La collection de peintures italiennes d'Eugène de Beauharnais

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LA COLLECTION DE PEINTURES ITALIENNES D’EUGÈNE DE BEAUHARNAIS Monica Preti-Hamard La collection d’Eugène de Beauharnais (Paris, 1781-Munich, 1824) n’a pas bénéficié d’une fortune critique comparable à celle qu’ont pu connaître les collections d’autres mem- bres de la famille de Napoléon 1 . Elle est pourtant de toute première importance, tant du fait de la personnalité du collectionneur que de la qualité des œuvres qu’elle contenait, de son histoire et, enfin, des champs problématiques qu’elle permet de parcourir. Notre recherche s’appuie sur différentes sources, dont des documents inédits conservés dans les Archives Beauharnais de l’Université de Princeton 2 . Jusqu’à présent, ces archives sont res- tées largement inexploitées. Elles contiennent en particulier des comptes et des correspon- dances qui enrichissent considérablement la connaissance que l’on peut avoir de cette col- lection. Dans le cadre du présent colloque, nous allons d’abord évoquer de manière géné- rale ces différents aspects, pour nous concentrer ensuite sur la période qui fut décisive dans la constitution de la collection : les années milanaises du prince Eugène. Eugène de Beauharnais collectionneur Eugène de Beauharnais, fils du vicomte Alexandre de Beauharnais et de Marie-Josèphe Rose de Tascher de La Pagerie, future impératrice Joséphine, fut l’un des protagonistes de l’épopée napoléonienne 3 : vice-roi d’Italie de 1805 à 1814, il résida à Milan. C’est en 1806, à l’époque de son mariage avec la princesse royale de Bavière Auguste Amélie (1788-1851), qu’il fut adopté formellement par Napoléon. Comme commandant en chef de l’armée d’Italie, il se distingua notamment dans les campagnes d’Autriche en 1809 et de Russie en 1812. Après la chute de l’Empire, il se retira en Bavière sous la protection de son beau-père, avec le titre de duc de Leuchtenberg, et reçut en apanage la principauté d’Eichstätt. Il fit alors construire à Munich un somptueux palais où il exposa sa collection et sa bibliothèque 4 ; c’est là qu’il mourut en 1824, à l’âge de quarante-deux ans. Sa person- nalité contrastée permet sans doute de rendre compte de sa manière d’accumuler les œuvres. De même explique-t-elle, tout au moins en partie, que son activité de collection- neur n’ait pas été suffisamment étudiée. Le premier catalogue sélectif de la collection, daté de 1825 5 , un an après la mort d’Eugène, énumère 219 tableaux : 69 peintures modernes (dont seulement 4 de peintres italiens) 150 peintures anciennes. Ces dernières se répartissent en 85 tableaux des écoles italiennes, 56 des écoles flamande et hollandaise et 8 de l’école espagnole. Parmi les écoles italiennes prédominent celles du nord de l’Italie, et plus spécialement celles de Lombardie, d’Émilie- Romagne et de Vénétie, essentiellement des XVI e et XVII e siècles. Contrairement à la collec- tion Fesch, les écoles florentine, napolitaine et romaine sont très peu représentées. L’origine de la collection Beauharnais, comme nous allons le voir, justifie cette différence. Eugène constitua sa collection en deux étapes principales : d’abord à Milan, où son goût s’affine et où il accumula un nombre considérable de tableaux sans pour autant concevoir l’idée d’un ensemble cohérent ; ensuite à Munich, où la collection, qu’enrichissent entre autres les tableaux provenant du partage de la collection de Joséphine 6 , trouve sa cohé- rence et son but ultime grâce à l’exposition publique, dans le palais construit pour le prince par l’architecte néoclassique Leo von Klenze, d’un choix de peintures et de sculp- tures, dont le catalogue de 1825 rend compte. Plusieurs autres catalogues de la collection furent publiés ; le dernier parut à Francfort en 1851 et en 1852 7 . Ce catalogue pleinement illustré, qui nous a permis un grand nombre d’identifications, demeure cependant muet quant aux provenances et ne contient aucune 129 94933 colloque fesh OK.qxp_Mise en page 1 12/11/12 11:23 Page129

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LA COLLECTION DE PEINTURES ITALIENNES

D’EUGÈNE DE BEAUHARNAIS

Monica Preti-Hamard

La collection d’Eugène de Beauharnais (Paris, 1781-Munich, 1824) n’a pas bénéficiéd’une fortune critique comparable à celle qu’ont pu connaître les collections d’autres mem-bres de la famille de Napoléon1. Elle est pourtant de toute première importance, tant dufait de la personnalité du collectionneur que de la qualité des œuvres qu’elle contenait, deson histoire et, enfin, des champs problématiques qu’elle permet de parcourir. Notrerecherche s’appuie sur différentes sources, dont des documents inédits conservés dans lesArchives Beauharnais de l’Université de Princeton2. Jusqu’à présent, ces archives sont res-tées largement inexploitées. Elles contiennent en particulier des comptes et des correspon-dances qui enrichissent considérablement la connaissance que l’on peut avoir de cette col-lection. Dans le cadre du présent colloque, nous allons d’abord évoquer de manière géné-rale ces différents aspects, pour nous concentrer ensuite sur la période qui fut décisivedans la constitution de la collection : les années milanaises du prince Eugène.

Eugène de Beauharnais collectionneurEugène de Beauharnais, fils du vicomte Alexandre de Beauharnais et de Marie-JosèpheRose de Tascher de La Pagerie, future impératrice Joséphine, fut l’un des protagonistesde l’épopée napoléonienne3 : vice-roi d’Italie de 1805 à 1814, il résida à Milan. C’est en1806, à l’époque de son mariage avec la princesse royale de Bavière Auguste Amélie(1788-1851), qu’il fut adopté formellement par Napoléon. Comme commandant en chefde l’armée d’Italie, il se distingua notamment dans les campagnes d’Autriche en 1809 et deRussie en 1812. Après la chute de l’Empire, il se retira en Bavière sous la protection deson beau-père, avec le titre de duc de Leuchtenberg, et reçut en apanage la principautéd’Eichstätt. Il fit alors construire à Munich un somptueux palais où il exposa sa collectionet sa bibliothèque4 ; c’est là qu’il mourut en 1824, à l’âge de quarante-deux ans. Sa person-nalité contrastée permet sans doute de rendre compte de sa manière d’accumuler lesœuvres. De même explique-t-elle, tout au moins en partie, que son activité de collection-neur n’ait pas été suffisamment étudiée.Le premier catalogue sélectif de la collection, daté de 18255, un an après la mort d’Eugène,énumère 219 tableaux : 69 peintures modernes (dont seulement 4 de peintres italiens)150 peintures anciennes. Ces dernières se répartissent en 85 tableaux des écoles italiennes,56 des écoles flamande et hollandaise et 8 de l’école espagnole. Parmi les écoles italiennesprédominent celles du nord de l’Italie, et plus spécialement celles de Lombardie, d’Émilie-Romagne et de Vénétie, essentiellement des XVIe et XVIIe siècles. Contrairement à la collec-tion Fesch, les écoles florentine, napolitaine et romaine sont très peu représentées.L’origine de la collection Beauharnais, comme nous allons le voir, justifie cette différence.Eugène constitua sa collection en deux étapes principales : d’abord à Milan, où son goûts’affine et où il accumula un nombre considérable de tableaux sans pour autant concevoirl’idée d’un ensemble cohérent ; ensuite à Munich, où la collection, qu’enrichissent entreautres les tableaux provenant du partage de la collection de Joséphine6, trouve sa cohé-rence et son but ultime grâce à l’exposition publique, dans le palais construit pour leprince par l’architecte néoclassique Leo von Klenze, d’un choix de peintures et de sculp-tures, dont le catalogue de 1825 rend compte.Plusieurs autres catalogues de la collection furent publiés ; le dernier parut à Francfort en1851 et en 18527. Ce catalogue pleinement illustré, qui nous a permis un grand nombred’identifications, demeure cependant muet quant aux provenances et ne contient aucune

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information sur la formation de l’ensemble8. Sa publication précède de quelques années àpeine le transfert de la collection en Russie, prélude à sa dispersion entre la fin du XIXe siè-cle et les premières décennies du XXe siècle9. Remarquons qu’en Russie, ce furent lestableaux italiens de la collection qui suscitèrent le plus grand intérêt, provoquant un richedébat critique auquel prirent part des connoisseurs ou des historiens de l’art aussi bien alle-mands et italiens que russes, tels Gustav Friederich Waagen, Karl Eduard et ErnestFriderich Liphart, Aleksandr Neoustroïeff, Adolfo et Lionello Venturi10.L’étude de cette collection se prête à plusieurs approches et pose des problématiquesessentielles pour l’histoire des collections à une époque cruciale : rapports entre les pra-tiques privées et le modèle étatique du collectionnisme ; différents types d’appropriationsidentitaires : locales, nationales ou familiales ; collections en ‘exil’ ; catalogues et historio-graphie de l’art en Allemagne et en Russie. Autant d’aspects que nous développerons dansune prochaine publication.

