ENTRE MULTILATEacuteRALISME ET INTEacuteGRATION REacuteGIONALE
La politique commerciale du gouvernement Lula (2003-2006)
Quelle a eacuteteacute la politique commerciale du Breacutesil durant le premier mandat du
preacutesident Lula da Silva Cet article aborde tous les aspects fondamentaux de la
question heacuteritage de la politique commerciale performances du commerce
exteacuterieur participation aux neacutegociations internationales (le Doha Round ) prioriteacutes
geacuteographiques des directives commerciales et des relations entre le commerce
exteacuterieur et la strateacutegie de deacuteveloppement Il analyse les bons reacutesultats obtenus
sur le plan inteacuterieur (appreacuteciation du reacuteal exceacutedents de la balance commerciale
reacuteduction de la dette exteacuterieure en particulier publique flexibiliteacute de lrsquooffre
breacutesilienne face agrave la demande mondiale ) en les replaccedilant en particulier dans
le cadre du boom des matiegraveres premiegraveres au plan international Il fait eacutegalement
le point sur lrsquoactiviteacute deacuteployeacutee par le gouvernement Lula au sein des neacutegociations
commerciales internationales
Au niveau des options de deacuteveloppement du commerce exteacuterieur il soulegraveve un
conflit possible entre une orientation trop axeacutee sur les pays du Sud et lrsquointeacutegration
optimale de lrsquoeacuteconomie breacutesilienne au marcheacute mondial qui marque actuelle ment
le pas dans le domaine de lrsquoattraction des investissements eacutetrangers au Breacutesil
Entre multilateralismo e integraccedilatildeo regional
A poliacutetica comercial do governo Lula (2003-2006)
Qual foi a poliacutetica comercial brasileira durante o primeiro mandato do Presidente
Lula da Silva Todos os toacutepicos fundamentais satildeo abordados desenvolvimento
do legado da poliacutetica comercial desempenho do sector externo participaccedilatildeo nas
negociaccedilotildees internacionais (Doha Round) prioridades geograacuteficas da orientaccedilatildeo
comercial e relaccedilotildees entre o sector externo e a estrateacutegia de desenvolvimento
Os bons resultados obtidos no sector externo satildeo especialmente destacados (apre-
ciaccedilatildeo do real excedentes comerciais reduccedilatildeo da diacutevida externa em particular
puacuteblica flexibilidade da oferta brasileira face agrave procura mundial etc) observa-
se no entanto que ainda dependeram muito do boom das mateacuterias-primas verificado
no periacuteodo Faz-se tambeacutem uma apreciaccedilatildeo positiva da actuaccedilatildeo no ciclo de
negociaccedilotildees comerciais internacionais
A avaliaccedilatildeo das prioridades comerciais em termos geograacuteficos eacute mais matizada
pois existe a possibilidade de conflito entre uma orientaccedilatildeo demasiado concentrada
nos paiacuteses do Sul e uma integraccedilatildeo oacuteptima da economia brasileira no mercado
mundial A articulaccedilatildeo estrateacutegica entre crescimento e sector tambeacutem manifesta
falhas nomeadamente ao niacutevel da atracccedilatildeo do investimento directo estrangeiro
Between Multilateralism and Regional Integration
The Trade Policy of the Lula Government (2003-2006)
What was Brazilrsquos trade policy during the first term of office of President Lula
da Silva This article addresses all the fundamental aspects of the question
Lrsquoauteur remercie les suggestions drsquoAdelino Torres
copy Koninklijke Brill NV Leiden 2007 Lusotopie XIV (2) 87-108Also available online ndash wwwbrillnl
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(inheritance of trade policy performances of foreign trade participation in inter-
national negotiations (the Doha Round) geographical priorities of trade directives)
and of the relationships between foreign trade and development strategy It
analyses the good results achieved domestically (appreciation of the Real trade
surpluses reduction of external debt particularly public debt flexibility of Brazilian
supply faced with world demand etc) repositioning them within the framework
of the boom in raw materials at an international level It also reports on the
activity deployed by the Lula government in the international trade negotiations
As regards the options for the development of foreign trade it raises a pos-
sible conflict between an orientation which is too focused on the countries of the
South and the optimal integration of the Brazilian economy into the world
market currently stagnating in terms of attracting foreign investment to Brazil
Cet article se propose drsquoexaminer la politique commerciale du gouvernement
du preacutesident Luiz Inacio Lula da Silva lors de son premier mandat de 2003
agrave 2006 notamment dans lrsquoobjectif de discerner si celle-ci srsquoest inscrite dans le
changement ou dans la continuiteacute Un certain nombre drsquoindicateurs de reacutefeacuterence
tels que les seacuteries statistiques ou lrsquoactiviteacute au sein des organisations internationales
ont donc eacuteteacute observeacutes et analyseacutes Par ailleurs compte tenu de la faiblesse de la
croissance breacutesilienne compareacutee agrave la moyenne mondiale durant cette peacuteriode il
srsquoagira eacutegalement de comprendre comment la politique commerciale peut contri-
buer agrave son acceacuteleacuteration consideacutereacutee comme neacutecessaire au vaste programme social
du gouvernement
Lrsquoarticle preacutesente donc briegravevement lrsquoheacuteritage du preacutesent gouvernement en la
matiegravere en rapport avec lrsquoeacutevolution du systegraveme commercial international depuis
la Seconde Guerre mondiale avant drsquoexposer dans un deuxiegraveme temps les prin-
cipales performances du secteur exteacuterieur au cours des anneacutees 2003-2006 que ce
soit aux niveaux commercial moneacutetaire ou financier Il portera ensuite sur les
relations entre le gouvernement Lula et les organisations eacuteconomiques internatio-
nales en particulier sur les neacutegociations au sein de lrsquoOrganisation mondiale du
commerce (OMC) ndash plus exactement agrave lrsquooccasion du Doha Round ndash avant de
prendre en consideacuteration les orientations geacuteostrateacutegiques y compris sous lrsquoangle
de lrsquointeacutegration reacutegionale de la politique commerciale breacutesilienne durant cette
peacuteriode Enfin la question sera poseacutee de la place du secteur exteacuterieur dans la
strateacutegie breacutesilienne de deacuteveloppement en comparaison avec celles de la Chine et
de lrsquoInde en ayant comme reacutefeacuterence les implications des diffeacuterentes alternatives
commerciales dans la croissance eacuteconomique
Lrsquoheacuteritage de la politique commerciale breacutesilienne
Le Breacutesil a souvent eacuteteacute preacutesenteacute comme un prototype de pays agrave deacuteveloppement
autocentreacute et agrave eacuteconomie fermeacutee au cours des premiegraveres deacutecennies de lrsquoapregraves-
guerre (Cardoso amp Helwege 1992 75-6) la protection eacutetait garantie par des
barriegraveres tarifaires eacuteleveacutees notamment dans drsquoimportants secteurs de lrsquoindustrie et
des services Drsquoautre part le pays nrsquoavait appartenu qursquoagrave des groupes drsquointeacutegration
reacutegionale peu ambitieux et instables Pourtant le Breacutesil srsquoest finalement quelque
peu ouvert agrave lrsquoexteacuterieur apregraves la deacutemocratisation de son reacutegime agrave partir de 1988
(Bresser-Pereira 1996) Par la suite le gouvernement de Fernando Collor de Melo
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surtout agrave ses deacutebuts en 1990-1991 a constitueacute un jalon sur la voie de la libeacutera-
lisation des eacutechanges en deacutepit des nombreuses objections souleveacutees par son action
dans les secteurs les plus divers de la socieacuteteacute breacutesilienne Certes jusqursquoen 2002
la libeacuteralisation commerciale a eacuteteacute assez perturbeacutee que ce soit avant le Plano Real
(1994) au moment des flambeacutees hyperinflationnistes et autres deacutesordres macroeacute-
conomiques survenus durant cette peacuteriode ou apregraves le changement de reacutegime
moneacutetaire du reacuteal en 1999 (la flexibiliteacute au lieu de lrsquoancrage nominal fort des
premiegraveres anneacutees) mais cette politique a eacuteteacute maintenue pour lrsquoessentiel sous les
diffeacuterents gouvernements qui se sont succeacutedeacute
Lrsquoun des aspects majeurs de cette nouvelle orientation en faveur de lrsquoouverture
commerciale a eacuteteacute la creacuteation du Mercosul en 1995 (un genre de laquo marcheacute com-
mun raquo comprenant eacutegalement lrsquoArgentine le Paraguay et lrsquoUruguay instaureacute lors
du Traiteacute drsquoAsuncioacuten signeacute en 1991) Bien que largement partageacutee avec lrsquoArgen-
tine cette initiative a permis au Breacutesil de prendre une part plus importante
qursquoauparavant dans les questions drsquointeacutegration reacutegionale
Il est important de rappeler ici que le Breacutesil a eacuteteacute lrsquoun des 23 pays fondateurs
de lrsquoAccord geacuteneacuteral sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) en 1947 (de
mecircme qursquoil avait eacuteteacute preacutesent agrave la confeacuterence de Bretton Woods en 1944) Au tout
deacutebut de ce processus lors de la reacutedaction de la Charte de La Havane en 1946
le Breacutesil lrsquoInde et le Chili avaient pris la tecircte drsquoun groupe de pays en deacutevelop-
pement qui demandaient que des exceptions soient faites afin de favoriser leur
deacuteveloppement eacuteconomique (Narlikar 2005 13) Au cours des deacutecennies suivantes
malgreacute sa participation faible au commerce mondial relativement agrave sa taille le
Breacutesil agrave lrsquoinstar de lrsquoInde a eacuteteacute freacutequemment inviteacute aux reacuteunions de laquo Green Room raquo1
ce qui nrsquoa pas eacuteteacute du tout la regravegle pour les autres pays en deacuteveloppement De la
sorte le Breacutesil est resteacute un partenaire important au sein de lrsquoOMC heacuteritiegravere du
GATT apregraves 19952 en particulier dans certains secteurs tels que les eacutechanges
agricoles degraves lors concerneacutes par ses regravegles bien que ce ne fucirct laquo qursquoun deacutebut raquo
(Messerlin 1995) ougrave il joua un rocircle beaucoup plus important qursquoau niveau du
commerce en geacuteneacuteral Parallegravelement sa preacutesence agrave la Confeacuterence des Nations
unies pour le commerce et le deacuteveloppement (CNUCED) organisation creacuteeacutee en
1964 pour reacutepondre aux problegravemes speacutecifiques des pays en deacuteveloppement dans
ces deux domaines a eacuteteacute agrave plusieurs reprises loin drsquoecirctre neacutegligeable
Le Breacutesil beacuteneacuteficie donc de conditions favorables pour jouer un rocircle de premier
plan dans le systegraveme commercial international et sa strateacutegie drsquoouverture lanceacutee
agrave la fin des anneacutees 1980 a sans nul doute accru ses possibiliteacutes drsquointervention
1 Eacutetape importante du processus deacutecisionnel du GATT ougrave les reacutesolutions finales eacutetaient prises
plutocirct par consensus que par majoriteacute des voix pour plus de deacutetails voir A N arlikar 2005
17-18 2 Un exemple parmi tant drsquoautres dans le cadre drsquoune coalition plus vaste ndash comprenant
drsquoautres pays en deacuteveloppement dont lrsquoAfrique du Sud et les Organisations non gouvernemen-
tales ndash agrave la fin des anneacutees 1990 le Breacutesil a fortement contribueacute agrave lrsquoapprobation de dispositions
plus favorables au traitement du sida en placcedilant lrsquointeacuterecirct de la santeacute publique avant la protec-
tion des brevets des multinationales pharmaceutiques dans ce qui fucirct une action tregraves remarqueacutee
concernant les Aspects des droits de proprieacuteteacute intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC)
et leurs exceptions dans une situation drsquourgence sanitaire A N arlikar 2005 106-7
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dans ce domaine Lrsquoambition de jouer un rocircle plus important a conduit les gou-
vernements breacutesiliens agrave prendre en compte un eacuteventail relativement large de
questions commerciales internationales et agrave accepter un certain nombre de com-
promis et drsquoalliances (Narlikar 2003) Pourtant il faut bien reconnaicirctre que le
pouvoir du Breacutesil dans ce domaine reste limiteacute et que comme le remarque jus-
tement Narlikar dans le contexte de lrsquoOMC sa position a eacuteteacute le plus souvent
celle drsquoun laquo rule taker raquo plutocirct que celle drsquoun laquo agenda setter raquo3 Crsquoest ce qursquoil convient
de garder agrave lrsquoesprit pour comprendre la politique commerciale breacutesilienne des
anneacutees 2003-2006 avec ses effets au plan national et international
Les bonnes performances du secteur exteacuterieur
Signalons tout drsquoabord que le premier mandat preacutesidentiel de Lula a coiumlncideacute
avec une eacutevolution tregraves favorable de la plupart des principaux indicateurs relatifs
aux relations eacuteconomiques exteacuterieures (cf tableau I) tout au moins si on le com-
pare avec les anneacutees 1999-2002 ou mecircme avec drsquoautres peacuteriodes identiques des
trois derniegraveres deacutecennies Drsquoautre part si lrsquoon observe les reacutesultats eacuteconomiques
du gouvernement Lula dans son ensemble le secteur exteacuterieur semble ecirctre lrsquoun
des domaines ougrave il a le mieux reacuteussi4 Par exemple les preacutevisions neacutegatives sur
le risque agrave court terme drsquoune rupture dans le paiement de la dette exteacuterieure
souvent eacutevoqueacutees en deacutebut de mandat (The Economist 2003) en reacutefeacuterence notam-
ment agrave la situation argentine de 2001 semblent bien loin quatre ans apregraves (drsquoailleurs
le rapport devises eacutetrangegraveresdette exteacuterieure totale qui eacutetait de 179 en 2002
est passeacute agrave 519 en 2006) Que srsquoest-il donc passeacute
Tabl I ndash B reacutesil principaux indicateurs du secteur exteacuterieur 1999-2006
(en milliards US $)
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Exportations 480 551 582 604 731 965 1183 1375
Importations 492 558 556 472 483 628 736 914
Balance commerciale minus12 minus07 26 132 248 340 347 461
Inteacuterecircts minus149 minus146 minus149 minus131 minus130 minus134 minus144 minus148
Remises de beacuteneacutefices minus41 minus33 minus50 minus52 minus56 minus73 minus127 minus160
Compte-courant minus253 minus242 minus232 minus77 42 117 141 137
Investissement
portefeuille 35 86 51 44 59 82 95 78
Investissement direct 286 328 225 166 101 182 150 160
Amortissement 258 352 389 451 487 516 528
Dette exteacuterieure totale 226 217 210 211 216 201 169 160
Reacuteserves en devises 363 33 359 378 493 529 538 831
Compte-courant et reacuteserves en devises eacutetrangegraveres en donneacutees provisoires
Source Banco Central do Brasil
3 Ibid 8 4 Pour une eacutevaluation moins favorable insistant sur les vulneacuterabiliteacutes structurelles dont pacirctit
toujours le secteur exteacuterieur breacutesilien voir C arneiro 2006 9-17
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Tout drsquoabord compte tenu de ses implications geacuteneacuterales sur le secteur exteacuterieur
il est neacutecessaire drsquoobserver lrsquoeacutevolution du taux de change du reacuteal La figure 1
montre le comportement de la monnaie breacutesilienne vis-agrave-vis du dollar ameacutericain
depuis 1994 (anneacutee de sa mise en circulation) en bref le reacuteal srsquoest substantielle-
ment appreacutecieacute entre deacutebut 2003 et fin 2006 On assiste en reacutealiteacute agrave un renverse-
ment total de tendance cette fois-ci vers son appreacuteciation En admettant mecircme
lrsquooccurrence drsquoune speacuteculation intense5 et drsquoun surajustement6 en 2002 qui a
contribueacute de maniegravere conjoncturelle agrave sa forte deacutepreacuteciation et par conseacutequent agrave
un retournement agrave court terme le progregraves du reacuteal est notable en ce qui concerne
lrsquoensemble des anneacutees prises en compte dans la figure 1 Lrsquoarriveacutee du gouverne-
ment Lula et mecircme son eacutelection en sont nettement le point drsquoinflexion puisque
lrsquoon note un pic de deacutepreacuteciation quelques mois avant la fin 2002 eacutetant donneacute
les risques qui menaccedilaient alors la balance des paiements un accord avec le Fonds
moneacutetaire international ndash FMI ndash avait eacuteteacute signeacute par les principales forces politiques
breacutesiliennes au mois drsquoaoucirct de cette mecircme anneacutee
Il est vrai que lrsquoon ne peut mettre uniquement au creacutedit des autoriteacutes breacutesi-
liennes lrsquoensemble de cette eacutevolution car comme dans drsquoautres exemples eacutevoqueacutes
plus loin il faut tenir compte de lrsquoinfluence des facteurs exteacuterieurs tels les mou-
vements moneacutetaires agrave lrsquoeacutechelle mondiale Ici il faut en particulier souligner le
changement de politique moneacutetaire exteacuterieure des Eacutetats-Unis laquelle a sans doute
peseacute eacutetant donneacute le statut de reacutefeacuterence et de reacuteserve du dollar ndash notamment sa
manipulation freacutequente pour des raisons inteacuterieures et sans tenir compte des inteacute-
recircts des autres pays (McKinnon 2001) or celui-ci a commenceacute un mouvement
agrave la baisse agrave partir de 20027 comme inversement il srsquoeacutetait appreacutecieacute grosso modo
entre 1996 et 2001 Ces variations du dollar ont eacuteteacute suivies mais plutocirct dans le
sens inverse par les autres monnaies (y compris lrsquoeuro pas seulement le reacuteal et
les devises moins importantes et non indexeacutees8) crsquoest-agrave-dire qursquoen 2003-2006 elles
se sont appreacutecieacutees dans un cadre geacuteneacuteral drsquoinstabiliteacute des changes mondiaux
Quoi qursquoil en soit lrsquoappreacuteciation du reacuteal a sans doute eacuteteacute une chance pour le
Breacutesil et elle a eu des effets positifs sur lrsquoensemble du secteur exteacuterieur comme
le montrent les tableaux I et II
Le fait qui a le plus directement contribueacute agrave cette performance du reacuteal a eacuteteacute
lrsquoeacutevolution de la balance commerciale (bien plus que celle de la balance financiegravere
qui inclut parmi drsquoautres rubriques lrsquoinvestissement direct eacutetranger comme on
peut le voir au tableau I) La figure 2 preacutesente lrsquoeacutevolution des exportations et des
importations de marchandises9 depuis 1999 Il est clair qursquoagrave partir de 2003 les
5 Sur la toile de fond financiegravere des eacutelections preacutesidentielles en Ameacuterique latine voir S antiso
2003 et pour le Breacutesil voir M artiacutenez amp S antiso 20032004 6 Deacutepreacuteciation laquo excessive raquo de la monnaie due agrave la viscositeacute des autres prix pheacutenomegravene
geacuteneacuteralement de courte dureacutee (valable aussi pour lrsquoappreacuteciation mutatis mutandis) 7 Agrave la suite de plusieurs troubles dont lrsquoeacuteclatement de la bulle speacuteculative des cours des
nouvelles technologies drsquoinformation et de communication (NTIC) en 2000 et les eacuteveacutenements de
2001 les autoriteacutes moneacutetaires nord-ameacutericaines ont modifieacute leur politique de change 8 Lrsquoindexation au dollar a eacuteteacute le cas parmi drsquoautres du yuan renminbi chinois bien qursquoil ait
aussi eacuteteacute leacutegegraverement reacuteeacutevalueacute en 2006 9 Le poids des services dans les eacutechanges exteacuterieurs breacutesiliens reste peu significatif et lrsquoinves-
tissement direct eacutetranger sera consideacutereacute plus loin
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deux flux ont beaucoup augmenteacute davantage celui des exportations multiplieacute par
228 entre 2002 et 2006 plus modeacutereacutement celui des importations dont la pro-
gression a eacuteteacute freineacutee par la faible croissance multiplieacute par 193 Ainsi le rapport
exportationsimportations pratiquement en eacutequilibre en 1999-2001 a ensuite
deacutegageacute un important surplus commercial
Cette eacutevolution de la balance commerciale a eu un impact tregraves positif sur
la dette exteacuterieure le Breacutesil srsquoest retrouveacute beaucoup moins endetteacute vis-agrave-vis de
lrsquoexteacuterieur (tableau II) Le gouvernement a profiteacute de cet exceacutedent commercial
pour amortir la dette exteacuterieure ce qui est un atout pour le deacuteveloppement futur
du pays rendu plus facile par lrsquoeacutelargissement de la marge de manœuvre de la
politique eacuteconomique (par exemple la possibiliteacute de recours agrave des emprunts exteacute-
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Gouvernement Lula
Source IPEA
Fig 1 Taux de change reacutealUSD 1994-2006
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Source IPEA
Fig 2 Breacutesil commerce de biens 1999-2006
Milliards US Dollars
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 93
rieurs dans des conditions plus favorables) En effet le rapport de la dette exteacuterieure
totale au Produit inteacuterieur brut (PIB) a chuteacute agrave 179 en juin 2006 (alors qursquoil
eacutetait de 459 en 2002) il faut revenir au deacutebut des anneacutees 1970 pour trouver
des chiffres semblables (177 en 1973) En outre il faut souligner le rythme
plus rapide de la reacuteduction de la dette publique son poids dans la dette exteacuterieure
totale eacutetant passeacute de 551 en 2002 agrave 455 en 2006 ( juin)
Tabl II ndash B reacutesil indicateurs de lrsquoendettement exteacuterieur 1999-2006
(en pourcentage)
Service de
la dette
exportations
Service de la
dettePIB
Paiement
drsquointeacuterecircts
exportations
Dette
publique
exteacuterieurePIB
Dette
exteacuterieure
PIB
Dette
exteacuterieure
exportations
1999 1458 130 356 162 420 4699
2000 946 86 310 149 360 3938
2001 869 99 303 182 412 3606
2002 833 109 253 240 459 3491
2003 741 110 210 236 424 2941
2004 537 86 148 190 333 2113
2005 558 83 122 97 213 1434
2006 612 88 119 81 179 1213
Dans ce tableau les rapports au PIB ont eacuteteacute calculeacutes en se fondant sur les donneacutees des
comptes nationaux breacutesiliens pour cette variable avant mars 2007 crsquoest-agrave-dire avant sa reacuteeacuteva-
luation par lrsquoIBGE eacutevoqueacutee plus loin
jusqursquoen juin
Source Banco Central do Brasil
Toutefois ici comme dans le cas de lrsquoappreacuteciation du reacuteal on ne peut exclure de
lrsquoanalyse drsquoautres tendances de lrsquoeacuteconomie mondiale qui ont influenceacute le commerce
de biens breacutesilien en particulier le boom des matiegraveres premiegraveres (agricoles et
mineacuterales) En effet certains produits de base (comme par exemple le cafeacute le
sucre le fer le tourteau de soja et la viande de bœuf cf tableau III) dont le
Breacutesil est un gros exportateur et qui correspondent agrave sa speacutecialisation tradition-
nelle ont geacuteneacuteralement vu leurs cours grimper rapidement pendant cette peacuteriode
Lrsquoeacutemergence drsquoune forte demande chinoise de commodities10 aupregraves du Breacutesil
(figure 3) comme ailleurs a contribueacute agrave cette eacutevolution les exportations breacutesiliennes
vers la Chine ont eacuteteacute multiplieacutees par 8 entre 2000 et 2006 ougrave elles ont atteint
84 milliards de dollars Drsquoun point de vue structurel la capaciteacute agrave bien srsquoajuster
10 On sait qursquoun accroissement relativement faible de la demande peut avoir un effet multi-
plicateur sur les prix (cela est ducirc au fait que leur offre est plutocirct rigide) Plus geacuteneacuteralement on
admet que des variations de lrsquooffre et de la demande (qursquoon suppose aussi fondamentalement
stable) agrave la hausse et agrave la baisse ont des effets amplifieacutes sur les prix des matiegraveres premiegraveres qui
sont par conseacutequent plus volatiles que ceux des produits manufactureacutes
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agrave cette demande mondiale en hausse met en relief un point fort de lrsquoeacuteconomie
breacutesilienne
Tabl III ndash Eacute volution du prix de quelques produits de base
Cafeacute
Tourteau
de soja
Sucre
raffineacute Minerai de fer Viande de bœuf
Cents $lp US$t US$t US$ centst US$arrobe
1999 1259 1467 1758 276 176
2000 665 1954 2452 288 183
2001 462 1438 2395 300 201
2002 602 1673 2082 293 252
2003 611 2310 1845 320 269
2004 1050 1648 2593 379 266
2005 1071 1963 3552 650 227
2006 1082 1745 4000 774 257
Jusqursquoen octobre
Source Banco Central do Brasil et Bolsa de Mercadorias amp Futuros (BM amp F)
En revanche si lrsquoon observe la tendance agrave lrsquoaugmentation du prix mondial des
matiegraveres premiegraveres en termes de monnaie locale les reacutesultats sont plus nuanceacutes
En effet sur la base 100 en 2002 les prix unitaires en monnaie breacutesilienne11 des
cinq commodities du tableau III eacutetaient en 2006 de 756 pour la viande de bœuf
(un des principaux produits de lrsquoexportation breacutesilienne) de 774 pour le tourteau
de soja 1333 pour le cafeacute 1425 pour le sucre raffineacute et de 196 pour le fer
Dans ces circonstances pour quelques produits de base dont la viande de bœuf
et le tourteau de soja de notre seacutelection la hausse de leurs prix en dollars ameacuteri-
cains compte tenu de la deacutepreacuteciation de cette monnaie ne srsquoest pas reacutepercuteacutee
sur les recettes locales Pour obtenir leur augmentation il aurait eacuteteacute neacutecessaire
drsquoaccroicirctre les quantiteacutes exporteacutees de maniegravere agrave compenser les pertes Agrave la fin du
premier mandat cette baisse des rendements aurait creacuteeacute une certaine insatisfaction
de la part des exportateurs concerneacutes notamment dans lrsquoagro-alimentaire breacutesilien
dans la mesure ougrave par exemple ils payent lrsquoessentiel de leurs inputs en monnaie
locale
Eacutetant donneacute la deacutepreacuteciation du dollar et les tendances globales que lrsquoon vient
de signaler la position du Breacutesil dans le commerce mondial de marchandises entre
2002 et 200512 srsquoest ameacutelioreacutee dans lrsquoensemble bien que drsquoune faccedilon deacuteseacutequilibreacutee
11 Les calculs suivants ont eacuteteacute faits en termes drsquoindice de base annuelle fixe en 2002 en
divisant les valeurs preacutesenteacutees dans le tableau III par celles de lrsquoinverse de la seacuterie utiliseacutee dans
la figure 1 (taux de change reacutealUS$) 12 Au moment ougrave nous eacutecrivons deacutebut 2007 lrsquoOMC nrsquoa pas encore deacutelivreacute ses estimations
sur le commerce mondial pour 2006
LUSO 142_1037_86-108indd 94LUSO 142_1037_86-108indd 94 111607 12743 PM111607 12743 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 95
plus preacuteciseacutement pour les exportations qui sont passeacutees de 096 agrave 116 et
pour les importations qui sont passeacutees de 075 agrave 072 Si lrsquoon observe
plus attentivement le commerce exteacuterieur breacutesilien on constate aussi que la part
des produits manufactureacutes a deacuteclineacute entre 2000 et 2006 passant de 5905 agrave
543 13 par conseacutequent celle des produits de base et semi-finis a augmenteacute
conduisant agrave ce que Reinaldo Gonccedilalves a appeleacute la laquo reprimarizaccedilatildeo raquo14 (2005 264)
Malgreacute les efforts qui ont eacuteteacute deacuteployeacutes par les gouvernements avant et apregraves 2003
le Breacutesil continue donc agrave eacuteprouver des difficulteacutes agrave aller au-delagrave de ses avantages
comparatifs traditionnels et agrave srsquoimplanter sur de nouveaux creacuteneaux exportateurs
agrave haute valeur ajouteacutee sauf pour quelques exceptions bien connues (dont la con-
struction aeacuteronautique civile lrsquoexploration offshore de peacutetrole et lrsquoindustrie automo-
bile) Dans drsquoautres cas comme celui des biocombustibles le Breacutesil a deacuteveloppeacute
une grande capaciteacute de production aux cours des derniegraveres deacutecennies mais leur
utilisation agrave une eacutechelle globale nrsquoest pas devenue jusqursquoagrave preacutesent une option
nette de la part des principaux consommateurs potentiels Nous reviendrons plus
loin sur ces questions
En reacutesumeacute les principaux indicateurs du secteur exteacuterieur au cours des quatre
premiegraveres anneacutees du gouvernement Lula ont connu une eacutevolution nettement
positive mecircme si les facteurs internationaux sur lesquels le gouvernement nrsquoa pas
13 Gazeta Mercantil 18 janvier 2007 Cette source reprenant une information de la Fundaccedilatildeo
Centro de Estudos do Comeacutercio Exterior (Funcex) ajoute laquo Entre 2000 et 2006 les prix des produits
de base ont augmenteacute de 43 tandis que les produits manufactureacutes nrsquoont augmenteacute que de
22 Aussi la croissance du quanta exporteacute a-t-elle eacuteteacute plus eacuteleveacutee pour les produits de base
(123 ) que pour les produits manufactureacutes (86 ) raquo 14 Tendance des produits primaires agrave regagner du poids dans les exportations breacutesiliennes
Remarquons le problegraveme que repreacutesente la demande chinoise de commodities allieacutee au fait que
ce pays exporte encore principalement des produits low-tech et que les pays deacuteveloppeacutes essaient
de se concentrer sur les produits agrave haute technologie et laissent peu drsquoespace aux pays agrave tech-
nologie moyenne comme le Breacutesil
Fig 3 Commerce Breacutesil-Chine 1999-2006
Millions US Dollars
0
2000
4000
6000
8000
10000
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Exportations ImportationsSource Secex
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drsquoinfluence ont joueacute un rocircle non neacutegligeable dans ces performances Il srsquoagit
surtout de lrsquoeacutevolution du marcheacute mondial des matiegraveres premiegraveres dont les prix
ont eacuteteacute agrave la hausse le Breacutesil en eacutetant lrsquoun des principaux fournisseurs Drsquoautre
part au niveau inteacuterieur comme la faible croissance nrsquoa pas tireacute les importations
vers le haut ces diffeacuterentes tendances ont permis en 2003-2006 lrsquoaccumulation
drsquoun surplus substantiel de la balance commerciale (mecircme lrsquoappreacuteciation du reacuteal
nrsquoa pu lrsquoempecirccher) Pourtant un renversement de tendance pourrait survenir et
reacuteveacuteler des fragiliteacutes dans le secteur exteacuterieur breacutesilien En particulier en admettant
mecircme que la phase actuelle de boom du cycle des matiegraveres premiegraveres soit relati-
vement longue (agrave cause de lrsquoentreacutee de la Chine et de lrsquoInde dans ce marcheacute) elle
aura certainement des limites agrave un moment donneacute Enfin la politique de change
la composition du commerce de marchandises et la position breacutesilienne dans le
commerce mondial ne sont pas devenues substantiellement diffeacuterentes de la situa-
tion preacuteceacutedente15 mecircme si les poleacutemiques concernant la nature de leur eacutevolution
se poursuivent
Les relations avec les organisations eacuteconomiques internationales le deacutefi des neacutegociations du Doha Round
Comme agrave drsquoautres niveaux clarifier la politique du gouvernement breacutesilien de
Lula dans ce domaine nrsquoest pas facile Lrsquoeacutevolution des organisations eacuteconomiques
internationales reacutepond agrave un certain nombre de facteurs que les gouvernements
nationaux ont du mal agrave influencer sans parler du rythme souvent tregraves lent de
la complexiteacute des neacutegociations et des marchandages pas forceacutement tregraves transpa-
rents Neacuteanmoins on peut tenter de preacuteciser les contours speacutecifiques de lrsquoaction
du gouvernement Lula dans ce domaine fondamental de la politique commerciale
Citons tout drsquoabord les deacuteclarations du ministre des Affaires eacutetrangegraveres Celso
Amorim au milieu du mandat preacutesidentiel
laquo Les accords sur les trois fronts de neacutegociation commerciale dans lesquels le Breacutesil
est simultaneacutement engageacute ndash le Doha Round de lrsquoOrganisation mondiale du commerce
la Zone de libre-eacutechange des Ameacuteriques16 (Alca) et le Mercosul-Union Europeacuteenne ndash
doivent ecirctre conclus dans un deacutelai drsquoun an et demi raquo17
Notons qursquoelles donnent la prioriteacute aux neacutegociations au sein de lrsquoOMC (Mouratildeo
2005) Compte tenu de leur position clef dans lrsquoensemble de la politique com-
merciale du gouvernement Lula agrave lrsquoeacutechelle internationale il faut drsquoabord examiner
les relations avec lrsquoOMC crsquoest-agrave-dire au niveau multilateacuteral ayant comme centre
le Doha Round pour ensuite passer en revue les questions relatives agrave lrsquointeacutegration
15 Plus geacuteneacuteralement C arneiro (2006 9) considegravere que laquo la peacuteriode 2003-2005 en ce qui
concerne le gouvernement Lula ne se diffeacuterencie pas exception faite drsquoeacuteventuelles diffeacuterences
de gestion de celle correspondant aux anneacutees 1999-2002 car ces politiques ont eu comme
fondement un reacutegime combinant lrsquoinflation le change flottant et la contraction fiscale raquo 16 Zone de libre-eacutechange (ZLEA) plus connu sous le sigle Alca Aacuterea de Livre Comeacutercio das
Ameacutericas 17 O Estado de Satildeo Paulo 3 deacutecembre 2004 B12
LUSO 142_1037_86-108indd 96LUSO 142_1037_86-108indd 96 111607 12743 PM111607 12743 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 97
eacuteconomique (Mercosul Alca et relations avec lrsquoUnion europeacuteenne) et autres ques-
tions geacuteostrateacutegiques comme les relations Sud-Sud
Le cycle de neacutegociations du Doha Round est tregraves important dans la mesure ougrave
la promotion du deacuteveloppement en particulier la pleine participation des eacutecono-
mies en deacuteveloppement dans le systegraveme commercial international constitue un
objectif central depuis son lancement en novembre 2001 Degraves le deacutebut des neacutego-
ciations malgreacute toute la rheacutetorique sur le deacuteveloppement il eacutetait eacutevident que
comme les barriegraveres tarifaires srsquoeacutetaient substantiellement reacuteduites au cours des
deacutecennies suivant lrsquoapregraves-guerre de mecircme que les principales barriegraveres quanti tatives
eacutetaient en phase de deacutemantegravelement (du moins partiel) depuis la fin de lrsquoUruguay
Round en 1993 on srsquoapprochait doreacutenavant drsquoenjeux plus controverseacutes ougrave il exis-
tait traditionnellement plus de reacutesistance agrave suivre les regravegles du GATTOMC En
lrsquooccurrence les diffeacuterentes regravegles de protection de la proprieacuteteacute intellectuelle (dans
leur relation avec le commerce) lrsquoouverture des marcheacutes agricoles notamment en
raison de lrsquoentreacutee dans le systegraveme reacutesultant du Round preacuteceacutedent avaient eacuteteacute plus
formelles qursquoeffectives Or preacuteciseacutement lrsquoinclusion des produits agricoles dans ces
regravegles en particulier la reacuteduction des subventions publiques qui introduisent de
graves distorsions dans le commerce mondial de ces biens eacutetait un enjeu qui
inteacuteressait prioritairement de nombreux pays en deacuteveloppement et a fortiori le
Breacutesil en raison des difficulteacutes qursquoils rencontrent agrave tirer profit de leurs avantages
comparatifs Dans une deacuteclaration qui illustre bien la position breacutesilienne sur les
produits agricoles le ministre Celso Amorim estima que
laquo Il est choquant que plus drsquoune cinquantaine drsquoanneacutees apregraves lrsquoeacutetablissement de regravegles
multilateacuterales destineacutees agrave libeacuterer et agrave discipliner le commerce international sous lrsquoeacutegide
du GATT une cateacutegorie de produits drsquoune si grande importance pour les pays en
deacuteveloppement soit resteacutee proteacutegeacutee par des exceptions des subsides et des barriegraveres
de tous ordres raquo18
Crsquoest dans ce cadre en particulier agrave Cancuacuten en septembre 2003 que deux grou-
pes principaux19 se sont formeacutes autour de la question devenue centrale de lrsquoouver-
ture des marcheacutes agricoles (bien entendu cet enjeu eacutetait lieacute agrave drsquoautres lors des
neacutegociations) Drsquoun cocircteacute les Eacutetats-Unis et lrsquoUnion europeacuteenne srsquoopposegraverent agrave
quelques diffeacuterences pregraves et nrsquooffrirent que des concessions marginales en la matiegravere
et de lrsquoautre le G-20 au sein duquel le Breacutesil a joueacute un rocircle deacuteterminant20 qui
souhaita de veacuteritables concessions y compris une reacuteduction sensible des subventions
publiques
18 Valor 9 septembre 2003 AB 19 On ne mentionne que ces deux groupes importants pour notre sujet cependant drsquoautres
se sont formeacutes agrave la confeacuterence de Cancuacuten qui sont resteacutes actifs par la suite pour plus de deacutetails
voir N arlikar 2005 112-113 20 Il est vrai que drsquoautres grandes eacuteconomies eacutemergentes appartiennent aussi au G-20 comme
lrsquoInde la Chine lrsquoAfrique du Sud la Thaiumllande et lrsquoArgentine mais compte tenu de sa position
plus laquo combative raquo et du plus grand inteacuterecirct qursquoil porte sur le sujet le Breacutesil a dans lrsquoensemble
joueacute un des rocircles les plus importants dans les neacutegociations internationales concernant les produits
agricoles
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Apregraves cinq ans de neacutegociations et le deacutepassement de la date limite initialement
poseacutee pour sa conclusion en janvier 2005 le Doha Round a eacuteteacute suspendu sine die
en juillet 2006 sans reacutesultats concrets (le souhait du ministre breacutesilien concernant
les deacutelais nrsquoa donc pas eacuteteacute reacutealiseacute) Face agrave cette situation certains parlent de ce
cycle en termes drsquoeacutechec (par exemple Laborde amp Fontagneacute 2007) Mais si lrsquoon
observe les enjeux et les forces asymeacutetriques en preacutesence lrsquoanalyse doit ecirctre plus
nuanceacutee Il est hors de question de consideacuterer ce Round comme un succegraves et il
serait plus approprieacute drsquoestimer que ce que lrsquoon a perdu crsquoest peut-ecirctre une bataille
et non la guerre (Bhagwati 2004) qui selon toute vraisemblance se prolongera
Dans cette affaire le principal problegraveme reacuteside dans le type de reacuteponse agrave donner
face agrave lrsquoalternative suivante soit obtenir un accord dans un deacutelai relativement
court mais qui ne porte que sur des points secondaires soit obtenir un accord
plus difficilement mais qui porte sur les questions fondamentales comme lrsquoouver-
ture effective des marcheacutes agricoles ce qui serait novateur et repreacutesenterait pro-
bablement des gains consideacuterables pour le commerce mondial Il nrsquoest donc pas
possible de dire que le gouvernement breacutesilien a remporteacute un succegraves dans ce
domaine bien qursquoil ait deacutefini et maintenu une strateacutegie claire (agrave propos de laquelle
par ailleurs il ne semble pas y avoir de divergences significatives entre les prin-
cipales forces politiques breacutesiliennes) pourtant pour que sa voix soit plus creacutedible
dans les neacutegociations il faudrait qursquoil soit conseacutequent dans lrsquoagriculture comme
ailleurs21
Plus geacuteneacuteralement en ce qui concerne les reacutesultats tangibles du Doha Round 22
notamment dans les dossiers laquo sensibles raquo comme lrsquoagriculture il faudrait des condi-
tions internationales plus favorables comme en 199323 lorsque celles-ci ont permis
de sortir des impasses de lrsquoUruguay Round et du North American Free Trade Agreement
(Nafta) ce qui semble aujourdrsquohui assez improbable Par ailleurs plus de cinq ans
21 Drsquoapregraves B hagwati (2004 59) le tarif agricole moyen serait de 12 aux Eacutetats-Unis de
37 au Breacutesil et de 112 en Inde Agrave juste titre cet auteur souligne dans nombre de ses
eacutecrits que les pays en deacuteveloppement demandent aux pays deacuteveloppeacutes la reacuteduction de leurs
tarifs sans ecirctre disposeacutes agrave en faire autant Bien que cela soit vrai en termes absolus Bhagwati
neacuteglige le fait que les premiers depuis les anneacutees 1980 ont souvent reacuteduit plus vite que les
seconds leurs niveaux de protection Par exemple entre le milieu des anneacutees 1980 et lrsquoan 2000
le tarif moyen (tous secteurs) est passeacute de 66 agrave 42 en Europe de 7 agrave 4 aux Eacutetats-
Unis de 44 agrave 17 au Breacutesil et de 80 agrave 32 en Inde la libeacuteralisation unilateacuterale des
pays en deacuteveloppement a eacuteteacute importante depuis le milieu des anneacutees 1980 voir B aldwin 2006
1456 1458-1459 Drsquoautre part les pays en deacuteveloppement ont comparativement moins de pos-
sibiliteacutes de financer drsquoune faccedilon durable drsquoimportants subsides agrave la production et agrave lrsquoexportation
lesquels enfreignent gravement le libre cours des flux du commerce international 22 Deacutebut 2007 plusieurs personnaliteacutes politiques internationales dont le Preacutesident breacutesilien
notamment agrave Davos fin janvier se sont prononceacutees pour la reprise des neacutegociations du Doha
Round cependant rien nrsquoeacutetait encore trancheacute agrave ce sujet au moment de conclure la reacutedaction
de cet article 23 Au deacutebut des anneacutees 1990 peu de temps apregraves la chute du mur de Berlin et drsquoautres
changements majeurs agrave lrsquoeacutechelle mondiale survenus pendant cette peacuteriode lrsquoarriveacutee agrave la Maison
Blanche de lrsquoAdministration Clinton en 1993 alors relativement plus activiste de ce point de
vue a permis le deacuteblocage drsquoun certain nombre drsquoimpasses dans les neacutegociations commerciales
internationales
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 99
ont eacuteteacute neacutecessaires pour que le Tokyo Round (1973-1979) soit conclu plus de sept
ans pour lrsquoUruguay Round (1986-1993) il faudrait donc beaucoup de chance pour
que le Doha Round soit conclu dans un temps plus court compte tenu de son
agenda ndash reconnu par tous comme tregraves difficile ndash des coucircts qursquoil implique agrave court
terme pour des groupes politiquement puissants dans les pays deacuteveloppeacutes sans
compter que lrsquoOMC compte doreacutenavant un nombre bien plus eacuteleveacute de membres
Enfin srsquoagissant de la strateacutegie breacutesilienne dans ce domaine elle ne pourra ecirctre
pleinement eacutevalueacutee que dans les anneacutees agrave venir au vu de ses reacutesultats
Les choix de politique eacutetrangegravere prioriteacutes et indeacutecisions
En ce qui concerne les orientations geacuteostrateacutegiques des relations eacuteconomiques
exteacuterieures plusieurs voies sont possibles qui drsquoailleurs ne srsquoopposent pas neacuteces-
sairement Au-delagrave du multilateacuteralisme (en principe une perspective plus globale
qui nrsquoimplique pas de discrimination commerciale) lrsquointeacutegration eacuteconomique est
orienteacutee vers les pays et les reacutegions proches mais pas exclusivement (reacutegionalisa-
tion) Actuellement la plupart des pays et le Breacutesil ne fait pas exception ont une
politique commerciale baseacutee sur un certain dosage de multilateacuteralisme et
drsquointeacutegration reacutegionale Drsquoautre part outre les deux dimensions preacuteceacutedentes il
peut y avoir des accords bilateacuteraux ou de simples prioriteacutes geacuteographiques sans
aucun engagement pour les autres pays et nrsquoentraicircnant que des mesures unilateacute-
rales pour stimuler les eacutechanges dans les directions deacutesireacutees
Qursquoen est-il des options geacuteostrateacutegiques de la politique commerciale breacutesilienne
Parmi les regroupements qui ont marqueacute cette peacuteriode il faut noter 1) le Mercosul
et le reste de lrsquoAmeacuterique latine 2) les relations Sud-Sud et lrsquoAfrique 3) lrsquoAlca le
Mercoeuro24 ou les deux ce qui pose la question drsquoaccords possibles agrave lrsquoeacutechelle
continentale ou extracontinentale (et entre pays deacuteveloppeacutes et en voie de deacutevelop-
pement) Ces champs drsquoaction sont vastes et varieacutes ce qui nrsquoest pas surprenant
car le commerce exteacuterieur breacutesilien se preacutesente de faccedilon assez diversifieacutee geacuteogra-
phiquement25 Neacuteanmoins pour eacutevaluer les diffeacuterentes voies de renforcement des
liens eacuteconomiques internationaux plus que pour faire le bilan du passeacute il faut
tenir compte de leur potentiel futur notamment agrave moyen terme
Comme nous lrsquoavons deacutejagrave remarqueacute la creacuteation du Mercosul au deacutebut des
anneacutees 1990 a eacuteteacute agrave lrsquoorigine drsquoun laquo grand bond en avant raquo pour la politique
commerciale breacutesilienne et pour lrsquoAmeacuterique latine tout entiegravere dans la mesure ougrave
ce groupement eacutetait plus ambitieux et concret que ceux qui lrsquoavaient preacuteceacutedeacute
(drsquoune certaine maniegravere lrsquoexpeacuterience des quatre pays fondateurs du laquo cocircne sud raquo
24 Terme utiliseacute pour deacutesigner le projet de creacuteation drsquoune zone de libre-eacutechange entre lrsquoUnion
europeacuteenne et le Mercosul (deacutecision du sommet de Madrid en 1995) et la possibiliteacute drsquoun ren-
forcement geacuteneacuteral des liens eacuteconomiques entre les deux blocs voir S ilva 2004 263 25 Distribution du commerce exteacuterieur breacutesilien en 1999-2002 pour les exportations Union
europeacuteenne 263 Eacutetats-Unis 244 Aladi (Association latino-ameacutericaine drsquointeacutegration y
compris le Mercosul) 205 Asie et Moyen-Orient 125 et autres 161 et pour les
importations Union europeacuteenne 274 Eacutetats-Unis 233 Aladi 189 Asie et Moyen-
Orient 154 et autres 15 G onccedilalves 2005 265 et 269
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se rapprochait des pratiques europeacuteennes drsquointeacutegration) Par ailleurs le Breacutesil eacutetant
de loin la plus grande eacuteconomie du bloc son rocircle y fut deacuteterminant agrave maints
eacutegards Du point de vue de ses options geacuteographiques le gouvernement Lula a
nettement accordeacute la prioriteacute au Mercosul et par extension naturelle agrave lrsquoAmeacuterique
latine (Meyer 2005 61) Jusqursquoagrave preacutesent des accords drsquoassociation ont eacuteteacute signeacutes
avec le Chili la Bolivie le Peacuterou la Colombie et lrsquoEacutequateur puis le Venezuela
est devenu un Eacutetat membre en 2006 Cependant malgreacute les premiegraveres anneacutees
favorables le moins que lrsquoon puisse dire est qursquoen raison de diffeacuterents facteurs
dont la grave crise de lrsquoArgentine qui a deacutebuteacute en 1999 et exploseacute en 2001-2002
le Mercosul stagne depuis et a cesseacute drsquoapprofondir son ancrage Chaque Eacutetat
membre srsquoest enfermeacute dans ses problegravemes particuliers et le Mercosul reste un
exemple drsquointeacutegration reacutegionale sans coordination eacuteconomique (Baer et al 2002)
Certes ses liens avec la Communauteacute andine se sont resserreacutes et des neacutegociations
ont eacuteteacute reacutealiseacutees avec drsquoautres pays (le Mexique par exemple) ou drsquoautres groupes
mais leur ampleur reste modeste et compte tenu de lrsquoexpeacuterience drsquointeacutegration de
la reacutegion les espoirs sont reacuteserveacutes Lrsquoimpasse de lrsquoAlca analyseacutee plus loin nrsquoest
pas eacutetrangegravere agrave cette eacutevolution Pour avoir une vue drsquoensemble sur cette option
dirigeacutee vers lrsquoAmeacuterique latine le principal fait agrave retenir est lrsquoentreacutee du Venezuela
dans le Mercosul
Les relations Sud-Sud (hors Ameacuterique latine) sont une autre dimension de la
politique commerciale breacutesilienne qui a pris de lrsquoimportance du moins du point
de vue diplomatique (Meyer 2005) bien que drsquoune faccedilon geacuteneacuterale elles nrsquoaient
pas pris la forme drsquoune inteacutegration reacutegionale Drsquoune part les relations du Breacutesil
avec la Chine lrsquoInde lrsquoAfrique du Sud et drsquoautres eacuteconomies eacutemergentes se sont
deacuteveloppeacutees agrave plusieurs niveaux (multilateacuteraux ou bilateacuteraux) notamment au sein
du G20 accompagnant lrsquointensification rapide des eacutechanges commerciaux Drsquoautre
part le cas de lrsquoAfrique dans son ensemble est particuliegraverement repreacutesentatif de
la tendance Sud-Sud et plusieurs initiatives ont eacuteteacute lanceacutees par le gouvernement
breacutesilien dans le but drsquoun renforcement des relations commerciales avec ce conti-
nent geacuteographiquement proche (Oliveira amp Mouratildeo 2005 Coelho amp Saraiva
