« Le lion de Saint-Marc est brisé : Millin et Venise »

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Aubin-Louis Millin 1759 -1818 entre France et Italie / tra Francia e Italia Campisano Editore Voyages et conscience patrimoniale / Viaggi e coscienza patrimoniale

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Aubin-Louis Millin 1759-1818entre France et Italie / tra Francia e Italia

Campisano Editore

Voyages et conscience patrimoniale / Viaggi e coscienza patrimoniale

sous la direction deAnna Maria D’Achille

Antonio IacobiniMonica Preti-Hamard

Marina RighettiGennaro Toscano

Voyages et conscience patrimoniale

Aubin-Louis Millin (1759-1818)entre France et Italie

Campisano Editore

a cura diAnna Maria D’Achille

Antonio IacobiniMonica Preti-Hamard

Marina RighettiGennaro Toscano

Viaggi e coscienza patrimoniale

Aubin-Louis Millin (1759-1818)tra Francia e Italia

Campisano Editore

57 Introduction / IntroduzioneAnna Maria D’Achille, Antonio Iacobini, Monica Preti-Hamard, Marina Righetti, Gennaro Toscano

11 Préfaces / PrefazioniÉric Gross, Jacqueline Sanson, Marina Righetti

15 Aubin-Louis Millin entre sciences de la nature et sciences de l’hommeAlain Schnapp

DE LA QUÊTE SAVANTE À LA QUÊTE PATRIMONIALE : LES PRÉCURSEURS DE MILLINDALLA RICERCA ERUDITA ALLA RICERCA SUL PATRIMONIO: I PRECURSORI DI MILLIN

25 La collection GaignièresAnne Ritz-Guilbert

33 Itinera literaria et antiquités du Moyen Âge. L’Italie de Jean Mabillon et Bernard de Montfaucon Francesco Russo

47 Autour de Millin : les voyageurs français en Italie, de la Révolution à l’EmpireGilles Bertrand

59 Documentazione, selezione e «cangiamenti» dello stile: il metodo di Lanzi dai taccuini di viaggio alla Storia pittoricaChiara Gauna

MILLIN ET LA BIBLIOTHÈQUE NATIONALEMILLIN E LA BIBLIOTHÈQUE NATIONALE

75 La carrière d’Aubin-Louis Millin : mondanité et service de l’ÉtatThierry Sarmant

87 Le fonds Millin au département des Manuscrits de la Bibliothèque nationale de FranceMarie-Laure Prévost

93 Les recueils de dessins « archéologiques » de Millin conservés au département des Estampes et de la Photographie de la Bibliothèque nationale de FranceJocelyn Bouquillard

LES VOYAGES DE MILLIN EN FRANCE ET EN ITALIEI VIAGGI DI MILLIN IN FRANCIA E IN ITALIA

111 Les Antiquités nationales d’Aubin-Louis Millin : un voyage autour du patrimoineCecilia Hurley

123 Portrait du Languedoc dans le Voyage dans les départemens du Midi de la FranceAnnie-France Laurens

135 « Mes regards... se tournoient toujours vers la terre classique » : le voyage de Millin en Italie (1811-1813)Monica Preti-Hamard

157 Aubin-Louis Millin a Torino: i rapporti con le istituzioni culturali e gli eruditi localiLucetta Levi Momigliano

169 Aubin-Louis Millin a Torino: la visita alla Biblioteca dell’Università e ai suoi fondi manoscrittiGiovanna Saroni

181 Roma di fronte alla storia. Cultura della tutela nel periodo napoleonicoValter Curzi

189 Tra visionarietà e osservazione: la riproduzione dei monumenti antichi nel XVIII secolo e le origini della moderna topografia classicaMarcello Barbanera

205 «Estrarre i segni di verità dagli oggetti»: il museo di Stefano Borgia e dintorniOrietta Rossi Pinelli

Table des matières / Indice

215 «L’Italie! L’Italie! Tel est le vœu de tous les artistes»: il Bel Paese nell’opera di Pierre-Henri de Valenciennes (1750-1819)Luigi Gallo

225 Séroux d’Agincourt et les origines de l’histoire de l’art médiévalHenri Loyrette

249 Seroux d’Agincourt e MillinIlaria Miarelli Mariani

261 Seroux d’Agincourt e il patrimonio librarioSimona Moretti

273 «Tous les lieux qui méritent d’être observés»: Millin e i monumenti della Roma medievaleAnna Maria D’Achille

299 Da Roma al regno di Napoli: sulle tracce del Medioevo di MillinAntonio Iacobini

327 Millin e il «véritable trésor lapidaire» delle chiese di RomaFabrizio Federici

339 Millin e l’edizione del mosaico con scene di teatro nel Museo Pio-Clementino: autenticità del documento e fedeltà del rilievoMichela di Macco

357 I Diari di viaggio di Pierre Adrien Pâris e le lettere a MillinElisa Debenedetti

369 Millin, il voyage pittoresque e la pittura di PanoramaSilvia Bordini

377 Il regno di Napoli al tempo di MillinTobia R. Toscano

387 Millin et « l’école » napolitaine de peinture et de sculptureGennaro Toscano

413 Millin et la collection de vases antiques de Caroline Murat, reine de NaplesFlorence Le Bars

423 Alla scoperta della Magna Grecia: il viaggio in Calabria di Millin, Catel e Astolphe de CustineMonica Preti-Hamard

443 Viaggiatori ed eruditi in Abruzzo tra Sette e OttocentoPio Francesco Pistilli

457 « Le lion de Saint-Marc a été brisé, j’en suis fâché ! » : Millin à VeniseGennaro Toscano

497 L’«Ancienne Lombardie» nei viaggi e nella corrispondenza di Aubin-Louis MillinStefano Bruzzese

515 La conservazione dei monumenti medievali tra fine Settecento e Ottocento: restauro e colore tra Francia e ItaliaEliana Billi

525 Viaggi e nascita della storia dell’arte nell’OttocentoDonata Levi

ANNEXES / APPARATI

534 Itinéraire du voyage de Aubin-Louis Millin en Italie / Itinerario del viaggio di Aubin-Louis Millin in ItaliaMonica Preti-Hamard

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Rhône, la Saône, le canal du Centre, la Loire et laSeine. Ils furent présentés au peuple parisien le27 juillet 1798. Entreposés aux Invalides, puis transféréssur quatre piliers de la grille latérale qui entourait lacour des Tuileries, ils furent installés sur l’arc duCarrousel en 1807 4.À cette époque, Millin est déjà en contact avec JacopoMorelli, conservateur de la Biblioteca Marciana et col-laborateur du Magasin encyclopédique, et comme nousle verrons, l’un de ses correspondants privilégiés ainsique son compagnon de visite dans la Cité des Doges.Deux mentions dans deux lettres envoyées à l’abbéMorelli témoignent l’intérêt de l’érudit français pourles célèbres bronzes vénitiens. Dans la première, datéedu 25 juillet 1808, il se plaint de ne pas avoir eu la possi-bilité de les étudier de près : « Quoique j’aie demandéplusieurs fois à voir les Chevaux de Venise avant queles échafauds fussent défaits, je n’ai pu encore avoirune réponse satisfaisante et vérifier le rapportd’Erizzo » ; dans la seconde, datée du 27 août 1808, ilexprime sa satisfaction d’avoir enfin pu voir les bronzeset lui envoie des précieux croquis des inscriptions :« Je puis enfin cher et estimable confrère vous donnerdes renseignements précis sur les inscriptions queErizzo dit avoir vues sur les Chevaux de Venise. Elles yexistent en effet et sont disposées comme vous lesvoyez dans cette lettre » 5. Outre le transfert de ces chefs-d’œuvre à Paris, le richepatrimoine de la Sérénissime avait connu pendant lesannées de domination française de véritables boulever-sements. Malgré les résistances d’Antonio Canova, parexemple, les collections de la célèbre BibliotecaMarciana ainsi que les collections d’antiques avaientquitté leur siège historique pour être installées au palaisdes Doges : le déménagement eut lieu du 27 décembre1811 au 27 février 18126. Millin découvre Venise à la fin de son séjour en Italie :il découvre une ville bafouée, une foule affligée.Il avait préparé son séjour vénitien avec beaucoup desoins et fut particulièrement aidé par ses correspon-dants vénitiens.Pour étudier le séjour de Millin à Venise, nous avons

Le 8 septembre 1813, dans l’après-midi, le chevalierMillin arrive enfin à Venise. La cité qu’il découvre estdésormais une ville française. Fin mai 1796, l’arméefrançaise commandée par Napoléon avait occupéBergame, Vérone et Trente ; le 18 avril 1797, Français etAutrichiens se partagent les terres de la Sérénissime :l’Autriche s’empare de la Terre Ferme tandis que l’an-cienne Cité des Doges, déjà à l’agonie, se voit accorderla Romagne, Bologne et Ferrare. Le 12 mai, le dogeLudovico Manin et le Grand Conseil démissionnent etune municipalité provisoire est nommée. En septembre de la même année, dix-huit tableauxappartenant au patrimoine de la Sérénissime furentenvoyés au Louvre 1. Parmi ces tableaux figuraient deschefs-d’œuvre du Titien, les Noces de Cana et le Repaschez Lévi de Véronèse, d’autres toiles du maître prove-nant du palais des Doges, des Tintoret mais aussi desœuvres des peintres primitifs telle la Pala de SanZaccaria de Giovanni Bellini 2.Le traité de Campoformio, signé pendant la nuit du 17au 18 octobre 1797, livre Venise à l’Autriche. Après unepremière domination autrichienne, les Français repren-nent possession de la ville, le 19 janvier 1806. Les pro-vinces vénètes sont annexées au Royaume d’Italie dontle vice-roi est Eugène de Beauharnais : Milan en est lacapitale. De nombreux chefs-d’œuvre de peinture véni-tienne sont alors envoyés à Brera qui devait devenir lagrande pinacothèque du Royaume d’Italie. C’est le cas,par exemple de la grande toile de Gentile et GiovanniBellini, La prédication de saint Marc à Alexandrie,transférée de la Scuola Grande de San Marco à Breraen 1809 3.Venise est offensée, en pleine décadence : le regret dela liberté perdue, la ruine des grandes familles et parconséquent l’abandon et la vente de palais, la suppres-sion de Scuole et de monastères firent plonger la villedans une atmosphère de désolation générale. Même leschevaux de Saint-Marc avaient quitté la façade de labasilique pour Paris ! Le 13 décembre 1797, ils furentdéposés et envoyés par mer d’abord à Ancône, puis àLivourne, où ils furent chargés sur une frégate endirection de Toulon, puis vers Paris en remontant le

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« Le lion de Saint-Marc a été brisé, j’en suis fâché ! » :Millin à VeniseGennaro Toscano

utilisé plusieurs types de sources, la plupart inédites,telles ses notes de voyages 7, les lettres qu’il avaitenvoyées à ses correspondants, notamment celleséchangées avec l’abbé Jacopo Morelli 8, les lettresreçues – en particulier la riche correspondance avecMauro Boni 9 –, puis quelques lettres envoyées àLeopoldo Cicognara 10 et à d’autres illustres personnali-tés de l’époque, et enfin les dessins et les relevés qu’ilfit exécuter sur place 11. Si cette riche documentation

permet de reconstruire avec une extrême précisionson bref mais dense séjour vénitien ainsi que sonréseau de correspondants, elle est tellement variée quel’on court le risque de se disperser et de s’éloigner del’exercice de synthèse car Millin fut un véritable gra-phomane et envahit de lettres et de notes ses corres-pondants vénitiens. Parmi eux, le célèbre conservateurde la Biblioteca Marciana, Jacopo Morelli, joua unrôle fondamental.

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1. L. Zandomeneghi, Relevé de la Cariatide avecmasque de la Biblioteca Marciana (aujourd’hui au musée archéologique de Venise), Paris, BnF,Estampes, Ga 66 Fol., n. 37 (© BnF)

2. L. Zandomeneghi, Relevé du Buste de prêtre d’Isis de la Biblioteca Marciana (aujourd’hui au Palazzo Grimani de Santa Maria a Formosa), Paris, BnF, Estampes, Ga 66 Fol., n. 35 (© BnF)

recevait d’autres en échange pour étoffer sa riche col-lection. Dès le 16 septembre 1810, Millin informe son corres-pondant vénitien de son projet de voyage en Italie :« Aussitôt après j’espère faire paraître la collection depierres gravées dont je vous ai envoyé quelques échan-tillons et au printemps il sera possible que j’aie le plai-sir d’aller vous remercier moi-même de toutes vos bon-tés ; car il faudra bien que j’aille visiter la belle Italie et

La correspondance et les relations entre les deuxhommes avaient commencé bien avant le séjour deMillin à Venise : le conservateur de la BibliotecaMarciana collaborait régulièrement au Magasin ency-clopédique et renseignait son correspondant françaissur les nouveautés éditoriales qui pouvaient l’intéres-ser. Les lettres envoyées par Millin à l’abbé Morellinous éclairent également sur sa méthode de travail : ilenvoyait des gravures à son confrère à Venise, il en

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3. L. Zandomeneghi, Allégories de la Peinture et de l’Architecture, détail du monument funéraired’Antonio Canova, Venise, basilique Santa MariaGloriosa dei Frari (foto G. Brevetti)

4. Venise, Basilique Santa Maria Gloriosa dei Frari,Portrait de Luigi Zandomeneghi, détail dumonument funéraire du Titien (foto G. Brevetti)

je compte que le projet que j’en ai formé ne sera pasvain et que l’année prochaine ne se passera point sansque j’aie eu l’avantage de vous voir ; ce sera certaine-ment une des plus grandes satisfactions que j’auraidans mon voyage » 12. Une autre lettre envoyée par l’archéologue au conser-vateur depuis Reggio Calabria le 16 juin 1812 témoignedes relations privilégiées qui lièrent les deux érudits :« C’est à l’extrémité de la Calabre, aux limites de laGrande Grèce, en face de la Sicile que je reçoisMonsieur et très cher Confrère votre réponse à lalettre dont j’avais chargé monsieur le Sénateur comtede St Vallier. Mon voyage a été fatiguant, périlleuxmême, mais plein d’intérêt pour moi [...].Vous êtes de mon avis, il vaut mieux faire bien quefaire promptement et beaucoup [...] ; mais on ne doitrien laisser derrière soi voilà pourquoi je n’ai pointencore vu l’Italie Septentrionale, tandis que je par-cours le département de Rome et les provinces duroyaume de Naples avec tant de soin. Le recueil de dessins que je rapporterai de cescontrées est immense. Je recherche aussi les livres etles estampes locales, préparez vous à bien des impor-tunités quand j’irai à Venise » (annexe 1).Effectivement, l’abbé Morelli sera sollicité par le che-valier Millin lors de son incursion vénitienne entre lafin de l’été et l’automne 1813. Après le long séjour à Naples et dans son royaume 13,puis une nouvelle étape à Rome, un passage rapide àFlorence, Bologne et Ferrare, il arrive le soir du 4 sep-tembre 1813 à Padoue : il n’y reste que trois jours 14

mais ne perd pas son temps. Il va visiter le Santo, lePrato della Valle, les oratoires, la basilique Sainte-Justine, la cathédrale, les bibliothèques, l’église desEremitani et la chapelle des Scrovegni.Le 8 septembre il se lève à cinq heures et prend laroute à sept heures moins le quart ; après avoir par-couru les bords de la Brenta et fait une halte à la Villaroyale de Stra, il arrive à Venise. Dès son arrivée dansla Cité des Doges, il parcourt le Grand Canal, visite laplace Saint-Marc et se paye un mauvais dîner au caféFlorian 15.

Dans son extrait publié dans le Magasin encyclopé-dique, il affirme : « ma première visite a été celle denotre savant et respectable confrère Monsieur l’abbéMorelli, qui m’a comblé de bontés » 16, affirmationconfirmée par ses notes de voyages. Le lendemain, le9 septembre, il se lève à six heures et quart et à neufheures se rend chez l’abbé Morelli, « vieillard sec d’àpeu près 75 ans ». Jacopo Morelli (1745-1819) avait été nommé « custode »(conservateur) de la Biblioteca Marciana à la fin del’année 1778, après la mort d’Anton Maria Zanetti,charge qu’il occupa jusqu’à sa mort en 1819. Érudit etgrand connaisseur, Morelli était resté l’un des pharesde la cité, « custode » non seulement de la riche etcélèbre bibliothèque mais aussi de la mémoire de laSérénissime. Sa vaste culture et sa position stratégiquele mirent au centre d’un important réseau d’hommesde culture et en contact avec les plus importantssavants de l’Europe de l’époque 17. Tout en n’étantjamais sorti de Venise, Morelli « non solamente conos-ce le grandi Biblioteche di tutto il culto mondo, i piùpregevoli Musei di antichità, i più doviziosi Gabinettidi medaglie, le più insigni Gallerie di pitture e tuttociò, in una parola, che alla bella letteratura ed alle artibelle appartiene ; ma ne parla ancora con quella dottri-na, profondità ed evidenza, che soltanto ad ocular testi-monio avresti creduto concessa », écrira IsabellaTeotochi Albrizzi à propos du conservateur dans sesRitratti publiés en 1807 18. Millin tomba lui aussi sous le charme de ce vieillard etfut impressionné par sa collection de livres. Il note :« Je vois sa bibliothèque qui est très curieuse : une par-tie est de manuscrits, je ne sais s’il a pu rassembler tantde choses précieuses et rares : ce ne sont pas desmanuscrits inutiles et qui n’offrent que des vignettesinsignifiantes plus au moins bien faites ; ce sont despièces inédites sur la littérature et les arts », puis ilaffirme que Morelli a « presque tous les livres debibliographie, je crois qu’il ne lui en manque aucunc’est ce qu’il appelle le métier ; un autre corps contientles livres d’antiquités et d’érudition variée ; un autre unimmense recueil épistolaire dans toutes les langues ; un

