Le pèlerinage à Lourdes, la fin d'un cycle?

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Le pèlerinage à Lourdes, la fin d’un cycle? Lauren Moore Mémoire du master de Religions et Sociétés 2014 Université de Bordeaux Montaigne

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Le pèlerinage à Lourdes, la fin d’un cycle?

Lauren Moore Mémoire du master de Religions et Sociétés 2014

Université de Bordeaux Montaigne

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 2!

Remerciements Je tiens à exprimer toute ma reconnaissance à mon Directeur de mémoire Monsieur Jean-Pierre Moisset. Je le remercie de m’avoir encadrée, orientée, aidée et conseillée. Je remercie Tamara Galvan, qui a lu et relu mon mémoire et qui a travaillé mon français à l’écrit. Je la remercie pour son encouragement et son soutien durant ces derniers mois. Je remercie les services du Sanctuaire de Notre Dame de Lourdes, notamment Mylène Médaillon et David Torchala, pour avoir répondu à toutes mes questions et pour m’avoir fourni toutes les informations et statistiques qu’il me fallait pour ce mémoire. Enfin, je remercie toute ma famille, en Australie, en France ou ailleurs, qui m’ont écouté parler de Lourdes sans cesse pendant ces deux dernières années et qui m’ont soutenue par leur amitié et leur amour. À tous ces intervenants, je présente mes remerciements, mon respect et ma gratitude.

Table de matières !!!Introduction* ! 3*

* Sources!et!méthodologie! 5*

Première*Partie* La*fréquentation*du*pèlerinage*à*Lourdes* 8*

* Janvier! 10*

* Juin! 14*

* Août! 18*

* Comparaisons!du!nombre!de!communiants!:!Lourdes,!Fatima!&!Medjugorje!

21*

* La!nationalité!des!pèlerins!de!Lourdes! 23*

Deuxième*Partie* L’évolution*du*modèle*de*pèlerinage* 26*

* La!liminalité!:!définition!et!évolution! 26*

* Les!raisons!de!l’évolution!du!modèle!de!pèlerinage!

29*

* La!phase!préliminaire!:!un!voyage!de!séparation!

30*

* La!phase!liminaire!:!une!perte!définitive!de!spontanéité!

38*

* La!liminalité!:!une!phase!nécessairement!spontanée!

39*

* La!phase!postiliminaire!:!intégration,!profondeur!et!durée!de!la!liminalité!

49*

Troisième*Partie* La*régression*de*la*fréquentation*de*Lourdes*continueraGtGelle*?*

53*

* L’avenir!à!court!terme! 54*

* Les!Orientations!de!Mgr!Brouwet! 55*

* L’aménagement!de!la!Grotte! 60*

* Les!avis!des!touristes! 64*

* Politiques! 65*

* L’influence!papale!:!primordiale!au!pèlerinage!marial!

68*

* Un!chemin!alternatif!à!l’exemple!de!Rocamadour!

68*

Conclusion* ! 73*

Bibliographie* ! 76*

Annexes* ! 80*

!

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! 3!

Introduction

En février 1858, dès le premier jour où la jeune fille, Bernadette Soubirous, a déclaré

avoir vu une apparition d’une “dame en blanc”, la Grotte de Massabielle a attiré une

foule de pèlerins telle que la France n’en avait jamais connue auparavant. Depuis ces

premiers jours, la ville de Lourdes s’est adaptée à cette célébrité, en poursuivant les

transformations nécessaires à l’accueil des milliers, puis des millions de pèlerins qui y

viennent chaque année.

Contrairement aux autres lieux sacrés proches, comme par exemple les grottes de

Betharram ou le sanctuaire de Garaison, Lourdes surpassa rapidement sa renommée

locale et gagna de l’intérêt national: « Lourdes se distingue aussi de lieux de

pèlerinage plus anciens et plus traditionnels en ceci qu’elle cesse, vers la fin des

années 1860, d’être un lieu de culte local pour acquérir une dimension nationale. »1

Cette dimension est due à plusieurs facteurs dont la publicité faite autour des

expériences visionnaires de Bernadette Soubirous. En effet, la population, les

autorités et la presse ont pu les constater, donc elles ne restèrent pas dans le domaine

privé. À cela s’ajoute l’accès facilité par l’ouverture de la voie ferrée en 1866, et la

création officielle du pèlerinage national et de l’Association de Notre-Dame du Salut

en 1873.2

“Lourdes occupe, dans l’histoire des apparitions mariales, une place particulière

qu’elle doit, en partie à son succès.”3 La fréquentation des sanctuaires n’a cessé

d’augmenter, avec quelques baisses dans les années 1950 et début 1980 ainsi que des

« pauses » pendant les grandes guerres.4

Tout au long de cette augmentation, la paroisse, le diocèse, et ensuite, les services du

Sanctuaire ont travaillé pour transformer cette simple grotte sur le Gave en un lieu

capable de recevoir aujourd’hui jusqu’à six millions de personnes par an. Et

1ALBERT-LLORCA, M., « Les Apparitions et leur histoire », Archives de Sciences Sociaux des Religions, 2001, 116. 59. 2ALBERT-LLORCA, M., « Les Apparitions et leur histoire », 63. 3 ALBERT-LLORCA, M, « Les Apparitions et leur histoire », 56. 4 Voir figure 20.

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! 4!

récemment même, à l’aube de la crise économique mondiale, des pèlerins

débarquaient en masse à Lourdes pour la venue du pape Benoit XVI afin de célébrer

les 150 ans des premières apparitions. Plus de 9 millions de personnes ont alors

traversé la Grotte de Massabielle en 2008.

"Notre mission est de veiller à ce que tous ceux qui viennent au Sanctuaire se

laissent toucher devant la Grotte par l'amour inconditionnel de Jésus."

- Mgr Brouwet dans sa publication "Au service de la joie des convives", 11 février

2014.

La mission des Sanctuaires part du principe que les pèlerins viennent, mais que faire

s’ils ne viennent plus? Victor et Edith Turner dans Image and Pilgrimage in

Christian Culture ont étudié l’évolution et le fonctionnement des lieux de pèlerinage,

et notamment la relation entre “l’organisme” (le lieu sacré) et son environnement (les

structures profanes qui soutiennent l’organisme).5 Selon leur étude, le pèlerinage à

Lourdes forme un organisme vivant né en 1858 mais dont l’espérance de vie demeure

inconnue. Le pèlerinage à Lourdes, est-il éternel ou se trouve-t-il à un stade

d’évolution toute particulière de sa vie?

Les autorités de la ville de Lourdes ont constaté une diminution du nombre de pèlerins

en 2012. En 2013, une nouvelle baisse était annoncée : pour la première fois depuis

l’an 2000, moins de six millions de pèlerins étaient venus. Cependant, la question à

poser est la suivante: « cette baisse, était-elle prévisible depuis longtemps ? »

Depuis 2004, le Sanctuaire de Lourdes à connu un nombre important d'événements

exceptionnels qui ont attiré une grande foule de pèlerins par rapport à d'autres années.

En 2004, la fête des 150 ans du dogme de l'Immaculée Conception a été célébrée.

En 2008, ce fut les 150 ans depuis les apparitions et en 2011 les Journées Mondiales

de la Jeunesse à Madrid ont permis des milliers de jeunes de faire une étape à

5 WEIBEL, Deane, « The Virgin Mary Versus the Monkeys », Religious innovation in the global age: essays on the construction of spirituality. North Carolina, McFarland Publishing, 2005, 247-257.

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! 5!

Lourdes.6 Mais à part ces événements, cette dernière décennie n'a pas connu

d’augmentation de la fréquentation de pèlerins.

Quelle est la cause de cette stagnation, voire de cette baisse de fréquentation?

Plusieurs articles et documents ont été publiés depuis 2012 pour en faire notification

et l’expliquer. Le Sanctuaire, l'office de tourisme, ainsi que les journalistes se sont

tous posés cette même question. Sans exception, ils l’attribuent tous à la crise

économique, citant aussi la nécessité d’aménagements plus adaptés à l’accueil des

pèlerins (par exemple, un aménagement ferroviaire réservé aux pèlerins). Or, ces

analyses semblent trop simplifiées, et ne prennent pas en considération les

permutations de croyances et leurs pratiques, ni l’évolution du modèle de pèlerinages.

En réaction à cette diminution, la ville de Lourdes vise à assurer son avenir. Aux

travers des élections municipales, chacun des candidats, des unions de commerçants

et aussi du Diocèse de Tarbes-Lourdes proposent leur projet pour l’avenir des

pèlerinages. Ces projets révèlent leur perception du problème, ainsi que les solutions

proposées pour redynamiser la fréquentation.

Dans un premier temps seront examinés la nature de la baisse de fréquentation de

Lourdes durant cette dernière décennie, et notamment son état actuel. Dans un

deuxième temps nous analyserons la fréquentation selon les différents cycles de

pèlerinage et nous la comparerons à d’autres lieux de pèlerinage. Enfin cette étude

prendra en considération les efforts mis en place par le Sanctuaire et la municipalité

de Lourdes afin de développer les pèlerinages dans l’avenir.

Sources et méthodologie

Les statistiques seront non seulement analysées d’après les estimations faites par le

Sanctuaire, mais aussi d’après les chiffres de l’Office de Tourisme. Les définitions

données aux termes diffèrent également car, alors que le Sanctuaire cherche à

dénombrer les pèlerins, l’Office de Tourisme compte les touristes qui viennent à

Lourdes, et de ce fait leurs statistiques sont plus larges.

6 La proximité de Lourdes de Madrid a encouragé plusieurs groupes de jeunes à aller à Madrid pour les JMJ en s’arrêtant à Lourdes.

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! 6!

Le Sanctuaire a trois moyens de comptabilisation: le nombre de personnes qui passe à

l’entrée de la Grotte (ce qui suppose qu’un pèlerin y passera forcement), le nombre de

communiants aux messes (comptabilisation des hosties servies) et le nombre de

cierges vendus. Cette étude prendra en compte les chiffres bruts de certains mois de

l’année à l’entrée de la Grotte au lieu de l’estimation annuelle. L’importance de

l’analyse par mois est d’éviter de fausser les chiffres annuels en prenant en compte les

événementiels qui gonflent les chiffres momentanément. Les chiffres comptabilisés

d’après les cierges n’ont pas été suffisamment détaillés pour pouvoir en retirer des

conclusions.

Les statistiques de vente de cierges ne donnent pas une vision de la fréquentation,

mais peuvent être un moyen d’analyser l’évolution du modèle de pèlerinage car elles

sont liées à la spiritualité et non au nombre de visiteurs. Les différences de vente de

grands cierges et de petits cierges sont notamment le moyen d’évaluer l’évolution du

pèlerinage en groupe et celui, de l’individu.

Les services du Sanctuaire et l’Office de Tourisme ont aussi publié plusieurs

documents sur la fréquentation des pèlerins, ainsi que sur les finances des Sanctuaires

et de la ville. La plupart de ces documents datent de 2011 et 2012. Plusieurs

rapports, suite aux inondations d’octobre 2012 et juin 2013, remettent en question la

stabilité financière des Sanctuaires.

La publication la plus importante à notre étude sur l’avenir des pèlerinages est celle de

Mgr Brouwet dans sa publication intitulée les Orientations de Lourdes, publiée le 11

février 2014. Après un travail de deux ans effectué par un conseil, l’état actuel des

pèlerinages y est constaté, et les projets et changements prévus pour le Sanctuaire y

sont aussi présentés. Ce document propose des grandes transformations et permet de

mieux comprendre la place donnée aux pèlerinages dans l’Eglise Catholique.

Pour cette étude, il fut aussi pertinent d’engager une discussion avec les commerçants

et les pèlerins. Ce fut la plus grande difficulté de la recherche, car à l’heure actuelle,

la ville de Lourdes est en période dite de « hors-saison ». Plusieurs boutiques et

hôtels sont fermés, et encore plus cette année puis qu’ils effectuent des travaux suite

aux inondations.

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! 7!

Plusieurs entretiens ont donc été prévus pour cette étude avec des membres de

l’Union des commerçants du Boulevard de la Grotte, des membres de l’Union des

commerces-souvenirs lourdais, et d’autres encore avec David Torchala, responsable

de la communication et Mylène Médaillon, adjointe responsables des pèlerinages au

Sanctuaire, ainsi que Marlene Watkins, fondatrice et Pamela Ryan directrice des

pèlerinages de North American Lourdes Volunteers, et Mgr Brouwet, évêque de

Tarbes-Lourdes.

2014 semble être un tournant important pour la ville de Lourdes. Les candidats pour

les élections municipales parlaient d’une ville qui “se meurt” 7 , mais jusqu’à

maintenant ce déclin se cachait derrière l’afflux lors des grands événementiels. Or, il

semblerait qu’en réalité il s’agisse d’un flux décroissant depuis une dizaine d’années

plutôt qu’un déclin soudain depuis 2012. Est-ce que les pèlerinages se trouvent à la

fin d’un cycle? Qu’en serait-il de l’avenir de Lourdes?

En ce qui concerne les modèles et les cycles de pèlerinages, plusieurs œuvres sont

essentielles à cette étude. Image and Pilgrimage in Christian Culture de Victor et

Edith Turner proposent un cycle de vie pour un lieu de pèlerinage qu’ils ont adapté du

travail d’Arnold Van Gennep. Ce cycle a été critiqué par Deana Weibl dans son

article, The Virgin Mary versus the Monkeys, où elle démontre le non-fonctionnement

du modèle de Turner à Rocamadour. Christian Pilgrimage in Modern Western

Europe de Mary Lee Nolan et Sidney Nolan sert aussi de socle pour comprendre

l’installation et l’évolution d’un lieu de pèlerinage.

7 Jean-Pierre Artiganave, maire émérite de Lourdes dans l’article EGRE Pascale : « Municipales à Lourdes: prières pour un réveil économique », Le Parisien, 17/01/2014. http://www.leparisien.fr/municipales-2014/en-regions/municipales-a-lourdes-prieres-pour-un-reveil-economique-17-01-2014-3502841.php

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! 8!

Première partie : La fréquentation du pèlerinage à Lourdes.

Depuis 1858, une certaine méfiance à l’égard des statistiques des taux de

fréquentation de la grotte de Massabielle s’est installée. Les journalistes voulant

gonfler les chiffres, et les autorités minimiser l’influence de Bernadette, chacun a sa

manière d’estimer le nombre de pèlerins.

Aujourd’hui, plus de 150 ans plus tard, les chiffres sont encore basés sur des

estimations, bien plus précises soit, mais tout de même empreintes de suffisamment

de controverses pour nécessiter une nouvelle interprétation et un travail

d’approfondissement.

Chaque année, le service du Sanctuaire de Lourdes publie ses estimations, souvent par

un communiqué annuel intitulé « Bilan et Perspectives ». Ce communiqué contient

les chiffres qui détaillent les groupes de pèlerins, leurs origines et les constats sur les

modes de fréquentation. Le chiffre le plus utilisé par les journalistes est l’estimation

des taux de fréquentation, souvent arrondie par la presse à six millions de pèlerins par

an.

Ce document préconisait habituellement une croissance annuelle et un prévisionnel

en hausse ainsi que quelques améliorations à envisager pour l’année à venir. Or, ces

deux dernières années, le service du Sanctuaire a dû annoncer une baisse des taux de

fréquentation. En 2012, une baisse de -4,25% par rapport à 2011 a suscité plusieurs

articles de presse, mais ce n’est que depuis celle de 2013, annoncée discrètement

après la publication des Orientations de Monseigneur Brouwet, que son importance a

été soulevée.

Pour la première fois depuis l’an 2000, le nombre de pèlerins estimé est en dessous

des six millions : 5 833 595. 8 Cette baisse symbolique souligne aussi que celle de

2012 ne fut pas une exception, nécessitant donc une étude plus approfondie.

8!SERVICES!DU!SANCTUAIRE!NOTRE!DAME!DE!LOURDES,!Dossier'de'bilan'2013.'(Annexe!1)!

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! 9!

Aucun évènement en 2012 ne justifie cette baisse, mais, depuis 2004, plusieurs

événements contribuent à une hausse de fréquentation éphémère :

• 2004!:!150!ans!du!dogme!de!l’Immaculée!Conception!et!une!visite!du!Pape!

Jean!Paul!II.!

• 2008!:!150!ans!des!apparitions!de! la!Vierge!par!Bernadette!Soubirous!et!

une!visite!du!Pape!Benoît!XVI.!

• 2011!:! les! Journées!Mondiales!de! la! Jeunesse! (JMJ)!ont! lieu!à!Madrid,! ce!

qui!suscite!le!passage!à!Lourdes!de!jeunes,!avant!et!après!l’événement.!

Ces années clés pour le Sanctuaire créent des pics de fréquentation exceptionnels,

pouvant cacher la réalité de ces dernières dix années. La Figure 1 montre la courbe

des estimations des taux de fréquentation avec ces années exceptionnelles comprises

tandis que la deuxième n’en tient pas compte. Ces courbes juxtaposées mettent en

évidence que, sans ces événementiels, le pèlerinage de Lourdes n’a pas connu

d’augmentation significative depuis 2005.

Figure 1. Source : Les services du Sanctuaire (Annexe 2)

Pour confirmer ce constat, il convient d’observer les données brutes, et non seulement

les estimations, ainsi que les statistiques de l’office de tourisme. Pour ce projet de

recherche, le service du Sanctuaire a donné accès à la quasi-totalité de leurs

statistiques de 2004 à 2013 : le dénombrement à l’entrée de la grotte, la quantité des

5500000!

6000000!

6500000!

7000000!

7500000!

8000000!

8500000!

9000000!

9500000!

2002! 2004! 2006! 2008! 2010! 2012! 2014!

Estimation)de)fréquentation)annuelle)

Avec!évenements!exceptionnels!

Sans!évenements!exceptionnels!

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! 10!

cierges vendues, et tous les détails sur chaque groupe organisé, et leurs nationalités.

Pour cette étude, l’office de tourisme a également partagé ses statistiques mensuelles

des nuitées et l’évolution de la capacité des hôtels depuis 2009 avec enthousiasme.

Afin de mieux analyser les données brutes, trois mois ont été choisi : janvier, juin et

août.

Figure 2. Source : Documents du Sanctuaire (Annexe 3)

Janvier

Le mois de janvier est un mois stable, sans fêtes ou événements particuliers pouvant

attirer un nombre de pèlerins plus élevé. De plus, il est situé en période de hors saison

des pèlerinages. Le mois suit directement les vacances de noël, ce qui fait de janvier

un mois sans vacances scolaires pour la plupart des pays européens.

La Figure 2 montre le nombre de communiants pour tous les mois de janvier depuis

2003. Ces chiffres sont précisément basés sur le nombre d’hosties distribuées lors des

messes. Le nombre de communiants en 2012 est légèrement en dessous de celui de

2003. Les augmentations en janvier 2004 et 2008, ainsi qu’en 2005 peuvent être

expliquées respectivement par les anniversaires des apparitions, et les 150 ans du

dogme l’Immaculée Conception fêté le 8 décembre 2004. Même sans fêtes

particulières au mois de janvier, ces années ont attiré une fréquentation plus élevée en

amont ou en aval de l’événementiel.

6000!

6500!

7000!

7500!

8000!

8500!

9000!

2003!2004!2005!2006! 2007!2008! 2009!2010!2011!2012!

Nombre)de)communiants)en)janvier)

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! 11!

Au contraire, en 2009, suite à la grande fête des 150 ans des apparitions en 2008, une

baisse de fréquentation n’est pas étonnant suite au déluge important de pèlerins venu

en 2008 (Soit 9 033 773 selon les estimations) surtout en janvier. L'INSEE explique

que le jubilé et la crise économique cumulés en 2008 contribuent à la baisse de 2009:

« En 2009, l'activité hôtelière en Midi- Pyrénées est en net repli. C'est d'abord

le contrecoup du Jubilé à Lourdes, qui avait dopé exceptionnellement l'année

2008. C'est ensuite le contexte de la crise économique, qui pèse

particulièrement sur la fréquentation étrangère. Après quatre années de baisse,

la fréquentation des campings de Midi-Pyrénées repart à la hausse en 2009.

Mais les touristes réduisent la durée de leur séjour en moyenne d'une demi-

journée. »9

La durée du séjour est très importante pour l’interprétation du nombre des

communiants. Car, par exemple un pèlerin, qui passe trois jours à Lourdes, pourrait

assister à plusieurs messes et donc être compté plusieurs fois.

Pour cette étude, l’office de tourisme de Lourdes a fourni ses chiffres hôteliers

mensuels pour 2008, 2009 et 2010. Entre 2008 et 2009, ces statistiques montrent que

la durée moyenne d’un séjour à Lourdes en janvier a baissé de 1,72 nuits à 1,66 nuits,

avant d’augmenter à 1,8 nuits en 2010.10 Cette différence est suffisamment peu

significative et la durée assez courte pour nous permettre de supposer que l’évolution

de la fréquentation des communiants à la messe a peu évolué.

Les comptages à la Grotte évitent en principe la possibilité de compter le même

pèlerin deux fois, car les comptages ne sont effectués qu’une fois par mois, lors de

dates choisies par les services du Sanctuaire. Les services nomment des jours qui

seront probablement représentatifs du mois. Les services ne choisissent pas par

exemple le 15 août, car ce n’est pas un jour typique mais une fête religieuse. Les

9http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?reg_id=7&ref_id=16416&page=dossiers_etudes/dos_annuels_mp/annee_economique_2009/hotellerie_camping.htm,!consulté!3!avril!2014.!10!INSEE!Hotels!2010.xls!(voir!annexe!4)!

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! 12!

services du Sanctuaire transmettent ces dates à la sécurité qui compte, pendant 24

heures, le nombre de personnes qui passent à la Grotte.

Figure 3. Source : Documents fournis par les services du Sanctuaire (Annexe 5)

La Figure 3 montre les passages à la grotte pour une période de 24 heures en janvier

de 2004 à 2011. Une des difficultés de cette étude fut le manque de chiffres

importants. En 2012, la première année où le Sanctuaire annonce une baisse d’après

ses estimations, les chiffres furent erronés. Les chiffres sur plusieurs mois de 2012

furent jusqu’à 4 fois plus élevés qu’en 2008. Le comptage pour le mois de janvier,

par exemple, n’a jamais dépassé les mille, mais en 2012 le comptage fut de 3075. Les

services du Sanctuaire ont été avertis. Ils pensent aussi que ces chiffres sont

effectivement erronés, mais ils n’ont pas pu expliquer pourquoi. Plusieurs études ont

été effectuées pour vérifier que les comptages n’aient pas été doublé, qu’il n’y ait pas

eu de fautes de frappe (par exemple, si le chiffre était 3555, un 5 pourrait être

supprimé, supposant une faute de frappe), mais aucune explication n’a été trouvée.

Toutes les statistiques pour 2012 sont donc inutilisables pour cette étude. Les

comptages de 3 mois en 2013 : janvier, mars et juin manquent aussi.

Mais en réalité les statistiques de 2012 et 2013 ne changeront pas le constat de cette

étude. Le Sanctuaire confirme une baisse en 2012 et en 2013. La détermination de la

durée de cette baisse est plus essentielle.

Depuis 2008, les comptages de janvier suggèrent non seulement une baisse, mais

également une tendance similaire depuis 2004. Le dénombrement de communiants en

0!

200!

400!

600!

800!

1000!

1200!

2004! 2005! 2006! 2007! 2008! 2009! 2010! 2011!

Comptages)à)la)Grotte)en)janvier)

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! 13!

janvier montre cinq années d’augmentation et quatre années de diminution.

