Les programmes d’enseignement du français et la qualité de la langue

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1 Les programmes d’enseignement du français et la qualité de la langue Lebrun, M.(2005), Les programmes d’enseignement du français et la qualité de la langue, Dans Stefanescu, A. et P. Georgeault (dir.) Le français au Québec : les nouveaux défis (pp 515-552), Montréal : Conseil supérieur de la langue française/Fides Monique Lebrun, UQAM Introduction Les programmes ministériels sont le reflet de l’évolution des préoccupations d’une société, tant par leurs contenus que par les approches pédagogiques qu’ils sous-tendent. Lorsque paraît le Rapport Parent, en 1964, c’est le programme du Département de l’Instruction publique de 1959 qui est à l’honneur. Ce dernier énumère un véritable catalogue de notions grammaticales à enseigner. Le but principal de ce programme est d’amener l’élève à parler et à écrire correctement. La norme du français correct reste le français de France. Le maître, ainsi qu’on l’appelle, est le dispensateur du savoir. L’accent mis sur la grammaire et l’orthographe est très important. Il faudra attendre 1995 avant que pareil souci ne resurgisse. Les exercices grammaticaux et la dictée doivent garantir l’acquisition d’une langue correcte. Il n’est pas question ici d’observation des faits de langue, mais bien d’exercisation. Cependant, on ne vise pas la bête mémorisation des règles, mais bien leur application pratique. On distingue grammaire normative et grammaire raisonnée, cette dernière comprenant l’analyse des mots et des propositions. Des apprentissages particuliers touchent la phraséologie et la stylistique (termes qui seront remplacés par la grammaire de texte dans les programmes de 1994 et 1995). Il n’est pas sans importance d’évoquer le contexte socio-politique entourant le rapport Parent et la naissance des programmes cadres (celui du primaire et celui du secondaire. Les Insolences du Frère Untel (1959) sont venues déployer sur la place publique les doléances d’un enseignant de français concernant la piètre qualité de la langue parlée des jeunes Québécois et de la société en général, de même que les lacunes du système d’éducation. Le ministère de l’éducation du Québec est créé en 1964, dans la foulée du Rapport Parent. Il aura dorénavant la responsabilité de la rédaction et de l’implantation des programmes d’études. La commission Gendron (1968) rend peu après public son Rapport sur la langue québécoise et la loi 63 sur le libre choix de la langue d’enseignement est votée (1969). Nous expliquerons en première partie ce qu’a été l’évolution des programmes de français du primaire et du secondaire de 1969 à nos jours en faisant ressortir leur position sur la qualité de la langue. Une seconde partie fera de même pour les programmes du collégial Première partie : les programmes du primaire et du secondaire 1-Les programmes cadre de 1969 Ces programmes cadre, l’un pour le primaire et l’autre pour le secondaire, sont les premiers programmes spécifiques à l’enseignement du français que connaisse le Québec. Ils considèrent la langue comme un instrument au service de la communication et de la pensée, un outil de transmission de la culture, surtout de la culture québécoise : plus l’élève maîtrise la

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Les programmes d’enseignement du français et la qualité de la langue Lebrun, M.(2005), Les programmes d’enseignement du français et la qualité de la

langue, Dans Stefanescu, A. et P. Georgeault (dir.) Le français au Québec : les nouveaux défis (pp 515-552), Montréal : Conseil supérieur de la langue française/Fides

Monique Lebrun, UQAM Introduction Les programmes ministériels sont le reflet de l’évolution des préoccupations d’une société, tant par leurs contenus que par les approches pédagogiques qu’ils sous-tendent. Lorsque paraît le Rapport Parent, en 1964, c’est le programme du Département de l’Instruction publique de 1959 qui est à l’honneur. Ce dernier énumère un véritable catalogue de notions grammaticales à enseigner. Le but principal de ce programme est d’amener l’élève à parler et à écrire correctement. La norme du français correct reste le français de France. Le maître, ainsi qu’on l’appelle, est le dispensateur du savoir. L’accent mis sur la grammaire et l’orthographe est très important. Il faudra attendre 1995 avant que pareil souci ne resurgisse. Les exercices grammaticaux et la dictée doivent garantir l’acquisition d’une langue correcte. Il n’est pas question ici d’observation des faits de langue, mais bien d’exercisation. Cependant, on ne vise pas la bête mémorisation des règles, mais bien leur application pratique. On distingue grammaire normative et grammaire raisonnée, cette dernière comprenant l’analyse des mots et des propositions. Des apprentissages particuliers touchent la phraséologie et la stylistique (termes qui seront remplacés par la grammaire de texte dans les programmes de 1994 et 1995). Il n’est pas sans importance d’évoquer le contexte socio-politique entourant le rapport Parent et la naissance des programmes cadres (celui du primaire et celui du secondaire. Les Insolences du Frère Untel (1959) sont venues déployer sur la place publique les doléances d’un enseignant de français concernant la piètre qualité de la langue parlée des jeunes Québécois et de la société en général, de même que les lacunes du système d’éducation. Le ministère de l’éducation du Québec est créé en 1964, dans la foulée du Rapport Parent. Il aura dorénavant la responsabilité de la rédaction et de l’implantation des programmes d’études. La commission Gendron (1968) rend peu après public son Rapport sur la langue québécoise et la loi 63 sur le libre choix de la langue d’enseignement est votée (1969). Nous expliquerons en première partie ce qu’a été l’évolution des programmes de français du primaire et du secondaire de 1969 à nos jours en faisant ressortir leur position sur la qualité de la langue. Une seconde partie fera de même pour les programmes du collégial Première partie : les programmes du primaire et du secondaire 1-Les programmes cadre de 1969 Ces programmes cadre, l’un pour le primaire et l’autre pour le secondaire, sont les premiers programmes spécifiques à l’enseignement du français que connaisse le Québec. Ils considèrent la langue comme un instrument au service de la communication et de la pensée, un outil de transmission de la culture, surtout de la culture québécoise : plus l’élève maîtrise la

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langue, plus il s’intègre à une culture. La révolution tranquille est passée par là : dorénavant, tous les programmes de français insisteront sur la situation particulière du Québec, sur son affirmation culturelle et sur ses liens avec la francophonie. Les auteurs de ces programmes considèrent que la langue parlée et écrite de l’élève est imparfaite et qu’il faut la corriger, d’où la visée fonctionnelle de l’enseignement du français, tant à l’oral qu’à l’écrit, mais avec une insistance toute nouvelle sur l’oral. On veut que l’élève accède au registre de langue soutenu. Certains détracteurs de ce programme ont cru que l’on valorisait la langue de l’élève, alors que c’est le contraire qui était voulu par les concepteurs. Les programmes cadre disent aussi que l’apprentissage de la langue doit se faire de façon globale, et non en dissociant ses éléments constitutifs tels que la grammaire, l’analyse, l’écriture. Ils accordent une grande importance à la mise en situation des apprentissages. Les programmes recommandent, en grammaire, d’entraîner au maniement de la phrase française dans ses structures les plus fréquentes (c’est la phraséologie), d’étudier les groupes fonctionnels et leur place dans la phrase. Comme ces programmes ne détaillaient aucunement les contenus, il a fallu que les diverses commissions scolaires entreprennent une opération de rédaction de fascicules distribués ensuite aux enseignants. Ces programmes laissaient l’initiative aux enseignants, mais comme ceux-ci en avaient peu l’habitude, ils ont réclamé du MEQ des balises plus strictes. De plus, les Cassandre veillaient, telle Lysiane Gagnon (1975), auteure d’une série d’articles très alarmistes sur l’enseignement de la langue orale et écrite dans nos écoles. L’auteure évoque l’ignorance de l’orthographe, de la syntaxe et des règles élémentaires de la grammaire et l’engouement pour le joual. Elle en impute principalement la faute aux programmes cadre; elle y attaque également le MEQ, les « pédagogues de pointe » et déplore l’absence de matériel. Selon elle, les programmes mettent trop l’accent sur l’expression personnelle et il n’y a pas de continuité d’un degré à l’autre. En fait, en 1975, seuls les enfants du primaire avaient vécu toute leur scolarité sous le programme cadre dit Valiquette (1984).La critique de Gagnon était non fondée dans les faits, mais elle a malheureusement contribué à répandre depuis lors l’idée que les enseignants de français ne savaient pas transmettre leur savoir, que les concepteurs de programme étaient détachés des vraies priorités et que le MEQ leur laissait la bride sur le cou. La littérature Il ne faut pas croire que l'enseignement secondaire public répugnait, avant 1964, à l'insertion de la littérature dans les curriculum. Les programmes étaient de la génération des "catalogues" (Grégoire, 1987) et particulièrement exsangues: on y énumérait sèchement les composantes de la matière à l'étude. Pour en connaître davantage sur les contenus réellement enseignés, il faut se référer aux manuels en usage à l'époque, de même qu'à la presse pédagogique. On peut noter cependant la prégnance de deux « méthodes », la lecture expliquée et le recours à l'histoire littéraire. Certains pédagogues (Beaupré, 1966) se plaignent alors des « ravages de la méthode historique » dans les études de lettres chez les jeunes du secondaire, y voyant un fatras inefficace. La Commission Parent (1964), nommée d'après son président, devait brosser un tableau général de l'enseignement au Québec. Sur un total de 1200 pages, environ soixante étaient dévolues à la langue, dont moins de cinq pages à la seule littérature... mais ce sont des pages fondatrices. En effet, le Rapport insistait sur la nécessité de lier l'art littéraire aux autres arts et de permettre à l'élève de cultiver sa sensibilité et d'enrichir sa vie par des visions du monde différentes de la sienne. Parlant de la valeur éducative de la littérature, on énumérait ses rôles

