Création de valeur par la collaboration entre client et fournisseur

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1 Création de valeur par la collaboration entre client et fournisseur Tendances observées et application de modèles de SRM à l’écosystème aéronautique « On ne résout pas un problème avec les modes de pensée qui l’ont engendré. » Albert Einstein Auteur : Jean Potage Résumé de la contribution L’auteur fait le point sur une décennie d’initiatives et de pratiques de création de valeur au plan collaboratif en prenant comme terrain d’observation l’écosystème industriel de la supply chain aéronautique (42 Mds d’euros de chiffre d’affaires, 162 000 personnes). Il y observe la thématique de la relation client-fournisseur pour dégager six grandes tendances générales d’évolution, conceptualisées dans un business model de création de valeur à trois niveaux, le modèle « 3C », et décrit ensuite le fonctionnement de ces trois niveaux avec un modèle de relation client-fournisseur. 1. Observation des évolutions de la relation client-fournisseurs dans la supply chain aéronautique 1.1 Portrait de la supply chain aéronautique L'acte de naissance de l'industrie aéronautique française porte la date du 11 janvier 1908. Dès l’année suivante était créée l’Association des Industries de la Locomotion Aérienne devenue en 1975 le Groupement des Industries Françaises Aéronautiques et Spatiales qui est une fédération professionnelle regroupant 317 sociétés – depuis les grands maîtres d’œuvre et systémiers jusqu’aux PME – spécialisées dans l’étude, le développement, la réalisation, la commercialisation et la maintenance de tous programmes et matériels aéronautiques et spatiaux. La supply chain aéronautique représente ainsi actuellement en France un écosystème de plus de 100 000 emplois dont environ les deux tiers dans la supply chain des sous-traitants et fournisseurs. 1.2 Evolution des frontières de la supply chain aéronautique Fournisseurs de rang 1 et 2 : des rôles plus clairs mais plus complexes Un siècle après son acte de naissance et dans un contexte global de mondialisation économique, les constructeurs ont en effet besoin de partenaires solides « pesant au moins 1 milliard de dollars », taille jugée nécessaire pour devenir un partenaire de rang 1 (Tier-One) partageant avec le constructeur les risques technologiques et financiers. Cela conduit à des externalisations industrielles et donc à une réorganisation massive de la supply chain aéronautique. « Comme Boeing, la volonté d’Airbus de devenir architecte intégrateur se traduit par moins de production en direct et par un partage du risque industriel sur des partenaires stratégiques. » 1 La supply chain aéronautique (figure 1) s’organise ainsi en clients / donneurs d’ordres plutôt architectes et ensembliers, activant des fournisseurs de rang 1 plutôt ensembliers / systémiers, lesquels activent à leur tour des fournisseurs de rang 2 sous-systémiers / composantiers, etc… 1 http://www.perspectives-entrepreneurs.fr/le-numero-du-mois/on-en-parle/comment-airbus-transforme-sa- filiere/

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Création de valeur par la collaboration entre client et fournisseur

Tendances observées et application de modèles de SRM à l’écosystème aéronautique

« On ne résout pas un problème avec les modes de pensée qui l’ont engendré. »

Albert Einstein

Auteur : Jean Potage

Résumé de la contribution

L’auteur fait le point sur une décennie d’initiatives et de pratiques de création de valeur au plan collaboratif en prenant comme terrain d’observation l’écosystème industriel de la supply chain aéronautique (42 Mds d’euros de chiffre d’affaires, 162 000 personnes). Il y observe la thématique de la relation client-fournisseur pour dégager six grandes tendances générales d’évolution, conceptualisées dans un business model de création de valeur à trois niveaux, le modèle « 3C », et décrit ensuite le fonctionnement de ces trois niveaux avec un modèle de relation client-fournisseur. 1. Observation des évolutions de la relation client-fournisseurs dans la supply chain aéronautique

1.1 Portrait de la supply chain aéronautique

L'acte de naissance de l'industrie aéronautique française porte la date du 11 janvier 1908. Dès l’année suivante était créée l’Association des Industries de la Locomotion Aérienne devenue en 1975 le Groupement des Industries Françaises Aéronautiques et Spatiales qui est une fédération professionnelle regroupant 317 sociétés – depuis les grands maîtres d’œuvre et systémiers jusqu’aux PME – spécialisées dans l’étude, le développement, la réalisation, la commercialisation et la maintenance de tous programmes et matériels aéronautiques et spatiaux. La supply chain aéronautique représente ainsi actuellement en France un écosystème de plus de 100 000 emplois dont environ les deux tiers dans la supply chain des sous-traitants et fournisseurs. 1.2 Evolution des frontières de la supply chain aéronautique

Fournisseurs de rang 1 et 2 : des rôles plus clairs mais plus complexes

Un siècle après son acte de naissance et dans un contexte global de mondialisation économique, les constructeurs ont en effet besoin de partenaires solides « pesant au moins 1 milliard de dollars », taille jugée nécessaire pour devenir un partenaire de rang 1 (Tier-One) partageant avec le constructeur les risques technologiques et financiers. Cela conduit à des externalisations industrielles et donc à une réorganisation massive de la supply chain aéronautique. « Comme Boeing, la volonté d’Airbus de devenir architecte intégrateur se traduit par moins de production en direct et par un partage du risque industriel sur des partenaires stratégiques. »1 La supply chain aéronautique (figure 1) s’organise ainsi en clients / donneurs d’ordres plutôt

architectes et ensembliers, activant des fournisseurs de rang 1 plutôt ensembliers / systémiers,

lesquels activent à leur tour des fournisseurs de rang 2 sous-systémiers / composantiers, etc…

1 http://www.perspectives-entrepreneurs.fr/le-numero-du-mois/on-en-parle/comment-airbus-transforme-sa-

filiere/

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Figure 1 : Evolution de la supply chain dans les grandes filières

Les constructeurs veulent désormais des « partenaires plus grands, plus forts et mieux structurés »2. Alors que fin 2007, Airbus traitait avec 4 000 fournisseurs de rang 1 en France, ils étaient 2 300 en 2011. Ainsi voit désormais le jour la notion d’entreprise étendue. Reste cependant à en décrire les nouvelles modalités de fonctionnement, lesquelles ne se limitent évidemment pas aux simples aspects contractuels des achats et à leur management. La relation client-fournisseur et donc le SRM qui en résulte sont donc considérablement modifiés : « rupture ou évolution ? » titraient déjà certaines conférences en marge du salon du Bourget 2007. On notera par ailleurs que cette transformation du « relationnel » s’accompagne d’une autre évolution, celle de la complexité des systèmes et des produits développés avec les sous-traitants et les fournisseurs (Potage, 2007).

Performances attendues des fournisseurs de rang 1

Les exigences contribuant à une meilleure création de valeur par les fournisseurs de rang 1 vont ainsi se décliner dans le cadre de la fourniture de systèmes / sous-systèmes ou produits, pour laquelle ils devront notamment

a) Posséder des capacités à concevoir / fabriquer / tester, éventuellement en mode collaboratif, à innover, tout en utilisant les bases de données du donneur d’ordre voire les mêmes outils de génie industriel

b) Disposer d’une Supply Chain performante et d’un “OTD” (On Time Delivery) exemplaire, c’est-à-dire avoir une bonne maîtrise de leurs fournisseurs (rang 2),

c) Disposer de compétences multi-métiers (électronique, mécanique…) et être capables d’opérer du sourcing en pays bas-coûts

d) Mener les plans de progrès nécessaires ou demandés par les donneurs d’ordres e) Maîtriser les obsolescences induites par le contexte de haute technologie de l’aéronautique,

via le suivi des approvisionnements fin de vie ou des capacités de reconception selon les obsolescences identifiées (« end of life » management).

Performances attendues des fournisseurs de rang 2

Les exigences vont être de même nature, cette foi-ci adaptées à la fourniture de produits, composants, matières, et porter principalement sur les critères suivants :

a) Compétitivité globale face aux enjeux de service (prix, qualité, délai) b) Réactivité et flexibilité très fortes selon l’évolution des carnets de commandes c) Capacité multi-métiers sur de petits sous-ensembles, ou de spécialité d) Capacité de sous-traitance en pays bas coûts e) Capacité à se regrouper conjoncturellement (Pôles de compétitivité, Comité Richelieu, …)

ou structurellement f) Maîtrise d’une approche marché multi sectorielle afin de limiter le taux de dépendance

commerciale vis-à-vis du donneur d’ordre (inférieur à 30 %) Constatant ces nouvelles exigences, le Pôle Interministériel de Prospective et d’Anticipation des Mutations Economiques a analysé en détail la nature des évolutions de la chaîne de valeur de la

2 Ibid.

3

supply chain aéronautique. Cette analyse a fait l’objet d’un rapport (PIPAME, 2009) et le présent article complète cette analyse par une vision « achats » et SRM de ces évolutions.

1.3 Repositionnement de la chaîne de valeur

Le capital fournisseurs est en train de rentrer dans le capital immatériel de l’entreprise, aussi devient-il primordial d’en analyser les mécanismes de création de valeur par la relation avec les fournisseurs. Du point de vue des « achats » nous distinguerons ainsi trois types de création de valeur.

Création de valeur par la réduction du coût des achats

Ce type de création de valeur opère quant aux achats effectués dans un environnement compétitif,

lié à un marché de l’offre concurrentiel et donc à une appréciation de la performance fournisseur

largement centrée sur le classique triptyque Qualité, Coût, Délai (QCD).

