DUPONT C., 2013 - Teinture et exploitation du pourpre Nucella lapillus le long du littoral...

11
BAR International Series 2570 2013 Anciens peuplements littoraux et relations Homme/Milieu sur les côtes de l’Europe atlantique Ancient Maritime Communities and the Relationship between People and Environment along the European Atlantic Coasts Sous la direction de / Edited by Marie-Yvane Daire, Catherine Dupont, Anna Baudry, Cyrille Billard, Jean-Marc Large, Laurent Lespez, Eric Normand and Chris Scarre Avec la collaboration de / With the collaboration of Francis Bertin, Chloé Martin et Kate Sharpe

Transcript of DUPONT C., 2013 - Teinture et exploitation du pourpre Nucella lapillus le long du littoral...

BAR International Series 25702013

Anciens peuplements littoraux et relations Homme/Milieu sur les côtes

de l’Europe atlantique

Ancient Maritime Communities and the Relationship between People and

Environment along the European Atlantic Coasts

Sous la direction de / Edited by

Marie-Yvane Daire, Catherine Dupont, Anna Baudry, Cyrille Billard, Jean-Marc Large, Laurent Lespez, Eric Normand and Chris Scarre

Avec la collaboration de / With the collaboration of

Francis Bertin, Chloé Martin et Kate Sharpe

Published by

ArchaeopressPublishers of British Archaeological ReportsGordon House276 Banbury RoadOxford OX2 [email protected]

BAR S2570

Anciens peuplements littoraux et relations Homme/Milieu sur les côtes de l’Europe Atlantique / Ancient Maritime Communities and the Relationship between People and Environment along the European Atlantic Coasts

© Archaeopress and the individual authors 2013

ISBN 978 1 4073 1191 3

pour citer ce volume / how to cite:

Daire M.Y., Dupont C., Baudry A., Billard C., Large J.M., Lespez L., Normand E., Scarre C. (dir.), 2013. Ancient Maritime Communities and the Relationship between People and Environment along the European Atlantic Coasts / Anciens peuplements littoraux et relations Home/Milieu sur les côtes de l’Europe atlantique. Proceedings of the HOMER 2011 Conference, Vannes (France), 28/09-1/10/2011. British Archaeological Reports, International Series 2570, Oxford: Archaeopress.

Printed in England by Information Press, Oxford

All BAR titles are available from:

Hadrian Books Ltd122 Banbury RoadOxfordOX2 7BPEnglandwww.hadrianbooks.co.uk

The current BAR catalogue with details of all titles in print, prices and means of payment is available free from Hadrian Books or may be downloaded from www.archaeopress.com

459

INTRODUCTION

Bien que les propriétés tinctoriales de deux coquillages, le pourpre Nucella lapillus et le murex Ocenebra erinaceus, soient connues aussi bien par les biologistes (Fretter et Graham 1984) que les historiens (Cardon 2007), leur réalité archéologique est restée en France pendant longtemps silencieuse. L’intégration récente de la malacologie sur les chantiers archéologiques est venue changer la donne en révélant une occurrence régulière de ces deux coquillages. Ces nouvelles découvertes viennent compléter plusieurs études régionales ou locales publiées ou issue de la littérature grise (Figure 1). La disparité de

de cette utilisation particulière des coquillages. Ainsi, nous proposons une synthèse de toutes les données archéologiques avec, pour certains sites, une analyse plus détaillée des coquilles.La présence de pourpres et de murex sur un site

activité tinctoriale. Dans une première partie, les éléments permettant d’associer les coquilles à l’activité de teinture seront rappelés. La synthèse proposée permettra également de savoir qu’elle est l’extension chronologique connue de cette activité. Ensuite, les différentes phases de l’utilisation des coquillages seront décrites de sa collecte à son abandon.Cette publication correspond à une actualisation d’une première synthèse (Dupont 2011). Deux nouveaux sites (Tariec Vraz et Le Clos du Moulin) et deux nouvelles analyses malacofauniques (Le Grand Essart et la Pouplinière) viennent compléter le corpus. Loin d’être

seront présentés tout au long de cet article.

CRITÈRES PERMETTANT D’ASSOCIER DES COQUILLES À DES FINS TINCTORIALES

La connaissance des accumulations de pourpres cassés est inégale. Certaines ne sont connues que par le biais de prospections de surface tandis que d’autres sont issues de fouilles avec prélèvements sédimentaires (Figure 1). Bien que fragmentaire, l’aire de distribution est vaste et ne semble pas témoigner d’un épiphénomène (Figure 2). Ce

a aussi été utilisé sur les côtes irlandaises et anglaises (Dupont 2011).

