Espagne-Maroc: Etude Comparative globale

10
AIDE AU DEVELOPPEMENT M1 RICI 2013/2014 Une étude comparative de deux pays méditerranéens Espagne / Maroc Sarah Ayachi Sous la direction du Pr. Fouad NOHRA

Transcript of Espagne-Maroc: Etude Comparative globale

AIDE AU DEVELOPPEMENT

M1 RICI 2013/2014

Une étude comparative de deux pays méditerranéensEspagne / Maroc

Sarah Ayachi Sous la directiondu Pr. Fouad

NOHRA

Sommaire

Introduction

1. Pourcentage des Terres Agricoles

2. Degré d'alphabétisation des adultes

3. Taux de mortalité brut

4. Taux de chômage

Focus : Situation tendue entre Melilla et Nador

Conclusion

Introduction

Le Maroc et l’Espagne sont deux pays différents de part de nombreux facteurs sociaux etculturels. Pourtant, une multitude de paramètres les lient, que ce soit par leur histoire passée oupar les récents défis à relever. Leur frontière située sur le continent africain, qui est l'une des pluscourtes au monde avec 16km, illustre ainsi cette proximité.

Depuis quelques années, les deux pays traversent des épreuves quelque peu similaires etdoivent faire face aux même enjeux. C'est donc en rapport avec les éléments mentionnés ci-dessusque nous avons choisi de comparer l'Espagne et le Maroc, en se basant sur quatre indicateurs : lepourcentage de terres agricoles, le degré d'alphabétisation des adultes, le taux de mortalité brut etle taux de chômage. Nous évaluerons ces indicateurs sur une période de dix ans, entre 1990 et2010, tout en intégrant quelques chiffres plus récents afin de mieux comprendre la tendanceactuelle. De plus, nous avons estimé pertinent d'inclure à cette étude un court élément expliquantla situation économique particulière des enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla, situées au norddu Maroc, avec l'exemple de la zone frontalière de Melilla/Nador.

Le Maroc est un pays émergent possédant un PIB par habitant inférieur à celui des pays développés, mais qui connaît une croissance économique rapide, et dont le niveau de vie ainsi queles structures politiques et sociales tendent à se rapprocher de ceux des pays développés. Quand àl'Espagne, après avoir connu un rapide et fulgurant essor économique suite à son intégration à l'Union Européenne, elle connaît désormais un essoufflement à plusieurs niveaux.

A l'issue de cette, étude, nous tenterons ainsi de comprendre pourquoi ces deux pays sont d'une part voués à s'allier pour continuer dans une perspective de bien-être socio-économique, mais surtout, comment le Maroc peu apparaître comme le nouveau concurrent de son voisin.

1. Pourcentage des terres agricoles :

En ce qui concerne l'Espagne, on remarque un décroissement constant du pourcentage des terres agricoles depuis les années 1990. En effet, dans les année 1970, 65% de ses terres étaient portées sur l'agriculture alors qu'en 2010 seulement 55% sont des terres agricole. On peut expliquer cela en majeure partie grâce au phénomène de l'exode rural que l'Espagne a connu dans les années 1960 et qui n'a fait que s'accentuer dans le temps. Cet exode a provoqué la fermeture de nombreuse exploitations agricoles, qui sont devenues pour la plupart des champs immenses de serres, en particulier dans les provinces du Sud. Depuis les années 1980 , l'Espagne a opté pour

une stratégie tournée vers le tourisme de masse, malgré qu'elle ait gardé une activité agricole significative.

Contrairement à l'Espagne, le Maroc voit sont secteur agricole se développer, passant de 55,5% des terres agricole dans les années 1970 à 70% dans les 1990. Bien qu'en 2000 ce secteur ait connu une légère baisse, il reste tout de même un secteur économique important du pays. Ce développement du secteur agricole marocain s'explique en parti grâce à la libéralisation du secteurqui a commencé dans les années 1985 sous la direction de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International. De plus, le Maroc ne semble pas avoir intérêt à ralentir sa production, un effet dû aux différents accords de libre-échange qui ont pu être signé avec l'Union Européenne en 1996 et avec les États-Unis en 2006. Les produits agricoles marocains sont soumis à de faibles droits de douane.