Création de valeur par l’amélioration de la performance des fournisseurs clés

Ce type de création de valeur opère différemment en fonction du cycle de vie des programmes (amont vs aval) et concerne des fournisseurs dont la performance s’avère critique pour le donneur d’ordres qui s’est engagé sur la réussite technique, industrielle et commerciale de son programme ou de son projet : par voie de conséquence, ces fournisseurs « clés » doivent être proactifs et faire l’objet de plans d’amélioration continue de leur performance, chaque fois que nécessaire.

Création de valeur par la co-innovation

Ce type de création de valeur est obtenu via un co-business development des acteurs basé sur la complémentarité des savoir-faire dans une filière aéronautique boostée en permanence par l’innovation, comme en témoigne tous les deux ans le Salon du Bourget et plus globalement son histoire industrielle.

1.4 Repositionnement de la relation client-fournisseur

Les trois types de création de valeur ainsi identifiées mettent à contribution trois types de fournisseurs et donc trois types de relation client-fournisseur, tout d’abord des relations de « Compétitivité » avec un nombre important de fournisseurs, des relations de « Confiance » avec un nombre plus réduit de fournisseurs clés, et enfin des relations de « Croissance » avec un petit nombre de fournisseurs innovants. Nous observons au final trois niveaux de création de valeur comme indiqué dans le tableau 1.

Niveaux de création de valeur Types de fournisseurs Nombre de fournisseurs pour un grand compte

Co-innovation, co-business

development

Fournisseurs de type Croissance Quelques dizaines

Co-development, co-manufacturing Fournisseurs de type Confiance Quelques centaines

Réduction des coûts Fournisseurs de type

Compétitivité

Quelques milliers

Tableau 1 : les trois niveaux de création de valeur via les achats dans une supply chain type

grand compte

1.5 Repositionnement des acteurs de la relation client-fournisseur

Un rôle tout à fait nouveau pour les fonctions achats des grands comptes

4

La nouvelle supply chain aéronautique nécessite chez les grands comptes des organisations achats capables à la fois de réduire le nombre de fournisseurs mais dans le même temps d’améliorer la performance des fournisseurs clés en pilotant celle-ci en termes de coûts, délais, qualité en aval et en termes de capacité techniques ou industrielles en amont (Supplier Performance Management : SPM) Dans le même temps les achats doivent aussi créer davantage de valeur par une meilleure relation avec les fournisseurs clés (Key Supplier Management : KSM) en construisant avec ces derniers des relations partenariales appropriées en fonction des étapes du cycle de vie des projets /programmes, et donc en pilotant les fournisseurs en termes de co-innovation, co-développement, co-fabrication. Ainsi la segmentation du panel fournisseurs des grands comptes et l’activité de management qui en résulte ne doivent plus être seulement basées sur un classement par volumes achats décroissants (approche classique dite de Pareto, omniprésente dans les manuels achats, et conduisant à des catégories de fournisseurs de classes A, B et C) mais plutôt sur la création de valeur potentielle résultant de leur prestation.

Un rôle des achats qui se met trop lentement en place

Toutes ces évolutions constituent pour la fonction achats un changement historique important, du fait que celui-ci implique également un nouveau mode de fonctionnement avec les prescripteurs, en particulier dans les partenariats de co-innovation et de co-développement, de même qu’avec les fournisseurs quant à les impliquer très en amont sur les projets et programmes. Or selon une étude du Cabinet State of Flux3 de Juin 2009, portant sur 223 services achats dans 15 industries et 9 pays, il ressort que le management des fournisseurs clés reste encore un « add-on job » par rapport au « day-job » des acheteurs. En effet : 62 % des interrogés n’ont pas mis en place de SRM, 57 % pensent ne pas y consacrer assez de temps, 53 % n’ont pas de ressources affectées au SRM, 47 % n’ont pas les compétences nécessaires, 4 % envisagent de développer le SRM, 2 % s’estiment incapables de mesurer les bénéfices du SRM. Point positif qui ressort de cette enquête : 28 % se disent capables de mesurer la valeur du SRM, estimée supérieure à 3 % du montant des achats.

Un enjeu de taille pour les fournisseurs : leur repositionnent sur la chaîne de valeur

Les nouvelles exigences des donneurs d’ordre conduisent à une réduction drastique du nombre des fournisseurs chez les grands comptes. Cette réduction s’accompagne alors de regroupements pouvant prendre alors des formes très variées : des fusions- acquisitions, des Joint Venture, ou encore des partenariats dédiés dans le cadre de tel ou tel projet aéronautique. « Nous faisons évoluer notre chaîne d’approvisionnement et souhaitons disposer de véritables partenaires intégrateurs de haut niveau dans tous les métiers, qu’il s’agisse des aérostructures ou du secteur des outillages de production » déclarait ainsi le responsable de la supply chain d’Airbus en mars 2012.4

2. Emergence de nouvelles organisations et de nouveaux outils pour le SRM

L’observation des évolutions de la supply chain aéronautique met en évidence l’émergence de nouvelles organisations dédiées à un meilleur pilotage de la performance des fournisseurs clés et de la relation avec ces derniers. Sept grandes évolutions sont désormais repérables : la mise en place de structures de SPM (Supplier Performance Management), de structures de KSM (Key Supplier Management), la montée en puissance des acheteurs projets dans les organisations achats, la mise en place d’une gouvernance des achats partenariaux dans les organisations grands comptes, la création de structures de SPM mutualisées au niveau filière aéronautique et enfin l’animation d’écosystèmes fournisseurs par les Pôles de Compétitivité. Cette émergence de nouvelles

3 http://www.stateofflux.co.uk/about_newsroom/companies_are_confusing_spm_with_srm.aspx

4 http://www.perspectives-entrepreneurs.fr/le-numero-du-mois/on-en-parle/comment-airbus-transforme-sa-

filiere/

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organisations dans le monde des hautes technologies qui caractérise l’aéronautique est accompagnée par une émergence transverse : celle des e-outils informatiques visant à simplifier et fluidifier les échanges d’informations complexes entre clients et fournisseurs et sur laquelle nous reviendrons.

2.1 Emergence de nouvelles organisations

Mise en place de structures opérationnelles de SPM (Supplier Performance Management)

L’émergence de ces structures est dorénavant visible dans l’énoncé de leur politique d’achats par les grands comptes via leurs portails fournisseurs. Ainsi le groupe EADS annonce-t-il par exemple sur son site internet : « In order to help them improve, we share our evaluations with suppliers. If needed, EADS helps the supplier to identify the root causes of any problems with delivery of work packages, and to establish appropriate improvement plans. »5. De même « Airbus identifies areas where improvements can be made in the supply chain and implements action plans to achieve those improvements by actively collaborating with our suppliers. »6

On retrouve la même tendance chez les fournisseurs de rang 1, comme par exemple Thales qui annonce également sur son site internet : « Thales s'investit dans le développement de ses fournisseurs stratégiques en apportant un support et une expertise dans le diagnostic et les recommandations d'améliorations de leur chaîne opérationnelle complète.»7

Cette émergence d’équipes dédiées au SPM dans les organisations achats grands comptes se traduit concrètement par la publication régulière d’offres d’emplois émanant des structures ad hoc qui se mettent progressivement en place dans les organisations achats ou supply chain. Ainsi tel équipementier fait par exemple état d’un poste de « Directeur des approvisionnements et Performance Fournisseurs », qui pilote et améliore la performance fournisseurs à la tête d’un service de 70/90 personnes8

, ou tel autre recherche un « Supplier Performance Manager » rattaché cette fois à la Direction Industrielle.9

Désignation de responsables du KSM (Key Supplier Management)

La mise en place de structures de KSM est souvent liée aux enjeux du cycle de vie des programmes et donc aux organisations projets des grands comptes. Tous projets confondus, des fournisseurs peuvent s’avérer des fournisseurs clés du point de vue « criticité » de leur performance attendue. Ainsi on pouvait noter dès 2010 la présence des grands thèmes du SRM dans l’agenda de

l’@viationweek A&D Supply Chain Conference10: « Develop metrics to effectively manage

program/supplier relationships, improve the flow-down of technical requirements, design & schedule changes, implement standardized processes for supplier selection and assess supplier quality » Montée en puissance des acheteurs projets dans les organisations projets

Si le SRM de Compétitivité conduit naturellement à la mise en place d’organisations achats transverses avec des « acheteurs familles » au sein des Directions Achats grands comptes, les deux autres types de SRM (Confiance et Croissance) conduisent plutôt à la mise en place « d’acheteurs projets » au sein des Directions de Programmes.

5 http://www.eads.com/eads/int/en/our-responsibility/strong-supplier-partnerships.html

6 http://www.airbus.com/support/material-logistics/suppliers/

7 https://supplieronline.thalesgroup.com/sol/jcms/c_5007/quality-policy

8 http://safran.profils.org/offre-de-emploi/imprimer-fiche-emploi-directeur-des-appros-et-performance-

fournisseurs-h-f_19440.aspx?LCID=1036 9 http://www.optioncarriere.com/recherche/emplois?s=HISPANO+-+SUIZA

10 http://events.aviationweek.com/current/adsupply/

6

Selon la fiche de poste de l’APEC11, l’ « acheteur projets » pilote et coordonne les achats pour un produit ou un projet complet, en liaison avec les équipes métier et la stratégie globale de l’entreprise. Il achète aussi bien des matières premières, des produits transformés, des prestations de services que des lignes de production.

