vive les musiques ! - Journal Zibeline

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ZIBELINE mensuel culturel 14.02 > 13.03.2020 n° 2 CULTURE LOISIRS ciné élections municipales la culture à avignon L 11477 - 2 - F: 3,50 - RD 3€50 6MIC vive les musiques !

Transcript of vive les musiques ! - Journal Zibeline

ZIBELINEmensuel culturel

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n° 2CULTURE LOISIRS ciné

élections municipales la culture à avignon L 11477 - 2 - F: 3,50 € - RD

3€50

6MIC vive les musiques !

04 92 64 27 34 THEATREDURANCE.FR

MARSmer 04 mars 19:00

théâtre marionnettes

Bon débarras !

Cie Alula

ven 13 mars 21:00 théâtre

Sous d’autres cieux

Cie Crossroad – Maëlle Poésy

mer 18 mars 16:00 théâtre clown

LiLeLaLoLuCie Voix Off

mar 24 mars 21:00 cirque théâtre

BurningL’Habeas Corpus Cie

U N E P R O D U C T I O N C O N C E R T O S O A V E

DU 2

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LE SALON

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THÉ ÂTRE L A JEUNESSE SECOUE LE PL ATE AU DU ZEF !

MARDI 17 MARS � 20h30≥ 14 ans • ± 1h20

Une pièce haletante qui interroge les adolescent.e.s sur leur rapport au réel et aux réseaux sociaux… ou comment la porosité entre ces deux mondes peut bouleverser une vie. Des tableaux vivants, où textes, musiques et vidéos servent un propos puissant sur les luttes des femmes à travers les époques et leur place dans notre société actuelle.

CES FILLES�LÀAnne Courel • Cie Ariadne (Sur un texte d’Evan Placey)

MERCREDI 25 MARS � 20h30≥ 13 ans • ± 2h

Reprenant les codes d’une émission radio, cette soirée réunie trois jeunes invités à débattre autour de sujets qui les animent. Accompagnés de musique live et de dessins réalisés en direct, ils nous font vivre leur histoire, partagent leurs réfl exions, expliquent leur mode d’action... Une expérience vivifi ante orchestrée par une jeunesse intrépide !

RADIO LIVE UNE NOUVELLE GÉNÉRATION AU MICROAurélie Charon, Caroline Gillet, Amélie Bonnin Radio Live Production

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Louise Quignon

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TA RIF S : 15 € � 3 €

04 92 64 27 34 THEATREDURANCE.FR

MARSmer 04 mars 19:00

théâtre marionnettes

Bon débarras !

Cie Alula

ven 13 mars 21:00 théâtre

Sous d’autres cieux

Cie Crossroad – Maëlle Poésy

mer 18 mars 16:00 théâtre clown

LiLeLaLoLuCie Voix Off

mar 24 mars 21:00 cirque théâtre

BurningL’Habeas Corpus Cie

U N E P R O D U C T I O N C O N C E R T O S O A V E

DU 2

9 FÉ

VRI

ER A

U 31

MAR

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LE SALON

DE M

USIQUE

edito

ZIBELINE MAGAZINE, MENSUEL CULTUREL

CULTURE LOISIRS CINÉ

Mensuel paraissant le vendredi

Édité à 20 000 exemplaires par Zibeline

BP 90007 13201 Marseille Cedex 1Dépôt légal : janvier 2008 ISSN 2491-0732

Imprimé par RotimpressImprim’vert - papier recyclé

Rédactrice en chef : Dominique Marçon

Rédaction :[email protected]

CommercialeZoé [email protected] 07 67 19 15 54

[email protected] Directrice de publication Agnès Freschel

Chargée des abonnements

[email protected]

Contact diffuseurs :

A juste Titres - tél : 04 88 15 12 41Titre modifiable sur www.direct-editeurs.fr

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Photo de couverture : © 6MIC

Et le gagnant est... Blanc !

L a 35e édition des Victoires de la musique s’annonce monochrome. Physiquement, par la couleur de peau des nommés ; artis-tiquement, par le style musical des œuvres

sélectionnées. Un choix inacceptable, dans un pays d’une si grande variété de création musicale. Les organisateurs de la compétition ont décidé de fusionner, dans la catégorie Album, les six décli-naisons qui existaient jusqu’à l’année dernière, réduisant ainsi de treize à huit le nombre de ré-compenses décernées. Résultat : la suppression pure et simple des distinctions pour les albums de musiques du monde, musiques électroniques, rap, musiques urbaines, rock et chansons. Une mise à l’écart de fait de la diversité culturelle dans la production discographique nationale. Certes les frères Tarik et Nabil de PNL, venus de la cité des Tarterêts en banlieue parisienne, Ma-lik Djoudi et son électro pop lancinante ou encore le succès commercial de Vitaa et Slimane font une très minoritaire exception à la règle. Mais ces « arabes de service » masquent mal la profonde in-compréhension, par les organisateurs, de la vitalité et la diversité des champs musicaux du monde, électro et urbains...Loin de nous d’émettre un jugement sur le talent ou la légitimité des musiciens retenus. D’Alain Souchon à Catherine Ringer, en passant par Phi-lippe Katerine, Clara Luciani, Suzane et Jeanne Added, la créativité est, ou fut, incontestable. On peut tout aussi légitimement estimer qu’il faut sortir des étiquettes des rayons de disquaire. Mais force est de constater que ce choix, dans un monde souvent aseptisé et guidé par le marché, exclut de

fait un grand nombre d’artistes de ces Victoires. Concrètement, les musiques du monde, le rock et l’électro ont disparu des écrans...

Défaite de la musiqueAurions-nous pourtant pu imaginer des Victoires de la musique sans Manu Chao, Rachid Taha, Souad Massi, Ibrahim Maalouf ou plus récem-ment Camélia Jordana ? Sans Soprano qui rem-plit les stades ?Le public averti ou curieux n’attend rien de cet évé-nement médiatique. Il sait que la scène musicale française est bien plus bariolée que celle que nous servent les grand-messes audiovisuelles. Les spec-tateurs, partout en France, remplissent les salles de concert, petites et grandes, les festivals. Même s’il existe chez ces derniers une tendance à vouloir assurer la billetterie en programmant les mêmes têtes de gondole qui, de leur côté, cherchent à gon-fler les dates de leurs tournées pour compenser la chute du marché du disque. Mais comment parler de victoire de la musique si la diversité culturelle en ressort vaincue ? La question n’est pas esthétique, elle est bien cultu-relle et donc politique. Une telle invisibilisation de la diversité dépasse largement le domaine de la musique, et renvoie à l’effacement médiatique des racisés, des post-colonisés. Pourquoi ce pays refuse-t-il de voir, et surtout de montrer, celles et ceux qui le composent, qui irriguent son histoire et enrichissent ses identités ? Si le monde de la culture n’est pas à l’avant-garde de cette ques-tion-là, pour la poser et y répondre, qui le sera ?

LUDOVIC TOMAS

www.theatrejoliette.fr - 04 91 90 74 28www.theatrejoliette.fr - 04 91 90 74 28www.theatrejoliette.fr - 04 91 90 74 28

03 > 07 mars [ création ]

Rien n’arrive ! Et ça arrive souvent !

Jean-Paul Curnier / Yves FravegaL’Art de Vivre

S A I S O N V I I 2 0 1 9 - 2 0 2 0

SCÈNE CONVENTIONNÉE

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JEUDI 27 VENDREDI 28

FÉVRIER

20h30Théâtre

Molière, Sète

Une femmeCOMÉDIE MUSICALE

se déplaceDAVID LESCOT – CIE DU KAÏROS

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arts visuels (P.93-94)Jean Ranc au Musée Fabre, MontpellierJean Arnaud à la galerie du Canon, Toulon, et au Musée des

Tapisseries, Aix

sommaire2

CINÉMA (P.103-107)Films du mois : Plogoff, des pierres contre des fusils ; Deux ; Tu mourras à 20 ans ; L’état sauvage ; Une histoire de la grève générale ; Un divan à TunisAnnonces : La Première fois, Festival du Premier film documentaire

BALADE (P.112-114)Les zones humides de la plaine de Hyères

ÉCOUTES/ÉCRANS (P.108-114)

LIVRES/CD (P.96-102)Livres du mois : La nuit atlantique ; Il est temps que je te dise ;

Sankhara ; Le ciel à bout portant ; La forêt au Moyen Âge ; Tu ressembles à une juive ; La mémoire tyrannique ; La mort du soleil ;

Préférer l’hiver ; Opération Macron

CD du mois : Brahms ; When U Leave it ; Spartenza

société (P.12-17)Les chroniques du changement climatique, septième volet

Les énergies renouvelables en questionRencontres nationales de l’association Cultures du Coeur

portrait (P.22-23)Bruno Allary, fondateur et directeur artistique de la Cie Rassegna

cité queer (P.18-20)Le festival + de genres à Marseille

Le sport inclusif

événements (P.24-35)Le 6Mic, nouvelle salle de musiques actuelles du Pays d’AixFestival Avec le temps, Bouches-du-RhôneFestival Les Suds en hiver, ArlesFestival Babel Minots, Marseille et MiramasZ Festival, VarBiennale de théâtre d’objets Greli Grelo, Pays d’AptFestival Mars en baroque, MarseilleExposition Voyage voyages au Mucem, Marseille

critique (P.36-59)Festival Parallèle, la Criée, les Bernardines, le Joliette, le Gymnase, le Zef, le Mucem, la bibliothèque de l’Alcazar, le Massalia, l’Espace Busserine, le Klap, le Bois de l’Aune, le Jeu de Paume, le GTP, le Vitez, le 3bisf, le Petit Duc, l’Espace NoVa, le Sémaphore, le théâtre d’Arles, le théâtre Armand, le Liberté, Châteauvallon, les 13 Vents, le Domaine d’O, le théâtre de Sète, l’Opéra de Toulon, l’Éolienne, Espace culturel de Chaillol, Correns, l’Opera Mundi, les Nouvelles Hybrides

Politique culturelle (P.6-11)La culture à AvignonL’Hôtel des arts à ToulonÉtat des lieux de la musique classique à Marseille

AU PROGRAMMESpectacle vivant (P.60-78)

Musiques (P.78-88)

Arts visuels (P.90-92)

Tombolo Giens Porquerolles © Jean Belvisi

Ana Carla Maza - Festival Les Suds en hiver

© Florence Ducommun

Graces, Silvia Gribaudi - + de genres a Klap Maison pour la danse © Giovanni Chiarot

Elle dirige l’une des rares majorités progressistes dans une ville impor-tante du Sud-Est. Cé-cile Helle, à laquelle cer-

tains reprochent parfois un manque de souplesse à l’égard des acteurs culturels, est en

campagne pour un deuxième mandat. Entretien.

Zibeline : Après la démission de votre adjointe à la culture, pour raisons person-

nelles, en septembre 2015, vous ne lui avez jamais désigné de successeur et vous vous êtes attribué la délégation. Pourquoi ?Cécile Helle : Cela m’a semblé comme une évidence de devoir assumer cette délégation. D’abord, pour montrer l’importance qu’occupe la culture dans une ville comme Avi-gnon ; ensuite, pour essayer de développer de nouvelles pers-pectives et projets en matière de politique culturelle. La vo-lonté, pour ce premier mandat, était de retisser un lien de confiance avec les acteurs culturels que je connaissais bien et de longue date. Je voulais leur montrer que devenir maire ne signifiait pas que je ne m’intéressais plus à leurs projets ou équipements culturels, et leur garantir que cela restait une priorité majeure en termes d’action avec les nouvelles fonctions qui étaient les miennes.Toutefois, si je suis réélue, mon idée est de confier la déléga-tion à un adjoint ou une adjointe.À votre prise de fonction, quelle a été votre première mesure en termes de politique culturelle ?Cela a été d’essayer de faire passer l’idée qu’une politique culturelle, dans une ville, ne peut pas se limiter au verse-ment d’aides financières à des structures. Même si on conti-nue à le faire en consacrant 3,8 millions d’euros à l’aide aux associations culturelles. La première mesure concrète a été la mise en place de la gratuité dans les cinq musées muni-cipaux comme un enjeu de démocratisation des pratiques

culturelles. C’était à la fois ouvrir grand leurs portes aux Avi-gnonnaises et Avignonnais et envoyer un signe aux touristes disant que notre ville recèle d’autres richesses que le Palais des papes et le Pont.Pourquoi n’avez-vous pas prolongé la démarche jusqu’à l’ac-cès aux bibliothèques ?Je crois beaucoup à la lecture publique car elle est l’un des pre-miers modes d’accès aux pratiques culturelles. La quasi-to-talité des quartiers est équipée d’une bibliothèque. Quand on se représente, c’est bien d’avoir gardé des propositions pour nourrir un nouveau mandat. Et c’est donc une proposition que je porte dans la campagne électorale. Mais la gratuité ne suffit pas à faire venir le public dans les bibliothèques et les musées. Nous avons voulu en faire aussi des lieux de vie culturels en y organisant, ainsi que dans cinq lieux patrimo-niaux, d’octobre à juin, une véritable saison culturelle avec des expositions d’artistes locaux, des conférences, des lectures, des découvertes d’œuvres. Cela permet aux arts plastiques et visuels et aux artistes qui les portent de trouver leur place dans la ville et de dire que la culture à Avignon, ce n’est pas que le spectacle vivant.Avez-vous d’autres projets liés aux arts visuels ?Nous allons créer une friche artistique qui prendra place dans la Cour des Doms, dans le cadre du projet de trans-formation-rénovation de l’ancienne prison Sainte-Anne, au cœur du centre historique. Les travaux ont démarré. Le projet

Maire de la Cité des papes depuis 2014, Cécile Helle est candidate à sa réélection. De fait attentive à la question culturelle, elle revient sur son bilan et déroule ses propositions

« La culture à Avignon, ce n’est pas que le spectacle vivant »

Zibeline : Quels sont les relations entre la ville et le Festival ?Paul Rondin : Le Festival ne peut pas aller bien sans sa ville et la ville ne peut pas aller bien sans son Festival. La coordination et l’entente doivent être professionnellement parfaites. L’envie d’être au service de la culture étant com-mune, on n’a pas eu de grands chemins à parcourir pour se retrouver, même s’il y a parfois eu des ajustements à faire. Le Festival est le cœur de l’attractivité de cette ville et la ma-nifestation qui régénère chaque année sa visibilité nationale et internationale.Les élections municipales sont-elles un enjeu pour le festival ?Toujours car le festival n’est pas intouchable ni éternel. Les Chorégies d’Orange ont été au bord d’une extinction. On pour-rait faire du Festival un Puy du Fou à la place d’un lieu de

« Pourquoi cette ville n’est toujours pas la capitale du théâtre ? »Entretien avec Paul Rondin, directeur délégué du Festival d’Avignon

Cécile Helle © Gaelle Cloarec

6 politique culturelle

Cour du Palais des papes © Christophe Raynaud De Lage - Festival d'Avignon

comporte aussi la création de logements en location ou en accession à la propriété. Parmi les établissement publics pré-vus, la friche artistique sera en gestion municipale. Notre idée est de proposer des résidences d’artiste, sur des périodes de 6 mois à un an, éventuellement renouvelables une fois, pour aider des jeunes créateurs locaux, au sens large, qui ont des difficultés à trouver un lieu de travail. On a établi un collectif de discussion pour définir le futur mode de fonctionnement.Quels sont les grands projets en cours ?La bibliothèque Jean-Louis Barrault, située dans les quar-tiers Sud, va faire l’objet d’une grande rénovation à partir de 2021, dans le cadre du programme de renouvellement ur-bain de l’Anru. On considère que c’est un des lieux culturels

forts de nos quartiers populaires. Le projet donne l’opportu-nité de réinterroger les espaces de lectures publique. Penser une bibliothèque aujourd’hui n’est pas la même chose qu’en 1985 quand elle a été inaugurée. En face, nous avons le projet d’un nouveau musée d’histoire naturelle qui est aujourd’hui un peu à l’étroit et désuet dans le centre-ville. Ce serait un nouvel objet architectural et muséal que nous appellerions le Museum d’Avignon, ancré dans l’actualité des enjeux en-vironnementaux. Avec la bibliothèque rénovée, cela créerait un véritable pôle culturel dans les quartiers Sud.Et si vous êtes réélue ?Je souhaite un nouvel équipement hybride dans le quartier du Pont des Deux Eaux, le seul non doté d’une bibliothèque.

« La culture à Avignon, ce n’est pas que le spectacle vivant »

« Pourquoi cette ville n’est toujours pas la capitale du théâtre ? »débat d’idées, de cosmopolitisme. Je ne pense pas que tout le monde aie le même avis sur la question. Et la petite rengaine qui dit que le Festival est trop riche et qu’il capterait des moyens aux dépens des autres structures lo-cales est démagogique et insupportable. C’est un discours d’une absurdité totale mais il ne vient pas de la municipalité. Le Festi-val est un redistributeur de l’argent qu’on lui confie. Faut-il selon vous repenser le fonctionne-ment du Festival ?Il faut que la culture soit dans l’espace pu-blic et que tous les publics puissent accéder à la culture y compris le non-public, mais ça ne veut pas dire pour autant que tout le monde peut diriger le Festival. Personnellement, je ne peux pas m’occuper d’une centrale nucléaire comme tout le monde

ne peut pas diriger le Festival d’Avignon. La réputation d’un Festival dans le monde est cent fois plus importante qu’une

Comédie française.Que pensez-vous des politiques culturelles me-

nées dans cette ville ?Je ne comprends pas pourquoi cette ville

n’est toujours pas la capitale du théâtre. C’est-à-dire pourquoi on n’a pas fait de cette ville un lieu de fabrication à plein temps du spectacle vivant. Je ne parle pas d’ouvrir des salles 24 heures sur 24 mais

d’une véritable économie du spectacle vi-vant. Il y a tout pour. Pourquoi aucune mu-

nicipalité n’a réussi à capitaliser là-dessus ? C’est une erreur stratégique, alors que l’ambition

est à portée de main. ENTRETIEN RÉALISÉ PAR L.T.

Paul Rondin, Festival d'Avignon © Christophe Raynaud de L

age

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Le candidat Les Républicains griffe mais ne mord pas Le conseiller régional Michel Bissière se

présente face à Cécile Helle

Inutile d’insister, l’ancien adjoint de Marie-Josée Roig, maire d’Avignon de 1995 à 2014, n’est pas du genre à chercher la polémique. La culture n’est pas une terre inconnue

pour ce conseiller régional délégué à la créa-tion artistique. « Il faut penser la culture de demain. Elle est une chance pour l’écono-mie, comme le tourisme et le patrimoine », affirme-t-il dans un esprit consensuel. Les critiques qu’il formule avec modé-ration à l’encontre de la maire sortante sont avant tout celles dont il se fait le relais : « les acteurs culturels se plaignent d’un manque d’écoute ». Et de citer, pour illustrer son propos, le départ des Passa-gers du Zinc et d’Avignon Blues Festival, structures ayant trouvé refuge dans la ville de Châteaurenard, dans les Bouches-du-Rhône. « Ces choses-là ne se seraient pas passé s’il y avait eu un élu délégué à la culture. » Le candidat énonce quelques propositions à son image, bienveillantes. « Je souhaite instaurer ce que j’appelle

un troc culturel. Des jeunes pourront donner de leur temps pour se consacrer à des tâches d’intérêt général à définir avec

les besoins des opérateurs culturels. En contrepartie, ceux-ci devront les faire bénéficier d’invitations

aux spectacles de la saison. » S’aventurant sur le terrain du candidat écologiste Jean-

Pierre Cervantès, dans l’opposition mu-nicipale, il souhaite voir la ville moteur d’une démarche « éco-responsable » au-près des organisateurs d’événements. « C’est fini le temps du gaspillage de pa-pier ! » C’est sur une des mesures phares

de la maire actuelle qu’il s’affirme plus clivant : « Je ne suis pas favorable à la gra-

tuité pour tous et tout le temps. Pourquoi en faire bénéficier des familles qui viennent l’été à

Avignon et qui ont un budget pour cela. Pour les Avi-gnonnais, on pourrait trouver un juste milieu comme un jour par semaine ». Une idée pas si anodine que cela.

L.T.

Michel Bissière c ©. X-DR

Il aura une dimension à la fois lecture publique et musique, comprenant une petite salle de concerts et des studios. Car on manque d’espaces publics dédiés à l’expression des groupes locaux. Nous cherchons également à poursuivre l’esprit de saison culturelle évoqué précédemment, en mettant à dispo-sition des compagnies locales, en théâtre comme en musique, et avec un accompagnement technique, deux salles dont on a repris la gestion : la salle Benoît XII dans le centre histo-rique et celle de la Barbière dans les quartiers périphériques.Le troisième champ sur lequel je souhaite aller est celui de la pratique amateur pour laquelle il manque un temps fort. L’idée est donc de proposer la création d’un nouveau festi-val pluridisciplinaire, sur une semaine au printemps. Autre exemple, nous lancerions un appel à projet aux écoles de la ville pour accueillir, tout au long de l’année scolaire, des ré-sidences d’artistes au sein des établissements afin de mettre le plus tôt possible en contact les enfants avec l’art.Quel est votre rapport au Festival d’Avignon ?La ville reste un partenaire privilégié. Comme soutien finan-cier et dans l’accompagnement logistique pour le rayonne-ment du Festival. Beaucoup de lieux mis à sa disposition sont municipaux. On a par ailleurs développé des partenariats au-tour de l’éducation artistique et culturelle, dans le cadre des activités périscolaires, tout au long de l’année. En 2020, un spectacle sera programmé pendant le Festival dans une salle d’un quartier populaire de la ville. Pour le reste, la ville est un acteur du conseil d’administration au même titre que l’État, le Département et la Région. En ce qui concerne le Off, il n’y

avait quasiment aucun contact avec ville avant que je sois élue maire. On a établi un partenariat en passant une convention pluriannuelle qui comprend une petite aide financière et la participation de la ville au conseil d’administration.N’y a-t-il pas quelque chose à inventer de sorte que la culture devienne le moteur d’un développement économique pérenne ?Mais elle l’est déjà. Il n’y aurait pas l’attractivité touristique que connaît Avignon s’il n’y avait pas ce rayonnement cultu-rel. On ne peut pas dissocier rayonnement culturel, attracti-vité touristique et développement économique dans un ter-ritoire comme le nôtre. C’est l’une des villes où la présence d’organismes de formation aux métiers artistiques et cultu-rels est forte. Ces filières apportent la preuve qu’il existe en-suite une possibilité d’emploi au sein du bassin avignonnais et permettent aux diplômés soit de lancer leurs propres acti-vités soit de trouver un emploi au sein des opérateurs cultu-rels existants.Plus généralement, quelle est votre ambition culturelle en cas de deuxième mandat ?Mon souci de maire est de faire vivre la culture tout au long de l’année. Bien sûr, il y a le temps fort du Festival, et il faut s’en réjouir car cela apporte beaucoup à notre ville, mais les acteurs culturels sont nombreux et d’une grande diversité. Je me pose toujours ces deux questions : quelle place donner à l’artiste dans la ville ? Et comment l’accompagner au mieux dans son processus de création ?

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR LUDOVIC TOMAS

8 politique culturelle

Une nouvelle page se tourne pour l’Hôtel des artsRebaptisé Centre d’art TPM, l’Hôtel des arts à Toulon change de cap et joue la carte du design en s’appuyant sur le savoir-faire de la Villa Noailles à Hyères. Explications

Géré par le Conseil départemental du Var depuis sa création en 1999, l’Hô-tel des arts est désormais adminis-

tré par Toulon Provence Méditerranée au titre de la compétence Tourisme, culture, sport. « Un élément structurant de la vie culturelle du territoire désormais dédié au design, explique Marie-Aline Lopasso, directrice générale adjointe des services de TPM, qui fera de Toulon et Hyères deux haltes sur le chemin des festivaliers. Après Arles pour la photographie, Aix-en-Provence pour le patrimoine et l’art lyrique, Avignon pour le théâtre ». À ceux qui regrettent déjà la disparition de cette vitrine historique de l’art contemporain, la réponse est nette : « Ce n’était pas figé dans le marbre que l’Hô-tel des arts reste art contemporain ! Depuis quelque temps, la coloration design du ter-ritoire s’est affirmée avec la Villa Noailles et la Design Parade dont la réputation est nationale et inter-nationale, avec la licence option design de l’École supérieure d'art et de design de Toulon Provence Méditerranée (ESADTPM) et le master 1 de l’école Camondo. À la différence de Saint-Étienne réputée pour le design industriel, Toulon a une vision plus artistique du design. Ici, c’est l’objet d’art ». Désormais, l’art visuel contemporain prendra place à la Villa Pacha à la Seyne-sur-Mer dirigée par Isabelle Bourgeois, dans les salles rénovées du Musée d’art et à la galerie du Canon passée aux mains de TPM suite au décès de son fondateur Jacques Mi-kaelian. « La galerie du Canon ayant pour mission, souligne Marie-Aline Lopasso, de montrer plus particulièrement la jeune création régionale » (lire aussi p 94). Quant à la collec-tion permanente de l’ex-Hôtel des arts, celle-ci demeure la propriété du Conseil départemental qui poursuivra sa poli-tique d’accès à la culture pour tous à travers des expositions itinérantes. Enfin, les agents chargés de l’organisation des expositions et des événements, de l’accueil et de la média-tion du public sont désormais rattachés à TPM, dirigés par Jean-Pierre Blanc, initiateur de la Design Parade et directeur de la Villa Noailles depuis 15 ans. Un hégémonisme qui fait parfois grincer des dents, vite retoqué par Marie-Aline Lo-passo : « On est dans le principe du cluster, c’est-à-dire que l’on s’assemble autour d’une vision commune. On n’est pas en

train de se manger les uns les autres mais de faire travailler des acteurs culturels qui, avant, étaient dans une concurrence farouche. Quinze ans plus tard, pas un seul qui n’ait de projet collaboratif. Quand Jean-Pierre Blanc travaille avec l’Hôtel des arts, il travaille également avec l’ESADTPM ».

Futurissimo et la collection du Centre PompidouJustement, on doit au directeur de la Villa Noailles d’avoir ac-quis à sa cause le Centre Pompidou et signé le 20 décembre 2019 une « Convention-cadre de partenariat pour la co-or-ganisation d’expositions » en 2020, 2021 et 2022. Dont l’effet est quasi immédiat : dès le 26 juin prochain, le public pourra découvrir l’exposition Futurissimo, design italien 1930-2000 dans le cadre de la nouvelle édition du festival (26 juin au 1er novembre). D’ici là, les portes du Centre d’art TPM resteront fermées durant six mois, ce qui est inédit dans son histoire. Reste le souvenir de ses plus belles pages écrites par Sophie Biass-Fabiani, Gilles Altiéri et Ricardo Vazquez qui partagèrent avec le public leurs coups de cœur au fil d’expositions-décou-vertes, de rétrospectives ou d’hommages.

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Centre d’art TPM, Toulon metropoletpm.fr

Hotel des arts TPM © O. Pastor - TPM

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«Un auditorium ? Ce se-rait, évidemment, la moindre des choses. » La voix de Macha Makeïeff est douce,

mais la directrice de La Criée ne mâche pas ses mots. « C’est tout simplement une anomalie, à l’échelle de cette deuxième ville de France c’est même scandaleux. » Ce « manque », Macha Makeïeff l’a comblé notamment en programmant, dès sa no-mination à la tête du plus grand théâtre de Marseille, des concerts réguliers d’une qualité constante. Cette saison, au moins deux concerts de musique classique ont lieu par mois. Pour les accueillir, la met-teuse en scène, coutumière, entre autres, des contraintes de l’opéra, a peu à peu adapté l’acoustique du plateau du CDN à des effectifs de musique de chambre, et organise également depuis sept ans La Folle Criée. « Le contact des grands musiciens, et des grands orchestres, est un éblouissement nécessaire. » Éblouis-sement que sa programmation prend soin de préserver, tout en cultivant son

« frottement au théâtre ». « Destiner la mu-sique à un ghetto de mélomanes serait évidemment une erreur. Marseille s’est construite sur un rapport populaire à la musique, hérité de Pierre Barbizet, qui a tant compté pour cette ville. »Même son de cloche chez Dominique Bluzet, directeur à Marseille du Gym-nase et des Bernardines, et à Aix du Jeu de Paume et du Grand Théâtre de Pro-vence. « À Marseille, la musique classique passe toujours sous les radars quand on parle de politique culturelle. ». L’homme de théâtre rappelle comme d’autres que « les villes de Montpellier, de Nice de Lyon ne sont pourtant pas de la même ampleur, et possèdent toutes un auditorium… ». Faute d’être parvenu à le créer à Marseille, il se réjouit d’avoir fait du Grand Théâtre de Provence, fort de ses 1400 places, une salle majeure dédiée à la musique orchestrale.

Le Festival de Pâques, créé en collabora-tion avec Renaud Capuçon, fête cette an-née sa 8e édition, et ne désemplit pas. S’y retrouvent les mélomanes du Pays d’Aix mais aussi leurs voisins marseillais, qui prennent souvent la peine du voyage.

Méli mélomanePourtant, la musique classique « n’inté-resse que peu Marseille et le Département ». En témoignent les premiers financeurs de ce volet du GTP : la ville d’Aix-en-Pro-vence, le mécénat, la Région puis l’État. Un bref coup d’œil aux budgets alloués à la musique classique et contemporaine à Marseille ces dernières années confirme un désintérêt du Département pour la question, et des pratiques contestables : une subvention conséquente est versée à l’association Marseille Concerts, présidée par Robert Fouchet, soutien officiel de Martine Vassal à la métropole comme à sa candidature municipale...Côté Région, le transfert de compétence souhaité par Renaud Muselier dans le domaine fragile de la culture, et dans une collectivité menacée par la montée du Rassemblement national, inquiète. Si

les subventions régionales à la musique marseillaise sont stables et plutôt consé-quentes (592 000 euros), qu’en serait-il si les successeurs de l’actuel président régional étaient plus allergiques au sou-tien à la création ?Car la DRAC, c'est-à-dire l’État en ré-gion, demeure la garante de la politique de création. La faiblesse des subsides de la ville et du département (769 000 euros chacune, soit moins d’un euro par habi-tant) en fait la plus grosse donatrice en subventions de fonctionnement, avec 1,1 millions accordés aux ensembles de musiques classique et contemporaine marseillais. Un schéma très inhabituel, puisque ce sont les municipalités qui ont habituellement en charge l’essentiel des dépenses pour la musique.La municipalité de Marseille a fait le choix de se concentrer sur ses obligations, l’édu-cation musicale : le budget du Conser-vatoire à Rayonnement Régional et des classes classiques de la Cité de la Musique est pris en charge uniquement par la ville, pour des résultats pourtant indignes de la deuxième ville de France : 1600 élèves au Conservatoire, 2000 en école de mu-sique... Marseille est à la traîne, malgré un afflux de demandes non satisfaites.Quant à l’Opéra de Marseille, il est géré en budget annexe. Les 23 millions néces-saires sont complétés par 1,2 millions du département, accordés en action cultu-relle. Une quasi-désertion du départe-ment, un refus de la Métropole, prési-dée elle aussi par Martine Vassal, d’en faire un équipement métropolitain, un renoncement au label d’Opéra national que possèdent toutes les autres villes de plus de 400 000 habitants... l’Opéra de Marseille et le Ballet National doivent ab-sorber la quasi-totalité des dépenses en art lyrique et chorégraphique de la Ville. Qui demeurent malgré tout considérable-ment en-dessous de celles de Lyon. Ses 53 euros par habitant font pâle figure face aux 69 euros des Lyonnais, ou encore face aux 103 euros de Bordeaux. Là où Lyon rassemble un orchestre symphonique et un orchestre dédié au répertoire lyrique, l’Orchestre Philharmonique de Marseille doit, seul, jouer sur les deux tableaux.

Vers quel Opéra ?Pour Maurice Xiberras, directeur de l’Opéra, « on touche au bout du bout de la régie municipale ». Et ce malgré le soutien de la ville, sa « carte blanche » en termes de programmation, ou encore

Marseille mérite un Auditorium !

Sous prétexte que l’Opéra municipal représente de loin la plus grosse dépense culturelle de la Ville, Marseille néglige ses autres opérateurs, et renvoie les amateurs de musique classique vers Aix...

10 politique culturelle

le remplacement des musiciens à chaque départ en retraite. « Sur cette question, la mairie a toujours joué le jeu. » Qualifié encore, il y a une à deux décennies, de phalange « pagnolesque », l’Orchestre a depuis impressionné critique et public. La nomination à sa tête de Lawrence Foster est pour beaucoup dans cette mue. Les ta-rifs des spectacles demeurent abordables par rapport aux autres maisons d’Opéra : ils ne dépassent jamais les 80 euros en catégorie 1. « C’est une vraie volonté mu-nicipale : que l’opéra demeure accessible ». Le programme jeunes, destiné aux moins de 28 ans, leur propose des billets à 10 euros, toutes catégories confondues. De-puis septembre, 5000 places ont déjà été vendues. De quoi entamer un chantier considérable pour l’Opéra et pour sa suc-cursale de l’Odéon, dédiée à l’opérette : faire connaître leur répertoire à un pu-blic plus large que le « bel âge » qui le fréquente plus volontiers. Malgré la qualité évidente de son or-chestre, malgré ses coproductions plus nombreuses, plusieurs obstacles de-meurent à la qualification de cet Opéra en Opéra national. Le nombre de levers de rideau, insuffisant ; l’absence de mu-sique contemporaine, de politique de commandes, de collaborations avec des Ensembles contemporains ou baroques ; des mises en scènes qui demeurent par-fois « pagnolesques », surtout à l’Odéon ; et l’impossibilité, sans salle de répétition adéquate, d’accueillir un ballet digne de ce nom. « C’est un de mes plus grand regrets, ne pas pouvoir proposer de danse… Une ville telle que Marseille aurait pourtant intérêt à faire vivre la danse qui l’a fait connaître.

Celle de Marius Petipa, de Roland Petit ! C’était tout de même quelque chose ! ». Macha Makeïeff rêve à mi-mot d’une fusion entre l’Opéra et le Ballet Natio-nal de Marseille, dirigé aujourd’hui par le Collectif (La)Horde. Laquelle corres-pondrait davantage aux objectifs d’un Opéra national, impliquant au moins deux créations par saison, là où la mu-sique contemporaine demeure cruelle-ment absente de l’enceinte marseillaise.

Les programmes des candidatsMarie-Hélène Féraud, conseillère mu-nicipale chargée de l’Opéra et de l’Odéon, a rejoint la liste du candidat LR dissident Bruno Gilles. L’Auditorium lui apparaît comme « un beau rêve, mais peu réali-sable au vu des budgets actuels ». La prio-rité demeurant aujourd’hui l’orchestre et sa polyvalence, dont l’élue se félicite : « Lyrique, symphonique, répertoire ita-lien, allemand… il sait tout faire ! » Ses missions de rayonnement départemen-tal, d’action pédagogique et sociale -en EHPAD, dans les hôpitaux, auprès de gens du voyage, de cadres carcéraux- font partie de ses plus grandes fiertés. Son ouverture vers d’autres collectivités est une « nécessité ». Mais la qualification de l’Opéra en Établissement public mé-tropolitain lui semble plus envisageable qu’une labellisation nationale. Pour Michèle Rubirola, candidate du Printemps Marseillais, il demeure « regret-table et condamnable de percevoir l’Opéra comme une charge et non comme une chance ». Pour l’écologiste « la construction d’un grand auditorium dédié à la musique classique et contemporaine, respectant un cahier des charges bien précis concernant

l’acoustique, est une nécessité absolue ». Faire enfin de l’Opéra de Marseille un Opéra national serait facilité, entre autres, par cet auditorium et par le rayonnement qu’il permettrait à l’orchestre. L’impor-tance des conservatoires de proximité est également un de ses sujets de prédi-lection : leur union souhaitable avec les plus petites structures aboutirait selon la candidate à la présence d’un conser-vatoire dans chaque arrondissement. « Comme à Paris, Comme à Lyon. Nous sommes, après tout, la deuxième ville de France. » Ces passerelles permettraient notamment d’« assurer la continuité de l’apprentissage, de dynamiser l’équipe pé-dagogique et de développer une pratique amateur forte au sein du conservatoire en parallèle du parcours professionnalisant. »

Politiques des margesCes questions tiennent à cœur à la can-didate : elle consulte volontiers sa fille, la violoncelliste Marine Rodallec, qui a re-joint depuis plusieurs années le collectif C Barré. Le GMEM, présent à Marseille depuis 1972 et labellisé Centre National de Création Musicale en 1997, s’est associé à C Barré depuis 2013. Michèle Rubirola sait et chérit la place qu’occupe à Mar-seille la musique jazz et contemporaine. La nomination de Raphaël Imbert à la tête du Conservatoire à Rayonnement Régional, notamment, « s’inscrit dans cette belle dynamique pour la création ». Les ensembles de musique contempo-raine sont en effet nombreux à Marseille : le Pôle Instrumental Contemporain de l’Ensemble Télémaque et la Salle de Mu-sicatreize programment ainsi une mu-sique contemporaine à petite échelle, mais qui connaît un beau retentissement local et national. Pour Michèle Rubirola, les artistes en ré-sidence au GMEM, mais aussi les musi-ciens de l’Ensemble Télémaque, de Mu-sicatreize ou encore du Concerto Soave « mériteraient de développer davantage leurs collaborations, ainsi que les pro-jets d’orchestres à l’école qu’ils ont mis en place. Mais les musiciens doivent avant tout pouvoir se produire dans les condi-tions qu’ils méritent. Soit rien de moins qu’un auditorium digne de ce nom. »

SUZANNE CANESSA

Une version concentrée de cet article, commandée par la Lettre du Musicien, est parue le 6 février

Subventions accordées par la Ville de Marseille, le Département 13, la Région Sud et la Drac Paca

Musique classique et

contemporaine

Opéra/Odéon : budget annexe

Conservatoire à rayonnement

régional (budget 2018)

CITÉ DE LA MUSIQUE

(SUBVENTION 2019)

Subventions Ville 2019

769 446 23 019 060 8 840 000 2 800 000

Subventions Département

2018768 966

1 200 000 (action

culturelle)

(200 000 pour les

musiques du monde)

Subventions Région 2019

592 000

Subvention Drac 2019

1 112 350

1111

Le climat dérailleQue se passe-t-il sur nos voies ferrées en cas d’inondations ? D’incendies ? Rencontre avec un cheminot du sud de la France, où le réchauffement climatique crée le chaos

Christophe Campagna est secrétaire général de la CGT Cheminots des Arcs et environs, dans le Var. Un dépar-tement qui a été durement touché par les inondations ces dernières années, occasionnant des morts par di-

zaines et des dégâts matériels considérables. En plein mou-vement social contre la réforme des retraites, il a accepté de répondre à nos questions concernant l’impact des phéno-mènes météorologiques extrêmes sur les structures ferro-viaires. Car avec le réchauffement global de la planète, les « épisodes méditerranéens », ces pluies torrentielles provo-quant d’intenses crues, se multiplient.

Quand l’eau débordeLe cheminot était en poste le 3 octobre 2015, lorsque des orages virulents ont frappé la ville de Cannes (cumul des précipita-tions : 180 mm en 3 heures). Le trafic ferroviaire s’est alors totalement interrompu, les voies, les quais et le hall principal de la gare étant inondés. Des agents ont contacté le centre de supervision, une équipe s’est rendue sur place pour sécuriser

les installations, tandis que les passagers étaient évacués par les services de secours municipaux. En 2019, deux nouveaux épisodes dangereux ont eu lieu coup sur coup, en novembre et décembre. Mais cette fois, smartphones obligent, « on a reçu les alertes directement dessus ».Quelles sont les conséquences pour le chemin de fer, lorsque l’eau déborde ? « Le courant peut carrément dessouder et em-porter des voies. Ou simplement le ballast*, ce qui affecte leur stabilité. Les câbles permettant la signalisation peuvent dys-fonctionner, donc il faut les mettre hors tension. L’eau est un conducteur ! » Une fois les flots retirés, vient l’inventaire des dégâts, explique Christophe Campagna. Un train de mesure circule, pour vérifier le nivellement, puis du ballast est ajouté là où c’est nécessaire. « Mais ce n’est qu’un pansement, tant qu’il n’est pas bourré par une machine, il faut réduire la vi-tesse de circulation. » Entre les gares, de longs rails soudés sans joints mécaniques (lesquels occasionnaient le fameux ta-tam, ta-tam rythmant les voyages en train d’antan) font parfois 3 ou 4 kilomètres de long, nous apprend-il. Des ap-pareils spécifiques en mesurent la dilatation, vérifient si l’un des rails n’est pas plus bas que l’autre, ou s’ils ont pris des coups, ne sont pas gauchis.

RisquesCela entraîne-t-il des risques d’accidents ? « Très peu, répond le syndicaliste. La SNCF a été créée en 1938, donc on travaille sur les inondations depuis longtemps. Mais les épisodes ex-trêmes se multiplient, et ce sont des travaux qui ne sont pas prévus. Au-delà du coût, le personnel est mobilisé en plus de

© Christophe Campagna

12 société

l’astreinte, le plan de maintenance est décalé. » Qu’est-ce qui peut expliquer les débordements récurrents ? Chris-tophe Campagna a son idée là-dessus. Dans le Var et les Alpes-Maritimes, son secteur, les sols sont particulière-ment artificialisés. « J’ai été associé avec la gare de Cannes à des visites pour prévoir des drains. Les alentours bétonnés empêchent l’eau de s’écouler. » Cependant d’après lui, même les terres conservées à l’agriculture ne sont pas garantes d’une bonne évacuation : « Au Muy, touché par les inondations en 2010 et 2019, il y a une petite zone industrielle et des vignes, mais la terre retournée évacue moins d’eau que celle laissée en friche. Et pour en avoir discuté avec les habitants, alors qu’il s’agit d’une zone inondable, ça construit à tout va... »La SNCF, nous explique-t-il, est propriétaire d’une bande de 10 mètres de large de chaque côté des voies de chemin de fer. Pas assez pour mettre en place des mesures efficaces contre le ravinement.

IncendiesAvec le réchauffement climatique, les épisodes de canicule et les sécheresses s’amplifient, particulièrement dans le sud de la France. Chaque coup de vent peut conduire à des incendies plus ou moins graves. Du côté de la SNCF, des mesures sont-elles prises pour anticiper ? « Concernant les incendies, dans le ferroviaire, ils sont souvent causés par des essieux chauds ou

des freins serrés. Pour ce type de défaut, nous avons tous les 100 km des détecteurs de boîtes chaudes permettant de nous alerter si un train avait ce genre de problème. » Ingénument, la journaliste demande si, lorsque le feu passe par-dessus les voies, outre les dégâts occa-sionnés au système électrique, cela peut aussi déformer les rails sous l’effet de la chaleur ? À quoi le professionnel répond, amusé : « Ce qu’il peut se passer lorsque les caténaires* ont chauffé, c’est que nous faisons baisser les pan-tographes* des locomotives au point où il y a eu échauffement, puis nous procédons à une visite qui permettra de déterminer s’il faut en remplacer une partie. Pour ce qui est de la voie, je n’ai jamais vu, ni entendu que l’on avait rem-placé un rail parce celui-ci avait fondu lors d’un incendie. »

Cellules de criseEn tant que professionnel, justement, es-time-t-il que les autorités ferroviaires ont pris la mesure des changements ? « Je n’ai

pas l’impression que l’on ait ap-pris grand-chose dans la cellule de crise. En 2015 on s’est retrouvés à 20 agents pour gérer l’urgence. Les

renforts ont mis 4 jours pour arriver à Cannes. » Une lenteur qu’il attribue

à la direction, laquelle n’aurait pas éva-lué l’ampleur de la catastrophe, malgré

les informations transmises par le person-nel sur place. « En 2019, je n’ai pas l’impression

que cela ait été plus rapide. Bien-sûr, les situations ne sont pas comparables, mais au niveau de la réactivité, c’est une vraie Nouvelle Orléans ! » Christophe Campagna fait là allu-sion à l’ouragan Katrina qui frappa en août 2005 la côte des USA, dévastant tout sur son passage. La réaction confuse des pouvoirs publics américains, incapables de venir en aide aux habitants, trahit alors leur impréparation face aux risques naturels. L’État français et les collectivités locales, confron-tés aux changements climatiques, seront-ils plus efficaces ? L’avenir nous le dira. En attendant, le secrétaire général de la CGT Cheminots des Arcs et environs s’inquiète du service public que lui et ses équipes doivent assurer. La modernisation du réseau, notamment la signalisation en cabine (pour remplacer les panneaux, des boîtes communiquent par ondes d’un train à l’autre) peut entraîner une concentration du personnel. « Donc moins de monde pour l’entretien. Cela n’ira pas en fa-veur de la sécurité des installations. » Aujourd’hui, des agents de circulation sont répartis dans les petites gares. « On est à proximité des trains, des gens, des pannes en cas de besoin. Mais ils veulent tout télécommander depuis Marseille, pour faire des économies. J’imagine dans 15 ans : si un disjoncteur saute aux Arcs, il faudra attendre qu’un agent vienne de Nice pour le réparer ? »

GAËLLE CLOAREC

* Lexique

Ballast : Lit de cailloux sur lequel repose une voie de chemin de fer. Il stabilise le sol ainsi que les voies et limite les vibrations au passage des trains.

Caténaires : Ensemble de câbles porteurs et de fils conducteurs destinés à l’alimentation des moyens de transports électriques par un dispositif aérien de captage du courant. Les trains circulent grâce à elles.

Pantographe : Dispositif articulé permettant à une locomotive électrique, un tramway ou autres systèmes automoteurs électriques de capter le courant par frottement sur une caténaire.

Christophe Campagna © X-D.R.

© Christophe Campagna

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À quoi servent les énergies

« vertes » ?Sur le territoire

français, entre les centrales nucléaires

poussent les éoliennes et les centrales

photovoltaïques, portées par un discours

technocratique qui ne convainc pas les

populations

Les énergies renouvelables seraient une solution écologique à la crise environnementale. Mais dès qu’on l’observe de près, cette affirmation

s’avère suspecte. L’espèce humaine consomme de plus en plus d’énergie, afin d’alimenter un système économique en roue libre. La production électrique de l’éolien, du so-laire, ou de la biomasse s’ajoute au nu-cléaire, au pétrole, au charbon et au gaz pour éclairer jour et nuit nos villes, faire décoller nos avions, nourrir nos datas centers, objets connectés, smartphones. En fait de transition énergétique, il s’agit d’une accumulation, et les émissions de carbone continuent d’augmenter.

Sur le territoire français, les pouvoirs publics encouragent l’implantation d’éo-liennes ou de fermes photovoltaïques, sans pour autant renoncer à prolonger

la durée de vie des centrales nucléaires. Mais les experts du renouvelable sont confrontés à une opposition de plus en plus franche aux projets industriels de ce type. En Aveyron par exemple, des habitants ont contré pendant plusieurs années la construction d’un méga-trans-formateur sur la commune de Saint-Vic-tor-et-Melvieu. Le terrain a été occupé par un collectif appelé l’Amassada1 (l’as-semblée, en Occitan, à prononcer sans le « a » final).Le 15 janvier 2020, plusieurs de ses membres sont venus à Marseille parler de leur démarche et expliquer leur raison-nement. Les éoliennes sont d’énormes machines, nécessitant chacune des tonnes d’acier, de béton... et tout un appareillage qui implique des « terres rares ». Comme leur nom ne l’indique pas, celles-ci ne sont pas rares, mais difficiles à extraire. Elles le sont dans des sites ultra toxiques, notamment en Chine2, à un coût humain et environnemental exorbitant. L’une des jeunes habitantes de l’Amassada (écouter l’entretien complet sur notre webradio) s’insurge : « Cela ne nous touche pas car ces mines sont loin de chez nous. Ce sont des produits dangereux, mais passée la frontière, ça devient écolo ? ».