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5. L. Zandomeneghi, Relevé des Tétrarques (Venise, place Saint-Marc), Paris, BnF, Estampes, Ga 66 Fol., n. 25 (© BnF)

autre enfin plus de deux mille dissertation et petits trai-tés sur différents sujets. La conversation de cet hommecélèbre est vive, spirituelle ». Ces appréciations sem-blent correspondre au portrait littéraire qu’avait brosséMadame Teotochi Albrizzi de l’abbé : « Malgrado l’es-sere lui sempre fra i libri, o fra quegli uomini che da’libri non sono gran fatto diversi, e malgrado, dirò così,la vastissima mole di sua erudizione, la quale suol quasisempre opprimere o spegnere quel fiore dello spiritoche in bei motti ed in saporite facezie sviluppasi, puntonon è in lui rintuzzata la vivacità dell’ingegno, in modotale che la sua conversazione riesce al pari che utile,dilettevole » 19.Jacopo Morelli accompagna tout naturellement Millin àla Biblioteca Marciana. Depuis l’arrivée des Français,les fonds de la célèbre bibliothèque avaient été dépla-cés au palais des Doges car les salles construites parSansovino devaient être réaménagées pour abriter lepalais royal 20 : « ce local fait actuellement partie dupalais du vice-roi ; on a transporté la bibliothèque dansle palais ducal aussi j’en vais parler après avoir décrit cepalais », signale Millin dans ses notes, puis il décritquelques statues antiques transférées au palais desDoges et en particulier « une superbe statue de rougeantique ». Parmi les relevés d’antiques qu’il fit exécuterà la Biblioteca Marciana nous avons retrouvé ceuxd’après la Cariatide avec masque (fig. 1) et « la superbestatue de rouge antique » (fig. 2). Restée jusqu’en 1795

au palais Cappello-Morosini, la Cariatide avec masque(Rome, IIe siècle après J.-C.) avait intégré les collectionsde la Biblioteca Marciana grâce à l’interventiond’Antonio Canova 21, tandis que le Buste de prêtre d’Isis,en rouge antique, provenant vraisemblablement de laVilla Adrienne de Tivoli, était rentré dans les collec-tions de la Biblioteca Marciana grâce au legs deGiovanni Grimani de 1587 22.À Venise, pour ses relevés, Millin fit appel à un jeune ettalentueux sculpteur, Luigi Zandomeneghi. C’est l’abbéMauro Boni qui avait présenté cet habile dessinateur àMillin dès son arrivée à Venise (annexe 4). Né en 1779 à Colognola (Vérone), Zandomeneghi avaitété envoyé à Vérone auprès d’un fabriquant de car-

rosses ; en 1795 il arriva à Venise dans l’atelier du sculp-teur Giovanni Ferrari, dit le Torretti. Dans ce mêmeatelier était passé quelques années plus tôt le célèbreAntonio Canova. Il se perfectionna dans le dessin et lacopie des sculptures antiques ; ces copies étaient telle-ment bien réalisées que même Canova fut piégé.Au début de sa carrière, Zandomeneghi fut protégé parGirolamo Ascanio Molin grand collectionneur de pein-tures et d’antiques. Toutefois, les difficultés politiquesde l’époque ne facilitèrent guère la carrière de l’artiste.La crise économique de la ville ne stimula pas degrands chantiers publics. En 1806, il collabore avecBartolomeo Ferrari à la décoration de la façade de SanMaurizio à Venise ; à la fin de l’année 1807, à l’occasionde la visite de Napoléon à Venise, il s’occupa de ladécoration de l’arc de triomphe érigé par l’architecteSelva vers l’église Santa Lucia 23. En 1812, Zandomeneghi est responsable des sculpturesà l’Arsenal, puis l’année suivante intervient dans lesaménagements du Giardino pubblico comme entémoigne sa lettre envoyée au Podestà de Venise le17 juillet 1813 : le sculpteur souhaite que les quatre sta-tues de Goldoni, d’Alfieri, de Metastasio et deCimarosa soient installées « ai termini del ponte deigiardini, e in altro luogo che fosse creduto più conve-niente », selon le projet de Selva 24. Une grande amitié le lia à Canova et il fut choisi parl’Accademia di Belle Arti de Venise pour sculpter lesallégories de la Peinture et de l’Architecture (fig. 3) dumonument funéraire érigé à la gloire du grand artistedans l’église des Frari en 1827 25. En collaboration avecson fils Pietro, il participa à la réalisation du grandiosemonument funéraire à la gloire de Titien (fig. 4), érigéentre 1843 et 1852 dans la même église 26.Échappés aux études sur l’artiste et retrouvés deuxsiècles plus tard, les relevés exécutés parZandomeneghi à la demande de Millin illustrent unepériode mal connue et peu documentée de son activitédans la Venise française. En l’absence de commandespubliques, cette fin d’année 1813 fut donc très béné-fique pour le sculpteur qui trouva en l’archéologuefrançais un commanditaire prêt à payer des sommes

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6. L. Zandomeneghi, Relevé des “pilastri acritani”(Venise, place Saint-Marc), Paris, BnF, Estampes, Vb 132 (W, 2), n. 24 (© BnF)

7. L. Zandomeneghi, Relevé du bas-relief avec Hercule et le sanglier d’Erymanthe (Venise, façade de la basilique Saint-Marc), Paris, BnF, Estampes, Ga 66 Fol., n. 27 (© BnF)

8. L. Zandomeneghi, Relevé du bas-relief avec Herculeet le cerf (Venise, façade de la basilique Saint-Marc),Paris, BnF, Estampes, Ga 66 Fol., n. 26 (© BnF)

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considérables pour des dessins qui à ses yeux étaientcapables de rappeler et représenter les monuments his-toriques négligés par ses contemporains. Reprenons l’itinéraire de Millin à Venise. Le 9 sep-tembre, après avoir passé la journée en compagnie del’abbé Morelli, il s’offre le soir les plaisirs d’une certaineLauretta et se couche à 22 heures pour être en formele lendemain. Les jours suivants (10 et 11 septembre)sont consacrés à la place Saint-Marc, notamment à labasilique. Il écrit dans son journal de voyage : « j’ai faitdessiner quelques monumens qui ont été négligés sur laplace de Saint Marc, ou qui sont incrustés dans lesmurs de l’église » 27. Outre le célèbre groupe desTétrarques (fig. 5) que les Vénitiens avaient rapporté

comme trophée lors de la quatrième croisade en 1204

ou les “pilastri acritani” (fig. 6), Millin fit dessinerdeux curieux bas-reliefs situés sur la façade principalede la basilique représentant Hercule et le sanglier d’Érymanthe (fig. 7) et Hercule et le cerf (fig. 8).Effectivement la commande de ces deux bas-reliefs« négligés » témoigne de l’ampleur et de la va riété desintérêts que l’archéologue réserve au patri moineantique et médiéval de la Cité des Doges. Millin reste très discret et politiquement correct sur lestravaux de réaménagements de la place Saint-Marc quipourtant devaient être au cœur des débats citadins.À propos de l’église San Geminiano, démolie pour faireplace au grand escalier du palais royal, il se limite à

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9. L. Zandomeneghi, Relevé d’un bas-relief de la collection de GirolamoAscanio Molin, Paris, BnF, Estampes, Ga 66 Fol., n. 28 (© BnF)

remarquer : « on a préféré d’abattre ce monument »pour « faire disparaître les différences dans l’architec-ture ». Homme des Lumières, il apporte une contribu-tion tiède à ce débat en invoquant tout simplement leconcept de symétrie cher aux architectes de son temps.Après avoir visité le cœur de la Cité des Doges et sansjamais oublier ses correspondants, tels le chevalierRangoni ou l’abbé Morelli, le 13 septembre, Millinentreprend son tour des collections archéologiques dela ville. Il commence par celle du patricien GirolamoAscanio Molin (1738-1814) qui avait fait restaurer en1806 le palais familial, rio San Stin, pour y abriter sa ri -che collection de tableaux et d’antiques 28. Ce fut l’abbéMauro Boni, conseiller et courtier pour la constitu-tion de cette collection, qui y introduisit l’archéologuefrançais. Si la collection de tableaux de GirolamoAscanio Molin a fait l’objet d’un mémoire de maîtriseen 1991-1992 29, l’étude de sa collection d’antiques reste àfaire 30. À propos de cette collection d’antiques, Millinécrit : « Les quelques pièces méritent attention et je lesai faites dessiner », puis il mentionne le jardin où il yavait « un petit temple en demi retour et sur les côtésdes niches où sont des statues de marbre de Paros ;elles représentent de jeunes magistrats ».Effectivement, il fit dessiner par Luigi Zandomeneghiun bas-relief (fig. 9) et les deux statues de jeunes magis-trats 31 (fig. 10). La plus importante collection d’antiques de laSérénissime était sans doute celle organisée par lesGrimani dans leur palais de Santa Maria a Formosa :des sculptures grecques et romaines, des portraits, desreliefs, des inscriptions et des vases venus du Levant oude Rome. En 1587, Giovanni Grimani avait légué à laSérénissime cette riche collection qui fut transféréedans la première salle de la Biblioteca Marciana, ori -gine du Statuario pubblico de la République et premiernoyau de l’actuel musée archéologique national 32.Toutefois, malgré les dispositions du legs de GiovanniGrimani, un certain nombre d’œuvres resta au palaisGrimani : les reliefs scellés dans les parois, les sculp-tures modernes, quelques bronzes et les statues monu-mentales. Parallèlement, d’autres membres de la fa -

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10. L. Zandomeneghi, Relevé d’unmagistrat de la collection de GirolamoAscanio Molin, Paris, BnF, Estampes,Ga 66 Fol., n. 30 (© BnF)

mille, tels Antonio, évêque de Torcello puis patriarched’Aquilée, ou plus tard Giovanni Carlo, continuèrent àacquérir des antiques pour le palais jusqu’à la secondemoitié du XVIIIe siècle 33. La collection d’antiques du palais Grimani constituaitl’une des gloires et des curiosités de la Sérénissime.En 1698, par exemple, Bernard de Montfaucon, accom-pagné par Apostolo Zeno, avait visité cette collection.Il en admira les sculptures et les inscriptions de la couret en retranscrit un certain nombre ; il ne put visiter latribune car on en avait perdu les clefs 34.

Comme la plupart des visiteurs illustres, Millin soulignela « grandeur de cette maison » et affirme dans sesnotes posséder « la description imprimée de ce beaupalais ». En effet, un guide anonyme de la fin du XVIIIe siècle, en italien et en français, était à la disposi-tion des voyageurs et donnait une idée assez précise dela présentation des œuvres et des antiques restées aupalais de Santa Maria a Formosa 35.Les notes et les dessins que Millin fit réaliser d’aprèsles antiques conservées au palais Grimani sont extrê-mement intéressants, car à partir de 1830, la plupart des

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11. L. Zandomeneghi, Relevé d’un bas-relief de la collection Grimani(Weimar, Schlossmuseum), Paris, BnF,Estampes, Ga 66 Fol., n. 1027 (© BnF)

12. L. Zandomeneghi, Relevé d’un bas-relief de la collection Grimani(Weimar, Schlossmuseum), Paris, BnF,Estampes, Ga 66 Fol., n. 1028 (© BnF)

deux bas-reliefs du palais Grimani pour qu’il puisse lesconfronter avec les originaux : « faites moi le plaisir dela confronter avec l’original et de me dire ce que tientle jeune homme qui est appuyé sur la colonne, c’estprobablement le manche de l’instrument dont l’extré-mité est à terre ou l’autre extrémité ne serait ce pas unflambeau renversé, vous me ferez aussi un grand plaisirsi vous me donnez des détails sur l’origine de ce basrelief » (annexe 15). L’abbé Morelli lui répondit ainsi à ce sujet le 20 janvier1816 : « Quanto al bassorilievo Grimani, di cui mi avete

œuvres de cette collection furent vendues par les anti-quaires Antonio Sanquirico 36, Francesco Pagliaro etDavid Weber. Millin fit dessiner par Zandomeneghi deux bas-reliefs(fig. 11-12) qui surmontaient les portes de la salle déco-rée à « boscaglia », décoration à l’époque attribuée àGiovanni da Udine. Le guide du palais possédé parMillin décrivait ainsi ces reliefs et leur emplacement :« Plafond d’une invention singulière, et d’un travailadmirable peint au fresque par Jean d’Udine et repré-sentant un boccage qui contient la série des Volatilesconnus, exécuté avec une précision tout-à-fait surpre-nante. On voit sur les portes deux grandes planchesantiques en bas-relief, toutes deux représentent l’his -toire d’Oreste et Pilade » 37. Suivant la tradition locale, Millin les interpréta commeétant l’histoire d’Oreste et de Pylade et les publia dansson ouvrage L’Orestéide, ou Description de deux bas-reliefs du palais Grimani, à Venise, et de quelques monu-ments qui ont rapport à l’histoire d’Oreste (Paris 1817).Passés dans les mains de Sanquirico, ces deux bas-reliefs furent acquis par le grand-duc de Saxe-Weimar,Karl Alexander, pendant son voyage en Italie en 1834-1835 ; ils sont aujourd’hui conservés au Schlossmuseumde Weimar 38.D’une grande précision, les dessins exécutés à la com-mande de Millin sont extrêmement fidèles aux origi-naux et montrent la grande capacité de leur auteur.Nous avons notamment pu le constater à propos de sescommandes aux artistes napolitains lors de son longséjour dans la capitale méridionale, l’archéologue étaittrès exigeant sur la qualité des relevés et demandait àses équipes de dessinateurs de reproduire les œuvresd’art dans leur état de conservation. Toutefois, si àNaples il avait eu la possibilité de vérifier sur place lafidélité de la plupart des relevés qu’il avait comman-dés 39, son bref séjour vénitien ne lui permit pas desuivre la même méthode. Rentré à Paris, il fut obligé dedemander l’avis de ses correspondants, de l’abbéMorelli notamment, ou de faire confiance à ses inter-médiaires tel l’abbé Mauro Boni. En effet, le 29 août1815, Millin envoie à l’abbé Morelli les gravures des

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13. L. Zandomeneghi, Relevé du bas-relief représentant Silène offrantun sacrifice au dieu Priape de lacollection Grimani (Aquilée, muséearchéologique national), Paris, BnF,Estampes, Ga 66 Fol., n. 31 (© BnF)

mandato l’intaglio in rame, il giovane appoggiato allacolonna tiene in mano un mezzo di mazza o di bastone,che va unito all’altro giovine in piedi aderente allacolonna, col pileo frigio in testa ; né vi è alcun indizioche li due pezzi spezzati formassero una fiaccola. Latradizione vocale delle persone di casa fa che vi sianorappresentati Pilade e Oreste ; né io ho comodo diverificare ciò. Donde il marmo sia provenuto, non v’ènotizia alcuna avendone il Patriarca d’AquileiaGiovanni Grimani, che raccolse quelle anticaglie, avuteda Roma, da Atene e da tutta la Grecia » (annexe 17).Parmi les antiques restées au palais Grimani, le curieuxautel représentant sur ses faces l’Enfantement de Priapeet Silène offrant un sacrifice au dieu Priape attira égale-ment l’attention de l’archéologue (fig. 13). D’abordexposé dans la cour du palais, puis au piano nobiledans le Camaron d’oro, cet autel du IIe siècle aprèsJésus Christ est conservé depuis 1895 au musée archéo-logique d’Aquilée 40.À côté des sculptures, une magnifique œnochoé enbronze restée au palais Grimani fut dessinée parZandomeneghi (fig. 14). Avec un trait sûr et précis, ledessinateur a parfaitement rendu la perfection de cetobjet caractérisé par une magnifique anse richementornée, représentée en détail sur le côté gauche de lafeuille. Installée jusqu’en 1833 dans la tribune du palais,cette œnochoé (fig. 15) fut achetée par le collectionneurhongrois Gábor Fejérvary grâce à la médiation de l’an-tiquaire Sanquirico ; elle est aujourd’hui au musée desBeaux-Arts de Budapest 41.Les notes de voyages de Millin nous apprennent queses journées vénitiennes commençaient très tôt : il selevait généralement à six heures moins le quart pourrendre visite à ses correspondants avant de commencerles visites des monuments. Le 14 septembre, il va visiterla collection Nani dont il possédait le catalogue que luiavait envoyé Jacopo Morelli, comme en témoigne unelettre datée du 17 mars 1809 : « Cher et respectableconfrère, Je profite d’une occasion qui se présente parle départ de M. Siauve, commissaire des guerres pouravoir l’honneur de vous écrire, je vous dois d’abord desremerciements pour les ouvrages que vous m’avez

adressés principalement pour ce beau catalogue dumusée Nani qui est devenu très rare et je me regarde àprésent très heureux de le posséder grâce à vos bontés,dans ma bibliothèque » 42.Ce même jour, il rend visite à Isabella Teotochi Albrizzicomme il apparaît dans ses notes : « Je vais voirMadame Albrizzi femme très aimable : sa descriptiondes chef d’œuvres de Canova. Il a fait pour elle unetête d’Hélène ». Il fait allusion à l’ouvrage de celle-cisur les sculptures de Canova, publié à Florence en1809 43 ainsi qu’au célèbre buste que le sculpteur luiavait offert en signe de reconnaissance. Sculpté parCanova en 1811 et offert à Isabella Teotochi Albrizzil’année suivante, ce buste d’Hélène (Venise, baronRubin de Cervin Albrizzi), inaugure la série des têtesidéales de Canova ; il fut dès 1812 apprécié parLeopoldo Cicognara 44. Tout comme l’élite internatio -nale de l’époque, Millin fréquenta le salon animé parIsabella Teotochi Albrizzi (1760-1836) dans son palaisvénitien et il restera en contact avec elle une fois rentréà Paris. Les jours suivants, il rend visite régulièrement à l’abbéBoni, il s’accorde quelques escapades avec des courti-sanes, puis il va au théâtre à San Moysé dans la logeAlbrizzi, il visite l’Académie où il remarque la salle desplâtres de Canova, Santa Maria del Giglio dont il ad -mire le « très beau portail », l’Arsenal, Santi Giovannie Paolo, Sant’Antonio Abate, San Zaccaria, SantaMaria a Formosa, la Madonna dei Miracoli, SantaMaria della Misericordia, la Madonna dell’Orto, SanGiobbe, l’église des Scalzi, etc. Avec une énergieinépuisable, il réussit à visiter la quasi totalité desmonuments, musées, palais et collections vénitiens,sans négliger les dîners mondains comme celui chez lePatriarche en compagnie du Préfet, des abbés Morelliet Boni, et du chevalier Rangoni. Une fois terminé le tour des églises et des collectionspubliques et privées de l’ancienne Cité des Doges, le25 septembre, en compagnie de l’abbé Boni, Millin serend à Torcello, à Murano, à Mazzorbo et à SanMichele in Isola. À la fin de son séjour, il se consacra plus particulière-

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bibliothèque, du Statuario pubblico, et des antiquesappartenant à celle-ci. Grâce à ce cumul de fonctions, ilréussit à préserver les manuscrits du Trésor avec leursprécieuses reliures. En 1803, le gouvernement autrichien chargea l’abbé derédiger un inventaire détaillé des objets du Trésor quiavaient échappé aux destructions ou aux ventes.Le conservateur fit ainsi transporter dans son bureaucertains objets pour mieux les étudier. L’étude étaitencore en cours lorsque Millin lui rendit visite à Venise.À côté de sa description de la coupe en verre tur -quoise, par exemple, Jacopo Morelli y apposa la note« écrite à Millin le 8 octobre 1814 » 47. Il fait sans douteréférence à des renseignements qu’il avait dû envoyerà son correspondant rentré en France.