Le rôle et la mission de ces acheteurs projets va donc largement consister à « faire s’engager » les fournisseurs clés, tant sur leurs propositions en phase devis que sur leur performance intrinsèque en phase exécution. En termes de création de valeur on notera ici que l’optimum « économique » recherché par les acheteurs projets peut s’avérer différent de celui des achats familles, les contraintes d’offsets au sein d’un portefeuille achats grands comptes en sont la parfaite illustration.

Mise en place de la gouvernance des achats partenariaux chez les grands comptes

Lors du Séminaire Pacte PME du 25 octobre 2012, Fabrice Brégier, Président d’Airbus et de Pacte PME déclarait ainsi à propos des achats partenariaux : « cette vision doit maintenant se traduire par des objectifs pour les grands groupes, qu’il s’agisse de nouveaux entrants ou d’émergence de nouveaux partenaires stratégiques parmi les PME déjà fournisseurs. Ils doivent être portés par un responsable à haut niveau entièrement libre du choix des moyens à mettre en place. »12 En effet et nonobstant la signature de chartes ou de pactes, la complexité et l’inertie des grandes organisations peuvent ralentir la mise en place des achats partenariaux, particulièrement dans le cadre des relations grand compte / PME.

La gouvernance des achats partenariaux porte ainsi sur des pratiques nouvelles à mettre en place, lesquelles ont présentées par l’auteur en Séminaire Pacte PME13 réunissant grands comptes et PME le 25 octobre 2012. Elles consistent à établir d’une part le panel des PME fournisseurs à potentiel de croissance et d’autre part à en piloter le développement.

Création de structures de SPM mutualisées entre acteurs d’une même supply chain

L’initiative la plus en lien avec la supply chain aéronautique et l’effet « filière » est probablement celle de SPACE. Créée en juin 2007 lors du Salon du Bourget, et suite à une réflexion commune entre Airbus et ses partenaires majeurs, l’association SPACE (Supply chain Progress towards Aeronautical Community Excellence) rassemble plusieurs grands comptes du secteur aéronautique pour travailler ensemble à la préparation de leurs fournisseurs clés aux défis de l’aéronautique du XXIème siècle. Maurice Perrault, président de l’association rappelait ainsi les raisons du lancement de SPACE14: « Nous avons observé que la supply chain aéronautique n’était pas au niveau pour faire face aux défis de demain : un volume d’avions à livrer toujours plus important, avec des délais de plus en plus courts et des exigences de qualité de plus en plus fortes sur des équipements complexes. Nous avons donc décidé de créer une association pour soutenir nos fournisseurs afin d’améliorer la performance industrielle et donc la compétitivité de la supply chain globale. » SPACE15 offre donc dans cet esprit deux types de services pour l’accompagnement des fournisseurs. Le premier, consiste à aider les donneurs d’ordre membres de l’association à améliorer leurs process industriels par la désignation de deux experts sous label SPACE, via un diagnostic et un suivi de projet. SPACE apporte alors des méthodologies et des outils pour harmoniser les pratiques des processus de la supply chain au plan de la performance qualité et délais de livraison.

Le second service, s’adresse aux partenaires fournisseurs désirant mener des actions d’amélioration de leur processus industriel. SPACE propose alors des interventions de consultants en Supplier

11

http://recruteurs.apec.fr/Recrutement/Marche-Emploi/Fiches-Apec/Fiches-fonctions/Fiches-metiers/Les-metiers-cadres-de-la-fonction-achats 12

http://www.pactepme.org/docs/seminaire/compte_rendu.pdf 13

http://www.pactepme.org/docs/seminaire/seminaire.pdf 14 http://safran-group.com/site-safran/presse-et-medias/espace-medias/article/maurice-perrault-president-de-l?4222

15 http://www.space-aero.org/

7

Development à des prix préférentiels. L’association est aussi en contact avec les Chambres Régionales et les DRIRE (Directions Régionales de l’Industrie, de la Recherche et de l’Environnement) pour soutenir, au niveau des régions, les initiatives de Supplier Development.

Dynamisation de la R&D collaborative par l’organisation de Pôles de Compétitivité aéronautiques

Avec trois pôles de compétitivité dans l’industrie aéronautique et spatiale, la France affiche ses ambitions : bâtir une industrie solide, innovante et diversifiée capable de répondre à un marché mondial fortement concurrentiel et à forts enjeux. AEROSPACE VALLEY16 (1600 établissements et 8500 chercheurs) est le Pôle de compétitivité Midi-Pyrénées & Aquitaine axé sur la sécurité, la sûreté du transport aérien, Terre Vivante et la navigation spatiale, le positionnement et les télécommunications, les systèmes embarqués, les architectures et l’intégration, l’énergie, la propulsion et la motorisation. ASTech17 Paris Région, vise à accroître en Ile-de-France les positions de leader européen de l'industrie des secteurs du transport spatial, de l’aviation d’affaires, de la propulsion et des équipements. Ce pôle constitue le premier bassin d’emplois en France dans le domaine de l’Aéronautique, de l’Espace et des systèmes embarqués, en rassemble ainsi plus de 100 000 personnes et regroupant la majorité des emplois de R&D français. PEGASE18 a quant à lui été lancé en région PACA (Provence-Alpes-Côte d’Azur) à l’initiative de grands industriels (Eurocopter, Dassault, Thales Alenia Space, Areva TA), d'organismes de recherche et de formation (ONERA, INRIA, Université Paul Cézanne Marseille, École Centrale Marseille), et quelques PME (Focus 21, Weirwalves & Controls, Studiel, Artères) et l’UIMM 13-04.

2.2 Emergence d’outils dédiés à la supply chain aéronautique

L’arrivée à maturité des outils et plateformes de E-achats

Côté constructeur, le portail achat SUP@IRWORLD19 d’Airbus existe depuis une dizaine d’années. Il a été construit au départ sur la base de trois outils informatiques couvrant chacun un sous-ensemble du processus achats : Airbus/EADS Sourcing permettant aux acheteurs et aux fournisseurs de travailler de manière « dématérialisée » lors des phases d’appels d’offres ou lors des enchères inversées, Sup@irWorld BuySide dédié au processus « General Procurement goods and services » et Sup@irWorld eSupplyChain couvrant le cycle complet de la supply chain, de la commande à la facturation. De tels outils sont évidemment en constantes évolutions et améliorations. Côté équipementiers, dès 2001 ceux-ci ont développé également des suites d’outils de e-procurement, comme par exemple eSupplyChain et Exindus (Extranet Industriel) chez Thales. eSupplyChain est un portail Internet20 couvrant l'ensemble des flux logistiques entre les différentes entités de la Division Aéronautique et les acteurs impliqués dans le processus d'approvisionnement. Exindus est quant à lui un extranet hautement sécurisé qui permet d'optimiser les échanges de données techniques et disposer d'un espace de collaboration restreint avec les fournisseurs référencés. Il est articulé sur deux modules : «e-coop» pour les échanges de données techniques par affaire et «e-log» pour partager des documents génériques (guides, support de formation, standards du groupe).

Plates formes B2B pour le « collaboratif industriel» : une opportunité de mutualisation des

investissements entre les constructeurs

Dans la supply chain aéronautique la mise en place d’espaces numériques partagés pour la co-conception ou le co-manufacturing s’impose, eu égard aux enjeux des systèmes en traitement des

16 http://www.aerospace-valley.com/

17 http://www.pole-astech.org/site/pages/index.php

18 http://www.pole-pegase.com/

19 www.esourcing.airbus.com/Sourcing

20 https://supplieronline.thalesgroup.com/sol/jcms/c_51531/esupply-chain-aero

8

données commmunes associées aux programmes et projets complexes, soit en termes de PDM (Product Data Management), soit en termes de PLM (Product Life Management). Ainsi dès 2000 les industriels anglo-saxons de l’aéronautique ont-ils développé une plateforme collaborative : Exostar21. Créée par Boeing, Loockeed Martin, Raytheon, BAE et Rolls Royce cette plateforme est interconnectée avec la plateforme Terrabis et couvre une vingtaine de pays depuis fin 2006. Exostar est utilisée par plusieurs dizaines de milliers d’acteurs.22 Du côté des industriels français de l'aéronautique et de la défense et dans le prolongement de l’initiative du standard BoostAero , un "plateau virtuel" de Product Lifecycle Management (PLM) intitulé SEINE (Standards pour l'Entreprise Innovante Numérique Etendue) a été lancé en 2007 sous l’égide du GIFAS. L'objectif du projet SEINE est d'accélérer la numérisation de la Supply Chain aéronautique et défense et des filières d’un même écosystème industriel. Airbus, EADS, Dassault Aviation, Safran, Thales ont donc dans ce cadre lancé un hub commun de collaboration sécurisée, BoostAeroSpace23, un cloud à destination de leurs entreprises étendues. BoostAeroSpace" supporte toutes les fonctions de l'entreprise étendue via 3 services24 : Air Supply qui couvre pour les services partagés suivants : Prévisions de commandes, Ordres d’achats, Stocks de consignation,Commandes / livraisons, Informations d’expédition, Facturation ; Air Collab qui propose deux services différents sur les process et workflows collaboratifs, selon qu’ils sont asynchrones ou synchrones avec le cycle de vie d’un projet, ; et enfin Air Design qui couvre les échanges de données techniques, de données PLM, et enfin permet de faire des co-revues ou d’échanger des catalogues d’articles avec les fournisseurs. Il va de soi que les enjeux liés à la haute sécurité (cryptage) et au cloisonnement des échanges d’informations sont pris en compte par cette plateforme.