Déguisement vertPour elle et ses amis, le discours du ca-pitalisme vert n’est qu’une propagande techniciste, destinée à empêcher une vraie réflexion sur notre rapport à l’énergie. Si l’humanité doit se tirer de l’effon-drement de la biodiversité et du chaos climatique où l’extractivisme a plongé la planète, au lieu d’en consommer tou-jours plus il faudrait, comme l’écrit Ni-colas Casaux, membre de l’organisation

d’écologie radicale internationale Deep Green Resistance, avoir « en ligne de mire un abandon progressif de l’utilisation des -et de la dépendance aux- produits industriels high-tech et de l’électricité in-dustrielle ; un retour à un mode de vie simple, low-tech, basé sur un artisanat local, écologique, permettant un maxi-mum d’autonomie, un respect complet des équilibres biologiques, et des espèces vivantes non-humaines ».L’auteur Alessandro Pignocchi (lire p20), n’en pense pas moins. Il propose d’ima-giner une « source d’énergie magique, in-finie et absolument non polluante : prise dans les règles du marché, une telle énergie accélérerait dramatiquement l’artificiali-sation des terres, leur bétonnage, et donc précipiterait l’advenue d’un monde vide et tristement invivable. » Son point de vue est intéressant, car tout comme les ré-sistants de l’Amassada, ou les zadistes de Notre-Dame-des-Landes, il évalue avec clairvoyance la posture occidentale

© Amassada

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lorsqu’il faut envisager le devenir d’un lieu de vie. Le choix est restreint : ex-ploitation, ou protection. « En réalité, deux facettes complémentaires d’un même mode de relation, de sujet à objet ». Car la protection d’un territoire -pour services écosystémiques rendus, le fait qu’une zone arborée filtre les eaux, par exemple, ou pour ses aspects récréatifs, touris-tiques- reste une forme d’utilisation. Il alerte sur un « phénomène de cliquet » : quand on choisit de protéger une zone, on peut toujours changer d’avis et l’ex-ploiter. « L’inverse est plus complexe. Tant que l’on reste prisonnier de ce choix, on se dirige nécessairement vers des lieux protégés de plus en plus réduits. »

Logique industrielleExactement ce qui pousse d’autres per-sonnes, cette fois dans le département des Alpes-de-Haute-Provence, à lutter contre un projet de centrale photovoltaïque porté par la société SolaireParcMP079, filiale

d’Engie Green, au lieu-dit La Seygne. Bruno Seguy, habitant d’Ongles, la com-mune concernée, expliquait sur Radio Zinzine3 qu’il s’agit de défricher 12 hec-tares d’une forêt de pins maritimes, âgés de 70 ou 80 ans. Des sols acides atypiques pour le secteur, où croissent bruyère à balais et callune, en zone humide censée être préservée au titre du Schéma Régio-nal de Cohérence Écologique. « On nous présente ces projets pour lutter contre le changement climatique, et notre premier allié dans cette lutte c’est la forêt, comme puits de carbone. Donc elle n’est absolu-ment pas à détruire ! » Pourquoi choisir un espace naturel pour implanter des panneaux qui pourraient l’être en mi-lieu urbain, sur des toits de parking ou autre lieu déjà bétonné ? Selon lui, c’est la logique industrielle de la multinatio-nale qui prévaut. « Raser une forêt coûte moins cher que d’aller dans un espace déjà anthropisé. Pour Engie, Ongles n’est qu’un point sur la carte. Si on les laissait

faire, cela ne les gênerait pas de couvrir le département de panneaux. »Le gouvernement non plus, manifeste-ment : Bruno Seguy relate qu’Emma-nuelle Wargon, secrétaire d’État auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire, est récemment venue tra-vailler « l’acceptation sociale » par les po-pulations locales du développement des énergies renouvelables, en les incitant à participer à la solidarité nationale...

Contre-cultureComme l’exprime la chercheuse Chris-telle Gilabert4, « La difficulté consiste à affronter la capacité du modèle tech-no-libéral à absorber les critiques et à se les réapproprier pour les mettre au ser-vice de son propre essor. Et ce sans tou-cher au cœur de son fonctionnement, qu’il prétend ainsi rendre plus « vertueux » ou « durable ». » Le marché utilise les éner-gies vertes pour perpétuer le mythe de la croissance. Un procédé parfaitement

© Amassada

1515

détaillé dans un film documentaire réa-lisé par l’Amassada, Pa res nos arresta (en accès libre sur vimeo.com/207707152) : on y comprend la façon dont les pires multinationales, de Total à Coca Cola, se servent des crédits carbone pour pou-voir continuer à polluer. Le système de compensations mis en place par le Proto-cole de Kyoto le leur permet, il leur suffit d’investir dans un champ d’éoliennes... lesquelles, en plus, rapportent. La no-tion de pollueur payé, en quelque sorte.Ce sont ces aberrations que dénoncent les opposants au transformateur géant en Aveyron. « Ce n’est pas qu’une ques-tion de paysage », déclarent-ils, mais de culture. À la question de savoir comment résister au rouleau compresseur techno-cratique, ils répondent qu’il est difficile de défendre quelque chose qui se trouve à deux heures de là où on habite. Or « ha-biter un lieu, c’est l’opposé de le gouverner ou de le défigurer. » Lors de l’expulsion de l’Amassada en octobre dernier, deux blindés ont accompagné les pelleteuses chargées de la destruction des cabanes, avec « la volonté de détruire une utopie

de vie, l’imaginaire rendu possible ». « Les machines sont en train de détruire ce avec quoi on a grandi, déclare une toute jeune femme. On n’a pas le choix, il faut lut-ter ! Le jour où ils auront éclaté toutes les montagnes à coup de dynamite pour faire encore plus de profit, on n’aura plus notre place et il n’y aura plus aucun sens à se lever le matin. L’Amassada a eu du sens et elle en a toujours un. Il faudrait que des Amassadas fleurissent de partout. »

GAËLLE CLOAREC

1 Le blog de l’Amassada : douze.noblogs.orgFilm Pa res nos arresta : vimeo.com/207707152

2 lemonde.fr/asie-pacifique/article/2012/07/19/en-chine-les-terres-rares-tuent-des-villages_1735857_3216.html

3 Controverse photovoltaïque à Ongles, émission de Radio Zinzine du 30 novembre 2019 :zinzine.domainepublic.net/emissions/SPX/2019/SPX20191207-ControversePhotovoltaiqueOngles.mp3

4 https://usbeketrica.com/article/pourquoi-alternative-low-tech-tarde-se-generaliser

Mésanges subversives

Alessandro Pignocchi vient de publier son troisième Petit traité d’écologie sauvage, aux éditions Steinkis. Une

utopie graphique étonnante, peuplée de mésanges révolutionnaires et ironiques. Des enfants rentrent de leur classe de na-ture, où l’activité principale consistait à faire sauter un champ d’éoliennes, parce

qu’elles dérangent les populations de chauves-souris. Angela Merkel et Donald Trump dia-loguent paisiblement au coin du feu. Les chefs d’État ont perdu tout pouvoir coercitif, depuis que le monde a basculé du capitalisme vers le communalisme. Ce-lui qui a le plus de

mal à s’y faire est Emmanuel Macron : le choc a manifestement été trop déstabili-sant pour son esprit formaté. Le concept occidental de « nature » exploitable a dis-paru, hormis dans quelques secteurs où le mode de vie libéral persiste tant bien

que mal, observé avec étonnement par un anthropologue Jivaro.L’auteur, ancien chercheur en sciences cognitives, proche de Philippe Descola, est un ardent défenseur de la Zad Notre-Dame-des-Landes. Dans un texte lumi-neux, à la fin de l’ouvrage, il explique l’importance des rituels nés là-bas, les-quels densifient « le tissu de liens affectifs qui nous attachent à cette forêt et à ces milieux de vie ». Car l’être humain sé-crète de la culture comme l’araignée sa toile. Il n’y a qu’à voir comme en un an les Gilets Jaunes ont mis en partage, à partir de ce simple signe de reconnais-sance fluo, des lieux de rencontre, des chants, une forme de lutte...

DéséconomiserAlessandro Pignocchi s’intéresse aux usages alternatifs des zadistes. Il cite Jé-rôme Baschet, historien médiéviste pour lequel le capitalisme « a créé la supposée nature humaine à son image, en faisant de l’égoïsme et de l’intérêt personnel des valeurs positives, ce qu’aucune culture humaine n’avait fait auparavant » (extrait de l’essai Une juste colère. Interrompre la

destruction du monde, Éditions Diver-gences). Il célèbre la capacité des habi-tants, sur ce territoire de Loire-Atlan-tique, à bloquer la sphère économique « qui transforme en objet tout ce qu’elle touche », lui opposant ces « dimensions de l’existence qui ne peuvent être ni mesurées ni échangées, mais seulement éprouvées ». Un processus politique radical passant par l’entraide et la sobriété ; une « désé-conomisation » d’autant plus subversive qu’elle se déploie à travers un imaginaire foisonnant. D’où le titre de ce troisième tome, que l’on peut lire sans avoir pris connaissance des précédents (de toutes façons, il y a de fortes chances qu’on se les procure dans la foulée) : Mythopoïèse. Du grec ancien poïésis, création, fabrica-tion de mythes. Car ses jolies mésanges sont artisanes d’un nouveau monde : elles chantent ce que la Zad met en pra-tique en alimentant de bons légumes les luttes sociales.

G.C.

Petit traité d’écologie sauvage. Mythopoïèse Alessandro PignocchiSteinkis Éditions, 16 €

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La culture avec tousL’association Cultures du Cœur a organisé à la Friche de la belle de Mai ses Rencontres nationales autour du thème : « Culture et travail social : quelles pratiques pour quels objectifs ? »

Tout comme il est incroyablement choquant de réaliser que les femmes n’ont le droit de vote en France que de-puis 1944, il est troublant de se rappeler que ce n’est qu’en

1998, sous le gouvernement Jospin, portée par la ministre de l’Emploi et de la Solidarité de l’époque, Martine Aubry, qu’a été entérinée la Loi d’orientation* relative aux exclusions. Il s’agissait de garantir « l’égal accès de tous, tout au long de la vie, à la culture, à la pratique sportive, aux vacances et aux loisirs ». L’avancée était réelle, et les moyens devaient ensuite suivre pour répondre à ce qui constituait désormais « un ob-jectif national [qui] permet de garantir l’exercice ef-fectif de la citoyenneté ». Ainsi Edgar Dana, alors directeur de l’ancienne ANPE des professions du spectacle, saisissait l’opportunité et fon-dait l’association Cultures du Cœur, des-tinée à désenclaver les territoires et les populations, offrant aux plus vulnérables l’accès aux pratiques culturelles. Dès 2000, l’antenne marseillaise commençait l’essai-mage, avec la première antenne régionale ; 37 départements sont aujourd’hui couverts par le réseau, qui s’appuie sur la participation solide de partenaires culturels et structures sociales -combinaison qui s’avère être un puissant levier d’insertion et de remobilisa-tion auprès des publics en situation d’exclusion.Dans ce haut lieu de porosité entre action sociale et cultu-relle, Jean-Michel Djian, rédacteur en chef de la revue France Culture Papiers, introduisait cette journée à la Friche par une sorte de remise en question très personnelle, qui por-tait finalement sur l’ensemble du milieu de l’administration culturelle. Après 40 ans en prise avec les questions de dé-mocratisation de la culture (il a été conseiller de Jack Lang en 1981), habité par un idéal républicain qu’il revendique en-core haut et fort, il avoue cependant ressentir « une forme de désenchantement ». Fervent acteur de la transversalité entre les ministères, il constate pourtant se battre contre « ce que nous-mêmes avons mis en place » : la raideur de l’institution, les cloisonnements qui en découlent, les parcours du com-battant pour trouver une ligne budgétaire qui corresponde à la bonne case. Et pourtant, « jamais il n’y a eu autant de tra-vailleurs sociaux à se passionner pour la chose culturelle », ce qui aboutit selon lui à « une sorte de schizophrénie ».

Une question de vocabulaireÀ sa suite, les intervenants ont tous rivalisé pour ré-enchanter ce propos. Pascal Le Brun Cordier (université Paris I-Pan-théon-Sorbonne), en présentant plus particulièrement les

tiers-lieux « qui font du bien car ils font du lien » insistait sur le vocabulaire à employer, symptomatique des enjeux à dé-fendre. Il s’inscrit en effet très fortement contre l’expression consacrée d’« accès à la culture », qui sous-entend que les pu-blics concernés n’auraient pas de culture. Il préfère parler de « culture expérientielle », de « démo-praxie » : faire, en-semble, partout. C’est aussi ce qu’a défendu Marie Andrieu, qui est intervenue au Foyer d’accueil médicalisé Le hameau du Phare à Arles avec son association Tous égaux derrière l’objectif. Un projet photo auquel chacun a pris part, dans

une dynamique de volontariat / propositions. Dans un plaidoyer vibrant, Françoise Nyssen, ancienne mi-

nistre de la Culture venue là en voisine et en tant que présidente de l’association Musicatreize

(également invitée à présenter plusieurs de ses actions), évoquait la pratique comme pilier, comme fondement de la culture.

« J’ai hurlé ça au ministère, on ne voulait pas m’entendre ». « Tout le monde est porteur de

culture », a renchéri Laura Slimani, chargé de mission à la Fédération des Acteurs de la Solidarité.

Autre nuance entre les mots, relevée par Vincent Delahaye, fondateur du festival C’est pas du luxe !, qui diffé-rencie la vie et la survie. Offrir un toit, à manger ? Oui. Mais imposer « l’idée que la culture aussi est un besoin primaire » (L. Slimani), et être médiateur dans l’instauration d’« un lien au sensible et au beau ». Dans son association Le Village (Ca-vaillon), tout se déroule de manière décloisonnée entre les métiers, les activités, pour « être en permanence dans la ques-tion culturelle, et développer une démocratie impliquante ». Au fil des présentations des différentes actions, toutes inven-tives et très concrètes, il a bien fallu aussi pointer le manque criant de moyens alloués par l’État au travail social quand il est dirigé vers l’action culturelle, pour laquelle les crédits restent « totalement marginaux », dénonce P. Le Brun Cor-dier. L. Slimani renchérit en rappelant que le ministère de la Culture est conventionné avec tous les ministères, sauf celui des Affaires sociales... Une absurdité ? Le mot est bien faible, et ce n’est pas qu’une question de vocabulaire.

ANNA ZISMAN

* Loi d’orientation du 29 juillet 1998, article 140

Les Rencontres nationales de Cultures du Cœur ont eu lieu le 31 janvier à la Friche de la Belle de mai, Marseille

« Tout le monde est

porteur de culture »

Laura Slimani

1717

Graces, Silvia Gribaudi © Giovanni Chiarot eroidee

La 3e édition du festival accueille dix spectacles dont six écrits

par des femmes. Entretien avec Michel Kelemenis, directeur de Klap Maison

pour la danse

Zibeline : Qu’est-ce qui a motivé la création du festival + de genres ?Michel Kelemenis : Je souhaitais depuis longtemps ouvrir une page sur une question sociétale en écho direct avec l’expression du corps. Les questions de genre, de glis-sement de genre, de sexualité, de pornographie, tout cet environnement me semblait nécessaire à l’intérieur d’une maison comme celle-ci. Il nous a fallu du temps pour trou-ver une identité, une force, un dialogue pacifique avec notre environnement direct -car nous sommes dans un quartier où ces thématiques ne sont pas celles que l’on croise dans la rue à tout moment- mais aussi avec un public intéressé par la danse. C’est au bout de cinq ans que le temps m’a semblé juste, que j’ai ressenti comme une maturité pour le projet, pour sa perception, l’équipe, les gens de la ville.N’êtes-vous pas un précurseur à présent que le sujet est de-venu fréquent dans la création contemporaine ?Je n’avais pas réfléchi en ces termes. Lorsqu’on l’a lancé il y a trois ans, c’était un acte assez fort et salué, avec la conver-gence de publics et de professionnels. L’été qui a suivi la première édition, le Festival d’Avignon s’est consacré à cette question-là aussi. On se rend compte que les structures de spectacles qui essaient d’avoir une écoute vis-à-vis des grands mouvements de société ont ouvert, ici ou là, des fenêtres de programmation qui s’emparent du sujet. Des artistes également trouvent autour de la question large des genres, et qui peut toujours s’élargir, des manières d’oser les questions plutôt que de la poser. À leur façon, en incluant des performances, des moments inatten-dus de réalité virtuelle, ou se promener dans une interrogation sur soi et dans la lecture que l’on a de l’autre.Au fil des ans, la notion du genre à Klap s’est-elle étendue ?Dès de la départ, nous n’étions pas fo-calisé sur LA question du genre. C’est une manière d’observer la diversité, les singulari-tés. Nous vivons dans un monde où la communi-cation individuelle est multipliée par les réseaux sociaux. C’est un endroit où les individualités ont non seulement be-soin de s’exprimer mais aussi de se reconnaître. Nous voyons

aujourd’hui la société, les autres, dans un panel de couleurs infiniment plus riche qu’il n’a jamais été parce que cette fe-nêtre-là est ouverte. Je trouve important de l’explorer et de se rendre compte que, derrière ces effets de circulation d’infor-mation, il y a des personnes qui réfléchissent, qui se mettent en jeu, avec audace, pour partager une vision du monde.Comment se construit la programmation ?

Avec l’idée qu’il faut avoir cette ouverture dans la tête. Le thème étant large, il peut être relatif à

l’impact de l’humanité sur la planète, aux relations hommes-femmes, au glissement

de la pensée de sa propre personnalité. Il faut donc beaucoup d’écoute. C’est un voyage à travers des artistes qui re-viennent et trouvent ici un espace de confiance et de visibilité plus grandes que dans des manifestations plus mar-

ginales. L’équipe s’est aussi mise dans ce sillage. Je tiens à rester à l’endroit de

l’artiste que je suis, si bien que la program-mation est très largement confiée à Laurent

Meheust, le directeur adjoint. Êtes-vous attachés à présenter des créations ?

Bien sûr, Klap est un lieu de création, avec des résidences. Mais il me semble aussi important d’être attentif à ce qui

Cité Queer

+ de genres explorés, entre humour et étrangeté

Michel Kelemenis © Agnès Mellon

18 actualité culturelle LGBTQI du sud-est

Graces, Silvia Gribaudi © Giovanni Chiarot eroidee

se fait en matière de propos, à l’échelle de la danse. Il faut donc inviter des choses qui sinon ne viendraient pas. Nous avions reçu il y a deux ans, par exemple, Silvia Gribaudi et Liz Kinoshita, dans la cadre d’un autre festival, Question de danse, qui montrent des projets en chantier, commentés. Elles reviennent pour montrer leurs œuvres finalisées. Matthieu Hocquemiller, qui nous accompagne depuis le début, va en revanche présenter une création.Est-ce un festival tous publics ?Beaucoup choses sont accessibles à tous. Certaines sont ré-servées aux adultes. La nudité peut poser problème. Dans All

eyes on, Teresa Vittucci prend les traits d’une cam girl. Sa caméra connectée à un site Internet d’échange des corps de chacun, elle répondra aux sollicitations des internautes. Nous sommes tenus de protéger la jeunesse de choses qui peuvent, par définition, amener beaucoup d’inattendu. De nombreuses propositions sont à voir parfois avec humour aussi et portent leur lot d’étrangeté et je ne crois pas que le jeune public soit hostile à l’étrangeté, bien au contraire.

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR LUDOVIC TOMAS

+ de genres12 au 28 marsKlap Maison pour la danse, Théâtre Joliette Scène 44, Marseille04 96 11 11 20 kelemenis.fr

Sport inclusifÀ Marseille, les clubs LGBT accueillent des sportifs de tous niveaux, de tous genres et de toutes conditions

«Le sport pour tous et contre toutes formes de discri-minations. » La devise de Must fait recette. Créée en 2013, l’association multi-sports marseillaise propose

une cinquantaine d’activités à près de 400 membres. Foot-ball, basket, volley, athlétisme, escalade, tennis, randonnée, danse, pétanque, jeux de société... Les principales disciplines ont trouvé leurs amateurs parmi le public LGBTQI mais pas seulement. Hommes, femmes, transgenres, gays, lesbiennes, hétérosexuels : pas besoin de montrer patte blanche pour re-joindre la communauté de Marseille United Sport pour Tous. « Le principe de non-discrimination est inscrit dans nos sta-tuts. Un bon tiers de nos adhérents sont des femmes et une douzaine sont des personnes trans ou sans genre défini. Il n’y a aucun jugement et le mélange fonctionne. C’est magnifique », s’enthousiasme Giampiero Mancinelli, l’un des cinq cofon-dateurs de l’association, aujourd’hui vice-président. Les bar-rières économiques, sociales voire juridiques n’ont pas da-vantage leur place à Must où ceux qui n’ont pas les moyens de payer leurs cotisations comme les réfugiés avec ou sans papiers sont les bienvenus.

Footballeuse transgenreÀ l’instar de la plupart des bars et des boîtes de nuit estam-pillés LGBT, les associations sportives sont donc elles aussi des espaces d’inclusivité où l’acceptation de la diversité sous

Au programme12 mars : Cellule, Nach ; Soulèvement, Tatiana Julien - Klap Maison pour la danse

14 mars : Stimmlos Zwei, Arthur Perole - Théâtre Joliette

18 mars : Not I, Camille Mutel ; « ‘StɔːRiz », Joachim Maudet - Klap

21 mars : All eyes on, Teresa Vittucci - Klap

27 & 28 mars : Goupils, Matthieu Hocquemiller - La Scene44

24 mars : You can’t take it with you, Liz Kinoshita - Klap

28 mars : Best regards, Marco D’Agostin ; Graces, Silvia Gribaudi - Klap

1919

À Pâques, des mini JO contre les discriminationsDu 10 au 13 avril aura lieu la 6e édition de GaySportMed, à Marseille. Bisannuel, ce tournoi est la plus importante manifestation sportive LGBTI+ de la deuxième ville de France. Environ 500 participants sont attendus à sept compétitions : badminton, course à pied, football fé-minin et masculin, pétanque, natation et volley-ball. Quelque vingt-cinq nationalités seront représentées, principalement européennes. Le premier jour, un village d’accueil avec animations et forum asso-ciatif sera installé sur le Cours d’Estienne-d’Orves tandis que la soi-rée de clôture aura lieu au Cabaret aléatoire.

L.T.

GaySportMed10 au 13 avrilMarseille

gaysportmed.com

Cité Queer

toutes ses formes favorise des situations singu-lières. Comme par exemple cette footballeuse transgenre qui se retrouve par choix gardienne de l’équipe de foot masculine. Ou bien cet homme hétérosexuel aux tendances homophobes, arrivé dans le club sans savoir où il mettait les pieds, et qui, aujourd’hui, est très investi dans l’asso-ciation où il vient accompagné de sa compagne et de leur fils. En novembre dernier, Must était invité par l’Olym-pique de Marseille dans le cadre d’un tournoi contre les discriminations. « On pourrait se de-mander pourquoi les sportifs LGBT ressentent le besoin de se retrouver dans des associations dédiées, interroge Philippe Cottin, président des FrontRunners. Quoi qu’on dise, les notions de sexualité, de relation au corps jouent aussi. C’est quand même plus sympa de faire du sport entre personnes qui partagent les mêmes modes de vies. Cela nous donne la possi-bilité d’en parler librement. »

« Je n’aurais jamais fait de sport »« Personne ne prend les gestes comme des allusions sexuelles, nuance Giampiero Mancinelli. Être gay m’a toujours freiné dans ma pratique. Je suis petit, pas très musclé, je n’aurais jamais fait de sport s’il n’y avait pas eu de clubs LGBT », ad-met-il. Pionnière dans le milieu sportif LGBT à Marseille, les FrontRunners ont fait leur apparition en 2002. Plus modeste en membres et en propositions que sa benjamine, l’associa-tion est liée au réseau international éponyme, présent dans plusieurs grandes villes du pays. Mais l’antenne marseillaise est la seule à proposer quatre sections sportives en plus de la course (natation, badminton et volley) et à insister sur la dimension conviviale. « Nous tenons à favoriser les moments de partage et d’échange au-delà du sport. Nous organisons des apéros mensuels, des sorties cinéma et théâtre, des week-ends à la montagne ou à la mer », explique Philippe Cottin. L’inté-gration des femmes est aussi une préoccupation permanente avec l’organisation, depuis 2015, d’une opération de sensibi-lisation appelée Juin, mois du sport au féminin.

Affiliations et compétitionsFrontRunners et Must sont affiliées à des organisations qui ne concernent pas que la communauté LGBTQI comme la FSGT (Fédération sportive et gymnique du travail) ou la Fé-dération française d’athlétisme, ce qui facilite un certain nombre de démarches, notamment en termes de licence et de participation à des compétitions locales, nationales et internationales. Toutes deux passent des conventions avec les collectivités, principalement la Ville, pour utiliser les in-frastructures publiques comme les stades, les gymnases et... les piscines. « Pas une seule n’est digne de ce nom à Marseille,

à part le Cercle des nageurs, mais ce n’est pas pour nous. Il y a des gymnases sans douche... », ironise Philippe Cottin. Car dans le domaine de l’accès au sport, usagers LGBT et hété-rosexuels cisgenres font face à la même incurie municipale.Au mois d’avril, les deux associations organisent ensemble la 6e édition de GaySportMed, la compétition pluridisciplinaire marseillaise bisannuelle qui rassemble plusieurs centaines de sportifs européens (lire ci-dessous).

LUDOVIC TOMAS

frontrunnersmarseille.org must13.org

© X-D.R

20 actualité culturelle LGBTQI du sud-est

Bruno Allary © Muriel Despiau

Refusant de s’enfermer dans les cases, Bruno Allary a pris dès l’enfance le goût du divers, le flamenco à la maison, inépuisable source, et le

jazz à l’école. Il se sent à l’aise dans cet « entre-deux, ces allers et retours entre la multiplicité des pratiques et des ma-nières de projeter la musique » qui l’on construit. Si bien qu’il ne peut envisa-ger un concert monolithique, consacré à un seul genre, soit arabo-andalou, soit jazz ; le mélange des deux est indisso-ciable, autorisant des zones de tension, permettant des passages, des ponts, des échos. « Je n’ai pas envie de choisir émo-tionnellement, je me sens bien à la croi-sée… j’aime bien braconner », sourit-il.

Pour un art collectifComme tout l’intéresse, Bruno Allary, qui revendique son double apprentissage, se plaît aux rencontres, jouant d’abord beaucoup avec des musiciens et des chan-teurs du pourtour de la Méditerranée. Ainsi est né il y a vingt ans l’ensemble à géométrie variable Rassegna. Les quinze premières années de cet ensemble, au titre qui évoque ce qui rassemble, ont été dominées par l’interprétation des mu-siques traditionnelles et du monde, selon une géographie qui permettait d’arpen-ter les contrées méditerranéennes, et de les mettre en regard. Des disques, des concerts, beaucoup, et des musiciens, des artistes, qui passent, qui restent, qui reviennent… Bruno Allary se refuse à tous les citer de peur d’en oublier un

ou une, chacun étant précieux dans ses apports, sa démarche, son humanité. La géométrie du groupe est à l’image de la vie, se bâtit de rencontres. « À petite échelle, l’art se construit comme la vie », sans cesse en mouvement. Si on lui de-mande pourquoi il ne s’est jamais pro-duit en solo, il rétorque que « la musique n’est pas une démarche solitaire, la ren-contre est le moteur de la création. Tout s’échafaude sur la rencontre… ». Jouer avec, « créer une fratrie »… mais tout se prépare en deux temps cruciaux : celui du « travail de laboratoire » qui entraîne le choix d’une époque, d’un répertoire, de compositions originales, d’arrange-ments, s’effectue en solitaire ; puis ce-lui du partage, des discussions, du re-modelage, des interventions des uns et des autres, temps au cours duquel tout se soude et se scelle…

Abolir les frontièresIl y a cinq ans, un pas de côté s’esquisse, essentiel dans le parcours du musicien et de son ensemble. « Avant, croiser les musiques populaires de la Méditerranée constituait un espace de liberté dans le-quel je me sentais bien et dont je ne pen-sais pas sortir un jour, sa richesse, ses re-nouvellements me suffisaient… ». Avec Il Sole no si Muove (paru chez Buda Music, lire sur journalzibeline.fr) sont entrées au répertoire des musiques « savantes » et certaines hors du champ méditerra-néen, puisque venues d’Angleterre. C’est une démarche qui a peu de précédents,

souvent les musiciens spécialistes des musiques savantes « s’encanaillent avec un brin de condescendance, en allant vers des musiques populaires, mais l’inverse se pratique peu, comme si une cloison se dressait entre les interprètes des musiques « populaires » et celles, savantes, trônant dans leur empyrée, inatteignables… ». En musique, « la propriété, c’est du vol », personne n’a à s’arroger tel ou tel genre,

Cette année la compagnie Rassegna fête ses 20

ans, et la salle l’Éolienne ses 10 ans. Portrait

du musicien Bruno Allary dont le parcours

est intimement lié à l’une comme à l’autre

Braconner tous les savoirs

22 portrait

Bruno Allary © Muriel Despiau

tel ou tel domaine, « elle appartient à tous ! ». Ensuite, la musique se conjugue avec d’autres domaines. Avec l’historien Patrick Boucheron et la joueuse de flûtes kaval Isabelle Courroy, Bruno Allary propose un spectacle, Contre-temps (dont le CD sortira à la rentrée 2020), où les mots de l’historien tissent avec la poésie des musiques qui empruntent aux guitares électriques comme aux instruments plus tra-ditionnels (flûtes), une nouvelle forme où se catapultent les temps, où le Moyen-Âge nous redevient proche, où le passé et le présent se parent de nouvelles résonnances…

Un présent chargé de futursGrâce à la convention signée avec le théâtre Durance pour une période de trois ans, s’ouvrent de nouvelles perspectives, dans les domaines de la transmission, diffusion et création, avec de vraies rencontres entre les collectifs : les équipes de l’Éolienne, lieu d’ancrage de la compagnie Rassegna depuis dix ans, et du théâtre seront amenées à échanger sur leurs pratiques, sans compter la commande de création. « J’ai enfin du temps pour penser, composer, répéter, encore et encore ! », se réjouit Bruno Allary. Il s’agira du troisième volet du trip-tyque consacré au temps (dont les premiers sont Il Sole non si Muove et Contretemps), Qui-vive ! (prévu le 11 mars 2021 à Château-Arnoux-Saint-Auban). « J’ose m’atteler à la mu-sique baroque, qui me semblait la plus lointaine ». « L’idée est de nous remettre dans l’état de quasi-sidération qui a été celui des premiers auditeurs de cette musique, tenter de rejouer de manière à ce que tout soit un peu en intranquillité, renouer avec les bruits résiduels des instruments de l’époque… Aujourd’hui, on va de plus en plus vers la pureté, or toutes ces musiques ont leur part de bruits, et je propose de nous ramener à l’intérieur de ces compositions baroques du XVIIe avec les instruments d’aujourd’hui. » Pour ce faire sont rassemblés Carina Salvado, chanteuse de fado (et percussions), Clémence Niclas (flûtes à bec), Nolwenn Le Guern (viole de gambe), Bruno Allary (chant, guitares élec-triques et baroques) et Isa L.Atipik (turntable). Cette dernière, première femme championne de France de Djs DMC 2019, ainsi que 3e mondiale de cette discipline (catégorie Battle) où elle était aussi la première femme à concourir, « fait chan-ter ses disques, rejoint par son mouvement la spirale baroque, dans quelque chose qui incarne ses ostinatos et le bruit qui va avec ! », explique Bruno Allary. Attention ! Le bruit signifie simplement la présence de la matière, du souffle, des gestes, de l’incarnation de la musique dans la chair des instruments ! La beauté est essentielle. « Je suis sans cesse en quête du beau, c’est par lui que naît l’émotion ».

Un lieu de rencontres culturelles« L’Éolienne retrouve enfin son immeuble, qui était en travaux, menaçant d’effondrement, et la Maison du Chant d’Odile Le-cour nous a accueillis avec générosité durant quinze mois » souligne-t-il. Rassegna est de nouveau dans ses murs en ce début 2020 et Claire Leray, sa directrice de production, a réussi le tour de force de concentrer la programmation de l’année entre janvier et mai, d’où un calendrier dense ! Les contes sont particulièrement présents, cent quarante spec-tacles « hors les murs » sont prévus, avec une constellation de conteurs dont la venue colle toujours au plus près des pro-positions musicales et des lieux. Générosité, goût du beau et un inextinguible appétit de dé-couverte… De quoi nourrir nos impatiences !

MARYVONNE COLOMBANI

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MIC

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À Aix-en-Provence,

6Mic promet bonnes ondes et

secousses musicales

24 événements

Nouveau temple des musiques actuelles, le « rocher » dispose d’équipements de pointe. Dédié à la diffusion et à l’accompagnement d’artistes, il consacrera une large part aux talents du territoire

Avec sa coque en béton propulsé, pensé comme un drapé minéral recouvrant l’ensemble de l’édifice, elle aurait presque des airs de Sainte-Victoire. Les plus narquois penchent plutôt pour le rocher des singes du zoo de Vincennes. Espérée depuis une vingtaine d’années, 6Mic,

la nouvelle salle de musiques actuelles du Pays d’Aix, ouvre ses portes le 6 mars. Avec deux salles modulables aux jauges maximales respectives de 2000 et 800 places, l’édifice de plus 5000 mètres carrés conçu par les architectes Rudy Ricciotti et Jean-Michel Battesti devient la plus grande scène française dédiée aux musiques actuelles. Devant l’Aéronef de Lille et Paloma à Nîmes. En atten-dant l’obtention du label ministériel Smac (Scène et non pas salle de musiques actuelles), l’équipe, dix-sept permanents répartis en cinq pôles, a bâti un projet ambitieux qui devrait considérablement changer la donne musicale, non seulement dans la ville mais aussi sans doute au-delà, de la mé-tropole à la région.

Plusieurs salles et studiosVoisine de la Fondation Vasarely, 6Mic n’est pas qu’une salle de concert, ni même deux. Elle dis-pose de cinq studios de répétition, d’un studio de préproduction et d’un bureau de production. Le matériel provenant à 95% des fournisseurs locaux. « C’est un équipement qui manquait au Pays d’Aix. L’idée n’est pas seulement d’accueillir des musiciens qui viendront travailler dans les studios mais de leur proposer un accompagnement sur la voie de la pro-fessionnalisation à travers plusieurs dispositifs qui vont de trois jours à trois ans, selon leurs besoins », détaille Laurence Hébrard, codirectrice du lieu. Et de préciser : « Les opérateurs du territoire et no-tamment les associations ont énormément agi. On ne va pas faire à leur place mais construire ensemble, à partir de leur expérience et aussi en inventant de nouvelles choses ». Une orientation sur laquelle in-siste Stéphane Delhaye, le directeur.

© 6

MIC

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Salle Club © 6MIC

Grande Salle © 6MIC

25

Des partenariats en construction« On les connaît de longue date pour être, nous aussi, des locaux. On ne les a pas tous encore rencontrés mais on a com-mencé à travailler avec un certain nombre d’entre eux. Nous avons par exemple des pistes de collaboration avec l’associa-tion Aix’Qui ? qui organise le fameux tremplin Class’EuRock et Seconde Na-ture. » Et surtout avec Comparses et Sons dont le directeur Frédéric André est programmateur associé, aux côtés de Marc Housson. « Lui est plus dans les musiques afro-américaines tandis que moi je viens de la musique électronique, détaille le programmateur en titre. On est

assez complémentaires et notre mission en tant que salle de musiques actuelles est de programmer toutes les esthétiques. J’ai envie de monter des plateaux avec des jeunes groupes locaux. C’est important et une belle expérience pour eux. Mais on ne se privera pas de programmer des groupes plus anciens ».

Artiste associéDes partenariats avec des événements marseillais ne seront plus sacrilèges. Ils sont déjà actés avec les festivals Avec le Temps et Le Bon Air. C’est aussi le cas avec Jardins sonores, de Vitrolles. « On discute avec ceux qui nous regardaient un peu de travers par crainte que notre

dimension écrase ce qui existe autour de nous. On va faire très attention en essayant de coordonner nos programmations pour

Quelques chiffres Coût des travaux : 20 500 000 € TTC

dont participations de l’État et du Conseil régional à hauteur de 1,66 M€ chacun.

Superficie du terrain :15 900 m²

Surface de plancher du bâtiment : 5151 m²

Parking : 225 places et 152 supplémentaires mutualisées avec le pôle numérique

Nombre d’événements par saison : 126 dont 103 concerts (50% en programmation propre, 35% en coproduction/coréalisation, 15 % de productions extérieures)

Objectif de résidences d’artiste : 17

Patio intérieur, vue depuis le grand Hall © 6MIC

Laurence Hébrard et Stéphane Delhaye, codirecteurs du 6MIC © Vincent Agnès

Marc Housson, programmateur du 6MIC © Vincent Agnès

26 événements

ne pas se marcher dessus », rassure Marc Housson. « Nous sommes ouverts à toutes propositions d’autres partenaires potentiels », complète Stéphane Delhaye. À chaque nouvelle saison, 6Mic désigne un artiste as-socié. Un autre type de partenariat qui voit un profes-sionnel s’impliquer dans la vie du lieu, contribuant à la ligne artistique et aux actions culturelles (ateliers, formations, master class). En échange, la structure devient son lieu principal de travail où il pourra me-ner à bien ses propres projets. C’est Kevin Rodriguez, alias Worakls (programmé le 7 mars) qui essuie les plâtres des premiers dix-huit mois.

Des tarifs accessibles...Sur un budget prévisionnel d’environ 3,2 millions d’euros, autour d’1,3 est attendu de la part de l’en-semble des collectivités. À l’heure actuelle, la métro-pole Aix-Marseille, institution de tutelle, a attribué 870 000 euros à la SCIC (société coopérative d’intérêt collectif) Iris, gestionnaire du site par délégation de service public (DSP) pour une durée de 7 ans (2019-2026). Une DSP dont le cahier des charges comprend une politique tarifaire volontariste s’engageant à ne pas dépasser le prix de 25 euros pour les concerts de la grande salle et de 15 pour ceux du club. « Évidem-

ment, ces tarifs ne concernent que nos propo-sitions, pas celles des producteurs à qui nous louerions le lieu », précise Stéphane Delhaye, également gérant d’Iris.Côté technique, les équipements sont du der-nier cri. « Nous aurons la première salle au monde dotée du nouveau système piloté de manière numérique inventé par la société de Christian Heil. »

… plus que les transportsReste une faille. Et pas des moindres. Celle des transports publics collectifs pour accé-der au site. Des discussions sont toujours en cours pour obtenir la mise en place d’une na-

vette reliant 6Mic à l’arrêt de bus le plus proche, à 700 mètres. Cet accord trouvé, il sera malgré tout difficile aux spectateurs non motorisés de ne pas choisir entre la fin d’un concert et le dernière bus urbain.

LUDOVIC TOMAS

6Mic, salle des musiques actuelles du Pays d’Aix160, rue Pacal Duverger13090 Aix-en-Provence

6mic-aix.fr

Au programme

6 mars (complet) : Mekanik Kantatik + Instrumentarium + Yann Cleary (grande salle) ; Lau Rinha + Stony + Bru Vintage + Jacket + Hollowgram + Virago + Own (club)7 mars :Worakls Orchestra8 mars : Fred Nevché + Damasio & Yan Péchin, en coréalisation avec le festival Avec le temps12 mars : Richard Bona & Alfredo Rodriguez (grande salle) ; Nelick + Kemmler (club) 13 mars : Las Aves + Thelma14 mars : Blick Bassy 19 mars : The Wackids 21 mars : Malik Djoudi + Donald Pierre 22 mars : Ayo 26 mars : Les Amazones d’Afrique + OC69 27 mars : Hypnotic Brass Ensemble + Selecter the Punisher 9 avril : Spianbifida + Claude Fernand + Kriekelstein10 avril : Vox Low + FK Club11 avril : Catherine Ringer chante les Rita Mitsouko 18 avril : Erik Truffaz Quartet + Uncle B!M 24 avril : Lofofora + Ricine25 avril : Ben l’Oncle Soul + Jacket 29 avril : Süeür + Kamaï2 mai : Raoul Petite 3 mai : Salif Keita8 mai : Tour Sud au profit de SOS Méditerranée avec HK, Caravane Namasté, Sergent Garcia...9 mai : Ken Boothe + Natural Bashy Soundsystem27 mai : Oxmo Puccino 23 septembre : Peter Hook & The Light

Worakls © X-D.R

Fred Nevché © B. Jamot

Ayo © Sophie Koella

Blick Bassy © Justice Mukheli

Laurence Hébrard et Stéphane Delhaye, codirecteurs du 6MIC © Vincent Agnès

Marc Housson, programmateur du 6MIC © Vincent Agnès

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Avec 34 concerts dans 20 lieux, le festival de la chanson francophone continue de se déployer dans la métropole marseillaise

Découvrir, au détour d’un bar ou d’une gare, la chanson pop de Charlène Darling, de Charlotte Fever, d’Anto-nin Appaix ou celle, plus électro de Harm. Ces artistes,

parmi d’autres, sont programmés dans le Parcours Chanson, gratuit, proposé par le festival Avec le temps, qui déroule sa 22e édition comme une annonce de printemps musical à Marseille et ses alentours. Plus haut sur l’affiche, des valeurs montantes de la chanson francophone dont la langue peut même aller au-delà, comme c’est le cas avec le phénomène Mohamed Lamouri, chanteur malvoyant repéré sur la ligne 2 du métro parisien. Juniore, lui, mélange les genres et les époques, inventant une sorte de « yéyé noir ». Quant à Tsew the Kid, il se la jouerait plutôt rappeur crooner. On ne saurait trop recommander l’Orient psychédélique de Mauvais Œil ou la violoncelliste électro Tallisker. Personne n’a pu oublier Suzane, révélation de l’édition 2019, qui revient auréolée de son grandissant succès. Aussi bien qu’elle manie la comédie, le chant, la danse et le cirque, Aloïse

Sauvage brasse hip-hop, électronique et chanson française. Baltazar Montanaro, au violon baryton, présente son album Amours, un répertoire engagé, rappelant des épisodes obscurs de l’histoire auxquels il oppose la beauté dont la nature hu-maine est capable. La poésie de Clara Ysé fait tourbillonner pop française, gammes sopranes et folk latino-américaine. Écrits encore plus gros, les noms d’Izia et de Fred Nevché garantissent de belles envolées rock, à la fois sensibles et en-ragées. Tout près des étoiles, la reine Brigitte Fontaine aux provocations acerbes et décalées donnera un concert déjà complet. Groupe emblématique des années 90, Les Inno-cents, devenus duo, n’ont peut-être jamais été aussi libres d’affirmer leur pop harmonieuse et fédératrice. Et pourquoi ne pas convoquer un héraut du reggae revendicatif ? À l’image de l’Ivoirien Tiken Jah Fakoly, devenu un porte-drapeau in-ternational et intergénérationnel des aspirations émancipa-trices du continent africain. Avec le temps, le rap ne s’invite plus, il s’impose. Celui de Lonepsi, pointu, exigeant et chargé d’émotions. Celui des Fixpen Sill, explorateurs de nouvelles sonorités. Ou encore celui de Jock’Air, à la fois brut et dan-sant, nourri aux influences du disco. À découvrir enfin des pépites de la scène québécoise comme Clay and friends ou Les Louanges.

LUDOVIC TOMAS

Avec le temps5 au 28 marsDivers lieux, Marseille et alentours

festival-avecletemps.com

Quelques rendez-vous5 mars : Météo Mirage + P.R2B + Ian Caulfield Le Makeda, Marseille

6 mars : Mohamed Lamouri + Tiken Jah Fakoly - Salle Guy Obino, Vitrolles

8 mars : Fred Nevché + Alain Damasio & Yann Péchin - 6MIC, Aix-en-Provence

10 mars : Juniore + Izia - L’Espace Julien, Marseille

11 mars : Brigitte Fontaine (complet) - Le ZEF, Marseille

12 mars : Tessae + Tsew The Kid - L’Espace Julien, Marseille

13 mars : Tallisker + Mauvais Œil - Le Makeda, Marseille ; Lous and the Yakuza, Julien Granel + Les Louanges + Suzane + L’Impératrice - Dock des Suds, Marseille

14 mars : Clay and Friends + Cadillac - Le Makeda, Marseille ; KLNO + Fixpen Sill + Yseult + Jok’Air + Vladimir Cauchemar - Dock des Suds, Marseille

15 mars : Baltazar Montanaro + Clara Ysé - Montévidéo, Marseille

19 mars : Louise Verneuil + Les Innocents - L’Espace NoVa, Velaux

28 mars : Roxaane + Lonepsi + Aloïse Sauvage - L’Espace Julien, Marseille

Avec le temps voit plus grand

Mauvais Oeil © Jules Faure

28 événements

On dirait les Suds, mais en hiver

Co-réalisés par le festival de musiques du monde et le conservatoire de musique du Pays d’Arles, les Suds en hiver célèbrent la diversité culturelle

Nous l’avons découvert en première partie d’un Bobby McFerrin éteint. L’été dernier, dans le théâtre antique

d’Arles, la lumière est venue de Rusan Filiztek. Ce chanteur et musicien vir-tuose est l’un des plus jeunes et émi-nents représentants de la musique tra-ditionnelle kurde. S’inspirant des chants et mélodies d’Anatolie et de Mésopota-mie, il tisse un dialogue aussi émouvant qu’envoûtant entre les musiques et les époques. Sa voix veloutée, son jeu raf-finé au tembur (luth saz à cordes métal-liques) résonneront avec majesté dans le Château de Tarascon (le 1er mars) où il sera accompagné du percussionniste

kurde Neset Kutaz et du multi-instru-mentiste breton Sylvain Barou, ici au duduk, le hautbois arménien.Pierre-Laurent Bertolino reste pour la plupart des amateurs des musiques à fort ancrage territorial le Monsieur vielle à roue électro-acoustique de Du-pain, lancé à la fin des années 90 entre Marseille et Port-de-Bouc et reformé en 2015, avec l’élargissement à de nou-veaux musiciens dont le Breton Gur-vant Le Gac, à la flûte traversière, passé par la Kreiz Breizh Akademy #2 d’Erik

Marchand. La seconde vie de Dupain sera brève mais donnera naissance à une nouvelle aventure : le duo Bertolino-Le Gac (le 4 mars). Ses sonorités inspirées et oniriques explorent les confins d’une musique modale nourrie aux sources de Bretagne et des Pays d’Oc, qui s’affran-chit du temps, offrant une ballade sou-vent hypnotique et toujours surprenante.

Éclectique Titi RobinC’est avec l’un des pionniers des mu-siques du monde en France, habitué des étés arlésiens, que la programmation se poursuit. Titi Robin (le 5 mars) renoue avec la saveur gitane et la puissance ryth-

mique de ses premières formations. Il officie cette fois en duo, avec son complice guitariste et chanteur Roberto Saadna, spécialiste réputé de la rumba catalane, rencontré en 1993 à l’époque de l’album Gitans. L’univers musical de Titi Robin est un croisement des cultures gitanes et orientales qu’il vit intimement et au-quel il apporte sa touche de guitariste néanmoins occidental. Du flamenco au gnawa, du qawwali au maloya, en passant par les musiques indiennes, bretonnes ou des Balkans, Thierry Robin n’a cessé

de s’immerger dans des courants qu’il a le talent de rapprocher. « Il était temps pour moi de revenir aux sources gitanes, de replonger dans la force du compás ca-talan et de ses palmas, de retrouver la voix unique et brûlante de Roberto Saadna », dévoile-t-il. À l’initiative des Suds et du conservatoire, Le Chœur Battant est une chorale qui réunit plus de 220 élèves de primaire. Il revient cette année à la chanteuse, flûtiste et pédagogue Clotilde Rullaud de diriger ce voyage au cœur des mu-siques et cultures du monde, accompa-gnée par les musiciens Grégory Dargent et Étienne Gruel (le 6 mars).

Cameroun, Italie et CubaLe folk-singer camerounais Blick Bassy (le 7 mars) aborde un pan méconnu de son pays d’origine à travers l’histoire de Ruben Um Nyobe, père oublié de l’in-dépendance. Accompagné par le violon-celliste Clément Petit, le tromboniste Johan Blanc et le trompettiste et cla-viériste Alexis Anerilles, il présente la version scénique du remarquable 1958. Un dernier album très personnel dans lequel l’artiste poursuit sa quête intime, à la fois minimal et organique, où coha-bitent cordes, cuivres et synthés.Deux femmes clôturent cette troisième édition des Suds en hiver : l’Italienne Ma-ria Mazzotta et la Cubaine Ana Carla Maza (le 8 mars). La voix puissante de la première, l’une des plus émouvantes des Pouilles, nous plonge instantané-ment dans les traditions anciennes du bassin méditerranéen. La seconde, chan-teuse violoncelliste, fait corps avec son instrument, déployant une gamme de couleurs et de sensations, du classique au jazz en passant par la pop.

L.T.

Les Suds, en hiver1er au 8 marsDivers lieux, Pays d’Arles04 90 96 06 27 suds-arles.com

Rusan Filiztek © Yann Etienne

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Babel Minots monte dans les toursQuand ce n’est plus les vacances, elles recommencent presque pour les petits Marseillais et Miramasséens, puisque s’ouvre dès la mi-mars un festival qui leur est entièrement dédié

Cette année, Babel Minots, Festival autour des musiques pour le jeune public, rentre chez les grands : il souffle sa 6e bougie, est accompagné pour la deuxième fois par son

compère Avec le Temps (lire p 28) et accueille un nouveau par-tenaire, Nuits Métis à Miramas ; et c’est le Nomad Café (20 ans cette année !), salle de musiques actuelles pour l’enfance et la jeunesse, qui lui tient la main. Alors autant voir tout en grand : entre 14 lieux répartis dans les 2 villes, 18 compagnies (dont 6 régionales) viendront régaler les jeunes oreilles de sons qui les feront voyager au pays des langues et des sons venus de tous les étages de la tour de Babel.En route, dès 3 ans, au rythme des instruments et contes africains, animés par Lamine Diagne (Cie de l’Enelle), qui perce les mystères de l’amitié entre les animaux et l’origine de la kalimba (Le Cri du Port). Gurvan Liard et Nanih Vi-tard s’arrêtent au Sénégal, où le vieux Souleymane raconte son périple, qui l’avait mené jusqu’en Europe (Le Voyage de

Souleymane, à partir de 7 ans, Nomad’ Café et Médiathèque de Miramas). Jean-Baptiste Soulard s’adresse à tous les pu-blics avec un spectacle à la fois dansé et chanté, accompagné de vidéo, dont il présentera une sortie de résidence (Le Si-lence de l’eau, Cabaret aléatoire, gratuit). « La musique, c’est la vie », a prononcé la grand-mère de Firmin & Hector avant de mourir. Les deux l’ont prise aux mots, et depuis ne se sont jamais arrêtés de chanter ! Mais tout de même, que se pas-serait-il s’ils osaient (Nomad’ Café) ? Une autre grand-mère

cineklang © Christine Francois

Echappées belles dans la roue du Vélo11e édition de la Biennale de théâtre d’objet Greli Grelo concoctée par le Vélo Théâtre en Pays d’Apt

Premier lieu à avoir été labellisé « Scène conventionnée théâtre d’objet » en Région Paca par le ministère de la

Culture (en 2017), le Vélo Théâtre, fondé par les plasticiens Tania Castaing et Charlot Lemoine, développe « le croise-ment des arts et l’accompagnement d’ar-tistes qui fabriquent et expérimentent des œuvres nouvelles », donne une visi-bilité aux projets de création misant sur le théâtre d’objet, au croisement des arts plastiques et de la scène. Depuis la pre-mière édition en 2008, le festival Greli Grelo a pris de l’ampleur, investissant les lieux culturels de la ville d’Apt et la salle des fêtes de Saint-Saturnin. Cette 11e édition ne déroge pas à la règle, in-vitant des artistes venus d’Italie, d’Alle-magne, d’Ecosse et de plusieurs régions de France, tous porteurs d’imaginaires propices au voyage.