ment à l’étude du Trésor de Saint-Marc. Dans ses notesde voyages, il écrit : « 30 septembre, demander pourvoir le trésor que je fais dessiner et dont j’ai les des -criptions pratiques », et dans son journal de voyage ilajoute qu’il était très difficile d’y pénétrer 45. L’intérêt que Millin réserve aux objets conservés dansle Trésor de Saint-Marc fut sans aucun doute stimulépar les relations qu’il entretint avec l’abbé Morelli.En effet, dès 1792, le conservateur de la BibliotecaMarciana s’était intéressé au Trésor en commençant parles manuscrits qui y étaient conservés, notamment ceuxqui possédaient de précieuses reliures 46. Dès 1801, Morelli avait souhaité que les manuscritssoient déposés à la Biblioteca Marciana pour des rai-sons de conservation. L’abbé s’occupait en effet de la

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14. L. Zandomeneghi, Relevé d’uneœonochoé en bronze de la collectionGrimani (Budapest, musée des Beaux-Arts), Paris, BnF, Estampes, Ga 67 Fol., n. 34 (© BnF)

15. Budapest, musée des Beaux-Arts,Œnochoé en bronze

Dans des notes, conservées à la Biblioteca Marciana(Ris. 73), l’abbé Morelli décrit en effet avec une ex -trême précision les objets du Trésor : il en donne lesdimensions et en retranscrit les inscriptions 48.Tout en émulant son correspondant vénitien et dispo-sant sans doute de moyens bien plus importants, Millinfit réaliser par Zandomeneghi des relevés d’une grandefidélité de certains objets du Trésor. Dans son journalde voyage il écrit : « J’ai rapporté les dessins [...] devases énormes de sardonyx, de crystal ou de verre dutrésor de Saint Marc où il est très difficile de pénétrer.La plupart des vases ont des inscriptions arabes ; j’ai

aussi pris le dessin de la coupe turquoise dontMontfaucon a seulement donné la description » 49.Il fait allusion à la célèbre coupe en verre turquoise(Iran ou Iraq, IXe-Xe siècle) avec une monture en argentdoré, émaux cloisonnés et pierres précieuses, œuvrebyzantine du Xe siècle (fig. 16), décrite par Bernard deMontfaucon dans son Diarium Italicum 50.L’étude des objets précieux du Trésor de Saint-Marcfut au cœur des préoccupations vénitiennes de Millin.En effet, dans ses notes manuscrites conservées à labibliothèque de l’Arsenal, il a laissé un dossier intitulé« trésor de saint Marc » avec la description plus ou

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16. L. Zandomeneghi, Relevé de lacoupe en verre turquoise du Trésorde Saint-Marc, Paris, BnF, Estampes,Ga 67 Fol., n. 48 (© BnF)

17. L. Zandomeneghi, Relevé du vase de cristal de roche du Trésor deSaint-Marc, Paris, BnF, Estampes,Ga 67 Fol., n. 39 (© BnF)

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18. L. Zandomeneghi, Relevé de l’aiguièreau nom du calife Al-Aziz-Billah duTrésor de Saint-Marc, Paris, BnF,Estampes, Ga 67 Fol., n. 41 (© BnF)

moins détaillée de 18 objets, tandis qu’au départementdes Estampes de la Bibliothèque nationale de Francesont conservés les relevés de 8 objets dessinés par LuigiZandomeneghi sur 7 grandes feuilles ainsi que quelquesplanches tirées de ces mêmes dessins 51. Outre la célèbrecoupe en verre turquoise, Millin fit exécuter les relevésdu vase de cristal de roche (Iraq, fin du Xe siècle avecune monture réalisée à Venise pendant la seconde moi-tié du XIIIe siècle) 52 (fig. 17), de l’aiguière au nom ducalife Al-Aziz-Billah (Le Caire, entre 975 et 996, avecmonture du XVIe siècle) 53 (fig. 18), de la situla avec desscènes de chasse (VIe-VIIe siècle) 54 (fig. 19), du sceau deverre pourpre (Rome ou Alexandrie, IVe siècle ?) 55

(fig. 20), des aiguières en sardoine et en agathe (artbyzantin, VIIe siècle ?) 56 (fig. 21) et de la coupe en sar-doine (Ve-VIe siècle ?) 57 (fig. 22). La correspondance entre l’abbé Morelli et Millin conti-nua après son retour à Paris. Comme nous l’avons vu,Morelli dut envoyer à l’archéologue des renseignementssur la coupe en verre turquoise et ce dernier tenait aucourant son correspondant vénitien de l’état d’avance-ment de ses travaux sans oublier de lui parler des évo-lutions rapides de la situation politique. Malgré la pré-cipitation des évènements de l’époque – abdication deNapoléon en avril 1814 suivie par l’exil sur l’île d’Elbe ;retour des Autrichiens à Venise le 20 avril de la mêmeannée – et leurs divergences idéologiques, les deuxhommes continuèrent à nourrir leur amitié fondée surla commune passion pour l’étude et la sauvegarde dupatrimoine. Le 13 juin 1814, Millin reprend sa corres-pondance avec le conservateur de la BibliotecaMarciana et lui envoie vraisemblablement le compterendu de son journal de voyage publié dans la Magasinencyclopédique sans oublier de lui rappeler son projetde publication du voyage en Italie : « Combien j’ai étésatisfait très respectable ami de recevoir de vos nou-velles. J’ai cru que ce maudit blocus ne finirait jamais.Enfin cette terrible et insupportable guerre est termi-née, et nous pourrons reprendre notre correspondance[...]. J’ai donné un extrait de quelques lettres quej’avais adressées à l’Institut pendant mon voyage. Cen’est qu’un itinéraire mais on y trouve l’indication des

recherches que j’ai faites et des dessins que j’ai fait exé-cuter, et enfin une notice de ce qu’on peut attendre demon entreprise. Je donne outre cela, tous les matins quatre ou cinqheures à la rédaction de mon voyage ; mais je n’espèrepas en pouvoir commencer l’impression avant uneannée » (annexe 10).Quelques mois plus tard, le 27 août 1814, Millin conti-nue à rédiger son journal de voyage et lui exprime sonenvie de vouloir retourner en Italie du Nord et de vou-loir passer quelques jours à Venise : « Je continue tou-jours mes travaux et principalement la rédaction demon voyage. Je poursuivrai ainsi jusqu’au printemps del’année prochaine, et peut-être retournerai-je dans lahaute Italie, pour corriger, augmenter, etc. mon ou -vrage sur les lieux. Je serai bien content, si je puis allerpasser cinq à six jours à Venise » (annexe 13). Le 22 octobre de la même année, Millin continue à luiparler de ses rythmes de rédaction du journal de sonvoyage : « Je suis occupé de la rédaction de mon vo -yage, c’est un ouvrage qui me plait toujours plus àmesure que j’y travaille, je cause des objets, des amisqu’il me rappelle. J’aurais bien des renseignements àvous demander, des questions à vous faire sur notrechère Venise, mais je vous importunerai le moins que jepourrai. Tout est encore ici dans la plus grande stagnation. Lesjournaux, les pamphlets, les querelles politiques occu-pent tous les esprits. Le goût des questions purementlittéraires est tout-à-fait passé, à moins qu’elles ne tien-nent à une littérature frivole » 58. La rédaction de son « guide-journal » de voyage conti-nue à occuper une bonne partie des ses journées pen-dant l’automne 1814 : « Je travaille tous les matins àmon voyage et c’est pour moi un plaisir ravissant, jecrois revoir la belle Italie, aussi je marcherai par tout, jeveux que mon ouvrage conduise, intéresse et instruisecelui qui le prendra pour Guide [...]. Si je meurs avantde l’avoir donné, la perte ne sera pas grande, si jel’achève il sera plus complet » 59. Entre temps, la situation politique se précipitait défini-tivement pour Napoléon : défaite de Waterloo le

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19. L. Zandomeneghi, Relevé de la situlaavec scènes de chasse du Trésor de Saint-Marc, Paris, BnF, Estampes, Ga 67 Fol., n. 42 (© BnF)

20. L. Zandomeneghi, Relevé du sceau de verre pourpre du Trésor de Saint-Marc, Paris, BnF, Estampes, Ga 67 Fol., n. 43 (© BnF)

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21. L. Zandomeneghi, Relevé desaiguières en sardoine et en agathe duTrésor de Saint-Marc, Paris, BnF,Estampes, Ga 67 Fol., n. 38 (© BnF)

22. L. Zandomeneghi, Relevé de la coupe en sardoine du Trésor deSaint-Marc, Paris, BnF, Estampes,Ga 67 Fol., f. 166 (© BnF)

Paris où il fut traité Dieu sait comment. En le repre-nant à Paris, le 3 octobre 1815, il tomba et se cassa [...].À Paris, on l’avait placé sur une colonne d’où jaillissaitune fontaine devant l’hôtel des Invalides et on lui avaitmis la queue entre les jambes en signe de mépris àl’égard de la grandeur vénitienne ». Une fois réparé, lelion fut hissé sur sa colonne le 17 avril 181661.La correspondance entre l’archéologue français et l’abbé vénitien continua jusqu’au 12 octobre 1817 ; dansses dernières lettres, Millin tient au courant JacopoMorelli de ses fréquentations parisiennes et notammentde ses rencontres avec Madame Albrizzi. La noblevénitienne servit d’intermédiaire pour les échangesentre les deux érudits et de coursier pour apporter àVenise les gravures des bas-reliefs du palais Grimani 62. L’autre abbé qui joua un rôle fondamental pendant leséjour de Millin à Venise fut Mauro Boni. Nous l’avonsvu, ce dernier lui avait présenté le dessinateur LuigiZandomeneghi (annexe 4) et avait suivi le travail unefois l’archéologue rentré à Paris. « Le savant abbé Bonia été pour moi plein d’obligeance », écrira Millin dansson journal de voyage 63. Mauro Boni (1746-1817), père jésuite, grand érudit,entretint des relations avec les plus grands savants deson temps : Lanzi, Andrès, Tiraboschi. Vers 1799, ils’établit à Venise comme précepteur du fils deGiacomo Giustiniani. Installé dans le palais de la noblefamille aux Zattere, Boni resta longtemps dans la cité etdevint secrétaire de l’Ateneo veneto. Éditeur, historiendu livre, expert en gravure, peinture et antiquité, il futessentiellement antiquaire dans le sens ancien etmoderne du mot. Souvent contesté par ses contempo-rains, il ne dédaignait pas d’avoir recours aux sourcesde deuxième, voire de troisième main. Jacopo Morelli,par exemple, exprima des jugements féroces sur sesméthodes peu orthodoxes et sur son honnêteté intellec-tuelle : il ne craignait pas de fréquenter des célèbresfaussaires comme les Meneghetti. Par ailleurs, il avaitfait acquérir des faux aux familles dont il était consul-tant comme les Correr, les Giustiniani et les Molin 64. Ce fut le comte Marescalchi qui mit en contact l’abbéBoni et Millin. Les lettres échangées entre les deux éru-

18 juin 1815, suivie par la dernière demeure de l’empe-reur des Français à Sainte-Hélène. Étrangement, Millinn’en parle pas à son cher ami vénitien, ce ne sont queles passions intellectuelles et les questions patrimo-niales qui lui tiennent à cœur. Les chevaux de Saint-Marc avaient été déposés de l’arcdu Carrousel le 1er octobre 1815 sous la direction d’ingé-nieurs autrichiens et anglais et restèrent dans une caser-ne sous escorte jusqu’au 17 octobre, jour de leur départpour Venise. Le 13 décembre, ils retrouvent leur placesur la façade de la basilique devant l’empereurd’Autriche. À cette occasion Leopoldo Cicognara dédiaà sa majesté François Ier d’Autriche et nouveau roi deVenise sa dissertation intitulée Dei quattro cavalli ripostisul pronao della Basilica di San Marco (Venise 1815).Cicognara voulut ainsi rendre hommage à celui quiavait permis le retour de ces mémoires sacrées à Venise :« Poche memorie saranno ai posteri tanto care, quantoun atto della Sovrana Volontà sì liberale, e sì grande,per cui V. M. fra noi ripone une delle più sudate palmedella vittoria, restitutore generoso di quel patrioMonumento che stette per tanti secoli come trofeodella Veneta gloria sull’arco maggiore della Basilica diSan Marco ».Millin n’était pas du même avis ; il était triste de voirrepartir ces chefs-d’œuvre, témoins de l’éphémère gloire de la France napoléonienne. Il exprime son étatd’âme à l’abbé Morelli dans une lettre datée du 3 octo -bre 1815 : « Le lion de S. Marc a été brisé, j’en suisfâché. Je vois avec peine la France privée de monumensqu’elle avait conquis mais quelque part qu’ils soient jedésire qu’ils se conservent » 60. Millin fait allusion aulion en bronze qui surmonte l’une des colonnes de laPiazzetta : ce monument historique, emblème de la Citédes Doges, avait suivi le même chemin que les autresœuvres saisies par les Français à Venise. À ce propos, ilconvient de lire les notes d’Emanuele Cicogna. Le 11 dé -cembre 1815, il écrit que : « le jeudi 7 courant, à peinepassées deux heures de l’après-midi, le bateau trans-portant les Chevaux et le Lion vénitiens arriva devantla douane de la Salute ». Le lion était en 14 morceauxet il fallait le réparer : « en 1797, on l’emporta cassé à

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dits demeurent une source précieuse qui permet derentrer au cœur de cette relation. Dès le retour deMillin à Paris, Boni lui adresse des lettres très flat-teuses. Le 5 octobre 1813, par exemple, Boni lui écrit :« Quanto a me giocondissima fu la saggia ed amabileconvivenza di tre settimane con voi, riscontrando i pre-ziosi monumenti dell’arte antica e rediviva in Veneziacolla rapidita del vostro alacre ingegno, e pronta e sicu-ra perspicacia delle vostre cognizioni ; altrettanto mi ètriste ed amarissimo il distacco. Io vi accompagno con ivoti fervidi della salute, che vi mantenga nella vostraammirabile alacrità per compiere le illustrazioni dellespoglie opime d’arti italiane finora sfuggite agli occhilincei de’ più solenni antiquari da’ secoli per risvelarsial saggio Millin, le quali vengono ad arricchire non cherisarcire il vostro museo più splendido di quelli diAttico e Mecenate » (annexe 5). Bien que peu apprécié par ses contemporains, l’abbéBoni eut néanmoins le mérite d’avoir fait découvrir àMillin les antiquités vénéto-adriatiques, notammentTorcello et Grado. Si grâce à ses fréquentationsromaines – ses longues séances de travail avec Sérouxd’Agincourt notamment – et à ses méticuleusesrecherches dans le Mezzogiorno 65, l’archéologue fran-çais avait considérablement élargi sa connaissance del’Italie médiévale, à Venise, Mauro Boni lui fit décou-vrir cette civilisation vénéto-adriatique méconnue àl’époque en France. Il n’oublia pas de rappeler dansson journal de voyage que l’on considérait la cathédralede Torcello comme « le berceau de l’église vénitienne ».Il remarqua les volets qui fermaient les fenêtres, consti-tués d’énormes pierres d’un seul bloc, et surtout lamosaïque « qui est couverte d’un nombre immense defigures ; c’est un véritable poème sacré, à cause de lamultiplicité des allégories et des symboles ». Il rappellel’avoir fait dessiner « dans une proportion qui ne laisserien à désirer par la fidélité des détails » 66. En effet, une fois Millin rentré à Paris, l’abbé Boni sechargea de surveiller le travail du dessinateur LuigiZandomeneghi, engagé dans une vaste opération derelevés des mosaïques de la cathédrale de Torcello.Dans une lettre du 18 octobre 1813, Boni in forme Millin

de l’état d’avancement des relevés des mosaïques :« Ieri mi portai sopra il luogo, e col mezzo di una scalagrande ho esaminato diligentemente il lavoro già tuttosegnato, ed ora si è messo a purgarlo caratterizzandobene le forme. Io sono stato contento del primo schiz-zo, gli ho fatto osservare alcune avvertenze per ridurloa perfezione, e spero che piacerà anche agl’occhi linceidel Roscio in antiquaria e belle arti » (annexe 7). Dansla lettre suivante, envoyée de Venise le 30 octobre de lamême année, Boni écrit : « Heureusement, oggi allequattro pomeridiane il diligente e bravoZandomeneghi, che vi riverisce distintamente con grati-tudine, termina nel mio studiolo sotto a’ miei occhi dipurgare i quattro disegni che ho creduto bene di fareseguire perché nulla abbiate a bramare di quanto èinteressante a Torcello ». Dans cette même lettre, il introduit la notion de style etfait allusion aux différentes mains qui ont œuvré sur lechantier de Torcello : « Poiché nel grande mosaico paredi scorgere la mano di tre artefici differenti, il 1° abbas-so più rozzo, il terzo più castigato e corretto che hadisegnato il Paradiso, ed il medio in alto al terzo infe-riore, ma migliore del primo. Ho raccomandato aZandomeneghi di conservare il carattere che li dis-tingue, pare che sia riuscito a qualche professore edilettante di buon gusto, che ne ha ammirato i disegniche v’invio ».L’abbé termine cette lettre de façon impudiquementflatteuse en comparant l’archéologue français au grandhistorien de l’art italien Luigi Lanzi : « Amico amabilis-simo, permettete uno sfogo al mio spirito da tre anniabbattuto per la perdita amarissima dell’illustre mioPadre e Maestro di amorosa benevolenza per dieci lus-tri, il saggio e santo amico Luigi Lanzi, che ha lasciatoun gran vuoto nel mio spirito, troncando il mio più gio-condo carteggio letterario di otto lustri ogni corso diposta e di cui tengo un tesoro di mille lettere erudite.Or la buona sorte amica mi porge in voi il compenso diun altro Luigi pari in dottrina e carattere di saggezza,di cui confido meritarmi una pari benevolenza ».Outre les mosaïques, Boni prend la liberté de faire des-siner le bas-relief scellé à l’extérieur de l’escalier qui

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23. L. Zandomeneghi, Relevé du bénitier de la cathédrale de Torcello, Paris, BnF,Estampes, Ga 67 Fol., n. 44 (© BnF)