En France, plusieurs critères permettent d’associer des amas coquilliers observés le long du littoral atlantique

et de la Manche à des déchets propres à une activité de teinture. Tous ces critères n’ont malheureusement pas

sédimentaires.Le caractère commun à tous ces sites est la cassure

est différente d’une altération qui se produit le long des zones les plus fragiles de la coquille, c’est-à-dire, la jonction entre les tours de spire.La composition de l’accumulation est un autre critère à considérer. Les pourpres (Nucella lapillus) sont associés de façon récurrente au murex (Ocenebra erinaceus), une espèce également connue pour ces propriétés tinctoriales (Dupont 2011). Ces deux gastéropodes vivent sur les côtes rocheuses de la Manche et de l’Atlantique. Le murex s’avère toujours largement moins représenté que le pourpre dans les accumulations étudiées. Si certains auteurs témoignent de l’utilisation de ces deux espèces en

nuances (Henry 1952 ; Labrousse 1959), l’accessibilité de la ressource sur la côte peut aussi expliquer les plus faibles proportions de murex observées. Si le pourpre est accessible dès le niveau moyen de l’estran, le murex ne l’est que dans les plus bas niveaux de la zone intertidale (Daguzan 1967 ; Fretter et Graham 1984 ; Hayward et al., 1996). L’analyse dès la fouille est indispensable pour bien mettre en évidence les concentrations de ces deux espèces. En effet, les structures dans lesquelles elles sont trouvées, comme des fosses ou des fossés, peuvent correspondre à des accumulations successives de différentes activités. Ainsi, les pourpres et murex peuvent se trouver mêlés à

gastéropodes.Le fait que le murex accompagne régulièrement le pourpre conforte l’hypothèse de leur destination tinctoriale. À l’inverse du pourpre (Dupont 2006 exemple de Beg-er-Vil), l’utilisation d’Ocenebra erinaceus comme aliment n’est en effet pas attestée.Il existe d’autres utilisations du pourpre décelées en archéologie mais l’addition des critères précédemment cités permet d’écarter une consommation alimentaire, ou la confection de parure (Dupont 2011).

EXTENSION CHRONOLOGIQUE DE L’ACTIVITÉ

françaises ne sont pas calés chronologiquement (Figure 1). La Pointe du Béron et Prat ont été attribués à la Protohistoire sans plus de précision (Cocaign 1997 ; Fischer 1925 ; Le

TEINTURE ET EXPLOITATION DU POURPRE NUCELLA LAPILLUS LE LONG DU LITTORAL ATLANTIQUE FRANÇAIS

Catherine DUPONTCNRS, UMR 6566 CReAAH (Centre de Recherche en Archéologie, Archéosciences, Histoire) Campus Beaulieu, Bat.

24-25, Université de Rennes 1, CS74205, 35042 Rennes, France, email : [email protected]

460

HOMER : ANCIENS PEUPLEMENTS LITTORAUX / ANCIENT MARITIME COMMUNITIES

Figure 1. Données géographiques, chronologiques et références bibliographiques utilisées des sites archéologiques présentant des pourpres utilisés dans l’activité tinctoriale.

461

RESSOURCES - RESOURCES, DUPONT ; TEINTURE ET EXPLOITATION DU POURPRE NUCELLA LAPILLUS...

attribué au Bronze ancien à Tariec Vraz semble être le témoignage le plus ancien connu de cette activité (Pailler et Sparfel 2008). Cette attribution demande cependant à

ampleur car seules six tests de pourpres cassés y ont été étudiés. À Champ du Bois, les céramiques décrivent une occupation du site de l’Âge du Fer au Moyen Âge sans autre précision concernant les accumulations de pourpres (Guillement 1978). Les pourpres de l’Île aux Moutons ont été découverts dans les niveaux supérieurs de l’accumulation coquillière ce qui placerait leur formation à

Port-Blanc sont également placés dans les accumulations les plus récentes du site archéologique ce qui les dateraient

Romaine (données inédites M. Y. Daire). Les sites de Staol et de la ZA du Pladreau suggèrent une activité qui s’étend

et al., 1995 ; Hervé-Monteil 2010). Ce dernier site est en relation

avec une villa gallo-romaine comme celles de Sables-d’Or et de Granville (Bizien-Jaglin 2006 ; Cocaign 1992). Les sites de la Pouplinière et de Bel Air peuvent être ajoutés à cette période (Tessier 2001 ; Prospections Y. Gruet et Y. Bodeur). La fouille de la Pouplinière a permis de préciser le moment l’extraction de colorants pourpres du 1er au début du 2ème siècle ap. J.-C. (D. Doyen inédit). Sur le site Le Grand Essart, un indice ponctuel d’extraction de colorant a été observe au 1er siècle ap. J.-C. (Séris 2009). Les éléments les plus probants et nombreux correspondent quant à eux à l’occupation située entre les 5ème et 8ème siècles. Les attestations d’extraction de colorant sur ce site à l’époque médiévale sont incertaines car elles

de l’Antiquité au Moyen Âge. Plusieurs des sites observés par M. Tessier semblent associés à des niveaux médiévaux (Tessier 2001 ; Figure 1). Cela semblerait également être le cas sur le site Le Clos du Moulin fouillé en 2011 et de

Régional d’Archéologie (SRA) des Pays-de-la-Loire. Les dépôts de la ZAC des « Terres aux Moines » (Zone d’Aménagement Concerté), du Yaudet de l’Île de Brunec ont été attribués au haut Moyen Âge (Campbell 2007 ;

plus précise pour le Yaudet dont l’attribution chronologique a été précisée par le radiocarbone (Campbell 2007). À La Plaine, la principale accumulation découverte est associée à de la céramique datée entre les 11ème et 12ème siècles

d’extraction de colorant à partir des coquillages de pourpres est Les Plantes attribuée aux 13 et 14ème siècles (É. Normand, inédit).Ainsi l’utilisation des gastéropodes pourpres et murex

géographique, mais aussi sur un laps de temps prolongé

ancien jusqu’aux 13 et 14ème siècles.