Ces deux pays ayant le même climat et à peu près la même constitution du sol ont fait des choix stratégiques différents, a tel point qu'à la fin des années 1970, le Maroc voit pour la premièrefois son pourcentage des terres agricoles être plus important que celui de l'Espagne. Cet indicateurreflète une différence entre ces deux pays. L'Espagne est d'ailleurs devenu un pays importateur desproduits agricoles marocains. S'ajoute à cela un regain du gouvernement marocain pour promouvoir et aider le secteur agricole à s'imposer comme nouveau secteur dynamique et fournisseur d'emploi.

2. Degré d'alphabétisation des adultes:

De part son statut de pays émergent, le Maroc a toujours observé un pourcentage d'alphabétisation bien plus bas que celui de l'Espagne.

En ce qui concerne l'Espagne, le taux d'alphabétisation a toujours été très élevé. Pour les adultes (considérés comme étant âgés de plus de 15 ans) le degré d'alphabétisation a été croissantdes années 1980 aux années 2005, puis il s'est stabilisé. Selon la Banque Mondiale, en 1985, 85 espagnols âgés de plus de 15 ans sur 100 étaient considérés comme étant alphabètes, alors qu'en 2010, leurs nombre augmente à 99 sur 100. Avec le tableau1 il est facile de comprendre que l'analphabétisme touche surtout les personnes âgées de plus de 24 ans car en effet, selon la Banque Mondial, les jeunes âgés entre 15 et 24 ans ont quasiment toujours eu, depuis 1985, un

1 Voir annexe 1 tableau comparatif indicateurs clés

degré d'alphabétisation frôlant les 100%. En Espagne, le taux d'alphabétisation a augmenté en particulier après la chute du régime franquiste et la nouvelle constitution établie par la monarchie parlementaire du Roi Juan Carlos Ier. Pour le Maroc, la courbe ne cesse d'être croissante, que ce soit pour les jeunes ou pour les adultes. Comme pour l'Espagne, ce qui saute aux yeux est que les personnes âgées de plus de 24 ans ont toujours étaient les plus touchées par l'analphabétisme. Par exemple en 2010, selon la Banque Mondiale, 80 jeunes âgés entre 15 et 24 ans sur 100 sont considérés comme étant alphabètes, alors qu'à la même date, seulement 55 adultes âgés de plus de 15 ans sont considérés comme étant alphabètes. Si on prenait uniquement les personnes âgées de plus de 24 ans, on s'apercevrait facilement que le chiffre est alors beaucoup plus faible. Cependant, ces données sont très encourageantes pour le Maroc car elles connaissent un accroissement fort et constant en terme d'alphabétisation. En effet, en 1985, un peu moins de 50 jeunes sur 100 étaient alphabètes contre 80 jeunes sur 100 en 2010.

Cet indicateur met en exergue une différence entre ces deux pays pour ce qui est de l'éducation, avec une réelle avance de l'Espagne, bien que le Maroc tende à se rapprocher du pays européen.

3. Taux de mortalité brut :

Pour l'Espagne, le taux de mortalité reste constant, autour des 9%, avec quelques légers pics à la hausse en 2000, 2003 et 2004. Ces pics peuvent s'expliquer par des événements de terrorisme, perpétrés d'une part par les indépendantistes basques en 2000 et 2003, et d'autre partpar des extrémistes se revendiquant d'Al Qaïda en 2004. Outre ces événements ayant enrayé la tendance constante d'un faible taux de mortalité, cet indicateur démontre qu'en matière de santé, l'Espagne possède un système efficace et largement diffusé, permettant une bonne prise en chargedes malades, des femmes enceintes et des enfants nécessitant des soins.