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mène à l’ambon 67 : « Mi sono preso la libertà di nonommettere il piccolo basso rilievo di marmo greco sta-tuario negletto da voi ; ma riveduto a me piacque ; mipare il trono della fortuna sul carro alato, uno vi èridente per averla afferrata pel ciuffo, l’altro dolenteperché gli fugge, la donna è disperata perché gli è fug-gita » (fig. 24). En plus de ce relief, l’abbé Boni fera exécuter le relevéde l’étrange bénitier de la cathédrale de Torcello 68

(fig. 23) et lui enverra les relevés du pavement de labasilique Sant’Eufemia à Grado (fig. 25), « primomonumento dell’arti venete rinascenti in questo feliceestuario insieme colla Repubblica Veneta unico esem-pio in Terra della beata dalla gran mente del divinoPlatone ideata, ma qui solo goduta colla felicità de’popoli per quattordici secoli – ah! con dolor mi rimem-bra! » (annexe 8).Mauro Boni aurait dû également faire exécuter les rele-vés de la célèbre Pala d’oro de la basilique Saint-Marc ;Millin le lui rappelle dans une lettre envoyée de Paris le14 juin 1814 – « ainsi, cher Boni, ne manquez pas de me

faire dessiner la pala de St Marc, si elle ne l’est pasencore » – et lui demande de saluer LeopoldoCicognara (annexe 11). En réalité, ce fut ce dernier quise chargea de faire dessiner la Pala d’oro pour le cheva-lier Millin comme le prouve une lettre adressée par l’ar-chéologue français à Mauro Boni : « J’ai écrit àM. Cicognara qui a eu la bonté de faire dessiner pourmoi la palla d’oro » 69.Si Millin n’avait pas eu la possibilité de rencontrerLeopoldo Cicognara lors de son séjour à Venise – il lerappellera lui-même dans son journal de voyage 70 –, ileut l’occasion de faire sa connaissance à Turin, sur lechemin du retour. En effet, Cicognara avait séjourné àParis de juin à octobre 1813 où, aidé par le ministreMarescalchi, il s’était occupé de la promotion de sonouvrage intitulé Storia della scultura dal suoRisorgimento in Italia sino al secolo di Napoleone perservire di continuazione alle opere di Winckelmann e did’Agincourt, imprimé à Venise en 181371. Dans cet ou -vrage apprécié par l’empereur, Cicognara avait publiéquelques détails de la célèbre Pala d’oro. Deux ans plustard, deux planches avec des détails de la pala furentpubliées par Cicognara dans le premier volume de Lefabbriche più cospicue di Venezia (Venise 1815). Millin était conscient de l’importance de ces publica-tions et du rôle joué par Cicognara dans le contexteartistique vénitien ; il essaya d’entretenir de bonnesrelations avec le grand historien de la sculpture en l’in-formant sur l’avancement de son projet éditorial surl’Italie et en lui proposant d’échanger leurs ouvragesrespectifs. Dans sa lettre envoyée à Cicognara le 15 jan-vier 1815, Millin écrit : « J’ai eu l’honneur de vous expri-mer, Monsieur, lorsque j’ai eu l’avantage de vous voir àTurin, mon regret de ne vous avoir pas rencontré àVenise ou retrouvé à Paris. J’aurais eu bien le plaisir àm’entretenir avec vous et à recevoir vos instructions.J’ai commencé la relation de mon voyage et je n’ai pastrouvé votre premier volume qui m’aurait été fort utile,et que j’aurais cité plus d’une fois ». Puis il soulignequ’un ami lui avait prêté le volume sur la sculpture etdemande à Cicognara de le lui envoyer en échange deses Monumens inédits : « Mes monumens antiques

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24. L. Zandomeneghi, Relevé du bas-reliefde l’escalier de l’ambon de la cathédralede Torcello, Paris, BnF, Estampes, Ga 66 Fol., n. 45 (© BnF)

25. Paris, BnF, Vb 132 (V, 1), n. 47, Dessin du pavement de la basiliqueSant’Eufemia de Grado (© BnF)

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inédits sont d’un gros volume in 4° ayant plus de 72

planches la plus part en taille douce. Ils se vendent à 72

francs prix de particulier. J’aurais l’honneur de vous enoffrir un exemplaire pour votre premier volume dontj’ignore le prix. S’il y a du plus ou du moins cela sera àvaloir sur d’autres ouvrages ». Il regrette ne pas avoirpu recenser le volume sur la sculpture dans le Magasinencyclopédique car à sa parution il était en Italie, loinde Paris, mais il lui promet d’en parler. Il termine salettre en faisant allusion à son projet éditorial : « Je vaispublier quelques ouvrages sur les monumens que j’aifait graver à mon retour. Si vous le désirez, je pourrai àmesure qu’ils paraîtront vous en faire passer un exem-plaire également pour échange avec votre ouvrage » 72.Le comte Cicognara fit sans doute exécuter pour lechevalier Millin les relevés de la Pala d’oro car ce der-nier le remercie dans une lettre du 14 mars 1816 nonseulement pour l’envoi de l’ouvrage sur la sculpturemais aussi pour les dessins 73. Millin s’éteint à Paris le 14 août 1818. LeopoldoCicognara se rend à Vienne en juillet 1818 pour remettrecomme hommage à l’empereur la Muse Polymnie deCanova, puis il visite Prague, Dresde, Berlin, Weimar etParis où il demeura jusqu’au printemps 1819. À l’occa-sion de la vente des papiers Millin, il acheta quelquesdessins ayant appartenu à l’illustre archéologue et sansdoute la vue d’ensemble de la Pala d’oro, comme nousl’apprend le rédacteur des Operette di Iacopo Morelli.Dans cet ouvrage publié après la mort du conservateurde la Biblioteca Marciana, après avoir cité l’Epistola adAlbinum Ludovicum Millinum, de inscriptione Græcaquæ Venetiis in Museo Grimanorum exstat 74, le rédac-teur rappelle les échanges entre l’abbé vénitien et l’ar-chéologue français et les relevés que ce dernier avaitfait exécuter à Venise : « volentieri il Morelli diede laspiegazione di quella semplice epigrafe greca al signorMillin, che ne lo ricercò e con cui si trattenne per gior-ni parecchi in lunghi colloquii, quando l’anno 1813

visitò tutta l’Italia. E da que’ discorsi n’era accadutoche il Millin, invogliatone, avea fatto cavare esattissimidisegni e del grande mosaico del duomo di Torcello, edi que’ due isolati pilastri a fianco della chiesa di san

Marco, e della Pala d’oro, e di alcune delle rare cose cheà il Tesoro della chiesa di san Marco, e di due bassi-rilie-vi del palazzo Grimani ec. per dargli poscia ad incidereed illustrargli ; ma perché morte troppo prestamente ilcolse a discapito dei buoni studii, non ebbimo che laincisione e la illustrazione de’ due bassi-rilievi de’Grimani, col titolo di Oresteide (Paris 1817) da ciò cherappresentano » 75. Comme nous l’avons rappelé, le comte Cicognara avaiteu la chance de pouvoir acquérir le relevé de la Palad’oro : « Buona ventura però volle che trovandosi inParigi il cav. Cicognara al tempo dell’asta delle cose delsig. Millin, vi trovasse vendibile il disegno della Palad’oro, che inciso fe’ bella parte della grand’opera delleFabbriche di Venezia » 76. En réalité le premier volume des Fabbriche di Veneziaavait vu le jour en 1815, avant le décès de Millin, et il pré-sentait déjà deux planches illustrant des détails de laPala d’oro de Saint-Marc. Ces mêmes planches accompa-gnées d’une vue d’ensemble de la pala furent publiéespar Cicognara dans sa Descrizione di tre tavole rappre-sentanti la Pala d’oro nella R. Basilica di S. Marco (Venise1820) et c’est vraisemblablement dans cet ouvrage quefut utilisé le relevé exécuté à la commande de Millin etacquis après sa mort par celui qui avait servi d’intermé-diaire.Dès son retour à Paris, l’archéologue avait pourtantessayé de trouver des financements pour la publicationde ses ouvrages sur l’Italie. Le 20 octobre 1814, il avaitenvoyé une lettre à l’abbé de Montesquiou, ministre del’Intérieur, pour lui demander de l’aide et lui avait pro-posé entre autres de publier une « Description desmosaiques de Torcello et de Grado et de plusieursMonuments inédits sacrés et prophanes de la ville deVenise et de ses isles », accompagnée de trente-et-undessins 77. Dans une autre lettre envoyée au mêmeministre le 12 février 1815, Millin revient sur son projetvénitien : « Monseigneur, Votre Excellence, après avoireu l’insigne bonté de me promettre de favoriser par lamanificence (sic) de ses encouragemens la publication demon voyage d’Italie, m’a fait demander par quel partieje voulois commencer, ce que l’ouvrage pourra coûter, à

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1 A. Alberti, « Pietro Edwards e le opere d’arte tolte da Napoleone aVenezia », Nuova Antologia, 1926, p. 325-338 ; M.-L. Blumer,« Catalogue des peintures transportées d’Italie en France de 1796 à1814 », Bulletin de la Societé d’Histoire de l’Art Français, 1936,p. 244-348 ; F. Lugato, « Le vicende del patrimonio artistico: disper-sioni e ritorni », in Dai Dogi agli Imperatori. La fine della Repubblicatra storia e mito, catalogue d’exposition, Venise - palais des Doges-musée Correr (14 septembre-8 décembre 1997), Milan 1997, p. 137-141. Malgré les nombreuses imprécisions, voir égalementP. Wescher, Kunstraub unter Napoleon, Berlin 1976, édition italienneI furti d’arte. Napoleone e la nascita del Louvre, Turin 1988, p. 71 et ss.2 G. Toscano, « Giovanni Bellini et la France (XVIe – XXe siècle).Les aléas d’une reconnaissance », in Da Bellini a Veronese : temi diarte veneta, sous la direction de G. Toscano et F. Valcanover, Venise2004, p. 209-213.3 Sur le sujet voir A. Augusti, « Le requisizioni napoleoniche aVenezia e la costituzione della Pinacoteca di Brera e delle Galleriedell’Accademia », in Venezia napoleonica, sous la direction deM. Engelhardt, Venise 2001, p. 91-103 ; S. Sicoli, « Ambiguità econtraddizioni nella formazione della Pinacoteca di Brera », inVenezia e le terre venete nel regno italico : cultura e riforme in etànapoleonica, actes du colloque (Venise 15-17 octobre 2003) sous ladirection de G. Gullino et G. Ortalli, Venise 2005, p. 147-193 ;Brera: la Pinacoteca: storia e capolavori, sous la direction deS. Bandera, Milan 2009.4 A. Guidi Toniato, « Les chevaux de Saint-Marc de la chute de larépublique à nos jours », in Les Chevaux de Saint-Marc, Venise, cata-logue de l’exposition, Paris - Galeries nationales du Grand Palais(10 avril-10 août 1981), Paris 1981, p. 111-117.5 Venise, Biblioteca Marciana, Archivio Morelli 116 (12622). Millinfait allusion au Discorso sopra le medaglie antiche di SebastianoErizzo publié à Venise en 1559 ; sur les hypothèses d’Erizzo relativesaux chevaux, voir L. Borrelli Vlad, A. Guidi Toniato, « Sources etdocumentations sur les chevaux de Saint-Marc », in Les Chevaux deSaint-Marc, p. 123.6 M. Zorzi, La Libreria di San Marco : libri, lettori, società nellaVenezia dei Dogi, Milan 1987, p. 363-364.7 Paris, BnF, Arsenal, 6372.8 Dans le fonds de Jacopo Morelli conservé à la Biblioteca Marcianade Venise, Archivio Morelli 116 (12622), sont conservées 28 lettresadressées par Millin à Jacopo Morelli ; nous ne publions que cinq deces lettres en annexe de cet article. Nous nous réservons de revenirultérieurement sur ce sujet et de publier l’ensemble de cette corres-pondance. Deux lettres envoyées par Morelli à Millin sont conser-vées à la Bibliothèque nationale de France (annexes 17 et 20).9 Paris, BnF, fr. 24679.10 Venise, Bibliothèque du musée Correr, Ms. P. D. 712 C, LIV.11 Les dessins commandés par Millin à Venise, à Grado et à Torcellocorrespondent aux n. 24-48 et 1027-1028 de l’Inventaire des piècescomposant la collection des dessins d’antiquités et autres recueillis parm. A.-.L. Millin pendant son voyage en Italie pendant les années 1812à 1814 et acquis après sa mort en 1819 : Paris, Bnf, Estampes,Réserve, Ye 1. Archives, 1809-1826. 12 Venise, Biblioteca Marciana, Archivio Morelli 116 (12622).13 Voir les articles d’A. Iacobini, de G. Toscano, « Millin et “l’école”napolitaine de peinture et de sculpture », et de M. Preti-Hamard,

quel nombre il sera tiré et le prix de chaque livraison,je m’empresse de répondre à ces différentes questions.Je commencerai par publier les monumens sacrés etprophanes tous inédits que j’ai faits dessiner à Venise etchacun d’eux ont de l’importance et de l’intérêt, l’étu-de des monumens ecclésiastiques est actuellement trèsnégligée en France, cette publication contribuera peut-être à la ranimer et les monumens mythologiques, grecset romains donneront à cet ouvrage un intérêt plusconforme au goût général des amateurs des arts. On ytrouvera ainsi la gravure des superbes vases que l’onconserve dans le trésor de Saint-Marc. Je puis direcependant qu’ils étaient ignorés et qu’ils sont entière-ment inconnus » 78. Effectivement, la crise financière puis la mort de l’ar-chéologue ne rendirent pas possible cette publicationde grande envergure qui aurait dû présenter de bellesplanches tirées des relevés de Zandomeneghi. Commepour son voyage à Rome et au Royaume de Naples, lesnotes du séjour vénitien de Millin et les dessins qu’il fitexécuter sur place sont restés inédits jusqu’à aujour-d’hui. S’il fut de courte durée comparé à ses étapes àRome et en Italie méridionale, il fut riche de nom-breuses découvertes qui l’introduisirent à des chapitresinédits de l’histoire de l’art et de l’archéologie. Grâce àses relations avec les abbés Morelli et Boni, Millin futle premier français à comprendre la valeur artistique decette civilisation vénéto-byzantine et à étudier avecautant de soin les précieux et insolites objets du Trésorde Saint-Marc. « J’ai quitté avec regret Venise, cette ville charmante etmalheureuse, où les mœurs étoient si piquantes àobserver, et qui laisse de si nobles et si intéressans sou-venirs », écrira-t-il dans le compte rendu de son journalde voyage 79.

NOTES

J’exprime toute ma gratitude à tous ceux qui ont facilité ma recherche :Giulia Brazzale, Giulio Brevetti, Elena Catra, Anna Maria D’Achille,Elsa Damien, Luca Dell’Aquila, Marcella De Paoli, Antonio Iacobini,Susy Marcon, Isabella Palumbo Fossati, Francesco Russo, ClémentSaliou, Alessandra Schiavon, Giorgio Tagliaferro et Tobia R. Toscano.

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« Alla scoperta della Magna Grecia: il viaggio in Calabria di Millin,Catel e Astolphe de Custine », dans ce volume.14 Paris, Bnf, Arsenal, 6372 ; toutefois, dans son compte rendu duvoyage publié dans le Magasin encyclopédique, il affirme avoir passé7 jours à Padoue (Extrait de quelques lettres adressées à la Classe dela Littérature ancienne de l’Institut impérial par A. L. Millin pendantson voyage en Italie, Paris 1814, p. 72).15 Sauf indications contraires, les notes concernant son séjour àVenise sont contenues dans le manuscrit 6372 de la bibliothèque del’Arsenal à Paris.16 Millin, Extrait de quelques lettres, p. 27.17 Sur l’abbé Morelli voir E. De Tipaldo, Biografia degli Italiani illus-tri nelle scienze, lettere ed arti del sec. XVIII, e de’ contemporanei, Ve -nise 1834, II, p. 481-496 ; Zorzi, La Libreria di San Marco, p. 349 et ss.18 I. Teotochi Albrizzi, Ritratti, Brescia 1807, éd. cons. Palerme 1992,p. 81-82.19 Ibid., p. 84.20 Sur les transformations de la Biblioteca Marciana et desProcuratorie nuove voir G. Pavanello, « La decorazione del PalazzoReale di Venezia », Bollettino dei Musei Civici Veneziani, 21, 1/2,1976, p. 3-34 ; M. Frank, « Atti mancati o progetti falliti? Attorno alPalazzo Reale di Venezia », Rivista Napoleonica, 10-11, 2004-2005,p. 101-102. 21 Venise, Museo archeologico nazionale, inv. 161 ; voir la notice deM. De Paoli in Museo archeologico nazionale di Venezia, sous ladirection d’I. Favaretto, M. De Paoli, M. C. Dossi, Milan 2004,p. 71, n. II 24. 22 Venise, Museo archeologico nazionale, inv. 117 : Lo Statuario pub-blicao della Serenissima. Due secoli di collezionismo di antichità 1596-1797, catalogue de l’exposition, Venise - Biblioteca Marciana (6 sep-tembre-2 novembre 1997), Cittadella 1997, p. 146, n. 9. Ce buste estactuellement exposé au palais Grimani de Santa Maria a Formosa.23 Je remercie tout particulièrement Giulia Brazzale qui a mis à madisposition son mémoire de maîtrise inédit Per il catalogo dello scul-tore Luigi Zandomeneghi, sous la direction de N. Stringa, Venise,Université Ca’ Foscari, faculté des lettres et philosophie, 2002-2003.24 Venise, Archivio di Stato, Dipartimento Adriatico, Prefettura, busta562.25 G. Brazzale, Per il catalogo dello scultore Luigi Zandomeneghi,p. 161-167 avec bibliographie. Sur le monument voir égalementG. Barbieri, « In morte delle arti sorelle. La commedia delle esequiesolenni di Canova, Palladio, Tiziano », in Il Veneto e l’Austria. Vita ecultura artistica nelle città venete 1814-1866, catalogue de l’exposi-tion, Vérone - Palazzo della Gran Guardia (30 juin-29 octobre1989), Milan 1989, p. 80-82.26 G. Brazzale, Per il catalogo dello scultore Luigi Zandomeneghi,p. 182-187, avec bibliographie. Sur ce monument voir la notice deG. Pavanello in Venezia nell’Ottocento. Immagini e mito, cataloguede l’exposition, Venise - musée Correr (décembre 1983 - mars1984), Milan 1983, p. 132-133, n. 167, et l’article de G. Barbieri,« In morte delle arti sorelle », p. 88 dans ce même ouvrage.27 Millin, Extrait de quelques lettres, p. 73.28 Ascanio Molin légua à sa mort son cabinet d’histoire naturelle aulycée public de Venise ; les statues, les tableaux et les bronzes àl’Académie des Beaux-Arts de Venise ; les livres, les estampes, les

