Validation linguistique en français des versions courtes des questionnaires de symptômes (PFDI-20)...

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TRAVAIL ORIGINAL Validation linguistique en français des versions courtes des questionnaires de symptômes (PFDI-20) et de qualité de vie (PFIQ-7) chez les patientes présentant un trouble de la statique pelvienne Development of a linguistically validated French version of two short-form, condition-specific quality of life questionnaires for women with pelvic floor disorders (PFDI-20 and PFIQ-7) R. de Tayrac a, * , B. Deval b , H. Fernandez c , P. Marès a , et Mapi Research Institute d a Service de gynécologieobstétrique, centre hospitalo-universitaire Carémeau, place du Professeur-Debré, 30029 Nîmes cedex 09, France b Service de gynécologieobstétrique, centre hospitalo-universitaire, Nancy, France c Service de gynécologieobstétrique, hôpital Antoine-Béclère, Clamart, France d Mapi Research Institute, 27, rue de la Villette, 69003 Lyon, France Reçu le 27 août 2007 ; avis du comité de lecture le 28 août 2007 ; définitivement accepté le 29 août 2007 Disponible sur internet le 18 septembre 2007 MOTS CLÉS Symptômes ; Qualité de vie ; Prolapsus génital ; Incontinence urinaire ; Troubles de la statique pelvienne ; Français ; Questionnaire Résumé Introduction. L objectif de ce travail était la validation linguistique en français des versions courtes des questionnaires sur les symptômes et la qualité de vie validés en langue anglaise chez des patientes présentant des troubles de la statique pelvienne. Matériel et méthodes. Le questionnaire sur les troubles de la statique pelvienne (PFDI-20) et le questionnaire sur limpact des troubles de la statique pelvienne (PFIQ-7), ont été obte- nus après une double traduction (anglaisfrançais), une rétrotraduction (françaisanglais), une revue des traductions par des experts et des tests de compréhension sur un échantillon de patientes présentant différents troubles de la statique pelvienne. La validation linguistique a été réalisée en collaboration avec Mapi Research Institute et lauteur de la version originale, le docteur Matthew Barber, et sponsorisée par les laboratoires Coloplast. Journal de Gynécologie Obstétrique et Biologie de la Reproduction 36 (2007) 738748 * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (R. de Tayrac). 0368-2315/$ - see front matter © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.jgyn.2007.08.002

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Journal de Gynécologie Obstétrique et Biologie de la Reproduction 36 (2007) 738–748

TRAVAIL ORIGINAL

Validation linguistique en français des versionscourtes des questionnaires de symptômes (PFDI-20)et de qualité de vie (PFIQ-7) chez les patientesprésentant un trouble de la statique pelvienne

Development of a linguistically validated Frenchversion of two short-form, condition-specific qualityof life questionnaires for women with pelvic floordisorders (PFDI-20 and PFIQ-7)

R. de Tayraca,*, B. Devalb, H. Fernandezc, P. Marèsa,et Mapi Research Instituted

a Service de gynécologie–obstétrique, centre hospitalo-universitaire Carémeau, place du Professeur-Debré, 30029 Nîmescedex 09, Franceb Service de gynécologie–obstétrique, centre hospitalo-universitaire, Nancy, Francec Service de gynécologie–obstétrique, hôpital Antoine-Béclère, Clamart, Franced Mapi Research Institute, 27, rue de la Villette, 69003 Lyon, France

Reçu le 27 août 2007 ; avis du comité de lecture le 28 août 2007 ; définitivement accepté le 29 août 2007Disponible sur internet le 18 septembre 2007

MOTS CLÉSSymptômes ;Qualité de vie ;Prolapsus génital ;Incontinence urinaire ;Troubles de la statiquepelvienne ;Français ;Questionnaire