Les différentes étapes de l’activité

Plusieurs synthèses des archives historiques existent et ont pour but de décrire l’extraction de colorant à partir des coquillages de la collecte à l’utilisation des pigments colorés (Biggam 2006 ; Cardon 2007 ; Macheboeuf 2005). Que nous disent les témoins archéologiques à ce sujet en Manche et le long du littoral atlantique français ?

Collecte et stockage des coquillages

Pourpres et murex peuvent être facilement collectés à la main sur les estrans rocheux. L’utilisation de nasses avec appâts peut aussi être utilisée.Une fois collectés, ces coquillages ont été soit traités

colorant massivement. Des structures auraient pu exister sur estran pour conserver les coquillages vivants sur estran (Macheboeuf 2005). Elles peuvent prendre la forme de bassins creusés dans la roche (Cocaign 1992) et pourraient être présentes sur la Plage du Lomer (communication personnelle, L. Pirault). Nucella lapillus est un gastéropode prédateur (Crothers 1985). Comme Spanier (1986)

Figure 2. Localisation des sites archéologiques français associés

Sables-d’Or, 3- Granville, 4- Le Yaudet, 5- Pointe du Béron, 6- Prat, 7- Staol, 8- Tariec Vraz, 9- Sondages 1 et 2, île aux Moutons, 10- Île de Brunec, 11- Tréutan, 12- Port-Blanc, 13- Plage du Lomer, 14- Pen-Bé, 15- ZA du Pladreau, 16- Le Clos du Moulin, 17- La Cossonière-des-Rives, 18- La Pouplinière, 19- La Lucette, 20- Moulin Tillac, 21- Comtée, 22- La Cornillais, 23- ZAC des « Terres aux Moines », 24- Les Missotières, 25- Le Grand Essart, 26- La Payré 2, 27- Champ du Bois, 28- Bel Air, 29- les Plantes.

462

HOMER : ANCIENS PEUPLEMENTS LITTORAUX / ANCIENT MARITIME COMMUNITIES

l’a mentionné pour Trunculariopsis trunculus, une concentration prolongée d’individus de cette espèce a pu conduire à un cannibalisme observable par la présence de perforations typiques de ce muricidé. Les pourpres Nucella lapillus et murex Ocenebra erinaceus réalisent de telles perforations pour tuer leurs proies avant de les consommer. Ces perforations sont rares ou absentes sur les sites archéologiques français. Pour la première fois en France des

décomptées à la Pouplinière. Seulement 28 pourpres (0,16%) et un murex (0,3%) en sont atteints. Ces pourcentages sont faibles. Ils sont inférieurs à ceux observés sur les moules et les huîtres du site et ne témoignent donc pas d’un stockage prolongé des pourpres et murex.Les coquilles archéologiques donnent également accès à une autre étape de l’exploitation des pourpres et murex : celle de la gestion du stock naturel disponible. Les mesures effectuées sur les coquilles nous permettent de travailler sur cette thématique. Les coquilles étant quasi-systématiquement cassées, cette étape de l’analyse archéomalacologique nécessite la reconstitution de la longueur totale des coquilles (Dupont 2011). Seules les données biométriques issues de fouilles récentes sont accessibles. À la différence des coquillages collectés pour être consommés les pourpres inférieurs à 20mm n’ont pas été systématiquement exclus. Ainsi, à la ZA Pladreau (Zone Artisanale) 56% des individus sont inférieurs à 20mm (N = 287 individus, longueur moyenne = 20mm, min = 13, max = 29mm). À La Pouplinière, ils représentent 35% (N = 937 individus, longueur moyenne = 22mm, min = 11mm, max = 41mm) et 43% sur Le Grand Essart (N = 1206 individus, longueur moyenne = 20mm, min = 10mm, max = 31mm). Le murex a été minoritairement exploité sur ces sites. Il est très rare à la ZA Pladreau avec seulement cinq individus recensés pour plus de 2400 pourpres. À La Pouplinière ils représentent 2% (NMI = 382 ; Nombre Minimum d’Individu) des coquillages tinctoriaux et sont tous supérieurs à 20mm. Leur rareté et la sélection de grands individus peuvent être liés à une plus faible exploitation et donc à un impact moins important de l’action anthropique sur la longueur des tests. Leur accès limité par rapport aux pourpres peut expliquer cette différence. Au Grand Essart le murex représente 3% (NMI = 38) des espèces tinctoriales et 16% des individus sont inférieurs à 20mm. Le point commun à ces trois sites est donc une forte proportion de pourpres inférieurs à 20mm vis-à-vis des gastéropodes à destination alimentaire. Il n’existe pas sur ces sites de volonté de gestion du stock naturel de pourpres. Tous ceux qui étaient visibles sur les rochers ont été ramassés. La plus faible proportion de murex est sans doute liée à un accès plus limité de cette espèce. À la ZA Pladreau et à La Pouplinière, les murex sont tous de longueur supérieure à 20mm, seuls les grands individus ont été sélectionnés pour la teinture tandis qu’au Grand Essart, le murex a subi un traitement similaire à celui des pourpres. Quelques pourpres sont découverts intacts à la fouille. Avant l’analyse de La Pouplinière, le point commun à ces pourpres était leur petite dimension (Dupont 2011). Cette caractéristique était liée au mode de cassure des coquilles qui étaient brisés une à une au niveau de leur dernier tour de spire. À La Pouplinière, les coquilles ont été écrasées et petite et grande coquille ont indifféremment échappées à la « chaîne opératoire ».