2004)
Bien qursquoils repreacutesentent eacutegalement deux orientations importantes de la politique
commerciale breacutesilienne reconnues par le gouvernement Lula lrsquoAlca et le Mercoeuro
nrsquoont pas connu drsquoavanceacutees pratiques significatives pendant cette peacuteriode En outre
comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment ces orientations nrsquoont pas eacuteteacute prioritaires
dans la politique internationale du gouvernement Lula qui favorisait le Doha Round
Srsquoagissant de processus remontant deacutejagrave aux anneacutees 1990 dont lrsquoentreacutee en vigueur
fondamentalement sous la forme drsquoune zone de libre-eacutechange eacutetait initialement
preacutevue pour 2005 lrsquoimpression est qursquoils traicircnent en longueur sans qursquoon puisse
reacuteellement entrevoir la fin des neacutegociations qui nrsquoont pas eacuteteacute abandonneacutees pour
autant Indeacutependamment de la multipliciteacute drsquoacteurs qursquoil faudrait prendre
en compte la question serait de savoir quel degreacute de pression a eacuteteacute exerceacute ndash ou
non ndash par le gouvernement breacutesilien agrave ce sujet LrsquoAlca est apparue drsquoabord comme
une sorte drsquoillustration de ladite theacuteorie des reacutegions naturelles (dans ce cas les
Ameacuteriques de lrsquoAlaska agrave la Terre de Feu) Mais compte tenu de lrsquounilateacuteralisme
traditionnel des Eacutetats-Unis envers lrsquoAmeacuterique latine et de lrsquoeacuteventail limiteacute des
produits inclus dans ces neacutegociations les pays de la reacutegion sont resteacutes reacuteticents agrave
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 101
cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
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10
20
30
40
50
60
70
80
1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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(inheritance of trade policy performances of foreign trade participation in inter-
national negotiations (the Doha Round) geographical priorities of trade directives)
and of the relationships between foreign trade and development strategy It
analyses the good results achieved domestically (appreciation of the Real trade
surpluses reduction of external debt particularly public debt flexibility of Brazilian
supply faced with world demand etc) repositioning them within the framework
of the boom in raw materials at an international level It also reports on the
activity deployed by the Lula government in the international trade negotiations
As regards the options for the development of foreign trade it raises a pos-
sible conflict between an orientation which is too focused on the countries of the
South and the optimal integration of the Brazilian economy into the world
market currently stagnating in terms of attracting foreign investment to Brazil
Cet article se propose drsquoexaminer la politique commerciale du gouvernement
du preacutesident Luiz Inacio Lula da Silva lors de son premier mandat de 2003
agrave 2006 notamment dans lrsquoobjectif de discerner si celle-ci srsquoest inscrite dans le
changement ou dans la continuiteacute Un certain nombre drsquoindicateurs de reacutefeacuterence
tels que les seacuteries statistiques ou lrsquoactiviteacute au sein des organisations internationales
ont donc eacuteteacute observeacutes et analyseacutes Par ailleurs compte tenu de la faiblesse de la
croissance breacutesilienne compareacutee agrave la moyenne mondiale durant cette peacuteriode il
srsquoagira eacutegalement de comprendre comment la politique commerciale peut contri-
buer agrave son acceacuteleacuteration consideacutereacutee comme neacutecessaire au vaste programme social
du gouvernement
Lrsquoarticle preacutesente donc briegravevement lrsquoheacuteritage du preacutesent gouvernement en la
matiegravere en rapport avec lrsquoeacutevolution du systegraveme commercial international depuis
la Seconde Guerre mondiale avant drsquoexposer dans un deuxiegraveme temps les prin-
cipales performances du secteur exteacuterieur au cours des anneacutees 2003-2006 que ce
soit aux niveaux commercial moneacutetaire ou financier Il portera ensuite sur les
relations entre le gouvernement Lula et les organisations eacuteconomiques internatio-
nales en particulier sur les neacutegociations au sein de lrsquoOrganisation mondiale du
commerce (OMC) ndash plus exactement agrave lrsquooccasion du Doha Round ndash avant de
prendre en consideacuteration les orientations geacuteostrateacutegiques y compris sous lrsquoangle
de lrsquointeacutegration reacutegionale de la politique commerciale breacutesilienne durant cette
peacuteriode Enfin la question sera poseacutee de la place du secteur exteacuterieur dans la
strateacutegie breacutesilienne de deacuteveloppement en comparaison avec celles de la Chine et
de lrsquoInde en ayant comme reacutefeacuterence les implications des diffeacuterentes alternatives
commerciales dans la croissance eacuteconomique
Lrsquoheacuteritage de la politique commerciale breacutesilienne
Le Breacutesil a souvent eacuteteacute preacutesenteacute comme un prototype de pays agrave deacuteveloppement
autocentreacute et agrave eacuteconomie fermeacutee au cours des premiegraveres deacutecennies de lrsquoapregraves-
guerre (Cardoso amp Helwege 1992 75-6) la protection eacutetait garantie par des
barriegraveres tarifaires eacuteleveacutees notamment dans drsquoimportants secteurs de lrsquoindustrie et
des services Drsquoautre part le pays nrsquoavait appartenu qursquoagrave des groupes drsquointeacutegration
reacutegionale peu ambitieux et instables Pourtant le Breacutesil srsquoest finalement quelque
peu ouvert agrave lrsquoexteacuterieur apregraves la deacutemocratisation de son reacutegime agrave partir de 1988
(Bresser-Pereira 1996) Par la suite le gouvernement de Fernando Collor de Melo
LUSO 142_1037_86-108indd 88LUSO 142_1037_86-108indd 88 111607 12741 PM111607 12741 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 89
surtout agrave ses deacutebuts en 1990-1991 a constitueacute un jalon sur la voie de la libeacutera-
lisation des eacutechanges en deacutepit des nombreuses objections souleveacutees par son action
dans les secteurs les plus divers de la socieacuteteacute breacutesilienne Certes jusqursquoen 2002
la libeacuteralisation commerciale a eacuteteacute assez perturbeacutee que ce soit avant le Plano Real
(1994) au moment des flambeacutees hyperinflationnistes et autres deacutesordres macroeacute-
conomiques survenus durant cette peacuteriode ou apregraves le changement de reacutegime
moneacutetaire du reacuteal en 1999 (la flexibiliteacute au lieu de lrsquoancrage nominal fort des
premiegraveres anneacutees) mais cette politique a eacuteteacute maintenue pour lrsquoessentiel sous les
diffeacuterents gouvernements qui se sont succeacutedeacute
Lrsquoun des aspects majeurs de cette nouvelle orientation en faveur de lrsquoouverture
commerciale a eacuteteacute la creacuteation du Mercosul en 1995 (un genre de laquo marcheacute com-
mun raquo comprenant eacutegalement lrsquoArgentine le Paraguay et lrsquoUruguay instaureacute lors
du Traiteacute drsquoAsuncioacuten signeacute en 1991) Bien que largement partageacutee avec lrsquoArgen-
tine cette initiative a permis au Breacutesil de prendre une part plus importante
qursquoauparavant dans les questions drsquointeacutegration reacutegionale
Il est important de rappeler ici que le Breacutesil a eacuteteacute lrsquoun des 23 pays fondateurs
de lrsquoAccord geacuteneacuteral sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) en 1947 (de
mecircme qursquoil avait eacuteteacute preacutesent agrave la confeacuterence de Bretton Woods en 1944) Au tout
deacutebut de ce processus lors de la reacutedaction de la Charte de La Havane en 1946
le Breacutesil lrsquoInde et le Chili avaient pris la tecircte drsquoun groupe de pays en deacutevelop-
pement qui demandaient que des exceptions soient faites afin de favoriser leur
deacuteveloppement eacuteconomique (Narlikar 2005 13) Au cours des deacutecennies suivantes
malgreacute sa participation faible au commerce mondial relativement agrave sa taille le
Breacutesil agrave lrsquoinstar de lrsquoInde a eacuteteacute freacutequemment inviteacute aux reacuteunions de laquo Green Room raquo1
ce qui nrsquoa pas eacuteteacute du tout la regravegle pour les autres pays en deacuteveloppement De la
sorte le Breacutesil est resteacute un partenaire important au sein de lrsquoOMC heacuteritiegravere du
GATT apregraves 19952 en particulier dans certains secteurs tels que les eacutechanges
agricoles degraves lors concerneacutes par ses regravegles bien que ce ne fucirct laquo qursquoun deacutebut raquo
(Messerlin 1995) ougrave il joua un rocircle beaucoup plus important qursquoau niveau du
commerce en geacuteneacuteral Parallegravelement sa preacutesence agrave la Confeacuterence des Nations
unies pour le commerce et le deacuteveloppement (CNUCED) organisation creacuteeacutee en
1964 pour reacutepondre aux problegravemes speacutecifiques des pays en deacuteveloppement dans
ces deux domaines a eacuteteacute agrave plusieurs reprises loin drsquoecirctre neacutegligeable
Le Breacutesil beacuteneacuteficie donc de conditions favorables pour jouer un rocircle de premier
plan dans le systegraveme commercial international et sa strateacutegie drsquoouverture lanceacutee
agrave la fin des anneacutees 1980 a sans nul doute accru ses possibiliteacutes drsquointervention
1 Eacutetape importante du processus deacutecisionnel du GATT ougrave les reacutesolutions finales eacutetaient prises
plutocirct par consensus que par majoriteacute des voix pour plus de deacutetails voir A N arlikar 2005
17-18 2 Un exemple parmi tant drsquoautres dans le cadre drsquoune coalition plus vaste ndash comprenant
drsquoautres pays en deacuteveloppement dont lrsquoAfrique du Sud et les Organisations non gouvernemen-
tales ndash agrave la fin des anneacutees 1990 le Breacutesil a fortement contribueacute agrave lrsquoapprobation de dispositions
plus favorables au traitement du sida en placcedilant lrsquointeacuterecirct de la santeacute publique avant la protec-
tion des brevets des multinationales pharmaceutiques dans ce qui fucirct une action tregraves remarqueacutee
concernant les Aspects des droits de proprieacuteteacute intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC)
et leurs exceptions dans une situation drsquourgence sanitaire A N arlikar 2005 106-7
LUSO 142_1037_86-108indd 89LUSO 142_1037_86-108indd 89 111607 12742 PM111607 12742 PM
90 joaquim ramos silva
dans ce domaine Lrsquoambition de jouer un rocircle plus important a conduit les gou-
vernements breacutesiliens agrave prendre en compte un eacuteventail relativement large de
questions commerciales internationales et agrave accepter un certain nombre de com-
promis et drsquoalliances (Narlikar 2003) Pourtant il faut bien reconnaicirctre que le
pouvoir du Breacutesil dans ce domaine reste limiteacute et que comme le remarque jus-
tement Narlikar dans le contexte de lrsquoOMC sa position a eacuteteacute le plus souvent
celle drsquoun laquo rule taker raquo plutocirct que celle drsquoun laquo agenda setter raquo3 Crsquoest ce qursquoil convient
de garder agrave lrsquoesprit pour comprendre la politique commerciale breacutesilienne des
anneacutees 2003-2006 avec ses effets au plan national et international
Les bonnes performances du secteur exteacuterieur
Signalons tout drsquoabord que le premier mandat preacutesidentiel de Lula a coiumlncideacute
avec une eacutevolution tregraves favorable de la plupart des principaux indicateurs relatifs
aux relations eacuteconomiques exteacuterieures (cf tableau I) tout au moins si on le com-
pare avec les anneacutees 1999-2002 ou mecircme avec drsquoautres peacuteriodes identiques des
trois derniegraveres deacutecennies Drsquoautre part si lrsquoon observe les reacutesultats eacuteconomiques
du gouvernement Lula dans son ensemble le secteur exteacuterieur semble ecirctre lrsquoun
des domaines ougrave il a le mieux reacuteussi4 Par exemple les preacutevisions neacutegatives sur
le risque agrave court terme drsquoune rupture dans le paiement de la dette exteacuterieure
souvent eacutevoqueacutees en deacutebut de mandat (The Economist 2003) en reacutefeacuterence notam-
ment agrave la situation argentine de 2001 semblent bien loin quatre ans apregraves (drsquoailleurs
le rapport devises eacutetrangegraveresdette exteacuterieure totale qui eacutetait de 179 en 2002
est passeacute agrave 519 en 2006) Que srsquoest-il donc passeacute
Tabl I ndash B reacutesil principaux indicateurs du secteur exteacuterieur 1999-2006
(en milliards US $)
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Exportations 480 551 582 604 731 965 1183 1375
Importations 492 558 556 472 483 628 736 914
Balance commerciale minus12 minus07 26 132 248 340 347 461
Inteacuterecircts minus149 minus146 minus149 minus131 minus130 minus134 minus144 minus148
Remises de beacuteneacutefices minus41 minus33 minus50 minus52 minus56 minus73 minus127 minus160
Compte-courant minus253 minus242 minus232 minus77 42 117 141 137
Investissement
portefeuille 35 86 51 44 59 82 95 78
Investissement direct 286 328 225 166 101 182 150 160
Amortissement 258 352 389 451 487 516 528
Dette exteacuterieure totale 226 217 210 211 216 201 169 160
Reacuteserves en devises 363 33 359 378 493 529 538 831
Compte-courant et reacuteserves en devises eacutetrangegraveres en donneacutees provisoires
Source Banco Central do Brasil
3 Ibid 8 4 Pour une eacutevaluation moins favorable insistant sur les vulneacuterabiliteacutes structurelles dont pacirctit
toujours le secteur exteacuterieur breacutesilien voir C arneiro 2006 9-17
LUSO 142_1037_86-108indd 90LUSO 142_1037_86-108indd 90 111607 12742 PM111607 12742 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 91
Tout drsquoabord compte tenu de ses implications geacuteneacuterales sur le secteur exteacuterieur
il est neacutecessaire drsquoobserver lrsquoeacutevolution du taux de change du reacuteal La figure 1
montre le comportement de la monnaie breacutesilienne vis-agrave-vis du dollar ameacutericain
depuis 1994 (anneacutee de sa mise en circulation) en bref le reacuteal srsquoest substantielle-
ment appreacutecieacute entre deacutebut 2003 et fin 2006 On assiste en reacutealiteacute agrave un renverse-
ment total de tendance cette fois-ci vers son appreacuteciation En admettant mecircme
lrsquooccurrence drsquoune speacuteculation intense5 et drsquoun surajustement6 en 2002 qui a
contribueacute de maniegravere conjoncturelle agrave sa forte deacutepreacuteciation et par conseacutequent agrave
un retournement agrave court terme le progregraves du reacuteal est notable en ce qui concerne
lrsquoensemble des anneacutees prises en compte dans la figure 1 Lrsquoarriveacutee du gouverne-
ment Lula et mecircme son eacutelection en sont nettement le point drsquoinflexion puisque
lrsquoon note un pic de deacutepreacuteciation quelques mois avant la fin 2002 eacutetant donneacute
les risques qui menaccedilaient alors la balance des paiements un accord avec le Fonds
moneacutetaire international ndash FMI ndash avait eacuteteacute signeacute par les principales forces politiques
breacutesiliennes au mois drsquoaoucirct de cette mecircme anneacutee
Il est vrai que lrsquoon ne peut mettre uniquement au creacutedit des autoriteacutes breacutesi-
liennes lrsquoensemble de cette eacutevolution car comme dans drsquoautres exemples eacutevoqueacutes
plus loin il faut tenir compte de lrsquoinfluence des facteurs exteacuterieurs tels les mou-
vements moneacutetaires agrave lrsquoeacutechelle mondiale Ici il faut en particulier souligner le
changement de politique moneacutetaire exteacuterieure des Eacutetats-Unis laquelle a sans doute
peseacute eacutetant donneacute le statut de reacutefeacuterence et de reacuteserve du dollar ndash notamment sa
manipulation freacutequente pour des raisons inteacuterieures et sans tenir compte des inteacute-
recircts des autres pays (McKinnon 2001) or celui-ci a commenceacute un mouvement
agrave la baisse agrave partir de 20027 comme inversement il srsquoeacutetait appreacutecieacute grosso modo
entre 1996 et 2001 Ces variations du dollar ont eacuteteacute suivies mais plutocirct dans le
sens inverse par les autres monnaies (y compris lrsquoeuro pas seulement le reacuteal et
les devises moins importantes et non indexeacutees8) crsquoest-agrave-dire qursquoen 2003-2006 elles
se sont appreacutecieacutees dans un cadre geacuteneacuteral drsquoinstabiliteacute des changes mondiaux
Quoi qursquoil en soit lrsquoappreacuteciation du reacuteal a sans doute eacuteteacute une chance pour le
Breacutesil et elle a eu des effets positifs sur lrsquoensemble du secteur exteacuterieur comme
le montrent les tableaux I et II
Le fait qui a le plus directement contribueacute agrave cette performance du reacuteal a eacuteteacute
lrsquoeacutevolution de la balance commerciale (bien plus que celle de la balance financiegravere
qui inclut parmi drsquoautres rubriques lrsquoinvestissement direct eacutetranger comme on
peut le voir au tableau I) La figure 2 preacutesente lrsquoeacutevolution des exportations et des
importations de marchandises9 depuis 1999 Il est clair qursquoagrave partir de 2003 les
5 Sur la toile de fond financiegravere des eacutelections preacutesidentielles en Ameacuterique latine voir S antiso
2003 et pour le Breacutesil voir M artiacutenez amp S antiso 20032004 6 Deacutepreacuteciation laquo excessive raquo de la monnaie due agrave la viscositeacute des autres prix pheacutenomegravene
geacuteneacuteralement de courte dureacutee (valable aussi pour lrsquoappreacuteciation mutatis mutandis) 7 Agrave la suite de plusieurs troubles dont lrsquoeacuteclatement de la bulle speacuteculative des cours des
nouvelles technologies drsquoinformation et de communication (NTIC) en 2000 et les eacuteveacutenements de
2001 les autoriteacutes moneacutetaires nord-ameacutericaines ont modifieacute leur politique de change 8 Lrsquoindexation au dollar a eacuteteacute le cas parmi drsquoautres du yuan renminbi chinois bien qursquoil ait
aussi eacuteteacute leacutegegraverement reacuteeacutevalueacute en 2006 9 Le poids des services dans les eacutechanges exteacuterieurs breacutesiliens reste peu significatif et lrsquoinves-
tissement direct eacutetranger sera consideacutereacute plus loin
LUSO 142_1037_86-108indd 91LUSO 142_1037_86-108indd 91 111607 12742 PM111607 12742 PM
92 joaquim ramos silva
deux flux ont beaucoup augmenteacute davantage celui des exportations multiplieacute par
228 entre 2002 et 2006 plus modeacutereacutement celui des importations dont la pro-
gression a eacuteteacute freineacutee par la faible croissance multiplieacute par 193 Ainsi le rapport
exportationsimportations pratiquement en eacutequilibre en 1999-2001 a ensuite
deacutegageacute un important surplus commercial
Cette eacutevolution de la balance commerciale a eu un impact tregraves positif sur
la dette exteacuterieure le Breacutesil srsquoest retrouveacute beaucoup moins endetteacute vis-agrave-vis de
lrsquoexteacuterieur (tableau II) Le gouvernement a profiteacute de cet exceacutedent commercial
pour amortir la dette exteacuterieure ce qui est un atout pour le deacuteveloppement futur
du pays rendu plus facile par lrsquoeacutelargissement de la marge de manœuvre de la
politique eacuteconomique (par exemple la possibiliteacute de recours agrave des emprunts exteacute-
0
05
1
15
2
25
3
35
4
1994 0
1
1995 0
1
1996 0
1
1997 0
1
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2002 0
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2004 0
1
2005 0
1
2006 0
1
35
21
Gouvernement Lula
Source IPEA
Fig 1 Taux de change reacutealUSD 1994-2006
Imp
Exp
0
20
40
60
80
100
120
140
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source IPEA
Fig 2 Breacutesil commerce de biens 1999-2006
Milliards US Dollars
LUSO 142_1037_86-108indd 92LUSO 142_1037_86-108indd 92 111607 12742 PM111607 12742 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 93
rieurs dans des conditions plus favorables) En effet le rapport de la dette exteacuterieure
totale au Produit inteacuterieur brut (PIB) a chuteacute agrave 179 en juin 2006 (alors qursquoil
eacutetait de 459 en 2002) il faut revenir au deacutebut des anneacutees 1970 pour trouver
des chiffres semblables (177 en 1973) En outre il faut souligner le rythme
plus rapide de la reacuteduction de la dette publique son poids dans la dette exteacuterieure
totale eacutetant passeacute de 551 en 2002 agrave 455 en 2006 ( juin)
Tabl II ndash B reacutesil indicateurs de lrsquoendettement exteacuterieur 1999-2006
(en pourcentage)
Service de
la dette
exportations
Service de la
dettePIB
Paiement
drsquointeacuterecircts
exportations
Dette
publique
exteacuterieurePIB
Dette
exteacuterieure
PIB
Dette
exteacuterieure
exportations
1999 1458 130 356 162 420 4699
2000 946 86 310 149 360 3938
2001 869 99 303 182 412 3606
2002 833 109 253 240 459 3491
2003 741 110 210 236 424 2941
2004 537 86 148 190 333 2113
2005 558 83 122 97 213 1434
2006 612 88 119 81 179 1213
Dans ce tableau les rapports au PIB ont eacuteteacute calculeacutes en se fondant sur les donneacutees des
comptes nationaux breacutesiliens pour cette variable avant mars 2007 crsquoest-agrave-dire avant sa reacuteeacuteva-
luation par lrsquoIBGE eacutevoqueacutee plus loin
jusqursquoen juin
Source Banco Central do Brasil
Toutefois ici comme dans le cas de lrsquoappreacuteciation du reacuteal on ne peut exclure de
lrsquoanalyse drsquoautres tendances de lrsquoeacuteconomie mondiale qui ont influenceacute le commerce
de biens breacutesilien en particulier le boom des matiegraveres premiegraveres (agricoles et
mineacuterales) En effet certains produits de base (comme par exemple le cafeacute le
sucre le fer le tourteau de soja et la viande de bœuf cf tableau III) dont le
Breacutesil est un gros exportateur et qui correspondent agrave sa speacutecialisation tradition-
nelle ont geacuteneacuteralement vu leurs cours grimper rapidement pendant cette peacuteriode
Lrsquoeacutemergence drsquoune forte demande chinoise de commodities10 aupregraves du Breacutesil
(figure 3) comme ailleurs a contribueacute agrave cette eacutevolution les exportations breacutesiliennes
vers la Chine ont eacuteteacute multiplieacutees par 8 entre 2000 et 2006 ougrave elles ont atteint
84 milliards de dollars Drsquoun point de vue structurel la capaciteacute agrave bien srsquoajuster
10 On sait qursquoun accroissement relativement faible de la demande peut avoir un effet multi-
plicateur sur les prix (cela est ducirc au fait que leur offre est plutocirct rigide) Plus geacuteneacuteralement on
admet que des variations de lrsquooffre et de la demande (qursquoon suppose aussi fondamentalement
stable) agrave la hausse et agrave la baisse ont des effets amplifieacutes sur les prix des matiegraveres premiegraveres qui
sont par conseacutequent plus volatiles que ceux des produits manufactureacutes
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94 joaquim ramos silva
agrave cette demande mondiale en hausse met en relief un point fort de lrsquoeacuteconomie
breacutesilienne
Tabl III ndash Eacute volution du prix de quelques produits de base
Cafeacute
Tourteau
de soja
Sucre
raffineacute Minerai de fer Viande de bœuf
Cents $lp US$t US$t US$ centst US$arrobe
1999 1259 1467 1758 276 176
2000 665 1954 2452 288 183
2001 462 1438 2395 300 201
2002 602 1673 2082 293 252
2003 611 2310 1845 320 269
2004 1050 1648 2593 379 266
2005 1071 1963 3552 650 227
2006 1082 1745 4000 774 257
Jusqursquoen octobre
Source Banco Central do Brasil et Bolsa de Mercadorias amp Futuros (BM amp F)
En revanche si lrsquoon observe la tendance agrave lrsquoaugmentation du prix mondial des
matiegraveres premiegraveres en termes de monnaie locale les reacutesultats sont plus nuanceacutes
En effet sur la base 100 en 2002 les prix unitaires en monnaie breacutesilienne11 des
cinq commodities du tableau III eacutetaient en 2006 de 756 pour la viande de bœuf
(un des principaux produits de lrsquoexportation breacutesilienne) de 774 pour le tourteau
de soja 1333 pour le cafeacute 1425 pour le sucre raffineacute et de 196 pour le fer
Dans ces circonstances pour quelques produits de base dont la viande de bœuf
et le tourteau de soja de notre seacutelection la hausse de leurs prix en dollars ameacuteri-
cains compte tenu de la deacutepreacuteciation de cette monnaie ne srsquoest pas reacutepercuteacutee
sur les recettes locales Pour obtenir leur augmentation il aurait eacuteteacute neacutecessaire
drsquoaccroicirctre les quantiteacutes exporteacutees de maniegravere agrave compenser les pertes Agrave la fin du
premier mandat cette baisse des rendements aurait creacuteeacute une certaine insatisfaction
de la part des exportateurs concerneacutes notamment dans lrsquoagro-alimentaire breacutesilien
dans la mesure ougrave par exemple ils payent lrsquoessentiel de leurs inputs en monnaie
locale
Eacutetant donneacute la deacutepreacuteciation du dollar et les tendances globales que lrsquoon vient
de signaler la position du Breacutesil dans le commerce mondial de marchandises entre
2002 et 200512 srsquoest ameacutelioreacutee dans lrsquoensemble bien que drsquoune faccedilon deacuteseacutequilibreacutee
11 Les calculs suivants ont eacuteteacute faits en termes drsquoindice de base annuelle fixe en 2002 en
divisant les valeurs preacutesenteacutees dans le tableau III par celles de lrsquoinverse de la seacuterie utiliseacutee dans
la figure 1 (taux de change reacutealUS$) 12 Au moment ougrave nous eacutecrivons deacutebut 2007 lrsquoOMC nrsquoa pas encore deacutelivreacute ses estimations
sur le commerce mondial pour 2006
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 95
plus preacuteciseacutement pour les exportations qui sont passeacutees de 096 agrave 116 et
pour les importations qui sont passeacutees de 075 agrave 072 Si lrsquoon observe
plus attentivement le commerce exteacuterieur breacutesilien on constate aussi que la part
des produits manufactureacutes a deacuteclineacute entre 2000 et 2006 passant de 5905 agrave
543 13 par conseacutequent celle des produits de base et semi-finis a augmenteacute
conduisant agrave ce que Reinaldo Gonccedilalves a appeleacute la laquo reprimarizaccedilatildeo raquo14 (2005 264)
Malgreacute les efforts qui ont eacuteteacute deacuteployeacutes par les gouvernements avant et apregraves 2003
le Breacutesil continue donc agrave eacuteprouver des difficulteacutes agrave aller au-delagrave de ses avantages
comparatifs traditionnels et agrave srsquoimplanter sur de nouveaux creacuteneaux exportateurs
agrave haute valeur ajouteacutee sauf pour quelques exceptions bien connues (dont la con-
struction aeacuteronautique civile lrsquoexploration offshore de peacutetrole et lrsquoindustrie automo-
bile) Dans drsquoautres cas comme celui des biocombustibles le Breacutesil a deacuteveloppeacute
une grande capaciteacute de production aux cours des derniegraveres deacutecennies mais leur
utilisation agrave une eacutechelle globale nrsquoest pas devenue jusqursquoagrave preacutesent une option
nette de la part des principaux consommateurs potentiels Nous reviendrons plus
loin sur ces questions
En reacutesumeacute les principaux indicateurs du secteur exteacuterieur au cours des quatre
premiegraveres anneacutees du gouvernement Lula ont connu une eacutevolution nettement
positive mecircme si les facteurs internationaux sur lesquels le gouvernement nrsquoa pas
13 Gazeta Mercantil 18 janvier 2007 Cette source reprenant une information de la Fundaccedilatildeo
Centro de Estudos do Comeacutercio Exterior (Funcex) ajoute laquo Entre 2000 et 2006 les prix des produits
de base ont augmenteacute de 43 tandis que les produits manufactureacutes nrsquoont augmenteacute que de
22 Aussi la croissance du quanta exporteacute a-t-elle eacuteteacute plus eacuteleveacutee pour les produits de base
(123 ) que pour les produits manufactureacutes (86 ) raquo 14 Tendance des produits primaires agrave regagner du poids dans les exportations breacutesiliennes
Remarquons le problegraveme que repreacutesente la demande chinoise de commodities allieacutee au fait que
ce pays exporte encore principalement des produits low-tech et que les pays deacuteveloppeacutes essaient
de se concentrer sur les produits agrave haute technologie et laissent peu drsquoespace aux pays agrave tech-
nologie moyenne comme le Breacutesil
Fig 3 Commerce Breacutesil-Chine 1999-2006
Millions US Dollars
0
2000
4000
6000
8000
10000
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Exportations ImportationsSource Secex
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drsquoinfluence ont joueacute un rocircle non neacutegligeable dans ces performances Il srsquoagit
surtout de lrsquoeacutevolution du marcheacute mondial des matiegraveres premiegraveres dont les prix
ont eacuteteacute agrave la hausse le Breacutesil en eacutetant lrsquoun des principaux fournisseurs Drsquoautre
part au niveau inteacuterieur comme la faible croissance nrsquoa pas tireacute les importations
vers le haut ces diffeacuterentes tendances ont permis en 2003-2006 lrsquoaccumulation
drsquoun surplus substantiel de la balance commerciale (mecircme lrsquoappreacuteciation du reacuteal
nrsquoa pu lrsquoempecirccher) Pourtant un renversement de tendance pourrait survenir et
reacuteveacuteler des fragiliteacutes dans le secteur exteacuterieur breacutesilien En particulier en admettant
mecircme que la phase actuelle de boom du cycle des matiegraveres premiegraveres soit relati-
vement longue (agrave cause de lrsquoentreacutee de la Chine et de lrsquoInde dans ce marcheacute) elle
aura certainement des limites agrave un moment donneacute Enfin la politique de change
la composition du commerce de marchandises et la position breacutesilienne dans le
commerce mondial ne sont pas devenues substantiellement diffeacuterentes de la situa-
tion preacuteceacutedente15 mecircme si les poleacutemiques concernant la nature de leur eacutevolution
se poursuivent
Les relations avec les organisations eacuteconomiques internationales le deacutefi des neacutegociations du Doha Round
Comme agrave drsquoautres niveaux clarifier la politique du gouvernement breacutesilien de
Lula dans ce domaine nrsquoest pas facile Lrsquoeacutevolution des organisations eacuteconomiques
internationales reacutepond agrave un certain nombre de facteurs que les gouvernements
nationaux ont du mal agrave influencer sans parler du rythme souvent tregraves lent de
la complexiteacute des neacutegociations et des marchandages pas forceacutement tregraves transpa-
rents Neacuteanmoins on peut tenter de preacuteciser les contours speacutecifiques de lrsquoaction
du gouvernement Lula dans ce domaine fondamental de la politique commerciale
Citons tout drsquoabord les deacuteclarations du ministre des Affaires eacutetrangegraveres Celso
Amorim au milieu du mandat preacutesidentiel
laquo Les accords sur les trois fronts de neacutegociation commerciale dans lesquels le Breacutesil
est simultaneacutement engageacute ndash le Doha Round de lrsquoOrganisation mondiale du commerce
la Zone de libre-eacutechange des Ameacuteriques16 (Alca) et le Mercosul-Union Europeacuteenne ndash
doivent ecirctre conclus dans un deacutelai drsquoun an et demi raquo17
Notons qursquoelles donnent la prioriteacute aux neacutegociations au sein de lrsquoOMC (Mouratildeo
2005) Compte tenu de leur position clef dans lrsquoensemble de la politique com-
merciale du gouvernement Lula agrave lrsquoeacutechelle internationale il faut drsquoabord examiner
les relations avec lrsquoOMC crsquoest-agrave-dire au niveau multilateacuteral ayant comme centre
le Doha Round pour ensuite passer en revue les questions relatives agrave lrsquointeacutegration
15 Plus geacuteneacuteralement C arneiro (2006 9) considegravere que laquo la peacuteriode 2003-2005 en ce qui
concerne le gouvernement Lula ne se diffeacuterencie pas exception faite drsquoeacuteventuelles diffeacuterences
de gestion de celle correspondant aux anneacutees 1999-2002 car ces politiques ont eu comme
fondement un reacutegime combinant lrsquoinflation le change flottant et la contraction fiscale raquo 16 Zone de libre-eacutechange (ZLEA) plus connu sous le sigle Alca Aacuterea de Livre Comeacutercio das
Ameacutericas 17 O Estado de Satildeo Paulo 3 deacutecembre 2004 B12
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 97
eacuteconomique (Mercosul Alca et relations avec lrsquoUnion europeacuteenne) et autres ques-
tions geacuteostrateacutegiques comme les relations Sud-Sud
Le cycle de neacutegociations du Doha Round est tregraves important dans la mesure ougrave
la promotion du deacuteveloppement en particulier la pleine participation des eacutecono-
mies en deacuteveloppement dans le systegraveme commercial international constitue un
objectif central depuis son lancement en novembre 2001 Degraves le deacutebut des neacutego-
ciations malgreacute toute la rheacutetorique sur le deacuteveloppement il eacutetait eacutevident que
comme les barriegraveres tarifaires srsquoeacutetaient substantiellement reacuteduites au cours des
deacutecennies suivant lrsquoapregraves-guerre de mecircme que les principales barriegraveres quanti tatives
eacutetaient en phase de deacutemantegravelement (du moins partiel) depuis la fin de lrsquoUruguay
Round en 1993 on srsquoapprochait doreacutenavant drsquoenjeux plus controverseacutes ougrave il exis-
tait traditionnellement plus de reacutesistance agrave suivre les regravegles du GATTOMC En
lrsquooccurrence les diffeacuterentes regravegles de protection de la proprieacuteteacute intellectuelle (dans
leur relation avec le commerce) lrsquoouverture des marcheacutes agricoles notamment en
raison de lrsquoentreacutee dans le systegraveme reacutesultant du Round preacuteceacutedent avaient eacuteteacute plus
formelles qursquoeffectives Or preacuteciseacutement lrsquoinclusion des produits agricoles dans ces
regravegles en particulier la reacuteduction des subventions publiques qui introduisent de
graves distorsions dans le commerce mondial de ces biens eacutetait un enjeu qui
inteacuteressait prioritairement de nombreux pays en deacuteveloppement et a fortiori le
Breacutesil en raison des difficulteacutes qursquoils rencontrent agrave tirer profit de leurs avantages
comparatifs Dans une deacuteclaration qui illustre bien la position breacutesilienne sur les
produits agricoles le ministre Celso Amorim estima que
laquo Il est choquant que plus drsquoune cinquantaine drsquoanneacutees apregraves lrsquoeacutetablissement de regravegles
multilateacuterales destineacutees agrave libeacuterer et agrave discipliner le commerce international sous lrsquoeacutegide
du GATT une cateacutegorie de produits drsquoune si grande importance pour les pays en
deacuteveloppement soit resteacutee proteacutegeacutee par des exceptions des subsides et des barriegraveres
de tous ordres raquo18
Crsquoest dans ce cadre en particulier agrave Cancuacuten en septembre 2003 que deux grou-
pes principaux19 se sont formeacutes autour de la question devenue centrale de lrsquoouver-
ture des marcheacutes agricoles (bien entendu cet enjeu eacutetait lieacute agrave drsquoautres lors des
neacutegociations) Drsquoun cocircteacute les Eacutetats-Unis et lrsquoUnion europeacuteenne srsquoopposegraverent agrave
quelques diffeacuterences pregraves et nrsquooffrirent que des concessions marginales en la matiegravere
et de lrsquoautre le G-20 au sein duquel le Breacutesil a joueacute un rocircle deacuteterminant20 qui
souhaita de veacuteritables concessions y compris une reacuteduction sensible des subventions
publiques
18 Valor 9 septembre 2003 AB 19 On ne mentionne que ces deux groupes importants pour notre sujet cependant drsquoautres
se sont formeacutes agrave la confeacuterence de Cancuacuten qui sont resteacutes actifs par la suite pour plus de deacutetails
voir N arlikar 2005 112-113 20 Il est vrai que drsquoautres grandes eacuteconomies eacutemergentes appartiennent aussi au G-20 comme
lrsquoInde la Chine lrsquoAfrique du Sud la Thaiumllande et lrsquoArgentine mais compte tenu de sa position
plus laquo combative raquo et du plus grand inteacuterecirct qursquoil porte sur le sujet le Breacutesil a dans lrsquoensemble
joueacute un des rocircles les plus importants dans les neacutegociations internationales concernant les produits
agricoles
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Apregraves cinq ans de neacutegociations et le deacutepassement de la date limite initialement
poseacutee pour sa conclusion en janvier 2005 le Doha Round a eacuteteacute suspendu sine die
en juillet 2006 sans reacutesultats concrets (le souhait du ministre breacutesilien concernant
les deacutelais nrsquoa donc pas eacuteteacute reacutealiseacute) Face agrave cette situation certains parlent de ce
cycle en termes drsquoeacutechec (par exemple Laborde amp Fontagneacute 2007) Mais si lrsquoon
observe les enjeux et les forces asymeacutetriques en preacutesence lrsquoanalyse doit ecirctre plus
nuanceacutee Il est hors de question de consideacuterer ce Round comme un succegraves et il
serait plus approprieacute drsquoestimer que ce que lrsquoon a perdu crsquoest peut-ecirctre une bataille
et non la guerre (Bhagwati 2004) qui selon toute vraisemblance se prolongera
Dans cette affaire le principal problegraveme reacuteside dans le type de reacuteponse agrave donner
face agrave lrsquoalternative suivante soit obtenir un accord dans un deacutelai relativement
court mais qui ne porte que sur des points secondaires soit obtenir un accord
plus difficilement mais qui porte sur les questions fondamentales comme lrsquoouver-
ture effective des marcheacutes agricoles ce qui serait novateur et repreacutesenterait pro-
bablement des gains consideacuterables pour le commerce mondial Il nrsquoest donc pas
possible de dire que le gouvernement breacutesilien a remporteacute un succegraves dans ce
domaine bien qursquoil ait deacutefini et maintenu une strateacutegie claire (agrave propos de laquelle
par ailleurs il ne semble pas y avoir de divergences significatives entre les prin-
cipales forces politiques breacutesiliennes) pourtant pour que sa voix soit plus creacutedible
dans les neacutegociations il faudrait qursquoil soit conseacutequent dans lrsquoagriculture comme
ailleurs21
Plus geacuteneacuteralement en ce qui concerne les reacutesultats tangibles du Doha Round 22
notamment dans les dossiers laquo sensibles raquo comme lrsquoagriculture il faudrait des condi-
tions internationales plus favorables comme en 199323 lorsque celles-ci ont permis
de sortir des impasses de lrsquoUruguay Round et du North American Free Trade Agreement
(Nafta) ce qui semble aujourdrsquohui assez improbable Par ailleurs plus de cinq ans
21 Drsquoapregraves B hagwati (2004 59) le tarif agricole moyen serait de 12 aux Eacutetats-Unis de
37 au Breacutesil et de 112 en Inde Agrave juste titre cet auteur souligne dans nombre de ses
eacutecrits que les pays en deacuteveloppement demandent aux pays deacuteveloppeacutes la reacuteduction de leurs
tarifs sans ecirctre disposeacutes agrave en faire autant Bien que cela soit vrai en termes absolus Bhagwati
neacuteglige le fait que les premiers depuis les anneacutees 1980 ont souvent reacuteduit plus vite que les
seconds leurs niveaux de protection Par exemple entre le milieu des anneacutees 1980 et lrsquoan 2000
le tarif moyen (tous secteurs) est passeacute de 66 agrave 42 en Europe de 7 agrave 4 aux Eacutetats-
Unis de 44 agrave 17 au Breacutesil et de 80 agrave 32 en Inde la libeacuteralisation unilateacuterale des
pays en deacuteveloppement a eacuteteacute importante depuis le milieu des anneacutees 1980 voir B aldwin 2006
1456 1458-1459 Drsquoautre part les pays en deacuteveloppement ont comparativement moins de pos-
sibiliteacutes de financer drsquoune faccedilon durable drsquoimportants subsides agrave la production et agrave lrsquoexportation
lesquels enfreignent gravement le libre cours des flux du commerce international 22 Deacutebut 2007 plusieurs personnaliteacutes politiques internationales dont le Preacutesident breacutesilien
notamment agrave Davos fin janvier se sont prononceacutees pour la reprise des neacutegociations du Doha
Round cependant rien nrsquoeacutetait encore trancheacute agrave ce sujet au moment de conclure la reacutedaction
de cet article 23 Au deacutebut des anneacutees 1990 peu de temps apregraves la chute du mur de Berlin et drsquoautres
changements majeurs agrave lrsquoeacutechelle mondiale survenus pendant cette peacuteriode lrsquoarriveacutee agrave la Maison
Blanche de lrsquoAdministration Clinton en 1993 alors relativement plus activiste de ce point de
vue a permis le deacuteblocage drsquoun certain nombre drsquoimpasses dans les neacutegociations commerciales
internationales
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ont eacuteteacute neacutecessaires pour que le Tokyo Round (1973-1979) soit conclu plus de sept
ans pour lrsquoUruguay Round (1986-1993) il faudrait donc beaucoup de chance pour
que le Doha Round soit conclu dans un temps plus court compte tenu de son
agenda ndash reconnu par tous comme tregraves difficile ndash des coucircts qursquoil implique agrave court
terme pour des groupes politiquement puissants dans les pays deacuteveloppeacutes sans
compter que lrsquoOMC compte doreacutenavant un nombre bien plus eacuteleveacute de membres
Enfin srsquoagissant de la strateacutegie breacutesilienne dans ce domaine elle ne pourra ecirctre
pleinement eacutevalueacutee que dans les anneacutees agrave venir au vu de ses reacutesultats
Les choix de politique eacutetrangegravere prioriteacutes et indeacutecisions
En ce qui concerne les orientations geacuteostrateacutegiques des relations eacuteconomiques
exteacuterieures plusieurs voies sont possibles qui drsquoailleurs ne srsquoopposent pas neacuteces-
sairement Au-delagrave du multilateacuteralisme (en principe une perspective plus globale
qui nrsquoimplique pas de discrimination commerciale) lrsquointeacutegration eacuteconomique est
orienteacutee vers les pays et les reacutegions proches mais pas exclusivement (reacutegionalisa-
tion) Actuellement la plupart des pays et le Breacutesil ne fait pas exception ont une
politique commerciale baseacutee sur un certain dosage de multilateacuteralisme et
drsquointeacutegration reacutegionale Drsquoautre part outre les deux dimensions preacuteceacutedentes il
peut y avoir des accords bilateacuteraux ou de simples prioriteacutes geacuteographiques sans
aucun engagement pour les autres pays et nrsquoentraicircnant que des mesures unilateacute-
rales pour stimuler les eacutechanges dans les directions deacutesireacutees
Qursquoen est-il des options geacuteostrateacutegiques de la politique commerciale breacutesilienne
Parmi les regroupements qui ont marqueacute cette peacuteriode il faut noter 1) le Mercosul
et le reste de lrsquoAmeacuterique latine 2) les relations Sud-Sud et lrsquoAfrique 3) lrsquoAlca le
Mercoeuro24 ou les deux ce qui pose la question drsquoaccords possibles agrave lrsquoeacutechelle
continentale ou extracontinentale (et entre pays deacuteveloppeacutes et en voie de deacutevelop-
pement) Ces champs drsquoaction sont vastes et varieacutes ce qui nrsquoest pas surprenant
car le commerce exteacuterieur breacutesilien se preacutesente de faccedilon assez diversifieacutee geacuteogra-
phiquement25 Neacuteanmoins pour eacutevaluer les diffeacuterentes voies de renforcement des
liens eacuteconomiques internationaux plus que pour faire le bilan du passeacute il faut
tenir compte de leur potentiel futur notamment agrave moyen terme
Comme nous lrsquoavons deacutejagrave remarqueacute la creacuteation du Mercosul au deacutebut des
anneacutees 1990 a eacuteteacute agrave lrsquoorigine drsquoun laquo grand bond en avant raquo pour la politique
commerciale breacutesilienne et pour lrsquoAmeacuterique latine tout entiegravere dans la mesure ougrave
ce groupement eacutetait plus ambitieux et concret que ceux qui lrsquoavaient preacuteceacutedeacute
(drsquoune certaine maniegravere lrsquoexpeacuterience des quatre pays fondateurs du laquo cocircne sud raquo
24 Terme utiliseacute pour deacutesigner le projet de creacuteation drsquoune zone de libre-eacutechange entre lrsquoUnion
europeacuteenne et le Mercosul (deacutecision du sommet de Madrid en 1995) et la possibiliteacute drsquoun ren-
forcement geacuteneacuteral des liens eacuteconomiques entre les deux blocs voir S ilva 2004 263 25 Distribution du commerce exteacuterieur breacutesilien en 1999-2002 pour les exportations Union
europeacuteenne 263 Eacutetats-Unis 244 Aladi (Association latino-ameacutericaine drsquointeacutegration y
compris le Mercosul) 205 Asie et Moyen-Orient 125 et autres 161 et pour les
importations Union europeacuteenne 274 Eacutetats-Unis 233 Aladi 189 Asie et Moyen-
Orient 154 et autres 15 G onccedilalves 2005 265 et 269
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se rapprochait des pratiques europeacuteennes drsquointeacutegration) Par ailleurs le Breacutesil eacutetant
de loin la plus grande eacuteconomie du bloc son rocircle y fut deacuteterminant agrave maints
eacutegards Du point de vue de ses options geacuteographiques le gouvernement Lula a
nettement accordeacute la prioriteacute au Mercosul et par extension naturelle agrave lrsquoAmeacuterique
latine (Meyer 2005 61) Jusqursquoagrave preacutesent des accords drsquoassociation ont eacuteteacute signeacutes
avec le Chili la Bolivie le Peacuterou la Colombie et lrsquoEacutequateur puis le Venezuela
est devenu un Eacutetat membre en 2006 Cependant malgreacute les premiegraveres anneacutees
favorables le moins que lrsquoon puisse dire est qursquoen raison de diffeacuterents facteurs
dont la grave crise de lrsquoArgentine qui a deacutebuteacute en 1999 et exploseacute en 2001-2002
le Mercosul stagne depuis et a cesseacute drsquoapprofondir son ancrage Chaque Eacutetat
membre srsquoest enfermeacute dans ses problegravemes particuliers et le Mercosul reste un
exemple drsquointeacutegration reacutegionale sans coordination eacuteconomique (Baer et al 2002)
Certes ses liens avec la Communauteacute andine se sont resserreacutes et des neacutegociations
ont eacuteteacute reacutealiseacutees avec drsquoautres pays (le Mexique par exemple) ou drsquoautres groupes
mais leur ampleur reste modeste et compte tenu de lrsquoexpeacuterience drsquointeacutegration de
la reacutegion les espoirs sont reacuteserveacutes Lrsquoimpasse de lrsquoAlca analyseacutee plus loin nrsquoest
pas eacutetrangegravere agrave cette eacutevolution Pour avoir une vue drsquoensemble sur cette option
dirigeacutee vers lrsquoAmeacuterique latine le principal fait agrave retenir est lrsquoentreacutee du Venezuela
dans le Mercosul
Les relations Sud-Sud (hors Ameacuterique latine) sont une autre dimension de la
politique commerciale breacutesilienne qui a pris de lrsquoimportance du moins du point
de vue diplomatique (Meyer 2005) bien que drsquoune faccedilon geacuteneacuterale elles nrsquoaient
pas pris la forme drsquoune inteacutegration reacutegionale Drsquoune part les relations du Breacutesil
avec la Chine lrsquoInde lrsquoAfrique du Sud et drsquoautres eacuteconomies eacutemergentes se sont
deacuteveloppeacutees agrave plusieurs niveaux (multilateacuteraux ou bilateacuteraux) notamment au sein
du G20 accompagnant lrsquointensification rapide des eacutechanges commerciaux Drsquoautre
part le cas de lrsquoAfrique dans son ensemble est particuliegraverement repreacutesentatif de
la tendance Sud-Sud et plusieurs initiatives ont eacuteteacute lanceacutees par le gouvernement
breacutesilien dans le but drsquoun renforcement des relations commerciales avec ce conti-
nent geacuteographiquement proche (Oliveira amp Mouratildeo 2005 Coelho amp Saraiva
2004)
Bien qursquoils repreacutesentent eacutegalement deux orientations importantes de la politique
commerciale breacutesilienne reconnues par le gouvernement Lula lrsquoAlca et le Mercoeuro
nrsquoont pas connu drsquoavanceacutees pratiques significatives pendant cette peacuteriode En outre
comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment ces orientations nrsquoont pas eacuteteacute prioritaires
dans la politique internationale du gouvernement Lula qui favorisait le Doha Round
Srsquoagissant de processus remontant deacutejagrave aux anneacutees 1990 dont lrsquoentreacutee en vigueur
fondamentalement sous la forme drsquoune zone de libre-eacutechange eacutetait initialement
preacutevue pour 2005 lrsquoimpression est qursquoils traicircnent en longueur sans qursquoon puisse
reacuteellement entrevoir la fin des neacutegociations qui nrsquoont pas eacuteteacute abandonneacutees pour
autant Indeacutependamment de la multipliciteacute drsquoacteurs qursquoil faudrait prendre
en compte la question serait de savoir quel degreacute de pression a eacuteteacute exerceacute ndash ou
non ndash par le gouvernement breacutesilien agrave ce sujet LrsquoAlca est apparue drsquoabord comme