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : renaud.de

0368-2315/$ - see front mattedoi:10.1016/j.jgyn.2007.08.00

tayrac@

r © 2002

Résumé

Introduction. — L’objectif de ce travail était la validation linguistique en français des versionscourtes des questionnaires sur les symptômes et la qualité de vie validés en langue anglaisechez des patientes présentant des troubles de la statique pelvienne.Matériel et méthodes. — Le questionnaire sur les troubles de la statique pelvienne (PFDI-20)et le questionnaire sur l’impact des troubles de la statique pelvienne (PFIQ-7), ont été obte-nus après une double traduction (anglais–français), une rétrotraduction (français–anglais), unerevue des traductions par des experts et des tests de compréhension sur un échantillon depatientes présentant différents troubles de la statique pelvienne. La validation linguistique aété réalisée en collaboration avec Mapi Research Institute et l’auteur de la version originale,le docteur Matthew Barber, et sponsorisée par les laboratoires Coloplast.

chu-nimes.fr (R. de Tayrac).

7 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Questionnaires de qualité de vie et troubles de la statique pelvienne 739

Résultats. — Ces questionnaires sont des autoquestionnaires remplis par la patiente en dehorsd’une présence médicale. Ils regroupent l’ensemble des symptômes urinaires, colo-ano-rec-taux et périnéovaginaux en rapport avec les troubles de la statique pelvienne. L’évaluationde ces questionnaires, dans leur version originale anglaise, a montré une bonne corrélationentre les réponses et la symptomatologie qui amène la patiente à consulter. Leur principalavantage est la simplicité d’interprétation, grâce à l’obtention de scores chiffrés. La valida-tion linguistique n’est pas une traduction littérale des questionnaires originaux, mais le déve-loppement de versions conceptuellement équivalentes et culturellement acceptables pour lesfemmes françaises. Ces questionnaires sont des outils de mesure indispensables pour une priseen compte de l’aspect fonctionnel des différentes formes de prolapsus génitaux.Conclusion. — Les versions françaises du PFDI-20 et du PFIQ-7 sont les premiers instrumentsde mesure de symptômes et de qualité de vie validés linguistiquement en français spécifique-ment développés pour les patientes présentant des troubles de la statique pelvienne.© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDSSymptoms;Quality of life;Pelvic organ prolapse;Urinary incontinence;Pelvic floor disorders;French;Questionnaire

Abstract

Introduction. — The aim of this work was to develop a linguistically validated French versionof two short-form questionnaires on symptoms and quality of life in female patients with pel-vic floor disorders (PFDI-20, PFIQ-7), originally developed and psychometrically validated inEnglish.Material and methods. — French versions of the short form Pelvic Floor Disorder Inventory(PFDI-20) and Pelvic Floor Impact Questionnaire (PFIQ-7) were developed after two indepen-dent forward translations (English–French), one back translation (French–English), a review byFrench clinicians and patient testing on a sample of patients with pelvic floor disorders. Thislinguistic validation process was led in collaboration with Mapi Research Institute and theauthor of the original English version, Dr Matthew Barber, and sponsored by Coloplast.Results. — These two self-administered questionnaires are completed by patients without amedical presence. They cover urinary, colo-recto-anal and pelvic/vaginal symptoms relatedto pelvic floor disorders. Psychometric evaluation of the original US English questionnairesfound a good correlation between answers provided and clinical symptoms leading the patientto seek medical attention. Their main advantage is their ease of interpretation through theuse of a numeric score. Linguistic validation does not consist in translating original question-naires literally, but rather in developing conceptually equivalent and culturally appropriateversions adapted to the target country. These questionnaires are invaluable instruments toevaluate functional aspects of various forms of pelvic organ prolapse.Conclusion. — The French versions of the PFDI-20 and PFIQ-7 are the first linguistically vali-dated instruments available in French to evaluate symptoms and quality of life in patientswith pelvic floor disorders.© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Introduction