Les outils archéologiques associés

Les coquilles archéologiques sont découvertes dans des zones de rejet. Elles semblent, bien souvent, trouvées en dehors de l’aire d’activité d’extraction de colorants. Leur association avec des objets archéologiques qui auraient pu servir d’outils dans l’activité de teinture est quasi-inexistante. D’autre part, certains des sites à pourpres présentent une occupation chronologique vaste et l’activité de teinture a pu être stoppée bien avant l’abandon du site.La description des cassures découvertes sur les coquilles peut nous aider à aborder la problématique des outils ayant servi à l’activité tinctoriale. Pour cela une typologie de fragments coquilliers a été mise en place (Dupont 2011) basée sur les travaux d’Y. Gruet (1993). Sur la plupart des sites dont les fragments coquilliers ont été observés, les coquilles sont brisées au niveau de leur dernier tour de spire (Tariec Vraz, Île aux Moutons, Port-Blanc, ZA du Pladreau, Le Grand Essart, Île de Brunec, Yaudet, La Plaine). La Pouplinière se démarque totalement de ce schéma général : sur ce site, les coquillages ont été écrasés massivement.Les quelques indices d’outils dont nous disposons restent très sporadiques. Ainsi, sur le site de la plage du Lomer les prospecteurs ont observé « plusieurs dalles de schiste de 20 à 40cm de large ayant pu éventuellement servir d’enclumes. Sur l’une d’entre elles, reposait un galet oblong de grès « rouille » (12 5 3,5cm), comportant d’évidentes traces d’abrasion » (Jacquet 2003). Ces dalles étaient présentes directement dans le dépôt de pourpres.

(1996) rappellent la découverte d’une « enclume primitive par les fouilleurs de 1926 » qui « pourrait bien avoir servi à casser les coquillages ». Plusieurs meules ont été découvertes à La Pouplinière ainsi qu’une pince à épiler trouvée dans une accumulation de pourpres (D. Doyen

des fouilles archéologiques prises en compte, de savoir si ces outils sont réellement associés à l’activité d’extraction de colorant.

Extraction du colorant

Une fois cassées, la glande tinctoriale est extraite des coquilles. Différents procédés permettent de préparer et de conserver le colorant (Cardon 2007 ; Macheboeuf 2005). Notre objectif n’est pas d’en faire une présentation exhaustive. Cependant, la diversité des procédés aboutissant au colorant pourpre et l’étalement dans la chronologie de cette activité méritent d’être soulignée. Elle peut brouiller les pistes des archéologues par le fait que cette activité a pu être s’organiser de différentes façons dans les populations humaines (activité sporadique et ponctuelle ou intensive et répétée voire artisanale). Ainsi, certains auteurs évoquent la possible utilisation de structures de combustion (Cocaign 1994 ; Henry 1952). Mais, cette chauffe ne semble pas nécessaire à cette activité (Cardon 2007). Les foyers attenants aux dépôts ne sont donc pas systématiques. De même de la protohistoire au Moyen Âge les outils ont pu varier allant du galet allongé à un outil métallique. L’utilisation du colorant ne s’est pas obligatoirement faite sur place. Les expérimentations de C. Macheboeuf en sont un très bon exemple (Macheboeuf

463

RESSOURCES - RESOURCES, DUPONT ; TEINTURE ET EXPLOITATION DU POURPRE NUCELLA LAPILLUS...

2005). Ainsi, on pourrait trouver sur des sites exportateurs de colorant des céramiques destinées au stockage du colorant. Le sel permettait semble-t-il de conserver les vertus des glandes tinctoriales pendant plusieurs mois (Macheboeuf 2005). Son utilisation a été proposée sur le site à pourpres irlandais de Inishkea (Henry 1952). La présence de quelques débris d’augets à sel gaulois sur le site de La Pouplinière aurait pu en être un témoignage (Tessier 2001). Cependant, les récentes fouilles tendent à montrer que ces fours ne sont pas contemporains de l’extraction du pourpre (Doyen inédit). Un site à sel a également été recensé au Champ du Bois et a été attribué lors de prospections à la Protohistoire. De même, à plusieurs centaines de mètres de la plage du Lomer des fours à sel sont connus et une des motivations de la fouille de Port-Blanc était la présence de fours à sel (informations M. Y. Daire). Ces données restent des pistes de recherche et ne présentent pas des preuves d’utilisation de sel dans la confection de colorant pourpre.