Les années milanaises : l’apprentissage esthétique et la formation de la collectionC’est de toute évidence à Milan qu’Eugène de Beauharnais put former son goût et consti-tuer le premier noyau de sa collection. Toutes les conditions étaient en effet réunies à cettefin. D’une part, il disposait des moyens financiers nécessaires grâce à ses nouvelles fonc-tions : d’abord vice-roi d’Italie et général en chef de l’armée d’Italie en 1805, puis princede Venise en 1806 et prince héritier du grand-duché de Francfort en 1810. D’autre part,les occasions de faire des acquisitions se multipliaient à un moment où la circulation desœuvres s’intensifiait, en particulier à Milan, qui devint alors une des places majeures dumarché de l’art. Enfin, Beauharnais se trouva au cœur des débats artistiques qui animaientles milieux politiques et culturels de la capitale lombarde.En effet, depuis l’arrivée des Français en 1796 à Milan, on assista à l’élaboration et la miseen œuvre par l’État d’un vaste projet artistique et muséographique. Ce projet, qui devaitaboutir à la constitution de la Pinacoteca di Brera, premier musée ‘national’ italien, naquitd’une volonté centralisatrice s’inspirant du Louvre révolutionnaire (selon un modèle d’ail-leurs fort mal adapté à la réalité italienne)11. C’est ainsi qu’une vaste campagne de saisiesd’œuvres d’art fut mise en place dans les différents territoires de la République Cisalpine,puis du Royaume d’Italie. Le vice-roi qui se trouvait de fait au centre de ce processus estun jeune militaire de vingt-quatre ans. Il fit la connaissance de Giuseppe Bossi (BustoArsizio, Varèse, 1777-Milan, 1815), secrétaire de l’Accademia di Brera jusqu’à sa démis-sion en 1807, et Andrea Appiani (Milan, 1754-1817), premier peintre du Roi (1805) etdirecteur de la même Académie à partir de 1807. Tel est le contexte artistico-idéologiqueau sein duquel Eugène commence à acheter lui-même.Les comptes de la caisse particulière du vice-roi pour les années 1806-1814, conservésdans les archives de Princeton, nous donnent des indications sur ces acquisitions12.Observons d’abord que, pour toutes les années (sauf 1807 et 1813), les dépenses en« Achats de Diamants & Bijoux » sont deux à trois fois supérieures à celles qu’entraînentles « Achats d’Objets d’Arts, Sciences &a »13. Par exemple, pour l’année 1808, sur unedépense totale, de 851.522 lires, 258.824 sont consacrées à des « Diamants & Bijoux » et122.395 à des « Objets d’Arts et Sciences »14. En 1809, sur un total de 533.031 lires,116.035 sont imputées au premier poste et 76.899 au second15. L’importance des dépensesen bijoux et en pierres précieuses ne surprend pas, étant donné les frais de représentationau sein d’une cour qui voulait s’imposer par son faste et sa magnificence.Même s’il faut tenir compte du fait que ces comptes n’incluent pas les différentes transac-tions à l’amiable, les dons ou les échanges (qui, notamment pour les œuvres d’art, pou-vaient être fréquents), il semblerait que, pendant les premières années de son règne, le

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jeune prince ne manifeste que peu d’intérêt pour les tableaux. La plus grande partie de sesdépenses en œuvres d’art est alors consacrée aux pierres gravées anciennes et modernesdont il semble réunir une collection importante, qui correspond à un goût tout à fait par-ticulier pour les arts glyptiques et pour les miniatures, alors très répandu à Milan, bienqu’une partie en fût certainement destinée à des cadeaux de prestige. On trouve parmi lesartistes mentionnés pour les pierres modernes les noms les plus célèbres de l’époque :Giovanni Beltrami16, Antonio Berini17, Giovan Battista Dorelli18, Giuseppe Girometti19,Clemente Pestrini20 et Giacomo Pichler21. Relevons également, parmi ses fournisseurs depierres anciennes, des marchands et des antiquaires de renom, tels que Durand22,Millingen23 ou Sanquirico24.Les achats de tableaux anciens commencent en 1807 : le 10 avril, pour 15 Vues de Venisede Guardi25, Eugène verse la somme de 3.150 lires à l’abbé Luigi Celotti26, Vénitien bienconnu pour ses activités dans le marché de l’art. À défaut d’éléments permettant d’identi-fier avec certitude ces tableaux (et donc de juger de leur qualité), soulignons tout au moinsleur prix relativement bas, si nous le comparons à celui du tableau d’un peintre trouba-dour contemporain, François Fleury Richard de Lyon, qu’Eugène, cette même année,paye 7.818 lires27. L’achat des Vues de Guardi est probablement motivé par l’annexion desÉtats de Venise au Royaume d’Italie le 30 mars 1807. C’est à cette occasion qu’il com-mande également deux portraits à Giambattista Gigola, peintre de portraits en miniatureà sa cour depuis 180628. Comme on le voit, les achats d’Eugène à cette époque sont guidéspar des choix de circonstance. Par ailleurs, nous ne nous arrêterons pas sur les com-mandes (passées aux peintres et sculpteurs contemporains) de portraits d’Eugène, de safamille ou des membres du gouvernement, qui sont liées à des choix officiels.En revanche, nous pouvons pressentir le développement du goût propre d’Eugène à tra-vers la commande, en 1808, de la réplique de la Madeleine de Canova, qui appartenait alorsau célèbre collectionneur Giovanni Battista Sommariva29. L’émulation avec un collection-neur tel que Sommariva, ainsi que le sujet religieux et sentimental, qui peut être mis enrapport avec le goût ‘familiale’ pour le genre troubadour (sa mère Joséphine ainsi que sasœur Hortense manifestèrent cette même prédilection), motivèrent sans doute cet achat.Les acquisitions de tableaux anciens augmentent à partir de la fin de la première décen-nie du XIXe siècle, au moment même où l’on assiste à une importante accélération des tra-vaux et des enrichissements de la Pinacoteca di Brera30, auxquels le vice-roi prend unepart toute personnelle. C’est sur le modèle de ce musée milanais que se constitue sa col-lection privée. En effet, le prince profite pleinement de cette aventure muséale : il y formeson goût, mais aussi et surtout, il utilise tous les réseaux centralisés et se sert des mêmevoies d’acquisition et des mêmes conseillers que pour la construction muséale. En suivantles traces laissées dans les comptes, attardons-nous sur trois exemples : le premierconcerne l’achat d’une œuvre, les deux autres, celui de collections en bloc.

La Vierge, l’Enfant Jésus et Sainte Anne de Santa Maria près San CelsoEntre 1811 et 1814, Eugène verse à M. Bugatti, trésorier de la fabrique de Santa Mariaprès San Celso, la somme de 20.000 lires pour un tableau de Salaino [fig. 1]31. Sommeimportante si nous la comparons au prix payé pour d’autres tableaux anciens, et notam-ment pour ceux de Guardi mentionnés plus haut. Cette copie de la Vierge, l’Enfant Jésus etSainte Anne (dite Sainte Anne) de Léonard de Vinci au Louvre jouissait à l’époque d’unegrande notoriété. Autrefois attribuée à Léonard lui-même, elle avait été citée par LuigiLanzi dans sa Storia pittorica della Italia (dont l’édition définitive paraît en 1809), commeun illustre témoignage de l’activité de Gian Giacomo Caprotti, dit Salaì ou Salaino (Milan,vers 1480-1524), disciple et ami de Léonard, attribution reprise dans les milieux milanaiset en particulier par Giuseppe Bossi, que le prince fréquentait32. Plus encore, Eugène, qui

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Fig. 1 – Gian Giacomo Caprotti dit Salaì (attribué à),

Vierge à l’Enfant, Jésus et sainte Anne,Los Angeles, Collection

University of California, Armand Hammer Museum,

Willits J. Hole Collection.

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Fig. 2 – Johann Nepomuk Muxel,Cène d’après Giuseppe Bossi, gravure au trait, dans JohannDavid Passavant,Galerie Leuchtenberg, Munich, 1851, no 93, Paris, Bibliothèque de l’INHA.

avait commandé à Bossi la copie de la Cène de Léonard de Vinci33, lui acheta en 1808 lecarton préparatoire, récemment retrouvé à l’Académie des Beaux-Arts de Saint-Pétersbourg34. Dans la Villa Bonaparte à Milan, ce grand carton est remarqué parStendhal, qui le juge supérieur au tableau35. Il sera ensuite exposé dans le palaisLeuchtenberg à Munich [fig. 2].La signification de ces faits est très riche. Il suffit d’évoquer le fait que Bossi – peintre,écrivain d’art et collectionneur de grande envergure – perçut cette commande d’Eugènepour la copie de la Cène comme un défi : il étudia plus qu’il ne copia et finit par consacrerà la fresque un livre, dans lequel Léonard apparaît comme le créateur de l’école lom-barde36. Le livre sur la Cène, ainsi que Dario Trento l’a démontré dans une belle étude37,répond aux préoccupations et aux intérêts que Bossi partageait avec d’autres représen-tants de la culture milanaise, visant à l’élaboration d’une histoire de l’art lombarde qui fai-sait encore défaut. Il s’agissait aussi d’affirmer le caractère propre d’une tradition régio-nale dans un esprit de revendication nationale. Bossi veut présenter Léonard comme lefondateur de l’école milanaise : à cette fin, son livre insiste sur les œuvres de la périodemilanaise de l’artiste florentin et sur toutes les œuvres léonardesques qui se trouvent dansle Milanais. Le cas de la Sainte Anne est paradigmatique : l’original de Léonard au Louvreest à peine cité, tandis que l’accent est mis sur la copie du Salaì38 ; l’auteur va jusqu’à men-tionner la récente acquisition du tableau de la part du vice-roi (peut-être sur le conseil deBossi lui-même), précisant que ce dernier « l’a ajouté aux autres précieuses œuvres dontest décorée sa villa à Milan »39.Deux collections en bloc ne devaient pas tarder à enrichir notablement celle d’Eugène : leprince fit en effet l’acquisition de la collection Sampieri de Bologne et de la collectionArese de Milan, l’une et l’autre fortement ancrées dans le patrimoine local de leurs villesrespectives.