Cependant, malgré les augmentations, les communiants ne sont pas plus nombreux, la

différence entre 2003 et 2012 n’étant pas significative.

Bien que le mois de janvier ait connu des baisses et des stagnations du nombre de

pèlerins depuis dix ans, la fréquentation a connu une augmentation intéressante.

Effectivement, depuis 2010 le nombre de pèlerins venant en groupes organisés n’a

cessé d’augmenter, jusqu’en janvier 2014. (Voir figure 4) Une explication de la

baisse de 2014 pourrait être la fermeture de multiples hôtels pour cause de travaux

suite aux inondations de 2013. Multiples boutiques, hôtels et restaurants étaient

effectivement fermés pour des travaux en janvier 2014. Le magasin « Palais du

Rosaire » qui se situe à 64 Boulevard de la Grotte est un des magasins d’articles

religieux qui reste ouvert quasiment toute l’année, mais là, il était fermé. Trois mois

plus tard, lors d’une visite, le magasin n’était toujours pas ouvert.

JANVIER(( 2009( 2010( 2011( 2012( 2013( 2014(

Nombre'de'pèlerins' 422' 592' 631' 727' 740''' 665'

Variation' ;45,34%' 40,28%' 6,59%' 15,21%' 1,79%' ;10,14%'Figure 4. Nombre de pèlerins en groupes. Source : Documents fourni par les services du Sanctuaire (Annexe 6)

Cette augmentation est surprenante, car elle est à l’opposé des tendances annuelles.

Sans compter l’augmentation exceptionnelle de 2008, le nombre de pèlerins venant en

groupe diminue en moyenne de -6% par an depuis 2003. Par conséquent, il convient

d’en tirer deux explications hypothétiques : les pèlerinages en groupe effectuent

souvent un séjour à la montagne en même temps, ou que les pèlerins en groupes, ou

pèlerinage organisé, préfèrent venir pendant une période plus tranquille.

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! 14!

Boutique « Palais du Rosaire »Photo : Auteure 2012.

Juin

Le mois de juin se situe en pleine saison de pèlerinages, tout en étant un mois de mi-

saison car les vacances d’été sont déjà arrivées dans certains pays, et les taux de

fréquentation sont environ dix fois plus importants qu’au mois de janvier, mais

l’année scolaire (tout au moins en France et dans d’autres pays de l’Europe) n’est pas

encore finie. Les courbes sont donc plus régulières et représentatives des tendances

annuelles. (Voir Figure 1) Le pic de fréquentation en 2008 se voit plus clairement

qu’en janvier, parce que la saison de pèlerinages est officiellement ouverte depuis

quelques mois et le message des 150 ans des apparitions se répand. En revanche, il

n’existe pas de pic remarquable en 2004 pour les 150 ans du dogme de l’Immaculée

Conception.

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! 15!

Figure 5. Source : Documents du Sanctuaire (Annexe 3)

Si le nombre de communiants en juin montre la viabilité des chiffres basés sur le

comptage des hosties, la courbe des passages à la Grotte montre la nécessité

d’estimations. Les comptages ne montrent pas d’augmentation de taux de

fréquentation en 2008, mais une hausse en 2004 qui se démarque clairement par un

pic suivi d’une diminution en 2005.

Une interprétation de l’évolution des taux de fréquentation basée seulement sur les

passages à la grotte ne peut pas être fiable. Or, ces chiffres sont toujours de la plus

haute importance pour compter les touristes. Chaque personne, -pèlerin, touriste ou

bénévole- passera à la grotte lors de son séjour, mais il ne participera pas forcément à

la messe, et risque ainsi d’échapper au comptage des communiants.

Figure 6. Source : Documents fournis par les services du Sanctuaire (Annexe 5)

50000!

55000!

60000!

65000!

70000!

75000!

80000!

85000!

90000!

95000!

100000!

2003! 2004! 2005! 2006! 2007! 2008! 2009! 2010! 2011! 2012!

Nombre)de)communiants)en)juin)

0!

20000!

40000!

60000!

2003! 2004! 2005! 2006! 2007! 2008! 2009! 2010! 2011!

Comptages)à)la)Grotte)en)juin)

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 16!

Les comptages à la grotte pourraient aider à distinguer les pèlerins des touristes.

Par exemple, selon l’hypothèse qu’un pèlerin assisterait à une messe et un touriste

non, il conviendrait de diviser le nombre de communiants par le nombre de

passages à la grotte, ce qui pourrait donner une estimation grossière du

pourcentage de pèlerins et de touristes. Grâce aux statistiques fournies par le

Sanctuaire, elle serait une estimation grossière, puisque les comptages ne se font

qu’une fois par mois, et les hosties sont comptées tout le long du mois. Il convient

de diviser le nombre de communiants par une multiplication par 30 du comptage à

la grotte pour arriver aux estimations suivantes : (Figure 7)

'JUIN' Communiants( La(Grotte( %(

2004( 69738' 38352' 6,06%'

2005( 72455' 23372' 10,33%'

2006( 63321'' 24395' 8,65%'

2007( 62987' 17539' 11,97%'

2008( 96034' 28584' 11,20%'

2009( 65641' 39813' 5,50%'

2010( 64786' 36681' 5,89%'

2011( 67423' 11338' 19,82%'Figure 7. Estimation du pourcentage des passagers à la Grotte qui sont aussi communiants.

Source : Documents fournis par les Services du Sanctuaire (Annexes 3 et 5)

Une étude plus approfondie des statistiques et des comptages serait nécessaire afin de

proposer des estimations plus fiables. Cependant, le comptage des passages à la

grotte reste indispensable afin de comptabiliser toutes les personnes, qu’elles soient

pratiquantes, croyantes ou tout simplement curieuses.

juin( 2009( 2010( 2011( 2012(

Nombre'de'pèlerins'en'groupes' 25'421' 25'415' 28'434' 19'872'

Variation' ;44,48%' ;0,02%' 11,88%' ;30,11%'Figure 8. Nombre de pèlerins en groupes. Source : Documents fourni par les services du Sanctuaire (Annexe 6)

Le mois de juin montre une baisse plus proche de celle constatée par le Sanctuaire en

ce qui concerne les pèlerinages en groupes. Suite à la baisse considérable entre 2008

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 17!

et 2009, (-44,48%, voir Figure 5) 2011 connaît une augmentation, rapidement perdu

en 2012 qui annonce une diminution de -30,11%.

Lorsque les services du Sanctuaire parlent d’une baisse de fréquentation, notamment

des groupes de pèlerins, les chiffres du mois de juin en sont le meilleur exemple.

C’est seulement depuis 2012 que le Sanctuaire parle d’une baisse générale des taux

de fréquentation (depuis plus longtemps pour les groupes), mais les chiffres de juin

montrent qu’une augmentation stable n’a pas eu lieu depuis 2003. La baisse, une

quasi-stagnation, est légère. Or, la fréquentation de Lourdes n’est certainement pas en

période de croissance.

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 18!

Août

Figure 9. Source : Documents fournis par les services du Sanctuaire (Annexe 5)

Le troisième mois à examiner est celui qui connaît le taux le plus élevé de

fréquentation des pèlerins chaque année. Comme pour le mois de juin, le nombre de

communiants est très représentatif de l’estimation annuelle. Les mois d’août 2004 et

2011 devraient en être des exceptions puisque ils ont connu respectivement la venue

du pape Jean Paul II et les Journées Mondiales de la Jeunesse de Madrid, qui ont

attirés des jeunes en route vers, ou de retour de Madrid. Or, le premier événement ne

semble avoir aucun impact sur le nombre de communiants, la présence du pape ne

suscitant pas d’augmentation de participants aux messes. Pour vérifier si la présence

papale aurait eu un impact sur le nombre de communiants, il convient d’observer en

parallèle le mois de septembre 2008 avec la présence de Benoît XVI. Bien que le

nombre de communiants pour tous le mois de septembre 2008 soit plus élevé de

+20% par rapport à celui de 2007, ce n’est cependant pas plus élevé que les autres

mois de 2008.11

11!Bilan!de!communion!2001e2012.!!(Annexe!3)!

80000!

90000!

100000!

110000!

120000!

130000!

140000!

2003! 2004! 2005! 2006! 2007! 2008! 2009! 2010! 2011! 2012!

Nombre)de)communiants)en)août)

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 19!

aout( 2009( 2010( 2011( 2012( 2013(Nombre'de'pèlerins'en'groupes'(sauf'jeunes)' 33'779' 33'947' 32'973' 26'513' 23'809'''

Variance' ;40,99%' 0,50%' ;2,87%' ;19,59%' ;10,20%'Figure 10. Nombre de pèlerins en groupes. Source : Documents fournis par les services du Sanctuaire (Annexe 6)

Le deuxième événement en août 2011, les Journées Mondiales de la Jeunesse à

Madrid, a clairement suscité une augmentation du nombre de communiants, mais

aussi du nombre de jeunes. Les services du Sanctuaire recueillent des statistiques sur

les jeunes en particulier, et il est donc possible d’observer leur fréquentation. 13 003

jeunes, faisant partie de 165 groupes différents ont été accueillis par le Sanctuaire en

août 2010, or en août 2011, il a été comptabilisé 45 457 jeunes de 445 groupes.12 31

000 de ces jeunes sont considérées comme des pèlerins « exceptionnels », faisant

parties des groupes qui ne viennent pas régulièrement, comme par exemple dans le

cas des jeunes venant ou rentrant des JMJ.

Exceptionnellement donc le mois d’août 2011 a connu donc une fréquentation élevée,

soit une augmentation des groupes de +16,58% par rapport aux à 2010. Sans ces

chiffres dits exceptionnels, le mois d’août 2011 connait une baisse de -4,65% par

rapport à 2010.

En août 2006, le service de sécurité du Sanctuaire a effectué un comptage plus

approfondi durant une période de 24 heures à chacune de ses entrées : 65 680

personnes les ont franchies.13 Ce chiffre est utilisé dans les tableaux pour les

comptages, mais le bilan détaillé intitulé « l’Opération de comptage 29-30 août

2006 » ne signale que 24 500 passages à l’intérieur de la grotte, ce qui altère la courbe

et fait ressortir un taux de baisse important entre 2004 et 2007.14 (Voir Figure 11)

12!Comparatif'NBRE'DE'PELERINS'10?11.docx!(Annexe!8)!!!!13!Operation'comptage'29'août'2006'(Annexe!7)!14!Operation'comptage'29'août'2006'(Annexe!7)!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 20!

Figure 11. Source : Documents fourni par le service du Sanctuaire. (Annexes 5 et 7)

Les comptages effectués à l’entrée de la Grotte et ceux du nombre d’hosties

distribuées ainsi que la tenue des registres des groupes par les services du Sanctuaire

soulignent un taux de stagnation et de baisse. Les seuls chiffres étudiés qui présentent

une augmentation sont la participation des pèlerins aux groupes de janvier. Cette

anomalie fera partie de la discussion sur les changements des habitudes des pèlerins.

Par conséquent, la baisse de fréquentation à Lourdes serait bien plus importante que

celle annoncée par le Sanctuaire. Elle existerait donc depuis environ 10 ans, et non

seulement 2 ans. Il est intéressant de comparer une baisse aussi importante aux taux

de fréquentation des autres lieux de pèlerinage.

Pèlerinage militaire 2013. Photo : L’auteure

0!

10000!

20000!

30000!

40000!

50000!

60000!

70000!

2003! 2004! 2005! 2006! 2007! 2008! 2009! 2010! 2011! 2012! 2013!

Comptages)à)la)Grotte)en)août))(avec)amendements))

août!

août!(amendé)!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 21!

Comparaisons du nombre de communiants : Lourdes, Fatima & Medjugorje

Pour comparer la fréquentation de plusieurs lieux de pèlerinage, les statistiques sur les

communiants servent de moyen de comptage le plus utilisé, le plus précis et le plus

universel.

Figure 13 : Source : Bilan de communion 2012. (Annexe 3)

Figure 14 : Source : Medjugorje Web « Statistics for 1984 – 2012 », http://www.medjugorje.org/stats.htm

500000!

600000!

700000!

800000!

900000!

2005! 2006! 2007! 2008! 2009! 2010! 2011! 2012!

Nombre)de)communiants)par)an)à)Lourdes)

0!500000!1000000!1500000!2000000!2500000!

Nombre)de)communiants)par)an)à)Medjugorje)

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 22!

Figure 15 : Sources : Sanctuaire de Fatima, « Dados estatísticos de 2013 »15

Les taux de fréquentation de Lourdes et Fatima ont des tendances similaires. Chaque

année de pic est suivie d’une stagnation ou d’une baisse légère. Chaque lieu a connu

une baisse en 2012, -5% de baisse pour Fatima, -11% pour Medjugorje et -8% pour

Lourdes. Fatima et Medjugorje ont enregistré une hausse en 2013 qui signale que

2012 aurait été peut-être une année de baisse exceptionnelle et unique.

Malheureusement, le nombre de communiants en 2013 n’a pas été disponible au

moment de cette étude, mais selon les autres chiffres de fréquentation disponibles, une

baisse en nombre de communiants est probable.16

Ceci dit, la différence la plus remarquable est la croissance de Medjugorje. Nous

aborderons les raisons de cette croissance dans la deuxième partie de cet ouvrage.

L’autre pèlerinage qui y sera également analysé est celui de Saint Jacques de

Compostelle qui connaît une croissance encore plus importante que Medjugorje.

Cependant celle-ci est difficile à comparer aux autres lieux de pèlerinage parce que

les chiffres sont pris sur le chemin et non à l’arrivée. Aucune statistique sur le

nombre de communiants à la cathédrale de Saint Jacques de Compostelle n’a été

trouvée. Mais sur le chemin, la hausse de fréquentation est irréfutable : (Figure 16)

15!SANCTUAIRE!DE!FATIMA,'Dados&estatísticos&de&2013,'http://www.santuarioefatima.pt/files/60612_apresentacao_2013_52f24baf574a7.pdf,!téléchargé!le!3!avril!2014.!!16!Voir!figure!16!

3500000!

4000000!

4500000!

5000000!

2005!2006!2007!2008!2009!2010!2011!2012!2013!

Nombre)de)communiants)par)an)à)Fatima)

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 23!

Figure 16. Source : BUREAU D’ACCUEIL DES PELERINS DE SAINT-JACQUES-DE-COMPOSTELLE, Statistics,

http://peregrinossantiago.es/eng/pilgrims-office/statistics

La nationalité des pèlerins de Lourdes

Grâce au communiqué de presse détaillé sur la baisse des taux de fréquentation en

2011, le Sanctuaire a signalé les pays et les régions du monde dont le nombre de

pèlerins sont en baisse ou en hausse.17 Ces tendances montrent que les pèlerins

traversent des distances plus grandes pour accéder au lieu. Ceux du Proche Orient et

de l’Amérique du Sud sont en croissance importante et régulière depuis la baisse

commune à tous en 2009. Les pays dont la fréquentation est en baisse et qui inquiète

le Sanctuaire sont : l’Italie, la Belgique, l’Espagne et la France.18 Ce constat est

primordial car de ces quatre pays sont issus le plus grand nombre de pèlerins. La

Suisse et la Grande Bretagne sont les seuls pays en Europe à avoir connu une

croissance depuis 2009.

Curieusement, la fréquentation des groupes venant de l’Afrique a connu une forte

croissance depuis 2009, mais en 2008 une baisse importante et exceptionnelle.

Aucune explication n’a été trouvée pour expliquer une telle baisse.

17!Voir!annexe!9.!18!Voir!annexe!9.!

0!

50000!

100000!

150000!

200000!

250000!

300000!

2004! 2005! 2006! 2007! 2008! 2009! 2010! 2011! 2012! 2013!

La)fréquentation)des)chemins)de))St)Jacques)de)Compostelle)

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 24!

Figure 17. Source : Les services du Sanctuaire. (Annexe 10)

Figure 18. Source : Les services du Sanctuaire. (Annexe 10)

Durant la dernière décennie, les taux de fréquentation de Lourdes ont cessé

d’augmenter. Certaines statistiques semblent montrer une stagnation, d’autres une

baisse. Comparée à d’autres lieux, la fréquentation de Lourdes chute tout comme

celle de Fatima, mais celles de Saint Jacques de Compostelle et Medjugorje sont en

hausse importante et stable.

Le constat le plus inquiétant pour le Sanctuaire de Lourdes est ce grand départ des

Européens. La hausse de pèlerins venant d’ Amérique du Sud et du Proche-Orient,

invite à se demander si ces régions vont compenser les taux de fréquentation

européens en baisse. Ces tendances et évolutions peuvent être expliquées par

l’analyse du modèle de pèlerinage.

0!

500!

1000!

1500!

2000!

2003! 2004! 2005! 2006! 2007! 2008! 2009! 2010! 2011! 2012! 2013!

Pèlerins)en)groupe)venant)du)PROCHE)ORIENT)

0!

2000!

4000!

6000!

8000!

2003! 2004! 2005! 2006! 2007! 2008! 2009! 2010! 2011! 2012! 2013!

Pèlerins)en)groupe)venant)de)l'AMERIQUE)DU)SUD)

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 25!

Des Africaines en pèlerinage à Lourdes. Photo : l’auteure, 2008.

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 26!

Deuxième partie : L’évolution du modèle de pèlerinage

Pour identifier l’évolution d’un modèle de pèlerinage, il faut le définir à un moment

antérieur à celui de la baisse de fréquentation du lieu.

La liminalité : définition et évolution

Turner et Turner (1978) comparent les pèlerinages effectués dans les grandes

religions aux rites d’initiation des religions tribales, citant le modèle d’Arnold Van

Gennep composé de trois parties: préliminaire (séparation), liminaire (ou

marginalisation) et postiliminaire (agrégation).19 Dans le contexte tribal, un initiant se

sépare de son quotidien, passe une période de confinement transitoire, avant de

s’agréger de nouveau à sa tribu, mais dans son état renouvelé ou transformé. Cette

initiation peut exiger plusieurs rites de passage puisque « tout changement dans la

situation d’un individu y comporte des actions et des réactions entre le profane et le

sacré. »20 La phase liminaire étant centrale, l’objectif de ces rites est de « faire passer

l’individu d’une situation déterminée à une autre situation tout aussi déterminée. »21

La phase préliminaire et tous ses rites servent ainsi à préparer la marginalisation,

c’est-à-dire la phase liminaire. Et puis la phase liminaire dépend également la phase

postiliminaire et ses rites.22

Néanmoins, dans ce modèle déjà proposé par Van Gennep en 1908, la phase liminaire

ne s’effectue pas sans que l’initiant soit d’abord passé par une séparation. La phase

préliminaire est indispensable à la liminalité. Dans le contexte d’une tribu, l’initiant

doit se détacher de son identité ou sa place dans la société pour pouvoir s’en procurer

une nouvelle. Dans certaines tribus, australiennes par exemple, un garçon est écarté

de sa mère et de ses sœurs pour devenir un homme. « Il doit abandonner tous les jeux

et tous les sports de son enfance, en même temps que se brisent les anciens liens

19!VAN!GENNEP,!Arnold.!Rites'de'passage,'Paris,!Librairie!Critique,!1909.!p14.!20!VAN!GENNEP,!Arnold.!Rites'de'passage,'p!3.!21!VAN!GENNEP,!Arnold.!Rites'de'passage,'p!4.!22!VAN!GENNEP,!Arnold.!Rites'de'passage,'p!27.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 27!

domestiques entre lui et sa mère ou ses sœurs. »23 Au moment d’être séparé de sa

mère et avant d’être rattaché aux hommes, le garçon est marginalisé. La phase

liminaire est assimilée à une phase d’« entre-deux » où l’initiant n’a ni son identité du

passé, ni celle du futur. Si cette phase se vit pendant un certain temps et avec d’autres

personnes, son statut dans la société n’a aucune valeur, et il y développe une

camaraderie et une égalité que les Turner appellent communitas.24

Alors que Van Gennep constate ces phases dans les rites des tribus, Victor et Edith

Turner en 1969 recherchent cette liminalité dans les religions historiques, et l’histoire,

notamment la religion catholique.25 La difficulté constatée au sein de l’Eglise

Catholique est le manque de cycles comprenant toutes les phases : préliminaire,

liminaire et postiliminaire. Dans l’Eglise, la consécration à la vie monastique est un

des seuls exemples où les adeptes ont choisi de se séparer de leur identité et leur

statut social. Seulement, cette séparation sociale est définitive, et par conséquent, il

n’existe pas de phase postiliminaire d’agrégation nouvelle dans la société, mais à une

toute autre communauté.

Le pèlerinage paraît être le seul exemple de véritable liminalité pour Victor et Edith

Turner. Ils constatent que la nature du pèlerinage est anti-structurelle, un moyen de

libération de la structure de l’Eglise, sans y chercher le salut extra ecclésia :

« Pilgrimage then, offers liberation from profane social structures that are

symbiotic with a specific religious system, but they do this in order to

intensify the pilgrim’s attachment to his own religion, often in fanatical

opposition to other religions. »26

23!HOWITT,!cité!en!VAN!GENNEP,!Arnold.!Rites'de'passage,'Paris,!Librairie!Critique,!1909.!p108.!24 TURNER, Victor. « Liminality and Communitas », The Ritual Process : Structure and Anti-Structure, Chicago, Aldine Publishing, 1969, p361. 25 TURNER, Victor & TURNER, Edith, Image and Pilgrimage in Christian Culture, [Version numérique Kindle] New York, Columbia University Press, 1978. Location 25 de 3702. 26!TURNER, Victor & TURNER, Edith, Image and Pilgrimage in Christian Culture.!Location!265!de!3702.!!«!Un!pèlerinage!offre!donc!une!libération!des!structures!sociales!profanes!qui!sont!symbiotiques!avec!un!système!religieux!précis,!mais!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 28!

L’objectif du pèlerinage diffère d’un rite de passage de par son individualité. Un

pèlerinage n’est ni un rite imposé par une société, ni garantissant un statut social plus

élevé. Un pèlerinage est une quête personnelle, un mysticisme extériorisé, dont

l’efficacité n’est connue que du pèlerin. Son statut dans la société ne change pas

forcement, mais son identité religieuse s’affermi.

Le modèle de Van Gennep s’applique au pèlerinage de cette manière: le pèlerin se

sépare de son quotidien et de sa paroisse locale27 pour rejoindre un lieu où il vit une

transition de son état spirituel, ou physique dans le cas d’une guérison, et rentre chez

lui changé, ayant vécu une expérience semblable au rite de passage.

Cette expérience de changement d’état spirituel n’est pas garantie non plus. Pour le

pèlerin, la phase liminaire ne présente qu’une possibilité de changement. Il peut

effectivement passer par la phase liminaire, ne rien trouver dans sa quête spirituelle, et

retourner à son statut initial.28

Contrairement à l’étape où l’initiant se sépare de sa tribu, le pèlerin chrétien se sépare

de son quotidien : sa vie quotidienne, son identité dans la société et la structure, la

liturgie et le rythme de son église locale. Après cette séparation, le pèlerin passe à la

prochaine phase dite de transition que les Turner appellent « liminaire », parce qu’il

se trouve temporairement sur un seuil, séparé de toutes choses antérieures, vivant

ainsi une certaine ambiguïté et désorientation propice à un renouvellement ou une

transformation.