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fondamentaux. Certains sont instrumentaux (connaissance de la langue sous diverses formes), d'autres , plus esthétiques (perception de divers styles, de genres différents, des mythes dont s'est nourri l'humanité) ou alors, ouvertement éthiques (enrichissement moral). On recommandait de faire apprendre par coeur de belles pages de prose et de vers. Au chapitre de l'analyse littéraire, on insistait sur son aspect formateur, soulignant qu'il n'en était pas de même avec d'autres types de textes, dont l'article de journal. Quant au corpus, on conseillait de choisir des oeuvres dont les héros sont des enfants, pour aborder, vers 14 ans, les poètes romantiques et parnassiens, le roman réaliste et les récits historiques. Le théâtre devait faire son apparition chez les 15 ans et être approfondi l'année suivante par l'étude des grands tragiques grecs. Enfin, au terme du secondaire , on pouvait aborder le roman contemporain et l'essai. La mutation des programmes, en 1969, coïncide avec la percée de la pédagogie non-directive, de la narratologie et de la contestation de la vision élitiste de la langue. Le « programme-cadre » du primaire et celui du secondaire se réduisent à une douzaine de feuillets. En guise de précaution oratoire, les auteurs anonymes du programme du secondaire précisent en introduction que leur texte est « ouvert » afin de répondre aux exigences d'une société « en perpétuel devenir » (p. 4). On a souvent appelé ces programmes cadre « les quatre savoirs »: savoir parler, écouter, lire et écrire. Des trois principes directeurs énoncés au secondaire, seul le troisième touche la littérature: « La langue, sous sa forme orale et sous sa forme écrite. est un agent privilégié dans la transmission et la transformation des valeurs de civilisation ». (p. 6). On y lie indissolublement langue et littérature, cette dernière étant définie comme une parole à part, qui recherche l'inédit, respecte certaines règles stylistiques, et contribue à la fois à l'élévation personnelle et, par la création, à l'enrichissement du patrimoine mondial. On suggère de développer chez l'élève « sens de l'observation, sens esthétique, esprit critique » (ibid.). Contrairement aux programmes antérieurs, celui de 1969 donne des directives pédagogiques. Celles-ci étant générales, il revient à l'enseignant de les appliquer dans les classes de littérature. Il doit faire une mise en situation des textes. On lui conseille de s'adapter à l'âge et aux intérêts de ses élèves et de miser sur la communication, ainsi, de faire interpréter des poèmes en classe. Le programme suggère des formes littéraires particulières à aborder avec les élèves: les formes courtes se retrouveront à tous les niveaux, et les plus longues, à la fin du secondaire. Un tableau énumère treize formes différentes, assorties de pratiques pédagogiques telles que la lecture, l'audition, l'interprétation, la dramatisation. On y retrouve, à coté des genres les plus connus, le proverbe, la lettre, le journal intime, le téléroman et le film. On n'en saura pas plus, le programme restant muet sur les époques à toucher, sur la proportion d'oeuvres québécoises à insérer et même, sur l'histoire littéraire. Pour y voir plus clair, impossible de se référer à des manuels du crû, ceux-ci ayant été emportés par la vague des réformes. C'est la pédagogie de la feuille volante, du polycopié, de l'enseignant improvisateur... et insécurisé. Heureusement, certaines revues pédagogiques sont là, qui se font pourvoyeuses de bonnes idées, dont le providentiel Québec français et ses Cahiers pratiques, prêt-à-porter pédagogique qui a influencé toute une génération et pavé la voie au renouveau. Ainsi, des enseignants proposeront des démarches pédagogiques susceptibles de faire réfléchir leurs collègues sur des applications de la rhétorique et de la narratologie en classe. Certains d'entre eux deviendront même auteurs de manuels et inspirateurs d'un nouveau programme, dont Cécile Dubé et James Rousselle , qui proposent, en 1979, une démarche intertextuelle concrète. Le programme cadre est néanmoins critiqué avec virulence, entre autre par Viateur Beaupré (1974), polémiste et enseignant, qui s'en prend à la conception qu'a le ministère de l'éducation de l'enseignement de la langue et de la littérature.

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Voyant les difficultés des enseignants à appliquer le programme de littérature, la Direction générale de l'enseignement secondaire du ministère de l'éducation met alors un comité conjoint avec l'Association québécoise des professeurs de français (AQPF). Le rapport sera publié en deux tranches dans Québec français (voir AQPF et DGEES, 1976 et 1977). D'entrée de jeu, le rapport souligne l'importance que les programmes ministériels accordent à la communication et à l'expression. Par ailleurs, la tradition québécoise privilégie l'approche externe des textes au détriment de l'approche interne, seule capable de lier le vécu culturel de l'élève à la pratique littéraire et de lui permettre d'accéder ainsi à une culture vivante. Il convient donc, disent les auteurs, d'aborder l'organisation discursive des oeuvres. Pour ce faire, on part du bagage culturel de l'élève et on essaie de l'enrichir. Ainsi, on se montre vigilant devant le choix des oeuvres; on privilégie les oeuvres complètes, et non les anthologies. L'histoire littéraire ne vient qu'en appoint, entre autres, comme amorce, pour susciter la motivation, par exemple. Il faut conjoindre lecture et écriture: amené à comprendre le fonctionnement d'un texte, l'élève voudra « reprendre à son compte ce travail sur le signifiant » (AQPF/DDEES , 1977, 22). Il ne convient pas de confiner les genres et les thèmes à des niveaux d'études déterminés, mais de les ouvrir largement. L'enseignant peut ménager des pauses de lecture autonome à ses élèves et en profiter lui-même pour parfaire sa culture littéraire. 2-Les programmes de 1979 et 1980 Dans L’école québécoise, appelé aussi Livre orange (MEQ, 1979), l’État québécois affirme qu’il a le devoir de garantir la qualité de l’éducation, que celle-ci doit contribuer à sa culture générale , de même qu’à la cohérence et à l’intégration des divers apprentissages. Pour ce faire, on mentionne la nécessité du recours aux acquis antérieurs des élèves et de la diversification des approches, avec une insistance particulière sur les approches rendant l’élève actif et autonome dans un contexte signifiant. Dans la foulée du Livre orange de 1979 apparaît un nouveau programme de français pour le primaire, basé sur les quatre savoirs (savoir-écouter, savoir-parler, savoir-lire et savoir-écrire). On y prône, comme dans le programme du secondaire, paru l’année suivante, l’apprentissage occasionnel des connaissances grammaticales , voulant entendre par là le fait d’intégrer la grammaire à des pratiques signifiantes d’écriture. Le passage a été mal compris et les enseignants ont cru qu’ils ne devaient faire de la grammaire que de temps à autre. Pour ces deux programmes, il faut viser l’apprentissage d’un français correct permettant d’accéder à la plus large audience possible, au Québec d’abord, puis dans l’ensemble de la francophonie. Les deux programmes parlent de pratiques du langage, d’objectivation de la pratique et d’acquisition de connaissances. Le terme « objectivation », qui signifie un retour de type métacognitif sur les pratiques, a été mal compris. Les pratiques doivent être faites en contexte signifiant. Sous l’impulsion de la psychologie cognitive, l’enseignant devient un modélisateur, un régisseur des différentes situations de communication. En raison des prises de position de l’Association québécoise des professeurs de français (AQPF), dans ces programmes comme dans ceux des années quatre-vingt-dix, la langue devient un instrument transdisciplinaire au service des divers apprentissages scolaires. Le programme du primaire de 1979 poursuit dans cette orientation de l’AQPF. Il détaille les exigences relatives à l’orthographe et à la syntaxe. Toutefois, il intègre ces éléments à la compréhension et à la production de discours signifiants. La nouveauté : l’apparition du discursif et des différents types de textes, de même que de critères pragmatiques touchant

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l’intention de communication et la prise en compte des interlocuteurs. Le programme de 1980 du secondaire va dans le même sens. Dans les deux cas, les habiletés linguistiques sont subordonnées aux exigences de la communication (lecture et production de types de discours variés). Au primaire, le programme énumère les connaissances linguistiques nécessaires à la lecture et à l’écriture, soit le lexique, la syntaxe et la morphologie, cette dernière étant aussi désignée sous l’appellation orthographe grammaticale. Au secondaire, on suggère, à l’occasion de la production d’un discours oral ou écrit, d’amener les élèves à reconnaître dans quelle mesure ils tiennent compte du fonctionnement de la langue et du discours . Ainsi, on les incite, par exemple, à vérifier les accords. Les critères d’ordre linguistique, pragmatique et discursif se retrouvent également à l’oral (ex. : choisir une variété de langue adaptée à la situation de communication). C’est le premier programme qui accepte les variations; par ailleurs, il ne suggère aucune intervention. Le processus de l’objectivation mis de l’avant permet l’étude de variétés de langues autres que celles de l’élève, surtout en fonction de facteurs géographiques et culturels. On veut le rendre capable de s’adapter à plusieurs situations de communication. Toutefois, on ne définit pas l e « français correct d’ici ». En ce qui regarde l’évaluation, le Guide du secondaire de 1981 ne mentionne, pour la production écrite, que l’évaluation d’éléments discursifs et aucun élément linguistique ou pragmatique. Pour l’exposé oral, on inclut cependant des éléments linguistiques (ex. : précision des adjectifs), mais ne fait pas mention de la variation linguistique. Les compétences à l’oral ne sont pas évaluées au primaire. Les programmes de 1979-1980 acceptent la variation dans la langue orale de l’élève, mais veulent développer chez lui le souci d’un français correct. Cependant, le fait de ne pas définir le français correct d’ici, joint à la subordination des critères linguistiques aux autres critères nuit à l’évaluation. Depuis 1979, les programmes de français ont perdu leur étiquette de « langue maternelle », suppression qui en dit long sur l’ouverture de l’école francophone à la diversité pluriethnique. Du côté du matériel pédagogique, disons que si l’époque du programme cadre a été plus prolixe en manuels et cahiers d’exercices, il n’en est pas de même pour la période de la décennie quatre-vingt. Cependant, le programme cadre ayant insufflé un vent de liberté, certains spécialistes, donc Francoeur-Bellavance (1984) et Lessard (1984) ne se gênent pas pour critiquer l’usage de matériel commercialisé. Ces deux auteurs sont contre le manuel scolaire tel qu’il existe en 1984. Ils ne parlent directement ni du programme cadre ni du programme de 1979-1980. Tout au plus disent-ils que, comme l’on change de programme, il est temps de revoir notre conception du manuel. Ils s’intéressent spécifiquement au primaire. La littérature Les PPMF, ou programmes de perfectionnement des maîtres de français, tant du primaire que du secondaire, vont, à partir de 1976 et, massivement jusqu'en 1983, susciter la curiosité des enseignants pour les recherches de pointe. En littérature, cela se traduit par la vogue d'un Barthes, d'un Greimas et d'un Larivaille qui sont vulgarisés dans les manuels. Les enseignants apprennent à s'interroger sur les structures différenciées des textes. Il n'y a plus de Littérature avec le grand « L », soit un idéal souvent peu accessible aux élèves, mais bien des « types » ou « genres » de textes dont on peut démonter et remonter la mécanique aussi facilement que dans un problème de mathématique. Cet engouement structuraliste opère une fixation des enseignants sur le texte narratif qui dure encore.