L’achat de la collection Sampieri (janvier 1811)Contraint par des nécessités financières, le marquis Francesco Sampieri dut mettre envente la prestigieuse collection familiale, une des plus illustres de Bologne depuis leXVIIe siècle, constituée de plus de 120 tableaux – pour la majeure partie d’école émiliennedu XVIe et XVIIe siècles – ainsi que de quelques sculptures40. Quand Eugène décida en 1811d’en acquérir la totalité, en partie pour son usage personnel et en partie pour la Pinacotecadi Brera, la réaction fut vive : la collection cristallisait en effet de forts sentiments patrio-tiques locaux et son départ fut vécu comme une douloureuse spoliation que le BolonaisFerdinando Marescalchi (alors ministre des Relations extérieures du Royaume d’Italie)qualifia de « honte éternelle » de Sampieri41. Si l’histoire est connue, les circonstances et

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Fig. 3 – Francesco Albani, Danse des Amours,

Milan, Pinacoteca di Brera.

Fig. 4 – MarcantonioFranceschini, Triomphe de Vénus,

localisation actuelle inconnue.

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Fig. 5 – Dosso Dossi (attribué à),Scène de jeu,Moscou, musée Pouchkine.

Fig. 6 – Giovan FrancescoBarbieri dit Guercino, Vision de saint Jérôme, Moscou, musée Pouchkine.

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Fig. 8 – Bonifacio Veronese (attribué à),

Portrait d’homme, localisation actuelle

inconnue (anciennement New York, collection Kress).

Fig. 9 – Francesco Mazzola, dit Parmigianino, Circoncision,Detroit, The Detroit Institute of Arts.

Fig. 7 – Paris Bordone, Saint Jérôme dans un paysage,

Philadelphie, Philadelphia Museum of Art,John G. Johnson Collection.

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les modalités de cet achat, que nous pouvons suivre à travers les documents, prennent iciune grande importance. Elles nous permettent en effet de sentir toute l’ambiguïté entreprivé et public dans les achats d’Eugène.La décision du vice-roi de diviser la collection en deux lots avait d’abord été communiquéeau ministre de l’Intérieur42 : 6 chefs-d’œuvre devaient ainsi revenir à la Pinacoteca di Brera(parmi lesquels la célèbre Danse des Amours de Francesco Albani, [fig. 3])43, le reste étantdestiné à sa collection personnelle. Le ministre chargea ensuite le directeur de l’Accademiaet de la Pinacoteca di Brera, Andrea Appiani, du transfert de la collection de Bologne àMilan. Ce dernier, par lettre du 9 janvier 1811, demanda donc à Francesco Rosaspina,professeur de gravure à l’Accademia de Bologne, de superviser la mise en caisse et l’expé-dition immédiate à Milan44. Le 11 janvier, le ministre de l’Intérieur informa le prince del’achat de la Galerie au prix de 15.000 louis d’or, soit 354.300 lires italiennes : notons queles 6 tableaux destinés à la Brera, et donc à la charge de l’État, représentaient à eux seulsla somme de 326.522 lires et 50 centimes, tandis que les tableaux destinés à Eugène, etqu’il aurait à rembourser sur sa caisse personnelle, furent estimés à 27.777 lires et 50 cen-times45. Comme on peut constater, les tableaux d’Eugène sont moins chers : c’est ce quipeut-être le motiva à donner successivement (21 août 1811) à la Pinacoteca un autre chef-d’œuvre provenant de la même collection, la Pietà de Giovanni Bellini46. Est-ce à dire qu’iltira profit de sa position, ou bien serait-ce plutôt, comme nous le verrons, que la valeurdes tableaux change en quittant leur contexte ?Seuls quelques tableaux de la collection Sampieri figurent dans les catalogues de la collec-tion d’Eugène et de ses héritiers47. Signalons en particulier : le Triomphe de Vénus deMarcantonio Franceschini (Londres, Christie’s, 7 juillet 2006, no 207) [fig. 4]48, qui futainsi séparé de son pendant, la Danse des Amours d’Albani [fig. 3] et deux tableauxaujourd’hui à Moscou au musée Pouchkine : une Scène de jeu de Dosso Dossi [fig. 5]49 et laVision de Saint Jérôme de Guercino [fig. 6]50, ainsi que la précieuse Mise au Tombeaud’Annibale Carracci actuellement conservée au Metropolitan Museum of Art de NewYork51.

Fig. 11 – Sandro Botticelli, Portrait de Michele MarulloTarchianota, Madrid, Museo Nacional del Prado, collection Guardans-Cambó.

Fig. 10 – Agnolo di Cosimo, dit Bronzino,

Portrait de Laura Battiferri, Florence, Palazzo Vecchio,

collection Loeser.

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L’achat de la collection Arese (mai-juin 1811)La collection Arese avait aux yeux des Milanais la même valeur que celle des Sampieripour les Bolonais : il s’agissait de l’une des collections les plus importantes de la capitalelombarde, signalée par les voyageurs étrangers (tel Montesquieu) et dont la visite étaitrecommandée par les principaux guides de la ville52. La collection, connue par un inven-taire datant du milieu du XVIIIe siècle, comptait environ 200 tableaux. Un large choix depeintres y était représenté (surtout du nord de l’Italie, du XVIe et XVIIe siècles, avecquelques ouvertures à d’autres écoles, notamment la florentine – Bronzino – la flamande,la hollandaise – Rubens, Luca d’Olanda, Van Dyck, Teniers – et l’espagnole – Ribera –,plus quelques anonymes). Ce fut encore Giuseppe Bossi53 qui servit d’intermédiaire dans l’acquisition de cette col-lection entre mai et juin 1811. Les modalités d’exécution furent alors les mêmes que pourla collection Sampieri : ordre donné au ministre de l’Intérieur54, don de 6 tableaux à laPinacoteca di Brera55 et répartition entre tableaux devant rester dans la collectiond’Eugène et œuvres destinées à l’échange ou à la vente. Cette fois-ci, on retrouve dans lacollection d’Eugène à Munich56 des tableaux comme le Saint Jérôme dans un paysage deParis Bordone [fig. 7]57, le Portrait d’homme attribué à Titien ou à Giovanni Busi, ditCariani et, plus récemment, à Bonifacio Veronese [fig. 8]58, la Circoncision de Parmigianino[fig. 9]59 et le Portrait de la poétesse Laura Battiferri de Bronzino [fig. 10]60. Dans ce nouveaucontexte, le tableau de Bronzino, en particulier, jouissait d’une célébrité inédite61. Quantaux tableaux de la collection Arese destinés à Brera, ils firent l’objet d’une donation,contrairement à la procédure suivie pour la collection Sampieri (dont l’achat, rappelons-le, fut effectué conjointement par le prince Eugène et l’État).La cession de certains tableaux des collections Sampieri et Arese à la Pinacoteca di Brera,motivée par des évidentes raisons de prestige, visait sans doute aussi à faire oublier la partque des intérêts privés prenaient à de telles transactions, d’autant plus douloureusementressenties que les populations locales étaient fortement attachées à ces collections.L’intérêt particulier de ces ensembles picturaux à forte « personnalité » locale (autrementdit leur représentativité de la culture figurative régionale, dont pouvait éventuellementtémoigner des copies et des productions « mineures ») se dissipe cependant une fois lesœuvres arrachées à leur contexte d’origine. La valeur intrinsèque attribuée à ces collec-tions dans les villes où elles se constituèrent baisse fortement lors de leur transfert et necorrespond certainement plus aux ambitions du prince62.En 1812, Eugène de Beauharnais se défait d’un certain nombre de tableaux, notammentissus des collections Sampieri et Arese, qu’il expédie à Paris à Guillaume-JeanConstantin, marchand de tableaux, restaurateur et conservateur de la collection deJoséphine, pour qu’ils soient restaurés et vendus63. Des réclamations venues de Milan ausujet du paiement de la collection Arese durent inquiéter Eugène : celui-ci, en septembre1815, demanda des renseignements à son ex-trésorier Michel Hennin, lequel constataqu’en effet seul le premier tiers du règlement avait été acquitté64. Ce fait explique peut-êtreque certains tableaux de la collection Arese soient restés à Milan et finirent par entrerdans la collection de la Pinacoteca di Brera65.Les circonstances et les modalités du transfert de la collection à Munich après la chute del’Empire sont trop complexes pour qu’on en rende compte ici. Pour évoquer, en guise deconclusion, la période munichoise, nous nous en tiendrons à un tableau qu’Eugène acheta,probablement en 1822, comme un autoportrait de Masaccio. Il s’agit en réalité du fascinantPortrait de Michele Marullo Tarchianota aujourd’hui conservé à Madrid dans la collectionGuardans-Cambó [fig. 11]66. Cet achat, qui n’était pas connu, est documenté dans une cor-

