En écoutant Jean-François Chevalier

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Bonjour Messieurs Dames En écoutant Jean-François Chevalier Jean-François Chevalier - On peut aussi parler de choses complètement à côté de l’exposition ? Paulette Choné - Pas trop si on n’a que deux pages ! 1. Ça c’est quand même une révélation ! Pourquoi Messieurs Dames 1 ? Tout simplement c’est une enseigne de coiffure qui appartenait à mes beaux-parents et je l’ai redécouverte dans le grenier comme une invitation à l’exposition, alors qu’à l’origine c’était le coin des femmes le coin des hommes C’est une invitation à entrer dans mon univers, à partager une partie de mon univers par l’intermédiaire des peintures, des gravures Une façon de me rapprocher des gens pour leur montrer mon travail Dans l’idéal c’est un échange Bien qu’il soit plastique, c’est quand même un échange, un rapprochement Bien sûr, c’est de la peinture, mais ça peut devenir plus que ça Parler des clapiers et des lapins, c’est une histoire personnelle Parler des enseignes aussi c’est une histoire personnelle Oui, ça veut dire beaucoup de choses La façon dont on m’a construit C’est à travers des faits journaliers que l’on bâtit ce que l’on a à dire Bien sûr la culture vient s’ajouter à cela Les expériences ? Oui. Mais quand même, l’essentiel c’est ce qu’on vit tous les jours Le réel, oui, vient modeler le faire Le réel se révèle à travers une recherche Par l’exécution d’une idée Et après, pour modeler une œuvre Encore faut-il la saisir au bon moment « Surprendre ce qui surgit » ? C’est à la fois immédiat et Très long Et puis après l’œuvre existe Alors elle résiste plus ou moins au temps Parce que ce réel-là contient tout Puisqu’il est à la fois la mémoire du Messieurs Dames qui était sur la vitrine Et qui révèle tout ce que j’ai vécu jusque là Et maintenant tu vois Là tout d’un coup il y a cette distance qui fait que le réel dure, que ce n’est pas un objet décoratif L’œuvre n’est pas un objet, c’est un fait C’est un fait Quelque chose qui existe 1 Exposition fin janvier 2014 à La Douëra, Maxéville (Meurthe-et-Moselle)

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Bonjour Messieurs Dames En écoutant Jean-François Chevalier

Jean-François Chevalier - On peut aussi parler de choses complètement à côté de l’exposition ? Paulette Choné - Pas trop si on n’a que deux pages !

1. Ça c’est quand même une révélation ! Pourquoi Messieurs Dames1 ? Tout simplement c’est une enseigne de coiffure qui appartenait à mes beaux-parents et je l’ai redécouverte dans le grenier comme une invitation à l’exposition, alors qu’à l’origine c’était le coin des femmes le coin des hommes C’est une invitation à entrer dans mon univers, à partager une partie de mon univers par l’intermédiaire des peintures, des gravures Une façon de me rapprocher des gens pour leur montrer mon travail Dans l’idéal c’est un échange Bien qu’il soit plastique, c’est quand même un échange, un rapprochement Bien sûr, c’est de la peinture, mais ça peut devenir plus que ça Parler des clapiers et des lapins, c’est une histoire personnelle Parler des enseignes aussi c’est une histoire personnelle Oui, ça veut dire beaucoup de choses La façon dont on m’a construit C’est à travers des faits journaliers que l’on bâtit ce que l’on a à dire Bien sûr la culture vient s’ajouter à cela Les expériences ? Oui. Mais quand même, l’essentiel c’est ce qu’on vit tous les jours Le réel, oui, vient modeler le faire Le réel se révèle à travers une recherche Par l’exécution d’une idée Et après, pour modeler une œuvre Encore faut-il la saisir au bon moment « Surprendre ce qui surgit » ? C’est à la fois immédiat et Très long Et puis après l’œuvre existe Alors elle résiste plus ou moins au temps Parce que ce réel-là contient tout Puisqu’il est à la fois la mémoire du Messieurs Dames qui était sur la vitrine Et qui révèle tout ce que j’ai vécu jusque là Et maintenant tu vois Là tout d’un coup il y a cette distance qui fait que le réel dure, que ce n’est pas un objet décoratif L’œuvre n’est pas un objet, c’est un fait C’est un fait Quelque chose qui existe

