Déchets nucléaires : classification, gestion et options futures
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Définition d'un déchet nucléaire
« Toute matière contenant des radionucléides en concentration supérieure aux valeurs que les autorités compétentes considèrent comme admissibles dans les matériaux propres à une utilisation sans contrôle, et pour laquelle aucun usage n’est prévu »
� Notion de nocivité : norme et contrôle� Connaissances de l’effet de la radioactivité� Contexte socio-économique (ALARA)
� Notion d’absence d’usage : définition contingentée� Situation énergétique (cas du Pu)� Coûts de recyclage
Les déchets nucléaires sont très spécifiques
� Dans la mesure où toute dose reçue est nocive, tout déchet nucléaire est potentiellement dangereux
� Le danger provient des rayonnements émis → Conditionnement difficile (pas d’équivalent à la neutralisation chimique)
� Ces rayonnements sont invisibles… … mais mesurables avec un grande précision → Suivi aisé (caractérisation, pas toujours)
� Ce danger décroît avec l’activité (exponentiellement) → Il existe une échelle de temps de disparition
La loi du 30.12.1991 (« loi Bataille »)
� Aucun pays n’a de politique de gestion à long terme des déchets nucléaires MA et HA
� Contrainte: incertitudes sur la politique énergétique� La pratique industrielle courante est l’entreposage
� En France, la loi Bataille du 30 Décembre 1991� Moratoire de 15 ans sur toute décision� 3 axes de recherche
� Séparation et transmutation → pilote CEA� Stockage géologique profond → pilote ANDRA� Conditionnement et entreposage → pilote CEA
� Suivi des recherches : Office Parlementaire d’Evaluation des Choix Scientifiques et Technologiques (OPECST)
� Expertise : Commission Nationale du Débat Public (CNDP)
Loi du 28.06.2006 « gestion durable des déchets »
� « Finaliser » les 3 axes de recherche� Séparation et transmutation ◊ pilote CEA
� Bilan en 2012 sur les filières de transmutation� Construction d’un prototype en 2020 – Mise en service en 2040
� Stockage géologique profond réversible ◊ pilote ANDRA� Solution de référence pour les déchets HA et MAVL� Demande de Construction en 2015 + Rendez vous Parlement� Mise en exploitation en 2025
� Conditionnement et entreposage ◊ pilote CEA� création ou modification d'installations d'ici 2015
� Plan National de Gestion des Matières et Déchets Radioactifs (2ème version en 2009)� Réduction de la quantité et de la nocivité des déchets� Entreposage comme étape préalable� Stockage comme solution pérenne, (déchets MA et HA-VL)
Loi du 28.06.2006
� Transparence et le contrôle démocratique� Indépendance de la Commission Nationale d’Evaluation� Interdiction de stocker en France des déchets étrangers � Comité Local d’Information et de Suivi renforcé� rendez-vous parlementaire en 2015 pour fixer les conditions de
réversibilité du stockage géologique … � … précédé par la consultation des collectivités et un débat public
� Gestion des combustibles usés et des déchets � Accompagnement local : Groupement d’Intérêt Public (€€€)� Financement d’aménagement du territoire� Financement des recherches� Mission d’intérêt général confiée à l’ANDRA� Collecte des déchets radioactifs des propriétaires non solvables� Assainissement des sites pollués « orphelins »
Origine des déchets
� Grande variété de producteurs, donc de déchets� Besoin de normer et de réguler
L'ANDRA
� Agence Nationale pour la gestion des Déchets RAdioactifs� Ancienne division du CEA� Devenu établissement public indépendant en 1991� Tutelles : industrie, recherche, environnement� Mission triple :
� Industriel : exploitation des centres de stockage� Recherche : développement de nouveaux centres, définition de
spécifications de conditionnement� Information du public
La classification actuelle
Période
Activité
Très courte durée de vie
T1/2 < 100 jours
Courte durée de vie
T1/2 ≤ 31 ansLongue durée de vie
T1/2 > 31 ans
Très Faible Activité (TFA)< 100 Bq/g
Gestion par décroissance radioactive sur le site de production
Puis
Éliminationdans les filières
conventionnelles.
