t q ue l e s co n t r ib u t i o ns d ues , e t ne fo n t j ama i s d e r e marq ues

d 'o rd re lo g i s t iq ue , p o r t an t s ur l e s che va ux o u sur l ' a r me me nt .

3

nous nous at tarderons davantage sur sa descript ion et sur l ' ident i f icat ion

des différents personnages et l ieux ci tés dans l 'annexe, qu ' i l nous est

parvenu dans deux manuscri ts , l 'un conser vés aux Archives

Départementales Loire -Atlant ique à Nantes où i l es t considéré comme le

plus ancien manuscri t du Trésor des Chartes de Bretagne de Nantes12

,

l 'autre à la Bibl iothèque Nat ionale13

. Une analyse importante lui a été

consacrée à la f in du XIXe s iècle par Marcel Planiol

14. Mais les

préoccupat ions étaient davantage juridiques. Barthélémy Pocquet du Haut -

Jussé15

, en 1963, s 'es t intéressé à son aspect sociologique afin de découvrir

les origines de la noblesse bretonne. Enf in, Michel Pastoureau16

, en 1973, a

eu l 'excel lent méri te d ' ident i f ier un grand nombre de personnages ci tés à

part i r d’un t ravai l antérieur de R. Gaignière, hélas sujet à caut ion17

.

Ce document permet de soulever un problème grave pour le duc et le duché

de Bretagne. A la vei l le d 'une période de guerre quasi permanente, de quels

éléments mil i tai res pouvaient - i ls disposer . Ce qui équivaut à déterminer

l 'é tat du système féodo -vassal ique bre ton ? La Bretagne connaî t -el le à

l ' ins tar d 'autres régions d 'Europe le t radi t ionnel décl in des inst i tut ions

féodales , vassal iques et mil i tai res dont la période d 'apogée semble

s 'étendre du mil ieu XIIe au mil ieu du XIII

e s iècle ? Ou toujours archaïque,

comme le prétendent certains médiévis tes du s iècle dern ier , la Bretagne

conserve-t -el le des inst i tut ions d 'un autre âge ?

Les pages qui vont suivre viseront seulement à dégager les raisons d 'êt re,

les principaux caractères et les résul tats du L ivre des ost z .

Dès le préambule, véri table int roduct ion à ce document , l 'object i f du

duc y est énoncé : aff i rmer et af fermir son autori té . Jean II fait réunit son

armée, «semons ses ouz » afin de recueillir les « recoignoissances que les barons

et autres genz li firen... » Les récalcitrants seront frappés d' « amante comme

roison devroi t de ceulx vers quelx i l le pourra monstrer . . . »18

. Le duc

souhaite apprécier la capacité de ses vassaux directs à se mobiliser militairement

et financièrement afin de combattre pour l' intégrité du duché et pour son duc. Il

peut avoir désiré apprécier l 'ampleur de son emprise sur la noblesse bretonne,

l 'étendue et surtout l'évolution de son domaine et l 'efficacité de son

administration.

Jamais la pol i t ique de la mise au pas des grands f eudataires , imitée des rois

de France, n 'a été aussi eff icace. Le Livre des Ostz en montre les résul tats .

12

Arch ive s Dép a r t e me nt a l e s d e Lo i r e -At l an t iq u e , T réso r d es Cha r t e s , E 1 3 2 . 13

B ib l io thèq ue Na t io na l e , ms. f ra n ça i s 1 6 5 9 , f ° 5 9 v ° -66 v ° . 14

M. P LANIO L, His to i r e d es in s t i t u t io n s d e la Bre ta g n e , t o me s 3 , 4 e t 5 , Mayen ne ,

1 9 8 1 -1 98 4 . 15

B . P OCQUET DU HAUT J USSE (B . ) , " De l a vassa l i t é à l a no b le s se d ans l e d uché d e

B re tagne" , d ans Ac tes d u 88e Co n g rès d es soc ié t é s S a va n te s , C le rmo nt -Fe r r and , 1 9 6 3 ,

Bu l l e t in p h i lo lo g iq u e e t h i s to r iq u e . d u C . T .H .S . , t . 1 , 1 96 3 , p . 78 5 -80 0 . 16

M. P AST OURE AU, " L 'hé r a ld iq ue b r e to nne . D es o r ig ine s à l a gue r r e d e succes s io n d e

B re tagne" , d ans Bu l l e t in d e la So c ié t é Arch éo lo g iq u e d u F in i s t è re , t . CI , 1 9 73 , p . 12 1 -

1 4 7 . 17

B .N . , ms. f r . , 2 2 3 6 1 , f° 1 1 9 -1 2 1 : No ms , q u a l i t é s e t d esc r ip t io n s d es a rme s d es

se ig n eu rs d es évêch és d e Renn es , Trég u ie r , Co rn o u a i l l e s o u Qu imp er e t d e Léon en

1 2 9 4 .

18

A.D . L. A. , l e Livre d es Os t z , E 1 3 2 , f . 4 r°

4

La maison de Penthièvre, cadet te de la maison des comtes de Rennes19

,

véri table concurrente de la dynast ie ducale, quasi indépendante au XIIe

s iècle, paraî t soumise et repl iée dans ses domaines f rançais ( la terre de

Mayenne, essent iel lement) . Henri d 'Avaugour, l 'héri t ier , ne t ient plus que

les terres de Goël lo et de Quint in en Bretagne. Les f iefs de Penthièvre et

de Tréguier ont été confisqués en 1222 pa r Pierre de Dreux au nom de sa

femme, Alix de Thouars , duchesse de Bretagne, héri t ière de la branche

d 'Alain le Noir20

. Sa vicomté de Dinan n 'es t même pas ci tée car , même s ' i l

en est encore t i tulai re, el le es t alors dans les mains du duc. Henri II (mort

en 1318) doi t se contenter d 'une vague juridict ion sur Dinan, at tes tée

encore en 1287 et 129721

. On aurai t pu croire que la seigneurie de Cl isson,

relevant directement du duc, serai t ci tée. Il n 'en est r ien. Les Cl isson qui

s 'é taient rebel lés sous le règne de Pierre Mauclerc avaient été pardonnés et

avai t ret rouvé leurs biens. Pourtant , l e seigneur de Cl isson n 'avoue au

total quatre cheval iers pour ses f iefs d 'Héric et de Pontchâteau et ne

ment ionne pas sa ter re de Cl isson. La ter re et l e château de Cl isson so nt- i ls

donc sous le contrôle direct du duc en 129422

? Le t rès puissant et turbulent

l ignage de Léon, rebel le au XIIe s iècle

23 e t ami des Penthièvre, n 'es t plus

représenté que par Hervé de Léon, de la branche cadet te . La branche aînée

est totalement ruinée. Les ducs Jean Ie r

e t II ont acquis morceaux après

morceaux l 'ensemble de leurs biens24

. Les Lanvaux, héri t iers de la maison

d 'Hennebont , seigneurs de Guemenet -Héboi ont tout perdu après deux

révol tes , en 1238 et en 127225

. Leur héri t ier , Alain est rédui t à déclarer un

demi-cheval ier pour la terre de Trogoff qui lui vient de sa femme26

. Les

ant iques maisons bretonnes de Vitré, de La Guerche, de Porhoët et de

Fougères , s i désireuses d 'autonomie n 'ex is tent plus , ass imilées par

d ' i l lust res l ignages d 'origine f ran çaise, proches de la cour de Paris . Les

19

Vo i r l ’a r t i c l e sur l ’o r ig ine d e ce t t e ma i so n e t sur se s r e l a t io n s a vec l e s d ucs d e

B re tagne d e H . GUILLOT EL, " Les o r ig ine s d e Gui nga mp , sa p l ace d ans l a géo grap hi e

féo d a le b r e to n ne" , d ans Mémo i re d e la So c ié t é H i s to r iq u e e t Arch éo lo g iq u e d e

Bre ta g n e , t . LVI , 1 9 79 , p . 8 1 -1 00 . 20

J . GESLIN d e B OURGOGNE e t A. d e B ART HELEMY, Les a n c ien s évêch és d e

Bre ta g n e . H i s to i re e t mo n u men t s , P a r i s , 1 85 5 -1 8 7 9 , t . 5 , p . 13 . 21

Do m H. MO RICE, M émo ires p o u r se rv i r d e p reu ves à l ' h i s to i re ecc lé s ia s t iq u e e t

c i v i l e d e Bre ta g n e , P a r is , 1 7 4 2 -1 7 46 , t . I , co l . 9 6 3 , 9 9 1 , 9 98 , 10 1 5 , 10 5 0 , 1 0 66 . 22

A. d e LA B ORDE RIE , His to i re d e la Bre ta g n e , o p . c i t . , t . I I I , p . 3 4 4 e t Do m Mo r ice ,

P reu ves , o p . c i t . , t . I , co l . 97 6 e t P . d e B ERT HOU, Cl i s so n e t se s mo n u men t s , 1 89 0 ,

Nantes , p . 3 2 2 . 23

H . GUILLOT EL, " Les v i co mtes d e Léo n au XIe e t XI I

e s i èc l e s" , dans M.S .H.A .B . ,

1 9 7 1 , t . LI , p . 2 9 -5 1 e t A. -Y . , B OU RGES, " L 'e xp ans io n t e r r i to r i a l e d es v i co mte s d e

Léo n à l ' ép o q ue féo d a l e" , d ans B.S .A .F . , p . 364 -3 7 3 . 24

Vo i r l e s ac t e s r éun i s p a r A. d e La B o rd er i e sur " l ' a cq uê t d u co mté d e Léo n p a r l e d uc

d e B re tagne" , d ans " Re cue i l d 'ac t e s i néd i t s d es d uc s e t p r inces d e B re tagne , XIe, XI I

e,

XI I Ie s i èc l e s" , d ans Bu l l e t in e t mémo ire d e la so c ié t é a rch éo log iqu e d u d épa r temen t

d ' I l e - e t -V i la in e , t . XIX, 1 8 89 , p . 2 11 -2 4 7 . 25

J . -M. LE MENE, His to i re a rch éo lo g iq u e f éo d a le e t re l ig i eu se des p a ro i s se s d u

d o icèse d e Va n n es , Vanne s , 1 8 9 1 , t . I , p . 9 8 e t 1 0 8 e t " Généa lo g ie d es se ig ne ur s

d 'He nneb o nt" , d ans B u l l e t in d e la So c ié t é Po lyma t iq u e du Mo rb ih a n , 1 8 78 , p .1 41

d 'ap rè s Do m MO RICE, Preu ves , t . I , co l . 4 1 e t 1 1 1 . 26

L . U RVO Y DE P ORT ZAMP AR C, O rig in e e t g én éa lo g ie d e la ma iso n d e Tro g o f f ,

Van nes , 1 9 0 0 , p . 2 0 .

5

Montmorency sont à Vit ré et à Laval27

; Jean de Brienne est le seigneur de

La Guerche et vicomte de Beaumont -au-Maine ; le seigneur de Fougères et

comte de Porhoët es t Hugues de Lusignan, comte de La Marche et

d 'Angoulême28

. Pourtant , Jean II es t prudent lors qu 'i l réclame les devoirs

de ses plus puissants vassaux. Il refuse de se mêler du content ieux entre les

seigneurs de Vitré et de La Guerche. Il accepte de reconnaî t re, pour

l ' ins tant , les privi lèges de l 'évêque de Dol qui lui coûtent pourtant cher :

dix cheval iers immobil isés à Rennes. L'évêque n 'es t pas n ' importe qui , i l

es t un des consei l lers du roi de France29

. Malgré le préjudice, dans le Livre

des Ostz , les autori tés ducales respectent les accords de Crépy entr e le

seigneur de Vitré et le duc30

. La terre de Vitré en el le -même est déchargée

de tous devoirs mil i tai res et judiciai res . Enfin, i l es t poss ible d 'entrevoir

un danger mortel pour le duc en cas de confl i t di rect avec le roi . En effet ,

ces plus puissants vassaux directs sont d ' importants vassaux du roi . Henri

d 'Avaugour est seigneur de Mayenne ; le seigneur de Vitré es t seigneur de

Laval31

; Hervé de Léon est le seigneur de Noyon -sur -Andel le et de

Châteauneuf -en-Thimerais32

; l 'évêque de Dol es t un grand seign eur

normand33

; le comte de La Marche et d 'Angoulême est le seigneur de

Porhoët et de Fougères , le seigneur de Châteaubriant t ient la terre de Candé

en Anjou34

e t les Chabot , s i res de Retz , t iennent de vastes domaines en

Poi tou35

. Au total , ces seigneurs doiv ent fournir au duc cinquante -deux

cheval iers , soi t un t iers des effect i fs féodaux bretons. Leur absence à l 'os t

ducal serai t catast rophique.

27

A. B ERT RAND DE B ROUSSI LLON, La ma i so n d e La va l (1 0 2 0 -1 60 5 ) .É tu d e

h i s to r iq u e a cco mp a g n ée d u ca r tu la i re d e La va l e t d e V i t ré , t . I I , l e s Mo n tmo ren cy -

La va l (1 2 6 4 -14 1 2 ) , P a r i s , 1 8 9 8 , p . 7 . 28

P è r e ANSELME DE S AINT E -M ARIE , His to i re g én éa lo g iqu e e t ch ro n o lo g iq u e d e la

ma i so n ro ya le d e Fra n ce , P a r i s , 17 2 6 -1 73 3 , t . I I I , p . 7 9 -8 0 . 29

A. GUILLOT IN DE CORSON Po u i l l é h i s to r i q u e d e l ' a rch evêch é d e Ren n es , P a r i s ,

1 8 8 0 -1 88 6 , p . 4 06 e t Do m MORI CE, Preu ves , o p . c i t . , t . I , co l . 1 05 7 -1 0 5 8 : T h ib aud de

P o uancé e s t évêq ue d e Do l en 1 2 7 9 . I l e s t un d es co nse i l l e r s d e P h i l i p p e I I I l e Hard i . 30

B .N . , mss . Fra n ça i s 22 3 1 9 , p . 1 4 7 , 2 3 32 5 , p . 3 5 3 ; F r . Au g us t i n d u P AZ, His to i re

g én éa log iq u e d e p lu s ieu rs ma i so n s i l l u s t re s d e Bre ta g n e , P a r i s , 1 6 2 0 ; A. d e LA

B ORDERIE , " Recue i l d 'ac t e s i néd i t s d es d ucs …" , d ans B.S .A . I . - e t -V . , t . XIX, 1 8 8 9 , p .

2 1 1 -2 4 7 , ac t e n° 1 0 8 : P o ur l a t e r r e d e Vi t r é , so n se i g neur ne d o i t r i en au d uc d u fa i t

d e l ' a cco rd d e Crép y e n Va lo i s ( j u i n 1 2 3 7 ) en t r e And ré I I I d e Vi t r é e t so n b eau - f r è r e ,

l e b a i l l i s t r e d e Bre tagn e , P ie r r e d e Dreux : e l l e e s t d éso rma i s d écha rgée d e to us d ro i t s

d e b a i l , r acha t e t ga rd e . 31

Vo i r sur l e s d o mai nes d e ce t t e fa mi l l e l 'o uvra ge r écen t d e D . P ICHOT , Le Ba s -Ma in e

d u Xe au X I I I

e s i èc l e : é tu d e d 'u n e so c ié t é , Lava l , 1 9 9 5 .

32 L . MERLET , " No t i ces sur l a b a ro nnie d e Châ tea u neu f -e n-T hi mer a i s" , d ans Revue

n o b i l ia i re , h i s to r iq u e e t b io g ra p h iq u e , 1 8 65 , p . 4 6 9 -4 71 . 33

H . GUILLOT EL, " Les o r ig ine s d u r e sso r t d e l ' é vêc hé d e Do l" , d ans M.S . H.A .B . , t .

5 4 , 1 97 7 , p . 5 9 -6 0 : " s i l 'o n ad me t q ue l e s p a r o i s se s e nc la vées p ro lo n gent l e s d o mai ne s

acq ui s au x ép o q ues méro vin g ien nes e t ca ro l ing ien nes , l ' é va l ua t io n ap p ro xi ma t i ve d e

l eur s ur face p eu t ê t r e c h i f f r é s à p r è s d e 4 0 0 0 hec ta r e s d an s l ' é vêc hé d e R en nes , 1 9 0 0 0

d ans ce lu i d 'Ale t , 8 0 0 0 d ans ce lu i d e Sa in t -B r i euc , 9 7 0 0 hec ta r e s d ans ce lu i d e

T réguie r , 8 7 d ans ce lu i d e Sa in t -P o l -d e -Léo n e t 2 0 00 d ans ce lu i d e Ro uen . , so i t u n

to t a l d e 4 3 0 00 hec ta r e s" , fo r tune co mp arab le aux gr a nd es ab b a yes d e l ' ép o q ue : Sa in t -

Ger ma i n -d es -P rès , 3 3 00 0 hec ta r e s so us l e s Ca ro l ing ie ns , Co rb ie , 2 0 0 0 0 hec ta r e s . 34

A. GUILLOT IN d e C ORSON e t C . GOUDE , H i s to i re d e Ch â tea u b r ia n t , b a ro n n ie ,

v i l l e e t p a ro i s se , Re nne s , 1 8 7 0 , p . 3 0 . 35

R . B LANC H ART , "Car tu la i r e d es s i r e s d e Ra ys (1 1 6 0 -1 4 4 9)" , d ans Arch ives

Hi s to r iq u es d u Po i to u , t . 2 8 , 1 8 97 , p . XX e t LI I -XC.