Les troubles de la statique pelvienne chez la femme com-prennent de nombreux symptômes incluant l’incontinenceurinaire, l’incontinence anale, les symptômes de prolapsusgénito-urinaires et rectaux, les difficultés mictionnelles(dysurie), les difficultés d’exonération (constipation termi-nale ou dyschésie) et les troubles de la sexualité [1]. Cestroubles ont des facteurs de risque commun, comme l’âgeet les grossesses [2], et sont liés entre eux par la dénerva-tion du plancher pelvien [3]. Il n’est pas rare que ces symp-tômes coexistent chez une même patiente, ou se dévelop-pent au cours du temps [4]. De plus, de nombreuses étudesont démontré que le traitement chirurgical de l’un de cessymptômes peut améliorer, aggraver ou même prédisposerà un autre [5]. Si les symptômes urinaires et génitaux sontgénéralement bien explorés lors de la prise en charge ini-

tiale, urologique ou gynécologique, les troubles anorectauxsont souvent négligés, alors que les patientes consultantpour un prolapsus génito-urinaire souffrent de constipationterminale dans environ 25 % des cas et d’incontinence analedans environ 33 % [6]. En raison de ces intrications com-plexes, nombreux sont les praticiens qui tentent actuelle-ment de regrouper leurs compétences pour évaluer et trai-ter ensemble et de façon globale les troubles de la statiquepelvienne. La prise en charge isolée d’un type de symptô-mes par une spécialité (urologie, gynécologie ou coloproc-tologie), trop limitative, est devenue insuffisante.

Ces troubles de la statique pelvienne sont rarement res-ponsables de morbidité sévère ou de mortalité. En revan-che, ils affectent directement la qualité de vie des patien-tes. Il est par conséquent indispensable de posséder desinstruments permettant de mesurer l’impact des symptô-mes de prolapsus sur la qualité de vie. De tels instruments

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doivent permettre de corréler la symptomatologie fonction-nelle au stade anatomique, de poser une indication chirur-gicale en fonction de la gêne fonctionnelle et d’évaluerl’efficacité et la tolérance des différentes interventionschirurgicales.

Des instruments de mesure de la qualité de vie pourl’incontinence urinaire ont été développés : en langue fran-çaise, l’échelle MHU (mesure du handicap urinaire),l’échelle Ditrovie, et l’autoquestionnaire Contilife [7,8],et en langue anglaise, l’IIQ (incontinence impact question-naire) et l’UDI (urogenital distress inventory) [9]. Ces ins-truments n’ont été validés qu’en l’absence de prolapsusassocié, ce qui limite leur utilisation. Des échelles de qua-lité de vie ont également été développées pour l’inconti-nence anale (FIQL) [10], la constipation [11] et la dyschésie[12]. Il existe des versions françaises validées de ces échel-les, mais là encore, elles ont été conçues en l’absence deprolapsus génital.

À ce jour, il n’existe que deux questionnaires validés etpubliés concernant l’évaluation des symptômes et de laqualité de vie dans le prolapsus génito-urinaire, le pelvicfloor distress inventory (PFDI) et le pelvic floor impactquestionnaire (PFIQ). Ces questionnaires développés parBarber et al. et publiés en 2001 sont validés en anglais[13]. Ce sont des autoquestionnaires que la patiente doitremplir sans l’aide du praticien. Des versions courtes(PFDI-20 et PFIQ-7), développées à partir des versions lon-gues, ont été depuis validées en anglais [14].

Nous avons réalisé, en collaboration avec le Dr M. Bar-ber, le Mapi Research Institute et les laboratoires Coloplast,la validation linguistique en français de ces versions cour-tes. Cet article résume la méthodologie de validation lin-guistique et propose l’intégralité du questionnaire sur lestroubles de la statique pelvienne — version courte (PFDI-20) — et du questionnaire sur l’impact des troubles de lastatique pelvienne — version courte (PFIQ-7) —, ainsi queles grilles de calcul de scores respectives.

Matériel et méthodes

L’objectif du processus de validation linguistique étaitd’obtenir une traduction du questionnaire original qui soità la fois conceptuellement équivalente et facilement com-préhensible par les patientes en France. Afin de satisfaireces exigences, une méthodologie de traduction de renom-mée internationale et recommandée par Mapi Research Ins-titute (27, rue de la Villette, 69003 Lyon, France, www.mapi-research-inst.com) a été utilisée. Le processus com-plet de validation linguistique nécessite environ trois moisde travail. Cette validation linguistique a été sponsoriséepar les laboratoires Coloplast (les Jardins du Golf, 6 rue deRome, 93561 Rosny-sous-Bois cedex, France).