1 Exposition fin janvier 2014 à La Douëra, Maxéville (Meurthe-et-Moselle)

Donc dans Messieurs Dames il y a aussi cet aspect-là, de reconnaître des gens qui viennent, je ne sais pas quel effet ça va produire, imagine des gens qui vont recevoir le carton, et puis en arrivant à l’exposition ils s’attendent à quelque chose ? Et puis ils tombent sur une série de toiles qui est presque impressionniste ou je ne sais pas Et là aussi La mémoire de Cournault dans la Douëra Le miroir et ce fameux article Ça c’est quand même une révélation ! ...

2. Des animaux qui sentent mauvais ou qui sentent bon Oui je me souviens d’une exposition, c’était au moment de l’installation des mères de coulée de Pompey et le titre de l’exposition, c’était Témoin d’un parcours

C’était tout ce que j’avais vécu autour de ces années et de ce parcours géographique Et qui devait se révéler au travers de choses que je montrais Il y a forcément cette notion d’histoire de choses vécues qui témoignent d’un parcours Autant géographique que personnel C’était quand même Pompey, toute la sidérurgie qui a modelé, forgé, modelé, forgé mon environnement Ce qui prouve quand même que le réel a énormément d’importance La rencontre avec le réel Mais le réel quotidien, le tous les jours, le banal, le clapier, les enseignes de commerçants ! Mes parents, mes beaux-parents étaient commerçants Le contact avec les gens était normal La première chose qu’on disait, c’était : « messieurs dames » Et je dirais même que quand on arrive à mettre le quotidien le plus banal possible dans une œuvre et que ça fait tout à fait l’inverse, que ça renvoie complètement à autre chose... Mais tu es plus proche de Chardin que de Duchamp… Ah non, les ready made, c’est pas ça Il y a tout le côté charnel, gustatif Regarde le petit livre sur la montagne, la fourrure, la caresse Ça pour moi c’est le quotidien Le petit livre sur la montagne Tu vois bien, avec les textes de Rousseau Et Les enfants y pensent, il y a ce texte de Delacroix qui est explicite là-dessus Une œuvre d’art ce n’est pas seulement l’image, c’est l’appréhension de la vie Un gamin quand il te fait un dessin il fait un visage qui parle ou des animaux qui sautent, qui sentent mauvais ou qui sentent bon La bave de l’escargot, les sauterelles Il y a cette proximité avec les choses la sensation

3. L’accident Quand tu peins, c’est de la sauce, c’est du jus, c’est de la pâte, c’est des choses qui se mélangent Tu joues avec tous les accidents possibles C’est ça le réel, c’est l’accident Des choses qui s’annulent les unes les autres aussi Tu penses tout d’un coup avoir une chose possible, intéressante et il arrive cet accident qui te prive... Il n’y a pas de retour en arrière C’est pourquoi je dis : annuler On ne peut pas refaire On peut changer mais pas refaire Donc les choses s’annulent ! 4. Je mets mon ongle dans la taille et je vois C’est une réflexion de graveur ? La gravure c’est encore plus terrible Moi je ne chronomètre pas l’acide, je mets mon ongle dans la taille et je vois Et après c’est le tirage qui va révéler la chose Ce qu’on n’a pas vu c’est le tirage qui va le révéler Et là encore une fois quand le tirage est révélé, c’est difficile de juger si on va garder ou pas garder On peut être tout à fait déçu ou content Au moment du tirage il y a une espèce de transe et ça peut tourner court très vite On fait une retouche et un tirage et on s’aperçoit que tout est changé Alors là j’ai fait l’expérience avec la gravure de la montagne dans les Dolomites. En réalité, il y a 5 gravures, 3 petites et 2 grandes. Sur les 3 petites, j’ai plusieurs états. Sur une grande, j’ai fait 2 états, enfin 1, et sur l’autre j’ai fait 15 états. Je m’apercevais au fur et à mesure que je faisais des états,