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Conscient du désir des enseignants d'avoir un programme qui miserait explicitement sur les acquis de diverses théories linguistiques et littéraires, le ministère de l'éducation accouche, en 1981, au terme d'une opération rigoureusement menée (consultations d'enseignants, de conseillers pédagogiques, de spécialistes universitaires), d'un volumineux programme de français en six volumes: un pour chaque année du secondaire, assorti d'un guide pédagogique et de quelques instruments d'appoint, dont un ouvrages sur les valeurs socioculturelles. Qu'on se rassure, les programmes des diverses années étant largement redondants,les contenus ne sont donc pas pléthoriques. Les enseignants québécois se sentiront néanmoins « encadrés » comme jamais, surtout qu'une nouvelle génération de manuels surgit concurremment et que les examens sommatifs et formatifs de toutes sortes surgissent dans le décor. Comme le précédent, le programme de 1981 mise sur la communication. Fait nouveau, on s'y montre directif en accolant à chaque année d'études des "discours" particuliers où le littéraire côtoie le non-littéraire. Voici la division que l'on impose, pour un "littéraire" qui n'est jamais nommé que par ses « types de discours »: récits d'aventures et poèmes à caractère ludique en première secondaire; courts romans d'aventures ou de science-fiction et poèmes à caractère expressif en 2e secondaire; contes et poèmes en 3e secondaire; nouvelles littéraires,pièces de théâtre et poèmes en 4e secondaire; romans et poèmes en 5e secondaire. Cette répartition subsiste encore dans les programmes du secondaire.. Il faut souligner que les pratiques de « production » constituent le complément parfait de ce programme, l'élève étant amené, par exemple, à écrire des récits d'aventures en première secondaire, des contes, en troisième secondaire et des nouvelles, l'année suivante. Les auteurs-clés ne sont que suggérés, çà et là, dans le Guide et récupérés en fin de parcours. Le parti-pris est en fait plus pragmatique et sociologique que purement littéraire. Ainsi , le programme énonce clairement qu'il faut amener les élèves à se situer par rapport aux valeurs socioculturelles des discours lus ou écoutés, ainsi, par exemple, en prenant conscience des "discours qui appartiennent à l'héritage culturel québécois ou qui sont considérés comme significatifs dans l'expression des valeurs de la société québécoise. (Guide, p. 25).Le programme se montre ouvert à l'héritage culturel de la francophonie et cite même des oeuvres classiques américaines. On suggère à l'enseignant de dépasser la simple nomenclature des oeuvres, qui ne permet pas de construire une culture, mais bien d'impliquer les élèves dans leurs lectures. A ce propos, le programme ne fait pas de l'histoire littéraire une matière à l'étude. Tout au plus l'enseignant y recourra-t-il pour faciliter la compréhension générale ou ponctuelle . Qu'il soit littéraire ou non, tout discours est analysé à la sauce communicative. On récupère pour ce faire le schéma de Jakobson, qu'on plaque de façon simpliste sur le texte, en demandant, invariablement, qui en est l'émetteur, le récepteur, quels sont leurs rapports, leurs buts, etc. Aux types de textes tels que le poème, la nouvelle, la pièce de théâtre, etc,le programme assigne la mission de « satisfaire un besoin d'imaginaire, d'explorer le langage, et de se donner une vision du monde » (Guide, p. 33), deux objectifs répétés à satiété. Pour ce qui est des textes narratifs, on applique ensuite les schémas et formules de la narratologie, parlant d'épisodes, de héros et de anti-héros, de situation initiale, d'élément déclencheur, etc. Heureusement que l'on prévoit aussi des activités plus originales (ex.: discussion sur une thématique, interview fictive d'écrivain, etc.) Là où le programme innove, c'est dans ce qu'il appelle « l'objectivation de la pratique ». Dans les faits, il s'agit d'une application un peu simple de la métacognition. On veut rendre l'élève

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conscient de son apprentissage, de ses difficultés, en l'amenant à s'interroger, pas à pas, sur ce qu'il croit être ses acquis et sur la façon de remédier à ses éventuels blocages. Ainsi, suite à la lecture d'un récit d'aventures, l'enseignant pourra demander aux élèves en quoi ils ont « enrichi leur imaginaire » (voir la « mission » des types de textes, plus haut): il fera identifier des situations précises et amènera les élèves à comparer entre eux leurs perceptions. On ne va pas jusqu'à suggérer au maître de se mettre en scène lui-même comme lecteur, dans une technique proche de la « modélisation » (i.e. la technique de la verbalisation à voix haute de la pensée en cours de lecture) et suggérée par la psychologie cognitive: cela viendra dans le programme subséquent. L’évaluation : un élément important du curriculum de français C’est en 1980 que l’évaluation devient un élément important de la réforme des curriculum. En 1981, le MEQ instaure la Politique ministérielle d’évaluation pédagogique, qui propose de mettre l’évaluation pédagogique au cœur de l’activité éducative. Les commissions scolaires commencent à perfectionner leur personnel dans ce domaine. On se met alors à distinguer l’évaluation formative, qui est un processus d’aide à l’élève en cours d’apprentissage, de l’évaluation sommative, qui arrive au terme de l’apprentissage et permet d’en faire un bilan. Parallèlement à cette tendance, et sous la poussée des Américains, le Québec commence, dans les années quatre-vingt, à critiquer les épreuves à choix multiples, qui négligent des mécanismes intellectuels complexes tels que la résolution de problèmes, l’analyse, la synthèse, de même que l’expression orale et écrite. C’est la raison pour laquelle le Québec administre, depuis 1986, des épreuves écrites en français, dont celle de 5e secondaire est la plus connue. C’est également la raison pour laquelle les questions à court développement vont se répandre dans les épreuves ministérielles pour les autres matières que la français, obligeant l’élève à un minimum de rédaction. On ira plus loin avec les programmes de l’aube du 21 siècle. En 1987, le Conseil de la langue française émet un avis officiel et publie deux rapports recommandant d’expliciter les contenus spécifiques à l’apprentissage de la langue et d’accorder plus de place à la langue écrite dans toutes les matières. En 1988, le MEQ fait paraître Le français à l ’école. Plan d’action. On y souligne qu’il faut plus de grammaire, plus de syntaxe et plus d’orthographe dans les programmes, qu’il faut redéfinir l’habileté à écrire. L’AQPF se prononce alors contre ce document, car elle craint que l’on remplace une pédagogie du discours par une pédagogie de la langue, que l’on se centre sur la langue comme objet et que l’on fasse passer au second plan son aspect fonctionnel 3-Les programmes de 1994 et 1995 Le contexte des réformes Avant de parler des programmes du primaire et du secondaire. Il convient d’évoquer le contexte dans lequel les réformes se situent. Les Etats généraux sur l’éducation (1995-1996) centrent les discussions sur la réforme des curriculums. Les mémoires déposés aux commissaires et les audiences font état de la nécessité de donner à la maîtrise du français oral et écrit la priorité absolue en éducation. Les intervenants souhaitent également en faire une préoccupation partagée par tous les intervenants en éducation. On émet également le souhait que l’élève québécois, dans cette foulée, puisse acquérir une riche culture littéraire faisant une large place aux auteurs québécois. Selon les commissaires, l’habileté à communiquer doit se développer par la lecture, l’écriture, la parole et l’écoute. La langue, souligne-t-on, est plus