Stockage de surface (< 200m)(Centre de stockage TFA de l’Aube)
Faible Activité (FA)< 5 mSv/h au contact
100 < … < 100 000 Bq/gStockage en surface
(< 200m) (Centre de Stockage
FMA de l’Aube)
(Déchets tritiés à l’étude)
(radifères et graphites)Stockage à faible
profondeurà l’étude
(loi du 28 Juin 2006)
Moyenne Activité (MA)5 mSv/h - 2mSv/h au contact
105 < … < 108 Bq/g
Stockage profond à l’étude
(loi du 28 Juin 2006)
Haute Activité (HA)2mSV/h au contact
~ 1010 Bq/g
Stockage géologique profond à l’étude (loi du 28 Juin 2008)
Les débuts du stockage des déchets...
� Campagnes françaises d’immersion en Atlantique: � 1967 et 1969� Entre 4000 et 5000 m de fond� 46 396 colis (FMA), soit 14 200 tonnes� Activité totale: 353 TBq (dont 8 en α)� L'AEN a fait bien plus dans les années 70...
TFA : nature et provenance
� Très Faibles Activités (<100 Bq/g)� Déchets industriels banals : plastiques,
ferrailles, gravats... � Déchets minéraux inertes : gravats...� Provenance :
� démantèlement des installations nucléaires
� quelques industries � assainissement/réhabilitation
� Pas de traitement sauf compactage
� Quantités produites en France : � 130 000 m3 déjà stockés � ~ 25 000 tonnes / an
TFA : le centre de stockage de Morvilliers
� Centre en service depuis 2004 pour les TFA� France seul pays à disposer d'une filière spécifique
Zone des bassins
Zone industrielle
Zone des terresTranche de
stockage à venir
Alvéoles en exploitation
Zone de stockage Alvéoles remplies aveccouverture définitive
Alvéoles remplies aveccouverture provisoire
capacité de stockage : 650000 m3 (~ 750 000 t), sur 28.5 hectares
durée d’exploitation : 30 ans
le site : 25m d’argile reposant sur des sables argileux
→ faible circulation d’eau
� Stockage dans des alvéoles� Recueil d’éventuelles eaux infiltrées : membrane entourant les déchets,couche d’argile sous et sur les flancs des alvéoles
FA et MA (faibles & moyennes activités)
� Composition :� Surtout émetteurs β et γ de courte période� Emetteurs α avec A ≤ 3 700 Bg/g après 300 ans
� Provenance :� installations nucléaires (gants, filtres, résines)� laboratoires, médecine, industrie, UNGG...
� Quantités produites en France en 2004� FA et MA: ~ 886 000 m3 (90% du total!) � FAVL: ∼ 47 000 m3
� Leur devenir :� FA et MA à vie courte: stockage en surface� FAVL: durée de vie incompatible avec une surveillance
institutionnelle � Solutions à l’étude. Actuellement, entreposés.