C’était comme si j’étais dans la montagne, La montagne qui apparaissait qui disparaissait dans les nuages, Qui vivait Quand on met tous les états l’un au bout de l’autre, on s’aperçoit de cette respiration Et c’est la gravure qui permet de conserver cela qui permet de conserver dans tous ses états la chronologie de la plaque C’est très important ça. Peut-on aller jusqu’à dire que la gravure permet de conserver le temps ? Tu veux dire les étapes ? Oui. Ça m’avait beaucoup plu ça C’est pour ça que la gravure m’intéressait, parce qu’à chaque fois il y avait un témoin Une épreuve-témoin qui à chaque fois balisait la construction Ou bien l’inverse (rires) Quand on écrit sur l’ordinateur on chasse les ratures, les repentirs, c’est le triomphe du définitif... C’est impersonnel C’est très prétentieux, ça a l’air de vouloir maintenir seulement ce qui est achevé C’est peut-être une façon plus simple de communiquer ? Dans la communication, tu uniformises le mode de communication, alors qu’en art tu revendiques une singularité Donc forcément ce que tu montres est singulier À un moment donné il faut beaucoup de disponibilité Pour capter les choses

5. La grâce, pas entre guillemets Je n’ai plus du tout d’esprit de compétition, de vouloir être le meilleur des meilleurs Ça donne une grande liberté. C’est là que j’espère que tout se dénoue ! Pendant tes années d’activité, on t’apprend à filer droit et on te prive de tout ce bonheur de liberté qui est la chose la plus créatrice car c’est là que les choses se font On t’apprend toutes sortes de méthodes pour que tu sois dans les rangs Je peux me servir de ces méthodes mais peut-être pas pour rechercher ce que l’on me demandait à l’époque Dirais-tu qu’au long des années de maturation, le réel travaille lui même en toi ? Ah oui ! ça travaille tout seul, c’est un long travail ! Mais attention, le résultat, ce n’est pas un travail d’artisan, pas un travail de perfection, ce n’est pas la perfection qu’on cherche là C’est bien autre chose, de plus libre Justement, là on va se permettre tous les écarts possibles Là, la peur du vide on n’en a plus Justement la perfection c’est d’arriver à la liberté La perfection, c’est d’arriver à ne pas penser à la perfection ? Oui, oui. C’est comme un geste juste, ou un son ou une conversation, qui va être justement... ... je n’aime pas le mot mais qui va sembler intelligente d’elle-même

C’est la grâce ? Oui, c’est ça ! C’est bien beau d’être doué mais il faut quand même la grâce Si on n’a pas ça, si on ne la rencontre pas, eh bien rien ne se passe 6. Le matin quand je déjeune je regarde la Moselle Mais ça n’est pas non plus l’inspiration ? Pfffffuuuiiiii l’inspiration c’est pas grand chose Il faut graisser les rouages, ìl faut que ça marche Mais là ça vient tout seul Ici on a tout sous la main Dans l’atelier là-bas, c’est pareil J’ai mis une vie à accumuler le matériel nécessaire pour pouvoir travailler quand tu fais exister quelque chose quel bonheur parce que tu te dis sans prétention j’ai vaincu en découvrant autre chose j’ai vaincu quoi ? j’ai vaincu moi je me suis dépassé en faisant ça je ne suis plus dans l’état où j’étais avant il s’est passé autre chose peut-être un tableau une gravure ou un regardant simplement le matin quand le déjeune je regarde le paysage je regarde la Moselle La vie même Tenter de se rapprocher de ça, de cette simplicité À un moment donné je ne pose pas la question si c’est bien ou mal de le faire

7. Comme un saint qu’on vénérait Comment as-tu découvert Cournault ? Cournault, c’est à l’école que je l’ai découvert, avec André Wahl, Monsieur Claude. Ce sont eux qui m’ont parlé de Cournault, c’est Jacquemin aussi, Hallez, ceux qui m’ont fait découvrir la gravure et par l’intermédiaire de la gravure m’ont fait connaître Cournault. Alors bien sûr après je connaissais la Douëra la maison le parc le lieu