Depuis les années 1990, la tendance concernant le taux de mortalité s'est inversée pour le Maroc, contrairement à l'Espagne. Très élevé jusque dans les années 1980 en atteignant les 20%, ce taux n'a pas cessé de diminuer jusqu'en 1999, jusqu'à passer sous la barre des 8%. Cependant, on note une légère augmentation entre les années 2000 et 2010, mais ce tout en restant sous la barre des 7%. Un tel taux de mortalité qui ne fait que diminuer peut s'expliquer par de réelles avancées en matière de prise en charge sanitaire et sociale ; un accès aux soins plus accessible et des aides accordées aux familles rurales, évitant ainsi les années sans récolte et donc sans ressources. Plus tard, un plan national global pour l'amélioration des services de santé a été entrepris, en particulier en milieu rural, allant de paire avec un programme conjoint entre l'UNFPA,l'OMS, l'UNDP et l’UNICEF, qui a permis d’élaborer une stratégie nationale sur la réduction de la

mortalité néonatale en 2011. Cependant, malgré de timides initiatives entreprises en terme de santé, le Maroc doit poursuivre ses efforts.

4. Taux de chômage :

Grâce à ce graphique, nous pouvons apercevoir qu'entre 1990 et 2008, les courbes respectives exposant le taux de chômage au Maroc et en Espagne se rejoignent. Ainsi, le taux vacille autour des 20% entre 1990 et 2000, pour baisser ensuite autour des 10% jusqu'en 2008, où un retournement s'opère. Pour l'Espagne, un pic à la hausse du taux de chômage est observé en 1993,effet direct de la crise du Système Monétaire Européen. Le taux baisse à partir de 1995, date à laquelle l'Espagne est candidate au Traité de Maastricht afin de s'engager dans l'Union économique et monétaire européenne, un système qui va lui réussir jusqu'à l'éclatement de la bulle immobilière en 2008, qui a fait littéralement exploser le taux de chômage espagnol, allant de 8% en 2007 à plus de 20% en 2010. De 2009 à 2011, le taux de chômage ne s’est pas stabilisé. Au contraire, il n’a pas cessé d’augmenter. Pour faire face au ralentissement économique et à l’augmentation du chômage qui touche principalement les métiers du bâtiment et des services, (premiers employeurs de la main-d’œuvre immigrée) l’ex-gouvernement socialiste espagnol a adopté en 2008 un projet de « plan de retour volontaire » ciblant les 100.000 immigrés en situation régulière mais sans emploi depuis plus d’un an. Ce plan propose aux immigrés de rentrer dans leur pays d’origine et de percevoir une allocation de chômage en deux temps : 40% de cette allocation sera versée au moment du départ et le reste, après l’arrivée dans les pays d’accueil. Les bénéficiaires recevront l’équivalent de 11.000 euros et la promesse d’un soutien pour l’obtention d’un micro-crédit pour monter des petites entreprises dans leur pays d’origine. En contrepartie, ces derniers devraient renoncer à leurs permis de résidence et de travail et s’engager à ne pas revenir en Espagne pendant une durée minimale de trois ans. Le gouvernement espagnol promet également aux immigrés intéressés par cette offre un traitement privilégié dans le cadre des programmes de recrutement de la main-d’œuvre saisonnière, initiés par l’Espagne dans divers pays, dont le Maroc.2 Depuis, la tendance s'inverse ; tout comme la courbe du taux de chômage quibaisse pour le Maroc et augmente pour l'Espagne, l'immigration, véritable miroir reflétant ces variations d'accès à l'emploi, ne se fait plus du Maroc vers l'Espagne mais de l'Espagne vers le Maroc. Ces dix dernières années, les secteurs de la construction ou de l’agriculture ont garanti un travail permanent à des dizaines de milliers de Marocains. Mais depuis la crise immobilière, des milliers d'Espagnols traversent à leur tour le détroit de Gibraltar en sens inverse dans l'espoir de trouver un emploi. Pour grand nombre d'entre eux, cette option a été la bonne. Selon l’Institut National de la statistique d’Espagne, le nombre d’Espagnols officiellement enregistrés en tant que résidents sur le sol marocain a été multiplié par 4 entre 2003 et 2011. Cependant, ce qu'il faut savoir est qu'un taux de chômage aussi bas au Maroc ne traduit que peu la réalité ; l'immense part qu'occupent la corruption et le marché noir fausse clairement les données officielles, qui ne

2 Voir annexe 2 classement comparatif taux de chômage

reflètent pas la situation de fort chômage, surtout chez les jeunes ; les diplômés sont les plus touchés.

Conclusion :

Dans cette étudecomparative focalisée surl'Espagne et le Maroc, nousavons pu nous rendre compte deplusieurs tendances sociales etéconomiques décrivant unchangement dans les équilibresentre ces deux pays aussi prochesque différents.