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respondance envoyée au prince Eugène et à son secrétaire intime Antoine Darnay par uncertain Serand Lasalle, marchand de tableaux actif à Munich, Vienne et Cassel67. Dans le nouveau contexte de la cour bavaroise, les rapports qu’Eugène entretient avec lesœuvres paraissent changer de nature. Si, comme nous avons vu, les achats de la périodemilanaise sont très étroitement liés aux stratégies institutionnelles – Eugène est surtouthomme d’État –, à Munich, il correspond directement avec différents intermédiaires pourses acquisitions de tableaux68. Il a en outre l’opportunité d’élargir le champ de ses intérêts,comme le démontre l’achat de cette œuvre. Lasalle en vantait les qualités – « sa rareté, sabeauté et son importance dans l’histoire de l’art » –, tout en invitant Eugène à se documen-ter sur Masaccio, notamment par la lecture de la Storica pittorica de Lanzi. Lasalle, quiavait beaucoup manœuvré pour qu’Eugène acheta ce tableau, concluait : « J’ai fait pourla gallerie [sic] de S.A.R., pour l’honneur de Masaccio, tout ce que j’ai dû : S.A.R. déci-dera, et mes affaires à la garde de Dieu ! »69. Le prince, qui avait dans un premier tempshésité à cause du prix trop élevé (600 louis), fut finalement convaincu par les propos del’habile marchand et, sans doute aussi, par la qualité incontestable de l’œuvre. Il sembleen revanche qu’il n’ait pas acheté le « grand Guercino » estimé à 1.000 louis, nonobstantles facilités de payement que Lasalle lui proposait s’il en faisait l’acquisition avec leMasaccio70. Le tableau de Guercino, dont Lasalle fournissait une longue description71,semblerait pouvoir être identifié avec le Bienheureux Félix recevant l’Enfant Jésus des mains dela Vierge peint en 1642 pour Giovanni Battista d’Este et aujourd’hui à la Galleria Estensede Modène : pouvait-il se trouver sur le marché de l’art à cette époque ? S’agissait-il plu-tôt d’une copie ? Sur la base des documents à notre disposition nous ne pouvons répon-dre à ces questions. Limitons nous à remarquer qu’Eugène à Munich continua à s’intéres-ser aux tableaux italiens et à en faire l’acquisition.Il mourut prématurément en 1824, dans sa quarante-troisième année. Un an plus tard, sagalerie était ouverte au public.

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Cet article (avec celui qui lui fait suite, de FranceNerlich) constitue la première étape d’un projet plusvaste, qui vise à reconstituer les vicissitudes de la col-lection d’Eugène de Beauharnais et des ducs deLeuchtenberg. Je tiens à remercier tout particulière-ment Alain Pillepich pour sa généreuse collaboration,ainsi que mes amis et collègues Roberta Bartoli,Roberto Contini, Andrea De Marchi, MichelHochmann, Chiara Nenci, Alain Pougetoux et HelenaSharnova, pour leurs suggestions et leurs avis éclairés.Abbreviations : EBA = Princeton University Library, Eugène deBeauharnais ArchiveASM = Milan, Archivio di Stato

1. Les contributions concernant la collectiond’Eugène de Beauharnais sont ponctuelles et éparses.Citons notamment : Gabriella FERRI PICCALUGA,« Eugenio de Beauharnais, conoscitore e collezionistadi dipinti leonardeschi », dans I leonardeschi a Milano :fortuna e collezionismo (actes de colloque, Milan, 1990),Milan, 1991, p. 218-229 (article intéressant quicontient cependant plusieurs erreurs) ; DwightC. MILLER, « A Note on the Collection of the Duke ofLeuchtenberg », dans Paragone, XLI, 24 (489), 1990,p. 76-82 ; Alessandro MORANDOTTI, « Le stampe ditraduzione come fonti per la storia del collezionismo :il caso di Milano fra età napoleonica e Restaurazione »,dans Nicoletta DIACREMA, Giorgio CUSATELLI (éd.),Il Lombardo-Veneto, 1814-1859. Storia e Cultura (Le Cartetedesche 12), Pasian di Prato-Udine, 1996, p. 196-197,213-216 notes 27 à 35 ; Valentina MADERNA, « Alcunidoni di Eugenio di Beauharnais alla Pinacoteca diBrera », dans Matteo CERIANA, FernandoMAZZOCCA (éd.), Itinerari d’arte in Lombardia dal XIIIal XX secolo. Scritti offerti a Maria Teresa Binaghi Olivari,Milan, 1998, p. 295-309.2. Eugène de Beauharnais Archive. A Finding Aid Preparedby David Rollo with assistance from Barbara Volz and JohnDelanay, Manuscripts Division, Department of RareBooks and Special Collections, Princeton UniversityLibrary, 1991. Les archives furent mises aux enchèrespar la famille Leuchtenberg chez Sotheby’s à Londresle 5 mars 1936 (les autographes de Napoléon ayantété auparavant retirés de la vente). Elles y furentachetées par l’agent de change new-yorkais André deCoppet (1892-1953) qui les déposa à l’Université dePrinceton en 1941.3. Alain PILLEPICH, Eugène de Beauharnais, ‘honneur etfidelité’ (catalogue d’exposition, musée national deschâteaux de Malmaison et Bois-Préau, 1999-2000),Paris, 1999 (avec bibliographie).4. Iris LINNENKAMP, Leo von Klenze – Das Leuchtenberg-Palais in München, Munich, 1992. Voir aussi l’article deFrance NERLICH dans ce même volume.5. Johann NEPOMUK MUXEL, Catalogue des tableaux dela galerie de feu son Altesse Monseigneur le Prince Eugène

duc de Leuchtenberg à Munich, Munich, Joseph Baer,1825. Ce catalogue fut publié la même année en deuxversions, française et allemande. Les tableaux y sontprésentés dans leur ordre d’accrochage en deuxsalles, l’une consacrée à la peinture moderne, l’autre àla peinture ancienne. Cette dernière contenait égale-ment des sculptures, mentionnées à part à la fin ducatalogue : au centre, 5 statues d’artistes français etitaliens (Antoine Chaudet, François-Joseph Bosio,Alessandro Algardi et Antonio Canova) et, sur8 tables le long des parois, quelques copies de vases etdes sculptures antiques.6. Alain POUGETOUX, La collection de peintures del’Impératrice Joséphine (Notes et documents des musées deFrance no 37), Paris, 2003, p. 61-64. Alain Pougetoux aeu l’amabilité de me transmettre copie de l’État généraldes tableaux échus en partage à S. A. le prince Eugène,manuscrit daté par Soulange Bodin : Paris, le 15 sep-tembre 1814 (musée national du château deMalmaison, inv. M.M. 68.8.43). Cette liste, que j’étu-die actuellement, comporte de nombreuses indica-tions de provenance et des notes marginales indi-quant des noms d’acquéreurs ainsi que quelques prixde vente.7. La première édition en allemand et la deuxième,bilingue, en anglais et en allemand : Johann DavidPASSAVANT, Galerie Leuchtenberg. Gemälde-SammlungSeiner Kaiserlichen Hoheit des Herzogs von Leuchtenberg inMünchen. In Umrissen gestochen von Inspector J.N. Muxel– Zweite Ausgabe mit umgearbeitetem Texte von J.D.Passavant, Francfort, Verlag Baer, 1851 ; idem, TheLeuchtenberg Gallery, A collection of pictures forming thecelebrated gallery of his Imperial Highhness the Duke ofLeuchtenberg, at Munich ; engraved by J. N. Muxel, curatorof the Gallery; with biographical and critical notices by J. D.Passavant, Francfort, Joseph Baer, 1852.8. Sur ce catalogue, voir l’article de France NERLICH

dans ce même volume.9. C’est le second fils d’Eugène – Maximilien deLeuchtenberg (Munich, 1817-Saint-Pétersbourg,1852) – qui hérita de la collection. Deux ans après samort, son épouse, la grande-duchesse MarieNicolaïevna, fille du Tzar Nicolas Ier, vendit le palaismunichois et la collection fut transférée à Saint-Pétersbourg. La collection – enrichie par de nou-veaux achats de la grande-duchesse MarieNicolaïevna, conseillée par le connaisseur KarlEduard von Liphart (Dorpart, 1808-Florence,1891) – fut en grande partie dispersée entre la fin duXIXe siècle et les premières années qui suivirent laRévolution d’octobre. Voir MILLER, op. cit. n. 1, p. 79et MORANDOTTI, op. cit. n. 1, p. 213-214, n. 31. ElenaSharnova m’a, en outre, signalé l’existence d’intéres-sants documents dans les archives russes.10. Sur ce milieu international de connoisseurs et his-toriens de l’art, voir l’article de Giacomo AGOSTI,« Una famiglia di studiosi leonardeschi nei ricordi di