Et puis il y avait toujours cette admiration pour le monotype, pour les gravures qui étaient à la fois très figuratives, très bien dessinées et qui tout à coup devenaient quelque chose de complètement accidentel Des graffitis, des monotypes, des toiles avec du sable dessus, des fresques, des choses inattendues sur du sable, sur de la toile, sur du papier, sur des miroirs, etc. Donc pour moi, c’était l’artiste majeur de chez nous, de l’Est, qui avait une envergure très large par rapport à tous les gens que je connaissais J’aurais aimé d’ailleurs le fréquenter, le connaître Bon c’était comme un saint qu’on vénérait Bref je n’ai jamais eu l’intention non plus de faire du Cournault mais l’intention de me révéler tel que j’étais Et puis bon, on oublie, il y a un moment où il est peut-être en nous mais on n’en parle plus et puis il faut retourner aux accidents de la vie, au banal 8. Faire du petit bois Eh bien il y a là... (je parle de personnes qui pourraient être mes aïeux)... et on récupère forcément des objets de ceux-ci et notamment cette armoire tapissée d’Est républicains que je n’avais pas spécialement l’intention d’utiliser Plus pour faire du petit bois Pour faire de la place et voilà tout d’un coup en sciant l’armoire je trouve un fragment avec « les Amis de Cournault Dernier hommage à Cournault » que je présente dans l’exposition en hommage à Cournault dans le salon de Cournault et de façon presque prétentieuse je m’immisce dans cette façon de faire cette façon de penser j’espère juste pendant le temps de l’exposition (rires) et encore une fois (disons le temps de l’exposition nous dira la suite) il est vrai que c’est comme un miracle au moment où on veut aller dans un endroit on trouve tous les éléments qui nous sont donnés on ne sait pourquoi ni comment et qui font exister encore plus fort que le désir de réaliser des choses concrètes Et finalement oui je crois beaucoup en ces situations fortuites Je crois que quand on peut faire une peinture ou une gravure aussi fortuite que ça c’est de la grâce comme on disait tout à l’heure ... 9. Je dessine les lettres comme je dessinerais une montagne Peut-on revenir un instant sur le livre ? Le livre... oui au départ il y a une espèce de récit, dès l’instant qu’il y a une suite de gravures, ça doit faire office de récit avec une chronologie, un contenu en tout cas, entre chaque pièce qui fait que les choses se répondent Ce sont toujours des livres sans texte bien sûr, quelquefois avec des titres, donc c’est la gravure qui doit justement véhiculer les choses Mais la gravure ne doit pas discourir ? Elle n’est pas démonstrative, elle révèle des choses souvent incongrues, inattendues Je pense alors aux emblèmes de l’art ancien : des gravures qui révèlent l’inattendu voire l’énigme, mais avec le secours du texte Voilà, absolument

Nous pourrions faire ensemble un livre d’emblèmes, un jour Entre parenthèses, imaginerais-tu une suite de gravures avec du texte ? Ou est-ce que ça te paraît tout à fait incongru ? Ah, je n’y suis jamais arrivé, j’ai utilisé du texte qui devient image et jamais illustré un texte ou même jamais écrit un texte pour l’illustrer après. Je ne parle pas d’illustration, mais de quelque chose où du texte qui ne serait pas seulement le titre viendrait en même temps et solidairement de la gravure. Oui ça existe dans le bouquin de Pompey : il y a du texte qui devient image, du texte gravé. Dans le recueil de bêtes aussi, il y a du texte qui devient image. Dans le dernier, Les yeux fermés, il y a du texte : dans le numéro de la chambre... C’est plutôt la lettre au sens technique du vocabulaire de la gravure ? Oui, je dessine les lettres comme je dessinerais une montagne

10. Faire fi La matérialité du livre, la reliure, l’emboîtage, quel rôle jouent-ils ? C’est l’œuvre, comme le reste, comme l’accrochage dans l’exposition Ça doit donner toute sa lisibilité au travail accompli Ça en fait quelque chose d’extrêmement précieux aussi ? Ça peut être extrêmement brutal ! Le Pompey, c’est la plaque du four de mon père, cette plaque de fonte de 3, 4 kilos complètement érodée qui est la couverture Donc les gravures sont insérées là-dedans, ça peut être ultra-précieux C’est très précieux, c’est unique !

