l'interférence interlinguistique pour pallier le manque d'éfficacité dans l'apprentissage des...

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1 Nom : HATEM Prénom : Youcef Grade : Maitre-assistant (B) Etablissement : Université Mouloud MAAMMERI de Tizi Ouzou Cet article envisage l’interférence linguistique comme une approche susceptible de générer des résultats probants, dans l’apprentissage des langues étrangères. L’interférence linguistique, quand elle s’inscrit dans ce que les spécialistes et les didacticiens appellent le transfert positif, permet unes certaine fluidité chez les plurilingues et une fluidité certaine lors du contact des langues surtout pour des langues apparentées comme le français et l’anglais, langues étrangères par excellence des algériens. Au vu des constations faites sur ce phénomène de transfert linguistique (voir la thèse de magistère de l’auteur de ce même article intitulée : Influence et interférence de l’anglais sur le français : Cas d’étudiants du département d’anglais de Tizi Ouzou), mais aussi l’influence du français lors de l’apprentissage de l’anglais dans les cycles moyens et secondaires, on est en droit de conclure à la pertinence de l’interférence linguistique et/ou du transfert linguistique dans l’enseignement des langues étrangères.

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Nom : HATEMPrénom : YoucefGrade : Maitre-assistant (B)Etablissement : Université Mouloud MAAMMERI de Tizi Ouzou

Cet article envisage l’interférencelinguistique comme une approchesusceptible de générer des résultatsprobants, dans l’apprentissage deslangues étrangères. L’interférencelinguistique, quand elle s’inscrit dansce que les spécialistes et lesdidacticiens appellent le transfertpositif, permet unes certaine fluiditéchez les plurilingues et une fluiditécertaine lors du contact des languessurtout pour des langues apparentéescomme le français et l’anglais, languesétrangères par excellence desalgériens. Au vu des constations faitessur ce phénomène de transfertlinguistique (voir la thèse demagistère de l’auteur de ce mêmearticle intitulée : Influence etinterférence de l’anglais sur lefrançais : Cas d’étudiants dudépartement d’anglais de Tizi Ouzou),mais aussi l’influence du français lorsde l’apprentissage de l’anglais dansles cycles moyens et secondaires, onest en droit de conclure à lapertinence de l’interférencelinguistique et/ou du transfertlinguistique dans l’enseignement deslangues étrangères.

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Mots clés : langues étrangères-apprentissage-interférencelinguistique-français-anglais

L’INTERFERENCE (INTER)LINGUISTIQUE POURPALLIER LE MANQUE D’EFFICACITE DANS L’APPRENTISSAGE DES LANGUES ETRANGERES

Introduction

Dans le jargon linguistique, LesConcepts SLA (second language acquisition),mais surtout TLA (Third language acquisition)sont fréquemment associées aux notionsd’interférences (inter) linguistiqueset/ou influence (inter)linguistique. Ily a aussi une autre dénomination pource phénomène, laquelle dénomination esttoute aussi éloquente qu’influenceet/ou interférence. En effet, letransfert-puisque c’est de lui qu’ils’agit- qu’il soit un substratum transfer,un borrowing transfer, un positive transfer ou unnegative transfer (l’emploi de ces

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anglicismes n’obéit qu’à desconsidérations déontologiques) renvoietout simplement à des procédésqu’apprenants de langues autres que lalangue première (L1) tendent à utilisersans préméditation aucune. Notre proposest d’attirer l’attention sur letransfert positif et ce qu’il renfermecomme potentiel à même de permettre auxapprenants des langues étrangères enAlgérie de se servir des similitudesqui existent entre le français etl’anglais afin d’apprendre l’une oul’autre langue efficacement.

1. Du Volet théorique

Pour arriver au transfert qui nousintéresse en premier lieu, à savoir lepositive transfer, un exposé succinct desautres types de transferts estnécessaire. Un substratum transfer concernel’influence qu’exerce la languepremière sur la langue seconde, tandisque le borrowing transfer a trait àl’influence que la langue seconde faitpeser sur la langue première. Letransfert linguistique est positif ounégatif ; dans le premier cas lessimilitudes entres deux langues donnéesfacilitent l’acquisition de l’une desdeux langues selon l’ordred’acquisition. Ces mêmes similitudespeuvent également constituer unobstacle et troubler l’acquisition etconstituer un sérieux handicap pour laréalisation de cette tâche.