C’est un des spectacles emblématiques du Vélo Théâtre, Enveloppes et déballages, qui donne le ton dès la soirée d’ouver-ture (28 février). Un théâtre fourmillant d’objets jaillissant de colis délivrés par un facteur fantaisiste, créateur de mondes minuscules, colorés et enchanteurs ! Le même soir, et durant 6 jours, le « bri-co-luminologue » Flop (Philippe Le-febvre) fera jaillir de son Travel-lllling une radiographie poétique d’objets et de vêtements au gré d’ombres, reflets et couleurs révélateurs, tandis que les Ombres électriques de la Cie Florschütz & Döhnert tournent, roulent, créent ombres et lumières lors des rotations d’une drôle de machine qui turbine en musique. C’est aussi en musique -claviers, percussions, objets en tous genres- et en ombres chinoises que la Cie du Pestacle convie les tout-petits (dès 2 ans) Sous la lune, là où le sommeil rejoint les rêves les plus doux et efface les petites peurs en révélant des trésors imaginaires… Les plus grands ne sont pas en reste, avec

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30 événements

Babel Minots monte dans les tourscélèbrera la musique (Cie Alatoul), le jazz swing qui sort de sa contrebasse, qui l’accompagne depuis son enfance et qui l’a sau-vée de tous les tourments, en particulier ceux de la guerre (No-mad’ Café). Retour aux fondamentaux avec les New Kidz, qui transposent en un bon vieux rock des familles les thèmes liés à l’enfance : Back to black (dès 5 ans, Le Moulin) ! Jean-François Hoël et Hervé Mabille dévoilent les secrets d’une bonne B.O. au cinéma (Cinéklang, dès 8 ans, Nomad’ Café). Humour et sur-prises sont embusqués derrière l’écran. La Mal Coiffée propose au Nomad’ Café un conte initiatique, inspiré du roman d’Henri Bauchau Diotime et les lions. Ici, c’est l’histoire de Léona, qui n’arrive pas à s’intégrer dans son clan : forte de ses ancêtres les lions, elle parviendra à tracer son propre chemin, loin des tâches traditionnellement dévolues aux femmes (dès 6 ans). Enfin, à la Cité de la Musique, le conteur musicien Ahamada Smis et le marionnettiste Yiorgos Karakantzas charmeront les tout-pe-tits (dès 2 ans) avec les aventures du Kipépéo, qui, tel un papil-lon, sortira, au fil des rencontres, de sa chrysalide ; un parcours enchanté au son des musiques de l’Océan indien.

ANNA ZISMAN

Babel Minots11 au 22 marsDivers lieux, Marseille & Miramas04 91 62 49 77 lenomad.com / babelminots.com

cineklang © Christine Francois

Sons pour tousPour le jeune public, le Z Festival irrigue le Var de six sons de cloches orchestrés par Le Pôle et Tandem

La Cie Mon grand L’Ombre donne le La avec Tamao, ciné concert qui raconte les aventures d’une tortue marine : animation douce et lumineuse, musique et récit joués et

chantés sur le plateau, à partager dès 4 ans (Le Pradet). Vidéo et musique encore, dans le spectacle de la Cie Nokill (L’Envol, à partir de 8 ans). Ici les sons virevoltent dans tous les sens, vibrent aux oreilles d’un père et son fils qui ne rêvent que de voler (La Valette). Autant continuer de profiter du grand air, avec Thomas Pitiot : Allez jouer dehors ! (dès 5 ans). Le compositeur et ses deux musiciens nous emmènent dans un grand voyage autour des sons sans frontières, rythmés par l’Afrique et le jazz (Le Revest-les-Eaux). Autre périple, dans des contrées tout là-haut, ou au ras du sol, dans l’Ici-balao que Nina fait découvrir à un petit garçon de 11 ans, dont la Cie Presque Oui se remémore les souvenirs. Spec-

tacle onirique, un conte en chansons qui rend à l’enfance son pouvoir d’imagination (La Garde, à partir de 6 ans). Et c’est à L’épopée d’un pois que sont conviées les mini oreilles (dès 3 mois !) par la Cie La Rotule. Comment captiver les bébés ? Avec des ombres chinoises, des couleurs douces, des images connues ou abstraites, l’histoire d’un rond qui part explorer le monde en chansons (Le Revest-les-Eaux). Enfin, voyage dans le temps, proposé par The Wackids, qui offre au jeune public (à partir de 6 ans) une plongée dans les années 90 (Back to the 90’s, Toulon). C’est les parents qui vont être contents ! Les deux générations pourront parta-ger les effluves de Blur, Oasis, Metallica, avec ces pros du Rock’n’Toys, qui depuis dix ans parviennent à réunir tout le monde autour des codes du rock pour tous.

A.Z.

Z Festival, Festival de Zik jeune public13 au 20 marsLa Valette du Var, La Garde, Le Revest-les-Eaux, Le Pradet, Toulon

festival-z.com

L'Envol © DandyManchot

Echappées belles dans la roue du Vélodes propositions qui déclinent le théâtre d’objet sous des formes variées : avec l’artiste écossaise Shona Reppe il se découvre Sous la surface, une installation plastique (mise en scène par Char-lot Lemoine) ébouriffante peuplée d’images intrigantes, galerie éphémère qui rend l’ordinaire extraordinaire et où rien n’est ce qu’il semble être ; il se fait imagé avec le Théâtre de cuisine qui remonte le temps pour une Conversation avec nos ancêtres sur les pas d’une jeune femme qui ravive la mémoire de sa grand-mère ; ainsi qu’avec les machines mécaniques et poétiques de Magali Rousseau qui tentent toutes de s’envoler et échouent, brassant l’air et la lumière (Je brasse de l’air) ; ou encore marion-nettique avec les peluches automatisées de la Cie 36 du mois, petits êtres hauts en couleurs installés sur les gradins qui com-mentent l’univers qui les entoure à coups d’envolées philoso-phiques, blagues ou monologues égocentriques. Les spectacles sont par ailleurs accompagnés d’ateliers, de per-formances surprises, d’expositions….

DOMINIQUE MARÇON

Greli Grelo - Biennale de théâtre d’objets28 février au 4 marsDivers lieux, Pays d’Apt04 90 04 85 25 velotheatre.com

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Mars en baroque attaque sa 18e édition

Entretien avec Jean-Marc Aymes, directeur artistique du festival

Zibeline : Mars en baroque s’articule cette année autour d’une nouvelle thé-matique, celle du salon, après une sai-son 2019 consacrée à celle de l’atelier du musicien. Pouvez-vous nous en dire da-vantage sur ce choix de programmation ?Jean-Marc Aymes : Il nous semblait intéressant de montrer que la musique, c’est comme l’architecture : un matériau que l’on sculpte. Après cette incursion vers l’atelier, vers ce « côté cuisine » de la musique, nous voulions cette année nous aventurer « côté salon ». Je tenais à projeter en ouverture du festival un chef-d’œuvre méconnu du cinéma : Le Salon de Musique de Satyajit Ray. Un pur chef-d’œuvre ! Il montre que la musique a eu sa place dans les salons, lieu qu’on imagine davantage pour des échanges littéraires. En France, c’est vraiment au sein de ces salons du XVIIIe siècle que la musique a pu se dé-velopper. Nous nous sommes laissés guider par ce film, par cette idée d’une musique à l’échelle intime. Nous avons eu la chance de pouvoir nous associer à l’IIMM (Institut Na-tional des Musiques du Monde) d’Aubagne pour cette soirée d’ouverture. Patrick Barbier, qui a publié aux éditions Grasset un très bel ouvrage, Pour l’amour du baroque, précèdera la projection du film, et un concert de musique indienne le conclura. Mêler les différents ver-sants du spectacle vivant, je trou-vais ça génial !Il faut dire que le mélange des genres est au cœur du projet de-puis plusieurs éditions…Le baroque, au sens étymologique, c’est aussi le mélange, l’impureté ! Depuis pas mal d’années nous perpé-tuons le cadre des conférences, mais nous nous intéressons aussi au spectacle vivant. Et nous avons à cœur de confronter le baroque à d’autres styles. La musique contemporaine, grâce à notre partenariat avec Musicatreize, évidemment. Le baroque fait partie d’un patrimoine, qu’il faut faire vivre ! Et la musique

de la Renaissance est également passionnante, elle est pour-tant peu jouée… alors qu’Aix-en-Provence a été une cour ex-traordinaire pour ce répertoire. Nous organisons donc cette saison des Week-ends Renaissance, petites formes passion-nantes. Josquin des Prés est un grand nom de cette époque,

mais il n’est connu que pour ses apports à la polypho-nie. On connaît peu ses pièces plus monodiques,

d’où leur programmation pour cette édition ! Les enjeux de l’interprétation sur ins-

truments d’époque se sont déplacés du baroque vers d’autres répertoires.

Bien sûr ! La recherche sur les ins-truments anciens déborde du seul baroque : c’est pourquoi nous pro-grammons depuis plusieurs édi-tions l’Armée des Romantiques, qui interprètera du Brahms. Brahms

qui a assimilé un héritage baroque, contrapuntique et bachien considé-

rable -il a composé des Variations sur le style de Haendel, notamment. Nous

voulons élargir au spectre du spectacle du vivant, celui de l’époque musicale, ainsi que ce-

lui de l’interprétation « historiquement informée », comme on dit ! L’interprétation ne va d’ailleurs pas sans un questionnement du texte même. D’où notre programme dé-dié à Urbain VIII : on sait qu’une musique officielle était jouée

Le Concert Hostel Dieu © Florent de Gaudemar

Jean-Marc Aymes © Eric Bourillon

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pour le Pape dans la Chapelle Sixtine mais aussi, pour les Vêpres, dans ses appartements. Nous nous sommes intéressés aux compositeurs joués dans ce cadre, dont le célèbre Miserere d’Alle-gri. C’est une œuvre mythique et paradoxale : le Pape refusait de la diffuser et en a refusé la publication. Plusieurs compositeurs sont al-lés l’écouter et l’ont retranscrite, mais avec un siècle de retard, donc avec des ornementations qui n’étaient pas celles pratiquées à l’origine. Nous avons donc commandé à un spécialiste de ces ornementations de le recréer dans le style d’origine. Afin d’entendre, peut-être, le VRAI Miserere d’Allegri…Vous avez également mis l’accent, cette an-née, sur un répertoire méconnu : les femmes compositrices !On sait qu’il y avait en Italie, à la fin du XVIe siècle et au début du XVIIe, un nombre considé-rable de compositrices. Un concert sera notam-ment consacré cette année à Barbara Strozzi. En France, on connaît Elisabeth Jacquet de la Guerre, mais c’est un peu tout. D’où le Parnasse

au féminin, programme dédié à ce répertoire du Concert de l’Hostel Dieu. Et la conférence de Marie-Paule Vial sur les salons féminins, où étaient reçus les intellectuels, les écrivains… Nous voulions donc rendre hommage à un répertoire mais aussi à cette forme de politique cultu-relle parallèle et indispensable. Indispensable, mais réservée alors à une seule élite et à un rôle politique certain.Effectivement. La musique représentait alors le pouvoir, elle mettait en valeur la force politique du monarque. Dif-ficile d’oublier, en contemplant le Château de Versailles par exemple, qu’il a vu le jour grâce au sang du peuple. Mais c’est évidemment pour cela que ces concerts, leur médiation, nos conférences mais aussi notre programme Musique à l’hôpital, sont capitales. C’est notre but, notre mission finalement : faire de cette musique privée, éli-tiste, un bien commun.

PROPOS RECUEILLIS PAR SUZANNE CANESSA

Mars en baroque29 février au 31 marsDivers lieux, Marseille04 91 90 93 75 marsenbaroque.com

Le Concert Hostel Dieu © Florent de Gaudemar

L’art en voyage

Voyage Voyages, une exposition artistique qui

détonne au Musée des civilisations de l’Europe et

de la Méditerranée

Attention, voici la dernière occa-sion de voir l’excellente exposi-tion Giono au Mucem : courez-y si ce n’est déjà fait, elle s’achève le

17 février. Les amateurs de Beaux-Arts pourront en profiter pour visiter Voyage Voyages, une centaine d’œuvres rassem-blées par Christine Poullain, ancienne directrice des Musées de Marseille, et Pierre-Nicolas Bounakoff, commis-saire indépendant. Pourquoi ce thème du voyage, plutôt bateau, c’est presque le cas de le dire ? « Parce que le Mucem est le plus grand musée sur les bords de la Méditerranée, répond Christine Poullain ; je ne l’aurais pas proposé à Lyon ou Lille ».Une déclaration un peu futile qui s’avère

refléter assez bien le propos du dispositif. Malgré quelques tentatives, soulignées par son confrère, de « mettre en dialogue les époques, la pensée intellectuelle et le savoir-faire des artistes », les visiteurs attirés par les questions de société res-teront sur leur faim. Car les aspects du voyage sur lesquels il y aurait eu le plus à dire -migrations, tourisme de masse, voire circulations de flux marchands- sont insuffisamment approfondis.

Un charme inégalReste une belle scénographie, signée Joris Lipsch et Floriane Pic du Studio Mat-ters, avec des espaces denses et d’autres comportant des installations imposantes. Et une sélection d’œuvres, de la fin du XIXe siècle à nos jours, non dénuée de charme. Certaines sautent aux yeux, dont la plus frappante est sans doute aucun Accumulation -Searching for the Desti-nation, vague de valises usagées réalisée par Chiharu Shiota. Lors de la visite de presse, le photographe Bernard Plossu s’en amusait : « ça donne envie de souf-fler dessus ! » Pas seulement : le public

s’y attarde, s’aventure dessous, écoutant l’étonnant bruit de ressac des bagages suspendus par des fils rouges.Les classes en sortie scolaire (lire ci-contre) apprécient la variété des supports, les touristes photographiés par Martin Parr les font rire, Le Cockpit accidenté du marseillais Richard Baquié les im-pressionne, les couleurs du désert que Vassily Kandinsky et Paul Klee sont allés chercher au Maghreb attirent leur regard. Pas sûr qu’ils réalisent à quel point le Mucem a dû batailler pour leur présenter les deux tapisseries polyné-siennes d’Henri Matisse, sur lesquelles s’achève le parcours : l’une d’entre elles ornait les locaux parisiens d’un minis-tère, d’après Christine Poullain... Le public adulte, lui, se montre intrigué par des éléments plus discrets. Une mys-térieuse et poétique vidéo filmée sur une plage de Dieppe en 2012, par Jennifer Douzenel, lors d’un concours de cerfs-vo-lants, ou encore les enregistrements ré-alisés par le documentariste sonore Pas-cal Messaoudi auprès de marseillais, en amont de l’exposition. Dommage, ces derniers ne sont pas mis en valeur, car il est particulièrement émouvant d’en-tendre des prisonnières des Baumettes évoquer le voyage intérieur, seule éva-sion qui leur est possible. Notez que durant les vacances d’hiver, outre des visites-jeu spécifiques, une série de propositions autour de Voyage Voyages est prévue à l’attention du jeune public. Pour les tout-petits, à partir de deux ans, trois courts métrages d’ani-mation autour du monde de la mer se-ront projetés les 19 et 20 février. À par-tir de 8 ans, les enfants apprécieront Le Voyage de Malenky, du théâtre cinéma-rionettique par la Cie Traversant 3 (26 et 27 février).

Autres propositions : musique et botaniqueLe compositeur Tarek Atoui est l’artiste invité au Mucem pour la saison 2019-2020. Chaque week-end du mois de mars, il installera une Salle des sons dans le Forum du musée. Enfants et adultes, amateurs et professionnels sont conviés à participer à Transmitters, des ateliers

Voyage voyages, Scénographie Studio Matters, janvier 2020 © Francois Deladerrière - Mucem

34 événements

Les valises suspendues du Mucem

L’exposition Voyage Voyages est visible au Mucem à Marseille jusqu’au 4 mai 2020. Une centaine d’œuvres d’art : peintures, photographies, installations... pas vraiment ce qu’on attend d’un musée de société

Dès l’entrée de l’exposition, on est surpris par les valises suspendues. Le bruit des valises qui bougent (évoquant des fantômes, des bateaux,

l’exode, la Shoah, etc.) est apaisant ou dérangeant selon les sensibilités. Une artiste, Chiharu Shiota, qui fait réagir ! Des photographies d’enfants en noir et blanc sont tristes, on voudrait les aider... Mais cette exposition donne plutôt envie de voyager : elle rappelle des souvenirs de voyages. On voudrait visiter la Tunisie, le Maroc, grâce aux œuvres sur ces pays. Ou encore aller en Syrie, ou à Dubaï pour voir les îles qui s’effacent comme sur le grand panneau d’Andreas Gursky.L’exposition ne donne pas assez à réfléchir sur les autres types de voyages que le tourisme, par exemple l’exil ou les migrations. C’est un appel à la rêverie plus qu’à la réflexion.

CLASSE UPE2A, COLLÈGE MONTICELLI

Les journalistes de Zibeline poursuivent leurs ateliers d’éducation à la presse en mi-lieu scolaire. Ils ont accompagné une classe de primo-arrivants du collège Monticelli au Mucem, pour voir Voyage Voyages. Les élèves, avec leur enseignante Halina Men-nai, ont rédigé une critique de l’exposition.

animés par des musiciens confirmés dans cet espace d’expérimen-tation sonore, doté de deux tables connectées, équipées de mysté-rieux instruments et objets sonores : le Duofluctus (Sergey Fila-tov, Russie), le Piezothing (Daniel Araya, Suède), le Sub-ink (Boris Shershenkov, Russie) et le Trublion (collectif Trublion, Paris). L’objectif est de constituer un groupe qui répétera au GMEM, en vue d’une représentation publique au Mucem le 10 mai, ainsi que de concerts hors les murs.Par ailleurs le 9 mars, en partenariat avec la plateforme de vision-nage Tënk, aura lieu une projection du film Re : Visiting Tarab, ré-alisé par Fouad Elkoury en 2013 autour de Tarek Atoui.Enfin dans le cadre du séminaire Exposer le récit (en entrée libre), l’Institut méditerranéen des métiers du patrimoine propose le 13 mars une rencontre avec l’artiste Uriel Orlow, autour du projet Theatrum Botanicum. Il détaillera son travail photographique et vidéo, et abordera des sujets tels que « le rôle de la classification et de la dénomination des plantes, le nationalisme botanique, la mi-gration et l’invasion des espèces, le biopiratage et la diplomatie des fleurs pendant l’apartheid ».

GAËLLE CLOAREC

Voyage Voyagesjusqu’au 4 maiMucem, Marseille04 84 35 13 13 mucem.org

Écoutez sur notre webradio l’émission Plus loin que la nuit et le jour, entretien avec Pierre-Nicolas Bounakoff, co-commissaire de l’exposition.

Poèmes de la classe UPE2A inspirés par Voyage Voyages © G.C

Chiharu Shiota, Accumulation–Searching for the Destination, 2014-2019 © Avec l'aimable autorisation de l'artiste et de la Galerie Templon, Paris-Bruxelles, photo Bertrand Huet-Tutti © Adagp, 2019

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Artistes divergents pour œuvres parallèlesThéâtre, conférence,

danse, performance... Retour sur nos coups

de cœur du festival Parallèle, à Marseille

La 10e édition du rendez-vous dédié à la jeune création contemporaine était la première depuis la fusion

avec l’Officina. Une cuvée de haute tenue, particulièrement vers la danse.

Future loversLes post-millenials vivent-ils différem-ment de leurs aînés ? Bien qu’encore plus connectés, conscients des impératifs écologiques ou réceptifs au question-nement lié aux genres, n’en sont-ils pas moins des adolescents épris de liberté, assaillis de désirs comme de doutes ? Dans Futures lovers, la compagnie ma-drilène La Tristura met en scène une de ces si communes soirées pendant la-quelle, dans un parc surplombant la ville, huit jeunes dansent, boivent, se désha-billent, s’interrogent, se confient, s’ex-posent, s’isolent, tombent amoureux, se séparent, éclairés par les phares d’une voiture. Des comédiens et comédiennes au naturel saisissant et une scénographie dynamique insufflent à un récit somme

toute banal une fraîcheur narrative ef-ficace et touchante.

Ana PiLa Brésilienne Ana Pi a mené une re-cherche sur les danses urbaines à travers le monde et a choisi d’en sélectionner dix, pour écrire une conférence dansée qu’elle mène avec humour et grâce, accompa-gnant ses démonstrations de pédagogie. Chaque danse est inévitablement liée à une grande ville cosmopolite, une mu-sique, un contexte social, économique et politique. À commencer par le pantsula,

danse de la révolte associée au kwaito (première musique électronique venue d’Afrique) et créée à Soweto, quartier ghetto de Johannesbourg, du temps du régime sud-africain de ségrégation ra-ciale, l’Apartheid. C’est dans les mêmes années 80 qu’apparaît sa déclinaison oc-cidentale, la house, née dans les clubs de Chicago. Les États-Unis voient également émerger le hip-hop, la break dance, le krump, le voguing, toutes en réaction à des climats de discrimination. Née sous la colonisation britannique en Jamaïque, le dancehall coïncide avec le dévelop-pement des sound systems dont l’objet est de démocratiser la fête. Les années 2000 et Internet popularisent de nou-veaux courants comme le kuduro ango-lais et le passinho brésilien ou encore le dustep, inventé à Londres. Passionnant.

République ZombieDans la blancheur du plateau, trois êtres gisent, comme tétanisés. Leurs bouches grandes ouvertes émettent un chant à l’unisson. Le mouvement prend forme, d’abord au ralenti, avec toujours cette ex-pression qui mêlent la peur au dégoût. Les boucles musicales accentuent une atmosphère pesante. Si ces créatures ne peuvent qu’intriguer, elles semblent

Republique Zombie © Margaux Vendassi et Francois Ségallou pour le Festival Parallèle

Ductus Midi © Margaux Vendassi et Francois Ségallou pour le Festival Parallèle

36 critiques

Artistes divergents pour œuvres parallèles

inoffensives voire bienveillantes. Que cherchent-elles à exprimer ? De quoi veulent-elles nous prévenir ou nous pré-munir ? Soudain, un message d’alerte invite le public à quitter les lieux. L’un des trois « zombies », personnage trans-genre en verve, poursuit son monologue absurde et obsessionnel à l’extérieur, les premières et uniques paroles formu-lées. De retour dans la salle, les gradins condamnés, les spectateurs s’installent sur la scène, comme ayant symbolique-ment basculé dans l’autre monde pour observer le destin inquiétant de l’huma-nité. En cours de création, République Zombie était présenté en avant-première. En se réappropriant l’image populaire d’un mythe vaudou né à Haïti, transformé en revenant sanguinolent en Occident, Nina Santes s’adresse au monde des vi-vants. Un monde en voie d’extinction, qui se décompose mais pour lequel rien n’est définitivement perdu. À l’image de l’argile pétrie dans la scène finale, longue catharsis d’où semble renaître une lueur d’espoir.

Ductus MidiLui chante en italien, la voix déformée par ce satané auto-tune. Affairée à une étrange activité de poterie, elle l’accompagne,

imitant une trompette. Arthur Cham-bry et Anne Lise Le Gac ne diront pas un mot de toute la performance. Ductus Midi est pourtant une œuvre qui décline des formes de langage. Un langage qui ne passe pas forcément par l’oralité, souvent par des instruments de musique ou des machines, programmés pour formuler les mots à la place des humains. Et du son naît le mouvement. Car Ductus Midi est un parcours décalé, un glissement absurde dans les méandres de l’esprit créatif. Même les rares moments véri-tablement dansés sont une déambula-tion, un voyage. Un clavier, un gong en mousse polyuréthane, des percussions, une fontaine, un écran jonchent ce par-cours fait d’escales sonores. L’arrivée de Christophe Manivet, chasseur mar-seillais et champion d’Europe des imi-tateurs de chants d’oiseaux, donne lieu à un échange d’une poésie inattendue.

Alessandro SciarroniLa soirée de clôture du festival était aussi la première invitation au public du Bal-let national de Marseille (BNM) dans ses locaux depuis que l’institution est dirigée par le collectif [LA] Horde. L’ex-citation est palpable, autant que la joie d’accueillir. C’est le chorégraphe Ales-sandro Sciarroni qui a l’honneur de cette première coréalisation entre les deux structures. D’abord avec Save the last dance for me, un duo tournoyant et enivrant de danseurs italiens (Gianmaria Borzillo et Giovanfrancesco Giannini) qui sublime la technique de la polka chi-nata. Cette danse du début du siècle der-nier, originaire de Bologne, se pratique entre hommes. Sur le point de disparaître du patrimoine folklorique, elle retrouve une actualité et une modernité grâce au choix du chorégraphe de la transposer sur des musiques électroniques. Perfor-mance physique qui transparaît dans les gouttes de sueur des interprètes, le perpétuel mouvement circulaire semble offrir à cette tradition populaire un pou-voir d’éternité.La deuxième proposition de Sciarroni, Happiness, a pour première qualité de lever le voile sur les nouveaux visages du BNM. Mais c’est loin d’être la seule. Douze

danseuses et danseurs -dont quelques anciens tout de même-, dans des mou-vements à la fois sobres et majestueux, composent un ballet multicolore fas-cinant. Lignes, cercles, amples ou sur eux-mêmes, en solo ou collectivement, les déplacements se font écho. Quand les bras s’en mêlent, les cris fusent. De joie ou de libération ? Euphorisant.

LUDOVIC TOMAS

Le festival Parallèle s’est déroulé du 24 janvier au 1er février, dans divers lieux à Marseille

Ductus Midi © Margaux Vendassi et Francois Ségallou pour le Festival Parallèle

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Que peut le droit face au pouvoir ?

Pas grand-chose. Voire rien. Telle est l’amère expérience que vit le Dr To-mas Stockmann dans Un ennemi du

peuple. Ce médecin honnête a décou-vert que les bains, qui font la renom-mée - et la prospérité ! - de la ville sont contaminés et que de gros travaux seront nécessaires pour les rendre salubres à nouveau. Mais lorsqu’il veut rendre l’in-formation publique et alerter la popula-tion, convaincu de rendre un grand ser-vice à sa ville natale, il se heurte à tous, et particulièrement à son frère Peter, qui est aussi le préfet de la cité. Bref, le bienfaiteur ne tardera pas à devenir un « ennemi du peuple », abandonné de (presque) tous, définitivement exclu. S’il ne fallait qu’une seule raison de courir voir la pièce, ce serait celle-ci : redécou-vrir le drame d’Ibsen dans une nouvelle traduction d’Eloi Recoing, remarquable de vitalité et d’actualité. Car cette œuvre, publiée en 1882, résonne aujourd’hui avec une force implacable. Toute-puissance

des intérêts privés, pouvoir des action-naires, collusion des élites, mépris du peuple, démagogie des journalistes, su-prématie de l’ « opinion publique » et de « la majorité compacte », lâ-cheté et complaisance du plus grand nombre, fail-lite de la démocratie, tout y est déjà. Mais il y en a bien d’autres, des raisons de se délecter du spectacle mis en scène par Jean-François Si-vadier. Cinq actes, menés tambour battant, avec un magistral sens du rythme et de la comédie, 2h45 qu’on ne sent pas passer, bref un vrai moment de plaisir théâtral comme on en aimerait plus souvent. Tout est pensé : le décor, à la fois sublime et décati (un espace qui laisse voir ses zones d’ombre), les ponctuations musicales et autres intermèdes, les jeux de lumière, le dialogue avec la salle… Sur ce plateau

on ne peut plus vivant le drame se dé-ploie à l’aise, porté par des comédiens exceptionnels, à la tête desquels Nico-las Bouchaud incarne un « ennemi du

peuple » habité, avec ses diatribes aux accents nietzschéens et ses rictus à la Nicholson. Superbe !

FRED ROBERT

Un ennemi du peuple a été joué du 22 au 25 janvier au Théâtre la Criée, Marseille

© Jean-Louis Fernandez

Et la terre se fissureLe travail collectif de Sara Llorca, Omar Youssef Souleimane et Guillaume Clayssen, tous trois à l’origine de La terre se révolte, déçoit

En s’inspirant librement du livre d’Omar Youssef Souleimane, Le petit terroriste (paru en 2018 chez Flam-

marion), l’auteure et metteure en scène Sara Llorca visait à prolonger dans la fic-tion sa propre rencontre avec l’écrivain

syrien. Andréa (Lou De Laâge), étudiante en philosophie, demande un entretien à Wissem (Elie Youssef et Logann An-tuofermo), poète syrien réfugié à Paris dont elle écoute le témoignage à la ra-dio, après les attentats de Paris. La jeune femme est en recherche de passerelles entre islam et philosophie des Lumières.

D’entrée de jeu, le récit de cet ancien salafiste devenu athée en épousant la littéra-ture ne parvient pas à évi-ter les écueils sur l’affron-tement entre islam radical et modéré, les questionne-ments existentiels d’un ar-tiste en exil, le dialogue entre Orient et Occident, l’inter-ventionnisme étranger en Syrie, les conflits identitaires et familiaux... La rencontre

avec celle qu’il ne pourra s’empêcher de vouloir séduire n’élèvera pas le niveau d’une œuvre poussive et affaiblie par les poncifs. Bien qu’Andréa cumule le fait d’être la petite-fille d’un exilé an-tifranquiste et d’avoir grandi dans la

cité cosmopolite Karl Marx à Bobigny, elle frôle la névrose. L’un comme l’autre échouent à nous émouvoir. Un cube ou-vert et rotatif comme décor, l’utilisation de la musique, les interventions d’une danseuse (Ingrid Estarque), des appa-ritions de René Descartes (Tom Pézier), le dédoublement du personnage central et des scènes de flash-back jouées hors du cadre auraient pu être autant d’atouts pour apporter un souffle salvateur à la pièce. Mais de la direction d’acteurs à la scénographie, en passant par l’écri-ture et le jeu, le résultat passe à côté de toutes les ambitions.

LUDOVIC TOMAS

La terre se révolte a été créée le 21 janvier et jouée jusqu’au 25 au Théâtre des Bernardines, Marseille

7 marsThéâtre Liberté, scène nationale de Toulon04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

à venir

© Raphael Arnaud

38 critiques

Toutes mes vies pour Patti

Durant la rencontre qui précédait le spectacle (organisée par La Marelle et animée par Pascal Jourdana),

Claudine Galéa a rappelé combien le théâtre est aujourd’hui un « endroit d’im-pureté où se mélangent les formes », un espace de liberté, bien plus grand, se-lon elle, que celui qu’offre le roman. Le spectacle proposé par Benoît Bradel ne peut donc que la réjouir. La 7e vie de Patti Smith, créé avec Marie-Sophie Fer-dane, s’inspire en effet de deux œuvres de Galéa, une pièce radiophonique, Les 7 vies de Patti Smith, et un roman, Le corps plein d’un rêve. Texte hybride pour un spectacle qui tient de la performance musicale autant que du théâtre. On sait la place qu’occupe la musique dans le travail de Bradel. Pour évoquer l’icône du rock qu’est Patti Smith, c’est d’ailleurs bien le moins. Sur une scène très sobre rappelant celle d’une salle de concert, deux musiciens (excellents Thomas Fernier et Seb Martel) accompagnent et donnent la réplique à celle qui incarne tour à tour Patti Smith et l’adolescente marseillaise qui la décou-vrait en 1976. Étonnante, fulgurante Marina Keltchewsky (en

noir et blanc, comme Patti sur la pochette de Horses), qui donne magnifiquement corps à cette expérience fondatrice ; qui, une heure durant, murmure, crie, psal-modie, chante (fort bien), arpentant l’es-pace des deux vies qu’elle évoque. Bribes d’un récit de jeunesse, vers de Rimbaud, notices biographiques, souvenirs et dis-cours de la star, le texte circule, porté par la musique. Porté aussi par la présence intense de la comédienne, tout entière habitée par ses personnages. Celui d’une chanteuse, poétesse, artiste protéiforme et engagée, qui, en 1978, abandonna la scène pour plusieurs années, pétrifiée par le déferlement de ses fans. Et celui de cette jeune fille plutôt introvertie, à qui elle montra la voie de l’émancipation ; à qui sa voix si particulière, une voix qui

« entre dans le corps », permit de trouver une voix (et une vie) à elle. Une vie et une voix d’écrivaine.

FRED ROBERT

La 7e vie de Patti Smith a été représenté les 30 & 31 janvier au Théâtre Joliette, Marseille

© paquito - cie Zabraka

Mortifères passions«T

u es un éjaculateur en différé ! » C’est sur une échevelée scène de rupture, poignante confession

d’un amour évaporé, que s’ouvre Vents Contraires. Marie égraine à Rodolphe ses motifs d’insatisfaction, ce cruel instant où advient la « fin du sortilège amoureux » aurait dit Marcel Proust. Ne restent alors que la lassitude, le sentiment d’oppres-sion devant un corps périmé, une ten-dresse émoussée, et cette angoisse sourde qui comprime le ventre quand on en est réduit à lire l’étiquette de la confiture devant le ciel bas et lourd de la table du petit-déjeuner. Lequel Rodolphe, aimé de Marthe, fréquente en secret Salomé, pour laquelle se consume d’amour Leïla, au point d’abandonner Camille… Les vents contraires éponymes, ce sont ceux qui régissent les atermoiements de l’âme humaine à l’œuvre dans la vie de couple, quand le souffle de la passion le dispute à la tempête de la jalousie, avant la per-nicieuse accalmie de l’ennui. Après deux monologues, le dramaturge Jean-René Lemoine revient à une pièce chorale,

cherchant dans la monstration de cette « ronde frénétique de passions contra-riées » à faire saillir la vacuité des égos contrariés, aveugles au monde qui se délite autour d’eux. En fond de scène,

un miroir géant, tour à tour barrière ou passage vers un ailleurs, permet de mieux contempler les soubresauts et ri-cochets stériles de ces âmes paniquées. Coproduite par la MC93, la pièce laisse éclater de belles personnalités au pla-teau, telle l’élégante Anne Alvaro ou la troublante Océane Cairaty. Assumée, la

représentation d’un parisianisme aisé pourra agacer par moments -ces sashimi dégustés en feuilletant mollement Télé-rama, cette outrancière description du milieu de la mode, ces ritournelles pop

systématisées par Joël Pommerat-, se révéler cruel ou irrésistible à d’autres -la prostitution des étudiantes en HEC, la crudité des nuits sans sommeil échouées de-vant M6... Les instanta-nés volés se télescopent à l’issue de fondus au noir, et le puzzle d’une misère citadine émi-nemment contempo-

raine se reconstitue peu à peu : « il ne faut pas avouer aux gens qu’on aime qu’on les aime, car c’est le premier qui avoue qui doit purger la peine ».

JULIE BORDENAVE

Vents contraires jouait du 6 au 8 février au Théâtre du Gymnase, Marseille

© Jean-Louis Fernandez

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Frisson de l’escampette

C’est l’histoire d’une émancipation caprine : tout le monde connaît La chèvre de Monsieur Seguin, ce

conte d’Alphonse Daudet qui finit mal pour la belle échappée. Son adaptation par la Cie La Paloma maintient une fin plus

ouverte. Blanquette, hé-roïne récalcitrante (elle pèse longuement l’appel de la montagne contre l’affection asphyxiante de l’homme), se décide à écouter les fantômes de ses prédécesseures, et s’en va gambader parmi les chamois. Le sort, sous la forme du terrible loup, va-t-il la punir définitivement de son désir d’escapade ?C’est moins la morale qui l’entrave, que son petit cocon de sécurité. Contrairement à Arthur

Rimbaud, qui écrivait « Je redoute l’hiver, parce que c’est la saison du confort », elle n’y va pas franco ! Elle atermoie telle-ment que l’une des chèvres disparues sous les crocs du fauve lui assène « oublie tes rêves de liberté et achète-toi un fau-teuil roulant », tandis que l’autre soupire « le loup est très beau, c’est à cela qu’on le reconnaît ». À croire que ce fatal des-tin ne leur a pas ôté le goût du risque, au moins par procuration... Blanchette, convaincue d’être différente de toutes les autres chevrettes, trouvera-t-elle une autre voie ?Les thèmes de Ravie soulèvent manifes-tement l’intérêt du jeune public, même si la compagnie est plus habituée à trai-ter sur les plateaux des textes destinés à des adultes, signés Falk Richter, Sarah Kane ou Edward Bond. Sans doute qu’un format plus resserré aiderait à mieux

© La Paloma

Spectrale Virginia Woolf

Convoquer le fantôme des écrivains dans une bibliothèque, c’était LA bonne idée de la metteuse en scène

Edith Amsellem pour cette nouvelle création de la Cie ERd’O. Quel meilleur hommage à ce lieu de découvertes in-tergénérationnelles, qu’y faire commu-nauté pour un spectacle camouflé sous l’apparence d’une conférence ? Réunis sur des gradins installés au 3e étage de l’Alcazar, les spectateurs étaient accueil-lis ce soir-là par une bibliothécaire, pour une intro soignée posant le contexte bio-graphique de Virginia Woolf, sujet du débat. Une vie étonnante pour l’époque, mâtinée de relations extraconjugales homosexuelles n’empêchant pas une réelle accointance intellectuelle avec son époux. Surtout, une production litté-raire abondante hantée par le « feu des consciences », rédigée à une époque où la production littéraire était alors encore essentiellement masculine. C’est bien à cette thématique, traitée dans Un lieu à soi, que s’attache le spectacle : pourquoi les autrices sont-elles si rares jusqu’au XXe siècle ?Intacte, la bibliothèque va pourtant

subtilement se transfigurer au cours du spectacle, comme par un effet de la pensée. Beaucoup de malice et de fa-cétie pour des effets léchés -que nous tairons- destinés à pimenter la mise en scène. Et Virginia apparaît. Si sa prose, parfois ardue, réclame une attention acérée pour se laisser appréhender sur papier, la comédienne Anne Naudon, plus spectrale que jamais, l’habite en une subtile incandescence. C’est avec

une virevoltante fluidité que s’épanouis-sent une heure durant les réflexions de l’autrice, entre constats, prospectives et analyses. Une lumineuse évidence se fait alors jour en un temps suspendu, titillant un appétit sans cesse renouvelé pour tous ces auteurs frémissants, qua-siment frétillants, qui ne demandent qu’à être (re)découverts sur les rayon-nages. Un brin (trop) soutenu pour ces premières représentations, le rythme

© Vincent Beaume

40 critiques

10 marsThéâtre du Jeu de Paume, Aix08 2013 2013 lestheatres.net

19 & 20 marsThéâtre La Passerelle, Gap04 92 52 52 52 theatre-la-passerelle.eu

à venir

5 marsMédiathèque Albert Camus, La Valette04 94 23 36 49 lavalette83.fr

30 avrilMédiathèque Boris Vian, Port-de-Bouc04 42 06 39 09

theatre-semaphore-portdebouc.com

11 mars au 17 avrilTournée dans le cadre des dispositifs d’action culturelle de la Bibliothèque départementale des Bouches-du-Rhône04 91 11 19 47 enrangdoignons.com

à venir

Sur la route

«Ma grand-mère s’appelle Bœuf... Elle n’est pas née dans une étable » : voilà une expression parlante pour dézinguer les clichés sur les origines et les patro-

nymes, que Dominique Sicilia tient de sa grand-mère. Elle a choisi d’appeler ainsi son spectacle, inspiré du riche terreau familial dont elle est issue. Car s’il n’en saura pas plus sur la grand-mère, le public va en apprendre beaucoup sur le père. Pe-tite fille, elle l’accompagnait dans ses tournées de camionneur, et c’est leur relation, intense et émouvante, qui renaît sur scène.Belkacem Tir interprète avec justesse cet homme illettré, puits de savoir non scolaire. La jeune Nina admire ce héros, qui livre du matériel de chantier le jour et devient éboueur la nuit. Elle se juche à ses côtés et un vif dialogue se noue entre eux. La pièce, destinée aux enfants à partir de 6 ans, se déploie sous la forme d’un road-movie. Babou conduit, sa fille s’installe sur le siège passager, mais ô surprise ! Nina, personnage miniature de 8 ans, 10 ans, puis 11 ans... est présente sous forme de vi-déo, à qui Dominique Sicilia prête sa voix. L’ingénieux dispositif conçu par Cédric Cartaut décuple l’empathie ressentie pour les protagonistes, de même que la musique jouée en direct par Élise Sut (tuba et flûte).« Qu’est-ce que ça fait, de ne pas savoir lire, je ne m’en souviens plus ? », demande la fillette à son père. « Et qu’est-ce que ça fait, de savoir lire ? », lui rétorque-t-il finement. Toute la délicatesse d’une transmission réussie entre les générations se retrouve dans cet échange. On se moque de Nina à l’école parce qu’elle porte un nom d’île d’origine italienne, son papa ne sait pas lire, et alors ? La profonde humanité d’une personne ne se mesure pas à cela, c’est l’important message délivré par ce joli spectacle.

GAËLLE CLOAREC

Ma grand-mère s’appelle Bœuf... s’est joué du 4 au 7 février à l’Espace Culturel Busserine, MarseilleIl sera repris lors du festival OFF d’Avignon 2020, au théâtre de la Bourse CGT

© Cédric Cartaut

rythmer le spectacle, les comédiens (Rachel Ceys-son, Francesco Italiano et Chloé Lasne) ont quant à eux assez d’énergie pour l’intensifier !

GAËLLE CLOAREC

Ravie a été créée le 16 janvier au Théâtre Massalia, Marseille, jouée les 3 & 4 février au théâtre du Briançonnais, les 6 & 7 février au Théâtre Durance, Château-Arnoux/Saint-Auban

Lire notre entretien avec Rachel Ceysson et Thomas Fourneau sur journalzibeline.fr

devrait sans peine s’assagir à terme pour trouver sa vitesse de croisière, promesse d’une inextinguible force qui se clôt avec beaucoup d’émotion. Habile et élégante manière de faire communauté de pensée, en semant les graines d’une réflexion qui ne cesse de cheminer depuis un siècle.

JULIE BORDENAVE

Virginia à la bibliothèque jouait du 28 janvier au 8 février, à la bibliothèque du Merlan et de l’Alcazar, Marseille, et les 13 et 14 février dans les médiathèques de Gap et Tallard

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© Gianni Fiorito

Fleurs d’oublis

Les corolles des Belles de nuit, « mi-rabilis » de la famille des « nyctagi-nacées », s’ouvrent le soir avant de

se faner au matin. Est-ce en pensant à elles qu’ont été composées Les Belles de nuit, nouvelle création de la dramaturge Magali Mouget mise en scène par Marie Provence ? Il y a quelque chose de l’ombre propice à ces plantes qui domine tout cela. Dans un travail de dédoublement répété, le personnage central, Michelle, aide-soignante, spécialiste coiffure, af-fronte en un lancinant tournoiement les étapes qui mènent à la vieillesse, en trois temps, à l’instar du tableau de Gustav Klimt Les Trois Âges de la femme. Tout commence par l’anniversaire des cin-quante-cinq ans, cette « tangente de la di-zaine », puisque ni ses cinquante ans ni ses soixante n’ont ou ne seront fêtés. Le déri-soire est mis en scène, poudre à paupière bleu lagon ou curaçao, lourdeur navrante de la fête, danses de camping, menu in-fect de grande distribution… Michelle

se voit ballotée par son fils qui sort sa mère pour le repas festif obligé, feint le bonheur, alors que rien ne suggère la joie dans ces ma-nifestations apprê-tées, retourne à son travail à la maison de retraite La Roseraie, sympathise avec les pensionnaires, pose des bigoudis et coiffe à grand renfort de spray. En un cycle terrifiant où tout se délite, jusqu’aux quatre-vingt-cinq ans du personnage, les mêmes faits se re-produisent, le pied qui s’enfonce dans une flaque de boue en descendant de la voiture, fard à paupières invariablement bleu, absence de la sœur de Michelle, Monnette, restée en Algérie… la parole

se distribue, le même personnage se fragmente, porté tour à tour par diffé-rentes comédiennes… Le texte suit sa boucle, jusqu’au final surprenant lorsque la mémoire défaille, que les inhibitions s’effacent et que l’être se perd. Le sujet ne manque pas d’intérêt, et

© Mathieu Mangaretto

« Moins réels mais plus vrais ! »

Tout le paradoxe du théâtre se condense dans la pièce de Pirandello, Six per-sonnages en quête d’auteur, que l’on

pose en modèle archétypal de la mise en abyme et de l’interrogation de l’art théâtral dans son essence. La représen-tation passe par les filtres multiples de

l’histoire racontée, de son écriture, de sa distribution, de son interprétation enfin, liée à la fois aux décisions du metteur en scène et de la sensibilité des acteurs. Ouf ! Promesse d’une soirée bien pesante, et didactique, et pontifiante, allez-vous penser  ! Que nenni  ! Lorsque Spiro

Scimone et Francesco Sframeli s’en mêlent, la légèreté et la finesse lissent les aspérités pro-fessorales et ne gardent que le suc d’une écriture passée à la moulinette de « la langue de la com-pagnie ». Avec Sei, libre-ment inspiré de la pièce pirandellienne, la troupe italienne (surtitrée avec maestria en français) suit la trame générale ima-ginée par le dramaturge d’Agrigente, mais l’allège avec un humour rava-geur qui accorde à l’en-semble rythme et tension

dramatique. Tout commence comme dans le propos original par une répéti-tion, quatre acteurs désabusés ignorent si leur pièce sera jouée, et leur metteur en scène tente, sans illusions, de leur communiquer un peu d’enthousiasme. Un court-circuit plonge la scène dans

42 critiques

aurait sans doute demandé davantage de relief, de qualités introspectives. On a l’impression de rester au bord d’une création qui n’ose pas prendre son envol.

M.C.

Les Belles de nuit a été créée du 22 au 24 janvier au Jeu de Paume, Aix-en-Provence, et jouée du 31 janvier au 2 février au théâtre Liberté, Toulon et le 8 février au théâtre Comoedia, Aubagne

12 au 14 marsThéâtre Joliette, Marseille04 91 90 74 28 theatrejoliette.fr

à venir

Tragédie en barbecue

La Cie La Variante s’empare de la pièce de Sarah Kane, L’amour de Phèdre. Éperdument amoureuse de l’indifférent Hippolyte, fils de son époux Thésée, Phèdre l’accuse de viol

et le jeune homme à l’immaculée chasteté (dans les pièces an-tiques et raciniennes) sera condamné à mort. Dans la pièce de Sarah Kane, toute « bienséance » jetée aux orties, on découvre un Hippolyte avachi devant sa télévision, bouffeur de chips et de jeux vidéo, fornicateur de première, dédaigneux, arrogant, goujat, une Phèdre entreprenante, fascinée par un beau-fils dont tout devrait la repousser. Apparaissent de nouveaux per-sonnages, un médecin désabusé, une fille de Phèdre, Strophe, la seule, sans doute, consciente de l’horreur à venir, et de celles passées, un curé… Absence de dieu, déliquescence des relations humaines, classe dominante justifiant l’injustifiable, sont pas-sés à la moulinette avec jubilation… Un certain Ico apparaît, voulu par le metteur en scène initial, Michel Ducros, trop tôt disparu, tenant le rôle d’un auteur un peu dépassé par l’am-pleur de la tâche à venir : « Par où commencer ? » débute-t-il, et, s’adressant aux personnages immobiles qui attendent de s’in-carner dans les mots, « Pourquoi allez-vous dire ce texte ? ». Les didascalies énoncées aux acteurs figés (qui se gardent bien de les mettre en application, ouf !), nous font entrer dans le cœur d’un discours théâtral, remis en question par des comédiens qui s’insurgent parfois invoquant les limites de ce qui peut/doit être joué ou pas. S’instaure une dialectique iconoclaste entre la fiction, les éléments de réel, le jeu scénique, la puissance évo-catrice du langage, grâce à la finesse de la reprise de la mise en scène par Danielle Bré. Manque sans doute dans le vortex gore de la fin (boyaux sur barbecue et meurtres en série, dont les ex-cès suscitent le rire, et déplacent la pièce dans l’esthétique des « Cinémastock » d’Alexis et Gotlib), la dimension métaphysique qui aurait donné une dimension universelle à cette œuvre, dé-fendue avec brio par ses acteurs.

M.C.