NOTES

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Adolfo Venturi : i Liphart padre e figlio », dans I leo-nardeschi a Milano : fortuna e collezionismo, Milan, 1991,p. 255-266.11. La nouvelle Accademia « Nazionale » di Brera,avec Pinacoteca annexée, fut inaugurée le 25 octobre1803. Sur la Pinacoteca di Brera dans les annéesnapoléoniennes, voir notamment Aurora SCOTTI,Brera 1776-1815. Nascita e sviluppo di una istituzionemuseale milanese, Quaderni di Brera 5, Florence, 1979,p. 49-67 ; Sandra SICOLI, « La politica della tutela inLombardia nel periodo napoleonico. La formazionedella Pinacoteca di Brera : il ruolo di Andrea Appianie Giuseppe Bossi », dans Ricerche di Storia dell’Arte, 38,1989, p. 71-90 ; eadem, « La Regia Pinacoteca di Breradal 1809 al 1815. Criteri di formazione e problemi digestione. La tutela mancata », dans Ricerche di Storiadell’Arte, 46, 1992, p. 61-81 ; ainsi que le volume :Liana CASTELFRANCHI, Roberto CASSANELLI, MatteoCERIANA (éd.), Milano, Brera e Giuseppe Bossi nellaRepubblica Cisalpina (actes de colloque, Milan, IstitutoLombardo di Scienze e Lettere, 1997), Milan, 1999.12. EBA, Personal Finances (1806-1824), Cartons 130-146. Ces boîtes comprennent différentes pièces comp-tables, des lettres et d’autres documents de naturediverse. Une comptabilité générale par année esttenue de 1806 à 1814 (par compte d’année jusqu’en1809 et, à partir de 1810, par compte d’exercice). Cescomptes généraux, classés par types de recettes et dedépenses, étaient soumis annuellement au vice-roi parMichel Hennin, trésorier de la Couronne ; c’est surces comptes, dont j’ai consulté les copies microfilméesaux archives du musée national du château deMalmaison, que je fonde mes observations. 13. Il faut remarquer que les « Objets d’Arts,Sciences & a » incluent aussi bien les tableaux et lessculptures que les pierres gravés, les mosaïques et lesalbâtres, ainsi que les livres. 14. « Année 1808. Trésor de la Couronne. Caisse par-ticulière de S.A.I. le Prince Vice-Roi. Compte généralrendu à Son Altesse Impériale Monseigneur le PrinceEugène Napoléon de France, Vice-Roi d’Italie,Prince de Venise, Archi-Chancelier d’Etat del’Empire Français, des Recettes & Dépenses faitessur la Caisse particulière pendant l’année 1808. ParM. Hennin Trésorier pro.e de la Couronne. » (EBA,Personal Finances).15. « Année 1809. Trésor de la Couronne. Caisse par-ticulière de S.A.I. Monseigneur le Prince Vice-Roi.Compte général rendu à Son Altesse ImpérialeMonseigneur le Prince Eugène Napoléon de France,Vice-Roi d’Italie, Prince de Venise, Archi-Chancelierd’Etat de l’Empire Français, des Recettes &Dépenses faites sur la Caisse particulière pendantl’année 1809. Par M. Hennin Trésorier pro.e de laCouronne. » (EBA, Personal Finances).16. Giovanni Beltrami (Crémone, 1770-1854), gra-veur de camées et de gemmes. Sur ses relations avecEugène de Beauharnais, voir Gabriella TASSINARI,« Glyptic Portraits of Eugène de Beauharnais : TheIntaglios by Giovanni Beltrami and the Cameo by

Antonio Berini », dans The Journal of the WaltersMuseum, 60-61, 2002-2003, p. 43-64. Le collection-neur et mécène lombard Giovanni BattistaSommariva commanda à Giovanni Beltrami lesreproductions gravées sur pierre précieuse de plu-sieurs de ses tableaux, voir Lucia PIRZIO BIROLI

STEFANELLI, « “Avea il marchese Sommariva… una suafavorita idea” II. Le incisioni di Giovanni Beltrami »,dans Bollettino dei Musei Comunali di Roma, n. s., XI,1997, p. 111-131.17. Antonio Berini (Rome, 1770-Milan ?, 1861), gra-veur de camés et de gemmes. Il travailla pour Eugènede Beauharnais, ainsi que pour Giovanni BattistaSommariva, voir Giorgio LISE, « Antonio Berini inci-sore di pietre dure e il legato Sommariva-Seillère »,dans Raccolta delle Stampe A. Bertarelli. Raccolte di Arte.Applicata Museo degli strumenti musicali. Rassegna di studie di notizie, XIII, Milan, 1986, p. 477-496 et GabriellaTASSINARI, « Incisori di pietre dure e collezionisti aMilano nel primo Ottocento : il caso di AntonioBerini e Giovanni Battista Sommariva », dansContinuità della tradizione classica. Le gemme incise nelSettecento e Ottocento (seminario, Castello di Udine, 26 settembre 1998), Udine, 2003.18. Sur ce graveur de gemmes, voir GabriellaTASSINARI, « Il progetto dell’incisore di gemmeGiovan Battista Dorelli per l’istituzione di una Scuolad’incisione di cammei », dans Studi Monzesi, 12, 2002.19. Giuseppe Girometti (Rome, 1780-1851).20. Voir Lucia PIRZIO BIROLI STEFANELLI, « Camilloe Clemente Pestrini incisori in pietre dure e professoriin tenero », dans Antologia di belle arti, n. s., 35-38,1990, p. 42-49.21. Giacomo Pichler (Rome, 1778-Milan, 1815), fils(moins célèbre que son père) de Giovanni (Rome,1734-1791). Il travailla aussi pour Giovanni BattistaSommariva, voir Lucia PIRZIO BIROLI STEFANELLI,« “Avea il marchese Sommariva… una sua favorita idea” I.Opere di incisori romani documentate nella colle-zione Paletti », dans Bollettino dei Musei Comunali diRoma, n. s., IX, 1995, p. 104-116.22. Probablement Edmé-Antoine Durand (1768-1835), collectionneur et marchand d’antiquités fran-çais, dont la première collection de vases dits «étrusques » fut acquise par le Louvre en 1825.23. James Millingen (1774-1845), archéologueanglais, auteur de nombreux ouvrages sur lesmédailles antiques et modernes. Il est notammentl’auteur, avec Aubin-Louis MILLIN, de l’Histoire métal-lique de Napoléon, ou Recueil des médailles et des monnaiesqui ont été frappées depuis la première campagne de l’arméed’Italie jusqu’à son abdication en 1819, Londres, 1819-1821. Il vécut longtemps à Rome en faisant commerced’antiquités. Millingen vendit en 1808 une partie desa collection au Cabinet Numismatique de Brera àMilan : à ce propos, voir Adriano SAVIO, « La fonda-zione del Gabinetto Numismatico di Brera », dansDaniele FORABOSCHI (éd.), Storiografia e erudizione.Scritti in onore di Ida Caleba Limentani, Bologne, 1999,

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p. 231-232 et Ève GRAN-AYMERICH, Dictionnaire bio-graphique d’archéologie : 1798-1945, Paris, 2001, ad vocem.24. S’agit-il d’Alessandro Sanquirico (1777-1849),l’un des plus célèbres peintres de décors de théâtre,qui fut actif pendant de nombreuses années à la Scalade Milan (voir Fernando MAZZOCCA, AlessandroMORANDOTTI, Enrico COLLE et alii [éd.], Milano neo-classica [catalogue d’exposition, Milan, PalazzoReale], Milan, 2001, p. 632-633), ou d’AntonioSanquirico, marchand d’art à Venise (voir MarilynPERRY, « Antonio Sanquirico, Art Merchant ofVenice », dans Labyrinthos, 1-2, 1982, p. 67-111) ?25. « Année 1807. Trésor de la Couronne. Caisse par-ticulière de S.A.I. le Prince Vice-Roi. Compte généralrendu à Son Altesse Impériale Monseigneur le PrinceEugène Napoléon de France, Vice-Roi d’Italie,Prince de Venise, Archi-Chancelier d’État del’Empire Français, des Recettes & Dépenses faitessur la Caisse particulière pendant l’année 1807. ParM. Hennin Trésorier pro.e de la Couronne. » (EBA,Personal Finances).26. Luigi Celotti, abbé vénitien, marchand et collec-tionneur de tableaux, de livres et de manuscrits enlu-minés, actif dans la première moitié du XIXe siècle. SurCelotti, voir Francis HASKELL, Mécènes et peintres. L’artet la société au temps du baroque italien, Paris, 1991,p. 692. Pour ses contacts avec le marché de l’art enAngleterre, voir Hugh BRIGSTOCKE, WilliamBuchanan and the 19th Century Art Trade : 100 letters to hisagents in London and Italy, Londres, The Paul MellonCentre for Studies in British Art, 1982, ad indicem. En1818, Luigi Celotti put acquérir la collection d’œu-vres graphiques du peintre Giuseppe Bossi, qu’il finitpar vendre – sur la proposition de LeopoldoCicognara, et non sans de longues et laborieuses trac-tations – à l’Accademia de Venise en 1822 (voirGiovanna NEPI SCIRÉ, Accademia di Venezia. La colle-zione di disegni, Milan, 1982, p. 11-12).27. « Année 1807. Trésor de la Couronne. Caisse particulière de S.A.I. le Prince Vice-Roi…. », voirnote 25.28. Le paiement pour ces deux portraits est enregis-tré en 1808 (« Année 1808. Trésor de la Couronne.Caisse particulière de S.A.I. le Prince Vice-Roi… »,voir note 14). Voir Chiara PARISIO, Giovanni BattistaGigola. Committenti e opere, Brescia, 2002, no 58, 60 et64, p. 101-104 (avec illustrations en couleur). 29. La Madeleine qui appartint à Sommariva estactuellement au Museo di Sant’Agostino de Gênes.La réplique commandée par Eugène de Beauharnaisse trouve aujourd’hui au musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg. Les paiements pour cette réplique etpour son transport de Rome à Milan sont effectués en trois versements : en 1809, le « 28 mars : àMr Bignami et Vassalli pour valeur d’une traite surRome de 1.000 sequins remise à M. Canova p.r 2/3 duprix de la Statue de la Madeleine = 11.96 lires 80 cen-times » ; en 1810, « à M. le Ch. Canova à Rome pourpartie du prix de sa Statue de la Madeleine500 sequins en une traite prise des Mess. Bignami et