Pour développer leur modèle de pèlerinage, Turner et Turner se concentrent sur cette

étape transitoire qu’ils appellent la liminalité. Elle consiste en une déconstruction et

reconstruction de l’identité de l’initiant avant qu’il ne rentre dans la dernière phase

proposée par Van Gennep, l’incorporation où il s’approprie sa nouvelle identité ou

ils!l’exercent!ainsi!afin!d’intensifier!l’attachement!du!pèlerin!à!sa!propre!religion,!souvent!en!opposition!aux!autres!religions.!»!(Traduction!de!l’auteure)!!27!Sauf!en!cas!de!pèlerinage!diocésain.!28!TURNER, Victor & TURNER, Edith, Image and Pilgrimage in Christian Culture.!Location!197!de!3702!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 29!

statut, et réintègre sa vie lors son retour. Dans le sens où un pèlerinage diffère d’un

rite de passage, dans la plupart des cas, le changement de statut ou d’identité est

purement intérieur et ne suppose pas une amélioration du statut social. 29 Un

changement ou une transformation n’est pas non plus garanti. Faire un pèlerinage ne

fait que présenter ce potentiel et n’exige aucune révélation effective pour aboutir.

Néanmoins, la valeur d’un pèlerinage se jauge à sa capacité à transformer la vie du

pèlerin.

« L’attrait le plus essentiel de Lourdes, c’est aussi un besoin de régénération

du Salut, sous deux formes que le peuple ne dissocie pas, comme font les

intellectuels : conversions et guérisons s’articulent diversement selon

chacun. »30

Dans le langage lourdais, la « régénération » et le « Salut » sous la forme de

conversion et guérison remplacent le terme de « liminalité ». Lorsque ceci est

recherché, il procure une transformation telle que la conversion « au sens évangélique

de metanoia ».31 Metanoia, mot grec qui signifie « renversement de la pensée »,32 est

une transformation intérieure ayant un sens identique à celui donné aux rites de

passage. L’identité d’une personne est transformée lors la phase liminaire. Un

pèlerinage à Lourdes a pour objectif principal cette liminalité.

Les raisons de l’évolution du modèle de pèlerinage

La baisse de fréquentation des Sanctuaires de Lourdes soulève la question de

l’évolution du modèle de pèlerinage. Mgr Brouwet, au sein de l’Eglise Catholique33,

ainsi que les politiques qui se soucient de l’avenir économique de Lourdes, l’ont 29!TURNER, Victor & TURNER, Edith, Image and Pilgrimage in Christian Culture.!Location!333!de!3702!30!LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon, Chalet, 1976,!79.!31!LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon, Chalet, 1976,!79.!32!Définition!de!métanoia:!http://nlpepnlemetanoia.ch/www.nlpepnlemetanoia.ch/POURQUOI_METANOIA.html!,!Consulté!12!avril.!33!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations':'au'service'de'la'joie'des'convives,!Tarbes,!février!2014.!(BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations!par!la!suite).!!!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 30!

constaté. Cette évolution rend-elle obsolète le modèle de Van Gennep adapté par les

Turner ? Au contraire, ce modèle faciliterait l’identification de cette évolution.

Une caractéristique unique du pèlerinage lorsqu’il est comparé aux rites de passage

tribaux est son individualité. Le changement de statut qui a lieu lors de la phase

liminaire n’est pas imposé par la société, mais par l’individu et/ou Dieu. La phase

liminaire ne peut pas évoluer en tant que telle, mais le changement vécu lors de celle-

ci déclenche une évolution du modèle entier.

« Le souci dominant, c’est pour que le pèlerinage débouche dans un

engagement pour toute la vie. »34

Ce souci dont René Laurentin parle est la profondeur de ce changement, et donc

l’efficacité même de la phase liminaire, pas juste « une escalade d’émotions

populaires » passagères, mais une véritable conversion qui dure définitivement.

La phase préliminaire : un voyage de séparation

L’efficacité de la phase liminaire dépend presque entièrement de l’étape préliminaire.

Tout comme la réussite d’un sprinteur lors d’une course dépend non seulement de sa

préparation mais aussi de sa capacité à se déconnecter de toute distraction alentour

pour se concentrer sur la course devant lui, de même le pèlerin doit passer par cette

phase de séparation.

« Le paysan, largement représenté dans les pèlerinages diocésains, abandonne

tout, pour un temps ; non seulement sa maison ; mais sa terre et ses habitudes.

Il retrouve la liberté du septième jour. Le cercle des routines est brisé. Le

« clos » devient « ouvert » au plan de la vie concrète et de la religion. Maintes

aliénations, inhibitions, servitudes, irrépressibles sur place, se relâchent,

disparaissent. L’homme retrouve une disponibilité, une gratuité, un espace

pur pour se réorienter à neuf. Et cela débouche sur la conversion selon les

34!LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon, Chalet, 1976, 92.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 31!

paroles entendues par Bernadette : « Priez pour la conversion des pécheurs ».

Et encore : « Pénitence ». » René Laurentin, 197635

Cette phase de séparation a clairement évolué depuis le début des pèlerinages, et

notamment depuis la dernière décennie. Les moyens de transport employés par les

pèlerins pour effectuer leur voyage vers Lourdes ou d’autres lieux de pèlerinage

semblent démontrer que, plus ce voyage est difficile ou long, plus le lieu est

populaire. Historiquement, les pèlerins allaient à pied ou à cheval, partant de loin,

avec très peu ou pas de bagages, sans avoir prévu d’hébergement. A pied, le chemin

était long et dangereux, ce qui faisait partie du sacrifice et permettait un temps de

pénitence. Le pèlerin devait arrêter son travail pendant plusieurs mois pour pouvoir

faire le voyage, et la séparation était ainsi bien marquée : il n’avait plus de travail,

plus de logement, plus, ou peu, de possessions matérielles. Pendant ces jours ou

mois de voyage, il vivait sans identité, si ce n’est celle du pèlerin. Dans le cas d’un

pèlerinage en groupe, il garde une seule chose de son identité : son appartenance à

cette entité (diocésaine, paroissiale ou familiale). Or, que ce soit en groupe ou seul, la

séparation s’effectue par la distance spatio-temporelle.36

Un troisième élément plus subtil contribuait à cette séparation : la différence

culturelle. Lorsque le pèlerin traversait plusieurs régions ou pays et arrivait au lieu de

pèlerinage, il se trouvait dans une nouvelle culture marquée par des différences de

langue ou d’accent, d’architecture ou de paysage, et d’alimentation. Il n’avait même

plus de lien avec ce qui l’entourait, et il se trouvait donc séparé de son

identité culturelle propre.

L’évolution du modèle de pèlerinage à Lourdes est due aux changements de ces trois

éléments présents dans la phase préliminaire : la distance, le temps et la culture ont

subi les effets de la globalisation. Plus le pèlerin vit une séparation marquée par la

35!LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon, Chalet, 1976, 81.!36!BROCKMAN, Norbert, « Marian pilgrimage at the millenium : renewal or tourism», Marian Studies, Volume 51, 2000.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 32!

distance, la durée de son pèlerinage et la différence culturelle, plus la phase

préliminaire est efficace.

Saint Jacques de Compostelle : la séparation spatio-temporelle

La facilité du voyage progresse depuis l’ouverture de la voie ferroviaire à Lourdes en

1866, huit ans après les apparitions. Cette modernisation, du cheval au train, du train

à la voiture, et aujourd’hui à l’avion, ne fait que raccourcir le chemin des pèlerins vers

Lourdes, particulièrement pour les Européens. Depuis 2011, les pèlerins venant de

Milan, Rome, Bruxelles, Paris, ou Londres peuvent arriver directement à Lourdes par

avion en moins de deux heures, grâce aux compagnies aériennes « low-cost ». La

distance reste inchangée, Rome est toujours à 1500 kilomètres de Lourdes, mais les

moyens de transport modernes, à la fois rapides et confortables, ont rendu la

population plus mobile et la notion de distance a évolué. Grâce aux voies ferroviaires,

Lourdes est devenue très rapidement un lieu de pèlerinage national, et grâce aux vols

aériens un lieu international.

Ces évolutions ont rendu le pèlerinage accessible au plus grand nombre tout en

supprimant « le chemin ». L’objectif de ce rituel n’est plus le cheminement effectué

pour arriver au lieu, mais le simple fait d’y être. Ce phénomène de pèlerinage « sans-

chemin » est caractéristique des lieux d’accueil récents, postérieurs à la Révolution

Industrielle.37

« The Marian shrines dispense with stations, those stopping-points along the

Way that build up to the final goal. And, above all, the new shrines seem to

do away altogether with the need to make an arduous passage of purification –

the Way itself. »38

37!BROCKMAN, Norbert, « Marian pilgrimage at the millenium : renewal or tourism», Marian Studies, Volume 51, 2000.!38!BROCKMAN, Norbert, « Marian pilgrimage at the millenium : renewal or tourism», 97.!!«!Les!sanctuaires!mariales!éliminent!les!stations,!ces!points!d’arrêt!qui!montent!vers!le!but!final!du!chemin.!!Et!surtout,!ces!nouveaux!lieux!se!débarrassent!entièrement!du!besoin!de!faire!un!passage!ardu!de!purification!–!le!Chemin!même.!»!(Traduction!de!l’auteure)!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 33!

C’est à juste titre que Norbert Brockman se demande si les moyens de transport

moderne n’ont pas banalisé un aspect majeur du pèlerinage, le Chemin. En prenant

un avion ou un train, un pèlerin ne s’arrête pas aux stations, ces autres lieux religieux

qui servent d’étapes, et il ne fait pas la connaissance d’autres pèlerins. Ils éliminent

par conséquent le vécu de la communitas des Turner. 39 « Le transport moderne et les

médias de masse ont transformé le pèlerinage en tourisme religieux »40. Le plus

grand défi pour les coordinateurs de pèlerinage est la préparation des pèlerins au

passage de la phase préliminaire41.

Le pèlerinage de Saint Jacques de Compostelle est un exemple qui montre

l’importance de ce chemin. Depuis les années quatre-vingts, Saint Jacques de

Compostelle a connu une augmentation presque linéaire du nombre de pèlerins qui

fréquentent ses chemins.

39 Communitas : «A relational quality of fully un meditated communication even communion, between definite and determinate identities which arises spontaneously in all kinds of groups, situations and circumstances. » TURNER, Victor & TURNER, Edith, Image and Pilgrimage in Christian Culture, [Version numérique Kindle] New York, Columbia University Press, 1978. !Location!3247!de!3702.!40!BROCKMAN, Norbert, « Marian pilgrimage at the millenium : renewal or tourism», 109.!(Traduction!de!l’auteure)!41!LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon, Chalet, 1976,!92.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 34!

Figure 19. La fréquentation des chemins de St Jacques de Compostelle, selon les comptages de la

confraternité de St Jacques.42

Le pèlerinage de Saint Jacques de Compostelle se distingue des autres grands lieux de

pèlerinage, dont Lourdes, pour divers raisons. Comme il a connu une augmentation

constante depuis trente ans, ces différences sont autant de clefs pour comprendre la

baisse de fréquentation de pèlerins à Lourdes.

Plusieurs typologies et modèles essaient de définir les lieux de pèlerinage. Turner et

Turner (1978) les identifient sous quatre typologies: prototypique, un lieu qui est

établi par un fondateur ou un Saint important ; archaïque, un lieu qui dérive d’une

dévotion antérieure et qui a donc un élément syncrétique ; médiévale, un lieu établi

entre l’an 500 et l’an 140043 ; et moderne, un lieu établi aux XIXème et XXème

siècles suite à la Révolution Industrielle.44

Ces typologies présentent bien des défauts car certains lieux pourraient appartenir à

plusieurs catégories : les deux dernières étant identifiables par date, et les deux

42 BUREAU D’ACCUEIL DES PELERINS DE SAINT-JACQUES-DE-COMPOSTELLE, Statistics, http://peregrinossantiago.es/eng/pilgrims-office/statistics/ consulté le 3 avril 2014. 43!Ou!de!l’an!500!jusqu’à!aux!Reformes.!44!TURNER, Victor & TURNER, Edith, Image and Pilgrimage in Christian Culture.!Location!59!de!3702!

0!

50000!

100000!

150000!

200000!

250000!

300000!

2004! 2005! 2006! 2007! 2008! 2009! 2010! 2011! 2012! 2013!

La)fréquentation)des)chemins)de))St)Jacques)de)Compostelle)

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 35!

premières par la manière dont elles furent formées. L’Eglise de Saint Jacques de

Compostelle a été établie comme un lieu de pèlerinage au IXème siècle lors de la

découverte des ossements considérés comme étant ceux du corps de Saint Jacques,

l’apôtre.45 Or, d’après les légendes, Saint Jacques lui-même serait venu en mission à

Iberia, ce qui permet de considérer ce pèlerinage à la fois comme prototypique et

médiéval.46 Le pèlerinage à Lourdes est contrairement à celui de Compostelle,

nettement plus moderne.

Est-ce uniquement cette modernité de Lourdes qui lui fait vivre actuellement une

baisse de fréquentation ? Saint Jacques de Compostelle et Lourdes se différencient

sur plusieurs points : tout d’abord par leurs dates respectives, mais aussi par l’identité

même du lieu, Lourdes étant un lieu d’apparition de la Vierge Marie à une jeune fille

inconnue alors que Compostelle est un lieu relique de Saint Jacques, frère de Jésus et

fondateur de l’Eglise. Chacun de ces lieux a sa propre histoire, ancienne ou récente,

masculine ou féminine, importante ou inconnue. Cependant, c’est le chemin, le

Camino qui les distingue le plus. Un véritable pèlerin de Saint Jacques de

Compostelle doit avoir fait un minimum de 100 kilomètres à pied sur les chemins

traditionnels, ou deux fois plus à cheval ou à vélo. Ceci exige un engagement de

temps et de distance, une séparation obligé par le chemin, ce qui n’est pas le cas pour

un pèlerin allant à Lourdes.

Medjugorje et Israël : séparation culturelle

Le manque de séparation spatio-temporelle entre le lieu de départ et celui d’arrivée

lors du pèlerinage à Lourdes impose celui de la séparation culturelle. Autrefois, un

pèlerin quittait entièrement sa culture locale : sa langue, sa nourriture, ses normes de

comportement, et ses habitudes culturelles d’origine qui lui étaient familières. Aller à

Lourdes ce n’était pas rester dans sa propre culture, mais aller en Bigorre, où les

habitants s’habillaient, mangeaient et parlaient différemment. Or, de nos jours, à

cause du développement de l’Union Européenne et l’impact de la mondialisation,

Lourdes, tout comme l’Europe de l’Ouest est devenue plus « proche » culturellement.

45!NOLAN Mary Lee & NOLAN Sidney, Christian Pilgrimage in Modern Western Europe, Chapel Hill, The University of North Carolina Press, 1989, 92.!46!NOLAN Mary Lee & NOLAN Sidney, Christian Pilgrimage in Modern Western Europe, 92.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 36!

Grâce aux chaînes, que ce soit MacDonalds, Lidl, ou même l’agrandissement des

rayons internationaux dans les grandes surfaces, le pèlerin peut toujours retrouver un

peu de sa culture.

« The current developments towards the spread of a monoculture are also

referred to as the McDonaldization or Westernization of society and this leads

to a situation where touristic places around the world all end up looking the

same. »47

Dans le Sanctuaire, un effort a aussi été fait pour s’adapter aux langues différentes.

Un pèlerin italien pourrait par exemple quitter son « chez-lui » en Italie pour venir à

Lourdes, et aller à la messe en italien et se retrouver entouré d’autres Italiens ! Cette

situation ne se prête pas à la liminalité car sans la séparation culturelle, la

déconstruction de l’identité du pèlerin ne se fait pas.

Le besoin de séparation culturelle expliquerait la raison pour laquelle de plus en plus

de pèlerins non-européens fréquentent les Sanctuaires de Lourdes alors que les

Européens (notamment de l’ouest) préfèrent les lieux de pèlerinage culturellement très

différents, comme Israël et Medjugorje.

Alors que les Italiens fréquentent de moins en moins Lourdes, ils se tournent de plus

en plus vers Medjugorje et Israël. François Vayne, dans un entretien avec le Père

André Cabes, constate que Lourdes subit les conséquences de la fréquentation

croissante de Medjugorje, notamment par une baisse du nombre de pèlerins italiens. 48

Ce village de 3 500 habitants n’attire des pèlerins que depuis 1981, date de la

proclamation des premières visions.49 Selon le Père André Cabes, où l’élément

47!Tourism,!globalization!and!cultural!diversity,!Bilimava!&!Bekius!P6!«!Le!développement!actuelle!vers!l’expansion!d’une!monoculture!est!aussi!appelé!le!Macdonaldisation!ou!l’occidentalisation!de!la!société,!et!il!amène!une!situation!où!les!lieux!touristiques!dans!le!monde!ressemblent!tous!les!uns!aux!autres!»!(traduction!de!l’auteure).!48!VAYNE,!François,!«!Le!sens!de!Lourdes!»!Il'blog'di'François'Vayne,!consulté!le!30!avril!2014,!http://les7sources.eu/LeesensedeeLourdes!?lang=it!!49!MEDJUGORJE!WEB,!Overview,'www.medjugorje.org/overview.htm,!consulté!le!29!avril!2014.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 37!

attrayant de Medjugorje est la continuité de ces apparitions,50 la multiplicité des

visionnaires et des lieux d’apparitions contribuent aussi à rendre ce village en lieu à

visiter. (au-delà d’un lieu sacré, comme les Sanctuaires à Lourdes). Etant une petite

ville célèbre depuis peu par rapport à Lourdes, Medjugorje se développe encore pour

accueillir les pèlerins, bien que tout soit ralenti par le manque de reconnaissance de la

part du Vatican des miracles.51

Comme les apparitions restent pour le moment « extra ecclésia », sans reconnaissance

officielle, un pèlerinage à Medjugorje franchit le seuil de la structure de l’Eglise,

toutefois avec l’intention d’y retourner. Dans ce sens, Medjugorje se prête facilement

à la préliminalité et donc à la liminalité.

Or, la question de séparation culturelle à Medjugorje, en particulier pour les Italiens,

est bien plus complexe. D’un côté, le père André Cabes signale que « La « religion »

des Italiens (lui) semble moins « cérébrale » que la nôtre (française) ».52 Il fait

référence ici à l’attachement italien à Lourdes le 11 février, mais ce constat pourrait

aussi affirmer leur attachement à Medjugorje, qui exprime mieux le côté mystique de

la « religion » italienne. Dans le même entretien, François Vayne suggère que les

pèlerins allant à Medjugorje reprochent à Lourdes « une sorte de bureaucratisation

routinière ».53 Il est difficile de savoir donc si les pèlerins italiens sont plus attirés par

la différence liée à la culture bosnienne, ou par la nature mystique « extra-ecclésia »

du lieu. Cela dépend sûrement des différences culturelles en Italie elle-même, ce qui

dépasse les paramètres du sujet de cette étude. Mais que ce soit la culture italienne ou

la culture ecclésiale, la séparation se fait importante pour les pèlerins italiens allant à

Medjugorje.

50!VAYNE,!François,!«!Le!sens!de!Lourdes!»!Il'blog'di'François'Vayne,!consulté!le!30!avril!2014,!http://les7sources.eu/LeesensedeeLourdes!?lang=it!51!La!prise!de!décision!du!Vatican!semble!éminente!car!un!rapport!a!été!donné!à!la!commission!en!janvier!2014.!52!VAYNE,!François,!«!Lourdes!et!les!clefs!de!la!sainteté!de!Bernadette!»,!Zenit.org,'Rome,!1!février!2013,!consulté!30!mars,!http://www.zenit.org/fr/articles/lourdeseeteleseclefsedeelaesainteteedeebernadette.!53!VAYNE,!François,!«!Le!sens!de!Lourdes!»!Il'blog'di'François'Vayne,!consulté!le!30!avril!2014,!http://les7sources.eu/LeesensedeeLourdes!?lang=it!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 38!

En 2013, le pèlerinage « tendance » pour les Italiens c’était Israël. Les vols à Mostar,

l’aéroport près de Medjugorje, en provenance d’Italie furent annulés, et soudainement

la crise économique semblait toucher Medjugorje pour la première fois. En même

temps, Israël annonçait une année record pour le tourisme arrivant dans le pays, dont

53% de chrétiens et 28% de juifs.54 22% venaient dans le cadre du pèlerinage, mais la

difficulté à distinguer les touristes ayant tout de même une motivation religieuse des

pèlerins est élevée.

En termes de séparation et liminalité, Israël propose un potentiel plus important pour

les Européens. Comme le pèlerinage de Saint Jacques de Compostelle, celui d’Israël

est archaïque, selon les définitions des Nolan, et une séparation de distance, de temps

et de culture est imposée à la plupart de ses pèlerins.55

Si le manque de liminalité à Lourdes a causé une baisse de fréquentation surtout

auprès des Européens, cela est certainement dû en partie à l’absence de la phase

préliminaire, ou le peu de temps qui est y consacré : la durée raccourcie du pèlerinage,

la suppression du chemin facilité par des nouveaux moyens de transports comme les

vols « low-cost », et l’impact de la globalisation qui amoindrit les différences

culturelles entre Lourdes et la ville d’origine du pèlerin. Moins la phase préliminaire

est marquée par le temps, la distance et la différence culturelle, moins le pèlerin

déconstruira son identité pour vivre une phase liminaire efficace. Or, elle aussi a

connu des évolutions qui pourraient contribuer à la baisse de fréquentation des

pèlerins à Lourdes.

La phase liminaire : une perte définitive de spontanéité

La liminalité est le sommet, l’objectif, l’ultime nécessité d’un pèlerinage. René

Laurentin, ainsi que plusieurs autres auteurs, ne parle pas de liminalité, mais de

conversion. Les paroles de la Dame à Bernadette montrent la centralité de la

54!IMRA!(Independent!Review!Analysis),!Annual'Tourism'Report,'9!janvier!2014,!consulté!sur!:!http://www.imra.org.il/story.php3?id=62803!55!Selon!l’Annual'Tourism'Report,!les!dix!plus!grand!pays!d’origine!sont!(dans!l’ordre)!:!les!EtatseUnis,!la!Russie,!la!France,!le!RoyaumeeUni,!l’Allemagne,!l’Italie,!l’Ukraine,!la!Pologne,!le!Canada!et!le!Brésil.!!L’Ukraine!étant!le!pays!le!plus!près.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 39!

conversion à Lourdes : « Priez Dieu pour la conversion des pécheurs ».56 Le potentiel

de la liminalité fait également la différence entre le but d’une visite touristique et

celui d’un pèlerinage à la grotte.

La liminalité pour un pèlerinage à Lourdes peut, comme ailleurs, se manifester

différemment, et, de plus en plus fréquemment, ne pas se manifester du tout. La

transformation peut être intérieure, comme par exemple : une paix intérieure, une

guérison émotionnelle, une décision de s’engager dans la religion comme une

vocation à la vie religieuse, ou même un engagement à devenir plus pratiquant. Elle

peut être aussi extérieure, comme dans le cas de guérisons, miracles et signes, que ce

soit pour le pèlerin lui-même ou pour quelqu’un d’autre (famille, amis). Le pèlerin

peut venir avec une demande ou un besoin précis, ou pas, ou le désir de gagner une

faveur particulière.

Une liminalité limitée ou peu probable rend un lieu de pèlerinage moins attirant, le

transformant tout simplement en un simple lieu touristique. Le Tour Eiffel, par

exemple, n’est pas un lieu de pèlerinage car, justement, le fait de s’y rendre n’a pas

pour objectif la liminalité. Sous toutes ses formes diverses, elle reste la motivation

même des pèlerins qui vont à Lourdes. Cependant la baisse de fréquentation de

Lourdes comme un lieu de pèlerinage rend l’examen de la liminalité nécessaire afin

de savoir si elle est suffisante pour attirer les pèlerins.