L’utilisation du colorant

Plusieurs fonctions du colorant sont connues. La teinte de

a pu amener à la sélection d’animaux producteurs de laine. Les études archéozoologiques menées sur les moutons sont donc à prendre en considération sur ce type de site. L’élaboration de textile sur les sites à dépôts de pourpre pourrait être un indice intéressant. Ainsi, sur le site des Terres aux Moines des fusaïoles, polissoir à aiguilles, peson ont été découverts (Hasselin et Joncheray 1990). Dans un rayon de 400m du dépôt coquillier de Grandville un peson de tisserand a aussi été décrit (Cocaign 1992). À nouveau ces artefacts restent trop tenus pour montrer leur corrélation directe avec l’extraction de colorant. L’analyse

prouver l’utilisation de mollusque pour la coloration. C’est ce qui a, par exemple été montré sur une empreinte de tissu sur coquille Saint-Jacques dans la sépulture d’un enfant daté de l’époque gallo-romaine (Naintré, Vienne, étude inédite Dupont et Gruet). Les tissus ont pu être teintés avant ou après leur façonnage. Ils peuvent être teintés dans des bains ou par simple frottement de la glande sur le textile (Cardon 2007). Ce type d’utilisation ne permet pas d’exclure la fabrication de la laine sur un autre site.La pourpre a aussi pu servir de peinture corporelle. L’œil de l’anthropologue sera alors crucial pour détecter des restes de pigments dans les sépultures. Une telle hypothèse est l’une des utilisations proposées sur le site de Prat à cause du nombre assez restreint de pourpres observés (Cocaign 1997).J. Y. Cocaign évoque aussi pour la villa de Granville une utilisation potentielle de la pourpre pour en colorer les murs (1997). D’après ce même auteur, certaines colorations rouges ont été décrites sur d’autres murs de villas gallo-romaines. Il pourrait être intéressant d’analyser les éléments chimiques de ces pigments rouges pour savoir si c’est effectivement à l’aide de coquillage que ces décors ont été réalisés.

d’enluminures (Biggam 2006). Il faudrait donc regarder de plus près les habitats religieux qui sont susceptibles

sites localisés à Charron : « les Plantes ». Pour Henry ce sont les sites archéologiques qui présentent une faible exploitation du pourpre qui pourraient témoigner de cette utilisation, la teinture de la laine nécessitant d’abondantes quantités de colorant (1952). C’est d’ailleurs ce même critère qui a amené à proposer G. Campbell a proposé la participation du colorant à la confection d’enluminures au Yaudet (2007).

Le rejet des déchets liés à cette activité

La différence de composition des dépôts coquilliers associés à des pourpres est frappante et n’est pas passée inaperçue (Cocaign 1997 ; Tessier 2001). Les descriptions manquent encore souvent de données chiffrées.Les quantités de pourpres trouvées ainsi que leurs proportions par rapport aux coquillages consommés sont résumées (Figure 3). Elles présentent une limite de taille : la prise en compte de l’hétérogénéité des dépôts. En effet, les dépotoirs comme ceux de la ZA du Pladreau ou Le Grand Essart sont des fosses et des fossés composés d’une succession d’accumulations de déchets alimentaires et de teinture. Rappelons que la réaction chimique qui révèle le colorant a besoin d’une forte luminosité. Ce facteur d’ensoleillement a pu rendre cette activité saisonnière. Sur un site où l’occupation est prolongée, l’aspect saisonnier de l’activité peut diluer l’impression de concentrations des déchets. Sur Le Grand Essart, les pourpres se concentrent soit dans des lentilles associées à des rejets alimentaires, soit dans des fosses et fossés dont ils constituent le principal composant. Si certaines zones montrent des concentrations de pourpres plus récurrentes, ces déchets se trouvent de façon répétés sur les 2000m² de la surface fouillée. À La Pouplinière l’activité apparaît plus concentrée sur près de 750m² (D. Doyen inédit) avec des pourcentages de pourpres dépassant les 95% sur toute l’extension de la fouille. Si l’occupation est plus ponctuelle l’impression de spécialisation peut être renforcée. C’est peut-être ce qui est observée à la surface des sites de l’île aux Moutons et de Port-Blanc où les pourpres semblent localisés sur les dépôts alimentaires (informations G. Hamon et M. Y. Daire). Ainsi, selon que l’on prenne la composition de ces structures dans leur globalité ou par évènements successifs la teinture pourra être interprétée comme une activité plus ou moins spécialisée.