Vassalli = 6.215 lires » et, la même année, « à Fucciop.r port de la Statue de la Madeleine = 484 livres80 centimes » (EBA, Personal Finances : comptes géné-raux, années 1809 et 1810).30. En vue de l’inauguration des SallesNapoléoniennes de la Pinacoteca, prévue pour le15 août 1809. En outre, le décret de suppression descompagnies, congrégations et associations religieuses(avril 1810) eut pour conséquence des nouveauxdéplacements d’œuvres d’art, dont une partie fut des-tinée à Brera. Sur ces questions, voir SICOLI, op. cit.n. 11, 1992.31. Le payement fut effectué en quatre versementsannuels de 5.000 lires chacun (EBA, PersonalFinances : Comptes généraux, années 1811 à 1814).Les Archives Beauharnais conservent également unelettre des administrateurs de Santa Maria près SanCelso attestant le payement du premier versement,datée Milan, 6 février 1811 (EBA, Correspondence,Carton 127, dossier 1) : le tableau (huile sur bois,179 � 115 cm) suivit le destin de la collectionBeauharnais-Leuchtenberg d’abord à Munich, puis àSaint-Pétersbourg ; mis en vente à Stockholm en1817 (Leuchtenbergska Tavelsamlingen, A. B. NordiskaKompaniet, Stockholm, 1917, no 13), appartintensuite aux collectionneurs américains Axel Beskowet Willitts J. Hole ; donné en 1939 au musée del’Université de Californie avec le reste de la collectionWillitts J. Hole.32. Cette attribution est encore aujourd’hui envigueur, bien que Francesco Frangi ait émis desdoutes : Francesco FRANGI, « La “resistenza” leonar-desca a Milano : il Maestro di Ercole e GerolamoVisconti », dans Valentina MADERNA (éd.), Brera maivista. All’ombra di Leonardo. La pala di Sant’Andrea allaPusterla e il suo maestro (catalogue d’exposition, Milan,Pinacoteca di Brera), Milan, 2003, p. 18-19. Voiraussi Chiara NENCI (éd.), Memorie di Giuseppe Bossi.Diario di un artista nella Milano napoleonica 1807-1815,Milan, 2004, p. 37, 131-132, n. 286.33. Eugène la lui avait en effet commandée en 1807afin de faire réaliser une mosaïque en vue de préser-ver la fresque, déjà très abîmée. La copie peinte parBossi est perdue. La mosaïque fut réalisée parGiacomo Raffaelli entre 1810 et 1818.Originairement destinée au musée du Louvre, elle futfinalement, à cause des changements politiques inter-venus, expédiée à Vienne, où elle est aujourd’huiconservée à la Minoritenkirche, voir PietroC. MARANI, Il genio e le passioni : Leonardo e il Cenacolo ;precedenti, innovazioni, riflessi di un capolavoro (catalogued’exposition, Milan, Civico Museo d’arte contempo-ranea), Milan, 2001, p. 386-387, no 165.34. Voir Irina ARTEMIEVA, « Vicende della pitturaveneta rinascimentale all’Ermitage », dans eadem(éd.), Cinquecento veneto. Dipinti dall’Ermitage (cata-logue d’exposition, Bassano del Grappa, MuseoCivico-Barcelone, Museu Nacional d’Art deCatalunya), Genève, 2001, p. 34 ; Dario TRENTO, «Una copia di Giulietta Manzoni da Leonardo/Bossi »,

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dans Sandro BERTOLUCCI, Giovanni MEDA et alii(éd.), Weimar 1818. Goethe, Cattaneo, Mylius, Manzoni(catalogue d’exposition, Loveno di Menaggio, VillaVigoni), Loveno di Menaggio, 2004, p. 42 [fig. 5], p.44 n. 8. Le carton fut acheté par décision du vice-roile 9 janvier 1808, voir NENCI, op. cit. n. 32, p. 8. Aucunpaiement n’est enregistré dans la caisse particulièred’Eugène pour cette œuvre qui alla pourtant enrichirsa collection privée.35. Stendhal émet des critiques sévères et motivéessur la copie de la Cène de Léonard peinte par Bossi. Illa définit comme « un gros ouvrage sans génie » avantde renchérir : « Dans une galerie la Cène de Bossidéplaira toujours » ; du carton, il note en revanche :« À la villa Buonaparte ; il a coûté 24 000 francs auprince Eugène ; beaucoup meilleur que le tableau »,Henry Beyle dit STENDHAL, Histoire de la peinture enItalie, éd. établie par Vittorio DEL LITTO, Paris, 1996,p. 198-199.36. Giuseppe BOSSI, Del Cenacolo di Leonardo da Vinci,Milan, Stamperia Reale, 1810.37. Dario TRENTO, Il “Cenacolo” di Bossi protolibro distoria dell’arte lombarda, dans Milano, Brera e GiuseppeBossi nella Repubblica Cisalpina (incontro di studi n. 12,Milan, Istituto Lombardo di Scienze e Lettere, 4-5febbraio 1997), Milan, Istituto Lombardo di Scienzee Lettere, 1999, p. 177-206.38. « (…) rappresentò Maria già persuasa dallamadre già in atto di permettere al figlio che prenda edabbracci a suo talento l’agnello. Sant’Anna mostracon un sorriso celeste la compiacenza a suo tempo, labeatitudine e la gloria d’una madre della divina fami-glia, e di antivedere oprarsi dal figlio di Dio la salutedell’umano genere. Il putto si volge sorridendo allamadre, in atto quasi di godere del suo trionfo, e diconsolarla al tempo istesso [sic] dell’affanno che lecagionerà il proprio sacrificio [sic]. La madre infineguardandola con una dolcezza ed una soavità che aLeonardo solo fu dato d’imitare, sebbene muova nellelabbra un modesto angelico sorriso di tenue compia-cimento, mostra negli occhi alquanto socchiusi e inlieve elevamento e gonfiamento delle palpebre infe-riori, che il di lui cuore non è tranquillo, e che le glo-rie d’esser madre del Salvatore non la fa dimenticache la grand’opera della Salvazione si farà col sangui-noso sacrifizio [sic] del suo unico figlio. » (Bossi, op.cit. n. 36, p. 233).39. « Questa bell’opera fu di recente acquistata dalVice-Ré d’Italia, che l’ha aggiunta ad altre prezioseopere di cui va adorna la sua Villa in Milano. Il signorGiuseppe Benaglia si prepara ad inciderla, e ne stafacendo il disegno » (idem, p. 262, n. 47).40. Son contenu est connu grâce à deux inventairesmanuscrits du XVIIIe siècle et à un catalogue imprimé :inventaire manuscrit de 1718, mais enregistré en 1743(ASB, Notarile, Pietro Pedini, 6 juillet 1743, partielle-ment publié dans Giuseppe CAMPORI, Raccolta di cata-loghi ed inventari inediti (…) dal secolo XV al secolo XIX,Modène, 1870) ; inventaire manuscrit de 1787 (ASB,Notarile, Francesco Masini, 22 febbraio 1787 (ce der-