6

Le Livre des Ostz révèle ensui te que jamais le domaine ducal n 'a été aussi

étendu. Mais faut - i l parler de domaine ducal ou plutôt de domaines du duc?

Il es t t rès diff ici le en fai t de fai re la différence sauf lorsqu 'on réussi t à

découvrir l 'or igine de tel ou tel f ief , surtout quant on découvre "le terme

comte" dans t rois aveux, ceux d 'Alain de Coët inizan, dans la bai l l ie de

Tréguier , de Henri de Trébrivan, dans la bai l l ie de Cornouai l le et d 'Hervé

du Chastel , dans la bai l l ie de Léon. Il s 'agi t non pas du comte de Bretagne

( jusqu 'en 1297, pour l 'adminis t rat ion française, le duc de Bretagne n 'es t en

fai t qu 'un comte) , ma is pour le premier du comte de Tréguier , pour le

second du comte de Cornouai l le et pour le dernier du comte de Léon. Ainsi ,

les vassaux ont des devoirs mil i tai res non pas envers le duc de Bretagne

mais envers le comte de Cornouai l le , le comte de Tréguier o u le comte de

Léon36

. Le domaine ducal étai t en fai t composé d 'un ensemble de comtés,

détenus par le duc. Jean II es t l 'héri t ier d 'Hoël , duc de Bretagne, comte,

personnel lement , de Cornouai l le et de Vannes (mort en 1084) et de son

épouse Havoise de Rennes, comtesse par droi t propre de Rennes et de

Nantes (morte en 1072)37

. Les comtés de Penthièvre et de Tréguier ont été

réclamés et obtenus vers 1215 par Pier re Mauclerc, au nom de son épouse,

dernière représentante de la branche cadet te de Penthièvre (cel le d ' Henri

d 'Avaugour est puînée) . Le comté de Léon est en fai t au duc depuis

quelques mois seulement . Il l 'a racheté à son f i ls cadet , t rop dépensier38

. La

longue paix permet au duc de remplir ses caisses et d 'acheter de nombreux

domaines mais aussi de profi ter de l 'ex t inct ion de l ignages, comme ceux

des seigneurs de Lavau39

, des vicomtes de Gourin40

, des vicomtes de Poher,

ces derniers n 'étant pas ment ionnés dans le Livre des Ostz . Le duc a aussi

confisqué d ' importantes terres . En 1294, Alain de Trogoff cont inue de

réclamer sa terre de Lanvaux et de Kemenet -Héboé, tout comme le seigneur

de Rostrenen qui ci te sa terre de Vil iac41

. Le nombre des vassaux directs

du duc s 'es t considérablement accru. Henri de Trébrivan, parent des

Rostrenen, toujours en Cornouai l le ment ionne avec quelque amertume que

le duc a fai t un échange avec lui . Peut -êt re a - t - i l perdu des terres42

?

L'évêque de Dol es t le vassal du comte de Rennes, i l doi t garder en armes

sa capi tale comme l 'évêque et le chapi t re de Rennes. Les seigneurs de

Porhoët étaient les héri t iers des vicomtes de Rennes43

comme l 'é taient les

vicomtes de Donges de ceux de Nantes44

. Le seigneur de Sion est l 'héri t ier

d 'une autre vicomté de Nantes , cel le -ci avortée, Migron45

. L'acquis i t ion des

36

Vo ir la thèse de Gui l l o t e l 37

A. CHEDEVI LLE e t N . -Y . T ONNERRE, La Bre ta g n e f éo d a le , XIe- X I I I

e s i èc l e s ,

Evreu x ,1 9 8 7 , p . 2 9 . 38

LA B ORDE RIE , " Recue i l d 'ac t e s i néd i t s d es d ucs . . . " , op . c i t . , a c t e , n° C LX, p . 2 4 0 -

2 4 2 e t n° CLXI , p . 2 4 2 -2 4 3 . 39

Vo i r l a d éc la r a t io n d u se ig ne ur d e La Ro che -B erna rd , b a i l l i e d e Nante s . 40

Vo i r l a d éc la r a t io n d 'Henr i d e Co ë tb uha l , b a i l l i e d e Co rno ua i l l e . 41

Co mtes se d u LAZ, La b a ro n n ie d e Ro s t ren en , Vanne s , 1 8 9 2 , p . 6 42

P . P OT IER DE CO UR CY, No b i l ia i re e t a rmo r ia l d e Bre ta g n e , Ma ye nne , 1è r e

éd i t io n ,

1 8 4 6 , 7e éd i t io n , 19 9 3 , t . I I , p . 5 12 .

43 H . GUI LLOT EL, " D e l a v i co mté d e Re n ne s à l a v i co mté d e P o rho ë t ( f in d u X

e-

mi l i e u d u XI Ie s i èc l e ) " , d ans M.S .H.A .B . , p . 1 6 -1 7 , 7 9 -8 0 e t 15 9

44 N . -Y . T ONNERRE, N a issa n ce d e la Bre ta gn e , Géo g ra ph ie h i s to r iq u e e t s t ru c tu res

so c ia le s d e la Bre ta gne mér id io n a le (Na n ta i s e t Va nn e ta i s ) d e la f in d u V I I Ie s i èc l e à

la f i n d u XI Ie s i èc l e , Anger s , 1 9 9 4 , p . 33 7 .

45 I b id , p . 34 3 .

7

châtel lenies du Pel ler in et de Touff ou46

par le duc à une date inconnue a

permis d 'obtenir les aveux de pet i ts seigneurs comme les Montrelais , les

Sebran, les Sion et Jamet de La Muce. Les seigneuries de Rieux, de

Rochefort et de Malestroi t ont été détachées au profi t de cadets des

maisons souveraines bretonnes47

. L'acquis i t ion du Kemenet -Héboé a permis

d 'obtenir les aveux de Geoffroi de Boubry, d 'Ol ivier de Tinténiac pour la

terre de La Roche-Moisan, de Sylvestre de La Boutoui l ler ie , et peut -êt re

d 'Hervé de Léon. Normand de Kaer, les seigneurs de la paroisse de Séné

dépendent des domaines des comtes de Vannes. Par l 'obtent ion du

Penthièvre (soi t les châtel lenies de Lambal le, Moncontour) et du Trégor

( les châtel lenies de Bel le - Is le, de Lannion et de Guingamp)48

au début XIIIe

s iècle, Henri d 'Avaugour, ses parents , le vicomte de Tonquedec et la dame

de Kergorlay, Rol land de Dinan pour la terre de Corron et Pierre

Tournemine, les se igneurs du Périer , de La Roche -Jagu, le prieur de

Lannion sont avec cert i tude devenus les vassaux directs du duc. En 12 23,

lorsqu 'i l a annexé le Trégor, Pierre de Dreux occupe le château de La

Roche-Derrien. Malgré sa condamnat ion devant la cour de Paris en 1269,

Jean II annexe en 1287-1288 La Roche-Derrien49

. Alain de Coët inizan

devient alors son vassal . La victoire de Co nan II (1040-1066) sur les

Penthièvre permet la créat ion de la châtel lenie de Morlaix -Lanmeur50

e t en

1294 d 'obteni r les aveux d 'Henri Charruel , d 'Even du Ponthou, d 'Alain de

Trogoff et de Rol land de Dinan et peut -êt re, dans la bai l l ie de Cornouai l le ,

de Jean de Mené. Les Comtes de Cornouai l le paraissent avoir eu des

domaines part icul iers51

dans t rois régions, le long de l 'Aulne (où l 'on

t rouve les f iefs de Jean de La Roche -Helgomarc 'h , du seigneur de

Kergorlay, du voyer du Faou), autour de Quimper et dans la zone des Caps

( les f iefs des seigneurs de Nevet , du Juch, de Lesongar, de Pontcroix , de

Pont-L'Abbé en dépendent) , l e long de l 'Aven (où se t rouvaient les terres

relevant du duc de Robert de Hénant , de Guil laume du Plessis , de Pierre de

Haut-Bois) .

Les seigneurs de Rostrenen et de Kergorlay étaient des vassaux des

vicomtes de Poher52

, tout comme l 'é tai t Henri de Coët -Buhal des vicomtes

46

Ib id , p . 33 8 e t 33 9 , no te 1 . 47

J . -M. LE MENE, " Généa lo g ie d es s i r e s d e Rieu x" , d ans Bu l l e t in d e la So c ié t é

Po lyma t iq u e du Mo rb ih a n , 1 87 9 , p . 3 : Les R ieux é t a i e n t i s s us d es anc ien s so u ve ra i ns

d e B re tagne47

. Le ur l i g nage d éb ute a vec Rud a l t , co mte d e Van nes , f i l s d 'Ala in l e

Grand , co mte d e Vanne s e t so u ve ra in d e B re tagne . N . -Y . T ONNERRE , Na issa n ce d e la

Bre ta g n e . . . , p . 1 70 e t J . -M. LE MENE, " Généa lo g ie d es s i r e s d e Ro che fo r t " , d ans

B.S .P .M. , 18 7 9 , p .1 4 9 : Le p r e mie r se i g n eur co nn u d e Ro che fo r t e s t Ab b o n o u Ha mo n

q u i n 'ap p a ra î t q u 'au d éb ut d u XI Ie s i èc l e . I l e s t p eu t -ê t r e a us s i u n d escend an t d 'Ala i n

l e Grand , co mte d e Vanne s e t d e rn ie r r o i d e B re tagne , co mme l ' é t a i en t l e s se ig ne ur s

d 'E lve n o u d e L 'Ar go ë t d o nt hé r i t en t l e s se i g n eur s d e Males t ro i t . 48

GESLIN d e B OURGO GNE e t B ART HELEM Y , Les a n c ien s évêch és… , t . V , p . 1 3 -1 6 . 49

Ib id , p . 24 1 , no te 1 . 50

Ib id , t . V , p . 4 . 51

J . QU AGHEB EUR , C o mté d e Po h er e t Te rre d e Co rn o u a i l l e , mémo i re e t p o u vo i r s d u

d éb u t IXe a u d éb u t X I I I

e s i èc l e s , T hèse d e d o c to ra t , P a r i s -So rb o nne , 1 9 9 4 , p . 18 1 e t

3 5 0 . 52

H . GUILLOT EL, " Les v i co mtes d e P o he r e t l eur o r ig i ne" , d ans B.S .A .F . , t . CXIX,

1 9 9 0 , p . 3 9 6 -3 98 . P OTIER, o p . c i t . t . I I , p . 8 9 e t 5 1 2 .

8

de Gourin53

. L'achat du Léon a fournis au duc s ix feudataires

supplémentaires , dont t rois sont les héri t iers (probable ou c ertains) des

vicomtes de Léon. Grâce à ces acquis i t ions, le duc a pu améliorer

l 'adminis t rat ion de ses domaines54

à l ' ins tar de ses vois ins français et

anglais55

, d iviser le t err i toi re breton en bai l l ies , dont les l imites sont issues

des divis ions ecclésiast iques, élaborées aux époques mérovingiennes et

carol ingiennes ; c 'es t le cas des ter res du Désert56

(au seigneur de

Châteaubriant) , de Kemenet -Heboé57

(à Hervé de Léon), de Poher et de

Cornouai l le58

(au seigneur de Kergorlay) , de Plestel ou Plougastel59

Alain Nuz et Rolland II de Dinan), du Faou (au voyer du Faou) qui sont

tous d ' anciens archidiaconés ecclésiast iques. Le duc cont inue d 'user de la

méthode de l ' inféodat ion. Il confie des terres récemment acquises à des

f idèles . Certains sont issus de l 'ar is t ocrat ie guerr ière, comme Brient Le

Boeuf (dans la bai l l ie de Nantes)60

, Ol ivier de Tinténiac (bai l l ie de

Ploërmel et Broërech)61

. D 'autres ont pu emprunté leurs nom à la

châtel lenie confiée. Il s 'agi t , dans la bai l l ie de Nantes , de Geoff roi de

Guerrande (dans la bai l l ie de Nantes) , de Geoffroi de Boubry (dans la

bai l l ie de Ploërmel et Broërech), d 'Henri de Fouesnant (bai l l ie de

Cornouai l le) . L'adminis t rat ion semble s 'êt re renforcée. Si un ancien cadre

d 'origine carol ingienne, le voyer du Faou (en Cornouai l le) es t ci té , sont

également ment ionnés le sénéchal de Rennes (qui a un rôle purement

mil i tai re dans le Livre des Ostz ) et le sénéchal de Nantes (qui se contente

de percevoir la contr ibut ion f inancière du seigneur de Rougé). L'Assemblée

de Ploërmel part icipe el le-même à ce t effort . Ernest Texier62

la classe

parmi les premiers parlements ou États de Bretagne. Pier re Mauclerc, tout

comme Jean II en 1294, avai t réuni , sous l 'empire de ses besoins

f inanciers , tous les vassaux immédiats pour leur demander de contr i buer à

ses dépenses mil i tai res . Au début du XIIIe s iècle, seuls les vassaux directs

53

B . -A. P OCQUET DU HAUT -J USSE, " Le p l us anc ien rô le d es co mp tes d u d uc hé ,

1 2 6 2" , d ans M.S .H.A .B . , 1 9 4 6 , p . 6 0 : : Go ur in e s t c i t é d an s l a châ te l l e n ie d e

Qui mp er l é e t r ap p o r t a i t 1 0 l iv r e s , ma i s o n ne s a i t p a s p o urq uo i . 54

Ib id , Les q ue lq ues co mp tes d uca ux d e l a d e uxiè me p a r t i e d u XI Ie s i èc l e r é vè len t l a

p r é sence d e châ te l a i ns , c ' e s t -à -d i r e d 'a gen t s g é r an t l e s d o mai nes d u d uc . 55

B .A. P OCQUET DU HAUT -J USSE, " Le g r and f i e f b r e to n" , dans F . LOT e t R .

F AW T IER, His to i re d es in s t i t u t io n s , t . I , P a r is , 1 9 5 7 , p . 27 3 : Henr i I I e s t p eu t -ê t r e à

l 'o r ig ine d e l a c r éa t io n o u d u d éve lo p p eme nt d u rô le d es sénécha ux r ég io na ux . Ap rès

l e s P lan tage nê t , l ' e mp r i se f r ança i se en B re tag n e e s t p lus g r and e . Le s d ucs d e B re tagne ,

i s s ues d e l a b r anc he cap é t i enne d es Dre u x , s ' i nsp i r en t d e l e ur s co us i ns f r a nça i s :

ap p a r i t i o ns d 'o rga nes no u veau x co mme l e s b a i l l ages , l a c ha mb re d es Co mp tes , l e

Co nse i l o u P a r l e men t c r éés en F rance ve r s 1 2 7 0 . 56

GUILLOT IN d e CORS ON, o p . c i t . , B.S .A . I . - e t - I . , t . 23 , 18 9 4 , p . 2 0 1 e t 2 0 4 . 57

J . J AFF RE, S e ig n eu rs e t se ig n eu r ie s d u Kemen e t -Héb o é , Lo r i en t , 1 98 6 , p . 9 9 . 58

QUAGHEB EUR , o p . c i t . , t . I , p . 2 98 e t 5 75 . 59

A. -Y . B OUR GES, " L 'é vêché d e Le xo b ie e t l ' a r ch id iaco né d e P lo ugas te l : au to ur d es

o r ig ines r e l i g i eu ses d u T régo r" , d ans Trég o r , mémo ire v i va n te , n° 7 , 2 se me s t r e , 1 9 9 4 ,

p . 3 -1 7 . 60

GUILLOT IN d e CO RS ON, o p . c i t . , B .S .A .N . , t . 3 6 , 1 8 96 , p . 3 62 e t t . 3 8 , 1 89 7 , p . 38 :

i l e s t u n d es p l us i mp o r tan t s se i g neur s d u co mt é na n ta i s avec se s se i g neur i e s d e No za y,

I s sé e t Fo u ge ra y. 61

P OT IER, o p . c i t . , t . I I , p . 5 9 8 e t GUILLOT IN, o p . c i t . , B .S .A . I . - e t -V . , t . 2 6 , 1 8 97 ,

p . 4 4 : I l e s t auss i l e se ig ne ur d e T in tén iac e t d e Ro mi l l é d ans l e co mté d e Ren nes ,

f i e f s q u i r e l è ven t d e l ' a b b esse d e Sa in t -Geo rge s d e Ren nes . 62

E . T EXIER, Etu d es su r la co u r d u ca le e t l e s o r ig in es d u p a r lem en t d e Bre ta g n e ,

Ren nes , 1 9 0 5 , p . 7 0 .