Les dépôts de pourpres associés à des rejets alimentaires sont de 21 parmi les 29 sites pris en compte dans cette

de pourpres a été notée (Staol, île aux Moutons, Port-Blanc, ZA du Pladreau, Le Grand Essart, La Pouplinière et Le Clos du Moulin). Notons que cette caractéristique n’a pas toujours été précisée dans les publications et que, à notre connaissance, neuf de ces sites ne sont connus que par prospections. De même, l’opération limitée en surface de Tariec Vraz n’a pas permis de mettre en évidence de

découvert que de façon sporadique sur Le Yaudet (Campbell 2007). Seules deux structures ont livré des pourpres à La Plaine en plus de dix exemplaires (Figure 3). À la Pointe du Béron les pourpres semblent minoritaires par rapport à un lot important de patelles (Fischer 1925). Sur le site Les Plantes, les pourpres auraient aussi été trouvés de façon

464

HOMER : ANCIENS PEUPLEMENTS LITTORAUX / ANCIENT MARITIME COMMUNITIES

localisée. Pour d’autres sites la présence des pourpres semble plus récurrente. C’est le cas du site de la ZA Pladreau qui présente neuf structures à pourpres parmi les

32 étudiées sur ce site. Les pourpres représentent un à 66% du nombre minimum d’individus de coquillages. Sur Le Grand Essart dix des 18 principales structures possèdent

Figure 3. Proportions des pourpres Nucella lapillus et les murex Ocenebra erinaceus par rapport aux espèces majoritaires découvertes (NMI : Nombre Minimum d’Individus).

465

RESSOURCES - RESOURCES, DUPONT ; TEINTURE ET EXPLOITATION DU POURPRE NUCELLA LAPILLUS...

du pourpre entre deux et 99% des NMI observés. Cette récurrence du pourpre dans les structures à coquilles a aussi été observée sur le site du Clos du Moulin. À l’île aux Moutons et Port-Blanc, les pourpres sont concentrés sur la surface des dépôts coquilliers. Ces niveaux n’ayant pas été isolés à la fouille sur l’île aux Moutons, les proportions présentées dans la Figure 3 correspondent à l’ensemble du dépotoir et donc au cumul de plusieurs activités. L’analyse malacofaunique en cours de Port-Blanc permettra sans doute d’isoler les pourpres du dépôt alimentaire sous-jacents. Pour ces deux sites, peut-être contemporains, on peut se demander si l’excursion de populations humaines

partie liée à l’exploitation de colorant. Pour les autres sites fouillés où coquilles de pourpres se mêlent aux dépôts alimentaires (ZAC des « Terres aux Moines » et Champ du Bois), les données accessibles ne sont pas assez précises pour savoir si la présence des pourpres est récurrente sur différentes structures.

Les dépotoirs connus par la présence quasi-exclusive de pourpres sont, quant à eux, au nombre de huit. Ce chiffre doit être magné avec prudence puisque seulement trois d’entre eux ont été fouillés ou fait l’objet de prélèvement malacofauniques (Granville, Île de Brunec et La Pouplinière). Les dimensions de ces dépôts sont loin d’être toutes connues. Le site de Granville, qui avait déjà été érodé lors de son étude, mesurait alors 4,1m de long pour une épaisseur de 20cm (Cocaign 1992). Son observation avait été faite, comme pour le site du Lomer, en front de falaise. Ce dernier mesurait 4,5m de long pour 50cm d’épaisseur lors de son observation par H. Jacquet (2003). Ce dépôt est d’ailleurs en constante érosion. L’extension du dépôt de La Payré 2 était de 15m² si l’on

été retrouvé lors de nos prospections de 2007 et a peut-être été victime de l’érosion marine. À La Pouplinière, 19 des 20 structures étudiées témoignent de la présence du pourpre. Son pourcentage évolue entre 44 et 99% du NMI. Ces forts pourcentages font à nouveau de La Pouplinière un cas à part : 15 des 20 structures observées présentent des pourcentages de pourpres supérieurs à 90% du NMI total des coquillages. Ces résultats sont différents de ceux obtenus par M. Tessier en 2001. Ils peuvent s’expliquer soit par la prise en compte de zones différentes du site, soit par les biais apportés par les différentes techniques de prélèvements. Les observations faites sur ces sites ne permettent pas de savoir s’ils sont complémentaires d’un habitat. Cette absence n’est peut-être qu’apparente. Elle explique en partie pourquoi les archéologues ne se sont pas attardés sur ce type de sites.

CONCLUSIONS

Cette synthèse montre que l’activité d’extraction de colorant à partir du pourpre le long du littoral atlantique et de la Manche est loin d’être un épiphénomène sur les côtes françaises. Cette exploitation s’étend sur toute la zone de distribution naturelle du pourpre et s’étale sur

du Bronze ancien jusqu’au 14ème siècle ap. J.-C. Parmi les 29 sites recensés, 12 ont été décrits seulement dans

les dix dernières années et huit l’ont été lors de fouilles archéologiques.Les critères à retenir pour faire d’un site à pourpres un lieu d’extraction de colorant sont les cassures systématiques des coquilles de Nucella lapillus, les cassures différentes des altérations taphonomiques, les concentrations de coquilles de cette espèce, la représentation des individus de pourpres inférieurs à 20mm et la présence de murex Ocenebra erinaceus brisés.La composition des dépotoirs à pourpres est loin d’être homogène et le pourcentage de représentativité du pourpre varie vis-à-vis des espèces consommées. Cependant, nous avons vu que la composition globale d’un remplissage d’une fosse ou d’un fossé ne veut rien dire de la spécialisation de l’activité car ces structures correspondent à une succession d’activités spécialisée et domestiques. La sous représentation du murex par rapport à celle du pourpre semble lié à un accès potentiel de cette ressource moins prolongé.Les nouveaux résultats apportés par l’analyse des