dessins, les pierres gravées, les vases et les médailles à la ville avec lesouhait qu’ils soient conservés à la Biblioteca Marciana : Collezionidi antichità a Venezia nei secoli della Repubblica, catalogue de l’expo-sition, Venise - Biblioteca Marciana (27 mai-13 juillet 1988), Rome1988, p. 136-137.29 L. Rizzi, Girolamo Ascanio Molin, un collezionista veneziano traSette e Ottocento, mémoire de maîtrise inédit sous la direction deF. Mazzocca, Université Ca’ Foscari de Venise, 1991-1992.30 Venise, Archivio municipale, busta 1814, podestà III : « Elencodegli Oggetti di Antichità in Marmo, Bronzo ed altro » (Rizzi, Giro -lamo Ascanio Molin, un collezionista veneziano tra Sette e Ottocento).31 Paris, BnF, Estampes, Ga 66 Fol., n. 28-30.32 Lo statuario pubblico della Serenissima.33 I. Favaretto, « Una tribuna ricca di marmi...: appunti per una sto-ria delle collezioni dei Grimani di Santa Maria a Formosa »,Aquileia nostra, LV, 1984, col. 205-240 ; Id., Arte antica e culturaantiquaria nelle collezioni venete al tempo della Serenissima, Rome1990, p. 84-93 ; Id., « Un cortile delle statue veneziano. Per un per-corso della memoria nel Palazzo Grimani di Santa Maria aFormosa », in Studi di Archeologie in onore di Gustavo Traversari,Rome 2004, p. 341-361 ; M. De Paoli, « Intorno a Palazzo Grimanie alle sua raccolte di antichità: les sculture del cortile, i vasi e i bron-zi del primo piano », Atti dell’Istituto Veneto di Scienze, Lettere edArti, CLXV, 2006-2007, p. 419-459 ; Id., « Le collezioni archeolo-giche dei Grimani. Raccolte d’arte per un palazzo delRinascimento », in Palazzo Grimani a Santa Maria a Formosa. Storia,arte, restauri, sous la direction d’A. Bristot, Vérone 2008, p. 127-131.34 « Sexta augusti [1698] comitibus domino Apostolo Zeno viro eru-dito et hujusce urbis ornamento, cujus beneficiis non semel ornatisumus, itemque domino Birone presbytero græce docto, ædesJoannis Caroli Grimani patritii veneti adimus, ubi bene multa obser-vavimus, quæ nos etsi frequentes eo venerimus in hanc unam diemconferemus. Ab ingressu occurrit peristylium quadrum, in quo visi-tur statua marmorea Julii Cæsaris paludati, non ita perito fabro ela-borata. E regione illius erigitur Agrippa nudus marmoreus humanaproceritate duplo major, doctissimo artifice, qui Delphinum caudatenet, capite in solum nixo. In numismatibus ejus Neptunus depingi-tur, Delphinum supina dextera gestans, tridentem sinistra tenens, innautici imperii signum. Agrippæ statuæ et icones mediæ raræ sunt,quare hæc magni pretii [...].Alia multa spectabilia istic sunt tabellæ depictæ peritissimis pictori -bus. Monstratur item ampla supellex figlina, disci videlicet in conca-vo a Raphaele delineati ; at multi Raphaelem auctorem negant, ferenusquam exstant tot hujuscemodi. Est ibidem conclave plenumanaglyphis, signis, inscriptionibus, aliisque antiquitatum monumentis,quæ per cancellos a limine solum salutare licuit, nam semper oppes-sulatas invenimus fores, neque clavis aderat, consilio an casu igno-ratur » : B. de Montfaucon, Diarium italicum, Paris 1702, p. 37-41.35 Pitture e scolture nel Palazzo di Casa Grimani a S. Maria a Formosa,s. l. n. d., (voir Favaretto, « Una tribuna ricca di marmi », p. 211,fig. 1).36 Sur Sanquirico voir M. Perry, « Antonio Sanquirico, art merchantof Venise », Labyrintos, 1/2, 1982, p. 74 et ss. 37 Pitture e scolture nel Palazzo di Casa Grimani, p. 10-11.38 Favaretto, « Una tribuna ricca di marmi », p. 219.39 G. Toscano, « Le Moyen Âge retrouvé. Millin et Ingres à la décou-

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« Trésor de St. Marc, vase de verre réduit à moitié », signé par LuigiZandomeneghi, n. 43 de l’Inventaire des pièces composant la collec-tion des dessins.52 Venise, Trésor de Saint-Marc, n. 99 : D. Alcouffe et D. GaboritChopin in Le trésor de Saint-Marc de Venise, p. 264-273, n. 36, avecbibliographie. 53 Venise, Trésor de Saint-Marc, n. 80 : D. Alcouffe, in Le trésor deSaint-Marc de Venise, p. 216-221, n. 30, avec bibliographie.54 Venise, Trésor de Saint-Marc : Il Tesoro di San Marco, n. 13. 55 Venise, Trésor de Saint Marc, n. 123 : K. Reynolds Brown in Letrésor de Saint-Marc de Venise, p. 77-81, n. 1.56 Venise, Trésor de Saint Marc, n. 11-12 : D. Alcouffe in Le trésor deSaint-Marc de Venise, p. 90-95, n. 5.57 Venise, Trésor de Saint Marc, n. 64 : D. Alcouffe in Le trésor deSaint-Marc de Venise, p. 87-89, n. 4.58 Venise, Biblioteca Marciana, Archivio Morelli 116 (12622).59 Ibid., lettre adressée à l’abbé Morelli le 10 novembre.60 Ibid.61 Les Diari de Cicogna sont conservés à la bibliothèque du muséeCorrer (Ms. 2844-2845). Nous avons utilisé la version française deces extraits, publiée par B.M. Scarfi (dir.), Le lion de Venise : étudeset recherches sur la statue de bronze de la Piazzetta, Venise 1990,p. 34-35. 62 Venise, Biblioteca Marciana, Archivio Morelli 116 (12622).63 Millin, Extrait de quelques lettres, p. 72.64 Sur Mauro Boni voir l’excellent article de M. Bonfioli dans leDizionario Biografico degli Italiani, 12, Rome 1970, p. 81-84, et l’ar-ticle de P. Pastres, « Mauro Boni. Brevi note sulla vita e gli studi diun allievo di Lanzi », in L. Lanzi, Lettere a Mauro Boni : 1791 -1809, éd. par P. Pastres, Udine 2009, p. 35-51.65 Toscano, « Millin et “l’école” napolitaine ».66 Millin, Extrait de quelques lettres, p. 73-74.67 Sur ce bas-relief, voir R. Polacco, Sculture paleocristiane e altome-dievali di Torcello, Trévise 1976, p. 138-140.68 Sur cette sculpture, voir Ibid., p. 71, n. 43.69 Copie très abîmée et presque illisible de la lettre envoyée parMillin à Boni le 2 septembre 1815 : Paris, BnF, fr. 24679, f. 170-173.70 Millin, Extrait de quelques lettres, p. 72 : « j’ai eu le chagrin de nepoint trouver à Venise M. Cicognara ».71 Voir l’article de G. Romanelli dans le Dizionario biografico degliItaliani, ad vocem.72 Venise, musée Correr, Bibliothèque, Ms. P. D. 712 C, LIV.73 Ibid.74 Magasin encyclopédique, avril 1814, II, p. 281-288.75 Operette di Iacopo Morelli bibliotecario di S. Marco ora insieme rac-colte con opuscoli di antichi scrittori, Venise 1810, I, p. XCIX.76 Ibid.77 Paris, BnF, fr. 24693, extrait du brouillon de la lettre datée du 20octobre 1814, partiellement publié par G. Toscano, « Millin et“l’école” napolitaine » dans ce volume.78 Ibid., extrait du brouillon de la lettre datée du 15 février 1815. 79 Millin, Extrait de quelques lettres, p. 74.

verte de Naples angevine », in Ingres, un homme à part ? Entre car-rière et mythe, la fabrique du personnage, actes du colloque interna-tional (Paris 25-26 avril 2006), sous la direction de C. Barbillon,Ph. Durey, U. Fleckner, Paris 2009, p. 275-310 ; Id., « Aubin-LouisMillin, Filippo Marsigli e la riscoperta di Leonardo da Besozzo », inA. Delle Foglie, La cappella Caracciolo del Sole a San Giovanni aCarbonara, Milan 2011, p. XVII-XXIV ; Id., « Millin et “l’école”napolitaine », dans ce volume.40 Inv. 364 : E. Di Filippo Balestrazzi, « L’ara di Eupor nel museo diAquileia », in Venetia. Studi miscellanei di Archeologia delle Venezie,Padoue 1970, II, p. 9-126 ; V. Santa Maria Scrinari, MuseoArcheologico di Aquileia. Catalogo delle sculture romane, Rome 1972,p. 181, n. 554 ; Favaretto, « Un cortile delle statue veneziano »,p. 357 ; De Paoli, « Intorno a Palazzo Grimani », p. 427.41 Inv. 56.11.A : Favaretto, « Una tribuna ricca di marmi », col. 220 ;J. G. Szilágyi, Ancient Art: Department of Antiquities. Handbook ofthe permanent exhibition, Budapest 2003, p. 57.42 Venise, Biblioteca Marciana, Archivio Morelli 116 (12622).43 I. Teotochi Albrizzi, Opere di scultura e di plastica di AntonioCanova descritte, Florence 1809.44 Voir la notice de F. Mazzocca in Antonio Canova, catalogue del’exposition, Venise - musée Correr (22 mars-30 septembre 1992),Venise 1992, p. 316-317, n. 142, avec bibliographie.45 Millin, Extrait de quelques lettres, p. 73. Sur le Trésor de Saint-Marc voir A. Pasini, Il Tesoro di San Marco in Venezia illustrato,Venise 1886-1887 ; R. Gallo, Il Tesoro di S. Marco e la sua storia,Venise-Rome 1967 ; Il Tesoro di San Marco, sous la direction de H.R. Hahnloser, Florence 1971 ; Le Trésor de Saint-Marc de Venise,catalogue de l’exposition, Paris - Galeries nationales du GrandPalais (24 mars-25 juin 1984), Paris 1984. 46 S. Marcon, « Il Tesoro di San Marco : le legature preziose e glistudi di Jacopo Morelli su numerosi oggetti », in Oreficeria sacra aVenezia e nel Veneto. Un dialogo tra le arti figurative, sous la direc-tion de L. Caselli et E. Merkel, Venise 2007, p. 134 et ss. 47 Venise, Biblioteca Marciana, Ris. 73, f. 267 (voir Marcon, « IlTesoro di San Marco », p. 143). 48 Ibid., p. 155-161.49 Millin, Extrait de quelques lettres, p. 73.50 Venise, Trésor de Saint-Marc, n. 140 : Montfaucon, Diarium itali-cum, p. 72. Sur cette coupe voir la notice de M. English Frazer, inLe Trésor de Saint-Marc de Venise, p. 209-211, n. 28, avec bibliogra-phie. 51 Paris, BnF, Estampes, Ga 67 Fol. : f. 165, « Trésor de St. Marc -Vases de Sardonyx, grandeur naturelle », n. 38 de l’Inventaire despièces composant la collection des dessins ; f. 166, signé par LuigiZandomeneghi, « Trésor de St Marc, vase de Sardonyx, grandeur del’original », sans numéro ; f. 168, 169, 170 (gravures, sans numéros) ;f. 171, n. 39 de l’Inventaire des pièces composant la collection des des-sins ; f. 172, « Trésor de St. Marc, vase de Turquoise, grandeur del’original », signé par Luigi Zandomeneghi, n. 40 de l’Inventaire despièces composant la collection des dessins ; f. 173, « Trésor de St.Marc, vase de verre, grandeur de l’original », signé par LuigiZandomeneghi, n. 41 de l’Inventaire des pièces composant la collec-tion des dessins ; f. 174, « Trésor de St. Marc, vase de verre, gran-deur de l’original », signé par Luigi Zandomeneghi, n. 42 del’Inventaire des pièces composant la collection des dessins ; f. 175,

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ANNEXE

1. Lettre d’Aubin-Louis Millin à Jacopo Morelli, Reggio [de Calabre], 16 juin 1812. Venise, Biblioteca nazionale marciana, Archivio Morelli 116 (12622)

C’est à l’extrémité de la Calabre, aux limites de la GrandeGrèce, en face de la Sicile que je reçois monsieur et très cherConfrère votre réponse à la lettre dont j’avais chargé mon-sieur le sénateur comte de St Vallier. Mon voyage a été fati-guant, périlleux même, mais plein d’intérêt pour moi, je sou-haite que le retour se fasse aussi heureusement, je partiraile 27.Vous êtes de mon avis, il vaut mieux faire bien que fairepromptement et beaucoup ; on peut abandonner pour untemps ce qui est devant soi, si la vie se prolonge, on a l’occa-sion de revenir sur ces objets, si on la perd, ils sont inutiles àla mort ; mais on ne doit rien laisser derrière soi, voilà pour-quoi je n’ai point encore vu l’Italie Septentrionale, tandis queje parcours le département de Rome et les provinces duroyaume de Naples avec tant de soin. Le recueil de dessins que je rapporterai de ces contrées estimmense. Je recherche aussi les livres et les estampes locales,préparez vous à bien des importunités quand j’irai à Venise. Je rechercherai à Paris l’ouvrage de Bartholin De BibliothecaIncendio je ne le connais que par votre indication. Je regrette beaucoup ce que j’avais rassemblé sur Peiresc enLanguedoc et à Carpentras, j’avais plus de 400 pages denotices. Si j’ai le temps je ferai venir les manuscrits même àParis ce qui sera facile, mais je joins entre vos mains quoiqueje n’y sois pas obligé de les faire restituer, j’abhorre l’espritd’envahissement des grands établissements et la manie devouloir tout réunir dans les plus grandes capitales. Il faudraitautant dire que les princesses seules auront des ornements etque les bourgeoises seront sans parures.Cela ne m’empêchera donc pas de faire mon travail dans laBibliotheca Barthoricci mais il sera moins facile puisque je nepuis pas faire venir mes matériaux.J’ignore si vous m’avez envoyé à Paris l’opuscolo dell’Ange -loni sopra lo Studio delle Medaglie. Je n’en ai point d’avis etcependant chaque courrier m’apporte un paquet de meslettres.Je suis fâché que la lettre de notre excellent amiM. Cancellieri ne vous soit pas parvenu, je viens de lui écrire.Je voudrais vous envoyer séparé ma description du Carnaval

de Rome mais je ne veux pas la confier à la poste sans savoirsi elle vous arrivera franche. Si cette lettre vous parvient sansfrais comme je le pense, je me servirai du même moyen.Vous pouvez encore m’écrire de la manière indiquée dans madernière lettre, je ne reviendrai pas avant le mois denovembre et serai encore à Rome en octobre.Recevez l’assurance de mon respect et de mon attachement /A.-L. Millin

2. Lettre d’Aubin-Louis Millin à Jacopo Morelli, Naples, 24 août 1812. Venise, Biblioteca nazionale marciana,Archivio Morelli 116 (12622)

Respectable ami et très cher collègue, puisque ma lettre deReggio vous a été agréable, j’ose me flatter que vous recevrezavec plaisir celle-ci qui vous annonce mon heureux retour àNaples. J’ai rapporté beaucoup de notes et d’observations etun beau porte feuilles de dessins. J’ai traversé la Calabre danstous les sens et suis en état de fixer les idées sur ce qu’on ypeut encore remarquer.Je suis à Naples depuis trois semaines, j’y continue mesrecherches dans les cabinets et j’ai les dessins d’un grandnombre de monumens importants dans tous les genres.Surtout des peintures de l’époque de la Renaissance de l’artet des vases gréco-italiques. Je suis actuellement occupé de lacollection de la Reine, après demain je pars pour une excur-sion à l’émissaire du lac Fucin en passant par Monte Cassino,je reviendrai par Bénévent. Mon dessinateur m’accompagneainsi je ferai encore quelque récolte.Vous avez bien raison de dire que si je voulais tout donnersans choix, je n’aurais jamais fini. Il est certain que si je vou-lais mettre ensemble tout ce que j’ai recueilli et le publier,l’argent, les forces et les moyens me manqueraient. Personnene pourrait entreprendre cet ouvrage pour l’impression, etpresque personne ne pourrait l’acheter : aussi n’est pas monintention. Je publierai seulement mon voyage dans diffé-rentes parties de l’Italie, sans aucune planche, je le partageraien trois, le royaume de Naples, l’ancien état romain, l’ItalieSeptentrionale que je me réserve de voir.Quant aux matériaux de toute espèce que je recueille, ils sontparticulièrement pour moi, c’est un trésor que j’amasse pouravoir des objets de comparaison et d’études et qui pourrontde temps en temps me fournir des sujets de mémoire et dedissertation ou pour quelques ouvrages particuliers tels

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4. Lettre de Mauro Boni à Aubin-Louis Millin, Venise, 14 septembre 1813. Paris, BnF, fr. 24679

L’Abate Boni presenta al prestantissimo Signor CavaliereMillin l’abile disegnatore a puri contorni di cui si è servitocon soddisfazione il Cavaliere Cicognara. Ella può farne laprova; è accurato e onesto, e facilmente anderà bene inteso.Buon giorno le auguro, e lieto di nuove scoperte a compi-mento della sua vasta e utile idea. Sempre a’ suoi commandipieno di vera stima e grata riconoscenza ho l’onore di essere.Di casa Zustinian alle Zattere / Li 14 settembre [1813], alle 8della mattina. Suo affezionatissimo obbedientissimo servitore e amico

5. Lettre de Mauro Boni à Aubin-Louis Millin, Venise, 5 octobre 1813. Paris, BnF, fr. 24679

Amico carissimo, comme il-y-en-a peu. / Addio ! Quanto a me giocondissima fu la saggia ed amabile conviven-za di tre settimane con voi, riscontrando i preziosi monumen-ti dell’arte antica e rediviva in Venezia colla rapidità delvostro alacre ingegno, e pronta e sicura perspicacia dellevostre cognizioni; altrettanto mi è triste ed amarissimo ildistacco. Io vi accompagno con i voti fervidi della salute, chevi mantenga nella vostra ammirabile alacrità per compiere leillustrazioni delle spoglie opime d’arti italiane finora sfuggiteagli occhi lincei de’ più solenni antiquari da’ secoli per risve-larsi al saggio Millin, le quali vengono ad arricchire non cherisarcire il vostro museo più splendido di quelli di Attico eMecenate. Tra quelle vostre delizie voi dovevate, spero, qual-che istante di rimembranza a chi resta rapito da’ vostri talen-ti, schiavo dell’aureo vostro carattere, e più grato riconoscen-te alla vostra amicizia fino all’estremo respiro.Godo del bene di essereDal gabinetto memore, il di 5 ottobre 1813 / Molti saluti albravo e fido OstermannAffezionatissimo Servo e amico vero / Ab. Mauro Boni

6. Lettre de Mauro Boni à Aubin-Louis Millin,Venise, 6 octobre 1813. Paris, BnF, fr. 24679

Amico pregiatissimo / Ci siamo dimenticati di parlare dellaiscrizione in piombo a lettere di rilievo, che avete osservata in

qu’un supplément à mon ouvrage sur les vases peints. J’espère bien passer à Venise en retournant en France, maisj’y reviendrai encore l’année prochaine car je n’aurai vudans celle-ci que le Midi de l’Italie et il faudra donnerautant de temps au Nord, que de profit je ferai dans votreentretient combien j’aurais de plaisir à vous assurer person-nellement de mon estime et de mon sincère attachement.A. L. Millin

P. S. Il n’y a rien de changé dans la forme de notre corres-pondance jusqu’au terme où je quitterai Rome, et je ne man-querai pas de vous en prévenir.