La gravure qui est quand même multiple, tout à coup elle est dans quelque chose qui est unique, ce qui lui évite d’être disséminée, d’être comme une feuille de papier précaire. C’est vrai que c’est contradictoire : pourquoi à un moment donné ne fait-on pas un carnet de croquis, de dessins ? Pourquoi a-t-on besoin de passer par la taille, par l’acide, par l’impression, par l’encre ? Alors qu’avec un crayon ! Mais... Je crois qu’on aboutit à quelque chose qui peut être reproduit mais le but n’est pas là, pas dans la reproduction Une fois qu’on en aura fait 2, 3... ces 2, 3 là qu’on aura faits, on les aura faits uniquement pour aboutir au plus juste et au plus loin du travail D’ailleurs tu attaches plus d’importance à la réalisation d’états successifs même nombreux qu’au multiple pour lui-même... Oui, et nombre d’artistes qui font de l’estampe font fi de leurs gravures. 11. Sisyphe, alors là ! Tu as parlé du moment du tirage comme du moment de la révélation. Oui, la transe L’anxiété aussi ? ?... je ne sais pas si c’est de l’anxiété parce que l’anxiété, ça veut dire qu’on veut aboutir LÀ... alors que quand je tire, je suis curieux de savoir ce que ça va être c’est plutôt de la curiosité cette excitation de découvrir autre chose la surprise alors ça te dépasse Des fois on refuse et puis 2, 3 jours après... par exemple dans les états de cette montagne, là, je poursuivais, et puis tout d’un coup j’arrivais à la 9e et puis je disais, tu aurais pu en tirer 2, 3 de plus de la précédente, parce que c’était vraiment mieux que ce que tu fais actuellement et puis maintenant avec les mois de recul, je ne sais pas si je réagis de la même façon il y a donc une espèce de croyance à un moment on croit qu’on y est arrivé et puis on n’y croit plus je ne sais pas si ça a voir avec la religion il y a une espèce de croyance qui se dissipe et qui revient finalement on n’arrive pas à posséder donc on en refait d’autres Est-ce donc une expérience de la finitude de l’homme, de l’inatteignable ? A l’époque, quand je faisais Sisyphe, alors là !... c’est de la pâte à papier quelque chose qui se déforme il y a ce que tu mets et puis dans le temps il y a ce qui se déforme quand tu peins il y a une grosse différence entre le frais et le sec ou bien il y a quelque chose qui a filé tous ces accidents en fin de compte ce sont des accidents on joue avec ça ça travaille tout seul

Il faut beaucoup d’humilité. C’est de l’humilité, ou bien le petit malin ? De l’innocence ? Oui, il faut arriver à ce stade d’innocence à un moment donné on est absorbé dans ce qu’on fait et on le fait en toute liberté, ça se fait c’est après qu’on le regarde, et que ça résiste ou pas Et si ça résiste trop on abandonne ? OUI Dans l’atelier j’ai beaucoup de toiles, de plaques Je passe de l’une à l’autre sans états d’âme et je prélève dans tout ça ce qui m’intéresse sur le moment Le prélèvement ça peut être 2, 3 ou la moitié d’une, ou 5, 6 tout d’un coup telle bribe de chose qui va se conserver Dans ce prélèvement et cette sélection pour s’immiscer dans la Douëra par exemple, il y a aussi une sorte de hasard bien venu qui intervient ? Il y a une justesse qui se révèle par rapport au lieu, au format Les formats qui s’ajustent malgré les contraintes, ou avec elles Tu dois faire quelque chose qui n’est pas forcé, qui n’est pas convenu Tu dois continuer ton travail par l’accrochage. L’accrochage est une continuation du travail. On doit être capable de faire avec ce qu’on nous donne, dans n’importe quelle situation Je pars de ce principe là : dans n’importe quelle situation tu montres quelque chose qui doit être juste Ne pas s’efforcer 12. Ne pas s’efforcer