opératoire » que nous avions précédemment établie (Dupont 2011). En effet, la cassure du dernier tour de spire au niveau de la glande hypobranchiale n’est pas le seul geste utilisé. Comme nous l’avions déjà démontré cette fracture nécessita un traitement des coquilles une à une. À La Pouplinière l’extraction du colorant est l’activité qui domine les faits archéologiques. Les coquilles y ont été écrasées en masse. Les questions que suscite cette nouvelle opération de fouille renforcent l’importance de la nécessité d’acquérir de nouvelles données archéologiques pour mieux saisir la diversité de cette activité.

REMERCIEMENTS

Je suis reconnaissante envers tous les responsables de fouilles et découvreurs qui m’ont permis de prendre en compte leurs informations inédites: Y. Bodeur, X. Dubillot, V. Carpentier, M. Y. Daire, D. Doyen, Y. Gruet, G. Hamon, M. L. Hervé, Q. Lemouland, E. Normand, Y. M. Paulet, Y. Pailler et D. Séris.

BIBLIOGRAPHIE

Biggam, C. P. 2006. Knowledge of whelk dyes and pigments in Anglo-Saxon England. Anglo-Saxon England 35, 23-55.

Bizien-Jaglin, C. 2006. La prospection archéologique 2005 dans le nord de la Haute-Bretagne. Les Dossiers du Centre Régional Archéologique d’Alet 34, 29-48.

Campbell, G. 2007. Marine Molluscs. In B. Cunliffe et P. Galliou (dir.), Les fouilles du Yaudet en Ploulec’h, Côtes-d’Armor, volume 3 : Le site : du quatrième siècle apr. J.-C. à aujourd’hui, 89-90. Oxford, Oxford University School of Archaeology, Monograph 65.

Campbell, G. 2008. Marine Molluscs: Appendix G., http://www.arch.ox.ac.uk/appendices-LYP1.html

466

HOMER : ANCIENS PEUPLEMENTS LITTORAUX / ANCIENT MARITIME COMMUNITIES

Cardon, D. 2007. Natural Dyes: Sources, Tradition, Technology and Science. London, Archetype.

Carpentier, V. 2009. La consommation des produits de la mer. Quelques données archéologiques récentes en Basse-Normandie. Archéopages 26, 6-15.

Cocaign, J. Y. 1992. Un dépôt original de coquilles dans l’estuaire de Gouessant. Les Dossiers du Centre Régional Archéologique d’Alet 20, 33-38.

Cocaign, J. Y. 1994. Diversité du peuplement littoral dans l’antiquité. L’exemple de la côte nord-est de la Bretagne. Les Dossiers du Centre Régional Archéologique d’Alet 22, 21-39.

Cocaign, J. Y. 1997. La pourpre (Nucella lapillus) et son utilisation comme teinture en Armorique. Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest 104 (4), 7-22.

Cocaign, J. Y., Le Goff, J. C. et Roué, D. 1995. Le site du Staol en Santec (Finistère). Bulletin de l’Association Manche Atlantique pour la Recherche Archéologique dans les Îles 8, 47-55.

Crothers, J. H. 1985. Dog-whelks: an introduction to the biology of Nucella lapillus (L.). Field Studies 6, 291-360.

Daguzan, J. 1967. Contribution à l’Écologie des Mollusques intertidaux de la pointe rocheuse de Penvins (Morbihan). Thèse inédite, Faculté des Sciences de l’Université de Rennes 1.

Daire, M. Y., Baudry, A. et Quesnel, L. 2006. Le site gaulois de Port Blanc à Hoedic (Morbihan) La campagne de fouille de 2005, premiers résultats. Bulletin de l’Association Manche Atlantique pour la Recherche Archéologiques dans les Îles 19, 69-86.

Dupont, C. 2006. La malacofaune de sites mésolithiques et néolithiques de la façade atlantique de la France : Contribution à l’économie et à l’identité culturelle des groupes concernés. Oxford, Archeopress, British Archaeological Reports, International Series 1571.

Dupont, C. 2011. The Dog Whelk Nucella lapillus and Dye Extraction Activities from the Iron Age to the Middle Ages along the Atlantic Coast of France. Journal of Island and Coastal Archaeology 6 (1), 3-23.

Fischer, P. H. 1925. Un amas préhistorique de coquilles près de Roscoff (Finistère). Revue Anthropologique Avril-Juin, 197-200.

Fretter, V. et Graham, A. 1984. The prosobranch molluscs of Britain and Danmark. 8 Neogastropoda. The Journal of Molluscan Studies Supplément 15, l-124.

Gruet, Y. 1993. Les coquillages marins : objets archéologiques à ne pas négliger. Quelques exemples d’exploitation et d’utilisation dans l’Ouest de la France. Revue Archéologique de l’Ouest 10, 157-161.

Guillement, J. 1978. Le site gallo-romain de Charron (Charente-Maritime). Revue de la Saintonge et de l’Aunis 4, 131-133.