D'une part, les indicateursétudiés nous montrent uneamélioration globale du niveaude vie et de la situationéconomique au Maroc ; un intérêtdu royaume pour son industrieagricole, pour son système desanté et de solidarité et uncombat contre les inégalités.

D'autre part, on remarqueque pour son voisin espagnol, leschiffres montrent uneaugmentation du chômage et undynamisme moindre dans lesecteur agricole. Cependant, lepays européen, fort de sespolitiques audacieuses etefficaces, reste loin devant leMaroc en terme d'éducation etd'accès aux soins.

Ainsi, il reste primordialpour les deux pays, qui doivent faire face aux mêmes problèmes de l'immigration, du chômage ou encore du manque d'eau, d'arriver à régler tous les problèmes liés aux territoires (enclaves de Ceuta et Melilla, Sahara Occidental) et aux nouveaux enjeux socio-économiques, qui s'annoncent comme de grands défis impossibles à éviter.

Focus sur la zone frontalière de Melilla/Nador

Melilla, ville autonome espagnole située sur le continent africain, estfrontalière avec la ville marocaine de Nador. Cette enclave espagnoleest un lieu stratégique économiquement parlant pour l'Espagne. Cettedernière est largement gagnante des trafics en tout genre qu'y s'yopèrent, et où les marocains viennent se ravitailler chez les grossistesEspagnols à bas prix. Cette économie souterraine génère d'ailleursselon le quotidien espagnol El Faro des bénéfices de plus de 440millions d'euros par ans.

Ce commerce juteux ne garantie pas pour autant la sécurité et ladignité humaine pour nombre de Marocains. En effet, la structure de lafrontière sous forme d'entonnoir est extrêmement dangereuse. Les casde blessures sont fréquents et certaines personnes en perdent mêmela vie, piétinés par la foule. La grande majorité des porteurs marocains– souvent des femmes - ne travaillent pas pour leur propre comptemais pour celui de commerçants riches et influents.

Le trafic, qu'il soit de produits de consommation courante, destupéfiants, de contrefaçon ou de carburant, permet aux douaniers des'enrichir grâce à la forte corruption, et ce dans l'impunité la plus totaleet l'aveuglement volontaire des deux gouvernements. Les Marocains yvoient un lieu de commerce et de passage vers une amélioration deleurs conditions de vie, alors que les Espagnols y voient une fiscalitéintéressante pour lancer leurs entreprises, tirant un bénéfice de lapauvretémarocaine. (voir annexes 3 et 4)

Annexes :

1) Tableau comparatif des indicateurs clés en 2009

Année de référence :2009

Espagne Maroc

PIB par habitant en $ US 31 747 2 811Taux de croissance annueldu PIB par habitant (en

volume)-2,6 3,6

Population (en millions) 46 31,5Part de la population âgéede moins de 15 ans (en %)

14,5 28,0

Part de la population âgéede 60 ans et plus (en %)

22 8,1

Taux de chômage en % 18,9 9,1Terres Agricoles (% des

terres)55 65,5

Taux d’alphabétisation dela population âgée de 10

ans et plus98 60,3

Espérance de Vie 82 76

2) Classement des taux de chômage : comparaison

3) Poste frontière entre Melilla et Nador

4) Enclaves espagnoles au Maroc

Bibliographie

http://www.statistiques-mondiales.com/espagne.htm

http://www.courrierinternational.com/article/2013/04/18/pays-d-immigres-espagnols

http://cecille.recherche.univ-lille3.fr/axes-de-recherche/mondes-mediterraneens/publications-en-ligne/article/vers-la-fin-de-l-immigration

Rapport OMD du Maroc ( Objectif du Millénaire pour le Développement) – rapport national 2009

Rapport : L'Espagne, Douze années d'aveuglement, Dominique Plihon et Nathalie Rey, Économistesatterrés, Université Paris-Nord, décembre 2011www.atterres.org

http://leconomiste.com/article/reportage-entre-nador-et-mellilia-contrebande-les-va-et-vient-continuent

http://perspective.usherbrooke.ca/

http://www.lesechos.fr/

www.banquemondiale.org