9

du duc étaient donc invi tés à dél ibérer avec lui . Sous Pierre Mauclerc, i l s

sont une soixantaine en 1225 à Nantes63

. En 1294, i ls sont plus d 'une

centaine ( le domaine du duc s 'étant accru) , chif fre que l 'on ret rouve en

1462 lors d 'une réunion des États64

. Il es t souvent quest ion d 'argent et de

comptes dans le Livre des Ostz . L'enregis t rement des différents aveux

révèle d 'évidentes habi tudes comptables . Chaque part ie se termine par un

calcul déterminant l e total de la contr ibut ion de la bai l l ie , e t pour f ini r , de

toute la Bretagne : "Toute Somme des cheval iers deuz d 'ost a monseigneur

de toute Bretaigne, environ, VII Ix x

,e t , VI , cheval iers , et XVII , escuiers" .

Le Livre des Ost z fourni t d ' intéressants éléments permet tan t d ' imaginer les

modal i tés de cet te réunion, son organisat ion et les cr i tères qui ont

déterminé la présence des différents personnages.

Les protagonis tes ont pu se réunir , comme lors de la réunion des États au

XVe s iècle, dans une grande sal le ou, plus vraisemblablement étant donné

leur nombre (plus d 'une centaine sans compter leur entourage et les

spectateurs ) dans un pré ou un champ en dehors de la ci té , ou encore sur la

plus grande place de Ploërmel . A côté du duc se sont placés ses sénéchaux

principaux, de Rennes et de Nantes , car aucun sénéchal de Bretagne n 'es t

at tes té en 129465

. Devant lui ont pu s ' ins tal ler ses consei l lers , son

entourage immédiat , sa famil le mais aussi ses off iciers de f inance qui

prennent en notes les déclarat ions de chacun. Les différents feudatai res du

duc ou leurs représentants défi lent l 'un après l 'autre devant lui , proclament

leurs devoirs mil i tai res , discutent du montant de leur contr ibut ion s i

nécessaire. Le comte de La Marche qui es t l 'égal dans la hiérarchie féodale

du duc de Bretagne s 'es t fai t représenté par son sénéchal de Fougères ,

Gui l laume L'Oel ier66

, e t son sénéchal de Porhoët , Symoneaux. Il respecte

ainsi ses devoirs mil i tai res tout en ménageant son autre puissant suzerain,

le roi de France. L'évêque et le chapi t re de Rennes qui ne souhai tent pas

voir leur fonct ion entachée par des considérat ions mil i tai res ont dépêché

leur off icier civi l , leur procureur, un proche de l 'évêque67

. Herl in de

Bougon est lui auss i absent car i l es t mineur. Jean de Bougon, son tuteur ,

défend ses intérêts . D'autres feudataires sont ci tés , sans que leur présence

soi t at tes tée. Ce sont les vassaux des avouants , et donc les arr ières -vassaux

du duc (au total , i l s sont onze) . La présence de 79 vassaux direc ts du duc,

seigneurs laïcs et ecclésiast iques, es t certaine : 8 pour la bai l l ie de Rennes,

20 pour cel le de Nantes , 10 pour cel le de Ploërmel et de Broërech, 6 pour

le Penthièvre, 9 pour la bai l l ie de Tréguier , 20 pour la Cornouai l le et enfin

63

Do m MO RICE, Hi s to i re…, o p . c i t . , t . I . p . 1 5 2 -1 53 ; Do m G. -A. LOB INE AU,

His to i re d e Bre ta g n e , 2 to mes d o nt un d e p ièces j us t i f i ca t i ves , P a r i s , 1 7 0 7 , t . I , p .

2 1 7 -2 1 8 . 64

J . -L . MONT IGNY, Es sa i su r l e s in s t i t u t io n s d u d u ch é d e Bre ta g ne à l ' ép o q u e d e

P ie rre Ma u c le rc e t l a p o l i t i q u e d e ce Pr in ce , Pa r i s , 1 9 6 1 , p . 3 7 . 65

A. OHEIX, Es sa i s ur l e s sé nécha u x d e B re tagne d es o r i g ine s a u XIVe s i èc l e , P a r i s ,

1 9 1 3 , p . 1 7 7 . 66

V ico mte LE B OUT EILLER, No tes su r l ' h i s to i re d e la v i l l e e t du pa ys d e Fo u g ères ,

B ruxe l l e s , 1 9 1 3 -1 9 1 4 , p . 2 5 . 67

D . d e LA MOT T E -ROUGE, Ch â te l l en ie d e La mb a l l e , v i e i l l e s d emeu res e t v i e i l l e s

g en s , 1 97 7 , p . 55 7 : La se ig neur i e d e La Ro ch e -T ang u y q u i p o r t e l e no m d e l ' é vêq ue d e

Ren nes d o n ne na i s sa nc e à sa vo i s i ne , ce l l e d e La Ro c he -a u -De na i s .

10

6 pour le Léon68

. Marie ou Margueri te de Penthièvre, dame ou vicomtesse

de Frinandour, es t la seule vassale du duc. Cinq prélats et communautés

rel igieuses sont ci tés , l 'évêque et le chapi t re de Rennes, les évêques de

Dol , de Saint -Malo et de Saint -Brieuc, et le prieur de Lannion. Les autres

prélats , abbés et prieurs bretons ont dû recevoi r à une date encore inconnue

des immunités pour leurs immenses biens relevant immédiatement du duc69

.

L' importance de chacun est déterminée par la contr ibut ion mil i tai re qu 'i l

doi t fourn ir . Il se détache t rois types de services , un service mil i tai re pur

où le vassal fourn i t à l 'armée ducale des combat tants , la garde d 'une

forteresse ducale et une aide pécuniaire.

1) Le service d 'ost

Presque la total i té des feudataires du duc (91 sur 101 ci tés70

) lui

fournissent des combat tants , cheval iers d 'ost , écuyers , hommes d 'armes à

cheval , s imples hommes d 'armes, archers , mais certains doivent seulement

se présenter eux -mêmes.

12 avouants doivent chacun plus de 5 cheval iers d 'ost71

. Au total , cet te

catégorie apporte 88,5 cheval iers , soi t presque la moit ié de la

contr ibut ion totale (environ 165 cheval iers) .

8 avouants reconnaissent devoir entre 3 et 5 cheval iers72

, soi t un total

de plus de 30,5 cheval iers .

6 avouants déclarent 2 cheval iers d 'ost , pour un total de 12 cheval iers73

.

1 avouant déclare 1,5 cheval ier74

.

24 avouants déclarent un seul cheval ier d 'ost , soi t , pour ce t te catégorie ,

24 cheval iers75

.

Plus de 12 avouants doivent un demi -cheval ier d 'ost pour au total 6

cheval iers76

.

68

Ce q u i p e r me t d 'e n t r e vo i r l ' a mp le ur d e l a d é sagré ga t io n d u d o mai n e d uca l d ep ui s l e

XIe s i èc l e .

69 LA B ORDE RIE , " Recue i l d 'ac t e s i néd i t s d es d ucs… , o p . c i t . , t . XI X, 1 8 8 9 , p . 21 1 -

2 4 7 , ac t e n° CX d e 1 2 69 . 70

Ro l l and d e Dina n , P ie r r e To urne mi ne , Her vé d e Léo n , l e s se i gne ur s d e Rie u x e t d e

La G uerche so n t c i t é s p lus i e ur s fo i s . 71

l e co mte d e La Marc he , 1 5 ; l ' évêq ue d e Do l e t Henr i d 'Ava u go u r , 1 0 chacun ; l e

v i co mte d e Ro ha n , 9 ,5 ; l e se ig ne ur d e Châ t eaub r i an t , 7 ; l e se i g n eur d e Rieu x , 6 ,

co mme l e s se i g neur s d e Ro che fo r t ; Les se i g neur s d e Re tz , d e Ma les t ro i t e t d e Vi t r é ,

ce d e rn ie r avec se s va ssa ux , l e v i co mte d e T o nq ued ec avec so n v assa l , Ro l l a nd d e

Dina n e t en f i n Hervé d e Léo n d o ive n t chac u n à l 'o s t d uca l , 5 cheva l i e r s . 72

Ro l l and d e Dinan , p lu s d e 3 ,5 ; P i e r r e T o urne mi ne , 4 , co mme l e s se igne ur s d e P o nt -

L 'Ab b é , d e Cl i s so n , d e Mo nt fo r t e t d e La Guerche ; l e se igne ur d e La Ro che -B erna rd

avec so n vas sa l T hib au d d e Ro che fo r t e t l e se i gne ur d e Lo héac e n d o iven t 3 chac u n . 73

l e s se i gne ur s d e Ro s t r enen e t d e Kergo r l a y, Ala i n d e Car man, He nr i d e Fo ues nan t ,

Eud o n d e P o ntchâ teau e n co mmu n a vec so n f r è r e u t é r in , l e se i g neur d e Cl i s so n . 74

Geo f f ro i l e Ro ux a vec so n va ssa l , Ro l l and d e L 'Ar genta ye . 75

Les se i gne ur s d e Ro ug é , d u J uch , d e Rezé , d u P é r i e r , l e v i co mte d u Fao u , Ga lé r an e t

Gui l l a u me d e Châ tea ug i ro n , Ala i n d e Fo ntena y , Rao ul d e Melesse e t se s p a r so nnie r s ,

Geo f f ro i d e G uer r and e , P h i l ip p e e t Reg na ud d e Mo nt r e l a i s , G ui l l a u me Seb ran , Her l in

o u Hub e l in d e B o ugo n , P ie r r e Ma lo r e t l e s se igne ur s d e l a p a ro i s se d e S éné , Ro l l and

d e La Mo t t e - (Ro u ge ? ) , Henr i Cha r r ue l a vec so n vassa l , Henr i l e Lo n g , Henr i d e Ne ve t ,

Yvo n d e Ro s mad ec , Go ur me lo n , f i l s d e S inq uin ( l e se i g neur d e P ontc ro ix) , Henr i d e

T réb r ivan , Henr i d e Co ë tb uha l , Ala i n N uz e t B e r t r and d e Kernau .

11

3 avouants doivent un t iers de cheval ier , pour un total d 'un cheval ier77

.

2 avouants doivent un quart de cheval ier , soi t un cheval ier78

.

9 feudataires avouent devoir des écuyers d 'ost . Le duc obt ient donc au

total 12 écuyers79

.

4 avouants reconnaissent devoir fournir à l 'os t ducal des combat tants80

.

5 avouants disent vouloir se rendre eux -mêmes à l 'os t et servir le duc81

.

La durée du service n 'es t ment ionnée que dans le cas de contr ibut ion faible.

Le cheval ier cornouai l lais Jean de La Roche -Helgomarc 'h aff i rme devoir

servir le duc quinze jours . Il n 'es t alors guère possible que ces combat tants

puissent guerroyer hors de Bretagne. Le l ieu a aussi son importance. Les

dix cheval iers de l 'évêque de Dol ne part iciperont à l 'os t ducal que pour

protéger la vi l le de Rennes. Seul l 'aveu de l 'évêque de Saint -Malo

ment ionne le matériel : i l a l 'obl igat ion de produire t rente archers , armés

d 'arcs et de f lèches.

2°) Le service de garde.

Trois contr ibut ions concernent des devoirs l iés à la garde d 'une ci té ou

seulement d 'une porte. Les évêques de Dol et de Rennes annoncent ne

devoir garder que la vi l le de Rennes. Le seigneur t régorrois , Alain de

Coët inizan, di t ne devoir f inancer la garde d 'une des portes de la forteresse

de La Roche-Derrien qu 'un jour et une nui t . Le reste serai t à la charge du

comte de Tréguier , soi t le duc.

3°) Les redevances f inancières

Seules cinq déclarat ions indiquent que le duc de Bretagne obt ient le service

mil i tai re sous forme de rente f inancière : ce sont les aveux de l 'évêque de

Saint -Brieuc dans la bai l l ie de Penthièvre (déclare douze l ivres dix sous

en deniers) , des seigneurs de Rougé et de Sion (doivent chacun dix sous

pour chaque mesure de terre) et de Brient Le Boeuf (doi t quatre l ivres en

deniers d 'ost ) , ces derniers dans la bai l l i e de Nantes . La déclarat ion de

l 'évêque de Saint -Br ieuc s 'expl ique aisément . C 'es t un ecclésiast ique, et en

tant que tel i l a obtenu le privi lège de ne pas part iciper aux opérat ions

mil i tai res ( tout comme tentent de le fai re les évêques de Rennes et de Dol ) .

Grand seigneur, l 'essent iel de ses domaines dépendent des seigneurs de

Châteaubriant82

auxquels i l es t apparenté. La ter re de Jans est mineure. Il

76

Gui l l a u me d e La Mo t t e -Ma ugre mie u , J ean d e Maure , l e s hé r i t i e r s d e Geo f f ro i e t d e

Gui l l a u me d 'Ana s t , Ge o f f ro i d e B o ub ry, S y l v es t r e d e La B o to u i l l i e , Geo f f ro i d e Sa i n t -

Deno ua l , E ven d u P o ntho u , Ala i n d e T ro go f f , R ic ha rd d e La Ro c he -J a gu , Ala i n d e

Les t i a l a e t l e s t e n ure s d e Les lec h . 77

Geo f f ro i d e La T o ur , Gui l l a u me B o te r eau , Ma th ie u d e La Ce l l e . 78

J ame t d e La M u sse , Ge o f f ro i d e S io n . 79

l e se ig neur d e Ro u gé , 1 , en p lus d u che va l i e r d u ; l e se igne ur d u J uch e t Henr i d e

Neve t , 2 e n co mp lé me nt d u che va l i e r d éc la r é ; Ro b e r t d u Hé na nt , 2 ; l e s V i l l e s Lo ys ,

Ro b er t , Mo red re e t Co u ren t , un chac u n ; Hervé d e Ker -Aud ie rne e t Henr i d e

Lesco nga r , u n c hacu n . 80

Les ho mme s d e l a v i l l e d e Ren ne s (p ro b ab le ment l a ga r n i so n d e Ren nes ) p o ur

l ' é vêq ue e t l e chap i t r e d e Renne s ; d e s a r che r s ( t r en te ) avec l eur éq u ip e me nt ( a res e t

sa i e t e s : a r c s e t f l èc h es ) p o ur l ' é vêq ue d e S a in t -Malo ; t r o i s ho mmes a r mé s p o ur l e

vo ye r d u Fao u ; u n ho mme a r mé à cheva l p o ur l e f i l z Yze rg u en t ; l e p r i eur d e Lannio n

ap p o r t e un ho mme d 'a r me . 81

J ean d e La Ro che -He l go marc 'h , J ehan d e Mené , Gui l l a u me d u P le ss i s - Nizo n , Hervé

d u Cha s te l . T ro i s d 'en t r e eux so n t che va l i e r s . 82

H . GUI LLOT EL, " Châ teaub r i a n t e t l e s c hâ te l l e n ie s b r e to nne s aux XIe e t XI I

e

s i èc l e s" , d ans M.S .H.A .B . , t . 6 6 , 1 98 9 , p . 10 .

12

est possible que les contr ibut ions des seigneurs de Rougé et de Syon dont

les f iefs sont vois ins l 'un de l ' autre (Frossay et Jasson, sur les bords de la

Loire) se complètent . Le seigneur de Rougé nous indique bien les modal i tés

de percept ion de ce t te rente. Il doi t informer le sénéchal de Nantes de la

quant i té de terre qu ' i l t ient .

De tel les déclarat ions ne so nt jamais fai tes à la légère. Comme l 'aff i rme

Phi l ippe Contamine, "Les services mil i tai res pesant sur les seigneurs

(surtout les plus importants) et surtout sur les vassaux se t rouvent ainsi

progressivement déf inis , et du même coups ci rconcis , l imités"83

au cours

d 'enquêtes antérieures . Depuis longtemps des accords avaient f ixé leurs

portées . Il n 'en reste, comme trop souvent pour cet te époque, que peu de

t races . L'arrangement ci té dans ce regis t re entre le seigneur de Vitré et son

vassal , le seigneur de La Guerche à propos de la terre de Mart igné ( -

Ferchaud) es t ancien puisque deux documents t ranscri ts par Dom Morice

l 'a t tes tent , l 'un en 1198 entre André de Vitré et Geoff roi de Pouancé84

et

l 'autre en 1227 entre le même André de Vitré et Gui l laume de La Guerch e85

.