FA-VL : graphites
� Graphites : centrales UNGG (années 60-70)� ~ 22 900 t soit ~ 100 000 m3 � ~ 21 200 TBq en 2013, principalement: 14C, 63Ni (VL) et 3H,
137Cs, 60Co, 55Fe (VL)� 36Cl: principal radionucléide susceptible d’être relâché� Sa libération par les barres de graphite reste mal comprise
FA-VL : radifères
� Industrie des terres rares � Industrie du radium (années 20 à 40)
� ~ 30 000 à 60 000 t � Principalement: 226Ra (décroissance
de l’238U) et 222Rn� Peu solubles : moins d’exigences sur
les barrières � Limiter l’exhalaison du gaz 222Ra vers
la surface� ⇒ mesures et simulations de la
migration de gaz
FA et MA à vie longue : avenir incertain
� Non-régis par la loi Bataille� Stockage en cours de définition (demande d'autorisation)� Mise en service espérée en 2020...� … Mais retards déjà considérables
Solution de référence(couverture intacte)
Solutions alternatives(couverture remaniée)
Formations géologiques retenuespour l’appel à candidature
Le centre de stockage de la Manche
� stockage en pleine terre � eaux de pluies recueillies dans des fossés � contrôles dans un bassin de rétention� abandonné dès 1970 � plates-formes recouvertes d’un revêtement de bitume et équipées d’un drain d’écoulement des eaux
� 1969 – 1978: les premiers stockages
� 1991 - 1997: couverture finale du site
� bitume + terre + sable
� avant 1969 : 14 300 m3 immergé dans l’Atlantique
Le centre de stockage de la Manche : aujourd'hui
� 527 214 m3 de déchets FA et MA� Depuis 2003 : surveillance très active (10 ans)
� contrôle de la stabilité de la couverture� observation interne des canalisations� contrôle hydraulique des réseaux de drainage disposés dessus
et dessous la membrane bitumeuse� contrôle de la nappe phréatique autour des ouvrages de
stockage.
� Autorisations de rejets d’effluents radioactifs :� 0.125 GBq/an en α� 0.25 GBq/an en β� 125 GBq/an de tritium
Le centre de l'Aube
� Mis en service en 1992 (successeur de celui de la Manche) � Stockage en casemates de béton� Capacité d'un million de m3
Les Moyennes et Haute Activités à Vie Longue
� Principalement émetteurs α, longue période (> 30 ans)� Provenance
� les combustibles usés ne sont pas considérés en France comme des déchets !
� MA-VL: coques et embouts de combustibles irradiés� HA-VL: issus du retraitement des combustibles irradiés
� Quantités produites en France en 2004� MA-VL: ~ 45 000 m3
� HA: 1600 m3
� Conditionnement� vitrification (~ 4 kW / conteneur de 150 litres)
� Actuellement, pas de filière d’élimination� Entreposés dans les installations nucléaires
Vitrification des déchets de haute activité
Combustible usé: ~ 1000 t / an
Vitrification aprèscisaillage et retraitement
(usine de la Hague)
Conteneur dedéchet vitrifié
Stockage/entreposage
Comportement à long terme:simulations de l’altération
� 104 ans: 0.1%� 106 ans: 10%� 107 ans: 100%
Le stockage géologique profond
� Aucun site civil existant dans le monde !(mais tous les pays concernés y travaillent)
� Double fonction : � Protection des colis (ralentissement de leur dégradation)� Blocage de la migration des radionucléides
� Notion de triple barrière� Colis� Barrière ouvragée� Milieu géologique
� Le dimensionnement dépend du critère thermique !� Retarder au maximum l'enfouissement pour laisser décroître
les actinides de périodes courtes (sic)
Le stockage géologique : types de sites
� Formations argileuses� Riches en eau, mais écoulement très faible� Grande perméabilité chimique � Roche plastique : scellement optimal (mais travaux délicats)� Conductivité thermique médiocre
� Formations granitiques� Très peu perméable à l’eau� Forte résistance mécanique� Présence de fractures
� Roches volcaniques� Bonne résistance thermique et mécanique� Site « unique » de Yucca Mountains
� Sel� Excellente imperméabilité� Fort fluage (pas de réversibilité)
Le laboratoire de Bures
� Site argileux, exploré depuis 1994� « Site de recherche » … mais personne n’envisage d’en
chercher un autre pour tout recommencer !� Lieu devenu symbolique des mouvements « anti »
Le laboratoire de Bures
� Phase 1 : 1992 - 2005 (335 M€)� 27 forages profonds� 525 m de galeries (à -445 m et -490 m)� 130 forages depuis les galeries expérimentales � 1400 capteurs reliés au SAGD en temps réel� 4 km de carottes dans le Callovo-Oxfordien� 40000 échantillons
� Phase 2: 2008-2012 (exploitation: 17 M€/an)� 800 m de galeries à creuser� 25 expérimentations à démarrer ou poursuivre� 230 forages pour la période 2007-2009 � 2000 capteurs à installer� 14 forages profonds pour la reconnaissance 2008-2009
Le principe de réversibilité
� « L’autorisation de création d’un centre de stockage en couche géologique profonde de déchets radioactifs ne garantissant pas la réversibilité de ce centre dans les conditions prévues
par cette loi ne peut être délivrée. » (Loi du 28 Juin 2006)� « L’autorisation fixe la durée minimale pendant laquelle, à titre
de précaution, la réversibilité du stockage doit être assurée. Cette durée ne peut être inférieure à cent ans. »
L'histoire à la rescousse ?