une sorte drsquoillustration de ladite theacuteorie des reacutegions naturelles (dans ce cas les
Ameacuteriques de lrsquoAlaska agrave la Terre de Feu) Mais compte tenu de lrsquounilateacuteralisme
traditionnel des Eacutetats-Unis envers lrsquoAmeacuterique latine et de lrsquoeacuteventail limiteacute des
produits inclus dans ces neacutegociations les pays de la reacutegion sont resteacutes reacuteticents agrave
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cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
0
10
20
30
40
50
60
70
80
1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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surtout agrave ses deacutebuts en 1990-1991 a constitueacute un jalon sur la voie de la libeacutera-
lisation des eacutechanges en deacutepit des nombreuses objections souleveacutees par son action
dans les secteurs les plus divers de la socieacuteteacute breacutesilienne Certes jusqursquoen 2002
la libeacuteralisation commerciale a eacuteteacute assez perturbeacutee que ce soit avant le Plano Real
(1994) au moment des flambeacutees hyperinflationnistes et autres deacutesordres macroeacute-
conomiques survenus durant cette peacuteriode ou apregraves le changement de reacutegime
moneacutetaire du reacuteal en 1999 (la flexibiliteacute au lieu de lrsquoancrage nominal fort des
premiegraveres anneacutees) mais cette politique a eacuteteacute maintenue pour lrsquoessentiel sous les
diffeacuterents gouvernements qui se sont succeacutedeacute
Lrsquoun des aspects majeurs de cette nouvelle orientation en faveur de lrsquoouverture
commerciale a eacuteteacute la creacuteation du Mercosul en 1995 (un genre de laquo marcheacute com-
mun raquo comprenant eacutegalement lrsquoArgentine le Paraguay et lrsquoUruguay instaureacute lors
du Traiteacute drsquoAsuncioacuten signeacute en 1991) Bien que largement partageacutee avec lrsquoArgen-
tine cette initiative a permis au Breacutesil de prendre une part plus importante
qursquoauparavant dans les questions drsquointeacutegration reacutegionale
Il est important de rappeler ici que le Breacutesil a eacuteteacute lrsquoun des 23 pays fondateurs
de lrsquoAccord geacuteneacuteral sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) en 1947 (de
mecircme qursquoil avait eacuteteacute preacutesent agrave la confeacuterence de Bretton Woods en 1944) Au tout
deacutebut de ce processus lors de la reacutedaction de la Charte de La Havane en 1946
le Breacutesil lrsquoInde et le Chili avaient pris la tecircte drsquoun groupe de pays en deacutevelop-
pement qui demandaient que des exceptions soient faites afin de favoriser leur
deacuteveloppement eacuteconomique (Narlikar 2005 13) Au cours des deacutecennies suivantes
malgreacute sa participation faible au commerce mondial relativement agrave sa taille le
Breacutesil agrave lrsquoinstar de lrsquoInde a eacuteteacute freacutequemment inviteacute aux reacuteunions de laquo Green Room raquo1
ce qui nrsquoa pas eacuteteacute du tout la regravegle pour les autres pays en deacuteveloppement De la
sorte le Breacutesil est resteacute un partenaire important au sein de lrsquoOMC heacuteritiegravere du
GATT apregraves 19952 en particulier dans certains secteurs tels que les eacutechanges
agricoles degraves lors concerneacutes par ses regravegles bien que ce ne fucirct laquo qursquoun deacutebut raquo
(Messerlin 1995) ougrave il joua un rocircle beaucoup plus important qursquoau niveau du
commerce en geacuteneacuteral Parallegravelement sa preacutesence agrave la Confeacuterence des Nations
unies pour le commerce et le deacuteveloppement (CNUCED) organisation creacuteeacutee en
1964 pour reacutepondre aux problegravemes speacutecifiques des pays en deacuteveloppement dans
ces deux domaines a eacuteteacute agrave plusieurs reprises loin drsquoecirctre neacutegligeable
Le Breacutesil beacuteneacuteficie donc de conditions favorables pour jouer un rocircle de premier
plan dans le systegraveme commercial international et sa strateacutegie drsquoouverture lanceacutee
agrave la fin des anneacutees 1980 a sans nul doute accru ses possibiliteacutes drsquointervention
1 Eacutetape importante du processus deacutecisionnel du GATT ougrave les reacutesolutions finales eacutetaient prises
plutocirct par consensus que par majoriteacute des voix pour plus de deacutetails voir A N arlikar 2005
17-18 2 Un exemple parmi tant drsquoautres dans le cadre drsquoune coalition plus vaste ndash comprenant
drsquoautres pays en deacuteveloppement dont lrsquoAfrique du Sud et les Organisations non gouvernemen-
tales ndash agrave la fin des anneacutees 1990 le Breacutesil a fortement contribueacute agrave lrsquoapprobation de dispositions
plus favorables au traitement du sida en placcedilant lrsquointeacuterecirct de la santeacute publique avant la protec-
tion des brevets des multinationales pharmaceutiques dans ce qui fucirct une action tregraves remarqueacutee
concernant les Aspects des droits de proprieacuteteacute intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC)
et leurs exceptions dans une situation drsquourgence sanitaire A N arlikar 2005 106-7
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dans ce domaine Lrsquoambition de jouer un rocircle plus important a conduit les gou-
vernements breacutesiliens agrave prendre en compte un eacuteventail relativement large de
questions commerciales internationales et agrave accepter un certain nombre de com-
promis et drsquoalliances (Narlikar 2003) Pourtant il faut bien reconnaicirctre que le
pouvoir du Breacutesil dans ce domaine reste limiteacute et que comme le remarque jus-
tement Narlikar dans le contexte de lrsquoOMC sa position a eacuteteacute le plus souvent
celle drsquoun laquo rule taker raquo plutocirct que celle drsquoun laquo agenda setter raquo3 Crsquoest ce qursquoil convient
de garder agrave lrsquoesprit pour comprendre la politique commerciale breacutesilienne des
anneacutees 2003-2006 avec ses effets au plan national et international
Les bonnes performances du secteur exteacuterieur
Signalons tout drsquoabord que le premier mandat preacutesidentiel de Lula a coiumlncideacute
avec une eacutevolution tregraves favorable de la plupart des principaux indicateurs relatifs
aux relations eacuteconomiques exteacuterieures (cf tableau I) tout au moins si on le com-
pare avec les anneacutees 1999-2002 ou mecircme avec drsquoautres peacuteriodes identiques des
trois derniegraveres deacutecennies Drsquoautre part si lrsquoon observe les reacutesultats eacuteconomiques
du gouvernement Lula dans son ensemble le secteur exteacuterieur semble ecirctre lrsquoun
des domaines ougrave il a le mieux reacuteussi4 Par exemple les preacutevisions neacutegatives sur
le risque agrave court terme drsquoune rupture dans le paiement de la dette exteacuterieure
souvent eacutevoqueacutees en deacutebut de mandat (The Economist 2003) en reacutefeacuterence notam-
ment agrave la situation argentine de 2001 semblent bien loin quatre ans apregraves (drsquoailleurs
le rapport devises eacutetrangegraveresdette exteacuterieure totale qui eacutetait de 179 en 2002
est passeacute agrave 519 en 2006) Que srsquoest-il donc passeacute
Tabl I ndash B reacutesil principaux indicateurs du secteur exteacuterieur 1999-2006
(en milliards US $)
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Exportations 480 551 582 604 731 965 1183 1375
Importations 492 558 556 472 483 628 736 914
Balance commerciale minus12 minus07 26 132 248 340 347 461
Inteacuterecircts minus149 minus146 minus149 minus131 minus130 minus134 minus144 minus148
Remises de beacuteneacutefices minus41 minus33 minus50 minus52 minus56 minus73 minus127 minus160
Compte-courant minus253 minus242 minus232 minus77 42 117 141 137
Investissement
portefeuille 35 86 51 44 59 82 95 78
Investissement direct 286 328 225 166 101 182 150 160
Amortissement 258 352 389 451 487 516 528
Dette exteacuterieure totale 226 217 210 211 216 201 169 160
Reacuteserves en devises 363 33 359 378 493 529 538 831
Compte-courant et reacuteserves en devises eacutetrangegraveres en donneacutees provisoires
Source Banco Central do Brasil
3 Ibid 8 4 Pour une eacutevaluation moins favorable insistant sur les vulneacuterabiliteacutes structurelles dont pacirctit
toujours le secteur exteacuterieur breacutesilien voir C arneiro 2006 9-17
LUSO 142_1037_86-108indd 90LUSO 142_1037_86-108indd 90 111607 12742 PM111607 12742 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 91
Tout drsquoabord compte tenu de ses implications geacuteneacuterales sur le secteur exteacuterieur
il est neacutecessaire drsquoobserver lrsquoeacutevolution du taux de change du reacuteal La figure 1
montre le comportement de la monnaie breacutesilienne vis-agrave-vis du dollar ameacutericain
depuis 1994 (anneacutee de sa mise en circulation) en bref le reacuteal srsquoest substantielle-
ment appreacutecieacute entre deacutebut 2003 et fin 2006 On assiste en reacutealiteacute agrave un renverse-
ment total de tendance cette fois-ci vers son appreacuteciation En admettant mecircme
lrsquooccurrence drsquoune speacuteculation intense5 et drsquoun surajustement6 en 2002 qui a
contribueacute de maniegravere conjoncturelle agrave sa forte deacutepreacuteciation et par conseacutequent agrave
un retournement agrave court terme le progregraves du reacuteal est notable en ce qui concerne
lrsquoensemble des anneacutees prises en compte dans la figure 1 Lrsquoarriveacutee du gouverne-
ment Lula et mecircme son eacutelection en sont nettement le point drsquoinflexion puisque
lrsquoon note un pic de deacutepreacuteciation quelques mois avant la fin 2002 eacutetant donneacute
les risques qui menaccedilaient alors la balance des paiements un accord avec le Fonds
moneacutetaire international ndash FMI ndash avait eacuteteacute signeacute par les principales forces politiques
breacutesiliennes au mois drsquoaoucirct de cette mecircme anneacutee
Il est vrai que lrsquoon ne peut mettre uniquement au creacutedit des autoriteacutes breacutesi-
liennes lrsquoensemble de cette eacutevolution car comme dans drsquoautres exemples eacutevoqueacutes
plus loin il faut tenir compte de lrsquoinfluence des facteurs exteacuterieurs tels les mou-
vements moneacutetaires agrave lrsquoeacutechelle mondiale Ici il faut en particulier souligner le
changement de politique moneacutetaire exteacuterieure des Eacutetats-Unis laquelle a sans doute
peseacute eacutetant donneacute le statut de reacutefeacuterence et de reacuteserve du dollar ndash notamment sa
manipulation freacutequente pour des raisons inteacuterieures et sans tenir compte des inteacute-
recircts des autres pays (McKinnon 2001) or celui-ci a commenceacute un mouvement
agrave la baisse agrave partir de 20027 comme inversement il srsquoeacutetait appreacutecieacute grosso modo
entre 1996 et 2001 Ces variations du dollar ont eacuteteacute suivies mais plutocirct dans le
sens inverse par les autres monnaies (y compris lrsquoeuro pas seulement le reacuteal et
les devises moins importantes et non indexeacutees8) crsquoest-agrave-dire qursquoen 2003-2006 elles
se sont appreacutecieacutees dans un cadre geacuteneacuteral drsquoinstabiliteacute des changes mondiaux
Quoi qursquoil en soit lrsquoappreacuteciation du reacuteal a sans doute eacuteteacute une chance pour le
Breacutesil et elle a eu des effets positifs sur lrsquoensemble du secteur exteacuterieur comme
le montrent les tableaux I et II
Le fait qui a le plus directement contribueacute agrave cette performance du reacuteal a eacuteteacute
lrsquoeacutevolution de la balance commerciale (bien plus que celle de la balance financiegravere
qui inclut parmi drsquoautres rubriques lrsquoinvestissement direct eacutetranger comme on
peut le voir au tableau I) La figure 2 preacutesente lrsquoeacutevolution des exportations et des
importations de marchandises9 depuis 1999 Il est clair qursquoagrave partir de 2003 les
5 Sur la toile de fond financiegravere des eacutelections preacutesidentielles en Ameacuterique latine voir S antiso
2003 et pour le Breacutesil voir M artiacutenez amp S antiso 20032004 6 Deacutepreacuteciation laquo excessive raquo de la monnaie due agrave la viscositeacute des autres prix pheacutenomegravene
geacuteneacuteralement de courte dureacutee (valable aussi pour lrsquoappreacuteciation mutatis mutandis) 7 Agrave la suite de plusieurs troubles dont lrsquoeacuteclatement de la bulle speacuteculative des cours des
nouvelles technologies drsquoinformation et de communication (NTIC) en 2000 et les eacuteveacutenements de
2001 les autoriteacutes moneacutetaires nord-ameacutericaines ont modifieacute leur politique de change 8 Lrsquoindexation au dollar a eacuteteacute le cas parmi drsquoautres du yuan renminbi chinois bien qursquoil ait
aussi eacuteteacute leacutegegraverement reacuteeacutevalueacute en 2006 9 Le poids des services dans les eacutechanges exteacuterieurs breacutesiliens reste peu significatif et lrsquoinves-
tissement direct eacutetranger sera consideacutereacute plus loin
LUSO 142_1037_86-108indd 91LUSO 142_1037_86-108indd 91 111607 12742 PM111607 12742 PM
92 joaquim ramos silva
deux flux ont beaucoup augmenteacute davantage celui des exportations multiplieacute par
228 entre 2002 et 2006 plus modeacutereacutement celui des importations dont la pro-
gression a eacuteteacute freineacutee par la faible croissance multiplieacute par 193 Ainsi le rapport
exportationsimportations pratiquement en eacutequilibre en 1999-2001 a ensuite
deacutegageacute un important surplus commercial
Cette eacutevolution de la balance commerciale a eu un impact tregraves positif sur
la dette exteacuterieure le Breacutesil srsquoest retrouveacute beaucoup moins endetteacute vis-agrave-vis de
lrsquoexteacuterieur (tableau II) Le gouvernement a profiteacute de cet exceacutedent commercial
pour amortir la dette exteacuterieure ce qui est un atout pour le deacuteveloppement futur
du pays rendu plus facile par lrsquoeacutelargissement de la marge de manœuvre de la
politique eacuteconomique (par exemple la possibiliteacute de recours agrave des emprunts exteacute-
0
05
1
15
2
25
3
35
4
1994 0
1
1995 0
1
1996 0
1
1997 0
1
1998 0
1
1999 0
1
2000 0
1
2001 0
1
2002 0
1
2003 0
1
2004 0
1
2005 0
1
2006 0
1
35
21
Gouvernement Lula
Source IPEA
Fig 1 Taux de change reacutealUSD 1994-2006
Imp
Exp
0
20
40
60
80
100
120
140
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source IPEA
Fig 2 Breacutesil commerce de biens 1999-2006
Milliards US Dollars
LUSO 142_1037_86-108indd 92LUSO 142_1037_86-108indd 92 111607 12742 PM111607 12742 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 93
rieurs dans des conditions plus favorables) En effet le rapport de la dette exteacuterieure
totale au Produit inteacuterieur brut (PIB) a chuteacute agrave 179 en juin 2006 (alors qursquoil
eacutetait de 459 en 2002) il faut revenir au deacutebut des anneacutees 1970 pour trouver
des chiffres semblables (177 en 1973) En outre il faut souligner le rythme
plus rapide de la reacuteduction de la dette publique son poids dans la dette exteacuterieure
totale eacutetant passeacute de 551 en 2002 agrave 455 en 2006 ( juin)
Tabl II ndash B reacutesil indicateurs de lrsquoendettement exteacuterieur 1999-2006
(en pourcentage)
Service de
la dette
exportations
Service de la
dettePIB
Paiement
drsquointeacuterecircts
exportations
Dette
publique
exteacuterieurePIB
Dette
exteacuterieure
PIB
Dette
exteacuterieure
exportations
1999 1458 130 356 162 420 4699
2000 946 86 310 149 360 3938
2001 869 99 303 182 412 3606
2002 833 109 253 240 459 3491
2003 741 110 210 236 424 2941
2004 537 86 148 190 333 2113
2005 558 83 122 97 213 1434
2006 612 88 119 81 179 1213
Dans ce tableau les rapports au PIB ont eacuteteacute calculeacutes en se fondant sur les donneacutees des
comptes nationaux breacutesiliens pour cette variable avant mars 2007 crsquoest-agrave-dire avant sa reacuteeacuteva-
luation par lrsquoIBGE eacutevoqueacutee plus loin
jusqursquoen juin
Source Banco Central do Brasil
Toutefois ici comme dans le cas de lrsquoappreacuteciation du reacuteal on ne peut exclure de
lrsquoanalyse drsquoautres tendances de lrsquoeacuteconomie mondiale qui ont influenceacute le commerce
de biens breacutesilien en particulier le boom des matiegraveres premiegraveres (agricoles et
mineacuterales) En effet certains produits de base (comme par exemple le cafeacute le
sucre le fer le tourteau de soja et la viande de bœuf cf tableau III) dont le
Breacutesil est un gros exportateur et qui correspondent agrave sa speacutecialisation tradition-
nelle ont geacuteneacuteralement vu leurs cours grimper rapidement pendant cette peacuteriode
Lrsquoeacutemergence drsquoune forte demande chinoise de commodities10 aupregraves du Breacutesil
(figure 3) comme ailleurs a contribueacute agrave cette eacutevolution les exportations breacutesiliennes
vers la Chine ont eacuteteacute multiplieacutees par 8 entre 2000 et 2006 ougrave elles ont atteint
84 milliards de dollars Drsquoun point de vue structurel la capaciteacute agrave bien srsquoajuster
10 On sait qursquoun accroissement relativement faible de la demande peut avoir un effet multi-
plicateur sur les prix (cela est ducirc au fait que leur offre est plutocirct rigide) Plus geacuteneacuteralement on
admet que des variations de lrsquooffre et de la demande (qursquoon suppose aussi fondamentalement
stable) agrave la hausse et agrave la baisse ont des effets amplifieacutes sur les prix des matiegraveres premiegraveres qui
sont par conseacutequent plus volatiles que ceux des produits manufactureacutes
LUSO 142_1037_86-108indd 93LUSO 142_1037_86-108indd 93 111607 12742 PM111607 12742 PM
94 joaquim ramos silva
agrave cette demande mondiale en hausse met en relief un point fort de lrsquoeacuteconomie
breacutesilienne
Tabl III ndash Eacute volution du prix de quelques produits de base
Cafeacute
Tourteau
de soja
Sucre
raffineacute Minerai de fer Viande de bœuf
Cents $lp US$t US$t US$ centst US$arrobe
1999 1259 1467 1758 276 176
2000 665 1954 2452 288 183
2001 462 1438 2395 300 201
2002 602 1673 2082 293 252
2003 611 2310 1845 320 269
2004 1050 1648 2593 379 266
2005 1071 1963 3552 650 227
2006 1082 1745 4000 774 257
Jusqursquoen octobre
Source Banco Central do Brasil et Bolsa de Mercadorias amp Futuros (BM amp F)
En revanche si lrsquoon observe la tendance agrave lrsquoaugmentation du prix mondial des
matiegraveres premiegraveres en termes de monnaie locale les reacutesultats sont plus nuanceacutes
En effet sur la base 100 en 2002 les prix unitaires en monnaie breacutesilienne11 des
cinq commodities du tableau III eacutetaient en 2006 de 756 pour la viande de bœuf
(un des principaux produits de lrsquoexportation breacutesilienne) de 774 pour le tourteau
de soja 1333 pour le cafeacute 1425 pour le sucre raffineacute et de 196 pour le fer
Dans ces circonstances pour quelques produits de base dont la viande de bœuf
et le tourteau de soja de notre seacutelection la hausse de leurs prix en dollars ameacuteri-
cains compte tenu de la deacutepreacuteciation de cette monnaie ne srsquoest pas reacutepercuteacutee
sur les recettes locales Pour obtenir leur augmentation il aurait eacuteteacute neacutecessaire
drsquoaccroicirctre les quantiteacutes exporteacutees de maniegravere agrave compenser les pertes Agrave la fin du
premier mandat cette baisse des rendements aurait creacuteeacute une certaine insatisfaction
de la part des exportateurs concerneacutes notamment dans lrsquoagro-alimentaire breacutesilien
dans la mesure ougrave par exemple ils payent lrsquoessentiel de leurs inputs en monnaie
locale
Eacutetant donneacute la deacutepreacuteciation du dollar et les tendances globales que lrsquoon vient
de signaler la position du Breacutesil dans le commerce mondial de marchandises entre
2002 et 200512 srsquoest ameacutelioreacutee dans lrsquoensemble bien que drsquoune faccedilon deacuteseacutequilibreacutee
11 Les calculs suivants ont eacuteteacute faits en termes drsquoindice de base annuelle fixe en 2002 en
divisant les valeurs preacutesenteacutees dans le tableau III par celles de lrsquoinverse de la seacuterie utiliseacutee dans
la figure 1 (taux de change reacutealUS$) 12 Au moment ougrave nous eacutecrivons deacutebut 2007 lrsquoOMC nrsquoa pas encore deacutelivreacute ses estimations
sur le commerce mondial pour 2006
LUSO 142_1037_86-108indd 94LUSO 142_1037_86-108indd 94 111607 12743 PM111607 12743 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 95
plus preacuteciseacutement pour les exportations qui sont passeacutees de 096 agrave 116 et
pour les importations qui sont passeacutees de 075 agrave 072 Si lrsquoon observe
plus attentivement le commerce exteacuterieur breacutesilien on constate aussi que la part
des produits manufactureacutes a deacuteclineacute entre 2000 et 2006 passant de 5905 agrave
543 13 par conseacutequent celle des produits de base et semi-finis a augmenteacute
conduisant agrave ce que Reinaldo Gonccedilalves a appeleacute la laquo reprimarizaccedilatildeo raquo14 (2005 264)
Malgreacute les efforts qui ont eacuteteacute deacuteployeacutes par les gouvernements avant et apregraves 2003
le Breacutesil continue donc agrave eacuteprouver des difficulteacutes agrave aller au-delagrave de ses avantages
comparatifs traditionnels et agrave srsquoimplanter sur de nouveaux creacuteneaux exportateurs
agrave haute valeur ajouteacutee sauf pour quelques exceptions bien connues (dont la con-
struction aeacuteronautique civile lrsquoexploration offshore de peacutetrole et lrsquoindustrie automo-
bile) Dans drsquoautres cas comme celui des biocombustibles le Breacutesil a deacuteveloppeacute
une grande capaciteacute de production aux cours des derniegraveres deacutecennies mais leur
utilisation agrave une eacutechelle globale nrsquoest pas devenue jusqursquoagrave preacutesent une option
nette de la part des principaux consommateurs potentiels Nous reviendrons plus
loin sur ces questions
En reacutesumeacute les principaux indicateurs du secteur exteacuterieur au cours des quatre
premiegraveres anneacutees du gouvernement Lula ont connu une eacutevolution nettement
positive mecircme si les facteurs internationaux sur lesquels le gouvernement nrsquoa pas
13 Gazeta Mercantil 18 janvier 2007 Cette source reprenant une information de la Fundaccedilatildeo
Centro de Estudos do Comeacutercio Exterior (Funcex) ajoute laquo Entre 2000 et 2006 les prix des produits
de base ont augmenteacute de 43 tandis que les produits manufactureacutes nrsquoont augmenteacute que de
22 Aussi la croissance du quanta exporteacute a-t-elle eacuteteacute plus eacuteleveacutee pour les produits de base
(123 ) que pour les produits manufactureacutes (86 ) raquo 14 Tendance des produits primaires agrave regagner du poids dans les exportations breacutesiliennes
Remarquons le problegraveme que repreacutesente la demande chinoise de commodities allieacutee au fait que
ce pays exporte encore principalement des produits low-tech et que les pays deacuteveloppeacutes essaient
de se concentrer sur les produits agrave haute technologie et laissent peu drsquoespace aux pays agrave tech-
nologie moyenne comme le Breacutesil
Fig 3 Commerce Breacutesil-Chine 1999-2006
Millions US Dollars
0
2000
4000
6000
8000
10000
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Exportations ImportationsSource Secex
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96 joaquim ramos silva
drsquoinfluence ont joueacute un rocircle non neacutegligeable dans ces performances Il srsquoagit
surtout de lrsquoeacutevolution du marcheacute mondial des matiegraveres premiegraveres dont les prix
ont eacuteteacute agrave la hausse le Breacutesil en eacutetant lrsquoun des principaux fournisseurs Drsquoautre
part au niveau inteacuterieur comme la faible croissance nrsquoa pas tireacute les importations
vers le haut ces diffeacuterentes tendances ont permis en 2003-2006 lrsquoaccumulation
drsquoun surplus substantiel de la balance commerciale (mecircme lrsquoappreacuteciation du reacuteal
nrsquoa pu lrsquoempecirccher) Pourtant un renversement de tendance pourrait survenir et
reacuteveacuteler des fragiliteacutes dans le secteur exteacuterieur breacutesilien En particulier en admettant
mecircme que la phase actuelle de boom du cycle des matiegraveres premiegraveres soit relati-
vement longue (agrave cause de lrsquoentreacutee de la Chine et de lrsquoInde dans ce marcheacute) elle
aura certainement des limites agrave un moment donneacute Enfin la politique de change
la composition du commerce de marchandises et la position breacutesilienne dans le
commerce mondial ne sont pas devenues substantiellement diffeacuterentes de la situa-
tion preacuteceacutedente15 mecircme si les poleacutemiques concernant la nature de leur eacutevolution
se poursuivent
Les relations avec les organisations eacuteconomiques internationales le deacutefi des neacutegociations du Doha Round
Comme agrave drsquoautres niveaux clarifier la politique du gouvernement breacutesilien de
Lula dans ce domaine nrsquoest pas facile Lrsquoeacutevolution des organisations eacuteconomiques
internationales reacutepond agrave un certain nombre de facteurs que les gouvernements
nationaux ont du mal agrave influencer sans parler du rythme souvent tregraves lent de
la complexiteacute des neacutegociations et des marchandages pas forceacutement tregraves transpa-
rents Neacuteanmoins on peut tenter de preacuteciser les contours speacutecifiques de lrsquoaction
du gouvernement Lula dans ce domaine fondamental de la politique commerciale
Citons tout drsquoabord les deacuteclarations du ministre des Affaires eacutetrangegraveres Celso
Amorim au milieu du mandat preacutesidentiel
laquo Les accords sur les trois fronts de neacutegociation commerciale dans lesquels le Breacutesil
est simultaneacutement engageacute ndash le Doha Round de lrsquoOrganisation mondiale du commerce
la Zone de libre-eacutechange des Ameacuteriques16 (Alca) et le Mercosul-Union Europeacuteenne ndash
doivent ecirctre conclus dans un deacutelai drsquoun an et demi raquo17
Notons qursquoelles donnent la prioriteacute aux neacutegociations au sein de lrsquoOMC (Mouratildeo
2005) Compte tenu de leur position clef dans lrsquoensemble de la politique com-
merciale du gouvernement Lula agrave lrsquoeacutechelle internationale il faut drsquoabord examiner
les relations avec lrsquoOMC crsquoest-agrave-dire au niveau multilateacuteral ayant comme centre
le Doha Round pour ensuite passer en revue les questions relatives agrave lrsquointeacutegration
15 Plus geacuteneacuteralement C arneiro (2006 9) considegravere que laquo la peacuteriode 2003-2005 en ce qui
concerne le gouvernement Lula ne se diffeacuterencie pas exception faite drsquoeacuteventuelles diffeacuterences
de gestion de celle correspondant aux anneacutees 1999-2002 car ces politiques ont eu comme
fondement un reacutegime combinant lrsquoinflation le change flottant et la contraction fiscale raquo 16 Zone de libre-eacutechange (ZLEA) plus connu sous le sigle Alca Aacuterea de Livre Comeacutercio das
Ameacutericas 17 O Estado de Satildeo Paulo 3 deacutecembre 2004 B12
LUSO 142_1037_86-108indd 96LUSO 142_1037_86-108indd 96 111607 12743 PM111607 12743 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 97
eacuteconomique (Mercosul Alca et relations avec lrsquoUnion europeacuteenne) et autres ques-
tions geacuteostrateacutegiques comme les relations Sud-Sud
Le cycle de neacutegociations du Doha Round est tregraves important dans la mesure ougrave
la promotion du deacuteveloppement en particulier la pleine participation des eacutecono-
mies en deacuteveloppement dans le systegraveme commercial international constitue un
objectif central depuis son lancement en novembre 2001 Degraves le deacutebut des neacutego-
ciations malgreacute toute la rheacutetorique sur le deacuteveloppement il eacutetait eacutevident que
comme les barriegraveres tarifaires srsquoeacutetaient substantiellement reacuteduites au cours des
deacutecennies suivant lrsquoapregraves-guerre de mecircme que les principales barriegraveres quanti tatives
eacutetaient en phase de deacutemantegravelement (du moins partiel) depuis la fin de lrsquoUruguay
Round en 1993 on srsquoapprochait doreacutenavant drsquoenjeux plus controverseacutes ougrave il exis-
tait traditionnellement plus de reacutesistance agrave suivre les regravegles du GATTOMC En
lrsquooccurrence les diffeacuterentes regravegles de protection de la proprieacuteteacute intellectuelle (dans
leur relation avec le commerce) lrsquoouverture des marcheacutes agricoles notamment en
raison de lrsquoentreacutee dans le systegraveme reacutesultant du Round preacuteceacutedent avaient eacuteteacute plus
formelles qursquoeffectives Or preacuteciseacutement lrsquoinclusion des produits agricoles dans ces
regravegles en particulier la reacuteduction des subventions publiques qui introduisent de
graves distorsions dans le commerce mondial de ces biens eacutetait un enjeu qui
inteacuteressait prioritairement de nombreux pays en deacuteveloppement et a fortiori le
Breacutesil en raison des difficulteacutes qursquoils rencontrent agrave tirer profit de leurs avantages
comparatifs Dans une deacuteclaration qui illustre bien la position breacutesilienne sur les
produits agricoles le ministre Celso Amorim estima que
laquo Il est choquant que plus drsquoune cinquantaine drsquoanneacutees apregraves lrsquoeacutetablissement de regravegles
multilateacuterales destineacutees agrave libeacuterer et agrave discipliner le commerce international sous lrsquoeacutegide
du GATT une cateacutegorie de produits drsquoune si grande importance pour les pays en
deacuteveloppement soit resteacutee proteacutegeacutee par des exceptions des subsides et des barriegraveres
de tous ordres raquo18
Crsquoest dans ce cadre en particulier agrave Cancuacuten en septembre 2003 que deux grou-
pes principaux19 se sont formeacutes autour de la question devenue centrale de lrsquoouver-
ture des marcheacutes agricoles (bien entendu cet enjeu eacutetait lieacute agrave drsquoautres lors des
neacutegociations) Drsquoun cocircteacute les Eacutetats-Unis et lrsquoUnion europeacuteenne srsquoopposegraverent agrave
quelques diffeacuterences pregraves et nrsquooffrirent que des concessions marginales en la matiegravere
et de lrsquoautre le G-20 au sein duquel le Breacutesil a joueacute un rocircle deacuteterminant20 qui
souhaita de veacuteritables concessions y compris une reacuteduction sensible des subventions
publiques
18 Valor 9 septembre 2003 AB 19 On ne mentionne que ces deux groupes importants pour notre sujet cependant drsquoautres
se sont formeacutes agrave la confeacuterence de Cancuacuten qui sont resteacutes actifs par la suite pour plus de deacutetails
voir N arlikar 2005 112-113 20 Il est vrai que drsquoautres grandes eacuteconomies eacutemergentes appartiennent aussi au G-20 comme
lrsquoInde la Chine lrsquoAfrique du Sud la Thaiumllande et lrsquoArgentine mais compte tenu de sa position
plus laquo combative raquo et du plus grand inteacuterecirct qursquoil porte sur le sujet le Breacutesil a dans lrsquoensemble
joueacute un des rocircles les plus importants dans les neacutegociations internationales concernant les produits
agricoles
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98 joaquim ramos silva
Apregraves cinq ans de neacutegociations et le deacutepassement de la date limite initialement
poseacutee pour sa conclusion en janvier 2005 le Doha Round a eacuteteacute suspendu sine die
en juillet 2006 sans reacutesultats concrets (le souhait du ministre breacutesilien concernant
les deacutelais nrsquoa donc pas eacuteteacute reacutealiseacute) Face agrave cette situation certains parlent de ce
cycle en termes drsquoeacutechec (par exemple Laborde amp Fontagneacute 2007) Mais si lrsquoon
observe les enjeux et les forces asymeacutetriques en preacutesence lrsquoanalyse doit ecirctre plus
nuanceacutee Il est hors de question de consideacuterer ce Round comme un succegraves et il
serait plus approprieacute drsquoestimer que ce que lrsquoon a perdu crsquoest peut-ecirctre une bataille
et non la guerre (Bhagwati 2004) qui selon toute vraisemblance se prolongera
Dans cette affaire le principal problegraveme reacuteside dans le type de reacuteponse agrave donner
face agrave lrsquoalternative suivante soit obtenir un accord dans un deacutelai relativement
court mais qui ne porte que sur des points secondaires soit obtenir un accord
plus difficilement mais qui porte sur les questions fondamentales comme lrsquoouver-
ture effective des marcheacutes agricoles ce qui serait novateur et repreacutesenterait pro-
bablement des gains consideacuterables pour le commerce mondial Il nrsquoest donc pas
possible de dire que le gouvernement breacutesilien a remporteacute un succegraves dans ce
domaine bien qursquoil ait deacutefini et maintenu une strateacutegie claire (agrave propos de laquelle
par ailleurs il ne semble pas y avoir de divergences significatives entre les prin-
cipales forces politiques breacutesiliennes) pourtant pour que sa voix soit plus creacutedible
dans les neacutegociations il faudrait qursquoil soit conseacutequent dans lrsquoagriculture comme
ailleurs21
Plus geacuteneacuteralement en ce qui concerne les reacutesultats tangibles du Doha Round 22
notamment dans les dossiers laquo sensibles raquo comme lrsquoagriculture il faudrait des condi-
tions internationales plus favorables comme en 199323 lorsque celles-ci ont permis
de sortir des impasses de lrsquoUruguay Round et du North American Free Trade Agreement
(Nafta) ce qui semble aujourdrsquohui assez improbable Par ailleurs plus de cinq ans
21 Drsquoapregraves B hagwati (2004 59) le tarif agricole moyen serait de 12 aux Eacutetats-Unis de
37 au Breacutesil et de 112 en Inde Agrave juste titre cet auteur souligne dans nombre de ses
eacutecrits que les pays en deacuteveloppement demandent aux pays deacuteveloppeacutes la reacuteduction de leurs
tarifs sans ecirctre disposeacutes agrave en faire autant Bien que cela soit vrai en termes absolus Bhagwati
neacuteglige le fait que les premiers depuis les anneacutees 1980 ont souvent reacuteduit plus vite que les
seconds leurs niveaux de protection Par exemple entre le milieu des anneacutees 1980 et lrsquoan 2000
le tarif moyen (tous secteurs) est passeacute de 66 agrave 42 en Europe de 7 agrave 4 aux Eacutetats-
Unis de 44 agrave 17 au Breacutesil et de 80 agrave 32 en Inde la libeacuteralisation unilateacuterale des
pays en deacuteveloppement a eacuteteacute importante depuis le milieu des anneacutees 1980 voir B aldwin 2006
1456 1458-1459 Drsquoautre part les pays en deacuteveloppement ont comparativement moins de pos-
sibiliteacutes de financer drsquoune faccedilon durable drsquoimportants subsides agrave la production et agrave lrsquoexportation
lesquels enfreignent gravement le libre cours des flux du commerce international 22 Deacutebut 2007 plusieurs personnaliteacutes politiques internationales dont le Preacutesident breacutesilien
notamment agrave Davos fin janvier se sont prononceacutees pour la reprise des neacutegociations du Doha
Round cependant rien nrsquoeacutetait encore trancheacute agrave ce sujet au moment de conclure la reacutedaction
de cet article 23 Au deacutebut des anneacutees 1990 peu de temps apregraves la chute du mur de Berlin et drsquoautres
changements majeurs agrave lrsquoeacutechelle mondiale survenus pendant cette peacuteriode lrsquoarriveacutee agrave la Maison
Blanche de lrsquoAdministration Clinton en 1993 alors relativement plus activiste de ce point de
vue a permis le deacuteblocage drsquoun certain nombre drsquoimpasses dans les neacutegociations commerciales
internationales
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 99
ont eacuteteacute neacutecessaires pour que le Tokyo Round (1973-1979) soit conclu plus de sept
ans pour lrsquoUruguay Round (1986-1993) il faudrait donc beaucoup de chance pour
que le Doha Round soit conclu dans un temps plus court compte tenu de son
agenda ndash reconnu par tous comme tregraves difficile ndash des coucircts qursquoil implique agrave court
terme pour des groupes politiquement puissants dans les pays deacuteveloppeacutes sans
compter que lrsquoOMC compte doreacutenavant un nombre bien plus eacuteleveacute de membres
Enfin srsquoagissant de la strateacutegie breacutesilienne dans ce domaine elle ne pourra ecirctre
pleinement eacutevalueacutee que dans les anneacutees agrave venir au vu de ses reacutesultats
Les choix de politique eacutetrangegravere prioriteacutes et indeacutecisions
En ce qui concerne les orientations geacuteostrateacutegiques des relations eacuteconomiques
exteacuterieures plusieurs voies sont possibles qui drsquoailleurs ne srsquoopposent pas neacuteces-
sairement Au-delagrave du multilateacuteralisme (en principe une perspective plus globale
qui nrsquoimplique pas de discrimination commerciale) lrsquointeacutegration eacuteconomique est
orienteacutee vers les pays et les reacutegions proches mais pas exclusivement (reacutegionalisa-
tion) Actuellement la plupart des pays et le Breacutesil ne fait pas exception ont une
politique commerciale baseacutee sur un certain dosage de multilateacuteralisme et
drsquointeacutegration reacutegionale Drsquoautre part outre les deux dimensions preacuteceacutedentes il
peut y avoir des accords bilateacuteraux ou de simples prioriteacutes geacuteographiques sans
aucun engagement pour les autres pays et nrsquoentraicircnant que des mesures unilateacute-
rales pour stimuler les eacutechanges dans les directions deacutesireacutees
Qursquoen est-il des options geacuteostrateacutegiques de la politique commerciale breacutesilienne
Parmi les regroupements qui ont marqueacute cette peacuteriode il faut noter 1) le Mercosul
et le reste de lrsquoAmeacuterique latine 2) les relations Sud-Sud et lrsquoAfrique 3) lrsquoAlca le
Mercoeuro24 ou les deux ce qui pose la question drsquoaccords possibles agrave lrsquoeacutechelle
continentale ou extracontinentale (et entre pays deacuteveloppeacutes et en voie de deacutevelop-
pement) Ces champs drsquoaction sont vastes et varieacutes ce qui nrsquoest pas surprenant
car le commerce exteacuterieur breacutesilien se preacutesente de faccedilon assez diversifieacutee geacuteogra-
phiquement25 Neacuteanmoins pour eacutevaluer les diffeacuterentes voies de renforcement des
liens eacuteconomiques internationaux plus que pour faire le bilan du passeacute il faut
tenir compte de leur potentiel futur notamment agrave moyen terme
Comme nous lrsquoavons deacutejagrave remarqueacute la creacuteation du Mercosul au deacutebut des
anneacutees 1990 a eacuteteacute agrave lrsquoorigine drsquoun laquo grand bond en avant raquo pour la politique
commerciale breacutesilienne et pour lrsquoAmeacuterique latine tout entiegravere dans la mesure ougrave
ce groupement eacutetait plus ambitieux et concret que ceux qui lrsquoavaient preacuteceacutedeacute
(drsquoune certaine maniegravere lrsquoexpeacuterience des quatre pays fondateurs du laquo cocircne sud raquo
24 Terme utiliseacute pour deacutesigner le projet de creacuteation drsquoune zone de libre-eacutechange entre lrsquoUnion
europeacuteenne et le Mercosul (deacutecision du sommet de Madrid en 1995) et la possibiliteacute drsquoun ren-
forcement geacuteneacuteral des liens eacuteconomiques entre les deux blocs voir S ilva 2004 263 25 Distribution du commerce exteacuterieur breacutesilien en 1999-2002 pour les exportations Union
europeacuteenne 263 Eacutetats-Unis 244 Aladi (Association latino-ameacutericaine drsquointeacutegration y
compris le Mercosul) 205 Asie et Moyen-Orient 125 et autres 161 et pour les
importations Union europeacuteenne 274 Eacutetats-Unis 233 Aladi 189 Asie et Moyen-
Orient 154 et autres 15 G onccedilalves 2005 265 et 269
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se rapprochait des pratiques europeacuteennes drsquointeacutegration) Par ailleurs le Breacutesil eacutetant
de loin la plus grande eacuteconomie du bloc son rocircle y fut deacuteterminant agrave maints
eacutegards Du point de vue de ses options geacuteographiques le gouvernement Lula a
nettement accordeacute la prioriteacute au Mercosul et par extension naturelle agrave lrsquoAmeacuterique
latine (Meyer 2005 61) Jusqursquoagrave preacutesent des accords drsquoassociation ont eacuteteacute signeacutes
avec le Chili la Bolivie le Peacuterou la Colombie et lrsquoEacutequateur puis le Venezuela
est devenu un Eacutetat membre en 2006 Cependant malgreacute les premiegraveres anneacutees
favorables le moins que lrsquoon puisse dire est qursquoen raison de diffeacuterents facteurs
dont la grave crise de lrsquoArgentine qui a deacutebuteacute en 1999 et exploseacute en 2001-2002
le Mercosul stagne depuis et a cesseacute drsquoapprofondir son ancrage Chaque Eacutetat
membre srsquoest enfermeacute dans ses problegravemes particuliers et le Mercosul reste un
exemple drsquointeacutegration reacutegionale sans coordination eacuteconomique (Baer et al 2002)
Certes ses liens avec la Communauteacute andine se sont resserreacutes et des neacutegociations
ont eacuteteacute reacutealiseacutees avec drsquoautres pays (le Mexique par exemple) ou drsquoautres groupes
mais leur ampleur reste modeste et compte tenu de lrsquoexpeacuterience drsquointeacutegration de
la reacutegion les espoirs sont reacuteserveacutes Lrsquoimpasse de lrsquoAlca analyseacutee plus loin nrsquoest
pas eacutetrangegravere agrave cette eacutevolution Pour avoir une vue drsquoensemble sur cette option
dirigeacutee vers lrsquoAmeacuterique latine le principal fait agrave retenir est lrsquoentreacutee du Venezuela
dans le Mercosul
Les relations Sud-Sud (hors Ameacuterique latine) sont une autre dimension de la
politique commerciale breacutesilienne qui a pris de lrsquoimportance du moins du point
de vue diplomatique (Meyer 2005) bien que drsquoune faccedilon geacuteneacuterale elles nrsquoaient
pas pris la forme drsquoune inteacutegration reacutegionale Drsquoune part les relations du Breacutesil
avec la Chine lrsquoInde lrsquoAfrique du Sud et drsquoautres eacuteconomies eacutemergentes se sont
deacuteveloppeacutees agrave plusieurs niveaux (multilateacuteraux ou bilateacuteraux) notamment au sein
du G20 accompagnant lrsquointensification rapide des eacutechanges commerciaux Drsquoautre
part le cas de lrsquoAfrique dans son ensemble est particuliegraverement repreacutesentatif de
la tendance Sud-Sud et plusieurs initiatives ont eacuteteacute lanceacutees par le gouvernement
breacutesilien dans le but drsquoun renforcement des relations commerciales avec ce conti-
nent geacuteographiquement proche (Oliveira amp Mouratildeo 2005 Coelho amp Saraiva
2004)
Bien qursquoils repreacutesentent eacutegalement deux orientations importantes de la politique
commerciale breacutesilienne reconnues par le gouvernement Lula lrsquoAlca et le Mercoeuro
nrsquoont pas connu drsquoavanceacutees pratiques significatives pendant cette peacuteriode En outre
comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment ces orientations nrsquoont pas eacuteteacute prioritaires
dans la politique internationale du gouvernement Lula qui favorisait le Doha Round
Srsquoagissant de processus remontant deacutejagrave aux anneacutees 1990 dont lrsquoentreacutee en vigueur
fondamentalement sous la forme drsquoune zone de libre-eacutechange eacutetait initialement
preacutevue pour 2005 lrsquoimpression est qursquoils traicircnent en longueur sans qursquoon puisse
reacuteellement entrevoir la fin des neacutegociations qui nrsquoont pas eacuteteacute abandonneacutees pour
autant Indeacutependamment de la multipliciteacute drsquoacteurs qursquoil faudrait prendre
en compte la question serait de savoir quel degreacute de pression a eacuteteacute exerceacute ndash ou
non ndash par le gouvernement breacutesilien agrave ce sujet LrsquoAlca est apparue drsquoabord comme
une sorte drsquoillustration de ladite theacuteorie des reacutegions naturelles (dans ce cas les
Ameacuteriques de lrsquoAlaska agrave la Terre de Feu) Mais compte tenu de lrsquounilateacuteralisme
traditionnel des Eacutetats-Unis envers lrsquoAmeacuterique latine et de lrsquoeacuteventail limiteacute des
produits inclus dans ces neacutegociations les pays de la reacutegion sont resteacutes reacuteticents agrave
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cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
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20
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40
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80
1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 105
les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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106 joaquim ramos silva
Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 107
toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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dans ce domaine Lrsquoambition de jouer un rocircle plus important a conduit les gou-
vernements breacutesiliens agrave prendre en compte un eacuteventail relativement large de
questions commerciales internationales et agrave accepter un certain nombre de com-
promis et drsquoalliances (Narlikar 2003) Pourtant il faut bien reconnaicirctre que le
pouvoir du Breacutesil dans ce domaine reste limiteacute et que comme le remarque jus-
tement Narlikar dans le contexte de lrsquoOMC sa position a eacuteteacute le plus souvent
celle drsquoun laquo rule taker raquo plutocirct que celle drsquoun laquo agenda setter raquo3 Crsquoest ce qursquoil convient
de garder agrave lrsquoesprit pour comprendre la politique commerciale breacutesilienne des
anneacutees 2003-2006 avec ses effets au plan national et international
Les bonnes performances du secteur exteacuterieur
Signalons tout drsquoabord que le premier mandat preacutesidentiel de Lula a coiumlncideacute
avec une eacutevolution tregraves favorable de la plupart des principaux indicateurs relatifs
aux relations eacuteconomiques exteacuterieures (cf tableau I) tout au moins si on le com-
pare avec les anneacutees 1999-2002 ou mecircme avec drsquoautres peacuteriodes identiques des
trois derniegraveres deacutecennies Drsquoautre part si lrsquoon observe les reacutesultats eacuteconomiques
du gouvernement Lula dans son ensemble le secteur exteacuterieur semble ecirctre lrsquoun
des domaines ougrave il a le mieux reacuteussi4 Par exemple les preacutevisions neacutegatives sur
le risque agrave court terme drsquoune rupture dans le paiement de la dette exteacuterieure
souvent eacutevoqueacutees en deacutebut de mandat (The Economist 2003) en reacutefeacuterence notam-
ment agrave la situation argentine de 2001 semblent bien loin quatre ans apregraves (drsquoailleurs
le rapport devises eacutetrangegraveresdette exteacuterieure totale qui eacutetait de 179 en 2002
est passeacute agrave 519 en 2006) Que srsquoest-il donc passeacute
Tabl I ndash B reacutesil principaux indicateurs du secteur exteacuterieur 1999-2006
(en milliards US $)
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Exportations 480 551 582 604 731 965 1183 1375
Importations 492 558 556 472 483 628 736 914
Balance commerciale minus12 minus07 26 132 248 340 347 461
Inteacuterecircts minus149 minus146 minus149 minus131 minus130 minus134 minus144 minus148
Remises de beacuteneacutefices minus41 minus33 minus50 minus52 minus56 minus73 minus127 minus160
Compte-courant minus253 minus242 minus232 minus77 42 117 141 137
Investissement
portefeuille 35 86 51 44 59 82 95 78
Investissement direct 286 328 225 166 101 182 150 160
Amortissement 258 352 389 451 487 516 528
Dette exteacuterieure totale 226 217 210 211 216 201 169 160
Reacuteserves en devises 363 33 359 378 493 529 538 831
Compte-courant et reacuteserves en devises eacutetrangegraveres en donneacutees provisoires
Source Banco Central do Brasil
3 Ibid 8 4 Pour une eacutevaluation moins favorable insistant sur les vulneacuterabiliteacutes structurelles dont pacirctit
toujours le secteur exteacuterieur breacutesilien voir C arneiro 2006 9-17
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 91
Tout drsquoabord compte tenu de ses implications geacuteneacuterales sur le secteur exteacuterieur
il est neacutecessaire drsquoobserver lrsquoeacutevolution du taux de change du reacuteal La figure 1
montre le comportement de la monnaie breacutesilienne vis-agrave-vis du dollar ameacutericain
depuis 1994 (anneacutee de sa mise en circulation) en bref le reacuteal srsquoest substantielle-
ment appreacutecieacute entre deacutebut 2003 et fin 2006 On assiste en reacutealiteacute agrave un renverse-
ment total de tendance cette fois-ci vers son appreacuteciation En admettant mecircme
lrsquooccurrence drsquoune speacuteculation intense5 et drsquoun surajustement6 en 2002 qui a
contribueacute de maniegravere conjoncturelle agrave sa forte deacutepreacuteciation et par conseacutequent agrave
un retournement agrave court terme le progregraves du reacuteal est notable en ce qui concerne
lrsquoensemble des anneacutees prises en compte dans la figure 1 Lrsquoarriveacutee du gouverne-