La nécessaire standardisation des formats échanges de la e-supply chain aéronautique

Consécutivement à un benchmark avec la filière automobile, et sur proposition de sa Commission Technologies de l’Information, le GIFAS a défini et fait réaliser dès 2005 un format d’échanges standard et international pour la supply chain aéronautique : BoostAero, basé sur la syntaxe ebXML. Ce standard déposé auprès des instances internationales de standardisation UN/CEFACT (ONU) par le GIFAS, l'ASD (Association aéronautique européenne) et l'AIA (Association aéronautique US), couvre les échanges entre clients et fournisseurs dans le domaine de la logistique (plan d’approvisionnement, programme de livraison, commandes, avis d’expédition, réception, factures). Il opère sur 4 couches d’activité : Business Process, Sémantique, Syntaxe et Architecture technique.

L'évolution d’un standard étant inéluctable, une association internationale BoostAero a été créée en mai 2006, avec la mission de la maintenance et du développement des standards d’échanges internationaux de l’industrie aéronautique. A sa naissance, l’association comprenait au départ une dizaine d'adhérents : le Gifas, Thales, Dassault, Safran, Exostar, Daher, Radiall, MBDA (EADS), Zodiac, Terrabis, Intertechnique, ATR, (EADS), SKF.

Standardisation des indicateurs de la performance fournisseur

Le contexte aéronautique est marqué par le développement de hautes technologies. Pour les acteurs de la supply chain, un rôle important pour les achats consiste alors à vérifier la synchronisation des roadmaps technologiques des fournisseurs avec la roadmap technologique du programme / projet, notamment en termes de tenue des rendez-vous industriels clés (« gates »). La filière aéronautique utilise désormais un standard de facto, l’échelle des TRL (Technology Readiness Level)25, issue des

21

http://www.exostar.com/About_Exostar.aspx 22

Ibid. 23

http://www.boostaerospace.com/Pages/home.aspx 24

http://www.boostaero.com/presentation/nm_comprendre 25 https://www.gifas.asso.fr/fichiersPDF/Actualites/ActualitesGIFAS/1_-_LOnera_en_bref.pdf

9

méthodologies développées par la NASA dans les années 1990, lequel est un système de mesure qui permet d'évaluer le niveau de maturité d'une technologie chez un fournisseur en utilisant des repères quantifiés quant à son développement, en vue d’une intégration dans un système ou un sous-système (Tableau 2). Si les pôles de compétitivité mentionnés plus haut (§ 2.1.6.1) ont fait leurs preuves pour amener des idées au stade du TRL 4, leur industrialisation qui consiste à passer du TRL 5 au TRL 9 nécessite environ trois fois plus de financements de même que la mise en œuvre de relations collaboratives client-fournisseurs, sujet qui nous intéresse ici.

Technology

Readiness

Level

de la NASA

Validations correspondantes sur les composants,

produits, systèmes aéronautiques

Champs d’actions

Type de SRM

activé

9 Système « prouvé vol » aux travers de missions opérationnelles réussies

Achats

Collaboratifs

Ex :

Co-industrialisation

SRM de Confiance

8 Vrai système complet et « qualifié vol » au travers d’essais et de démonstrations sol et vol

7 Démonstration d’un prototype du système dans un environnement vol

6 Démonstration d’un modèle ou prototype du système ou sous-système

dans un environnement représentatif (sol ou vol)

5 Validation de composants ou de maquettes dans un environnement représentatif

Pôles de compétitivité

Ex :

Aerospacevalley

Astech

Pégase

SRM de Croissance

(co-innovation)

4 Validation de composants ou de maquettes dans un environnement de

laboratoire

3 Preuve de faisabilité du concept par des moyens analytiques et/ou expérimentaux

2 Concept de technologie et/ou d’application formulé

1 Principes de base observés et analysés

Tableau 2 : Echelle TRL des technologies selon la NASA

Cette échelle est donc largement utilisée et préconisée dans la supply chain aéronautique quant à l’évaluation des fournisseurs vis-à-vis de la maîtrise des technologies qu’ils utilisent.

3. Conceptualisation et modélisation du SRM

3.1 La recherche académique sur le thème du SRM en général

La recherche académique sur le thème du SRM est relativement récente (fin des années 90). Ceci peut expliquer le fait que des publications portent sur des inventaires bibliographiques (Johnsen, Calvi, Phillips, 2011) ou sur la définition proprement dite du SRM et de ses motivations : pourquoi finalement manager la relation client-fournisseur? (Cannon, Perrault, 1999), (Krause, Handfield, Tyler, 2007), (Johnson, Leenders, Day, 2011), (Philippart, Poissonnier, Kourim, 2012), (Alleaume, 2013). La question est légitime dans la mesure où la création de valeur attendue du SRM nécessite du côté client un investissement non négligeable qu’il faut donc justifier en termes ROI. Les thèmes d’investigation et de recherche en SRM semblent donc s’organiser logiquement sur les axes spécifiques à ce registre nouveau qu’est le relationnel, comme le jeu des relations de pouvoir entre acheteur et fournisseur (Caniels, Gelderman, 2007), la motivation (« commitment ») des fournisseurs (Provan, Gassenheimer, 1994), l’importance du comportement (« behaviour ») des acheteurs jusqu’à maintenant plutôt dicté par la réduction (« cost killing ») des coûts (Ramsay, Wagner, 2009). En matière de relations collaboratives liées au développement de produits nouveaux le partage de l’information avec les fournisseurs constitue un facteur de réussite important (Kopecka, Santema, Hultink), (Personnier, Le Dain, Calvi, 2011). De ce point du vue l’apport des NTIC dans les e-échanges est évidemment repéré comme un levier important (Wagner, Essig, 2006). La mesure de cette réussite pose la question des capacités à collaborer et celle des métriques d’évaluation de la performance de la collaboration (Johnsen, Lamming, 2000), (Calvi, Cheriti, Le Dain, 2008), (Kibbeling M., Gelderman C., Calvi R., Ulijn J. et Van Weele A., 2009). Dans une thèse de doctorat sur le sujet (Cheriti, 2011) l’auteure étudie et propose ainsi trois modèles d’évaluation : l’aptitude du client à co-concevoir avec un fournisseur, l’aptitude du fournisseur co-concevoir avec un client, et la performance de la relation dans un projet de Développement de Produit Nouveau (DPN) collaboratif.

10

Quant aux relations collaboratives liées à la co-innovation (incrémentale ou de rupture) avec les fournisseurs, la recherche académique en la matière est encore embryonnaire. Elle porte par exemple sur la détection des fournisseurs innovants (Schiele, Pulles, Veldman, 2011) ou la modélisation de cette détection (Lakemond, Rosel, 2011), (Rehm, Schupp, Matthyssens, 2011). Du fait que la collaboration client-fournisseur s’inscrit le plus souvent dans un écosystème, des travaux de recherche portent sur les effets de cet écosystème dans les relations collaboratives clients-fournisseurs. Ainsi les initiatives SC2126 (les supply chains du 21ème siècle) ou encore SCRIA27 (lancée par l’aéronautique britannique il y a déjà une quinzaine d’années) donnent-elles lieu à des analyses plutôt menées par des cabinets de conseil. Un autre écosystème important est celui de la supply chain automobile, pour lequel les travaux de Heinke (Henke, 2011) ont apporté un éclairage très intéressant sur la création de valeur par la relation client-fournisseur via une dizaine d’années d’observation des grands comptes et notamment du modèle Toyota. De tels travaux restent à faire dans la supply chain aéronautique.

Pour notre part, nous avons tenté de décomposer le business model achats d’un grand compte en un minimum de catégories homogènes basées sur les types de relations client-fournisseur, et également de modéliser les échanges de toute nature induits par les relations en elles-mêmes, partant du constat simple suivant : l’approche ISO décrit bien les processus de l’entreprise, mais en revanche elle semble inadaptée pour modéliser des relations, du simple fait que la relation en elle-même ne se réduit pas à un « processus. ». Enfin, si l’on veut s’affranchir des processus et des organisations qui varient considérablement d’un grand compte à l’autre ou d’un grand compte à une PME fournisseur, il est nécessaire d’envisager une modélisation « en couches », approche inexplorée à ce jour en SRM, à l’instar des modèles relationnels utilisés en télécommunications (Protocole TCP IP d’internet par exemple).

3.2 Proposition d’un modèle de création de valeur basé sur le SRM : le modèle des « 3 C »

Le modèle « 3C » en lui même

Comme nous l’avons déjà repéré plus haut et résumé dans le tableau 1, trois types de relation client- fournisseur peuvent donc être distinguées et analysées pour décrire le SRM : les relations de Compétitivité, de Confiance, de Croissance, c’est-à-dire les « 3 C » schématiquement représentés sur la figure 3.

Figure 3 : les trois types de SRM du modèle « 3C » et leur type de fournisseur associé

Le SRM de Compétitivité est celui qui consiste à travailler et optimiser le fameux triptyque Prix-Qualité-Délai des fournisseurs et à le formaliser dans un contrat d’achat « as usual ».