La liminalité : une phase nécessairement spontanée

Une caractéristique commune aux lieux d’apparitions comme celui de Lourdes est

leur naissance spontanée. Dès le moment où Bernadette eut sa première vision, tout a

été improvisé pour elle, sa famille, la ville, l’église locale et les autorités. Dans le cas

de Lourdes, les apparitions ne furent pas le fruit d’une quête spirituelle, et personne

n’aurait pu prédire les millions de pèlerins qui la suivraient à la grotte de Massabielle.

Toute prédiction aurait été probablement erronée de toute manière, puisque la plupart

des lieux de pèlerinages attirent un afflux de pèlerins pendant quelques semaines,

mois ou années suite à un événement miraculeux, puis s’atténuent et disparaissent ou

56 LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon, Chalet, 1976, p81.

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 40!

deviennent un lieu de pèlerinage local très peu connu.57 Lourdes est une des

exceptions parmi les milliers de lieux qui depuis des siècles ont apparu et disparu.

Elle a survécu plus de 150 ans, mais le lieu lui-même chemine en permanence, évolue

avec le temps par les initiatives des pèlerins ainsi que par la « créativité pastorale ».58

Les cinq signes de Lourdes sont : le rocher (lorsqu’un pèlerin passe à l’intérieur de la

grotte, il le touche), la lumière (procurée par les cierges), l’eau (qu’il boit et avec

laquelle il se lave), la foule (par la participation au rassemblement à la grotte), et les

malades et hospitaliers.59 Ces signes, ces gestes des pèlerins ont tous commencé de

manière spontanée.

« A l’origine de Lourdes, c’est l’initiative populaire seule qui créa les rites et

l’organisation du pèlerinage durant les neuf premiers mois : récitation du

chapelet et veillées de prières, rites d’ablution, captation de la source. » 60

Ces initiatives populaires continuent largement au cours des années, mais

progressivement le clergé prend le relais de l’organisation en créant des rituels et ainsi

une tension entre l’attrait spontané des laïcs et la rationalité pastorale.61 Mgr Théas

fait un grand travail de réorganisation des Sanctuaires de Lourdes, surtout à cause de

l’afflux de pèlerins venant pour le centenaire des apparitions en 1958. Une structure

est assez rapidement fondée pour se charger des dossiers médicaux afin de pouvoir

reconnaître les guérisons.

57!NOLAN Mary Lee & NOLAN Sidney, Christian Pilgrimage in Modern Western Europe, 248.!58!LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon,!Chalet,!1976,!61.!59 SANCTUAIRE NOTRE DAME DE LOURDES, « Les signes de Lourdes», Site du Sanctuaire, http://fr.lourdes-france.org/approfondir/les-signes, consulté 22 février. 60!LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon,!Chalet,!1976,!100.!!61!LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon,!Chalet,!1976,!76!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 41!

De nos jours, tous les signes mentionnés ci-dessus ont été pris en main par les

Sanctuaires et la gestion est globale. Les cierges sont fabriqués, achetés et brûlés aux

Sanctuaires ; l’eau de la Grotte coule dans les robinets et dans les bains ; la foule, et

les malades sont accueillis et gérés par des structures de bénévoles. La spontanéité,

existe-elle toujours à Lourdes ?

La notion de pèlerinage n’a jamais été aussi institutionnalisée. Cette grande tension

entre la structure, inévitable, et le charisme et mysticisme des débuts, existe depuis

toujours. Tout lieu de pèlerinage débute hors de la structure de l’Eglise et, dans cette

spontanéité, cette liminalité est imprévu. Ce n’est que depuis 1983 que la notion de

pèlerinage a trouvé sa place dans le droit canonique, avec cinq points fondamentaux,

dont deux sont particulièrement pertinents à cette étude :

« Can. 1233 - Certains privilèges pourront être accordés aux sanctuaires

chaque fois que les circonstances des lieux, l'afflux des pèlerins et surtout le

bien des fidèles semblent le recommander.

Can. 1234 - § 1. Dans les sanctuaires seront plus abondamment offerts aux

fidèles les moyens de salut en annonçant avec zèle la parole de Dieu, en

favorisant convenablement la vie liturgique surtout pour la célébration de

l'Eucharistie et de la pénitence, ainsi qu'en entretenant les pratiques éprouvées

de piété populaire. »62

Le premier point (Can. 1233) semble laisser une possibilité à d’autres lieux de

pèlerinage, et reconnaît que ces lieux, sous le Concile 1962-1965, l’influencent aussi

très certainement. Le deuxième impose les rites et la centralité de la liturgie aux

sanctuaires. Ce n’est pas très étonnant, mais il pourrait être problématique pour la

liminalité. Au départ, le pèlerinage se trouve au seuil de l’Eglise, en marge de celle-ci,

ce qui était idéal pour cette phase. Cependant en mettant la liturgie au centre des

pèlerinages, ceux-ci s’intègrent dans une structure, et cette liminalité est compromise.

62!VATICAN,!«!Code!de!droit!canonique!»,!chapitre'III':'Les'sanctuaires,'http://www.vatican.va/archive/FRA0037/_P4G.HTM!consulté!1!mai!2014.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 42!

La notion d’inconnu ainsi que la place faite à la spontanéité sont perdues, car la

liturgie, par principe et définition, est réglementée et connue.

La spontanéité est essentielle à la liminalité puisque cette inconnue permet justement

la transformation de l’identité du pèlerin. L’idée qu’à la phase liminaire, l’identité est

déconstruite pour être reconstruite montre bien l’importance de cette spontanéité.

La motivation du pèlerin est également très importante pour la liminalité. La

différence entre un pèlerinage et du tourisme religieux, selon Norbert Brockman, est

un rencontre avec la grâce divine.63 Cette rencontre est la liminalité. Mais la

différenciation entre un touriste et un pèlerin n’est pas très claire, ni de l’extérieur, ni

même de la part du pèlerin. Le débat anthropologique prolonge les recherches sur la

distinction floue qui persiste entre le tourisme religieux et le pèlerinage. Ces deux

formes de découverte d’un lieu sont aujourd’hui liées par les moyens de transport

pour y accéder, leurs hébergements et surtout leurs lieux à visiter en commun.

Le diagramme des Nolan montre bien la relation aujourd’hui entre les lieux de

pèlerinage, les attractions touristiques religieuses et les lieux de fêtes religieux.

63!BROCKMAN, Norbert, « Marian pilgrimage at the millenium : renewal or tourism», Marian Studies, Volume 51, 2000, 107.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 43!

Figure 20. Les relations entre les lieux sacrés, les attractions touristiques religieux et lieux de fêtes : explications et exemples.64

I. Lieux) de) pèlerinages.! ! Des' lieux' qui' servent' comme' but' aux'

pèlerinages.'

a. Des! lieux!qui! ont!peu!de!valeur!d’attraction! touristique! et!qui!ne!

sont!pas!caractérisés!par!des!fêtes,!processions!ou!démonstrations!

folkloriques.! !La'plupart'des'visiteurs'sont'des'membres'de'voyages'

religieux' organisés,' ou' ils' se' considèrent' pèlerins.' Les' activités' sur'

place'sont'de'nature'religieuse.'

b. Des!lieux!qui!portent!une!grande!valeur!touristique.! !Les'touristes'

sont' souvent' plus' nombreux' que' les' pèlerins,' car' ces' lieux' sont'

connus' pour' l’art,' l’architecture,' les' particularités' du' lieu' ou' leur'

64!NOLAN Mary Lee & NOLAN Sidney, Christian Pilgrimage in Modern Western Europe, Chapel Hill, The University of North Carolina Press, 1989, Figure!2e2!17.!!Traduction!de!l’auteur.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 44!

importance'historique.' 'Même's’il' existe'des' jours' spéciaux'pour' les'

pèlerinages,'ces'lieux'ne'sont'pas'particulièrement'connus'pour'leurs'

grandes'fêtes'religieuses.'

c. Des! lieux! largement!connus!pour! les!évènements!très!colorés! liés!

au!pèlerinage.! !Le'pèlerinage'en'tant'qu’évènement'est'de'première'

importance' dans' ces' lieux.' ' Dans' certains' cas' des' années' passent'

entre'chaque'évènement,'mais'les'pèlerinages'ont'normalement'lieu'

une'ou'deux'fois'par'an.'

d. Des! lieux! qui! comprennent! importance! touristique! et! fêtes! de!

pèlerinages!d’importance!cultuelle.!!Un'exemple'typique'ce'genre'de'

lieu'est'Saint'Jacques'de'Compostelle,'en'Espagne,'visité'tout'au'long'

de' l’année' par' de' nombreux' touristes' et' pèlerins' mais' surtout' fin'

juillet'quand'la'fête'de'Saint'Jacques'est'célébrée'(25'juillet),'avec'de'

nombreuses' processions,' grands?messes' et' démonstrations'

folkloriques.'

II. Des) attractions) religieuses) touristiques.! ! Ces' lieux' souvent' des'

structures' ecclésiastiques' sont' visités' par' des' touristes' et' vacanciers'

séculiers,'des'groupes'de'voyages'de'tourisme'religieux'et'des'pèlerins'en'

route' pour' des' lieux' de' pèlerinages,' mais' ils' ne' sont' pas' considérés'

comme'des'lieux'de'pèlerinages.''Beaucoup'de'cathédrales'et'monastères'

célèbres'd’Europe'se'trouvent'dans'cette'catégorie.'

III. Des) lieux) de) fêtes) religieuses.! ! Plusieurs' fêtes' religieuses' et'

processions'en'Europe'ne' sont'pas'considérées'comme'des'pèlerinages.''

Comme,' par' exemple,' les' processions' de' la' Semaine' Sainte' et' Corpus'

Christi,'et'la'plupart'des'célébrations'publiques'de'Noël.''Ces'événements'

sont' associés' à' des' églises' dont' certains' sont' aussi' des' attractions'

touristiques' importantes'et'des'monuments'historiques.' 'Les'catégories'

II'et' III' se'recoupent.' 'Par'exemple,' la' fameuse'cathédrale'de'Granada,'

qui' contient' les' tombes' des' monarques' catholiques,' Ferdinand' et'

Isabella,' est' la' scène' d’une' célébration' religio?civile' importante' le' 2'

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 45!

janvier,' mais' généralement' n’est' pas' considérée' comme' un' lieu' de'

pèlerinage.65'

Lourdes aujourd’hui est difficile à placer. Les Nolan place le pèlerinage à Saint-

Jacques de Compostelle dans Id : un mélange de tourisme religieux, pèlerinage et fête

religieuse. Lourdes aussi pourrait y être, mais comparé à Saint Jacques de

Compostelle, elle est beaucoup moins touristique alors la catégorie Ic semble mieux

adaptée. Mais elle est loin d’être un lieu sans tourisme, au contraire, avec la baisse de

fréquentation des pèlerins, l’effort pour attirer les touristes devient la solution aux

problèmes économiques de la ville.

Avec la suppression du chemin, les agences de voyages essaient de créer leur propre

chemin, par une sorte de voyage à thème « marial », rendant visite à plusieurs lieux de

pèlerinage lors d’un seul voyage. 66 Ceci est loin du pèlerinage du Moyen Age parce

qu’il est marqué par le confort. L’impact sur la phase préliminaire est important car

pour la liminalité le tourisme peut limiter la transformation de la personne qui devient

alors pèlerin-touriste. L’enchaînement de plusieurs lieux de pèlerinage est une

évolution subtile qui transforme l’objectif de vivre une expérience de pèlerinage en

celui de le faire tout simplement.

De plus, les horaires de ces voyages sont structurés, même si certains proposent la

possibilité de jours supplémentaires pour avoir du temps libre aux Sanctuaires.

Cependant, ce type d’organisation laisse peu de place à la spontanéité pour ouvrir le

pèlerin-touriste à l’inconnu et à la liminalité. Le temps de la préliminalité étant réduit

par les transports modernes, le pèlerin n’arrive pas aux Sanctuaires dans un état

propice à vivre cette rencontre avec la grâce.

Certes, cela n’empêche pas entièrement la liminalité, Bernadette elle-même n’y était

pas prête lorsqu’elle a vécu la première apparition, mais une fois touchée par cette

65!NOLAN Mary Lee & NOLAN Sidney, Christian Pilgrimage in Modern Western Europe, Chapel Hill, The University of North Carolina Press, 1989, 17.!!Traduction!de!l’auteur.!66!BROCKMAN, Norbert, « Marian pilgrimage at the millenium : renewal or tourism», !

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 46!

rencontre, elle s’est rendue disponible pour y revenir comme l’apparition le lui avait

demandée. Pour le pèlerin venant en groupe, que ce soit avec son diocèse ou avec une

agence de voyage, le retour est déjà fixé, le temps de passage aux Sanctuaires est

prévu, et si donc les moments passés à la grotte déclenchent une transformation

intérieure, le pèlerin, encadré par son groupe et son programme fixe, n’a pas

forcément le temps de la vivre complètement. L’hôtel est réservé pour un certain

nombre de jours, le vol de retour est déjà payé, le programme ne peut pas être changé

sans beaucoup de frais supplémentaires. Deux exceptions existent à cette

problématique de liminalité limitée : les personnes guéries et les bénévoles.

La possibilité de guérison est un point attrayant de Lourdes pour les pèlerins. Même

si le message premier des apparitions n’était pas la guérison, mais la conversion et la

pénitence, celle-ci fait partie de l’histoire de Lourdes dès le début des pèlerinages.

Une guérison est la forme de liminalité et de transformation la plus concrète, car elle

est visible et peut être prouvée. Au début, la guérison fait exploser la fréquentation de

la grotte, de 1500 personnes le 1er mars 1858, quand Catherine Lathapie fut guérie, à

8000 personnes le jeudi 4 mars 1858.67 Cependant, alors que les témoignages des

guérisons commencent à se répandre, les autorités ecclésiastiques et

gouvernementales cherchent à mettre en ordre le chaos potentiel d’une foule

croissante et excitée :

« Dès lors, les guérisons foisonnent, mais l’illusion se mêlait au sérieux. La

Commission épiscopale eut fort à faire pour trier la masse des papiers

griffonnés, dans un enthousiasme parfois confus, par le Docteur Dozous. »68

Quatre ans après, ces guérisons sont reconnues. En 1866, la publication des faits

commence dans les Annales de Notre Dame de Lourdes. Puis vers 1882, le Bureau

des constatations médicales est fondé. En 1905, Pie X demande que les mêmes

procédures utilisées pour les canonisations soient appliqués aux constats à Lourdes : 67!SANCTUAIRE!NOTRE!DAME!DE!LOURDES,!«!Les!apparitions!de!1858!»,!Site'du'Sanctuaire,'http://fr.lourdesefrance.org/approfondir/bernadetteesoubirous/tempsedeseapparitions,!consulté!22!février.!68!LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon,!Chalet,!1976,!75.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 47!

un examen médical puis religieux. En 1946, Mgr Théas réorganise le processus afin

de rendre la procédure médicale encore plus exigeante.69 Suite à ces changements,

22 guérisons ont été reconnues entre 1946-1965, puis seulement sept depuis 1965.70

La dernière guérison à avoir été reconnue actuellement a eu lieu en 1989. Depuis

cette date, quatre autres ayant eu lieu avant la précédente ont été reconnues. De ce

fait aucune guérison ayant eu lieu dans les 25 dernières années a été reconnue,

constituant la période la plus longue sans guérison depuis l’histoire des Sanctuaires.

Cependant, il existe probablement des dossiers de guérisons de cette période qui sont

encore en train d’être examinés. En 2006, Mgr Perrier, évêque de Tarbes-Lourdes, a

essayé d’alléger la définition du miracle, citant un décalage entre les critères d’un

miracle établi à une époque moins avancée en médecine.71 Pour l’instant, aucun

grand changement dans le nombre de guérisons déclarées n’a été constaté: « Des six

millions de pèlerins qui visitent Lourdes chaque année, environ 40 prétendent être

miraculeusement guéris. »72.

Est-ce que la notion de « miracle » a été sur-institutionnalisée à tel point que cette

forme de liminalité n’existe plus ? Tout en étant, certes, un facteur, le progrès en

médecine en est aussi très important. Les soins sont de plus en plus pris en charge par

des professionnels et les médecins déconseillent que les malades voyagent ou qu’ils

pratiquent le « jeûne thérapeutique ». Or, si le pèlerin continue son traitement, la

guérison ne peut pas être entièrement attribuée au pèlerinage. Ceci fut le constat fait

69!LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon,!Chalet,!1976,!75.!!70!HENEGHAN,!Tom,!«!No!new!Lourdes!miracles!despite!eased!criteria!»,!Reuters,'11!septembre!2008,!http://uk.reuters.com/article/2008/09/11/usepopeelourdesemiracleseidUKLB71597820080911!consulté!le!26!mars.!71!PERRIER!Mgr!Jacques,!«!A!propos!des!guérisons!miraculeuses!à!Lourdes!»,!Site'de'l’Eglise'en'Lot'et'Garonne,'!http://catholiqueeagen.cef.fr/site/710.html,!consulté!26!mars!2014.!72!HENEGHAN,!Tom,!«!No!new!Lourdes!miracles!despite!eased!criteria!»,!Reuters,'11!septembre!2008,!http://uk.reuters.com/article/2008/09/11/usepopeelourdesemiracleseidUKLB71597820080911!consulté!le!26!mars.!(traduction!de!l’auteure)!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 48!

par René Laurentin en 197573, mais qui s’est encore amplifié aujourd’hui alors que le

nombre de trains spéciaux baisse chaque année, et que les traitements médicaux sont

de plus en plus efficaces. Moins de malades, moins de guérisons.

Les personnes relatant le plus de transformations sont les bénévoles. Plusieurs vidéos

montrent les bénévoles témoignant de l’impact de leur séjour à Lourdes sur leur vie.

Durant au moins une semaine, des bénévoles de tous âges passent six à huit heures par

jour à aider à la logistique des Sanctuaires en tant qu’hospitaliers dans les cinq cadres

suivants :

• Formation!spirituelle!et!technique!des!volontaires!

• !Accompagnement!lors!de!la!démarche!du!Bain!

• Accueil!des!malades!en!pèlerinage!(deux!cadres!pour!ce!service)!

• Intendance!!

• Cérémonies,!gare,!logistique74!

Dans les témoignages rassemblés par helpinlourdes.org et Marlene Watkins de North

American Lourdes Volunteers, et d’autres associations bénévoles, un mot qui revient

souvent est « transformation ». Ils témoignent tous qu’un voyage à Lourdes en tant

que bénévole leur a changé la vie. Le plus impressionnant parmi ces témoignages est

la conviction et certitude avec laquelle ils parlent, surtout parmi les jeunes :

« Tu pleureras beaucoup quand tu vas à Lourdes » - Ryan Kress

« You really discover beautiful parts of yourself and even parts you didn’t

even know you had inside of you. » - Alley (« On y découvre vraiment de

belles choses sur soi-même, même des choses dont on ignorait l’existence »)75

« Si notre dame veut que tu ailles à Lourdes, elle te fait venir. Et quand elle te

fait venir, ça va changer ta vie. » Sarah Joan

73!LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon,!Chalet,!1976,!111.!74!SANCTUAIRE!NOTRE!DAME!DE!LOURDES,!«!Services!»,!Site'de'l’Hospitalier'Notre'Dame'de'Lourdes,!http://fr.lourdesefrance.org/hndl/services,!consulté!12!mai!2014.!75!Traduction!de!l’auteure!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 49!

« Lourdes is addictive » (« Lourdes est addictive »)76

« It really changed my life; I even met my girlfriend here! » (« Ça a vraiment

changé ma vie ; j’y ai même rencontré ma copine ! ») 77

Dans ces témoignages se retrouvent la liminalité, la découverte d’une nouvelle

identité, et la certitude qu’en venant à Lourdes, on en revient changé. Les bénévoles

évitent les éléments de Lourdes qui limitent la liminalité. Un bénévole est distinct du

touriste, car il y vient en assumant un rôle de service. Il n’a pas la même motivation,

et à part les activités aux Sanctuaires (les messes, les processions, les visites à la

Grotte), il ne participe pas aux mêmes activités que le touriste. Il ôte son identité en

assumant son nouveau rôle de service, mettant même un uniforme. Comme les

pèlerins d’autrefois, il vit des expériences éprouvantes lorsqu’il travaille et sert les

malades. Mgr Perrier, évêque émérite de Tarbes, a déclaré que « Lourdes sans les

malades, cela deviendrait un Disneyland catholique. »78 Les bénévoles restent près

des malades et évitent donc le côté « Disneylandais ».

Malheureusement, la liminalité du bénévolat est conditionnée par la présence des

malades et d’autres pèlerins. Moins de malades signifie moins de fauteuils à pousser,

moins de personnes à accueillir et à assister.

La liminalité ne peut pas être maîtrisée, organisée, ou imposée. Elle ne peut qu’être

encouragée, en laissant la place pour que le pèlerin puisse vivre une transformation.

La phase postiliminaire : intégration, profondeur et durée de la liminalité

La dernière phase dépend largement des deux premières et concerne le retour du

pèlerin chez lui. L’importance de cette phase est l’intégration de la transformation

76!Traduction!de!l’auteure!77!Pour!une!liste!exhaustive!des!témoignages!et!entretiens,!voir!bibliographie.!78 LE BARS, Stéphanie, « 150 ans après les "apparitions" de la Vierge, Lourdes reste portée par la ferveur populaire », Le Monde, 12 septembre 2008, http://www.lemonde.fr/societe/article/2008/09/12/150-ans-apres-les-apparitions-de-la-vierge-lourdes-reste-portee-par-la-ferveur-populaire_1094483_3224.html, consulté le 13 janvier 2014.

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 50!

vécue par le pèlerin dans sa vie. « Le souci dominant, c’est que le pèlerinage

débouche sur un engagement de toute la vie. »79 Tout comme le processus pour

reconnaître qu’une guérison dure longtemps afin de s’assurer qu’elle est définitive, il

en de même pour s’assurer que la liminalité soit permanente.

Ceux qui viennent en pèlerinage organisé ou qui prennent contact avec le service des

Sanctuaires peuvent bénéficier d’un « suivi » après le pèlerinage. Les groupes

diocésains sont en générale accompagnés par un prêtre qui souvent accompagne ces

pèlerins lors de leur phase postiliminaire. Si la transformation vécue par le pèlerin

exige un nouvel engagement dans leur paroisse, le prêtre et même les autres membres

de ce groupe peuvent témoigner de cette intégration. La responsabilité pastorale est

suffisamment claire pour ces pèlerins.

Une des difficultés actuelles se pose pour les pèlerins « isolés », ceux qui ne viennent

pas avec un groupe et qui ne se présentent pas auprès des Sanctuaires. Ces pèlerins

peuvent, comme ceux en groupe, vivre une expérience de transformation, mais celle-

ci est tellement individuelle que personne n’ est au courant.

Le pèlerinage à Lourdes ne s’impose pas dans la vie de ces pèlerins isolés. Grâce aux

transports modernes, ce chemin raccourci peut être effectué lors d’un week-end ou de

congés annuels. Contrairement à ceux du Moyen Age qui nécessitaient des voyages

de plusieurs mois, un pèlerin d’aujourd’hui n’a plus besoin de quitter son travail

pendant quelque mois pour l’effectuer. Le pèlerinage ne se remarque donc pas dans

la société par l’absence. Par conséquence, la phase postiliminaire est difficile à

définir. Ce modèle de définition a été emprunté à celui d’un rite de passage identifié

par Van Gennep qui suppose que la société soit incluse dans ce rite. Dans un rite de

passage, la tribu, la société ou la famille est au courant du passage que vit l’adepte, et

son départ et retour y sont constatés et remarqués. Or quand le pèlerin vit son

pèlerinage pendant un temps d’absence court et prédéterminé (vacances, week-end),

la société n’est pas forcément au courant d’une transformation quelconque. Lorsque

le départ passe inaperçu, le retour également ne se remarque pas.