Analyse conceptuelle

Cette première étape correspondait à l’analyse des ques-tionnaires originaux avec leur auteur, afin de définir lesnotions sous-jacentes à chaque item. L’auteur est générale-ment impliqué tout au long du processus de validation lin-guistique, à chaque fois qu’une clarification est nécessaire.

Recrutement d’un consultant

Un consultant indépendant et anonyme a ensuite étérecruté par le Mapi Research Institute, afin de jouer lerôle de chef de projet et de coordination du processus devalidation linguistique.

Traduction forward (anglais–français)

Deux traductions en français ont été réalisées de manièreindépendante. La première traduction utilisée était dérivéede la version longue traduite et publiée antérieurement parles auteurs [15]. La seconde a été réalisée par un traduc-teur professionnel, dont la langue maternelle est la languecible et parlant couramment la langue source. Une versionréconciliée est ensuite produite après rapprochement deces deux traductions et un rapport de traduction est rédigéen anglais par le consultant. Ce rapport est ensuite analyséet discuté avec le Mapi Research Institute.

Traduction backward (du français vers l’anglais,rétrotraduction)

Une rétrotraduction de la version conciliée vers l’anglais aensuite été effectuée par un autre traducteur profession-nel, dont la langue maternelle est la langue source et par-lant couramment la langue cible. Cette nouvelle version aensuite été comparée à l’original et les différences obser-vées ont été analysées, afin de créer une autre version, ànouveau discutée entre le consultant et Mapi Research Ins-titute.

Revue clinicien

Deux cliniciens, experts dans le domaine de la statique pel-vienne, ont ensuite été désignés pour faire une revue desquestionnaires et donner leur avis sur les termes employés.

Tests de compréhension (cognitive debriefing)

La nouvelle version de la traduction, comprenant les modi-fications suggérées par les cliniciens, a ensuite été testéeauprès d’un échantillon de cinq patientes de langue mater-nelle française présentant différents troubles de la statiquepelvienne, opérés ou en attente d’intervention. Ces testsont été pratiqués au cours d’entretiens individuels de60 minutes, par une enquêtrice professionnelle indépen-dante, avec pour but de déterminer si les formulations uti-lisées étaient claires, acceptables et appropriées. Certainesmodifications suggérées par les patientes ont été retenues,à condition qu’elles ne modifient pas le concept des ques-tionnaires originaux. Une troisième version alors produite afait l’objet d’une nouvelle discussion entre le consultant etMapi Research Institute.

Relecture

La quatrième version traduite a été relue par le consultantet par un traducteur dont la langue maternelle est la languecible. Les commentaires du traducteur sont ensuite envoyés

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au consultant et discutés. La version finale de la traductionest alors créée.

Résultats

Les titres originaux des questionnaires ont été traduits enfrançais (questionnaire sur les troubles de la statique pel-vienne et questionnaire sur l’impact des troubles de la sta-tique pelvienne), mais les acronymes anglais (PFDI-20,PFIQ-7) doivent être conservés afin de permettre une iden-tification facile.

Les cinq patientes choisies pour les tests de compréhen-sion étaient les mêmes pour le PFDI-20 et pour le PFIQ-7.L’âge moyen était de 62,2 ans (44 à 73). Leur niveaud’éducation était majoritairement et volontairement faibleafin de s’assurer que les questionnaires pouvaient être

Figure 1 Questionnaire sur les troubles de la statique pelvienne —

Figure 1 Pelvic Floor Distress Inventory — short form (PFDI-20).

compris par le plus grand nombre. Les temps de remplissagemoyen relevés étaient de 9,2 minutes (3 à 19) pour le PFDI-20 et de 3,4 minutes (2 à 6) pour le PFIQ-7, soit un temps deremplissage moyen de 12,6 minutes (5 à 22) pour les deuxquestionnaires.