3. Lettre de Mauro Boni à Aubin-Louis Millin, lettre non datée [1813 ?]. Paris, BnF, fr. 24679

Très Illustre, et très célèbre savant, Aggradisca il sentimentovivo e sincero della mia gratitudine, per l’onore e pel donoprezioso, che si è compiaciuta di farmi, col mezzo di S. E.Marescalchi Ministro, della lettera pittorica, illustrata dallaluce de’ suoi riflessi ed elogi, che non sapeva di meritare.Incoraggito da’ suoi stimoli ho scritto un breve tributo digrata riconoscenza all’illustre maestro, la cui memoria sem-per acerbam, semper honoratam, sic dii voluistis habebo !Per far conoscere specialmente quella squisita maniera chetenne egli ne’ suoi studi e nella sua arte d’insegnare. Si diffe-risce la stampa, per inserire alcune dissertazioni inedite su’monumenti scavati recentemente in Adria Euganea, e da luiillustrati ne’ giorni estremi di quella luce chiarissima. Nonmancherò di tributarglieli e farne parte a chi ha tanto stima-to ed onorato nelle opere, e nel Giornale Enciclopedico facee scorta vivissima di ogni letteratura. Io tengo carissime molte delle sue opere; tra le elementarimi mancano la mineralogie Homerique = e l’introduction àl’étude des médailles, che ho tanto cercato, ma sempre inva-no. Se la sua graziosità potesse favorirmela col mezzo di S.E. M. Marescalchi, egli supplirà il prezzo per me. Io le saròben grato; e bramo di corrispondere se posso ad ogni suocomando. Consideri in me un sincero veneratore de’ suoiesimi talenti, e studi inesausti di opere eruditissime a mezzodel gusto, e saggia critica. Il buon Dio lo feliciti con lungaprosperità. Mi creda per vera stima e grato animo a jamais. / Umiliss.oObb.mo. Servitore ab. Mauro Boni.

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fretta presso di me, della quale vi ho data la stampa per esa-minare se è antica genuina, e se ha qualche pregio. Vi pregodi dirmi il vostro parere, se mi consigliate ad acquistarla, e sesia conveniente di apprezzarla un Luigi, o possa valere dipiù. Fatemi grazia di consegnar il riscontro all’esibitore delpresente biglietto, che scrivo all’istante della partenza perPadova. Addio amico incomparabile: vi auguro ogni bene,ricordatevi di me presso l’amico, e credetemi tutto e sempre/ Vostro affezionatissimo obbedientissimo servitore e amico /Mauro Boni Di Casa Zustinian alle Zattere / 6 ottobre 1813

7. Lettre de Mauro Boni à Aubin-Louis Millin, Venise, 18 octobre 1813. Paris, BnF, fr. 24679

Preclarissimo Signore ed amico pregiatissimo / Venezia 18ottobre 1813.Mi affretto a darvi notizia del disegno del mosaico grande diTorcello, sperando che questa mia vi raggiunga a Milano. Ierimi portai sopra il luogo, e col mezzo di una scala grande hoesaminato diligentemente il lavoro già tutto segnato, ed ora siè messo a purgarlo caratterizzando bene le forme. Io sonostato contento del primo schizzo, gli ho fatto osservare alcuneavvertenze per ridurlo a perfezione, e spero che piacerà ancheagl’occhi lincei del Roscio in antiquaria e belle arti. Il lavoro ègrande, penoso assai a segnar tutto e preciso in tanta infinitàe strana varietà di figure e di simboli stravaganti oltre ognicredere. Quante cose non ha afferrate il dottissimo P. Costa -doni nella sua descrizione - T° 43 della raccolta calogeriana,che il disegno, e la vostra virtù avrà il merito di illustrare.Il bravo e diligente disegnatore ha impiegato tutta la settima-na a far lo schizzo di tutto l’insieme, e dovrà continuare tuttala corrente settimana a purgarlo sopra luogo stesso per ren-dere l’opera perfetta, e poi darà mano all’altro mosaico, ed aldisegno delle figure di marmo. Ho rimarcato che vi è un pic-colo basso rilievo greco che meritava anch’esso illustrazione;come notabili particolarità negli abiti e simboli degli apostolidell’abside sopra la cattedra del grande altare : per esempioS. Pietro dipinto nell’abito con tre chiavi in mano, una d’oro,e due di vivi colori forse a dimostrare il potere sui tre regnicelestium, terrestrium, et infernorum; sarebbe interessanteanche questo e così avrete in cinque disegni tutto l’importan-te della insigne Cattedrale di Torcello, riservata da ben diecisecoli al merito vostro per essere bene illustrata. Ho compe-

rato anche quella palla argentea, è di cesello a rilievo, e nonha nulla di particolare che meriti osservazione.Ora parliamo del prezzo dell’opera. Bisogna per la verità chevi faccia riflettere il disagio del povero artista nel fare il peno-so lavoro in isola deserta. Mi giura che il cattivo alloggio evitto stentato gli costa più di due franchi al giorno. Se sareteben soddisfatto del lavoro spero qualche compenso dallavostra generosità l’ho ricercato per quanto farebbe tutti cin-que i disegni che vi propongo. Mi lusingo che aggiungendo aicinquanta franchi d’acconto per il grande, con altri trenta sipotrà averli tutti cinque, compresa anche la mancia di buonagrazia. Attendo pronto riscontro per mia regola; spero dipotervi spedire tutto nella ventura settimana e pria che termi-ni il mese possiate avere tutto a Milano da portare con voi aParigi, se gli eventi non affrettano il vostro ritorno alla Patria.Reso conto delle mie attenzioni per servirvi passo al piaceredi affermarvi la somma stima che vi professo, e la indelebilegratitudine alla vostra amorevole benevolenza, che l’ottimovostro carattere ha lasciato scolpito nel mio cuore. Io sonotutto a’ vostri cari e pregiati comandi, e voi avete tutto ildiritto di valervi di me quanto vale la mia limitata sufficienza.Addio egregio amico. Il ciel vi prosperi sempre : Bene, diu,vale a vantaggio delle lettere ed arti, a conforto degli amici,tra’ quali spero di aver oggimai il luogo non ultimo nel vostrocuore, nel mio già siete Antistes omnibus e meis amicis. Molti saluti al bravo Ostermann, ed a Parigi mille ossequi algran ministro Marescalchi. Sto il bene di essere. / Vostroaffez.mo obblig.mo Servitore ab. Mauro Boni. Amico vero.

8. Lettre de Mauro Boni à Aubin-Louis Millin, Venise, 30 octobre 1813. Paris, BnF, fr. 24679

Martedì 27 andante, ebbi la prima vostra giocondissima, oraro e prestante tra i miei più cari amici; ieri la risposta allamia, che ben calcolai dovesse prevenire il vostro arrivo aMilano.Heureusement, oggi alle quattro pomeridiane il diligente ebravo Zandomeneghi, che vi riverisce distintamente con gra-titudine, termina nel mio studiolo sotto a’ miei occhi di pur-gare i quattro disegni che ho creduto bene di far eseguire,perché nulla abbiate a bramare di quanto è interessante aTorcello, e fatto l’involto difeso con tela incerata da ogniingiuria, volo subito a consegnarlo al Cav.re Mr. Dupont,perché vi giungano a posta corrente. La palla ossia l’abside

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Su quelli che ricevete abbiamo rilevato delle singolarità nonavvertite o vedute male dal chiarissimo P. Costadoni. Plusvident oculi quam oculus, per quanto un occhio sia perspica-ce : ma oggi non ho tempo d’indicarvele, e’ il disegno esattis-simo ve le fa scorgere meglio che io non saprei dire voi.Voi avete il bene del conversare di Madama Albrizzi Isabellaanche a Milano, le cui grazie e talenti, comme il-y-en-a peu,io pregio quanto i suoi più fervidi adoratori. Sono sensibile egrato della memoria in cui si degna di avermi; vous la regret-terez bientôt ; e noi ne saremo lieti. Ho eseguite le vostre commissioni con Monsignor Patriarcaebbro del vostro egregio carattere, che vi saluta cordialissi-mamente. Ho già pronti i libretti che bramate, resta a trovar-vi le memorie letterario-bibliografiche del Valvassore : atten-do le altre vostre commissioni. Sentirò Fuchs per il girodel dinaro quando sarà di ritorno da Firenze. Io vi scrivo ita-liano che ben conoscete, voi seguitate a scri vermi franceseche intendo e mi diletta; così si può scrivere a penna volante,e ciascuno sa meglio dire i suoi sentimenti nella sua linguanatia e schietta : la mia vi assicura che siete l’amico più ama-bile, e ch’io vi sono à jamais.Dallo studiolo sulle Zattere di casa Zustinian /Affezionatisimo obbligatissimo / Vostro Boni.

9. Lettre de Mauro Boni à Aubin-Louis Millin, Venise, 2 novembre 1813. Paris, BnF, Fr. 24679

Venezia, 2 novembre 1813 / Che tempi orribili ! mi fan sovve-nire l’epitaffio nel florilegio greco di Lico tradotto già quan-do mi bolliva l’estro giovanile :

Non in terra, ma in mar Lico finio.Sciolse d’Egina, e in un, ahi ! fato rio!,Vita e nave perdè. Io avel di LicoIl nome e’ il fier destin ti mostro, e dico :Quando tramonta de’ Capretti il segnoNon affidare al mar il fragil legno.

S. Simone squarciavele sempre burascoso quest’anno ci hadato un ottavario di venti, pioggia, tuoni, fulmini, grandini,procelle di mare e d’aria, ed oggi torna la pioggia e freddocrudelissimo di Gennaio.Tuttavia col bravo disegnatore siamo stati tranquillamenteoccupati al lavoro per voi. Sabbato a notte finiti i quattrodisegni di Torcello che avrete ricevuti, e vi promisi per oggi idue di Grado. Ma era impossibile in tale ristrettezza di farli

sopra la cattedra non merita di essere figurata, voi mi scrive-te, ed io ho già prevenuto il vostro giudizio non facendoladisegnare, perché tutto si ha nel grande anche le quattromaniere di benedire degli apostoli, ed è lo stile medesimodell’artefice medio ; poiché nel grande mosaico pare di scor-gere la mano di tre artefici differenti : il 1° abasso più rozzo,il terzo più castigato e corretto che ha disegnato il paradiso,ed il medio in alto al terzo inferiore, ma migliore del primo.Ho raccomandato a Zandomeneghi di conservare il carattereche li distingue, pare che sia riuscito a qualche professore edilettante di buon gusto, che ne ha ammirato i disegni chev’invio. Bramo che tali siano giudicati anche dall’occhio linceo e per-spicace di voi che a me siete il Roscio dell’arte. Mi sonopreso la libertà di non omettere il piccolo basso rilievo dimarmo greco statuario negletto da voi; ma riveduto a mepiacque; mi pare il trono della fortuna sul carro alato, uno viè ridente per averla afferrata pel ciuffo, l’altro dolente perchégli fugge, la donna è disperata perché gli è fuggita. Voi ridetedel mio sogno; ma benché sogni mi piace, perché fu donodell’amica l’aver prevenuto di un mese il termine della nostravilleggiatura, per farmi tornar a Venezia nel giorno stesso delvostro arrivo, e condurci a mirar il Trono a Torcello stringen-do il nodo dell’angelica unione de’ nostri animi, che sia,spero, indelebile finchè avremo un filo di vita. Amico amabi-lissimo, permettete uno sfogo al mio spirito da tre anniabbattuto per la perdita amarissima dell’illustre mio Padre eMaestro di amorosa benevolenza per dieci lustri, il saggio esanto amico Luigi Lanzi, che ha lasciato un gran vuoto nelmio spirito, troncando il mio più giocondo carteggio lettera-rio di otto lustri ogni corso di posta, e di cui tengo un tesorodi mille lettere erudite. Or la buona sorte amica mi porge invoi il compenso di un altro Luigi pari in dottrina e caratteredi saggezza, di cui confido meritarmi una pari benevolenza.Torno ai disegni. Se il lungo e penoso lavoro si fosse potutoaccelerare, ricevereste insieme con questi anche il lucido de’miei, cioè del pavimento colle varie iscrizioni e dell’abside opalla antichissima di Grado del Sec° VI. e VII. primo monu-mento dell’arti venete rinascenti in questo felice estuarioinsieme colla Repubblica Veneta unico esempio in Terra dellabeata dalla gran mente del divino Platone ideata, ma qui sologoduta colla felicità de’ popoli per quattordici secoli – ah!con dolor mi rimembra! Domani l’artefice darà mano a luci-darveli esattamente, e spero di poterli spedire mercoledìprossimo 3 novembre.

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simili agli altri. Fortunatamente aveva la copia abbozzata delmio originale; in tre giorni di lavoro è riuscito di ridurli per-fettamente simili, con tutte le iscrizioni, ed un ristretto dellenotizie da me notate per la intelligenza a gustarli forse più,che se li aveste osservati di volo cogli occhi vostri. Io li hosempre guardati con gelosia come un privativo tesoro, nèmai ho voluto concedere copia ad altri. Solo a voi, amicoprestantissimo, perché degno delle vostre illustrazioni ode-poriche; singolare per le tante iscrizioni di nomi e professio-ni, che fanno la storia gradense di quell’epoca al secolo VI.La greca esige maturo riflesso : alcune voci mi paiono malespresse dall’artefice inesperto, forse ignaro del greco.Sentirò il vostro parere, e gli schiarimenti ci daran tenia dilettere erudite.Mi affretto a spedirveli, giacchè M. le Chev.r Dupont mi assi-cura che partirete da Milano a’ nove del corrente, onde vigiungano pria che il vento chiuda le vie. Se l’adorabile N. D.Isabella è ancora costì avete l’opportunità di farmi parveni-re sicuri i vostri riscontri, e le nuove commissioni, e la sommadi denaro che vi piacerà destinare al disegnatore che vi riveri-sce, per l’opera fatta e da farsi. Ve lo raccomando, è merite-vole. La Dama è tanto gentile e umana, che oso lusingarminon le spiacerà di fare a voi ed a me questa grazia; colleattrattive della vostra persuasiva rendetela più benevolaanche al suo servo che la ossequia con tutto il rispetto.Avrete certo visitate a Monza le opere de’ Longobardi e dellacelebre Regina Teodolinda, ed a Pavia in S. Michele; allaCertosa i monumenti viscontei sforzeschi ecc. Avete veduto aPavia il tesoro delle rarità che possiede il Marchese LuigiMalaspina di cui vi parlai. Vi siete ricordato di me ? È unodei più illustri ornamenti dell’arti italiane, che io conosca, emi degna del suo fervore.Non mi avete mai detto nulla sulla lamina incisa a caratteri,forse del genere della Panormitana, di cui vi diedi la stampa,e dicesi che era del museo d’Apostolo Zeno; io ne ho un’altradi tal fatta, nè nulla so scorgeva di proposito. Addio.Ricordatevi di chi si pregia di essere / Tutto VostroAffezionatissimo / M. Boni.

10. Lettre d’Aubin-Louis Millin à Jacopo Morelli, Paris, 13 juin 1814. Venise, Biblioteca nazionale Marciana,Archivio Morelli 116 (12622)

Combien j’ai été satisfait très respectable ami de recevoir de

vos nouvelles. J’ai cru que ce maudit blocus ne finirait jamais.Enfin cette terrible et insupportable guerre est terminée, etnous pourrons reprendre notre correspondance. Je n’ai pointmanqué de donner aussitôt de vos nouvelles à vos amisBarbier, Chardon de la Rochette, Boissonade, Courier, Sacyet C. Elles leur ont fait, comme à moi, un très grand plaisir.Nous sommes tous contents de vous savoir bien-portant eten état de reprendre vos travaux. Les miens n’ont point été interrompus mais le temps n’étaitpas favorable pour les publier. Aussi, m’en suis-je tenu à pré-parer ce qui doit voir le jour et à publier quelques disserta-tions dans le magasin encyclopédique.La difficulté est de vous les faire parvenir. J’espère que leséjour de l’excellent comte Marescalchi dans les états del’empereur d’Autriche nous sera favorable. J’ai donné unextrait de quelques lettres que j’avais adressées à l’Institutpendant mon voyage. Ce n’est qu’un itinéraire mais on ytrouve l’indication des recherches que j’ai faites et des des-sins que j’ai fait exécuter, et enfin une notice de ce qu’onpeut attendre de mon entreprise. J’ai fait aussi imprimer unedissertation sur une médaille très curieuse de l’antique Sirisque j’ai trouvée pendant mon séjour à Tarente. Je la réim -prime actuellement chez Didot pour lui donner une formeplus élégante vous l’aurez. Vous trouverez ci-joint un autre article également inséré dansle même journal. Ce sont des observations sur l’arc d’Ain enSavoie.Je joins encore une seconde édition que j’ai fait faire avec destypes plus élégants de ma description d’un sceau de Louis XII (1). Si vous voulez savoir quels sont actuellement les ouvragesque je prépare, je vous dirai que je m’occupe de la descrip-tion d’environ deux cent pierres gravées dont les estampes decent cinquante sont déjà faites et le texte presque achevé ;ainsi vers la fin du mois prochain j’en pourrai commencerl’impression.Si le magasin vous est parvenu, vous aurez pu lire une petitenotice de deux vases peints qui ont été trouvés dans des tom-beaux qu’on a récemment ouverts à Canosa. Ce sont certai-nement les plus beaux et les plus curieux qui aient jamais étévus. J’en ai des superbes dessins de la grandeur de l’original.On doit m’apporter demain la première planche qui est déjàgravée. Comme il y en aura à-peu-près dix, toutes in folio, duformat du vase Poniatowsky, et deux sont doubles, il fautbien six mois pour que la gravure soit terminée. J’espère quel’impression le sera aussi dans le même temps.