L’amour de Phèdre a été créée le 28 janvier au théâtre Antoine Vitez, Aix-en-Provence

© Philippe Nou

l’obscurité, l’un des acteurs est envoyé à la re-cherche du technicien qui sera occupé aux toi-lettes toute la durée de la pièce, problèmes de prostate obligent… La lumière revient avec l’ap-parition de personnages qui réclament au met-teur en scène l’écriture de leur pièce... La fable se joue, entre l’éternité des personnages et la fragilité de l’humain qui les porte, la distance irrémédiable entre ce qu’ils sont et les acteurs qui endossent leurs rôles. Incarnation impos-sible, dans ce lieu où se dessinent les frontières entre le réel et le vrai, et s’affirme la nécessité de tricher, de détourner, de transformer, afin que prennent consistance les êtres nés du papier… Un exercice de haute voltige conduit avec l’élé-gante virtuosité de la simplicité.

MARYVONNE COLOMBANI

Sei a été donné au Bois de l’Aune, Aix, les 14 et 15 janvier et le 17 janvier au Théâtre Liberté, scène nationale de Toulon

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Tout Quick

L’Espace Nova de Velaux étrenne le nouveau spectacle d’Arturo Brachetti, SOLO, adapté, pour cette nouvelle tournée du roi

du Quick Change, à de petites salles. Afin d’enchaîner ses numéros, Arturo Brachetti se sert d’une maison mi-niature qu’il nous fait visiter à l’aide d’une caméra, et s’orchestre une plongée dans les souvenirs de ce personnage. Effecti-vement, les changements de costume sont bluf-fants, le voici en Batman, puis en Reine des Neiges, en Blanche-Neige (la neige est vraiment un truc de princesse), en Shrek, Mandrake, Merlin… on répartit par thèmes, (les contes, les comics, les chanteurs de variété), puis avec un seul rond de chapeau, pléthore de silhouettes sont encore mises en scène. Un passage par le « rêve de sable » dessine d’autres scènes, offre un petit cœur à la ville d’ac-cueil. Peter Pan n’est pas en reste, avec le surgisse-ment d’une ombre qui refuse de se plier aux volontés de son propriétaire… Tout cela avec vidéo, mapping, lumières, effets spéciaux, c’est très bien fait, souvent époustouflant dans la virtuosité des changements de

personnages, plus de cinquante. L’homme à la houppette (qui a, quand même, été récompensé par Frédéric Mit-

terrand en 2011 de la distinction de Chevalier des Arts et Lettres) avoue son âge, (62 ans), danse,

court, vole, s’agite, se livre à des traits d’hu-mour gras surlignés par « cela m’a échappé,

mais on arrête, il y a des enfants »… Bref, la salle est comble, un public qui n’avait jamais franchi les portes du théâtre est là. Le lieu est enfin

désacralisé, et lui sera ouvert pour d’autres propositions. Ici, il est difficile de parler d’art, il s’agit d’une belle performance

fantaisiste, et si elle amène de nouveaux spec-tateurs au théâtre, le pari est gagné, et l’on ne peut

pas s’en plaindre. M.C.

SOLO a été donné le 21 janvier à l’Espace Nova, VelauxArturo Brachetti © Ranzani

Le langage dans toutes ses dimensions

Yves Fravega s’empare de l’œuvre de l’auteur du Désordre des tran-

quilles, Jean-Paul Curnier, philosophe, professeur d’art, romancier, essayiste, cher-cheur, entre autres activi-tés, pour un spectacle dont les prémices nous étaient offertes lors de sa sortie de résidence au 3bisf. Au cœur de ce travail, un livre, Peine perdue, qui rassemble une centaine de contes brefs et de fables qui effleurent en une langue dépouillée les sujets les plus variés avec un art de la distanciation réjouissant. On s’assoit à une terrasse de café, on réinvente les vies minuscules de nos contemporains… Rien n’arrive ! Et ça arrive souvent !, titre du spectacle à venir, promet un programme chargé ! Dans ce « laboratoire d’imbécillité heureuse », où l’on est hanté par le « res-sassement sur la tentation de l’insigni-fiance », naissent d’étranges machines : un bar avec ses manettes pour diverses bières pression qui, actionnées, libèrent des mots, des sons, des rythmes, assortis d’un sens aigu de la dérision ; ailleurs,

un lutrin supporte un énorme volume, à l’âge séculaire, censé renfermer les se-crets des origines… On croise Dieu, en proie au Verbe qu’il a créé, mais qui se retrouve bien seul, puisqu’il n’a personne à qui parler… Le raisonnement ploie alors vers les tournoiements jubilatoires des syllogismes, le langage se tord, devient son propre objet, divague au cœur des méandres des signes, s’évade des limites traditionnelles, et se résout en pirouettes espiègles. L’insignifiance échappe alors à l’ombre, le rien si ordinaire prend un nouvel essor : bonheurs iconoclastes qui font un clin d’œil potache au vide d’une chanson de variété, s’appuient

sur la drôlerie d’une voix caver-neuse alignant des lieux com-muns sur le ton de l’épopée… La scénographie inventive gravite dans un univers que ne dédai-gneraient pas les Monty Python, ou le Gotlib des « Rubrique-à-Brac ». On rit beaucoup, dans cette proposition qui est bien plus profonde qu’elle ne veut le dire, mais est-ce encore un effet d’optique langagière ? En première partie, la lecture claire

des participants aux ateliers proposés donnait un premier aperçu de l’écriture corrosive et fine de Jean-Paul Curnier.

MARYVONNE COLOMBANI

La sortie de résidence avant la création de Rien n’arrive ! Et ça arrive souvent ! a eu lieu le 16 janvier au 3bisf, Aix-en-Provence

© Clémence Savalle

3 au 7 mars (création)Théâtre Joliette, Marseille04 91 90 74 28 theatrejoliette.fr

à venir

44 critiques

La tentation de l’absolu

Inspirée de la première pièce de Léo-nid Andreïev, Vers les étoiles (1905), l’œuvre de Jonathan Châtel (dont une

première lecture sous forme d’extrait avait été donnée au Bois de l’Aune lors d’un Rebonds en 2019, à lire sur jour-nalzibeline.fr), De l’ombre aux étoiles, nous entraîne dans « un espace-temps indéterminé » au sommet d’une mon-tagne, lieu hors du monde où Andreï, astrophysicien, s’est exilé avec sa famille, fuyant les remuements du monde. Son fils aîné Alexandre a choisi de prendre part à la révolution aux côtés des insur-gés… Entre la poésie éternelle des sphères où se projette le savant, et l’implication active dans les conflits, les idées s’af-frontent : fascination pour « trous noirs » et « naines blanches », implication dans la vie terrestre… un parfum sartrien, dé-terminant l’homme par ses actes, vient s’opposer à l’attitude contemplative qui tente de s’extraire du temps présent et se perd dans les élucubrations mathé-matiques, et le vertige de l’immensité de l’univers. Les mystiques s’affrontent

tandis que s’installe une certaine po-rosité entre fiction et mythologies per-sonnelles. Tous sont happés par la ten-tation de l’absolu, s’y fondent en une démesure dionysiaque. Aspiration à la sainteté et au sacrifice, désir de projeter l’humanité dans de nouveaux commen-cements au cœur des étoiles… Les personnages ne se contentent pas seu-lement d’être des figures archétypales, mais sont d’une humanité boulever-sante. Pierre Baux, Jo-hanna Hess, Francesco Italiano, Mireille Rous-sel, Adrien Rouyard, sont d’une saisis-sante justesse, portant un texte superbe-ment écrit, dans une mise en scène en épure (toujours Jonathan Châtel) qui se love dans le demi-cercle de hauts murs métalliques habités par un tableau mou-vant qui nous dit le ciel, l’espace, dans une architecture qui rappelle les toiles

de Nicolas de Staël. Les références à la peinture viennent ainsi en contrepoint à la quête d’une musique résumant l’uni-vers, menée par le fils cadet d’Andreï

dont la douleur se traduira par le cri muet de Munch… Rencontre tragique entre l’utopie et les limites humaines. Poignant.

MARYVONNE COLOMBANI

De l’ombre aux étoiles a été donné les 30 et 31 janvier au Bois de l’Aune, Aix-en-Provence

Pourquoi pas ?

C’était visible avant même sa naissance, révélé par le médecin lors d’une échographie qui rend ses parents perplexes : « On dirait qu’il se pose beaucoup de

questions ! » De fait son premier mot sera « pour-quoi », premier d’une longue vie passée à interroger tout et son contraire. De son enfance à sa vieillesse, ce « condamné à perplexité » qui ne veut pas finir comme tel pose un regard fantai-siste sur le monde qui l’entoure, faisant du pourquoi une béquille qu’il manie savamment. À chaque âge son questionnement, de l’en-fant émerveillé qui veut savoir si « les dieux entre eux sont copains » à l’ado qui « se console comme il peut » avec ses jeux vidéo, en passant par l’amoureux qui calcule ce qu’une femme qui rit à moitié dans son lit signifie selon la moitié qu’il choisit, jusqu’au vieil « homo sapionce » qui se demande pourquoi vivre debout alors que couché on a la tête dans les étoiles…Avec quelques accessoires seulement Michaël Hirsch campe une galerie de personnages attachants, aux réparties traversées

de traits d’esprit, d’envolées philosophiques, de glissements de sens souvent savoureux. Si le jeu de questions/réponses

est inégal, et parfois un peu fastidieux, certaines acro-baties verbales s’avèrent poétiques, véhiculant

réflexions et émotions. Mais c’est en prévenant qu’il va « poé-

ter plus haut que son cul », à la fin du spectacle, que Michaël Hirsch s’en-

vole vraiment, lorsqu’il déclame un « mille-pattes en vers et contre tous », poème contestataire de 125 vers qui nous invite à résis-ter à coups de pourquoi « contre ce monde qui sent le sapin ». Un bon moyen selon lui de préserver une

indispensable indépendance d’esprit et un scepticisme salvateur pour ne

pas avoir « l’élection douloureuse face à cette Gaule anesthésiée ».

DOMINIQUE MARÇON

Pourquoi ? a été joué le 31 janvier au théâtre Le Sémaphore, Port-de-Bouc

© Lisa Lesourd

© Marie Liebig

4545

Zibeline pour sortir malin et penser la vie

La double vie des footballerines

Personnages caricaturaux, décor en trompe l’œil un peu kitch, interprétation

exagérément expressive… On a craint le pire durant les pre-mières minutes de Féminines mais, avec sa malice et son sa-voir-faire, Pauline Bureau a effectué un virage à 180 degrés et évité l’écueil de la télé-réalité transposée au théâtre. Trem-pant sa plume dans l’histoire de la première équipe fémi-nine de football à Reims en 1968, elle réussit à décoller du réel pour créer une œuvre fictionnelle aux contours sociologiques engagés, et emprunte à l’émission belge Strip-Tease sa distanciation et son empa-thie légendaires pour les personnages. Tout en assumant la forme d’une comédie aux couleurs des Deschiens qui colle parfaitement à l’époque ! Georges Pompidou est alors aux manettes de la République française, les femmes viennent à peine d’obtenir le droit d’ouvrir un compte en banque et la loi Neuwirth autorisant la vente de contraceptifs est toujours dans les tuyaux… Du coup, ce qui aurait pu être une peinture grossièrement brossée de la société française s’avère être un fin portrait de femmes dont l’émancipation passe par le ballon

rond. Unique objet du désir d’être soi, s’épanouir, se libé-rer du joug du patron et du mari. Entrainements, échauf-fements, matchs, vestiaires, chambre à coucher, usine, machines, grèves, terrain de foot : deux heures durant, la mise en scène alterne champ et contre-champ comme au cinéma, nous invitant à des allers-retours entre le plateau et l’écran. Dedans-dehors, tou-jours au plus près de l’action.

On sort du cadre comme ces Féminines sortent de leur quo-tidien pour briser la chape de plomb et retrouver la sensa-tion de vivre. Il faut les voir se jeter sur la piste de danse au rythme des tubes à la mode, entre rires et larmes, abattues par les coups de blues, boostées par les coups de foudre. Tou-jours unies même dans le plan final, magnifique épilogue chorégraphié en chair, en os et en image.

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Féminines a été joué le 21 janvier au Théâtre de Fos et le 24 janvier au Liberté-scène nationale, Toulon

Queue de poisson

La désillusion est d’autant plus grande que La Scortecata et Operetta burlesca d’Emma Dante nous avaient réjouis

par l’équilibre parfait entre la bouffonne-rie et le drame, la finesse de leurs propos. Si drôlerie il y a dans sa libre adaptation de La Petite sirène d’Andersen, Fable pour

un adieu ne tient pas ses promesses. Pourtant ce n’est pas la première fois que la dramaturge et metteure en scène sicilienne écrit un « spectacle de variété », comme elle les nomme, à l’adresse du jeune public. Là, le grand écart entre son intention d’informer les enfants sur les

questions de la vie et de la mort, le dépassement de soi, l’acceptation des différences, et la forme comico-théâ-trale poussée à l’extrême nous laisse songeurs… et la métaphore sur les « vies perdues, infortunées, malheu-reuses » nous échappe !Sur un plateau vide bien trop grand pour les trois acteurs, une sirène, une sorcière et un prince charmant inter-changeables s’amusent bruyamment, ondulent, pirouettent, dansent et rient aux éclats. On tente d’imaginer une mer glacée, des corps frissonnants, et la terrible tempête qui va changer le cours de la vie de la petite sirène. Tombée en amour pour un naufragé, elle n’a plus qu’une obsession : se défaire de sa queue pour gambader

sur la terre ferme et épouser son prince bien-aimé. On connaît la suite ! Le ré-sultat ne convainc pas tant la diction en français est hésitante, le texte à peine au-dible, les chansons italiennes portées par un faible filet de voix, les chorégraphies approximatives étirées à l’extrême. L’ir-ruption de la sorcière juchée sur des ta-lons aiguille, en robe lamée et perruque blonde, ne change rien à la donne. Du conte initiatique annoncé il reste peu de choses, transformé en comédie carnava-lesque (que vient donc faire la musique brésilienne ?) avec boule à facettes au-tour d’un scénario rebattu : le marivau-dage. Fable pour un adieu avait pourtant bien commencé avec un premier tableau élégant et délicat comme Emma Dante a le secret, qui fait dire à l’une de ses héroïnes « je suis devenue sorcière parce que je n’ai pas pu aimer ». Pas sûr que les enfants s’en souviennent…

M.G.-G.

Fable pour un adieu a été donné le 28 janvier au Liberté, scène nationale Toulon

© Carmine Maringola

© Pierre Grosbois

46 critiques

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Zibeline pour sortir malin et penser la vie

Sous d’autres cieux hier comme aujourd’hui

C’est un voyage initiatique. Celui d’Énée fuyant Troie incendiée en quête d’une nouvelle terre hospitalière, bravant les intempéries, la guerre, pliant sous le poids

des volontés divines. Ce sera Olympe, Carthage, Thrace et tant d’autres exils… Adapté par Maëlle Poésy et Kevin Keiss, le poème de l’Énéide de Virgile est une leçon d’humanité aux

résonances contemporaines saisissantes. Autrefois Junon, Minerve et Hector dictaient leurs lois ; au-jourd’hui le climat, l’économie, les conflits jettent dans la tempête des milliers de réfugiés. Cette déflagration est d’autant plus vive que la mise en scène de Maëlle Poésy fragmente les épisodes du récit mythologique, déconstruit la narration par une série de flash-back, rythme l’interprétation théâtrale de séquences cho-régraphiques ritualisées, alterne adresses directes au public et dialogues, fait entendre le français, l’ita-lien et l’arabe au gré des pays traversés. L’odyssée d’Énée embrase le plateau où se consume des âmes humaines fracassées, habitées par l’amour, le déses-poir, la solitude, la haine, la peur, le pouvoir, la des-truction… Aux premières lueurs de la pièce, la danse de groupe évoque les chorégraphies incantatoires de Hofesh Shechter avec lequel la comédienne et met-teuse en scène a accompli sa formation. Leur force

tellurique scande à merveille tous les mouvements d’errance du peuple troyen qui porte en lui l’espoir de retrouver la terre-mère. Les partis pris scénographiques éminemment visuels éclatent les espaces et contraignent les corps à évoluer dans la pénombre, mais la multiplication des médiums, notamment l’usage superflu de la vidéo, alourdit la forme déjà hétérogène

Des nouvelles du futur

Il a déjà eu lieu, « Le grand effondrement ». Aux alentours de 2027. Depuis 2008 et le « Pic pétrolier » on le pressentait déjà,

avec son cortège de tsunamis, d’ouragans, de sécheresses et d’incendies, qui allait éradiquer des millions d’humains sur la Terre dévastée par le suicide capitaliste. Les sept personnes qui habitent De quoi hier sera fait nous parlent depuis 2047, et nous font un cours d’histoire économique et politique qui parle de notre présent, et de tout ce qui a suivi depuis. Marie La-machère (conception et mise en scène) et Barbara Métais-Chastagnier (écriture) ont élaboré une pièce d’anticipation qui leur permet de poser les problèmes d’au-jourd’hui avec un regard distancié, rétros-pectif, et proposer un futur possible. Ceux qui sont toujours là se souviennent de la fin du « siècle 20 » et du début du suivant, évoquent les traces de ce « vieux monde » presque englouti : « on en retrouve tou-jours un petit bout à étudier ».L’ensemble des membres de la Cie //In-terstices a mené, pendant près de quatre

ans, un travail de recherche (interviews de spécialistes, rencontres sur le terrain, lectures) qui forme le socle du spectacle. Appuyé sur des événements concrets d’au-jourd’hui, la réflexion se déroule autour des

sept personnages, qui reprennent, avec la liberté de ceux qui ont dépassé l’engluage mortifère des débuts du siècle 21, le fil des luttes et des espoirs. Il s’agit toujours de résister aux « Maîtres et possesseurs »,

© Denise Oliver Fierro

© Jean-Louis Fernandez

48 critiques

du spectacle. Brillante, intelligente, créa-tive, la mise en scène l’est assurément, mais elle laisse l’émotion sur les bords du rivage. Reste qu’elle affûte notre ré-flexion sur la géopolitique actuelle, et l’avenir de notre humanité. Ce qui est en soi une formidable leçon de théâtre.

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Sous d’autres cieux a été joué les 17 et 18 janvier à Châteauvallon scène nationale, Ollioules, et du 12 au 14 février au Gymnase, Marseille

qui sont toujours là, aussi cruels qu’ac-culés. Repenser le territoire, partager les ressources économiques et naturelles (le pétrole, c’est fini), bousculer l’urba-nisation et pousser la ville au bas de son piédestal : les décennies défilent au long d’un brainstorming socio-politique plu-tôt revigorant. Le soir de la création, 16 janvier, comédiens et techniciens étaient en grève comme pour la dernière le 24, cohérents, sincères et investis. Mais le spectacle peine un peu à s’émanciper du poids documentaire et vire parfois à l’exposé démonstratif. Au fil des repré-sentations, le théâtre saura sans doute reprendre sa place.

ANNA ZISMAN

De quoi hier sera fait a été créé au Théâtre des 13 vents, Montpellier, joué le 17 janvier et du 20 au 23 janvier

Falaise : Baro d’Evel au sommet

À son pas qui descend, fébrile, les marches des travées du Théâtre Jean-Claude Carrière, on se prend

à imaginer que c’est un cheval qui va surgir d’entre les spectateurs. Et puis non, c’est une petite femme tout en noir, qui rejoint la scène barrée d’un immense rideau, noir. Corne de brume

au loin. Le décor apparaît, très imposant, hauts blocs sombres dans une lumière blafarde. C’est le monde créé par Ca-mille Decourtye et Blaï Mateu Trias (scénographie Lluc Castells), minéral, dangereux, mystérieux. Mais déjà, la paroi, tout là-haut, se craquelle, la vie s’impose, une mariée longiligne casse la roche et éclaire la falaise du blanc de sa robe. « Attention ! », crie un autre sur le plateau. Le subjuguant Falaise, dernier spectacle de la Cie Baro d’Evel, incarne cette dualité permanente : le danger, la douceur ; le vide, la vie ; l’angoisse, le rire ; le noir, le blanc... Une échelle inter-minable vient cueillir la mariée, entame un ballet d’un mur à l’autre, jamais ne se pose, son amoureux court en bas, un bouquet timidement brandit vers sa pro-mise qui enfin quitte les barreaux mais

est condamnée à arpenter, superbement désarticulée, tragique, le sommet des murs. Des murs qui, du haut en bas, tout au long du spectacle, seront traversés, transgressés, transfusés par les huit in-terprètes : ils entrent et sortent, ils dé-boulent, ils disparaissent, ils percent des brèches, ils tombent, ils escaladent

cette entité dont ils ont peut-être oublié qu’elle constitue leur seul hori-zon, ils tombent encore. Des pigeons traversent la scène, bouffées de li-berté à la présence cha-rismatique. Un cheval à la robe insolemment blanche ignore les tour-ments des huit humains qui s’agitent, ploient en tas, rampent, sortis en-core d’un nouveau trou. « Faut que tu tentes des trucs. C’est pas toujours tout noir ou tout blanc », lui explique Camille De-courtye dans un dia-logue magnifique avec l’animal. « On va tom-ber pendant combien de temps ? », lui demande-t-elle, cachant son an-goisse pour ne pas lui faire porter tout le poids

du tourment des hommes. C’est peut-être (bientôt) la fin du monde, mais la sève coule toujours entre ces êtres furieu-sement vivants. Alors même si la peur est là, on danse (moments d’anthologie, tandis que le couple de mariés se désa-grège littéralement sous les costumes de plâtre qui se fissurent, May B et Maguy Marin comme possibles viatiques), on chante (en rock ou en baroque), on peint avec tellement de fougue que le blanc recouvre le noir, et la troupe s’accorde même un moment de paradis ; « On n’est pas bien là ? ».

A.Z.

Falaise, accueilli en collaboration avec la Saison Montpellier Danse, a été joué au Théâtre Jean-Claude Carrière au Domaine d’O, Montpellier, les 15 & 16 janvier

13 marsThéâtre Durance, Château-Arnoux /Saint-Auban04 92 64 27 34 theatredurance.fr

à venir

© Francois Passerini

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Band de quatre

La langue de James Baldwin est terri-blement intense. L’écrivain américain, incontournable figure du combat pour

les droits civiques, se servait des mots pour clamer à la fois son identité de Noir, d’homosexuel, d’intellectuel, d’écrivain,

en lançant à la bonne société des textes rudes et imagés, d’une redoutable finesse d’analyse. Le film de Raoul Peck, I am not your negro (2017) a contribué à faire redécouvrir l’auteur disparu en 1987. On l’y voit, argumentant, démontrant,

devant des assemblées variées, et là en-core, son verbe impressionne par tant d’acuité, ses propos par tant de frontalité.Le monologue introductif de Harlem Quartet, adapté d’un des romans de Bald-win (Just above my head, 1979) par Élise

Vigier (mise en scène) et Kevin Keiss (traduction, dramatur-gie) plonge d’emblée dans son style et son lexique si particu-liers. Jean-Christophe Folly impressionne dans son inter-prétation de Hall, qui raconte cette journée de 1973, où il a appris la mort de son frère ca-det, étendu dans une marre de sang dans les toilettes sordides d’un bar de Londres. Ça per-cute, la douleur est rêche, on

la prend en pleine face. Le moment, les détails qu’il décrit sont incroyables de réalisme -le ton est donné. On s’engage sur le passé du groupe de chant gospel monté par Arthur dans les années 50, leur tournée dans le Sud ségrégationniste, la

frustration du ghetto qui se mue en ter-reur en Alabama. Les quatre jeunes co-pains traversent les États et les années, il faudra pour certains partir en Corée, il y a aussi l’inquiétante et fascinante Julia (Ludmilla Dabo, magnétique), qui se dé-bat dans son drame familial, la sexualité qui s’impose ; les souvenirs affluent dans le récit de Hall. Élise Vigier mélange les périodes, peut-être pour dynamiser une narration linéaire, soulignant les pas-sages temporels par des changements de décor, certes bien rodés, mais redon-dants. La vidéo est parfois envahissante, quand le chant est au contraire sacrifié, réduit à la portion congrue. Reste la force des mots, dont la violence, la crudité et la beauté envahissent le plateau, incar-nés par des acteurs très convaincants.

A.Z.

Harlem Quartet a été joué au Théâtre Molière de Sète les 30 & 31 janvier, et le 17 janvier au Théâtre Les Salins, Martigues

Shakespeare tout nu

Dans son manifeste, on peut lire la définition de ce que la Compagnie Provisoire appelle plaisamment son

« théâtre enragé ». Il y est question d’un jeu le plus nu possible, avec « les inter-prètes, le public et le texte. C’est tout. ». Raconter les histoires des autres, trans-mettre, pas forcément sur les plateaux de théâtre, « jouer partout ». Pour Le roi Lear [chronique] Julien Guill a conçu une tournée, « Un jour, un théâtre », dans 6 lieux de la Métropole montpelliéraine, ce qui faisait dire lors de la présentation de la saison à Frantz Delplanque, di-recteur du Théâtre municipal Jean Vilar, quel plaisir cela avait été d’être embar-qué dans cette aventure « tous ensemble, sur un projet tout simple ». Sur la scène du Théâtre Jean-Claude Carrière au Do-maine d’O, les quatre comédiens, en jean et pull noir, juste eux, sans maquillage, sans décor (avec tout de même une so-norisation qui souvent brouille les mots), dans la lumière plate des éclairages de service, portent la tragédie de Shakes-peare à bout de bras. Ils sont à la fois les

uns et les autres, les femmes jouent les hommes et vice versa, les trois filles du roi (joué par Fanny Rudelle) occupent le corps d’un seul acteur (Camille Daloz), qui incarne aussi les deux fils du comte de Gloucester (qui fait escale chez Do-minique Léandri). Seul le fou (Sébas-tien Portier) du Roi Lear est finalement

stable ; pas de nomadisme comédien, ce qui donne plus de poids à cette ré-plique désabusée, lancée à son maître : « J’aimerais être n’importe qui plutôt qu’un fou ! Pourtant je n’aimerais pas être toi. » Le fait est que la tâche n’est pas simple pour Lear qui, voulant par-tager son royaume entre ses filles pro-portionnellement à l’amour qu’elles lui portent, réveille les jalousies et les trahisons, jusqu’à épuisement de cha-cun des personnages. Héritage maudit, familles hautement toxique, pouvoir délétère, personnages multiples, in-trigues noueuses ; le morceau est de taille, et l’enragement de ce théâtre-là ne dépasse malheureusement pas le numéro d’acteur un peu vain.

ANNA ZISMAN

Le roi Lear [chronique] a été joué au Kiasma (Castelnau-le-Lez), au Chai du Terral (Saint-Jean-de-Védas), au Théâtre Jean Vilar (Montpellier), au Théâtre Jean-Claude Carrière (Montpellier), à La Bulle Bleue (Montpellier) et au Théâtre Jacques Cœur (Lattes), du 28 janvier au 2 février

© Marc Ginot

© Tristan Jeanne Vales

50 critiques

Du cirque entre envolées et retenue

Avant de se clore le 16 février, l’Entre-deux biennales des Arts du Cirque a accueilli deux formes contemporaines aux esthétiques hétéroclites

À la Criée fin janvier, place aux subtiles envolées des 19 acrobates de la Cie XY. Le collectif ménage depuis 2009 une irrésistible déclinaison des portés acrobatiques sous

toutes leurs formes, conviant le lindy hop au plateau (Il n’est pas encore minuit, 2014) ou exerçant leur talent en pleine rue en soulevant des membres du public (Les voyages, vu notam-ment sur le parvis de l’Opéra en mai 2017 dans le cadre de Sirènes et midi net). Asso-ciée au chorégraphe Rachid Ouramdane, la compagnie s’attelle avec Möbius à re-créer le mouvement perpé-tuel, en un saisissant hom-mage aux murmurations, ces nuées d’oiseaux obs-curcissant le ciel l’automne venu. Se présentant d’abord un par un face public, les acrobates forment ensuite un corps collectif devant nos yeux. Doucement gal-vanisante, l’onde première se propage au fil des corps, tour à tour unis puis désu-nis. Puis les nuées fusent de chaque côté, en d’étourdis-santes chorégraphies régies par une logique inconnue des humains. Entre ressac et affaissements, envol puis renaissance, la fluidité des mouvements est tangible, empruntant tant à la force animale que végétale -telle cette pyramide humaine qui refleurit sans cesse, une corolle d’acrobates recueillant le partenaire qui choit avant de se hisser à nouveau. Ha-bilement sculpté par un discret jeu de lumières, le plateau dénudé se présente comme une toile vierge accueillant des corps pinceaux, tout de noir vêtus, modulant indéfiniment cet organisme en mouvement perpétuel, à l’image d’une cal-ligraphie vivante. Grâce et légèreté confèrent une sensation éthérée autant qu’aquatique, par la grâce de figures inédites -portés horizontaux ou véritables piqués dans l’air depuis l’épaule du complice. Une dernière envolée, puis le plateau se vide en un souffle, laissant le public étourdi et ravi, pour une interminable standing ovation. Au ZEF quelques jours plus tard, c’était Koltès qui reprenait vie dans une salle métamorphosée en hangar des bas-fonds.

Au sein d’un dispositif quadrifrontal, Jean-Baptiste André et Dimitri Jourde rejouaient la traque du célèbre face à face entre un dealer et son client (Dans la solitude des champs de coton) ; le langage corporel venant souligner cette confronta-tion entre désir inassouvi et frustration, exprimant l’état de tension d’un dialogue aux multiples sous textes, faisant la part belle aux non-dits. Les deux acrobates expliquent s’être « re-

trouvés autour de cette pièce pour sa langue, son champ lexical, sa physionomie et la situation qu’elle campe : celle d’un face à face entre deux hommes qui font l’épreuve de l’altérité ». Dans ce tête-à-tête de deux corps affû-tés préside un affronte-ment subtil des forces en présence, entre défiance et mise en respect, apprivoise-ment et évitement, attrac-tion et répulsion. Toujours hardie pour un circassien, la prise de parole est ici dé-libérément mise en danger : les artistes déclament leur texte à voix feutrée, à l’is-sue d’haletantes acrobaties, voire lors d’équilibre sur la tête. Si l’exercice est péril-leux et parfois déroutant, l’ensemble ne manque pas d’élégance, délivrant une homogénéité assez indo-lente, alternant décrochages hypnotiques et retours au

texte. Certains se laissèrent embarquer par cette douce litanie, d’autres restèrent rétifs à une dramaturgie trop monotone et une scénographie un peu envahissante. D’indéniables respi-rations ponctuent toutefois la pièce, tel cet apprivoisement farouche où la parole se tarit sur un air de Bob Dylan, avant de retourner à des relations plus troubles, pour s’acheminer de concert sur ce « chemin courbe » qui relie imperceptible-ment les humains entre eux.

JULIE BORDENAVE

Möbius jouait les 31 janvier et 1er février à La Criée, Marseille ; Deal jouait les 4 et 5 février au ZEF, Marseille, dans le cadre de l’Entre-deux Biennale des Arts du Cirque. L’Entre-deux Biennale des Arts du Cirque se poursuit jusqu’au 16 février

Deal © Benoit Thibaut

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Utopie sous surveillance

Poursuivant son travail sur les migrations, les déplace-ments et la liberté de mouvements des êtres humains, le chorégraphe d’origine syrienne Mithkal Alzghair

questionne dans We are not going back, sa der-nière création, la possibilité d’accéder à un monde libéré des contrôles que nous im-posent les frontières de tous ordres. Y compris, et surtout, celles qui di-visent les pays, les nationalités. Ils sont cinq, trois femmes et deux hommes dont les pas se meuvent petit à petit à l’unisson, avançant lentement dans un même mou-vement hésitant, telle une foule qui cherche dans une progression têtue à atteindre un même objectif. Le titre même (Nous ne reviendrons pas en arrière) annonce une décision définitive, une révolte. Les corps ont du mal à tenir, avançant et reculant, grapillant quelques mètres au fur et à mesure de ces valses hésitations, répétitions hypnotiques. Corps exposés, mena-cés, contrôlés, empêchés, soumis, comme suspendus aux in-jonctions de contrôles qui les fouillent, les contraignent à une

surveillance de chaque instant. Etonnamment ces gestes-là sont harmonieux, bras qui se lèvent en reddition, tête que l’on

couvre de mains protectrices, bras inquisiteurs qui dé-couvrent chaque parcelle… avant que les heurts

ne reprennent par secousses et ne soudent à nouveau ces cinq nomades forcenés.

Pourtant parfois certains s’échappent, se décrochent pour vivre une envo-

lée solitaire, criant leur envie vis-cérale de liberté. Les cinq danseurs -Annamaria Ajmone, Mirte Bogaert, Judit Dömötör, Yannick Hugron et Sa-mil Taskin-, de cinq nationalités

et cultures différentes, forment un échantillon de cette humanité tra-

versée par de vivantes résistances, de celles qui permettent les utopies de

liberté et d’égalité. DOMINIQUE MARÇON

We are not going back a été dansé le 21 janvier au Théâtre d’Arles

© Cécile Mella

Oneironaut, le rêve perturbéLa chorégraphe Tânia Carvalho présentait sa dernière création à Klap, à Marseille

Si l’on s’en réfère à l’étymologie d’Onei-ronaut, la chorégraphe portugaise Tânia Carvalho voulait sans doute

naviguer dans ses rêves. Un rêve ha-bité par sept danseurs et danseuses aux genres in-décis, créatures grimées comme sorties d’un cabaret interlope. Telle une troupe d’outre-tombe qui répète son prochain ballet, ils ré-pondent rigoureusement au tempo dicté par deux pianistes. L’une est la cho-régraphe elle-même, com-positrice à l’occasion, aidée par Chopin. L’autre pré-férant Nina Hagen. Dans une atmosphère obscure, en justaucorps et collants, ils, elles dansent, exprimant parfois le poids du collec-tif, la contrainte du faire en commun, l’exigence voire

intransigeance desquelles relève l’acte même de danser. Le temps de moments de liberté volés, la discipline de groupe laisse libre cours aux individualités, aux élans d’une créativité personnelle. Sinuant entre grâce et folie, les doux monstres alternent les mouvements lents et plus violents. Tout à tour pantins ou fantômes, on ne sait s’ils sortent d’un film d’épou-vante ou d’un tableau goyesque. Rêve ou cauchemar ? La danse de Tânia Carvalho semble sortie de ténèbres où il y aurait la lumière. Fixant l’instant même où du chaos renaît l’humanité.

LUDOVIC TOMAS

Oneironaut a été créé le 23 janvier à Klap Maison pour la danse, Marseille

© Rui Palma

52 critiques

Le goût du silence

Moment de magie pure au GTP avec la venue d’Anouar Brahem en quar-tet pour son concert The Astoun-

ding Eyes of Rita, (disque paru sous le label ECM en 2009). Accompagné de trois musiciens venus d’horizons différents, Klaus Gesing (clarinette basse), Björn Meyer (basse), Khaled Yassine (darbouka, bendir), le prince du oud tisse de subtils échos entre les brumes nordiques et la luminosité de l’Orient. Les instruments s’accordent, les mélodies ourlées de rêve se posent sur les rythmes ostinato, les motifs se répondent, se croisent, se pa-rent d’échos, la pureté des lignes s’in-carne dans les souffles, la matérialité des clapets de la clarinette, le percussif corps de la guitare basse, la peau de la darbouka, les cordes du oud, aériennes… Osmose souveraine entre mélismes per-sans et géométrie jazzique. Les solos em-pruntent chacun à l’univers de l’autre, en sculptent la matière vaporeuse en un art souverain d’une sérénité nimbée

de mélancolie. L’auditeur est emporté dans les vagues sonores, l’air prend une autre texture, l’écoute suit d’autres mo-des, portée par l’émotion. Le public est enveloppé d’une atmosphère cotonneuse, où tout devient évidence, pensée méditative. Le thème est em-prunté au poète Mahmoud Darwich, dont un titre est éponyme du spectacle, gardé en anglais. « Entre nous, mille oiseaux mille images / D’in-nombrables rendez-vous / Criblés de balles »… La perte de l’être aimé, métaphore de celle de la terre natale de Pa-lestine est évoquée dans sa violence, et sa poignante nostalgie, « Il était une fois / Ô silence du crépuscule / Au matin, ma lune a émigré, loin / Dans les yeux cou-leur de miel / La ville / A balayé tous les aèdes, et Rita / Entre Rita et mes yeux, un fusil ». Le tournoiement des notes nous

conduit au cœur des villes et des contrées frappées par la bêtise des hommes, The lover of Beirut, Stopover at Djibouti, Galilée

mon amour, Al Birwa, (où naquit Mah-moud Darwich). Magique spiritualité…

MARYVONNE COLOMBANI

The Astounding Eyes of Rita a été donné le 18 janvier au Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence

Anouar Brahem © CF Wesenberg

Salon baroque

À l’invitation du Festival Internatio-nal de musique de chambre de Pro-vence, Concerto Soave proposait

un concert tissant de délicates corres-pondances entre l’Italie et la Provence.

Un subtil Laudate Dominum de l’aixois André Campra ouvrait le concert, mo-dulé par la voix d’Alice Duport-Percier (soprano), accompagnée des violons de Marie Rouquié et Simon Pierre, le vio-loncelle (souvent utilisé dans ce réper-toire baroque comme basse continue) de

Cécile Vérolles, et l’orgue de Jean-Marc Aymes (aussi à la direction et au clavecin). Ce dernier livrait au cours de la soirée des clés d’écoute, permettant de goûter avec plus de pertinence les construc-

tions musicales. Ainsi, la technique « en canon » du premier mouvement de la pièce rare qu’est la Sonate en trio de Pierre Gabriel Buffardin (né à Marseille), élégante et vive, ou le mystère qui entoure Chalabrieul dont on ne connaît ni les dates ni même le prénom, seu-lement qu’il fut « Musi-cien de Saint-Victor ». C’est dans les archives de l’ab-

baye que Concerto Soave a déniché l’une de ses partitions oubliées, son Exultate Deo, motet avec Symphonie dont les vo-calises et les phrasés accordent à la voix soliste une palette tout en finesse.Quittant la Provence, on rejoignait les musiques de la région de Naples avec

un extrait du Messie de Haendel, Pifa, peignant la venue des bergers avec leurs chalumeaux (piffero), instruments à vent représentés ici par les violons. Le thème de Noël était encore à l’honneur grâce à la Pastorale di Natale de Scarlatti qui met en scène un berger étonné d’être em-pli, sans raison, d’une ineffable joie. La Passacaille de Maurizio Cazzati, douce et contemplative, offrait aux violons un duo virtuose, tandis que la Sonate op.1 n°3 de Vivaldi rivalisait d’audaces et d’élans enthousiastes. Le « clou » de la représen-tation était bien sûr, in fine, son Motet In Furore Giustissimae irae, d’une rare intensité, porté par la voix aux multiples variations de la soprano, brûlante dans la colère, tendre au cœur des apaise-ments, d’une joie communicative dans son sublime Alléluia qui vint clore les bis réclamés par un public subjugué.

M.C.

Concert donné le 23 janvier au Théâtre Armand, Salon-de-Provence

© Aurélien Gaillard

5353

Cadeau de janvier

Après le cinéma muet, le cinéma sans images ? Ce projet pourrait éton-ner, mais lorsqu’on évoque Tous les

Matins du Monde on pense d’emblée au film magnifique d’Alain Corneau qui,

en 1991, remua le monde de la musique et des mélomanes en provoquant un en-gouement et un intérêt sans précédents pour la musique baroque et l’interpré-tation sur instruments d’époque. Fort de ce constat et de la même admiration

pour la bande-son du film interprétée à l’époque par la fine fleur des interprètes du baroque réunis sous l’égide de Jordi Savall dans l’ensemble le Concert des Nations, le jeune Valentin Tournet,

brillant gambiste lui aussi, a imaginé un spectacle autour du même corpus d’œuvres mais sans support visuel. Exit donc l’époustou-flante performance d’acteurs du film, seule la musique, supplantée par la voix d’un récitant, servait ici les ex-traits du roman épo-

nyme de Pascal Quignard. Sonorisée et en position de soliste, la voix du comé-dien Jean-Damien Barbin donnait vie à différentes parties du récit en incarnant le spectre de la tragédie. Avec une théâ-tralité évidente, celui-ci goûtait chaque

parole avec une articulation idoine, leur donnant un caractère sombre, à l’image du personnage janséniste et austère de Sainte Colombe, incarné par Jean-Pierre Marielle au cinéma. L’ensemble La Cha-pelle Harmonique interprétait ce ré-pertoire, rendant grâce à ce style si inti-miste notamment dans les pièces à une ou deux violes avec Natalia Timofeeva. Même en ensemble plus conséquent où s’ajoutaient au besoin un théorbe, un clavecin, un violon ou deux voix de so-prano, la géométrie variable des effectifs fonctionnait parfaitement. Invité à par-tager cette complicité, le public attentif s’est vu récompensé de deux bis tout aussi réjouissants. Bravo aux artistes.

ÉMILIEN MOREAU

Concert donné le 20 janvier au Palais Neptune, Toulon, dans le cadre du Festival de musique Toulon & Région

La Chapelle Harmonique © X-D.R

Musique écolo ?

Lorsqu’en 1828, Rossini crée, sur un livret d’Eugène Scribe et Charles-Gaspard Delestre-Poirson, Le Comte Ory, son unique opéra comique en français, il y recycle avec bonheur

la moitié de son précédent ouvrage Il viaggio a Reims (1825), dans le but toujours aussi évident de mettre à l’honneur la voix. Dans cette avant-dernière œuvre lyrique, il met en musique les tribulations d’un person-nage prêt à tout pour assouvir son désir, lorgnant avec envie une jeune comtesse esseulée. Lors des représentations de l’œuvre donnée à l’Opéra de Toulon pour la première fois, rien ne semble avoir été oublié : servies par un casting irrépro-chable, les voix étaient géné-reuses et théâtralement bien incarnées dans des costumes taillés par Christian Lacroix. Les décors sobres et efficaces d’Éric Ruf étaient embellis par les lumières en clair-obscur de Stéphanie Daniel. Un ingé-nieux capharnaüm de boiseries évoquant l’intérieur d’une église servait de décor unique au premier acte où l’on assistait à un improbable chassé-croisé de personnages où les chœurs impeccables jouaient les leurs avec une ferveur éloquente.

Le deuxième acte était lui resserré sur l’intérieur du châ-teau de l’élue. Un régal visuel mis en mouvement par Denis Podalydès dans une scénographie joyeusement foutraque et débridée qui cadrait on ne peut mieux avec l’atmosphère bouffonne de l’ouvrage. Excepté son accent latin prononcé, le ténor Francisco Brito incarnait à merveille la truculence

de son personnage et sa voix brillante et légère s’accommo-dait très bien de la virtuosité du rôle du Comte. Marie-Ève Munger brillait de mille feux dans son rôle de soprano colo-rature incarnant une Comtesse Adèle fragile et émouvante. La sémillante mezzo Ève-Maud Hubeaux offrait au page Iso-lier une fougue bienvenue, Ar-mando Noguera brillait dans son Raimbaud fourbe à souhait et la basse de Thomas Dear faisait mouche en gouverneur.

Un plateau réjouissant qui prouvait que développé durable-ment et qualitativement, l’art du beau chant fait encore recette.

É. M.

Le Comte Ory a été donné les 24, 26 & 28 janvier à l’Opéra de Toulon

© Opéra Royal de Wallonie-Liège, déc. 2018

54 critiques

Travailler la lumière

Gérard Dahan et Myriam Daups, directeurs du Petit Duc, savent dé-couvrir et accompagner les talents

avec une pertinente bienveillance. Le 24 janvier, ils offraient la scène à un double concert, réunissant deux coups de cœur. Venu de Montpellier, le duo Milin -Emi-lienne Chouadossi (chant) et Rémi Plo-ton (piano, clavier, composition)- pro-posait un répertoire où se croisent leurs propres compositions, des airs du Moyen Âge, des chansons actuelles (superbe réin-terprétation de Babooshka de Kate Bush). Les orchestrations du musicien ourlent d’une vibration nouvelle la voix aux into-nations profondes de la chanteuse qui se glisse dans les différents registres avec une sensibilité espiègle et chaleureuse dans ses créations ou ses reprises (Becca Stevens, Sia…). Un deuxième temps était consacré à la jeune formation (un an) en trio du saxophoniste Maxime Atger (qui raconte sa première rencontre avec Gérard Dahan dans un train les menant à Paris), avec Sébastien Lalisse (piano)

et Pierre-François Maurin (contrebasse). Tour à tour les œuvres des trois musiciens fondent une esthétique à la poésie onirique où improvi-sation et canevas narratif se mêlent. Les trois premières pièces seront ainsi jouées à la file, rompant avec la tradition jazzique qui demande des applaudissements à chaque volte éloquente. Piano aux amples phrases qui alternent avec des rythmes ostinato, contrebasse aux étonnantes variations entre pizzicati et archet, saxo-phone aux accents veloutés… le silence ici devient écrin, les sons, comme gar-dés jusque dans leur ultime vibration, retrouvent leur puissance d’émerveille-ment. « Je travaille beaucoup avec des ta-bleaux, sourit Maxime Atger, ces derniers morceaux ont été composés à partir de toiles de Pierre Alechinsky et de photos de Man Ray. Le travail pictural est appliqué

à la musique, son jeu entre les pleins et les vides, pour aller vers une épure, ne garder que les notes essentielles »… Le saxopho-niste Raphaël Imbert rejoignait l’en-semble, magie des volutes qui se marient en harmonies fulgurantes… Bonheurs.

MARYVONNE COLOMBANI

Concerts donnés le 24 janvier au Petit Duc, Aix-en-Provence

© Myriam Daups

Persépolis à MassiliaÀ l’Éolienne, Shadi Fathi et Bijan Chemirani subliment la musique persane

Le rendez-vous avait été une première fois manqué. Fermée pendant de long mois suite aux effondrements de la

rue d’Aubagne, l’Éo-lienne avait dû an-nuler de nombreux concerts dont celui du duo formé par Shadi Fathi et Bijan Chemirani (lire p22 & 23). Leur album Delâshena, paru en 2018, s’était rapide-ment hissé jusqu’à la 20e place du classe-ment international des cent meilleures sorties en musiques du monde et vu dé-cerner le prix coup de cœur de l’Acadé-mie Charles Cros. Au fil des concerts, ce n’est plus tout à fait la même proposition un an et demi après. Mais la rencontre

entre l’Iranienne de nais-sance et l’Iranien d’héri-tage, réunis sans l’avoir vraiment cherché, produit

toujours la même sensation. Dans ce dialogue entre instruments de musique classique persane, l’auditeur se laisse im-

médiatement emporter par une virtuo-sité délicate. Shadi Fathi au setâr et au shouranguiz, Bijan Chemirani au zarb et à l’udu rendent hommage à la poésie persane, un art qui a devancé celui de la

composition au pays du grand Hafez et pour lequel les notes se mettent à dispo-sition. Parfois d’ailleurs, les morceaux sont introduits par des vers de poètes contemporains, car si leur musique a des origines anciennes, leur approche est résolument actuelle jusque dans l’utili-sation d’une boucle qui permet au per-cussionniste qu’est Bijan de démarrer certaines pièces au saz, luth à manche long. À son tour, Shadi laissera les cordes pour manier le daf, grand tambour sur cadre. Fusionnel dans ses envolées, le duo sait pour autant laisser libre cours à leur talent respectif de soliste. Dans l’échange ou à l’unisson gagne l’impro-visation, consubstantielle à cette esthé-tique. Ils ne se disent pas dans la conti-nuité des grands maîtres, mais y puisent avec grâce leur inspiration.

LUDOVIC TOMAS

Concert donné le 6 février à l’Éolienne, Marseille

© Muriel Despiau

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Poésie vivante

Le Chantier de Correns et son di-recteur artistique, Frank Tenaille, sont familiers des rencontres entre

les peuples et leurs cultures. Combien signifiante est l’éclosion de l’ensemble Charla Banjara, « conversation gitane »,

à la fin de leur double résidence (Cité de la Musique de Marseille et Chantier de Correns). Le trajet des musiques tzi-ganes depuis l’Inde jusqu’à l’Espagne en passant par le Moyen Orient, dessine le propos de cet ensemble atypique qui

unit sur un même plateau Maria Robin, spécialiste des danses et chants popu-laires Kalbeliya des gitans du Rajasthan, La Fabia, formée au flamenco « jondo » (traditionnel) mais aussi à une approche contemporaine de la danse flamenca

(entre autres), Shadi Fathi, (setâr, zarb, daf) virtuose soliste de musique persane, Jesus de la Manuela, can-taor gitan et Guillaume Ho-gan (contrebasse et guitare) au parcours éclectique et voyageur. L’improvisation familière du jazz semble un écho des airs transmis par oralité, la technique du oud s’adapte à celle de la gui-tare, la contrebasse se marie avec les volutes du setâr…

Les instruments frottent leurs échelles, l’occidentale en demi-tons, l’orientale en quarts de ton, tandis que le chant du can-taor redécouvre les quarts de ton de ses origines et s’accorde avec aisance à ceux de la chanteuse persane. Les floreos aux

figures très travaillées des doigts dans la danse flamenca répondent à celles de la danse Kalbeliya, dont les sonnailles de pieds passent aux chevilles de la bailaora qui abandonne alors ses claquements de talons, les châles deviennent terres d’envol, les robes virent avec la vélo-cité de derviches tourneurs. Et la poésie, dernier lieu de liberté sous la dictature, livre ses métaphores. Shadi Fathi offre la musicalité des mots d’un poème du contemporain Ahmad Shamlou : « Non je n’ai jamais cru la nuit / Car / Au fond de son vestibule / J’espère trouver tou-jours / Une fenêtre (…) / Le mont naît des premières pierres / Et l’homme des premières douleurs / Il y avait en moi un prisonnier rebelle / Qui ne pouvait s’ac-commoder de ses chaînes / Je suis né de ton premier regard ». Poétique vivante du monde.