Hamon, G. (dir.). 2005. L’île aux Moutons (Fouesnant, Finistère). Fouille programmée du 23 août au 10 septembre 2004. Rapport de fouille. Inédit.

Hasselin, M. et Joncheray, D. 1990. Pornic - ZAC des « Terres aux Moines ». Rapport d’évaluation archéologique. Document administrative communicable. Nantes, Service Régional d’Archéologie des Pays-de-la-Loire.

Hayward, P., Nelson-Smith, T. and Shields, C. 1996. Collins pocket guide. Sea shore of Britain and Northern Europe. London, Harper Collins.

Henry, F. 1952. A wooden hut on Inishkea North, Co. Mayo. (Site 3, House A). Journal of the Royal Society of Antiquaries of Ireland 82 (2), 163-178.

Hervé-Monteil M. L. (dir.) 2010. Piriac-sur-Mer (Loire-Atlantique), il y a 2000 ans : de la ferme gauloise à la villa gallo-romaine. Guérande, Société des amis de Guérande, Cahiers du pays de Guérande 51.

Jacquet, H. 2003. Gisement de coquilles de pourpres brisées Plage du Lomer (commune de Pénestin, Morbihan). Feuillets mensuels de la Société Nantaise de la Préhistoire 413, 51-53.

Labrousse, M. 1959. Recherches sur l’alimentation des populations gallo-romaines : escargots, huîtres et fruits de mer à Montmaurin. Pallas 8 (2), 57-84.

sur les îles Saint-Nicolas et Brunec, archipal des Glénan, commune de Fouesnant. Bulletin de la Société Archéologique du Finistère 125, 77-82.

Macheboeuf, C. 2005. Exploitation et commercialisation de la pourpre dans l’Empire romain. Thèse inédite, Université du littoral Côte d’Opale.

Pailler, Y. et Sparfel, Y. (dir.). 2008. Rapport de sondage d’urgence sur un site de l’Âge du bronze ancien, île de Tariec vraz en Landéda (Finistère). Inédit.

Séris, D. 2009. Jard-sur-Mer (85), Le Grand Essart Une villa gallo-romaine et une occupation de l’Antiquité tardive et du haut Moyen Âge, Rapport Final d’Opération, Fouille archéologique, Intervention du 08/01 au 30/06/2007, n° de site : 85 114 0018. Inédit.

Spanier, E. 1986. Cannibalism in Muricid Snails as a .

Journal of Archaeological Science 13 (5), 463-468.

Tessier, M. 2001. Les témoins anciens de la collecte de pourpres en Pays-de-Retz. Bulletin du Groupe Vendéen d’Études Préhistoriques 37, 51-56

467

RESSOURCES - RESOURCES, DUPONT ; TEINTURE ET EXPLOITATION DU POURPRE NUCELLA LAPILLUS...

TEINTURE ET EXPLOITATION DU POURPRE NUCELLA LAPILLUS LE LONG DU LITTORAL ATLANTIQUE FRANÇAIS

Catherine DUPONT

MOTS-CLÉS :Malacofaune, teinture, pourpre, atlantique, France, Manche, murex, Nucella lapillus, Ocenebra erinaceus

RÉSUMÉ :L’extraction de colorant à partir des coquillages marins est connue sur plusieurs continents. Bien que moins visible par la quantité des déchets et la pérennité de cette activité, l’extraction de colorants à partir des coquillages est aussi attestée le long de la Manche et du littoral atlantique européen. Dans cet article, nous proposons une synthèse des données archéologiques de cette activité sur les côtes françaises qui s’étendent de la Manche à l’Océan atlantique. Les critères permettant de détecter cette activité de teinture pendant les sondages et fouilles archéologiques seront

découvertes (prospection, diagnostic et fouilles) et de l’extension chronologique de l’activité de teinture. Pour les sites les mieux documentés, une analyse malacologique a été appliquée dans le but de mieux connaitre des différentes étapes d’exploitation des coquillages aux propriétés tinctoriales : de leur collecte sur estran à leur rejet. Nous verrons ainsi que derrière une apparente homogénéité des accumulations de ces coquilles se cache une certaine diversité.

DYE EXTRACTION AND EXPLOITATION OF THE DOG WHELK NUCELLA LAPILLUS ALONG THE COASTS OF FRANCE

Catherine DUPONT

KEY-WORDS: Malacofauna, dye, dog whelk, Atlantic, France, Channel, murex, Nucella lapillus, Ocenebra erinaceus.

ABSTRACT:The extraction of dyes from marine shells is known on several continents. Evidence for the extraction of dyes from shells is also found along the coasts of Europe, even though it is less visible here considering the quantity of wastes and the long-lasting nature of this activity. In this paper, we present a synthesis based on the archaeological indications of this

the criteria which make it possible to detect this dyeing activity from the shell remains discovered during surveys and archaeological excavations. to the sampling (surveys, archaeological inventories, excavations) and the chronological span of dyeing activities. For the best documented sites, we apply malacological analyses to obtain some more information on the various stages of exploitation of seashells with colouring qualities, from their collection on the seashore to the disposal of waste near the

the collected material.