79!LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon,!Chalet,!1976,!92.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 51!

Les démarches pour que la reconstruction de l’identité du pèlerin soit effectuée sont

entièrement laissées à sa propre initiative. Trouver une paroisse ou un prêtre référent,

changer sa place dans la société, tout est entre les mains du pèlerin puisque le

pèlerinage à Lourdes n’a pas de place dans la société moderne.80

La baisse de fréquentation de Lourdes a pour cause plusieurs évolutions constatées au

travers du modèle de pèlerinage de Victor et Edith Turner, adapté de celui des rites de

passage proposé par Van Gennep. La phase préliminaire semble avoir un effet de

domino négatif, particulièrement sur la phase liminaire. Le manque de séparation

temporelle, spatiale et culturelle que vit le pèlerin venant à Lourdes n’ôte pas

suffisamment l’identité à celui-ci pour lui permettre de vivre une phase liminaire

efficace. Il n’est pas prêt pour une transformation de vie. Ceci explique la popularité

d’autres lieux de pèlerinage, comme Saint Jacques de Compostelle, Medjugorje et

Israël qui promeuvent une expérience réelle de liminalité. Cela semble contradictoire,

mais plus le chemin vers Lourdes est facile, moins le pèlerinage aura un impact

spirituel puissant.

Dans la phase liminaire, le manque de spontanéité rend « le fait de Lourdes » moins

impressionnant. La tension entre la spontanéité des laïcs et la rationalité pastorale

existe à chaque lieu de pèlerinage. Plus la notion de pèlerinage est intégrée dans

l’Eglise, moins celui-ci se trouve marginalisé, sur le seuil, et moins il sera

transformateur.

En dernier lieu, la phase postiliminaire n’existe que pour ceux qui la cherchent

puisque la société ne remarque plus le pèlerinage, ni dans le temps, ni dans le statut

social puisque la transformation est généralement intérieure et non visible.

Afin de vivre un pèlerinage transformateur, deux expériences clés sont essentielles : la

séparation et la spontanéité. Si, comme dans le cas de Lourdes, ces éléments

manquent ou sont limités, l’impact de ce geste de pèlerinage est moins puissant et

80!Tel!est!le!cas!pour!les!sociétés!occidentales.!!Il!pourrait!exister!des!cultures!où!le!pèlerinage!à!Lourdes!a!une!valeur!particulière!pour!leur!société,!mais!ceci!sort!du!cadre!de!cette!étude.!!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 52!

donc moins attrayant. Dans cette optique, cette étude examinera les constats et

changements proposés par l’Eglise, la ville et les habitants, afin d’analyser l’avenir

possible du pèlerinage à Lourdes.

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 53!

Troisième Partie : La régression de la fréquentation de Lourdes

continuera-t-elle?

Malheureusement, peu d’études ont été effectuées sur l’évolution des fréquentations

de lieux de pèlerinage modernes. Les pèlerinages du Moyen Age ont brusquement

cessé à cause de la Réforme protestante, cependant les lieux modernes, comme

Lourdes, n’ont subi aucun événement de rupture et continuent leur évolution

librement.

Les Turner proposent l’hypothèse selon laquelle le pèlerinage a sa propre entéléchie,

« sa propre force immanente qui contrôle et dirige son développement. »81 Après le

développement d’un pèlerinage lors d’une apparition, un martyr ou un miracle, le lieu

de destination se développe de façon spontanée dès le début et progressivement

devient routinier et institutionnalisé. Les Turner tracent ce développement de la

vision à la routinisation, de l’anti-structure à la contre-structure, et à la structuration.82

« It is clear, for example, that the style of interconnectedness changes as

pilgrimage systems become more elaborate. Numbers bring diversification of

functions, and the coordination of diverse functions brings bureaucracy and

centralized control. »83

La bureaucratisation et le contrôle centralisé risquent de transformer un lieu de

pèlerinage en un milieu différent de celui du départ. La fraternité qui se formait

naturellement parmi les pèlerins se trouve étouffée par la structure faisant subir aux

lieux de pèlerinages développés ainsi une crise majeure, disent les Turner. Ceci est 81!TURNER, Victor & TURNER, Edith, Image and Pilgrimage in Christian Culture.!Location!451!de!3702!82!TURNER, Victor & TURNER, Edith, Image and Pilgrimage in Christian Culture.!Location!474!de!3702!83!TURNER, Victor & TURNER, Edith, Image and Pilgrimage in Christian Culture.!Location!474!de!3702.!«!Il!est!clair,!par!exemple,!que!l’interaction!sociale!évolue!alors!que!les!systèmes!de!pèlerinage!deviennent!de!plus!en!plus!élaborés.!!Un!plus!grand!nombre!de!pèlerins!exige!une!diversification!de!fonctions.!!!Et!puis!la!coordination!des!diverses!fonctions!exige!bureaucratie!et!contrôle!centralisé.!»!(Traduction!de!l’auteure)!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 54!

une forme de critique forte de la part des pèlerins. Si celle-ci est soutenue par un

pouvoir quelconque, le lieu risque de devenir victime d’iconoclasme. Cependant, la

critique pourrait aussi être un élément déclencheur de réforme, bénéfique à son avenir.

Heureusement, de nos jours, pour les lieux de pèlerinages catholiques, l’iconoclasme

ne pose plus le même risque qu’avant, et comme les Turner le constatent, il est rare

qu’un grand lieu (comme Lourdes, par exemple) s’éteigne définitivement.84

Plusieurs lieux de pèlerinages ont vécu des périodes, voire des siècles, endormies,

durant lesquelles ils ne semblaient plus attirer de pèlerins. Cependant ils se réactivent

toujours comme le célèbre exemple de Saint-Jacques-de-Compostelle. Les Turner et

les Nolan sont tous d’avis qu’un lieu comme Lourdes ne cessera jamais d’être

fréquenté par les pèlerins, même s’il y aura des périodes de baisse ou même de

sommeil.

Or, même si en théorie la survie de Lourdes en tant que lieu de pèlerinage est en

sécurité, en réalité cette ville s’inquiète car elle est devenue entièrement dépendante

du Sanctuaire à tel point que la moindre baisse de fréquentation a un fort impact sur

les revenus des commerçants et hôteliers et le budget de l’Eglise. La baisse de

fréquentation, ainsi que les inondations d’octobre 2012 et juin 2013 ont montré que

l’économie de Lourdes à court terme est fragile.

Alors que les statistiques sur la fréquentation de Lourdes annoncent une nouvelle

baisse sur une deuxième année consécutive, toutes les parties concernées, que ce soit

le Diocèse, l’Office de Tourisme, le service des Sanctuaires, les politiciens locaux, les

hôteliers, les restaurateurs ou les commerçants lourdais, se remettent en question dans

l’espoir de déclencher les réformes nécessaires pour faire revivre le pèlerinage.

Chacun interprète le problème de la fréquentation selon ses intérêts et ses objectifs.

L’avenir à court terme

En février 2014, Mgr Brouwet, évêque de Tarbes-Lourdes publiait ses orientations

pour les trois prochaines années à Lourdes, alors que les campagnes pour les élections

84!TURNER, Victor & TURNER, Edith, Image and Pilgrimage in Christian Culture.!Location!478!de!3702!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 55!

municipales battaient leur plein. Les candidats présentaient non seulement leurs

constats, mais également leurs solutions pour sauver Lourdes de la crise. Même

certaines associations de commerçants ont fait appel aux candidats afin de leur

adresser leurs inquiétudes. C’est Josette Bourdeu qui a été élue et Lourdes est donc

sous l’étiquette Parti Radical de Gauche, contrairement aux tendances électorales

ailleurs en France.

Cette partie examina les solutions proposées par les associations lourdaises,

notamment les partis politiques et les services du Sanctuaire, afin de vérifier

l’efficacité de ceux-ci pour le renouvellement de la fréquentation de pèlerins à

Lourdes.

Les Orientations de Mgr Brouwet.

Mgr Brouwet démarra son épiscopat dans le Diocèse de Tarbes-Lourdes en 2012, la

première année de la constatation de baisse de fréquentation. Après des statistiques

annonciatrices depuis presque dix ans, ce fut à Mgr Brouwet d’annoncer la première

baisse depuis 2004 en 2012, et puis la deuxième en 2013. Mais en 2013, au lieu de

mettre celle-ci en avant, il publie les « Orientations », un document qui vise l’avenir

de Lourdes. Il a travaillé sur ce document avec le Conseil de Lourdes composé des

chapelains et des cadres du Sanctuaire depuis deux ans.

Le document est divisé en six parties : l’introduction, l’annonce de l’Évangile,

l’internationalisation, l’aménagement de l’espace de la Grotte, la « place de l’Eglise »

et les services des Sanctuaires.85 Il y décrit la mission, l’évolution, et les changements

que Mgr Brouwet souhaite entreprendre. Ce document aide à mieux comprendre

comment l’Eglise voit son propre rôle dans le pèlerinage.

L’intitulé des orientations de Mgr Brouwet, « Au service de la joie des convives », est

pertinent. Il introduit ses orientations par l’histoire du mariage à Cana dans l’Evangile

de Jean ch2v1-11. Il y présente la responsabilité du Sanctuaire de Lourdes, comme à

Cana, à se mettre « au service de la joie des convives sous la conduite de Marie, pour

85!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations,!2.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 56!

laisser le Seigneur accomplir son œuvre dans les cœurs de miséricorde. »86 Ce

parallèle est pertinent parce qu’un mariage est aussi un rite de passage, avec des

phases préliminaire, liminaire et postiliminaire. Or, dans cet exemple donné par Mgr

Brouwet, il semble assimiler les pèlerins aux convives, c’est-à-dire aux témoins de la

liminalité, et non à des participants. L’Eglise et le Sanctuaire sont comparés aux

serviteurs sous la conduite de Marie. Sans pousser plus loin l’analogie, il est

intéressant de remarquer les places attribuées aux Sanctuaires et aux pèlerins : les

serviteurs et les convives.

La mission du Sanctuaire y est clairement citée :

« Notre mission est de veiller à ce que tous ceux qui viennent aux Sanctuaires se

laissent toucher devant la Grotte par l’amour inconditionnel de Jésus. »87

Afin d’accomplir cela, explique-t-il, il faut approfondir, développer et adapter la

mission aux circonstances actuelles. « Car un pèlerinage est un mouvement. Et ce

mouvement se poursuit dans une société en mutation profonde, en un temps où

l’Eglise et la foi même traversent des bouleversements cultuels sans précédent. »88

Nulle part la publication ne mentionne le mot « touriste ». Dans le cadre de

l’anthropologie du pèlerinage, une distinction est établie entre le pèlerin et le touriste

religieux, mais Mgr Brouwet semble avoir une vision bien plus vaste du « pèlerin »,

qui comprend aussi le touriste.

« Leur pèlerinage s’inscrit parfois dans un voyage plus vaste : des vacances

dans les Pyrénées, en France ou en Europe. »89

Il parle de ces pèlerins comme étant parfois des baptisés non-pratiquants, comme ceux

qui ne connaissent rien du message de Lourdes, ou des non-chrétiens, avec aucune

connaissance de ce qu’ils vont trouver ou vivre à la grotte. 86!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations,!5.!87!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations,!5.!88!LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon,!Chalet,!1976,!107.!89!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations,!8.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 57!

« Partons d’un postulat : tous ceux qui franchissent les grilles du Sanctuaire

ont une attente. Une attente spirituelle parce qu’ils savent que, dans ce lieu

d’apparitions, le ciel a en quelque sorte touché la terre. Mais c’est aussi une

attente très concrète vis-à-vis de nous parce qu’ils ont besoin d’être

accompagnés dans leur démarche. »90

Mais ce postulat, que chaque personne qui vient à la Grotte a une attente spirituelle,

est-il un bon point de départ ? Est-ce qu’un simple touriste curieux peut se dire

« pèlerin », n’ayant pas engagé, en venant à Lourdes, un processus de pèlerinage ?

En évitant d’utiliser le mot touriste dans son discours, Mgr Brouwet interprète très

différemment le problème de la baisse. Elle devient premièrement et avant tout le

manque de connaissance de l’histoire et du message des apparitions. La solution est

donc d’enseigner et d’évangéliser, en proposant une « véritable initiation

chrétienne ». 91 En essence, il veut que des catéchèses soient proposées

essentiellement par des chapelains et des religieux à chaque station du Sanctuaire.92

Quant aux personnes malades ou handicapées, elles ont un rôle particulier à jouer

dans l’évangélisation des pèlerins. Mgr Brouwet rappelle l’importance de cheminer à

leur cotés avant, pendant et après leur voyage, d’être à leur écoute. « N’oublions pas

que, souvent, ce sont ces personnes malades ou handicapées qui évangélisent les

personnes « bien portantes » par leur attachement au Christ. »93 A ce propos, Mgr

Brouwet constate avec justesse, comme son prédécesseur Mgr Perrier, l’importance

des malades à Lourdes. Selon les témoignages des bénévoles, ceux qui se tiennent

auprès des malades ou handicapées vivent une expérience des plus transformatrices.

La fréquentation en « légère » diminution est à améliorer grâce aux familles,

visiteurs et aumôniers, enfin d’encourager les pèlerins malades à s’y rendre. Les

raisons que Mgr Brouwet donne pour cette diminution sont les mêmes qui celles

90!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations,!9.!91!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations,!10.!92!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations,!10.!93!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations,!12.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 58!

constatées par René Laurentin dans son article « Lourdes dans la mutation actuelle »,

en particulier que les médecins laissent de moins en moins voyager les patients

gravement malades.94 Même si la diminution est légère, elle l’est depuis plusieurs

décennies lorsque René Laurentin fit ses constatations en 1975.

Favoriser la venue de malades est effectivement très important pour l’avenir de

Lourdes ainsi que pour sa fréquentation et ce pour plusieurs raisons. En termes de

liminalité, ils vivent une véritable séparation d’avec leur situation antérieure, surtout

s’ils partent d’un hôpital ou centre. Ils se trouvent entourés de nouvelles personnes, le

chemin est plus compliqué et souvent plus long. Suite à cette séparation, ils peuvent

vivre une liminalité très forte en particulier grâce aux communitas : la personne

handicapée ne fait pas son pèlerinage sans le soutien des autres. Et, en rentrant chez

elle (ou à l’établissement d’où elle est partie) pour la phase postiliminaire ou

l’agrégation, son retour a probablement plus d’impact que les pèlerins bien portants.

Elle parlera de son vécu et les personnes près d’elle (familles, infirmières, etc) qui

veillent sur son bien-être vont remarquer la liminalité, cette transformation vécue. Cet

impact est tellement important qu’il peut influencer. Bien que les chapelains, les

religieux et les religieuses soient ceux qui annoncent l’Evangile aux Sanctuaires, ce

sont les personnes handicapées ou malades qui le rapportent avec elles et en

témoignent.

La présence des personnes handicapés ou malades est probablement la raison même

pour laquelle la fréquentation des jeunes ne subit pas de baisse importante, car un

grand nombre participent à leur service. Mgr Brouwet se soucie dans sa publication

de l’enracinement de la foi des jeunes, qu’ils puissent découvrir la foi catholique et la

mettre en pratique.

Un autre grand sujet qu’il aborde dans sa publication est l’internationalisation. Il en

parle comme d’un constat, mais aussi en tant qu’objectif. La fréquentation de

Lourdes est déjà plus internationale, mais par les médias (télévision et internet), il

envisage une présence plus importante à l’étranger. Il cite aussi le besoin de rendre

94!LAURENTIN, René, « Lourdes dans la mutation actuelle, religion populaire et animation pastorale », Permanence et renouveau du pèlerinage, Lyon,!Chalet,!1976,!111.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 59!

Lourdes plus accessible par la disponibilité en plusieurs langues de liturgies et

documentations. Les langues européennes priment, mais avec l’évolution de la

fréquentation des pèlerins, il faut penser aux autres langues étrangères. Mgr Brouwet

ne mentionne pas quelles langues, mais il cite des liens avec d’autres pays comme la

Chine, la Corée du sud et le Liban, grâce aux communautés religieuses qui résident à

Lourdes, et la traduction en arabe semble être une priorité.95

Bien que la disponibilité de la documentation et la signalétique en plusieurs langues

soit très importante, la liturgie multilingue est compliquée et délicate, notamment en

ce qui concerne la séparation et le développement de communitas. Le risque de

rassemblement se faisant par langue et par peuple est l’élimination de cette séparation

et marginalisation nécessaire pour permettre une réelle liminalité. Est-ce que le

Chinois se trouvera suffisamment marginalisé , en liminalité, s’il se trouve entouré de

compatriotes parlant sa langue natale ? Mgr Brouwet, en comparant l’Esprit de

Pentecôte et la dispersion à Babel, semble comprendre que ce n’est pas une simple

question de traduction. Cependant, la nécessité de la séparation entre l’identité

intrinsèque et originelle du pèlerin à un statut d’« étranger » lors du pèlerinage et

contribuant à la liminalité n’est pas prise en compte.

95!Dans!un!entretien!téléphonique!avec!le!service!de!communication!des!Sanctuaires,!David!Torchala!spécifie!la!primordialité!de!l’inclusion!de!la!langue!arabe!au!Sanctuaire.!.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 60!

Figure 20. Plan du Sanctuaire Notre Dame de Lourdes. Source : Service de Communication du Sanctuaire.

L’aménagement de la grotte

Les changements les plus radicaux qui sont proposés dans le traité Orientations sont

ceux projetés pour l’espace de la Grotte. L’objectif est de « rendre plus cohérent le

parcours des pèlerins », afin que le lieu soit plus harmonieux.96

Actuellement, pour arriver à la Grotte, les pèlerins passent d’abord devant des

distributeurs de médailles, puis les kiosques de cierges et les fontaines avant d’arriver

à la Grotte. Ensuite ils continuent vers les brûloirs pour y poser leurs cierges avant de

poursuivre le chemin vers les piscines. Enfin, ils peuvent soit traverser un pont pour

96!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations,!22.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 61!

prendre le chemin de croix de l’autre côté du Gave, soit retourner en sens inverse pour

repasser par la Grotte et visiter les églises.

Le manque de cohérence dans le parcours pour atteindre la Grotte est évident,

notamment à cause de l’emplacement du point de vente des cierges et des médailles,

ainsi que celui des fontaines. Celles-ci attirent un flux de personnes venant y remplir

des bidons et des bouteilles d’eau, ce qui perturbe, selon Mgr Brouwet, la méditation

lors du cheminement vers la Grotte.97 Ce geste, non-commandité dans ceux transmis

par Bernadette Soubirous, n’est pas un acte de prière. Effectivement, elle avait

demandé aux personnes de se laver dans cette eau et de la boire. Mgr Brouwet

propose donc de déplacer les fontaines de l’autre côté de la Grotte, afin qu’elles

puissent être visitées après son passage. Il suggère également que ces nouvelles

fontaines soient construites de façon à décourager le remplissage de bouteilles d’eau

et d’encourager le pèlerin davantage à la boire et à s’y laver.98 Mgr Brouwet n’est pas

le premier à rappeler que la Vierge n’a jamais demandé aux pèlerins de se baigner

dans l’eau de la Grotte. Mgr Perrier lui aussi avait notamment projeté de déplacer les

piscines de Lourdes de l’autre côté du Gave. Ce projet ayant pour but de mieux

préparer les pèlerins à ce geste, et aussi d’en simplifier l’acte, fut conçu en 2012 avant

que Mgr Brouwet prenne l’épiscopat, mais ne verra pas le jour. En effet, certaines

baignoires étaient dessinées de façon à permettre aux pèlerins de simplement s’y

baigner à genoux comme Bernadette l’avait fait.99 Or, ce projet, estimé à quatre

millions d’euros ne sera pas retenu, certainement faute de budget. Les piscines seront

restructurées à l’intérieur, mais non déplacées.

Ensuite, le déplacement des présentoirs de cierges individuels de l’autre côté du Gave

après la construction d’une passerelle formerait une sorte de chapelle de lumières, à

la suite de laquelle le pèlerin pourrait soit prendre le Chemin de Croix, soit le quitter

sans devoir repasser par la Grotte.

97!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations!24.!98!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations,!24.!99 GUENOIS Jean-Marie, « A Lourdes les piscines changent de place », Le Figaro, 19 janvier 2012, http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2012/01/19/01016-20120119ARTFIG00544--lourdes-les-piscines-changent-de-place.php, consulté le 3 mai 2014. !

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 62!

Les brûloirs seront déplacés à l’autre côté du Gave. Photo : l’auteure, 2012.

Tous ces changements laisseraient devant l’entrée de la Grotte une place libre que

Mgr Brouwet souhaite transformer en lieu de silence et de méditation. Dans ce

remaniement du Chemin, ce lieu pourrait préparer le pèlerin à son passage au lieu de

l’apparition.

Les inondations ont été sur certains points déclencheurs de quelques éléments compris

dans les Orientations. Le budget investi dans ces projets est sûrement plus

conservateur qu’initialement, mais l’aménagement prévu pour la « place de l’Eglise »

est directement lié aux risques d’inondation. Il constate le manque d’un lieu de

convivialité, un lieu informel de rencontre, car « le Sanctuaire lui-même est plutôt

réservé à la prière et à la liturgie. »100 Dans un entretien pour Radio Présence, Mgr

Brouwet explique que les pèlerins retournent dans leurs hôtels ou hébergements après

leur temps de repos et de convivialité. L’idée derrière la conception de ce lieu serait

que les pèlerins puissent rester plus longtemps à la Grotte, et y passer un temps de

100!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations,!26.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 63!

communion fraternelle, pour que « l’Eglise se retrouve dans la joie »101, en y créant

un lieu de fête, et y laissant la place à la spontanéité et au développement des

communitas.

Ce pôle de développement, présenté à la fin de la trentaine de pages qui composent

cette publication, est une nouvelle création ayant trois fonctions: faire connaître le

Sanctuaire à l’extérieur (agences de voyage, à l’étranger, etc), travailler avec les

acteurs économique des Hautes-Pyrénées, et trouver de nouvelles sources de

revenus.102 Suite à cette conclusion, la question de financement est enfin soulevée.

Le document n’évite pas l’utilisation du mot « crise », précisant que la crise

économique ainsi que celle de la foi chrétienne, et les inondations, sont les facteurs

qui contribuent à la diminution de fréquentation du site.103 Sans le moindre air

d’inquiétude, Mgr Brouwet explique cette période comme étant due aux

circonstances subies par le Sanctuaire en encourageant ces services à persévérer, à

être créatifs, et à rester fidèles à leur mission.104 Tant qu’ils restent fidèles à la

mission, explique-t-il, les Sanctuaires ont un avenir.

Dans cette publication, l’appel lancé par Mgr Brouwet est d’aller plus loin. Il parle

beaucoup d’évangélisation, et dans son entretien sur Radio Présence, il appelle les

services du Sanctuaire à « sortir de leurs guichets » et aller à la rencontre des

pèlerins. 105 Les orientations sont très positives, sans aucune critique du

fonctionnement du Sanctuaire. Le sujet très délicat qu’il ne traite pas, est celui des

« marchands du temple » à l’extérieur du Sanctuaire, mais qui a un impact très

important, surtout sur les touristes, ceux qui en arrivant aux portes du Sanctuaire sont

déjà méfiants de la « religion ».