M.C.

Concert donné le 17 janvier à La Fraternelle, Correns

Entre minimalisme et luxuriance

Évènement au Grand Théâtre de Provence que la venue d’Anoushka Shankar, accompagnée du bel Orchestre national de Lyon dirigé avec enthousiasme par Miguel

Harth-Bedoya ! Le programme donnait un aperçu de la puis-sance et de la variété de l’œuvre de Ravi Shankar, père d’icelle. Comme entrée en matière, pas de souvenir du Salon de Musique de Satyajit Ray, mais une compo-sition qui réunit le jeune Philip Glass et Ravi Shankar, Offering (offrande). La magie tournoyante des cordes se mêle à la mélodie râga des saxophones. Les modes et les mélodies se nouent, les échelles de l’Inde et de l’Occident se fondent sans oublier jamais leurs particularités. Il n’est plus de musique savante ou traditionnelle, mais une palette moi-rée d’onirisme, amples vagues où éclosent de subtils éclats. Le brillant de l’œuvre de Michael Torke, Ash, flamboie et transporte l’orchestre, créant avec le minimalisme, dont Philip Glass est l’un des fondateurs, de vibrants échos. La joueuse de sitar entrait enfin en scène pour le Concerto pour sitar et orchestre n°2 « Râga Mâlâ » de Ravi Shankar. Les quatre

mouvements de cette œuvre foisonnante offrent la possibilité à l’orchestre et à la soliste d’aborder tous les registres, en une écriture imagée où se croisent les continents. Les rythmes dialoguent, les variations se répondent en élans sans cesse

renouvelés. Les frontières s’ef-facent, on franchit les mers et les grammaires trouvent de nou-velles géographies. On entend ici une danse où se marquent les pas, là passe une fanfare, et voici un groupe de percussions plein d’allant… la luxuriance de la composition pourrait faire songer à celles des romans de Garcia Marquez, renvoyant aux terres d’origine du chef d’or-chestre qui lie les mondes avec une fine pertinence. Impossible

de laisser partir Anoushka Shankar sans qu’elle ait généreu-sement accordé des bis où, soliste, elle propose quelques-unes de ses propres compositions. Magie délicate.

MARYVONNE COLOMBANI

Concert donné le 31 janvier, Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence

Charla Banjara © Zoé Lemonnier

Anoushka Shankar © Anushka Menon

56 critiques

RESERVATIONS TEL 06.13.06.06.82INFOS/BILLETTERIE EN LIGNE

WWW.PRESENCESFEMININES.COMLa Valette

La GardeLe Pradet

Toulon ConcertsConférences

2020

ans

TITI ROBIN & ROBERTO SAADNA

THÉÂTRE PECOUT CHÂTEAURENARD

JEUDI 5 MARS, 20H30

en coréalisation avec

#LesSuds . www.suds-arles.com

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Au gré des vents

Le Quatuor Avena ouvrait brillam-ment les Week-Ends Musicaux de Chaillol. Adam Campbell, saxo-

phone baryton (Afrique du Sud), Fa-bio Cesare, saxophone alto (Italie), Sumika Tsujimoto, saxophone té-nor (Japon) et Nicolas Allard, saxo-phone soprano (France, Gap), com-plices depuis trois ans, arpentent les époques et les formes, avec un même bonheur qui conjugue espièglerie et une indéniable maestria jusque dans leur mise en scène : entrée des musi-ciens de la porte de l’église à l’autel, sur une suite de Danses Roumaines (Sz 56) de Béla Bartok qui fusionne musique savante et populaire en une même pâte joyeuse et descriptive, et départ trissé sur un air traditionnel ja-ponais, Sakoula, (fleur de cerisier) en remontant la nef. Entretemps, on aura visité les Ciudades (Cités) de Guillermo Lago : Sarajevo (inspiré du travail du compositeur en Bosnie au temps de la guerre), avec ses ostinatos, ses émer-gences brumeuses, sa mélodie lente et mélancolique où perce le souvenir de Philip Glass, Cordoba aux pointes his-panisantes tandis qu’un jeune homme tombe amoureux devant la cathédrale et que les musiciens se livrent à un quadrille sur scène, Montevideo et son

tango, « perdu derrière la montagne », en écho à celui de Buenos Aires, Köln, où les saxophonistes s’accroupissent en demi-cercle initiatique, Addis Abeba enfin, pour célébrer l’Afrique « où tout a commencé »… On se laissait trans-porter par la fluidité jazzée de Préludes de Gershwin, le « Nuevo Tango » de Piazzolla, « avec rage », la « Nouvelle Musette » de Richard Galliano, et ses notes où rêve encore Casque d’or ou un Clown venu tout droit d’un film de Fel-lini (grâce aux arrangements de Nicolas Allard). Au cœur de la représentation, une création mondiale sur une com-mande de l’Espace Culturel de Chaillol pour cet ensemble, Massar (« trajec-toire » en arabe) de Jean-Charles Ri-chard, évoque en trois temps la Mé-diterranée, Turquie, Espagne, Perse et Maroc. Mouvement tournoyant em-prunté à la musique soufie, rythmes auxquels ne manquent que les palmas, du chant espagnol, volutes ourlées de mélismes orientaux… partition luxu-riante, à l’instar d’une fresque voya-geuse… Bonheurs !

M.C.

Concert donné le 2 février dans l’église de Saint-Pierre d’Argençon, dans le cadre des Week-ends musicaux de Chaillol

© Alexandre Chevillard

Des images plein la têteLe Mucem a proposé une immersion totale dans l’univers de Jean Giono : quatre jours de projections avec les films les plus marquants inspirés par ses œuvres

Dans le cadre de l’exposition Giono qui continue son parcours avec succès (plus de 50 000 visiteurs à ce jour),

les soirées cinéma ont attiré un public nombreux, dans lequel se recon-naissaient des Manosquins des-cendus du plateau, des amis de Giono et de Lucien Jacques, ve-nus avec Sylvie Durbet-Giono, fille de l’écrivain. Certains ont peut-être vus pour la première fois les films sélectionnés, aux person-nages intenses, aux situations et aux images fortes.En amorce, hommage à Jacques Mény, documentariste, spécialiste de Giono, conseiller scientifique de l’exposition, avec la projection de Le mystère Giono (1995) où il mêle ex-traits d’interview, images d’archives, soulignant la capacité imaginative de Giono qui vivait véritablement avec ses personnages, les voyait évoluer dans son bureau. Claude Giraud lui prête sa voix chaleureuse, lui qui a créé le rôle de Langlois au cinéma.Naturel, précis et sobre, Jean-Pierre Darroussin a introduit les séances avec

bonheur. Mention spéciale pour sa lec-ture des deux premiers chapitres de Re-gain, suivie de celle du moins connu Le prélude de Pan, nouvelle de 1929.

Après la projection de Crésus (1960), seul film réalisé par Giono qui y fait jouer Fernandel, acteur fétiche de Pagnol, Jofroi, première adaptation du même Pagnol, qu’il a réalisé en 1934, séduit par son aspect documentaire sur la vie d’un village, avec décors naturels, ca-méra mobile et la prestation de Vincent Scotto qui assure le rôle-titre en même temps que la bande son. Suivait Regain

(1937), merveilleusement restauré, aux images noir et blanc sublimes. Interprétation superbe et émouvante d’Orane Demazis - quoi qu’en disent ses détracteurs… et belle fable sur le travail de la terre et la valeur du blé et du pain. On note la présence de Nicolas Pagnol qui a pris en mains le devenir de l’œuvre de son grand-père et déclare vouloir restaurer les vieilles ruines des décors spéciale-ment construits pour le tournage dans les collines près d’Aubagne.

Chroniques romanesquesPuis sont venus les deux grands films adaptés des Chroniques roma-nesques : Un roi sans divertissement réalisé par François Leterrier en 1963 et Les âmes fortes par Raoul Ruiz en 2001. C’est Giono lui-même qui a fait l’adaptation du premier : son scénario transforme l’intrigue,

la resserre en récit qui suit la règle des trois unités et éclaire l’énigmatique per-sonnage de Langlois, pris littéralement au piège d’un assassin de jeunes filles qui

tue par désoeuvrement. Glaçant dans tous les sens du mot car tout se passe dans la neige, le froid et l’ennui. Le blanc étincelle, le rouge éclabousse et l’on entend Giono qui donne sa voix au meurtrier. Quant à Raoul Ruiz, il filme les paysages dans leur belle indif-férence au monde des hommes, de leurs pulsions et de leurs se-crets. La nuit envahit l’image, les ombres noires des travailleurs des chemins de fer s’étendent et cachent les turpitudes… On est

bien loin des enluminures provençales qu’on a voulu coller à Giono.

CHRIS BOURGUE

La manifestation Jean Giono, artisan d’images s’est déroulée au Mucem à Marseille, du 16 au 19 janvier.

Regain © Les Films Marcel Pagnol

Un roi sans divertissement © Collection Gaumont

58 critiques

Nous tempsifions

Le cycle de conférence consacré à la thématique du temps par Opera Mundi bat son plein. Mi-janvier, c’est un couple et binôme de travail, les philosophes tourangeaux Sophie

Gosselin et David Gé Bartoli, qui sont venus présenter un livre écrit à quatre mains (Le toucher du monde, éditions Dehors, 2019). Ouvrage dans lequel ils détaillent leur ré-flexion sur le statut du discours scien-tifique au XXIe siècle, articulé à celui de la technique.Pour Sophie Gosselin, il faudrait s’ex-traire du temps universel contempo-rain, matérialisé par des algorithmes, et qui constitue une résille planétaire, pour la bonne raison que « le temps linéaire n’existe pas ». Chaque espèce animale ou vé-gétale ouvre une temporalité, et l’une des dé-finitions de la Terre pourrait être cet enchevê-trement de temporalités. Or le monde capitaliste tend à tout traduire en signes, permettant le décompte, la manipulation, afin de faciliter l’emprise des marchés. David Gé Bartoli ren-chérit : « Les corps ont besoin de s’effacer dans une nuit, dans des cachettes : nous devons laisser au vivant la possibilité de

disparaître des relevés ». Il évoque les loups, chers à leur confrère Baptiste Morizot, penseur sorti des bibliothèques pour suivre les pistes animales

à l’air libre... et à l’œil nu. Les outils de vision nocturne comme les caméras infrarouges

leur ôtent ce refuge. Les deux philosophes de l’Université de Tours inventent quant

à eux des mots, comme « tempsifier », se laisser habiter par la mémoire d’un

lieu. Dommage qu’ils ne prennent pas la peine de décrypter le reste de

leur vocabulaire. Tout le monde n’a pas la chance, durant les conférences,

d’être assis à côté d’une professeure de lettres classiques, à même d’expliquer

l’étymologie de « réifier » (du latin res, rei : transformer en chose) ou de phusis (en grec

ancien : jaillissement permanent)... GAËLLE CLOAREC

La conférence Habiter le monde, habiter le temps a eu lieu le 15 janvier à la librairie L’hydre aux mille têtes, Marseille

Sophie Gosselin et David Gé Bartoli © G.C

Géo, mais tri poétique

L’association les Nouvelles Hybrides invitait, en résidence pour janvier 2020, Nicolas Tardy. Lors de la

rencontre publique organisée à la bi-bliothèque de La Tour d’Aigues, Aman-dine Tamayo le soumettait à un fin et pertinent questionnement, soulignant le problème de définition quant à la ca-tégorisation de cet auteur prolifique : écrivain, poète, plasticien, éditeur, per-formeur… « J’ai plutôt tendance à me dé-finir ces derniers temps comme un écri-vain, alors que je me voyais poète à mes débuts. Ce qui constitue un paradoxe, j’ai d’abord écrit en prose, et aujourd’hui en vers… » Explorateur des frontières, Ni-colas Tardy se plaît aussi aux lectures publiques en collaboration avec des mu-siciens, ce travail apporte un rythme à son écriture et modifie son rapport au temps ; lui qui vient des arts plastiques peut considérer les mots comme « des briques de Lego à assembler » et use du traitement de texte « comme bande de montage ». Le premier livre évoqué lors de l’entretien, Monde de seconde main, propose un travail aigu sur le regard :

« En regardant longtemps, se dessinent des strates de sens… l’image a rapport à la fiction, la clarté de la géométrie décrite se double d’opacité, le concret prend des allures abstraites. En déconstruisant le regard, on ne l’épuise pas, on l’ouvre. J’écris beaucoup et je rabote beaucoup dans une remise en cause des outils traditionnels. Travailler sur des séries est un moyen de relancer, je ne suis pas un coureur de fond, je compose des séries, comme de petits sprints. Si le travail de décalage désoriente le lec-teur, c’est bien, à l’époque où tout le monde veut nous orienter ! » Le second ouvrage, Gravitations autour d’un double soleil, évoque par un subtil jeu d’énigmes, la vie du musiciens Sun Ra, et nous donne à voir l’histoire du siècle. Télescopages garantis ! « On n’est pas monolithiques ! » sourit celui qui voit « l’art comme une expérience »…

MARYVONNE COLOMBANI

La rencontre a eu lieu le 25 janvier à la bibliothèque de La Tour d’Aigues

© Laurence Bernis

Monde de seconde main, éditions de l’Attente, 13€Gravitations autour d’un double soleil, éditions Série discrète, 15€

à lire

5959

60 au programme spectacles bouches-du-rhône vaucluse

La moucheValérie Lesort et Christian Hecq : leur adaptation enchanteresse de 20 000 lieues sous les mers, passée par La Criée, avait reçu en 2016 le Molière de la création visuelle et le prix de la critique. La Mouche est leur nouveau spectacle adapté de la nouvelle de George Langelaan, rendue célèbre par l’adaptation au cinéma de Cronenberg. Nul doute que leur adaptation théâtrale va valoir le détour !

5 au 7 marsLa Criée, Marseille

04 91 54 70 54 theatre-lacriee.com

Quasi nienteIl y a « des plis qui séparent la fiction de la vie ». C’est dans ces plis que travaille le théâtre de Daria Deflorian et Antonio Tagliarini, notamment dans cette pro-position inspirée du film Le désert rouge d’Antonioni et de la figure de son héroïne Giuliana. Sur scène, deux hommes et trois femmes, dans un jeu de miroir, en quête de vérité. Spectacle en italien, surtitré français.

13 au 15 marsLa Criée, Marseille

04 91 54 70 54 theatre-lacriee.com

Un furieux désir de bonheur

Théâtre de récit, danse et cirque, à voir dès 8 ans, autour du moteur de l’existence : le désir ! D’où, sur scène, une libération des corps et de la parole, à partir de l’histoire de Léonie, 70 ans, qui décide que main-tenant ça suffit, mais qu’en attendant d’en finir, autant profiter de la vie. Elle ne sera pas seule dans cette affaire : sept interprètes pour cette grande forme de théâtre jeunesse signée Olivier Letellier.

13 au 14 marsLa Criée, Marseille

04 91 54 70 54 theatre-lacriee.com

17 marsLa Garance, Cavaillon

04 90 78 64 64 lagarance.com

Alex Lutz

Humoriste, comédien, auteur, metteur en scène, cinéaste Alex Lutz revient au Gymnase avec son second spectacle, qui commence par un petit numéro équestre (!) pour ensuite s’interroger, à travers di-verses pitreries plus ou moins régressives, potaches et/ou surréalistes, sur par exemple la notion de performance, l’origine du rire, ou le duo nature / culture. Le tout assai-sonné de quelques divagations à la fois punk et fleur bleue.

10 au 14 mars

Le Gymnase, Marseille08 2013 2013 lestheatres.net

A love suprêmeMise en scène de Dominique Pitoiset, qui entame avec ce spectacle un cycle sur « la femme blanche et l’homme blanc de plus de 50 ans à l’entrée des temps post-démocra-tiques » pour ce texte de Xavier Durringer, spécialement écrit pour l’actrice Nadia Fa-brizio. Elle incarne une strip-teaseuse vieil-lissante de Pigalle, poussée brusquement vers la retraite, qui se retourne sur sa vie.

3 au 7 marsLes Bernardines, Marseille

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Rien n’arrive !Et ça arrive souvent !L’acteur et metteur en scène Yves Fravega et le musicien et compositeur Pascal Gobin rendent ici hommage à leur ami disparu Jean-Paul Curnier, philosophe irrévéren-cieux, qui a collaboré à de nombreuses re-prises avec leur Cie L’art de vivre. Un spec-tacle-performance qui s’invente sur scène à partir d’un recueil de textes traitant de l’amour, la solitude, l’absurdité, l’imbécilité heureuse et le moins que rien. (lire p44)

3 au 7 marsThéâtre Joliette, Marseille

04 91 90 74 28 theatrejoliette.fr

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Eins Zwei Drei

Eins Zwei Drei, c’est à peu près tout ce que les non germanophones parviennent à compter dans la langue de Goethe. C’est aussi la nouvelle pièce du chorégraphe suisse-allemand Martin Zimmermann, avec trois acteurs-danseurs-circassiens, accompagnés du pianiste Colin Vallon. Il y questionne « l’autorité, la soumission et la liberté, qu’elle soit celle de l’enfance ou celle de la folie ». Rien de mieux qu’une bonne triangulation pour explorer la complexité des relations humaines...

3 & 4 marsLe Zef, Marseille

04 91 11 19 20 lezef.org

BufflesLa marionnettiste Émilie Flacher s’est ins-pirée d’une fable urbaine du catalan Paul Miró : une famille de buffles habite un quartier où rodent des lions. Le plus jeune d'une fratrie de six enfants disparaît, puis les parents, tour à tour. Chaque membre restant réagit à sa manière, avec ses souvenirs et les non-dits. Précisons que l'histoire fait référence à la dictature de Franco en Espagne. Pour les 13 ans et plus.

6 & 7 marsThéâtre Massalia, Marseille

04 95 04 95 75 theatremassalia.com

Estelle BlanquetLes Simples conférences organisées par la compagnie Lanicolacheur pour le jeune public du Théâtre Massalia invitent cette fois-ci une spécialiste de la didactique des sciences, Estelle Blanquet. Physicienne de formation, elle s’intéresse à l’appropriation des critères scientifiques par les élèves de maternelle et primaire, ainsi qu’aux usages pédagogiques de la science-fiction.

7 marsThéâtre Massalia, Marseille

04 95 04 95 75 theatremassalia.com

Bouge ! #3Carrefour artistique biennal mis en place en 2016 par Michel Kelemenis, Bouge ! invite durant deux semaines jeunes danseurs et compositeurs d’expressions différentes à expérimenter la création chorale. La troi-sième édition met à l’épreuve du groupe les chorégraphes Balkis Moutashar (Mar-seille), Lali Ayguadé (Barcelone), Linda Hayford (Rennes) et Silvia Gribaudi (Ve-nise). Restitution publique le 4 mars, en-trée gratuite sur réservation.

4 marsKlap Maison pour la Danse, Marseille

04 96 11 11 20 kelemenis.fr

L’architecture climatique

Un architecte suisse est l’invité d’Opera Mundi au Frac Paca. Philippe Rahm in-terviendra à propos du défi climatique : on ne peut plus continuer à vivre dans des bâtiments qui ignorent les contraintes na-turelles, exposition aux intempéries, varia-tion des températures et de l’humidité, à grand renfort d’énergie fossile, dans des passoires énergétiques. Le traditionnel Apéro Mundi qui suit les conférences se transforme pour l’occasion en Dîner Mundi au restaurant du Frac (pensez à réserver : 09 72 85 35 58).

7 marsOpera Mundi, Marseille

04 91 91 27 55 opera-mundi.org

Les multiples temporalités du carbone

Bernadette Bensaude-Vincent, histo-rienne et philosophe des sciences, inter-viendra pour Opera Mundi à la BMVR Al-cazar. Avant un Grand format s’adressant aux 15 ans et plus, qui retracera la tempo-ralité du carbone, depuis sa formation dans l’espace interstellaire jusqu’à un possible effondrement de la biosphère, elle donnera une conférence Abécédaire à l’attention des enfants à partir de 7 ans, sur le carbone et l’histoire humaine.

12 marsOpera Mundi, Marseille

04 91 55 90 00 opera-mundi.org

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62 au programme spectacles bouches-du-rhône

L’État social au défi de la mondialisationL’économiste Bernard Tabuteau régale depuis février l’Université Populaire Mar-seille-Provence de plusieurs conférences. Après avoir traité des grandes étapes de l’État social, l’émergence de cet ensemble de droits sociaux conquis à partir de la fin du XIXe siècle, son évolution entre les deux Guerres mondiales, la naissance de la Sé-curité Sociale, et les remous de la mondia-lisation... il conclura par une réflexion très actuelle sur le régime des retraites, l’as-surance chômage et l’assurance maladie.

2 marsCasa Consolat, Marseille

06 52 78 67 85 upop.info

Phèdre !

Le Théâtre Fontblanche présente Phèdre !, non pas sous la forme d’une pièce clas-sique, mais par le biais d’une conférence, ou peut-être d’un cours magistral. Le co-médien Romain Daroles, dirigé par Fran-çois Gremaud, y déclare son amour du texte de Racine, avec un humour et une intensité qui justifient bien l’ajout d’un point d’exclamation au titre.À partir de 15 ans.

3 & 4 marsThéâtre Fontblanche, Vitrolles04 42 02 46 50 vitrolles13.fr

5 & 6 marsThéâtre de l’Olivier, Istres

04 42 56 48 48 scenesetcines.fr

La femme du boulangerAubagne fête les 125 ans de la naissance de son enfant chéri, Marcel Pagnol. Jean-Claude Bodracco et sa compagnie re-prennent son film inspiré d’un épisode de Jean le Bleu de Giono : un boulanger ré-cemment installé en Haute Provence voit sa jeune femme le quitter pour un berger. Il décide de faire la grève du pain, mobilisant tout le village pour retrouver la boulangère.

28 & 29 févrierLe Comoedia, Aubagne

04 42 18 19 88 aubagne.fr

Billie Holiday Sunny SideLa vie et l’œuvre de Lady Day, aussi tumul-tueuse que talentueuse, écrite, mise en scène et interprétée par Naïsiwon El Aniou. Son texte est inspiré de biographies, ainsi que de l’autobiographie de Billie Holiday, Lady sings the Blues, et s’appuie également sur les paroles de ses chansons. L’artiste joue et danse son hommage à l’une des plus grandes dames du jazz.

4 marsLe Comoedia, Aubagne

04 42 18 19 88 aubagne.fr

Le temps qui reste

Philippe Lellouche a écrit et mis en scène cette pièce pour l’Atelier Théâtre Actuel. Virginie Guilhaume y interprète une jeune veuve qui retrouve ses amis d’enfance, Phi-lippe Lellouche, Christian Vadim et Da-vid Brécourt. Une variation sur le temps qui passe et ne revient plus.

6 marsLe Comoedia, Aubagne

04 42 18 19 88 aubagne.fr

Jamais Jamais

On ne sait s’il s’agit d’un dortoir d’orphe-linat, caserne, colonie de vacances… Cinq adultes isolés du monde extérieur vivent une réalité monotone, et pour s’en divertir, entreprennent de se raconter l’histoire de Peter Pan au Pays du Jamais Jamais. Les co-médiens de la Cie Les arpenteurs de l’invi-sible incarnent les différents personnages de l’aventure inventée par James Matthew Barrie, en la pimentant de... rock ‘n roll !

13 marsLe Comoedia, Aubagne

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Beckett Boulevard Les belges de la Cie De Koe (Natali Broods, Peter Van den Eede, Nico Sturm) opposent une fin de non-recevoir à l’injonction pu-blicitaire et médiatique du « restez vous-mêmes ». Une jeune divorcée annonce à son ex-mari qu’elle se lance en politique, il démonte les faux-semblants de son en-gagement, le serveur du bar s’en mêle, et leurs échanges tendent à démontrer avec acidité « la désolante construction de nos identités contemporaines ».

5 & 6 marsBois de l’Aune, Aix-en-Provence04 88 71 74 80 boisdelaune.fr

10 au 12 marsThéâtre La Vignette, Montpellier

04 67 14 55 98 theatre.univ-montp3.fr

Killing RobotsKilling Robots est la création 2019 de la Cie Hanna R, une enquête sur le « meurtre » d’un robot autostoppeur. Chargé de prendre des photos à travers les États-Unis, il sera retrouvé démembré au bord d’une route. Du théâtre à mi-chemin entre fiction et documentaire, sur un sujet qui a de l’ave-nir, les relations homme-machines, mis en scène par Linda Blanchet.

11 marsThéâtre Antoine Vitez, Aix-en-Provence

04 13 55 35 76 theatre-vitez.com

Le reste...

Un spectacle d’Angie Pict encore en chan-tier, d’après Le reste, vous le connaissez par le cinéma, texte incisif de Martin Crimp, lui-même écrit d’après Les Phéniciennes d’Euripide, « pour faire du théâtre la caisse de résonance des tumultes du monde et de ses folies vengeresses ». Inceste, guerres fratricides, corruption et violence destruc-trice sont au programme. Brrr !

17 marsThéâtre Antoine Vitez, Aix-en-Provence

04 13 55 35 76 theatre-vitez.com

Arlequin, poli par l’amour

Un marivaudage mis en scène par Tho-mas Jolly à grands renforts de paillettes, tulle et perfectos. Derrière le charmant Ar-lequin et sa bergère Silvia, « c’est le droit à l’existence qui s’exprime », la prérogative de la jeunesse : choisir parmi toutes les vies qui s’offrent à nous... Choix libre en appa-rence seulement : la fée, figure puissante, se charge de le leur rappeler.

3 au 7 marsJeu de Paume, Aix-en-Provence08 2013 2013 lestheatres.net

Händel & Common GroundDeux pièces chorégraphiques d’Alonzo King, chorégraphe afro-américain connu pour son engagement en faveur des droits civiques et son approche à la fois politique et spirituelle de la danse. La première s’ap-puie sur la musique baroque du compositeur Georg Friedrich Händel, la seconde est une ode à l’énergie urbaine de San Francisco.

3 mars Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence

08 2013 2013 lestheatres.net

Le bruit des loupsParler de notre rapport à la nature par le biais du conte, c’est le choix qu’a fait l’une des figures majeures de la magie nouvelle, Étienne Saglio. En observant ses jeunes enfants, il a réalisé la place importante que tient dans leur vie toute une faune issue du récit : le loup peuple encore nos imagi-naires, alors que peu d’entre nous côtoient directement le grand prédateur. L’artiste invite sur scène de vrais animaux, ainsi qu’un géant authentique. Du réalisme ma-gique, en somme !

6 & 7 mars Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence

08 2013 2013 lestheatres.net

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Fúria

Lia Rodrigues livre une pièce pour huit danseurs, certains issus des favelas de Rio, ces quartiers de bidonvilles hantés par les cartels et la police brésilienne corrompue. Son spectacle « regorge de processions sur-réelles et fantaisistes, de tremblements et d’orgies, d’images chamaniques et d’états-li-mites, où se mélangent désir sexuel, vio-lence et beauté dans de véritables torrents émotionnels ». Une Fúria carnavalesque cathartique.

10 & 11 marsPavillon Noir, Aix-en-Provence04 42 93 48 14 preljocaj.org

Lady Magma

La chorégraphe irlandaise Oona Doherty n’a pas froid aux yeux. Avec ses cinq dan-seuses, elle a travaillé à partir de leur « énergie tantrique » et la part cachée de leur être, pour en faire émerger plaisirs et traumatismes. Elle revendique de faire de son art un doigt d’honneur à la repré-sentation phallocrate des femmes dans les médias. Jouissif !

13 & 14 marsPavillon Noir, Aix-en-Provence04 42 93 48 14 preljocaj.org

Boys don’t cryC’était un tube intergalactique de The Cure, puis un film américain avec un héros trans-genre, c’est désormais un spectacle jeune public de Hervé Koubi (dès 7 ans). Le cho-régraphe franco-algérien raconte l’histoire d’un garçon qui aime bouger en rythme et point le foot, avec sept jeunes virtuoses du hip-hop, danse de rue et danse contem-poraine. Joie du mouvement et du pas de côté face aux clichés.

13 marsEspace NoVa, Velaux

04 42 87 75 00 espacenova-velaux.com

Bougresses !Pierre Béziers s’inspire de la Canso des eretges (XIIIe siècle) et d’œuvres de trou-badours pour vous convier à une expérience de teatre degustacioun : deux comédiennes concoctent en direct une spécialité culinaire médiévale, la « frigousse des hérétiques », et racontent la croisade contre les cathares conduite par le cruel Simon de Montfort (mort caillassé, dit-on, par des toulousaines à qui sa tête ne revenait pas). Les specta-teurs sont invités à manger le plat à la fin.

6 marsHalle Léo Ferré, Gardanne

04 42 65 77 00 ville-gardanne.fr

11 au 14 marsL’Ouvre-Boîte, Aix-en-Provence

04 42 38 94 38 theatredumaquis.com

Thomas Cantaloube

Les Nouvelles Hybrides proposent une ren-contre avec le journaliste international et collaborateur de Médiapart, Thomas Can-taloube. Lequel est devenu romancier en 2019, en publiant Requiem pour une Ré-publique, plongée dans les débuts de la Ve République sur fond de Guerre d’Algérie, entre 1959 et 1962, où les appétits néoco-loniaux s’aiguisaient déjà.

5 marsBibliothèque de Mirabeau

04 90 08 05 52 lesnouvelleshybrides.com

Le bonheur (n’est pas toujours drôle)

Pierre Maillet (Collectif Les Lucioles) re-trouve là son auteur fétiche, Rainer Werner Fassbinder. C’est dans son cinéma du mi-lieu des années 70 qu’il a puisé l’inspiration de ce spectacle : les scénarios de Le droit du plus fort, Tous les autres s’appellent Ali et Maman Küsters s’en va au ciel. Il rend ainsi hommage à l’artiste autant qu’aux person-nages qui peuplent son œuvre, des « laissés pour compte trop souvent marginalisés par une société de plus en plus égocentrique et déshumanisée ».

5 marsThéâtre Les Salins, Martigues

04 42 49 02 00 les-salins.net

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Marie-AntoinetteThierry Malandain s’attache au destin tra-gique de la dernière reine de France, adorée de tout un peuple puis haïe et condamnée à être guillotinée. Le chorégraphe concentre le récit à Versailles, avec 22 danseurs évo-luant dans les décors et les costumes de Jorge Gallardo, et sur les partitions de Jo-seph Haydn et Christoph Willibald Gluck.

13 & 14 marsThéâtre Les Salins, Martigues

04 42 49 02 00 les-salins.net

Mademoiselle BDans sa dernière création, le Théâtre Dé-saccordé rend les lettres vivantes, faisant des mots des marionnettes qui vont racon-ter l’histoire de Béatrice, une petite fille qui ne vécut qu’un jour et demi… À partir des formes du livre et de la graphie, tout en ombres et en projections, Sandrine Maunier et Rémi Lambert développent et animent avec douceur et tendresse l’ima-ginaire des enfants. Dès 6 ans.

19 févrierThéâtre Le Sémaphore, Port-de-Bouc

04 42 06 39 09 theatre-semaphore-portdebouc.com

Ce qui demeure

Fondatrice de la Cie Babel, Elise Chatauret travaille comme une réalisatrice de films documentaires, enrichissant son écriture d’entretiens, de documents divers qui for-ment le matériau premier de ses enquêtes. Pour interroger la mémoire, la construc-tion de l’histoire et le rythme d’un siècle, elle a recueilli la parole d’une femme de 93 ans. Deux jeunes femmes et une musi-cienne restituent ce récit, entre souvenirs intimes et mémoire collective.

4 marsThéâtre Le Sémaphore, Port-de-Bouc

04 42 06 39 09 theatre-semaphore-portdebouc.com

Petit air du tempsUn homme seul, face à une chaise vide et une interlocutrice transparente qui se pré-sente pour un entretien d’embauche. En-goncé dans son costume et ses certitudes, dissimulant mal un cynisme débordant, il va peu à peu se laisser rattraper par des émotions qui submergeront son corps, en une danse burlesque haute en couleurs !Créé en 1999 par Bruno Pradet, Cie Vil-canota, ce solo est aujourd’hui repris par Christophe Brombin.

5 & 6 marsThéâtre Le Sémaphore, Port-de-Bouc

04 42 06 39 09 theatre-semaphore-portdebouc.com

Love and revengeSpectacle atypique des artistes libanais La Mirza (plasticienne) et Rayess Bek (rappeur), Love and Revenge est un ci-né-concert électro à la mode rétro. En mixant des grands succès de comédies musicales égyptiennes avec des extraits de films égyptiens des années 1940 à 1990 projetés en arrière-plan, auxquels s’ajoutent l’oud électrique de Mehdi Haddab et la basse de Julien Perraudeau, ils racontent les traditions et contradictions du monde arabe, avec glamour et humour.

13 marsThéâtre Le Sémaphore, Port-de-Bouc

04 42 06 39 09 theatre-semaphore-portdebouc.com

OmbreLa Cie de l’Enelle s’inspire très librement de La Divine comédie de Dante pour exprimer les peurs ressenties dans l’enfance, quand les ombres envahissent la chambre. C’est dans celle du petit Dante, donc, que s’ins-tallent Lamine Diagne et Rémi Lambert pour l’aider à affronter cette vie grouillante de la nuit, où tout peut s’avérer effrayant. Avec une couette animée et rassurante, qui se transforme parfois en écran de projec-tion, en radeau, en baleine… ils feront re-surgir la lumière au cours d’une traversée en musique et en images.

4 marsForum de Berre

04 42 10 23 60 forumdeberre.com

13 marsEspace de l’Huveaune, La Penne-sur-Huveaune

04 91 36 21 41 ville-lapennesurhuveaune.fr

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Le MisanthropeAlceste rejette la société dans laquelle il vit, les mensonges, compromissions et faux-semblants, tout en étant éperdument épris de Célimène, jeune coquette et reine des salons, qui adore médire de ses sem-blables… Peter Stein met en scène la pièce de Molière, avec Lambert Wilson dans le rôle d’Alceste.

7 marsThéâtre La Colonne, Miramas

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Les naufragésDurant une quinzaine d’années, Patrick Declerck, psychanalyste et ethnologue, a accompagné des SDF à Paris. Emmanuel Meirieu met en scène son essai éponyme (édité chez Pocket), un témoignage boule-versant que portent avec justesse François Cottrelle, le soignant résigné, et Stéphane Balmino, un homme brisé. (à lire sur jour-nalzibeline.fr).

10 marsThéâtre La Colonne, Miramas

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12 au 14 marsLe Bois de l’Aune, Aix-en-Provence

04 88 71 74 80 boisdelaune.fr

19 & 20 marsThéâtre Liberté, Toulon

04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

I Fall, I Flow, I Melt

Le danseur et chorégraphe Benjamin Mil-lepied poursuit son exploration sur la pro-fondeur et la complexité de la musique de Jean-Sébastien Bach, deuxième volet de son Bach Studies. Dans cette pièce pour douze danseurs, il adjoint et juxtapose au baroque de Bach la musique du composi-teur contemporain David Lang.

13 marsThéâtre La Colonne, Miramas

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Blanche-Neige ou la chute...

Le film (muet) est projeté sur un écran pen-dant que les comédiens jouent la pièce, avec les musiciens et bruitages en live. La Cie La Cordonnerie est spécialiste de cet alliage : une histoire filmée qui ren-contre son reflet vivant sur scène. Le duos de femmes (la marâtre, la jeune fille) est installé en 1989, pendant la chute du Mur. L’adulte est hôtesse de l’air, folle de son re-flet, l’ado est mutique, planquée sous son casque de walkman. Dès 8 ans. (lire jour-nalzibeline.fr)

Blanche Neige ou la chute du mur de Berlin14 mars

Théâtre de Fos04 42 11 01 99 scenesetcines.fr

Je parle à un homme….Entre Jacques Gamblin et Thomas Co-ville une solide amitié s’est forgée au fil de l’eau et des mots. Lorsque le navigateur tente, en 2014, de battre pour la quatrième fois le record du monde à la voile en soli-taire, Gamblin fait le pari fou d’entamer une correspondance quotidienne avec lui. Au fil de ces échanges se tricote alors un dialogue intime et puissant où chacun se dévoile, avec humour et élégance. (lire jour-nalzibeline.fr)

Je parle à un homme qui ne tient pas en place1er mars

Théâtre de l’Olivier, Istres04 42 56 48 48 scenesetcines.fr

10 marsThéâtre La Passerelle, Gap

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Dans la peau de Don QuichotteMétilde Weyergans et Samuel Hercule (Cie La Cordonnerie) transportent Don Quichotte dans le XXIe siècle, en terre pi-carde, au milieu des champs de betterave… La faute au bug de l’an 2000 et à la crainte d’un bibliothécaire en charge de la saisie informatique des catalogues de voir dis-paraître son travail ! Dans ce désert espa-gnol fantasmé, il va naviguer entre passé et présent, romanesque et réalité, en che-valier errant plus vrai que nature !

10 & 11 marsThéâtre de l’Olivier, Istres

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au programme spectacles bouches-du-rhône hérault vaucluse 67

Et maintenant quelque chose…

Quinze ans après leur premier duo, Dalila et Samson, le chorégraphe Herman Diephuis et la chanteuse-performeuse Dalila Khatir se retrouvent, et même (ou surtout ?) s’ils sont « plus vieux, plus gros, plus arthrosés, plus névrosés » ils sont aussi « moins polis et plus en colère » ! C’est ensemble qu’ils vont dire et danser ce qu’ils ont sur le cœur, non sans accueillir à leur côté un groupe d’ar-lésiens qui perturbera le duo et donnera lieu à des situations inattendues.

Et maintenant quelque chose de complètement différent

3 marsThéâtre d’Arles

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Marius

La pièce s’est jouée dans l’enceinte de la Maison Centrale d’Arles, 4 fois fin 2017 et début 2018, avec des détenus. Durant trois ans l’auteur-metteur en scène Joël Pom-merat (Cie Louis Brouillard) a travaillé avec 6 d’entre eux à une adaptation du texte de Marcel Pagnol, avec la collaboration de la dramaturge Caroline Guiela Nguyen et de Jean Ruimi, un des détenus-comédiens qui a coanimé l’atelier théâtre). Le Théâtre d’Arles, qui a soutenu le projet, propose la projection de la captation de la pièce, en présence d’Anne de Armézaga, codirec-trice de la Cie Louis Brouillard.

5 marsThéâtre d’Arles

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Les diablesDepuis les années 80 la Compagnie de l’Oiseau-Mouche, à Roubaix, réunit des comédiens en situation de handicap. C’est le savoir-faire de sept comédiennes et co-médiens de cette troupe singulière que met en valeur Michel Schweizer, révé-lant la parole incisive, décalée et ironique qu’ils portent sur le monde qui nous en-toure. Une rencontre « hors normes » et hors certitudes.

12 & 13 marsThéâtre d’Arles

04 91 52 51 51 theatre-arles.com

10 marsThéâtre Molière, Sète

04 67 74 02 02 tmsete.com

Précieux(ses)La Cie Pirenopolis transpose les Ridi-cules de Molière dans notre société d’au-jourd’hui, celle du paraître et des clivages sociaux, toujours bien présents. Une émis-sion de télé-réalité, Le grand bureau des merveilles, scrute les réactions de jeunes filles de la petite bourgeoisie provinciale dans la jeunesse dorée du grand Paris. Et si rien n’avait changé depuis les « commo-dités de la conversation » ?

12 marsL’Alpilium, Saint-Rémy-de-Provence

04 90 92 70 37 mairie-saintremydepprovence.fr

Moving in concert

Sons, gestes, couleurs… Tout dans la dernière pièce chorégraphique de Mette Ingvartsen interagit, faisant coexister les humains et les technologies -des bâtons de lumière LED sans fil et mobiles. De l’abstraction naît l’imagination, et les corps en mouve-ment et en lumière créent des effets hal-lucinatoires des plus poétiques.

18 févrierLa Garance, Cavaillon

04 90 78 64 64 lagarance.com

Cent mètres papillon

Promis à une carrière de nageur de haut niveau, Maxime Taffanel a quitté la com-pétition à l’âge de 18 ans pour se tourner vers le théâtre. Dans ce solo mis en scène par Nelly Pulicani, il relate l’apprentissage de l’effort, la violence de l’entraînement, les doutes, les remises en question qui suivent les défaites, et les joies qui ponctuent les victoires. Mais aussi le rapport sensoriel et charnel qu’il entretient toujours avec l’eau.

3 marsSalle Roger Orlando, Caumont-sur-Durance

4 marsSalle des fêtes, L’Isle-sur-la-Sorgue

5 marsSalle de L’Arbousière, Châteauneuf-de-Gadagne

6 marsJardin de Madame, Oppède

7 marsEspace Folard, Morières-les-Avignon

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Night light

Que se passe-t-il quand tout le monde dort ? Est-ce que quelqu’un prend soin de la nuit ? Est-ce qu’il fait noir partout ? Une petite fille qui n’arrive pas à dormir va affronter sa peur de l’obscurité pour découvrir que la nuit, le monde est parsemé d’une multi-tude de lumières, chaudes et accueillantes. Andy Manley et la Cie danoise Teater Re-fleksion l’accompagnent dans un théâtre d’objets doux et subtil. Dès 3 ans.

11 & 14 marsLa Garance, Cavaillon

04 90 78 64 64 lagarance.com

Noire

Dans les années 50 dans l’État de l’Alabama, aux États-Unis, une jeune fille noire de quinze ans, Claudette Colvin, fut la pre-mière à ne pas céder son siège à un pas-sager blanc dans un bus. Neuf mois plus tard Rosa Parks réitéra ce geste, et devint l’égérie de la lutte pour les droits civiques. Stéphane Foenkinos a adapté et mis en scène l’essai de Tania de Montaigne, Noire, la vie méconnue de Claudette Colvin (Gras-set), que l’autrice interprète seule sur scène.

28 févrierThéâtre du Chêne Noir, Avignon

04 90 86 74 87 chenenoir.fr

AsiaCondamnée à mort pour blasphème, Asia Bibi, chrétienne pakistanaise, a passé plus de huit ans en prison, affrontant l’absurde en attendant son procès devant la Cour suprême. Son tort ? Avoir bu l’eau d’une source réservée aux musulmans et donc l’avoir souillée… Elle est finalement ac-quittée et extradée au Canada. Gérard Ge-las met en scène Pauline Dumas, sur un texte de Mouloud Belaïdi. « Un texte sur l’intolérance, le fanatisme et pour tout dire la bêtise qui se fait meurtrière. » Et sur une femme d’exception.

5 au 15 marsThéâtre du Chêne Noir, Avignon

04 90 86 74 87 chenenoir.fr

Les philosophes en chair et en os

L’approche biographique est pour Fré-déric Pagès, journaliste au Canard En-chaîné et agrégé de philosophie, un ex-cellent accès à l’œuvre d’un philosophe. Les conférences-spectacles qu’il propose se nourrissent aussi de photos et cartes géographiques et sont rythmées par les improvisations d’un musicien. Après Pla-ton le 28 février, il abordera les vies de Rousseau (20 mars) et Spinoza (3 avril).

28 févrierThéâtre des Halles, Avignon

04 32 76 24 51 theatredeshalles.com

Les deux frères et les lions

De leur enfance misérable à leur anoblisse-ment par la Reine d’Angleterre, deux frères jumeaux deviennent à force de travail, de montages financiers et placements immo-biliers l’une des plus grandes fortunes de Grande-Bretagne. La machine se grippe lorsque, installés sur les îles anglo-nor-mandes, ils veulent transmettre leur héri-tage à leurs filles respectives et se heurtent à la loi ancestrale qui les régit… L’histoire est vraie, Hedi Tillette de Clermont-Ton-nerre en a fait une fable satirique qui des-sine en creux l’histoire du capitalisme et du libéralisme exacerbé.

6 marsThéâtre des Halles, Avignon

04 32 76 24 51 theatredeshalles.com

À nos corps défendus

La comédienne et metteuse en scène Alexia Vidal et l’artiste plasticienne Karine De-bouzie ont effectué un travail de recherche auprès de quelque trente personnes qui ont accepté de parler de leur parcours et de leur ressenti à propos de leurs corps. Le résultat, deux œuvres, une installation vi-déo et une création théâtrale. La Cie Corps de Passage nous invite à un voyage inti-miste au cours duquel on croise des person-nages familiers ou atypiques, attachants, tous, bouleversants parfois, émouvants toujours en une profondeur qui nous ren-voie à nous-mêmes.

6 & 7 marsThéâtres des Carmes, Avignon

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Ô ma mémoireÀ 88 ans, Stéphane Hessel évoquait les 88 poèmes qui lui ont sauvé la vie dans un re-cueil intitulé Ô ma mémoire, la poésie de la nécessité. Accompagnée du pianiste Simon Barzilay, Sarah Lecarpentier évoque la vie de son illustre grand-père, mêlant les poèmes qu’il avait choisis et ses propres textes, instaurant une délicate continuité entre les générations. La poésie n’est plus ici un simple ornement des jours, mais leur essence même. Incontournable dans le cadre du Printemps des Poètes !

14 marsThéâtre des Carmes, Avignon

04 90 82 20 47 theatredescarmes.com

BéréniceRobin Renucci, directeur des Tréteaux de France, met en scène dans la plus absolue sobriété Bérénice de Jean Racine. Sur le plateau nu, les alexandrins du poète tra-gique déploient leur verve et leur acuité. On le sait, Titus et Bérénice s’aiment, mais le destin de Rome en a décidé autrement, Titus ne peut être empereur s’il épouse une reine étrangère. La séparation déchi-rante se passe sous les yeux affligés et im-puissants d’Antiochus, le confident fidèle… Une pépite.

7 marsSalle des fêtes, Mornas

04 90 28 12 51 cddv-vaucluse.com

Antigone

À la suite de la guerre fratricide entre Été-ocle et Polynice, Créon, l’oncle des enfants du malheureux Œdipe, offre des funérailles nationales au premier frère et abandonne aux corbeaux le corps du second. Antigone, leur sœur, se révolte et procède aux rites interdits. La tragédie n’a plus qu’à dérou-ler son fil. Dans une scénographie qui im-merge les spectateurs dans des projections vidéo à 360°, les acteurs évoluent au mi-lieu du public, devenu d’office le chœur antique composé des citoyens de la ville de Thèbes… à vivre dans la mise en scène de Gilbert Barba.

1er févrierSalle des fêtes, Malemort-du-Comtat

14 marsMaison Garcia, Villedieu

04 90 28 12 51 cddv-vaucluse.com

Bon débarras

Ils ont entre six et quatorze ans, et dans cette maison du XIXe, investissent à des époques différentes le lieu magique qu’est le débarras, poste d’observation, refuge, ter-ritoire des rêveries, cachette… Neuf enfants se succèdent, grandes marionnettes dont les vêtements évoquent leurs époques, de 1906 à nos jours. Par le filtre de l’enfance, l’histoire se dessine en un jeu de piste où les années défilent, guerres, émancipa-tions, invention de la purée mousseline… La Cie Alula offre une lecture sensible du siècle par le biais du quotidien.

4 marsThéâtre Durance, Château-Arnoux-Saint-Auban

04 92 64 27 34 theatredurance.fr

Un jour j’ai rêvé d’être toiCurieux objet, qualifié d’« autofiction théâ-trale » que celui proposé par la Cie Shindô. Anaïs et Bertrand (Anaïs Müller et Bertrand Poncet) jouent à « faire du théâââtre », en-dossent les rôles de personnages qui eux-mêmes interprètent d’autres personnages : elle devient Ange, une comédienne, lui, Bert, un homme qui se rêve femme. Le loufoque croise le fer avec l’essentiel. Ju-bilation des mots et de ce qu’ils recouvrent au cœur de dialogues ciselés…

5 au 7 marsUsine Badin, Gap

04 92 52 52 52 theatre-la-passerelle.eu

Elle pas princesse, lui pas héros

Les stéréotypes ont la vie dure ! Le sucré, le doux, le rose et les jupes qui tournent pour les petites filles, les jeux violents, la casse, la gouaille, réservés aux petits gar-çons… Le texte de Magali Mougel (Actes Sud Papiers, collection Heyoka Jeunesse) revient avec humour et tendresse sur les archétypes, les déconstruit dans une mise en scène inventive de Johanny Bert. Les acteurs Delphine Léonard et Jonathan Heckel campent des personnages d’en-fants qui ne rentrent pas dans le moule et c’est vivifiant. (À partir de 7 ans)

4 marsEn déambulation au Théâtre du

Briançonnais, Briançon04 92 25 52 42 theatre-du-brianconnais.eu

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70 au programme spectacles alpes var

Là, maintenant, tout de suite…Après le succès des Bonimenteurs, Didier Landucci revient pour un Seul en scène déjanté dans une mise en scène d’Ali Bou-gheraba. Lors d’une « vraie-fausse » confé-rence interactive, il montre comment peut naître une idée sans réfléchir, un person-nage se composer dans l’instant. L’art de l’improvisation se dévoile, fascinant et ju-bilatoire en un exercice virtuose qui s’érige en art de vivre. (à partir de 8 ans).