ment Lula et mecircme son eacutelection en sont nettement le point drsquoinflexion puisque
lrsquoon note un pic de deacutepreacuteciation quelques mois avant la fin 2002 eacutetant donneacute
les risques qui menaccedilaient alors la balance des paiements un accord avec le Fonds
moneacutetaire international ndash FMI ndash avait eacuteteacute signeacute par les principales forces politiques
breacutesiliennes au mois drsquoaoucirct de cette mecircme anneacutee
Il est vrai que lrsquoon ne peut mettre uniquement au creacutedit des autoriteacutes breacutesi-
liennes lrsquoensemble de cette eacutevolution car comme dans drsquoautres exemples eacutevoqueacutes
plus loin il faut tenir compte de lrsquoinfluence des facteurs exteacuterieurs tels les mou-
vements moneacutetaires agrave lrsquoeacutechelle mondiale Ici il faut en particulier souligner le
changement de politique moneacutetaire exteacuterieure des Eacutetats-Unis laquelle a sans doute
peseacute eacutetant donneacute le statut de reacutefeacuterence et de reacuteserve du dollar ndash notamment sa
manipulation freacutequente pour des raisons inteacuterieures et sans tenir compte des inteacute-
recircts des autres pays (McKinnon 2001) or celui-ci a commenceacute un mouvement
agrave la baisse agrave partir de 20027 comme inversement il srsquoeacutetait appreacutecieacute grosso modo
entre 1996 et 2001 Ces variations du dollar ont eacuteteacute suivies mais plutocirct dans le
sens inverse par les autres monnaies (y compris lrsquoeuro pas seulement le reacuteal et
les devises moins importantes et non indexeacutees8) crsquoest-agrave-dire qursquoen 2003-2006 elles
se sont appreacutecieacutees dans un cadre geacuteneacuteral drsquoinstabiliteacute des changes mondiaux
Quoi qursquoil en soit lrsquoappreacuteciation du reacuteal a sans doute eacuteteacute une chance pour le
Breacutesil et elle a eu des effets positifs sur lrsquoensemble du secteur exteacuterieur comme
le montrent les tableaux I et II
Le fait qui a le plus directement contribueacute agrave cette performance du reacuteal a eacuteteacute
lrsquoeacutevolution de la balance commerciale (bien plus que celle de la balance financiegravere
qui inclut parmi drsquoautres rubriques lrsquoinvestissement direct eacutetranger comme on
peut le voir au tableau I) La figure 2 preacutesente lrsquoeacutevolution des exportations et des
importations de marchandises9 depuis 1999 Il est clair qursquoagrave partir de 2003 les
5 Sur la toile de fond financiegravere des eacutelections preacutesidentielles en Ameacuterique latine voir S antiso
2003 et pour le Breacutesil voir M artiacutenez amp S antiso 20032004 6 Deacutepreacuteciation laquo excessive raquo de la monnaie due agrave la viscositeacute des autres prix pheacutenomegravene
geacuteneacuteralement de courte dureacutee (valable aussi pour lrsquoappreacuteciation mutatis mutandis) 7 Agrave la suite de plusieurs troubles dont lrsquoeacuteclatement de la bulle speacuteculative des cours des
nouvelles technologies drsquoinformation et de communication (NTIC) en 2000 et les eacuteveacutenements de
2001 les autoriteacutes moneacutetaires nord-ameacutericaines ont modifieacute leur politique de change 8 Lrsquoindexation au dollar a eacuteteacute le cas parmi drsquoautres du yuan renminbi chinois bien qursquoil ait
aussi eacuteteacute leacutegegraverement reacuteeacutevalueacute en 2006 9 Le poids des services dans les eacutechanges exteacuterieurs breacutesiliens reste peu significatif et lrsquoinves-
tissement direct eacutetranger sera consideacutereacute plus loin
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92 joaquim ramos silva
deux flux ont beaucoup augmenteacute davantage celui des exportations multiplieacute par
228 entre 2002 et 2006 plus modeacutereacutement celui des importations dont la pro-
gression a eacuteteacute freineacutee par la faible croissance multiplieacute par 193 Ainsi le rapport
exportationsimportations pratiquement en eacutequilibre en 1999-2001 a ensuite
deacutegageacute un important surplus commercial
Cette eacutevolution de la balance commerciale a eu un impact tregraves positif sur
la dette exteacuterieure le Breacutesil srsquoest retrouveacute beaucoup moins endetteacute vis-agrave-vis de
lrsquoexteacuterieur (tableau II) Le gouvernement a profiteacute de cet exceacutedent commercial
pour amortir la dette exteacuterieure ce qui est un atout pour le deacuteveloppement futur
du pays rendu plus facile par lrsquoeacutelargissement de la marge de manœuvre de la
politique eacuteconomique (par exemple la possibiliteacute de recours agrave des emprunts exteacute-
0
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Gouvernement Lula
Source IPEA
Fig 1 Taux de change reacutealUSD 1994-2006
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Source IPEA
Fig 2 Breacutesil commerce de biens 1999-2006
Milliards US Dollars
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 93
rieurs dans des conditions plus favorables) En effet le rapport de la dette exteacuterieure
totale au Produit inteacuterieur brut (PIB) a chuteacute agrave 179 en juin 2006 (alors qursquoil
eacutetait de 459 en 2002) il faut revenir au deacutebut des anneacutees 1970 pour trouver
des chiffres semblables (177 en 1973) En outre il faut souligner le rythme
plus rapide de la reacuteduction de la dette publique son poids dans la dette exteacuterieure
totale eacutetant passeacute de 551 en 2002 agrave 455 en 2006 ( juin)
Tabl II ndash B reacutesil indicateurs de lrsquoendettement exteacuterieur 1999-2006
(en pourcentage)
Service de
la dette
exportations
Service de la
dettePIB
Paiement
drsquointeacuterecircts
exportations
Dette
publique
exteacuterieurePIB
Dette
exteacuterieure
PIB
Dette
exteacuterieure
exportations
1999 1458 130 356 162 420 4699
2000 946 86 310 149 360 3938
2001 869 99 303 182 412 3606
2002 833 109 253 240 459 3491
2003 741 110 210 236 424 2941
2004 537 86 148 190 333 2113
2005 558 83 122 97 213 1434
2006 612 88 119 81 179 1213
Dans ce tableau les rapports au PIB ont eacuteteacute calculeacutes en se fondant sur les donneacutees des
comptes nationaux breacutesiliens pour cette variable avant mars 2007 crsquoest-agrave-dire avant sa reacuteeacuteva-
luation par lrsquoIBGE eacutevoqueacutee plus loin
jusqursquoen juin
Source Banco Central do Brasil
Toutefois ici comme dans le cas de lrsquoappreacuteciation du reacuteal on ne peut exclure de
lrsquoanalyse drsquoautres tendances de lrsquoeacuteconomie mondiale qui ont influenceacute le commerce
de biens breacutesilien en particulier le boom des matiegraveres premiegraveres (agricoles et
mineacuterales) En effet certains produits de base (comme par exemple le cafeacute le
sucre le fer le tourteau de soja et la viande de bœuf cf tableau III) dont le
Breacutesil est un gros exportateur et qui correspondent agrave sa speacutecialisation tradition-
nelle ont geacuteneacuteralement vu leurs cours grimper rapidement pendant cette peacuteriode
Lrsquoeacutemergence drsquoune forte demande chinoise de commodities10 aupregraves du Breacutesil
(figure 3) comme ailleurs a contribueacute agrave cette eacutevolution les exportations breacutesiliennes
vers la Chine ont eacuteteacute multiplieacutees par 8 entre 2000 et 2006 ougrave elles ont atteint
84 milliards de dollars Drsquoun point de vue structurel la capaciteacute agrave bien srsquoajuster
10 On sait qursquoun accroissement relativement faible de la demande peut avoir un effet multi-
plicateur sur les prix (cela est ducirc au fait que leur offre est plutocirct rigide) Plus geacuteneacuteralement on
admet que des variations de lrsquooffre et de la demande (qursquoon suppose aussi fondamentalement
stable) agrave la hausse et agrave la baisse ont des effets amplifieacutes sur les prix des matiegraveres premiegraveres qui
sont par conseacutequent plus volatiles que ceux des produits manufactureacutes
LUSO 142_1037_86-108indd 93LUSO 142_1037_86-108indd 93 111607 12742 PM111607 12742 PM
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agrave cette demande mondiale en hausse met en relief un point fort de lrsquoeacuteconomie
breacutesilienne
Tabl III ndash Eacute volution du prix de quelques produits de base
Cafeacute
Tourteau
de soja
Sucre
raffineacute Minerai de fer Viande de bœuf
Cents $lp US$t US$t US$ centst US$arrobe
1999 1259 1467 1758 276 176
2000 665 1954 2452 288 183
2001 462 1438 2395 300 201
2002 602 1673 2082 293 252
2003 611 2310 1845 320 269
2004 1050 1648 2593 379 266
2005 1071 1963 3552 650 227
2006 1082 1745 4000 774 257
Jusqursquoen octobre
Source Banco Central do Brasil et Bolsa de Mercadorias amp Futuros (BM amp F)
En revanche si lrsquoon observe la tendance agrave lrsquoaugmentation du prix mondial des
matiegraveres premiegraveres en termes de monnaie locale les reacutesultats sont plus nuanceacutes
En effet sur la base 100 en 2002 les prix unitaires en monnaie breacutesilienne11 des
cinq commodities du tableau III eacutetaient en 2006 de 756 pour la viande de bœuf
(un des principaux produits de lrsquoexportation breacutesilienne) de 774 pour le tourteau
de soja 1333 pour le cafeacute 1425 pour le sucre raffineacute et de 196 pour le fer
Dans ces circonstances pour quelques produits de base dont la viande de bœuf
et le tourteau de soja de notre seacutelection la hausse de leurs prix en dollars ameacuteri-
cains compte tenu de la deacutepreacuteciation de cette monnaie ne srsquoest pas reacutepercuteacutee
sur les recettes locales Pour obtenir leur augmentation il aurait eacuteteacute neacutecessaire
drsquoaccroicirctre les quantiteacutes exporteacutees de maniegravere agrave compenser les pertes Agrave la fin du
premier mandat cette baisse des rendements aurait creacuteeacute une certaine insatisfaction
de la part des exportateurs concerneacutes notamment dans lrsquoagro-alimentaire breacutesilien
dans la mesure ougrave par exemple ils payent lrsquoessentiel de leurs inputs en monnaie
locale
Eacutetant donneacute la deacutepreacuteciation du dollar et les tendances globales que lrsquoon vient
de signaler la position du Breacutesil dans le commerce mondial de marchandises entre
2002 et 200512 srsquoest ameacutelioreacutee dans lrsquoensemble bien que drsquoune faccedilon deacuteseacutequilibreacutee
11 Les calculs suivants ont eacuteteacute faits en termes drsquoindice de base annuelle fixe en 2002 en
divisant les valeurs preacutesenteacutees dans le tableau III par celles de lrsquoinverse de la seacuterie utiliseacutee dans
la figure 1 (taux de change reacutealUS$) 12 Au moment ougrave nous eacutecrivons deacutebut 2007 lrsquoOMC nrsquoa pas encore deacutelivreacute ses estimations
sur le commerce mondial pour 2006
LUSO 142_1037_86-108indd 94LUSO 142_1037_86-108indd 94 111607 12743 PM111607 12743 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 95
plus preacuteciseacutement pour les exportations qui sont passeacutees de 096 agrave 116 et
pour les importations qui sont passeacutees de 075 agrave 072 Si lrsquoon observe
plus attentivement le commerce exteacuterieur breacutesilien on constate aussi que la part
des produits manufactureacutes a deacuteclineacute entre 2000 et 2006 passant de 5905 agrave
543 13 par conseacutequent celle des produits de base et semi-finis a augmenteacute
conduisant agrave ce que Reinaldo Gonccedilalves a appeleacute la laquo reprimarizaccedilatildeo raquo14 (2005 264)
Malgreacute les efforts qui ont eacuteteacute deacuteployeacutes par les gouvernements avant et apregraves 2003
le Breacutesil continue donc agrave eacuteprouver des difficulteacutes agrave aller au-delagrave de ses avantages
comparatifs traditionnels et agrave srsquoimplanter sur de nouveaux creacuteneaux exportateurs
agrave haute valeur ajouteacutee sauf pour quelques exceptions bien connues (dont la con-
struction aeacuteronautique civile lrsquoexploration offshore de peacutetrole et lrsquoindustrie automo-
bile) Dans drsquoautres cas comme celui des biocombustibles le Breacutesil a deacuteveloppeacute
une grande capaciteacute de production aux cours des derniegraveres deacutecennies mais leur
utilisation agrave une eacutechelle globale nrsquoest pas devenue jusqursquoagrave preacutesent une option
nette de la part des principaux consommateurs potentiels Nous reviendrons plus
loin sur ces questions
En reacutesumeacute les principaux indicateurs du secteur exteacuterieur au cours des quatre
premiegraveres anneacutees du gouvernement Lula ont connu une eacutevolution nettement
positive mecircme si les facteurs internationaux sur lesquels le gouvernement nrsquoa pas
13 Gazeta Mercantil 18 janvier 2007 Cette source reprenant une information de la Fundaccedilatildeo
Centro de Estudos do Comeacutercio Exterior (Funcex) ajoute laquo Entre 2000 et 2006 les prix des produits
de base ont augmenteacute de 43 tandis que les produits manufactureacutes nrsquoont augmenteacute que de
22 Aussi la croissance du quanta exporteacute a-t-elle eacuteteacute plus eacuteleveacutee pour les produits de base
(123 ) que pour les produits manufactureacutes (86 ) raquo 14 Tendance des produits primaires agrave regagner du poids dans les exportations breacutesiliennes
Remarquons le problegraveme que repreacutesente la demande chinoise de commodities allieacutee au fait que
ce pays exporte encore principalement des produits low-tech et que les pays deacuteveloppeacutes essaient
de se concentrer sur les produits agrave haute technologie et laissent peu drsquoespace aux pays agrave tech-
nologie moyenne comme le Breacutesil
Fig 3 Commerce Breacutesil-Chine 1999-2006
Millions US Dollars
0
2000
4000
6000
8000
10000
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Exportations ImportationsSource Secex
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drsquoinfluence ont joueacute un rocircle non neacutegligeable dans ces performances Il srsquoagit
surtout de lrsquoeacutevolution du marcheacute mondial des matiegraveres premiegraveres dont les prix
ont eacuteteacute agrave la hausse le Breacutesil en eacutetant lrsquoun des principaux fournisseurs Drsquoautre
part au niveau inteacuterieur comme la faible croissance nrsquoa pas tireacute les importations
vers le haut ces diffeacuterentes tendances ont permis en 2003-2006 lrsquoaccumulation
drsquoun surplus substantiel de la balance commerciale (mecircme lrsquoappreacuteciation du reacuteal
nrsquoa pu lrsquoempecirccher) Pourtant un renversement de tendance pourrait survenir et
reacuteveacuteler des fragiliteacutes dans le secteur exteacuterieur breacutesilien En particulier en admettant
mecircme que la phase actuelle de boom du cycle des matiegraveres premiegraveres soit relati-
vement longue (agrave cause de lrsquoentreacutee de la Chine et de lrsquoInde dans ce marcheacute) elle
aura certainement des limites agrave un moment donneacute Enfin la politique de change
la composition du commerce de marchandises et la position breacutesilienne dans le
commerce mondial ne sont pas devenues substantiellement diffeacuterentes de la situa-
tion preacuteceacutedente15 mecircme si les poleacutemiques concernant la nature de leur eacutevolution
se poursuivent
Les relations avec les organisations eacuteconomiques internationales le deacutefi des neacutegociations du Doha Round
Comme agrave drsquoautres niveaux clarifier la politique du gouvernement breacutesilien de
Lula dans ce domaine nrsquoest pas facile Lrsquoeacutevolution des organisations eacuteconomiques
internationales reacutepond agrave un certain nombre de facteurs que les gouvernements
nationaux ont du mal agrave influencer sans parler du rythme souvent tregraves lent de
la complexiteacute des neacutegociations et des marchandages pas forceacutement tregraves transpa-
rents Neacuteanmoins on peut tenter de preacuteciser les contours speacutecifiques de lrsquoaction
du gouvernement Lula dans ce domaine fondamental de la politique commerciale
Citons tout drsquoabord les deacuteclarations du ministre des Affaires eacutetrangegraveres Celso
Amorim au milieu du mandat preacutesidentiel
laquo Les accords sur les trois fronts de neacutegociation commerciale dans lesquels le Breacutesil
est simultaneacutement engageacute ndash le Doha Round de lrsquoOrganisation mondiale du commerce
la Zone de libre-eacutechange des Ameacuteriques16 (Alca) et le Mercosul-Union Europeacuteenne ndash
doivent ecirctre conclus dans un deacutelai drsquoun an et demi raquo17
Notons qursquoelles donnent la prioriteacute aux neacutegociations au sein de lrsquoOMC (Mouratildeo
2005) Compte tenu de leur position clef dans lrsquoensemble de la politique com-
merciale du gouvernement Lula agrave lrsquoeacutechelle internationale il faut drsquoabord examiner
les relations avec lrsquoOMC crsquoest-agrave-dire au niveau multilateacuteral ayant comme centre
le Doha Round pour ensuite passer en revue les questions relatives agrave lrsquointeacutegration
15 Plus geacuteneacuteralement C arneiro (2006 9) considegravere que laquo la peacuteriode 2003-2005 en ce qui
concerne le gouvernement Lula ne se diffeacuterencie pas exception faite drsquoeacuteventuelles diffeacuterences
de gestion de celle correspondant aux anneacutees 1999-2002 car ces politiques ont eu comme
fondement un reacutegime combinant lrsquoinflation le change flottant et la contraction fiscale raquo 16 Zone de libre-eacutechange (ZLEA) plus connu sous le sigle Alca Aacuterea de Livre Comeacutercio das
Ameacutericas 17 O Estado de Satildeo Paulo 3 deacutecembre 2004 B12
LUSO 142_1037_86-108indd 96LUSO 142_1037_86-108indd 96 111607 12743 PM111607 12743 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 97
eacuteconomique (Mercosul Alca et relations avec lrsquoUnion europeacuteenne) et autres ques-
tions geacuteostrateacutegiques comme les relations Sud-Sud
Le cycle de neacutegociations du Doha Round est tregraves important dans la mesure ougrave
la promotion du deacuteveloppement en particulier la pleine participation des eacutecono-
mies en deacuteveloppement dans le systegraveme commercial international constitue un
objectif central depuis son lancement en novembre 2001 Degraves le deacutebut des neacutego-
ciations malgreacute toute la rheacutetorique sur le deacuteveloppement il eacutetait eacutevident que
comme les barriegraveres tarifaires srsquoeacutetaient substantiellement reacuteduites au cours des
deacutecennies suivant lrsquoapregraves-guerre de mecircme que les principales barriegraveres quanti tatives
eacutetaient en phase de deacutemantegravelement (du moins partiel) depuis la fin de lrsquoUruguay
Round en 1993 on srsquoapprochait doreacutenavant drsquoenjeux plus controverseacutes ougrave il exis-
tait traditionnellement plus de reacutesistance agrave suivre les regravegles du GATTOMC En
lrsquooccurrence les diffeacuterentes regravegles de protection de la proprieacuteteacute intellectuelle (dans
leur relation avec le commerce) lrsquoouverture des marcheacutes agricoles notamment en
raison de lrsquoentreacutee dans le systegraveme reacutesultant du Round preacuteceacutedent avaient eacuteteacute plus
formelles qursquoeffectives Or preacuteciseacutement lrsquoinclusion des produits agricoles dans ces
regravegles en particulier la reacuteduction des subventions publiques qui introduisent de
graves distorsions dans le commerce mondial de ces biens eacutetait un enjeu qui
inteacuteressait prioritairement de nombreux pays en deacuteveloppement et a fortiori le
Breacutesil en raison des difficulteacutes qursquoils rencontrent agrave tirer profit de leurs avantages
comparatifs Dans une deacuteclaration qui illustre bien la position breacutesilienne sur les
produits agricoles le ministre Celso Amorim estima que
laquo Il est choquant que plus drsquoune cinquantaine drsquoanneacutees apregraves lrsquoeacutetablissement de regravegles
multilateacuterales destineacutees agrave libeacuterer et agrave discipliner le commerce international sous lrsquoeacutegide
du GATT une cateacutegorie de produits drsquoune si grande importance pour les pays en
deacuteveloppement soit resteacutee proteacutegeacutee par des exceptions des subsides et des barriegraveres
de tous ordres raquo18
Crsquoest dans ce cadre en particulier agrave Cancuacuten en septembre 2003 que deux grou-
pes principaux19 se sont formeacutes autour de la question devenue centrale de lrsquoouver-
ture des marcheacutes agricoles (bien entendu cet enjeu eacutetait lieacute agrave drsquoautres lors des
neacutegociations) Drsquoun cocircteacute les Eacutetats-Unis et lrsquoUnion europeacuteenne srsquoopposegraverent agrave
quelques diffeacuterences pregraves et nrsquooffrirent que des concessions marginales en la matiegravere
et de lrsquoautre le G-20 au sein duquel le Breacutesil a joueacute un rocircle deacuteterminant20 qui
souhaita de veacuteritables concessions y compris une reacuteduction sensible des subventions
publiques
18 Valor 9 septembre 2003 AB 19 On ne mentionne que ces deux groupes importants pour notre sujet cependant drsquoautres
se sont formeacutes agrave la confeacuterence de Cancuacuten qui sont resteacutes actifs par la suite pour plus de deacutetails
voir N arlikar 2005 112-113 20 Il est vrai que drsquoautres grandes eacuteconomies eacutemergentes appartiennent aussi au G-20 comme
lrsquoInde la Chine lrsquoAfrique du Sud la Thaiumllande et lrsquoArgentine mais compte tenu de sa position
plus laquo combative raquo et du plus grand inteacuterecirct qursquoil porte sur le sujet le Breacutesil a dans lrsquoensemble
joueacute un des rocircles les plus importants dans les neacutegociations internationales concernant les produits
agricoles
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Apregraves cinq ans de neacutegociations et le deacutepassement de la date limite initialement
poseacutee pour sa conclusion en janvier 2005 le Doha Round a eacuteteacute suspendu sine die
en juillet 2006 sans reacutesultats concrets (le souhait du ministre breacutesilien concernant
les deacutelais nrsquoa donc pas eacuteteacute reacutealiseacute) Face agrave cette situation certains parlent de ce
cycle en termes drsquoeacutechec (par exemple Laborde amp Fontagneacute 2007) Mais si lrsquoon
observe les enjeux et les forces asymeacutetriques en preacutesence lrsquoanalyse doit ecirctre plus
nuanceacutee Il est hors de question de consideacuterer ce Round comme un succegraves et il
serait plus approprieacute drsquoestimer que ce que lrsquoon a perdu crsquoest peut-ecirctre une bataille
et non la guerre (Bhagwati 2004) qui selon toute vraisemblance se prolongera
Dans cette affaire le principal problegraveme reacuteside dans le type de reacuteponse agrave donner
face agrave lrsquoalternative suivante soit obtenir un accord dans un deacutelai relativement
court mais qui ne porte que sur des points secondaires soit obtenir un accord
plus difficilement mais qui porte sur les questions fondamentales comme lrsquoouver-
ture effective des marcheacutes agricoles ce qui serait novateur et repreacutesenterait pro-
bablement des gains consideacuterables pour le commerce mondial Il nrsquoest donc pas
possible de dire que le gouvernement breacutesilien a remporteacute un succegraves dans ce
domaine bien qursquoil ait deacutefini et maintenu une strateacutegie claire (agrave propos de laquelle
par ailleurs il ne semble pas y avoir de divergences significatives entre les prin-
cipales forces politiques breacutesiliennes) pourtant pour que sa voix soit plus creacutedible
dans les neacutegociations il faudrait qursquoil soit conseacutequent dans lrsquoagriculture comme
ailleurs21
Plus geacuteneacuteralement en ce qui concerne les reacutesultats tangibles du Doha Round 22
notamment dans les dossiers laquo sensibles raquo comme lrsquoagriculture il faudrait des condi-
tions internationales plus favorables comme en 199323 lorsque celles-ci ont permis
de sortir des impasses de lrsquoUruguay Round et du North American Free Trade Agreement
(Nafta) ce qui semble aujourdrsquohui assez improbable Par ailleurs plus de cinq ans
21 Drsquoapregraves B hagwati (2004 59) le tarif agricole moyen serait de 12 aux Eacutetats-Unis de
37 au Breacutesil et de 112 en Inde Agrave juste titre cet auteur souligne dans nombre de ses
eacutecrits que les pays en deacuteveloppement demandent aux pays deacuteveloppeacutes la reacuteduction de leurs
tarifs sans ecirctre disposeacutes agrave en faire autant Bien que cela soit vrai en termes absolus Bhagwati
neacuteglige le fait que les premiers depuis les anneacutees 1980 ont souvent reacuteduit plus vite que les
seconds leurs niveaux de protection Par exemple entre le milieu des anneacutees 1980 et lrsquoan 2000
le tarif moyen (tous secteurs) est passeacute de 66 agrave 42 en Europe de 7 agrave 4 aux Eacutetats-
Unis de 44 agrave 17 au Breacutesil et de 80 agrave 32 en Inde la libeacuteralisation unilateacuterale des
pays en deacuteveloppement a eacuteteacute importante depuis le milieu des anneacutees 1980 voir B aldwin 2006
1456 1458-1459 Drsquoautre part les pays en deacuteveloppement ont comparativement moins de pos-
sibiliteacutes de financer drsquoune faccedilon durable drsquoimportants subsides agrave la production et agrave lrsquoexportation
lesquels enfreignent gravement le libre cours des flux du commerce international 22 Deacutebut 2007 plusieurs personnaliteacutes politiques internationales dont le Preacutesident breacutesilien
notamment agrave Davos fin janvier se sont prononceacutees pour la reprise des neacutegociations du Doha
Round cependant rien nrsquoeacutetait encore trancheacute agrave ce sujet au moment de conclure la reacutedaction
de cet article 23 Au deacutebut des anneacutees 1990 peu de temps apregraves la chute du mur de Berlin et drsquoautres
changements majeurs agrave lrsquoeacutechelle mondiale survenus pendant cette peacuteriode lrsquoarriveacutee agrave la Maison
Blanche de lrsquoAdministration Clinton en 1993 alors relativement plus activiste de ce point de
vue a permis le deacuteblocage drsquoun certain nombre drsquoimpasses dans les neacutegociations commerciales
internationales
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 99
ont eacuteteacute neacutecessaires pour que le Tokyo Round (1973-1979) soit conclu plus de sept
ans pour lrsquoUruguay Round (1986-1993) il faudrait donc beaucoup de chance pour
que le Doha Round soit conclu dans un temps plus court compte tenu de son
agenda ndash reconnu par tous comme tregraves difficile ndash des coucircts qursquoil implique agrave court
terme pour des groupes politiquement puissants dans les pays deacuteveloppeacutes sans
compter que lrsquoOMC compte doreacutenavant un nombre bien plus eacuteleveacute de membres
Enfin srsquoagissant de la strateacutegie breacutesilienne dans ce domaine elle ne pourra ecirctre
pleinement eacutevalueacutee que dans les anneacutees agrave venir au vu de ses reacutesultats
Les choix de politique eacutetrangegravere prioriteacutes et indeacutecisions
En ce qui concerne les orientations geacuteostrateacutegiques des relations eacuteconomiques
exteacuterieures plusieurs voies sont possibles qui drsquoailleurs ne srsquoopposent pas neacuteces-
sairement Au-delagrave du multilateacuteralisme (en principe une perspective plus globale
qui nrsquoimplique pas de discrimination commerciale) lrsquointeacutegration eacuteconomique est
orienteacutee vers les pays et les reacutegions proches mais pas exclusivement (reacutegionalisa-
tion) Actuellement la plupart des pays et le Breacutesil ne fait pas exception ont une
politique commerciale baseacutee sur un certain dosage de multilateacuteralisme et
drsquointeacutegration reacutegionale Drsquoautre part outre les deux dimensions preacuteceacutedentes il
peut y avoir des accords bilateacuteraux ou de simples prioriteacutes geacuteographiques sans
aucun engagement pour les autres pays et nrsquoentraicircnant que des mesures unilateacute-
rales pour stimuler les eacutechanges dans les directions deacutesireacutees
Qursquoen est-il des options geacuteostrateacutegiques de la politique commerciale breacutesilienne
Parmi les regroupements qui ont marqueacute cette peacuteriode il faut noter 1) le Mercosul
et le reste de lrsquoAmeacuterique latine 2) les relations Sud-Sud et lrsquoAfrique 3) lrsquoAlca le
Mercoeuro24 ou les deux ce qui pose la question drsquoaccords possibles agrave lrsquoeacutechelle
continentale ou extracontinentale (et entre pays deacuteveloppeacutes et en voie de deacutevelop-
pement) Ces champs drsquoaction sont vastes et varieacutes ce qui nrsquoest pas surprenant
car le commerce exteacuterieur breacutesilien se preacutesente de faccedilon assez diversifieacutee geacuteogra-
phiquement25 Neacuteanmoins pour eacutevaluer les diffeacuterentes voies de renforcement des
liens eacuteconomiques internationaux plus que pour faire le bilan du passeacute il faut
tenir compte de leur potentiel futur notamment agrave moyen terme
Comme nous lrsquoavons deacutejagrave remarqueacute la creacuteation du Mercosul au deacutebut des
anneacutees 1990 a eacuteteacute agrave lrsquoorigine drsquoun laquo grand bond en avant raquo pour la politique
commerciale breacutesilienne et pour lrsquoAmeacuterique latine tout entiegravere dans la mesure ougrave
ce groupement eacutetait plus ambitieux et concret que ceux qui lrsquoavaient preacuteceacutedeacute
(drsquoune certaine maniegravere lrsquoexpeacuterience des quatre pays fondateurs du laquo cocircne sud raquo
24 Terme utiliseacute pour deacutesigner le projet de creacuteation drsquoune zone de libre-eacutechange entre lrsquoUnion
europeacuteenne et le Mercosul (deacutecision du sommet de Madrid en 1995) et la possibiliteacute drsquoun ren-
forcement geacuteneacuteral des liens eacuteconomiques entre les deux blocs voir S ilva 2004 263 25 Distribution du commerce exteacuterieur breacutesilien en 1999-2002 pour les exportations Union
europeacuteenne 263 Eacutetats-Unis 244 Aladi (Association latino-ameacutericaine drsquointeacutegration y
compris le Mercosul) 205 Asie et Moyen-Orient 125 et autres 161 et pour les
importations Union europeacuteenne 274 Eacutetats-Unis 233 Aladi 189 Asie et Moyen-
Orient 154 et autres 15 G onccedilalves 2005 265 et 269
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100 joaquim ramos silva
se rapprochait des pratiques europeacuteennes drsquointeacutegration) Par ailleurs le Breacutesil eacutetant
de loin la plus grande eacuteconomie du bloc son rocircle y fut deacuteterminant agrave maints
eacutegards Du point de vue de ses options geacuteographiques le gouvernement Lula a
nettement accordeacute la prioriteacute au Mercosul et par extension naturelle agrave lrsquoAmeacuterique
latine (Meyer 2005 61) Jusqursquoagrave preacutesent des accords drsquoassociation ont eacuteteacute signeacutes
avec le Chili la Bolivie le Peacuterou la Colombie et lrsquoEacutequateur puis le Venezuela
est devenu un Eacutetat membre en 2006 Cependant malgreacute les premiegraveres anneacutees
favorables le moins que lrsquoon puisse dire est qursquoen raison de diffeacuterents facteurs
dont la grave crise de lrsquoArgentine qui a deacutebuteacute en 1999 et exploseacute en 2001-2002
le Mercosul stagne depuis et a cesseacute drsquoapprofondir son ancrage Chaque Eacutetat
membre srsquoest enfermeacute dans ses problegravemes particuliers et le Mercosul reste un
exemple drsquointeacutegration reacutegionale sans coordination eacuteconomique (Baer et al 2002)
Certes ses liens avec la Communauteacute andine se sont resserreacutes et des neacutegociations
ont eacuteteacute reacutealiseacutees avec drsquoautres pays (le Mexique par exemple) ou drsquoautres groupes
mais leur ampleur reste modeste et compte tenu de lrsquoexpeacuterience drsquointeacutegration de
la reacutegion les espoirs sont reacuteserveacutes Lrsquoimpasse de lrsquoAlca analyseacutee plus loin nrsquoest
pas eacutetrangegravere agrave cette eacutevolution Pour avoir une vue drsquoensemble sur cette option
dirigeacutee vers lrsquoAmeacuterique latine le principal fait agrave retenir est lrsquoentreacutee du Venezuela
dans le Mercosul
Les relations Sud-Sud (hors Ameacuterique latine) sont une autre dimension de la
politique commerciale breacutesilienne qui a pris de lrsquoimportance du moins du point
de vue diplomatique (Meyer 2005) bien que drsquoune faccedilon geacuteneacuterale elles nrsquoaient
pas pris la forme drsquoune inteacutegration reacutegionale Drsquoune part les relations du Breacutesil
avec la Chine lrsquoInde lrsquoAfrique du Sud et drsquoautres eacuteconomies eacutemergentes se sont
deacuteveloppeacutees agrave plusieurs niveaux (multilateacuteraux ou bilateacuteraux) notamment au sein
du G20 accompagnant lrsquointensification rapide des eacutechanges commerciaux Drsquoautre
part le cas de lrsquoAfrique dans son ensemble est particuliegraverement repreacutesentatif de
la tendance Sud-Sud et plusieurs initiatives ont eacuteteacute lanceacutees par le gouvernement
breacutesilien dans le but drsquoun renforcement des relations commerciales avec ce conti-
nent geacuteographiquement proche (Oliveira amp Mouratildeo 2005 Coelho amp Saraiva
2004)
Bien qursquoils repreacutesentent eacutegalement deux orientations importantes de la politique
commerciale breacutesilienne reconnues par le gouvernement Lula lrsquoAlca et le Mercoeuro
nrsquoont pas connu drsquoavanceacutees pratiques significatives pendant cette peacuteriode En outre
comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment ces orientations nrsquoont pas eacuteteacute prioritaires
dans la politique internationale du gouvernement Lula qui favorisait le Doha Round
Srsquoagissant de processus remontant deacutejagrave aux anneacutees 1990 dont lrsquoentreacutee en vigueur
fondamentalement sous la forme drsquoune zone de libre-eacutechange eacutetait initialement
preacutevue pour 2005 lrsquoimpression est qursquoils traicircnent en longueur sans qursquoon puisse
reacuteellement entrevoir la fin des neacutegociations qui nrsquoont pas eacuteteacute abandonneacutees pour
autant Indeacutependamment de la multipliciteacute drsquoacteurs qursquoil faudrait prendre
en compte la question serait de savoir quel degreacute de pression a eacuteteacute exerceacute ndash ou
non ndash par le gouvernement breacutesilien agrave ce sujet LrsquoAlca est apparue drsquoabord comme
une sorte drsquoillustration de ladite theacuteorie des reacutegions naturelles (dans ce cas les
Ameacuteriques de lrsquoAlaska agrave la Terre de Feu) Mais compte tenu de lrsquounilateacuteralisme
traditionnel des Eacutetats-Unis envers lrsquoAmeacuterique latine et de lrsquoeacuteventail limiteacute des
produits inclus dans ces neacutegociations les pays de la reacutegion sont resteacutes reacuteticents agrave
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 101
cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
0
10
20
30
40
50
60
70
80
1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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Added Nobel Laureate Recommends raquo Genegraveve UNCTAD communiqueacute de presse 2 novembre
ltwwwunctadorgpressgt
Wolf M 2006 laquo Chile Blazes the Trail for Latin America raquo Financial Times 13 deacutecembre
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 91
Tout drsquoabord compte tenu de ses implications geacuteneacuterales sur le secteur exteacuterieur
il est neacutecessaire drsquoobserver lrsquoeacutevolution du taux de change du reacuteal La figure 1
montre le comportement de la monnaie breacutesilienne vis-agrave-vis du dollar ameacutericain
depuis 1994 (anneacutee de sa mise en circulation) en bref le reacuteal srsquoest substantielle-
ment appreacutecieacute entre deacutebut 2003 et fin 2006 On assiste en reacutealiteacute agrave un renverse-
ment total de tendance cette fois-ci vers son appreacuteciation En admettant mecircme
lrsquooccurrence drsquoune speacuteculation intense5 et drsquoun surajustement6 en 2002 qui a
contribueacute de maniegravere conjoncturelle agrave sa forte deacutepreacuteciation et par conseacutequent agrave
un retournement agrave court terme le progregraves du reacuteal est notable en ce qui concerne
lrsquoensemble des anneacutees prises en compte dans la figure 1 Lrsquoarriveacutee du gouverne-
ment Lula et mecircme son eacutelection en sont nettement le point drsquoinflexion puisque
lrsquoon note un pic de deacutepreacuteciation quelques mois avant la fin 2002 eacutetant donneacute
les risques qui menaccedilaient alors la balance des paiements un accord avec le Fonds
moneacutetaire international ndash FMI ndash avait eacuteteacute signeacute par les principales forces politiques
breacutesiliennes au mois drsquoaoucirct de cette mecircme anneacutee
Il est vrai que lrsquoon ne peut mettre uniquement au creacutedit des autoriteacutes breacutesi-
liennes lrsquoensemble de cette eacutevolution car comme dans drsquoautres exemples eacutevoqueacutes
plus loin il faut tenir compte de lrsquoinfluence des facteurs exteacuterieurs tels les mou-
vements moneacutetaires agrave lrsquoeacutechelle mondiale Ici il faut en particulier souligner le
changement de politique moneacutetaire exteacuterieure des Eacutetats-Unis laquelle a sans doute
peseacute eacutetant donneacute le statut de reacutefeacuterence et de reacuteserve du dollar ndash notamment sa
manipulation freacutequente pour des raisons inteacuterieures et sans tenir compte des inteacute-
recircts des autres pays (McKinnon 2001) or celui-ci a commenceacute un mouvement
agrave la baisse agrave partir de 20027 comme inversement il srsquoeacutetait appreacutecieacute grosso modo
entre 1996 et 2001 Ces variations du dollar ont eacuteteacute suivies mais plutocirct dans le
sens inverse par les autres monnaies (y compris lrsquoeuro pas seulement le reacuteal et
les devises moins importantes et non indexeacutees8) crsquoest-agrave-dire qursquoen 2003-2006 elles
se sont appreacutecieacutees dans un cadre geacuteneacuteral drsquoinstabiliteacute des changes mondiaux
Quoi qursquoil en soit lrsquoappreacuteciation du reacuteal a sans doute eacuteteacute une chance pour le
Breacutesil et elle a eu des effets positifs sur lrsquoensemble du secteur exteacuterieur comme
le montrent les tableaux I et II
Le fait qui a le plus directement contribueacute agrave cette performance du reacuteal a eacuteteacute
lrsquoeacutevolution de la balance commerciale (bien plus que celle de la balance financiegravere
qui inclut parmi drsquoautres rubriques lrsquoinvestissement direct eacutetranger comme on
peut le voir au tableau I) La figure 2 preacutesente lrsquoeacutevolution des exportations et des
importations de marchandises9 depuis 1999 Il est clair qursquoagrave partir de 2003 les
5 Sur la toile de fond financiegravere des eacutelections preacutesidentielles en Ameacuterique latine voir S antiso
2003 et pour le Breacutesil voir M artiacutenez amp S antiso 20032004 6 Deacutepreacuteciation laquo excessive raquo de la monnaie due agrave la viscositeacute des autres prix pheacutenomegravene
geacuteneacuteralement de courte dureacutee (valable aussi pour lrsquoappreacuteciation mutatis mutandis) 7 Agrave la suite de plusieurs troubles dont lrsquoeacuteclatement de la bulle speacuteculative des cours des
nouvelles technologies drsquoinformation et de communication (NTIC) en 2000 et les eacuteveacutenements de
2001 les autoriteacutes moneacutetaires nord-ameacutericaines ont modifieacute leur politique de change 8 Lrsquoindexation au dollar a eacuteteacute le cas parmi drsquoautres du yuan renminbi chinois bien qursquoil ait
aussi eacuteteacute leacutegegraverement reacuteeacutevalueacute en 2006 9 Le poids des services dans les eacutechanges exteacuterieurs breacutesiliens reste peu significatif et lrsquoinves-
tissement direct eacutetranger sera consideacutereacute plus loin
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deux flux ont beaucoup augmenteacute davantage celui des exportations multiplieacute par
228 entre 2002 et 2006 plus modeacutereacutement celui des importations dont la pro-
gression a eacuteteacute freineacutee par la faible croissance multiplieacute par 193 Ainsi le rapport
exportationsimportations pratiquement en eacutequilibre en 1999-2001 a ensuite
deacutegageacute un important surplus commercial
Cette eacutevolution de la balance commerciale a eu un impact tregraves positif sur
la dette exteacuterieure le Breacutesil srsquoest retrouveacute beaucoup moins endetteacute vis-agrave-vis de
lrsquoexteacuterieur (tableau II) Le gouvernement a profiteacute de cet exceacutedent commercial
pour amortir la dette exteacuterieure ce qui est un atout pour le deacuteveloppement futur
du pays rendu plus facile par lrsquoeacutelargissement de la marge de manœuvre de la
politique eacuteconomique (par exemple la possibiliteacute de recours agrave des emprunts exteacute-
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Gouvernement Lula
Source IPEA
Fig 1 Taux de change reacutealUSD 1994-2006
Imp
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Source IPEA
Fig 2 Breacutesil commerce de biens 1999-2006
Milliards US Dollars
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rieurs dans des conditions plus favorables) En effet le rapport de la dette exteacuterieure
totale au Produit inteacuterieur brut (PIB) a chuteacute agrave 179 en juin 2006 (alors qursquoil
eacutetait de 459 en 2002) il faut revenir au deacutebut des anneacutees 1970 pour trouver
des chiffres semblables (177 en 1973) En outre il faut souligner le rythme
plus rapide de la reacuteduction de la dette publique son poids dans la dette exteacuterieure
totale eacutetant passeacute de 551 en 2002 agrave 455 en 2006 ( juin)
Tabl II ndash B reacutesil indicateurs de lrsquoendettement exteacuterieur 1999-2006
(en pourcentage)
Service de
la dette
exportations
Service de la
dettePIB
Paiement
drsquointeacuterecircts
exportations
Dette
publique
exteacuterieurePIB
Dette
exteacuterieure
PIB
Dette
exteacuterieure
exportations
1999 1458 130 356 162 420 4699
2000 946 86 310 149 360 3938
2001 869 99 303 182 412 3606
2002 833 109 253 240 459 3491
2003 741 110 210 236 424 2941
2004 537 86 148 190 333 2113
2005 558 83 122 97 213 1434
2006 612 88 119 81 179 1213
Dans ce tableau les rapports au PIB ont eacuteteacute calculeacutes en se fondant sur les donneacutees des
comptes nationaux breacutesiliens pour cette variable avant mars 2007 crsquoest-agrave-dire avant sa reacuteeacuteva-
luation par lrsquoIBGE eacutevoqueacutee plus loin
jusqursquoen juin
Source Banco Central do Brasil
Toutefois ici comme dans le cas de lrsquoappreacuteciation du reacuteal on ne peut exclure de
lrsquoanalyse drsquoautres tendances de lrsquoeacuteconomie mondiale qui ont influenceacute le commerce
de biens breacutesilien en particulier le boom des matiegraveres premiegraveres (agricoles et
mineacuterales) En effet certains produits de base (comme par exemple le cafeacute le
sucre le fer le tourteau de soja et la viande de bœuf cf tableau III) dont le
Breacutesil est un gros exportateur et qui correspondent agrave sa speacutecialisation tradition-
nelle ont geacuteneacuteralement vu leurs cours grimper rapidement pendant cette peacuteriode
Lrsquoeacutemergence drsquoune forte demande chinoise de commodities10 aupregraves du Breacutesil
(figure 3) comme ailleurs a contribueacute agrave cette eacutevolution les exportations breacutesiliennes
vers la Chine ont eacuteteacute multiplieacutees par 8 entre 2000 et 2006 ougrave elles ont atteint
84 milliards de dollars Drsquoun point de vue structurel la capaciteacute agrave bien srsquoajuster
10 On sait qursquoun accroissement relativement faible de la demande peut avoir un effet multi-
plicateur sur les prix (cela est ducirc au fait que leur offre est plutocirct rigide) Plus geacuteneacuteralement on
admet que des variations de lrsquooffre et de la demande (qursquoon suppose aussi fondamentalement
stable) agrave la hausse et agrave la baisse ont des effets amplifieacutes sur les prix des matiegraveres premiegraveres qui
sont par conseacutequent plus volatiles que ceux des produits manufactureacutes
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agrave cette demande mondiale en hausse met en relief un point fort de lrsquoeacuteconomie
breacutesilienne
Tabl III ndash Eacute volution du prix de quelques produits de base
Cafeacute
Tourteau
de soja
Sucre
raffineacute Minerai de fer Viande de bœuf
Cents $lp US$t US$t US$ centst US$arrobe
1999 1259 1467 1758 276 176
2000 665 1954 2452 288 183
2001 462 1438 2395 300 201
2002 602 1673 2082 293 252
2003 611 2310 1845 320 269
2004 1050 1648 2593 379 266
2005 1071 1963 3552 650 227
2006 1082 1745 4000 774 257
Jusqursquoen octobre
Source Banco Central do Brasil et Bolsa de Mercadorias amp Futuros (BM amp F)
En revanche si lrsquoon observe la tendance agrave lrsquoaugmentation du prix mondial des
matiegraveres premiegraveres en termes de monnaie locale les reacutesultats sont plus nuanceacutes
En effet sur la base 100 en 2002 les prix unitaires en monnaie breacutesilienne11 des
cinq commodities du tableau III eacutetaient en 2006 de 756 pour la viande de bœuf
(un des principaux produits de lrsquoexportation breacutesilienne) de 774 pour le tourteau
de soja 1333 pour le cafeacute 1425 pour le sucre raffineacute et de 196 pour le fer
Dans ces circonstances pour quelques produits de base dont la viande de bœuf
et le tourteau de soja de notre seacutelection la hausse de leurs prix en dollars ameacuteri-
cains compte tenu de la deacutepreacuteciation de cette monnaie ne srsquoest pas reacutepercuteacutee
sur les recettes locales Pour obtenir leur augmentation il aurait eacuteteacute neacutecessaire
drsquoaccroicirctre les quantiteacutes exporteacutees de maniegravere agrave compenser les pertes Agrave la fin du
premier mandat cette baisse des rendements aurait creacuteeacute une certaine insatisfaction
de la part des exportateurs concerneacutes notamment dans lrsquoagro-alimentaire breacutesilien
dans la mesure ougrave par exemple ils payent lrsquoessentiel de leurs inputs en monnaie
locale
Eacutetant donneacute la deacutepreacuteciation du dollar et les tendances globales que lrsquoon vient
de signaler la position du Breacutesil dans le commerce mondial de marchandises entre
2002 et 200512 srsquoest ameacutelioreacutee dans lrsquoensemble bien que drsquoune faccedilon deacuteseacutequilibreacutee
11 Les calculs suivants ont eacuteteacute faits en termes drsquoindice de base annuelle fixe en 2002 en
divisant les valeurs preacutesenteacutees dans le tableau III par celles de lrsquoinverse de la seacuterie utiliseacutee dans
la figure 1 (taux de change reacutealUS$) 12 Au moment ougrave nous eacutecrivons deacutebut 2007 lrsquoOMC nrsquoa pas encore deacutelivreacute ses estimations
sur le commerce mondial pour 2006
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plus preacuteciseacutement pour les exportations qui sont passeacutees de 096 agrave 116 et
pour les importations qui sont passeacutees de 075 agrave 072 Si lrsquoon observe
plus attentivement le commerce exteacuterieur breacutesilien on constate aussi que la part
des produits manufactureacutes a deacuteclineacute entre 2000 et 2006 passant de 5905 agrave
543 13 par conseacutequent celle des produits de base et semi-finis a augmenteacute
conduisant agrave ce que Reinaldo Gonccedilalves a appeleacute la laquo reprimarizaccedilatildeo raquo14 (2005 264)
Malgreacute les efforts qui ont eacuteteacute deacuteployeacutes par les gouvernements avant et apregraves 2003
le Breacutesil continue donc agrave eacuteprouver des difficulteacutes agrave aller au-delagrave de ses avantages
comparatifs traditionnels et agrave srsquoimplanter sur de nouveaux creacuteneaux exportateurs
agrave haute valeur ajouteacutee sauf pour quelques exceptions bien connues (dont la con-
struction aeacuteronautique civile lrsquoexploration offshore de peacutetrole et lrsquoindustrie automo-
bile) Dans drsquoautres cas comme celui des biocombustibles le Breacutesil a deacuteveloppeacute
une grande capaciteacute de production aux cours des derniegraveres deacutecennies mais leur
utilisation agrave une eacutechelle globale nrsquoest pas devenue jusqursquoagrave preacutesent une option
nette de la part des principaux consommateurs potentiels Nous reviendrons plus
loin sur ces questions
En reacutesumeacute les principaux indicateurs du secteur exteacuterieur au cours des quatre
premiegraveres anneacutees du gouvernement Lula ont connu une eacutevolution nettement
positive mecircme si les facteurs internationaux sur lesquels le gouvernement nrsquoa pas
13 Gazeta Mercantil 18 janvier 2007 Cette source reprenant une information de la Fundaccedilatildeo
Centro de Estudos do Comeacutercio Exterior (Funcex) ajoute laquo Entre 2000 et 2006 les prix des produits
de base ont augmenteacute de 43 tandis que les produits manufactureacutes nrsquoont augmenteacute que de
22 Aussi la croissance du quanta exporteacute a-t-elle eacuteteacute plus eacuteleveacutee pour les produits de base
(123 ) que pour les produits manufactureacutes (86 ) raquo 14 Tendance des produits primaires agrave regagner du poids dans les exportations breacutesiliennes
Remarquons le problegraveme que repreacutesente la demande chinoise de commodities allieacutee au fait que