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C’est en partie grâce aux travaux de lapsychologie behaviouriste dans lesannées 1950 et 1960 que le transfert(inter)linguistique et/ou l’influence(inter)linguistique attirentl’attention des spécialistes. Lesbehaviouristes considéraient que leshabitudes acquises lors del’apprentissage de la langue premièrese répercutent sur celles qui seforment lors de l’acquisition de lalangue seconde. Ce n’est que vers lesannées 1980 que la fougue pour letransfert linguistique s’empare deslinguistes. Cet engouement pourl’influence et/ou l’interférence(inter)linguistiques a pour berceau despays à vocation plurilingue à l’exempledu Canada, la Scandinavie, la Suisse,l’Espagne, etc. Les spécialistes s’yrépandent et répondent aux noms de DeAngelis, Selinker, Kellerman,Hammarberg, Cenoz, Ringbom, Tremblay,Dewaele pour ne citer qu’eux.L’influence (inter)linguistique estégalement connue sous le vocable decross-linguistic influence et/ ou languagetransfer. La recherche relative àl’influence (inter)linguistique chezdes sujets plurilingues est touterécente, mais n’en a pas moins acquisun statut distinct de celui de larecherche en ADL (acquisition d’unedeuxième langue). D’ailleurs, la toutepremière étude (des recherches firentmention de ce domaine à partir desannées 1960), selon les auteurs eux-mêmes de cette étude, remonte à 1995 et

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est l’œuvre de Larry Selinker etBaumgartner-Cohen, B. et est intitulée« Damn it, why can’t I keep these two languagesapart ? » (Zut ! Pourquoi ne puis-je pasgérer ces deux langues séparément ?Notre traduction). Les auteurs de cetteréflexion voulaient découvrir commentles apprenants de plusieurs languesgèrent ‘leurs’ langues. Selinker lui-même est plurilingue et maîtrisel’anglais (langue première), lefrançais est sa deuxième langue,l’hébreu étant sa troisième etl’allemand sa quatrième. Il ad’ailleurs enseigné la linguistique enAllemagne, y a noté des énoncés produitpendant son séjour là bas et l’énoncésuivant est l’illustration de ce quepeut être l’influence(inter)linguistique et l’interférencequi n’épargne même pas les linguistes :

Tu as mein fax bekommen ?= Tu as reçu monfax ?

Pour revenir à l’interférence(inter)linguistique qui est le nœud detout transfert et de toute influence(inter)linguistique, il y a lieu depréciser d’emblée qu’aucune langue –leslangues en contact s’entend-- ne peutse targuer d’être à l’abri de laditeinfluence puisque les emprunts et lescalques constituent des casd’interférences (inter)linguistiques.L’interférence est (inter)linguistiquebien entendu, mais elle relèveégalement de la psychologie, laphysique, la médecine, la météorologie

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et surtout la didactique des langues.La didactique des langues et lalinguistique se rejoignent et associentl’interférence à l’acquisition deslangues et au plurilinguisme. Levocable interférence est lui-même unexemple de cette influencelinguistique. En effet, la premièreentrée du Grand Robert dit ceci :

Interférence. n.f. Etym. 1819 ; angl.interference (1783 « intervention » ; ci-dessous, 2 ; en sciences, 1802 ThomasYoung), de to interfere, 1773, dans cetemploi, Lord Mondoddo, Interférer.

L’interférence est interlinguale ouintralinguale ; dans le premier caselle concerne deux langues, une languesource de l’interférence en question etune langue cible de celle-ci. Autrementdit, un terme donné appartenant à unelangue donnée (langue source) faitintrusion dans une autre langue ou unelangue cible. L’emprunt est l’interférence la plusclassique sauf que l’emprunt n’est pasconsidérée comme l’œuvre de l’individu,mais plutôt celle de la langue. Lecalque est aussi une interférence etcontrairement à l’emprunt, la forme dumot n’est point concernée par letransfert. L’emprunt et le calque sontdes interférences statiques en ce sensqu’elles constituent le résultat ducontact des langues. Ceci est surtoutconnu comme le substrat, l’adstrat etle superstrat L’adstrat concerne