6 marsThéâtre du Briançonnais, Briançon

04 92 25 52 42 theatre-du-brianconnais.eu

Filles & SoieUn théâtre d’ombres et de marionnettes, d’après l’album jeunesse Les trois contes de Louise Duneton, par et avec Séverine Coulon. Il y est question, à partir de l’his-toire de Blanche-Neige, Peau d’âne et La Petite Sirène, du corps féminin. Nées pour attendre et séduire, les petites princesses découvrent que « d’autres manières d’être femme existent, plus irrévérencieuses et savoureuses ».À partir de 5 ans.

10 marsThéâtre du Briançonnais, Briançon

04 92 25 52 42 theatre-du-brianconnais.eu

21 rue des Sources

Philippe Minyana entreprend de récon-cilier les morts et les vivants. Une maison construite par son grand-père abrite sa fa-mille depuis les Trente Glorieuses. Deux revenants en éveillent les réminiscences, les menues traces que laissent les occu-pants d’un lieu à l’heure de leur départ. Leur histoire faite de petits riens s’entre-choque avec la grande Histoire.À partir de 15 ans.

4 au 6 marsThéâtre Liberté, Toulon

04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

J’ai des doutes

Après Hyacinthe et Rose, spectacle où il évoquait ses grands-parents, l’humoriste de France Inter François Morel célèbre un confrère, Raymond Devos. Un amoureux des mots dont il allait voir les one-man-shows à Caen dans les années 1970. Pour cet hommage dit et chanté, joué en alter-nance avec Antoine Sahler et Romain Lemire, il a reçu le Molière 2019 du meil-leur comédien.

12 & 13 marsThéâtre Liberté, Toulon

04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

14 marsLe Carré, Sainte-Maxime

04 94 56 77 77 carreleongaumont.com

La bascule du bassinMia Delmae, Maria de Medeiros et Eve-lyne Istria interprètent une parturiente, sa mère et sa grand-mère. Il faut un brin de courage pour décider d’accoucher loin des structures médicales, qui à force de présenter la grossesse quasiment comme une maladie, exercent une pression an-xiogène sur ce moment précieux. Célesta a décidé de donner la vie chez elle, avec à ses côtés ses ascendantes, et un homme sage-femme. Foin des étriers inconfor-tables et des perfusions de précaution !

6 & 7 marsChâteauvallon - Scène Nationale, Ollioules

04 94 22 02 02 chateauvallon.com

Girls and BoysLa comédienne Constance Dollé invite des spectateurs à sa table et leur livre l’histoire de sa vie. Sa rencontre avec son mari, son mariage, sa carrière, leurs enfants... Rien que de très banal, en apparence, mais in-sensiblement le tableau se fissure, pour laisser sourdre violence et manipulation. Le texte, acerbe et très contemporain, est signé Dennis Kelly, dramaturge britan-nique à suivre.

10 au 12 marsChâteauvallon - Scène Nationale, Ollioules

04 94 22 02 02 chateauvallon.com

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au programme spectacles var 71

Hernani ! Brigand de la pensée

Un noble banni se bat pour son honneur, son amour et sa liberté. Avec cette pièce, Victor Hugo secoua si fort le théâtre clas-sique que lors de la première représenta-tion eut lieu la mémorable « bataille d’Her-nani », coup d’envoi du romantisme. Jean Barlerin, Odile Ernoult et Étienne Luneau disent et parfois chantent les vers fameux, tout en retraçant les grands épisodes de cette controverse.

6 marsEspace Comedia, Toulon

04 94 36 19 16 espacecomedia.com

Le bois dont je suis fait

Sur le point de mourir, une femme entre-prend de réconcilier son mari et leurs deux fils. La famille est au cœur de la réflexion de la Cie Qui va piano. Censée être le lieu de la confiance et de l’épanouissement, elle recèle bien des zones d’ombres que les grandes étapes de la vie, naissances, mariages et décès, mettent en lumière brutalement. Julien Cigana et Nicolas Devort jouent tour à tour une dizaine de personnages.

3 marsThéâtre du Rocher, La Garde

04 94 08 99 34 ville-lagarde.fr

Mange tes ronces« Un spectacle d’ombres qui assoit le specta-teur sur des chardons ardents ». Parce que Léopold doit affronter une grand-mère pas commode, adepte de la soupe aux orties, accompagnée d'un basset qui, c'est clair, déteste les enfants. Le séjour chez Mamie promet d'être houleux... La pièce, adaptée aux enfants de 5 ans et plus, s'appuie sur l'univers graphique de Théodora Ramae-kers, accompagnée par le musicien-brui-teur Jean-Luc Millot (ex-Têtes Raides).

10 marsThéâtre du Rocher, La Garde

04 94 08 99 34 ville-lagarde.fr

Héroïne(s) #1La Cie Les Passeurs a demandé à trois auteurs de travailler sur un triptyque au-tour du concept d’addiction. Sabine Ta-miser livre le premier volet au Théâtre Marelios : le Lamento de Livia. Une jeune femme qui boit sa vie, l’alcool lui donnant l’impression d’exister, de faire partie de la communauté des êtres qui passent dans le café où elle travaille.Dans le cadre du Festival Région en Scène, organisé en Paca-Corse par le réseau Cercle de Midi.

5 marsThéâtre Marelios, La Valette-du-Var

04 94 23 62 06 lavalette83.fr

Modestes propositions

La Cie du Détour (théâtre burlesque à géo-métrie variable) entend remédier à la trop forte croissance de la population mondiale. Par le biais d’une conférence, un démo-graphe et son assistante entreprennent de prêcher l’épuration de la race humaine, en s’appuyant sur des textes de Platon, Darwin ou Malthus. « Peu importe le degré de mons-truosité par lequel il faut passer », rien ne vaut le recyclage des inutiles !

3 marsThéâtres en Dracénie, Draguignan

04 94 50 59 59 theatresendracenie.com

Mad in Finland

Soudain, une skieuse atterrit sur scène. Vous êtes pourtant au cirque ? L’explication est simple : les sept artistes du Collectif Mad sont finlandaises, et si elles utilisent des outils plus classiques, trapèze ballant, fil, équilibres, clown, tissu, chant et mu-sique, elles sont là pour présenter leur pays, « une Finlande imaginaire et réinventée, où la dépression finlandaise a quelque chose de magique, où la rudesse du climat crée des caractères forts ».

1er & 3 marsLe Pôle, Le Revest-les-Eaux04 94 98 12 10 le-pole.fr

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72 au programme spectacles alpes-maritimes

Monsieur le Temps

L’amour, la mort, la vie, l’espoir... Autant de thèmes auxquels les jeunes enfants, philosophes nés, sont sensibles. Pioli, jeune auteur-compositeur-interprète de la Seyne-sur-Mer, reprend dans ce spec-tacle les chansons de son album éponyme, accompagnées d’un film d’animation. Une vieille dame réalise que le temps s’enfuit trop vite et qu’il lui a pris celui qu’elle ai-mait... Elle décide alors de ne pas se lais-ser faire !À partir de 7 ans.

2 & 3 marsLe Carré, Sainte-Maxime

04 94 56 77 77 carreleongaumont.com

Oncle Vania

Philippe Nicaud met en scène la pièce de Tchekhov en la nettoyant à l’os : l’intrigue est resserrée autour des personnages prin-cipaux, le folklore russe effacé. Reste la vé-rité du texte et la force des émotions. Ce n’est pas pour rien qu’à la découverte de l’œuvre, son confrère Maxime Gorki lui écrivit : « Je me suis mis à trembler devant votre talent, et à trembler de peur pour les gens, pour notre vie, misérable, incolore. Quel drôle de coup - et comme il est pré-cis - vous avez frappé là. »

16 févrierLa Croisée des Arts, Saint-Maximin

04 94 86 18 90 st-maximin.fr

Pour le meilleur ou pour le pirePour le meilleur et pour le pire, c’est la for-mule consacrée du mariage, prise plus ou moins au sérieux selon les personnalités des contractants. Le Cirque Aïtal expose l’intimité d’un couple d’acrobates déjan-tés, Victor et Kati, qui traversent la vie pied au plancher. L’occasion de faire preuve de virtuosité, dans des numéros de main à main, de perche, de domptage, et même de badminton…

22 févrierLa Croisée des Arts, Saint-Maximin

04 94 86 18 90 st-maximin.fr

Les Chatouilles ou la danse de la colèreLa performance d’Andrea Bescond a raflé tous les prix (dont le Molière du meilleur seul en scène en 2016) et conquis le public partout où elle est passée. Auteure, dan-seuse, actrice, elle y raconte son enfance marquée par les « chatouilles » d’un ami de la famille, l’impact qu’elles ont eu sur sa vie, amplifié par l’absence de réaction pa-rentale. Une danse de la colère qui lève le voile sur les conséquences de la pédophilie.

8 marsLa Croisée des Arts, Saint-Maximin

04 94 86 18 90 st-maximin.fr

La vie trésorrifique du grand Gargantua

On note le glissement orthographique : de « très horrifique », elle est devenue ce qu’elle est : un vrai trésor, de l’inépuisable Rabe-lais ! Félicien Chauveau et le collectif La Machine reprennent l’histoire du géant Gargantua, géant truculent et symbole de la démesure. Aiguillé par cette œuvre ma-jeure, l’artiste cherche, « à travers le rire et le genre carnavalesque, à voir se confronter personnages et situations au renversement des hiérarchies ».À partir de 14 ans.

4 au 6 marsThéâtre National de Nice

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LoDka

Ah, la Russie, ses oligarques, sa vodka... et ses clowns. Vous aviez adoré le Slava’s snowshow ? La famille Semianyki revient, dotée de son humour corrosif et d’une vi-talité à toute épreuve, qu’elle balade sur la planète de succès en succès. Pas de bar-rière de langue, leur éloquence ne recourt pas aux mots. LoDka (barque, en russe), c’est une métaphore de la vie humaine : nous sommes tous sur le même bateau, et pour le maintenir à flot, il vaut mieux se serrer les coudes !

5 & 6 marsThéâtre National de Nice

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Le jeu de l’amour et du hasard« À tort ou à raison, Marivaux m’apparaît comme un trait d’union entre Molière et Musset. Ou comme un chaînon qui me manquait », déclare le metteur en scène Benoît Lambert. Il est vrai que rien que le titre de ce marivaudage est un chef d’œuvre ! Les jeunes interprètes de cette pétillante pièce font honneur au chassé-croisé amou-reux le plus célèbre du théâtre classique, un texte virevoltant écrit en 1730, et qui n’a pas pris une ride.

11 au 14 marsThéâtre National de Nice

04 93 13 90 90 tnn.fr

Fliying cowLe chiffre Trois, dans les cours d’écoles, n’est pas facile à vivre pour les enfants. Quand on joue à trois, quand on apprend les règles de l’amitié à trois, rien n’est simple, et souvent la jalousie ou l’exclusion se fait ressentir avec une force terrible. En pas-sant par une cour de ferme, la Cie néer-landaise De Stilte aborde la question : à travers une chorégraphie originale, entre taquinerie et jeux de partage, solitude et rigolade, le mouvement dit et montre beau-coup aux tout-petits (dès 4 ans).

4 marsThéâtre de Grasse

04 93 40 53 00 theatredegrasse.com

Le maître et Marguerite

Roman phare de la littérature russe du XXe siècle, Le Maître et Marguerite a séduit de-puis autant le cinéma que le théâtre. Récit multi temporel et embrassant tout de la nature humaine, convoquant le réalisme et le fantasmagorique, Boulgakov a créé une œuvre totale, dont le metteur en scène Igor Mendjisky nous livre une adaptation foisonnante, avec un esprit forain et car-navalesque qui transpose habilement l’es-prit de l’écrivain russe dans notre société d’aujourd’hui.

11 & 12 marsECSVS, La Roquette-sur-Siagne

04 93 40 53 00 theatredegrasse.com

Le CV de Dieu

On est tous logés à la même enseigne, même Dieu ! Qui doit, une fois qu’il a décidé (après avoir créé Terre, ciel, mer et hommes) de reprendre du service dans le monde du travail, passer des entretiens d’embauche. Face au DRH sans concession (« était-ce nécessaire de créer les cons ? ») joué par Didier Bénureau, Jean-François Balmer se défend comme... un beau diable pour défendre son bilan. Sur le texte de Jean-Louis Fournier, un duo au firmament.

14 marsThéâtre de Grasse

04 93 40 53 00 theatredegrasse.com

Wax - Comment sortir du moule ?Dans ce spectacle conçu pour les enfants dès 3 ans, le marionnettiste Renaud Her-bin manipule des sujets qui se plient à ses désirs, tout comme ils lui échappent. Ils sortent tout droit du chaudron posé sur le plateau, plein d’une cire aussi malléable que libre et imprévisible. Matière douce et souple, elle est le chemin vers de multiples expérimentations poétiques.

3 marsScène 55, Mougins

04 92 92 55 67 scene55.fr

Rock and goalDu grand sportif au danseur, il n’y a qu’un pas... chorégraphique. Michel Keleme-nis propose un spectacle tout en énergie pour les enfants (5 à 10 ans), où les sports se mélangent et se transforment, dans un ensemble gestuel survitaminé. Les 4 inter-prètes défendent leur sport préféré et ré-inventent les règles des jeux (olympiques).

6 marsScène 55, Mougins

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74 au programme spectacles alpes-maritimes gard hérault

Une bonne soirée

Sans aucun doute, elle va être réussie, cette soirée ! Puisque Kyan Khojandi a décidé de nous raconter sa vie, celle d’un mec simple, à qui justement il arrive tout un tas de choses que nous partageons : vie amoureuse, familiale, souvenirs d’enfance, doutes... Et il se trouve que ce type ordinaire, c’est le créateur de la série Bref. Après Pul-sions (2016), ce seul en scène prouve que l’humoriste est l’un des plus pertinents du paysage culturel français.

20 févrierForum Jacques Prévert, Carros

04 93 08 76 07 forumcarros.com

Iliade

Des chaises, des sceaux, des paillettes et du faux sang ; cinq comédiens. Voilà de quoi embarquer pour Troie. La jeune metteuse en scène Pauline Bayle propose une adap-tation d’Homère somptueuse d’invention, où la simplicité des moyens découvre la force magnifiquement évocatrice du texte et des images. Guerre, courage, passion, fantaisie. Tout est prêt pour le voyage.

13 marsForum Jacques Prévert, Carros

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WahadaConstance était gravement malade, et Mo-zart, son futur mari, s’en remettait à Dieu en composant sa sublime Messe en ut mi-neur pour la sauver. Le chorégraphe Abou Lagraa rend magnifiquement hommage à la puissance spirituelle et sensuelle de la mu-sique du compositeur dans une pièce pour 22 danseurs du Ballet du Grand théâtre de Genève. Wahada, (promesse en arabe), déborde d’amour et d’harmonie.

26 févrierThéâtre Bernadette Lafont, Nîmes

04 66 36 65 10 theatredenimes.com

TabarnakTabarnak ils ont osé ! La troupe québécoise et familiale du Cirque Alfonse déboule avec son nouveau spectacle qui jongle avec les attributs de l’église ; c’est gonflé ! Et surtout drôle et irrévérencieux, en compagnie de trois musiciens qui mixent rock, musiques traditionnelles et électro. Il y a bien la nef, l’autel et le chœur, et la grand-messe peut commencer ! C’est divin.

3 & 5 marsThéâtre Bernadette Lafont, Nîmes

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6 & 7 marsThéâtre Molière, Sète

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Trisha Brown Dance Company

La compagnie fondée par l’une des choré-graphes majeure de la danse post-moderne reprend trois pièces clé de son répertoire. Le plasticien Robert Rauschenberg en avait conçu la scénographie et les costumes, ainsi Foray Forêt (1990), Working Title (1985) et Set & Reset (1983, avec la musique de Lau-rie Anderson) sont intimement liées. Avec un programme de performances (In Plain Site) proposé dans le hall.

11 marsThéâtre Bernadette Lafont, Nîmes

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Mule

Déjà accueillies l’an dernier, les deux acro-bates Hélène Leveau et Aviva Rose-Wil-liams reviennent avec leur facétieux duo. C’est tout simple et ça va loin - et haut, et vite, et fort ! Quintessence de complicité, de confiance, de technique et de partage, Mule est un moment rare d’humanité.

26 févrierGymnase, Anduze

28 & 29 févrierCentre socio-culturel, Rousson

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au programme spectacles hérault 75

EntrepriseAnne-Laure Liégeois, habituée du Cratère (Débrayage, Les Époux, Macbeth,...) est au-jourd’hui artiste associée de la scène na-tionale alésienne. Entreprise agrège trois textes joués dans le même décor. Le monde du travail vu par trois auteurs d’époques différentes : Perec (L’augmentation, 1968), Rémi De Vos (L’intérimaire, 1995) et Jacques Jouet (Le Marché, 2019). Dérision et im-pertinence au rendez-vous, avec ce qu’il faut de mise en perspective pour survoler l’étendue des... dégâts.

4 au 7 marsLe Cratère, Alès

04 66 52 52 64 lecratere.fr

MottesFrançois Salon et Sébastien Dehaye donnent vie, sur scène, à trois mottes d’ar-gile. À mains nues, ils sculptent et auscultent la matière, qui devient marionnettes, allé-gories de nos craintes et espoirs, paysages mouvants. Un croisement entre cirque, art de la céramique, théâtre corporel et d’ob-jet. À partir de 5 ans.

10 & 11 marsLe Cratère, Alès

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São Paulo Dance Company

Composée de jeunes danseurs et choré-graphes qui ont très rapidement atteint un niveau international, la compagnie brési-lienne revient à Alès pour un programme de trois pièces où ils pourront à nouveau expri-mer leur technique et leur swing sud-amé-ricain : Agora, de Cassi Abranches, L’oi-seau de feu, de Marco Goecke et Odisseia de Joëlle Bouvier. Influences diverses au service de la beauté et de l’émotion.

13 & 14 marsLe Cratère, Alès

04 66 52 52 64 lecratere.fr

Saga

Jonathan Capdevielle, invité de février au centre dramatique national de Montpellier, est un artiste multiple, toujours étonnant, passionnant. On pourra revoir le magni-fique Saga créé en 2015, pièce du puzzle autobiographique qu’il nous livre depuis 2009, où l’improbable famille tarbaise dé-roule ses frasques dans un déluge de trou-vailles scéniques, dans des moments tous plus poétiques et fous, où le théâtre s’im-pose comme un cadre rassurant et inspi-rant. Avec, imposant, occultant, l’immense bloc de pierre de la mémoire.

26 & 27 févrierThéâtre des 13 Vents, Montpellier

04 67 99 25 00 13vents.fr

RémiRémi, la nouvelle création de Jonathan Capdevielle, s’appuie sur le personnage de Sans famille, d’Hector Malot. L’histoire du petit orphelin et du bonimenteur Vitalis sera sur scène un voyage initiatique à tra-vers des masques (les animaux du spectacle qu’ils tournent de villages en villages), les voix (le metteur en scène est aussi ventri-loque, d’où un rapport à la parole toujours singulier), et, sûrement aussi, y retrouve-ra-t-on un peu du petit « Jojo ».

3 au 5 marsThéâtre des 13 Vents, Montpellier

04 67 99 25 00 13vents.fr

Victor ou la naissance d’une penséeVictor est un petit garçon à qui il arrive plein de choses, aussi intéressantes que voir un facteur s’envoler d’un pont, où s’occu-per de son chien. Il se passe qu’il est fina-lement en train de grandir : il accède à la conscience qu’il est un être pensant ! Pe-tit opéra pop, avec plein de chansons rock (Joseph D’Anvers) et des paroles légères et vraies (Marie Blondel, Julien Bonnet, Thomas Gornet). À partir de 8 ans, dans le cadre de Saperlipopette en vacances.

20 & 21 févrierThéâtre Jean-Claude Carrière,

Domaine d’O, Montpellier0 800 200 165 domainedo.fr

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Change meCamille Bernon et Simon Bourgade (Cie Mauvais sang) ont conçu un spectacle choc qui s’appuie sur les écrits d’Ovide (Les Mé-tamorphoses) et la terrible histoire (vraie) de Brandon Teena, violé et assassiné en 1993 dans le Nebraska. Axel-e est une fille qui se sait garçon depuis toujours. Elle aime Léna, d’un amour qui se développe sur un terrible mensonge. Les cinq comé-diens portent ce texte fin et violent avec un talent extraordinaire.

27 & 28 févrierThéâtre Jean-Claude Carrière,

Domaine d’O, Montpellier0 800 200 165 domainedo.fr

Les princessesLe Cheptel Aleïkoum fait « du cirque avec du cirque », dixit Marie Jolet, membre du collectif. Cela veut dire qu’on verra des ar-tistes qui transpirent, prennent des risques, et s’amusent aussi beaucoup dans cette histoire de princesses très libérées, avec des princes pas toujours charmants. Il y aura aussi des chansons, entre rock et mé-lodies sucrées, où les paroles révèlent les vérités cachées des contes. Des histoires de désir et d’amour, pour tout le monde à partir de 8 ans.

4 au 7 marsThéâtre Jean-Claude Carrière,

Domaine d’O, Montpellier0 800 200 165 domainedo.fr

Perplexe

Tiens, l’électricité est coupée... Une plante inconnue à l’odeur étrange est apparue dans l’appartement... Étrange, pensent Robert et Eva à leur retour de vacances. Mais Sébastien et Judith arrivent et ex-pliquent qu’ils se sont occupés de tout en leur absence. Bien... Mais ils restent, ils s’incrustent dans le quotidien du couple, jusqu’à les évincer de leur habitat. La Cie de l’Astrolabe s’empare du texte dérangeant - et drôle ! - de Marius von Mayenburg.

26 au 28 févrierThéâtre Jean Vilar, Montpellier

04 34 46 68 38 theatrejeanvilar.montpellier.fr

Pacamambo

La Cie Alegria Kryptonite (Montpellier) propose une mise en scène musicale (créa-tion sonore d’Alexandre Flory) du conte moderne écrit par Wajdi Mouawad. Quatre comédiens jouent une partition qui nous en-trainent dans une atmosphère à la Grimm, terrible, magique, et si humaine... Julie veut « casser la gueule à la mort ». Projet fou, à la mesure des enjeux si importants des enfants. À partir de 10 ans.

4 au 6 marsThéâtre Jean Vilar, Montpellier

04 34 46 68 38 theatrejeanvilar.montpellier.fr

Ici soit-ilLe chorégraphe Yann Lheureux, confronté à la maladie d’Alzheimer développée par sa mère, a décidé de se questionner sur le statut de la mémoire, de la perte. Seul sur le plateau, il incarne / interprète / ré-invente les propos enregistrés auprès de neuroscientifiques, gériatres, psycholo-gues, soignés, soignants). Parce que dans disparition il y a aussi devenir.

26 & 27 févrierThéâtre de la Vignette, Université

Paul-Valéry, Montpellier04 67 14 55 98 theatrelavignette.fr

Le récital des posturesYasmine Hugonnet réinvente son corps, qu’elle façonne et détourne comme autant de sculptures vivantes. À la manière d’un Xavier Leroy, autre chorégraphe danseur qui ploie des membres pour se transformer en quelque chose qui ne ressemble presque plus à un homme, la danseuse suisse se métamorphose en une farandole de poses, de personnages, de formes qui peu à peu la racontent et la dévoilent.

3 marsICI-Centre chorégraphique de Montpellier

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Partez devant

C’est une des « Petites » formes propo-sées par le collectif Le Grand Cerf Bleu : une table, deux chaises, deux comédiens (Adrien Guiraud et Juliette Prier) instal-lés au milieu du public. L’histoire de Simon et Clara, au tournant d’une quête existen-tielle, va se développer en toute intimité.

25 févrierSalle polyvalente, Balaruc-le-Vieux

26 févrierSalle polyvalente, Gigean

27 févrierSalle des fêtes, Vic-la-Gardiole

28 févrierMJC, Poussan

29 févrierSalle Ferdinand Buisson, Villeveyrac

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Une femme se déplace

David Lescot conjugue ses talents dans une comédie musicale dont il signe à la fois les textes, la mise en scène et la musique ! Partant d’une question qui peut donner le vertige : la possibilité d’agir sur ses actions passées en voyageant dans le temps est-elle une vraie ou fausse aubaine ?, il entraine Ludmilla Dabo et 15 autres merveilleux chanteurs, comédiens, danseurs et musi-ciens dans une fantaisie trépidante et classe.

27 & 28 févrierThéâtre Molière, Sète

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d’à côtéChristian Rizzo, directeur du Centre chorégraphique national de Montpellier, poursuit avec cette pièce son travail em-preint d’onirisme et de figures plastiques hybrides. Il propose une incursion dans le monde de l’enfance, en passant par les à-côtés de la scène : le son, les images, la lumière, qu’il élève à la hauteur des corps dansants. Pour éveiller les sensations en-fouies dans le quotidien adulte, il plonge dans la dimension insondable de l’inven-tion et des souvenirs, accompagnés par trois danseurs.

29 févrierCentre Culturel Léo Malet, Mireval

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InvisiblesNasser Djemaï raconte le destin des chi-banis, qu’ils appelle les invisibles. Après une vie de travail harassant, venus depuis l’autre côté de la Méditerranée dans les an-nées 60 ou 70, ils ont cessé leurs allers-re-tours entre les deux rives. Ils restent là, en France, ce pays qui ne les voit pas. La force d’interprétation des six magnifiques comédiens imprègne le texte fin et fort, sans pathos, et c’est tout un pan de notre société qui s’exprime enfin.

3 marsThéâtre Molière, Sète

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Nous, l’Europe, Banquet des peuples

De la rencontre entre le metteur en scène Roland Auzé (qui signe aussi la musique) et l’écrivain Laurent Gaudé est né ce pro-jet de théâtre créé à Avignon en 2019, pour dix acteurs de nationalités différentes et un chœur, chaque fois recomposé. Un texte somme, qui croise l’histoire de tous les pays du continent, dans un enchevêtrement des voix, des styles, des registres : une Europe plurielle, kaléidoscopique, comme pour faire advenir la possibilité d’une culture commune.

13 marsThéâtre Molière, Sète

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Nuit

Trois jongleurs, ceux du collectif Petit Tra-vers (Nicolas Mathis, Julien Clément, Rémi Darbois) au sommet de leur art. En symbiose, ils se cherchent, s’atteignent, s’esquivent, avec toujours ces objets qui fusent entre eux. La lumière est celle des flammes des bougies qui éclairent le pla-teau, et le son, celui des balles qui fendent toujours et encore l’air, s’accorde presque magiquement avec la musique diffusée. Une merveille de précision poétique.

14 marsCentre Culturel Léo Malet, Mireval

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Amitié

Irène Bonnaud porte sur scène un sy-nopsis écrit par Pasolini juste avant son assassinat. Un projet de road-movie qu’il avait intitulé Porno Théo Kolossal, racon-tant l’histoire d’Edouardo, quatrième roi Mage qui se perd et arrive trop tard à Beth-léem. Il meurt d’épuisement, après ses mille aventures (dont un passage par Rome dans les années 50), lorsqu’il apprend que Jésus est mort depuis longtemps. La scé-nographie reprend les codes du spectacle itinérant, épuré.

27 févrierScène de Bayssan, Béziers

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L’Enquête

C’est à l’auteur fildefériste Sébastien Le Guen que la veuve du clown Punch, qui of-ficiait au cirque Medrano dans les années 50, légua les affaires de son mari. Après une enquête intimiste, il nous raconte au-jourd’hui l’histoire de ce clown blanc et de celui qui l’incarnait. Le chercheur-artiste a confié la mise en scène de ce spectacle au très talentueux et ingénieux amoureux des objets et des reliques décalées Nico-las Heredia.

1er marsScène de Bayssan, Béziers

04 67 28 37 32 heraultculture.fr

Caroline SagemanL’inclassable pianiste Caroline Sageman, la plus jeune lauréate du concours Chopin de Varsovie (à 17 ans), s’attache dans ce concert à l’Espagne, « Terre de feu et de passions ». Le voyage commence par les Variations sur la Folia de Carl-Philip Em-manuel Bach, fait un détour par la mer-veilleuse Rhapsodie espagnole de Liszt, se love avec délices dans les œuvres de Gra-nados, s’immisce dans celles d’Albéniz… Un parcours onirique pailleté des élans virtuose de l’artiste.

3 mars Théâtre La Criée, Marseille

04 91 54 70 54 theatre-lacriee.com

Trio avec pianoSylvie Niverd (violon), Élisabeth Groulx (violoncelle) et Anne Guidi (piano) nous entraînent dans les contrées slaves aux côtés d’Antonín Dvořák avec son Trio n°4 en mi mineur opus 90 dit Dumky, (pluriel de « dumka », le terme « dumky », vient de l’ukrainien et fait référence aux complaintes de personnages captifs). La pièce composée de six ballades nostalgiques et légères à la fois nous fait entrer dans le domaine de l’épopée et des légendes. Ensuite, bienve-nue au salon de Felix Mendelssohn, pour une réunion familiale autour du Trio n°1 en ré mineur opus 49.

29 févrierFoyer de l’Opéra, Marseille

04 91 55 11 10 opera.marseille.fr

Orchestre PhilharmoniqueL’Orchestre Philharmonique de Marseille se glisse dans l’univers shakespearien par le biais d’auteurs russes, Chostakovitch (Suite de la musique de scène de Hamlet), Proko-fiev (Suite de Roméo et Juliette), Tchaïkovski (Variations sur un thème Rococo pour vio-loncelle), avec en soliste l’immense violon-celliste Marc Coppey. Quittant les ors de

l’opéra, l’orchestre ouvre le mois de mars à l’auditorium du Pharo en invitant deux stars de la musique classique. Le jeune chef Kuok Man Lio dont la direction précise et passionnée habitera d’un nouveau souffle la Valse de Maurice Ravel, le Concerto pour orchestre du compositeur chinois Tan Dun et le Concerto pour piano n° 25 en do majeur,

K. 503 de Mozart. Au piano, on retrouvera la finesse élé-gante du merveilleux David Kadouch.

23 févrierOpéra, Marseille

7 marsAuditorium du Pharo, Marseille

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ImpulsL’opéra se met au contemporain en ouvrant ses portes au Gmem avec un concert qui fera date, dirigé par Sébastien Boin. Six chanteurs et huit instrumentistes (saxo-phone, clarinette, accordéon, percussions, mandoline/guitare/ théorbe, cymbalum et contrebasse), issus respectivement de la Neue Vocalsolisten de Stuttgart et de l’Ensemble C Barré, nous feront décou-vrir la jeune génération, avec des œuvres fascinantes de fantaisie et d’inventivité de Mikel Urquiza (Espagne), Birke Ber-telsmeier (Allemagne) et l’écriture lyrique et passionnée d’Augustin Braud (France).

8 marsFoyer de l’Opéra, Marseille

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Apothicaire et perruquierNouvelle pépite exhumée pour les Di-manches d’Offenbach ! Boudinet (Jean-Gabriel Saint Martin) veut marier sa fille au fils (Christophe Crapez) de son ami Plumoiseau, apothicaire. Mais voilà, le coiffeur, Chilperic (Jean-François No-velli), qui doit s’occuper de la chevelure de la promise, Sempronia (Isabelle Philippe) reconnaît en la jeune fille celle qu’il aime… Quiproquos, dénouement heureux après de larges mécontentements. Le tout mené allègrement à la baguette par Jean-Chris-tophe Keck et le piano de Diego Mingolla.

16 févrierFoyer de l’Odéon, Marseille

04 96 12 52 70 odeon.marseille.fr

La Périchole

Lima, la belle chanteuse des rues, la Pé-richole (Héloïse Mas), préfère, malgré son amour pour le tendre Piquillo (Samy Camps), accepter la proposition du vice-roi (Olivier Grand) de rester à ses côtés. La faim est parfois un argument puissant. Amours contrariées, dénouement heureux, tous les ingrédients de l’opéra bouffe sont présent dans cette œuvre d’Offenbach qui égratigne sans le dire clairement les sphères du pouvoir et le bon plaisir des princes, sous la houlette de Bruno Membrey.

22 & 23 févrierOdéon, Marseille

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Violettes impérialesL’opérette en deux actes de Vincent Scotto croise les amours de Violetta (Charlotte Bonnet) et Don Juan (Frédéric Cornille) avec le destin d’Eugénie de Montijo (Per-rine Cabassud) et Napoléon III (Jean-Luc Épitalon). La marchande de violettes de-viendra une proche de celle à qui elle a prédit le titre d’Impératrice et se dévoue avec courage pour la sauver en prenant sa place dans le carrosse menacé d’un at-tentat. Tout finira bien sous la houlette de Bruno Conti dans une mise en scène de Jack Gervais. Les bouquets de violettes « portent bonheur ».

14 & 15 marsOdéon, Marseille

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Le retour de Moby Dick Le mythe de la baleine blanche et du terrible capitaine Achab nourrit les imaginaires. François Sarano, inspiré par le livre de Melville, écrit Le Retour de Moby Dick, ou ce que les cachalots nous enseignent sur les océans et les hommes (éditions Actes Sud). Sur scène, grâce à Nadine Estève (alto), Da-vid Rueff (saxophone), Guillaume Saurel (violoncelle), (le trio 3 Chevaux de Front), une « concerférence » illustrée nous guide à la rencontre des cachalots de l’Océan In-dien, avec le plongeur, scientifique et poète, François Sarano. Magique !

8 marsPic, L’Estaque

04 91 43 10 46 ensemble-telemaque.com

Jean-François Zygel

À l’occasion du 250e anniversaire de la naissance de Beethoven, « l’un des plus grands improvisateurs de tous les temps », Jean-François Zygel lui consacre un concert exceptionnel au cours duquel le plus célèbre de nos pianistes improvisateurs apporte toute sa verve, son inventivité, sa finesse, liées à une connaissance précise de l’œuvre du compositeur et de l’esprit dans lequel il l’interprétait. Un somptueux « récital d’improvisations », dans le plus pur es-prit romantique !

14 marsJeu de Paume, Aix-en-Provence08 2013 2013 lestheatres.net

31 marsThéâtre Liberté, Toulon

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Pastoral for the planetEntre La Tempête (La Tempesta, in Les Créatures de Prométhée) et la Symphonie n°6, Pastorale, de Beethoven, tout un uni-vers se dessine, de la furie à l’apaisement, avec des œuvres d’Anton Reicha (Lenore, Orage), Julius Rietz (Hero und Leander, ouverture), Fanny Hensel-Mendelssohn (Hero und Leander), Carl Maria von Weber (Kampf und Sieg). Laurence Equilbey et son ensemble Insula Orchestra sont mis en scène par Carlus Padrissa du collectif catalan La Fura dels Baus pour un spec-tacle total où sont interrogées les relations entre l’Homme et son environnement, et réaffirmée la nécessité de trouver enfin une harmonie…

21 & 22 févrierGrand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence

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Cavalleria Rusticana / PagliacciDeux drames de la jalousie et de la passion condensés dans ces deux opéras véristes en un acte : Cavalleria Rusticana de Pietro Mascagni. Turiddu (Denys Pivnitskyi), amant de Santuzza (Chrystelle di Marco), la trompe avec son ancienne fiancée, Lola (Ania Wozniak), dont l’époux, Alfio (Dongyong Noh) le défie dans un duel au couteau qui lui coûtera la vie. Et Pagliacci de Leoncavallo : le comédien Canio (Denys Pivnitskyi) tue sur scène sa femme, Nedda (Solen Mainguené) et son amant, Silvio (Jiwon Song) sans que le public ne réalise d’abord le crime, tant il est pris par la pièce. Sous la houlette de Miguel Campos Neto.

6 & 8 marsOpéra Confluence, Avignon

04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr

Le singe d’une nuit d’été

Le metteur en scène Yves Coudray tisse deux délicieuses opérettes en un acte pour un spectacle enlevé et jubilatoire. Pomme d’Api d’Offenbach offre une variation sur un thème familier du théâtre bourgeois du XIXe : peut-on concilier sentiments et diffé-rences de classes sociales ? Le Singe d’une nuit d’été de Serpette parodie Shakespeare, flirte avec le cirque, remplace les grands airs par d’étonnantes prouesses physiques. Dans les deux cas, tout « finit bien » sauf nos zygomatiques mis à rude épreuve !

11 & 13 marsPôle Culturel Jean Ferrat, Sauveterre

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Grégoire Girard & Philippe Hattat

Grégoire Girard (violon) et Philippe Hat-tat (piano) nous convient à un voyage où la musique dite populaire rencontre et nour-rit celle dite savante. Les airs tziganes et les flonflons des cafés d’Europe Centrale s’immiscent dans les partitions d’Enesco, Sarasate, Bartók, Ravel, Brahms… Leur vir-tuosité joyeuse, leur densité souvent bou-leversante sont interprétées avec maestria par les deux instrumentistes.

14 marsConservatoire du Grand Avignon,

Amphithéâtre Mozart, Avignon04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr

Laloum joue MozartL’Orchestre de l’Opéra de Toulon dirigé par Lio Kuokman offrira en création mon-diale la Symphonie n°3, Sinfonietta de Lionel Ginoux, et en écho la Sinfonietta de Fran-cis Poulenc, le Concerto pour piano n°23 de Mozart et le Concertino da Camera pour saxophone de Jacques Ibert. Deux grands solistes viendront l’accompagner, le sub-til et puissant pianiste Adam Laloum et le saxophoniste Femke Ylstra.

28 févrierOpéra, Toulon

04 94 92 70 78 operadetoulon.fr

Requiem de MozartLe Chœur Régional PACA dirigé par Mi-chel Piquemal et l’Orchestre de Cannes sous la houlette de Benjamin Levy, pré-sentent leur version, brillante et inspirée du célèbre Requiem de Mozart, accompa-gné d’une brochette de solistes de premier plan, Pauline Courtin (soprano), Patricia Schnell (mezzo), Luca Lombardo (ténor), Florent Leroux-Roche (basse). Une soi-rée d’exception !

14 marsScène 55, Mougins

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La Dame de pique

Inspiré de l’œuvre fantastique de Pouch-kine, La Dame de Pique de Tchaïkovski évoque la fin du XIXe siècle dans la Rus-sie des Romanov, qui reprend chair dans la nouvelle mise en scène d’Olivier Py. Le sombre Hermann (Oleg Dolgov), fas-ciné par le récit de la martingale donnée par le comte de Saint-Germain à la Com-tesse (Marie-Ange Todorovitch), la me-nace et trahit son amour pour la douce Lisa (Elena Bezgodkova). « Trois, sept et as » doivent accorder la fortune au jeu de Pharaon, mais c’est la Dame de Pique qui l’emporte, et Hermann sombre dans la fo-lie et la mort, sous la direction musicale de György G. Ráth.

28 février & 1er, 3 et 5 marsOpéra, Nice

04 92 17 40 79 opera-nice.org

Rosamunde phantasyLes mardis de l’Orchestre de Cannes donnent à écouter de petits bijoux, sou-vent dans une formation chambriste. Marie Fraschini (violon), Pascal Jugieau (alto), Philippe Cauchefer (violoncelle) et Vincent Tizon (hautbois et cor anglais) parcourront trois siècles afin de nous faire percevoir la force inventive de chacun. Au XIXe, Schu-bert, dans la tradition de l’époque, com-pose de la musique de chambre que l’on a plaisir à jouer en famille ou entre amis, ainsi naît le Quatuor Rosamunde… Au XXe, Britten fait de même et écrit à 19 ans son Phantasy Quartet. Enfin, notre XXIe, pré-occupé par notre relation au temps voit Marie Fraschini et ses Points de vue sur Montmartre (2018), entre immobilité et mouvement incessant…

3 marsMJC Picaud, Cannes

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Piano séries IV : BeethovenL’Orchestre de Cannes, dirigé par Benja-min Levy, accueille l’un des plus grands spécialistes de Beethoven, le pianiste Mi-chaël Levinas pour interpréter une page de jeunesse, vive, charpentée, et déjà d’une étonnante profondeur, son Concerto n°1 pour piano et orchestre en do majeur, op. 15. En-suite, l’Orchestre s’attachera à la dernière symphonie de Johannes Brahms, la 4e en mi mineur, op. 98, dite Symphonie d’au-tomne… œuvre passionnée et majestueuse.

8 marsThéâtre Croisette, Cannes

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Sonates pour violoncelle et pianoProgramme dense que celui proposé par les immenses interprètes que sont Marc Cop-pey (violoncelle) et Jean-Baptiste Fonlupt (piano) : Sonate pour violoncelle et piano en la majeur op. 69 de Beethoven, celle en mi mineur op. 38 de Brahms, celle enfin de Rachmaninov en sol mineur op. 19, sans compter les Variations sur un thème slo-vaque de Martinu, aux acrobatiques élans. Entre l’intime et la puissance, un concert d’exception.

10 marsLe Cratère, Alès

04 66 52 52 64 lecratere.fr

Mahler 9

L’Orchestre national Montpellier Occi-tanie, dirigé par Michael Schønwandt, se mesure à la Symphonie n°9 de Mahler. Le compositeur annota de sa main les premier et dernier mouvements de cette œuvre par « Ô jeunesse ! perdue ! Ô amour ! disparu ! » et « Ô beauté et amour, adieu ! adieu ! ». Toute la palette des sentiments se trouve condensée dans ces pages, du désespoir à la sérénité, dans un final apaisé.

28 févrierOpéra Berlioz, Montpellier

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Nicolas Angelich

Le subtil pianiste Nicholas Angelich a pré-paré un programme de haute volée qui per-met de goûter toute la palette d’un piano élégant, sensible, vif, profond. L’on écou-tera tour à tour la Sonate pour piano n°12 en la bémol majeur opus 26 de Beethoven, Visions fugitives opus 22 de Prokofiev, des Chorals de Johann Sebastian Bach et de Fer-ruccio Busoni, enfin Variations et Fugue sur un thème de Haendel opus 24 de Johannes Brahms. Un éclectisme pailleté.

7 marsSalle Pasteur, Le Corum, Montpellier

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Jérôme Mathevon quartet

Pianiste de la nouvelle génération du jazz marseillais, Jérôme Mathevon réunit un quartet initié par la complicité sonore qu’il partage avec trois musiciens : Clément Rioland, Quentin Bourg-Devret et Julian Biscaro-Balle. Partageant des influences communes, notamment les accents liber-taires du free, leur musique s’appuie sur un canevas de compositions où couleurs impressionnistes et embardées telluriques s’entremêlent.

20 février Le Cri du Port, Marseille

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Laurent Cavalié

Compositeur et acteur majeur de la créa-tion contemporaine occitane depuis plus de 20 ans, l’accordéoniste, percussionniste et chanteur Laurent Cavalié offre une seconde jeunesse à la chanson languedocienne. Cet alchimiste ravive les couleurs des chants anciens populaires en ajoutant à sa palette de nouvelles teintes. Une savante orfèvre-rie qui jongle avec les rythmes et les mots pour un projet solo mais pas solitaire.

21 févrierL’Éolienne, Marseille

04 91 37 86 89 leolienne-marseille.fr

Dooz KawaOriginaire de Strasbourg, Dooz Kawa dé-couvre le rap dans les années 90 et sort en 2010 son premier album, Étoiles du sol, qui livre une musique bercée de jazz ma-nouche. De pensée libertaire et refusant l’étiquette d’artiste et de poète, il tire de ses écorchements des cicatrices bien créatives et une écriture pulsionnelle. Avec son der-nier album, Contes Cruels, sorti en 2017, il confirme son statut de MC à la plume fine et contrôlée.

22 févrierLe Moulin, Marseille

04 91 06 33 94 lemoulin.org

NgayahCette soirée réunit les 35 musiciens et les danseuses du gamelan marseillais Bintang Tiga et de son frère parisien Puspawarna. Le gamelan est un instrument indonésien collectif, un ensemble indivisible composé de métallophones en bronze, de gongs, de flûtes et de tambours. À Bali, la musique, contrastée dans ses variations de vitesses et de dynamiques, exige une grande coor-dination de ses interprètes, les penabuh.

29 févrierCité de la Musique, Marseille

04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com

The Calling

Wherever you will go reste à ce jour le plus gros succès de The Calling, groupe de rock alternatif américain post grunge, originaire du sud de la Californie. Si on n’a plus trop entendu parler du groupe en France après le tube de 2001, il a poursuivi sa carrière aux États-Unis, avant une séparation sui-vie d’une expérience en solo du fondateur et chanteur Alex Band. En 2013, il relance le groupe avec de nouveaux musiciens.

27 févrierLe Molotov, Marseille

06 33 63 48 57 lemolotov.com

Skip the use

Après s’être offert un break pour se consa-crer à des projets personnels, Skip the use est de retour. Avec plus de 200 000 albums vendus et plusieurs centaines de concerts à travers la France, il est l’un des groupes majeurs de l’electro rock de ces dix der-nières années, couronné par une Victoire de la Musique (album rock) en 2013. Après un passage à la dernière Fiesta des Suds, on les retrouve dans la chaleur d’une pe-tite salle.

4 marsEspace Julien, Marseille

04 91 24 34 10 espace-julien.com

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Maria Mazzotta duoMaria Mazzotta est l’une des voix actuelles les plus emblématiques des Pouilles. Ca-ractérisée par son respect et sa méthode rigoureuse dans l’interprétation, elle visite les traditions anciennes. Avec une pointe de malice et de créativité, elle propose, accompagnée par le jeune et talentueux accordéoniste Bruno Galeone, une explo-ration du répertoire autour d’une Méditer-ranée éternelle, tout en grâce et en finesse.

5 marsLe Cri du Port, Marseille

04 91 50 51 41 criduport.fr

AsaEn 2007, quand sort le premier album d’Asa, c’est un raz-de-marée : disque de platine, prix Constantin, des centaines de concerts dans le monde. Ses chansons lui viennent de la vie, de la sienne, entre sa maison à Lagos, son appartement à Paris et Los Angeles, ses voyages. Son identité musi-cale navigue elle aussi, entre soul et folk intuitif, pop et reggae et chanson world.

5 mars Espace Julien, Marseille

04 91 24 34 10 espace-julien.com

7 marsPaloma, Nîmes

04 11 94 00 10 paloma-nimes.fr

Paul Personne

Guitariste reconnu par les plus grands, Paul Personne a su cultiver sa différence : une voix chaude mêlée aux guitares. Si l’étiquette de bluesman lui colle à la peau, il est aussi mélodiste et auteur de talent. Il revient avec un nouvel album, Funambule ou tentative de survie en milieu hostile (sorti le 31 mai 2019 chez Verycords), chaud et électrique où ses thèmes de prédilection côtoient des ballades mélancoliques.

5 mars Le Moulin, Marseille

04 91 06 33 94  lemoulin.org

The Two

L’un est mauricien, l’autre suisse et leur complicité traversée par l’esprit d’un blues métissé. The Two offre une musique à la fois sauvage et douce, qui respire la terre et envoûte les sens. Lauréats du Swiss Blues Challenge en 2014, le duo a représenté la Suisse aux mêmes concours à l’échelle eu-ropéenne et états-unienne. Même le pu-blic nord-américain s’est laissé séduire.

12 mars Le Cri du Port, Marseille

04 91 50 51 41 criduport.fr

13 marsThéâtre Denis, Hyères

04 98 070 070 tandem83.com

Sarah McCoyLa chanteuse et pianiste a passé une partie de sa vingtaine nomade à se produire dans des rades moites et infestés de mouches, à la Nouvelle-Orléans. Elle perpétue désor-mais une tradition perfectionnée par Tom Waits, Amy Winehouse, Leon Russell et Nina Simone, qui ont transformé en épo-pées les ruines de vies en perdition. Une musique brute et authentique à l’écart du brillant robotique à réglage automatique de la pop contemporaine.

21 févrierL’Usine, Istres

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Boum mon bœufLa musique nous embarque à la décou-verte de l’ambiance parisienne des Années Folles. Spectacle musical conçu par Claire Luzi et Cristiano Nascimento, Boum mon bœuf invite petits et grands à la découverte d’une curieuse histoire bovine qui relie le passé et le présent, la France et le Brésil, la musique classique avec la musique po-pulaire, tout en nourrissant l’imaginaire avec humour et poésie.

26 févrierThéâtre Comoedia, Aubagne04 42 18 19 88 aubagne.fr

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Zé Boiadé / Rita MacedoCristiano Nascimento et Claire Luzi in-terprètent leurs chansons franco-brési-liennes au sein de Zé Boiadé. Le groupe puise dans la chanson française, le choro, la samba et les rythmes nordestins du Brésil. Il s’amuse à décomposer et déstructurer les sons et les rythmes à la manière d’un collage. L’invitée spéciale de la soirée est Rita Macedo, célèbre chanteuse brésilienne des Femmouzes T, enracinée à Toulouse.

26 févrierThéâtre Comoedia, Aubagne04 42 18 19 88 aubagne.fr

KodoInstallé sur l’île de Sado en mer du Japon, le collectif Kodo perpétue la tradition du taiko, tambour géant aux combinaisons rythmiques infinies. Avec Legacy, pièce de transmission, la nouvelle génération de musiciens s’empare du répertoire joué depuis de longues années. Revêtant le cos-tume des travailleurs de l’ère Edo, les ar-tistes font corps avec leur instrument pour livrer une chorégraphie d’une puissance magistrale.

28 & 29 févrierGrand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence

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Brad Mehldau

Monument du piano jazz, Brad Mehldau invente sa propre grammaire musicale. Maîtrisant toutes les formations, c’est en trio qu’il s’exprime avec le plus d’éloquence. Accompagné par Jeff Ballard au tambour et Larry Grenadier à la basse, il commet un mélange de styles inédit à chacun de ses concerts. Au programme, des compo-sitions originales, des standards, des re-prises de Radiohead ou des Beatles et des improvisations.