101 BROUWET, MGR NICHOLAS, Interview sur Radio Présence, 11 février 2014 http://fr.lourdes-france.org/sites/default/files/mgr_brouwet_11fevrier.mp3 consulté 12 février 2014. 102!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations,!28.!103!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations,!30.!104!BROUWET!Mgr!Nicholas,!Orientations,!30.!!105 BROUWET, MGR NICHOLAS, Interview sur Radio Présence, 11 février 2014 http://fr.lourdes-france.org/sites/default/files/mgr_brouwet_11fevrier.mp3 consulté 12 février 2014. !

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 64!

Dans l’ensemble, la publication propose des changements qui vont faciliter le

parcours des pèlerins. Or, elle ne réussit pas à traiter le problème du tourisme, ces

touristes qui ne viennent pas avec une motivation fortement spirituelle et qui ne

s’identifient pas aux de pèlerins.

Mgr Brouwet propose dans cette publication une réflexion sur les moyens d’utiliser

internet pour faire des sondages sur les attentes des pèlerins. En quelque sorte cette

enquête existe déjà, en tout cas parmi les touristes. Tripadvisor.com, site web

international de tourisme, compte déjà plus de 600 avis de visiteurs du site du

Sanctuaire de Lourdes.

Les avis des touristes

Sur les 633 avis donnés sur tripadvisor.com,106 la majorité proviennent d’individus

ayant visité le Sanctuaire indépendamment des pèlerinages ou voyages organisés. Ils y

précisent s’ils sont catholiques, pratiquants, croyants ou non, et donc donnent un

éventail très large des fréquentations.

500 visiteurs donne un avis « excellent » et ensuite un éventail est présenté de

88 « très bon » , 28 « moyens » , 8 « médiocres », et 9 « horribles ». Les

commentaires ne sont pas sur la ville de Lourdes, mais précisément sur le Sanctuaire

Notre Dame de Lourdes en tant qu’ attraction touristique. Or, cela n’empêche pas les

visiteurs d’y mettre leurs avis sur l’environnement qui entoure le Sanctuaire, parfois

par erreur, car certains postes semblent être sur les hôtels à Lourdes, et non le

Sanctuaire. Souvent, ils parlent de leurs impressions sur toute l’expérience vécue lors

de leur venue au Sanctuaire.

Le point le plus déplaisant noté par les touristes est l’abondance de commerces,

surtout dans les rues en quittant les Sanctuaires. Certains des avis « excellent » ou

« très bien » précisent qu’il faut faire abstraction du côté commercial ou qu’il ne faut

pas être sceptique pour bien vivre la présence fortement commerciale autour du

Sanctuaire. D’autres insistent et précisent que la visite du Sanctuaire est un « must »

106!11!mai!2014!17h46.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 65!

pour les Catholiques, mais que même les non-croyants ou non-pratiquants peuvent

apprécier le lieu. Cependant la profusion d’ avis positifs n’empêche pas de soulever

le souci du mercantilisme de Lourdes comme d’un Las Vegas catholique ou tout

simplement une ville très touristique.

À la lecture des avis négatifs, le problème des commerces est cité dans 100% des avis

« horrible » et « médiocre », dans 64% des avis « moyen », dans 35% des avis « très

bon » et dans 10% des avis « excellent ». À moins d’arriver par la prairie, les

touristes et pèlerins doivent passer par ces grands axes menant au Sanctuaire dont le

Boulevard de la Grotte est le plus connu pour ses boutiques de souvenirs de piété.

Ces commerces d’articles religieux, ainsi que les hôtels et les restaurants de Lourdes

dépendent du marché du pèlerinage. La diminution du nombre de personnes

fréquentant le Sanctuaire pose une véritable menace à leurs revenus et sa survie.

Politiques

Dans le cadre de la politique, surtout dans les mois précédant les élections

municipales, chaque candidat a dû faire ses propres constats sur le problème de

Lourdes et proposer des solutions qui plaisent au plus de monde possible. D’un côté

les commerçants dépendent d’une bonne fréquentation du Sanctuaire, et de l’autre

côté les habitants de Lourdes évitent la ville basse où se trouve le Sanctuaire et ses

alentours, la partie « religieuse » de la ville. Ils se soucient de l’avenir de leurs

enfants, mais aussi de la nuisance qu’amène la fréquentation d’autant de personnes

dans une petite ville de quinze mille habitants. S’y ajoute la mission du Sanctuaire

qui a des priorités au-delà de celles de la vie de Lourdes : donc celle d’accueillir le

plus de monde possible, alors ils se préoccupent de l’aménagement de la ville pour

l’accueil. Les candidats quant à eux ont des motivations politiques qui influencent

leurs constats et solutions pour le problème de la baisse de fréquentation de la ville.

Jean-Pierre Artiganave, maire UMP pendant les 14 dernières années, est le premier à

blâmer les circonstances, notamment de la crise économique et de l’évolution du

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 66!

modèle de pèlerinage vers l’individualité.107 Pour ces raisons-là, il a proposé

plusieurs « mesures phares » pour « renforcer l’attractivité touristique de

Lourdes ».108 Il voulait diversifier l’offre touristique à Lourdes par des projets de

valorisation des grands sites, ainsi que des projets de communication,

commercialisation et promotion de la ville. Ceci suggère qu’il existe un besoin

d’attirer les touristes autrement que par le Sanctuaire. En visant le futur, M.

Artiganave voyait l’avenir de Lourdes hors son lieu de pèlerinage qui est le

Sanctuaire, et constatait le besoin développer un tourisme plus diversifié ainsi que

d’autres industries durables. Cependant, il n’a pas baissé les bras par rapport à

l’avenir du Sanctuaire. En janvier 2014, il a invité le Pape François à venir à Lourdes

en 2015.

Cette invitation est très intéressante, non seulement par son aspect politique mais

aussi par rapport à l’avenir du Sanctuaire. Une visite papale en 2015 ferait une

deuxième visite du Saint Siège en moins de 10 ans et serait stratégique du point de

vue économique de la ville. Le Pape François connaît une popularité sans précédant,

ce qui attirerait probablement une foule bien plus grande que celle que Benoît XVI y a

rassemblée en 2008. Une telle visite permettrait de régénérer les revenus de la ville

(voir ceux de la région) et le Sanctuaire, mais démontre peut-être une évolution

stratégique dans le modèle de pèlerinage vers l’attrait de l’évènementiel. Il est

difficile de savoir si cette invitation fait partie d’une stratégie à court ou long terme.

En supposant qu’il s’agit de ce dernier, en ciblant la création d’un événementiel, la

ville de Lourdes et son Sanctuaire feraient-ils augmenter la fréquentation de façon

continue, ou créeraient-ils plutôt une mutation qui entrainerait un déclin plus

considérable ?

M. Artiganave n’est pas seul à envisager cette solution au problème de Lourdes.

Claude Heintz, ancien séminariste et candidat pour le Front National, se tourne lui

aussi vers les événementiels. Il consacre un article entier au besoin de fêter Noël à

Lourdes, avec un marché de Noël comme à Toulouse ou Strasbourg, avec chorales et

illuminations, « afin que touristes et pèlerins viennent en nombre entre Noël et

107!ARTIGANAVE!JeanePierre,!«!Questions!de!femmes!à!JeanePierre!Artiganave!»!publication!de!campagne.!108!ARTIGANAVE!JeanePierre,!publication!sur!ses!projets.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 67!

l’Epiphanie. »109 Il propose de faire de Lourdes une ville de salons et de congrès,

pour faire travailler les commerçants et les hôteliers. Il ne cache pas sa foi catholique

et propose également de soutenir le Sanctuaire dans ses difficultés financières suite

aux inondations.

Ces interlocuteurs sont rejoints dans leurs propositions par Josette Bourdeu qui

emporte les élections au deuxième tour. Elle fait les constats les plus pointus sur l’état

actuel de Lourdes et propose donc des solutions encore plus ciblées. Elle fait 5

constats :

• L’économie!et!les!emplois!sont!menacés.!

• Les!Lourdais!quittent!la!ville!(!e1000!habitants!entre!2006!et!2011)!

• Lourdes!a!perdu!son!dynamisme,!elle!se!déshumanise!et!vieillit.!

• Lourdes!s’est!désorganisée,!s’est!enclavée,!elle!n’a!pas!su!se!réinventer.!

• La!municipalité!a!laissé!la!qualité!de!vie!à!Lourdes!se!détériorer.110!

!

A partir de ces constats et en les développant dans son programme, elle prétend que

Lourdes vit une crise identitaire qui se voit dans toutes les domaines. Elle aussi

propose que Lourdes devienne un lieu de congrès, mais elle désire aussi développer

l’identité de Lourdes, en concrétisant les liens entre Lourdes et le Vatican par la

création d’une antenne de musées du Vatican.

Cette idée renforcée par celle d’un festival de l’art sacré pourrait encourager les

pèlerins à rester un jour de plus, ou leur donner une raison supplémentaire de venir à

Lourdes. (Or, à long terme, il n’est pas sue que le problème de la crise identitaire

serait réglé par ces idées) Développer son identité, en faisant de Lourdes une ville

catholique, pourrait attirer à une échelle réduite, comme Rome et le Vatican, à la fois

109!HEINTZ,!Claude,!«!Les!habitants!de!Lourdes!n’onteils!pas!droit!a!un!vrai!marché!de!noël!digne!de!ce!nom!?!»,!lourdesavecclaudeheintz.wordpress.com,'http://lourdesavecclaudeheintz.wordpress.com/2013/12/24/lesehabitantsedeelourdesenonteilsepasedroiteaeunevraiemarcheedeenoeledigneedeeceenom/!consulté!6!janvier!2014.!!110!BOURDEAU!Josette,!«!Lourdes,!Terre!d’Avenirs!»,!publication'de'campagne'2014,'http://www.josettebourdeu.fr/notreeprogramme/!consulté!6!janvier.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 68!

les touristes et les pèlerins, non seulement à un lieu de pèlerinage mais à plusieurs

lieux religieux et événementiels.

En tout cas, les Lourdais furent plus convaincus par l’approche concrète de Josette

Bourdeu. L’invitation du pape étant déjà lancée par le maire sortant, le lien avec le

Vatican serait fortifié par la possibilité d’antenne de musées et la venue du Pape

François.

L’influence papale : primordiale au pèlerinage marial

L’influence du pape est peut-être sous-estimée à Lourdes. Les visites papales ont

attiré des foules, mais le dévouement du pape à la Vierge semble aussi influencer le

dévouement des fidèles. La croissance de la fréquentation à Lourdes a explosé après

la deuxième guerre mondiale pendant la papauté de Pie XII, un pape connu pour sa

dévotion mariale. La période de croissance continuera jusqu’en 2005, l’année du

décès du pape Jean Paul II. Lors de la papauté de Benoît XVI une baisse est

constatée. Malgré sa visite à Lourdes en 2008, Benoît XVI était moins connu pour sa

dévotion à la Vierge, et la fréquentation du lieu marial stagnait.

S’agit-il donc d’une influence similaire à la transmission du charisme de Weber ? La

dévotion à la Vierge Marie et la place du pèlerinage sont-elles liées au charisme du

pape ? Ceci exige une étude plus approfondie sur le dévouement des papes qui

dépasse le cadre de l’étude actuelle, mais la papauté de François pourrait révéler

l’impact du pape sur la fréquentation de Lourdes.

Si le dévouement des pèlerins dépend vraiment du celui du pape, l’avenir du

pèlerinage à Lourdes fluctuera selon la papauté, mais ne disparaitra pas tant que la

vénération de la Vierge sera une pratique de l’Eglise Catholique.

Un chemin alternatif à l’exemple de Rocamadour

Chacun des candidats aux élections municipales a également proposé le

développement du tourisme de la ville hors pèlerinage. La ville de Lourdes,

jusqu’alors dépendante du Sanctuaire, pourrait renverser la situation actuelle en

faisant du Sanctuaire une dépendance de la ville. Ce fut le cas pour le village de

Rocamadour, bien que cela ne fût pas intentionnel.

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 69!

Rocamadour était un des lieux dits « dormants », ayant connu l’apogée de sa

popularité aux XI et XIIème siècles. Au XVème, le lieu était délabré et dormant

jusqu’au XIXème siècle où le zèle marial permit de motiver sa rénovation. Alors que

le moyens de transport se développaient en France, Rocamadour est devenu le

« deuxième site touristique de France », un lieu donc populaire pour toutes sortes de

touristes.111 Le tourisme à Rocamadour se développe et semble s’éloigner de plus en

plus de son identité religieuse. Le point tournant des années soixante-dix fut mené

par l’installation d’ un parc à singes et un parc à aigles.

Les activités proposées aux pèlerins n’ont pas cessé d’augmenter depuis que le

tourisme séculier semble avoir pris le dessus sur le pèlerinage. Les messes

continuent, mais contrairement à Lourdes, le côté religieux de Rocamadour ne

s’impose plus et reste discret. L’office de tourisme tente de jouer la carte du site

religieux, ainsi que le Diocèse de Cahors, mais sans trop de succès. Le musée d’art

sacré fut une grosse dépense qui n’a pas réussi à se rembourser.112

Ce tourisme séculier primant sur le pèlerinage n’est indésirable que pour le Diocèse.

Selon les recherches de Deanna Weibl, les commerçants, les hôteliers et les

restaurateurs sont satisfaits de l’aspect séculier du tourisme de Rocamadour, et

constatent que sans ce lieu de pèlerinage, les touristes viendraient toujours.

Cependant plusieurs éléments distinguent Rocamadour de Lourdes. La nature du

pèlerinage à Lourdes est plus définie, plus récente et reconnue. L’âge d’or de ce

dernier se trouve au XXème siècle, et celui de Rocamadour au XIème. Or,

l’important est cette réorientation du centre de l’entéléchie (c’est-à-dire de la force

attirante du lieu). À Rocamadour, la force immanente n’est plus générée par le lieu de

pèlerinage mais par les lieux de tourisme. Ceci déplait surement à l‘Eglise, mais tant

que les visiteurs continuent à venir au village, toutes les autres entités concernées sont

satisfaites.

111!WEIBEL, Deane, « The Virgin Mary Versus the Monkeys », Religious innovation in the global age: essays on the construction of spirituality. North Carolina, McFarland Publishing, 2005.!248.!112!WEIBEL, Deane, « The Virgin Mary Versus the Monkeys », 248.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 70!

Une telle réorientation est-elle envisageable pour Lourdes ? Pour Rocamadour il ne

s’agissait pas d’une baisse de fréquentation sur quelques années, mais d’une

détérioration sur plusieurs siècles et en 1479, la chapelle de Notre Dame fut écrasée

par l’écroulement d’une falaise. Rocamadour a subi tellement de difficultés entre le

XVème et le XIXème qu’il semble miraculeux que ce lieu existe encore.113 La baisse

de fréquentation à Lourdes n’est donc pas comparable au déclin de Rocamadour.

Quant à son réveil en tant que lieu touristique séculier, cela n’était pas prévu.

L’arrivée des singes en 1974 n’était pas une stratégie de la part du village, mais un

aménagement chanceux permettant de transformer l’identité touristique du village.

Les pèlerins sont aujourd’hui une minorité, et se perdent dans la foule de touristes.

Cette réalité commence à se voir à Lourdes à une différence près : les pèlerins et les

touristes ont les mêmes lieux à visiter.

Lourdes n’a pas d’équivalent aux lieux d’attraction non-religieux de Rocamadour.

Même s’il existe d’autres lieux d’attraction que les lieux religieux, ils sont très peu

nombreux, et aucun lieu a le potentiel d’attirer un grand nombre de touristes. Le

Sanctuaire et les lieux liés aux apparitions sont les seuls qui soient suffisamment

développés.

Le défi qui demeure pour le Sanctuaire est la conversion du touriste en pèlerin. La

ville de Lourdes tente de développer le tourisme séculier et les visiteurs au Sanctuaire

viennent de plus en plus en dehors du contexte d’un pèlerinage organisé. Mgr

Brouwet encourage les services du Sanctuaire à sortir de leurs guichets et aller vers

les visiteurs, mettant en avant l’évangélisation.

Contrairement à la notion traditionnelle, le Sanctuaire de Lourdes risque de renverser

le schéma Turner sur le pèlerinage, en souhaitant que les visiteurs arrivent en tant que

touristes et s’en retourne, pèlerins. Cette approche met la liminalité avant la

préliminalité, en émettant l’hypothèse que cela soit même possible, ou supprime

113!WEIBEL, Deane,!«!Kidnapping!the!Virgin,!the!Reinterpretation!of!a!Roman!Catholic!Shrine!by!Religious!Creatives!»,!University!of!California,!San!Diego,!non!publié,'44.!

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 71!

entièrement la préliminalité et réduit le pèlerinage à la liminalité seule, en le

transformant en but au lieu de moyen.

L’entéléchie du Sanctuaire est composée de deux entéléchies différentes : l’entéléchie

de pèlerinage face à l’entéléchie de tourisme. Une est une force qui tire vers le

spirituel et vers la liminalité. L’autre, tire le développement du lieu vers le tourisme

et vers la commercialisation de la ville. A défaut de trouver un moyen de coexister,

ces deux forces vont continuer à lutter l’une contre l’autre jusqu’au jour où une

primera sur l’autre.

Distributeur de votifs. Photo : L’auteure 2013.

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 72!

Figure 21. La fréquentation de Lourdes de 1858 à nos jours. Sources : Documents fournis par les Services du Sanctuaire.

(Annexe 2)

Lour

des:

Fré

quen

tatio

n de

18

58 à

nos

jour

s

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 73!

Conclusion Depuis ses origines, le taux de fréquentation de pèlerins à Lourdes a connu une

évolution, avec des pics, des croissances et des décroissances. Pendant un temps, la

fréquentation de ce petit lieu dans les Hautes-Pyrénées semblait augmenter sans cesse.

Or, depuis les origines de ce phénomène, plusieurs décrues ont eu lieu mais toute

baisse ou stagnation fut éphémère, ne durant pas plus de quelques années avant de

repartir à la hausse.

Aujourd’hui, le Sanctuaire se trouve dans une situation nouvelle, une période de

diminution qui dure depuis une dizaine d’années. Pendant cette période, et en

parallèle aux modèles créés par les taux de fréquentation précédents, des pics

apparaissent en 2004, 2008 et 2011, années où des foules importantes ont été attirées

à la Grotte par des événementiels, mais ceux-ci masquent l’état réel d’un changement

de cycle en déclin. Depuis deux ans, Lourdes est confrontée à une décroissance

prévisible depuis une décennie.

Ce ralentissement peut être entièrement attribué au repliement en masse des pèlerins

européens. Les Français, les Italiens, les Espagnols et les Belges étaient autrefois les

nationalités les plus représentées à la Grotte de Massabielle. Cependant, même si pour

l’instant ils continuent à être les plus nombreux, leur taux de fréquentation continue

de baisser alors que celui des pays de l’Asie ou de l’Amérique du Sud ne cesse

d’augmenter rapidement, avec des pèlerins qui traversent le monde entier pour

atteindre la petite ville de Lourdes.

Justement, ce voyage long et difficile est ce qui manque aux Européens. Le

pèlerinage n’est pas un lieu, mais un cheminement transformateur vers un lieu.

Depuis l’arrivée des compagnies aériennes low-cost, la suppression des trains

spécifiquement réservés et la facilité du transport moderne, le chemin de pèlerinage

ne permet plus cette séparation de la vie quotidienne, nécessaire à la phase de

marginalisation d’après les Turner. Leur modèle, qui a été adapté de celui des rites de

passage tribaux, émet l’hypothèse selon laquelle un pèlerinage est un processus. Or, la

phase préliminaire, dite de séparation, est vitale à l’efficacité des suivantes.

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 74!

Les pèlerins recherchent inconsciemment ou consciemment ce chemin, cette

préparation à la transformation. Les chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle

connaissent actuellement une résurgence importante. Or, le chemin imposé aux

pèlerins, leur permet une séparation réelle de leur quotidien et de leur identité pour

ensuite éventuellement en revêtir une nouvelle. Sur ces chemins, les communitas se

forment aussi, permettant un regroupement de personnes en cheminement vers un

objectif liminaire, de transformation et de conversion communes. Or, cette

séparation ne doit pas être uniquement géographique, mais aussi culturelle. La

mondialisation et la globalisation ont rendu cette dernière plus difficile, surtout pour

les pèlerins européens qui se voient dans la nécessité de chercher des lieux plus

éloignés pour se sentir devenir étranger. Les lieux de pèlerinage comme Medjugorje

et Israël attirent donc ces pèlerins, notamment les Italiens.

Il convient de souligner que ces lieux, moins développés que Lourdes, permettent une

certaine spontanéité dans les pratiques. Plus Lourdes se développe et se structure,

moins elle offre de surprise. La liturgie est maintenant centrale à un pèlerinage à la

grotte mais elle empêcherait la spontanéité du pèlerin. De plus, depuis 1983, le

pèlerinage fait partie intégrante du droit canonique, ainsi assimilé à part entière dans

un rituel officiel de l’Eglise. Par conséquence, ce n’est plus une phase de séparation,

mais d’intégration.

Mgr Brouwet souhaiterait répondre à ces soucis que nous venons de soulever. Dans

les Orientations, il propose donc plusieurs solutions afin d’améliorer le Sanctuaire et

le rendre plus cohérent avec le message de Bernadette Soubirous, et en parallèle le

cheminement nécessaire au pèlerinage. L’aménagement de la Grotte proposé serait

propice à la liminalité, éliminant les distractions causées par les ventes de cierges et

le remplissage des bouteilles d’eau déplacés ailleurs. Certaines de ses propositions

rendraient le temps passé au Sanctuaire plus propice à un recueillement spirituel, mais

risque également d’empêcher la possibilité d’une séparation de sa communauté, sa

culture et sa langue.

L’équilibre doit être trouvé entre le tourisme religieux et le pèlerinage. En 2014,

Josette Bourdeu et les autres candidats au poste de maire proposaient que Lourdes

devienne une ville de congrès, développant ainsi d’autres lieux touristiques. Cette

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 75!

solution a été efficace à Rocamadour, seulement, là, le développement des attractions

touristiques y était entièrement spontané. L’église de Rocamadour reste déçue de la

présence imposante des touristes face au manque de pèlerins.

Cette commercialisation du lieu pose un autre problème. Le mélange touriste-pèlerin

attire les « marchands du temple » qui ont un impact très négatif sur le recueillement

spirituel. Le passage devant des centaines de magasins d’articles religieux demeure

problématique pour les pèlerins. Certains arrivent à faire la part entre les affaires

financières et la démarche spirituelle. Mais d’autres rentrent de Lourdes anéantis par

la présence de ces boutiques.

Les années futures ont une importance primordiale pour l’avenir du Sanctuaire de

Lourdes. Quoiqu’il soit peu envisageable que ce lieu soit laissé à l’abandon, la survie

de Lourdes dépend presque entièrement de son Sanctuaire. Les futurs taux de

fréquentation de Lourdes pourraient dépendre aussi de la dévotion papale à la Vierge,

et en l’occurrence donc du Pape François, car un lien semble subsister entre ces deux

occurrences.

L’évolution du pèlerinage à Lourdes est unique. La notion de chemin de pèlerin pour

y accéder doit être éliminé au profit d’un cheminement intérieur permettant l’arrivée

d’un touriste qui repartira pèlerin. Lourdes franchit le pas vers un nouveau cycle, une

évolution du rôle qu’un lieu du pèlerinage joue dans la vie des fidèles. La ville de

Lourdes vit donc sa propre liminalité, son identité étant remise en question et

transformée.

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 76!

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Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 80!