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l’influence qu’exerce une langue surune autre sans que cette dernière nedisparaisse pour autant. Le DicosEncarta définit l’adstrat comme« langue ou parler qui se superposent àune autre langue ou à un autre parleren y imprimant des influenceslinguistiques » et exemplifie commesuit : « L’anglais est un adstrat dufrançais ». Le substrat est relatif àl’influence qu’exerce une langue surune autre tout en étant supplantée parelle comme c’est le cas pour le gauloisqui a influencé le français, maisdisparut non sans laisser des traces,une centaine de mots, dans lefrançais. Le superstrat se traduitégalement par l’influence d’une languesur une autre sans que cela n’aboutisseà la disparition de la langueinfluencée comme c’est le cas deslangues amazighes qui subissentl’influence de l’arabe en particulier.

L’interférence qui peut pallier lemanque d’efficacité dansl’apprentissage des langues étrangèresest l’interférence dite dynamique. Cetype d’interférences se caractérise parles intrusions spontanées et aléatoiresd’éléments lexiques, phonético-phonologiques, grammaticaux etphraséologiques. Contrairement àl’interférence statique qui est unphénomène de langue ‘perpétré’ par legroupe et que d’aucuns ne considèreplus comme de l’interférence, car étanttout simplement naturalisée et adoptée

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par la langue emprunteuse,l’interférence dynamique est un fait dela parole, elle est l’œuvre del’individu et est perçue négativementpar le groupe. W.F. Mackey fait fort àpropos un subtil distinguo entrel’interférence statique etl’interférence dynamique ; alors que lapremière est à ses yeux une intégrationet une interférence codifiée, laseconde est l’interférence parexcellence. (Mackey, W.F., 1976 : 414)

L’interférence (inter)linguistique seramifie en plusieurs catégoriesd’interférences selon le sous systèmelinguistique concerné. Ainsi, il y a :

-L’interférence sémantique : Il existeévidemment en français et en anglaisdes équivalents pour la majorité desmots à l’exemple de hat pour chapeau,talk pour parler et through pour à travers.En disant « Il parle à travers sonchapeau », le bi-plurilingue introduitdans le français qu’il parle et/ouécrit une structure sémantique del’anglais basée sur le modèle anglais :

He talks through his hat. Un des éléments non négligeable en cequi concerne l’interférence sémantiqueest la relation entre langue et pensée.

-L’interférence lexicale : Ellecorrespond aux unités lexicales quel’individu introduit dans son discours.Ce genre d’interférences n’est pasfréquent dans le contact entre

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l’anglais et le français à conditionque l’on ne confonde pas interférencelexicale avec l’emprunt et l’anglicismequand bien même l’anglicisme renvoieégalement à une interférence lexicale.

-L’interférence grammaticale : Ils’agit de l’introduction par le bi-plurilingue dans son discours d’unitéset structures telles les unitésgrammaticales ou les fonctions comme lasuppression du /s/ pour le pluriel del’adjectif. Un autre exemple quiillustre l’interférence grammaticaleest l’ordre des mots dans la phrase.Autrement dit, mettre l’adjectif avantle nom comme cela se fait pourl’anglais ou encore le non respect dela concordance entre le nom et sonadjectif.

-L’interférence phonologique : Ils’agit d’une interférence d’ordre oraleet a surtout trait à la phonétiquearticulatoire et la phonétiqueacoustique, à savoir l’articulation,l’intonation, le rythme, etc. Il y alieu de souligner que dans l’anglaiset le français, l’intonation etl’accent tonique sont les élémentsphonologiques les plus exposés àl’interférence quand on passe del’anglais au français ou vice versa. Ilfaut souligner que l’interférencephonologique peut se manifester deplusieurs façons :

*Au plan phonémique : Cela survientquand le répertoire phonémique des deuxlangues en présence est différent.

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*Au plan phonétique : Il s’agit deconvergence au plan phonémique, maisdivergence au plan phonétique ;l’exemple des faux amis qui possèdentune même et seule graphie, mais dontles caractéristiques acoustiquesdifférent considérablement constitue uncas d’interférence phonétique.