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Comme vous avez mes lettres, il est inutile de répéter lestitres des ouvrages.Je vous prie de me dire comment je pourrai m’y prendrepour vous envoyer des petites dissertations que je désireraisde temps en temps vous adresser, à fin de vous rappeler monsouvenir d’une manière qui vous soit plus agréable. M. Fuchsva surement avoir des relations plus actives avec Paris, et ilpourra être notre intermédiaire. Je joins pourtant dans cepaquet, sans savoir quand et comment il vous parviendra,quelques petits écrits – un résumé de mon voyage danslequel je rends compte de mes recherches, et j’indique à-peu-près les sujets des dessins que j’ai rassemblés – une disserta-tion sur un beau sceau d’or de notre Louis XII – une autredissertation sur une très belle médaille de Siris en Lucanie –des observations sur le monument sépulcral de Companus àAix en Savoie.Je compte bientôt publier des ouvrages plus importants dontles gravures sont en train, ou même déjà terminées. Les prin-cipaux sont un recueil d’environ deux cents pierres gravéesinédites, et les deux beaux vases peints qui ont été récem-ment découverts à Canosa. Je continue toujours la rédactionde mon voyage, et j’espère vous demander souvent des avis siles communications deviennent plus faciles. Je désire extrê-mement avoir la réponse de votre aimable compatriote faite àmon confrère Châteaubriant, membre nommé à l’Institut, illui manque encore ses bulles. Donnez-moi, je vous prie, des nouvelles du respectable etaimable patriarche et de Monsieur Aglietti. J’espère que per-sonne n’est tourmenté et inquiété dans votre ville, et que leretour de la paix lui rendra si non son ancien gouvernement,qui lui donnait tant de splendeur, au moins le commerce quiramènera la richesse et l’abondance. Je n’en parle jamais sans intérêt, et je me rappelle toujoursavec délices le temps que j’y ai passé, et les personnes estima-bles qui ont bien voulu m’accorder leur amitié. J’ai toujoursprésent le rivage et le pont des Zattere, et la petite viergedont j’ai la gravure dans ma chambre, me rappelle celle quiest à la tête du lit d’un de mes meilleurs amis. J’aime à pren-dre regarder les dissertations nombreuses que je tiens de sacomplaisance les soins qu’il a mis à faire me procurer les des-sins de Torcello et me les les font regarder avec plus d’intérêt. Saluez, je vous prie de ma part M. Cicognara ; les change-ments qui sont survenus doivent lui avoir fait du tort ; il aurapeut-être de la peine à se faire payer les deux derniers tiersde la somme que le roi lui avait assignée. Son second volume

Je donne outre cela, tous les matins quatre ou cinq heures àla rédaction de mon voyage ; mais je n’espère pas en pouvoircommencer l’impression avant une année.Votre lettre a paru dans le magasin, et j’ai vos vingt-cinqexemplaires. M. Fuchs doit avoir un correspondant à Paris. Je pourrai luiremettre ce qu’il est impossible d’envoyer ; concertez-vousavec lui sur cet objet.Ecrivez-moi toutes les fois que vous le pouvez. Soyez per -suadé que je ne vous oublierais pas toutes les fois que jepourrais vous envoyer quelques monographies, car je saiscombien vous en êtes friands et comptez pour la vie sur matendre amitié. A. L. Millin. (1) Je n’ai pu envoyer cette fois que le voyage, les autres bro-chures arriveront par d’autres occasions.

11. Projet de lettre d’Aubin-Louis Millin à Mauro Boni,Paris, 14 juin 1814. Paris, BnF, fr. 24679

Combien j’ai eu de regret, cher et respectable ami, lorsqu’enrecevant la lettre de Fuchs du 30 avril, j’en y ai rien trouvé devous. Vous devez cependant avoir eu les lettres que je vous aiécrites puisque celle de M. Fuchs lui est parvenue. J’espèreque par l’entremise de l’excellent comte Marescalchi, notrecorrespondance deviendra plus active.Je vois par la lettre de M. Fuchs, qu’il vous a remis 30 francsque vous aviez avancé pour moi au dessinateur ; mais j’avaisdéjà compté moi-même cette somme à Mad. Albrizzi à Milanpour vous la remettre, et elle s’est surement acquitté de lacommission dont elle avait bien voulue se charger. Si cettesomme a été payée deux fois, peu importe ; les trente francsserviront pour l’acquisition des livres que j’avais pris laliberté de vous demander ; et vous pouvez également vousfaire toujours acquitter par M. Fuchs les predites sommesque vous dépenseriez pour moi ; parce que je les rétabliraiselon nos conventions, au correspondant de M. Fuchs, et àson défaut, j’écrirai à madame Tréveze, parce que je pourraiégalement le faire rembourser par MM. de Lenart qui m’a-vaient donné mes lettres de crédit sur lui. Ainsi, cher Boni,ne manquez pas de me faire dessiner la palla de St-Marc, sielle ne l’est pas encore, et de m’acquérir les ouvrages de labibliographie que je vous avez demandés dans ma lettre deMilan, pour les quels je désire principalement le recueilbibliographique de Valvasserre

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est-il prêt à paraître, je n’ai pas encore pu faire venir le pre-mier ; actuellement que la circulation est reouverte ; je pour-rai me le procurer.Ecrivez-moi donc de grâce, et recevez avec plaisir l’assuranceque je vous donne de la constance de mon amitié. A. L. Millin

12. Lettre d’Aubin-Louis Millin à Mauro Boni, Paris, 21 août 1814 (copie). Paris, BnF, fr. 24679

Monsieur Fuchs me mande, très cher ami, que vous n’avezpas reçu le premier paquet que je vous avais adressé. J’espèreau moins celui que je vous ai envoyé par l’accueillant comteMarescalchi, vous a été remis. J’attends de vos nouvellespour vous faire un autre envoi. Ecrivez-moi directement parla poste, si vous n’avez pas d’autres moyens ; car je m’impa-tiente beaucoup de ne pas avoir de vos nouvelles. Vous avezeu la bonté de vous charger de quelques acquisitions, et ausside faire dessiner la palla de San Marco, enfin répondez-moide grâce aux lettre que vous avez reçues, afin que nous puis-sions reprendre le fil de notre correspondance. Ne manquezpas aussi de profiter des occasions qui peuvent se présenter,et de m’en indiquer pour le retour.Je me servirai aussi de la voix de M. Allais correspondant deM. Fuchs. Je ne négligerai aucune occasion pour vous tenirau courant aussitôt que vous m’aurez donné signe de vie.Je désire extrêmement savoir ce qui se passe à Venise, nonpas par curiosité, pour suivre les événements politiques, maispar l’intérêt que je prends aux personnes qui ont bien voulum’accueillir. Qu’est devenu le respectable patriarche ? N’a-t-il point été inquiété? Dites-moi, comment se porte Madame Albrizzi, Benson,Monsieur le docteur Aglietti, le chevalier Rangoni, etc. Jedésire faire l’envoi d’une dissertation à M. le comte à Udine.Je pense bien qu’en vous l’adressant, il vous sera facile de merendre service. Recevez l’assurance de ma constante et sincè-re amitié. / A.L. Millin

13. Lettre d’Aubin-Louis Millin à Jacopo Morelli, Paris, 27 août 1814. Venise, Biblioteca nazionale Marciana,Archivio Morelli 116 (=12622)

Je pense bien, cher et respectable ami que mon dernier envoiqui contenait la seconde édition de ma dissertation sur un

sceau de notre roi Louis XII vous est parvenu par le comteMarescalchi à qui je l’ai adressé. Vous m’avez fait demanderdepuis par notre ami Cardon de la Rochette les bonnesfeuilles de votre lettre sur une inscription du palais Grimani.Je profite du départ de M. de Mocenigo pour vous l’adresser.J’aurais voulu pouvoir y joindre autre chose ; mais j’ai craintavec raison de trop grossir le paquet. Je chercherai pour celaune autre occasion. Donnez-moi quelque fois de vos nou-velles ; écrivez-moi directement par la poste plutôt que dem’en laisser manquer ; car vous savez combien elles me fontdu plaisir, et à quel point je vous suis attaché.Je continue toujours mes travaux et principalement la rédac-tion de mon voyage. Je poursuivrai ainsi jusqu’au printempsde l’année prochaine, et peut-être retournerai-je dans lahaute Italie, pour corriger, augmenter, etc. mon ouvrage surles lieux. Je serai bien content, si je puis aller passe cinq à sixjours à Venise. Ne doutez point que je me prendrai tous lesmoyens pour aller vous renouveler moi-même, si je le puis,l’assurance de ma constante et sincère amitié. A. L. Millin.

14. Lettre de Mauro Boni à Aubin-Louis Millin, Mirano, 12 octobre 1814. Paris, BnF, fr. 24679

Heureusement, mon cher et respectable et bon ami, compiesil’anno del memorabile cataclisma, al cui aspetto tacque laterra attonita, che dall’alto aspetta i gran destini dellaBilancia d’Europa, e rompe finalmente il nostro ingrato silen-zio. Ai primi dell’ottobre prossimo passato, ebbi il bene(dolce memoria!) di compiere ed ammirare i vostri talentinella rapidità di afferrare e discernere il pregio distinto degliantichi monumenti, che abbondano in questa città singolare,e in questa isola felice asilo delle arti qui rifugiate dal guastobarbarico dell’Italia e di Bisanzio. Dopo la scelta dei più pre-stanti o inosservati o non ben conosciuti, de’ quali vi spedii idisegni a Milano nel principio di novembre, non vidi mai unapice dei vostri sospiratissimi caratteri: solo in giugno ebbivostri saluti da Mr. Fuchs.Quante volte appena sciolto ilblocco di sei mesi presi la penna per scrivervi? Mi trattenne iltimore d’esservi molesto, e l’incertezza delle vostre prosperitànella nuova felicità di Parigi. Finalmente a’ primi del correntedue vostre lettere mi vennero simultanee a rallegrare quest’o-zio beato, la data 14 giugno speditami dal Signor ConteMarescalchi Gov.re di Parma, e la 27 agosto rimessami daMad.a Albrizzi Teotochi. Quella che da Milano mi dirigiste

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Venezia dal secolo VI fino al principio del XIII. Io le annunziaiall’Ateneo con meraviglia di tutti gli eruditi, e si è fatto contonelle Relazioni stampate che vi spedirò a primo incontro. Orami occupo giocondamente nell’ozio delle villa ad illustrarli, neho già fatti eseguir i disegni esattissimi per pubblicarli, e da -ranno spero nuova luce per dimostrare la origine ed i progres-si delle incisioni e delle stampe ancora involte nella caligine dipresunzioni e di partiti. Mi farà un gran regalo mandandomiil disegno esatto anche del suo per farne l’esame al confronto.Unitamente a nielli ed altri disegni importantissimi ha fattol’acquisto di 13 primizie della zecca veneta cioè delle monetede’ primi Tribuni di Grado de’ secoli V e VI de’ primi dogi diEraclea del VII e VIII, di Malacco, e di Rialto del IX affattosimili alla celebre di Carlo M. Tarvisii , le quali esaminate finoallo scrupolo dai più critici eruditi sono giudicate incontrasta-bili, e fan fede a Cassiodoro, che nelle lettere a’ primi Tribunidell’Isole Venete nomina le loro monete; il qual testo hamesso alla tortura i critici che non conoscevano mone te vene-te di tanta antichità; ed ora viene dimostrato col fatto. Per questa prima eccovi abbastanza ricambiato. Al mio ritor-no in città farò i complimenti a Madame Albrizzi, e Michielidalla quale mi procurerò la lettera contro Chataubriant, ed a’Signor Aglietti, Cicognara ecc. Qui niuno ha sofferto nelnuovo ordine provvisorio, in attenzione di migliori destiniconvenienti all’indole egregia della Nazione e alla importanzapolitica e commerciale di questo stato per tanti secoli flori-dissimo. Ma Monsignor Bonsignori, stato indolente all’arrivodel sommo Pontefice in Italia, ora è a Milano fuor dalla sededi Faenza e della amministrazione di questa. Mr. Cicognara èconfermato Presidente dell’accademia delle arti e dall’ateneotravaglia indefesso per dar il Tomo II. Ho scritto a Brescia che sia diretto al vostro nome un florile-gio di epigrammi di nuovo genere elegantissimi opera dell’in-signe maestro in Latinità Stefano Antonio Morcelli l’autorede stylo veterum inscriptionum. Questo nuovo ha per titolo= Electorum libri II. Eruditioni Epheborum Lycei Clarensis.Brixiae ex officina Bettoniana di cui parlano con sommiencomi i fogli letterari e merita un bell’articolo nel vostroclassico Magazzino. Ora sono a luce i suoi Sermones planeHoratiani, e si è pubblicato il progetto di associazione allasua Aphrica saeva sarà in III vol. In 4°, capo d’opera del granMorcelli mio Maestro e Padre pari a Lanzi. Vi raccomandodi procurare a quest’opera molti associati, e di proteggerla,degnissima del vostro favore. Credetemi pieno di stima, digratitudine e di vera attenzione. / Mauro Boni

ne’ plichi a Mr. Dupont furono disperse al vento con lui, chealla nuova del fatto di Lipsia in un baleno disparve, e volò aChambery. E fu gran danno, perché sarebbero stati eseguitigli altri disegni nel blocco con risparmio e quiete, quando gliartisti languivano senza travaglio. Al mio ritorno in Venezia a’primi di ottobre farò dar mano all’opera da altro disegnatorepiù esperto, perché il Zandomenichi sarà stipendiato in assi-duo e lungo lavoro incompatibile col nostro. Vi avrei ancheservito dei libri se non fossero smarrite le commissioni, cheavrete la bontà di ripetere.Quanto ai nostri conti or io vi resto debitore di trenta franchiavuti già da Mr. Fuchs per saldo al Zandomenichi, che tutta-via spera qualche cosa a titolo di regalo dalla vostra genero-sità per l’opera ben fatta e le cose di più : poi ebbi in giugnodal Sig. Tommaso Soranzo da voi consegnati in Milano aMadama Albrizzi, che tengo a vostra disposizione.Ora con prosperi auspici avviamo il nostro commercio lette-rario.Ma prima conviene cercar un mezzo sollecito, e possibilmen-te meno dispendioso per lettere trasmesse delle vostre produ-zioni, ed altre di letteratura ed arti che mi saranno gratissimeperché le spese di posta e dazi ora sono all’eccesso, e lefinanze mie ora sono più limitate, e i mezzi particolari nonsaranno così facili.Quanto alle discrete somme che avrò da esborsare per dise-gni e libri, il Signor Fuchs non ha difficoltà di somministrar-le, e voi le passerete così al suo corrispondente.Io bramo con somma impazienza le opere importantissimeche vi affrettate a pubblicare. Quanti tesori ancor restanoignoti d’Italia, che voi togliete all’oblio? Frutti delle linceeindagini de’ vostri viaggi letterati. Io ne gusto già un saggioprezioso, che sarà da pochi valutato quanto egli merita nelpiccolo extrait del vostro viaggio letto nel Magasin, poi nellacopia da voi favoritami. Alla pag. 7 voi ci date la notizia di untrittico con figure in bronzo rilevate su fondo nero, come gliantichi rilievi egizi, portato da Terra Santa a Susa dal CavalierBonifaccio; e veramente è una nuova scoperta pregevolissi-ma; ma io sono ricco di tre simili trittici, ed in pari lavorododici altre laminette solitarie, tutte da me acquistate ne’mesi del blocco con altre primizie dell’arti venete state sepol-te e inosservate in antichi musei di Veneti Patrizi. Questelaminette ben esaminate hanno il fondo profondamente trat-teggiato a bulino, e annerito poi con encrosto, cioè encaustoniello e le figure rilevate di bronzo, e tutti hanno la data del-l’anno e luogo, e vari anche il nome dell’artefice; tutti fatti in

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15. Lettre d’Aubin-Louis Millin à Jacopo Morelli, Paris, Bibliothèque du roi, 29 août 1815. Venise, Bibliotecanazionale Marciana, Archivio Morelli 116 (=12622)

Ami cher et précieux, Enfin je puis vous écrire, il est inutilede rappeler ce qui a interrompu ma correspondance, je mefélicite de la vous renouer et je saisirai toutes les occasionsqui se présenteront pour la continuer comme par le passé.Je profite aujourd’hui du départ d’une caisse adressée àM. Allais pour vous écrire et vous envoyer différents objetsrelatifs à nos études.Je n’ai rien publié depuis la médaille de Sérès qu’une petitedissertation sur un vase de Tarente les circonstances ont ététrop défavorables et ne sont pas plus propices, j’ai un grandnombre de gravures qui sont terminées, le texte est fait maiscomment hasarder l’impression ?Je vous envoie avec ma dissertation sur le vase de Tarente

une de ces gravures que vous avez désirées celle de la grandemosaïque de Torcello, je vous prie de la garder, peu m’impor-te qu’elle soit vue mais je ne voudrais pas qu’elle fut copiéeou réduite avant sa publication. (2 Vous avez les mémoires del’académie de Turin à l’exception du dernier volume qu’onretient toujours prisonnier dans une des salles de la biblio-thèque voici un petit mémoire de votre ami qui y a été inséré.Je joins une ode de Sapho avec des observations de M. Egerton.Voici encore un des deux bas-reliefs qui sont dans le palaisGrimani. Faites-moi le plaisir de la confronter avec l’originalet de me dire ce que tient le jeune homme qui est appuyé surla colonne. C’est probablement le manche de l’instrumentdont l’extrémité est en terre ou l’autre extrémité ne serait-cepas un flambeau renversé, vous me ferez aussi un grand plai-sir si vous me donnez des détails sur l’origine de ces bas-reliefs, le lieu où ils ont été trouvés. Vous aurez bientôt l’autre, il est gravé mais je ne puis enavoir des épreuves avant le départ de la caisse.Je comptais faire paraître mes monuments séparément, c’est-à-dire, la mosaïque et ce qui appartient à Torcello ensemble,les vases de Canosa ensemble, je le veux encore mais je suisépuisé pour les dépenses, les alliés nous abîment, leur cou-vert est bien cher.Je voudrais mettre à l’impression au mois de décembre lapartie de mon voyage qui traite de l’Italie supérieure, elle for-mera trois volumes, ils sont finis, je n’ai plus que revoir, ajou-ter, corriger, il faut espérer qu’à cette époque l’horizon seraplus clair.