nier publié intégralement par Gan PieroCAMMAROTA, Le origini della Pinacoteca nazionale diBologna. Una raccolta di fonti. La collezione Zambeccari,Bologne, 2000, p. 443-457) ; Description française et ita-lienne de tout ce qui est contenu dans la Galerie de Monsieurle Marquis et Sénateur Louis Sampieri (…), Bologne,chez l’imprimerie de S. Thomas d’Aquin, 1795.41. À ce sujet, je me permets de renvoyer à mon livre,Monica PRETI-HAMARD, Ferdinando Marescalchi (1754-1816) : un collezionista italiano nella Parigi napoleonica,préface d’Andrea Emiliani, 2 vol., Bologne, 2005, I, p.91-95.42. « S.A. il principe Vice-re invita a far acquisto dellaGalleria Sampieri dividendola in due lotti per cias-cuno dei quali dovrà farsi un contratto particolare,nel primo di essi intende che siano compresi i sei qua-dri principali e nel secondo il rimanente della GalleriaSampieri che brama conservare per il suo conto per-sonale » (ASM, Fondo Studi, parte moderna, fol. 472,note adressée au ministre de l’Intérieur, non signée etnon datée).43. Huile sur cuivre, 90 x 114 cm (ovale). Les autrestableaux de la collection Sampieri qui furent destinésà la Pinacoteca di Brera sont les suivants : les SaintsPierre et Paul de Guido Reni, Agar chassée de Guercino,la Samaritaine au puit d’Annibale Carracci, le Christ etl’Adultère d’Agostino Carracci et le Christ et laCananéenne de Ludovico Carracci. 44. Dans cette lettre Appiani s’exprimait ainsi : « Lafama delle vostre cognizioni nelle Belle Arti, e dellaonestà del vostro carattere mi ha determinato a pre-garvi che vi incarichiate di una commissione. È duopo quindi che sappiate avere io fatto l’acquistonei modi e giusto gli ordini datimi da S.A.I. il PrincipeVice Re della Galleria di quadri già di ragione del Sig.Francesco Sampieri, compreso il gruppetto di dueputti dell’Algardi, ed escluse le altre statue, pel prezzodi 15mila luigi d’oro, e mediante altre condizioni chesi sono stabilite nelle relative convenzioni. Dovendocol giorno 15 del corrente mese essere fatta la conse-gna della Galleria, perché possano essere tosto [?]spediti in seguito a Milano, ho pensato di dare a voiSig. Prof. l’incarico dell’uno e dell’altro oggetto.(…) » (ASM, Fondo Studi, parte moderna, fol. 472).Arrivés à Milan, les caisses de tableaux furent dépo-sés dans la Villa Bonaparte où elle furent ouvertes –comme l’indique le procès verbal de l’ouverture descaisses – en présence d’Andrea Appiani, du chevalierZanoia, secrétaire général de l’Accademia di Brera etd’un fonctionnaire d’État (ASM, Fondo Autografi, fol.103, fascicolo I : « Processo verbale dell’aprimentodelle Casse e ricognizione dei Quadri », daté 25 feb-braio 1811).45. ASM, Fondo Studi, parte moderna, fol. 472. Ce quiest confirmé par les comptes de la caisse privéed’Eugène qui, en 1813, rembourse au Ministre del’Intérieur la somme due (EBA, Personal Finances :compte général, année 1813).46. Voir SICOLI, op. cit. n. 11, 1992, p. 68-69.

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47. À l’état actuel de notre recherche, l’étude compa-rée des inventaires et du catalogue de la collectionSampieri avec les catalogues de la collectionBeauharnais-Leuchtenberg a permis l’identificationd’une dizaine de tableaux, ainsi que du groupe dedeux Putti en marbre d’Alessandro Algardi. Ce der-nier est reproduit en gravure par Muxel (PASSAVANT,op. cit. n. 7, 1851, no 253), mais sa localisation actuellen’est pas connue, voir Jennifer MONTAGU, AlessandroAlgardi, New Haven-Londres, 1985, p. 397, no L.112(qui ne connaissait pas la gravure de Muxel).48. Huile sur toile, 90 x 117 cm (ovale), PASSAVANT,op. cit. n. 7, 1851, no 88. Pour une notice récente dutableau, voir Dwight C. MILLER, MarcantonioFranceschini, Turin, 2001, no 68 (tav. XXXV).49. Huile sur bois transposée sur toile, 58 � 85 cm,PASSAVANT, op. cit. n. 7, 1851, no 38. Voir AlessandroBALLARIN, Dosso Dossi. La pittura a Ferrara negli anni delducato di Alfonso I - Volume primo, Cittadella-Padoue,1995, no 341. Le passage du tableau dans la collectionSampieri n’était pas connu.50. Huile sur cuivre, 33,5 � 40 cm, PASSAVANT, op. cit.n. 7, 1851, no 78. Voir Denis MAHON, Il Guercino.Catalogo critico dei dipinto (catalogue d’exposition,Bologne, Palazzo dell’Archiginnasio), Bologne, 1968,p. 119-120, no 49 ; David M. STONE, Guercino.Catalogo completo dei dipinti, Florence, 1991, p. 93,no 70 ; Luigi SALERNO, I dipinti del Guercino, Rome,1988, p. 158, no 78.51. Purchase, Edwin L. Weisl Jr. Gift, 1998 (inv.1988.188). Huile sur cuivre, 43,8 � 34,9 cm,PASSAVANT, op. cit. n. 7, 1851, no 69. 52. La collection est connue grâce à un cataloguemanuscrit du début du XVIIIe siècle conservé chez leshéritiers de la famille Arese (publié par FrancoARESE, « Una quadreria milanese della fine delSeicento », dans Arte Lombarda, XII, 1, 1967, p. 127-142). Sur la base de cet inventaire et d’un guide illus-tré de la ville de Milan – intitulé Guida Pittorica dellaCittà e del Ducato di Milano et seulement partiellementpublié en 1795 –, Alessandro Morandotti a pu recons-tituer l’histoire de certains tableaux de la collectionArese, passés ensuite dans celle d’Eugène deBeauharnais (MORANDOTTI, op. cit. n. 1, p. 193-237).Valentina Maderna, pour sa part, a identifié les6 tableaux de la collection Arese donnés par le vice-roi à la Pinacoteca di Brera (MADERNA, op. cit. n. 1).53. Lettre de Giuseppe Bossi à Mario Arese Lucinidu 3 janvier 1811, dans ARESE, op. cit. n. 52, p. 129n. 8 et dans MADERNA, op. cit. n. 1, p. 295.54. « Le Ministre de l’Intérieur ayant acheté par monordre et pour mon compte la galerie de tableaux desfrères Arese. Le contrat porte que le prix à payer estde 61.401, 48 francs payables en trois termes : 1813,1814, 1815 » (EBA, Correspondence, note d’Eugène deBeauharnais à Michel Hennin, trésorier de laCouronne, 12 mai 1811).55. Sur ce don, voir MADERNA, op. cit. n. 1.56. L’identification a été possible en comparant lesdescriptions de l’inventaire de la collection Arese

publié par Franco ARESE (voir supra note 52) avec lesgravures de Muxel (PASSAVANT, op. cit. n. 7) : seule-ment douze gravures correspondent avec certitude àdes tableaux provenant de la collection Arese. 57. Huile sur toile, 70 � 87 cm, PASSAVANT, op. cit. n. 7,1851, no 18. Pour deux notices récentes concernant letableau, voir Le siècle de Titien. L’âge d’or de la peinture àVenise (catalogue d’exposition, Paris, Grand Palais),Paris, 1993, no 85 (notice rédigée par AntonioBALLARIN) et Il Rinascimento a Venezia e la pittura delNord ai tempi di Bellini, Dürer, Tiziano (catalogue d’ex-position, Venise, Palazzo Grassi, 1999-2000), Milan,1999, no 102 (notice rédigée par Bernard AIKEMA).Dans ces deux catalogues, le passage du tableau dansles collections Arese et Eugène de Beauharnais n’estpas mentionné.58. Huile sur toile, 97,8 � 82,5 cm, PASSAVANT, op. cit.n. 7, 1851, no 12 (attribué à « Vecelli, Titian »). Cetableau, dont l’attribution reste contestée, à été sou-vent donné par la critique moderne, alternativement,au Titien ou à Giovanni Busi, dit Cariani. Une nou-velle proposition d’attribution à Bonifacio Veronese(Vérone, 1487-Venise, 1533) a été avancée lors de larécente vente du tableau chez Sotheby’s (Old MasterPaintings, part I, Londres, 12 juillet 2001, no 64) ; attri-bution qui ne semble cependant pas convaincre tousles spécialistes et notamment Michel Hochmann.Nous signalons que dans la collection Arese letableau était attribué à Marco Vecellio.59. Huile sur bois, 42 � 31 cm, PASSAVANT, op. cit. n. 7,1851, no 59. Voir Lucia FORNARI SCHIANCHI, SylviaFERINO-PAGDEN (éd.), Parmigianino e il manierismoeuropeo (catalogue d’exposition, Parme, GalleriaNazionale-Vienne, Kunsthistorisches Museum),Milan, 2003, no 2.2.3 (notice rédigée par DavidEKSERDJIAN).60. Huile sur toile, 83 � 90 cm, PASSAVANT, op. cit. n. 7,1851, no 33. Voir Marco CHIARINI, Alan P. DARR,Cristina GIANNINI (éd.), L’ombra del genio. Michelangeloe l’arte a Firenze 1537-1631 (catalogue d’exposition,Florence, Palazzo Strozzi-Chicago, The Art Instituteof Chicago-Detroit, The Detroit Institute of Arts,2002-2003), Milan, 2002, no 13 (notice par JanetCOX-REARICK).61. Voir l’article de France NERLICH dans ce mêmevolume. 62. Dans les Archives Beauharnais (EBA, Carton139, dossier 1) sont conservés deux listes manuscritesdes tableaux de la collection Sampieri (sans signatureni date) : l’une, probablement rédigée au moment dela vente, porte le titre « Quadri esistenti nella GalleriaSampieri di Bologna coi rispettivi prezzi », l’autre, sanstitre, relative à l’ouverture des caisses à Milan, estdivisée en quatre colonnes : « numero della cassa »,« numero marcato sul quadro » « Soggetto ed Autore »« Classe data alli quadri ». Dès son arrivée à Milan, lacollection Sampieri est ainsi divisée en catégories devaleur (de 1 à 4), selon les usages qu’Appiani appli-quait à la sélection des tableaux provenant des diffé-rents départements du Royaume : les meilleurs