On y constate que la terre de Mart igné devai t fournir deux cheval iers au

baron de Vitré. De même, selon l 'acte de 1199, la duchesse Constance

confirme les importants droi ts des moines du prieuré de Lannion reçus de

son père Conan III: "Ensui te, i l leur a été confi rmé que le prieur exerçai t

sur tous les hommes habi tant la di te aumône (cel le de Conan III) le droi t de

commandement à la guerre, de just ice et de chât iment suprême. . . " 86

. Dom

Morice a aussi t ranscri t et publ ié deux enquêtes , l 'une de 1226 et l 'autre de

1247, du sénéchal de Rennes à propos des dix cheval iers d 'ost de l 'évêque

de Dol . El les montrent que les vassaux de l 'évêque lui devaient

personnel lement une dizaine de cheval iers . On y reconnaî t les Beaufort , les

Landal , les Dol -Combourg, les Lanval lai , les Cherrueix , les Rochefort , les

Du Guescl in87

. Le Livre des ostz peut avoir off icial isé, par écri t et donc

pour longtemps, des prat iques anciennes, plus ou moins vagues et t rès

part icul ières .

Le rôle d 'armes di t de "l 'os t de 1272" de Phi l ippe II I l e Hardi contre le

comte de Foix88

possède de s i curieuses e t intéressantes s imil i tudes avec le

regis t re de 1294 qu ' i l es t impossible de ne pas les rapprocher. Les off iciers

du duc s 'en sont inspirés net tement89

. Il débute aussi par une introduct ion

83

P . CONT AMINE, His t o i re mi l i ta i re d e la Fr a n ce , t . I , d e s o r ig in es à 1 7 1 5 , so us l a

d i r ec t io n d e A. Co rv i s i e r , P a r i s , 1 9 92 , p .1 2 . 84

DOM MORICE Preu ve s , o p . c i t . t . I , co l . 7 3 0 . 85

Ib id , t . I , co l . 8 5 9 . 86

DOM MO RICE Preu ve s , t . I , o p . c i t . , co l . 7 7 3 e t A. D ROG UET , Le Mo yen Ag e , so us

l a d i r ec t io n d e G . MINOIS , Les Cô te s -d u -N o rd , d e la Préh i s to i re à n o s jo u rs , Sa in t -

J ean-d 'An ge l y , 1 9 8 7 , p . 1 2 1 : " . . . i l s ( l e s mo in es ) o n t t en u l e c i me t i è r e d e Sa i n te -Mar ie

d e La nnio n q u i t t e e t l i b r e d e t e l l e so r t e q ue t o u t acc usé e t t o u te p e r so nne d éga gée d e

se s fe r s q u i se r é fu g ie r a i t d ans ce c i me t i è r e y se r a i t co ns id é ré co mme l ib r e" .

1 2 1 ) 87

DOM MORICE Preu ve s , t . I , co l . 85 7 e t 9 3 1 . 88

E . B O U T A R IC , In s t i tu t io n s mi l i ta i re s d e la Fra n ce a va n t l e s a rmées p erma n e n te s ,

P a r i s , 18 6 3 , p . 19 3 -1 95 e t l e s H i s to r i ens d e F rance , t . XXI , p . 77 8 d 'ap rè s l e Ro uleau

D d e l a cha mb re d es Co mp tes d e F rance , J J 11 d u T réso r d es Cha r t r e s .

89 Les o f f i c i e r s r o ya ux e t d ucau x e mp lo ie n t l e mê me vo cab u la i r e e t p eu vent a vo i r r eçu s

une mê me fo r ma t io n : " s i co mme i l d i t " ( aveux d e l ' évêq ue d e Neve r s , d u co mte d e

B lo i s ) , " ne d o iven t a l e r en o s t fo r s en o s t d u ro y" " aveu d u co mte d e B lo i s ) , " C 'e s t

a s sa vo i r " (d éc la r a t io n d e l a co mte sse d e Neve r s ) .

13

où le roi reconnaî t avoir reçu les aveux de ses feudataires , puis se

succèdent , exactement comme dans le Livre des ostz , les déclarat ions de

ses vassaux qui ment ionnent le nombre précis de cheval iers dus, "le duc de

Bretaigne amena LX cheval iers , desquieux en av oi t XVI bannerets", mais

aussi des écuyers dus : "le comte de Bouloigne amena XXXIII cheval iers et

LXX escuiers . . ." . Le comte de Boulogne rajoute que ces écuyers seront

f inancés par le roi : "mais i l di t que ce fu aus dépens du roy". Dans le rôle

breton de 1294, le voyer du Faou doi t t rois hommes armés, la " terre au f i lz

Yzerguent" doi t un homme armé à cheval ; en 1272, "le comte de Rouergue

vint à tout IIIIX X

X armeures à cheval". Ce même seigneur doi t aussi 26

arbalét r iers , tout comme l 'évêque de Saint -Malo doi t fournir en 1294 30

archers à son duc. La durée est aussi ment ionnée : les comtes de

Dammart in, de Ponthieu, les évêques de Coutances et d 'Avranches et Hervé

de Léon (ci té deux fois dans le Livre des Ostz) déclarent un service de

quarante jours . L 'organisat ion est la même. Comme en 1294, les déclarants

de 1272 s 'expriment et manifestent l eurs désaccords, leurs approbat ions,

leurs remarques, souvent dans un sens rest r ict i f . Les bai l l ies servent aux

off iciers royaux comme ducaux de base comptable. Le rôle de 1272

ment ionne des bai l l ies , mais aussi des sénéchaussées , des châtel lenies et

les prévôtés90

. Mais l 'é tendue des domaines respect i fs royaux et ducaux ne

sont pas les mêmes ; en France, el les apportent un cont ingent de cheval iers

sans que soi t préc isé le détai l , ce qui n 'es t pas le cas en Bretagne91

.

Comme en Bretagne et partout ai l leurs , l 'or igine des contr ibut ions en 1272

est le f ief . La portée des obl igat ions es t déterminée suivant l ' importance de

la terre "concédée" par le roi : le comte de Damma rt in doi t deux cheval iers

pour sa "terre de Moncy et pour sa terre de Trie". le comte de Ponthieu en

doi t cinq "pour rai son de la comté de Pont ieu". Le seigneur breton, ci té

deux fois dans le Livre des Ostz , "Monseigneur Hervés de Léon doi t

service par XL jours d 'un cheval ier pour le f ié de Chasteauneuf et de IIII

cheval iers pour la terre qui fu monseigneur Gui l laume Poissy"92

. Le

regis t re de 1294 cont ient 45 noms de l ieux , 39 fois précédés du terme

"ter re", 16 fois de l 'expression "f ief" . Par hui t fois , ce document res te

vague employant les termes de "terre", de "f ief" ou encore de "ce qu 'i l t ient

du duc".

Il étai t normal de voir le f ief chois i comme l 'é lément déterminant du devoir

mil i tai re puisqu 'i l a été concédé à une date plus ou moins ancienne contre

un service personnel , en premier l ieu un service d 'ost à un proche, un

combat tant "bien aimé" qui devient alors un vassal . Il "t ient une terre, un

90

Les b a i l l i e s d e P o i sy , d e Ro uen , d e Caen , d e Caux , d u Co te n t i n , d e Gi so r s , l e s

sénéc hau ssée s d e P o i tou e t d e Sa in to nge , t o u t e s i s s ues d e l 'o eu vre r éo rgan i sa t r i ce d es

P lan tage nê t s , l e s c hâ t e l l en ie s d e Mo n t l é r y e t l e s p r é vô té s d e P a r i s , d 'E ta mp es , d e

T o ur s e t d 'Or l éans , é l é men t s d u d o mai ne a nce s t r a l d e s Cap é t i en s . 91

" Les che va l i e r s d e l a p r e svo té d e P a r i s , d 'Es t a mp es e t d ' I l ec env i ro n , q u i d o iven t

se rv ice au ro y. . . IX che va l i e r s" . 92

L . MERLET , " No t i ces sur l a b a ro nnie d e Châ tea u neu f -e n-T hi mer a i s" , d ans Revue

n o b i l ia i re , h i s to r iq u e e t b io g ra p h iqu e , 1 8 65 , p .4 6 9 -4 71 : Hervé I I I d e Léo n ép o u se e n

1 2 6 3 Margue r i t e d e Ch â teaune u f -en -T hi mera i s , hé r i t i è r e d ' un t i e r s d e l a se ig ne ur i e d u

mê me no m e t d u c hâ te au d e Seno nche s . Le ur f i l s , He rvé IV d e Léo n e s t p r é se n t a ux

mo nt r e s ro ya le d e 1 2 72 e t d uca le d e 1 29 4 . I l ép o use Mahaut d e Po i s s y, hé r i t i è r e d e

Gui l l a u me d e P o i s s y, s e igne ur d e No yo n -s ur -And e l l e . En 1 2 8 1 , i l é chan ge a vec l e r o i

P h i l ip p e I I I l e Hard i t ou t ce q u ' i l p o sséd a i t e n Châ tea u neu f e t Se no nc hes .

14

f ié" de son suzerain. Il es t à remarquer qu 'en Bretagne, le service d 'ost

n 'es t pas personnel mais dépend de la t erre détenue : "pour la roison de la

terre". La seule r ichesse de cet te ar is tocrat ie es t la t erre. Cet te ar is tocrat ie

mil i tai re es t en même temps une aris tocrat ie foncière, cel les des moyens et

grands propriétai res . Longtemps une quest ion est res tée en suspens :

quel les étaient les raisons expl iquant l ' importance des contr ibut ions ?

Pourquoi un tel doi t un cheval ier et un autre dix ? Ce qui amène la

différence, c 'es t bien sûr la fortune, principalement l 'é tendue des terres ,

des f iefs , mais aussi le nomb re de châteaux possédés. La place capi tale que

dét iennent dans la société, dans les inst i tut ions et dans la s t ratégie

mil i tai re les châteaux du Moyen Âge expl ique sans peine leur choix comme

cri tère d 'évaluat ion des devoirs mil i taires par les adminis t rat io ns ducales .

Tous les avouants de 1294 sont des châtelains . Souvent , i l s ont plusieurs

châteaux comme le comte de La Marche, le vicomte de Rohan. Le nombre

de cheval iers dus est l ié au nombre de châteaux possédés. Le seigneur de

Kergorlay doi t en Cornouai l l e deux cheval iers d 'ost et possède dans sa

seigneurie deux châteaux, Kergorlay et Laz . Les Châteaugiron doivent deux

cheval iers et ont deux châteaux, Châteaugiron et Amanlis . Le seigneur de

Fougères doi t cinq cheval iers , sa ter re es t divisée en cinq châtel lenies .

D'autres indicat ions met tent en avant l ' importance du château : le Livre des

Ostz ment ionne que t rois contr ibuants doivent garder des forteresses . Mais

i ls res tent des inconnues assez embarrassantes . Quels ont été les cr i tères de

l 'adminis t rat ion ducale pour réclamer un écuyer, un homme d 'arme ou

même une aide pécuniaire ? Des forteresses moins importantes ? Ou même

leurs absences93

? Par ai l leurs , ces châteaux ont le plus souvent disparu,

souvent lors de la guerre de Succession de Bretagne, et ne so nt at tes tés que

par des aveux tardifs dans le mei l leur des cas au XVe s iècle, plus

fréquemment au XVIIe s iècle. Il es t t rès diff ici le de savoir avec exact i tude

qu 'el les étaient les forteresses possédées par les avouants , faute de

documents . Mais les t ravau x récents sur l 'archéologie cas t rale médiévale

bretonne94

ont permis d 'él iminer bien des écuei ls et de soulever bien des

voi les . Pour quelques cas , souvent pour les plus importants vassaux du duc,

le comte de La Marche, seigneur de Porhoët , Henri d 'Avaugour , seigneur de

Goël lo et de Quin t in, l 'évêque de Dol , le vicomte de Rohan, i l faut

comptabi l iser les châteaux de leurs vassaux, cons trui ts par leurs

prédécesseurs mais inféodés à des cadets ou à des proches95

. Les forteresses

bretonnes ressemblent rarement à cel les des s iècles suivants , sauf peut -êt re

cel les du seigneur de Vitré96

ou du seigneur de Fougères97

. Les châteaux

93

C 'e s t l e ca s d 'Her vé d u C has te l d an s l a b a i l l i e d e Léo n q u i ne d o i t r i en au d uc , p eu t -

ê t r e p a r ce -q ue so n châ t eau d e T rémazan n 'e s t p as enco re co ns t ru i t . 94

M. B R AND 'HO NNEU R, Les mo t t e s méd iéva le s d ' I l l e - e t -V i la in e , Renne s , 1 9 9 0 ; S .

HINGU ANT , Les mot t e s méd iéva le s d es Cô te s -d u -No rd , Rennes , 1 9 9 4 e t P .

KERNEVE Z, Le s fo r t i f i ca t io n s méd iéva le s d u F in i s t è re . Mo t t e s , en ce in te s e t ch â tea u x ,

Ren nes , 1 9 9 7 . 95

Qui n t in a u B o the re l , Q ué mé né a ux B eau mer , l ' enq uê te d e l ' évêq ue d e Do l . 96

C . AMIOT , " Le châ t eau d 'Aub i gné e t l e s châ teau x à mo t t e s a ve c co ns t ruc t io n d e

p ie r r e en B r e tagne" , d ans Bu l l e t in d e la so c ié t é a rch éo lo g iq u e d ' I l l e - e t -V i la in e , t .

XCVI , 1 9 9 4 , p . 3 9 e t 4 9 : And ré I I I d e Vi t r é ap rè s sa v i c to i r e s ur so n b eau - f r è r e ,

P ie r r e Mauc le r c r eco ns t ru i t e t r e s t a ure se s c hâ teaux , ce r t a i ne ment e n p ie r r e . 97

J o sse l in e t Fo u gè re s s o n t ag grand i s e t p o sséd ent d es é l é me nt s e n p ie r r e , t r è s co u teu x

à l ' ép o q ue , ma i s i l s so n t l e s r é s id e nces d u t r è s r i che Hu g ues d e Lus i gna n , co mte d e La

Marche e t d 'An go ulê me .

15

bretons à la f in du XIIIe s iècle, ent revus lors de nos recherches, semblent

avoir en commun d 'êt re des châteaux di t "à motte". La part ie ess ent iel le de

la forteresse est un donjon de pierre et de bois , c 'es t -à-dire une grosse tour

quadrangulaire, édif iée sur une éminence art i f iciel le , une but te de terre et

de pierre, ou construi te sur un promontoire dominant de toute sa hauteur

une r ivière ou même la mer. Depuis leur construct ion, souvent deux à t rois

cents ans auparavant , s i ce n 'es t plus , ces châteaux n 'ont pas connu de

grandes modificat ions. Ils se s i tuent dans les l ieux s t ratégiques, contrôlant

ponts , routes terrest res et f luviales importan tes , ports , anses et baies .

Grâce à ses vassaux appelés et à sa pol i t ique castrale98

, le duc dispose d 'un

réseau ser ré de châteaux, qui défendent t rois zones sensibles , les côtes99

,

les f leuves100

e t les front ières101

. Cet te dis t r ibut ion n 'es t pas un hasard. Les

débarquements ennemis sont aisés sur certaines plages. Les remontées des

f leuves, axes de communicat ion bretons privi légiés , ont été fréquentes lors

des invasions scandinaves, res tées dans les mémoires . La front ière es t de la

Bretagne n 'a r ien de naturel l e . L'encadrement cast ral de la Bretagne est t rès

important . Si un cheval ier d 'ost correspond à un château, i l ex is terai t en

1294 165 châteaux relevant directement du duc, sans compter les s iens

propres et les ceux de ses vassaux indirects102

.