ce pays exporte encore principalement des produits low-tech et que les pays deacuteveloppeacutes essaient
de se concentrer sur les produits agrave haute technologie et laissent peu drsquoespace aux pays agrave tech-
nologie moyenne comme le Breacutesil
Fig 3 Commerce Breacutesil-Chine 1999-2006
Millions US Dollars
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1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Exportations ImportationsSource Secex
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drsquoinfluence ont joueacute un rocircle non neacutegligeable dans ces performances Il srsquoagit
surtout de lrsquoeacutevolution du marcheacute mondial des matiegraveres premiegraveres dont les prix
ont eacuteteacute agrave la hausse le Breacutesil en eacutetant lrsquoun des principaux fournisseurs Drsquoautre
part au niveau inteacuterieur comme la faible croissance nrsquoa pas tireacute les importations
vers le haut ces diffeacuterentes tendances ont permis en 2003-2006 lrsquoaccumulation
drsquoun surplus substantiel de la balance commerciale (mecircme lrsquoappreacuteciation du reacuteal
nrsquoa pu lrsquoempecirccher) Pourtant un renversement de tendance pourrait survenir et
reacuteveacuteler des fragiliteacutes dans le secteur exteacuterieur breacutesilien En particulier en admettant
mecircme que la phase actuelle de boom du cycle des matiegraveres premiegraveres soit relati-
vement longue (agrave cause de lrsquoentreacutee de la Chine et de lrsquoInde dans ce marcheacute) elle
aura certainement des limites agrave un moment donneacute Enfin la politique de change
la composition du commerce de marchandises et la position breacutesilienne dans le
commerce mondial ne sont pas devenues substantiellement diffeacuterentes de la situa-
tion preacuteceacutedente15 mecircme si les poleacutemiques concernant la nature de leur eacutevolution
se poursuivent
Les relations avec les organisations eacuteconomiques internationales le deacutefi des neacutegociations du Doha Round
Comme agrave drsquoautres niveaux clarifier la politique du gouvernement breacutesilien de
Lula dans ce domaine nrsquoest pas facile Lrsquoeacutevolution des organisations eacuteconomiques
internationales reacutepond agrave un certain nombre de facteurs que les gouvernements
nationaux ont du mal agrave influencer sans parler du rythme souvent tregraves lent de
la complexiteacute des neacutegociations et des marchandages pas forceacutement tregraves transpa-
rents Neacuteanmoins on peut tenter de preacuteciser les contours speacutecifiques de lrsquoaction
du gouvernement Lula dans ce domaine fondamental de la politique commerciale
Citons tout drsquoabord les deacuteclarations du ministre des Affaires eacutetrangegraveres Celso
Amorim au milieu du mandat preacutesidentiel
laquo Les accords sur les trois fronts de neacutegociation commerciale dans lesquels le Breacutesil
est simultaneacutement engageacute ndash le Doha Round de lrsquoOrganisation mondiale du commerce
la Zone de libre-eacutechange des Ameacuteriques16 (Alca) et le Mercosul-Union Europeacuteenne ndash
doivent ecirctre conclus dans un deacutelai drsquoun an et demi raquo17
Notons qursquoelles donnent la prioriteacute aux neacutegociations au sein de lrsquoOMC (Mouratildeo
2005) Compte tenu de leur position clef dans lrsquoensemble de la politique com-
merciale du gouvernement Lula agrave lrsquoeacutechelle internationale il faut drsquoabord examiner
les relations avec lrsquoOMC crsquoest-agrave-dire au niveau multilateacuteral ayant comme centre
le Doha Round pour ensuite passer en revue les questions relatives agrave lrsquointeacutegration
15 Plus geacuteneacuteralement C arneiro (2006 9) considegravere que laquo la peacuteriode 2003-2005 en ce qui
concerne le gouvernement Lula ne se diffeacuterencie pas exception faite drsquoeacuteventuelles diffeacuterences
de gestion de celle correspondant aux anneacutees 1999-2002 car ces politiques ont eu comme
fondement un reacutegime combinant lrsquoinflation le change flottant et la contraction fiscale raquo 16 Zone de libre-eacutechange (ZLEA) plus connu sous le sigle Alca Aacuterea de Livre Comeacutercio das
Ameacutericas 17 O Estado de Satildeo Paulo 3 deacutecembre 2004 B12
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eacuteconomique (Mercosul Alca et relations avec lrsquoUnion europeacuteenne) et autres ques-
tions geacuteostrateacutegiques comme les relations Sud-Sud
Le cycle de neacutegociations du Doha Round est tregraves important dans la mesure ougrave
la promotion du deacuteveloppement en particulier la pleine participation des eacutecono-
mies en deacuteveloppement dans le systegraveme commercial international constitue un
objectif central depuis son lancement en novembre 2001 Degraves le deacutebut des neacutego-
ciations malgreacute toute la rheacutetorique sur le deacuteveloppement il eacutetait eacutevident que
comme les barriegraveres tarifaires srsquoeacutetaient substantiellement reacuteduites au cours des
deacutecennies suivant lrsquoapregraves-guerre de mecircme que les principales barriegraveres quanti tatives
eacutetaient en phase de deacutemantegravelement (du moins partiel) depuis la fin de lrsquoUruguay
Round en 1993 on srsquoapprochait doreacutenavant drsquoenjeux plus controverseacutes ougrave il exis-
tait traditionnellement plus de reacutesistance agrave suivre les regravegles du GATTOMC En
lrsquooccurrence les diffeacuterentes regravegles de protection de la proprieacuteteacute intellectuelle (dans
leur relation avec le commerce) lrsquoouverture des marcheacutes agricoles notamment en
raison de lrsquoentreacutee dans le systegraveme reacutesultant du Round preacuteceacutedent avaient eacuteteacute plus
formelles qursquoeffectives Or preacuteciseacutement lrsquoinclusion des produits agricoles dans ces
regravegles en particulier la reacuteduction des subventions publiques qui introduisent de
graves distorsions dans le commerce mondial de ces biens eacutetait un enjeu qui
inteacuteressait prioritairement de nombreux pays en deacuteveloppement et a fortiori le
Breacutesil en raison des difficulteacutes qursquoils rencontrent agrave tirer profit de leurs avantages
comparatifs Dans une deacuteclaration qui illustre bien la position breacutesilienne sur les
produits agricoles le ministre Celso Amorim estima que
laquo Il est choquant que plus drsquoune cinquantaine drsquoanneacutees apregraves lrsquoeacutetablissement de regravegles
multilateacuterales destineacutees agrave libeacuterer et agrave discipliner le commerce international sous lrsquoeacutegide
du GATT une cateacutegorie de produits drsquoune si grande importance pour les pays en
deacuteveloppement soit resteacutee proteacutegeacutee par des exceptions des subsides et des barriegraveres
de tous ordres raquo18
Crsquoest dans ce cadre en particulier agrave Cancuacuten en septembre 2003 que deux grou-
pes principaux19 se sont formeacutes autour de la question devenue centrale de lrsquoouver-
ture des marcheacutes agricoles (bien entendu cet enjeu eacutetait lieacute agrave drsquoautres lors des
neacutegociations) Drsquoun cocircteacute les Eacutetats-Unis et lrsquoUnion europeacuteenne srsquoopposegraverent agrave
quelques diffeacuterences pregraves et nrsquooffrirent que des concessions marginales en la matiegravere
et de lrsquoautre le G-20 au sein duquel le Breacutesil a joueacute un rocircle deacuteterminant20 qui
souhaita de veacuteritables concessions y compris une reacuteduction sensible des subventions
publiques
18 Valor 9 septembre 2003 AB 19 On ne mentionne que ces deux groupes importants pour notre sujet cependant drsquoautres
se sont formeacutes agrave la confeacuterence de Cancuacuten qui sont resteacutes actifs par la suite pour plus de deacutetails
voir N arlikar 2005 112-113 20 Il est vrai que drsquoautres grandes eacuteconomies eacutemergentes appartiennent aussi au G-20 comme
lrsquoInde la Chine lrsquoAfrique du Sud la Thaiumllande et lrsquoArgentine mais compte tenu de sa position
plus laquo combative raquo et du plus grand inteacuterecirct qursquoil porte sur le sujet le Breacutesil a dans lrsquoensemble
joueacute un des rocircles les plus importants dans les neacutegociations internationales concernant les produits
agricoles
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Apregraves cinq ans de neacutegociations et le deacutepassement de la date limite initialement
poseacutee pour sa conclusion en janvier 2005 le Doha Round a eacuteteacute suspendu sine die
en juillet 2006 sans reacutesultats concrets (le souhait du ministre breacutesilien concernant
les deacutelais nrsquoa donc pas eacuteteacute reacutealiseacute) Face agrave cette situation certains parlent de ce
cycle en termes drsquoeacutechec (par exemple Laborde amp Fontagneacute 2007) Mais si lrsquoon
observe les enjeux et les forces asymeacutetriques en preacutesence lrsquoanalyse doit ecirctre plus
nuanceacutee Il est hors de question de consideacuterer ce Round comme un succegraves et il
serait plus approprieacute drsquoestimer que ce que lrsquoon a perdu crsquoest peut-ecirctre une bataille
et non la guerre (Bhagwati 2004) qui selon toute vraisemblance se prolongera
Dans cette affaire le principal problegraveme reacuteside dans le type de reacuteponse agrave donner
face agrave lrsquoalternative suivante soit obtenir un accord dans un deacutelai relativement
court mais qui ne porte que sur des points secondaires soit obtenir un accord
plus difficilement mais qui porte sur les questions fondamentales comme lrsquoouver-
ture effective des marcheacutes agricoles ce qui serait novateur et repreacutesenterait pro-
bablement des gains consideacuterables pour le commerce mondial Il nrsquoest donc pas
possible de dire que le gouvernement breacutesilien a remporteacute un succegraves dans ce
domaine bien qursquoil ait deacutefini et maintenu une strateacutegie claire (agrave propos de laquelle
par ailleurs il ne semble pas y avoir de divergences significatives entre les prin-
cipales forces politiques breacutesiliennes) pourtant pour que sa voix soit plus creacutedible
dans les neacutegociations il faudrait qursquoil soit conseacutequent dans lrsquoagriculture comme
ailleurs21
Plus geacuteneacuteralement en ce qui concerne les reacutesultats tangibles du Doha Round 22
notamment dans les dossiers laquo sensibles raquo comme lrsquoagriculture il faudrait des condi-
tions internationales plus favorables comme en 199323 lorsque celles-ci ont permis
de sortir des impasses de lrsquoUruguay Round et du North American Free Trade Agreement
(Nafta) ce qui semble aujourdrsquohui assez improbable Par ailleurs plus de cinq ans
21 Drsquoapregraves B hagwati (2004 59) le tarif agricole moyen serait de 12 aux Eacutetats-Unis de
37 au Breacutesil et de 112 en Inde Agrave juste titre cet auteur souligne dans nombre de ses
eacutecrits que les pays en deacuteveloppement demandent aux pays deacuteveloppeacutes la reacuteduction de leurs
tarifs sans ecirctre disposeacutes agrave en faire autant Bien que cela soit vrai en termes absolus Bhagwati
neacuteglige le fait que les premiers depuis les anneacutees 1980 ont souvent reacuteduit plus vite que les
seconds leurs niveaux de protection Par exemple entre le milieu des anneacutees 1980 et lrsquoan 2000
le tarif moyen (tous secteurs) est passeacute de 66 agrave 42 en Europe de 7 agrave 4 aux Eacutetats-
Unis de 44 agrave 17 au Breacutesil et de 80 agrave 32 en Inde la libeacuteralisation unilateacuterale des
pays en deacuteveloppement a eacuteteacute importante depuis le milieu des anneacutees 1980 voir B aldwin 2006
1456 1458-1459 Drsquoautre part les pays en deacuteveloppement ont comparativement moins de pos-
sibiliteacutes de financer drsquoune faccedilon durable drsquoimportants subsides agrave la production et agrave lrsquoexportation
lesquels enfreignent gravement le libre cours des flux du commerce international 22 Deacutebut 2007 plusieurs personnaliteacutes politiques internationales dont le Preacutesident breacutesilien
notamment agrave Davos fin janvier se sont prononceacutees pour la reprise des neacutegociations du Doha
Round cependant rien nrsquoeacutetait encore trancheacute agrave ce sujet au moment de conclure la reacutedaction
de cet article 23 Au deacutebut des anneacutees 1990 peu de temps apregraves la chute du mur de Berlin et drsquoautres
changements majeurs agrave lrsquoeacutechelle mondiale survenus pendant cette peacuteriode lrsquoarriveacutee agrave la Maison
Blanche de lrsquoAdministration Clinton en 1993 alors relativement plus activiste de ce point de
vue a permis le deacuteblocage drsquoun certain nombre drsquoimpasses dans les neacutegociations commerciales
internationales
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 99
ont eacuteteacute neacutecessaires pour que le Tokyo Round (1973-1979) soit conclu plus de sept
ans pour lrsquoUruguay Round (1986-1993) il faudrait donc beaucoup de chance pour
que le Doha Round soit conclu dans un temps plus court compte tenu de son
agenda ndash reconnu par tous comme tregraves difficile ndash des coucircts qursquoil implique agrave court
terme pour des groupes politiquement puissants dans les pays deacuteveloppeacutes sans
compter que lrsquoOMC compte doreacutenavant un nombre bien plus eacuteleveacute de membres
Enfin srsquoagissant de la strateacutegie breacutesilienne dans ce domaine elle ne pourra ecirctre
pleinement eacutevalueacutee que dans les anneacutees agrave venir au vu de ses reacutesultats
Les choix de politique eacutetrangegravere prioriteacutes et indeacutecisions
En ce qui concerne les orientations geacuteostrateacutegiques des relations eacuteconomiques
exteacuterieures plusieurs voies sont possibles qui drsquoailleurs ne srsquoopposent pas neacuteces-
sairement Au-delagrave du multilateacuteralisme (en principe une perspective plus globale
qui nrsquoimplique pas de discrimination commerciale) lrsquointeacutegration eacuteconomique est
orienteacutee vers les pays et les reacutegions proches mais pas exclusivement (reacutegionalisa-
tion) Actuellement la plupart des pays et le Breacutesil ne fait pas exception ont une
politique commerciale baseacutee sur un certain dosage de multilateacuteralisme et
drsquointeacutegration reacutegionale Drsquoautre part outre les deux dimensions preacuteceacutedentes il
peut y avoir des accords bilateacuteraux ou de simples prioriteacutes geacuteographiques sans
aucun engagement pour les autres pays et nrsquoentraicircnant que des mesures unilateacute-
rales pour stimuler les eacutechanges dans les directions deacutesireacutees
Qursquoen est-il des options geacuteostrateacutegiques de la politique commerciale breacutesilienne
Parmi les regroupements qui ont marqueacute cette peacuteriode il faut noter 1) le Mercosul
et le reste de lrsquoAmeacuterique latine 2) les relations Sud-Sud et lrsquoAfrique 3) lrsquoAlca le
Mercoeuro24 ou les deux ce qui pose la question drsquoaccords possibles agrave lrsquoeacutechelle
continentale ou extracontinentale (et entre pays deacuteveloppeacutes et en voie de deacutevelop-
pement) Ces champs drsquoaction sont vastes et varieacutes ce qui nrsquoest pas surprenant
car le commerce exteacuterieur breacutesilien se preacutesente de faccedilon assez diversifieacutee geacuteogra-
phiquement25 Neacuteanmoins pour eacutevaluer les diffeacuterentes voies de renforcement des
liens eacuteconomiques internationaux plus que pour faire le bilan du passeacute il faut
tenir compte de leur potentiel futur notamment agrave moyen terme
Comme nous lrsquoavons deacutejagrave remarqueacute la creacuteation du Mercosul au deacutebut des
anneacutees 1990 a eacuteteacute agrave lrsquoorigine drsquoun laquo grand bond en avant raquo pour la politique
commerciale breacutesilienne et pour lrsquoAmeacuterique latine tout entiegravere dans la mesure ougrave
ce groupement eacutetait plus ambitieux et concret que ceux qui lrsquoavaient preacuteceacutedeacute
(drsquoune certaine maniegravere lrsquoexpeacuterience des quatre pays fondateurs du laquo cocircne sud raquo
24 Terme utiliseacute pour deacutesigner le projet de creacuteation drsquoune zone de libre-eacutechange entre lrsquoUnion
europeacuteenne et le Mercosul (deacutecision du sommet de Madrid en 1995) et la possibiliteacute drsquoun ren-
forcement geacuteneacuteral des liens eacuteconomiques entre les deux blocs voir S ilva 2004 263 25 Distribution du commerce exteacuterieur breacutesilien en 1999-2002 pour les exportations Union
europeacuteenne 263 Eacutetats-Unis 244 Aladi (Association latino-ameacutericaine drsquointeacutegration y
compris le Mercosul) 205 Asie et Moyen-Orient 125 et autres 161 et pour les
importations Union europeacuteenne 274 Eacutetats-Unis 233 Aladi 189 Asie et Moyen-
Orient 154 et autres 15 G onccedilalves 2005 265 et 269
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se rapprochait des pratiques europeacuteennes drsquointeacutegration) Par ailleurs le Breacutesil eacutetant
de loin la plus grande eacuteconomie du bloc son rocircle y fut deacuteterminant agrave maints
eacutegards Du point de vue de ses options geacuteographiques le gouvernement Lula a
nettement accordeacute la prioriteacute au Mercosul et par extension naturelle agrave lrsquoAmeacuterique
latine (Meyer 2005 61) Jusqursquoagrave preacutesent des accords drsquoassociation ont eacuteteacute signeacutes
avec le Chili la Bolivie le Peacuterou la Colombie et lrsquoEacutequateur puis le Venezuela
est devenu un Eacutetat membre en 2006 Cependant malgreacute les premiegraveres anneacutees
favorables le moins que lrsquoon puisse dire est qursquoen raison de diffeacuterents facteurs
dont la grave crise de lrsquoArgentine qui a deacutebuteacute en 1999 et exploseacute en 2001-2002
le Mercosul stagne depuis et a cesseacute drsquoapprofondir son ancrage Chaque Eacutetat
membre srsquoest enfermeacute dans ses problegravemes particuliers et le Mercosul reste un
exemple drsquointeacutegration reacutegionale sans coordination eacuteconomique (Baer et al 2002)
Certes ses liens avec la Communauteacute andine se sont resserreacutes et des neacutegociations
ont eacuteteacute reacutealiseacutees avec drsquoautres pays (le Mexique par exemple) ou drsquoautres groupes
mais leur ampleur reste modeste et compte tenu de lrsquoexpeacuterience drsquointeacutegration de
la reacutegion les espoirs sont reacuteserveacutes Lrsquoimpasse de lrsquoAlca analyseacutee plus loin nrsquoest
pas eacutetrangegravere agrave cette eacutevolution Pour avoir une vue drsquoensemble sur cette option
dirigeacutee vers lrsquoAmeacuterique latine le principal fait agrave retenir est lrsquoentreacutee du Venezuela
dans le Mercosul
Les relations Sud-Sud (hors Ameacuterique latine) sont une autre dimension de la
politique commerciale breacutesilienne qui a pris de lrsquoimportance du moins du point
de vue diplomatique (Meyer 2005) bien que drsquoune faccedilon geacuteneacuterale elles nrsquoaient
pas pris la forme drsquoune inteacutegration reacutegionale Drsquoune part les relations du Breacutesil
avec la Chine lrsquoInde lrsquoAfrique du Sud et drsquoautres eacuteconomies eacutemergentes se sont
deacuteveloppeacutees agrave plusieurs niveaux (multilateacuteraux ou bilateacuteraux) notamment au sein
du G20 accompagnant lrsquointensification rapide des eacutechanges commerciaux Drsquoautre
part le cas de lrsquoAfrique dans son ensemble est particuliegraverement repreacutesentatif de
la tendance Sud-Sud et plusieurs initiatives ont eacuteteacute lanceacutees par le gouvernement
breacutesilien dans le but drsquoun renforcement des relations commerciales avec ce conti-
nent geacuteographiquement proche (Oliveira amp Mouratildeo 2005 Coelho amp Saraiva
2004)
Bien qursquoils repreacutesentent eacutegalement deux orientations importantes de la politique
commerciale breacutesilienne reconnues par le gouvernement Lula lrsquoAlca et le Mercoeuro
nrsquoont pas connu drsquoavanceacutees pratiques significatives pendant cette peacuteriode En outre
comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment ces orientations nrsquoont pas eacuteteacute prioritaires
dans la politique internationale du gouvernement Lula qui favorisait le Doha Round
Srsquoagissant de processus remontant deacutejagrave aux anneacutees 1990 dont lrsquoentreacutee en vigueur
fondamentalement sous la forme drsquoune zone de libre-eacutechange eacutetait initialement
preacutevue pour 2005 lrsquoimpression est qursquoils traicircnent en longueur sans qursquoon puisse
reacuteellement entrevoir la fin des neacutegociations qui nrsquoont pas eacuteteacute abandonneacutees pour
autant Indeacutependamment de la multipliciteacute drsquoacteurs qursquoil faudrait prendre
en compte la question serait de savoir quel degreacute de pression a eacuteteacute exerceacute ndash ou
non ndash par le gouvernement breacutesilien agrave ce sujet LrsquoAlca est apparue drsquoabord comme
une sorte drsquoillustration de ladite theacuteorie des reacutegions naturelles (dans ce cas les
Ameacuteriques de lrsquoAlaska agrave la Terre de Feu) Mais compte tenu de lrsquounilateacuteralisme
traditionnel des Eacutetats-Unis envers lrsquoAmeacuterique latine et de lrsquoeacuteventail limiteacute des
produits inclus dans ces neacutegociations les pays de la reacutegion sont resteacutes reacuteticents agrave
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cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
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30
40
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70
80
1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
LUSO 142_1037_86-108indd 105LUSO 142_1037_86-108indd 105 111607 12745 PM111607 12745 PM
106 joaquim ramos silva
Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 107
toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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92 joaquim ramos silva
deux flux ont beaucoup augmenteacute davantage celui des exportations multiplieacute par
228 entre 2002 et 2006 plus modeacutereacutement celui des importations dont la pro-
gression a eacuteteacute freineacutee par la faible croissance multiplieacute par 193 Ainsi le rapport
exportationsimportations pratiquement en eacutequilibre en 1999-2001 a ensuite
deacutegageacute un important surplus commercial
Cette eacutevolution de la balance commerciale a eu un impact tregraves positif sur
la dette exteacuterieure le Breacutesil srsquoest retrouveacute beaucoup moins endetteacute vis-agrave-vis de
lrsquoexteacuterieur (tableau II) Le gouvernement a profiteacute de cet exceacutedent commercial
pour amortir la dette exteacuterieure ce qui est un atout pour le deacuteveloppement futur
du pays rendu plus facile par lrsquoeacutelargissement de la marge de manœuvre de la
politique eacuteconomique (par exemple la possibiliteacute de recours agrave des emprunts exteacute-
0
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21
Gouvernement Lula
Source IPEA
Fig 1 Taux de change reacutealUSD 1994-2006
Imp
Exp
0
20
40
60
80
100
120
140
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source IPEA
Fig 2 Breacutesil commerce de biens 1999-2006
Milliards US Dollars
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 93
rieurs dans des conditions plus favorables) En effet le rapport de la dette exteacuterieure
totale au Produit inteacuterieur brut (PIB) a chuteacute agrave 179 en juin 2006 (alors qursquoil
eacutetait de 459 en 2002) il faut revenir au deacutebut des anneacutees 1970 pour trouver
des chiffres semblables (177 en 1973) En outre il faut souligner le rythme
plus rapide de la reacuteduction de la dette publique son poids dans la dette exteacuterieure
totale eacutetant passeacute de 551 en 2002 agrave 455 en 2006 ( juin)
Tabl II ndash B reacutesil indicateurs de lrsquoendettement exteacuterieur 1999-2006
(en pourcentage)
Service de
la dette
exportations
Service de la
dettePIB
Paiement
drsquointeacuterecircts
exportations
Dette
publique
exteacuterieurePIB
Dette
exteacuterieure
PIB
Dette
exteacuterieure
exportations
1999 1458 130 356 162 420 4699
2000 946 86 310 149 360 3938
2001 869 99 303 182 412 3606
2002 833 109 253 240 459 3491
2003 741 110 210 236 424 2941
2004 537 86 148 190 333 2113
2005 558 83 122 97 213 1434
2006 612 88 119 81 179 1213
Dans ce tableau les rapports au PIB ont eacuteteacute calculeacutes en se fondant sur les donneacutees des
comptes nationaux breacutesiliens pour cette variable avant mars 2007 crsquoest-agrave-dire avant sa reacuteeacuteva-
luation par lrsquoIBGE eacutevoqueacutee plus loin
jusqursquoen juin
Source Banco Central do Brasil
Toutefois ici comme dans le cas de lrsquoappreacuteciation du reacuteal on ne peut exclure de
lrsquoanalyse drsquoautres tendances de lrsquoeacuteconomie mondiale qui ont influenceacute le commerce
de biens breacutesilien en particulier le boom des matiegraveres premiegraveres (agricoles et
mineacuterales) En effet certains produits de base (comme par exemple le cafeacute le
sucre le fer le tourteau de soja et la viande de bœuf cf tableau III) dont le
Breacutesil est un gros exportateur et qui correspondent agrave sa speacutecialisation tradition-
nelle ont geacuteneacuteralement vu leurs cours grimper rapidement pendant cette peacuteriode
Lrsquoeacutemergence drsquoune forte demande chinoise de commodities10 aupregraves du Breacutesil
(figure 3) comme ailleurs a contribueacute agrave cette eacutevolution les exportations breacutesiliennes
vers la Chine ont eacuteteacute multiplieacutees par 8 entre 2000 et 2006 ougrave elles ont atteint
84 milliards de dollars Drsquoun point de vue structurel la capaciteacute agrave bien srsquoajuster
10 On sait qursquoun accroissement relativement faible de la demande peut avoir un effet multi-
plicateur sur les prix (cela est ducirc au fait que leur offre est plutocirct rigide) Plus geacuteneacuteralement on
admet que des variations de lrsquooffre et de la demande (qursquoon suppose aussi fondamentalement
stable) agrave la hausse et agrave la baisse ont des effets amplifieacutes sur les prix des matiegraveres premiegraveres qui
sont par conseacutequent plus volatiles que ceux des produits manufactureacutes
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94 joaquim ramos silva
agrave cette demande mondiale en hausse met en relief un point fort de lrsquoeacuteconomie
breacutesilienne
Tabl III ndash Eacute volution du prix de quelques produits de base
Cafeacute
Tourteau
de soja
Sucre
raffineacute Minerai de fer Viande de bœuf
Cents $lp US$t US$t US$ centst US$arrobe
1999 1259 1467 1758 276 176
2000 665 1954 2452 288 183
2001 462 1438 2395 300 201
2002 602 1673 2082 293 252
2003 611 2310 1845 320 269
2004 1050 1648 2593 379 266
2005 1071 1963 3552 650 227
2006 1082 1745 4000 774 257
Jusqursquoen octobre
Source Banco Central do Brasil et Bolsa de Mercadorias amp Futuros (BM amp F)
En revanche si lrsquoon observe la tendance agrave lrsquoaugmentation du prix mondial des
matiegraveres premiegraveres en termes de monnaie locale les reacutesultats sont plus nuanceacutes
En effet sur la base 100 en 2002 les prix unitaires en monnaie breacutesilienne11 des
cinq commodities du tableau III eacutetaient en 2006 de 756 pour la viande de bœuf
(un des principaux produits de lrsquoexportation breacutesilienne) de 774 pour le tourteau
de soja 1333 pour le cafeacute 1425 pour le sucre raffineacute et de 196 pour le fer
Dans ces circonstances pour quelques produits de base dont la viande de bœuf
et le tourteau de soja de notre seacutelection la hausse de leurs prix en dollars ameacuteri-
cains compte tenu de la deacutepreacuteciation de cette monnaie ne srsquoest pas reacutepercuteacutee
sur les recettes locales Pour obtenir leur augmentation il aurait eacuteteacute neacutecessaire
drsquoaccroicirctre les quantiteacutes exporteacutees de maniegravere agrave compenser les pertes Agrave la fin du
premier mandat cette baisse des rendements aurait creacuteeacute une certaine insatisfaction
de la part des exportateurs concerneacutes notamment dans lrsquoagro-alimentaire breacutesilien
dans la mesure ougrave par exemple ils payent lrsquoessentiel de leurs inputs en monnaie
locale
Eacutetant donneacute la deacutepreacuteciation du dollar et les tendances globales que lrsquoon vient
de signaler la position du Breacutesil dans le commerce mondial de marchandises entre
2002 et 200512 srsquoest ameacutelioreacutee dans lrsquoensemble bien que drsquoune faccedilon deacuteseacutequilibreacutee
11 Les calculs suivants ont eacuteteacute faits en termes drsquoindice de base annuelle fixe en 2002 en
divisant les valeurs preacutesenteacutees dans le tableau III par celles de lrsquoinverse de la seacuterie utiliseacutee dans
la figure 1 (taux de change reacutealUS$) 12 Au moment ougrave nous eacutecrivons deacutebut 2007 lrsquoOMC nrsquoa pas encore deacutelivreacute ses estimations
sur le commerce mondial pour 2006
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 95
plus preacuteciseacutement pour les exportations qui sont passeacutees de 096 agrave 116 et
pour les importations qui sont passeacutees de 075 agrave 072 Si lrsquoon observe
plus attentivement le commerce exteacuterieur breacutesilien on constate aussi que la part
des produits manufactureacutes a deacuteclineacute entre 2000 et 2006 passant de 5905 agrave
543 13 par conseacutequent celle des produits de base et semi-finis a augmenteacute
conduisant agrave ce que Reinaldo Gonccedilalves a appeleacute la laquo reprimarizaccedilatildeo raquo14 (2005 264)
Malgreacute les efforts qui ont eacuteteacute deacuteployeacutes par les gouvernements avant et apregraves 2003
le Breacutesil continue donc agrave eacuteprouver des difficulteacutes agrave aller au-delagrave de ses avantages
comparatifs traditionnels et agrave srsquoimplanter sur de nouveaux creacuteneaux exportateurs
agrave haute valeur ajouteacutee sauf pour quelques exceptions bien connues (dont la con-
struction aeacuteronautique civile lrsquoexploration offshore de peacutetrole et lrsquoindustrie automo-
bile) Dans drsquoautres cas comme celui des biocombustibles le Breacutesil a deacuteveloppeacute
une grande capaciteacute de production aux cours des derniegraveres deacutecennies mais leur
utilisation agrave une eacutechelle globale nrsquoest pas devenue jusqursquoagrave preacutesent une option
nette de la part des principaux consommateurs potentiels Nous reviendrons plus
loin sur ces questions
En reacutesumeacute les principaux indicateurs du secteur exteacuterieur au cours des quatre
premiegraveres anneacutees du gouvernement Lula ont connu une eacutevolution nettement
positive mecircme si les facteurs internationaux sur lesquels le gouvernement nrsquoa pas
13 Gazeta Mercantil 18 janvier 2007 Cette source reprenant une information de la Fundaccedilatildeo
Centro de Estudos do Comeacutercio Exterior (Funcex) ajoute laquo Entre 2000 et 2006 les prix des produits
de base ont augmenteacute de 43 tandis que les produits manufactureacutes nrsquoont augmenteacute que de
22 Aussi la croissance du quanta exporteacute a-t-elle eacuteteacute plus eacuteleveacutee pour les produits de base
(123 ) que pour les produits manufactureacutes (86 ) raquo 14 Tendance des produits primaires agrave regagner du poids dans les exportations breacutesiliennes
Remarquons le problegraveme que repreacutesente la demande chinoise de commodities allieacutee au fait que
ce pays exporte encore principalement des produits low-tech et que les pays deacuteveloppeacutes essaient
de se concentrer sur les produits agrave haute technologie et laissent peu drsquoespace aux pays agrave tech-
nologie moyenne comme le Breacutesil
Fig 3 Commerce Breacutesil-Chine 1999-2006
Millions US Dollars
0
2000
4000
6000
8000
10000
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Exportations ImportationsSource Secex
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96 joaquim ramos silva
drsquoinfluence ont joueacute un rocircle non neacutegligeable dans ces performances Il srsquoagit
surtout de lrsquoeacutevolution du marcheacute mondial des matiegraveres premiegraveres dont les prix
ont eacuteteacute agrave la hausse le Breacutesil en eacutetant lrsquoun des principaux fournisseurs Drsquoautre
part au niveau inteacuterieur comme la faible croissance nrsquoa pas tireacute les importations
vers le haut ces diffeacuterentes tendances ont permis en 2003-2006 lrsquoaccumulation
drsquoun surplus substantiel de la balance commerciale (mecircme lrsquoappreacuteciation du reacuteal
nrsquoa pu lrsquoempecirccher) Pourtant un renversement de tendance pourrait survenir et
reacuteveacuteler des fragiliteacutes dans le secteur exteacuterieur breacutesilien En particulier en admettant
mecircme que la phase actuelle de boom du cycle des matiegraveres premiegraveres soit relati-
vement longue (agrave cause de lrsquoentreacutee de la Chine et de lrsquoInde dans ce marcheacute) elle
aura certainement des limites agrave un moment donneacute Enfin la politique de change
la composition du commerce de marchandises et la position breacutesilienne dans le
commerce mondial ne sont pas devenues substantiellement diffeacuterentes de la situa-
tion preacuteceacutedente15 mecircme si les poleacutemiques concernant la nature de leur eacutevolution
se poursuivent
Les relations avec les organisations eacuteconomiques internationales le deacutefi des neacutegociations du Doha Round
Comme agrave drsquoautres niveaux clarifier la politique du gouvernement breacutesilien de
Lula dans ce domaine nrsquoest pas facile Lrsquoeacutevolution des organisations eacuteconomiques
internationales reacutepond agrave un certain nombre de facteurs que les gouvernements
nationaux ont du mal agrave influencer sans parler du rythme souvent tregraves lent de
la complexiteacute des neacutegociations et des marchandages pas forceacutement tregraves transpa-
rents Neacuteanmoins on peut tenter de preacuteciser les contours speacutecifiques de lrsquoaction
du gouvernement Lula dans ce domaine fondamental de la politique commerciale
Citons tout drsquoabord les deacuteclarations du ministre des Affaires eacutetrangegraveres Celso
Amorim au milieu du mandat preacutesidentiel
laquo Les accords sur les trois fronts de neacutegociation commerciale dans lesquels le Breacutesil
est simultaneacutement engageacute ndash le Doha Round de lrsquoOrganisation mondiale du commerce
la Zone de libre-eacutechange des Ameacuteriques16 (Alca) et le Mercosul-Union Europeacuteenne ndash
doivent ecirctre conclus dans un deacutelai drsquoun an et demi raquo17
Notons qursquoelles donnent la prioriteacute aux neacutegociations au sein de lrsquoOMC (Mouratildeo
2005) Compte tenu de leur position clef dans lrsquoensemble de la politique com-
merciale du gouvernement Lula agrave lrsquoeacutechelle internationale il faut drsquoabord examiner
les relations avec lrsquoOMC crsquoest-agrave-dire au niveau multilateacuteral ayant comme centre
le Doha Round pour ensuite passer en revue les questions relatives agrave lrsquointeacutegration
15 Plus geacuteneacuteralement C arneiro (2006 9) considegravere que laquo la peacuteriode 2003-2005 en ce qui
concerne le gouvernement Lula ne se diffeacuterencie pas exception faite drsquoeacuteventuelles diffeacuterences
de gestion de celle correspondant aux anneacutees 1999-2002 car ces politiques ont eu comme
fondement un reacutegime combinant lrsquoinflation le change flottant et la contraction fiscale raquo 16 Zone de libre-eacutechange (ZLEA) plus connu sous le sigle Alca Aacuterea de Livre Comeacutercio das
Ameacutericas 17 O Estado de Satildeo Paulo 3 deacutecembre 2004 B12
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 97
eacuteconomique (Mercosul Alca et relations avec lrsquoUnion europeacuteenne) et autres ques-
tions geacuteostrateacutegiques comme les relations Sud-Sud
Le cycle de neacutegociations du Doha Round est tregraves important dans la mesure ougrave
la promotion du deacuteveloppement en particulier la pleine participation des eacutecono-
mies en deacuteveloppement dans le systegraveme commercial international constitue un
objectif central depuis son lancement en novembre 2001 Degraves le deacutebut des neacutego-
ciations malgreacute toute la rheacutetorique sur le deacuteveloppement il eacutetait eacutevident que
comme les barriegraveres tarifaires srsquoeacutetaient substantiellement reacuteduites au cours des
deacutecennies suivant lrsquoapregraves-guerre de mecircme que les principales barriegraveres quanti tatives
eacutetaient en phase de deacutemantegravelement (du moins partiel) depuis la fin de lrsquoUruguay
Round en 1993 on srsquoapprochait doreacutenavant drsquoenjeux plus controverseacutes ougrave il exis-
tait traditionnellement plus de reacutesistance agrave suivre les regravegles du GATTOMC En
lrsquooccurrence les diffeacuterentes regravegles de protection de la proprieacuteteacute intellectuelle (dans
leur relation avec le commerce) lrsquoouverture des marcheacutes agricoles notamment en
raison de lrsquoentreacutee dans le systegraveme reacutesultant du Round preacuteceacutedent avaient eacuteteacute plus
formelles qursquoeffectives Or preacuteciseacutement lrsquoinclusion des produits agricoles dans ces
regravegles en particulier la reacuteduction des subventions publiques qui introduisent de
graves distorsions dans le commerce mondial de ces biens eacutetait un enjeu qui
inteacuteressait prioritairement de nombreux pays en deacuteveloppement et a fortiori le
Breacutesil en raison des difficulteacutes qursquoils rencontrent agrave tirer profit de leurs avantages
comparatifs Dans une deacuteclaration qui illustre bien la position breacutesilienne sur les
produits agricoles le ministre Celso Amorim estima que
laquo Il est choquant que plus drsquoune cinquantaine drsquoanneacutees apregraves lrsquoeacutetablissement de regravegles
multilateacuterales destineacutees agrave libeacuterer et agrave discipliner le commerce international sous lrsquoeacutegide
du GATT une cateacutegorie de produits drsquoune si grande importance pour les pays en
deacuteveloppement soit resteacutee proteacutegeacutee par des exceptions des subsides et des barriegraveres
de tous ordres raquo18
Crsquoest dans ce cadre en particulier agrave Cancuacuten en septembre 2003 que deux grou-
pes principaux19 se sont formeacutes autour de la question devenue centrale de lrsquoouver-
ture des marcheacutes agricoles (bien entendu cet enjeu eacutetait lieacute agrave drsquoautres lors des
neacutegociations) Drsquoun cocircteacute les Eacutetats-Unis et lrsquoUnion europeacuteenne srsquoopposegraverent agrave
quelques diffeacuterences pregraves et nrsquooffrirent que des concessions marginales en la matiegravere
et de lrsquoautre le G-20 au sein duquel le Breacutesil a joueacute un rocircle deacuteterminant20 qui
souhaita de veacuteritables concessions y compris une reacuteduction sensible des subventions
publiques
18 Valor 9 septembre 2003 AB 19 On ne mentionne que ces deux groupes importants pour notre sujet cependant drsquoautres
se sont formeacutes agrave la confeacuterence de Cancuacuten qui sont resteacutes actifs par la suite pour plus de deacutetails
voir N arlikar 2005 112-113 20 Il est vrai que drsquoautres grandes eacuteconomies eacutemergentes appartiennent aussi au G-20 comme
lrsquoInde la Chine lrsquoAfrique du Sud la Thaiumllande et lrsquoArgentine mais compte tenu de sa position
plus laquo combative raquo et du plus grand inteacuterecirct qursquoil porte sur le sujet le Breacutesil a dans lrsquoensemble
joueacute un des rocircles les plus importants dans les neacutegociations internationales concernant les produits
agricoles
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Apregraves cinq ans de neacutegociations et le deacutepassement de la date limite initialement
poseacutee pour sa conclusion en janvier 2005 le Doha Round a eacuteteacute suspendu sine die
en juillet 2006 sans reacutesultats concrets (le souhait du ministre breacutesilien concernant
les deacutelais nrsquoa donc pas eacuteteacute reacutealiseacute) Face agrave cette situation certains parlent de ce
cycle en termes drsquoeacutechec (par exemple Laborde amp Fontagneacute 2007) Mais si lrsquoon
observe les enjeux et les forces asymeacutetriques en preacutesence lrsquoanalyse doit ecirctre plus
nuanceacutee Il est hors de question de consideacuterer ce Round comme un succegraves et il
serait plus approprieacute drsquoestimer que ce que lrsquoon a perdu crsquoest peut-ecirctre une bataille
et non la guerre (Bhagwati 2004) qui selon toute vraisemblance se prolongera
Dans cette affaire le principal problegraveme reacuteside dans le type de reacuteponse agrave donner
face agrave lrsquoalternative suivante soit obtenir un accord dans un deacutelai relativement
court mais qui ne porte que sur des points secondaires soit obtenir un accord
plus difficilement mais qui porte sur les questions fondamentales comme lrsquoouver-
ture effective des marcheacutes agricoles ce qui serait novateur et repreacutesenterait pro-
bablement des gains consideacuterables pour le commerce mondial Il nrsquoest donc pas
possible de dire que le gouvernement breacutesilien a remporteacute un succegraves dans ce
domaine bien qursquoil ait deacutefini et maintenu une strateacutegie claire (agrave propos de laquelle
par ailleurs il ne semble pas y avoir de divergences significatives entre les prin-
cipales forces politiques breacutesiliennes) pourtant pour que sa voix soit plus creacutedible
dans les neacutegociations il faudrait qursquoil soit conseacutequent dans lrsquoagriculture comme
ailleurs21
Plus geacuteneacuteralement en ce qui concerne les reacutesultats tangibles du Doha Round 22
notamment dans les dossiers laquo sensibles raquo comme lrsquoagriculture il faudrait des condi-
tions internationales plus favorables comme en 199323 lorsque celles-ci ont permis
de sortir des impasses de lrsquoUruguay Round et du North American Free Trade Agreement
(Nafta) ce qui semble aujourdrsquohui assez improbable Par ailleurs plus de cinq ans
21 Drsquoapregraves B hagwati (2004 59) le tarif agricole moyen serait de 12 aux Eacutetats-Unis de
37 au Breacutesil et de 112 en Inde Agrave juste titre cet auteur souligne dans nombre de ses
eacutecrits que les pays en deacuteveloppement demandent aux pays deacuteveloppeacutes la reacuteduction de leurs
tarifs sans ecirctre disposeacutes agrave en faire autant Bien que cela soit vrai en termes absolus Bhagwati
neacuteglige le fait que les premiers depuis les anneacutees 1980 ont souvent reacuteduit plus vite que les
seconds leurs niveaux de protection Par exemple entre le milieu des anneacutees 1980 et lrsquoan 2000
le tarif moyen (tous secteurs) est passeacute de 66 agrave 42 en Europe de 7 agrave 4 aux Eacutetats-
Unis de 44 agrave 17 au Breacutesil et de 80 agrave 32 en Inde la libeacuteralisation unilateacuterale des
pays en deacuteveloppement a eacuteteacute importante depuis le milieu des anneacutees 1980 voir B aldwin 2006
1456 1458-1459 Drsquoautre part les pays en deacuteveloppement ont comparativement moins de pos-
sibiliteacutes de financer drsquoune faccedilon durable drsquoimportants subsides agrave la production et agrave lrsquoexportation
lesquels enfreignent gravement le libre cours des flux du commerce international 22 Deacutebut 2007 plusieurs personnaliteacutes politiques internationales dont le Preacutesident breacutesilien
notamment agrave Davos fin janvier se sont prononceacutees pour la reprise des neacutegociations du Doha
Round cependant rien nrsquoeacutetait encore trancheacute agrave ce sujet au moment de conclure la reacutedaction
de cet article 23 Au deacutebut des anneacutees 1990 peu de temps apregraves la chute du mur de Berlin et drsquoautres
changements majeurs agrave lrsquoeacutechelle mondiale survenus pendant cette peacuteriode lrsquoarriveacutee agrave la Maison
Blanche de lrsquoAdministration Clinton en 1993 alors relativement plus activiste de ce point de
vue a permis le deacuteblocage drsquoun certain nombre drsquoimpasses dans les neacutegociations commerciales
internationales
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ont eacuteteacute neacutecessaires pour que le Tokyo Round (1973-1979) soit conclu plus de sept
ans pour lrsquoUruguay Round (1986-1993) il faudrait donc beaucoup de chance pour
que le Doha Round soit conclu dans un temps plus court compte tenu de son
agenda ndash reconnu par tous comme tregraves difficile ndash des coucircts qursquoil implique agrave court
terme pour des groupes politiquement puissants dans les pays deacuteveloppeacutes sans
compter que lrsquoOMC compte doreacutenavant un nombre bien plus eacuteleveacute de membres
Enfin srsquoagissant de la strateacutegie breacutesilienne dans ce domaine elle ne pourra ecirctre
pleinement eacutevalueacutee que dans les anneacutees agrave venir au vu de ses reacutesultats
Les choix de politique eacutetrangegravere prioriteacutes et indeacutecisions
En ce qui concerne les orientations geacuteostrateacutegiques des relations eacuteconomiques
exteacuterieures plusieurs voies sont possibles qui drsquoailleurs ne srsquoopposent pas neacuteces-
sairement Au-delagrave du multilateacuteralisme (en principe une perspective plus globale
qui nrsquoimplique pas de discrimination commerciale) lrsquointeacutegration eacuteconomique est
orienteacutee vers les pays et les reacutegions proches mais pas exclusivement (reacutegionalisa-
tion) Actuellement la plupart des pays et le Breacutesil ne fait pas exception ont une
politique commerciale baseacutee sur un certain dosage de multilateacuteralisme et
drsquointeacutegration reacutegionale Drsquoautre part outre les deux dimensions preacuteceacutedentes il
peut y avoir des accords bilateacuteraux ou de simples prioriteacutes geacuteographiques sans
aucun engagement pour les autres pays et nrsquoentraicircnant que des mesures unilateacute-
rales pour stimuler les eacutechanges dans les directions deacutesireacutees
Qursquoen est-il des options geacuteostrateacutegiques de la politique commerciale breacutesilienne
Parmi les regroupements qui ont marqueacute cette peacuteriode il faut noter 1) le Mercosul
et le reste de lrsquoAmeacuterique latine 2) les relations Sud-Sud et lrsquoAfrique 3) lrsquoAlca le
Mercoeuro24 ou les deux ce qui pose la question drsquoaccords possibles agrave lrsquoeacutechelle
continentale ou extracontinentale (et entre pays deacuteveloppeacutes et en voie de deacutevelop-
pement) Ces champs drsquoaction sont vastes et varieacutes ce qui nrsquoest pas surprenant
car le commerce exteacuterieur breacutesilien se preacutesente de faccedilon assez diversifieacutee geacuteogra-
phiquement25 Neacuteanmoins pour eacutevaluer les diffeacuterentes voies de renforcement des
liens eacuteconomiques internationaux plus que pour faire le bilan du passeacute il faut
tenir compte de leur potentiel futur notamment agrave moyen terme
Comme nous lrsquoavons deacutejagrave remarqueacute la creacuteation du Mercosul au deacutebut des
anneacutees 1990 a eacuteteacute agrave lrsquoorigine drsquoun laquo grand bond en avant raquo pour la politique
commerciale breacutesilienne et pour lrsquoAmeacuterique latine tout entiegravere dans la mesure ougrave
ce groupement eacutetait plus ambitieux et concret que ceux qui lrsquoavaient preacuteceacutedeacute
(drsquoune certaine maniegravere lrsquoexpeacuterience des quatre pays fondateurs du laquo cocircne sud raquo
24 Terme utiliseacute pour deacutesigner le projet de creacuteation drsquoune zone de libre-eacutechange entre lrsquoUnion
europeacuteenne et le Mercosul (deacutecision du sommet de Madrid en 1995) et la possibiliteacute drsquoun ren-
forcement geacuteneacuteral des liens eacuteconomiques entre les deux blocs voir S ilva 2004 263 25 Distribution du commerce exteacuterieur breacutesilien en 1999-2002 pour les exportations Union
europeacuteenne 263 Eacutetats-Unis 244 Aladi (Association latino-ameacutericaine drsquointeacutegration y
compris le Mercosul) 205 Asie et Moyen-Orient 125 et autres 161 et pour les
importations Union europeacuteenne 274 Eacutetats-Unis 233 Aladi 189 Asie et Moyen-
Orient 154 et autres 15 G onccedilalves 2005 265 et 269
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se rapprochait des pratiques europeacuteennes drsquointeacutegration) Par ailleurs le Breacutesil eacutetant
de loin la plus grande eacuteconomie du bloc son rocircle y fut deacuteterminant agrave maints
eacutegards Du point de vue de ses options geacuteographiques le gouvernement Lula a
nettement accordeacute la prioriteacute au Mercosul et par extension naturelle agrave lrsquoAmeacuterique
latine (Meyer 2005 61) Jusqursquoagrave preacutesent des accords drsquoassociation ont eacuteteacute signeacutes
avec le Chili la Bolivie le Peacuterou la Colombie et lrsquoEacutequateur puis le Venezuela
est devenu un Eacutetat membre en 2006 Cependant malgreacute les premiegraveres anneacutees
favorables le moins que lrsquoon puisse dire est qursquoen raison de diffeacuterents facteurs
dont la grave crise de lrsquoArgentine qui a deacutebuteacute en 1999 et exploseacute en 2001-2002