ANNEXES

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

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ANNEXE 1 – Dossier du bilan 2013. Source : Les Services du Sanctuaire

L'activité La fréquentation

• Méthodes de recension et d'estimation Les pèlerins recensés Les pèlerins recensés sont ceux qui viennent dans un cadre organisé, ce qui représente environ 500 pèlerinages et quelques 4 500 groupes. Ils sont entre 600 et 700 milles pèlerins se rendant ainsi à Lourdes. Ces chiffres sont extrêmement précis et fiables, car ils correspondent à des réservations effectuées auprès des services d’accueil des Sanctuaires tels le Service Planification, le Centre d’information et le Service Jeunes. Les pèlerins estimés Outre les pèlerins recensés, les Sanctuaires s'emploient à estimer le nombre réel de pèlerins et de visiteurs qui se rendent sur le domaine. Pour cela, une méthode de comptage a été instaurée en 2001. Depuis, l’opération est renouvelée chaque année. Ainsi, une journée par mois, différents services sont sollicités : − d'une part, le service sécurité compte pendant 24 heures, les pèlerins qui passent à la

Grotte.

− d'autre part, les sacristains comptent simultanément les fidèles qui assistent aux messes

d'horaire (messes célébrées pendant la journée par les chapelains de Lourdes auxquelles assistent plus particulièrement les pèlerins isolés).

• pour ne pas fausser ces données, les opérations de comptage ne sont pas menées les jours de messe internationale ou de célébrations exceptionnelles.

Grâce à ces opérations de comptage, nous pouvons déterminer un ratio de 10.54, que l'on peut appliquer à l'ensemble de l'année 2013. Ainsi, notre estimation de la fréquentation pour la saison 2013 est de 5 833 595 pèlerins. Soit une baisse de 3,16 % par rapport à 2012.

Les résultats de ce comptage nous montrent qu'environ 20 000 pèlerins passent quotidiennement dans la Grotte d’avril à octobre.

On a ainsi compté 553 472 pèlerins assistant aux messes d'horaires en 2013

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 84!

Annexes 4 – INSEE Hotels 2010.xls Source : Documents fournis par l’Office de Tourisme de Lourdes

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 91!

ANNEXE 9

Estimation de la fréquentation globaleChaque année, les Sanctuaires s’emploient à estimer le nombre réel de pèlerins et de visiteurs qui se rendent sur le domaine. Une méthode de comptage a été ins-taurée en 2001 :

d’une part, le service sécurité compte pendant 24 heures, les pèlerins qui passent à la Grotte.

d’autre part, les sacristains comptent simultané-ment les fidèles qui assistent aux messes d’horaire (messes célébrées pendant la journée par les cha-pelains de Lourdes auxquelles assistent plus par-ticulièrement les pèlerins isolés).

Grâce à ces opérations de comptage, nous pouvons déterminer un ratio de 10.257, que l’on peut appliquer à l’ensemble de l’année 2011.

Ainsi, notre estimation de la fréquentation pour la saison 2011 est de 6  291 345 pèlerins. Soit une hausse de 3.23 % par rapport à 2010.

Les pèlerins recensésLes pèlerins recensés sont ceux qui viennent dans un cadre organisé, ce qui représente environ 500 pèleri-nages et quelques 4 500 groupes.

Ils sont près de 800 000 pèlerins se rendant ainsi à Lourdes. Ces chiffres correspondent à des réserva-tions effectuées auprès des services d’accueil des Sanc-tuaires tels le secrétariat général et le centre d’infor-mation.

Pour l’année 2011, les services de réservation des Sanctuaires ont recensés 783 196 pèlerins parmi les-quels on peut distinguer :

116 132 jeunes (+ 45 % par rapport à 2010)87 452 hospitaliers (- 8 % par rapport à 2010) 53 582 pèlerins malades (- 10 % par rapport à 2010)13 541 prêtres (- 8 % par rapport à 2010) 437 évêques et dignitaires (- 5 % par rapport à 2010)

Moyens de transportAu cours de l’année 2011, 333 trains spéciaux ont été affrétés. Cela représente 187 054 pèlerins (- 9 % par rapport à 2010) dont plus de 14 000 malades. Du côté du transport aérien, l’aéroport Tarbes-Lourdes-Py-rénées a compté 5 485 mouvements d’avions, soit un total de 452 327 voyageurs.

Sources : S.N.C.F. et aéroport Tarbes-Lourdes-Pyrénées

Répartition et courbe d’évolutionLes graphiques proposés en page suivante détaillent la répartition géographique des pèlerins et l’évolution de leur nombre depuis 10 ans.

Sanctuaires Notre-Dame de Lourdes - Service Communication - Presse Tél : 05.62.42.78.01 Fax : 05.62.42.89.51 E-mail : [email protected]

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Sanctuaires Notre-Dame de Lourdes - Service Communication - Presse Tél : 05.62.42.78.01 Fax : 05.62.42.89.51 E-mail : [email protected]

Evolution de la fréquentation des pèlerins recensés

Répartition géographique des pèlerins recensés

MALTE0.53%

PORTUGAL0.77%

SUISSE1.39%

PAYS-BAS1.13%

AUTRICHE0.52%

FRANCE41.69%

ITALIE25.64%

ESPAGNE6.83%

GRANDE-BRETAGNE3.93%

IRLANDE3.15%

ALLEMAGNE2.60%

BELGIQUE2.16%

AMERIQUE DU NORD2.15%

POLOGNE2.08%

EUROPE DE L'EST2.08%

ASIE DU SUD-EST2.00%

OCEANIE0.10%

LUXEMBOURG0.13%

PROCHE ORIENT0.19%

AFRIQUE 0.20%

AMERIQUE DU SUD0.72%

888920838631

1466350

870274783196

825868823170835260

858868814358

872794921321

920977

0

200000

400000

600000

800000

1000000

1200000

1400000

1600000

1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

! 93!

Analyse de la fréquentation

Afin d’expliquer tous ces chiffres et pour bien les comprendre, il est important d’en saisir le contexte.

- baisse de 14% de la fréquentation des italiens : cette diminution peut s’expliquer par plusieurs fac-teurs ; d’une part les importantes difficultés écono-miques et politiques traversées par le pays en 2011 et d’autre part la complexité du problème du transport ferroviaire des pèlerins. Comme l’Italie, d’autres nationalités connaissent une baisse sensible telles que la France, l’Allemagne, la Belgique et les pays d’Europe de l’Est. À contrario, l’Espagne, la Grande-Bretagne, l’Irlande, l’Amérique du Nord, l’Amérique du Sud, l’Afrique et le Proche-Orient voient leur nombre de pèlerins croître de ma-nière importante (voir notre graphique).

- hausse spectaculaire de la fréquentation des jeunes de + 45 % : cette forte progression se comprend à tra-vers le déroulement des J.M.J. à Madrid, de nombreux participants ayant fait une halte à Lourdes. L’énergie du Service Jeunes des Sanctuaires a permis de faire de cet événement un véritable succès pour Lourdes.

- la baisse de la fréquentation des pèlerins recensés d’environ 5% par rapport à 2010 s’explique par l’ha-bituelle différence entre les années paires et impaires (certains grands pèlerinages, comme le Fraternel ou le rassemblement des A.C.A.F.N. ne se déroulent que les années paires). Ils seront présents en 2012.

Sanctuaires Notre-Dame de Lourdes - Service Communication - Presse Tél : 05.62.42.78.01 Fax : 05.62.42.89.51 E-mail : [email protected]

En guise de conclusion, la hausse générale de nos estimations de fréquentation de 3 %, confrontée à la baisse des pèlerins recensés de 5 %, confirme la préférence de plus en plus prononcée pour une démarche de pèlerinage faite de manière individuelle ou en famille. C’est un défi pour les Sanctuaires de répondre aux attentes de ces pèlerins isolés.

Lauren Moore Le Pèlerinage à Lourdes, à la fin d’un cycle ?

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ANNEXE 11 Orientations de Mgr Brouwet http://fr.lourdes-france.org/sites/default/files/pdf/orientations_mgr_brouwet_fr.pdf

Mgr Nicolas Brouwetévêque de Tarbes et Lourdes

« Au servicede la joie des convives »Orientations pour le Sanctuaire de Lourdes

N° ISBN : 978-2-914971-33-1Sanctuaire Notre-Dame de Lourdes - 65100 Lourdes

2

SOMMAIRE

Introduction

L’annonce de l’Évangile

L’Internationalisation

L’Aménagement de l’espace de la Grotte

La « place de l’Église »

Les services du Sanctuaire

4

8

20

22

26

27

Noces de Cana - Mosaïque du Père Rupnik - Façade de la basilique du Rosaire.

3

« … nous mettre, comme à Cana, au service de la joie des convives sous la conduite de Marie »

4

Évangile selon saint Jean 2, 1-11

« Le troisième jour, il y eut un mariage à Cana de Galilée. La mère de Jésus était là. Jésus aussi avait été invité au mariage avec ses disciples. Or, on manqua de vin. La mère de Jésus lui dit : « Ils n’ont pas de vin. » Jésus lui répond : « Femme, que me veux-tu ? Mon heure n’est pas encore venue. » Sa mère dit à ceux qui ZLY]HPLU[�!�­�;V\[�JL�X\»PS�]V\Z�KPYH��MHP[LZ�SL��®�6Y��PS�`�H]HP[�Sn�ZP_�QHYYLZ�KL�WPLYYL�WV\Y�SLZ�W\YPÄJH[PVUZ�YP[\LSSLZ�des Juifs ; chacune contenait deux à trois mesures, (c’est-à-dire environ cent litres). Jésus dit à ceux qui servaient : « Remplissez d’eau les jarres. » Et ils les remplirent jusqu’au bord. Il leur dit : « Maintenant, puisez, et portez-en au maître du repas. » Ils lui en portèrent. Et celui-ci goûta l’eau changée en vin. Il ne savait pas d’où venait ce vin, mais ceux qui servaient le savaient bien, eux qui avaient puisé l’eau. Alors le maître du repas appelle le marié et lui dit : « Tout le monde sert le bon vin en premier et, lorsque les gens ont bien bu, on apporte le moins bon. Mais toi, tu as gardé le bon vin jusqu’à maintenant. » Tel fut le commencement des signes que Jésus accomplit. C’était à Cana de Galilée. Il manifesta sa gloire, et ses disciples crurent en lui. »

Introduction

5

Au Sanctuaire de Lourdes nous sommes au

service de la demande faite par la Vierge Marie

à Bernadette le mardi 2 mars 1858, lors de la

treizième apparition.

Quelle est donc notre mission ?

• Accueillir les pèlerinages en donnant accès à la

Grotte et à la source, en accompagnant les pèlerins

sur les pas de Bernadette à l’école de Notre-Dame.

• Bâtir l’Église en prêchant l’Évangile et en célébrant

les sacrements de l’eucharistie et de la réconciliation.

Dans cette pauvre Grotte de Massabielle, c’est un

coin du ciel qui a touché la terre pour que tous les pè-

lerins fassent l’expérience de la proximité, de la ten-

dresse et de la joie de Dieu dont Marie est le visage

et la servante.

Notre mission est de veiller à ce que tous ceux qui

viennent au Sanctuaire se laissent toucher devant la

Grotte par l’amour inconditionnel de Jésus. Notre

prédication, nos projets, nos initiatives, nos travaux

doivent aboutir à cela. Voilà la grandeur de notre res-

ponsabilité : nous mettre, comme à Cana, au service

de la joie des convives sous la conduite de Marie,

pour laisser le Seigneur accomplir son œuvre dans

les cœurs, une œuvre de miséricorde.

Notre Sanctuaire doit être le lieu où les hommes

et les femmes qui s’approchent de la Grotte com-

prennent combien ils sont aimés de Dieu.

Il nous faudra toujours revenir à cette mission, l’ap-

profondir, la développer, l’adapter aux circonstances

actuelles.

« Allez dire aux prêtres qu’on vienne icien procession et qu’on y bâtisse une chapelle. »

« Notre Sanctuaire doit être le lieu où les hommes et les femmes qui s’approchent de la Grotte comprennent combien ils sont aimés de Dieu. »

6

Introduction

7

Les évêques successifs, avec les recteurs, les cha-pelains et tous leurs collaborateurs, ont su, depuis les apparitions, se mettre au service des pèlerins et com-prendre leurs attentes, leurs soifs, leurs aspirations. Ils ont su expliquer les messages de Notre-Dame et en saisir la por-tée et l’urgence pour leur époque. Nous héritons d’une longue ex-périence de célébration de la grâce de Dieu et de prédication de l’Évangile. Le jubilé de 2008, pour les 150 ans des apparitions de Marie à Bernadette, a montré l’attachement des catholiques au Sanctuaire et sa renommée dans le monde. Il en a montré également la vitalité.

Nous avons acquis notre expérience en collaborant notamment avec des organismes de pèlerinages, qu’ils soient diocésains ou associatifs. Chaque année plus de 600 de ces groupes viennent à Lourdes. Ils repré-sentent la « colonne vertébrale » de notre saison de pèlerinages et en donnent le rythme. C’est grâce à eux que des centaines de milliers de chrétiens viennent à la

Grotte de Massabielle chaque année, souvent accom-pagnés par leurs évêques.

Je voudrais, dans ces pages, donner quelques VYPLU[H[PVUZ�WV\Y�SLZ�HUUtLZ�n�]LUPY�HÄU�X\»LUZLTISL��

chapelains et employés du Sanc-tuaire, hospitaliers et directeurs de pèlerinages, bénévoles et parte-naires du Sanctuaire, nous puissions travailler à mieux remplir la mission X\P� UV\Z� LZ[� JVUÄtL�� 4VU� VIQLJ[PM�est de donner une direction géné-rale pour nous aider dans le dis-cernement de nos projets futurs et dans les décisions que nous aurons

à prendre. N’hésitons pas à reprendre ces questions non seulement dans les réunions de travail au Sanc-tuaire mais également dans les congrès de pèlerinages et les rencontres des Hospitalités !

Ces orientations sont le fruit d’un travail de deux années avec le Conseil de Lourdes, Conseil compo-sé de chapelains et de cadres du Sanctuaire que je réunis tous les mois.

« Notre mission estde veiller à ce que tous ceux qui viennent au Sanctuaire se laissent toucher devant la Grotte par l’amour inconditionnel de Jésus. »

8

L’annonce de l’Évangile

Pendant les années qui viennent je voudrais que nous fassions porter nos efforts d’accueil sur les pèlerins individuels, les personnes malades ou

handicapées, les familles et les jeunes.

Les pèlerins individuelsNous le savons bien, les pèlerins les plus nombreux sont ceux qui viennent, non dans un pèlerinage porté par un diocèse ou une association, mais en s’orga-nisant eux-mêmes. Ce sont des individus, des fa-milles, des groupes d’amis. Ils viennent à Lourdes pour un ou plusieurs jours. Leur pèlerinage s’inscrit par-fois dans un voyage plus vaste : des vacances dans les Pyrénées, en France ou en Europe. Beaucoup connaissent déjà le Sanc-tuaire. Mais nombreux sont ceux qui y viennent pour la

première fois et qui ne connaissent pas le message de Lourdes. Parmi eux certains sont baptisés mais ne savent que peu de choses de la foi chrétienne. Certains ne sont pas chrétiens, appartiennent à une autre religion ou sont incroyants.

Nous avons une responsabilité particulière vis-à-vis de ces pèlerins-là. Nous devons continuer à ac-cueillir ceux qui viennent en pèlerinage organisé. Mais UV\Z�KL]VUZ�YtÅtJOPY�KL�THUPuYL�UV\]LSSL�n�S»HJJ\LPS�de ceux qui viennent individuellement ; en particulier ceux qui arrivent à Lourdes sans savoir ni ce qu’ils vont y trouver, ni comment ils vont vivre ces quelques

heures ou ces quelques jours à la Grotte de Massabielle.

Partons d’un postulat : tous ceux qui franchissent les grilles du Sanctuaire ont une attente. Une attente spiri-tuelle parce qu’ils savent que, dans ce lieu d’apparitions, le ciel a en quelque sorte touché la terre. Mais c’est aussi une attente très concrète vis-à-vis

« Partons d’un postulat : tous ceux qui franchissent les grilles du Sanctuaire ont une attente. Une attente spirituelle parce qu’ils savent que, dans ce lieu d’apparitions, le ciel a en quelque sorte touché la terre. Mais c’est aussi une attente très concrète vis-à-vis de nous parce qu’ils ont besoin d’être accompagnés dans leur démarche. »

9

de nous parce qu’ils ont be-

soin d’être accompagnés

dans leur démarche.

Je voudrais que, dans

SLZ�TVPZ�n�]LUPY��UV\Z�YtÅt-

chissions à cela : comment

accueillir, accompagner

et proposer la nouveau-

té de l’Évangile à ceux qui

viennent en pèlerinage sans

savoir ce qu’est Lourdes,

sans avoir de repères dans

la foi chrétienne, sans

même parfois savoir faire le

signe de la croix ou prier le Notre Père. Comment al-

lons-nous à leur rencontre en les accueillant tels qu’ils

sont, en respectant leur rythme sans craindre de leur

annoncer le Christ ?

C’est un vrai travail d’évangélisation qui demande

de la disponibilité, de l’écoute, de la patience et un

sens pastoral. Il faudra évidemment guider ces pèle-

rins vers des propositions déjà existantes comme le

ZLY]PJL�­�WuSLYPUZ�K»\U�QV\Y�®�V\�SL�ÄST�KL�WYtZLU[H[PVU�

du message de Lourdes.

Mais il faudra aussi savoir

prendre du temps avec seu-

lement quelques personnes

sans chercher à tout prix

S»LMÄJHJP[t�V\�SL�YLUKLTLU[��« J’imagine un choix

missionnaire capable de

transformer toute chose,

écrit le pape François dans

l’exhortation apostolique

Evangelii Gaudium��HÄU�X\L�les habitudes, les styles, les

horaires, le langage et toute

structure ecclésiale devienne un canal adéquat pour

l’évangélisation du monde actuel, plus que pour l’au-

to-préservation. La réforme des structures, qui exige

la conversion pastorale, ne peut se comprendre qu’en

ce sens : faire en sorte qu’elles deviennent toutes

plus missionnaires, que la pastorale ordinaire en

toutes ses instances soit plus expansive et ouverte,

qu’elle mette les agents pastoraux en constante atti-

tude de “sortie” et favorise ainsi la réponse positive de

Un pilote au service des pèlerins.

10

tous ceux auxquels Jésus offre son amitié. » Evangelii

Gaudium, 27.

Cet accueil, cette évangélisation est certainement

d’abord le travail des chapelains, des religieux et des

religieuses. Mais ce peut être aussi celui de volon-

taires, de jeunes, qui ont le désir d’annoncer le Christ,

en proposant une véritable initiation chrétienne.

Je veux, à ce sujet, que nous proposions des ca-

[tJOuZLZ� MVUKHTLU[HSLZ� H\� :HUJ[\HPYL� HÄU� K»PUZ[Y\PYL�dans la foi ceux qui demandent à avancer dans la vie

chrétienne. Le Sanctuaire de Lourdes est un lieu propice

WV\Y�LUJV\YHNLY�L[�MVY[PÄLY�UV[YL�YLSH[PVU�H]LJ�SL�*OYPZ[�Il est indispensable, également, que des chape-

lains continuent, dans le dynamisme de l’Année de

la foi, à assurer une présence et des catéchèses à

la Grotte, aux piscines et aux fontaines avec le désir

de faire connaître aux pèlerins combien ils sont aimés

de Dieu. Au cours des apparitions, la Vierge Marie a

présenté à Bernadette le visage de la tendresse de

Dieu pour l’humanité. Cette tendresse, cette sollici-

tude sont tout particulièrement visibles dans le sacre-

ment de la confession et de la réconciliation qui est le

sommet du pèlerinage à Lourdes.

Dans l’exhortation apostolique Evangelii Gaudium,

le pape François donne la clé de toute notre prédi-

cation : « Nous avons redécouvert que, dans la ca-

téchèse aussi, la première annonce ou “kérygme” a

un rôle fondamental, qui doit être au centre de l’ac-

tivité évangélisatrice et de tout objectif de renouveau

ecclésial. Le kérygme est trinitaire. C’est le feu de

l’Esprit qui se donne sous forme de langues et nous

fait croire en Jésus-Christ, qui, par sa mort et sa ré-

Z\YYLJ[PVU��UV\Z�Yt]uSL�L[�UV\Z�JVTT\UPX\L�S»PUÄUPL�miséricorde du Père. Dans la bouche du catéchiste

revient toujours la première annonce : “Jésus-Christ

« Il est indispensable, également, que des chapelains continuent,

dans le dynamisme de l’Année de la foi, à assurer une présence et des

catéchèses à la Grotte, aux piscines et aux fontaines avec le désir de faire

connaître aux pèlerins combien ils sont aimés de Dieu. »

L’annonce de l’Évangile

11

t’aime, il a donné sa vie pour te sauver, et maintenant

il est vivant à tes côtés, chaque jour, pour t’éclairer, pour

[L�MVY[PÄLY��WV\Y�[L�SPItYLY¹��®�Evangelii Gaudium, 164.Notre objectif est que chaque pèlerin reparte de

Lourdes avec ce message d’espérance dans le cœur.

L’Abbé Michel Baute, chapelain du Sanctuaire.

par

leur

s pr

opre

s moy

ens

dans le cadre d’u

n pè

lerin

age

orga

nisé

Pèlerins venant à Lourdes

IndividuelsFamilles

Groupes d’amis

Pèlerinageporté par un

diocèse ou uneassociation

12

Les personnes malades ou handicapéesÀ Lourdes, elles ont la première place. Je pense que

UV\Z�WV\]VUZ�v[YL�ÄLYZ�KL�SH�THUPuYL�KVU[�LSSLZ�ZVU[�accueillies, en particulier à l’Accueil Notre-Dame,

JOLa�SLZ�:µ\YZ�KL�:HPU[�-YHP�L[�H\�:HS\Z�0UÄYTVY\T�de l’UNITALSI.

Pourquoi des personnes

malades ou handicapées

viennent-elles à Lourdes ?

Pour y faire un pèlerinage

dans la foi. Notre mission

consiste à rendre ce pèleri-

nage possible et fructueux.

Il est indispensable que cha-

cune d’entre elles soit asso-

ciée, dans la mesure du possible, à la préparation du

pèlerinage et que nous sachions nous mettre, avant,

pendant et après le voyage, à leur écoute : à l’écoute

de leurs projets, de leurs désirs et de leurs attentes.

N’oublions pas que, souvent, ce sont ces per-

sonnes malades ou handicapées qui évangélisent les

personnes « bien portantes » par leur attachement au

*OYPZ[��WHY� SL\Y�WYPuYL��WHY� SL\Y� QVPL�L[� SL\Y�JVUÄHUJL�KHUZ� SL� :LPNUL\Y�� ,SSLZ� MVY[PÄLU[� UV[YL� LZWtYHUJL��Bien des témoignages ont été donnés dans ce sens,

venant d’ailleurs très souvent des pèlerins les plus

jeunes.

À ce sujet, certains pèlerinages cherchent à pro-

mouvoir une plus grande autonomie des personnes

malades ou handicapées. Il est

vrai que Lourdes a une longue

expérience de l’accompagne-

ment de ces pèlerins, en par-

ticulier grâce aux brancardiers

et à tous ceux qui assistent

les résidents des différents

Accueils. Mais des initiatives

nouvelles apparaissent pour

laisser aux personnes malades la plus grande auto-

nomie possible. Certains groupes leur proposent, par

exemple, de loger à l’hôtel avec les pèlerins valides.