Questionnaire sur les troubles de la statiquepelvienne — version courte (PFDI-20)

Le PFDI-20 est un questionnaire sur les symptômes de prola-psus (Fig. 1). Il comporte 20 questions couvrant troiséchelles : les symptômes de prolapsus génital (POPDI-6,questions 1 à 6), les symptômes colo-recto-anaux (CRADI-8, questions 7 à 14) et les symptômes urinaires (UDI-6,questions 15 à 20). Peu de difficultés sont survenues dansle processus de validation. Il est apparu néanmoins que

version courte (PFDI-20).

Figure 1 (suite)

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Figure 1 (suite)

Questionnaires de qualité de vie et troubles de la statique pelvienne 743

R. de Tayrac et al.744

trois patientes sur cinq répondaient en termes de fréquenceplutôt que d’intensité de la gêne occasionnée. Toutes lesquestions utilisent le même format pour les choix deréponse, avec une note comprise entre 0 (la patiente neressent pas le symptôme) et 4 (la patiente ressent le symp-tôme et cela la gêne beaucoup). Pour chaque échelle, il estpossible d’obtenir une valeur chiffrée, en calculant la notemoyenne pour les questions auxquelles le patient a répondu(valeur entre 0 et 4), puis en multipliant cette note par 25pour obtenir le score pour l’échelle (compris entre 0 et100). Les réponses manquantes sont sans effet puisquel’on utilise uniquement les questions auxquelles le patienta répondu pour calculer la note moyenne (Fig. 2). Le scoretotal du PFDI-20 est obtenu en ajoutant les scores pourchaque échelle (compris entre 0 et 300).

Figure 2 Calcul du score pour le PFDI-20.Figure 2 PFDI-20 score calculation.

Questionnaire sur l’impact des troublesde la statique pelvienne — version courte (PFIQ-7)

Le PFIQ-7 est un questionnaire sur le retentissement socialdu prolapsus (Fig. 3). Il comporte sept questions et troiscolonnes. Pour chaque question, une réponse doit êtrecochée dans chacune des trois colonnes, correspondantaux trois échelles : impact des symptômes urinaires (UIQ-7, première colonne), impact des symptômes colo-recto-anaux (CRAIQ-7, deuxième colonne) et impact des symptô-mes de prolapsus génital (POPIQ-7, troisième colonne). Lefonctionnement du tableau a généralement été compris lorsdes tests de compréhension, mais deux patientes sur cinqont eu du mal à saisir la logique des colonnes et ontdemandé des explications. Toutes les questions utilisent le

Figure 3 Questionnaire sur l’impact des troubles de la statique pelvienne — version courte (PFIQ-7).Figure 3 Pelvic Floor Impact Questionnaire — short form (PFIQ-7).

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même format pour les choix de réponse, avec une notecomprise entre 0 (absence d’impact sur la qualité de vie)et 3 (impact important sur la qualité de vie). Pour chaqueéchelle, il est possible d’obtenir une valeur chiffrée, en cal-culant la note moyenne pour les questions auxquelles lepatient a répondu pour chaque échelle (valeur entre 0 et3), puis en multipliant cette note par 100/3 pour obtenirle score pour cette échelle (compris entre 0 et 100). Lesréponses manquantes sont sans effet puisque l’on utiliseuniquement les questions auxquelles le patient a répondupour calculer la note moyenne (Fig. 4). Le score total duPFIQ-7 est obtenu en ajoutant les scores pour chaqueéchelle (compris entre 0 et 300).

Discussion

Les troubles de la statique pelvienne retentissent sur laqualité de vie des patientes qui en souffrent [16], et leurprise en charge ne peut plus être réalisée à partir d’unesimple description anatomique. Il est actuellement devenuindispensable que nous utilisions des instruments de mesurespécifiques de ce retentissement pour être capable dequantifier la gêne fonctionnelle avant une intervention, demesurer objectivement le résultat de nos choix thérapeuti-ques [17] et d’évaluer nos pratiques, particulièrement,mais pas seulement, lorsque les résultats sont comparésentre plusieurs équipes ou dans le cadre d’essais thérapeu-

Figure 4 Calcul du score pour le PFIQ-7.Figure 4 PFIQ-7 score calculation.