On va vendre les livres de notre ami La Rochette, ne croyezpas que je n’aie pas été sensible comme je le devais à saperte. Je le connaissais aussi depuis 25 ans, il venait souventchez moi. Je l’ai toujours soutenu, défendu et si je vous en aiparlé librement ç’a été à cause de mes relations intimes, etencore le mal n’étant pas aussi grand qu’on se plaisait à ledire pour l’écarter de tout. Si on lui avait donné l’aisanceque des travaux et ses talents lui méritaient, sa manière devivre eût reçu une autre modification. Il est l’une des pertesles plus grandes que la France littéraire ait faite depuisquelques temps.Je savais bien que notre respectable Marini ne reverraitjamais Rome. J’attends une notice sur lui pour en faireusage. M. Parrisot n’a pas encore tenu parole pour LaRochette, j’espère toujours en sa promesse.Ecrivez-moi promptement, voici le mauvais temps qui arrivepour votre santé, ménagez-vous. Adieu très cher, votre devous confrère / A.-L. Millin

16. Lettre d’Aubin-Louis Millin à Jacopo Morelli, Paris, 3 octobre 1815. Venise, Biblioteca nazionaleMarciana, Archivio Morelli 116 (=12622)

Vous devez avoir reçu, très cher ami, le paquet que je vousai envoyé dans une caisse adressée à M. Fuchs par M. Allaiset la lettre qui y était jointe.Je n’ai rien à ajouter à ce qu’elle contient, ma mythologiehomérique n’a pas encore paru, et les circonstances sont denature à ce que je ne me presse pas. Mon paquet contientaussi la mosaïque de Torcello et un bas relief du palaisGrimani.Pour vous donner une nouvelle agréable, vous saurez quevos chevaux sont descendus. Vos émaux cuits (?) sont prêtset les grand Jupiter les couvrira. J’espère cette fois de saredoutable égide. Je n’attends que l’ordre de mon souverainpour les livrer et comme la chose me paraît convenue vousles recevrez bientôt. Le lion de S. Marc a été brisé, j’en suisfâché. Je vois avec peine la France privé de monumensqu’elle avait conquis mais quelque part qu’ils soient je désirequ’ils se conservent. Je ne veux pas cependant que cette lettre parte vide, j’y jointma dissertation tirée des mémoires de l’Académie de Turinqui paroitront je ne sais quand et deux autres qui sont entreautres du magasin, cela sent bien la pénurie.

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l’illustrazione, e se voi non me lo scrivete.Quanto al bassorilievo Grimani, di cui mi avete mandato l’in-taglio in rame, il giovane appoggiato alla colonna tiene inmano un mezzo di mazza o di bastone, che va unito all’altrogiovine in piedi aderente alla colonna, col pileo frigio intesta; né vi è alcun indizio che li due pezzi spezzati formasse-ro una fiaccola. La tradizione vocale delle persone di casa fache vi siano rappresentati Pilade e Oreste; né io ho comododi verificare ciò.Donde il marmo sia provenuto, non v’è notizia alcuna aven-done il Patriarca d’Aquileia Giovanni Grimani, che raccolsequelle anticaglie, avute da Roma, da Atene e da tutta laGrecia, ed anche da Costantinopoli, come scrisse FrancescoSansovino nella descrizione di Venezia, stampata nel 1581

(Libro VIII p. 138), quando il Grimani ancora viveva. DelMuseo Grimani potete vedere la mia Notizia di Opere diDisegno ec. già stampata ma sopra di esse vi sarebbe da fareun gran libro a parte.Vi ho già scritto che acquisterei alcune opere del vostroCataloghetto che vi ho indicate, e il libro sul vaso di Canosa;ed avrei caro che mi mandasse il catalogo della Bibllioteca diMacarty che non so come acquistare : inoltre se mai si potes-se avere l’opera imperfetta del signor Van Praet (che vi pregodi riverire in mio nome) sopra le stampe prime del secolo XV,mi sarebbe carissima. Io pagherò tutto al ricevere li libriprontamente alla persona che mi indicherete; e di ciò ognunosia certo e persuasissimo si farebbe un grande torto allamemoria di M. de la Rochette, se non si scrivesse una notiziaintorno a lui, che fu uno de’ principali Grecisti della Francia;e dei costumi suoi negli ultimi tempi di sua vita non v’è biso-gno di troppo scrivere, essendo già bene noti. Sino dal principio di questo secolo ha avuto corrispondenzameco per lettere, mi amava assai ed ho ricevuto da lui sempretestimonianze di buon animo e obbligami verso di me : econservo molte sue lettere.Anche Marini merita assolutamente un elogio anzi una bellanotizia de’ suoi studi : egli mi era insino amico ed io a lui davari anni, e nel libro dei Papiri p. 368 per il suo bel cuorescrisse anche troppo bene di me. Io credo di avere o di cono-scere tutte le sue opere, cioè i Papiri diplomatici raccolti eillustrati, Roma 1805, f° - Iscrizioni antiche della Villa Albani,Roma 1785 - Lettera sopra un’Ara antica, Roma 1786. 4° -Osservazioni sopra un’antica pergamena, Roma 1779, 4° -Lettera al P. Abate Rosini sopra due frammenti d’inscrizioninelle Terme di Tito, ivi 1790 - Archiatri Pontifizi ec. Roma

Je vous prie de vouloir bien rendre le billet joint à M. Fuchs.Vous connaissez mon respect pour vous et mon amitié, j’at-tends impatiemment de vos nouvelles / A. L. Millin.

17. Lettre de Jacopo Morelli à Aubin-Louis Millin, Venise, 20 janvier 1816. Paris, BnF, fr. 24651

Amico Pregiatissimo e Collega / Venezia 20 Gennaio 1816

Addì 25 ottobre / Ho finalmente ricevuto il Mosaico diTorcello e il Bassorilievo Grimani, con la vostra lettera del 29

agosto 1815 piena di affettuosi sentimenti, alli quali corrispon-do con perfettissima cordialità.Il Mosaico è un laberinto da cui mi sembra che non se nepossa uscire mai, se si voglia spiegarlo a parte a parte. Voigià avete veduto quel che scrive il Costadoni, e comunemen-te si crede così all’ingrosso che supremam finalis iudiciidiem exhibes come scrisse Flaminio Cornaro nell’EcclesiaeTorcellanae illustratae, T. 1, p. 52. La Risurrezione de’ Morti(la quale ha un vestigio nelle parole HANA), la Venutadell’Anticristo, il Giudizio Universale con li eletti alla destrae li reprobi alla sinistra possono accreditare questa spiega-zione. Potrebbero forse conoscere le particolarità di esso,esaminando tanti e tanti scrittori dei bassi tempi che ne trat-tano, li quali servivano di guida a’ mosaicisti ed ai pittoriper i loro lavori. Libri apocrifi del Nuovo Testamento, spe-cialmente Apocalissi, commenti di scrittori frivoli e favolosisopra l’Apocalisse e il Giudizio, e la fine del mondo el’Anticristo possono dare lumi per intendere la rappresenta-zione. V’è un libro di Gio. Andrea Gilio da Fabriano, stam-pato in Camerino 1564 intitolato Due Dialoghi, nel secondodei quali, che è alquanto lungo, biasima continuamente lipittori che nelle loro opere seguivano li Vangeli e Leggendeapocrife, e li nomina. Si dice che Hancarville volendo illu-strare le pitture di Giotto nella chiesa dell’Arena di Padovale spiegava quasi tutte facendo vedere che il pittore aveva inesse seguito il Vangelo apocrifo De infantia Salvatoris. Unesempio dell’uso di dipingere il Giudizio Universale potetevederlo nel Fabricio Bibliotheca Graeca, T. V. p. 259 dellavecchia edizione. Le figure che anticamente si intagliaronoin legno, specialmente dell’Apocalisse, già conosciute dallicuriosi, anch’esse possono giovare. In somma voi avete unabisso di rappresentazioni fantastiche da farvi studiarelungo tempo, e forse senza pregio dell’opera. Io già nonmostro il rame intagliato ad alcuno, se voi non pubblicate

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1784. T 2. 4° - Atti dei Fratelli Arvali, Roma 1791. T. 2. 4° -Spiegazione di un antico epitaffio Roma 1790. 4° - Censuradell’opera del P. Paoli sopra S. Feliciano, nel Giornale di Pisa- Iscrizioni inedite del Museo Clementino spiegate; estratto eGiudizio dell’opera Fastorum anni Romani Giornale medesi-mo - Verrii Flacci Discorso sopra tre candelabri acquistati daPapa Clemente XIV, Pisa 1771 - Lettera sul Ruolo dellaSapienza di Roma nell’anno MDXIV, Roma 1797. 4° = Vi è giànoto che la sua grande raccolta d’inscrizioni cristiane la donòalla Vaticana. La sua raccolta di pezzi di terracotta con scrit-ture ec. è indicata da lui nell’opera dei Fratelli Arvali daAgincourt Recueil de fragments de sculptures ant. en terrecuite p. 85. Ma io scrivendo a voi non la finirei mai.Fati li miei rispettosi saluti al nostro degnissimo M. Sacy editegli che io sempre ho ricevuto suoi doni, anche ultima-mente, con gratitudine, e che desidero nuove di sua persona.Salutatemi anche il pregevolissimo M. Boissonade di cui pari-menti bramo notizie. Conservatemi la vostra a me cara grazia,e siate certo che con pienissima sincerità e di tutto cuoresono / vostro affezionatissimo Amico / Jacopo Morelli.

18. Lettre de Mauro Boni à Aubin-Louis Millin, Reggio Emilia, 15 mai 1816. Paris, BnF, fr. 24679

Preclarissimo e sempre Carissimo, / Reggio di Modena, 15maggio 1816

Un improvviso incontro del Sig.re Abate Cancelliere LuigiMaro, che viene da Roma per Parigi diretto a ritornare nelBelgio mi da impulso a scriverle, e renderle conto della mianuova situazione. Per somma grazia del mio Dio ho la sortedi essere ritornato intero dalla gran Madre sempre adorata esospirata in questo collegio ravvivato dalla Munificenza di s.a. R. Duca di Modena restauratore della sua prosapia ne’stati aviti, e della Compagnia di Gesù nei Collegi degli statiEstensi. Io sono qui da’ primi di novembre prossimo passato,destinato dai superiori Prefetto degli studi, e Bibliotecariodella rinascente Biblioteca. Maro ha recato la mia scelta col-lezione di circa 12 mila volumi, accresciuta da S. E. Rev.moMonsignor Vescovo Estense di Reggio di duemila, e dalsovrano d’altri 4 mila volumi, che forma già una bellaBiblioteca da me ordinata. Ho sistemate le scuole secondo ilratio studiorum nostro, di cui ho fortunatamente la primaedizione introvabile, tanto commentata come unica fenice daDebure. Abbiamo una scolaresca di oltre 500 allievi d’inge-

gno alacre che promettono eccellente riuscita assistiti da insi-gni professori Gesuiti, tra’ quale il P. Tito Cicconi, autoredella dissertazione sull’intelligenza di Mane, Techel, Pharesgrato alla vostra bontà che l’avete commentata nel Magazzinoenciclopedique. Siamo 18 Gesuiti, 14 Sacerdoti che abbiamo ripreso l’abitovotis receptis quadragennalibus, e quattro laici coadiutori. Le ultime mie occupazioni non mi hanno permesso di scri-vervi come ardentemente bramavo, e sono lieto di questoincontro felice per rinnovare la nostra amicizia, e intrapren-dere un regolare commercio di lettere. Io sospiro nuove dellavostra salute, a ben essere, de’ vostri studi, e delle opere chemeditate. Dopo la vostra partenza da Venezia, ebbi la sortedi fare preziose scoperte di monumenti inediti dell’arte delMedioevo. Monete dal secolo quinto al XII, piombi, lapidi,nielli, miniature, sculture affatto ignote, che dan nuova lucealla storia dei re Longobardi, di Carlo Magno in Italia, e deiprimi secoli gloriosi della Repubblica Veneta, furono da meenunciati in tre saggi all’Ateneo Veneto, pubblicati nelleRelazioni dell’Ateneo stampate a Venezia, le quali poteteavere dal Cavaliere Cicognara autore della Storia della scultu-ra. Ora in questa beata quiete religiosa e letteraria mi occupoad illustrarli ma ho bisogno dei vostri lumi, e profondecognizioni per coglier nel segno, e non illudermi. Se vi aggra-da scrivetemi, e dirigete le lettere con sopra coperta al SignorFoi celebre negoziante di libri e ricchissimo in commercio co’primi libri di Parigi e di Londra, alla cui direzione potetemandarmi tutto ciò che voleste favorirmi. Scrivetemi il vostroindirizzo, onde possa poi riconoscere i vostri comandi intutto che possa servirvi, e pregarvi delle produzioni che mioccorreranno per la Biblioteca.Datemi nuove certe dal ristabilimento in Francia de’ Gesuiti,che qui si vocifera, e si dice prossimo; e del felice andamentodelle cose politiche, e religiose in Parigi.Chiudo la lettera, in fretta per la partenza dell’egregio sogget-to; che vi raccomando; tutto ciò che farete per lui, l’avròcome fatto a me stesso. Vale optime amicorum.Il vostro Mauro Boni / della Compagnia di Gesù.

19. Lettre d’Aubin-Louis Millin à Mauro Boni (copie), Paris, 15 juillet 1816. Paris, BnF, fr. 24679

Monsieur et cher ami, / Je ne savais ce que vous étiez devenuet votre lettre du 15 de mai m’a fait un extrême plaisir. Elle ne

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[après la lettre précédente, suit un fragment d’une autre lettresans destinataire] [...] peut trouver le moyen de placer ceux-ci, mais j’ai perdula moitié de mon appointement et je ne suis plus en état decontinuer des sacrifices aussi considérables que ceux que j’aifaits. Je suis très satisfait qu’un trésor tel que celui dont vous meparlez soit entre vos mains, il ne pouvait être mieux placé, jerépondrai à toutes les questions que vous pourrai me fairepar la poste ou autrement, et je vais demander à M.Cicognara la relation dont vous me parlez afin d’en faireusage dans le Magasin encyclopédique. Mon adresse est toujours à M. Millin, membre de l’académieroyale des belles lettres, conservateur de la bibliothèque duroi. A la bibliothèque du roi à Paris, puisque j’occupetoujours les mêmes emplois. Le Magasin encyclopédique estinutile sur l’adresse. Vous me dites d’adresser ma lettre à M. Foi et vous n’ajoutezpas s’il est à Modène ou à Reggio. Je ne trouve son nom dansl’article d’aucune de ces villes dans l’almanach de commerce. J’attendrai de nouveaux renseignemens pour [...].

20. Lettre de Jacopo Morelli à Aubin-Louis Millin, Venise, 4 avril 1818. Paris, BnF, fr. 24693

Pregiatissimo e Carissimo Collega / Venezia 4 aprile 1818

Rispondo prontamente alla vostra lettera ultimamente scritta-mi e vi replico che io non ho mai ricevuta da MadamaAlbrizzi l’Oresteide; la quale io acquisterò per la Bibliotecadi San Marco, quando mi si farà avere. Acquisterò pure li vostri Annali Enciclopedici, che mi ditespediti ora da Atlais, dei quali io non ne ho veduto alcuntomo. Fatte che io abbia tutto, e ditemi a chi devo pagare, epagherò tutto prontamente.Fuchs non ha più credito, né si può valersi più di lui.Mandase per il mezzo del Negozio dell’Apollo in Venezia, colquale Atlais corrisponde. È perdita irreparabile la morte diVisconti. Vi mando per risparmio di spesa una lettera per ilnostro Monsieur Sacy e alcune piccole stampe. Sono inristrettezza di tempo, e con poca salute. Altra volta vi scri-verò più lungamente. Addio, Carissimo Amico, Addio /Vostro Affezionatissimo Amico e Collega / Jacopo MorelliVi raccomando far avere prontamente l’occlusa letterina aM. de Sacy.

m’est arrivée que dans les premiers jours de ce mois. Je voisavec satisfaction que vous êtes retourné dans votre anciennecompagnie, on a toujours de l’attrait pour l’état qu’on a choisidans sa jeunesse pour la corporation à la quelle on a été attaché.Votre excellent prince en rétablissent les Jésuites et en leurconfiant de nouveau son collège de Reggio ne pouvait pasmieux faire que d’y rappeler un homme tel que vous, votrebibliothèque jointe aux dons qui ont été faits doit déjà faireun bon commencement. Je serai certainement ravi de rouvrir ma correspondance avecvous, mais je n’ai plus les moyens que j’avais et je n’ose vousconstituer en faire. Je suivrai mes coutumes d’écrire un peud’avance pour profiter de l’occasion qui se présente et y join-dre ce qu’on me donnera la facilité d’y ajouter. J’ai été malade de l’estomac, cela ne m’a pas empêché de tra-vailler et de faire paraître des ouvrages dont la notice est cijointe. J’en publierai d’autres six. J’ai parlé plusieurs fois de vous dans les deux volumes demon voyage qui viennent de paraître, mais j’en parlerai plusau long encore quand je ferai l’article de Venise, c’est aussipour ce pays et pour Reggio que je vous demanderai des ren-seignements. Mon voyage dans la Lombardie va être mis sous presse vousserez bien aise que je parle dignement de Reggio, j’ai plu-sieurs ouvrages sur cette ville et voici les titres, vous verrezqu’ils ne doivent pas être connus à Paris. Certani. Maria di Reggio coronata - Descrizione del tempiodella Ghiara - Taccoli memorie della sua famiglia - Affarosi,Storia di Reggio - Memorie del monastero di S. Prospero -appendice - critiche osservazioni sopra questi [...] Vechiani[?] poeta regiense. Dites-moi relativement à Taccoli pourquoi il est dit dans laseconde partie qu’elle fait suite à la première qui est de 1742

tandis que celle que j’ai est de 1741. Il me manque Racconto de miracoli della madonna di Reggio- Isachi relazione della traslazione dell’istessa imagine 1609 -40 Reggio. S’il y a quelque brochure relative à Reggio mettezla de coté.M. Fuchs m’a écrit que vous ne lui aviez pas remis les 30

francs que M. Mocenigo vous a porté de Milan de ma part.Je suis fort aise car j’avais pu les perdre. Gardez-les pour l’ac-quisition de quelques ouvrages que je peux demander à vous,à M. Foy, et je vous ferai passer... Recevez l’assurance de ma sincère amitié / A. L. Millin.Je regrette beaucoup le [...] Marescalchi / A. L. Millin.

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