*Au plan allophonique : Dans le casoù un même son existant dans deuxlangues se manifeste différemment àl’exemple du /t/ qui est sourd aussibien en anglais qu’en allemand. Maisquand ce /t/ se retrouve entre deuxvoyelles comme dans writer il acquiertune valeur acoustique semblable au /d/dans l’anglais américain alors qu’ilgarde son aspect originel en allemand.Bien sûr, un américain apprenantallemand est susceptible de commettrece genre d’interférence (Odlin, T.,1989 : 116).

*Au plan distributionnel : Ceciconcerne le positionnement de sonscombinés comme le /ts/ allemand que lesanglophones prononcent aisément en finde mot, mais pas en début de mot.

-L’interférence graphique : Celaconcerne exclusivement l’aspect écritdu discours ayant trait à la paronymieet aux faux amis. La littérature relative au contact deslangues et à l’interférence dénombreégalement d’autres dénominations, voired’autres types d’interférences.

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-Interférence instrumentale : Il s’agitdes commentaires métalinguistiques, lesdemandes en aide directes etl’intégration de mot étrangers dans lebut d’apporter des corrections.

L’insertion : Comme son nom l’indique,il s’agit de l’insertion (interférencelexicale) d’une unité lexicale de lalangue source dans la langue cible pourcause de défaillance mnémonique oufaute de connaissance.

-L’interférence involontaire : Ellesurvient lorsque le sujet produit uneunité lexicale étrangère sans se rendrecompte. Alors il y a :

*l’auto correctionimmédiate de l’erreur.

*Réaction instantanée àla locution insérée lorsque dans unénoncé donné trois langues interférent.

*La présence del’unité cible ailleurs dans le texte oul’entrevue.

-L’interférence syntaxique : Elle seproduit surtout lors de laméconnaissance des règles syntaxiquestelles que les articles ou lesprépositions :L’interférence syntaxique peutégalement être une interférencelexicale quand le mot transféré est unmot grammatical tel que le pronom, lapréposition, etc. Autant dire que ladémarcation entre ces deuxinterférences n’est pas nette à ceniveau. L’interférence syntaxique peut

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aussi être relative à l’ordre des motset à la réflexivité. C’est ainsi quandpeut tomber sur un verbe pronominalespagnol du type de « se passa’construit sur le modèle français ‘sepasser’ alors que l’espagnol n’a pas deverbes pronominaux.

-Usage L3 ‘non-cible’ : cela concernesurtout les calques et les traductionsinstantanées.Par ailleurs, nous devons signaler queles linguistes mentionnent le rôle quejouent certains paramètres dansl’influence (inter)linguistiques et lesinterférences (inter)linguistiques.Hall&Ecke (2003) ont établit unetaxinomie qui regroupe pas moins dequarante (40) facteurs participant àl’apparition des interférences(inter)linguistiques dont nous citonsles plus remarquables que sont :

-L’apprenant : Les facteurs quiinfluent sur l’apprenant et peuventl’amener à produire des interférences(inter)linguistiques sont l’âge, sonattitude, sa consciencemétalinguistique et l’aspectpsychotypologique (par psychotypologie(nous verrons ci-après ce que signifiela psychotypologie).

-L’apprentissage : Dans le processusd’apprentissage interviennent desparamètres tels que les diversescompétences linguistiques (compétencetextuelle, compétence discursive etbien sûr la compétence conceptuelle) et

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la récence d’apprentissage de la langueen question.

La langue : S’il y a bien un facteurqui fait plus ou moins l’unanimitéquant à son poids dans l’influence(inter)linguistique, c’est assurémentle facteur de la distance typologique,mais aussi celui non moins important dudegré de contact ou d’emprunt.

Evénement : les facteurs relatifs àl’événement consistent en la formalitéde la tâche, le type de tâche, le modede langue (mode monolingue/bilingue,etc.).

Le mot : Il est admis que le lexiqueest le sous système le plus perméable àl’influence, c’est pourquoi la naturedu mot ; qu’il soit un motlexical/grammatical, sa fréquence et sasimilarité avec ses concurrentsconstituent des facteurs essentielsdans l’interférence(inter)linguistique.

Parmi les facteurs énumérés ci-dessus,deux facteurs méritent une attentiontoute particulière pour le rôle qu’ilsjouent dans l’influence d’une languesur une autre. Ces deux facteurs sontla langue, mais aussi et surtout ladistance typologique que nous avonstout particulièrement souligné, tant ceparamètre participe directement auprocessus d’influence(inter)linguistique.