En fai t , ce nombre de 165 châteaux ou cheval iers n 'a pas été s i aisé à

comptabi l iser . Les off iciers du duc comptent en effet 166 cheval iers , 17

écuyers et 30 archers . Ces résul tats , essent iels pour comprendre

l ' importance du potent iel mil i tai re de la Bretagne tant au point de vue

effect i f que f inancier , ont été repris par nombre d 'his toriens , avec quelques

erreurs103

. Mais ce calcul es t t rop rapide e t exclut la complexité du regis t re

98

LA B ORDE RIE , His to i re d e La Bre ta g n e , o p . c i t . , t . I I I , p . 36 3 . 99

Vo i r l e s c hâ teau x d 'Ala i n d e Car man, d 'A l a in N uz , d 'Her vé d u C has te l en Léo n ,

d 'Y vo n d e Ro s mad ec , d 'Her vé d u Neve t , d u se igne ur d u J uch , d u se i gne ur d e Les t i a l a ,

d 'He nr i d e Keraud ie r ne , d u se i gne ur d e P o nt -L 'Ab b é , d 'He nr i d e Fo ues na nt , e n

Co rno ua i l l e , d e Her vé d e L éo n e t d e No r ma n d d e Kae r d ans l a b a i l l i e r d e P lo ë rme l e t

B ro ë rech , d e Geo f f ro i d e Guérand e , d u se i gn eur d e La Ro c he -B ern a rd d ans ce l l e d e

Nante s ; d e Ro l l and d e Dinan , d e Geo f f ro i Tourne mi ne d ans l e s b a i l l i e s d e T réguie r e t

d e P en th ièvre , d e l ' é vê q ue d e S a in t -B r i euc en P en th iè vre , d e Do l d ans ce l l e d e Ren nes . 100

Sur l a Lo i r e , l e s châ te aux d u v ico mte d e Do n ges , d e Geo f f ro i d e S i o n , d e J a me t d e

La Muce , d 'Her l i n d e B o ugo n , d es Mo nt r e l a i s , d e s Seb ran , l e Lo ro ux -B o te r eau , d es

Ance ni s , d es Mo nt r e l a i s ; su r l a V i l a i ne , ceu x d es se ig ne ur s d e Rie ux , d e La Ro c he -

B erna rd ; su r L 'O us t , c eux d u co mte d e La Ma rche e t d u v ico mte d e Ro ha n ; s u r l 'Ave n ,

N izo n , Ha ut -B o i s , Hé nant ; s u r l e Sco r f f , c eux d e s f i e f s d e La Ro che -Mo isa n , d e

Gué méné ; su r l 'Aul ne , ceux d es se ig ne ur s d e La Ro c he -He lgo marc 'h , d e T rébr ivan , d e

Mené ; s u r l e Do uro n , ceux d e Ro l l a nd d e Di nan , d e s C ha r rue l , d 'A l a in d e T ro go f f , d u

se ig ne ur d u P o nt ho u ; su r l e T r i eux , ce ux d u s i r e d u P o i r i e r , d 'He nr i d 'Ava ugo ur ; su r

l a Le f f , c eu x d e P ie r r e T o urnemine , d e l a d a me d e Kergo r l a y, d e Ric ha rd d e La Ro che -

J agu ; su r l 'Ar gue no n , ceux d e Geo f f ro i d e P lanco ë t e t d e P ie r r e T o urnemine ; s u r

l 'E lo rn , c eu x d 'Hervé d e Léo n e t d e B e r t r and d e Kernau . 101

Do l , Fo ugè res , V i t r é , La G uerche , C hâ tea ub r i an t , Ance ni s , Mo nt r e l a i s , Macheco ul e t

Re tz q u i d o ive n t a u to t a l 2 9 cheva l i e r s . , f ac e à l a No rma nd ie , l 'Anj o u , l e Ma ine , l e

P o i to u , d o nc face aux t e r r e s ro ya le s . 102

De r écen te s é tud es sur l e s fo r t i f i ca t io ns méd iéva le s b r e to n nes o n t r évé lé l e ur

no mb re ex t r ao rd ina i r e : l e F i n i s t è r e en co n t i e n t 4 3 8 , l e s Cô te s d 'Ar mo r , 1 6 3 , l ' I l e -e t -

Vi l a ine , 2 8 0 . Au to t a l , l a B re tagne co n t i e n t l e s r e s t e s d e p lus d 'u n mi l l i e r d e

fo r t e r e sses , d e q uo i fa i r e r é f l éch i r ceu x q u i vo ud ra ien t e nva hi r l e d uc hé . 103

B . A. P OCQUET d u HAUT -J USSE, ( " De l a vas sa l i t é à l a no b le s s e…" , o p . c i t . , p .

7 9 0 ) q u i éc r iva i t : " Les d éc la r a t io n s d e 1 2 9 4 co nsc ieu se ment e nreg i s t r ée s p a r l e s

sec r é t a i r e s d e J ean I I s e t e r mi nent p a r l ' ad d i t i o n q u i a so n é lo q ue nce . Au to t a l , l e d uc

16

et des contr ibut ions. Les comparants déclarent dans leur ensemble

exactement 164,5 cheva l iers , 12 écuyers , 30 archers , un homme d 'arme à

cheval104

, un homme d 'arme par mesure de terre105

, la garde d 'une porte de

La Roche-Derrien106

, t rois hommes d 'arme107

. Pour t rois cheval iers108

, leurs

contr ibut ions se résument à leur propre personne. Le cas se ret r ouve aussi

pour t rois autres personnages qui ne sont pas cheval iers109

. Faut - i l compter

de même la présentat ion à la semonce de la dame de Kergorlay ? Quel les

sont les origines des écarts importants entre nos propres calculs et ceux des

off iciers du duc ? Dans la bai l l ie de Nantes , l 'o ff icier ducal y indique 36,5

cheval iers , alors que l 'addi t ion des contr ibut ions donne 35,5 cheval iers . Il

manque donc un cheval ier . Pourtant dans cet te part ie du regis t re, Geoffroi

Sebran, probablement seulement écuyer , indique qu 'i l souhai te se rendre à

l 'os t . Les seigneurs de Rougé, de Syon, ainsi que Brient Le Boeuf y

déclarent devoir des rentes pécuniaires au duc pour leurs f iefs nantais . Est -

i l possible que ces dernières contr ibut ions soi t équivalente à un cheval ier

d 'ost ? Les résul tats pour la bai l l ie de Tréguier se révèlent exacts (22,5

cheval iers et 3 écuyers)110

. Dans le total de la contr ibut ion de la bai l l ie de

Rennes est oubl ié l 'écuyer du seigneur de Rougé dû à son suzerain, le

seigneur de Vitré, ainsi que les hommes de la vi l le de Rennes fournis par le

procureur de l 'évêque et du chapi t re de Rennes. Dans la bai l l ie de Ploërmel

et de Broërech, seuls n 'ont pas été comptabi l isés les t rente archers de

l 'évêque de Saint -Malo. Enfin, dans la part ie léonarde du regis t re, le

cheval ier Hervé du Chastel n 'a pas été compté. Le Penthièvre doi t hui t

cheval iers , mais nous n 'en t rouvons que sept et demi, soi t un demi de

moins. L'aide f inancière de l 'évêque de Saint -Brieuc est considérée comme

équivalente à un demi cheval ier , complétant l 'autre demi-cheval ier déclaré

pour la terre au vicomte de Pomeri t en Planguenoual . La Cornouai l le doi t

fournir 15 cheval iers et demi et 14 écuyers selon l 'adminis t rat ion ducale,

plus de menus services . Si cet te bai l l ie doi t en effet 15,5 cheval iers , les

aveux des vassaux cornouai l lais ne cont iennent que hui t écuyers111

. Par

contre, i l y faut ajouter un certain nombre de combat tants112

. Faut - i l donc

en conclure que les contr ibut ions du voyer du Faou et du "f i lz d 'Yzerguent"

p eut co mp te r s ur u ne a r mée d e 1 6 1 cheva l i e r s e t 1 7 écu ye r s . Fe rd ina nd LOT , ( o p . c i t . ,

p . 2 19 ) a r ep r i s ce r é su l t a t p o ur en fa i r e u n exe mp le i mp o r tan t d e so n a rg u me nta t io n :

" c 'e s t a in s i q ue l a B re tagne ne fo urn i s sa i t à s o n co mte q ue l e no mb r e d é r i so i r e d e 1 66

cheva l i e r s" . 104

La t e r r e au f i l s d 'Yze rgue nt . 105

l e p r i eur d e Lann io n . 106

Ala i n d e Co ë t i n i zan . 107

l e vo ye r d u Fao u . 108

J ean d e La Ro c he -He lgo marc h , P ie r r e d e Haut -B o i s , t o us d e ux e n Co rno ua i l l e e t

Hervé d u C has te l en Lé o n . 109

Geo f f ro i Seb ran d an s l a b a i l l i e d e Nante s , p o ur Gui l l a u me d e P le ss i s - Nizo n e t J ea n

d e Mené en Co rno ua i l l e . 110

Mis à p a r t l e s ho mme s d 'a r me f ina ncés p a r l e p r i eur d e La nn io n , l a g a rd e d e l a p o r t e

d e La Ro che -Der r i en p a r Ala in d e C o ë t in i s an e t l a p r é sen ta t io n exc lu s i ve ment à l a

se mo nce d e l a d ame d e Kergo r l a y. 111

J uch : 2 , Neve t : 2 , Ke raud ie rne : 1 , Hénant : 2 , Leso n ga r : 2 . 112

Le s t r o i s ho mmes d 'a r mes à c heva l d u " f i l z d 'Yze r gue nt " , l e s d e vo i r s vo lo n ta i r e s e t

p e r so nne l s d es c heva l i e r s J ean d e La Ro c he -He lgo marc h , P ie r r e d u Ha ut -B o i s a in s i q ue

d e Gui l l au me d u P le s s i s -N izo n e t d e J ean d e Mené , p ro b ab lemen t no n enco re ad o ub és .

17

équivalent à plusieurs écuyers , auxq uel les i l doi t êt re adjoint la

contr ibut ion des deux vassaux non adoubés cheval iers ?

Pour Ferdinand Lot113

, c 'es t bien peu : "pour son expédi t ion contre le comte

de Bretagne, en 1231, saint Louis entret ient 131 cheval iers , 142 sergents à

cheval , 21 arbalét r iers montés , 44 "lesqui l lons", 1600 sergents à pied, au

total 2024 hommes. Il faut di re que les ressources mil i tai res du comte de

Bretagne étaient inf imes. Alors que la Normandie fournissai t presque 600

cheval iers , l a Bretagne n 'en donnai t même pas 200 à son souverain". Cet

his torien fai t t rois erreurs . La Normandie n 'a pas le même statut que la

Bretagne. Les Plantagenêts et leurs successeurs y ont toujours eu des

domaines t rès étendus et une s t ructure mil i tai re t rès performante114

. Le

domaine ducal breton en 1231 n 'es t pas le même qu 'en 1294. Sont ci tés

outre les cheval iers , "les auxi l iai res" de l 'os t royal , ce que ne fai t pas le

regis t re du Livre des ostz . En fai t , force est donc de constater que les

cont ingents chevaleresques sont s imilai res : 131 cheval ie rs pour le plus

puissant roi d 'Occident en 1231 (époque où les possessions royales sont

importantes) et 165 cheval iers pour le duc de Bretagne en 1294, à une date

où le domaine ducal at teint son apogée. Quelques décennies plus tard,

Phi l ippe Contamine dans son ouvrage sur la guerre au Moyen -Age voi t dans

le résul tat de la semonce de Ploërmel que "le servi t ium debi tum est en

pleine débâcle"115

. Il nous paraî t intéressant et nécessaire, en l 'é tat actuel

de notre recherche, de nuancer de tel les aff i rmat ions. Le duc ne convoque

pas seulement les vassaux directs de la couronne de Bretagne mais aussi les

feudataires de ses domaines personnels . Par contre, les ar r ières vassaux ou

vassaux de second rang, plus ou moins importants , n 'ont pas été appelés et

ne pouvaient pas l 'ê t re . Les exemples sont t rop nombreux pour tous les

ci ter . Un seul nom suffi t : Ol ivier de Machecoul , proche parent de Jean II,

puissant seigneur du pays de Retz n 'es t pas et ne pouvai t pas l 'ê t re

convoqué puisque ses f iefs relevaient du seigneur de Retz116

. De même,

l 'ar r ière-ban n 'es t pas appelé. Il n 'es t pas demandé aux comparants présents

à Ploërmel de ci ter leurs vassaux et les devoirs mil i tai res de ces derniers .

Cela n 'es t pas le problème du duc, comme le prouve la déclarat ion de Gui

de Laval , seigneur de Vitré. Pourtant , cet te semonce a provoqué quelques

remous au sein de l 'ar is tocrat ie mil i tai re bretonne, comme le prouve le

refus du vicomte de Pléhédel d 'aider son suzerain, Henri d 'Avaugour,

seigneur de Goël lo, qui devai t dix cheval iers au duc117

.

113

F . LOT , o p . c i t . , p . 2 36 . 114

J . B OUSSARD, " Enq uê te d e 11 7 2 sur l e s se rv ices d e cheva l i e r en N o rma nd ie" , d ans

Recu e i l d e t ra va u x o f fe r t s à M. Clo v i s B ru n e l , P ar i s , 19 5 5 , p . 1 9 3 -2 08 . 115

p . 1 81 , no te 1 . 116

GUILLOT IN d e CORS ON, o p . c i t . , B.S .A .N. , t . 3 8 , 1 8 97 , p . 22 5 -2 3 4 : I l s d é tena ien t

l e s châ te l l en ie s d e La B énas te , d e Co ut u mie r , d e B o urgneu f . 117

A.D . L. A. , E . 1 3 4 /1 . Ce d o cu me nt fa i t a u Liv r e d es Os t z . J . LAM ARE , " La fa mi l l e d e

B o i sge l in" , d an s Bu l l e t in d e la S o c ié t é d 'Emu la t io n d es Cô te s -d u -No rd , 1 8 6 5 , p . 1 03 -

2 1 6 e t R . COUFFON e t F . MERLET (F . ) , "No tes sur l e s o r ig i nes d e l a v i co mté d e

P léhéd e l " , d ans S o c ié t é d 'Emu la t io n d es Cô te s -d u -No rd , t . 6 4 , 1 932 , p . 75 -9 1 . Henr i

d 'Avau go ur a t en té d e se d écha rge r s ur Ala in d e Ker r ao ul , v i co mte d e P léhéd e l , en lu i

r éc l a man t un che va l i e r d 'o s t . Ala i n d e Ker r a o ul r é s i s t e e t d o i t se p r é sen te r d eva nt l a

co ur d e j u s t i ce d e Go ë l lo . I l s ' y r e fu se , se r é f é r an t à l a co u tu me d e B re tagne , me nace

mê me d 'en r é fé r e r a u d uc e t en d e rn iè r e i ns t ance a u ro i d e F rance e t a f f i r me d evo i r ce

r end re à Fo ugè re s , sa n s an no nce r q u ' i l r e l èv e d u se i g neur d e Fo ug è res . L 'o rd re d e

succe ss i o n d es se i g ne ur s d e l a v i co mté d e P léhéd e l e s t auss i me nt io n né , i nd iq ua nt

18

Des comparaisons sont possibles avec le royaume de France. Selon F. Lot ,

"le roi de France (Phi l ippe Auguste) pouvai t compter sur environ 800

cheval iers"118

. A Bouvines, en jui l let 1214, la Vita Odil iae précise le

nombre de cheval iers retenus par le roi : 40 0 seulement119

, dont 38

cheval iers banneret s bretons. Pour le règne de Phi l ippe III, la l is te des

cont ingents féodaux qui pri rent part à son expédi t ion contre le comte de

Foix donne 674 (sans compter les contr ibut ions de la Guyenne et de

l 'Anjou)120

, soi t t roi s fois plus , on est tenté de rajouter "seulement", que ce

qui es t déclaré à Ploërmel en 1294, soi t 22 ans plus tard. C 'es t peut -êt re

t rois fois moins important que pour le roi de France, mais la Bretagne n 'a

pas la superficie du royaume de France. Le roi d e France ne s 'y t rompe pas

en demandant à son vassal et cousin de Bretagne d 'apporter la première

contr ibut ion féodale de France en 1272. Il es t en effet à remarquer

l ' importance de la contr ibut ion bretonne dans l 'os t royal : en jui l let 1214,

38 cheval iers bannerets , en 1272, 60 cheval iers et en 1317, 90 cheval iers121

.

Le duc ne s 'entoure certainement que de ses vassaux principaux, les plus

r iches , car la guerre se s i tue en dehors de la Bretagne, le voyage est long,

l 'expédi t ion coûteuse, surtout lorsqu 'el le s 'é ternise.