1L�JYVPZ�X\»PS�UV\Z�MH\[�YtÅtJOPY��H]LJ�[V\Z�JL\_�X\P�

« … Je pense que nous pouvons être ÄLYZ�KL�SH�THUPuYL�KVU[�LSSLZ�ZVU[�accueillies, en particulier à l’Accueil Notre-Dame, chez les Sœurs de :HPU[�-YHP�L[�H\�:HS\Z�0UÄYTVY\T�KL�l’UNITALSI. »

L’annonce de l’Évangile

13Au service des malades à l’Accueil Notre-Dame.

14

sont engagés dans ces services, à ces initiatives et à notre manière d’être présents aux pèlerins malades.

,UÄU��UV\Z�ZH]VUZ�X\L� SL�UVTIYL�KL�WLYZVUULZ�malades est en légère diminution. Notamment celles qui sont les plus gravement atteintes. Cela est dû LU�WHY[PL�n�SH�KPMÄJ\S[t�JYVPZZHU[L�KL�SLZ�JVUK\PYL�H\�Sanctuaire par voie ferrée. Mais il y a une autre rai-son plus profonde : nous hésitons à inviter à Lourdes les personnes dont l’état de santé est fragile. Dans les hôpitaux, les cliniques, les maisons de retraite,

la direction craint par principe de laisser les résidents voyager. Voilà pourquoi ce sont les familles, les visi-teurs, les équipes d’aumônerie qui, dans un acte de JVUÄHUJL�LU�+PL\��KVP]LU[�SLZ�LUJV\YHNLY�n�ZL�YLUKYL�à Lourdes. Non pas d’abord pour y attendre un mi-YHJSL�THPZ�WV\Y�MVY[PÄLY�SL\Y�]PL�KL�MVP��SL\Y�LZWtYHUJL��leur enracinement personnel dans la vie de la grâce.

Nous ferons, en collaboration avec les Hospitalités et les directeurs de pèlerinages, des propositions aux diocèses et aux aumôneries pour favoriser la venue à Lourdes des personnes les plus fragiles.

« N’oublions pas que, souvent, ce sont ces personnes malades ou handicapées qui évangélisent les personnes « bien portantes » par leur attachement au Christ, par leur prière, par leur joie et leur JVUÄHUJL�KHUZ�SL�:LPNUL\Y��,SSLZ�MVY[PÄLU[�UV[YL�LZWtYHUJL��)PLU�KLZ�témoignages ont été donnés dans ce sens, venant d’ailleurs très souvent des pèlerins les plus jeunes. »

L’annonce de l’Évangile

15

Les famillesLes familles ont tout particulièrement besoin d’être

soutenues et aidées. Beaucoup d’entre elles

cherchent des lieux de ressourcement dans la foi où

chacun, parents et enfants, pourrait être encouragé

dans sa vie chrétienne. La personnalité de Berna-

dette, son humble parcours spirituel sous la conduite

de Marie, la vie de foi et de prière de la famille Soubi-

rous au Moulin de Boly et au cachot, le climat de ten-

dresse qui régnait en son sein, sont autant de sujets

de méditation pour les familles.

Avec toutes les structures du Sanctuaire, la

Cité Saint-Pierre, les communautés religieuses de

Lourdes, les pensions et les hôtels, nous verrons

comment accueillir les familles, en particulier celles qui

THUX\LU[� KL� TV`LUZ� ÄUHUJPLYZ� WV\Y� LU[YLWYLUKYL�un tel voyage. Il nous faudra aussi travailler à l’accueil

et à la garde des enfants en bas âge pour donner aux

parents la possibilité de prendre du temps pour eux.

Signalons que bien des grands-parents emmènent

leurs petits-enfants à Lourdes pour leur faire décou-

vrir, pendant les vacances, ce lieu de grâce et de res-

sourcement. Nous voulons, eux aussi, les encourager

et les aider à organiser ces séjours.

Le Sanctuaire est pour les jeunes une véritable école de vie.

16

« Les familles ont tout particulièrement besoin d’être ZV\[LU\LZ�L[�HPKtLZ��)LH\JV\W�d’entre elles cherchent des lieux de ressourcement dans la foi où chacun, parents et enfants, pourrait être encouragé dans sa vie chrétienne. La personnalité de )LYUHKL[[L��ZVU�O\TISL�WHYJV\YZ�spirituel sous la conduite de Marie, la vie de foi et de prière de la famille Soubirous au Moulin KL�)VS`�L[�H\�JHJOV[��SL�JSPTH[�de tendresse qui régnait en son sein, sont autant de sujets de méditation pour les familles. »

L’annonce de l’Évangile

17

Les jeunesLe Sanctuaire est pour les jeunes une véritable école

de vie. Par la liturgie, par le service des personnes

malades ou handicapées, par l’expérience qu’ils

peuvent faire de l’Église universelle, Lourdes est un

lieu privilégié pour découvrir, mettre en œuvre ou

développer les fondements de la vie chrétienne : la

louange de Dieu, la vie sacramentelle, le service des

autres – et en particulier des plus faibles – l’ouverture

à la catholicité, la rencontre de communautés chré-

tiennes dans leur diversité, la proximité de tous les

états de vie, la rencontre fraternelle des pasteurs de

l’Église – prêtres et évêques.

Avec le service « jeunes » du Sanctuaire nous verrons

comment développer de nouvelles propositions. No-

tamment pour que des jeunes soient, auprès d’autres

jeunes, des témoins ardents de la foi dans le Christ.

« … Par la liturgie, par le service des personnes malades ou handicapées, par l’expérience qu’ils peuvent faire de l’Église universelle, Lourdes est un lieu privilégié pour découvrir, mettre en œuvre ou développer les fondements de la vie chrétienne... »

18

« … la louange de Dieu, la vie sacramentelle, le service des autres – et en particulier des plus faibles – l’ouverture à la catholicité, la rencontre de communautés chrétiennes dans leur diversité, la proximité de tous les états de vie, la rencontre fraternelle des pasteurs de S»,NSPZL�¶�WYv[YLZ�L[�t]vX\LZ��®

L’annonce de l’Évangile

19

Comprendre lesattentes des pèlerinsAu sujet de l’accueil, il me semble nécessaire de développer un outil d’enquête auprès des pèlerins HÄU�KL�ZH]VPY�JVTTLU[�PSZ�Q\NLU[�SH�X\HSP[t�KL�UV[YL�HJJ\LPS�� 0S� LZ[� [YuZ�KPMÄJPSL�KL�WYLUKYL�KLZ�KtJPZPVUZ�si nous n’avons aucun moyen objectif de connaître ceux qui arrivent au Sanctuaire et de savoir si nous répondons à leurs attentes. Sans ces moyens d’en-quête nous raisonnons sur des impressions, des sen-timents qui ne correspondent pas toujours à la réalité. Certes les directeurs des pèlerinages sont des colla-borateurs précieux. Mais nous avons aussi à recueillir l’avis de ceux qui ne viennent pas dans des groupes constitués.

Il nous faudra aussi développer notre espace de dialogue sur internet pour rester en lien avec les pè-lerins et pour nous tenir au plus près de leurs ques-tions et de leurs suggestions. Y compris sur le plan spirituel.

20

L’internationalisation

Les pèlerins qui viennent de continents différents sont de plus en plus nombreux. Ils arrivent en petits groupes, en famille ; parfois avec des per-

sonnes malades, souvent avec des jeunes. Ils sont originaires d’Inde, du Sri Lanka, d’Australie, des USA, du Brésil, du Moyen-Orient, de Chine, de Corée, du Japon, d’Afrique…

Beaucoup d’entre eux entrent en contact avec des communautés religieuses amies qui résident à Lourdes (je pense aux sœurs coréennes, libanaises ou chinoises) et sont ainsi introduits au Sanctuaire. Nous devons poursuivre cet effort pour rendre le Sanctuaire accessible à tous et accueillant pour les pèlerins de tous les continents.

C’est par notre site internet que nous ferons mieux connaître le message de Lourdes et les possibilités of-fertes pour y venir en pèlerinage. J’aimerais que nous développions ce site avec des versions en langue arabe, chinoise et portugaise.

Avec notre télévision en ligne notre site peut être également une aide, un soutien, pour tous ceux qui ne peuvent se rendre à Lourdes et qui veulent pourtant être en communion avec ceux qui prient à la Grotte.

Il nous faut retravailler la signalétique dans le Sanc-[\HPYL�� 7V\Y� SH� ZPTWSPÄLY� L[� PUKPX\LY� KL� THUPuYL� [YuZ�claire les lieux les plus importants du pèlerinage. Mais en pensant également à ces langues nouvelles de sorte que tous les pèlerins se sentent accueillis. Il faudra aussi que des dépliants contenant un résumé du message de

L’internationalisation

LOURDES

21

Lourdes soient accessibles dans ces mêmes langues.Nous devons aussi poursuivre l’effort qui a été réali-

sé pour intégrer la diversité des langues dans la liturgie et dans les processions. À côté du français, de l’italien, de l’anglais et de l’espagnol, il faudra toujours être at-tentif aux groupes majoritairement présents pour pré-voir une lecture, des intentions de prière ou une partie du chapelet dans leur langue.

En revanche il faut veiller à ne pas alourdir les célé-brations par la répétition des lectures de la messe. La [YHK\J[PVU�KLZ�[L_[LZ�Z\Y�SLZ�tJYHUZ�WL\[�Z\MÄYL�

D’une manière générale les différentes langues doi-vent être accueillies dans la mesure de nos moyens. Mais l’usage de ces langues ne doit jamais prendre le pas sur le bon déroulement de la liturgie, sur sa beau-té, sa simplicité ou sa conformité aux rituels.

Soyons attentifs, par ailleurs, à ce que les langues n’entrent jamais en concurrence les unes avec les autres. Je demande à tous d’être compréhensifs à ce sujet et de ne pas laisser se développer un esprit de mécontentement et de division. C’est l’Esprit de Pen-tecôte qui doit nous animer et non la dispersion de Babel (Gn 11, 1-9).

Les pèlerins qui viennent de continents différents sont de plus en plus nombreux.

22

L’aménagement de l’espace de la Grotte

« … favoriser le silence et le recueillement à la Grotte »L’espace de la Grotte – de l’esplanade du Ro-

saire au pont des piscines – est le cœur de notre sanctuaire. Si l’accueil de tant de pèlerins est

possible, c’est précisément parce que les lieux se prêtent à recevoir la grâce de Lourdes. Le lieu des apparitions est facile d’accès, il est resté à ciel ouvert (l’expression trouve là toute sa force !). Le pèlerin est accueilli sur l’esplanade comme par les bras d’une mère. Il n’a pas de porte à franchir, pas d’escalier à monter. Il est là, tout de suite, à la place où Berna-dette se tenait devant Marie. Et avec tous ceux qui sont présents, quelle que soit leur condition, il pré-sente sa prière comme un pauvre devant Dieu.

Nous devons prendre soin de ce lieu de grâce. Et dans les trois ans qui viennent nous voudrions le réaménager pour :

• Rendre plus cohérent le parcours des pèlerins,• favoriser le silence et le recueillement à la Grotte,•�[YV\]LY�KLZ�ZVS\[PVUZ�H\_�Å\_�KLZ�NYV\WLZ�WLU-

dant la saison,• donner plus d’harmonie à l’ensemble du site.En travaillant avec un cabinet d’architecte il nous

a semblé judicieux de repenser l’ensemble de cet

espace même si les travaux devront s’étaler sur plu-ZPL\YZ�HUUtLZ�WV\Y�KLZ�YHPZVUZ�ÄUHUJPuYLZ�

• La zone qui sépare l’esplanade du Rosaire et la Grotte sera conçue comme un espace de prépara-tion au recueillement. On enlèvera non seulement les distributeurs de médailles et les kiosques des cierges mais également les fontaines pour éviter les distrac-tions et le bruit. Cette zone sera plantée d’arbres et invitera au silence.

• Le parvis de la Grotte restera en pleine lumière. L’aménagement du sol marquera ce lieu de prière et de méditation. Le mobilier sera refait ainsi que l’éclai-rage de la Grotte.

• La zone actuellement réservée aux cierges sera consacrée au geste de boire et de se laver, geste que Marie a demandé à Bernadette et qui fait partie de la tradition du pèlerinage à Lourdes. Les pèlerins accèderont donc aux fontaines après leur visite à la Grotte, ce qui est plus cohérent.

23

24

L’aménagement de l’espace de la Grotte

Ces nouvelles fontaines ne seront pas conçues

pour remplir des récipients d’eau de Lourdes. En ef-

fet il faut réserver ce lieu au geste demandé à Berna-

dette. Remplir des bouteilles ou des bidons n’est pas

un acte de prière. Il provoque beaucoup de bruit et

de mouvements. Il peut être fait ailleurs. Il nous reste

à trouver le lieu favorable.

• Le lieu actuel de stockage des cierges sera rem-

placé par une sacristie secondaire pour la Grotte. En

effet la sacristie actuelle est trop petite pour un grand

nombre de concélébrants. Le nouveau bâtiment,

égal en surface à l’ancien, contiendra aussi un lieu

de repos pour les hospitaliers. La sacristie actuelle

sera réaménagée avec un oratoire pour le Saint-Sa-

crement.

• Les piscines resteront à leur place et ne seront

donc pas déplacées de l’autre côté du Gave. Nous re-

verrons leur aménagement intérieur. Nous travaillons

aussi à la restructuration du « plateau » des piscines,

ce lieu d’attente des pèlerins qui désirent se baigner.

• Nous allons construire une nouvelle passerelle

en face des piscines. Après cette passerelle, sur

l’autre rive du Gave en remontant vers l’église Sainte-

25

Aménagement del’espace de la Grotte

Rendreplus cohérent

le parcoursdes pèlerins

Trouver dessolutions aux

flux des groupespendant la

saison

Favoriserle silence et lerecueillement

à la Grotte

Donner plusd’harmonie àl’ensemble

du site

Bernadette, nous disposerons les présentoirs pour les cierges. Ils formeront comme une chapelle de lumière et permettront aux pèlerins d’y poser leurs cierges individuels (les cierges les plus gros resteront à leur emplacement actuel).

• La nouvelle passerelle permettra donc aux pè-lerins d’accéder à cette chapelle de lumière et de repartir vers l’esplanade ou les sorties, sans passer directement devant la Grotte. Cette passerelle facilite-ra aussi à tous les pèlerins résidant à l’Accueil Notre-Dame l’accès aux piscines.

• Une autre passerelle sera construite plus tard en face de l’entrée de l’Accueil Notre-Dame, à la hauteur de la statue de saint Jean-Marie Vianney. De sorte que les résidents de l’Accueil n’aient pas à passer sous les arcades pour se rendre dans leur hébergement.

Tout cela doit bien entendu être travaillé en colla-boration avec les services de l’Etat garant des me-sures de protection contre les crues. A ce sujet, des études sont en cours pour examiner les dispositions n�WYLUKYL�HÄU�KL�WYV[tNLY�SLZ�SPL\_�SLZ�WS\Z�ZLUZPISLZ�en cas de nouvelles inondations.

26

La « place de l’Église »

A plus long terme, il me semble indispensable de repenser la zone des pavillons, de la chapelle Notre-Dame et du bâtiment abritant le musée

de Bernadette et la communication. Cet espace se trouve en zone inondable. Il nous faudra évidemment là aussi collaborer avec la municipalité de Lourdes et les services de la Préfecture. Avec les responsables de l’Hospitalité Notre-Dame de Lourdes et ceux des pavillons nous travaillerons à réaménager cette zone

pour en faire un lieu de rencontre, de fête, de pi-que-nique, bref un lieu de vie pour tous les pèlerins. Le Sanctuaire lui-même est plutôt réservé à la prière et à la liturgie. Il nous manque un lieu de convivialité qui pourrait à la fois être constitué de salles mises à la disposition des services et des mouvements d’Église pendant la saison et d’installations pour des rencontres informelles, des moments de fêtes et des repas en famille ou en groupe.

27

Les services du Sanctuaire

L’organisation généraleAu cours de l’année 2013 deux projets ont été menés à terme :

• Nous avons créé des pôles regroupant les ser-vices par métier. Il devenait en effet urgent de trouver une organisation cohérente pour faciliter le travail et la collaboration des vingt-deux services du Sanctuaire. La création de ses pôles permet, grâce au Conseil du Sanctuaire qui réunit les responsables de pôles autour du recteur et de l’économe, une plus grande autonomie des services, une meilleure coordination LU[YL�L\_�L[�\UL�ZPTWSPÄJH[PVU�KL�SH�JVTT\UPJH[PVU��

• Les services de la communication ont été re-NYV\WtZ�L[�\U�H\KP[�H�t[t�YtHSPZt�HÄU�KL�WYtJPZLY�SLZ�objectifs et l’organisation de ce département. Dans les années qui viennent nous travaillerons à da-vantage de collaboration entre les pôles et les ser-vices d’une part, entre les chapelains et les respon-sables de pôles d’autre part.

Par ailleurs nous commençons à travailler à une coopération encore plus fructueuse entre les salariés

et les bénévoles. Nous en avons une longue expé-rience à Lourdes : depuis le début des pèlerinages, chapelains, salariés, religieuses, religieux et bénévoles collaborent pour recevoir les pèlerins. Avec l’Hospita-lité Notre-Dame de Lourdes et le service des pilotes UV\Z�KL]VUZ�JSHYPÄLY�SLZ�YLZWVUZHIPSP[tZ�KL�JOHJ\U�L[�nos méthodes de travail. Tout cela pour améliorer la X\HSP[t�KL�UV[YL�HJJ\LPS�"�THPZ�tNHSLTLU[�WV\Y�MVY[PÄLY�l’esprit de service et de communion entre tous ceux qui travaillent au sanctuaire.

Le pôle développementNous allons créer au Sanctuaire un pôle chargé du développement, fonction qui n’existait pas jusqu’à maintenant. La mission de ce nouveau service sera à la fois de faire connaître le Sanctuaire à l’extérieur, de travailler plus étroitement avec les acteurs écono-miques du département, et de chercher de nouveaux revenus pour le Sanctuaire.

• Faire connaître le Sanctuaire, c’est établir des contacts avec les agences de voyage pour rendre

28

Les services du Sanctuaire

possible un passage à Lourdes aux chrétiens des autres continents.

• Travailler plus étroitement avec les acteurs éco-nomiques du département, c’est développer la colla-boration nécessaire avec les communes des environs KL�3V\YKLZ��SLZ�VMÄJLZ�K\�[V\YPZTL��SLZ�O�[LSPLYZ��S»Ht-roport et les sites touristiques pour coordonner nos efforts au service des pèlerins.

• Trouver de nouvelles sources de revenus, c’est non seulement rechercher des fonds auprès de bien-faiteurs français et étrangers ; mais c’est aussi déve-lopper, à partir de la librairie actuelle, une petite acti-]P[t�JVTTLYJPHSL�WV\Y�HZZ\YLY�S»tX\PSPIYL�ÄUHUJPLY�KL�notre Sanctuaire. Nous embaucherons donc cette année un respon-sable pour ce pôle développement.

« … depuis le début des pèlerinages, chapelains, salariés, religieuses, religieux et bénévoles collaborent pour recevoir les pèlerins. »

29

Plusieurs communautés travaillent au Bureau des messes du Sanctuaire de Lourdes : les Frères de Ploërmel, les Sœurs Auxiliatrices du Purgatoire, les FIlles de la Très Sainte Vierge Immaculée de Lourdes, les Sœurs de Saint-Joseph de Tarbes (Sœurs de Cantaous), les Sœurs de Saint-Joseph de Saint-Marc (notre photo) et la Casa di Maria (laïcs consacrés italiens).

30

Les services du Sanctuaire

L’équilibre budgétaireMême si la situation économique est fragile et que le nombre de pèlerins diminue, il nous faut absolument parvenir à l’équilibre budgétaire en 2015. Nous cher-chons donc de nouvelles ressources. Nous attendons également des pèlerinages organisés qu’ils prennent leurs responsabilités en versant la participation qui leur est demandée.

Nous serons également vigilants sur nos dépenses en essayant de rationaliser nos achats et les services pro-posés aux pèlerinages. Comme nous l’avons déjà fait en 2013, certaines personnes partant à la retraite ne seront pas remplacées. Nous devrons peut-être aussi, dans les années qui viennent, diminuer légèrement le nombre de postes de saisonniers. Cela se fera toujours en restant extrêmement attentifs aux personnes et à leur situation particulière.

J’aimerais remercier tous les employés et les bé-névoles du Sanctuaire. Après presque deux années passées avec vous, je salue à la fois votre profession-nalisme et votre disponibilité pour accueillir le mieux

possible tous les pèlerins. La crise économique et les inondations, d’une part, la crise de la foi chrétienne d’autre part, ont contribué à la diminution du nombre des pèlerins. Cela ne nous empêche pas de faire des projets et d’être inventifs. Notre Sanctuaire a un avenir Z»PS�LZ[�ÄKuSL�n�SH�TPZZPVU�X\P�S\P�LZ[�JVUÄtL�L[�Z»PS�ZHP[�JVT-prendre la soif de ceux qui viennent boire à la source. C’est précisément en période de crise, de doute, d’épreuves que nous devons accueillir ceux qui viendront chercher au Sanctuaire de Lourdes une lumière et une espérance.

Je voudrais également remercier tous ceux qui sont nos partenaires : l’Hospitalité Notre-Dame de Lourdes et toutes les Hospitalités, les associations et les directeurs de pèlerinages, les congrégations religieuses, les dona-teurs si généreux, la ville de Lourdes, le département des Hautes-Pyrénées et la Région Midi-Pyrénées. C’est grâce n�]V[YL�JVSSHIVYH[PVU��n�]VZ�LMMVY[Z��n�]V[YL�JVUÄHUJL�L[�n�votre amour pour Lourdes que nous pouvons accueillir autant de pèlerins chaque année. Nous avons beaucoup KL� QVPL�n�JVVWtYLY�H]LJ�]V\Z�L[�UV\Z�]V\Z�JVUÄYTVUZ�notre disponibilité.

1L�YLTLYJPL�LUÄU�SL�7uYL�YLJ[L\Y�L[�[V\Z�SLZ�JOHWLSHPUZ�de la Grotte. Merci pour votre ministère de prédication et

Une partie du Conseil de Lourdes.

31

de réconciliation ! Merci pour l’espérance que vous don-

nez aux pèlerins par la célébration des sacrements, par

vos paroles, par votre présence, par votre prière !

Je demande pour vous tous la bénédiction du Sei-

gneur par l’intercession de Notre-Dame de Lourdes et de

sainte Bernadette.

1L�]L\_��LU�JVUJS\ZPVU��SHPZZLY�n�]V[YL�YtÅL_PVU�SLZ�TV[Z�du pape François dans l’exhortation apostolique Evangelii Gaudium : « Il y a un style marial dans l’activité évangéli-

satrice de l’Église. Car, chaque fois que nous regardons

Marie nous voulons croire en la force révolutionnaire de la

tendresse et de l’affection. (…) Cette dynamique de jus-

tice et de tendresse, de contemplation et de marche vers

les autres, est ce qui fait d’elle un modèle ecclésial pour

S»t]HUNtSPZH[PVU��5V\Z�SH�Z\WWSPVUZ�HÄU�X\L��WHY�ZH�WYPuYL�maternelle, elle nous aide pour que l’Église devienne une

maison pour beaucoup, une mère pour tous les peuples,

et rende possible la naissance d’un monde nouveau. »

Lourdes, le 11 février 2014

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Une partie du Conseil de Lourdes.

Date d’impression : Février 2014

Conseil Imprime - 65000 Tarbes

Dépôt légal : Février 2014