le Mercosul stagne depuis et a cesseacute drsquoapprofondir son ancrage Chaque Eacutetat
membre srsquoest enfermeacute dans ses problegravemes particuliers et le Mercosul reste un
exemple drsquointeacutegration reacutegionale sans coordination eacuteconomique (Baer et al 2002)
Certes ses liens avec la Communauteacute andine se sont resserreacutes et des neacutegociations
ont eacuteteacute reacutealiseacutees avec drsquoautres pays (le Mexique par exemple) ou drsquoautres groupes
mais leur ampleur reste modeste et compte tenu de lrsquoexpeacuterience drsquointeacutegration de
la reacutegion les espoirs sont reacuteserveacutes Lrsquoimpasse de lrsquoAlca analyseacutee plus loin nrsquoest
pas eacutetrangegravere agrave cette eacutevolution Pour avoir une vue drsquoensemble sur cette option
dirigeacutee vers lrsquoAmeacuterique latine le principal fait agrave retenir est lrsquoentreacutee du Venezuela
dans le Mercosul
Les relations Sud-Sud (hors Ameacuterique latine) sont une autre dimension de la
politique commerciale breacutesilienne qui a pris de lrsquoimportance du moins du point
de vue diplomatique (Meyer 2005) bien que drsquoune faccedilon geacuteneacuterale elles nrsquoaient
pas pris la forme drsquoune inteacutegration reacutegionale Drsquoune part les relations du Breacutesil
avec la Chine lrsquoInde lrsquoAfrique du Sud et drsquoautres eacuteconomies eacutemergentes se sont
deacuteveloppeacutees agrave plusieurs niveaux (multilateacuteraux ou bilateacuteraux) notamment au sein
du G20 accompagnant lrsquointensification rapide des eacutechanges commerciaux Drsquoautre
part le cas de lrsquoAfrique dans son ensemble est particuliegraverement repreacutesentatif de
la tendance Sud-Sud et plusieurs initiatives ont eacuteteacute lanceacutees par le gouvernement
breacutesilien dans le but drsquoun renforcement des relations commerciales avec ce conti-
nent geacuteographiquement proche (Oliveira amp Mouratildeo 2005 Coelho amp Saraiva
2004)
Bien qursquoils repreacutesentent eacutegalement deux orientations importantes de la politique
commerciale breacutesilienne reconnues par le gouvernement Lula lrsquoAlca et le Mercoeuro
nrsquoont pas connu drsquoavanceacutees pratiques significatives pendant cette peacuteriode En outre
comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment ces orientations nrsquoont pas eacuteteacute prioritaires
dans la politique internationale du gouvernement Lula qui favorisait le Doha Round
Srsquoagissant de processus remontant deacutejagrave aux anneacutees 1990 dont lrsquoentreacutee en vigueur
fondamentalement sous la forme drsquoune zone de libre-eacutechange eacutetait initialement
preacutevue pour 2005 lrsquoimpression est qursquoils traicircnent en longueur sans qursquoon puisse
reacuteellement entrevoir la fin des neacutegociations qui nrsquoont pas eacuteteacute abandonneacutees pour
autant Indeacutependamment de la multipliciteacute drsquoacteurs qursquoil faudrait prendre
en compte la question serait de savoir quel degreacute de pression a eacuteteacute exerceacute ndash ou
non ndash par le gouvernement breacutesilien agrave ce sujet LrsquoAlca est apparue drsquoabord comme
une sorte drsquoillustration de ladite theacuteorie des reacutegions naturelles (dans ce cas les
Ameacuteriques de lrsquoAlaska agrave la Terre de Feu) Mais compte tenu de lrsquounilateacuteralisme
traditionnel des Eacutetats-Unis envers lrsquoAmeacuterique latine et de lrsquoeacuteventail limiteacute des
produits inclus dans ces neacutegociations les pays de la reacutegion sont resteacutes reacuteticents agrave
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cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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104 joaquim ramos silva
processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
0
10
20
30
40
50
60
70
80
1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
LUSO 142_1037_86-108indd 104LUSO 142_1037_86-108indd 104 111607 12745 PM111607 12745 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 105
les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
LUSO 142_1037_86-108indd 105LUSO 142_1037_86-108indd 105 111607 12745 PM111607 12745 PM
106 joaquim ramos silva
Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
LUSO 142_1037_86-108indd 106LUSO 142_1037_86-108indd 106 111607 12745 PM111607 12745 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 107
toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 93
rieurs dans des conditions plus favorables) En effet le rapport de la dette exteacuterieure
totale au Produit inteacuterieur brut (PIB) a chuteacute agrave 179 en juin 2006 (alors qursquoil
eacutetait de 459 en 2002) il faut revenir au deacutebut des anneacutees 1970 pour trouver
des chiffres semblables (177 en 1973) En outre il faut souligner le rythme
plus rapide de la reacuteduction de la dette publique son poids dans la dette exteacuterieure
totale eacutetant passeacute de 551 en 2002 agrave 455 en 2006 ( juin)
Tabl II ndash B reacutesil indicateurs de lrsquoendettement exteacuterieur 1999-2006
(en pourcentage)
Service de
la dette
exportations
Service de la
dettePIB
Paiement
drsquointeacuterecircts
exportations
Dette
publique
exteacuterieurePIB
Dette
exteacuterieure
PIB
Dette
exteacuterieure
exportations
1999 1458 130 356 162 420 4699
2000 946 86 310 149 360 3938
2001 869 99 303 182 412 3606
2002 833 109 253 240 459 3491
2003 741 110 210 236 424 2941
2004 537 86 148 190 333 2113
2005 558 83 122 97 213 1434
2006 612 88 119 81 179 1213
Dans ce tableau les rapports au PIB ont eacuteteacute calculeacutes en se fondant sur les donneacutees des
comptes nationaux breacutesiliens pour cette variable avant mars 2007 crsquoest-agrave-dire avant sa reacuteeacuteva-
luation par lrsquoIBGE eacutevoqueacutee plus loin
jusqursquoen juin
Source Banco Central do Brasil
Toutefois ici comme dans le cas de lrsquoappreacuteciation du reacuteal on ne peut exclure de
lrsquoanalyse drsquoautres tendances de lrsquoeacuteconomie mondiale qui ont influenceacute le commerce
de biens breacutesilien en particulier le boom des matiegraveres premiegraveres (agricoles et
mineacuterales) En effet certains produits de base (comme par exemple le cafeacute le
sucre le fer le tourteau de soja et la viande de bœuf cf tableau III) dont le
Breacutesil est un gros exportateur et qui correspondent agrave sa speacutecialisation tradition-
nelle ont geacuteneacuteralement vu leurs cours grimper rapidement pendant cette peacuteriode
Lrsquoeacutemergence drsquoune forte demande chinoise de commodities10 aupregraves du Breacutesil
(figure 3) comme ailleurs a contribueacute agrave cette eacutevolution les exportations breacutesiliennes
vers la Chine ont eacuteteacute multiplieacutees par 8 entre 2000 et 2006 ougrave elles ont atteint
84 milliards de dollars Drsquoun point de vue structurel la capaciteacute agrave bien srsquoajuster
10 On sait qursquoun accroissement relativement faible de la demande peut avoir un effet multi-
plicateur sur les prix (cela est ducirc au fait que leur offre est plutocirct rigide) Plus geacuteneacuteralement on
admet que des variations de lrsquooffre et de la demande (qursquoon suppose aussi fondamentalement
stable) agrave la hausse et agrave la baisse ont des effets amplifieacutes sur les prix des matiegraveres premiegraveres qui
sont par conseacutequent plus volatiles que ceux des produits manufactureacutes
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94 joaquim ramos silva
agrave cette demande mondiale en hausse met en relief un point fort de lrsquoeacuteconomie
breacutesilienne
Tabl III ndash Eacute volution du prix de quelques produits de base
Cafeacute
Tourteau
de soja
Sucre
raffineacute Minerai de fer Viande de bœuf
Cents $lp US$t US$t US$ centst US$arrobe
1999 1259 1467 1758 276 176
2000 665 1954 2452 288 183
2001 462 1438 2395 300 201
2002 602 1673 2082 293 252
2003 611 2310 1845 320 269
2004 1050 1648 2593 379 266
2005 1071 1963 3552 650 227
2006 1082 1745 4000 774 257
Jusqursquoen octobre
Source Banco Central do Brasil et Bolsa de Mercadorias amp Futuros (BM amp F)
En revanche si lrsquoon observe la tendance agrave lrsquoaugmentation du prix mondial des
matiegraveres premiegraveres en termes de monnaie locale les reacutesultats sont plus nuanceacutes
En effet sur la base 100 en 2002 les prix unitaires en monnaie breacutesilienne11 des
cinq commodities du tableau III eacutetaient en 2006 de 756 pour la viande de bœuf
(un des principaux produits de lrsquoexportation breacutesilienne) de 774 pour le tourteau
de soja 1333 pour le cafeacute 1425 pour le sucre raffineacute et de 196 pour le fer
Dans ces circonstances pour quelques produits de base dont la viande de bœuf
et le tourteau de soja de notre seacutelection la hausse de leurs prix en dollars ameacuteri-
cains compte tenu de la deacutepreacuteciation de cette monnaie ne srsquoest pas reacutepercuteacutee
sur les recettes locales Pour obtenir leur augmentation il aurait eacuteteacute neacutecessaire
drsquoaccroicirctre les quantiteacutes exporteacutees de maniegravere agrave compenser les pertes Agrave la fin du
premier mandat cette baisse des rendements aurait creacuteeacute une certaine insatisfaction
de la part des exportateurs concerneacutes notamment dans lrsquoagro-alimentaire breacutesilien
dans la mesure ougrave par exemple ils payent lrsquoessentiel de leurs inputs en monnaie
locale
Eacutetant donneacute la deacutepreacuteciation du dollar et les tendances globales que lrsquoon vient
de signaler la position du Breacutesil dans le commerce mondial de marchandises entre
2002 et 200512 srsquoest ameacutelioreacutee dans lrsquoensemble bien que drsquoune faccedilon deacuteseacutequilibreacutee
11 Les calculs suivants ont eacuteteacute faits en termes drsquoindice de base annuelle fixe en 2002 en
divisant les valeurs preacutesenteacutees dans le tableau III par celles de lrsquoinverse de la seacuterie utiliseacutee dans
la figure 1 (taux de change reacutealUS$) 12 Au moment ougrave nous eacutecrivons deacutebut 2007 lrsquoOMC nrsquoa pas encore deacutelivreacute ses estimations
sur le commerce mondial pour 2006
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 95
plus preacuteciseacutement pour les exportations qui sont passeacutees de 096 agrave 116 et
pour les importations qui sont passeacutees de 075 agrave 072 Si lrsquoon observe
plus attentivement le commerce exteacuterieur breacutesilien on constate aussi que la part
des produits manufactureacutes a deacuteclineacute entre 2000 et 2006 passant de 5905 agrave
543 13 par conseacutequent celle des produits de base et semi-finis a augmenteacute
conduisant agrave ce que Reinaldo Gonccedilalves a appeleacute la laquo reprimarizaccedilatildeo raquo14 (2005 264)
Malgreacute les efforts qui ont eacuteteacute deacuteployeacutes par les gouvernements avant et apregraves 2003
le Breacutesil continue donc agrave eacuteprouver des difficulteacutes agrave aller au-delagrave de ses avantages
comparatifs traditionnels et agrave srsquoimplanter sur de nouveaux creacuteneaux exportateurs
agrave haute valeur ajouteacutee sauf pour quelques exceptions bien connues (dont la con-
struction aeacuteronautique civile lrsquoexploration offshore de peacutetrole et lrsquoindustrie automo-
bile) Dans drsquoautres cas comme celui des biocombustibles le Breacutesil a deacuteveloppeacute
une grande capaciteacute de production aux cours des derniegraveres deacutecennies mais leur
utilisation agrave une eacutechelle globale nrsquoest pas devenue jusqursquoagrave preacutesent une option
nette de la part des principaux consommateurs potentiels Nous reviendrons plus
loin sur ces questions
En reacutesumeacute les principaux indicateurs du secteur exteacuterieur au cours des quatre
premiegraveres anneacutees du gouvernement Lula ont connu une eacutevolution nettement
positive mecircme si les facteurs internationaux sur lesquels le gouvernement nrsquoa pas
13 Gazeta Mercantil 18 janvier 2007 Cette source reprenant une information de la Fundaccedilatildeo
Centro de Estudos do Comeacutercio Exterior (Funcex) ajoute laquo Entre 2000 et 2006 les prix des produits
de base ont augmenteacute de 43 tandis que les produits manufactureacutes nrsquoont augmenteacute que de
22 Aussi la croissance du quanta exporteacute a-t-elle eacuteteacute plus eacuteleveacutee pour les produits de base
(123 ) que pour les produits manufactureacutes (86 ) raquo 14 Tendance des produits primaires agrave regagner du poids dans les exportations breacutesiliennes
Remarquons le problegraveme que repreacutesente la demande chinoise de commodities allieacutee au fait que
ce pays exporte encore principalement des produits low-tech et que les pays deacuteveloppeacutes essaient
de se concentrer sur les produits agrave haute technologie et laissent peu drsquoespace aux pays agrave tech-
nologie moyenne comme le Breacutesil
Fig 3 Commerce Breacutesil-Chine 1999-2006
Millions US Dollars
0
2000
4000
6000
8000
10000
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Exportations ImportationsSource Secex
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drsquoinfluence ont joueacute un rocircle non neacutegligeable dans ces performances Il srsquoagit
surtout de lrsquoeacutevolution du marcheacute mondial des matiegraveres premiegraveres dont les prix
ont eacuteteacute agrave la hausse le Breacutesil en eacutetant lrsquoun des principaux fournisseurs Drsquoautre
part au niveau inteacuterieur comme la faible croissance nrsquoa pas tireacute les importations
vers le haut ces diffeacuterentes tendances ont permis en 2003-2006 lrsquoaccumulation
drsquoun surplus substantiel de la balance commerciale (mecircme lrsquoappreacuteciation du reacuteal
nrsquoa pu lrsquoempecirccher) Pourtant un renversement de tendance pourrait survenir et
reacuteveacuteler des fragiliteacutes dans le secteur exteacuterieur breacutesilien En particulier en admettant
mecircme que la phase actuelle de boom du cycle des matiegraveres premiegraveres soit relati-
vement longue (agrave cause de lrsquoentreacutee de la Chine et de lrsquoInde dans ce marcheacute) elle
aura certainement des limites agrave un moment donneacute Enfin la politique de change
la composition du commerce de marchandises et la position breacutesilienne dans le
commerce mondial ne sont pas devenues substantiellement diffeacuterentes de la situa-
tion preacuteceacutedente15 mecircme si les poleacutemiques concernant la nature de leur eacutevolution
se poursuivent
Les relations avec les organisations eacuteconomiques internationales le deacutefi des neacutegociations du Doha Round
Comme agrave drsquoautres niveaux clarifier la politique du gouvernement breacutesilien de
Lula dans ce domaine nrsquoest pas facile Lrsquoeacutevolution des organisations eacuteconomiques
internationales reacutepond agrave un certain nombre de facteurs que les gouvernements
nationaux ont du mal agrave influencer sans parler du rythme souvent tregraves lent de
la complexiteacute des neacutegociations et des marchandages pas forceacutement tregraves transpa-
rents Neacuteanmoins on peut tenter de preacuteciser les contours speacutecifiques de lrsquoaction
du gouvernement Lula dans ce domaine fondamental de la politique commerciale
Citons tout drsquoabord les deacuteclarations du ministre des Affaires eacutetrangegraveres Celso
Amorim au milieu du mandat preacutesidentiel
laquo Les accords sur les trois fronts de neacutegociation commerciale dans lesquels le Breacutesil
est simultaneacutement engageacute ndash le Doha Round de lrsquoOrganisation mondiale du commerce
la Zone de libre-eacutechange des Ameacuteriques16 (Alca) et le Mercosul-Union Europeacuteenne ndash
doivent ecirctre conclus dans un deacutelai drsquoun an et demi raquo17
Notons qursquoelles donnent la prioriteacute aux neacutegociations au sein de lrsquoOMC (Mouratildeo
2005) Compte tenu de leur position clef dans lrsquoensemble de la politique com-
merciale du gouvernement Lula agrave lrsquoeacutechelle internationale il faut drsquoabord examiner
les relations avec lrsquoOMC crsquoest-agrave-dire au niveau multilateacuteral ayant comme centre
le Doha Round pour ensuite passer en revue les questions relatives agrave lrsquointeacutegration
15 Plus geacuteneacuteralement C arneiro (2006 9) considegravere que laquo la peacuteriode 2003-2005 en ce qui
concerne le gouvernement Lula ne se diffeacuterencie pas exception faite drsquoeacuteventuelles diffeacuterences
de gestion de celle correspondant aux anneacutees 1999-2002 car ces politiques ont eu comme
fondement un reacutegime combinant lrsquoinflation le change flottant et la contraction fiscale raquo 16 Zone de libre-eacutechange (ZLEA) plus connu sous le sigle Alca Aacuterea de Livre Comeacutercio das
Ameacutericas 17 O Estado de Satildeo Paulo 3 deacutecembre 2004 B12
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 97
eacuteconomique (Mercosul Alca et relations avec lrsquoUnion europeacuteenne) et autres ques-
tions geacuteostrateacutegiques comme les relations Sud-Sud
Le cycle de neacutegociations du Doha Round est tregraves important dans la mesure ougrave
la promotion du deacuteveloppement en particulier la pleine participation des eacutecono-
mies en deacuteveloppement dans le systegraveme commercial international constitue un
objectif central depuis son lancement en novembre 2001 Degraves le deacutebut des neacutego-
ciations malgreacute toute la rheacutetorique sur le deacuteveloppement il eacutetait eacutevident que
comme les barriegraveres tarifaires srsquoeacutetaient substantiellement reacuteduites au cours des
deacutecennies suivant lrsquoapregraves-guerre de mecircme que les principales barriegraveres quanti tatives
eacutetaient en phase de deacutemantegravelement (du moins partiel) depuis la fin de lrsquoUruguay
Round en 1993 on srsquoapprochait doreacutenavant drsquoenjeux plus controverseacutes ougrave il exis-
tait traditionnellement plus de reacutesistance agrave suivre les regravegles du GATTOMC En
lrsquooccurrence les diffeacuterentes regravegles de protection de la proprieacuteteacute intellectuelle (dans
leur relation avec le commerce) lrsquoouverture des marcheacutes agricoles notamment en
raison de lrsquoentreacutee dans le systegraveme reacutesultant du Round preacuteceacutedent avaient eacuteteacute plus
formelles qursquoeffectives Or preacuteciseacutement lrsquoinclusion des produits agricoles dans ces
regravegles en particulier la reacuteduction des subventions publiques qui introduisent de
graves distorsions dans le commerce mondial de ces biens eacutetait un enjeu qui
inteacuteressait prioritairement de nombreux pays en deacuteveloppement et a fortiori le
Breacutesil en raison des difficulteacutes qursquoils rencontrent agrave tirer profit de leurs avantages
comparatifs Dans une deacuteclaration qui illustre bien la position breacutesilienne sur les
produits agricoles le ministre Celso Amorim estima que
laquo Il est choquant que plus drsquoune cinquantaine drsquoanneacutees apregraves lrsquoeacutetablissement de regravegles
multilateacuterales destineacutees agrave libeacuterer et agrave discipliner le commerce international sous lrsquoeacutegide
du GATT une cateacutegorie de produits drsquoune si grande importance pour les pays en
deacuteveloppement soit resteacutee proteacutegeacutee par des exceptions des subsides et des barriegraveres
de tous ordres raquo18
Crsquoest dans ce cadre en particulier agrave Cancuacuten en septembre 2003 que deux grou-
pes principaux19 se sont formeacutes autour de la question devenue centrale de lrsquoouver-
ture des marcheacutes agricoles (bien entendu cet enjeu eacutetait lieacute agrave drsquoautres lors des
neacutegociations) Drsquoun cocircteacute les Eacutetats-Unis et lrsquoUnion europeacuteenne srsquoopposegraverent agrave
quelques diffeacuterences pregraves et nrsquooffrirent que des concessions marginales en la matiegravere
et de lrsquoautre le G-20 au sein duquel le Breacutesil a joueacute un rocircle deacuteterminant20 qui
souhaita de veacuteritables concessions y compris une reacuteduction sensible des subventions
publiques
18 Valor 9 septembre 2003 AB 19 On ne mentionne que ces deux groupes importants pour notre sujet cependant drsquoautres
se sont formeacutes agrave la confeacuterence de Cancuacuten qui sont resteacutes actifs par la suite pour plus de deacutetails
voir N arlikar 2005 112-113 20 Il est vrai que drsquoautres grandes eacuteconomies eacutemergentes appartiennent aussi au G-20 comme
lrsquoInde la Chine lrsquoAfrique du Sud la Thaiumllande et lrsquoArgentine mais compte tenu de sa position
plus laquo combative raquo et du plus grand inteacuterecirct qursquoil porte sur le sujet le Breacutesil a dans lrsquoensemble
joueacute un des rocircles les plus importants dans les neacutegociations internationales concernant les produits
agricoles
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Apregraves cinq ans de neacutegociations et le deacutepassement de la date limite initialement
poseacutee pour sa conclusion en janvier 2005 le Doha Round a eacuteteacute suspendu sine die
en juillet 2006 sans reacutesultats concrets (le souhait du ministre breacutesilien concernant
les deacutelais nrsquoa donc pas eacuteteacute reacutealiseacute) Face agrave cette situation certains parlent de ce
cycle en termes drsquoeacutechec (par exemple Laborde amp Fontagneacute 2007) Mais si lrsquoon
observe les enjeux et les forces asymeacutetriques en preacutesence lrsquoanalyse doit ecirctre plus
nuanceacutee Il est hors de question de consideacuterer ce Round comme un succegraves et il
serait plus approprieacute drsquoestimer que ce que lrsquoon a perdu crsquoest peut-ecirctre une bataille
et non la guerre (Bhagwati 2004) qui selon toute vraisemblance se prolongera
Dans cette affaire le principal problegraveme reacuteside dans le type de reacuteponse agrave donner
face agrave lrsquoalternative suivante soit obtenir un accord dans un deacutelai relativement
court mais qui ne porte que sur des points secondaires soit obtenir un accord
plus difficilement mais qui porte sur les questions fondamentales comme lrsquoouver-
ture effective des marcheacutes agricoles ce qui serait novateur et repreacutesenterait pro-
bablement des gains consideacuterables pour le commerce mondial Il nrsquoest donc pas
possible de dire que le gouvernement breacutesilien a remporteacute un succegraves dans ce
domaine bien qursquoil ait deacutefini et maintenu une strateacutegie claire (agrave propos de laquelle
par ailleurs il ne semble pas y avoir de divergences significatives entre les prin-
cipales forces politiques breacutesiliennes) pourtant pour que sa voix soit plus creacutedible
dans les neacutegociations il faudrait qursquoil soit conseacutequent dans lrsquoagriculture comme
ailleurs21
Plus geacuteneacuteralement en ce qui concerne les reacutesultats tangibles du Doha Round 22
notamment dans les dossiers laquo sensibles raquo comme lrsquoagriculture il faudrait des condi-
tions internationales plus favorables comme en 199323 lorsque celles-ci ont permis
de sortir des impasses de lrsquoUruguay Round et du North American Free Trade Agreement
(Nafta) ce qui semble aujourdrsquohui assez improbable Par ailleurs plus de cinq ans
21 Drsquoapregraves B hagwati (2004 59) le tarif agricole moyen serait de 12 aux Eacutetats-Unis de
37 au Breacutesil et de 112 en Inde Agrave juste titre cet auteur souligne dans nombre de ses
eacutecrits que les pays en deacuteveloppement demandent aux pays deacuteveloppeacutes la reacuteduction de leurs
tarifs sans ecirctre disposeacutes agrave en faire autant Bien que cela soit vrai en termes absolus Bhagwati
neacuteglige le fait que les premiers depuis les anneacutees 1980 ont souvent reacuteduit plus vite que les
seconds leurs niveaux de protection Par exemple entre le milieu des anneacutees 1980 et lrsquoan 2000
le tarif moyen (tous secteurs) est passeacute de 66 agrave 42 en Europe de 7 agrave 4 aux Eacutetats-
Unis de 44 agrave 17 au Breacutesil et de 80 agrave 32 en Inde la libeacuteralisation unilateacuterale des
pays en deacuteveloppement a eacuteteacute importante depuis le milieu des anneacutees 1980 voir B aldwin 2006
1456 1458-1459 Drsquoautre part les pays en deacuteveloppement ont comparativement moins de pos-
sibiliteacutes de financer drsquoune faccedilon durable drsquoimportants subsides agrave la production et agrave lrsquoexportation
lesquels enfreignent gravement le libre cours des flux du commerce international 22 Deacutebut 2007 plusieurs personnaliteacutes politiques internationales dont le Preacutesident breacutesilien
notamment agrave Davos fin janvier se sont prononceacutees pour la reprise des neacutegociations du Doha
Round cependant rien nrsquoeacutetait encore trancheacute agrave ce sujet au moment de conclure la reacutedaction
de cet article 23 Au deacutebut des anneacutees 1990 peu de temps apregraves la chute du mur de Berlin et drsquoautres
changements majeurs agrave lrsquoeacutechelle mondiale survenus pendant cette peacuteriode lrsquoarriveacutee agrave la Maison
Blanche de lrsquoAdministration Clinton en 1993 alors relativement plus activiste de ce point de
vue a permis le deacuteblocage drsquoun certain nombre drsquoimpasses dans les neacutegociations commerciales
internationales
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ont eacuteteacute neacutecessaires pour que le Tokyo Round (1973-1979) soit conclu plus de sept
ans pour lrsquoUruguay Round (1986-1993) il faudrait donc beaucoup de chance pour
que le Doha Round soit conclu dans un temps plus court compte tenu de son
agenda ndash reconnu par tous comme tregraves difficile ndash des coucircts qursquoil implique agrave court
terme pour des groupes politiquement puissants dans les pays deacuteveloppeacutes sans
compter que lrsquoOMC compte doreacutenavant un nombre bien plus eacuteleveacute de membres
Enfin srsquoagissant de la strateacutegie breacutesilienne dans ce domaine elle ne pourra ecirctre
pleinement eacutevalueacutee que dans les anneacutees agrave venir au vu de ses reacutesultats
Les choix de politique eacutetrangegravere prioriteacutes et indeacutecisions
En ce qui concerne les orientations geacuteostrateacutegiques des relations eacuteconomiques
exteacuterieures plusieurs voies sont possibles qui drsquoailleurs ne srsquoopposent pas neacuteces-
sairement Au-delagrave du multilateacuteralisme (en principe une perspective plus globale
qui nrsquoimplique pas de discrimination commerciale) lrsquointeacutegration eacuteconomique est
orienteacutee vers les pays et les reacutegions proches mais pas exclusivement (reacutegionalisa-
tion) Actuellement la plupart des pays et le Breacutesil ne fait pas exception ont une
politique commerciale baseacutee sur un certain dosage de multilateacuteralisme et
drsquointeacutegration reacutegionale Drsquoautre part outre les deux dimensions preacuteceacutedentes il
peut y avoir des accords bilateacuteraux ou de simples prioriteacutes geacuteographiques sans
aucun engagement pour les autres pays et nrsquoentraicircnant que des mesures unilateacute-
rales pour stimuler les eacutechanges dans les directions deacutesireacutees
Qursquoen est-il des options geacuteostrateacutegiques de la politique commerciale breacutesilienne
Parmi les regroupements qui ont marqueacute cette peacuteriode il faut noter 1) le Mercosul
et le reste de lrsquoAmeacuterique latine 2) les relations Sud-Sud et lrsquoAfrique 3) lrsquoAlca le
Mercoeuro24 ou les deux ce qui pose la question drsquoaccords possibles agrave lrsquoeacutechelle
continentale ou extracontinentale (et entre pays deacuteveloppeacutes et en voie de deacutevelop-
pement) Ces champs drsquoaction sont vastes et varieacutes ce qui nrsquoest pas surprenant
car le commerce exteacuterieur breacutesilien se preacutesente de faccedilon assez diversifieacutee geacuteogra-
phiquement25 Neacuteanmoins pour eacutevaluer les diffeacuterentes voies de renforcement des
liens eacuteconomiques internationaux plus que pour faire le bilan du passeacute il faut
tenir compte de leur potentiel futur notamment agrave moyen terme
Comme nous lrsquoavons deacutejagrave remarqueacute la creacuteation du Mercosul au deacutebut des
anneacutees 1990 a eacuteteacute agrave lrsquoorigine drsquoun laquo grand bond en avant raquo pour la politique
commerciale breacutesilienne et pour lrsquoAmeacuterique latine tout entiegravere dans la mesure ougrave
ce groupement eacutetait plus ambitieux et concret que ceux qui lrsquoavaient preacuteceacutedeacute
(drsquoune certaine maniegravere lrsquoexpeacuterience des quatre pays fondateurs du laquo cocircne sud raquo
24 Terme utiliseacute pour deacutesigner le projet de creacuteation drsquoune zone de libre-eacutechange entre lrsquoUnion
europeacuteenne et le Mercosul (deacutecision du sommet de Madrid en 1995) et la possibiliteacute drsquoun ren-
forcement geacuteneacuteral des liens eacuteconomiques entre les deux blocs voir S ilva 2004 263 25 Distribution du commerce exteacuterieur breacutesilien en 1999-2002 pour les exportations Union
europeacuteenne 263 Eacutetats-Unis 244 Aladi (Association latino-ameacutericaine drsquointeacutegration y
compris le Mercosul) 205 Asie et Moyen-Orient 125 et autres 161 et pour les
importations Union europeacuteenne 274 Eacutetats-Unis 233 Aladi 189 Asie et Moyen-
Orient 154 et autres 15 G onccedilalves 2005 265 et 269
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se rapprochait des pratiques europeacuteennes drsquointeacutegration) Par ailleurs le Breacutesil eacutetant
de loin la plus grande eacuteconomie du bloc son rocircle y fut deacuteterminant agrave maints
eacutegards Du point de vue de ses options geacuteographiques le gouvernement Lula a
nettement accordeacute la prioriteacute au Mercosul et par extension naturelle agrave lrsquoAmeacuterique
latine (Meyer 2005 61) Jusqursquoagrave preacutesent des accords drsquoassociation ont eacuteteacute signeacutes
avec le Chili la Bolivie le Peacuterou la Colombie et lrsquoEacutequateur puis le Venezuela
est devenu un Eacutetat membre en 2006 Cependant malgreacute les premiegraveres anneacutees
favorables le moins que lrsquoon puisse dire est qursquoen raison de diffeacuterents facteurs
dont la grave crise de lrsquoArgentine qui a deacutebuteacute en 1999 et exploseacute en 2001-2002
le Mercosul stagne depuis et a cesseacute drsquoapprofondir son ancrage Chaque Eacutetat
membre srsquoest enfermeacute dans ses problegravemes particuliers et le Mercosul reste un
exemple drsquointeacutegration reacutegionale sans coordination eacuteconomique (Baer et al 2002)
Certes ses liens avec la Communauteacute andine se sont resserreacutes et des neacutegociations
ont eacuteteacute reacutealiseacutees avec drsquoautres pays (le Mexique par exemple) ou drsquoautres groupes
mais leur ampleur reste modeste et compte tenu de lrsquoexpeacuterience drsquointeacutegration de
la reacutegion les espoirs sont reacuteserveacutes Lrsquoimpasse de lrsquoAlca analyseacutee plus loin nrsquoest
pas eacutetrangegravere agrave cette eacutevolution Pour avoir une vue drsquoensemble sur cette option
dirigeacutee vers lrsquoAmeacuterique latine le principal fait agrave retenir est lrsquoentreacutee du Venezuela
dans le Mercosul
Les relations Sud-Sud (hors Ameacuterique latine) sont une autre dimension de la
politique commerciale breacutesilienne qui a pris de lrsquoimportance du moins du point
de vue diplomatique (Meyer 2005) bien que drsquoune faccedilon geacuteneacuterale elles nrsquoaient
pas pris la forme drsquoune inteacutegration reacutegionale Drsquoune part les relations du Breacutesil
avec la Chine lrsquoInde lrsquoAfrique du Sud et drsquoautres eacuteconomies eacutemergentes se sont
deacuteveloppeacutees agrave plusieurs niveaux (multilateacuteraux ou bilateacuteraux) notamment au sein
du G20 accompagnant lrsquointensification rapide des eacutechanges commerciaux Drsquoautre
part le cas de lrsquoAfrique dans son ensemble est particuliegraverement repreacutesentatif de
la tendance Sud-Sud et plusieurs initiatives ont eacuteteacute lanceacutees par le gouvernement
breacutesilien dans le but drsquoun renforcement des relations commerciales avec ce conti-
nent geacuteographiquement proche (Oliveira amp Mouratildeo 2005 Coelho amp Saraiva
2004)
Bien qursquoils repreacutesentent eacutegalement deux orientations importantes de la politique
commerciale breacutesilienne reconnues par le gouvernement Lula lrsquoAlca et le Mercoeuro
nrsquoont pas connu drsquoavanceacutees pratiques significatives pendant cette peacuteriode En outre
comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment ces orientations nrsquoont pas eacuteteacute prioritaires
dans la politique internationale du gouvernement Lula qui favorisait le Doha Round
Srsquoagissant de processus remontant deacutejagrave aux anneacutees 1990 dont lrsquoentreacutee en vigueur
fondamentalement sous la forme drsquoune zone de libre-eacutechange eacutetait initialement
preacutevue pour 2005 lrsquoimpression est qursquoils traicircnent en longueur sans qursquoon puisse
reacuteellement entrevoir la fin des neacutegociations qui nrsquoont pas eacuteteacute abandonneacutees pour
autant Indeacutependamment de la multipliciteacute drsquoacteurs qursquoil faudrait prendre
en compte la question serait de savoir quel degreacute de pression a eacuteteacute exerceacute ndash ou
non ndash par le gouvernement breacutesilien agrave ce sujet LrsquoAlca est apparue drsquoabord comme
une sorte drsquoillustration de ladite theacuteorie des reacutegions naturelles (dans ce cas les
Ameacuteriques de lrsquoAlaska agrave la Terre de Feu) Mais compte tenu de lrsquounilateacuteralisme
traditionnel des Eacutetats-Unis envers lrsquoAmeacuterique latine et de lrsquoeacuteventail limiteacute des
produits inclus dans ces neacutegociations les pays de la reacutegion sont resteacutes reacuteticents agrave
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cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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104 joaquim ramos silva
processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
0
10
20
30
40
50
60
70
80
1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
LUSO 142_1037_86-108indd 104LUSO 142_1037_86-108indd 104 111607 12745 PM111607 12745 PM
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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106 joaquim ramos silva
Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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94 joaquim ramos silva
agrave cette demande mondiale en hausse met en relief un point fort de lrsquoeacuteconomie
breacutesilienne
Tabl III ndash Eacute volution du prix de quelques produits de base
Cafeacute
Tourteau
de soja
Sucre
raffineacute Minerai de fer Viande de bœuf
Cents $lp US$t US$t US$ centst US$arrobe
1999 1259 1467 1758 276 176
2000 665 1954 2452 288 183
2001 462 1438 2395 300 201
2002 602 1673 2082 293 252
2003 611 2310 1845 320 269
2004 1050 1648 2593 379 266
2005 1071 1963 3552 650 227
2006 1082 1745 4000 774 257
Jusqursquoen octobre
Source Banco Central do Brasil et Bolsa de Mercadorias amp Futuros (BM amp F)
En revanche si lrsquoon observe la tendance agrave lrsquoaugmentation du prix mondial des
matiegraveres premiegraveres en termes de monnaie locale les reacutesultats sont plus nuanceacutes
En effet sur la base 100 en 2002 les prix unitaires en monnaie breacutesilienne11 des
cinq commodities du tableau III eacutetaient en 2006 de 756 pour la viande de bœuf
(un des principaux produits de lrsquoexportation breacutesilienne) de 774 pour le tourteau
de soja 1333 pour le cafeacute 1425 pour le sucre raffineacute et de 196 pour le fer
Dans ces circonstances pour quelques produits de base dont la viande de bœuf
et le tourteau de soja de notre seacutelection la hausse de leurs prix en dollars ameacuteri-
cains compte tenu de la deacutepreacuteciation de cette monnaie ne srsquoest pas reacutepercuteacutee
sur les recettes locales Pour obtenir leur augmentation il aurait eacuteteacute neacutecessaire
drsquoaccroicirctre les quantiteacutes exporteacutees de maniegravere agrave compenser les pertes Agrave la fin du
premier mandat cette baisse des rendements aurait creacuteeacute une certaine insatisfaction
de la part des exportateurs concerneacutes notamment dans lrsquoagro-alimentaire breacutesilien
dans la mesure ougrave par exemple ils payent lrsquoessentiel de leurs inputs en monnaie
locale
Eacutetant donneacute la deacutepreacuteciation du dollar et les tendances globales que lrsquoon vient
de signaler la position du Breacutesil dans le commerce mondial de marchandises entre
2002 et 200512 srsquoest ameacutelioreacutee dans lrsquoensemble bien que drsquoune faccedilon deacuteseacutequilibreacutee
11 Les calculs suivants ont eacuteteacute faits en termes drsquoindice de base annuelle fixe en 2002 en
divisant les valeurs preacutesenteacutees dans le tableau III par celles de lrsquoinverse de la seacuterie utiliseacutee dans
la figure 1 (taux de change reacutealUS$) 12 Au moment ougrave nous eacutecrivons deacutebut 2007 lrsquoOMC nrsquoa pas encore deacutelivreacute ses estimations
sur le commerce mondial pour 2006
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 95
plus preacuteciseacutement pour les exportations qui sont passeacutees de 096 agrave 116 et
pour les importations qui sont passeacutees de 075 agrave 072 Si lrsquoon observe
plus attentivement le commerce exteacuterieur breacutesilien on constate aussi que la part
des produits manufactureacutes a deacuteclineacute entre 2000 et 2006 passant de 5905 agrave
543 13 par conseacutequent celle des produits de base et semi-finis a augmenteacute
conduisant agrave ce que Reinaldo Gonccedilalves a appeleacute la laquo reprimarizaccedilatildeo raquo14 (2005 264)
Malgreacute les efforts qui ont eacuteteacute deacuteployeacutes par les gouvernements avant et apregraves 2003
le Breacutesil continue donc agrave eacuteprouver des difficulteacutes agrave aller au-delagrave de ses avantages
comparatifs traditionnels et agrave srsquoimplanter sur de nouveaux creacuteneaux exportateurs
agrave haute valeur ajouteacutee sauf pour quelques exceptions bien connues (dont la con-
struction aeacuteronautique civile lrsquoexploration offshore de peacutetrole et lrsquoindustrie automo-
bile) Dans drsquoautres cas comme celui des biocombustibles le Breacutesil a deacuteveloppeacute
une grande capaciteacute de production aux cours des derniegraveres deacutecennies mais leur
utilisation agrave une eacutechelle globale nrsquoest pas devenue jusqursquoagrave preacutesent une option
nette de la part des principaux consommateurs potentiels Nous reviendrons plus
loin sur ces questions
En reacutesumeacute les principaux indicateurs du secteur exteacuterieur au cours des quatre
premiegraveres anneacutees du gouvernement Lula ont connu une eacutevolution nettement
positive mecircme si les facteurs internationaux sur lesquels le gouvernement nrsquoa pas
13 Gazeta Mercantil 18 janvier 2007 Cette source reprenant une information de la Fundaccedilatildeo
Centro de Estudos do Comeacutercio Exterior (Funcex) ajoute laquo Entre 2000 et 2006 les prix des produits
de base ont augmenteacute de 43 tandis que les produits manufactureacutes nrsquoont augmenteacute que de
22 Aussi la croissance du quanta exporteacute a-t-elle eacuteteacute plus eacuteleveacutee pour les produits de base
(123 ) que pour les produits manufactureacutes (86 ) raquo 14 Tendance des produits primaires agrave regagner du poids dans les exportations breacutesiliennes
Remarquons le problegraveme que repreacutesente la demande chinoise de commodities allieacutee au fait que
ce pays exporte encore principalement des produits low-tech et que les pays deacuteveloppeacutes essaient
de se concentrer sur les produits agrave haute technologie et laissent peu drsquoespace aux pays agrave tech-
nologie moyenne comme le Breacutesil
Fig 3 Commerce Breacutesil-Chine 1999-2006
Millions US Dollars
0
2000
4000
6000
8000
10000
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Exportations ImportationsSource Secex
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drsquoinfluence ont joueacute un rocircle non neacutegligeable dans ces performances Il srsquoagit
surtout de lrsquoeacutevolution du marcheacute mondial des matiegraveres premiegraveres dont les prix
ont eacuteteacute agrave la hausse le Breacutesil en eacutetant lrsquoun des principaux fournisseurs Drsquoautre
part au niveau inteacuterieur comme la faible croissance nrsquoa pas tireacute les importations
vers le haut ces diffeacuterentes tendances ont permis en 2003-2006 lrsquoaccumulation
drsquoun surplus substantiel de la balance commerciale (mecircme lrsquoappreacuteciation du reacuteal
nrsquoa pu lrsquoempecirccher) Pourtant un renversement de tendance pourrait survenir et
reacuteveacuteler des fragiliteacutes dans le secteur exteacuterieur breacutesilien En particulier en admettant
mecircme que la phase actuelle de boom du cycle des matiegraveres premiegraveres soit relati-
vement longue (agrave cause de lrsquoentreacutee de la Chine et de lrsquoInde dans ce marcheacute) elle
aura certainement des limites agrave un moment donneacute Enfin la politique de change
la composition du commerce de marchandises et la position breacutesilienne dans le
commerce mondial ne sont pas devenues substantiellement diffeacuterentes de la situa-
tion preacuteceacutedente15 mecircme si les poleacutemiques concernant la nature de leur eacutevolution
se poursuivent
Les relations avec les organisations eacuteconomiques internationales le deacutefi des neacutegociations du Doha Round
Comme agrave drsquoautres niveaux clarifier la politique du gouvernement breacutesilien de
Lula dans ce domaine nrsquoest pas facile Lrsquoeacutevolution des organisations eacuteconomiques
internationales reacutepond agrave un certain nombre de facteurs que les gouvernements
nationaux ont du mal agrave influencer sans parler du rythme souvent tregraves lent de
la complexiteacute des neacutegociations et des marchandages pas forceacutement tregraves transpa-
rents Neacuteanmoins on peut tenter de preacuteciser les contours speacutecifiques de lrsquoaction
du gouvernement Lula dans ce domaine fondamental de la politique commerciale
Citons tout drsquoabord les deacuteclarations du ministre des Affaires eacutetrangegraveres Celso
Amorim au milieu du mandat preacutesidentiel
laquo Les accords sur les trois fronts de neacutegociation commerciale dans lesquels le Breacutesil
est simultaneacutement engageacute ndash le Doha Round de lrsquoOrganisation mondiale du commerce
la Zone de libre-eacutechange des Ameacuteriques16 (Alca) et le Mercosul-Union Europeacuteenne ndash
doivent ecirctre conclus dans un deacutelai drsquoun an et demi raquo17
Notons qursquoelles donnent la prioriteacute aux neacutegociations au sein de lrsquoOMC (Mouratildeo
2005) Compte tenu de leur position clef dans lrsquoensemble de la politique com-
merciale du gouvernement Lula agrave lrsquoeacutechelle internationale il faut drsquoabord examiner
les relations avec lrsquoOMC crsquoest-agrave-dire au niveau multilateacuteral ayant comme centre
le Doha Round pour ensuite passer en revue les questions relatives agrave lrsquointeacutegration
15 Plus geacuteneacuteralement C arneiro (2006 9) considegravere que laquo la peacuteriode 2003-2005 en ce qui
concerne le gouvernement Lula ne se diffeacuterencie pas exception faite drsquoeacuteventuelles diffeacuterences
de gestion de celle correspondant aux anneacutees 1999-2002 car ces politiques ont eu comme
fondement un reacutegime combinant lrsquoinflation le change flottant et la contraction fiscale raquo 16 Zone de libre-eacutechange (ZLEA) plus connu sous le sigle Alca Aacuterea de Livre Comeacutercio das
Ameacutericas 17 O Estado de Satildeo Paulo 3 deacutecembre 2004 B12
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 97
eacuteconomique (Mercosul Alca et relations avec lrsquoUnion europeacuteenne) et autres ques-
tions geacuteostrateacutegiques comme les relations Sud-Sud
Le cycle de neacutegociations du Doha Round est tregraves important dans la mesure ougrave
la promotion du deacuteveloppement en particulier la pleine participation des eacutecono-
mies en deacuteveloppement dans le systegraveme commercial international constitue un
objectif central depuis son lancement en novembre 2001 Degraves le deacutebut des neacutego-
ciations malgreacute toute la rheacutetorique sur le deacuteveloppement il eacutetait eacutevident que
comme les barriegraveres tarifaires srsquoeacutetaient substantiellement reacuteduites au cours des
deacutecennies suivant lrsquoapregraves-guerre de mecircme que les principales barriegraveres quanti tatives
eacutetaient en phase de deacutemantegravelement (du moins partiel) depuis la fin de lrsquoUruguay
Round en 1993 on srsquoapprochait doreacutenavant drsquoenjeux plus controverseacutes ougrave il exis-
tait traditionnellement plus de reacutesistance agrave suivre les regravegles du GATTOMC En
lrsquooccurrence les diffeacuterentes regravegles de protection de la proprieacuteteacute intellectuelle (dans
leur relation avec le commerce) lrsquoouverture des marcheacutes agricoles notamment en
raison de lrsquoentreacutee dans le systegraveme reacutesultant du Round preacuteceacutedent avaient eacuteteacute plus
formelles qursquoeffectives Or preacuteciseacutement lrsquoinclusion des produits agricoles dans ces
regravegles en particulier la reacuteduction des subventions publiques qui introduisent de
graves distorsions dans le commerce mondial de ces biens eacutetait un enjeu qui
inteacuteressait prioritairement de nombreux pays en deacuteveloppement et a fortiori le
Breacutesil en raison des difficulteacutes qursquoils rencontrent agrave tirer profit de leurs avantages
comparatifs Dans une deacuteclaration qui illustre bien la position breacutesilienne sur les
produits agricoles le ministre Celso Amorim estima que
laquo Il est choquant que plus drsquoune cinquantaine drsquoanneacutees apregraves lrsquoeacutetablissement de regravegles
multilateacuterales destineacutees agrave libeacuterer et agrave discipliner le commerce international sous lrsquoeacutegide
du GATT une cateacutegorie de produits drsquoune si grande importance pour les pays en
deacuteveloppement soit resteacutee proteacutegeacutee par des exceptions des subsides et des barriegraveres
de tous ordres raquo18
Crsquoest dans ce cadre en particulier agrave Cancuacuten en septembre 2003 que deux grou-
pes principaux19 se sont formeacutes autour de la question devenue centrale de lrsquoouver-
ture des marcheacutes agricoles (bien entendu cet enjeu eacutetait lieacute agrave drsquoautres lors des
neacutegociations) Drsquoun cocircteacute les Eacutetats-Unis et lrsquoUnion europeacuteenne srsquoopposegraverent agrave
quelques diffeacuterences pregraves et nrsquooffrirent que des concessions marginales en la matiegravere
et de lrsquoautre le G-20 au sein duquel le Breacutesil a joueacute un rocircle deacuteterminant20 qui
souhaita de veacuteritables concessions y compris une reacuteduction sensible des subventions
publiques
18 Valor 9 septembre 2003 AB 19 On ne mentionne que ces deux groupes importants pour notre sujet cependant drsquoautres
se sont formeacutes agrave la confeacuterence de Cancuacuten qui sont resteacutes actifs par la suite pour plus de deacutetails
voir N arlikar 2005 112-113 20 Il est vrai que drsquoautres grandes eacuteconomies eacutemergentes appartiennent aussi au G-20 comme
lrsquoInde la Chine lrsquoAfrique du Sud la Thaiumllande et lrsquoArgentine mais compte tenu de sa position
plus laquo combative raquo et du plus grand inteacuterecirct qursquoil porte sur le sujet le Breacutesil a dans lrsquoensemble
joueacute un des rocircles les plus importants dans les neacutegociations internationales concernant les produits
agricoles
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Apregraves cinq ans de neacutegociations et le deacutepassement de la date limite initialement
poseacutee pour sa conclusion en janvier 2005 le Doha Round a eacuteteacute suspendu sine die
en juillet 2006 sans reacutesultats concrets (le souhait du ministre breacutesilien concernant
les deacutelais nrsquoa donc pas eacuteteacute reacutealiseacute) Face agrave cette situation certains parlent de ce
cycle en termes drsquoeacutechec (par exemple Laborde amp Fontagneacute 2007) Mais si lrsquoon
observe les enjeux et les forces asymeacutetriques en preacutesence lrsquoanalyse doit ecirctre plus
nuanceacutee Il est hors de question de consideacuterer ce Round comme un succegraves et il
serait plus approprieacute drsquoestimer que ce que lrsquoon a perdu crsquoest peut-ecirctre une bataille
et non la guerre (Bhagwati 2004) qui selon toute vraisemblance se prolongera
Dans cette affaire le principal problegraveme reacuteside dans le type de reacuteponse agrave donner
face agrave lrsquoalternative suivante soit obtenir un accord dans un deacutelai relativement
court mais qui ne porte que sur des points secondaires soit obtenir un accord