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qu’un outil de communication : elle est la base des apprentissages, des relations interpersonnelles et de l’identité collective. Apparu dans la foulée des Etats généraux sur l’éducation, le document ministériel Réaffirmer l’école (1997) entreprend une réflexion sur les curriculums d’études dans le sens d’un rehaussement des exigences, de relèvement du contenu culturel, de l’adaptation aux changements sociaux et de la maîtrise de compétences générales. La maîtrise linguistique y est encore une fois définie comme un savoir essentiel. On y insiste d’avantage qu’en 1979 sur « la fonction cognitive de l’école » (p. 22) et sur le rehaussement des exigences pour toutes les catégories d’élèves, y compris en ce qui regarde la lecture, l’écriture et le bagage culturel. Entre autres, à la fin du premier cycle du secondaire , à tout le moins, les élèves devraient avoir acquis les connaissances grammaticales de base en français écrit, ce qui est un grand bouleversement. Avec ce Rapport, le terme « compétences » fait son entrée officielle dans le vocabulaire québécois de l’éducation, bien qu’on le confonde plus souvent qu’autrement avec celui de « savoir ». On parle désormais de compétences en lecture, en écriture et écoute et en parole et on affirme que l’école doit les développer. En 1994, une enquête du Conseil des ministres de l’éducation du Canada démontre qu’en lecture 82,0% des élèves québécois francophones de 13 ans ont atteint un rendement égal ou supérieur au niveau 2, mais sans atteindre le niveau 3 (sur une échelle en cinq niveaux dont le 5e niveau démontre la compétence la plus élevée), alors que dans l’ensemble canadien, la moyenne se situe à 78,6. Pour les 16 ans, les pourcentages sont respectivement de 94,1 et de 90,8. Les élèves québécois francophones dépassent légèrement la moyenne nationale en lecture. Si nous considérons maintenant les rendements en écriture 90,5% des élèves québécois francophones de 13 ans ont atteint un rendement égal ou supérieur au niveau 2, mais sans atteindre le niveau 3 (sur une échelle en cinq niveaux dont le 5e niveau démontre la compétence la plus élevée), alors que dans l’ensemble canadien, la moyenne se situe à 90,0. Pour les 16 ans, les pourcentages sont respectivement de 96,2 et de 96,0. Les pourcentages de réussite en écriture des élèves québécois francophones sont donc sensiblement les mêmes que ceux de l’ensemble du pays. À la même époque, le rapport du Groupe DIEPE (1995) rend compte d’une étude menée en 1993 dans les quatre pays de la francophonie. On y démontre que les élèves québécois de 3e année du secondaire, après 9 ans de scolarité, ont des scores en production écrite équivalents ou supérieurs à ceux de leurs homologues belges et français quant aux dimensions purement communicatives (soit le développement du sujet de rédaction) et textuelles (soit la structure et la cohérence) de leur texte, mais inférieur en ce qui concerne le code, soit l’orthographe, la syntaxe et le vocabulaire et inférieurs également quant au style, soit l’originalité de la langue. Peu après, les travaux de Gagné, Ostiguy, Laurencelle et Lazure (1997), qui confirment les travaux précédents d’Ostiguy (1986) font ressortir le fait qu’en français oral, les élèves québécois utilisent peu le niveau standard, même en situation formelle de communication. On se trouve donc face à des élèves qui, tant à l’oral qu’à l’écrit, semblent ne pas avoir bénéficié d’un enseignement systématique sur le code et d’un suivi dans leurs pratiques scolaires sur le sujet. La langue écrite, selon les deux programmes Les programmes de 1994 (pour le secondaire) et de 1995 (pour le primaire) maintiennent la nécessité de se faire comprendre dans la francophonie et de s’approprier la richesse culturelle et littéraire du Québec, éléments déjà perceptibles dans les précédents programmes. On veut

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que l’enseignant articule les pratiques de discours signifiants et l’acquisition des connaissances, comme en 1979-1980. Le terme « objectivation » disparaît au profit de l’expression « retour sur la pratique ». Comme dans le programme précédent, et même encore plus, en raison de la popularité de l’enseignement stratégique, l’enseignant devient un modélisateur et un guide. On commence à parler de l’utilisation des technologies de l’information dans les pratiques rédactionnelles. Les deux programmes accordent plus de place à l’écrit que les précédents Au niveau grammatical, l’apprentissage systématique de la syntaxe et la grammaire de texte font leur réapparition, assorti d’un accent mis sur l’apprentissage inductif de toutes les notions ayant trait à la langue, dont les notions grammaticales. On précise les contenus à toucher pour chaque niveau d’étude. En trente ans, soit depuis le Rapport Parent, l’école est passée de la rédaction à une didactique de l’écriture . On se rend de plus en plus compte que, contrairement à la grammaire, le savoir-rédiger ne s’enseigne pas, mais qu’il s’apprend par l’exercice. L’application des règles de grammaire en vue de bien orthographier en contexte d’écriture se fait de façon spontanée ou réfléchie, selon les savoirs de chacun. Maîtrise orthographique et maîtrise rédactionnelle se rejoignent en ce qu’elles supposent des savoirs contextualisés, alors que la grammaire en tant que telle est souvent perçue comme un savoir décontextualisé. On voit ici à quel point la recherche en didactique de l’écriture a influencé les programmes, de même que les avancées de la psychologie cognitive. C’est en raison du constat de l’incompétence marquée des élèves de tous les niveaux (cf. le contexte des tests de français au cégep et à l’université) en grammaire et en orthographe que le coup de barre grammatical s’est imposé dans les programmes. La terminologie et le contenu de l’enseignement grammatical changent. En syntaxe, on part de la phrase de base et l’on dégage les constituants obligatoires et facultatifs de cette phrase. On passe ensuite aux phrases complexes et enfin, à la grammaire de texte. Les opérations linguistiques (ou manipulations) de remplacement, déplacement, addition et effacement permettent de comprendre les classes de mots et leurs fonctions, et ainsi de faire les accords qui s’imposent. Des notions nouvelles font leur apparition : groupe prépositionnel, organisateur textuel, marqueurs de modélisation Ces choix ne seront pas toujours bien compris par les enseignants, faute de perfectionnement, Plusieurs auront une pratique mécaniste de ces notions, qui vidées de leur logique interne, n’aideront pas davantage que dans la grammaire traditionnelle, les élèves à bien écrire. C’est que, pour bien comprendre l’esprit grammatical nouveau, il faut non seulement une solide formation en grammaire, mais également la pratique de la méthode inductive et de l’observation systématique de beaux « cas ». (Roy, 2002) La littérature Si les enseignants ont récriminé à l'encontre du programme de 1981, c'était dû non à l'absence de précisions, comme on l'avait vu lors de l'application du programme-cadre, mais bien parce que les connaissances grammaticales à acquérir étaient trop occasionnelles. Profitant de la refonte de 1995, le ministère rajustera son tir concernant sa conception de la lecture, influencé en cela par les théories cognitivistes .En littérature proprement dite, il s'inspirera quelque peu du courant de l'esthétique de la réception, dont les applications dans le cadre scolaire sont d'abord apparues aux Etats-Unis. Poursuivant sur la lancée de 1981, le ministre distingue cinq types de textes: narratif, dialogal, descriptif, explicatif, et argumentatif. Il précise que les textes poétiques ne peuvent

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être associés à un type de texte particulier. Les deux premiers types sont littéraires. Quant aux types descriptif, explicatif et argumentatif, il les confine aux textes dits « courants ». On distingue genre et type. « le genre s'est constitué historiquement à partir de formes conventionnelles d'écrits où domine un type particulier. Par exemple, le conte, la nouvelle littéraire, le récit et le roman sont des genres de textes où domine le type narratif. » (MEQ, 1995, p. 13) En insistant sur les genres et les types, le ministère met à la disposition de l'enseignant un instrument pédagogique susceptible d'attirer l'attention des élèves sur des régularités de structure et de style. Il met également de l'avant la notion de point de vue, qui lui permet plus de finesse dans l'analyse de l'énonciation. Les textes de type narratif se retrouvent durant les cinq années du secondaire, tout comme les textes de type poétique, mais leur complexité varie. Dans les deux dernières années de la scolarité, on ajoute les textes de type dialogal. Une démarche de lecture de textes littéraires (voir Programme de 1995, p. 19) permet de se rendre compte de la prégnance de l'esthétique de la réception. On procède en quatre étapes. 1- L'élève planifie sa lecture: il se situe en tant que lecteur, examine ses conditions de lecture. 2- Il construit le sens du texte: il analyse le contenu de l'univers décrit, reconstruit l'organisation du exte, discerne le point de vue, les valeurs véhiculées. 3- Il réagit au texte: il se situe quant à la satisfaction de ses besoins d'imaginaire et d'esthétique. 4- Il évalue sa démarche de ecture: il évalue ses habiletés et ses difficultés relativement à la compréhension du texte. Chacune de ces quatre étapes est divisée en sous-objectifs dont l'atteinte varie selon le type de texte ou encore, le niveau d'études. Comme dans le programme de 1981, les activités d'écriture concordent avec les activités de lecture. Dans un abus de langage qui fait sourire, on parle même de faire « écrire des textes littéraires », supposant ainsi une synonymie pour le moins hasardeuse entre « texte de fiction » et « texte littéraire ». Il n'est pas question de corpus dans le programme lui-même, mais dans une Sélection (Provost, 1995) commandée par le ministère et à laquelle les établissements doivent se plier pour choisir les quatre oeuvres intégrales que l'élève devra lire à chaque année. Elle a, elle aussi, fait l'objet de minutieuses consultations. On y retrouve à peu près 300 titres, dont environ 75 en traduction. Les oeuvres pour « adultes » alternent avec les ouvrages identifiés comme étant de la littérature de jeunesse (plus de 130 titres). Les oeuvres québécoises comptent pour la moitié des titres, ce qui peut se comprendre dans un système où la littérature de jeunesse est encouragée dès les débuts du primaire et où elle offre une incroyable variété de titres (environ 200 nouveaux titres par année). Reste à savoir si le répertoire n'est pas un peu biaisé sur ce sujet. Nul grand classique incontournable, donc, mais un choix ouvert, qui permet à l'enseignant de prévoir des parcours en fonction de ses élèves. On peut se demander jusqu'à quel point la visée esthétique de la lecture littéraire telle que la conçoit le programme se combine à la lecture dite « stratégique » qu'elle sous-tend. En effet, chaque sous-objectif littéraire se présente comme une stratégie à faire acquérir. En voici des exemples tirés en vrac du programme: observer les intitulés (titres, sous-titres, intertitres, surtitres), prévoir plusieurs façons d'annoter le texte, reconstruire le plan, distinguer un passage dialogué, etc. Québec français ne s'y est pas trompé, qui offre, dès l'hiver 1995, un numéro spécial sur la « lecture stratégique ». D'autre part, on y retrouve, dans la même foulée, à l'été 1995, un dossier sur les « types de textes » qui vient rappeler à quel point ceux-ci sont omniprésents dans le programme officiel. Dans les discussions sur la place publique, toutefois, c'est le volet grammaire qui prend toute la place, puisque les programmes opèrent,