13 marsGrand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence

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Michael Jones

Pour sa 1ère édition, Maza’Rock invite un artiste discret mais de premier plan. En France, Michael Jones est indissociable du trio Fredericks-Goldman-Jones. Pour Jean-Jacques Goldman, il est non seule-ment « un fabuleux guitariste » mais chante aussi comme lui-même aimerait chanter. Les bénéfices du concert contribueront à financer la salle de chimiothérapie du nouvel hôpital de jour de cancérologie du Pays d’Aix.

10 marsGrand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence

08 2013 2013 lestheatres.net

Masta Ace & Marco PoloFigure incontournable du rap new-yorkais, légende parmi les Mcs avec plus de trois décennies de carrière derrière un micro, ACE s’associe une nouvelle fois au beat-maker canadien Marco Polo. Quinze ans que les deux acolytes travaillent ensemble. Leur dernier disque convie J Dilla, Phat Kat, Smif-N-Wessun, Pharoahe Monch, Lil Fame, Elzhi et sonne définitivement comme une ode boom bap à Brooklyn et au hip-hop !

15 févrierSalle des fêtes, Venelles

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Clio + K !Clio décline en chansons son goût pour le cinéma d’auteur. Chez elle, le détail fait le récit et produit des images fulgurantes. Clio interroge la relation de sa langue élégante, avec subtilité et malice. Les mots et la mu-sique de K ! ne cèdent en rien à la mode. De son vrai nom Karine Duhamel, elle crée un premier album où s’entrechoquent punk, électro et chanson. Observant le monde, ne le jugeant guère et grossissant volon-tiers le trait.

7 marsSalle des fêtes, Venelles

04 42 54 71 70 mjc-venelles.org

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Birds on a wire

Rosemary Standley, chanteuse du groupe Moriarty, et Dom La Nena, violoncelliste, forment le duo Birds on a wire, nom en forme de clin d’œil à la chanson de Léonard Cohen qui fut leur première reprise. C’est en puisant dans les répertoires d’autres interprètes que ces deux se sont trouvées, explorant et revisitant un répertoire allant du rock à la musique baroque, de la mu-sique brésilienne à la pop et au folk.

21 févrierForum de Berre, Berre-l’Etang04 42 10 23 60 berreletang.fr

Les Ogres de Barback

Ils disent avoir l’impression d’être montés dans un camion en 1994 et de n’en être plus descendus. Mais Les Ogres de Barback ont heureusement pris le temps d’enregistrer un nouvel album, le premier depuis 2014. Quelques mois seulement, car les Ogres sont avant tout un groupe de scène. Les fran-gin.e.s Burguière conçoivent leur métier comme celui d’artisans à la rencontre des gens, pour échanger à travers leur musique.

29 févrierL’Usine, Istres

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Sanseverino & TangomotánLe nouveau projet du prolixe Sanseverino est né d’un pari singulier. Faire un album avec le groupe Tangomotán, par amour pour le tango, tout en ayant conscience qu’il n’y connaît pas grand chose. Pour que cela passe inaperçu, lui écrira les textes, eux composeront les musiques puis ren-dez-vous en studio ! En invité spécial, le batteur Stéphane Huchard. Pour un ré-sultat fusionnel à la fois sensuel, électrique et nostalgique.

13 mars L’Usine, Istres

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Yakir ArbibRévélation jazz inattendue, Yakir Arbib interprète les compositions originales de l’album My name is Yakir. Né avec une dé-ficience visuelle, le pianiste israélo-italien sait voir les couleurs de la musique et les traduire sur son clavier : un don qu’il a dé-veloppé en suivant des études dans le pres-tigieux Berklee College of Music et affiné auprès des plus grands du genre, de Al Jar-reau à Nils Petter Molvaer ou Chris Cheek.

28 février Chapelle du Méjan, Arles

04 90 49 55 99 cargodenuit.com

L’âge d’or

Épopée flamboyante dans un Moyen-Âge tourmenté par des révoltes paysannes, L’âge d’or est une bande dessinée politique qui a connu un grand succès à sa parution en 2018. L’ouvrage s’apprête à revivre sous la forme d’une projection narrative et mu-sicale, dans le cadre du festival Arles se livre. À l’origine de cette création, la ren-contre amicale de deux artistes : le musicien Alain Arsac, cofondateur du duo arlésien Fatche d’Eux et le dessinateur Cyril Pe-drosa, co-scénariste avec Roxanne Moreil de L’âge d’or. Musiques de l’un et dessins de l’autre vont trouver dans l’église des Alys-camps un écrin inattendu mais particuliè-rement adapté à la dimension mystique de l’œuvre. Une création qui permet d’évoquer la tradition des fresques ou tapisseries qui font récit, tout en utilisant les techniques sonores et visuelles contemporaines pour proposer aux visiteurs du lieu une expé-rience inédite.

29 février au 8 marsÉglise Saint-Honorat-des-Alyscamps, Arles

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Sinclair

Vaillant représentant du funk à la française et figure pop depuis bientôt trois décen-nies, Sinclair s’apprête à renouer avec la scène pour défendre son nouveau projet. Dévoilé en trois temps - dont un premier EP Hier s’efface -, celui-ci incarne une pro-position musicale plus expérimentale, aux lourdes influences électroniques, entre Prince et Franck Zappa. Désormais Arlé-sien, il vient en voisin présenter ses titres en avant-première.

6 marsCargo de nuit, Arles

04 90 49 55 99 cargodenuit.com

Alexis HK

Après avoir servi Brassens, le timbre en-voûtant d’Alexis HK retrouve, avec Comme un ours, son répertoire, son écriture, sa musicalité. Conteur à la signature vocale unique, il n’a pas son pareil pour croquer les personnages et nous emporter dans ses univers parallèles. Il trempe aujourd’hui sa plume dans les peurs de l’époque, la solitude et la bêtise humaine, sur une folk dépouil-lée, baignée par l’élégance d’un violoncelle.

22 févrierSalle de l’Étoile, Châteaurenard

04 90 90 27 79 passagersduzinc.com

Kaja DrakslerLa musique de cette pianiste est d’une clarté irrésistible. Elle oscille entre l’esthétique de l’improvisation européenne et la nouvelle musique, faisant écho au jazz traditionnel et au classique. Dans l’esprit du jazz hol-landais et de la musique improvisée, Kaja est attirée par l’idée d’effacer les frontières stylistiques et historiques et de forger une expression grâce à son langage personnel : la composition et l’improvisation.

5 mars Ajmi, Avignon

04 90 860 861 jazzalajmi.com

Ottilie [B]Ottilie [B] choisit la Saint-Valentin pour pré-senter de Cœur, son nouveau concert-spec-tacle, créé en résidence à La Gare. Une exploration à la frontière entre l’acous-tique et le numérique avec laquelle la chan-teuse-voyageuse approfondit sa recherche hybride, poétique, interactive. Accompagnée du violoncelliste Olivier Koundouno, elle invite à un voyage dans le temps et l’es-pace, autour de textes sensibles et profonds.

14 févrierLa Gare de Coustellet, Maubec

04 90 76 84 38 aveclagare.org

Les inAttendus

Une vive curiosité, un goût prononcé pour la création, une écoute attentive ont donné envie à Marianne Muller et Vincent Lher-met d’explorer des répertoires anciens et contemporains dans lesquels la basse de viole et l’accordéon exploitent un po-tentiel sonore exaltant. Cette rencontre entre instruments d’origines différentes et très éloignés dans le temps est pleine d’étonnements.

27 février au 1er marsEspace culturel de Chaillol

09 82 20 10 39 festivaldechaillol.com

LabessLa carrière de Nedjim Bouizzoul a démarré dans le métro de Montréal. Auteur compo-siteur interprète, il monte le groupe Labess qui réunit la rumba gitane, le flamenco, le gnawa, le chaabi ou encore des musiques traditionnelles d’Afrique. Les morceaux en arabe et en français célèbrent la liberté sur des mélodies festives et aussi bigarrées que les musiciens.

28 févrierLe K’fé Quoi !, Forcalquier

09 50 46 58 19 le-kfe-quoi.com

29 févrierLe Molotov, Marseille

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Maya Kamaty + AmazonitaMaya Kamaty a trouvé le juste équilibre entre l’organique et l’électronique. Son ma-loya réinventé n’appartient plus seulement à La Réunion mais au monde. Kayamb à bout de bras, elle fait de ce blues ter-naire hérité des esclaves le fil conducteur d’une folk voyageuse. La soirée se poursuit avec un Dj set tropical d’Amazonita, venue d’Équateur, avec des pépites tradi-latines des plus électro-dansantes.

16 févrierLe K’fé Quoi !, Forcalquier

09 50 46 58 19 le-kfe-quoi.com

Jaypee JayparC’est l’histoire d’un fils du metal qui a dé-cidé de troquer ses grosses Gibsons contre le naturel feutré de l’acoustique. L’identité de l’artiste se peaufine au fil des années pour arriver à un blues rock folk à la voix profonde et caverneuse, entre Tom Waits et Leonard Cohen. Son style se construit au même rythme que son envie de vivre pleinement de sa musique. En découle l’en-registrement de Meet me again fin 2018.

29 février Le Moulin à paroles, Méounes

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Violons barbares

Formé à la fin des années 2000, Violons Barbares est trio hybride, à la puissance d’une tribu de cavaliers farouches qui nous emmènerait dans la steppe mongole, en passant par les contrées balkaniques, vio-lons sur le dos et tambours dans les valises. De la rencontre de trois musiciens aux ori-gines et cultures différentes (un mongol, un bulgare, un français) émane une cohésion singulière et un enthousiasme débordant.

5 marsThéâtre du Rocher, La Garde

04 98 070 070 tandem83.com

Dédé Saint-Prix

À partir de la matrice musicale chouwal bwa, Dédé Saint-Prix, fidèle à l’héritage d’Aimé Césaire, avec sa flûte en bambou, son tambour en acajou, ses ti-bwa et ses tambours, imagine un répertoire nourri des influences populaires des Caraïbes. Il est question de poésie, de contes, de pro-verbes, d’imaginaires, imprégnés de mi-sik rasin des îles, du bélé à la biguine, de la cadence au zouk originel, du kompa à la charanga.

14 févrierLa Fraternelle, Correns

04 94 59 56 49 le-chantier.com

I MuvriniLe célèbre groupe de polyphonies corses s’est produit sur les scènes du monde en-tier, a chanté avec Sting ou MC Solaar. Ouvert à toutes les influences musicales, I Muvrini puise depuis toujours son ins-piration et sa poésie dans la résistance à travers le monde, croyant à l’entre-culture et aux liens entre les hommes. Leur der-nier album, Luciole, mêle influences blues, groove et même rock.

28 févrierThéâtre de Grasse

04 93 40 53 00 theatredegrasse.com

Rudi FloresNé à Corrientes, au nord-est de l’Argentine, et fils du compositeur et bandonéoniste Avelino Flores, Rudi Flores est considéré comme la référence mondiale de la guitare argentine. Sa musique de prédilection est le chamamé, mélange de cultures espagnole, amérindienne (peuple Guarani) et africaine, aux accents sociaux. Doté d’une technique personnelle qui croise le plectre et le jeu de doigts, il a, comme invité exceptionnel, le baryton basse Nahuel Di Pierro.

6 marsOdéon, Nîmes

04 66 36 65 10 theatredenimes.com

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François Hadji LazaroAvec Atchoum, François Hadji Lazaro offre un véritable concert de rock pour les en-fants et leurs parents, avec des morceaux originaux et aussi des classiques réarran-gés de ses différents groupes comme Pi-galle ou Les Garçons Bouchers. Côté mu-sique, c’est une déferlante de sonorités allant du rock à la bourrée auvergnate et une multitude d’instruments (14 exacte-ment). Quand la chanson enfantine se fait alternative et décalée.

21 févrierPaloma, Nîmes

04 11 94 00 10 paloma-nimes.fr

Trio JoubranSamir, Wissam et Adnan Joubran ont rapidement acquis une renommée inter-nationale. Sur scène, leurs compositions se laissent porter par une complicité dans l’improvisation, entre plages contemplatives et envolées fulgurantes. Pour cette tournée, ils deviennent sextet, accompagnés par les percussionnistes Youssef Hbeisch et Ha-bib Meftah et Valentin Mussou au violon-celle. Un dialogue délicatement empreint de la lutte du peuple palestinien.

28 févrierLe Cratère, Alès

04 66 52 52 64 lecratere.fr

Myrkur

Myrkur est formé par la musicienne da-noise Amalie Bruun, au chant, piano et nyckelharpa. Le nom du groupe est un mot islandais qui signifie « obscurité » et convient parfaitement à son style musi-cal sombre et sans concession. Deux al-bums figurent déjà à leur discographie : M (2015) et Mareridt (2017), ainsi que plu-sieurs singles comme Två Konungabarn (Deux rois enfants) ou Den lille piges død (La mort de la petite fille).

14 marsOpéra Comédie, Montpellier

04 67 601 999 opera-orchestre-montpellier.fr

Le cri du volcan électrique

Ce sont des enfants du pays qui se croisent et se recroisent partout où il y a de la mu-sique. Issus de trois formations (Iaross, Volin et Connie and Blyde) au croisement de trois répertoires, ces musiciens réunis se complètent et s’inspirent. Pour la deu-xième fois, ils se produisent ensemble pour ce concert où ils laissent éclater le cri de leur volcan électrique. De la chanson au rock planant, du jazz à l’électro.

15 févrierRockstore, Montpellier

04 67 06 80 00 rockstore.fr

Acid ArabAvec son mélange de musique électro-nique puissante et de sonorités arabes et moyen-orientales, Acid Arab enflamme la piste. Dans son nouvel opus Jdid, le groupe parisien lance un appel à l’émancipation des corps, en amplifiant le dialogue entre toutes les rives de la Méditerranée. Éga-lement au programme de la soirée : Ara-bian Panther, dj franco-libanais et DJ Ak-zidance, des collectifs marseillais Sidi&Co et Tropicold.

22 févrierSalle Victoire 2, Montpellier

04 67 47 91 00 victoire2.com

Flavia Coehlo + Gari GrèuLa Brésilienne Flavia Coelho, devenue Pa-risienne, sort un quatrième album, DNA, son disque le plus personnel, où elle aborde notamment la situation politique de son pays natal après l’arrivée au pouvoir de Jair Bolsonaro. Gari Grèu, MC de Massi-lia Sound System, s’autorise régulièrement des échappées en solo. Il présente l’album Barka, un concentré de la cité phocéenne et de sa vie de quartier, mais aussi d’Afrique.

7 marsRockstore, Montpellier

04 67 06 80 00 rockstore.fr

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JEAN-CLAUDE

IZZOHistoire d’un Marseillais - Stefania Nardini

Pour les 20 ans de la disparition de Jean-Claude Izzo, les Éditions des FédérésLa Marseillaise publient sa biographie signée par la journaliste et auteure Stefania Nardini.

Inclus des extraits de textes inédits du poète et auteur de polars cultes.

À offrir et à s’offrir

BON DE COMMANDEJe désire recevoir .......... exemplaire(s) du livre

« Jean-Claude Izzo » au prix unitaire de 15 € + 2,25 € de participation aux frais de port par livre

Nom : ............................................................... Prénom : ........................................................Adresse d’envoi : ...................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................Téléphone : ..................................................... email : ............................................................

Chèques de .......... € à l’ordre Éditions des Fédérés à adresser :Les Editions des Fédérés 15 cours d’Estienne d’Orves - 13001 Marseille

LIVREÉVÉNEMENT

90 au programme arts visuels bouches-du-rhône

Des marches, démarches Nombreux sont les artistes qui font de la marche une forme artistique à part entière touchant à toutes les formes et disciplines : performance, land art, dessin, sculp-ture, vidéo, cinéma, littérature, installation. La preuve par 80 œuvres réunies par Guillaume Monsaingeon, qui avait déjà proposé l’excellente exposition Villissima à l’Hôtel des arts de Toulon en 2015. On peut expérimenter cette pratique lors de Conversations marchées organisées les 8 février, 29 mars, 9 avril par le Bureau des guides du GR2013. M.G.-G.

8 février au 10 maiFrac, Marseille

04 91 91 27 55 frac-provence-alpes-cotedazur.org

Chibanis, La questionIls sont arrivés en France pendant les Trente Glorieuses, du temps où on avait be-soin d’eux pour construire nos immeubles, nos routes, nos voitures. Ils sont tou-jours là, cheveux blancs (Chibanis), dans ce pays qui n’est toujours pas le leur, et pas revenus dans celui (Algérie, Maroc) qu’ils ont quitté et qui ne les reconnaît plus. Le photographe montpelliérain Luc Jennepin leur rend hommage dans une série de portraits d’une saisissante dignité. A.Z.

jusqu’au 1er marsSalle des Machines, Friche de la Belle de Mai, Marseille

lafriche.org

Francis De HitaOù il est question de dessin, de volumes et de lumière. Le projet s’ins-pire « des voyants lumineux que l’on rencontre dans la technologie et plus particulièrement liée au son ». L’espace d’exposition se structure grâce à plusieurs dispositifs lumineux, installation/sculptures, que souligne une sélection de dessins et aquarelles. C.L.

Témoins lumineuxjusqu’au 7 mars

Galerie Territoires Partagés, Marseille09 51 12 61 85 artccessible-territoires-partages.blogspot.com

Michèle MétailComment rendre visible l’art poétique ? Éléments de réponse grâce à cette exposition de Michèle Métail en deux volets marseillais. L’artiste interviendra aux Grands bains douches lors du vernissage/lecture, vendredi 21 à 18h30 et au cipM samedi 29, lec-ture inaugurale et conférence à partir de 11h. C.L.

C’est parce que les mots…21 février au 21 mars

Galerie des grands bains douches de la Plaine, Marseille art-cade.net

Topo/phono/graphes29 février au 11 avril

cipM/Centre International de poésie, Marseille cipmarseille.fr

Michèle Métail, Anatomie de la litterature, 2010, 26 planches format A4, collage rehaussé de couleurs. Photo : courtesy artiste/Galerie des grands bains douches

Francis De Hita, Temoins lumineux, Galerie Territoires Partagés, Marseille, 2020, vue partielle. Photo : S. Guglielmet

Chibanis La Question © Luc Jennepin

Herman de Vries, Journal from a visit to leros and patmos, 1996-1998. Collection Frac Bretagne © Herman de Vries. Crédit photographique Hervé Beurel

au programme arts visuels bouches-du-rhône var alpes-maritimes 91

Hybrid’ArtVous êtes artiste plasticien.ne. ? Vous souhaitez faire connaître votre travail ? Cette édition 2020 d’Hybrid’Art offrira encore une belle vi-sibilité aux « artistes locaux, nationaux ou internationaux justifiant d’une pratique artistique à vocation professionnelle », quelque soit le médium utilisé. Dossier de participation à télécharger sur le site, date limite : vendredi 6 mars midi. C.L.

Salon d’art contemporain16 au 29 mai

Espace Gagarine, Port-de-Bouc04 42 43 31 20 centrefernandleger.com

Le musée inconnu « Pousser la porte d’une réserve, d’un grenier, ouvrir une boîte, sans savoir parfois ce que l’on va y trouver... ». Suite au récolement des collections du musée, ce nouvel accrochage invite aux croisements fé-conds entre des œuvres contemporaines et anciennes, des objets eth-nographiques et les collections d’histoire naturelle. C.L.

Le musée inconnu (ou la boite de Pandore)15 février au 31 maiMusée Réattu, Arles

museereattu.arles.fr

Mathias Poisson L’œuvre de Mathias Poisson, approche cartographique et performa-tive, est mise en avant par le Centre d’art contemporain de Châteauvert qui, après une résidence (marche de Marseille à la Provence verte), lui consacre un temps fort de restitution avec des œuvres in situ notam-ment. Cette expérience immersive doublée d’une réflexion écologique à l’ère anthropocène prend forme dans Vastes parages. M.G.-G.

15 février au 28 juinCentre d’art contemporain, Châteauvert

07 81 02 04 66 la-provence-verte.net

Pierre et GillesLe célèbre duo invente une exposition et une scénographie en relation directe avec l’ADN de la ville qui les accueille : le cinéma. À travers une quarantaine d’œuvres, ils remettent en scène les actrices et acteurs qui ont ultérieurement posé pour eux, dans des procédés vi-suels fidèles aux atmosphères acidulées et kitchs qui sont depuis 30 ans la preuve de leur absolue liberté. A.Z.

Pierre et Gilles, le goût du cinémajusqu’au 26 avril

Centre d’art la Malmaison, Cannes04 97 06 45 21 cannes.com

Gerard à la campagne (Hugo Marquez) 2014Photographie imprimée par jet d’encre sur toile et peinte, pièce unique, 168 x 135 cm© Pierre et Gilles – courtesy des artistes et de la Galerie Templon, Paris – Brussels.

Mathias Poisson, Dans le creux de la main, Source, photographies argentiques, 2019 - Courtesy de l’artiste et du Centre d’Art de Châteauvert

Jerry Uelsmann, Sans titre (escalier de l’Hôtel de Ville), Arles, 1974, collection Musée Réattu © Jerry Uelsmann, 2019

1er Prix artiste « coup de cœur » Hybrid’Art 2019 : Raphael TACHDJIAN, Dans le monde exte-rieur, les filles peuvent changer l’odeur de leurs peaux, 74x97,5 cm, pierre noire sur papier, 2015.

92 au programme arts visuels alpes-maritimes hérault

Matisse MétamorphosesLe musée Matisse de Nice s’associe au Kunsthaus de Zurich pour sonder une part souvent méconnue de l’œuvre d’Henri Matisse, la sculpture, quel que soit son état d’avancement : modelages en argile ou travaux en plâtre, études ou compléments d’études, formes abou-ties. Une manière de suivre son processus créatif autant que de dé-couvrir ses figures tutélaires que furent Rodin et Michel-Ange. M.G.-G.

14 février au 4 maiMusée Matisse, Nice

04 93 81 08 08 musee-matisse-nice.org

Jean-Philippe CharbonnierIl est l’un des plus grands photographes français du milieu du XXe siècle, et pourtant l’un des moins représenté de l’École humaniste de Paris, courant qu’il a incarné aux côtés de Robert Doisneau ou Édouard Boubat. Jean-Philippe Charbonnier a su, aux quatre coins du monde et dans toutes les couches de la société, saisir le regard de ceux qu’il rencontrait. Le Pavillon populaire présente, parmi plus de 200 œuvres, son reportage sur les hôpitaux psychiatriques, exposé pour la première fois dans sa totalité. A.Z.

jusqu’au 19 avrilPavillon Populaire, Montpellier04 67 66 13 46 montpellier.fr

PermafrostUne fois encore, La Panacée regarde le contemporain en face, et propose à 12 ar-tistes de questionner le délitement de nos paysages, qui s’effondrent et menacent. Dans une exposition qui se présente comme une expérience immersive, les œuvres (dioramas, vidéos, dessins, installations, sculptures) traduisent désastres naturels, sociaux ou politiques. Quels systèmes esthétiques pour de tels enjeux ? A.Z.

jusqu’au 3 mai Mo.Co Panacée, Montpellier

04 99 58 28 00 moco.art

QalqalahQalqalah est le nom d’une artiste et linguiste, héroïne de la nouvelle éponyme de la chercheuse égyptienne Sarah Rifky. Virginie Bobin et Victorine Grataloup s’en sont inspirées pour créer leur plateforme de recherche artistique en ligne, aux trois langues (arabe, français, anglais) et deux alphabets, déclinée au Crac de Sète sous forme d’exposition, où 4 artistes conjuguent les mots, la traduction, la réécriture, les récits pluriels, exil, langue maternelle... A.Z.

Qalqalah, Plus d’une langue7 mars au 24 mai

Centre Régional d’Art Contemporain, Sète04 67 74 94 37 crac.laregion.fr

Ceel Mogami de Haas, Rain, spit, snow, 2018, 73,1 x 97,2 cm.

Michael E. Smith, Untitled, 2019 Courtesy de l’artiste et Modern Art, Londres © Ben Westoby

Jean-Philippe Charbonnier, La piscine d’Arles (RH011175), 1975 © Jean-Philippe Charbonnier/GAMMA RAPHO

Henri Matisse, Nu couche II, 1927, bronze, H. 28,1 cm. Don de Mme Jean Matisse a l’État, 1978, pour dépôt au musée Matisse, Nice – Musée d’Orsay, Paris © Succession H. Matisse / Photo : Francois Fernandez

arts visuels 93

Ranc sort du rangLe musée Fabre présente une ambitieuse exposition qui permet d’approcher tout un pan de l’histoire de l’art autour des toiles du peintre originaire de Montpellier

Il est né en 1674, dans l’Isle Ranc, fief de la famille de peintres installée au pied de la cathédrale de la ville languedocienne. Dans l’atelier florissant, Jean Ranc développe très vite des

dons qui poussent son père à le recommander auprès de Hya-cinthe Rigaud, portraitiste déjà renommé sur la place de Paris. Ce fut ensuite une ascen-sion sans détour, jusqu’à être nommé auprès de la cour d’Espagne, dont il approchera les visages et les histoires au plus près de l’incarnation du bal-let diplomatique du dé-but du XVIIIe siècle. Il a côtoyé les plus grands, il a même détenu dans son atelier la couronne royale tandis qu’il travaillait au Portrait de Louis XV âgé de 9 ans (1719), il a croulé sous les commandes, il a attisé les jalousies, et pourtant ses toiles sont tombées dans un relatif oubli. Certes, il est para-doxalement aujourd’hui bien connu pour son très célèbre Vertumne et Po-mone (vers 1710-1722), fleuron de la collection du musée Fabre, som-met d’audace chroma-tique et narrative, mais ce tableau, dont le sujet n’est d’ailleurs pas re-présentatif de la carrière de l’artiste, occulte le reste de son œuvre, qui démontre pourtant une technique saisissante et une manière qu’on peut dénommer le « style Ranc ».

Entre la vie et la mortÀ travers un parcours scénographié par Maud Martinot (qui avait déjà si bien contribué à révéler l’œuvre de Vincent Bioulès l’été dernier), tout en perspectives et espaces-écrins centrés sur les thématiques choisies par les deux commissaires scien-tifiques (Stéphan Perreau et Pierre Stépanoff) et le directeur du musée Michel Hilaire, on progresse dans la farandole de visages qui nous interpellent directement depuis la croisée des XVIIe et XVIIIe siècles. Impressionnante rencontre avec la haute société de ces temps prérévolutionnaires, désireuse de laisser une image d’elle-même. Comment être indifférent à ce

besoin de poser avec les attributs de son rang, de prouver sa place dans le monde, de plonger son regard dans le nôtre - de personne à personne ? Soudain complices avec cette inclina-tion à se (faire) tirer le portrait, le temps s’abolit, et on entre presque naturellement dans les codes du Grand Siècle et de ce-

lui des Lumières. Grâce à l’interprétation si vivante de Ranc, les traits s’ani-ment sous la douceur des couleurs et des sourires désarmants, et, sous les poses compassées, on de-vine la force d’un bras ou la délicatesse d’une main. Les draperies sont somptueuses, les den-telles et les bijoux trou-blants de précision. Les couples (un tableau pour Monsieur, un pour Ma-dame) perdurent dans l’opulence, l’amour plus fort que la mort : Portrait de Pierre Gaudron (1706) qui, veuf très tôt, inscrivit sur son testament qu’on ne le sépare jamais de celui de sa femme - ils sont à nouveau réunis, extraits chacun de deux collections particulières. La mort, toujours embus-quée, transparait de fa-çon bouleversante dans le Portrait de Louise Éli-

sabeth d’Orléans, reine d’Espagne (1724, musée du Prado), inachevé pour cause de disparition de l’éphémère roi Louis, emporté par la variole après seulement 7 mois de règne. La reine fut alors renvoyée en France, et son portrait aban-donné. On découvre ici ce tableau, mi esquisse mi modèle de finesse, et la fragilité de l’instant dialogue magnifiquement avec le flou qui gagne.

ANNA ZISMAN

Jean Ranc, un Montpelliérain à la cour des roisjusqu’au 26 avrilMusée Fabre, Montpellier

museefabre.montpellier3m.fr

Jean Ranc, Portrait de l’infant Ferdinand, futur roi d’Espagne, vers 1723, huile sur toile, 144 x 116 cm, Madrid, Museo Nacional del Prado © Museo Nacional del Prado, Dist. RMN-GP / image du Prado

94 arts visuels

Des rêves kaléidoscopiques

À la galerie du Canon à Toulon, gérée désormais par Tou-lon Provence Métropole (lire P 9) qui donne carte blanche à Isabelle Bourgeois, directrice de la Villa Tamaris à La

Seyne-sur-Mer. Pour sa première exposition hors les murs, Isabelle Bourgeois a pioché dans la collection permanente une sélection d’œuvres de huit artistes exposés entre 2007 et 2019, mises en regard avec des travaux plus récents. L’histoire de l’institution et l’évolution des recherches des plasticiens sont données à voir dans des allers-retours judicieusement mis en espace par l’évitement systématique du vis-à-vis ou du bord à bord ! C’eut été trop didactique. Le jeu de piste, réflexif et ludique, fait se croiser Iles flottantes (2012) et J’ai des idées noires de toutes les couleurs (2019) de Pierre Tilman habi-tées par une poésie facétieuse intacte. Il érige tel un totem la sculpture en verre et plâtre de Dominique Angel, Sans titre, produite en 2013 au Cirva, et profite d’une encoignure pour surprendre avec Pièce supplémentaire (2006), petit ourson de plâtre blanc, inoffensif a priori, mais tout de même muni d’une hache dorée dans sa main droite. Il nous entraine de Rêve de plomb de Jean Arnaud (2008) au tirage numérique sur calque Le Récit de la peau (2017), jusqu’à la vidéo Mise en conformité réalisée en 2018 avec l’artiste-chercheur Da-mien Beyrouthy.Œuvre également présente au Musée des Tapisseries à Aix-en-Provence, projetée cette fois dans une Black Room, un for-mat plus grand et un autre cadrage. Rhinocéros ou pieuvre, technique mixte ou image vidéo, l’œuvre de Jean Arnaud est

inspirée des Métamorphoses d’Ovide, imprégnée de « l’idée de la pieuvre gardienne des profondeurs, nourrie de cet ima-ginaire, de ma fascination pour les questions de disparition et de survie, de l’animal menacé à l’animal menaçant. On est dans un entre-deux, on ne sait pas si ça flotte ou si ça vole… ». Ici, Perspectives propose, à sa manière, une « kaléidosco-pie » en réfléchissant les univers formels de 19 artistes de l’association, 6 artistes invités, et Claude Bernus auquel elle rend hommage. La thématique Rêvons l’espace nous fait tra-verser l’espace du tableau de Bernard Boyer et Piotr Kle-mensiewicz, de la photographie de Marc Chostakoff, de l’acrylique sur verre de Michel Vautier… Et de la sculpture : celle suspendue à tire-d’aile de Jane Deste telle une invita-tion à regarder par-dessus tête ; celle en papier brodé d’Odile Xaxa, alliance duale entre le fil rouge et le papier blanc ou calciné ; celle « jupitérienne » de Pierre Paindessous auda-cieusement nommée Ruissellement, où l’idée de la cordée est devenue la corde, symbole de la verticalité des élites et du pouvoir. Une œuvre qui épouse l’architecture, l’humain, la politique et le mythe.

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Kaléidoscopiejusqu’au 20 maiGalerie du Canon, Toulon 04 94 06 84 00 villatamaris.fr

Rêvons l’espacejusqu’au 22 marsMusée des Tapisseries, Aix-en-Provence04 42 23 09 91 aixenprovence.fr

Jean Arnaud, Arbre de vies III, Ruissellement, 2019, terre chamottée, acier, fibre textile, 300x220x200cm © Pierre Paindessous (photo) Marie GG / Zibeline

Il y a des hasards heureux, comme celui de voir l’œuvre de Jean Arnaud simultanément à deux endroits

Jean Arnaud, Reve de plomb 01 (Ulysse-Durer), 2008 © Jean Arnaud

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Zibeline pour sortir malin et penser la vie

Livre du mois

En vagues de mots et d’images

Le dernier roman d’Anne-Marie Garat commence par une traver-sée, celle de l’estuaire de la Gi-

ronde, pour se rendre en bordure de l’Atlan-tique dans une petite maison sur la dune dont la narratrice a l’intention de se dé-barrasser. Elle en avait fait l’acquisition sur un coup de tête dix ans auparavant et ne l’utilisait que très rare-ment. Cette traversée inaugure une sorte de parcours initiatique qui va bouleverser le cours de sa vie et la réconcilier avec une enfance douloureuse. Hélène a, en effet, été abandonnée par sa mère à sa naissance, confiée à ses tantes et élevée avec ses cou-sins. Désormais amplement trentenaire,

elle se déclare célibataire endurcie, nul-lipare et fière de l’être. Débarque dans la nuit un jeune homme à moto, squat-

ter occasionnel, avec lequel le dialogue se crée autour d’un co-gnac. Photographe, il vient immortali-ser les blockhaus qui s’enlisent ; elle-même pratique des exper-tises de fonds pho-tographiques  ; une connivence s’installe. Deux jours plus tard sa filleule chérie an-nonce sa visite. Tout ce monde se retrouve chez un géologue voi-sin qui les initie aux secrets du sable et des dunes… La nuit atlan-

tique nous entraîne à leur suite parmi les oyats, nous fait écouter le tumulte de l’océan, savourer les parfums de fougères

et d’embruns. Et surtout, Anne-Marie Ga-rat nous enveloppe dans son récit comme dans une couverture de survie, variant les intonations, ravivant souvenirs et émo-tions qui s’écoulent en vagues de mots et d’images, utilisant des styles différents, du lyrisme à l’indirect libre ancré dans la langue orale branchée, sautant parfois à pieds joints dans la fantaisie et l’hu-mour. Le récit prend un tour inattendu et fleur bleue lorsqu’éclate une terrible tempête… Plongez-vous dans les délices et les nuances de cette folle aventure pour laquelle l’auteure a déployé son talent de conteuse, nous réservant des surprises érotiques.

CHRIS BOURGUE

La nuit atlantique Anne-Marie GaratActes Sud – 21,50 €

Livre du mois

Quelques nuances de noir…

2017, Vancouver, Canada : la fille de Da-

vid Chariandy a 13 ans. C’est aussi l’année de l’élection de Trump dans le pays voisin, « énième homme gâté, vulgaire et hâbleur » qui, dès son accès au pou-voir, multiplie des déclarations racistes et discriminatoires. Sous prétexte de fournir à sa fille des éclaircissements sur les origines de leur famille, l’auteur se livre à une réflexion sur les inégalités et le racisme latent. Bien que Canadien de naissance, on lui a souvent demandé d’où il est vraiment et il lui est arrivé d’en-tendre le mot « nègre » à son sujet. Ses parents, d’origine africaine et asiatique, s’étaient engagés pour travailler sur les champs de cannes à sucre à Trinidad : un esclavage qui ne disait pas vraiment son nom, on disait plutôt « engagisme ». De là ils sont allés s’installer dans un quartier mixte de Toronto en 1963. Ils n’ont pas tous les deux la même cou-leur, et leur fils n’est pas tout à fait noir.

Cependant dans leur quartier de grande mixité avaient lieu des manifestations de méfiance : cultures, langues et cou-leurs soulevaient souvent des questions. À l’université, David a rencontré, puis épousé, une blanche d’origine écossaise dont la famille s’était installée au Qué-bec. Sa « fille chérie » - comme il l’appelle

tout au long du récit d’une manière un peu désuète - a donc un héritage mul-tiple, mais les problèmes qu’elle peut avoir sont bien différents de ceux que son père a eus dans son enfance et son adolescence. Cependant elle comprend confusément la question du racisme et, confrontée à une attaque qu’a subi son petit frère à l’école, elle a pris sa défense avec fougue à la grande satisfaction de ses parents. David Chariandy livre avec ce texte une réflexion sur le métissage, sur l’espoir d’un vivre ensemble enrichis-sant et non sclérosant. Mais une sourde inquiétude semble l’habiter.

CHRIS BOURGUE

L’auteur fait partie de la sélection du Prix littéraire de la Région Sud ; son livre 33 tours sera chroniqué dans le prochain Zibeline

Il est temps que je te dise (lettre à ma fille sur le racisme) David ChariandyTraduit de l’anglais par Christine RaguetÉditions Zoé 14 €

96 livres

Dix jours de réflexion

Après une violente dispute, Hélène quitte la maison,

laissant Sébastien seul avec leurs deux jumeaux de cinq ans à la veille de la rentrée scolaire. Elle lui laisse une lettre dans laquelle elle lui annonce qu’elle part pour dix jours, et qu’elle ne sera pas joignable. En réalité elle va vivre une expérience de méditation vipassana : dix jours à méditer dans le silence complet et dans un lieu isolé. Dix jours pour tenter de comprendre pourquoi leur couple a perdu le fil, pourquoi elle se sent si mal. Dix jours pour renouer avec elle-même et peut-être avec Sébastien. Or pendant ces quelques jours, entre le 5 et le 16 septembre 2001, il y a le 11… dont elle ne saura rien, tandis que Sé-bastien, journaliste à l’AFP, est au cœur de la tourmente. Le dernier roman de Frédérique Deghelt s’intitule Sankhara. Les sankharas sont des « perceptions phy-siques inconscientes engrammées dans le corps » ; des « nœuds » qui « remontent à la surface du corps lors des médita-tions » ; qu’il faut apprendre à sentir et à

laisser passer afin de se libérer de tous les conditionnements inconscients. Ce qu’Hélène s’applique à faire dans une reconquête d’elle-même qui l’émerveille. Alors que Sébastien est submergé par le chaos du monde, qui semble faire écho à sa dévastation intime… Le roman suit la chronologie de ces dix jours et fait

alterner les points de vue d’Hélène et de Sébastien. D’un côté silence et plé-nitude, de l’autre fureur et désarroi. À la crise de leur couple, chacun cherche des réponses dans des univers totale-ment différents. C’est ce que l’autrice a voulu approfondir : le lien entre l’exis-tence personnelle et le monde dans le-quel on vit, entre le chaos intime et les bouleversements du monde. Hélène et Sébastien, comme les deux faces d’une même interrogation sur ce qui fait l’es-sence (et le sens) de nos vies, la force de nos engagements. Le livre se déploie, in-tense, sensible, autour de ces deux per-sonnages émouvants, sondés au plus pro-fond… et dont on espère, tout au long de la lecture, que ces dix jours pas comme les autres leur permettront d’enfin se trouver. Pour mieux se retrouver.

FRED ROBERT

Ce roman est un des coups de cœur de la rentrée d’hiver de la librairie L’Attrape-mots (Marseille)

Sankhara Frédérique Degheltéditions Actes Sud 21,80 €

Livre du mois

Retour à Medellin

Installé à Londres depuis douze ans, Larry rentre au pays. Un retour pas facile pour le fils ca-

det de Libardo, un proche de Pablo Escobar. Car oui, Larry est le fils d’un narco. Et s’il revient, c’est qu’on a enfin retrouvé les restes de son père disparu. Il est temps de donner une sépulture dé-cente à ce mafieux notoire, temps aussi de retrouver Julio, son frère aîné, et sa mère Fernanda, restés en Colombie, tandis que lui s’en est arraché pour (peut-être) ces-ser enfin d’être « le fils de Libardo ». Le dernier roman de Jorge Franco, Le ciel à bout portant, pose avec force la question du rapport au père. Que devenir quand son propre père a été le bras droit d’un des plus grands assassins du pays ? Il retrace aussi de façon originale l’histoire récente de la Colombie. Car le roman s’articule selon trois temps différents : celui du retour de Larry à Medellin en pleine Alborada, une fête où la liesse popu-laire explose en pétards, feux d’artifice et

débordements en tous genres (alcool, drogues, sexe et reggaeton) ; ce-lui de l’enfance, juste après l’annonce de la mort d’Escobar, quand l’étau se resserre autour des narcotrafiquants et que les menaces, sur eux et leurs familles, se précisent  ; et ce-lui, suspendu, du vol Londres-Bogota, durant lequel Larry rencontre Charlie, qui rentre elle aussi enterrer son père. Sauf que son père à elle est « un mort digne, respecté, connu ». Alors que son père à lui est « un hors-la-loi, un disparu, un gêneur jusque dans sa mort. » Ces trois temps alternent en une succession de chapitres intenses, tout au long de ce roman à la fois intimiste et ancré dans l’histoire. Cet entrecroisement rend encore plus

sensible le vertige d’un Larry qui débarque, as-sommé par le décalage horaire et le manque de sommeil, et reçoit de plein fouet l’incandes-cente frénésie de sa ville natale, comme si rien n’avait changé. Le rythme soutenu ac-croche. Accrochent éga-lement le ton, à la fois cru et sentimental, et les personnages, tous un peu blessés, déjan-tés, suicidaires parfois,

car toujours conscients qu’ils ne sont « pas nés pour vivre au paradis ».

F.R.

Le ciel à bout portant Jorge Franco traduit de l’espagnol (Colombie) par René Solis Éditions Métailié 22 €

Livre du mois

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98 livres

Livre du mois

Livre du mois

Retrouver la forêt

Obscure et mystérieuse, touf-fue, vénérable... la forêt mé-diévale continue à nourrir

nos imaginaires. Les éditions Les belles lettres ont publié une somme his-torique qui ravira bien des lecteurs, tant elle soulève avec précision les idées re-çues. Non, la longue période qui court du Ve au XVe siècle n’a pas été l’âge d’or des arbres. Passé le Haut Moyen-Âge, les be-soins en bois de chauffage, de charpente, les usages agricoles, domestiques, arti-sanaux, puis proto-industriels ont avalé moult couverts forestiers. La pression anthropique pouvait s’alléger et la na-ture reprendre ses aises, comme ce fut le cas lors de la Grande Peste au mitan du XIVe siècle, mais le pouvoir aristocra-tique et royal a réglementé de plus en plus la « forêt usagère d’antan, devenue une forêt capital ».L’extrême intérêt de cet ouvrage, dirigé par Sylvie Bépoix et Hervé Richard, ré-sulte de son approche pluridisciplinaire.

Des spécialistes de littérature médié-vale y évoquent la « forêt rêvée », peu-plée de malebêtes, ermites, chevaliers errants et demoi-selles en fuite. Lin-guistes, juristes, his-toriens des religions et des institutions ap-portent leur pierre à l’édifice, étayé par les travaux d’archéolo-gues, de scientifiques étudiant les pollens ou les poutres des ca-thédrales, le fonctionnement des mines, la production de charbon, chaux, poix, sel... Mille ans qui se dévorent, sans que les aspects purement techniques ne décou-ragent : au contraire, habitants de Pro-vence, Bretagne, Bourgogne, des Alpes, Vosges ou Pyrénées y découvriront avec

plaisir l’évolution de leurs bois et bocages, ainsi que la longue lutte des habitants pour conserver le droit de chasser, celui de faire paître leurs bêtes, ra-masser des champi-gnons ou cueillir des châtaignes. D’autres y trouveront matière à réflexion sur la forêt contemporaine, qui ga-gnerait à être jardinée et non plus exploitée, en veillant à laisser de vastes pans au sauvage.

La sagesse des siècles devrait nous y inciter.

GAËLLE CLOAREC

La forêt au Moyen Âge Sous la direction de Sylvie Bépoix et Hervé RichardÉditions Les belles lettres, 26,90 €

Tu ressembles à une juive

«Aimer ou ne pas aimer les juifs est devenu,

redevenu, un positionne-ment stratégique au sein de

la société française. » C’est sur cet amer constat que s’érige le très beau texte de Cloé Korman. Après Les Hommes-Cou-leur, Les Saisons de Louveplaine et Midi, l’auteure quitte avec Tu ressembles à une juive le terrain du roman pour s’aventu-rer sur celui de l’essai. Entre manifeste et autobiographie, le récit porte une voix rare et précieuse. Le portrait, histori-cisé, de la « vieille tradition de racisme » de la France y côtoie l’histoire person-nelle de l’auteur, et son propre rapport, complexe, contrarié, à sa propre judé-ité. Il passe par ce « Attache tes cheveux, sinon tu ressembles à une juive » intimé par sa grand-mère, mais aussi par cette réponse d’une amie, lui reprochant de décliner le dîner de Pessah : « Si tu vas dîner seule, tu n’es pas juive ». S’ajoute à ces deux injonctions l’omission de son identité juive que la professeur de Français

perpétue chaque année en Seine-Saint-Denis. Tu ressembles à une juive ne tait en effet ni l’importance croissante des violences antisémites, ni leur perpétua-tion dans les milieux les plus défavori-sés. Elle pose également les questions qui fâchent, sur les « zones de compro-missions et d’ambiguïtés » de certaines franges du militantisme antiraciste. Ni

les glissements d’une Houria Bouteldja signant avec Les Blancs, les Juifs et Nous une tribune nauséabonde, ni ceux de la LICRA et du MRAP prompts à dénoncer un « racisme anti-blanc » fictif ne sont pas-sés sous silence. Mais plus intéressante encore est son analyse de la récupération des luttes contre l’antisémitisme par la droite et par l’extrême-droite, quand l’antiracisme se voit davantage mis en avant à gauche. L’essai ne perd pas pour autant son cap premier : rappeler les fondements jumeaux du racisme et de l’antisémitisme en France. Et notam-ment la création du Front National par Jean-Marie Le Pen, vétéran de la Guerre d’Algérie et anti-Arabe notoire, et Pierre Bousquet, ancien Waffen-SS…

SUZANNE CANESSA

Tu ressembles à une juive Cloé KormanSeuil, 12 €

99

La fin du sorcier

Le dernier livre traduit en français de Horacio Castellanos Moya, La Mémoire tyrannique, s’ancre dans

un épisode clé de l’histoire du Salva-dor, les mois de l’année 1944 qui virent la chute du dictateur militaire Hernández Martínez, adepte d’occultisme et sanguinaire, d’où son surnom de « sorcier nazi ». On suit la ré-pression sanglante de la révolte armée, le di-manche des Rameaux du 2 avril 1944, dirigée par des intellectuels, des chefs d’entreprise et des unités mécon-tentes de l’armée, et l’organisation de la grève des étudiants qui suivit en mai de la même année, malgré la loi mar-tiale et le couvre-feu, se prolongeant en grève générale. Horacio Moya évoque

cette période en un texte polyphonique et polymorphe, passant du journal in-time au dialogue de cinéma, avant de construire son épilogue situé bien après

les faits en 1973 en un monologue intérieur à la première personne, par un personnage se-condaire du récit, qui dénoue les derniers fils et narre les destinées de chacun des prota-gonistes, définitive-ment enserrés dans un passé qui se délite, et une mémoire collec-tive qui s’efface.L’écriture se ploie dans les modes de chacun, épouse les raisonne-ments, les attitudes,

les intonations des différents person-nages. Nous touche la simplicité presque innocente de Haydée, dont le style semble tout droit sorti de la Comtesse de Ségur.

Son mari, Périclès, est prisonnier poli-tique du régime qu’il a dans un premier temps soutenu avant d’être conquis par les théories marxistes. Elle se bat pour aller le voir, intercède auprès de sa famille (le père de Périclès est un fidèle colonel du dictateur), va chez le coiffeur, car il ne faut pas se laisser aller malgré tout, nous donne à goûter un quotidien où les actes les plus héroïques semblent aussi natu-rels que de choisir une robe de mariée en regrettant que l’on ne puisse plus en avoir de Paris. On suit dans sa fuite son fils, Clemente, condamné à mort pour avoir annoncé (à tort) la mort du dicta-teur à la radio, passages rocambolesques dignes d’un western spaghetti… Tour de force que ce livre qui allie humour, pro-fondeur et analyses sans concession, sur une page d’histoire à méditer…

MARYVONNE COLOMBANI

La Mémoire tyrannique Horacio Castellanos Moya, traduit de l’espagnol (Salvador) par René Soliséditions Métailié, 22 €

Livre du mois

Contagion

Le dernier roman traduit en français de Yan Lianke, La mort du soleil, joue des

paradoxes de l’écriture, dans une narration que l’auteur délègue à

l’idiot de son village, le jeune Niannian, qui, à l’instar d’un Homère des temps mo-dernes, en appelle, sur le mode familier, « Ohé ! Êtes-vous là ? », non aux muses de la Grèce antique, mais aux Esprits des monts Funiu, au Bouddha protecteur et au dieu de la littérature afin de leur ra-conter l’horreur d’une nuit qui a balayé de sa folie son village et leur demander de rendre la grâce de l’inspiration à son voisin, l’écrivain Yan Lianke, « oncle Yan », dont il a lu tous les livres. Dans cette mise en abyme de l’écriture où l’auteur devient l’un de ses personnages, la fic-tion envahit tout, comme un cataclysme d’un nouveau genre : la population de leur petite ville est en proie à une crise de somnambulisme collective. Épuisés par leur travail, - c’est la période des ré-coltes -, les gens dorment debout, agissent

en automates, re-tournent dans leurs champs, profèrent des vérités cachées, ou se livrent à des exactions sans nombre, pillent, volent, tuent… l’en-droit est bientôt mis à feu et à sang, les vieux comptes se règlent, les villages voisins s’invitent, eux et toute conscience, pour profiter de l’au-baine de « richesses » à portée de main. Les pulsions les plus viles s’exposent dans cette nuit qui n’en finit pas. Les chapitres sont scandés par les heures au cœur de cette tragédie où le temps s’arrête (« en un lieu en un jour »…), jusqu’à la tension du retard du lever du soleil. Alors le même titre, « 6h00 6h00 » se répète, comme une aiguille d’horloge blo-quée, accentuant l’urgence, tandis que les

passions se déchaînent et que la transgression devient loi, jusqu’à la délivrance en apo-théose flamboyante (un grand moment de littérature - et de cinéma !). La question de la réalité de la fiction se pose, peut-on mou-rir enfermé dans les pages que l’on écrit ? Quelle porosité entre le rêve et le monde ex-térieur ? Une grande leçon d’écriture dans un récit où les talents

de conteur, d’observateur, mêlés à un humour décapant, se déploient de fa-çon magistrale.