plus difficilement mais qui porte sur les questions fondamentales comme lrsquoouver-
ture effective des marcheacutes agricoles ce qui serait novateur et repreacutesenterait pro-
bablement des gains consideacuterables pour le commerce mondial Il nrsquoest donc pas
possible de dire que le gouvernement breacutesilien a remporteacute un succegraves dans ce
domaine bien qursquoil ait deacutefini et maintenu une strateacutegie claire (agrave propos de laquelle
par ailleurs il ne semble pas y avoir de divergences significatives entre les prin-
cipales forces politiques breacutesiliennes) pourtant pour que sa voix soit plus creacutedible
dans les neacutegociations il faudrait qursquoil soit conseacutequent dans lrsquoagriculture comme
ailleurs21
Plus geacuteneacuteralement en ce qui concerne les reacutesultats tangibles du Doha Round 22
notamment dans les dossiers laquo sensibles raquo comme lrsquoagriculture il faudrait des condi-
tions internationales plus favorables comme en 199323 lorsque celles-ci ont permis
de sortir des impasses de lrsquoUruguay Round et du North American Free Trade Agreement
(Nafta) ce qui semble aujourdrsquohui assez improbable Par ailleurs plus de cinq ans
21 Drsquoapregraves B hagwati (2004 59) le tarif agricole moyen serait de 12 aux Eacutetats-Unis de
37 au Breacutesil et de 112 en Inde Agrave juste titre cet auteur souligne dans nombre de ses
eacutecrits que les pays en deacuteveloppement demandent aux pays deacuteveloppeacutes la reacuteduction de leurs
tarifs sans ecirctre disposeacutes agrave en faire autant Bien que cela soit vrai en termes absolus Bhagwati
neacuteglige le fait que les premiers depuis les anneacutees 1980 ont souvent reacuteduit plus vite que les
seconds leurs niveaux de protection Par exemple entre le milieu des anneacutees 1980 et lrsquoan 2000
le tarif moyen (tous secteurs) est passeacute de 66 agrave 42 en Europe de 7 agrave 4 aux Eacutetats-
Unis de 44 agrave 17 au Breacutesil et de 80 agrave 32 en Inde la libeacuteralisation unilateacuterale des
pays en deacuteveloppement a eacuteteacute importante depuis le milieu des anneacutees 1980 voir B aldwin 2006
1456 1458-1459 Drsquoautre part les pays en deacuteveloppement ont comparativement moins de pos-
sibiliteacutes de financer drsquoune faccedilon durable drsquoimportants subsides agrave la production et agrave lrsquoexportation
lesquels enfreignent gravement le libre cours des flux du commerce international 22 Deacutebut 2007 plusieurs personnaliteacutes politiques internationales dont le Preacutesident breacutesilien
notamment agrave Davos fin janvier se sont prononceacutees pour la reprise des neacutegociations du Doha
Round cependant rien nrsquoeacutetait encore trancheacute agrave ce sujet au moment de conclure la reacutedaction
de cet article 23 Au deacutebut des anneacutees 1990 peu de temps apregraves la chute du mur de Berlin et drsquoautres
changements majeurs agrave lrsquoeacutechelle mondiale survenus pendant cette peacuteriode lrsquoarriveacutee agrave la Maison
Blanche de lrsquoAdministration Clinton en 1993 alors relativement plus activiste de ce point de
vue a permis le deacuteblocage drsquoun certain nombre drsquoimpasses dans les neacutegociations commerciales
internationales
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ont eacuteteacute neacutecessaires pour que le Tokyo Round (1973-1979) soit conclu plus de sept
ans pour lrsquoUruguay Round (1986-1993) il faudrait donc beaucoup de chance pour
que le Doha Round soit conclu dans un temps plus court compte tenu de son
agenda ndash reconnu par tous comme tregraves difficile ndash des coucircts qursquoil implique agrave court
terme pour des groupes politiquement puissants dans les pays deacuteveloppeacutes sans
compter que lrsquoOMC compte doreacutenavant un nombre bien plus eacuteleveacute de membres
Enfin srsquoagissant de la strateacutegie breacutesilienne dans ce domaine elle ne pourra ecirctre
pleinement eacutevalueacutee que dans les anneacutees agrave venir au vu de ses reacutesultats
Les choix de politique eacutetrangegravere prioriteacutes et indeacutecisions
En ce qui concerne les orientations geacuteostrateacutegiques des relations eacuteconomiques
exteacuterieures plusieurs voies sont possibles qui drsquoailleurs ne srsquoopposent pas neacuteces-
sairement Au-delagrave du multilateacuteralisme (en principe une perspective plus globale
qui nrsquoimplique pas de discrimination commerciale) lrsquointeacutegration eacuteconomique est
orienteacutee vers les pays et les reacutegions proches mais pas exclusivement (reacutegionalisa-
tion) Actuellement la plupart des pays et le Breacutesil ne fait pas exception ont une
politique commerciale baseacutee sur un certain dosage de multilateacuteralisme et
drsquointeacutegration reacutegionale Drsquoautre part outre les deux dimensions preacuteceacutedentes il
peut y avoir des accords bilateacuteraux ou de simples prioriteacutes geacuteographiques sans
aucun engagement pour les autres pays et nrsquoentraicircnant que des mesures unilateacute-
rales pour stimuler les eacutechanges dans les directions deacutesireacutees
Qursquoen est-il des options geacuteostrateacutegiques de la politique commerciale breacutesilienne
Parmi les regroupements qui ont marqueacute cette peacuteriode il faut noter 1) le Mercosul
et le reste de lrsquoAmeacuterique latine 2) les relations Sud-Sud et lrsquoAfrique 3) lrsquoAlca le
Mercoeuro24 ou les deux ce qui pose la question drsquoaccords possibles agrave lrsquoeacutechelle
continentale ou extracontinentale (et entre pays deacuteveloppeacutes et en voie de deacutevelop-
pement) Ces champs drsquoaction sont vastes et varieacutes ce qui nrsquoest pas surprenant
car le commerce exteacuterieur breacutesilien se preacutesente de faccedilon assez diversifieacutee geacuteogra-
phiquement25 Neacuteanmoins pour eacutevaluer les diffeacuterentes voies de renforcement des
liens eacuteconomiques internationaux plus que pour faire le bilan du passeacute il faut
tenir compte de leur potentiel futur notamment agrave moyen terme
Comme nous lrsquoavons deacutejagrave remarqueacute la creacuteation du Mercosul au deacutebut des
anneacutees 1990 a eacuteteacute agrave lrsquoorigine drsquoun laquo grand bond en avant raquo pour la politique
commerciale breacutesilienne et pour lrsquoAmeacuterique latine tout entiegravere dans la mesure ougrave
ce groupement eacutetait plus ambitieux et concret que ceux qui lrsquoavaient preacuteceacutedeacute
(drsquoune certaine maniegravere lrsquoexpeacuterience des quatre pays fondateurs du laquo cocircne sud raquo
24 Terme utiliseacute pour deacutesigner le projet de creacuteation drsquoune zone de libre-eacutechange entre lrsquoUnion
europeacuteenne et le Mercosul (deacutecision du sommet de Madrid en 1995) et la possibiliteacute drsquoun ren-
forcement geacuteneacuteral des liens eacuteconomiques entre les deux blocs voir S ilva 2004 263 25 Distribution du commerce exteacuterieur breacutesilien en 1999-2002 pour les exportations Union
europeacuteenne 263 Eacutetats-Unis 244 Aladi (Association latino-ameacutericaine drsquointeacutegration y
compris le Mercosul) 205 Asie et Moyen-Orient 125 et autres 161 et pour les
importations Union europeacuteenne 274 Eacutetats-Unis 233 Aladi 189 Asie et Moyen-
Orient 154 et autres 15 G onccedilalves 2005 265 et 269
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se rapprochait des pratiques europeacuteennes drsquointeacutegration) Par ailleurs le Breacutesil eacutetant
de loin la plus grande eacuteconomie du bloc son rocircle y fut deacuteterminant agrave maints
eacutegards Du point de vue de ses options geacuteographiques le gouvernement Lula a
nettement accordeacute la prioriteacute au Mercosul et par extension naturelle agrave lrsquoAmeacuterique
latine (Meyer 2005 61) Jusqursquoagrave preacutesent des accords drsquoassociation ont eacuteteacute signeacutes
avec le Chili la Bolivie le Peacuterou la Colombie et lrsquoEacutequateur puis le Venezuela
est devenu un Eacutetat membre en 2006 Cependant malgreacute les premiegraveres anneacutees
favorables le moins que lrsquoon puisse dire est qursquoen raison de diffeacuterents facteurs
dont la grave crise de lrsquoArgentine qui a deacutebuteacute en 1999 et exploseacute en 2001-2002
le Mercosul stagne depuis et a cesseacute drsquoapprofondir son ancrage Chaque Eacutetat
membre srsquoest enfermeacute dans ses problegravemes particuliers et le Mercosul reste un
exemple drsquointeacutegration reacutegionale sans coordination eacuteconomique (Baer et al 2002)
Certes ses liens avec la Communauteacute andine se sont resserreacutes et des neacutegociations
ont eacuteteacute reacutealiseacutees avec drsquoautres pays (le Mexique par exemple) ou drsquoautres groupes
mais leur ampleur reste modeste et compte tenu de lrsquoexpeacuterience drsquointeacutegration de
la reacutegion les espoirs sont reacuteserveacutes Lrsquoimpasse de lrsquoAlca analyseacutee plus loin nrsquoest
pas eacutetrangegravere agrave cette eacutevolution Pour avoir une vue drsquoensemble sur cette option
dirigeacutee vers lrsquoAmeacuterique latine le principal fait agrave retenir est lrsquoentreacutee du Venezuela
dans le Mercosul
Les relations Sud-Sud (hors Ameacuterique latine) sont une autre dimension de la
politique commerciale breacutesilienne qui a pris de lrsquoimportance du moins du point
de vue diplomatique (Meyer 2005) bien que drsquoune faccedilon geacuteneacuterale elles nrsquoaient
pas pris la forme drsquoune inteacutegration reacutegionale Drsquoune part les relations du Breacutesil
avec la Chine lrsquoInde lrsquoAfrique du Sud et drsquoautres eacuteconomies eacutemergentes se sont
deacuteveloppeacutees agrave plusieurs niveaux (multilateacuteraux ou bilateacuteraux) notamment au sein
du G20 accompagnant lrsquointensification rapide des eacutechanges commerciaux Drsquoautre
part le cas de lrsquoAfrique dans son ensemble est particuliegraverement repreacutesentatif de
la tendance Sud-Sud et plusieurs initiatives ont eacuteteacute lanceacutees par le gouvernement
breacutesilien dans le but drsquoun renforcement des relations commerciales avec ce conti-
nent geacuteographiquement proche (Oliveira amp Mouratildeo 2005 Coelho amp Saraiva
2004)
Bien qursquoils repreacutesentent eacutegalement deux orientations importantes de la politique
commerciale breacutesilienne reconnues par le gouvernement Lula lrsquoAlca et le Mercoeuro
nrsquoont pas connu drsquoavanceacutees pratiques significatives pendant cette peacuteriode En outre
comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment ces orientations nrsquoont pas eacuteteacute prioritaires
dans la politique internationale du gouvernement Lula qui favorisait le Doha Round
Srsquoagissant de processus remontant deacutejagrave aux anneacutees 1990 dont lrsquoentreacutee en vigueur
fondamentalement sous la forme drsquoune zone de libre-eacutechange eacutetait initialement
preacutevue pour 2005 lrsquoimpression est qursquoils traicircnent en longueur sans qursquoon puisse
reacuteellement entrevoir la fin des neacutegociations qui nrsquoont pas eacuteteacute abandonneacutees pour
autant Indeacutependamment de la multipliciteacute drsquoacteurs qursquoil faudrait prendre
en compte la question serait de savoir quel degreacute de pression a eacuteteacute exerceacute ndash ou
non ndash par le gouvernement breacutesilien agrave ce sujet LrsquoAlca est apparue drsquoabord comme
une sorte drsquoillustration de ladite theacuteorie des reacutegions naturelles (dans ce cas les
Ameacuteriques de lrsquoAlaska agrave la Terre de Feu) Mais compte tenu de lrsquounilateacuteralisme
traditionnel des Eacutetats-Unis envers lrsquoAmeacuterique latine et de lrsquoeacuteventail limiteacute des
produits inclus dans ces neacutegociations les pays de la reacutegion sont resteacutes reacuteticents agrave
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cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
0
10
20
30
40
50
60
70
80
1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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plus preacuteciseacutement pour les exportations qui sont passeacutees de 096 agrave 116 et
pour les importations qui sont passeacutees de 075 agrave 072 Si lrsquoon observe
plus attentivement le commerce exteacuterieur breacutesilien on constate aussi que la part
des produits manufactureacutes a deacuteclineacute entre 2000 et 2006 passant de 5905 agrave
543 13 par conseacutequent celle des produits de base et semi-finis a augmenteacute
conduisant agrave ce que Reinaldo Gonccedilalves a appeleacute la laquo reprimarizaccedilatildeo raquo14 (2005 264)
Malgreacute les efforts qui ont eacuteteacute deacuteployeacutes par les gouvernements avant et apregraves 2003
le Breacutesil continue donc agrave eacuteprouver des difficulteacutes agrave aller au-delagrave de ses avantages
comparatifs traditionnels et agrave srsquoimplanter sur de nouveaux creacuteneaux exportateurs
agrave haute valeur ajouteacutee sauf pour quelques exceptions bien connues (dont la con-
struction aeacuteronautique civile lrsquoexploration offshore de peacutetrole et lrsquoindustrie automo-
bile) Dans drsquoautres cas comme celui des biocombustibles le Breacutesil a deacuteveloppeacute
une grande capaciteacute de production aux cours des derniegraveres deacutecennies mais leur
utilisation agrave une eacutechelle globale nrsquoest pas devenue jusqursquoagrave preacutesent une option
nette de la part des principaux consommateurs potentiels Nous reviendrons plus
loin sur ces questions
En reacutesumeacute les principaux indicateurs du secteur exteacuterieur au cours des quatre
premiegraveres anneacutees du gouvernement Lula ont connu une eacutevolution nettement
positive mecircme si les facteurs internationaux sur lesquels le gouvernement nrsquoa pas
13 Gazeta Mercantil 18 janvier 2007 Cette source reprenant une information de la Fundaccedilatildeo
Centro de Estudos do Comeacutercio Exterior (Funcex) ajoute laquo Entre 2000 et 2006 les prix des produits
de base ont augmenteacute de 43 tandis que les produits manufactureacutes nrsquoont augmenteacute que de
22 Aussi la croissance du quanta exporteacute a-t-elle eacuteteacute plus eacuteleveacutee pour les produits de base
(123 ) que pour les produits manufactureacutes (86 ) raquo 14 Tendance des produits primaires agrave regagner du poids dans les exportations breacutesiliennes
Remarquons le problegraveme que repreacutesente la demande chinoise de commodities allieacutee au fait que
ce pays exporte encore principalement des produits low-tech et que les pays deacuteveloppeacutes essaient
de se concentrer sur les produits agrave haute technologie et laissent peu drsquoespace aux pays agrave tech-
nologie moyenne comme le Breacutesil
Fig 3 Commerce Breacutesil-Chine 1999-2006
Millions US Dollars
0
2000
4000
6000
8000
10000
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Exportations ImportationsSource Secex
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96 joaquim ramos silva
drsquoinfluence ont joueacute un rocircle non neacutegligeable dans ces performances Il srsquoagit
surtout de lrsquoeacutevolution du marcheacute mondial des matiegraveres premiegraveres dont les prix
ont eacuteteacute agrave la hausse le Breacutesil en eacutetant lrsquoun des principaux fournisseurs Drsquoautre
part au niveau inteacuterieur comme la faible croissance nrsquoa pas tireacute les importations
vers le haut ces diffeacuterentes tendances ont permis en 2003-2006 lrsquoaccumulation
drsquoun surplus substantiel de la balance commerciale (mecircme lrsquoappreacuteciation du reacuteal
nrsquoa pu lrsquoempecirccher) Pourtant un renversement de tendance pourrait survenir et
reacuteveacuteler des fragiliteacutes dans le secteur exteacuterieur breacutesilien En particulier en admettant
mecircme que la phase actuelle de boom du cycle des matiegraveres premiegraveres soit relati-
vement longue (agrave cause de lrsquoentreacutee de la Chine et de lrsquoInde dans ce marcheacute) elle
aura certainement des limites agrave un moment donneacute Enfin la politique de change
la composition du commerce de marchandises et la position breacutesilienne dans le
commerce mondial ne sont pas devenues substantiellement diffeacuterentes de la situa-
tion preacuteceacutedente15 mecircme si les poleacutemiques concernant la nature de leur eacutevolution
se poursuivent
Les relations avec les organisations eacuteconomiques internationales le deacutefi des neacutegociations du Doha Round
Comme agrave drsquoautres niveaux clarifier la politique du gouvernement breacutesilien de
Lula dans ce domaine nrsquoest pas facile Lrsquoeacutevolution des organisations eacuteconomiques
internationales reacutepond agrave un certain nombre de facteurs que les gouvernements
nationaux ont du mal agrave influencer sans parler du rythme souvent tregraves lent de
la complexiteacute des neacutegociations et des marchandages pas forceacutement tregraves transpa-
rents Neacuteanmoins on peut tenter de preacuteciser les contours speacutecifiques de lrsquoaction
du gouvernement Lula dans ce domaine fondamental de la politique commerciale
Citons tout drsquoabord les deacuteclarations du ministre des Affaires eacutetrangegraveres Celso
Amorim au milieu du mandat preacutesidentiel
laquo Les accords sur les trois fronts de neacutegociation commerciale dans lesquels le Breacutesil
est simultaneacutement engageacute ndash le Doha Round de lrsquoOrganisation mondiale du commerce
la Zone de libre-eacutechange des Ameacuteriques16 (Alca) et le Mercosul-Union Europeacuteenne ndash
doivent ecirctre conclus dans un deacutelai drsquoun an et demi raquo17
Notons qursquoelles donnent la prioriteacute aux neacutegociations au sein de lrsquoOMC (Mouratildeo
2005) Compte tenu de leur position clef dans lrsquoensemble de la politique com-
merciale du gouvernement Lula agrave lrsquoeacutechelle internationale il faut drsquoabord examiner
les relations avec lrsquoOMC crsquoest-agrave-dire au niveau multilateacuteral ayant comme centre
le Doha Round pour ensuite passer en revue les questions relatives agrave lrsquointeacutegration
15 Plus geacuteneacuteralement C arneiro (2006 9) considegravere que laquo la peacuteriode 2003-2005 en ce qui
concerne le gouvernement Lula ne se diffeacuterencie pas exception faite drsquoeacuteventuelles diffeacuterences
de gestion de celle correspondant aux anneacutees 1999-2002 car ces politiques ont eu comme
fondement un reacutegime combinant lrsquoinflation le change flottant et la contraction fiscale raquo 16 Zone de libre-eacutechange (ZLEA) plus connu sous le sigle Alca Aacuterea de Livre Comeacutercio das
Ameacutericas 17 O Estado de Satildeo Paulo 3 deacutecembre 2004 B12
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 97
eacuteconomique (Mercosul Alca et relations avec lrsquoUnion europeacuteenne) et autres ques-
tions geacuteostrateacutegiques comme les relations Sud-Sud
Le cycle de neacutegociations du Doha Round est tregraves important dans la mesure ougrave
la promotion du deacuteveloppement en particulier la pleine participation des eacutecono-
mies en deacuteveloppement dans le systegraveme commercial international constitue un
objectif central depuis son lancement en novembre 2001 Degraves le deacutebut des neacutego-
ciations malgreacute toute la rheacutetorique sur le deacuteveloppement il eacutetait eacutevident que
comme les barriegraveres tarifaires srsquoeacutetaient substantiellement reacuteduites au cours des
deacutecennies suivant lrsquoapregraves-guerre de mecircme que les principales barriegraveres quanti tatives
eacutetaient en phase de deacutemantegravelement (du moins partiel) depuis la fin de lrsquoUruguay
Round en 1993 on srsquoapprochait doreacutenavant drsquoenjeux plus controverseacutes ougrave il exis-
tait traditionnellement plus de reacutesistance agrave suivre les regravegles du GATTOMC En
lrsquooccurrence les diffeacuterentes regravegles de protection de la proprieacuteteacute intellectuelle (dans
leur relation avec le commerce) lrsquoouverture des marcheacutes agricoles notamment en
raison de lrsquoentreacutee dans le systegraveme reacutesultant du Round preacuteceacutedent avaient eacuteteacute plus
formelles qursquoeffectives Or preacuteciseacutement lrsquoinclusion des produits agricoles dans ces
regravegles en particulier la reacuteduction des subventions publiques qui introduisent de
graves distorsions dans le commerce mondial de ces biens eacutetait un enjeu qui
inteacuteressait prioritairement de nombreux pays en deacuteveloppement et a fortiori le
Breacutesil en raison des difficulteacutes qursquoils rencontrent agrave tirer profit de leurs avantages
comparatifs Dans une deacuteclaration qui illustre bien la position breacutesilienne sur les
produits agricoles le ministre Celso Amorim estima que
laquo Il est choquant que plus drsquoune cinquantaine drsquoanneacutees apregraves lrsquoeacutetablissement de regravegles
multilateacuterales destineacutees agrave libeacuterer et agrave discipliner le commerce international sous lrsquoeacutegide
du GATT une cateacutegorie de produits drsquoune si grande importance pour les pays en
deacuteveloppement soit resteacutee proteacutegeacutee par des exceptions des subsides et des barriegraveres
de tous ordres raquo18
Crsquoest dans ce cadre en particulier agrave Cancuacuten en septembre 2003 que deux grou-
pes principaux19 se sont formeacutes autour de la question devenue centrale de lrsquoouver-
ture des marcheacutes agricoles (bien entendu cet enjeu eacutetait lieacute agrave drsquoautres lors des
neacutegociations) Drsquoun cocircteacute les Eacutetats-Unis et lrsquoUnion europeacuteenne srsquoopposegraverent agrave
quelques diffeacuterences pregraves et nrsquooffrirent que des concessions marginales en la matiegravere
et de lrsquoautre le G-20 au sein duquel le Breacutesil a joueacute un rocircle deacuteterminant20 qui
souhaita de veacuteritables concessions y compris une reacuteduction sensible des subventions
publiques
18 Valor 9 septembre 2003 AB 19 On ne mentionne que ces deux groupes importants pour notre sujet cependant drsquoautres
se sont formeacutes agrave la confeacuterence de Cancuacuten qui sont resteacutes actifs par la suite pour plus de deacutetails
voir N arlikar 2005 112-113 20 Il est vrai que drsquoautres grandes eacuteconomies eacutemergentes appartiennent aussi au G-20 comme
lrsquoInde la Chine lrsquoAfrique du Sud la Thaiumllande et lrsquoArgentine mais compte tenu de sa position
plus laquo combative raquo et du plus grand inteacuterecirct qursquoil porte sur le sujet le Breacutesil a dans lrsquoensemble
joueacute un des rocircles les plus importants dans les neacutegociations internationales concernant les produits
agricoles
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Apregraves cinq ans de neacutegociations et le deacutepassement de la date limite initialement
poseacutee pour sa conclusion en janvier 2005 le Doha Round a eacuteteacute suspendu sine die
en juillet 2006 sans reacutesultats concrets (le souhait du ministre breacutesilien concernant
les deacutelais nrsquoa donc pas eacuteteacute reacutealiseacute) Face agrave cette situation certains parlent de ce
cycle en termes drsquoeacutechec (par exemple Laborde amp Fontagneacute 2007) Mais si lrsquoon
observe les enjeux et les forces asymeacutetriques en preacutesence lrsquoanalyse doit ecirctre plus
nuanceacutee Il est hors de question de consideacuterer ce Round comme un succegraves et il
serait plus approprieacute drsquoestimer que ce que lrsquoon a perdu crsquoest peut-ecirctre une bataille
et non la guerre (Bhagwati 2004) qui selon toute vraisemblance se prolongera
Dans cette affaire le principal problegraveme reacuteside dans le type de reacuteponse agrave donner
face agrave lrsquoalternative suivante soit obtenir un accord dans un deacutelai relativement
court mais qui ne porte que sur des points secondaires soit obtenir un accord
plus difficilement mais qui porte sur les questions fondamentales comme lrsquoouver-
ture effective des marcheacutes agricoles ce qui serait novateur et repreacutesenterait pro-
bablement des gains consideacuterables pour le commerce mondial Il nrsquoest donc pas
possible de dire que le gouvernement breacutesilien a remporteacute un succegraves dans ce
domaine bien qursquoil ait deacutefini et maintenu une strateacutegie claire (agrave propos de laquelle
par ailleurs il ne semble pas y avoir de divergences significatives entre les prin-
cipales forces politiques breacutesiliennes) pourtant pour que sa voix soit plus creacutedible
dans les neacutegociations il faudrait qursquoil soit conseacutequent dans lrsquoagriculture comme
ailleurs21
Plus geacuteneacuteralement en ce qui concerne les reacutesultats tangibles du Doha Round 22
notamment dans les dossiers laquo sensibles raquo comme lrsquoagriculture il faudrait des condi-
tions internationales plus favorables comme en 199323 lorsque celles-ci ont permis
de sortir des impasses de lrsquoUruguay Round et du North American Free Trade Agreement
(Nafta) ce qui semble aujourdrsquohui assez improbable Par ailleurs plus de cinq ans
21 Drsquoapregraves B hagwati (2004 59) le tarif agricole moyen serait de 12 aux Eacutetats-Unis de
37 au Breacutesil et de 112 en Inde Agrave juste titre cet auteur souligne dans nombre de ses
eacutecrits que les pays en deacuteveloppement demandent aux pays deacuteveloppeacutes la reacuteduction de leurs
tarifs sans ecirctre disposeacutes agrave en faire autant Bien que cela soit vrai en termes absolus Bhagwati
neacuteglige le fait que les premiers depuis les anneacutees 1980 ont souvent reacuteduit plus vite que les
seconds leurs niveaux de protection Par exemple entre le milieu des anneacutees 1980 et lrsquoan 2000
le tarif moyen (tous secteurs) est passeacute de 66 agrave 42 en Europe de 7 agrave 4 aux Eacutetats-
Unis de 44 agrave 17 au Breacutesil et de 80 agrave 32 en Inde la libeacuteralisation unilateacuterale des
pays en deacuteveloppement a eacuteteacute importante depuis le milieu des anneacutees 1980 voir B aldwin 2006
1456 1458-1459 Drsquoautre part les pays en deacuteveloppement ont comparativement moins de pos-
sibiliteacutes de financer drsquoune faccedilon durable drsquoimportants subsides agrave la production et agrave lrsquoexportation
lesquels enfreignent gravement le libre cours des flux du commerce international 22 Deacutebut 2007 plusieurs personnaliteacutes politiques internationales dont le Preacutesident breacutesilien
notamment agrave Davos fin janvier se sont prononceacutees pour la reprise des neacutegociations du Doha
Round cependant rien nrsquoeacutetait encore trancheacute agrave ce sujet au moment de conclure la reacutedaction
de cet article 23 Au deacutebut des anneacutees 1990 peu de temps apregraves la chute du mur de Berlin et drsquoautres
changements majeurs agrave lrsquoeacutechelle mondiale survenus pendant cette peacuteriode lrsquoarriveacutee agrave la Maison
Blanche de lrsquoAdministration Clinton en 1993 alors relativement plus activiste de ce point de
vue a permis le deacuteblocage drsquoun certain nombre drsquoimpasses dans les neacutegociations commerciales
internationales
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ont eacuteteacute neacutecessaires pour que le Tokyo Round (1973-1979) soit conclu plus de sept
ans pour lrsquoUruguay Round (1986-1993) il faudrait donc beaucoup de chance pour
que le Doha Round soit conclu dans un temps plus court compte tenu de son
agenda ndash reconnu par tous comme tregraves difficile ndash des coucircts qursquoil implique agrave court
terme pour des groupes politiquement puissants dans les pays deacuteveloppeacutes sans
compter que lrsquoOMC compte doreacutenavant un nombre bien plus eacuteleveacute de membres
Enfin srsquoagissant de la strateacutegie breacutesilienne dans ce domaine elle ne pourra ecirctre
pleinement eacutevalueacutee que dans les anneacutees agrave venir au vu de ses reacutesultats
Les choix de politique eacutetrangegravere prioriteacutes et indeacutecisions
En ce qui concerne les orientations geacuteostrateacutegiques des relations eacuteconomiques
exteacuterieures plusieurs voies sont possibles qui drsquoailleurs ne srsquoopposent pas neacuteces-
sairement Au-delagrave du multilateacuteralisme (en principe une perspective plus globale
qui nrsquoimplique pas de discrimination commerciale) lrsquointeacutegration eacuteconomique est
orienteacutee vers les pays et les reacutegions proches mais pas exclusivement (reacutegionalisa-
tion) Actuellement la plupart des pays et le Breacutesil ne fait pas exception ont une
politique commerciale baseacutee sur un certain dosage de multilateacuteralisme et
drsquointeacutegration reacutegionale Drsquoautre part outre les deux dimensions preacuteceacutedentes il
peut y avoir des accords bilateacuteraux ou de simples prioriteacutes geacuteographiques sans
aucun engagement pour les autres pays et nrsquoentraicircnant que des mesures unilateacute-
rales pour stimuler les eacutechanges dans les directions deacutesireacutees
Qursquoen est-il des options geacuteostrateacutegiques de la politique commerciale breacutesilienne
Parmi les regroupements qui ont marqueacute cette peacuteriode il faut noter 1) le Mercosul
et le reste de lrsquoAmeacuterique latine 2) les relations Sud-Sud et lrsquoAfrique 3) lrsquoAlca le
Mercoeuro24 ou les deux ce qui pose la question drsquoaccords possibles agrave lrsquoeacutechelle
continentale ou extracontinentale (et entre pays deacuteveloppeacutes et en voie de deacutevelop-
pement) Ces champs drsquoaction sont vastes et varieacutes ce qui nrsquoest pas surprenant
car le commerce exteacuterieur breacutesilien se preacutesente de faccedilon assez diversifieacutee geacuteogra-
phiquement25 Neacuteanmoins pour eacutevaluer les diffeacuterentes voies de renforcement des
liens eacuteconomiques internationaux plus que pour faire le bilan du passeacute il faut
tenir compte de leur potentiel futur notamment agrave moyen terme
Comme nous lrsquoavons deacutejagrave remarqueacute la creacuteation du Mercosul au deacutebut des
anneacutees 1990 a eacuteteacute agrave lrsquoorigine drsquoun laquo grand bond en avant raquo pour la politique
commerciale breacutesilienne et pour lrsquoAmeacuterique latine tout entiegravere dans la mesure ougrave
ce groupement eacutetait plus ambitieux et concret que ceux qui lrsquoavaient preacuteceacutedeacute
(drsquoune certaine maniegravere lrsquoexpeacuterience des quatre pays fondateurs du laquo cocircne sud raquo
24 Terme utiliseacute pour deacutesigner le projet de creacuteation drsquoune zone de libre-eacutechange entre lrsquoUnion
europeacuteenne et le Mercosul (deacutecision du sommet de Madrid en 1995) et la possibiliteacute drsquoun ren-
forcement geacuteneacuteral des liens eacuteconomiques entre les deux blocs voir S ilva 2004 263 25 Distribution du commerce exteacuterieur breacutesilien en 1999-2002 pour les exportations Union
europeacuteenne 263 Eacutetats-Unis 244 Aladi (Association latino-ameacutericaine drsquointeacutegration y
compris le Mercosul) 205 Asie et Moyen-Orient 125 et autres 161 et pour les
importations Union europeacuteenne 274 Eacutetats-Unis 233 Aladi 189 Asie et Moyen-
Orient 154 et autres 15 G onccedilalves 2005 265 et 269
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se rapprochait des pratiques europeacuteennes drsquointeacutegration) Par ailleurs le Breacutesil eacutetant
de loin la plus grande eacuteconomie du bloc son rocircle y fut deacuteterminant agrave maints
eacutegards Du point de vue de ses options geacuteographiques le gouvernement Lula a
nettement accordeacute la prioriteacute au Mercosul et par extension naturelle agrave lrsquoAmeacuterique
latine (Meyer 2005 61) Jusqursquoagrave preacutesent des accords drsquoassociation ont eacuteteacute signeacutes
avec le Chili la Bolivie le Peacuterou la Colombie et lrsquoEacutequateur puis le Venezuela
est devenu un Eacutetat membre en 2006 Cependant malgreacute les premiegraveres anneacutees
favorables le moins que lrsquoon puisse dire est qursquoen raison de diffeacuterents facteurs
dont la grave crise de lrsquoArgentine qui a deacutebuteacute en 1999 et exploseacute en 2001-2002
le Mercosul stagne depuis et a cesseacute drsquoapprofondir son ancrage Chaque Eacutetat
membre srsquoest enfermeacute dans ses problegravemes particuliers et le Mercosul reste un
exemple drsquointeacutegration reacutegionale sans coordination eacuteconomique (Baer et al 2002)
Certes ses liens avec la Communauteacute andine se sont resserreacutes et des neacutegociations
ont eacuteteacute reacutealiseacutees avec drsquoautres pays (le Mexique par exemple) ou drsquoautres groupes
mais leur ampleur reste modeste et compte tenu de lrsquoexpeacuterience drsquointeacutegration de
la reacutegion les espoirs sont reacuteserveacutes Lrsquoimpasse de lrsquoAlca analyseacutee plus loin nrsquoest
pas eacutetrangegravere agrave cette eacutevolution Pour avoir une vue drsquoensemble sur cette option
dirigeacutee vers lrsquoAmeacuterique latine le principal fait agrave retenir est lrsquoentreacutee du Venezuela
dans le Mercosul
Les relations Sud-Sud (hors Ameacuterique latine) sont une autre dimension de la
politique commerciale breacutesilienne qui a pris de lrsquoimportance du moins du point
de vue diplomatique (Meyer 2005) bien que drsquoune faccedilon geacuteneacuterale elles nrsquoaient
pas pris la forme drsquoune inteacutegration reacutegionale Drsquoune part les relations du Breacutesil
avec la Chine lrsquoInde lrsquoAfrique du Sud et drsquoautres eacuteconomies eacutemergentes se sont
deacuteveloppeacutees agrave plusieurs niveaux (multilateacuteraux ou bilateacuteraux) notamment au sein
du G20 accompagnant lrsquointensification rapide des eacutechanges commerciaux Drsquoautre
part le cas de lrsquoAfrique dans son ensemble est particuliegraverement repreacutesentatif de
la tendance Sud-Sud et plusieurs initiatives ont eacuteteacute lanceacutees par le gouvernement
breacutesilien dans le but drsquoun renforcement des relations commerciales avec ce conti-
nent geacuteographiquement proche (Oliveira amp Mouratildeo 2005 Coelho amp Saraiva
2004)
Bien qursquoils repreacutesentent eacutegalement deux orientations importantes de la politique
commerciale breacutesilienne reconnues par le gouvernement Lula lrsquoAlca et le Mercoeuro
nrsquoont pas connu drsquoavanceacutees pratiques significatives pendant cette peacuteriode En outre
comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment ces orientations nrsquoont pas eacuteteacute prioritaires
dans la politique internationale du gouvernement Lula qui favorisait le Doha Round
Srsquoagissant de processus remontant deacutejagrave aux anneacutees 1990 dont lrsquoentreacutee en vigueur
fondamentalement sous la forme drsquoune zone de libre-eacutechange eacutetait initialement
preacutevue pour 2005 lrsquoimpression est qursquoils traicircnent en longueur sans qursquoon puisse
reacuteellement entrevoir la fin des neacutegociations qui nrsquoont pas eacuteteacute abandonneacutees pour
autant Indeacutependamment de la multipliciteacute drsquoacteurs qursquoil faudrait prendre
en compte la question serait de savoir quel degreacute de pression a eacuteteacute exerceacute ndash ou
non ndash par le gouvernement breacutesilien agrave ce sujet LrsquoAlca est apparue drsquoabord comme
une sorte drsquoillustration de ladite theacuteorie des reacutegions naturelles (dans ce cas les
Ameacuteriques de lrsquoAlaska agrave la Terre de Feu) Mais compte tenu de lrsquounilateacuteralisme
traditionnel des Eacutetats-Unis envers lrsquoAmeacuterique latine et de lrsquoeacuteventail limiteacute des
produits inclus dans ces neacutegociations les pays de la reacutegion sont resteacutes reacuteticents agrave
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cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 103
rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
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10
20
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40
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70
80
1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
LUSO 142_1037_86-108indd 104LUSO 142_1037_86-108indd 104 111607 12745 PM111607 12745 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 105
les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
LUSO 142_1037_86-108indd 105LUSO 142_1037_86-108indd 105 111607 12745 PM111607 12745 PM
106 joaquim ramos silva
Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 107
toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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drsquoinfluence ont joueacute un rocircle non neacutegligeable dans ces performances Il srsquoagit
surtout de lrsquoeacutevolution du marcheacute mondial des matiegraveres premiegraveres dont les prix
ont eacuteteacute agrave la hausse le Breacutesil en eacutetant lrsquoun des principaux fournisseurs Drsquoautre
part au niveau inteacuterieur comme la faible croissance nrsquoa pas tireacute les importations
vers le haut ces diffeacuterentes tendances ont permis en 2003-2006 lrsquoaccumulation
drsquoun surplus substantiel de la balance commerciale (mecircme lrsquoappreacuteciation du reacuteal
nrsquoa pu lrsquoempecirccher) Pourtant un renversement de tendance pourrait survenir et
reacuteveacuteler des fragiliteacutes dans le secteur exteacuterieur breacutesilien En particulier en admettant
mecircme que la phase actuelle de boom du cycle des matiegraveres premiegraveres soit relati-
vement longue (agrave cause de lrsquoentreacutee de la Chine et de lrsquoInde dans ce marcheacute) elle
aura certainement des limites agrave un moment donneacute Enfin la politique de change
la composition du commerce de marchandises et la position breacutesilienne dans le
commerce mondial ne sont pas devenues substantiellement diffeacuterentes de la situa-
tion preacuteceacutedente15 mecircme si les poleacutemiques concernant la nature de leur eacutevolution
se poursuivent
Les relations avec les organisations eacuteconomiques internationales le deacutefi des neacutegociations du Doha Round
Comme agrave drsquoautres niveaux clarifier la politique du gouvernement breacutesilien de
Lula dans ce domaine nrsquoest pas facile Lrsquoeacutevolution des organisations eacuteconomiques
internationales reacutepond agrave un certain nombre de facteurs que les gouvernements
nationaux ont du mal agrave influencer sans parler du rythme souvent tregraves lent de
la complexiteacute des neacutegociations et des marchandages pas forceacutement tregraves transpa-
rents Neacuteanmoins on peut tenter de preacuteciser les contours speacutecifiques de lrsquoaction
du gouvernement Lula dans ce domaine fondamental de la politique commerciale
Citons tout drsquoabord les deacuteclarations du ministre des Affaires eacutetrangegraveres Celso
Amorim au milieu du mandat preacutesidentiel
laquo Les accords sur les trois fronts de neacutegociation commerciale dans lesquels le Breacutesil
est simultaneacutement engageacute ndash le Doha Round de lrsquoOrganisation mondiale du commerce
la Zone de libre-eacutechange des Ameacuteriques16 (Alca) et le Mercosul-Union Europeacuteenne ndash
doivent ecirctre conclus dans un deacutelai drsquoun an et demi raquo17
Notons qursquoelles donnent la prioriteacute aux neacutegociations au sein de lrsquoOMC (Mouratildeo
2005) Compte tenu de leur position clef dans lrsquoensemble de la politique com-
merciale du gouvernement Lula agrave lrsquoeacutechelle internationale il faut drsquoabord examiner
les relations avec lrsquoOMC crsquoest-agrave-dire au niveau multilateacuteral ayant comme centre
le Doha Round pour ensuite passer en revue les questions relatives agrave lrsquointeacutegration
15 Plus geacuteneacuteralement C arneiro (2006 9) considegravere que laquo la peacuteriode 2003-2005 en ce qui
concerne le gouvernement Lula ne se diffeacuterencie pas exception faite drsquoeacuteventuelles diffeacuterences
de gestion de celle correspondant aux anneacutees 1999-2002 car ces politiques ont eu comme
fondement un reacutegime combinant lrsquoinflation le change flottant et la contraction fiscale raquo 16 Zone de libre-eacutechange (ZLEA) plus connu sous le sigle Alca Aacuterea de Livre Comeacutercio das
Ameacutericas 17 O Estado de Satildeo Paulo 3 deacutecembre 2004 B12
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 97
eacuteconomique (Mercosul Alca et relations avec lrsquoUnion europeacuteenne) et autres ques-
tions geacuteostrateacutegiques comme les relations Sud-Sud
Le cycle de neacutegociations du Doha Round est tregraves important dans la mesure ougrave
la promotion du deacuteveloppement en particulier la pleine participation des eacutecono-
mies en deacuteveloppement dans le systegraveme commercial international constitue un
objectif central depuis son lancement en novembre 2001 Degraves le deacutebut des neacutego-
ciations malgreacute toute la rheacutetorique sur le deacuteveloppement il eacutetait eacutevident que
comme les barriegraveres tarifaires srsquoeacutetaient substantiellement reacuteduites au cours des
deacutecennies suivant lrsquoapregraves-guerre de mecircme que les principales barriegraveres quanti tatives
eacutetaient en phase de deacutemantegravelement (du moins partiel) depuis la fin de lrsquoUruguay
Round en 1993 on srsquoapprochait doreacutenavant drsquoenjeux plus controverseacutes ougrave il exis-
tait traditionnellement plus de reacutesistance agrave suivre les regravegles du GATTOMC En
lrsquooccurrence les diffeacuterentes regravegles de protection de la proprieacuteteacute intellectuelle (dans
leur relation avec le commerce) lrsquoouverture des marcheacutes agricoles notamment en
raison de lrsquoentreacutee dans le systegraveme reacutesultant du Round preacuteceacutedent avaient eacuteteacute plus
formelles qursquoeffectives Or preacuteciseacutement lrsquoinclusion des produits agricoles dans ces
regravegles en particulier la reacuteduction des subventions publiques qui introduisent de
graves distorsions dans le commerce mondial de ces biens eacutetait un enjeu qui
inteacuteressait prioritairement de nombreux pays en deacuteveloppement et a fortiori le
Breacutesil en raison des difficulteacutes qursquoils rencontrent agrave tirer profit de leurs avantages
comparatifs Dans une deacuteclaration qui illustre bien la position breacutesilienne sur les
produits agricoles le ministre Celso Amorim estima que
laquo Il est choquant que plus drsquoune cinquantaine drsquoanneacutees apregraves lrsquoeacutetablissement de regravegles
multilateacuterales destineacutees agrave libeacuterer et agrave discipliner le commerce international sous lrsquoeacutegide
du GATT une cateacutegorie de produits drsquoune si grande importance pour les pays en
deacuteveloppement soit resteacutee proteacutegeacutee par des exceptions des subsides et des barriegraveres
de tous ordres raquo18
Crsquoest dans ce cadre en particulier agrave Cancuacuten en septembre 2003 que deux grou-
pes principaux19 se sont formeacutes autour de la question devenue centrale de lrsquoouver-
ture des marcheacutes agricoles (bien entendu cet enjeu eacutetait lieacute agrave drsquoautres lors des
neacutegociations) Drsquoun cocircteacute les Eacutetats-Unis et lrsquoUnion europeacuteenne srsquoopposegraverent agrave
quelques diffeacuterences pregraves et nrsquooffrirent que des concessions marginales en la matiegravere
et de lrsquoautre le G-20 au sein duquel le Breacutesil a joueacute un rocircle deacuteterminant20 qui
souhaita de veacuteritables concessions y compris une reacuteduction sensible des subventions
publiques
18 Valor 9 septembre 2003 AB 19 On ne mentionne que ces deux groupes importants pour notre sujet cependant drsquoautres
se sont formeacutes agrave la confeacuterence de Cancuacuten qui sont resteacutes actifs par la suite pour plus de deacutetails
voir N arlikar 2005 112-113 20 Il est vrai que drsquoautres grandes eacuteconomies eacutemergentes appartiennent aussi au G-20 comme
lrsquoInde la Chine lrsquoAfrique du Sud la Thaiumllande et lrsquoArgentine mais compte tenu de sa position
plus laquo combative raquo et du plus grand inteacuterecirct qursquoil porte sur le sujet le Breacutesil a dans lrsquoensemble
joueacute un des rocircles les plus importants dans les neacutegociations internationales concernant les produits
agricoles
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98 joaquim ramos silva
Apregraves cinq ans de neacutegociations et le deacutepassement de la date limite initialement
poseacutee pour sa conclusion en janvier 2005 le Doha Round a eacuteteacute suspendu sine die
en juillet 2006 sans reacutesultats concrets (le souhait du ministre breacutesilien concernant
les deacutelais nrsquoa donc pas eacuteteacute reacutealiseacute) Face agrave cette situation certains parlent de ce
cycle en termes drsquoeacutechec (par exemple Laborde amp Fontagneacute 2007) Mais si lrsquoon
observe les enjeux et les forces asymeacutetriques en preacutesence lrsquoanalyse doit ecirctre plus
nuanceacutee Il est hors de question de consideacuterer ce Round comme un succegraves et il
serait plus approprieacute drsquoestimer que ce que lrsquoon a perdu crsquoest peut-ecirctre une bataille
et non la guerre (Bhagwati 2004) qui selon toute vraisemblance se prolongera
Dans cette affaire le principal problegraveme reacuteside dans le type de reacuteponse agrave donner
face agrave lrsquoalternative suivante soit obtenir un accord dans un deacutelai relativement
court mais qui ne porte que sur des points secondaires soit obtenir un accord
plus difficilement mais qui porte sur les questions fondamentales comme lrsquoouver-
ture effective des marcheacutes agricoles ce qui serait novateur et repreacutesenterait pro-
bablement des gains consideacuterables pour le commerce mondial Il nrsquoest donc pas
possible de dire que le gouvernement breacutesilien a remporteacute un succegraves dans ce
domaine bien qursquoil ait deacutefini et maintenu une strateacutegie claire (agrave propos de laquelle
par ailleurs il ne semble pas y avoir de divergences significatives entre les prin-
cipales forces politiques breacutesiliennes) pourtant pour que sa voix soit plus creacutedible
dans les neacutegociations il faudrait qursquoil soit conseacutequent dans lrsquoagriculture comme
ailleurs21
Plus geacuteneacuteralement en ce qui concerne les reacutesultats tangibles du Doha Round 22
notamment dans les dossiers laquo sensibles raquo comme lrsquoagriculture il faudrait des condi-
tions internationales plus favorables comme en 199323 lorsque celles-ci ont permis
de sortir des impasses de lrsquoUruguay Round et du North American Free Trade Agreement
(Nafta) ce qui semble aujourdrsquohui assez improbable Par ailleurs plus de cinq ans
21 Drsquoapregraves B hagwati (2004 59) le tarif agricole moyen serait de 12 aux Eacutetats-Unis de
37 au Breacutesil et de 112 en Inde Agrave juste titre cet auteur souligne dans nombre de ses
eacutecrits que les pays en deacuteveloppement demandent aux pays deacuteveloppeacutes la reacuteduction de leurs
tarifs sans ecirctre disposeacutes agrave en faire autant Bien que cela soit vrai en termes absolus Bhagwati
neacuteglige le fait que les premiers depuis les anneacutees 1980 ont souvent reacuteduit plus vite que les
seconds leurs niveaux de protection Par exemple entre le milieu des anneacutees 1980 et lrsquoan 2000
le tarif moyen (tous secteurs) est passeacute de 66 agrave 42 en Europe de 7 agrave 4 aux Eacutetats-
Unis de 44 agrave 17 au Breacutesil et de 80 agrave 32 en Inde la libeacuteralisation unilateacuterale des
pays en deacuteveloppement a eacuteteacute importante depuis le milieu des anneacutees 1980 voir B aldwin 2006
1456 1458-1459 Drsquoautre part les pays en deacuteveloppement ont comparativement moins de pos-
sibiliteacutes de financer drsquoune faccedilon durable drsquoimportants subsides agrave la production et agrave lrsquoexportation
lesquels enfreignent gravement le libre cours des flux du commerce international 22 Deacutebut 2007 plusieurs personnaliteacutes politiques internationales dont le Preacutesident breacutesilien
notamment agrave Davos fin janvier se sont prononceacutees pour la reprise des neacutegociations du Doha
Round cependant rien nrsquoeacutetait encore trancheacute agrave ce sujet au moment de conclure la reacutedaction
de cet article 23 Au deacutebut des anneacutees 1990 peu de temps apregraves la chute du mur de Berlin et drsquoautres
changements majeurs agrave lrsquoeacutechelle mondiale survenus pendant cette peacuteriode lrsquoarriveacutee agrave la Maison
Blanche de lrsquoAdministration Clinton en 1993 alors relativement plus activiste de ce point de
vue a permis le deacuteblocage drsquoun certain nombre drsquoimpasses dans les neacutegociations commerciales
internationales
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 99
ont eacuteteacute neacutecessaires pour que le Tokyo Round (1973-1979) soit conclu plus de sept