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La distance typologique estdéterminante dans l’influence(inter)linguistique parce que deuxlangues qui sont typologiquementsemblables comme l’anglais et lefrançais sont enclines à interférerl’une avec l’autre, voire influer l’unesur l’autre. Les langues sontclassifiées d’après deux approches ;une approche basée sur la forme, latypologie et/ou la morphologie et uneapproche fondée sur l’aspect génétique.Il convient de souligner que laclassification fondée sur la typologieet/ou la forme ne doit pas êtreconfondue avec la distance typologique.La distance typologique s’intéresse auxcaractéristiques qui peuvent rapprocherdeux langues. Ces caractéristiquespeuvent être dues à une filiationnaturelle ; appartenir à une mêmelangue mère, ou une filiationartificielle occasionnée par le contactdes langues qui est à son tour dû à unerelation de voisinage d’ordrehistorique et/ou géographique. Ladistance typologique implique souventce que Kellerman appelle la‘psychotypologie’ (Kellerman,1977/1983) qui renvoie à la conscienceet à la perception que lelocuteur/scripteur a de la distancetypologique entre la langue source etla langue cible. Alors que la distancetypologique relève de la langue (de lalinguistique à proprement parler), lapsychotypologie relève de la

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psycholinguistique puisque elle exploreun aspect psychologique dulocuteur/scripteur. Sur ce sujetjustement, Ringbom postule que lesapprenants asiatiques et africains del’anglais “[…] perceive English and French to besimilar and make considerable use of one of theselanguages when learning the other” (Ringbom,H., 1985: 3/40). (Les apprenantsasiatiques et africains discernent lessimilarités entre l’anglais et lefrançais et font usage de leurconnaissance de l’une des deux languespour apprendre l’autre Notretraduction).

Pour conclure ce volet théorique, ilconvient de ne pas omettre d’accorderl’importance requise à la distinctionentre l’interférence totale etl’interférence partielle. Alors quel’interférence totale est synonyme del’intrusion d’un élément complet, àsavoir un lexème, un morphème, unsyntagme, une phrase, etc.,l’interférence partielle se caractérisepar une extension dans l’emploi d’unélément, la confusion dans son emploi,l’interférence du signifiant sans lesignifié et vice versa, etc. Ladéfinition que suggère Terence Odlinpour l’interférence et/ou transfertnous semble suffisamment concluantepour cette partie relative àl’interférence : « Transfer is the influenceresulting from similarities and differences betweenthe target language and any other language that hasbeen previously (and perhaps imperfectly) acquired »

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(Odlin, 1989: 27). (Le transfer testl’influence resultant de similitudes etdifferences entre la langue cible ettoute autre langue précédemment (etpeut être maladroitement) acquise notretraduction).

2. Pratiquement parlant

Envisager le recours aux interférenceslinguistiques pour un apprentissageefficient des langues étrangères, lefrançais et l’anglais en l’occurrence,n’est pas une simple vue d’esprit,voire les élucubrations d’un chercheuren herbe. Les multiples travauxrelatifs à l’influence(inter)linguistique attestent si besoinest de l’importance de l’interférence(inter)linguistique dans l’acquisition,mais aussi la gestion des langues parl’individu.

A l’instar des travaux de Kellerman etRingbom cités plus-haut, une étude,celle de Akunna, Lund et Gentile (1981)corrobore l’idée que les langues quisont typologiquement similaires sontplus à même de s’influencermutuellement et interférer les unesavec les autres que celles qui le sontpeu ou pas du tout. Leur hypothèse estle fruit d’une enquête menée auprèsd’une quarantaine (40) d’individusayant comme L1 l’igbo (une des languesdu Nigeria), L2 anglais et L3 français.

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On leur a fait passer un testconsistant en 75 phrases rédigées enfrançais qu’ils devaient juger commejustes ou fausses. Les résultats del’enquête dévoilèrent des interférencesde l’anglais et de l’igbo ou desinterférences intralinguales dufrançais.