En fai t , le potent iel mil i tai re réel de la Bretagne est net tement plus

important que ne le di t le Livre des Ostz . Il serai t nécessaire de fai re un

inventaire des seigneuries bretonnes à la f in du XIII s iècle, de leurs

devoirs et capaci tés mil i t ai res , de connaî t re les possibi l i tés des "bonnes

vi l les" de Bretagne. La convocat ion ne ment ionne que les hommes d 'armes

comme si eux seuls comptaient en tant que force mil i tai re . Il es t évident

que tous ceux qui pouvaient porter les armes n 'ont pas été ap pelés . Le

nombre de cheval iers du royaume s 'élevai t à plusieurs mil l iers , en Bretagne

à plusieurs centaines , sans que nous en sachions le nombre précis faute de

documents exacts . Par ai l leurs , i l es t di ff ici le d ' imaginer que ces

personnages, souvent consid érables , r i ches et puissants se soient rendus

aux convocat ions comme à l 'a rmée, seuls . Chaque homme d 'arme étai t au

minimum accompagné d 'un valet et d 'un page mais qui ne prenaient pas

part au combat , se bornant à "habi l ler" le cheval ier , c 'es t -à-dire le

combat tant à cheval , et à garder les chevaux122

. Toujours selon Ferdinand

Lot , "somme toute , dans l 'ensemble du royaume le souverain (alors

Phi l ippe V Le Long) pouvai t compter sur le concours mi l i tai re d 'environ

400 grands et moyens feudataires , ce qui à rais on d 'un cont ingent évalué

avec exagérat ion à 10 ou 15 hommes pour chacun d 'eux représenterai t au

maximum 4 à 5000 caval iers"123

. S i le duc de Bretagne peut obtenir de ses

vassaux 165 cheval iers d 'ost , ses forces di tes d 'origine féodale at teignaient

au maximum 1650 à 2475 caval iers , soi t la moit ié des forces royales

françaises . Le duc n 'es t donc pas un prince à sous -est imer.

l 'o r ig ine d u f i e f e t l ' i n ex i s t e nce d e l i e ns e n t r e l e s v i co mte s d e P léh éd e l e t l e se i gne ur

d u Go ë l lo . 118

F . LOT , o p . c i t . , p . 2 49 . 119

Ib id , p . 2 26 . 120

F . LOT , o p . c i t . , p . 23 7 , d 'ap rè s l e r o u leau D d e l a cha mb re d es C o mp te s ( J J 1 d u

T réso r d es Cha r t r e s ) p ub l i é s p a r E . B OUT AR IC, o p . c i t . , p . 1 9 3 -1 95 e t Recu e i l s d es

Hi s to r i en s d e Fra n ce , t . XXI , p . 7 7 8 . 121

F . LOT , o p . c i t . , p . 2 10 . 122

Ib id , p . 27 0 . 123

Ib id , p . 27 3 .

19

Ce potent iel mil i tai re a un coût . La nature même du Livre des ostz montre

l ' importance de l 'argent . L'argent es t nécessaire au cheval ier pour acheter

un cheval de guerre , une armure, payer le forgeron qui a fabriqué l 'épée.

L'argent es t vi tal aux souverains pour garder leurs vassaux, pour payer les

mercenaires et les t roupes soldées e t surtout pour l 'en tret ien de tous.

Phi l ippe Contamine fourni t un tableau des soldes journal ières d 'un

cheval ier et d 'un homme de pied français , sachant que deux sous

représentaient en l 'occurrence entre hui t et douze l ivres de pain. En 1295,

un cheval ier coûte 10 sous, 12 sous 6 deniers ou 15 sous ; un homme de

pied, 12 deniers124

. En ut i l isant l 'es t imat ion la plus forte, le roi de France

doi t débourser pour l 'entret ien d 'environ 400 cheval iers en arme, 6000 sous

par jour, soi t 300 l ivres par jour ou encore 12 000 l ivres pour les 40 jours

t radi t ionnels de service mil i tai re. Pour sa part , l e souverain breton devrai t

payer pour environ 165 cheval iers , 2475 sous par jour, soit 126 l ivres 15

deniers par jour, soi t pour 40 jours , 4950 l ivres . Pour donner des éléments

de comparaison, les deux rôles des Comptes réal isés à Muzi l lac, datant

respect ivement de Pâques 1300 et 1303 (soi t à peine d ix ans après la

rédact ion du Livre des ostz ) , indiquent des recet tes ducales (d 'origine

domaniale) d 'un montant de 9800 l ivres en 1300 et de 16 284 l ivres en

1303125

. Les seuls combat tan ts d 'obl igat ion absorberaient donc en temps de

guerre du t iers à la moit ié des recet tes ordinaires du duc. Une tel le dépense

est di ff ici lement supportable à long terme car i l faut aussi compter sur les

t roupes auxi l iai res et les mercenaires . Il es t probabl e que le t résor ducal à

la mort de Jean II n 'aurai t pas été aussi énorme (165 910 l ivres en 1305) s i

le duché et la Bretagne avai t connu une période de guerre, longue et

dévastat r ice, comme aux s iècles suivants .

Phi l ippe Contamine s 'es t penché "sur la mis e de fonds, ou du capi tal ,

fournie par les guerr iers"126

. Les données chiffrées sont rares avant la f in

du XIIIe s iècle, mais i l es t assuré qu 'à lui seul l 'équipement étai t fort cher .

Le cheval de guerre valai t une fortune. En vue de l 'os t de Flandre de 1302 ,

le comte d 'Artois f i t acheter , pour lui et sa sui te , des montures dont nous

connaissons le prix : plus de cinq cents l ivres127

. En 1295, Pierre de

Bretagne, comte de Léon achète pour 9000 l ivres de chevaux. Il s 'y ruine et

doi t céder, en cont repart ie de l ' a ide du duc, son père, son apanage et

nouveau f ief de Léon128

. Le compte d 'Auberi (voyage à Lyon, mort et

124

P . CONT AMINE, La gu erre a u Mo yen -Ag e , Pa r i s , 1 9 8 6 , p . 1 9 8 . 125

Le co mte d e Neufb o u rg , "P ui s sa nce r e l a t ive d es co mtes e t se i gne ur s d e Fo rez au

XI I Ie s i èc l e " d ans Le Mo yen Ag e , 19 5 5 , t . XI , p . 41 4 : Le r even u d u co mte e s t d e 1 0

0 0 0 l iv r e s p a r an . En 1 2 5 9 , Alp ho nse d e P o i t i e r s , co mte d e P o i to u , d 'Auve r gne e t d e

T o ulo use a un r e ven u d e 3 1 46 8 l iv r e s p a r an . L 'Ed i t so mp t ua i r e d e 1 2 9 4 p o r t e " Les

d ucs , co mtes e t b a ro ns aya n t 6 0 0 0 ( l iv r ées ) d e t e r r e o u p lus" . D 'ap rè s J . R icha rd , le

r even u d u d uc d e B o urgo g ne en 1 2 7 8 e s t d e 2 0 0 0 0 l iv r e s e t en 1 3 0 8 d e 3 0 0 00 l iv r e s .

Les r i che s co mtes d e C ha mp a gne ava ien t p o ur r even u e n 1 2 3 3 3 3 7 50 l iv r e s , e n 1 2 7 0 ,

3 7 4 00 l iv r e s e t en 1 2 8 5 4 3 2 4 0 l iv r e s . P . 41 4 , l e s r ece t t e s d u ro i so n t é no r mes : e n

1 2 0 2 -1 20 3 , 21 0 9 2 0 l iv r e s 1 3 so us , en 1 2 2 3 , 22 8 0 00 l iv r e s , en 1 2 8 7 , 3 9 5 6 2 0 l iv r e s ;

en 1 2 9 9 , 1 5 71 9 77 l iv r e s ( mo n na ie d éva l uée ) . 126

P . CONT AMINE, La gu erre…. , o p . c i t . , p . 1 99 . 127

5 " gr and s che va us" , au p r ix mo ye n d e 2 8 0 l iv r e s p a r i s i s ; 8 cheva u x sa ns

q ua l i f i ca t i f , au p r ix mo ye n d e 1 1 5 l iv r e s p . ; 2 p a le f ro i s , a u p r ix mo ye n d e 5 0 l iv r e s

p a r i s i s ; un co ur s i e r , p o ur 6 0 l iv r e s p . ; 1 4 ronc in s , au p r ix mo ye n d e 3 4 l iv r e s p . e t 3

" ro nc ine t s" , au p r ix mo yen d e 1 2 l iv r e s p . " . 128

DOM MORICE, Hi s to i re… , o p . c i t . , t . I , p . 2 12 .

20

funérai l les du duc Jean II, 1305, du 1e r

août au 18 décembre) at tes te de

quelques "restaur", c 'es t -à-dire des dédommagements reçus de

l 'adminis t rat ion ducale pour des chevaux d 'arme morts ou blessés pendant

la campagne de Flandres du début du XIVe s iècle. Le cheval acheté pour

Pierre de Baden (un des cheval iers du duc) coûte 20 l ivres129

. P ierre du

Bois (ou du Haut -Bois , peut -êt re le même que celui du Livre des ostz )

reçoi t 30 l ivres130

. Un cheval , sans ment ion de sa qual i té vaut donc en

Bretagne entre 25 e t 30 l ivres . Le prix de l 'équipement n 'es t pas non plus

négl igeable. Un heaume d 'apparat es t t rès cher , celui du duc Jean II sur son

l i t de mort vaut t re ize l ivre131

. Une cot te de mai l le se négocie 30 sous132

,

soi t en 1295 seulement deux jours de solde ; mais pour un heaume, i l fal lai t

compter dix jours de solde et pour un cheval , entre un et deux mois de

gages133

. Les "restaur" reçus par les hommes d 'arme du duc de Bretagne (sa

garde personnel le) varient lors de la campagne de Flandres de 1302 ent re

15 à 300 l ivres , so i t de vingt jours à un an et demi de gages dans l 'os t

français . Un cheval ier reçoi t de 100 à 300 l ivres . Un écuyer perçoi t au

maximum 90 l ivres de compensat ion pour ses pertes en campagne et de 25 à

40 l ivres par an pour son service134

. Le capi tal représenté par l 'équipement

d 'un écuyer de la sui te ducale const i tuai t en moyenne entre t rois semaines

et quatre mois de so lde de cheval ier135

.

Le Livre des Ostz fourni t une indicat ion capi tale. L'évêque de Saint -

Brieuc doi t 12 l ivres 10 sous pour son service mil i tai re. Les secrétai res du

129

A. d e LA B O RDERI E , No u vea u recu e i l d 'a c te s in éd i t s d es d u cs e t p r in ces d e

Bre ta g n e (X I I Ie-X IV

e) , Ren nes , 1 9 0 2 , p . 1 47 , n° 2 4 5 : " Po ur un cheva l acha té d e

P ie r r e s d e B ad en p o ur P e r ine t , 2 0 l . " 130

Ib id , p . 14 2 , n° 2 09 : : " A P e r r au t do u B o a is , p o ur l a r e s t aur d e so n cheva l 3 0 l . "

Vo i r aus s i DOM MORI CE , P reu ves , o p . c i t . , t . I , co l . 1 1 9 8 -1 1 9 9 : t e s t a ment d e J ean

I I . P asse -Avant , écu ye r d u d uc r eço i t p o ur l e " r e s t aur " d e so n c he va l 1 0 l i v r e s . Le

cheva l i e r B e r t r and d e Pen mur o b t i en t " un ro uc in p o r l e p r i s d e 20 l ib" . 131

Ib id , p . 1 45 , n° 2 2 9 : Co mp te d 'Aub e r i : " P our u n hea u me d o ré ap or t é d e P ar i s p o ur

l e me i t r e l e j o ur d e l ' e n te r r eme nt mo ns . p a ie a u b a rb ie r mo ns . J eha n d e B re ta igne , 1 3 l .

1 5 s . " . 132

DOM MO RICE, Preu v es , o p . c i t . , t . I , co l . 11 9 8 , t e s t a ment d e J ean I I : " I t em a so n

f i l s ( d e Macé Gu i l l a r t ) xx x s . p o ur u ne co te q u e l e s exeq uto r s l i d o n n e ren t " . 133

Vo i r P . Co nta mine , La g u erre a u Mo yen Ag e , p . 2 00 . 134

DOM MORICE Preu ve s , o p . c i t . , t . I , co l . 1 19 5 -1 1 9 8 , t e s t a me nt d e J ean I I : Gaud in

B o te r e l r eço i t p o ur l e vo yage d e F la nd re (gue r r e d es F land res en 1 3 02 ) , 3 5 l iv r e s .

Gui l l a u me Co i t l a ga t o u Co ë t l aga t , p o ur so n se rv ice , sa se l l e p e rd ue à l a gue r r e , p o ur l e

r e to ur d 'u n che va l ( sau f ce lu i s ur l eq ue l i l f i t l a gue r r e d es F land res ) o b t i en t 5 0 l iv r e s .

Gui l l a u me C ha mp a i g n e s t d éd o mmagé d e 8 0 l iv r e s p o ur avo i r p a r t i c ip é à t ro i s

exp éd i t io ns e n F la nd re e t une e n Arago n ( ce r t a ine ment ce l l e d e 1 2 85) e t p o ur l e r e to ur

d e so n che va l . R io u Co te r ez o b t i en t 4 5 l iv r e s p o ur l e r e to ur d e cheva u x e t

" l ' e mp i r e me nt" d e so n ha rna i s , a lo r s q ue J ano t d e La C ui s i ne n 'a q ue 1 5 l iv r e s .

Gui l l a u me d e B ad en , é cu ye r , o b t i e n t p o ur l e s mê mes r a i so n s , 6 0 l i v r e s , t and i s q ue so n

p a ren t , P i e r r e d e B ad en en a 7 0 . C 'e s t san s co n tex te G ui l l a u me Vie i l l e , é cu ye r q u i e s t

l e p lus p o urv u : " po ur l e r e to ur d e chevaux , l ' a mend e men t d e so n ha rna i s , p o ur l e s

q ua t r e vo ya ges e n F la n d re , 90 l iv r e s" .

Le c he va l i e r , p ro che d u d uc , J ean d e Maure ( ce r t a ine ment c i t é d ans l e Liv re d es o s t z )

o b t i en t 3 0 0 l iv r e s p o ur l e vo ya ge d e F land re . I l o b t i en t au ss i l e p a ie men t d e 9 7 0 l iv r e s

p o ur so n vo ya ge en o u t r e mer ( en c ro i s ad e ) q u i a d uré q ua t r e ans . Geo f f ro y d e Gui gue n ,

cheva l i e r , l u i au ss i me mb re d e l ' en to ura ge d u d uc , r eço i t 54 0 l iv r e s p o ur q ua t r e

vo ya ges e n F la nd re e t a us s i p o ur u n gr and c he va l . I l a p e r çu 1 0 0 l iv r e s p o ur l e p r e mie r

vo ya ge en F la nd re e t ava i t e mp r un té 4 0 l iv r e s d o nt i l e s t q u i t t e e n 1 3 0 6 sur l e sub s id e

d e Do l . I l r eço i t auss i un ro nc i n p o ur l e " r e s to r d e so n p a le f ro y" . 135

P . CONT AMINE, La gu erre… , o p . c i t . , p . 1 98 .

21

duc semblent avoir compté cet te contr ibut ion comme représentant un demi -

cheval ier et es t iment donc le coût d 'un c heval ier à 25 l ivres , soi t

approximat ivement le prix d 'un cheval de combat . Au total , les quelques

165 cheval iers d 'ost valent 4125 l ivres , soi t environ la moit ié du revenu

ordinaire du duché à la f in du XIIIe s iècle, approximat ivement le coût de

l 'entret ien de l 'armée féodale selon les cr i tères de l 'adminis t rat ion

française. Le prix es t s i important que le lecteur du Livre des ostz a

souvent l ' impression d 'une fui te des avouants devant leurs devoirs

mil i tai res . Dans de nombreux cas , le comparant essai t de s 'en décharger sur

ses vassaux, les appelant nominat ivement136

. D'autres137

a t tendent l 'aide

f inancière ou "ostage" de leurs juveigneurs et hommes. La première

déclarat ion est t rès intéressante car el le fourni t une indicat ion de l ' "ostage"

en Cornouai l le : 12 deniers par hommes. Quelques cont r ibuants se font

aider aussi de leurs parsonniers138

ou des autres seigneurs de la paroisse139

.

Certains avouants l imitent eux -mêmes leur aide mil i tai re, tant le coût es t

insupportable, surtout à l ' in tér ieur de la Cornouai l le , où les f iefs sont ,

semble-t - i l , peu r iches : le voyer du Faou f inance t rois hommes armés pour

quinze jours . Il es t probable qu 'ensui te la dépense soi t à la charge de

l 'adminis t rat ion ducale : Alain de Coët inizan déclare devoir garder la porte

"En Galet" à La Roche-Derrien pour un jour et une nui t , le res te devra êt re

f inancé par le duc. Jehan de Mené aff i rme al ler à l 'os t tant que ses revenus

provenant de l 'a ide mil i tai re de ses vassaux seront suff isants .

On imagine sans peine le coût prohibi t i f de l 'expé di t ion pour un cheval ier ,

toujours accompagné au moins d 'un valet140

. S i un cheval vaut entre 20 et

30 l ivres , deux montures s ignif ient le double et c 'es t sans compter les

montures de rechange, d 'apparat , les équipements défensifs et of fensifs ,

l 'entret ien e t le ravi tai l lement . Selon Phi l ippe Contamine, le capi tal

nécessaire pour un cheval ier étai t en moyenne de s ix à hui t mois de gages

annuels (entre 135 et 180 l ivres) . Dans ses condi t ions, les vassaux du duc

devraient mobi l iser à l 'appel de leur duc, pour u n cont ingent de 165

cheval iers , entre 22 275 et 29 700 l ivres .