26

http://www.industryforum.co.uk/practical-solutions/supply-chain-solutions/sc21/

27 http://thinksigma.co.uk/brands-stategic-partners/scria/

11

Le second type ou SRM de Confiance, concerne des fournisseurs pour lesquels il fait sens d’accompagner la classique relation client - fournisseur classique par une démarche proactive d’amélioration continue de la performance : il s’agit alors le plus souvent de compléter le contrat d’achat par un contrat de progrès. Enfin, le SRM de Croissance concerne des fournisseurs aux savoir-faire complémentaires, avec lesquels l’entreprise cliente va co-innover afin de développer son offre produits, systèmes ou services et ainsi son activité. A chacun des types de SRM ainsi identifié correspond alors un type de fournisseurs, ce qui permet alors de structurer le panel fournisseurs de l’entreprise cliente en trois catégories, tel qu’indiqué tableau 1 et figure 3.

Etalonnage du modèle « 3C » en termes de création de valeur

Dans l’exemple générique d’un portefeuille achats grand compte de type hi-tech tel qu’indiqué tableau 3 supposons que nous ayions un portefeuille achat composé 5 segments, représentant un montant achat global annuel de valeur 100. L’analyse consiste alors à « projeter » un à un les segments achats sur le business model SRM « 3C ».

Segments

achats du

portefeuille

achat

Valeur

en base

100

Valeur en mode

COMPETITIVITE

Valeur en

mode

CONFIANCE

Valeur en mode

CROISSANCE

Systèmes et

sous-ensembles

30 15 10 5

Sous-traitances 25 10 10 5

Composants et

matières

15 10 4 1

Informatique

(matériel et

logiciel)

20 5 10 5

Frais généraux et

divers

10 7 2 1

Total 100 47 36 17

Tableau 3 : Projection d’un portefeuille achats sur le modèle « 3C »

Cette projection permet ici d’en déduire que 47 % du portefeuille achats est sont traités en mode SRM COMPETITIVITE, 36 % en mode CONFIANCE et 17 % en mode CROISSANCE. On notera au passage que l’on obtient à ce stade une visualisation du portefeuille achats de l’entreprise relativement différente d’une décomposition ABC issue d’une analyse Pareto (Figure 4)

Figure 4 : Exemple de décomposition en valeur d’un portefeuille achats selon le modèle des « 3C »

L’étape suivante de l’étalonnage consiste alors à bien identifier en face de chaque montant la liste des fournisseurs concernés (Tableau 4).

Type de SRM Valeur en base 100 Liste des fournisseurs

COMPETITIVITE 47 % Fournisseurs:

Société X

CONFIANCE 36 % Fournisseurs :

12

Société Y

CROISSANCE 17 % Fournisseurs :

Société Z

Tableau 4 : Résultat de la projection : les enjeux achats par type de SRM et type de

fournisseurs

A ce stade, on peut alors associer une valeur estimative de création de valeur à chaque type de SRM : 5 à 7% de réduction de coûts en mode Compétitivité, principalement obtenus par des leviers achats de type massification et mise en concurrence, 12 à 16 % de coûts évités en mode Confiance par les leviers achats amont impliquant les fournisseurs dès les phases de conception et/ou en les améliorant par les leviers du Supplier Development. Ces pourcentages de valeur résultent d’une heuristique elle-même basée sur une dizaine d’années de reporting des gains achats observés par l’auteur dans un grand groupe industriel ( 5000 points de mesure). On dispose donc ainsi d’un business model économique des gains achats, global pour toute l’entreprise (Tableau 5)

Type de SRM Leviers génériques de

création de valeur

Economies achats

COMPETITIVITE Gains achats de 5 à 7% Gains achats globaux de 2.3 à 3.3

en base 100

CONFIANCE Coûts évités de 12 à 16 % Coûts évités globaux de 4.3 à 5.8 en

base 100

CROISSANCE Coûts et risques de R&D partagés Somme des coûts de R&D évités

(estimation à faire par projet)

Tableau 5 : Résultat de la projection : les « gains » achats par type de SRM

3.3 Proposition d’un modèle de relation client-fournisseur : PRIME ©

Pourquoi un modèle pour observer et décrire les relations ?

A chaque business model achats des « 3C » correspond donc une typologie de relations client-fournisseur qui lui est propre. Vu des achats, ces relations concernent les interactions internes avec les autres fonctions de l’entreprise, et en externe, avec tout l’écosystème des fournisseurs. Y-a-t-il un modèle unique pour décrire, analyser le fonctionnement global de toutes ces relations afin de l’améliorer ? Une première approche spontanée consiste à procéder par essais-erreurs et comme on peut l’observer celle-ci est à l’œuvre sur le terrain. On peut, par exemple, élaborer des chartes « relationnelles » visant à bien gérer les pratiques : stopper les mauvaises et encourager les bonnes et aller plus loin en termes d’engagement quant à la signature de pactes. Cela est nécessaire et souvent urgent. On peut aussi, à l’exemple des chercheurs en physique, imaginer un modèle offrant une description fonctionnelle globale du SRM vu « comme un système » au sein de “l’entreprise étendue” en vue d’identifier ensuite de façon plus sûre les changements à opérer pour l’optimiser, indépendamment des organisations et des organigrammes. C’est cette approche holistique que nous avons retenue. Nous avons donc développé un modèle de SRM, décrit en détail dans (Potage, 2011a), modèle baptisé PRIME© (Purchasing Relationship Integrated Model for Enterprises). Ce nom a été choisi pour insister sur le fait qu’on ne doit pas essayer d’améliorer la fonction achats de façon séparée du reste de l’entreprise : le modèle doit être intégré et donc couvrir l’ensemble des fonctions de l’entreprise, y compris sa Direction Générale.

Le modèle PRIME ©

PRIME est inspiré d’OSI (Open Systems Interconnexion), un modèle en 7 couches utilisé dans le domaine des télécommunications. Ce modèle comprend 4 couches dites basses (couche physique, liaison de données, réseau, transport) et 3 couches hautes (session, présentation et application). La couche physique est celle où s’échangent les informations sous forme de « 0 » et de « 1 », comme les réseaux filaires ou les réseaux 3G bien connus. La couche “application” correspond par exemple à

13

celle d’une messagerie électronique, laquelle va activer les couches intermédiaires en vue de la diffusion des e-mails sur la couche physique. L’esprit de notre approche consiste donc à spéculer sur le fait qu’il y a une analogie de fonctionnement du SRM entre l’entreprise cliente et ses fournisseurs et les émetteurs-récepteurs d’un réseau de télécommunications. L’originalité d’un modèle « en couches » réside par ailleurs dans le fait que chaque couche assure une fonctionnalité homogène du SRM, instanciée par la couche immédiatement supérieure et qu’elle active la couche inférieure quand elle a assumé son propre rôle (principe de subsidiarité). Le modèle OSI a donc été transposé à la fonction achat, en le réduisant à 6 couches seulement, comme indiqué figure 5. La couche 1, “comptable”, est celle où l’on échange les factures et les règlements. La couche 2, “transaction”, correspond aux échanges de type commande et livraison des prestations. La couche 3 est celle bien connue du “contrat”. La couche 4, “communication”, concerne la tous les échanges d’informations préalables à la négociation d’un contrat : on aura donc ici les classiques échanges RFI (Request for Information) et RFQ (Request for Quotation) entre les acheteurs et les fournisseurs. La couche 5, “politique”, au sens « policy » des anglo-saxons, recouvre à la fois la définition de la stratégie d’achats de l’entreprise et ses tactiques de mise en œuvre : elle est donc censée fournir une description des politiques achats du segment, du projet ou de l’entreprise tout entière. Enfin, la couche 6, “valeurs”, correspond à la fois aux valeurs de nature RSE (Responsabilité Sociétale et Environnementale) sur lesquels l’entreprise entend assoir son activité et donc les relations avec ses fournisseurs mais aussi aux types de créations de valeurs par les achats de l’entreprise (Olaf de Hemmer, Poissonnier, Jehanin , 2013). Jusqu’à présent, les fonctions achats se sont surtout concentrées sur les couches basses du modèle et les couches supérieures sont très inégalement maîtrisées dans les organisations (d’où l’initiative de création de responsables des achats partenariaux proposée en 2012 par Pacte PME pour finalement mieux faire fonctionner ces couches).

Figure 5 : la représentation en couches du modèle PRIME©

Le modèle PRIME permet donc de structurer et de hiérarchiser les mécanismes d’échanges entre l’entreprise cliente et ses fournisseurs.

3.4 Fonctionnement des couches du modèle PRIME

A chaque couche ses interlocuteurs et parties prenantes du SRM, quelles que soient les organisations

PRIME permet d’identifier et préciser « qui parle à qui » à chaque niveau, de quelle façon et avec quels moyens dans les « liaisons » du SRM. Pour la couche “valeurs”, il s’agit à l’évidence de la Direction Générale. Pour la couche “politique”, ce sont souvent les grandes directions des achats qui expriment la politique de l’entreprise à l’égard des fournisseurs. La couche “communication” est prise en charge par les achats mais aussi par les autres directions opérationnelles : les achats n’en ont pas le monopole. La couche “contrat” est traitée par la direction des achats et les services juridiques. La couche “transactions” par les services achats et d’approvisionnement. Enfin la couche “comptable” est évidemment prise en charge par la comptabilité fournisseur, généralement rattachée à la Direction Financière.