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tiques. Le développement de questionnaires de qualité devie, prenant en compte tous les symptômes dans leurensemble chez une même patiente, est essentiel pourmieux comprendre les relations entre ces symptômes et letrouble anatomique, et pour pouvoir mieux répondre à lademande de la patiente.

Une étude révélait, il y a déjà quelques années, que lespatientes présentant un prolapsus génito-urinaire avaientgénéralement entre trois et quatre attentes, les principalesétant la correction des troubles urinaires et digestifs, lavolonté de retrouver des activités normales, d’améliorerleur santé globale et leur image de soi, ou encore leursrelations avec les autres, mais en aucun cas, la correctiondu trouble anatomique [18]. Une étude cas témoins récenteayant comparé la qualité de vie chez les femmes avec ousans prolapsus génital, à l’aide du SF-12 (short form healthsurvey) et du PFDI-20, a retrouvé que les femmes souffrant

de prolapsus avaient significativement moins confiance enelles (OR 4,7 ; IC 95 % 1,4–18 ; p = 0,02), se sentaientmoins attractives physiquement (OR 11 ; IC 95 % 2,9–51 ;p < 0,001) et sexuellement (OR 4,6 ; IC 95 % 1,4–17 ;p = 0,02), se sentaient moins féminines (OR 4 ; IC 95 %1,2–15 ; p = 0,03), avaient une moins bonne qualité de vie(p < 0,009) et une moins bonne image d’elles-mêmes [19].

Les deux questionnaires de Barber et al. [13], étudiant laqualité de vie en rapport avec le prolapsus, le Pelvic floordistress inventory (PFDI) et le pelvic floor impact question-naire (PFIQ), contiennent toutes les questions développéesdans l’IIQ (incontinence impact questionnaire) et l’UDI(urogenital distress inventory) [9], plus des questions spé-cifiques aux troubles de la statique pelvienne et aux trou-bles colo-ano-rectaux. Les auteurs avaient initialementtesté ces deux questionnaires chez 100 patientes souffrantde prolapsus symptomatique. Afin de vérifier la cohérence

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interne des réponses, toutes les patientes ont eu à remplirune seconde fois les deux questionnaires à domicile dans lessept jours après la consultation initiale. Parallèlement cespatientes ont bénéficié d’un interrogatoire standardisé surleurs symptômes et d’un examen clinique pour préciser lestade anatomique de leur prolapsus. Les réponses aux ques-tionnaires ont été ensuite corrélées aux interrogatoires etexamens cliniques de ces 100 patientes. L’âge moyen deleur population était de 56 ans ± 15, la parité moyenne de2 (0 à 5), le poids moyen de 78 kg ± 21, et 83 % d’entre ellesétaient de race blanche. Le temps de remplissage moyen del’ensemble des deux questionnaires (version longue) étaitde 23 minutes ± 11 (de 9 à 55 minutes). La cohérenceinterne du remplissage, c’est-à-dire le taux de réponsesidentiques lors de deux remplissages par la même patientedans les sept jours, a été de 87 % pour le PFDI et de 86 %pour le PFIQ. L’étude rigoureuse de la corrélation entre lessymptômes de prolapsus et les réponses aux questionnaires,a montré une corrélation de 88 % pour le PFDI et de 98 %pour le PFIQ. Il existait une corrélation significative entrel’inventaire des symptômes de prolapsus génital, le ques-tionnaire sur l’impact périnéal et le stade anatomique duprolapsus, ainsi qu’entre l’échelle de prolapsus antérieuret la dysurie, et l’échelle de prolapsus postérieur et ladyschésie. Il existait également une corrélation significa-tive entre l’inventaire des symptômes urinaires, le ques-tionnaire sur l’impact urinaire et la sévérité des symptômesurinaires associés au prolapsus, ainsi qu’entre l’échelle irri-tative et l’instabilité vésicale, l’échelle obstructive et ladysurie, et l’échelle d’effort et l’incontinence urinaired’effort. Enfin, il existait une corrélation significativeentre l’inventaire des symptômes colo-recto-anaux, lequestionnaire sur l’impact colo-recto-anal et la sévéritédes symptômes digestifs associés au prolapsus, ainsiqu’entre l’échelle d’incontinence et l’incontinence anale,et l’échelle d’obstruction et la dyschésie. En revanche, iln’existait pas de corrélation entre l’échelle de prolapsusrectal et l’existence d’un prolapsus rectal à l’examen cli-nique. Néanmoins, l’échelle de prolapsus rectal ne conte-nait que deux questions, et cette anomalie n’était repré-sentée que chez 4 % des patientes.