Ce recours aux vassaux permet d 'entrevoir le système vassal ique breton. Le

schéma idéal et ta rdif de la société féodale, la pyramide parfai tement

harmonique et régul ière à la tête de laquel le se s i tue le prince, avec une

s t r icte hiérarchie où les seigneurs les plus importants sont les vassaux

directs et immédiats , les plus faibles au contrai re n 'étant rat tachés à lui

136

Co mme l e se i gne ur d e Vi t r é ( q u i r ep o r t e p r e sq ue to us se s d evo i r s s ur l a d a me d u

B o i s -Geo f f ro y, sur l e s se ig ne ur s d e La G uerch e e t d e Ro u gé e t s ur Ro b in d e Co es me s) ,

co mme l e se i gne ur d 'Anceni s ( sur l e se ig ne ur d e Châ teaub r i an t ) , l e v i co mte d e Do nges

( sur l e d uc , so n vas sa l p o ur l a t e r r e d e Lavau e t sur l e se i g neur d e Ri eux) ; l e se ig ne ur

d e La Ro che -B erna rd d éc la r e q ue so n vas sa l , T h ib au t d e Ro che fo r t , l u i d o i t p o ur l a

t e r r e d 'Assé r ac l a mo i t i é d e sa co n t r ib u t io n ( 1 ,5 cheva l i e r s ) e t che r che à fa i r e p a ye r

p o ur un che va l i e r l e d u c lu i -mê me p o ur l a t e r r e d e Vi t r é . Henr i C ha r rue l fa i t p a r t i c ip e r

so n va ssa l , He nr i Le Lo ng , p o ur u n q ua r t d e sa co n t r ib u t io n . Geo f f ro i Le Ro ux e n fa i t

d e mê me a vec Ro l l and d 'Arge nta ye , p o ur u n d e mi c heva l i e r . Le v ico mte d e T o nq uéd ec

d éc la r e q ue so n vas sa l e t p a r en t , Ro l l a nd d e Dina n -Mo nta f i l a n t , p a r t age avec lu i l a

cha rge d e c inq che va l i e r s d 'o s t . 137

Co mme l e s se ig ne ur s c o rno ua i l l a i s J ean d e M ené e t Henr i d e T réb r ivan . 138

Rao ul d e Melesse , l e s e igne ur d e Rezé . 139

P i e r r e Ma lor se to urne ve r s l e s a u t r e s se i g neu r s d e l a p a ro i s se d e Séné . 140

LA B ORDE RIE , No u vea u recu e i l d ' a c te s…, o p . c i t . , p . 1 1 3 , n° 2 2 : Co mp te

d 'Aub e r i .

22

que par l ' in termédia ire de plusieurs relais es t , encore une fois , à revoir141

.

La plus grande complexi té règne au se in des relat ions féodo -vassal iques.

Les hommages se sont mult ipl iés . Chacun est tout à la fois vassal et

suzerain d 'un même personnage, comme le seigneur de Rochefort qui

devient le suzerain du duc pour la terre de Lavau que t ient le duc après

l 'ex t inct ion du l ignage de Lavau -sur-Loire. Il en devient t rès diff ici le de

comptabi l iser exactement les devoi rs de certains avouants : par exemple, le

seigneur de Vitré doi t cinq cheval iers , son vassal pour la t erre de Mart igné

lui en doi t un, mais i l s 'agi t du seigneur de La Guerche qui doi t pour La

Guerche deux cheval iers , soi t donc au total t rois cheval iers . Rol land de

Dinan doi t quatre cheval iers dans les bai l l ies de Penthièvre et de Tréguier ,

mais part icipe (on ne sai t pas pour combien) aux cinq cheval iers du

vicomte de Tonquedec et pour rai t tenir la terre au vicomte de Pomeri t à

Planguenoual qui doi t un demi cheval ier142

. Le cas le moins évident est

celui du vicomte de Rohan qui déclare neuf cheval iers et demi, dont t rois

pour son f ief de Porhoët qui sont dus à son suzerain le comte de La

Marche, seigneur de Porhoët (et donc son suzerain) . Faut - i l les intégrer

dans la déclarat ion du comte de La Marche pour sa terre de Porhoët ? Dans

ce cas , t rois cheval iers ont été comptés deux fois . Les demandes d 'enquêtes

sont nombreuses . L' incert i tude et la prudence sont de mise chez les

déclarants . C 'es t le cas pour les seigneurs d 'Ancenis , de Retz (pour sa terre

de Machecoul , acquise récemment143

) , de La Roche -Bernard, dans la bai l l ie

de Nantes

Cet te complexi té provient des partages successoraux. Par exe mple, l e

l ignage de Porhoët es t tombé en quenoui l le au début du XIIIe s iècle. Les

biens, immenses, ont été divisés entre la dame de Fougères qui héri te de la

terre de Porhoët (soi t les deux -t iers de la seigneurie se lon l 'Assise de

Geoff roi datant de 1185 ; son pet i t -f i ls es t le comte de La Marche) et

Al iénor, dame de Lannouée, de La Chèze et de Loudéac, vicomtesse de

Rohan (el le es t la mère d 'Alain VI de Rohan, présent à Ploërmel) . Les

considérat ions famil iales sont donc t rès présentes lors de cet te revue. Le

seigneur de Vitré essaie de fai re part iciper davantage à son devoir , mais

avec diff icul té , son beau -père, Jean de Beaumont , seigneur de La Guerche.

Les Anast , Jean de Maure, les héri t iers de Guil laume et de Geoffroi

d 'Anast , i ssus d 'un même l ignage puis que l 'ancien nom d 'Anast es t Maure,

se sont réunis pour déclarer un cheval ier . Le vicomte de Tonquédec et de

Coëtmen fai t part iciper son cousin germain, Rol land de Dinan -Montafi lant ,

car ce dernier a obtenu la ter re de Runfao de sa mère, une Coëtmen de

Tonquédec.

Une hiérarchie sociale es t vis ible à t ravers l ' importance des différentes

contr ibut ions, mais aussi à t ravers l 'or igine famil iale. Au sommet, on

t rouve un groupe rest reint (douze vassaux), devant plus de cinq cheval iers

au duc, disposant d 'une pui ssance s 'asseyant sur plusieurs châteaux,

possédant une autori té sur de vastes terr i toi res gérés avec l 'a ide de

141

Vo i r M. -T . ALLEM AN D -G AY, Le p o u vo i r d es co mtes d e Bo u rg o g n e a u X I I Ie s i èc l e ,

P ar i s , 1 98 8 142

Co mte sse d e L A M O T T E -R O U G E , Les Din a n e t l eu rs ju ve ig n eu rs , Na nt e s , 1 8 9 2 , p . 6 5

e t p . 7 4 -7 6 143

B LANCH ART , o p . c i t . , p . LIV-LVI I e t CXXV -C XXXII .

23

sénéchaux144

. I ls peuvent prétendre jouer un rôle pol i t ique en Bretagne mais

aussi dans tous l 'Ouest de la France. Ils sont souvent issus des plus

i l lust res l ignages de l 'Occident chrét ien . Le comte de La Marche, qui doi t

quinze cheval iers , soi t la plus forte contr ibut ion de Bretagne, es t le chef de

la maison de Lusignan, plusieurs fois royale. Sa grand -mère avai t épousé

Jean Sans Terre, roi d 'Angle terre145

. Jean de Beaumont , seigneur de La

Guerche est le cousin du roi de France. Son grand -père a été le roi de

Jérusalem. Sa tante a été l ' impératr ice du Saint -Empire146

. Le seigneur de

Vitré, Guy de Laval es t le représentant de la branche cadet te des

Montmorency, premier baron de la Chrét ienté147

. Ils sont tous apparenté au

duc, sauf peut -êt re Hervé de Léon, mais i l descend d 'Et ienne de Blois , roi

d 'Angleterre148

. Le second groupe est plus étoffé ( i ls sont quarante) . Ils

doivent entre un et cinq cheval iers . Ce sont les seigneurs importants ,

proches des grands et surtout du duc, dont i ls sont parfois parents , établ is

sur un nombre moins importants de châteaux, disposant de terres pouvant

s 'é tendre sur plusieurs paroisses . Certa ins se renforcent et organisent leur

seigneurie grâce à des al l iances hypergamiques149

. Enfin, on découvre

certains vassaux, plus modestes seigneurs devant moins d 'un cheval ier ,

at tachés par le duc à un château, possédant quelques biens

personnel lement150

. Le fai t que plusieurs de ces seigneurs portent le nom

d 'une motte et la présence ef fect ive d 'une motte au centre de leur

seigneurie pourrai t const i tuer un indice d 'ancienneté. Pourtant , i l s ne

sortent de l 'obscuri té qu 'au XIIIe s iècle et font f igure d 'hommes nouveaux.

Les Tournemine grâce à deu x mariages, l 'un avec Constance de Bretagne,

l 'autre avec Edie de Penthièvre leur permet tent d 'accéder à la haute

ar is tocrat ie , surtout lorsqu 'i ls obt iennent l 'ensemble du patr imoine des

Penthièvre (à part les places -fortes qui reviennent au duc). Les Chas tel

dans le Léon et les Rosmadec en Cornouai l le ont pu obteni r leurs f iefs de

mariages. Mais beaucoup sont des cadets d 'anciens l ignages. Bert rand de

Kernau en Léon est un cadet probable de la maison de Cornouai l le . Hervé

de Léon, Alain de Carman et le vic omte du Faou sont certainement membre

de la maison de Léon. Les seigneurs de Rostrenen et de Kergorlay sont

issus des vicomtes de Poher. Brient Le Boeuf es t un cadet de la maison de

Châteaubriant . Les Avaugour, les Tonquedec, les Rochefor t , les Rieux, les

Kaer descendent de la maison souveraine de Bretagne. Pour la grand

majori té d 'entre eux , ce n 'es t que le début d 'une fabuleuse ascension

sociale. L'ar r ière -pet i te-f i l le et héri t ière d 'Henri d 'Avaugour est Jeanne de

Penthièvre, duchesse de Bretagne. La mais on de La Guerche se fond dans le

l ignage ducal d 'Alençon. Les Tournemine et plus certainement les Dinan -

Montafi lant , les Retz , les Rieux, les Rosmadec, les Cl isson, les Léon, les

Rohan, les Kergorlay, les Coëtmen, l es Rostrenen, les Pont -L'Abbé, les

Haut-Bois , l es Chas tel , les Carmam, les Nuz, les Laval , l es Tinténiac sont

144

P o ur l e co mte d e La M arche , Gui l l a u me L 'Oe l i e r . . 145

P è r e ANSELME, o p . c i t . , t . I I , p . 79 -8 0 . 146

Ib id , t . I I , p . 12 2 4 -1 2 25 . 147

B ROUSSI LLON, o p . c i t . , p . 7 . 148

A. -Y. , B OURGE S, " L 'e xp ans io n t e r r i to r i a l e d es v i co mtes d e Léo n …" , o p . c i t . , p .

3 7 1 -3 7 2 . 149

Les Di na n e t l e s T o urn e mi ne . 150

J ean d e Ma ure , l e s hé r i t i e r s Anas t , Geo f f ro i d e G uérand e , S y lve s t r e d e La

B o ute i l l e r i e , Geo f f ro i d e B ub ry, l e vo ye r d u F ao u .

24

aux XIVe e t XV

e s iècles et au delà les plus r iches de Bretagne, cumulant

nombre de ter res ci tés dans le Livre des Ostz . Les Maure et les La

Boutei l ler ie ont des dest ins bri l lants l iés à l eurs l iens ét ro i ts avec le duc.

D'autres disparaisent rapidement , les Sebran, les Guerrande, les Fouesnant ,

les Anast , les Kaer, les Charruel , les Coët inisan, Les Boubry, les La

Roche-Helgomarc 'h , les Plessis -Nizon, les Hénant , les Keraudierne, l es

Trébrivan, les Mené, les Coëtbuhal , les Kernau, les Malor. Leurs l ignages

tombent en quenoui l le et fusionnent avec de plus i l lust res maisons. Le duc

avai t peut -êt re confié pour un certain temps une châtel lenie, ce qui

permet t rai t d 'expl iquer la dispari t ion des Bo ubry, Fouesnant . Des indices

dans le Livre des Ostz révèlaient déjà de graves diff icul tés : le partage de

la contr ibut ion, pourtant faible entre différents membres de la même

famil le , les Anast , les Châteaugiron ; l 'appel aux parsonniers , pour le

seigneur de Rezé ou autres seigneurs de la paroisse, comme Pierre Malor

dans la bai l l ie de P loërmel et Broërech . Rares sont les pet i ts contr ibuants

qui sont cheval iers , le coût de l 'adoubement étant certainement t rop

prohibi t i f .

Le but du duc est de montrer sa pu issance. Il poursuit sa politique de

contrôle de la féodalité et de mise en place des institutions ducales s'appuyant

sur des cadres administratifs plus anciens (les pagi et les doyennés

ecclésiastiques). Les résultats paraissent positifs. Les demandes d'e nquêtes sont

peu fréquentes. Malgré quelques concessions, ses décisions sont reconnus.

L'allégement du service d'ost par le rachat est peu important en Bretagne,

seulement cinq cas151

. Le duc peut compter sur une armée de type féodale non

négligeable, peu dispendieuse, pour lui à équiper, mais très coûteuse à entretenir

lui et surtout pour ses vassaux directs qui se tournent vers leurs propres vassaux,

révélant ainsi toute la complexité de la structure féodo -vassalique bretonne. Si

l 'on rajoute à ces forces les hommes du duc gagés par ses soins, les mercenaires

et les milices communales (appelées en cas d'invasions), l 'armée bretonne à la

veille d'un possible conflit avec ses voisins anglais et français est une force à ne

pas sous-estimer. Pourtant, le duc se heurtera très rapidement aux difficultés

financières et politiques. Ces plus importants contribuants sont les plus grands

seigneurs de l'Ouest du royaume de France, soumis juridiquement à son autorité

mais très autonome, proches de la cour de Paris152

. En cas de guerre avec le roi

de France, ils ont plus à perdre à désobéir au duc plutôt qu'au roi. Le duc risque

de perdre la moitié de l'apport féodal, d'être obligé de les soumettre un à un, et

pour cela de ne compter que sur ses vassaux les plus chétifs, no mbreux mais

fidèles153

. Face au danger, le duc, comme le montre le Livre des Ostz s'appuie sur

eux et appuie leur ascension.

En fin de compte, la Bretagne reste en paix. Edouard Ier

d'Angleterre avait prévu

d'envoyer sa flotte le 1er

septembre 1294. Elle ne part de Portmouth que le 30 du

même mois154

. Seuls les feudataires du comté anglais de Richmond

accompagnent le fils cadet du duc, Jean de Bretagne dans cette expédition. Jean

151

P . CONT AMINE, La gu erre… , o p . c i t . , p . 1 77 . 152

le comte de La Marche, le vicomte de Rohan, le seigneur de Laval et de Vitré, l 'évêque de

Dol, Henri d 'Avaugour, Hervé de Léon. 153

les Tournemine, les Maure et Anast, les Bouteillerie, les Chastel. 154

I . LUB IMENKO, o p . c i t . , , p . 5 .

25

II ferme les portes de son duché155

et subit la colère anglaise. La vallée de

l'Elorn est ravagé en 1295. Son très riche comté de Richmond est confisqué.

Philippe le Bel remercie le duc en lui conférant le titre de duc et pair. Par la

suite, Le duc, pour sa part, se montre un scrupuleux et fidèle vassal du roi. Son

contingent militaire est le plus important du royaume lors des guerres de

Flandres. Certains grands noms de la féodalité bretonne, cités dans le registre de

1294 ou leurs f i ls , se ret rouvent à la batai l le de Mons -en-Puel le le 13 août

1304156

. L'ost ducal res te pour le duc, même s ' i l a ses propres cheval iers la

pièce maî t resse de sa pol i t ique mil i tai re et ex térieure.

Transcript ion du Livre des Ostz

Ce sont les oz deüz au duc de Bretaigne

Comme monseigneur Jehan, duc de Bretaigne, comte d e Richmont , eust

semons ses ouz à Ploermel au jour de jeudi empres la mi aoust qui fut en

l 'an de graice mil CC IIIIx x

e t quatorze, ce sont les recognoissances que

ses barons et ses autres genz l i f i rent combien i ls l i devoin t d 'ost , laquel le

recognoissence, i l pr is t o protestat ion de plus en avoir que i ls ne

recognoissoint s i i l pove t monstrer que plus deüssent , e de avoir tel le

amante comme roison devroi t de ceulx vers quelx i l le pourra monstrer .