A chaque couche un rôle bien précis

Chacune des couches est donc caractérisée par ses « stake-holders », ses leviers d’efficience, ses

indicateurs de performance et ses outils. Ainsi pour la couche 1 (comptable), le stake-holder est

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évidemment la comptabilité fournisseur. Les leviers d’efficience de cette couche sont alors la

dématérialisation des factures et des règlements. Les indicateurs sont la tenue des budgets de

dépense achats et la vérification des gains achats réels. Les outils sont ici l’ERP, les chèques, les

virements, et de plus en plus les factures électroniques.

Pour les couches 2 et 3 nous retrouvons là le fonctionnement classique des services achats, que nous

ne rappellerons donc pas ici.

Pour la couche 4 (communication), les « stake-holders » sont le Président, la Direction Générale, la

Direction de la Communication en externe et en interne, et également l’ensemble des prescripteurs.

Les leviers d’efficience sont alors le traitement des conflits relationnels identifiés objectivement

(« Pourquoi sommes-nous finalement fâchés avec tel fournisseur? »), l’écoute, la transparence et le

respect des règles. L’indicateur clé de cette couche est celui de la qualité du relationnel des

interfaces. Les outils sont les rapports annuels d’activité, les assemblées des actionnaires, les

enquêtes d’opinion fournisseurs, les MoU (Memorandums of Understanding) et les accords de

confidentialité.

Pour la couche 5 (politique), le « stake-holder » est ici constitué par le binôme prescripteur-acheteur

amont. Les leviers d’efficience sont alors l’ensemble des bonnes pratiques d’achat amont et la

politique d’achat par segment. Les indicateurs sont les gains achats potentiels. Les outils clés sont les

bases de données achats et marketing et les outils d’intelligence économique.

Pour la couche 6 (valeurs), les « stake-holders » sont le Président et la Direction Générale, les

Directeurs des Business-Units, le management en général. Les leviers d’efficience sont les valeurs

communes de type RSE (sociales, sociétales, environnementales), les valeurs managériales

appliquées aux ressources internes (employés) et externes (clients et fournisseurs), l’esprit

d’innovation. Les indicateurs sont la mesure de la qualité relationnelle, les notations des agences

extra-financières, les résultats des enquêtes d’opinion clients/fournisseurs. On voit également

apparaître ici des outils de communication interne et externe avec des portails dédiés aux

fournisseurs, de même qu’une importance croissante et rapide des réseaux sociaux professionnels.

3.5 Analyse des relations client-fournisseur du business model « 3C » avec PRIME

Re-segmention du panel des fournisseurs par niveau de création de valeur

La mise en œuvre du modèle conduira également à revisiter et à requalifier tout le panel fournisseurs, étant entendu que se mettre d’accord en interne sur les critères de sélection n’est pas toujours facile. Opérer ce classement est pourtant indispensable pour définir le type de SRM qui s’appliquera à chaque fournisseur. Ce travail accompli, le classique panel fournisseurs sera donc segmenté en trois catégories de fournisseurs comme indiqué initialement sur le tableau 1 : ceux du type Compétitivité, ceux du type Confiance et ceux du type Croissance / co-innovation. Dans cette dernière catégorie (co-innovation) on verra apparaître des relations avec un type

particulier de fournisseurs, comme les start-up, avec lesquelles les Directions Scientifiques et

Techniques des grands donneurs d’ordres entretiennent des relations de R&D classiques ou en mode

« open innovation », voire des relations plus complexes lorsque la Direction du Corporate Venture

investit chez certaines d’entre elles. D’une certaine manière on est bien là dans « l’achat

d’innovation », à travers des investissements ou des prises de participation dans des entités

entrepreneuriales, dont les images d’Epinal étaient il y a peu le garage de MM. Hewlett et Packard,

ou encore celui de M. Bill Gates… Entrer dans ce jeu de manière proactive n’est pas du tout évident

pour les fonctions achats !

Analyse du fonctionnement de chaque type de SRM

Décrivons donc avec PRIME chacun des business models de «3C » : Compétitivité, Confiance,

Croissance. Avec les fournisseurs de type Compétitivité (tableau 1), la couche “politique” gérera

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essentiellement la réduction des coûts, la stratégie d’achat, la politique par segment, et la couche

“communication” les classiques RFI et RFQ.

Avec les fournisseurs de type Confiance (tableau 1), la couche “politique” gérera la co-performance

et le développement fournisseur. La couche “communication” mettra en oeuvre des « conventions

fournisseurs » et des revues destinées à donner à ces derniers de la visibilité sur les projets et les

affaires. Les contrats seront donc non seulement des contrats classiques mais aussi des contrats de

progrès. Les transactions concerneront, outre l’achat de produits, l’amélioration de la performance.

Sur le plan comptable, on pourra parler de co-investissement aval : la direction achat cherchera par

exemple convaincre la direction financière d’investir directement ou indirectement chez un

fournisseur.

Enfin, dans les relations fournisseurs placées sous le signe de la Croissance-innovation (tableau 1), la

couche “politique” sera donc orientée vers le co-business. La couche communication, assurera la

visibilité R&D pour le fournisseur et les RFI ne signifieront plus ici Request for Information mais

Request for Innovation via des réunions entre les directeurs techniques industriels et les fournisseurs

visant à leur exposer les besoins en innovation. Les contrats porteront également sur la co-

innovation et le co-investissement. La couche “transaction” concernera les nouveaux produits,

systèmes et procédés. Dans la couche “comptable”, on traitera les co-investissements amont, par

exemple des investissements dans des laboratoires de recherche pour mettre au point de nouveaux

matériaux. Le tableau 6 ci-après présente une vision globale des 6 couches du SRM vues selon PRIME

pour les trois business models de création de valeur.

Couches du modèle

PRIME

SRM de type

Compétivité

SRM de type

Confiance

SRM de type

Croissance

Valeurs COMPETITIVITE CONFIANCE CROISSANCE /

INNOVATION

Politique • Réduction des coûts

• Stratégie achats

• Politique par segment

• Politique fournisseurs

• Co-performance

• Développement fournisseurs

• Co-business

Communication • RFI, RFQ

• Conventions fournisseurs

• Revues fournisseurs

• Partage de visibilité sur projets et affaires

• RF-innovation

• Partage de visibilité sur R&D et technologies

Contrat • Contrat « as usual » • Contrat « as usual » + Contrat de progrès

• Contrat « as usual » + Contrat de co-R&D + Contrat de co-innovation

Transactions • Commande

• Appel à livraison

• Réception, recette

• Amélioration de la performance

• Nouveaux produits

• Nouveaux systèmes

• Nouveaux procédés

Comptable • Devis, factures

• Règlements

• Co-investissement aval

• Co-investissement amont

Tableau 6 : synthèse de la description des trois types de SRM selon le modèle PRIME

La mise en œuvre de PRIME permet donc d’aligner clairement toutes les pratiques achats tel que : valeurs RSE, achats durables, marketing achats, supplier développement, portails fournisseurs, innovation fournisseur, réduction des risques fournisseurs, partage des risques R&D, portails collaboratifs, etc. Ces pratiques ne prennent tout leur sens que lorsqu’elles sont articulées à bon escient sur chacun des trois modèles auquel elles correspondent, tel que résumé dans le tableau 6.

16

Evaluation du fonctionnement des trois types de SRM avec PRIME

Si le modèle PRIME permet de décrire le fonctionnement idéal des différents types de SRM, il permet également de procéder à des évaluations externes ou à des autoévaluations. Il suffit, par exemple, de noter l’entreprise cliente et l’entreprise fournisseur sur chacune des couches de chaque type de SRM selon une notation de 1 (mauvaise) à 5 (excellente) et de positionner le résultat en superposition sur un diagramme de type radar, résumant ainsi simplement la performance globale des trois types de SRM en une seule représentation (figure 6). C’est là que la pertinence du modèle opère quant à évaluer séparément les couches du SRM par type de modèle de création de valeur. Enfin, pour un type de SRM donné il est également possible et selon la même échelle de notation d’évaluer la performance SRM de l’entreprise cliente et de l’entreprise fournisseur (figure 7). Ainsi pour une couche donnée lorsque l’évaluation entre les deux révèle des écarts importants, on peut alors identifier la cause racine des dysfonctionnements du SRM de même que les acteurs concernés. Les actions correctives n’en seront que plus pertinentes !

Figure 6 : évaluation de la performance

de l’entreprise sur les trois types clés de

SRM

Figure 7 : évaluation SRM

croisée client-fournisseur

On peut aussi procéder à des évaluations croisées : l’entreprise demande à son fournisseur de la noter sur les six couches, et réciproquement. On peut par exemple s’apercevoir alors qu’il ne sert à rien d’établir des contrats très sophistiqués si l’on n’a pas adopté de position claire sur la couche “politique”, ou encore s’il n’y a pas de valeurs clairement affichées par la direction générale en matière de relations fournisseurs de co-innovation. Bref, établir les bases nécessaires à chaque type de SRM, plutôt que de partir systématiquement et uniquement dans le SRM de Compétitivité.

Si les grands comptes maîtrisent plutôt bien les achats de type Compétitivité, PRIME permet ainsi d’identifier les adaptations nécessaires au bon fonctionnement des deux autres SRM, dont les rouages sont beaucoup plus subtils (Potage, 2011b).