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sur la question, un virage à 180 degrés. Il est à craindre que les enseignants, désireux de se recycler en cette matière, ratent le coche en ce qui regarde les réorientations pourtant réelles en matière d'enseignement littéraire. 4-Évolution à partir de 1999-2000 : vers les compétences transversales Avant même la fin de la mise en application du programme du primaire, le MEQ a entrepris, en 2000, une opération de refonte de tous les programmes, dont le programme de français, à la lumière de l’approche par compétences, très à l’honneur de part et d’autre de l’Atlantique, dans la foulée du Rapport Prêt pour l’avenir de l’OCDE en 1994 et du Rapport de l’Unesco, Un trésor est caché dedans, en 1996. Ces documents clé posent la question des compétences requises pour participer activement à la vie du XXIe siècle. Il en va de même pour le Rapport du Groupe Corbo Préparer les jeunes au 21e siècle, publié en 1994, qui met l’accent sur la mondialisation, l’explosion des connaissances, le développement exponentiel des technologies et la complexification de la vie sociale. Dans un article publié dans Vie pédagogique en septembre 2000, Gagnon raconte la gestation, à la fin des années 90, du Programme des programmes, sorte de référentiel du renouveau de l,enseignement. Ce programme des programmes a été testé dans des écoles primaires ciblées et lancé en 2001 dans les écoles primaires du Québec. Le même cheminement a été suivi pour la réforme des programmes du secondaire, dont le programme de français du premier cycle, qui, après essai à partir de 2002 dans quelques écoles pilotes, sera lancé de façon définitive en septembre 2005 dans toutes les classes de 1ère et 2e secondaire du réseau. Jusqu’à maintenant, seul le programme du primaire (premier et deuxième cycles) est édité sous une forme générale (voir MEQ, 2001), de même que le programme du premier cycle du secondaire, couvrant les deux premières années (2004); le programme du 2e cycle secondaire fait actuellement l’objet de discussions. L’originalité de ces programmes réside dans les compétences transversales. On en compte onze, dont quelques-unes touchent de près (ex : « communiquer de façon appropriée ») et d’autre d’un peu plus loin (ex. : « exploiter l’information »; « résoudre des problèmes »; « exercer sa pensée critique »; « mettre en œuvre sa créativité ») la classe de français. Selon le MEQ, les onze compétences sont communes à toutes les matières. Ainsi, « travailler en coopération », « développer son identité personnelle », « exploiter les TIC comme outils méthodologiques », par exemple, trouvent une coloration particulière dans la classe de langue, à condition que l’enseignant soit inventif et comprenne de l’intérieur, en reformulant les contenus des programmes, les objectifs par compétences, ce qui n’est pas une mince affaire, les programmes actuels, tant au primaire qu’au début du secondaire, n’offrant pas d’illustration concrète de la façon de mettre en œuvre les compétences transversales et se contentant d’une pétition de principe. Si la chose peut sembler un peu plus faisable au primaire, ainsi que le raconte Francoeur (2000), rapportant les expérimentations de huit enseignantes du primaire, c’est que, à ce niveau, on a affaire à des généralistes qui peuvent travailler plus facilement qu’au secondaire en interdisciplinarité et sont maîtres des liens à faire et des ressources à convoquer pour justement pratiquer ces compétences transversales. L’auteur souligne la détermination et la créativité qui doivent animer les enseignants, de même que la nécessité du travail en équipe-école. La formule du portfolio, qui permet à l’élève de rassembler et classer ses productions, de voir ses progrès, semble à tous parfaitement adaptée à la réforme.

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Au secondaire, les enseignants soulignent que l’acquisition des compétences transversales est fortement tributaire des disciplines et qu’une mise en œuvre systématique est difficile sans une concertation interdisciplinaire qui n’est pas dans les mœurs pédagogiques. Il semble encore, actuellement, à lire les commentaires d’enseignants dans des revues telles que Vie pédagogique et Québec français, pour la période 1999-2004, que les fonctionnaires du MEQ leur laissent le soin d’illustrer la mise en œuvre de cet enseignement par compétence, qu’ils n’ont pas encore réussi à théoriser, ni pour le français, ni pour les autres matières. On doit en retenir, pour l’essentiel, que ces programmes reconduisent l’orientation prise en 1994 et 1995 en ce qui concerne l’enseignement de la grammaire et des divers types de textes Cependant, si les notions et concepts sont les mêmes, la grille de lecture et de mise en pratique diffère, en fonction justement des compétences. Au primaire, le changement primordial est que la compétence à apprécier des œuvres littéraires devient le point focal du programme. Même réorientation pour le secondaire, sauf que la compétence à apprécier les œuvres littéraires n’est pas centrale, comme au primaire; on y note également l’apparition des « familles de situations » , notion floue et mal expérimentée jusqu’à maintenant. Aux deux niveaux, l’enseignant est perçu comme un « passeur culturel ». On souligne fortement dans les deux programmes l’importance de la maîtrise de la langue comme outil de structuration de la pensée et de construction d’une appartenance sociale. Les ouvertures sur l’interdisciplinarité sont nombreuses, en théorie, mais, pratiquement, les programmes n’en donnent aucune illustration. Les programmes mettent l’accent sur le fait d’écrire dans toutes les disciplines, des textes qui s’allongent, au fil de la scolarité. : il serait souhaitable que voient le jour des manuels qui illustrent de si beaux principes. Quant à l’acquisition de l’oral, il est dommage qu’après tant d’études et de travaux des didacticiens et des linguistes du Conseil supérieur de la langue française, on ne soit pas plus précis sur le niveau attendu. On parle d’acquisition de l’oral standard, mais sans en définir les critères et sans dire que l’enseignant doit en être le modèle. En ce qui concerne l’évaluation, on remarque que le MEQ prend position pour des mesures complexes (dont la rédaction par l’élève de son portfolio) susceptibles de faire prendre conscience aux élèves de primaire et du secondaire de l’importance de la littératie tout au long de leur curriculum, respectant à cet égard les grandes tendances américaines de literacy accross the curriculum. Il propose que la langue écrite soit notée dans tous les travaux, même ceux des autres matières. La nouvelle pondération de chacun des volets de l,apprentissage en français est changée : si l’écriture reste à 50%, la communication orale passe de 25% à 10% laissant ainsi 40% pour l’évaluation de la lecture, donc on reconnaît par le fait même la grande importance sur le plan des compétences transversales. Il serait éventuellement souhaitable qu’une épreuve unique en lecture soit introduite en 5e secondaire, à l’égal de ce qui se fait pour l’écriture.. Il serait également souhaitable, ainsi que l’ont noté différents organismes que l’on ait des seuils de réussite séparés à 60% pour chacun des volets du français, en plus du seuil de réussite global actuel, qui est de 60% Parallèlement à cette démarche d’écriture des programmes se sont tenus, en 2000 et 2001 des États généraux sur la situation et l’avenir de la langue française au Québec. Les commissaires ont organisé six journées thématiques, dont l’une a porté sur la qualité de la langue au Québec et une autre sur la langue d’enseignement et l’enseignement des langues. Voici quelles en sont les lignes directrices à propos de la langue française à l’école. Le rapport des États généraux reconnaît le rôle central de l’école dans l’aménagement linguistique au Québec. Les intervenants ont été unanimes à déplorer la piètre qualité du français au Québec en raison d’un trop grand laxisme ambiant et d’un manque de ressources. On note cependant que le