MARYVONNE COLOMBANI

La mort du soleil Yan Lianke, traduit du chinois par Brigitte Guilbaudéditions Picquier, 22.50 €

Livre du mois

100 livres

Connaître la paix du froid

L’hiver est ainsi  : « une loi impla-cable, qui méprise

le superflu. » « Pas de si-magrées. Rien que le blanc et le silence. » Préférer l’hiver, le premier roman d’Au-rélie Jeannin, est ainsi : sans conces-sion, incisif, brutal parfois, toujours tou-chant. Deux femmes, une mère et sa fille, dans une cabane au fond des bois. Deux femmes endeuillées au cœur de l’hiver qui s’installe. Un hiver qu’elles préfèrent aux autres saisons, plus douces, car « il est venu remettre de l’ordre dans [leurs] chaos.[…] en [leur] imposant son froid et sa faim, il est venu geler ce qui devait l’être et pousser [leur] vie au-dehors. » L’hiver donc, comme une épreuve né-cessaire avant un éventuel retour à la vie. La fille est la narratrice de ce ro-man singulier, dont les très courts cha-pitres s’enchaînent comme autant de pages d’une sorte de journal de survie. L’écriture dense, presque clinique, dit les

gestes quotidiens (faire à manger, se laver, chercher du bois, s’approvisionner…), la nature prise dans l’étau de l’hiver (l’eau, les arbres, les animaux, dont un ragon-din…), mais aussi l’amour des livres et des phrases qu’on savoure ensemble, et puis les souvenirs de la vie d’autrefois,

qui reviennent par vagues douloureuses, difficiles à endiguer. Les personnages ne portent pas de nom, comme si l’hi-ver et la forêt n’avaient que faire d’un quelconque état civil ; restent les liens familiaux : un fils, un frère, un père, tous disparus ou partis ; et une mère et sa fille, unies dans leur entreprise de ré-sistance au désespoir. Préférer l’hiver est un livre rude. Certes. Mais il offre une belle réflexion sur la résilience. Sur la nécessité de s’abandonner. Afin d’accé-der « à ce point où tout est d’une justesse absolument parfaite. » ; là où l’on n’a plus ni froid ni peur. Ce roman, aux accents un brin survivalistes (on pense parfois au très marquant Dans la forêt de Jean Hegland), a l’austère beauté de certains noirs et blancs. Une beauté poignante. Un premier ouvrage remarquable.

FRED ROBERT

Préférer l’hiver Aurélie Jeannin éditions Harper Collins 17 €

Livre du mois

Livre du mois

Annales d’une manipulation d’État

Paru en 2019, le livre d’Éric Stemmelen, Opération Macron, présente avec la sè-

cheresse d’un scalpel les chroniques de la manipulation de grande ampleur qui a conduit aux der-nières élections prési-dentielles. Ne vous fiez pas au titre qui évoque, à dessein, un univers à la James Bond ou le po-lar, pas de fioritures ni d’effets de style, mais des dates, des faits, des chiffres, suivant une implacable chronolo-gie qui ne cherche pas le sensationnel mais énonce avec précision un déroulé machiavé-lique. Pas de fantasme complotiste non plus, tout est vérifiable, aisément, et les discours cités ne subissent pas les coupes adroites qui flouent l’in-terprétation. Le résultat est cruel ; dé-monstration du passage d’une démocratie

à la ploutocratie, avec un consentement qui rappelle les pages visionnaires d’un La Boétie dans son Discours de la servi-tude volontaire.Tout commence un 22 janvier 2012 par la

phrase culte de Fran-çois Hollande « mon adversaire… c’est le monde de la finance », alors que ses conseil-lers en économie, dont « un certain Emma-nuel Macron », en font partie… Nous sommes amenés à comprendre comment son image est mise en avant, dé-formée de manière laudative et souvent hyperbolique, dans une vaste entreprise

qui suit les principes de la Persuasion clandestine (cf. l’ouvrage de Vance Pac-kard sorti en 1998), grâce à une parti-cipation active des « Chiens de garde ». S’égrènent les notes qui démontrent la

mainmise des grands groupes finan-ciers sur la presse, Le Figaro, (Serge Das-sault, mort en 2018, dont « la fortune était proche de 24 milliards d’euros »), Le Monde (Xavier Niel, « fondateur de Free après avoir « réussi » dans le minitel rose, (…) 7 milliards d’euros »), Le Parisien, In-vestir, Connaissance des Arts, Radio Clas-sique (tous détenus par le groupe LVMH de Bernard Arnaud, « fortune estimée à 73 milliards d’euros en 2018 »), etc... On voit les grandes fortunes se multiplier par deux tandis que les aides sociales qui coûtent « un pognon de dingue », (c’est bien connu) sont réduites à peau de chagrin. Année après année, de 2012 à 2017, s’aggravent les violences faites aux droits démocratiques, les compli-cités alimentées par une cupidité sans vergogne se dessinent… Accablant ! et à méditer sérieusement…

MARYVONNE COLOMBANI

Opération Macron Éric Stemmelenéditions du Cerisier, collection Place Publique, 16 €

CD

Brahms

Un siècle après le célèbre Quintette pour clari-nette et cordes de Mo-

zart, Johannes Brahms s’at-telait à son tour à l’envoûtant instrument à vent. De même que la rencontre du jeune compositeur avec An-ton Stadler s’était avé-rée décisive, celle de Brahms avec le clari-nettiste Richard Müh-lfeld fut à l’origine de quatre œuvres mar-quantes de sa dernière période, qu’il dédia à l’interprète, qualifié du doux sobriquet de « cher rossignol ». Dans la lignée de la mé-lopée mozartienne, l’instrument ajoutait à la grâce mélodique de ses possibles un penchant nouveau pour le déploiement thématique et pour le chatoiement des

timbres. Le pianiste Jérôme Ducros, le violoncelliste Jérôme Pernoo, le Qua-tuor Voce et le clarinettiste Florent Héau ont uni leurs forces pour donner corps aux deux opus composés suite à cette rencontre : le Trio en la mineur opus

114 et le plus célèbre Quintette en si mineur opus 115.L’opus 114 a quelque peu souffert du succès de sa pièce jumelle : il n’est pourtant pas moins intéressant, bien au contraire ! Son ouverture mise elle aussi sur le frottement

entre l’âpreté des cordes et l’onctuosité de la clarinette, auxquels vient se greffer le métal d’un piano souvent perméable à la mélancolie ambiante. La tristesse, encore schubertienne, point sous l’articulation

pourtant élancée, presque héroïque, du clavier. L’entente est belle entre les mu-siciens, qui misent sur un équilibre bien choisi entre mesure et lyrisme. Elle de-meure entre le Quatuor Voce et Florent Héau sur un opus 115 pourtant plus im-modéré. Érigé sur un écrin contrapun-tique rutilant, le clarinettiste se risque à davantage d’éclat. Le dialogue opère entre les différentes couches, quand d’autres auront, pour faire éclater un chant de rossignol outré, davantage misé sur un cloisonnement harmonique du quatuor – en somme, misé sur le chant au dé-triment des champs. Ici, rien à dire : le tableau s’avère captivant.

SUZANNE CANESSA

Brahms Florent Héau, Jérôme Pernoo, Jérôme Ducros et le Quatuor Voce, sorti le 7 févrierLabel Klarthe, 15 €

CDdu mois

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136, rue Loubon • 13003 Marseillewww.lafriche.org

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Animations petits cinéphilestous les dimanches

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UN CINÉMA POUR TOUS

PRÉFETDE LA RÉGION

PROVENCE - ALPESCÔTE D'AZUR

Le GyptisCinémaImages

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102 cd

When U Leave It

On se souvient de Sista K, Karine, la chanteuse du groupe marseil-lais Watcha Clan. Il y a trois ans,

déjà tentée par l’aventure solo, elle sortait son premier album, Woman tale. Sous le nom contracté de Siska, elle se révé-lait en artiste affranchie et réinventée, exprimant volontiers une fragilité dis-simulée par des prestations scéniques explosives. En attendant un nouvel opus, Siska dévoile un titre sous forme d’EP digital, When U Leave It, morceau dé-cliné en plusieurs remixes : deux assu-rés par Ekiti Sound, DJ nigérian basé à Londres et un troisième par Suif qui a invité le rappeur soul de Los Angeles Charles X.La voix envoûtante de Siska se laisse ten-ter pour la première fois par des paroles en français, glissées dans un texte écrit majoritairement en anglais. Elle y évoque la tentation de demander aux proches

qui s’en vont de nous emmener avec eux. Côté influences musicales, le trip-hop rencontre l’esprit soul music en mode future downtempo. Un son qui laisse apparaître la patte de son complice de

toujours, Suprem Clem, également issu du Watcha. Pour accompagner son nouveau titre, Siska a tenu à sortir un clip. Tourné sur la plage de Beauduc, en Camargue, il est la première réalisation de la photo-graphe plasticienne marseillaise Julie Lagier. Une mise en scène léchée pour un décor naturel mi-nimaliste d’un blanc lumineux, où un homme et une femme évoluent, reliés par un fil rouge.

LUDOVIC TOMAS

When U Leave It (VLB Recordings) SiskaSorti le 11 décembre 2019

© VLB Recordings

Spartenza

Spartenza est un pont enjambant la Médi-terranée entre l’Eu-

rope du Sud et l’Afrique du Nord. Si le mot, sicilien, signifie une sé-paration, il s’agit pourtant bien d’une rencontre que le disque célèbre. Celle de Maura Guerrera, Sicilienne de Marseille et Malik Ziad, Algérien des deux rives.C’est parmi les chants et les rythmes de la tradition paysanne sicilienne et à par-tir d’enregistrements de collectage que Maura Guerrera a sélectionné les dix morceaux qui composent l’album. Son timbre, imprégné de la tradition vocale de son île d’origine, épouse naturellement la mandole et le guembri de Malik Ziad. Au croisement de l’académisme et de sa transmission dans les pratiques popu-laires, la couleur musicale de Spartenza incarne l’esprit voyageur de ces pièces à travers les siècles. Le parcours de Maura

auprès de noms aussi emblématiques que celui de Giovanna Marini prend ici corps dans un subtil mélange d’exalta-tion et de douceur. Expressions d’es-poir, de dépit et de désirs, les chants trouvent dans les rythmes d’Italie in-sulaire mais aussi les influences gnawa et chaâbi portées par l’autodidacte Ziad

une dimension spa-tio-temporelle hyp-notique. La création, également trans-posée à la scène, a reçu les conseils artistiques éclairés de Manu Théron, qui a aussi posé sa voix, et de Grégory Dargent. Un gage supplémentaire de qualité.

L.T.

Spartenza Maura Guerrera et Malik ZiadRadici music records

© Radici music records

CDdu mois

cinéma 103

Plogoff, des pierres contre des fusils

En mai dernier, la montée des marches à Cannes par le vieux tandem fi-nistérien Nicole et Félix Le Garrec

avait fait sensation. Leur film, Plogoff, des

pierres contre des fusils, restauré d’après le scan des négatifs, 40 ans après sa sor-tie en 1981, tourné et produit sans aide financière grâce à l’hypothèque de leur maison bigoudène, était sélectionné par Cannes Classics, côtoyant Huston, Gré-millon et Wajda ! Film patrimonial où

la caméra de Nicole et l’appareil photo de Félix se placent au cœur du combat des Bretons contre l’installation d’une centrale nucléaire sur la pointe du Raz.

Du 31 janvier au 14 mars 1980, paysans, commer-çants, pêcheurs, retrai-tés de l’armée, hommes, femmes, vieillards, en-fants organisent une ré-sistance dont le symbole devient le lance-pierre porté au cou, brandi face aux gardes mobiles di-ligentés en masse pour mater les subversifs. Des pierres lancées sur les boucliers. Des milliers de David sans peur, tê-

tus, parlant français ou breton, tenaces, solidaires, forts de leur droit de détermi-nation, contre les Goliath du pouvoir, cas-qués, aveugles et muets, perçus comme des envahisseurs. À travers témoignages, voix off, reportage live des affrontements dans la fumée des lacrymos, juxtaposant

scènes intimistes et collectives, mouve-ments de foule et arrêts sur images, le film suit le crescendo des événements : du boycott de l’enquête d’utilité publique sensée tenir compte de l’avis des popu-lations à l’état de guerre instauré par l’État. Ce documentaire patiné par le temps auquel le festival cannois a donné une seconde vie est précieux à plusieurs titres. D’abord parce qu’il représente un vrai document historique d’avant le temps des portables et des réseaux, en-suite parce qu’il rappelle que le cinéma peut être un outil de combat, enfin parce qu’il raconte une lutte qui finit bien - le projet de la Centrale sera retiré après l’élection de Mitterrand en 81. Même si rien n’est résolu pour le nucléaire et que la région comme d’autres affronte aujourd’hui bien d’autres dangers éco-logiques, un peu d’optimisme politique ne fait pas de mal !

ELISE PADOVANI

Plogoff, des pierre contre des fusils de Nicole et Félix Le Garrec est sorti le 12 février (1h35)

Deux«J

’aime commencer mes films par une scène qui va mettre le spectateur

dans un état propice à l’hypnose. Je voulais créer un espace mental que Nina et Madeleine, mais aussi le spectateur, partageraient » explique Filippo Mene-ghetti, réalisateur du superbe film Deux. Une scène onirique qu’on met, il est vrai, du temps à rattacher au reste du récit. Nina (Barbara Sukowa) et Madeleine (Martine Chevallier) sont deux retrai-tées, profondément amoureuses l’une de l’autre depuis vingt ans, qui vivent officiellement sur le même palier, mais en fait, ensemble chez Madeleine depuis qu’elle a perdu son mari. Madeleine ne parvient pas à annoncer à ses deux grands enfants Anne (Léa Drucker) et Frédéric (Jérôme Varanfrain) qu’elle a le projet de vendre son appartement pour partir vivre en couple à Rome, ce qui met Nina très en colère. Mais l’heure n’est pas aux reproches quand Madeleine, victime d’un accident cardiovasculaire, se retrouve à l’hôpital puis en convalescence, chez

elle, prise en charge par ses enfants puis confiée à une aide-soignante (Muriel Be-nazeraf), véritable cerbère. Nina essaie de s’immiscer, sous le prétexte de l’ami-tié de voisinage, dans le lent processus guérison de Madeleine mais c’est loin d’être simple. Les voilà donc toutes les deux empêchées, l’une par la maladie, l’autre par les non-dits. Comment se libérer ? Comment sortir de cette pri-son du regard des autres ? « Ce film qui pourrait être un mélodrame, je l’ai tourné comme un thriller et comme l’a dit mon chef opérateur [Aurélien Marra], c’est un “thriller de mœurs” » Dans une mise

en scène subtile, utilisant ellipses et al-lusions, filmant les corps et les objets en gros plans pour permettre au specta-teur de projeter des choses de sa propre vie, Filippo Meneghetti réussit à parler avec émotion du poids qu’a le secret au sein des familles, du regard des autres mais aussi du regard sur soi-même. Le cinéaste qui avait déjà réalisé plusieurs courts signe ici un premier long parfai-tement maitrisé.

ANNIE GAVA

Deux, de Filippo Meneghetti est sorti le 12 février (1h35)

Film du mois

Film du mois

© Paprika films-Tarantula Artemis production

© Félix Le Garrec

104 cinéma

Sous le signe de l’églantine

10 Boulevard du président Kennedy, ancienne école Giono, QG des Gilets Jaunes d’Aix, est projeté,

avec la complicité des Déconnomistes et de Dany Bruet, le film documentaire d’Olivier Azam et Laure Guillot, Une histoire de la grève générale - De la Com-mune au Front Populaire (2011), pro-duit par Les Mutins de Pangée. Y in-terviennent avec une précise pertinence les historiens Miguel Chueca (auteur de Déposséder les possédants-La grève générale aux temps héroïques du syn-dicalisme révolutionnaire (1895-1906)) et Charles Jacquier (chargé de la col-lection Mémoires sociales aux éditions Agone). Le sujet est d’actualité, une tire-lire est proposée pour soutenir les gré-vistes d’aujourd’hui. Le présent nous ren-voie aux commencements de la prise de conscience ouvrière et ce documentaire, qui s’appuie sur des archives rares, per-met un éclairage passionnant de l’his-toire des luttes par une contextualisa-tion des mouvements ouvriers, au cœur

de l’histoire du XIXe siècle, qui donne à comprendre les clivages qui perdurent. Ainsi, l’incompatibilité atavique entre réformistes et révolutionnaires, entre Jean Jaurès et Émile Pouget. La grève ne fut pas, malgré les idées reçues, la pre-mière stratégie de revendication pour

les ouvriers au XIXe, mais un pis-aller. Ainsi, Proudhon n’en était pas partisan. Le documentaire évoque La Commune, sa conclusion sanglante, terrible, mais aussi les grands principes qui en dé-coulèrent. Des figures émergent, Joseph Tortelier, menuisier, militant anarchiste

Olivier Azam et Laure Guillot, Une histoire de la greve generale - De la Commune au Front Populaire © Les mutins de la pangée

L’État Sauvage

David Perrault confirme, après Nos héros sont morts ce soir, son goût de l’époque

comme révélateur d’un espace, d’un territoire à inventer. Aux années 60 esquissées par ce premier film succède

une réappropriation par le cinéaste des codes d’un genre particulièrement tra-vaillé par ces questions : le western, lieu des possibles, devenu, au gré de ses plus récentes relectures, celui de la rédemp-tion. Si les personnages de L’État Sauvage

se voient ici contraints à une traversée, elle se déroule ici à rebours des itinéraires habituellement dépeints par le genre. La famille, installée à la Nouvelle-Orléans, n’est pas anglo-saxonne mais franco-phone ; elle se doit non plus de conqué-

rir la terre promise, mais de revenir vers son Paris natal ; elle est, enfin, à l’exception du patriarche, composée unique-ment de femmes. Dépeintes à merveille par Alice Isaaz, Deborah François et Maryne Bertieaux, les trois figures de jeunes filles oscillent entre un idéal européen romantique et celui, plus rance et ambigu, de la Belle du Sud. Face à elles, Kevin Janssens ne peut qu’in-carner à son tour une anima-lité en voie d’extinction.Redoutablement contemplatif, fort d’une photographie à se damner, L’État Sauvage peine cependant à toujours donner

Film du mois

© Pyramide distribution

et syndicaliste révolutionnaire qui plaida pour la « révolution des bras croisés », Émile Pouget, syndica-liste révolutionnaire, fondateur du journal libertaire Le Père Peinard, et qui participa à la rédaction de la Charte d’Amiens. Ce texte fon-dateur, adopté par la Confédéra-tion Générale du Travail (CGT) en 1906 est le seul encore aujourd’hui à théoriser dans une perspective large l’action syndicale. On revit la catastrophe de la mine de Cour-rière, le midi rouge, la création des Bourses du travail, le Front popu-laire qui accorde la journée de huit heures et les congés payés, poussé par les grèves que l’on qualifiera

de « joyeuses »… Magistral ! MARYVONNE COLOMBANI

La projection d’Une histoire de la grève générale - De la Commune au Front Populaire (2011) a eu lieu le 12 janvier dans l’ancienne école Giono, Aix-en-Provence

Olivier Azam et Laure Guillot, Une histoire de la greve generale - De la Commune au Front Populaire © Les mutins de la pangée

Tu mourras à vingt ansAmjad Abu Alala signe à grand fracas le retour du cinéma soudanais

corps à ses personnages et à rythmer son ac-tion. La musique, particulièrement répétitive, nuit quelque peu aux pourtant nombreux mo-ments de grâce. La Madeleine de Constance Dollé est notamment cruellement sous-ex-ploitée, quand le trio de tête se résume trop souvent aux atermoiements de la jeune Es-ther. Demeurent cependant, au sortir de la salle, des images envoûtantes.

SUZANNE CANESSA

L’État sauvage de David Perrault sortira le 26 février (1h58)

Avec Tu mourras à vingt ans, Amjad Abu Alala est re-venu de Dubaï, où il avait fait ses premières armes, à son Soudan natal. Avec pour projet, pour son premier

long-métrage, de mettre en images le texte d’un autre exilé : Hammour Ziada. Ce dernier, établi en Égypte depuis son

bannissement, y dénonçait une société soudanaise sclérosée, hantée par la mort dans ses moindres recoins. Tu mourras à vingt ans est nimbé de cette torpeur suffocante, de cette résignation froide et implacable. L’image, aux couleurs sublimes, l’enrichit cependant d’une luminosité diaphane. Elle donne à ce récit des allures de conte, de réalisme magique. On y suit le jeune Muzamil de sa naissance à ses vingt ans, âge auquel un cheikh soufi a prévu sa mort précoce. L’itinéraire de cet enfant maudit, vivant avec ses proches dans l’attente de sa propre fin, y devient à la fois tangible et métaphorique. Le père de Muzamil - Talal Afifi, impressionnant - fuit le domicile familial dès la prédiction du cheikh ; sa mère - formidable Islam Mubarak - porte le noir du deuil en prévision de cette mort cer-taine et exclut son fils de l’école. À quoi bon lire, en attendant la mort, autre chose que le Coran ? Tenté par l’amour de sa jeune voisine Naima - ravissante Bunna Khalid - puis par le désir d’indépendance prodigué par le libéré Suleiman, Muzamil demeure pétrifié par l’immanence de sa fin. L’espoir réside ailleurs : dans la belle alchimie qui a donné lieu à ce désir contagieux de cinéma, et qui a les traits et la jeunesse de Mustafa Shehata. Puis dans le film même : ce premier long-métrage est en effet le premier du Soudan depuis deux décennies. Il signe, dans une heureuse convergence éphéméride, la fin du régime islamique d’Omar Al-Bashir.

S.C.

Tu mourras à vingt ans de Amjad Abu Alala est sorti le 12 février (1h45)

Film du mois

© Pyramide distribution

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© Carole Bethuel

106 cinéma

Il était une Première foisLa Première fois, Festival du Premier Film Documentaire de Marseille déclinera sa 11e édition aux cinémas Les Variétés, La Baleine, le Vidéodrome 2, le Polygone Étoilé et, nouveauté, aux Baumettes

La fine équipe de bénévoles, animés par l’énergie de leur jeunesse et le goût commun d’un cinéma connecté à la ré-alité contemporaine, a sélectionné 15 films parmi les 350

reçus. De tous formats : de 12’ pour le film-poème d’Alexandre Carré Comment filmer un arbre, à 88’ pour celui de Guil-lermo Quintero, Homo Botanicus, qui nous plonge dans la jungle colombienne. De tous dispositifs : montage d’archives dans Les Maisons qu’on était d’Arianna Lodeserto retraçant la lutte des femmes et des ouvriers pour le droit au logement à Rome, ou col-lage YouTube dans Clean with me (After Dark) de Gabrielle Stemmer où des centaines de femmes se filment en train de faire le ménage chez elles. De tous lieux : de la zone de stoc-kage des déchets de Gardanne dans Car les Hommes passent d’Assia Piqueras et Thibault Verneret à la Chine rurale rat-trapée par la spéculation immobilière dans Une Nouvelle Ère de Boris Svartzman en passant par la lune dans La forêt de

l’Espace de Victor Missud. Une sélection de films partageant une vision bienveillante de l’humanité : les deux coursiers Omar et Marwen qui pédalent pour leur survie dans un Paris ubérisé (La Guerre des centimes de Nader Ayach), les 5 déte-nues du Centre Pénitentiaire de Réau qui, le temps d’un film,

Guillermo Quintero, Homo Botanicus © Stank

Un Divan à Tunis

Dans Ma chambre à moi, court-métrage de Ma-nele Labidi, l’héroïne

investissait les toilettes de son appartement exigu pour se ménager un espace de travail au grand dam de son compagnon. La protagoniste d’Un Divan à Tunis, premier long-métrage de la ré-alisatrice franco-tunisienne, va créer le sien sur le toit d’une maison au grand dam de ses habitants. Produit à partir du scénario pour lequel Manele Labidi avait obtenu le Prix Sopadin en 2017, Un divan à Tunis (Arab blues) est l’histoire d’un retour au pays. Selma Derwish, cé-libataire de 35 ans, immigrée en France depuis l’enfance, est convaincue que sa

Film du mois

questionnent leur attente (5 femmes de Sandrine Lanno), le livreur de légumes dans sa fourgonnette à Athènes (Le Panier de Cilia Martin). Des films mêlant l’intime et l’histoire col-lective : les souvenirs d’enfance en Sicile et les camps de clan-destins (Notre Territoire de Mathieu Volpe), une grand-mère

malade et le bond en avant de la Chine (Un Tigre court dans la Montagne de Nicolas Vimenet), un grand père et son passé nazi (À la Poursuite du vent de Julia Clever) …La Première fois, c’est aussi des actions scolaires, des accom-pagnements de projets avec Premier Jet, une Carte Blanche à Copie Carbone pour une création sonore originale, et des partenariats. Celui avec AFLAM donnera l’occasion de (re)voir le 5 mars La Voie Normale de Erige Sehiri, portraits croisés de 5 cheminots tunisiens affectés à la ligne la plus délaissée du réseau et de finir la soirée à la Brasserie Communale pour un concert inédit du rappeur algérien Diaz. Il y aura même des « deuxièmes fois », réalisées par des cinéastes découvert-e-s dans les éditions précédentes !L’Invitée d’honneur, Alessandra Celesia dont on pourra voir Mirage à l’italienne et Le Libraire de Belfast, et qui offrira une master class publique animée par Jean Boiron-Lajous, ou-vrira la manifestation le 3 mars aux Variétés avec Anatomia del Miracolo : Naples, une Madone meurtrie, trois femmes liées par leurs propres blessures.« Sourire et reprendre espoir » c’est l’ambition de ces rencontres : de quoi se réchauffer ensemble dans l’attente du Printemps.

E.P.

La Première fois, Festival du premier film documentaire3 au 8 marsDivers lieux, Marseille

festival-lapremierefois.org

Il était une Première fois

Guillermo Quintero, Homo Botanicus © Stank

Un Divan à Tunisplace de psychanalyste n’est pas chez des bourgeois parisiens mais dans la banlieue populaire de Tunis. Après la chute de Ben Ali, libérer la parole, se re-garder, s’accepter, ce n’est pas rien ! Et allonger sur le divan une société parta-gée entre les archaïsmes, les mauvaises habitudes héritées du passé et les aspi-rations à la liberté de tout un chacun, sous l’œil sévère de papa Freud, un Juif dont la barbe laisse penser aux patients qu’il est un Frère Musulman, c’est un boulot nécessaire ! Le succès de Selma en atteste d’ailleurs, malgré les tracas-series administratives du nouvel « État de Droit » et les rumeurs malveillantes qui la pousseront un temps à renoncer.

La réalisatrice choisit de caricaturer avec bienveillance et tendresse, jusqu’au gro-tesque, la schizophrénie et les dénis de son pays tout en soulignant l’énergie, la joie et la force des Tunisiens. Le di-van délimite un champ opératoire qui permet une suite de portraits rappro-chés s’opposant aux champs plus larges des paysages urbains ou périurbains. Un boulanger à la féminité refoulée, un iman glabre ostracisé, une coiffeuse pé-tillante aux rêves noirs, une ado rebelle, un flic ambigu flanqué de deux benêts incultes dignes des Gendarmes de Jean Girault. Silhouette décontractée, cheveux hirsutes, regard doux, Selma incarnée par Golshifteh Farahani, traverse ce

petit monde. Retrouvant ses racines et ce qu’elle a fui, elle pourra se projeter dans un futur. Est-ce la couleur médi-terranéenne, la canzone de la première séquence, le mélange d’arabe et d’un français musicalisé par l’accent, la façon de typer les personnages ? Il y un côté pagnolesque ici. Avec Un Divan à Tunis, Manele Labidi signe une comédie popu-laire qui s’assume.

ELISE PADOVANI

Un Divan à Tunis, de Manele Labidi est sorti le 12 février (1h28)

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écoutesécrans

Concert Beethoven - Berliner PhilharmonikerLe West-Eastern Divan Orchestra vient de fêter ses vingt ans. Fondé par

l’argento-israëlien Daniel Barenboïm et par l’américano-palestinen Edward Saïd, il se fixait alors pour mission de promouvoir la paix entre Juifs et Arabes. Et se plaçait dans la lignée de Goethe et de son recueil de poèmes, Le Divan occidental-oriental, à mi-chemin entre

les traditions de la poésie persane et du lyrisme allemand, qui a considérable-ment influencé le Romantisme musical. Quoi de mieux, pour célébrer ce triple ancrage, que le Triple Concerto de Beethoven ? Daniel Barenboïm y adopte la double casquette de chef et de pianiste soliste qui est devenue sa signature, et dialogue divinement avec le violon d’Anne-Sophie Mutter et le violoncelle de Yo-Yo Ma. L’orchestre, particulièrement sollicité sur le second mouvement, as-sure des finitions tout aussi admirables.

Disponible sur arte.fr jusqu’au 9 mars

Tristan et IsoldeOn retrouve Daniel Baren-boïm à Berlin, mais cette fois-ci dans la fosse du Staat-soper. Au programme, l’opus

wagnérien par excellence, Tristan et Isolde. Dès l’ouverture, la direction de Barenboïm fait merveille : elle de-meure incandescente, là où la mise en scène de Dmitri Tcherniakov désa-morce le mythe pour mieux déplacer l’émotion. Sur la scène, devenue un

intérieur bourgeois, la distribution vocale compte parmi les meilleures de ces vingt dernières années. L’Isolde d’Anja Kampe est inoubliable, et le Tristan d’Andreas Schlager a lui aussi fait vaillamment ses preuves. Penser à préparer ses mouchoirs pour l’Acte III…

Diffusion le 24 février à 00h05 sur France 2Disponible du 17 au 31 février

sur francetvinfo.fr/culture

Les couilles sur la tableOù l’expression requérant d’un homme d’attester vigoureusement et cliniquement de sa virilité se voit savamment détournée : il s’agit ici d’examiner au plus près les mécanismes du masculin. Et plus précisé-ment, d’en rendre compte du point de vue des femmes, et d’interroger

plus largement le genre. Lancé en 2017, le podcast de Victoire Tuaillon cumule depuis 500 000 écoutes mensuelles. Son succès est avant tout dû à la qualité des échanges, que son format, ample mais resserré, permet. La récente interview de Maïa Mazaurette, ou encore l’entretien-fleuve de Virginie Despentes sont tout bonnement passionnants. De quoi mettre du baume au cœur des féministes de tous poils.

À écouter sur binge.audio/category/les-couilles-sur-la-table/

Focus Daniel Barenboïm

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Fierté(s) Diffusée pour la première fois en 2017, la série de Philippe Faucon raconte trente ans de combats LGBT en trois épi-sodes : la dépénalisation de l’homosexualité en 1982, l’ins-tauration du PACS en 1999 et la légalisation du mariage ho-

mosexuel en 2013. Cette lutte pour l’égalité est ici traitée à travers le parcours individuel de Victor : de l’affirmation de son identité à son désir d’enfant, le temps long de la série permet au récit de toucher à une ampleur inédite. Le casting, qui voit se succéder Benjamin Voisin, Samuel Theis dans le rôle de Victor et Stanislas Nordey dans celui de son compagnon, n’est pas pour rien dans cette réussite.

Diffusion sur Arte le 27 février à 20h50Disponible sur arte.fr du 20 février au 20 mars

La ReligieusePrès de cinquante ans après l’adaptation maudite de Jacques Rivette, Guillaume Nicloux s’est attaqué, en 2013, au roman-mé-

moires de Diderot. Il s’approprie ainsi à son tour ce brûlot anticlérical. Le por-trait de Suzanne Simonin, adolescente contrainte d’entrer dans les ordres pour expier sa faute originelle - être née il-légitime - se pare ici des obsessions du cinéaste. La religieuse y devient non

seulement martyre du conservatisme chrétien, mais également une indivi-dualité en voie de construction, dont la foi n’est plus qu’accessoire. Une ode discrète, mais tenace, à l’indépendance et à la révolte.

Diffusion sur Arte le 19 février à 21hDisponible sur arte.fr du 19 au 25 février

La Belle Saison« Le public a vu son film lesbien avec La Vie d’Adèle, pas besoin d’un deuxième ». La cinéaste Catherine Corsini ne s’est heureusement pas laissée découra-ger par ces considérations imbéciles, et a signé avec

La Belle Saison une romance particulièrement tendre sur fond de parenthèse enchantée. La militante MLF campée par Cé-cile de France y rencontre la plus modeste Delphine, qui a le naturel et la gouaille d’Izïa Higelin. Lumineux.

Diffusion sur Arte le 4 mars à 20h55Disponible sur arte.fr du 4 au 10 mars

Zibeline partage ses morceaux choisis109

écoutesécrans

L’économie de la mortL’excellente série Entendez-vous l’éco  ?, diffusée sur France Culture, revient chaque jour à 14h sur un pan méconnu de

l’économie, en vue d’ouvrir le champ du débat autour d’une science trop peu vul-garisée. En janvier dernier, l’animatrice Tiphaine de Rocquigny se saisissait de manière facétieuse du Blue Monday (ré-puté le jour le plus déprimant de l’année) pour ausculter l’économie de la mort, un sujet encore tabou dans la société fran-çaise, décliné en trois épisodes. Entre tour d’horizon des lois régissant l’héri-tage et panel des inégalités sociales face

à la mort, on prêtera une oreille parti-culièrement attentive au deuxième épi-sode, consacré au marché des funérailles. Longtemps réservé à l’Église, le marché est désormais ouvert à la concurrence, mais pâtit encore d’un manque flagrant de transparence sur ses pratiques. La sociologue Pascale Trompette, direc-trice de recherche au CNRS, y expose avec brio un historique du sujet, tout en analysant ses enjeux financiers, sa-nitaires et symboliques.

Àréécouter sur franceculture.fr/emissions/series/economie-de-la-mort

Traits d’union.sFin janvier, Manifesta 13 Marseille inaugurait la série de rencontres Traits d’union.s. Tous les quinze jours dans son espace d’accueil situé sur la Cane-bière, deux personnalités issues du monde de la culture, de la sphère éco-nomique ou de la société civile se retrouvent pour échanger en public au-

tour de questionnements soulevés par la Biennale d’art contemporain. La première rencontre réunissait l’artiste espagnol Jordi Colomer, féru de dystopies urbaines, et Jean-Pierre Rehm, directeur du FID à Marseille. La deuxième se focalisait sur l’univers du musicien Raphaël Imbert. Les dix entretiens sont à retrouver au fil du temps sur le site de Radio Grenouille.

Agenda des rencontres sur manifesta13.org/fr/espace-manifestaÀ réécouter sur radiogrenouille.com

DiscordiaEn novembre 2017, un article du New York Times révélait les pratiques frauduleuses de Louis C.K. Cet irrésistible comique,

roi du stand up américain connu notam-ment pour narrer ses déboires amou-reux, se masturbait devant certaines aspirantes comédiennes en quête d’une entrée dans le métier… Comment « re-fait-on le match » après l’annonce ? Le débat fait rage actuellement, et le temps de parole accordé par Discordia - 1h30 chaque mois sur un sujet de société - a

le mérite de laisser la réflexion chemi-ner entre ses intervenants, sans faire l’impasse sur leurs hésitations, para-doxes ou contradictions. De cet épisode 26, on retiendra que la comique Pamela Adlon, coscénariste avec Louis C.K. de séries emblématiques telles que Louie, constituait peut-être la meilleure moitié du duo, et l’on s’empressera d’aller redé-couvrir son excellente série Better Things.

À réécouter sur podcast.ausha.co.

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SÉLECTION DE JULIE BORDENAVE ET SUZANNE CANESSA

MagicosQui n’a jamais rêvé de percer le fascinant - et agaçant - secret des tours de cartes ou des prétendues divinations ? En huit épisodes, Guillaume Natas ausculte le métier de magicien, mystérieux s’il en est. Auprès de praticiens - prestidigitateurs ou mentalistes de toutes générations - le

journaliste, lui-même féru d’illusionnisme, revient sur des questions fondamen-tales : qui invente vraiment les tours de magie ? Comment devient-on magicien ? Pourquoi si peu de femmes dans le milieu de la magie ? Au fil des épisodes, on navigue dans les coulisses du métier, de la vocation aux rudiments de l’initiation, des premiers tours dans les cabarets aux entraînements quotidiens... Consacré au mentalisme, le 5e volet s’avère particulièrement passionnant, convoquant la zététique (apologie du scepticisme) pour décortiquer les ressorts et dérives d’une pratique qui nécessite une éthique de fer pour ne pas verser dans le charlatanisme ou le sectarisme.

À réécouter sur slate.fr/podcasts/

L’avocat des terreursAlexandre Luc-Walton, jeune avocat au barreau de Paris, dé-fend depuis 2015 des individus radicalisés. Or, « défendre les

terreurs, c’est inaudible », comme l’étaie la documentariste Camille Juzeau. Avec beaucoup de délicatesse et de pertinence, les sept épisodes de cette série docu-mentaire passent en revue les nombreux questionnements qui agitent cet épineux fait sociétal. L’avocat y évoque notam-ment la difficulté de convoquer la notion de « défense de rupture », qui consiste à s’opposer à la légitimité du tribunal en train de juger : renie-t-on les valeurs républicaines quand on défend un dji-hadiste ? Sont également abordés les

enjeux du procès d’Abdelkader Merah - éviter que la cour ne se transforme en une arène, pour ne pas faire le jeu des ennemis de l’État de droit ; la réalisa-trice nous emmène aussi dans les pri-sons pour radicalisés, ou s’interroge sur la part allouée aux femmes dans les ré-seaux terroristes. Cinq ans après l’onde de choc des attentats, et tandis que la France accueille ses premiers ressortis-sants radicalisés en provenance de Sy-rie, un regard indispensable sur l’aspect judiciaire du terrorisme, et ses ramifi-cations éminemment philosophiques.

arteradio.com/serie/l_avocat_des_terreurs

Claude Ponti et Tomi UngererTandis que l’École des Loisirs sort le 4e numéro de son ma-gazine Grand (disponible gra-tuitement en librairie, ou à té-

lécharger sur son site), l’éditeur propose une belle rencontre vidéo entre deux monstres sacrés de la littérature jeune public, Claude Ponti et le regretté Tomi Ungerer. Les deux auteurs étudient avec pudeur les liens imperceptibles qui pour-raient les lier, tous deux nés au pied des Vosges, et ayant subi une enfance trauma-tisante. Où l’on apprend ainsi qu’intimé

au silence par un inceste subi durant son enfance, Claude Ponti a attendu l’âge 37 ans pour écrire, émancipé par la nais-sance de sa fille Adèle. L’échange s’achève sur une tendre pirouette : chaque auteur s’approprie l’icône de l’autre, à savoir un poussin et un brigand revisités.

À voir sur ecoledesloisirs.fr/grandÉcouter des lectures à voix haute

sur media.ecoledesloisirs.fr/lecture-voixhaute/nv/index.php

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C’est à l’occasion de la Journée mondiale des zones humides que le Bureau des guides organisait dé-but février une balade dans la plaine de Hyères, de Costebelle à la Lieurette. Si la ville - deuxième

commune du Var par sa superficie, comptant 600 hectares de friches - n’est pas avare, en son cœur, de joyaux de toutes sortes (Villa Noailles, Maison Godillot…), il s’agissait cette fois d’orienter son regard vers le méconnu, pour mieux ré-véler trésors cachés et paradoxes d’un paysage en mutation. C’est tout le lot de l’association MALTAE - Mémoires à lire, Territoires à l’écoute - dont la fondatrice Odile Jacquemin guidait ce jour-là les 24 promeneurs, aux côtés du géographe urbaniste Paul-Hervé Lavessière, membre du Bureau des Guides, dont l’antenne varoise œuvre actuellement à la pré-figuration d’un sentier de randonnée métropolitain, sur le modèle de son grand frère le GR2013.

L’ascension de Costebelle Abandonnant la gare pour cheminer par un petit sentier en plein cœur de la Colline aux mimosas, l’on y croisait les ves-tiges d’une église anglicane, témoignage d’une époque où Hyères damait le pion à sa voisine la Riviera. Dans le sillage

de la Reine Victoria, qui avait pris ses quartiers d’hiver dans la ville en 1892, les aristocrates anglais abandonnaient les pentes de la niçoise Cimiez pour se tourner vers le littoral varois (un musée est dédié à la Reine et l’art de vivre de l’époque, route

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Hyères, le paradoxe des zones humides

Dans le cadre du programme européen

Nature 4 City Life, emboîtons le pas

de l’antenne varoise du Bureau des

Guides pour un tour dans les zones

humides de la plaine de Hyères

Vestiges église anglicane © Jean Belvisi

Parc forain dans la zone non droit © Jean Belvisi

de Pierrefeu). Malgré son centre-ville situé à 4 kilomètres de la mer, Hyères amorçait alors sa transition saisonnière, glissant lentement d’un tourisme hi-vernal - bains de mer pour raisons sa-nitaires - au tourisme estival, eu égard à l’héliotropisme émergent. D’un siècle à l’autre, la ville asseyait les deux socles qui allaient assurer son essor : la santé

et le tourisme. Au sommet de Costebelle, le parvis de Notre-Dame de Consolation (lire encadré) s’ouvre sur un sublime panorama, permettant d’embrasser du regard la topologie inouïe d’Hyères : son double tombolo, enserrant de ses frêles bras les salins menant à la presqu’île de Giens. En toile de fond, les îles du Le-vant - Porquerolles, Port Cros, Levant.

Plaine et zone de non droit Descendant par la Voie Romaine, le groupe repiquait ensuite vers la plaine pour y longer les rails de l’ancienne ligne PLM - cette mythique voie ferrée Paris Lyon Méditerranée, créée en 1857, pré-misses d’un tourisme de masse qui al-lait exploser au siècle suivant. À travers

champs, c’est le passé horticole qui fut évoqué : la culture du ver à soie, les pé-pinières Decugis… assorti de la dégusta-tion de quelques fleurs de bourrache sur le chemin. En bifurquant sur la gauche, l’on rejoignait le Canal de Provence pour y déceler les traces d’une agriculture in-tensive de la deuxième moitié du XIXe siècle, visible notamment par quelques

fantasques serres abandonnées. Vient ensuite la traversée d’une « zone non droit » menant vers la plage. Un terri-toire confus, rétif à toute lecture claire du paysage, où se mêlent marché aux puces, chemins hâtivement privatisés, parc forain endormi en basse saison et na-ture reprenant farouchement ses droits. Sur la droite, un haut monticule végéta-lisé, stigmates d’une ancienne décharge abandonnée au moment de la construc-tion de l’aéroport civil dans les années 70 : ayant atteint 22 mètres, elle gênait la circulation des avions ! Cette incur-sion dans la plaine hyéroise, en plein cœur du secteur du Palyvestre, était l’oc-casion de s’immerger dans la dernière grande zone humide d’importance avant la Camargue et le Delta du Po, dont 900 hectares appartiennent désormais au Conservatoire du Littoral.

Coquelicot des mers Place ensuite à une traversée du parc de l’Institut Hélio marin, édifié au début du XXe siècle, puis augmenté dans les an-nées 50 d’un lazaret commandé à l’ar-chitecte Maurice David, fier témoignage d’une mouvance cubiste aujourd’hui un brin décrépie. L’édifice prend place face à l’ancienne gare d’Hyères-Plage, fer-mée depuis les années 40. Elle devait sa création à l’influent entrepreneur Alexis Godillot, créateur des célèbres croque-nots militaires, qui marqua de son em-preinte le développement de la ville. On lui doit notamment l’essor du quartier de la Plage, qui abrita l’une de ses cé-lèbres demeures dont les fastes égayent aujourd’hui encore le centre-ville (Villa

Hyères, le paradoxe des zones humides

Notre-Dame de ConsolationC’est un époustouflant édifice qui se dévoile au promeneur, à l’issue d’une petite ascension de la colline de Costebelle. Lieu de pèlerinage majeur dès le bas Moyen-Âge, Notre-Dame de Consolation est détruite par les bombardements allemands de 1944. En 1952, sa reconstruction est confiée à l’architecte hyérois Raymond Vaillant, qui utilise alors du calcaire local, extrait de la carrière de Costebelle. Les facétieuses sculptures en ciment brut de Jean Lambert-Rucki - membre de l’Union des artistes modernes fondée par Robert Mallet-Stevens - et les magistraux vitraux du maître verrier Gabriel Loire, illu-minant une nef volontairement dépouillée, en font une éton-nante pièce, troublant mélange d’architecture rationaliste et d’art brut. Devant le chevet de l’église, trône le vestige d’un miracle profane : la statue du clocher originel, ayant été re-trouvée intacte au milieu des décombres.

Vestiges église anglicane © Jean Belvisi

Parc forain dans la zone non droit © Jean Belvisi

© Jean Belvisi

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114 balade

Tunisienne, Villa Mauresque, manège…). Enfin, une halte sur la Plage du Jardin des mers jouxtant le Port Saint-Pierre permettait de faire un état des lieux. « L’aménagement se lit sur cette portion de plage, où se distinguent nettement la stratégie de zonage entre port, aéroport et Parc National », détaillait Odile Jac-quemin. Les années 70 virent en effet à Hyères l’ouverture de l’aéroport ci-vil, simultanément à la naissance du Conservatoire du Littoral. Sur la plage, les nombreuses feuilles de posidonie échouées sur le sable, mêlées aux sédi-ments du Gapeau, témoignent des en-jeux contradictoires régissant le site.

« Les zones humides à Hyères constituent un paradoxe permanent. La posidonie en est le symbole, au même titre que le co-quelicot sur les bords des routes ! Mal-gré leur utilité avérée contre l’érosion, les municipalités continuent de les enfouir, par souci esthétique. Il est nécessaire de sensibiliser et d’éduquer le public à cette cause », soulignait Christine Sandel, océanographe membre de MALTAE.

Paradoxes à ciel ouvert Enserrée entre l’Ayguade et le port, un nouveau paradoxe éclate depuis peu à ciel ouvert : la Promenade du front de mer, inaugurée en 2019, après 9 mois

de travaux et 5 millions d’euros d’investissement de la part de TPM. Le long du boulevard de la Marine, la route fut repoussée de quelques mètres pour offrir un espace piétonnier aménagé, privilégiant les modes de dépla-cement doux. Certes, la balade est aujourd’hui largement em-pruntée, et renoue avec un fan-tasme longtemps enfoui dans l’inconscient collectif : la Pro-menade des Palmiers, qui tenait la dragée haute à la Promenade des Anglais à la Belle Époque. Mais la précipitation est mau-vaise conseillère, et la durée de vie de ce lourd équipement

sera fatalement limitée, le site ayant été identifié comme l’un des plus extrêmes en termes de risque inondation. Une ex-pertise qui suscite la crainte du maire Jean-Pierre Giran, lequel redoute une « paralysie » des chantiers à mener pour l’Opération Grand Site visant à requali-fier le littoral hyérois.Tournant le dos à la plage, la balade at-taquait les derniers arpentages le long du Roubaud dans la zone humide de la Lieurette, lieu de promenades d’ob-servations organisées régulièrement par la Ligue de Protection des Oiseaux, qui y dispose d’un refuge depuis 2014. Suivant la ligne de crête du verdoyant Massif des Maures en toile de fond, la balade s’acheva par une visite chez JHADE - Jardins d’Hyères, Aujourd’hui pour Demain -, jardin solidaire situé en zone inondable non constructible, ou-vert en 2010 par Dominique Viau qui y cultive un projet d’agriculture solidaire et biodynamique.

JULIE BORDENAVE

Bois la Lieurette © Julie Bordenave

Lire, regarder, arpenterBatailles en bord de mer, Christian Desplats, Document, 2015

Habiter les pentes du littoral varois, Odile Jacquemin, Jean-Louis Pacitto, Christian Girier, DVD MALTAE, 2001-2004

Deux siècles d’un paysage entre terre et mer, Hyères de 1748 à nos jours, Odile Jacquemin, MALTAE, 2010

L’ouragan, Jean-Marc Ligny, in Nouvelles d’une ville, Valdé et autres lieux d’Hyères, MALTAE, 2000

Quand Giens redeviendra une île, Claire Moissard, consultable aux Centres de documentation de MALTAE et de l’École nationale du Paysage de Versailles

Prochaines balades : gr2013.fr et maltae.org

Voyage Voyages

Tarek Atoui

J4 Exposition 22 janvier—4 mai 2020

Artiste invité 2019-2020

La salle des sonsAteliers « Transmitters »Les samedis et dimanches Du 1er au 29 mars, de 14h à 17h, entrée libre

Temps du documentaireSoirée spéciale Tarek AtouiLundi 9 mars, 19h, projection en entrée libre En partenariat avec Tënk

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Avec le soutien de En partenariat avec

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Salle des Musiques Actuelles du Pays d’Aix

6mic-aix.fr160 rue Pascal Duverger 13090 Aix-en-Provence

UNE NOUVELLEÈRE SONORE

Votre salle de concert à Aix - Ouverture Mars 2020