4. Piloter les trois niveaux de création de valeur du modèle « 3 C » avec PRIME

4.1 Tout d’abord maîtriser les couches des SRM de Compétitivité et de Confiance

Pour chaque type de SRM on peut donc définir précisément le fonctionnement idéal de chaque couche et c’est bien là l’intérêt de disposer d’un modèle. Avant de décrire le SRM de croissance / co-innovation décrivons rapidement les SRM de Compétitivité et SRM de Confiance qui selon nous constituent les fondamentaux pour la fonction achat, avant d’aborder les sentiers de la co-innovation avec les fournisseurs. Les SRM de Compétitivité et de Confiance sont donc décrits couche par couche dans les tableaux 7 et 8 ci-après.

Couches PRIME Fonctionnalités des couches

du SRM de type COMPETITIVITE

Valeurs • Les valeurs RSE de l’entreprise sont explicitées et connues

• Les objectifs permanents et conjoncturels de compétitivité de l’entreprise (en interne et en externe) sont explicités et énoncés

Politique • Les fournisseurs de type Compétitivité sont identifiés

• La politique de réduction de coûts est énoncée

• La politique achats globale et par segments est définie et énoncée

• La politique « fournisseurs » est définie et énoncée (référencement, sélection, indicateurs de performance, …)

Communication • La communication globale vers les fournisseurs de type Compétitivité est menée régulièrement via des Conventions Fournisseurs, diffusée via des Portails Fournisseurs, des Conférences de Presse, des réunions sectorielles, …

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Contrat • Les achats de l’entreprise sont couverts par des contrats spécifiques et / ou des contrats cadres

Transaction • La performance fournisseurs (Qualité, Coût, Délai) concernant les commandes et livraisons en application des contrats d’achats est mesurée et suivie

Comptable • Le règlement des factures fournisseurs est conforme aux règles et lois en usage ainsi qu’aux chartes et / ou conventions signées

Tableau 7: fonctionnement des couches PRIME du SRM de COMPETITIVITE

Couches PRIME Fonctionnalités des couches

du SRM de type CONFIANCE

Valeurs • Les valeurs RSE de l’entreprise sont explicitées et connues

• Les objectifs de performance des fournisseurs de type confiance sont définis et annoncés (gains de compétitivité, amélioration des performances Q,C,D, …)

Politique • Les fournisseurs de type Confiance sont identifiés

• La politique de « supplier development » (modes curatif et préventif) est explicitée

Communication • Des revues de performances sont organisées à une fréquence ad hoc (selon les programmes de R&D, les projets et affaires, …)

• Une visibilité planning sur les programmes de R&D et sur les projets et affaires est régulièrement communiquée aux fournisseurs de type Confiance

Contrat • Au-delà des contrats d’achats « as usual » des contrats de co-développement et/ou des contrats de progrès sont négociés et mis en place avec les fournisseurs de type Confiance

Transaction • Aux indicateurs classiques « Q, C, D » s’ajoutent les indicateurs d’amélioration de

performance associés aux programmes de « supplier development »

Comptable • Des co-investissements sont éventuellement décidés avec certains fournisseurs de type Confiance ou en mutualisation filière (technologie, méthodes qualité communes, portails ou plateformes informatiques communes, formation, …)

Tableau 8: fonctionnement des couches PRIME du SRM de CONFIANCE

Les analyses menées dans le cadre des Etats Généraux de l’Industrie, ayant mis en évidence un déséquilibre important de la relation clients – fournisseurs en France, il en est résulté trois actions correctives françaises concomitantes et importantes : la création par décret du Président de la République française en avril 2010, de la Médiation Inter-entreprises, la mise en place par la CDAF (Compagnie des dirigeants et acheteurs de France) d’une charte des relations inter-entreprises et le Pacte PME. La Médiation28 a ainsi trois missions principales: « Réhumaniser la relation entre clients et fournisseurs : la rendre plus humaine, recréer du lien, réinsérer du dialogue, tout cela dans le respect mutuel des engagements, inciter les entreprises à assurer leur indépendance stratégique (veiller à ne pas dépasser 15 % du chiffre d'affaires, au-delà le taux de dépendance devient dangereux) et renforcer la responsabilité des leaders de filières : il existe un véritable avantage économique et financier à développer une relation partenariale basée sur la confiance et le « gagnant-gagnant » entre les acteurs d’une filière. ». Quant à la Charte CDAF29 des relations inter-entreprises rassemblant, début 2012, 245 grandes entreprises et organismes socioprofessionnels signataires, elle a pour objectif de construire une relation équilibrée et durable entre les grandes entreprises et leurs fournisseurs, dans la connaissance et le respect des droits et devoirs respectifs de chaque partie, un changement culturel profond. L’intérêt d’un tel dispositif est double : permettre aux donneurs d’ordres signataires de faire savoir et officialiser leur volonté de s’inscrire dans une relation partenariale « gagnant-gagnant » avec leurs fournisseurs, et enfin désigner un « Correspondant » PME au sein de l’entreprise signataire, qui interviendra en tant que médiateur interne pour faciliter le règlement des éventuels litiges fournisseurs. Le Pacte PME30 au sein duquel la filière aéronautique est très bien représentée (le Président de Pacte PME est également actuellement celui d’Airbus) est quant à lui une association regroupant PME et grands comptes pour agir en faveur du développement des PME d’innovation et de croissance. Pacte PME aide donc ses membres à mettre en place une politique d'achats partenariaux en diffusant des pratiques diffusées dans quatre cahiers accessibles sur le site de Pacte PME. Cinq concernent

28

http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9diation_inter-entreprises

29 http://www.cdaf.fr/presentation/chartePME.php

30 http://www.pactepme.org/

18

l’INNOVATION31, sept concernent les RELATIONS PARTENARIALES32, sept concernent l’ADAPTATION DES REGLES33 et enfin sept concernent les EFFETS DE LEVIER34.

4.2 Puis maîtriser les couches des SRM de Croissance et de Co-innovation

S’agissant du pilotage de l’innovation avec les fournisseurs et les fondamentaux des SRM de Compétitivité et de Confiance étant maîtrisés, nous obtenons les différentes fonctionnalités du SRM de croissance créateur de valeur par la co-innovation (Tableau 9).

Couches PRIME Fonctionnalités des couches

du SRM de type CROISSANCE

Valeurs • Les valeurs RSE de l’entreprise sont explicitées et connues

• Les objectifs de performance des fournisseurs de type croissance sont définis et annoncés (nouvelles technologies ou procédés à maîtriser, nouveaux produits / systèmes à

développer, nouveaux services à commercialiser,…)

Politique • Les fournisseurs de type Croissance sont identifiés

• La politique d’innovation avec ces fournisseurs est définie (innovation incrémentale ou de

rupture, innovation technologique ou de procédé, degrés de maturité technologique par

technologie et calendrier associé, …)

Communication • Des revues de présentation de la stratégie commerciale, technique (R&D, roadmaps

technologiques) et industrielle de l’entreprise cliente sont régulièrement organisées avec les fournisseurs de type Croissance

• Des « Request for Innovation » sont régulièrement lancés pour identifier les start up ou PME/PMI innovantes

Contrat • Au-delà des contrats d’achats « as usual » des contrats moyen / long terme de co-innovation et de co-investissement technologique sont négociés et mis en place

• Les aspects « brevets » et « propriété intellectuelle » sont pris en compte dans les contrats

Transaction • Aux indicateurs classiques « Q, C, D » s’ajoutent les indicateurs de type TRL « Technology Readiness Level » appliqués aux fournisseurs de type Croissance, de même que des pratiques de « roadmapping technologique »

Comptable • Des co-investissements sont éventuellement décidés avec certains fournisseurs de type Croissance (nouvelles technologies, nouveaux matériaux ou procédés, contrats de recherche fondamentale ou appliquée avec des laboratoires ou universités, fonds

d’investissement type Aérofund)

Tableau 9 : fonctionnement des couches PRIME du SRM de CROISSANCE (Innovation)

5. Analyse du SRM de la filière aéronautique selon le modèle PRIME

Muni du modèle PRIME nous pouvons alors observer les relations clients-fournisseurs à l’œuvre dans un écosystème come celui de la supply chain aéronautique. Cette observation par business model de création de valeur est présentée ci-après et sont seulement présentées ici les initiatives significatives ou exemplaires du point de vue du modèle PRIME. 5.1 Analyse du business model Compétitivité

Le fonctionnement de la couche valeurs s’améliore du fait que la plupart des grands comptes ont signé la charte CDAF ou sont membres actifs de Pacte PME, dont le Président est également celui d’Airbus. La couche transaction est considérablement fluidifiée par l’utilisation du standard d’échange BoostAero tel que défini par le Gifas pour améliorer la compétitivité de la e-supply chain aéronautique. Quant à la couche comptable et on signalera ici une Résolution adoptée en Assemblée Générale Ordinaire du GIFAS du 5 juillet 2012 quant à inciter les donneurs d'ordre à transmettre aux PME un carnet de commande ferme, sur 6 mois, afin de leur fournir la visibilité nécessaire à leurs investissements et faciliter leur accès aux prêts bancaires, et ce sur l’ensemble de la supply chain. Ce délai a été défini en concertation avec les PME et les banques locales, qui ont indiqué le cadre

31

http://www.pactepme.org/docs/cahiers/innovation.pdf 32

http://www.pactepme.org/docs/cahiers/relations-partenariales.pdf 33

http://www.pactepme.org/docs/cahiers/adaptation.pdf 34

http://www.pactepme.org/docs/cahiers/effet-de-levier.pdf

19

temporel adéquat pour faciliter les prêts. En parallèle, le GIFAS cherche à s’interfacer avec ces banques, pour inciter celles-ci à fournir les fonds requis par ces PME35.