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vocabulaire s’enrichit, de façon générale. Il reste cependant fort à faire, dit-on, en grammaire et en orthographe. On base ce constat sur les faibles résultats en français aux épreuves ministérielles de fin de cycle, tant au primaire qu’au secondaire, soit quatre épreuves en tout. À la fin du primaire, plus de la moitié des élèves sont jugés incompétents en écriture et le niveau d’incompétence atteint presque trois élèves sur cinq en 3e secondaire. Pour ce qui est de la 5e secondaire, en 200, 42% des élèves ont échou au crtitère du fonctionnement de la langue. Ces constats rejoignent ceux du Groupe DIEPE (1995). La Commission estime donc que les programmes d’études doivent insister davantage sur la maîtrise du français et l’éveil à la culture québécoise, afin de contrer, entre autre, un taux de décrochage alarmant. Une scolarisation plus poussée et des programmes mieux équilibrés devraient permettre de faire acquérir des habiletés variées reliées aux registres de langue, entre autre, de maîtriser le code orthographique, d’améliorer la syntaxe et le vocabulaire. Ce dernier doit être enseigné en bonne et due forme. La Commission souhaite une coordination des divers niveaux de scolarité dans l’atteinte de ces objectifs, la généralisation de mesures de rattrapage et l’octroi de crédits aux bibliothèques. Elle émet le vœu que chaque établissement d’enseignement se dote de sa propre politique linguistique institutionnelle (opération actuellement en cours). Par ailleurs, la commission recommande de mettre un fort accent sur la culture, dans les programmes de français. Ainsi, il faut améliorer le choix des textes donnés à lire et avoir des standards de qualité qui permettront aux jeunes d’accéder aux textes plus difficiles des niveaux collégial et universitaire. Nous terminerons cette partie en évoquant brièvement les résultats de deux enquêtes. La première, l’enquête PISA internationale, conduite par l’OCDE en 2003 dans 41 pays auprès d’élèves de 15 ans a démontré que les jeunes Canadiens se situent au 2e rang, après la Finlande, quant à leurs capacités en lecture; le Québec est pour sa part au 4e rang de l,ensemble canadien, après l’Alberta, la Colombie britannique et l’Ontario. Les résultats des filles sont de beaucoup supérieurs à ceux des garçons. La deuxième enquête touche l’écriture et a été menée par le Conseil des ministres de l’éducation du Canada (2003). En voici les résultats : 87,3% des élèves canadiens français de 13 ans (incluant les francophones québécois, dont il est impossible d’avoir le rendement isolément) ont atteint un rendement égal ou supérieur au niveau 2, mais sans atteindre le niveau 3 (sur une échelle en cinq niveaux dont le 5e niveau démontre la compétence la plus élevée), alors que dans l’ensemble canadien, la moyenne se situe à 82,4 pour les canadiens anglophones. Pour les 16 ans, les pourcentages de jeunes ayant atteint le niveau 3 (ou supérieur, mais sans atteindre le niveau 4) sont respectivement de 71,7 et de 57,7. En écriture, les résultats des élèves francophones seraient donc meilleurs que ceux des élèves anglophones. On peut également noter que, selon le rapport, pour près de 90% des élèves francophones la maîtrise de l’écriture est importante pour leurs études à venir, ce qui est le pourcentage canadien le plus fort.. Par contre, moins de 30% des élèves québécois francophones de 13 ans et moins de 25% des élèves de 16 ans disent ne pas éprouver beaucoup d’intérêt pour l’écriture. On mentionne qu’en raison des procédures administratives, de la nature des épreuves et des critères de correction, on ne peut comparer les résultats avec ceux de 1994. Deuxième partie : les programmes du collégial 1-Les dix premières années (1967-1977) Le réseau collégial existe depuis 1967. Le statut intermédiaire de l'enseignement collégial, pour les uns préparatoire à l'Université, pour les autres terminal, est vraisemblablement à la source des difficultés éprouvées par les professeurs de français, langue maternelle. Que

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fallait-il enseigner et à quelles fins, compte tenu de la diversité des orientations et des populations étudiantes? Cette hétérogénéité se ressent dans les choix des oeuvres à l'étude, des méthododologies critiques et des objectifs spécifiques. En effet, ils varient considérablement selon les établissements et même selon les professeurs, ce que des recherches sur le terrain ont permis de constater (Melançon, Moisan, Roy, 1993; Roy, 1996). Les instructions ministérielles apparaîtront peu directives au début, même si elles fixent les orientations didactiques. En 1967, le Comité de coordination provinciale du français (organisme consultatif, composé de représentants des cégeps, et relevant du Service des programmes du ministère de l'Éducation) a décidé de n'imposer qu'un cadre d'enseignement et de laisser aux équipes de professeurs le soin de le remplir. L'enseignement par genres littéraires À ses débuts, la nouvelle structure de l'enseignement du français au collégial correspondait à une division par genres littéraires, qui devait faire suite à l'enseignement des siècles et des courants littéraires au secondaire. Une recommandation des milieux universitaires (Faculté des lettres), en 1967, allait dans ce sens: on souhaitait l'intégration de quelques notions d'esthétique et un élargissement du corpus littéraire. Concrètement, le programme de 1967-1968 comprenait quatre cours obligatoires de français consacrés respectivement au roman, à la poésie, au théâtre et à l'essai. Chacun des cours devait inclure un contenu stylistique. Concurremment, dès la deuxième année, le programme prévoyait la possibilité de suivre un cours consacré à la linguistique et trois des quatre cours initiaux. En 1973-1974, ne subsiste que cette deuxième série de cours. En 1975, enfin, s'ajoutent de nouveaux cours qui sont essentiellement des cours de correction ou de perfectionnement de la langue maternelle (intitulés «français écrit», «français correctif» et «langue de l'administration et de la technique »). Les documents officiels du Ministère, les Cahiers de l'enseignement collégial, signalaient les objectifs de la formation collégiale en plus de prévoir une liste de cours. Ils étaient peu prescriptifs, toutefois, quant aux contenus. Des noms d'auteurs et des oeuvres étaient mentionnés à titre indicatif, sans plus, bien que l'on souhaitât une réelle présence de la littérature québécoise dans les cours. Cela rejoignait l'esprit du rapport Parent de 1964, qui notait déjà «l'intérêt extraordinaire manifesté par les étudiants à l'endroit de la littérature canadienne» (tome III, art. 613, p. 41). Lors d'une rencontre pédagogique provinciale, en 1973, les professeurs proposaient «que, dans les cours communs, soient étudiées avant tout des oeuvres québécoises contemporaines de nature à répondre aux préoccupations psychologiques et sociales de nos étudiants» (Coordination..., 1977, p. 31). En 1978, un comité de la Direction générale de l'enseignement collégial recommanda que les cours communs permettent aux étudiants de «lire davantage et de s'imprégner de la littérature québécoise et de la littérature francophone en général afin qu'ils puissent connaître et partager l'expérience linguistique et culturelle de la communauté québécoise» (Québec français, 1978, p. 14). La structure de cours par genre, plus administrative que littéraire au début, s'est avérée commode, car elle permettait un classement des oeuvres ou des auteurs sans égard à des questions de nationalité et de périodisation littéraire. Cela autorisait, en l'occurrence, l'enseignement d'oeuvres contemporaines et des littératures québécoise ou étrangère L'enseignement par genre n'est toutefois pas sans poser problème, puisqu'il fait prévaloir une forme ou une catégorie critique sur l'objet littéraire, problème plus important au collégial qu’au secondaire. Ce n'est plus un texte, mais le représentant d'un genre qui est à l'étude. Le genre devient une base de classement pour la définition et l'interprétation du texte littéraire.

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On pourrait penser qu'une position théorique s'est imposée à l'époque, par réaction contre l'ancien modèle didactique et l'histoire littéraire. Il est difficile, toutefois, d'y déceler déjà des postulats structuralistes, bien à l'honneur dans les années 1970. On verra plus loin que le discours didactique, composé des instructions ministérielles et de commentaires ou recommandations diverses, intègre peu à peu les concepts de la linguistique, des théories de la communication et des poétiques du discours. La justification en est implicite dans les modifications de programme et les ajouts de cours. En effet, les finalités esthétiques ou purement littéraires le disputent sans cesse aux objectifs généraux d'un enseignement de la langue et de son usage fonctionnel, compte tenu de la double orientation de l'enseignement collégial (pré-universitaire ou professionnel). On voit là l’originalité fondamentale du collégial par rapport aux niveaux antérieurs de scolarisation. Les séquences de cours Très tôt, des étudiants et des professeurs ont exprimé des insatisfactions à l'égard du programme, déplorant que l’enseignement par genre ne conduise pas l'étudiant à s'impliquer vis-à-vis les questions linguistiques et culturelles de son milieu. La Coordination provinciale suggéra, en 1972, que «chaque département étudie l'organisation des quatre cours communs en séquence progressive tenant compte de la langue, de la fonction du langage et des besoins des étudiants, et qu'ils soient formulés en termes d'objectifs, de méthodologie et d'évaluation» (Gagnon, 1972, p. 5). En 1974, seize projets de séquences furent soumis à la Coordination provinciale. Affichant une volonté de «respecter le plus possible les caractéristiques locales et de permettre à chaque département, selon ses moyens, d'atteindre les objectifs et les sous-objectifs généraux, afin, par ailleurs, de conserver, une certaine homogénéité à un enseignement national», le ministère de l'Éducation proposait, en 1975, les trois objectifs principaux suivants : « (1) donner à l'étudiant les moyens de saisir les rapports entre la langue, les productions culturelles et la société ; (2) lui permettre d'utiliser et d'explorer le plus souvent possible les matériaux de la langue en favorisant la production de textes et d'autres activités créatrices;(3)l’amener à perfectionner une compétence déjà acquise au primaire et au secondaire dans la pratique de la langue » (DGEC, 1975, 1).