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tableaux revenaient à la Brera, tandis que les autresétaient attribués à d’autres institutions, à la décora-tion des résidences royales ou à la vente.63. EBA, Personal Finances, Carton 139, dossier 1.64. « Monseigneur, M. Le Chevalier Soulange m’aremis la note, que V.A. lui a adressée pour moi, endate du 18 de ce mois et relative au payement de lagalerie de tableaux de la famille Arese de Milan. LeMinistre de l’Intérieur fit l’achat de cette Galerie aunom de V.A. et me remit un des originaux de l’acted’achat pour en exécuter le contenu quant aux paye-ments du prix. L’achat total montait effectivement,autant que je me le rappelle à soixante mille francs ;j’ai exactement rempli les conditions de l’achatjusqu’au moment de mon départ en Italie ; mais je nepuis pas me rappeler si j’ai payé le premier ou lesdeux premiers tiers ; cependant je pense plutôt n’enavoir payé que le premier.Il est donc facile, en se faisant représenter le doublede l’acte d’achat resté à la famille Arese, de voir ce quia du être payé en avril 1814 : ce qui a du être acquittél’a été, et rien de plus. (…) » (EBA, Correspondence :copie-lettre de Michel Hennin à Eugène deBeauharnais à Munich, Paris, 30 septembre 1815)65. Ce que Valentina Maderna avait remarqué, sanspouvoir donner une explication précise (MADERNA,op. cit. n. 1).66. Huile sur bois transposé sur toile, 49 � 35 cm,PASSAVANT, op. cit. n. 7, 1851, no 29 (attribué à« Masaccio »). Pour une bibliographie récenteconcernant le tableau, voir Alfonso E. PÉREZ

SÁNCHEZ, Joan SREDA I PONS (éd.), Colección Cambó(catalogue d’exposition, Madrid, Museo Nacional delPrado), Madrid, 1990, no 16, p. 204-210 ; GiovanniMORELLO, Anna Maria PETRIOLI TOFANI (éd.),Sandro Botticelli. Pittura della Divina Commedia (cata-logue d’exposition, Scuderie Papali al Quirinale),Milan, 2000, p 120-121, no 3.4. Les propositions dedatation varient : vers 1490 ou 1496-1497.67. EBA, Personal Finances, Carton 139, dossiers 1 et2. Il s’agit d’une dizaine de lettres (la majeure partiesans date ; une datée 22 novembre 1820). Ellescontiennent des descriptions et des listes de tableauxque Lasalle proposait de vendre au prince Eugènemoyennant de l’argent ou en échange d’autrestableaux de sa collection.68. Dans les Archives Beauharnais de Princeton sontconservées plusieurs lettres envoyées au prince Eugèneou à son secrétaire intime Antoine Darnay pour propo-ser l’achat de tableaux. Parmi les correspondants,citons, outre Serand Lasalle, le comte Cesare Bianchettide Bologne, Pellina Brignole de Dalberg, belle-sœur deCarlo Marescalchi, fils du défunt Ferdinando, ex-ministre des Relations Extérieures du Royaume d’Italieet grand collectionneur, Michel Hennin, GuillonLethière, ex-directeur de l’Académie de France àRome, le baron Charles Rechberg, grand chambellandu roi de Bavière et Xavier Schechner.

69. Lettre non datée, signée avec le sigle « S.L. » (pourSerand Lasalle). Étant donné l’intérêt de cette lettre,nous en donnons ici la transcription intégrale : « J’ai l’honneur de remettre à Monsieur le BaronDarnay les propositions que j’avais préparées pour lessoumettre à S.A.R. le Prince Eugène.Quant au Masaccio pris individuellement S.A.R. dai-gnera me permettre de lui dire qu’elle n’a pas assezréfléchi sur le mérite éminent de ce tableau et sur sonextrême rareté.Si S.A.R. pense que le prix de 600 Louis que j’y ai mispour elle seule, est tellement au-dessus de sa valeur qu’ilne lui permette pas de me faire une offre, comment leTableau serait-il digne de l’attention de S.A.R. ?Si au contraire il mérite l’estime que S.A.R. a paru enfaire en le voyant et le suffrage unanime, je diraipresque l’enthousiasme, de tous les artistes. Si tous sesont accordés à dire qu’il était digne et par sa beauté, etpar sa rareté et par son importance dans l’histoire del’art de faire le pendant du portrait de Raphaël dans lagallerie [sic] de Munich, comment peut-il être trop cherà ce prix ?Pour une chose parfaitement belle et qui ne se trouvequ’une fois, sur quelles bases les personnes que S.A.R.a daigné me nommer, ont-elles pour fonder leur évalua-tion ? Savent-elles quelqu’autre [sic] Portrait duMasaccio à placer dans la gallerie [sic] de S.A.R. quandelles en auront éloigné celui-ci ?Ignorent-elles que ni le Musée de Paris, ni Dresde, niBerlin, ni Vienne ne possèdent un Masaccio ; et moinsencore le Portrait de cet homme extraordinaire peintpar lui-même ? Que Florence même, Patrie de ce grandRestaurateur de la peinture, ne possède de lui qu’unportrait de jeunhomme [sic] dans le palais Pitti, quiselon Lanzi, y est tenuto in gran pregio ; et les restes de sesouvrages à fresque dans la chapelle del Carmine ?Qu’on ne cite dans Rome que quelques fresques à S.Clemente, de son premier tems [sic], très mal conservées,ou mal restaurées ? – je prie S.A.R. de lire ce qu’on écritdu Masaccio, et particulièrement Lanzi : Storia pittoricadella Italia, à l’école florentine.Cette autorité appuyée par l’impression que produitmon Tableau sur tous les connaisseurs et sur tous ceuxqui le voient, en dit assez sur la considération quemérite le Masaccio : quant au prix, il ne peut avoir pourarbitres que S.A.R. qui veut le posséder, et moi quiveux le lui vendre. La proposition que je soumets à S.A.R. lui rend l’ac-quisition de ce tableau beaucoup moins onéreuse sansla déprécier ; mais s’il fallait en traiter séparément, jene peux que répéter à S.A.R. que non seulement 600Louis dont j’accepte moitié en tableaux ne sont pas unecondition déraisonnable, mais que je ne l’ai faite quepour le Prince Eugène.S.A.R. jugera mieux que personne, si elle daigne yréfléchir, de l’importance de l’acquisition des deuxtableaux que j’ai l’honneur de lui offrir, et de l’avan-tage qu’elle présente. En se déterminant à le faire, elleenrichira sa galerie de deux pièces de premier ordre ;

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elle fera une très bonne chose pour moi qui lui enaurai une vive gratitude, en me félicitant de l’avoirtrès noblement servie.Mais si le Masaccio quitte Munich, j’ose assurerS.A.R. qu’elle le regrettera un jour ; et si quelquespersonnes l’ont détournée de cette belle acquisitionpar des calculs hors de saison, il s’en trouvera beau-coup d’autres qui s’étonneront et s’affligeront de voirce chef d’œuvre aller rendre ailleurs que chez S.A.R.une place digne de lui.J’ai fait pour la gallerie [sic] de S.A.R., pour l’hon-neur de Masaccio, tout ce que j’ai dû : S.A.R. déci-dera, et mes affaires à la garde de Dieu ! ». Ledeuxième tableau que Lasalle voulait vendre àEugène était un « grand Guercino », voir infra.70. L’œuvre n’apparaît en effet pas dans aucun descatalogues de la collection, ce qui, compte tenu de sonimportance, signifie sans doute qu’elle n’en a jamaisfait partie.71. Cette description est contenue dans une liste detableaux que Lasalle fit parvenir au prince Eugène (àune date non précisée). Cette liste, divisée par écoles,contient des descriptions plus ou moins longues de28 peintures avec leurs prix respectifs : dans l’ordre,

11 tableaux des écoles flamandes et hollandaises, 3 del’école française, un de l’école allemande et 13 desécoles italiennes. Les tableaux italiens sont les plusnombreux et les plus prisés. Parmi eux, figurent le« grand Guercino » et le portrait de Masaccio :« Guercino. Le bienheureux Félix, de l’ordre de StFrançois reçoit l’Enfant Jésus des mains de la Viergequi descend du ciel portée sur les nuages, auprès dusaint est un ange qui porte la besace. 4 figures princi-pales de grandeur naturelle. 9 pieds 1/2 de haut sur 6de long. Ce Tableau, l’un des plus beaux qui existentde ce maître, fut peint en 1642 pour un Duc d’Estequi s’était fait Capucin. Il porte les armes de la mai-son de Modène. Il est cité sous le no 52 de la liste desouvrages du Guercino donnée par Malvasia dans saFelsina Pittrice part. IV page 373. C’est une des piècesles plus capitales qui puissent être présentés à unecollection royale. 1.000 louis » ; « Masaccio. Son pro-pre portrait. Pièce des plus rares que je n’échangeraispas, pour sa grande beauté autant que pour sa raretéextrême, contre le plus beau portrait de la main deRaphaël, à composition égale – éminemment clas-sique 600 louis ».

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