Le retentissement du prolapsus sur la sexualité despatientes n’est que succinctement abordé dans ces ques-tionnaires, et chez une patiente qui se plaint au premierplan de troubles sexuels, ce qui est rarement le cas en pra-tique, il pourrait s’avérer utile d’utiliser un questionnairespécifique, comme celui de Rogers et al. [20], le PISQ validéspécifiquement pour les prolapsus, dont la validation lin-guistique en français est en cours (forme courte : PISQ-12).

L’avantage de ces questionnaires pour la pratique est lasimplicité de leur interprétation, grâce au principe des sco-res chiffrés. Ces scores sont réalisés en quelques minutes parle report des réponses sur les différentes échelles. Ils per-mettent une évaluation simple et rapide des différentssymptômes et de leur retentissement, tout en prenant encompte en globalité les plaintes des patientes, puisquechaque groupe de symptômes, matérialisé par les différenteséchelles, rentre à part égale dans le score final. Enfin, mêmelorsqu’il existe des questions sans réponse, éventualité fré-quente avec l’utilisation d’autoquestionnaires, le calcul des

scores est également réalisable, puisqu’il repose sur lamoyenne des questions répondues pour chaque échelle. Deplus, comme il s’agit d’autoquestionnaires remplis par lapatiente elle-même, l’explication du bien-fondé et de laméthode de remplissage ne prendra que quelques minutesau praticien. La limite de ces questionnaires est qu’ils nesont pas utilisables chez des patientes ne lisant pas le fran-çais. Le principal inconvénient des versions courtes par rap-port aux versions longues est la simplification des échelles en« urinaire », « colo-recto-anale » et « génitale », et la sup-pression des sous-échelles (« obstruction », « effort »,« prolapsus antérieur », « prolapsus postérieur »…) parmanque de questions spécifiques.

Depuis leur publication initiale, ces questionnaires ontfait l’objet de plusieurs publications sur la faisabilité deleur utilisation en pratique. Dans une étude multicentriquefrançaise sur la chirurgie du prolapsus par voie vaginaleavec prothèse, nous avions retrouvé un taux de remplissagecorrect des questionnaires en pré- et postopératoire chez77,6 % des patientes (111/143) [21]. Barber et al. ont mon-tré, dans un essai randomisé comparant deux pessaires(n = 42) et dans une étude sur la chirurgie du prolapsus(n = 64), que le PFDI et le PFIQ étaient sensible au change-ment après traitement, avec cependant une meilleure sen-sibilité pour le PFDI [22].

Conclusion

Les troubles de la statique pelvienne regroupent des situa-tions parfois complexes et il est fondamental de pouvoir enexplorer toutes les facettes avant la prise en charge théra-peutique, surtout si la sanction est chirurgicale. Cela dansle but de tenter d’offrir une réponse la plus adaptée pos-sible à la demande de chaque patiente, qui n’est pas tou-jours exprimée spontanément. La relation de confianceavec la patiente, la multidisciplinarité, l’utilisation d’undossier clinique type et l’emploi de questionnaires validésde symptômes et de qualité de vie sont autant d’élémentsqui contribuent à l’amélioration de la prise en charge decette pathologie fréquente.

Le questionnaire sur les troubles de la statique pel-vienne (PFDI-20) et le questionnaire sur l’impact des trou-bles de la statique pelvienne (PFIQ-7) sont utilisables gra-tuitement, à condition de déclarer leur utilisation au MapiResearch Institute, et de laisser figurer la mention« Traduction française financée par les laboratoiresColoplast » en bas de page.

Remerciements

Nous remercions le Dr Matthew Barber (Cleveland Clinic,États-Unis) pour sa collaboration.

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