2-Les séquences, de 1977 à 1994 Ces objectifs se traduiront, en 1977, par trois grandes orientations, complétées ultérieurement par une quatrième, qui définissent des séquences de cours. Le document du Ministère précise que chaque orientation est définie par des champs d'activités où se retrouvent les trois objets de l'enseignement du français au collégial, soit la langue, la littérature et la communication. Notons que, dans le même texte officiel, étaient désignés auparavant deux objets propres à l'enseignement du français, soit la langue et le discours. Cette incohérence n'est qu'un exemple d'imprécision dans les documents ministériels. Manifestement, ceux-ci sont attribuables à plusieurs énonciateurs et ils conservent des traces de la petite histoire des organismes. Quoi qu'il en soit, la littérature n'est jamais, d'après les instructions officielles, l'objet prioritaire de l'enseignement du français au collégial. Le projet des séquences de cours, toutefois, est loin de faire consensus. Les résistances se font explicites dans les Départements de français et dans les colloques. En 1982, lors d'un «Colloque des professeurs de français du niveau collégial» on dénonce une «démarche d'envergure» pour réviser les programmes et on rappelle les rejets successifs de propositions ministérielles qui mettaient l'accent sur la communication et la performance linguistique des étudiants. Entre autres, on reproche à un «plan d'étude cadre» les orientations suivantes: «approche normative et technique de la langue, secondarisation de la littérature, conception étroite de la culture (absence de vision critique).» Les auteurs ajoutent: «Cette triple

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orientation nous suggère assez clairement ce qu'on entend dans les textes du Ministère par « prolongement du secondaire »: c'est une répétition, un calque du secondaire (Dalpé, Jean et Saint-Pierre, 1982, p. 7).» De nouveaux cours viennent remplacer les cours obligatoires dans les Cahiers de l'enseignement collégial en 1980-1981 puis, malgré les oppositions répétées, la structure d'un enseignement par séquences finit par apparaître dans les instructions officielles. En 1985, les Cahiers contiennent une liste de quinze cours qui peuvent être offerts à titre de cours obligatoires. Deux de ces cours seront réservés par la suite aux étudiants de la concentration «Lettres »; ils sont intitulés «Langue, lecture et écriture au féminin» et «Écriture québécoise et modernité». Il s'agit d'une rupture importante dans les études collégiales. Ce programme révisé, qui s'appliquera jusqu'en 1994, fait prévaloir les objectifs didactiques sur les catégories littéraires. Il propose d'étudier «la langue et les discours, qu’ils relèvent de la littérature ou de la communication courante». La littérature y perd du coup un rôle central. On peut en juger à la description des séquences dans les instructions officielles, qui seront essentiellement les mêmes durant toute la période. Ainsi, les principes d’organisation de l’enseignement du français énoncés dans les Cahiers de l’enseignement collégial (DGEC, 1993, p. 1-71, 1-72) établissent quatre orientations ou «lignes directrices» déterminées par « des champs d’activité où se retrouvent les trois objets de l’enseignement du français au collégial: la langue, la littérature, la communication». Les orientations établies sont les suivants: a) langue, littérature et société; b) lecture, analyse et production; c) langue, langage et communication; d) langue et discours littéraire. L’organisation de quatre cours obligatoires en séquences «est déterminée par le collège et elle implique le choix de l’orientation, le choix des cours, leur ordre et les modalités d’implantation et de fonctionnement». De plus, les collèges sont libres d’instituer une ou plusieurs des orientations proposées en constituant une ou des séquences de quatre cours obligatoires choisis parmi la liste de cours «définis provincialement [...] en relation avec les objectifs généraux de l’enseignement du français au collégial». Les séquences sont alors composées de quatre cours obligatoires (ou cours communs) parmi la liste suivante (en ordre alphabétique): «communication et écritures», «communications et médias», «discours narratif», «discours poétique», «essai», «français», «langue, communication, société», «lecture et analyse», «lecture et écriture», «linguistique», «littérature de la francophonie», «littérature et société québécoise» et «théâtre». On y retrouve les cours des quatre genres principaux — dont la poésie et le roman sous l'acception élargie de discours poétique et de discours narratif — de même que les cours de linguistique et de français correctif, qui sont apparus très tôt dans le programme. Le choix du corpus littéraire revient entièrement aux collèges et, dans les faits, aux enseignants et aux départements eux-mêmes. Le MEQ s’en tient à fournir une description sommaire des orientations et des champs d’activité qui favorisent l’atteinte de cinq objectifs de l’enseignement du français à l’intérieur des orientations choisies. Ces objectifs sont définis dans une formulation caractéristique:

- utiliser correctement la langue orale et écrite selon les usages qui caractérisent les diverses situations de communication; - analyser et comprendre des discours oraux et écrits multiples et variés (dans leur dimension intellectuelle, affective, esthétique, symbolique et linguistique); - imaginer ou concevoir, organiser et produire des discours oraux et écrits multiples et variés, et en maîtriser les principes d’élaboration (règles de

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composition; principes propres aux genres littéraires et aux diverses situations de communication); - apprécier, interpréter et critiquer les valeurs culturelles transmises par la langue et les discours (sur le plan du fond et de la forme); - exprimer des valeurs personnelles et culturelles par la langue et les discours (créations littéraires, articles de journaux, tables rondes, débats, lettres, etc.).

Enfin, les quatre orientations — qui définissent les séquences — sont présentées ainsi dans les documents officiels : Orientation A: langue, littérature et société

Cette orientation propose l'étude critique des rapports entre la langue, la littérature et la société, en relation avec le fonctionnement interne des textes. Orientation B: lecture, analyse et production Cette orientation propose une démarche axée sur l'analyse et le développement de l'expression et de la créativité par la pratique de textes divers: narratifs, dramatiques, poétiques, critiques ou autres. Orientation C: langue, langage et communication Cette orientation propose l'étude de la langue et des langages par le biais de l'analyse critique et de la pratique des différents types de communication. Orientation D: Langue et discours littéraire Cette orientation propose d'étudier la langue, les mécanismes de créativité du langage, les modes de fonctionnement des différents discours, particulièrement à travers les genres littéraires.

Dans cette dernière orientation, réapparaît la catégorie des genres qui était prédominante avant 1977. En réalité, elle restera sous-jacente dans bien des séquences de cours, malgré les intentions du programme et la place faite, dans les cours, au cinéma, à la bande dessinée, au téléfeuilleton et à d'autres formes médiatiques. Fortier et Fortin (1993) qui ont analysé en détail le discours institutionnel dans l'ouvrage collectif La littérature au cégep (1968-1978), ont noté justement que

les séquences, de par les cours qui leur sont rattachés, conservent la structuration par genres et partagent, de fait, la plate-forme didactique antérieure. L'orientation «a» propose, entre autres, roman québécois, théâtre québécois, poésie québécoise, analyse du phénomène québécois dans la littérature; l'orientation «b» reprend les quatre genres, plus deux ateliers littéraires [...] (p. 274).

Néanmoins, il apparaît clairement dans les documents institutionnels de 1967 à 1993 que l'enseignement collégial n'est pas le lieu de la formation littéraire. Certains intitulés de cours sont particulièrement révélateurs: il ne désignent pas la littérature ou les textes narratifs ou poétiques, mais des tâches de lecture et d'analyse ou encore le discours narratif et le discours poétique. Ces formules renvoient, bien sûr, à un état de la théorie littéraire qui a trouvé dans la linguistique et les théories de la communication une source de renouveau. Elles signalent l'influence de l'université et de la critique savante, que nous avons pu vérifier par une enquête auprès des professeurs et dont Dumont (1993) a rendu compte. Même si perdure parfois un dessein humaniste dans les plans de cours laissés à la liberté des professeurs, en 1970, on est bien loin de l'enseignement classique des années 1950. Toutefois, le collège ne poursuit pas le projet critique des universitaires. Sa finalité est tout autre. L'enseignement de la langue est bien l'enjeu majeur du programme, auquel s'ajoute une préoccupation sociale ou plutôt nationale. À ce propos, Fortier et Fortin (1993) faisaient la remarque suivante:

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Ainsi, l'enjeu de l'enseignement littéraire se déplace: rarement objet d'étude, la littérature devient un instrument d'acquisition d'outils cognitifs et interprétatifs visant l'appropriation de la réalité. Terrain privilégié de manoeuvres idéologiques — ce qu'elle a toujours été, il ne faut pas se leurrer —, la littérature se voit expropriée au profit d'un projet collectif. (p. 303).

Le caractère national et social semble bien caractéristique du programme d'alors. Il a pu se traduire par l'inclusion effective de la littérature québécoise dans la matière enseignée, mais aussi par un point de vue critique inspiré de la sociologie. Des propositions du Comité de coordination de français, notamment, le laissaient entendre et, antérieurement, le Rapport Parent le suggérait: «L'enseignement de cette littérature [québécoise] pourrait s'orienter en partie vers une étude des aspects sociologiques que comportent les oeuvres littéraires et se rattacher, de cette façon, à une sorte d'anthropologie culturelle ou de psychologie nationale» (tome III, art. 613, p. 41). Par ailleurs, pas une méthode critique ne s'est véritablement imposée, bien que la thématique, la narratologie et la rhétorique aient eu leurs défenseurs. On doit noter le retrait de l'histoire littéraire au profit de l'histoire sociale. L'explication de textes et l'exercice d'analyse littéraire prennent peu de place. Du reste, le recours aux manuels scolaires (histoire littéraire, anthologie ou traités de composition) disparaît durant la période de 1967 à 1993 au profit de la photocopie pour l'étude d'extraits littéraires. La lecture intégrale des oeuvres est cependant encouragée. La variation des contenus enseignés mérite d'être soulignée. On y trouve des titres français, d'abord, puis québécois et étrangers, du XXe siècle essentiellement (Roy, 1993). Mais la littérature n'est pas l'objet exclusif des cours. La notion de discours permet l’introduction de textes paralittéraires ou non littéraires, les essais politiques, éditoriaux, bandes dessinées, feuilletons télévisés, etc. Cette hétérogénéité rend compte de la souplesse du programme d'études qui a prévalu jusqu'en 1994. De 1967 à 1993, les versions successives du programme d'enseignement collégial attestent, à travers des cours de langue et de communication, des préoccupations linguistiques et sociales dominantes. La montée du sentiment nationaliste ne saurait suffire à expliquer les nouveaux contenus de cours, qui prévoient la lecture d'oeuvres québécoises. La littérature, en fait, a acquis un statut instrumental, en devenant un moyen de perfectionnement des connaissances langagières, un lieu d'interprétation des contextes sociaux. En insistant sur les phénomènes de communication, le programme d'enseignement a privilégié la fonction sociale des discours, laquelle rejoint la conception saussurienne de la langue devenue parole. Les cours incluent des contenus non littéraires, des formes diverses de discours issues des médias. La littérature, loin d'être l'objet exclusif de l'enseignement du français au collégial, à cette époque, se définit par rapport aux discours ambiants. Souvent, la dimension documentaire ou référentielle des œuvres prend tout autant sinon plus d’importance que leurs caractéristiques esthétiques. Le niveau d'études et la double orientation pré-universitaire ou professionnelle du collégial le justifient vraisemblablement. Des recherches ont montré, d'ailleurs, que les oeuvres littéraires sont à l'étude dans une majorité de cours et de cégeps entre 1967 et 1993 (Melançon, Moisan, Roy, 1993; Roy, 1996), mais elles sont de plus en plus contemporaines et québécoises. Entre l'étude de la langue et celle de la littérature, un univers de discours assorti à une problématique de la communication sociale s'est imposé.