� Aucun stockage géologique n’a jamais été construit…� … mais il a existé des réacteurs naturels !� Oklo (Gabon) : réacteur fossile découvert vers 1970� Criticité pendant plusieurs milliers d'années :
� Il y a 1,950 Gyr : taux d’ 235U = 3.6%
� Présence d’eau en quantité suffisante
� Peu d’éléments absorbants
� Très faible mobilité des PF et actinides !
Que souhaiterait-on faire des déchets ?
� Réduire la radiotoxicité (soupe chimique inévitable)
� Les PF sont sauf rare exception intransmutables� Mélange isotopique, séparation impossible sauf cas particulier� Décroissance « raisonnablement » rapide pour la plupart
� Il restera toujours des déchets radioactifs...� … donc le stockage/entreposage est impératif
� Incinérer les actinides c'est les faire fissionner� Faut-il incinérer les courtes périodes (ex 241Am, T=400
ans) ? Critère thermique...
Les actinides en réacteur
� Quasiment tous les AM sont non-fissiles� En spectre rapide, la fission domine mais σ faible !
Où transmuter ?
� Recyclage « homogène »� Recyclage continu des AM dans le combustible� Cycle du combustible unique � L’excès de radio-toxicité est dilué� Pilotage des réacteurs modifié
� Recyclage en réacteur dédié� Fabrication de combustibles spécifiques (chauds)� Soulage le reste du parc de réacteurs� Réacteur critique impossible à piloter (trop peu de neutrons
retardés)
→ réacteur sous-critique
Les réacteurs hybrides (Accelerator Driven System)
� Présence d’une source de neutrons � Accélérateur de protons (E ~ 1 GeV)� Cible de spallation� Environ 30 neutrons par proton
� Cœur sous-critique : k < 1
(typiquement 0.98)� k « source » : multiplication d’un
neutron émis par la source de spallation dans le coeur
� La source de spallation comble le déficit de neutrons
Forces et faiblesses des ADS
� Souplesse de pilotage� Possibilité de coupure rapide du faisceau� Amortissement d’une excursion de réactivité
� Souplesse sur le choix de combustible� Le pilotage ne dépend plus des neutrons retardés� Coefficients de vide ou de température > 0 acceptables
� Neutrons disponibles� Possibilité d’inclure des PF dans les couvertures
� Spectre très dur � Optimal pour la fission des actinides
� Pur objet de R&D, effraie les industriels� Le combustible adapté est une perspective lointaine
Les scénarios innovants
� Le réacteur « propre » n'existe pas� L'incinérateur optimal non plus� Le développement de filières surgénératrices butte sur la
disponibilité des matières fissiles
� Etude de scénarios mélant plusieurs types de réacteurs :� Réacteur eau légère avec couverture fertile� Réacteur rapide producteur d'énergie� Réacteur rapide optimisé pour l'incinération
� Mais les investissements s'annoncent énormes...