Monsour Guy de Laval , seigneur de Vi tré, recognust que i l l i devoi t

cinq cheval iers d 'ost , ce es t asavoir , par raison d 'Aubigné, un cheval ier ,

dont la dame dou Boys-Geuf frey l i doi t la moyt ié, di t - i l . I t em, de la terre

de Mart igné dous cheval iers , lesquelx le seigneur de Mart igné l i doi t , ce

di t - i l . De la terre de Coesmes, un cheval ier et un escuier , que le seigneur

de Rogé l i doi t , ce di t - i l . Dou f ié de Vi lepor et de Noyal , un cheval ier de

Robin de Coesmes e t ses compaignons l i doivent , ce di t - i l . De Ret iers , un

cheval ier que le se igneur de Ret iers l i doi t , en tel le manière, que s i le

seigneur de Vi tré le semont le premier à venir en l 'os t , à luy vendra. Et s i

le seigneur de La Guerche le semont le premier à lui vendra, et celuy le

presentera à monseigneur, et sera compté o u nombre des cheval iers au

seigneur de Vi tré, ce di t - i l . Et monseigneur, le duc, di t que de c es devises

i l ne se mesloi t pas. Et bien s e pris t le seigneur de Vi tré la où i l se deüst

prendre sur ses hommes à avoir son deü d 'eulx, et convient qu' i l alast entre

155

LA B ORDE RIE ¸ Hi s to i re d e la Bre ta g n e , o p . c i t . , t . I I I , p . 36 3 . 156

Ib id e t DOM MORICE, His to i re… , o p . c i t . , p . 2 2 4 :

26

luy et ses hommes qu' i l rendeis t à m onseigneur le nombre des cheval iers

que i l le recognoisset , bons et suf f issenz, et plus se i l povet monstrer que

plus l i en deüst .

Le seigneur de Chateaubrient recognus t qu' i l devoi t sept cheval iers

d 'ost . C'est assavoir pour la roison de sa terre de Chat eaubrient , quatre

cheval iers et pour la roison de sa terre dou Desert , dous cheval iers , et

pour la roison de sa terre de Joué, un cheval ier par la menée au seigneur

d 'Ancenis , ce di t - i l .

Bernart de La Roche, seigneur de Loheac, recognust qu' i l devoi t

t roys cheval iers par raison de la terre de Loheac.

La gent du comte de La Marche, et ses seneschaux, c 'es t assavoir

Gui l laume L 'Oel ier et Symoneaux, recogneürent que le d i t comte devoi t

quinze cheval iers d 'ost . C'est assavoir pour la rai son de la terre de

Fougeres , cinq cheval iers , et pour la raison de la terre de Pourhoet , dix

cheval iers .

Monsour Gualeran de Chateaugiron recogneüst qu' i l devoi t un

cheval ier d 'ost , par la raison de sa terre de Chateaugiron.

Monsour Guil laume de Chateaugiron recognust q u' i l devoi t un

cheval ier d 'ost de sa terre de Chateaugiron.

Monsour Alain de Fontenay doi t un cheval ier de sa terre de

Fontenay.

Raoul de Malece et ses parsonniers , pour la terre de Malece, un

cheval ier .

L 'evesque et l e chapi tre de Rennes, par Olivie r de Denois de La

Roche, leur procureur, recogneürent que touz leurs hommes de la vi le de

Rennes doivent al ler en l 'os t monseigneur par Bretaigne, et les doi t l ivrer

le seneschal l ' evesque et celuy de chapis tre à une leue de la vi le de

Rennes. Et d ' i lecques i ls doivent al ler , la ou monseigneur voudra les

mener, exceptez s i comme le di t procureur af fermoit . Le chambrel lant

l ' evesque, son mousnier , son fournier et son preer .

Monsour Jehan de Beaumont , s eigneur de La Guerche, recognü t

devant le senaschal de Rennes que i l devoi t à son seigneur II cheval iers

d 'ost par la raison dou f ié de La Guerche, parsomet les autres chouses que

i l doi t rendre par monsour Guy de Laval .

27

L 'evesque de Doul recogneü t devant monseigneur que i l l i doi t X

cheval iers d 'ost . Mes i l disoi t qu ' i l les devoi t rendre en la vi le de Rennes.

E monseigneur disoi t que i l les devoi t rendre en quelque l ieu en Bretaigne

que ce fust , à sa volenté, mes que i l vousis t semondre ses oz . Toutes vois

pour ce qu' i l n 'es toi t pas besoign de les mener ai l lours quant à ores , fut

acordé que i l les rendeis t à Raennes quant à ces te foiz , sauf le droit

monseigneur de ce que i l disoi t que i l les devoi t avoir ai l lours .

Somme des cheval iers deüz d 'ost de la bai l l ie de Rennes, environ

XLVI.

La bai l l ie de Nantes.

Le seigneur de Rochefort recognut que i l doit VII I cheval iers d 'ost .

C'est asavoir par raison de la vico mté de Donges, V cheval iers , de quelx i l

di t que monseigneur le doi t delivrer de I cheval ier , par la raison de la

terre de Lavau que i l t ient , laquel le terre le doi t , ce di t - i l . Et par la raison

de la terre de Rochefort III cheval iers , desquelx I cheval ier doi t venir par

le seigneur de Reux, s i comme yceluy seigneur de Rochefort le di t .

Le seigneur de Rougé recognut que i l doi t en deniers d e sa terre

d 'Oul tre Laire X sous de chacune masure de terre. Et doi t bai l ler au

seneschal de Nantes le nombre des masures .

Le seigneur d 'Ancenis recognut que i l doi t pour tous ses f iez , III

cheval iers d 'ost , et s 'en doi t enquerre s i plus en doi t .

Le seigneur de Rays di t qu ' i l doi t , par raison de sa terre de Rays, V

cheval iers d 'ost , et s 'en doi t enquer re de sa terre de Machecou, s i r iens en

doi t , et combien.

Le segneur de Cl iczon recognut que i l doi t II cheval iers d 'ost par

raeson de la terre de Heric, mes i l dit que i l les doi t par la menée au

seigneur de Reux. I tem ledi t seigneur de Cl iczon et Eon ou Pont

recogneürent que i l s devoint II cheval iers d 'ost par raison de la terre de

Pontchatel .

Monsour Brient Le Bef recognut que i l doi t , par la raison de sa terre

de Geaux, III I l ibvres en deniers d 'ost .

28

Le seigneur de Reux recognut que i l doi t , pour sa terre de Reux, V

cheval iers d 'ost .

Le seigneur de La Roche-Bernard recongut que i l doi t III cheval iers

d 'ost , desquelx Monsour Thebaud de Rochefort doi t I cheval ier et demy par

raison de la terre d 'Acerac. Et le seigneur de La Roche parfet l 'autre demy.

Et di t que monseigneur doi t I cheval ier pour la terre de Vi tré qui es toi t à

Nantes qui fut donnée à fondre les Jacobins de Nantes , laquel le terre

monseigneur retrais t , mes monseigneur ne le cognois t pas et s 'en doi t

enquerre.

Monsour Geuf froy de Guerrande recognut que i l doi t I cheval ier d 'ost

pour tout son f ié , et se présenta pour soy, mes i l di t que se i l n 'es toi t

cheval ier , i l fera le service en tel p oint comme i l seroi t .

Monsour Phi l ippe de Montrelays recognut que i l doi t I cheval ier

d 'ost pour ses f iez que i l t ient de monseigneur.

Monsour Guil laume Sebran recognut que i l doi t I cheval ier d 'ost

pour ses f iez , mes i l di t que i l doi t le service en quel es tat que i l soi t .

Geuf froy Sebran se presenta son corps, quar i l di t qu' i l doi t le

servise par raison d 'ost , en quel es tat que i l soi t .

Monsour Geuf froy de La Tour et Gui l laume Botereau, et Mahé de La

Sel le , recogneürent que i ls devoint I cheval ier d 'ost , c 'es t asavoir chacun

le t ierz d 'un cheval ier , par raison de leurs f iez dou Lourous Botereau.

Herl in de Bougon recognust que i l doi t I cheval ier d 'ost pour ses f iez

de Bougon, pour lequel se presenta monsour Jehan de Bougon comme son

tutour.

James de La Muce recognut que i l doi t le quart d 'un cheval ier d 'ost ,

pour ce qui i l t ient en Rays de monseigneur.

Monsour Gef froy de Syon, le quart d 'un cheval ier d 'ost pour ce qu' i l

t ient en Saint Père en Rays.

Regnaud de Montrelays recognut que i l do i t I cheval ier d 'ost , pour ce

que i l t ient de monseigneur, e t di t que i l doit fere le servis e, en tel es tat

comme i l sera.

Le seigneur de Syon recognut que i l doi t X sous d ' ost de chascune

masure de terre de sa terre de Froceau.

29

Le seigneur de Rezay et ses parsonniers recogneürent que i ls deivent

I cheval ier d 'ost pour lours f iez de Rezay.

Somme des cheval iers deüs de la bai l l ie de Nantes , environ XXXVI et

demy.

La bai l l ie de Ploermel e t de Broerec

Le seigneur de Malestroi t recognut qu' i l doi t V cheval iers d 'ost , c 'es t

assavoir IIII pour la terre de Argouet , et I cheval ier pour la terre de

Malestroi t .

Le seigneur de Montf fort recognut que i l doi t I III che val iers d 'ost ,

c 'es t assavoir II cheval iers pour la terre de Gael , et II autres pour la terre

de Montfort .

Monsour Guil laume de La Mot e recognut qu' i l doit I cheval ier d 'ost .

Monsour Jehan de Maure recognut que i l doi t demy cheval ier , et les

heirs monsour Gef froy Denart doivent l 'autre moit ié , et les he irs monsour

Guil laume d 'Anast , demy cheval ier .

L 'evesque de Saint Malou, XXX archiers o arcs et saietes .

Monsour Normant de Kaer, pour luy et pour ses joveigneurs I

cheval ier .

Monsour Hervé de Leon, pour son f ié de Kuemenet Theboe, II

cheval iers .

Geuf froy de Boubry, demy cheval ier .

Le visconte de Rohan, IX cheval iers et demy. C'est assavoir V pour la

visconté de Rohan, et I cheval ier pour le f ié de Kuemenet Guingant , et

demy cheval ier pour le f ié de Gormené, et III cheval iers dou f ié de

Pourhouet , par la main au comte de La Marche.

Monsour Pierre Malor, et les autres seigneurs de la paroysse de

Sené, I cheval ier .

Monsour Olivier de Tyntyniac, pour la terre de La Roche Moysan, II

cheval iers .

Selvestre de La Botovi l l ie , demy cheval ier .

30

Somme des cheval iers deüst d ' ost des bai l l ies de Ploermel et de

Broerec, environ XXVII et demy.

Penthievre

Monsour Rol land de Dynam, II cheval iers pour le f ié de Courreun.

Monsour Pierres Tournemine, II cheval iers pour son f ié de

Penthievre.

Geuf froy de Saint Dougual , demy cheval i er .

Geuf froy Le Rous, I cheval ier et demy, lequel demy doi t Rol land

d 'Argentoye.

Monsour Rol land de La Mote, I cheval ier .

L 'evesque de Saint Briouc, XII l ibvres , X sous en deniers .

La terre au visconte de Pomeri t à Ploengonual doi t demy cheval ier .

Somme des cheval iers deüz d 'ost de la bai l l ie de Penthievre, environ

VIII cheval iers .

Triguier

Monseur Henri d 'Avalgor, X cheval iers d 'ost poru les f iez de Goylou

et de Quint in.

Le visconte de Tonquedeuc, V cheval iers pour luy et pour monsour

Rol land de Dynam, dou f ié le di t Rol land t ient de luy.

Monsour Pierres Tournemine, II cheval iers de son f ié de Bol loy et de

Triguier .

La dame de Guergoul lé di t qu 'el le ne doi t nuls cheval iers d 'ost de sa

terre de Triguier fors à al ler à la semonse comme les a utres gent i lz

hommes.

Even dou Pontou, I demy cheval ier .

Alain de Tonogouf di t qu ' i l souloit devoir demy cheval ier , mes i l di t

que monseigneur t i ent part i dou f ié , et pourtant , comme i l doi t pour le

remeignent , i l se presenta.

Le seigneur dou Per ier , I cheval ier d 'ost .

Richart de La Roche Jagu, I demy cheval ier dou f ié de Ploisal .

31

Monsour Rol land de Dynam, I cheval ier de la terre de Poastel .

Monsour Henri Charruel , I cheval ier pour le f ié Even Gue n, douquel

cheval ier Henri Le Lonc di t qu ' i l doi t la quarte part ie .

Alain de Coytdy inisen di t que i l doi t garder la porte de La Roche

Derien à ses couz, I jour e t une nuyt , c 'es t assavoir la p orte Engaset , et se

i l y es t plus , i l doi t demourer aux couz le comte, ce di t - i l .

La Vi l le Robert , doit I escuier d 'ost .

La Vi l le Loys, I escuier d 'ost .

Les Vi l les Courent et Moredre, I escuier d 'ost .

Cels qui s 'ensuient et leurs appartenances doivent I demy cheval ier

d 'ost à Ploisaul : la tenue du Les Luet , la tenue de Launoi Morvan, la

tenue de Karadeuc e t la tenue An Falcon.

Le priouz de Lannyon a gree à bai l l ier I homme armé de chascunes

LX l ivres de terre que i l a .

Somme des cheval iers deüz d 'ost de la bai l l ie de Treguier , environ

XXII cheval iers et demy et I II escuiers .

Cornoai l le

Le seigneur de Guergoul lé, II cheval iers d 'ost de sa terre de Poher et

de Cornoai l le .

Le seigneur dou Gug, I cheval ier et II escuiers .

Henri de Foynant , I I cheval iers .

Monsour Alain de Lis t iale, demy cheval ier .

Monsour Hervy de Nivet , I cheval ier e t I I escuiers .

Monsour Yvon de Rosmadec, I cheval ier .

Gourmailon, le f i l z Sanquin, I cheval ier .

Le seigneur de Ros trenein, II cheval iers dou f ié de Rostrenein. Et

dis t se i l tenis t la terre de Vi l iac, i l deüst I cheval ier , mes le com te la t ient

par quoy i l ni es t pas tenuz, ce di t - i l , jusques i l la t iengne.

Hervé de Kaer Hodierne, I escuier .

Monsour Jean de La Roche di t que i l doi t servir monseigneur en l 'os t

par XV jours .

32

Le seigneur du Pont , III cheval iers . C'est assavoir de la terre dou

Pont , II cheval iers , et de la terre de Gal lot , I cheval ier .

La terre au f i lz Yzerguent , I homme armé à cheval .

Robert de Henant , I I escuyers .

Gui l laume dou Plesseiz di t que i l doi t en l 'os t , soy aul tre.

Monsour Pierres dou Haust Boays doi t al ler en l 'os t , soy aul tre.

Henry de Lesomgar, I escuyer.

Le veier dou Fou, I II hommes armez, e t cogneüt qu' i l les doi t tenir

XV jours à ses despens.

Jehan de Mené di t qu ' i l doi t al ler en l 'os t , et servir le duc à ses

despens tant comme l 'os tage de sa terre durra . C 'est assavoir de chescun

hostel de ses hommes demoi nes XII deniers .

Henri de Tresbrivien di t qu ' i l devo i t I cheval ier d 'ost quand i l f i s t

l ' eschange o le comte. Mes i l devoi t avoir l 'os tage de ses jouveigneurs , ce

di t - i l .

Henri de Coyt Buhal di t qu e le visconte de Gourvrin devoi t I

cheval ier d 'ost , et di t ycel i Henri que i l respondra dudi t cheval ier à

l 'avenant quoi i l t ient de la terre.

Somme des cheval iers deüz d 'ost de la bai l l ie de Cornoai l le , environ

XV cheval iers et demy, et XII II escuyers et autres menuz servis es .

Leon

Monsour Hervé de Léon, V cheval iers d 'ost pour sa terre de Leon.

Alain de Kaermoven, II cheval iers .

Le visconte dou Fou, I cheval ier de sa terre de Leon.

Monsour Alain Nuz, I cheval ier de sa terre de Postel .

Bertran de Karreins , I cheval ier dou f ié de Kaerguerne.

Monsour Hervé du Chastel di t qu' i l ne doi t r ien s d 'ost fors al ler o le

comte la où i l le voudra mener, comme o son seigneur.

Somme des cheval iers deüz d 'ost de la bai l l ie de Léon, environ X

cheval iers .

33

Toute somme des cheval iers deüz d 'ost à monseigneur, de toute

Bretaigne, environ VIIIx x

e t VI cheval iers et XVII escuiers , selon la

recognoissance devant di te , en oul tre e t parsomet autres devoirs de rente

d 'ost sur masures et autrement que doive nt le s ire de Rogé, Brient Le

Beuf f , le s ire de Sion, l ' evesque de Saint Brieuc, B. et J . du Mené, et t rante

archiers o ars et sai tes que l 'evesque de saint Malou doi t , selon que plus à

pl in es t esclardi es chapi tre cy a devent .