5.2 Analyse du business model Confiance

Le fonctionnement de la couche politique est en amélioration constante du fait que les donneurs d’ordre et les fournisseurs de rang 1 ont défini pour la plupart une politique de supplier development avec leurs fournisseurs clés ; ces politiques sont dorénavant clairement énoncées sur les portails fournisseurs ad hoc de chaque grand compte. D’où l’initiative SPACE en mode mutualisation mentionnée plus haut. La couche communication s’améliore aussi constamment de par les initiatives des grands comptes qui organisent des conventions fournisseurs appropriées, soit directement, soit de manière mutualisée au sein des pôles de compétitivité Aerospacevalley, Astech ou Pégase. En termes d’outils de communication avec les fournisseurs, des portails dédiés comme SOL (Supplier On Line de Thales) ont été mis en place dès 2005. Enfin la couche transaction a vu les initiatives de développement par les grands comptes des E-outils comme ceux mentionnés plus haut, de même que le lancement de la Plateforme B2B mutualisée Boostaerospace, traduisant ainsi un haut niveau d’investissement en matière d’outils collaboratifs au sein de la supply chain aéronautique.

5.3 Analyse du business model Croissance

Une réflexion commune à plusieurs Directeurs Achats grands comptes a été organisée par le Gifas en

2012 sur le thème de l’amélioration des bonnes pratiques de co-innovation entre grands comptes et

PME. Il en est résulté un guide de ces bonnes pratiques de co-innovation diffusé à l’occasion du

Salon du Bourget 2013.36

Dans ce guide, les Directeurs Achats grands comptes participants au groupe de travail ont tenu à

exprimer leurs valeurs communes et partagées au sein de la filière quant à l’innovation avec les

fournisseurs, à savoir qauant à la couche valeurs : « L’industrie aéronautique est une industrie à forte

valeur ajoutée dont le développement a été possible notamment grâce à l’innovation. A ce titre, la

contribution de nombreuses PME françaises s’est avérée déterminante. En vue du développement

d’une communauté d’actions, le renforcement de la collaboration des grands maîtres d’oeuvre et des

PME est primordial pour consolider et amplifier la réussite de cette filière. Ce renforcement nécessite

à la fois une simplification des relations entre les parties prenantes et l’élargissement de ces relations

avec d’autres. Ainsi est créé un climat de confiance qui doit permettre d’accélérer la croissance

mutuellement profitable afin de maintenir et renforcer la compétitivité de la filière. Dans cet esprit,

le maître d’œuvre affiche et communique ses engagements dans sa relation avec des tiers en

matière d’innovation »37

Le Guide des bonnes pratiques de co-innovation grands comptes PME propose ensuite une amélioration de chaque couche en actant le fait que le business model achats dominant, basé sur la stricte compétitivité doit être adapté au contexte innovation qui caractérise le développement de la filière aéronautique. Ce contexte implique en effet nombre de PME innovantes pour lesquelles la relation avec les grands comptes industriels peut s’avérer difficile. Les modalités de cette relation complexe et tripartite sont donc à rééquilibrer, incluant ainsi les prescripteurs techniques et industriels, les acheteurs et les fournisseurs. Trois sensibilités « métier » sont alors à prendre en

35

http://www.cercleindustrie.eu/sites/default/files/images_site/2102013les_facteurs_cles_de_succes_de_la_filiere_transport_-final.pdf 36

Guide des bonnes pratiques de co-innovation entre grands comptes et PME, Gifas, Bourget 2013 37

Guide des bonnes pratiques de co-innovation entre grands comptes et PME, salon du Bourget 2013

20

compte par les grands comptes et à décliner en bonnes pratiques des relations collaboratives de co-innovation. Eu égard au nombre important des partie prenantes et à la complexité des organisations, la première de ces bonnes pratiques consiste à désigner chez les grands comptes un responsable de haut niveau (cf. § 2) lequel établit en permanence la liste des PME fournisseurs clés à potentiel d’innovation, vérifie la mise en application des bonnes pratiques achats de co-innovation à chaque étape du processus achats, facilite la mise en contact des parties prenantes et soutient si nécessaire le développement de telle ou telle PME clé. Du point de vue du processus achats ces bonnes pratiques clés de co-innovation s’avèrent déterminantes dès l’étape caractérisation du besoin (couche politique), quant à placer les fournisseurs dans une dynamique d’amélioration de leur offre en leur indiquant (couche communication) les thèmes d’innovation attendue et la perception du marché final (mode « push ») de même qu’en détectant les capacités d’innovation fournisseurs via des appels à compétences (mode « pull »). L’étape suivante de la sélection des fournisseurs doit quant à elle proposer des allotissements et des règles du jeu clairement définis du point de vue éligibilité des PME. La principale adaptation du processus achats au contexte de la co-innovation concerne l’étape suivante « négociation / contrat » (couche contrat): à ce stade les parties prenantes doivent avoir impérativement précisé les règles contractuelles de coopération et de valorisation de l’innovation ; en particulier les clauses liées à la propriété intellectuelle et les modalités d’accompagnement contractuel par le maître d’œuvre sont-elles alors clairement définies. L’ultime étape de management du contrat de co-innovation est assortie de mesures appropriées de la performance, notamment en termes de suivi de la maturité des innovations (indicateur Technology Readiness Level par exemple) et de la maturité « industrielle » attendue du prestataire selon les jalons ultérieurs des programmes (couche transaction). Enfin et du point de vue investissement (couche comptable), Airbus, la Caisse des Dépôts et Consignations Entreprises, le Groupe Safran, EADS et Eurocopter ont signé l’accord du fonds d’investissement AEROFUND 3, d’un montant de 150 millions d’euros à destination de la filière aéronautique française. Aerofund38 a pour objectif de « prolonger le fonds Aerofund 2 signé en 2008, afin de soutenir le développement des PME et ETI sous-traitantes du secteur aéronautique, et d’accompagner la croissance et l’émergence d’entreprises capables de se positionner comme des partenaires essentiels de ce secteur. » Vision d’ensemble des trois SRM avec le modèle des « 3C »

Au final et pour reprendre la même présentation que celle de la figure 3, nous obtenons une vision

globale des initiatives et tendances de création de valeur dans la supply chain aéronautique telle que

celle représentée figure 8.

Figure 8 : Les grands leviers de création de valeur de la filière aéronautique en mode collaboratif

Les quatre thématiques (cf. §4.1) dont Pacte PME vise l’amélioration consolident la dimension relationnelle entre grands comptes et PME d’une manière générale comme dans la supply chain

38

http://www.jeccomposites.com/news/composites-news/aerofund-3-150-millions-de-financement-supplementaire-pour-la-filiere-aeronautique

21

aéronautique. Les indicateurs mis en place et publiés par Pacte PME dans son baromètre fournisseurs39 à fin mai 2013 (8 500 interrogés pour 1 443 réponses) permettent ainsi de repérer les filières dans lesquelles les PME fournisseurs sont le plus satisfaites des relations avec leurs clients. Le Moci40 établit en déduit ainsi le classement par ordre croissant suivant pour les différentes filières : Banques / Assurances ; Energie ; Aéronautique / Espace / Sécurité ; Transport ; Entreprises publiques; Santé ; Etat / Collectivités.41 Conclusion

La reconfiguration de leur panel fournisseurs par les achats grands comptes a fait considérablement évoluer les supply chains ces dix dernières années et en particulier la supply chain aéronautique. Basée sur la création de valeur par une relation client-fournisseur toujours plus performante, cette (r)évolution s’avère exigente non seulement pour les fournisseurs et sous-traitants, mais également pour les prescripteurs et la fonction achats qui doit ainsi revisiter ses pratiques de SRM en adaptant celles qui sont inadaptées au mode de travail collaboratif avec les fournisseurs et en mettant en place des relations de confiance propices à la co-innovation. « Peut-on innover sans réformer la fonction achats » titrait un blog de l’Usine Nouvelle42 en janvier 2011. Deux ans plus tard nous répondons toujours par l’affirmative à cette question. Ainsi il devient nécessaire de « repenser l'entreprise » comme une action collective créatrice, tant ses interdépendances ont évolué et sont devenues cruciales (Segrestin, Hatchuel, 2012). Les modèles déjà proposés et ceux rappelés dans cet article pourront ainsi contribuer à mieux gérer cette interdépendance du SRM, acronyme qui devrait en effet désormais plutôt signifier « Supplier Resource Management », les Directions Achats du futur devenant alors de véritables Directions des Ressources Externes, de même que les Directions du Personnel d’antan sont devenues des Directions des Ressources Humaines. C’est en tout cas cette tendance de fond qui semble se dessiner pour l’avenir des achats, en particulier dans la supply chain aéronautique. Bibliographie

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http://www.pactepme.org/indicateurs/confiance 40

http://www.lemoci.com/011-69043-Les-relations-grands-groupes-PME-s-amelioreraient-barometre-Pacte-PME.html 41

Ibid. 42

http://blog.usinenouvelle.com/innovation/management/peut-on-innover-sans-reformer-la-fonction-achat/

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