Ringbom, H. (1987, 2001) a, lui, choisid’axer ses recherches sur lapsychotypologie qu’il juge primordialedans l’apparition de l’interférencelexicale. Le nombre de sujets estnettement plus important chez Ringbom ;il a réuni deux groupes de 577individus auxquels il a donné une tâchede traduction. Les deux groupes ont desprofils linguistiques différents ;tandis que le premier groupe a pour L1le finlandais, L2 le suédois et L3l’anglais, l’autre groupe a pour L1 lesuédois, L2 le finlandais et L3l’anglais. Parmi, ces langues, lesuédois et l’anglais sonttypologiquement similaires alors que lefinlandais est la langue la pluséloignée des deux autres. Lesparticipants devaient traduire uneliste de 63 mots de leur L1 à leur L3et chacun des mots était contextualisédans une phrase écrite en anglais. Ils’est avéré que les finlandais ontplus recours au suédois tandis que lessuédois se sont pour la plupart tournésvers l’anglais. Il y a une autre étudedu même Ringbom qui porte surl’influence d’une troisième langue, le

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suédois en l’occurrence, sur la L2(anglais) d’une population estudiantinefinlandaise. L’auteur a réuni pas moinsde dix mille (10,000) essais qu’il aexaminés pendant six (06) ans (1978-1984), relevant les marques del’influence du suédois sur l’anglais eta conclu que ladite influence se faitsurtout ressentir dans le lexique etl’orthographe. La langue suédoise seretrouve également dans une étudelongitudinale entreprise par Williams,S et Hammarberg, B (1998) portant surla répartition des tâches chez desplurilingues ayant l’anglais comme L1,l’allemand comme L2 et le suédois commeL3.

Il y a d’autres études moinsautorisée ; des thèses en l’occurrence,comme L’influence du français surl’anglais du Cameroun   d’Edmond Biloade l’université de Yaoundé, l’influencedu français sur des apprenantsmarocains de l’anglais (Bentahila,1975) ou encore l’influence del’anglais sur la prononciation dufrançais chez des sujets indiens (Singh&Carrol, 1979). En Algérie, une étudelongitudinale intitulée Le rôle dufrançais dans l’enseignement deslangues étrangères en Algérie futréalisée par une équipe de chercheursalgéro-française. Il y a aussi deuxthèses de magistère et l’une d’elle estl’œuvre de l’auteur de cet article dontles points essentiels émanent justementde cette thèse répondant au nom

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L’influence de l’anglais sur lefrançais : étude du cas d’étudiants dudépartement d’anglais de Tizi Ouzou. Lecorpus de cette étude aurait pu êtreconstitué de productions écrites et/ouorales d’apprenants des deux paliers del’enseignement général, à savoir lescours moyen et secondaires, sauf que lalangue source est le français et lalangue cible est l’anglais. Il seraitd’ailleurs intéressant d’explorer cecréneau au sein des deux palierssusnommés pour voir de visu ce que lesenseignants d’anglais des collèges etdu lycée nous apprendront, à savoirl’interférence du français chez lesélèves apprenant l’anglais.

3. Recommandations

Plutôt que de stigmatiser ce genred’erreurs puisque les interférencessont quand même répertoriées comme deserreurs, il serait probablementpréférable de les fructifier, pasuniquement à l’échelle individuelle parl’enseignant, mais à une échelleformelle. En somme, il s’agitd’inscrire l’interférence linguistiquecomme moyen de faciliter l’acquisitiondes langues étrangères surtout quandcelle-ci ne sont pas distantestypologiquement. Le français etl’anglais adhèrent quasi parfaitement àce principe, ayant plus de points

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communs que de traits distinctifs ; unmême et unique principe directionnelpour l’écriture ; de la gauche vers ladroite, le même agencement des motsdans la phrase, à savoir un sujet, unverbe et un complément quand bien mêmele SVO (subject+verb+object) anglais offremoins de flexibilité que celui dufrançais. L’anglais et le français ontaussi en commun la même structuresyntagmatique et les mêmes caractèreset/ou alphabet latin, mais cela n’enfacilite pas absolument lerapprochement. La non correspondanceentre l’aspect oral et l’aspect écritconstitue l’autre affinité quirapproche ces deux langues et de partet d’autre, des voix se sont élevéespour dénoncer ce qu’ils considèrentcomme une entrave à l’apprentissage desdeux langues. Par ailleurs, l’ondénombre un nombre considérabled’anglicismes (emprunts et calques) quetout un chacun peut reconnaître àl’instar des plus courants comme :

Anglicismes sémantiques: finaliser,réaliser, initier, opportunité, preuve,etc.