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3-La réforme de 1994 En 1994, une réforme des programmes du collégial vient une nouvelle fois bouleverser la donne. On assigne aux cours de français des buts tels que la maîtrise de la langue en tant qu’outil de communication et de pensée, la connaissance des richesses de l’héritage culturel par l’ouverture aux œuvres de civilisation, la capacité de développer une pensée réflexive autonome et critique, le développement de capacités d’analyse et de synthèse. On souhaite explicitement que le collégien s’exprime mieux oralement et par écrit. L’insistance sur les œuvres littéraires est justifiée par les arguments suivants. Ces œuvres permettent à l’étudiant de s’inscrire dans une culture et favorisent le développement d’habitudes de lecture. L’enseignant doit choisir des œuvres qui ont marqué la littérature d’expression française, dans les différents genres littéraires. Ces œuvres sont réparties dans les trois « ensembles » de soixante heures qui constituent la « formation générale commune et chaque ensemble doit toucher au moins deux genres différents. Il convient d’assurer une place équilibrée à la littérature québécoise dans ces ensembles; souvent, l’ensemble trois est consacré à la littérature québécoise. Les œuvres additionnelles sont choisies dans la littérature en traduction et dans les littératures étrangères. Le « quatrième ensemble » appartient à la formation propre à un programme donné et permet d’insister sur certaines compétences, ainsi, le français scientifique dans la concentration sciences pures. On insiste avec les étudiants sur les pratiques régulièrement de lecture et d’écriture; ainsi, l’étudiant a à rédiger des analyses de textes littéraires, des dissertations explicatives ou critiques. À ces quatre cours se superpose, pour les élèves faibles en français, soit les francophones de souche et les allophones, un cours de mise à niveau de 60 heures qui, depuis septembre 2002, utilise la nouvelle terminologie grammaticale en vigueur dans les niveaux antérieurs. Dans les faits, comme les élèves passent l’épreuve uniforme de français durant leur troisième session de collègue, il arrive fréquemment que le troisième cours obligatoire de français se convertisse peu ou prou en séance de préparation à l’épreuve. Plusieurs enseignants du collégial (Bordeleau, 1995; Cambron, 1999; Gadbois, 1995;Latulipe, 1994 a et b) reprochent au programme du collégial, en raison de l’existence de l’épreuve, mais également d’objectifs centrés sur la langue, de rétrécir l’expérience du langage aux seuls aspects correctifs. Ils sont contre cette littérature en service commandé, qui doit supplémenter veiller à l’éveil de la conscience linguistique et à laquelle on nie ses dimensions rhétoriques et esthétiques. Cependant, depuis quelques années, les détracteurs de la prise de position ministérielle se font moins nombreux. Il faut sans doute y voir, outre les accommodements trouvés localement et l’édition d’un matériel pédagogique ad hoc (cf Antoniades, Belzile et Richer, 2002), le rôle du Centre collégial de matériel didactique (CCDMD) et de sa revue correspondance, qui, depuis la réforme, publie bon an mal an quatre numéros consacrés à la pédagogie du français au collégial. Maints articles y démontrent à l’enseignant de français que les objectifs purement littéraires et ceux qui concernent la maîtrise de la langue ne sont pas incompatibles (cf Maisonneuve, 2003). L’épreuve uniforme de français L’épreuve uniforme de français est obligatoire au collégial depuis le 1er janvier 1996, soit dix ans après la création des épreuves obligatoires du primaire et du secondaire. Depuis le 1er janvier 1998, l’obtention d’un diplôme d’études collégiales est conditionnelle à la réussite de cette épreuve. Les étudiants doivent rédiger une dissertation critique à partir des textes littéraires proposés. L’utilisation du dictionnaire et de la grammaire sont permis. Les élèves peuvent faire jusqu’à 30 fautes dans une copie de 900 mots et réussir tout de même le test, en

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raison de la pondération des différents critères. Des études sont actuellement en cours, à l’effet d’exiger l’atteinte d’un double seuil (soit un seuil général, couvrant tous les critères, dont l’habileté de l,argumentation, et un seul spécifique à la grammaire).(Pour quelques statistiques sur les récents résultats à ces tests, voir le chapitre sur la formation des maîtres). Selon le rapport de la Commission des États généraux sur la situation et l’avenir de la langue française au Québec (2001), en 2000, un étudiant sur quatre a échoué à son premier cours de langue et littérature. Selon la Commission d’évaluation de l’enseignement collégial, ces échecs sont attribuables à une maîtrise insuffisante de la langue et du code linguistique de même qu’à une difficulté de bien conceptualiser, d’analyser et de synthétiser. Par ailleurs, la Commission a également insisté sur le rôle primordial à donner à la littérature, surtout à la littérature québécoise, pour un meilleur ancrage culturel des élèves. Conclusion On peut conclure, à l’issue de ce panorama, que les programmes québécois ont affirmé de plus en plus, au fil des décennies, leur souci pour une langue de qualité, mais que ce souci a été dépendant des effets de mode, que ce soit la vague communicative des années soixante ou encore l’engouement récent pour les compétences, en passant par la fixation sur les mesures évaluatives à partir des années quatre-vingt. Le souci pour le code a pris divers visages, tantôt laxistes, tantôt marqués au coin de la rigueur. Pour le secondaire, plus particulièrement, on a réaffirmé avec vigueur à partir de 1994 le souci de faire lire des textes littéraires dans l’optique de revitaliser les objectifs socioculturels des programmes. À l’aube du 3e millénaire, non seulement les enseignants de français, mais également tous les enseignants des divers niveaux d’études, se sont vus interpellés par les programmes comme des passeurs culturels, eux qui étaient déjà conscrits depuis une dizaine d’années comme correcteurs des erreurs langagières de leurs élèves, sans que leurs nouvelles responsabilités soient pour autant définies de façon précise. Il appartiendra que l’État, dont les programmes de formation de la jeunesse québécoise sont de plus en plus ambitieux, investissent dans le perfectionnement ad hoc des enseignants, et qu’il redémarre l’encadrement pédagogique qui avait autrefois cours dans les commissions scolaires. Nous terminerons notre propos par les défis à relever aux trois ordres d’enseignement 1-Régler la question de la dichotomie, qui n’est qu’apparente, entre la langue et la littérature, en autant qu’il s’agisse d’assurer aux élèves l’apprentissage d’une langue de qualité. L’apprentissage de la langue ne doit pas être considérée que dans sa finalité fonctionnelle. L’élève doit également accéder à sa dimension esthétique et, en cela, l’œuvre littéraire est irremplaçable. 2-Donner un rôle primordial, sinon prioritaire, aux didacticiens du français dans l’élaboration des programmes ministériels dans cette discipline. Actuellement, on les relègue au rôle de caution morale, alors qu’on se sert de leurs écrits de façon impressionniste et bricolée. Or, eux seuls peuvent assurer un programme de qualité au plan scientifique et non un patchwoork de connaissances tirées du savoir savant et raboutées parfois au mépris de toute logique (cf. le sort scolaire de certains concepts de la narratologie). Pour la partie plus purement didactique, on pourra leur adjoindre des conseillers pédagogiques et des enseignants choisis parmi les meilleurs de cette discipline.

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3-Assurer, dans les programmes, des contenus rigoureux à l’enseignement de la langue orale, enseignement basé prioritairement sur la norme morpho-syntaxique, morphologique et lexicale du français soutenu, tout en n’excluant pas les registres de langue. 4-Mieux lier apprentissage et évaluation. Démontrer aux enseignants, par des exemples ad hoc, que certains dispositifs pédagogiques, parfois un peu complexes, mais tout à fait réalisables dans une classe, permettent de lier oral, écrit et lecture et d’évaluer souplement chacun de ces trois volets. Il faut éviter que l’on voie dans les directives ministérielles une manie docimologique inefficace, et, pour ce faire, illustrer les démarche dont on ne pose, dans les programmes que les grands principes s’impose, car, sinon, l’enseignant ne s’en tiendra qu’à son manuel et ne fera pas l,effort de redéfinir pour lui-même et sa classe les grands objectifs de l,enseignement du français. 5-Définir de façon plus précise la maîtrise de la langue comme compétence transversale. Il n’est pas suffisant de dire que la connaissance de la langue est nécessaire pour assurer les apprentissages. Parallèlement, il y a risque, en insistant ainsi sur le rôle instrumental de la langue, d’occulter ses dimensions esthétiques (la littérature) et socioculturelle (langue comme patrimoine, comme facteur d’identité). Bibliographie Antoniades, É, N. Belzile et H. Richer (2002). Apprendre à bien écrire par les textes

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