Anglicismes lexicaux: week-end, leader,challenger, tester, toaster, etc.

Anglicismes syntaxiques: en charge de,être supposé faire, basé, etc.

Anglicismes phonétiques : Izrael aulieu d’Israël

Si l’on y prête plus d’attention, onverra que bon nombre d’anglicismesémaillent le texte de cet article àl’exemple des anglicismes grammaticaux

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comme et/ou construit sur le modèle deand/or, ou encore la tendance souventrencontrée dans des travaux derecherches et essais rédigés enfrançais et construit sur le modèleanglais ; un sous-titre qui commencepar l’article un(e), comme dans Lebilinguisme au Canada : une étudesociolinguistique, au lieu de Lebilinguisme au canada : étudesociolinguistique […] (Hagège, C.,1987 : 50). Il en est de même desgallicismes qui sont nombreux àémailler l’anglais.

Comme nous l’avons souligné plus haut,il y a une imbrication entre lefrançais et l’anglais au sein del’école algérienne du fait del’apprentissage avéré de l’une par letruchement de l’autre. Le contact entreces langues commence plutôt que prévu ;à partir du collège où l’anglais faitpour la première fois son entrée dansle répertoire linguistique desalgériens. C’est aussi à partir de cepalier que l’imbrication entre les deuxlangues commence avec la propension descollégiens à apprendre l’anglais par letruchement du français.

Pour peu qu’on se fixe comme objectifl’acquisition effective des languesétrangères par les apprenantsalgériens, qu’ils soient collégiens,lycéens ou étudiants à l’université, laprésence de mots anglicisés dans unerédaction en français ou des adjectifspluralisés dans un texte en anglais ne

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sera plus vue comme une anomalie, maisplutôt comme un bon signe de progrès.Le tableau suivant illustre un exemplede l’influence de l’anglais sur lefrançais chez des étudiants dudépartement d’anglais de Tizi Ouzoumentionnée précédemment et pourentrevoir le transfert que les lycéenset les collégiens opèrent lorsqu’ilsapprennent l’anglais, il suffit justed’aller dans le sens inverse.

1. Tableau représentant un échantillond’interférences (inter)linguistiquesà même de ne pas gênerl’apprentissage du français

Langue source anglais/languecible françaisrealization-text-guarder-exact-rest-group-form-strict-fix-method- term-Authorite-verb-problem-example-elitism-reflishir-adult-method-lesson-domain-modern-fair

Quand c’est le français qui est lalangue source et l’anglais la languecible, on aurait par exempleréalisation au lieu de realization,leçon au lieu de lesson, etc.

Conclusion

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Parce que la pédagogie se renouvellesans cesse et prenant acte du fait quela didactique des langues s’est depuisquelques temps muée en didactiques deslangues, mettre à profit les phénomènesde code-switching, interférence(inter)linguistique et autrescaractéristiques du plurilinguisme etdu contact des langues, ne peut qu’êtrejudicieux. Il ne s’agit pas d’érigerl’interférence (inter)linguistiquecomme méthode d’enseignement deslangues étrangères, toutefois la priseen considération de l’influence(inter)linguistique et/ou de l’éventueltransfert sera profitable aussi bienaux enseignants qu’aux enseignés.Cette éventualité est à coup sûr unepiste de recherche des plus sûres dansle domaine des didactiques des languesqu’il y a lieu d’explorer à fond afinde mieux les exploiter.

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Références bibliographiques

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Mackey, W.F., (1976) Bilinguisme et contact des langues. Paris : Klincksieck.

Odlin, T., (1989) Language Transfer Cross-linguistic Influence in Language Learning. Cambridge: Cambridge University Press.

Ringbom, H., (1985) The Influence of Swedish on the English of Finnish Learners, in http://eric.ed.gov/ERICDocs/data/ericdocs2sql/content_storage_01/0000019b/81.(Consulté le 18/05/2010).

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Selinker, L., & Baumgartner-Cohen, B., (1995). Multiple language acquisition: "Damn it, why can't I keep these two languages apart?", in M. Bensoussan, & I. Berman (Eds.), Language Culture and Curriculum (special issue), 8, 1-7.