ans pour lrsquoUruguay Round (1986-1993) il faudrait donc beaucoup de chance pour
que le Doha Round soit conclu dans un temps plus court compte tenu de son
agenda ndash reconnu par tous comme tregraves difficile ndash des coucircts qursquoil implique agrave court
terme pour des groupes politiquement puissants dans les pays deacuteveloppeacutes sans
compter que lrsquoOMC compte doreacutenavant un nombre bien plus eacuteleveacute de membres
Enfin srsquoagissant de la strateacutegie breacutesilienne dans ce domaine elle ne pourra ecirctre
pleinement eacutevalueacutee que dans les anneacutees agrave venir au vu de ses reacutesultats
Les choix de politique eacutetrangegravere prioriteacutes et indeacutecisions
En ce qui concerne les orientations geacuteostrateacutegiques des relations eacuteconomiques
exteacuterieures plusieurs voies sont possibles qui drsquoailleurs ne srsquoopposent pas neacuteces-
sairement Au-delagrave du multilateacuteralisme (en principe une perspective plus globale
qui nrsquoimplique pas de discrimination commerciale) lrsquointeacutegration eacuteconomique est
orienteacutee vers les pays et les reacutegions proches mais pas exclusivement (reacutegionalisa-
tion) Actuellement la plupart des pays et le Breacutesil ne fait pas exception ont une
politique commerciale baseacutee sur un certain dosage de multilateacuteralisme et
drsquointeacutegration reacutegionale Drsquoautre part outre les deux dimensions preacuteceacutedentes il
peut y avoir des accords bilateacuteraux ou de simples prioriteacutes geacuteographiques sans
aucun engagement pour les autres pays et nrsquoentraicircnant que des mesures unilateacute-
rales pour stimuler les eacutechanges dans les directions deacutesireacutees
Qursquoen est-il des options geacuteostrateacutegiques de la politique commerciale breacutesilienne
Parmi les regroupements qui ont marqueacute cette peacuteriode il faut noter 1) le Mercosul
et le reste de lrsquoAmeacuterique latine 2) les relations Sud-Sud et lrsquoAfrique 3) lrsquoAlca le
Mercoeuro24 ou les deux ce qui pose la question drsquoaccords possibles agrave lrsquoeacutechelle
continentale ou extracontinentale (et entre pays deacuteveloppeacutes et en voie de deacutevelop-
pement) Ces champs drsquoaction sont vastes et varieacutes ce qui nrsquoest pas surprenant
car le commerce exteacuterieur breacutesilien se preacutesente de faccedilon assez diversifieacutee geacuteogra-
phiquement25 Neacuteanmoins pour eacutevaluer les diffeacuterentes voies de renforcement des
liens eacuteconomiques internationaux plus que pour faire le bilan du passeacute il faut
tenir compte de leur potentiel futur notamment agrave moyen terme
Comme nous lrsquoavons deacutejagrave remarqueacute la creacuteation du Mercosul au deacutebut des
anneacutees 1990 a eacuteteacute agrave lrsquoorigine drsquoun laquo grand bond en avant raquo pour la politique
commerciale breacutesilienne et pour lrsquoAmeacuterique latine tout entiegravere dans la mesure ougrave
ce groupement eacutetait plus ambitieux et concret que ceux qui lrsquoavaient preacuteceacutedeacute
(drsquoune certaine maniegravere lrsquoexpeacuterience des quatre pays fondateurs du laquo cocircne sud raquo
24 Terme utiliseacute pour deacutesigner le projet de creacuteation drsquoune zone de libre-eacutechange entre lrsquoUnion
europeacuteenne et le Mercosul (deacutecision du sommet de Madrid en 1995) et la possibiliteacute drsquoun ren-
forcement geacuteneacuteral des liens eacuteconomiques entre les deux blocs voir S ilva 2004 263 25 Distribution du commerce exteacuterieur breacutesilien en 1999-2002 pour les exportations Union
europeacuteenne 263 Eacutetats-Unis 244 Aladi (Association latino-ameacutericaine drsquointeacutegration y
compris le Mercosul) 205 Asie et Moyen-Orient 125 et autres 161 et pour les
importations Union europeacuteenne 274 Eacutetats-Unis 233 Aladi 189 Asie et Moyen-
Orient 154 et autres 15 G onccedilalves 2005 265 et 269
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se rapprochait des pratiques europeacuteennes drsquointeacutegration) Par ailleurs le Breacutesil eacutetant
de loin la plus grande eacuteconomie du bloc son rocircle y fut deacuteterminant agrave maints
eacutegards Du point de vue de ses options geacuteographiques le gouvernement Lula a
nettement accordeacute la prioriteacute au Mercosul et par extension naturelle agrave lrsquoAmeacuterique
latine (Meyer 2005 61) Jusqursquoagrave preacutesent des accords drsquoassociation ont eacuteteacute signeacutes
avec le Chili la Bolivie le Peacuterou la Colombie et lrsquoEacutequateur puis le Venezuela
est devenu un Eacutetat membre en 2006 Cependant malgreacute les premiegraveres anneacutees
favorables le moins que lrsquoon puisse dire est qursquoen raison de diffeacuterents facteurs
dont la grave crise de lrsquoArgentine qui a deacutebuteacute en 1999 et exploseacute en 2001-2002
le Mercosul stagne depuis et a cesseacute drsquoapprofondir son ancrage Chaque Eacutetat
membre srsquoest enfermeacute dans ses problegravemes particuliers et le Mercosul reste un
exemple drsquointeacutegration reacutegionale sans coordination eacuteconomique (Baer et al 2002)
Certes ses liens avec la Communauteacute andine se sont resserreacutes et des neacutegociations
ont eacuteteacute reacutealiseacutees avec drsquoautres pays (le Mexique par exemple) ou drsquoautres groupes
mais leur ampleur reste modeste et compte tenu de lrsquoexpeacuterience drsquointeacutegration de
la reacutegion les espoirs sont reacuteserveacutes Lrsquoimpasse de lrsquoAlca analyseacutee plus loin nrsquoest
pas eacutetrangegravere agrave cette eacutevolution Pour avoir une vue drsquoensemble sur cette option
dirigeacutee vers lrsquoAmeacuterique latine le principal fait agrave retenir est lrsquoentreacutee du Venezuela
dans le Mercosul
Les relations Sud-Sud (hors Ameacuterique latine) sont une autre dimension de la
politique commerciale breacutesilienne qui a pris de lrsquoimportance du moins du point
de vue diplomatique (Meyer 2005) bien que drsquoune faccedilon geacuteneacuterale elles nrsquoaient
pas pris la forme drsquoune inteacutegration reacutegionale Drsquoune part les relations du Breacutesil
avec la Chine lrsquoInde lrsquoAfrique du Sud et drsquoautres eacuteconomies eacutemergentes se sont
deacuteveloppeacutees agrave plusieurs niveaux (multilateacuteraux ou bilateacuteraux) notamment au sein
du G20 accompagnant lrsquointensification rapide des eacutechanges commerciaux Drsquoautre
part le cas de lrsquoAfrique dans son ensemble est particuliegraverement repreacutesentatif de
la tendance Sud-Sud et plusieurs initiatives ont eacuteteacute lanceacutees par le gouvernement
breacutesilien dans le but drsquoun renforcement des relations commerciales avec ce conti-
nent geacuteographiquement proche (Oliveira amp Mouratildeo 2005 Coelho amp Saraiva
2004)
Bien qursquoils repreacutesentent eacutegalement deux orientations importantes de la politique
commerciale breacutesilienne reconnues par le gouvernement Lula lrsquoAlca et le Mercoeuro
nrsquoont pas connu drsquoavanceacutees pratiques significatives pendant cette peacuteriode En outre
comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment ces orientations nrsquoont pas eacuteteacute prioritaires
dans la politique internationale du gouvernement Lula qui favorisait le Doha Round
Srsquoagissant de processus remontant deacutejagrave aux anneacutees 1990 dont lrsquoentreacutee en vigueur
fondamentalement sous la forme drsquoune zone de libre-eacutechange eacutetait initialement
preacutevue pour 2005 lrsquoimpression est qursquoils traicircnent en longueur sans qursquoon puisse
reacuteellement entrevoir la fin des neacutegociations qui nrsquoont pas eacuteteacute abandonneacutees pour
autant Indeacutependamment de la multipliciteacute drsquoacteurs qursquoil faudrait prendre
en compte la question serait de savoir quel degreacute de pression a eacuteteacute exerceacute ndash ou
non ndash par le gouvernement breacutesilien agrave ce sujet LrsquoAlca est apparue drsquoabord comme
une sorte drsquoillustration de ladite theacuteorie des reacutegions naturelles (dans ce cas les
Ameacuteriques de lrsquoAlaska agrave la Terre de Feu) Mais compte tenu de lrsquounilateacuteralisme
traditionnel des Eacutetats-Unis envers lrsquoAmeacuterique latine et de lrsquoeacuteventail limiteacute des
produits inclus dans ces neacutegociations les pays de la reacutegion sont resteacutes reacuteticents agrave
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cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
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80
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Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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106 joaquim ramos silva
Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 107
toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
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eacuteconomique (Mercosul Alca et relations avec lrsquoUnion europeacuteenne) et autres ques-
tions geacuteostrateacutegiques comme les relations Sud-Sud
Le cycle de neacutegociations du Doha Round est tregraves important dans la mesure ougrave
la promotion du deacuteveloppement en particulier la pleine participation des eacutecono-
mies en deacuteveloppement dans le systegraveme commercial international constitue un
objectif central depuis son lancement en novembre 2001 Degraves le deacutebut des neacutego-
ciations malgreacute toute la rheacutetorique sur le deacuteveloppement il eacutetait eacutevident que
comme les barriegraveres tarifaires srsquoeacutetaient substantiellement reacuteduites au cours des
deacutecennies suivant lrsquoapregraves-guerre de mecircme que les principales barriegraveres quanti tatives
eacutetaient en phase de deacutemantegravelement (du moins partiel) depuis la fin de lrsquoUruguay
Round en 1993 on srsquoapprochait doreacutenavant drsquoenjeux plus controverseacutes ougrave il exis-
tait traditionnellement plus de reacutesistance agrave suivre les regravegles du GATTOMC En
lrsquooccurrence les diffeacuterentes regravegles de protection de la proprieacuteteacute intellectuelle (dans
leur relation avec le commerce) lrsquoouverture des marcheacutes agricoles notamment en
raison de lrsquoentreacutee dans le systegraveme reacutesultant du Round preacuteceacutedent avaient eacuteteacute plus
formelles qursquoeffectives Or preacuteciseacutement lrsquoinclusion des produits agricoles dans ces
regravegles en particulier la reacuteduction des subventions publiques qui introduisent de
graves distorsions dans le commerce mondial de ces biens eacutetait un enjeu qui
inteacuteressait prioritairement de nombreux pays en deacuteveloppement et a fortiori le
Breacutesil en raison des difficulteacutes qursquoils rencontrent agrave tirer profit de leurs avantages
comparatifs Dans une deacuteclaration qui illustre bien la position breacutesilienne sur les
produits agricoles le ministre Celso Amorim estima que
laquo Il est choquant que plus drsquoune cinquantaine drsquoanneacutees apregraves lrsquoeacutetablissement de regravegles
multilateacuterales destineacutees agrave libeacuterer et agrave discipliner le commerce international sous lrsquoeacutegide
du GATT une cateacutegorie de produits drsquoune si grande importance pour les pays en
deacuteveloppement soit resteacutee proteacutegeacutee par des exceptions des subsides et des barriegraveres
de tous ordres raquo18
Crsquoest dans ce cadre en particulier agrave Cancuacuten en septembre 2003 que deux grou-
pes principaux19 se sont formeacutes autour de la question devenue centrale de lrsquoouver-
ture des marcheacutes agricoles (bien entendu cet enjeu eacutetait lieacute agrave drsquoautres lors des
neacutegociations) Drsquoun cocircteacute les Eacutetats-Unis et lrsquoUnion europeacuteenne srsquoopposegraverent agrave
quelques diffeacuterences pregraves et nrsquooffrirent que des concessions marginales en la matiegravere
et de lrsquoautre le G-20 au sein duquel le Breacutesil a joueacute un rocircle deacuteterminant20 qui
souhaita de veacuteritables concessions y compris une reacuteduction sensible des subventions
publiques
18 Valor 9 septembre 2003 AB 19 On ne mentionne que ces deux groupes importants pour notre sujet cependant drsquoautres
se sont formeacutes agrave la confeacuterence de Cancuacuten qui sont resteacutes actifs par la suite pour plus de deacutetails
voir N arlikar 2005 112-113 20 Il est vrai que drsquoautres grandes eacuteconomies eacutemergentes appartiennent aussi au G-20 comme
lrsquoInde la Chine lrsquoAfrique du Sud la Thaiumllande et lrsquoArgentine mais compte tenu de sa position
plus laquo combative raquo et du plus grand inteacuterecirct qursquoil porte sur le sujet le Breacutesil a dans lrsquoensemble
joueacute un des rocircles les plus importants dans les neacutegociations internationales concernant les produits
agricoles
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Apregraves cinq ans de neacutegociations et le deacutepassement de la date limite initialement
poseacutee pour sa conclusion en janvier 2005 le Doha Round a eacuteteacute suspendu sine die
en juillet 2006 sans reacutesultats concrets (le souhait du ministre breacutesilien concernant
les deacutelais nrsquoa donc pas eacuteteacute reacutealiseacute) Face agrave cette situation certains parlent de ce
cycle en termes drsquoeacutechec (par exemple Laborde amp Fontagneacute 2007) Mais si lrsquoon
observe les enjeux et les forces asymeacutetriques en preacutesence lrsquoanalyse doit ecirctre plus
nuanceacutee Il est hors de question de consideacuterer ce Round comme un succegraves et il
serait plus approprieacute drsquoestimer que ce que lrsquoon a perdu crsquoest peut-ecirctre une bataille
et non la guerre (Bhagwati 2004) qui selon toute vraisemblance se prolongera
Dans cette affaire le principal problegraveme reacuteside dans le type de reacuteponse agrave donner
face agrave lrsquoalternative suivante soit obtenir un accord dans un deacutelai relativement
court mais qui ne porte que sur des points secondaires soit obtenir un accord
plus difficilement mais qui porte sur les questions fondamentales comme lrsquoouver-
ture effective des marcheacutes agricoles ce qui serait novateur et repreacutesenterait pro-
bablement des gains consideacuterables pour le commerce mondial Il nrsquoest donc pas
possible de dire que le gouvernement breacutesilien a remporteacute un succegraves dans ce
domaine bien qursquoil ait deacutefini et maintenu une strateacutegie claire (agrave propos de laquelle
par ailleurs il ne semble pas y avoir de divergences significatives entre les prin-
cipales forces politiques breacutesiliennes) pourtant pour que sa voix soit plus creacutedible
dans les neacutegociations il faudrait qursquoil soit conseacutequent dans lrsquoagriculture comme
ailleurs21
Plus geacuteneacuteralement en ce qui concerne les reacutesultats tangibles du Doha Round 22
notamment dans les dossiers laquo sensibles raquo comme lrsquoagriculture il faudrait des condi-
tions internationales plus favorables comme en 199323 lorsque celles-ci ont permis
de sortir des impasses de lrsquoUruguay Round et du North American Free Trade Agreement
(Nafta) ce qui semble aujourdrsquohui assez improbable Par ailleurs plus de cinq ans
21 Drsquoapregraves B hagwati (2004 59) le tarif agricole moyen serait de 12 aux Eacutetats-Unis de
37 au Breacutesil et de 112 en Inde Agrave juste titre cet auteur souligne dans nombre de ses
eacutecrits que les pays en deacuteveloppement demandent aux pays deacuteveloppeacutes la reacuteduction de leurs
tarifs sans ecirctre disposeacutes agrave en faire autant Bien que cela soit vrai en termes absolus Bhagwati
neacuteglige le fait que les premiers depuis les anneacutees 1980 ont souvent reacuteduit plus vite que les
seconds leurs niveaux de protection Par exemple entre le milieu des anneacutees 1980 et lrsquoan 2000
le tarif moyen (tous secteurs) est passeacute de 66 agrave 42 en Europe de 7 agrave 4 aux Eacutetats-
Unis de 44 agrave 17 au Breacutesil et de 80 agrave 32 en Inde la libeacuteralisation unilateacuterale des
pays en deacuteveloppement a eacuteteacute importante depuis le milieu des anneacutees 1980 voir B aldwin 2006
1456 1458-1459 Drsquoautre part les pays en deacuteveloppement ont comparativement moins de pos-
sibiliteacutes de financer drsquoune faccedilon durable drsquoimportants subsides agrave la production et agrave lrsquoexportation
lesquels enfreignent gravement le libre cours des flux du commerce international 22 Deacutebut 2007 plusieurs personnaliteacutes politiques internationales dont le Preacutesident breacutesilien
notamment agrave Davos fin janvier se sont prononceacutees pour la reprise des neacutegociations du Doha
Round cependant rien nrsquoeacutetait encore trancheacute agrave ce sujet au moment de conclure la reacutedaction
de cet article 23 Au deacutebut des anneacutees 1990 peu de temps apregraves la chute du mur de Berlin et drsquoautres
changements majeurs agrave lrsquoeacutechelle mondiale survenus pendant cette peacuteriode lrsquoarriveacutee agrave la Maison
Blanche de lrsquoAdministration Clinton en 1993 alors relativement plus activiste de ce point de
vue a permis le deacuteblocage drsquoun certain nombre drsquoimpasses dans les neacutegociations commerciales
internationales
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 99
ont eacuteteacute neacutecessaires pour que le Tokyo Round (1973-1979) soit conclu plus de sept
ans pour lrsquoUruguay Round (1986-1993) il faudrait donc beaucoup de chance pour
que le Doha Round soit conclu dans un temps plus court compte tenu de son
agenda ndash reconnu par tous comme tregraves difficile ndash des coucircts qursquoil implique agrave court
terme pour des groupes politiquement puissants dans les pays deacuteveloppeacutes sans
compter que lrsquoOMC compte doreacutenavant un nombre bien plus eacuteleveacute de membres
Enfin srsquoagissant de la strateacutegie breacutesilienne dans ce domaine elle ne pourra ecirctre
pleinement eacutevalueacutee que dans les anneacutees agrave venir au vu de ses reacutesultats
Les choix de politique eacutetrangegravere prioriteacutes et indeacutecisions
En ce qui concerne les orientations geacuteostrateacutegiques des relations eacuteconomiques
exteacuterieures plusieurs voies sont possibles qui drsquoailleurs ne srsquoopposent pas neacuteces-
sairement Au-delagrave du multilateacuteralisme (en principe une perspective plus globale
qui nrsquoimplique pas de discrimination commerciale) lrsquointeacutegration eacuteconomique est
orienteacutee vers les pays et les reacutegions proches mais pas exclusivement (reacutegionalisa-
tion) Actuellement la plupart des pays et le Breacutesil ne fait pas exception ont une
politique commerciale baseacutee sur un certain dosage de multilateacuteralisme et
drsquointeacutegration reacutegionale Drsquoautre part outre les deux dimensions preacuteceacutedentes il
peut y avoir des accords bilateacuteraux ou de simples prioriteacutes geacuteographiques sans
aucun engagement pour les autres pays et nrsquoentraicircnant que des mesures unilateacute-
rales pour stimuler les eacutechanges dans les directions deacutesireacutees
Qursquoen est-il des options geacuteostrateacutegiques de la politique commerciale breacutesilienne
Parmi les regroupements qui ont marqueacute cette peacuteriode il faut noter 1) le Mercosul
et le reste de lrsquoAmeacuterique latine 2) les relations Sud-Sud et lrsquoAfrique 3) lrsquoAlca le
Mercoeuro24 ou les deux ce qui pose la question drsquoaccords possibles agrave lrsquoeacutechelle
continentale ou extracontinentale (et entre pays deacuteveloppeacutes et en voie de deacutevelop-
pement) Ces champs drsquoaction sont vastes et varieacutes ce qui nrsquoest pas surprenant
car le commerce exteacuterieur breacutesilien se preacutesente de faccedilon assez diversifieacutee geacuteogra-
phiquement25 Neacuteanmoins pour eacutevaluer les diffeacuterentes voies de renforcement des
liens eacuteconomiques internationaux plus que pour faire le bilan du passeacute il faut
tenir compte de leur potentiel futur notamment agrave moyen terme
Comme nous lrsquoavons deacutejagrave remarqueacute la creacuteation du Mercosul au deacutebut des
anneacutees 1990 a eacuteteacute agrave lrsquoorigine drsquoun laquo grand bond en avant raquo pour la politique
commerciale breacutesilienne et pour lrsquoAmeacuterique latine tout entiegravere dans la mesure ougrave
ce groupement eacutetait plus ambitieux et concret que ceux qui lrsquoavaient preacuteceacutedeacute
(drsquoune certaine maniegravere lrsquoexpeacuterience des quatre pays fondateurs du laquo cocircne sud raquo
24 Terme utiliseacute pour deacutesigner le projet de creacuteation drsquoune zone de libre-eacutechange entre lrsquoUnion
europeacuteenne et le Mercosul (deacutecision du sommet de Madrid en 1995) et la possibiliteacute drsquoun ren-
forcement geacuteneacuteral des liens eacuteconomiques entre les deux blocs voir S ilva 2004 263 25 Distribution du commerce exteacuterieur breacutesilien en 1999-2002 pour les exportations Union
europeacuteenne 263 Eacutetats-Unis 244 Aladi (Association latino-ameacutericaine drsquointeacutegration y
compris le Mercosul) 205 Asie et Moyen-Orient 125 et autres 161 et pour les
importations Union europeacuteenne 274 Eacutetats-Unis 233 Aladi 189 Asie et Moyen-
Orient 154 et autres 15 G onccedilalves 2005 265 et 269
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se rapprochait des pratiques europeacuteennes drsquointeacutegration) Par ailleurs le Breacutesil eacutetant
de loin la plus grande eacuteconomie du bloc son rocircle y fut deacuteterminant agrave maints
eacutegards Du point de vue de ses options geacuteographiques le gouvernement Lula a
nettement accordeacute la prioriteacute au Mercosul et par extension naturelle agrave lrsquoAmeacuterique
latine (Meyer 2005 61) Jusqursquoagrave preacutesent des accords drsquoassociation ont eacuteteacute signeacutes
avec le Chili la Bolivie le Peacuterou la Colombie et lrsquoEacutequateur puis le Venezuela
est devenu un Eacutetat membre en 2006 Cependant malgreacute les premiegraveres anneacutees
favorables le moins que lrsquoon puisse dire est qursquoen raison de diffeacuterents facteurs
dont la grave crise de lrsquoArgentine qui a deacutebuteacute en 1999 et exploseacute en 2001-2002
le Mercosul stagne depuis et a cesseacute drsquoapprofondir son ancrage Chaque Eacutetat
membre srsquoest enfermeacute dans ses problegravemes particuliers et le Mercosul reste un
exemple drsquointeacutegration reacutegionale sans coordination eacuteconomique (Baer et al 2002)
Certes ses liens avec la Communauteacute andine se sont resserreacutes et des neacutegociations
ont eacuteteacute reacutealiseacutees avec drsquoautres pays (le Mexique par exemple) ou drsquoautres groupes
mais leur ampleur reste modeste et compte tenu de lrsquoexpeacuterience drsquointeacutegration de
la reacutegion les espoirs sont reacuteserveacutes Lrsquoimpasse de lrsquoAlca analyseacutee plus loin nrsquoest
pas eacutetrangegravere agrave cette eacutevolution Pour avoir une vue drsquoensemble sur cette option
dirigeacutee vers lrsquoAmeacuterique latine le principal fait agrave retenir est lrsquoentreacutee du Venezuela
dans le Mercosul
Les relations Sud-Sud (hors Ameacuterique latine) sont une autre dimension de la
politique commerciale breacutesilienne qui a pris de lrsquoimportance du moins du point
de vue diplomatique (Meyer 2005) bien que drsquoune faccedilon geacuteneacuterale elles nrsquoaient
pas pris la forme drsquoune inteacutegration reacutegionale Drsquoune part les relations du Breacutesil
avec la Chine lrsquoInde lrsquoAfrique du Sud et drsquoautres eacuteconomies eacutemergentes se sont
deacuteveloppeacutees agrave plusieurs niveaux (multilateacuteraux ou bilateacuteraux) notamment au sein
du G20 accompagnant lrsquointensification rapide des eacutechanges commerciaux Drsquoautre
part le cas de lrsquoAfrique dans son ensemble est particuliegraverement repreacutesentatif de
la tendance Sud-Sud et plusieurs initiatives ont eacuteteacute lanceacutees par le gouvernement
breacutesilien dans le but drsquoun renforcement des relations commerciales avec ce conti-
nent geacuteographiquement proche (Oliveira amp Mouratildeo 2005 Coelho amp Saraiva
2004)
Bien qursquoils repreacutesentent eacutegalement deux orientations importantes de la politique
commerciale breacutesilienne reconnues par le gouvernement Lula lrsquoAlca et le Mercoeuro
nrsquoont pas connu drsquoavanceacutees pratiques significatives pendant cette peacuteriode En outre
comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment ces orientations nrsquoont pas eacuteteacute prioritaires
dans la politique internationale du gouvernement Lula qui favorisait le Doha Round
Srsquoagissant de processus remontant deacutejagrave aux anneacutees 1990 dont lrsquoentreacutee en vigueur
fondamentalement sous la forme drsquoune zone de libre-eacutechange eacutetait initialement
preacutevue pour 2005 lrsquoimpression est qursquoils traicircnent en longueur sans qursquoon puisse
reacuteellement entrevoir la fin des neacutegociations qui nrsquoont pas eacuteteacute abandonneacutees pour
autant Indeacutependamment de la multipliciteacute drsquoacteurs qursquoil faudrait prendre
en compte la question serait de savoir quel degreacute de pression a eacuteteacute exerceacute ndash ou
non ndash par le gouvernement breacutesilien agrave ce sujet LrsquoAlca est apparue drsquoabord comme
une sorte drsquoillustration de ladite theacuteorie des reacutegions naturelles (dans ce cas les
Ameacuteriques de lrsquoAlaska agrave la Terre de Feu) Mais compte tenu de lrsquounilateacuteralisme
traditionnel des Eacutetats-Unis envers lrsquoAmeacuterique latine et de lrsquoeacuteventail limiteacute des
produits inclus dans ces neacutegociations les pays de la reacutegion sont resteacutes reacuteticents agrave
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 101
cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
0
10
20
30
40
50
60
70
80
1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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Santiso J 2003 The Political Economy of Emerging Markets New York Palgrave Macmillan
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UNCTAD 2005 laquo Target for Developing Countries Should Be Products with Higher Value
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ltwwwunctadorgpressgt
Wolf M 2006 laquo Chile Blazes the Trail for Latin America raquo Financial Times 13 deacutecembre
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Apregraves cinq ans de neacutegociations et le deacutepassement de la date limite initialement
poseacutee pour sa conclusion en janvier 2005 le Doha Round a eacuteteacute suspendu sine die
en juillet 2006 sans reacutesultats concrets (le souhait du ministre breacutesilien concernant
les deacutelais nrsquoa donc pas eacuteteacute reacutealiseacute) Face agrave cette situation certains parlent de ce
cycle en termes drsquoeacutechec (par exemple Laborde amp Fontagneacute 2007) Mais si lrsquoon
observe les enjeux et les forces asymeacutetriques en preacutesence lrsquoanalyse doit ecirctre plus
nuanceacutee Il est hors de question de consideacuterer ce Round comme un succegraves et il
serait plus approprieacute drsquoestimer que ce que lrsquoon a perdu crsquoest peut-ecirctre une bataille
et non la guerre (Bhagwati 2004) qui selon toute vraisemblance se prolongera
Dans cette affaire le principal problegraveme reacuteside dans le type de reacuteponse agrave donner
face agrave lrsquoalternative suivante soit obtenir un accord dans un deacutelai relativement
court mais qui ne porte que sur des points secondaires soit obtenir un accord
plus difficilement mais qui porte sur les questions fondamentales comme lrsquoouver-
ture effective des marcheacutes agricoles ce qui serait novateur et repreacutesenterait pro-
bablement des gains consideacuterables pour le commerce mondial Il nrsquoest donc pas
possible de dire que le gouvernement breacutesilien a remporteacute un succegraves dans ce
domaine bien qursquoil ait deacutefini et maintenu une strateacutegie claire (agrave propos de laquelle
par ailleurs il ne semble pas y avoir de divergences significatives entre les prin-
cipales forces politiques breacutesiliennes) pourtant pour que sa voix soit plus creacutedible
dans les neacutegociations il faudrait qursquoil soit conseacutequent dans lrsquoagriculture comme
ailleurs21
Plus geacuteneacuteralement en ce qui concerne les reacutesultats tangibles du Doha Round 22
notamment dans les dossiers laquo sensibles raquo comme lrsquoagriculture il faudrait des condi-
tions internationales plus favorables comme en 199323 lorsque celles-ci ont permis
de sortir des impasses de lrsquoUruguay Round et du North American Free Trade Agreement
(Nafta) ce qui semble aujourdrsquohui assez improbable Par ailleurs plus de cinq ans
21 Drsquoapregraves B hagwati (2004 59) le tarif agricole moyen serait de 12 aux Eacutetats-Unis de
37 au Breacutesil et de 112 en Inde Agrave juste titre cet auteur souligne dans nombre de ses
eacutecrits que les pays en deacuteveloppement demandent aux pays deacuteveloppeacutes la reacuteduction de leurs
tarifs sans ecirctre disposeacutes agrave en faire autant Bien que cela soit vrai en termes absolus Bhagwati
neacuteglige le fait que les premiers depuis les anneacutees 1980 ont souvent reacuteduit plus vite que les
seconds leurs niveaux de protection Par exemple entre le milieu des anneacutees 1980 et lrsquoan 2000
le tarif moyen (tous secteurs) est passeacute de 66 agrave 42 en Europe de 7 agrave 4 aux Eacutetats-
Unis de 44 agrave 17 au Breacutesil et de 80 agrave 32 en Inde la libeacuteralisation unilateacuterale des
pays en deacuteveloppement a eacuteteacute importante depuis le milieu des anneacutees 1980 voir B aldwin 2006
1456 1458-1459 Drsquoautre part les pays en deacuteveloppement ont comparativement moins de pos-
sibiliteacutes de financer drsquoune faccedilon durable drsquoimportants subsides agrave la production et agrave lrsquoexportation
lesquels enfreignent gravement le libre cours des flux du commerce international 22 Deacutebut 2007 plusieurs personnaliteacutes politiques internationales dont le Preacutesident breacutesilien
notamment agrave Davos fin janvier se sont prononceacutees pour la reprise des neacutegociations du Doha
Round cependant rien nrsquoeacutetait encore trancheacute agrave ce sujet au moment de conclure la reacutedaction
de cet article 23 Au deacutebut des anneacutees 1990 peu de temps apregraves la chute du mur de Berlin et drsquoautres
changements majeurs agrave lrsquoeacutechelle mondiale survenus pendant cette peacuteriode lrsquoarriveacutee agrave la Maison
Blanche de lrsquoAdministration Clinton en 1993 alors relativement plus activiste de ce point de
vue a permis le deacuteblocage drsquoun certain nombre drsquoimpasses dans les neacutegociations commerciales
internationales
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ont eacuteteacute neacutecessaires pour que le Tokyo Round (1973-1979) soit conclu plus de sept
ans pour lrsquoUruguay Round (1986-1993) il faudrait donc beaucoup de chance pour
que le Doha Round soit conclu dans un temps plus court compte tenu de son
agenda ndash reconnu par tous comme tregraves difficile ndash des coucircts qursquoil implique agrave court
terme pour des groupes politiquement puissants dans les pays deacuteveloppeacutes sans
compter que lrsquoOMC compte doreacutenavant un nombre bien plus eacuteleveacute de membres
Enfin srsquoagissant de la strateacutegie breacutesilienne dans ce domaine elle ne pourra ecirctre
pleinement eacutevalueacutee que dans les anneacutees agrave venir au vu de ses reacutesultats
Les choix de politique eacutetrangegravere prioriteacutes et indeacutecisions
En ce qui concerne les orientations geacuteostrateacutegiques des relations eacuteconomiques
exteacuterieures plusieurs voies sont possibles qui drsquoailleurs ne srsquoopposent pas neacuteces-
sairement Au-delagrave du multilateacuteralisme (en principe une perspective plus globale
qui nrsquoimplique pas de discrimination commerciale) lrsquointeacutegration eacuteconomique est
orienteacutee vers les pays et les reacutegions proches mais pas exclusivement (reacutegionalisa-
tion) Actuellement la plupart des pays et le Breacutesil ne fait pas exception ont une
politique commerciale baseacutee sur un certain dosage de multilateacuteralisme et
drsquointeacutegration reacutegionale Drsquoautre part outre les deux dimensions preacuteceacutedentes il
peut y avoir des accords bilateacuteraux ou de simples prioriteacutes geacuteographiques sans
aucun engagement pour les autres pays et nrsquoentraicircnant que des mesures unilateacute-
rales pour stimuler les eacutechanges dans les directions deacutesireacutees
Qursquoen est-il des options geacuteostrateacutegiques de la politique commerciale breacutesilienne
Parmi les regroupements qui ont marqueacute cette peacuteriode il faut noter 1) le Mercosul
et le reste de lrsquoAmeacuterique latine 2) les relations Sud-Sud et lrsquoAfrique 3) lrsquoAlca le
Mercoeuro24 ou les deux ce qui pose la question drsquoaccords possibles agrave lrsquoeacutechelle
continentale ou extracontinentale (et entre pays deacuteveloppeacutes et en voie de deacutevelop-
pement) Ces champs drsquoaction sont vastes et varieacutes ce qui nrsquoest pas surprenant
car le commerce exteacuterieur breacutesilien se preacutesente de faccedilon assez diversifieacutee geacuteogra-
phiquement25 Neacuteanmoins pour eacutevaluer les diffeacuterentes voies de renforcement des
liens eacuteconomiques internationaux plus que pour faire le bilan du passeacute il faut
tenir compte de leur potentiel futur notamment agrave moyen terme
Comme nous lrsquoavons deacutejagrave remarqueacute la creacuteation du Mercosul au deacutebut des
anneacutees 1990 a eacuteteacute agrave lrsquoorigine drsquoun laquo grand bond en avant raquo pour la politique
commerciale breacutesilienne et pour lrsquoAmeacuterique latine tout entiegravere dans la mesure ougrave
ce groupement eacutetait plus ambitieux et concret que ceux qui lrsquoavaient preacuteceacutedeacute
(drsquoune certaine maniegravere lrsquoexpeacuterience des quatre pays fondateurs du laquo cocircne sud raquo
24 Terme utiliseacute pour deacutesigner le projet de creacuteation drsquoune zone de libre-eacutechange entre lrsquoUnion
europeacuteenne et le Mercosul (deacutecision du sommet de Madrid en 1995) et la possibiliteacute drsquoun ren-
forcement geacuteneacuteral des liens eacuteconomiques entre les deux blocs voir S ilva 2004 263 25 Distribution du commerce exteacuterieur breacutesilien en 1999-2002 pour les exportations Union
europeacuteenne 263 Eacutetats-Unis 244 Aladi (Association latino-ameacutericaine drsquointeacutegration y
compris le Mercosul) 205 Asie et Moyen-Orient 125 et autres 161 et pour les
importations Union europeacuteenne 274 Eacutetats-Unis 233 Aladi 189 Asie et Moyen-
Orient 154 et autres 15 G onccedilalves 2005 265 et 269
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se rapprochait des pratiques europeacuteennes drsquointeacutegration) Par ailleurs le Breacutesil eacutetant
de loin la plus grande eacuteconomie du bloc son rocircle y fut deacuteterminant agrave maints
eacutegards Du point de vue de ses options geacuteographiques le gouvernement Lula a
nettement accordeacute la prioriteacute au Mercosul et par extension naturelle agrave lrsquoAmeacuterique
latine (Meyer 2005 61) Jusqursquoagrave preacutesent des accords drsquoassociation ont eacuteteacute signeacutes
avec le Chili la Bolivie le Peacuterou la Colombie et lrsquoEacutequateur puis le Venezuela
est devenu un Eacutetat membre en 2006 Cependant malgreacute les premiegraveres anneacutees
favorables le moins que lrsquoon puisse dire est qursquoen raison de diffeacuterents facteurs
dont la grave crise de lrsquoArgentine qui a deacutebuteacute en 1999 et exploseacute en 2001-2002
le Mercosul stagne depuis et a cesseacute drsquoapprofondir son ancrage Chaque Eacutetat
membre srsquoest enfermeacute dans ses problegravemes particuliers et le Mercosul reste un
exemple drsquointeacutegration reacutegionale sans coordination eacuteconomique (Baer et al 2002)
Certes ses liens avec la Communauteacute andine se sont resserreacutes et des neacutegociations
ont eacuteteacute reacutealiseacutees avec drsquoautres pays (le Mexique par exemple) ou drsquoautres groupes
mais leur ampleur reste modeste et compte tenu de lrsquoexpeacuterience drsquointeacutegration de
la reacutegion les espoirs sont reacuteserveacutes Lrsquoimpasse de lrsquoAlca analyseacutee plus loin nrsquoest
pas eacutetrangegravere agrave cette eacutevolution Pour avoir une vue drsquoensemble sur cette option
dirigeacutee vers lrsquoAmeacuterique latine le principal fait agrave retenir est lrsquoentreacutee du Venezuela
dans le Mercosul
Les relations Sud-Sud (hors Ameacuterique latine) sont une autre dimension de la
politique commerciale breacutesilienne qui a pris de lrsquoimportance du moins du point
de vue diplomatique (Meyer 2005) bien que drsquoune faccedilon geacuteneacuterale elles nrsquoaient
pas pris la forme drsquoune inteacutegration reacutegionale Drsquoune part les relations du Breacutesil
avec la Chine lrsquoInde lrsquoAfrique du Sud et drsquoautres eacuteconomies eacutemergentes se sont
deacuteveloppeacutees agrave plusieurs niveaux (multilateacuteraux ou bilateacuteraux) notamment au sein
du G20 accompagnant lrsquointensification rapide des eacutechanges commerciaux Drsquoautre
part le cas de lrsquoAfrique dans son ensemble est particuliegraverement repreacutesentatif de
la tendance Sud-Sud et plusieurs initiatives ont eacuteteacute lanceacutees par le gouvernement
breacutesilien dans le but drsquoun renforcement des relations commerciales avec ce conti-
nent geacuteographiquement proche (Oliveira amp Mouratildeo 2005 Coelho amp Saraiva
2004)
Bien qursquoils repreacutesentent eacutegalement deux orientations importantes de la politique
commerciale breacutesilienne reconnues par le gouvernement Lula lrsquoAlca et le Mercoeuro
nrsquoont pas connu drsquoavanceacutees pratiques significatives pendant cette peacuteriode En outre
comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment ces orientations nrsquoont pas eacuteteacute prioritaires
dans la politique internationale du gouvernement Lula qui favorisait le Doha Round
Srsquoagissant de processus remontant deacutejagrave aux anneacutees 1990 dont lrsquoentreacutee en vigueur
fondamentalement sous la forme drsquoune zone de libre-eacutechange eacutetait initialement
preacutevue pour 2005 lrsquoimpression est qursquoils traicircnent en longueur sans qursquoon puisse
reacuteellement entrevoir la fin des neacutegociations qui nrsquoont pas eacuteteacute abandonneacutees pour
autant Indeacutependamment de la multipliciteacute drsquoacteurs qursquoil faudrait prendre
en compte la question serait de savoir quel degreacute de pression a eacuteteacute exerceacute ndash ou
non ndash par le gouvernement breacutesilien agrave ce sujet LrsquoAlca est apparue drsquoabord comme
une sorte drsquoillustration de ladite theacuteorie des reacutegions naturelles (dans ce cas les
Ameacuteriques de lrsquoAlaska agrave la Terre de Feu) Mais compte tenu de lrsquounilateacuteralisme
traditionnel des Eacutetats-Unis envers lrsquoAmeacuterique latine et de lrsquoeacuteventail limiteacute des
produits inclus dans ces neacutegociations les pays de la reacutegion sont resteacutes reacuteticents agrave
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cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
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1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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ont eacuteteacute neacutecessaires pour que le Tokyo Round (1973-1979) soit conclu plus de sept
ans pour lrsquoUruguay Round (1986-1993) il faudrait donc beaucoup de chance pour
que le Doha Round soit conclu dans un temps plus court compte tenu de son
agenda ndash reconnu par tous comme tregraves difficile ndash des coucircts qursquoil implique agrave court
terme pour des groupes politiquement puissants dans les pays deacuteveloppeacutes sans
compter que lrsquoOMC compte doreacutenavant un nombre bien plus eacuteleveacute de membres
Enfin srsquoagissant de la strateacutegie breacutesilienne dans ce domaine elle ne pourra ecirctre
pleinement eacutevalueacutee que dans les anneacutees agrave venir au vu de ses reacutesultats
Les choix de politique eacutetrangegravere prioriteacutes et indeacutecisions
En ce qui concerne les orientations geacuteostrateacutegiques des relations eacuteconomiques
exteacuterieures plusieurs voies sont possibles qui drsquoailleurs ne srsquoopposent pas neacuteces-
sairement Au-delagrave du multilateacuteralisme (en principe une perspective plus globale
qui nrsquoimplique pas de discrimination commerciale) lrsquointeacutegration eacuteconomique est
orienteacutee vers les pays et les reacutegions proches mais pas exclusivement (reacutegionalisa-
tion) Actuellement la plupart des pays et le Breacutesil ne fait pas exception ont une
politique commerciale baseacutee sur un certain dosage de multilateacuteralisme et
drsquointeacutegration reacutegionale Drsquoautre part outre les deux dimensions preacuteceacutedentes il
peut y avoir des accords bilateacuteraux ou de simples prioriteacutes geacuteographiques sans
aucun engagement pour les autres pays et nrsquoentraicircnant que des mesures unilateacute-
rales pour stimuler les eacutechanges dans les directions deacutesireacutees
Qursquoen est-il des options geacuteostrateacutegiques de la politique commerciale breacutesilienne
Parmi les regroupements qui ont marqueacute cette peacuteriode il faut noter 1) le Mercosul
et le reste de lrsquoAmeacuterique latine 2) les relations Sud-Sud et lrsquoAfrique 3) lrsquoAlca le
Mercoeuro24 ou les deux ce qui pose la question drsquoaccords possibles agrave lrsquoeacutechelle
continentale ou extracontinentale (et entre pays deacuteveloppeacutes et en voie de deacutevelop-
pement) Ces champs drsquoaction sont vastes et varieacutes ce qui nrsquoest pas surprenant
car le commerce exteacuterieur breacutesilien se preacutesente de faccedilon assez diversifieacutee geacuteogra-
phiquement25 Neacuteanmoins pour eacutevaluer les diffeacuterentes voies de renforcement des
liens eacuteconomiques internationaux plus que pour faire le bilan du passeacute il faut
tenir compte de leur potentiel futur notamment agrave moyen terme
Comme nous lrsquoavons deacutejagrave remarqueacute la creacuteation du Mercosul au deacutebut des
anneacutees 1990 a eacuteteacute agrave lrsquoorigine drsquoun laquo grand bond en avant raquo pour la politique
commerciale breacutesilienne et pour lrsquoAmeacuterique latine tout entiegravere dans la mesure ougrave
ce groupement eacutetait plus ambitieux et concret que ceux qui lrsquoavaient preacuteceacutedeacute
(drsquoune certaine maniegravere lrsquoexpeacuterience des quatre pays fondateurs du laquo cocircne sud raquo
24 Terme utiliseacute pour deacutesigner le projet de creacuteation drsquoune zone de libre-eacutechange entre lrsquoUnion
europeacuteenne et le Mercosul (deacutecision du sommet de Madrid en 1995) et la possibiliteacute drsquoun ren-
forcement geacuteneacuteral des liens eacuteconomiques entre les deux blocs voir S ilva 2004 263 25 Distribution du commerce exteacuterieur breacutesilien en 1999-2002 pour les exportations Union
europeacuteenne 263 Eacutetats-Unis 244 Aladi (Association latino-ameacutericaine drsquointeacutegration y
compris le Mercosul) 205 Asie et Moyen-Orient 125 et autres 161 et pour les
importations Union europeacuteenne 274 Eacutetats-Unis 233 Aladi 189 Asie et Moyen-
Orient 154 et autres 15 G onccedilalves 2005 265 et 269
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se rapprochait des pratiques europeacuteennes drsquointeacutegration) Par ailleurs le Breacutesil eacutetant
de loin la plus grande eacuteconomie du bloc son rocircle y fut deacuteterminant agrave maints
eacutegards Du point de vue de ses options geacuteographiques le gouvernement Lula a
nettement accordeacute la prioriteacute au Mercosul et par extension naturelle agrave lrsquoAmeacuterique
latine (Meyer 2005 61) Jusqursquoagrave preacutesent des accords drsquoassociation ont eacuteteacute signeacutes
avec le Chili la Bolivie le Peacuterou la Colombie et lrsquoEacutequateur puis le Venezuela
est devenu un Eacutetat membre en 2006 Cependant malgreacute les premiegraveres anneacutees
favorables le moins que lrsquoon puisse dire est qursquoen raison de diffeacuterents facteurs
dont la grave crise de lrsquoArgentine qui a deacutebuteacute en 1999 et exploseacute en 2001-2002
le Mercosul stagne depuis et a cesseacute drsquoapprofondir son ancrage Chaque Eacutetat
membre srsquoest enfermeacute dans ses problegravemes particuliers et le Mercosul reste un
exemple drsquointeacutegration reacutegionale sans coordination eacuteconomique (Baer et al 2002)
Certes ses liens avec la Communauteacute andine se sont resserreacutes et des neacutegociations
ont eacuteteacute reacutealiseacutees avec drsquoautres pays (le Mexique par exemple) ou drsquoautres groupes
mais leur ampleur reste modeste et compte tenu de lrsquoexpeacuterience drsquointeacutegration de
la reacutegion les espoirs sont reacuteserveacutes Lrsquoimpasse de lrsquoAlca analyseacutee plus loin nrsquoest
pas eacutetrangegravere agrave cette eacutevolution Pour avoir une vue drsquoensemble sur cette option
dirigeacutee vers lrsquoAmeacuterique latine le principal fait agrave retenir est lrsquoentreacutee du Venezuela
dans le Mercosul
Les relations Sud-Sud (hors Ameacuterique latine) sont une autre dimension de la
politique commerciale breacutesilienne qui a pris de lrsquoimportance du moins du point
de vue diplomatique (Meyer 2005) bien que drsquoune faccedilon geacuteneacuterale elles nrsquoaient
pas pris la forme drsquoune inteacutegration reacutegionale Drsquoune part les relations du Breacutesil
avec la Chine lrsquoInde lrsquoAfrique du Sud et drsquoautres eacuteconomies eacutemergentes se sont
deacuteveloppeacutees agrave plusieurs niveaux (multilateacuteraux ou bilateacuteraux) notamment au sein
du G20 accompagnant lrsquointensification rapide des eacutechanges commerciaux Drsquoautre
part le cas de lrsquoAfrique dans son ensemble est particuliegraverement repreacutesentatif de
la tendance Sud-Sud et plusieurs initiatives ont eacuteteacute lanceacutees par le gouvernement
breacutesilien dans le but drsquoun renforcement des relations commerciales avec ce conti-
nent geacuteographiquement proche (Oliveira amp Mouratildeo 2005 Coelho amp Saraiva
2004)
Bien qursquoils repreacutesentent eacutegalement deux orientations importantes de la politique
commerciale breacutesilienne reconnues par le gouvernement Lula lrsquoAlca et le Mercoeuro
nrsquoont pas connu drsquoavanceacutees pratiques significatives pendant cette peacuteriode En outre
comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment ces orientations nrsquoont pas eacuteteacute prioritaires
dans la politique internationale du gouvernement Lula qui favorisait le Doha Round
Srsquoagissant de processus remontant deacutejagrave aux anneacutees 1990 dont lrsquoentreacutee en vigueur
fondamentalement sous la forme drsquoune zone de libre-eacutechange eacutetait initialement
preacutevue pour 2005 lrsquoimpression est qursquoils traicircnent en longueur sans qursquoon puisse
reacuteellement entrevoir la fin des neacutegociations qui nrsquoont pas eacuteteacute abandonneacutees pour
autant Indeacutependamment de la multipliciteacute drsquoacteurs qursquoil faudrait prendre
en compte la question serait de savoir quel degreacute de pression a eacuteteacute exerceacute ndash ou
non ndash par le gouvernement breacutesilien agrave ce sujet LrsquoAlca est apparue drsquoabord comme
une sorte drsquoillustration de ladite theacuteorie des reacutegions naturelles (dans ce cas les
Ameacuteriques de lrsquoAlaska agrave la Terre de Feu) Mais compte tenu de lrsquounilateacuteralisme
traditionnel des Eacutetats-Unis envers lrsquoAmeacuterique latine et de lrsquoeacuteventail limiteacute des
produits inclus dans ces neacutegociations les pays de la reacutegion sont resteacutes reacuteticents agrave
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 101
cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
0
10
20
30
40
50
60
70
80
1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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se rapprochait des pratiques europeacuteennes drsquointeacutegration) Par ailleurs le Breacutesil eacutetant
de loin la plus grande eacuteconomie du bloc son rocircle y fut deacuteterminant agrave maints
eacutegards Du point de vue de ses options geacuteographiques le gouvernement Lula a
nettement accordeacute la prioriteacute au Mercosul et par extension naturelle agrave lrsquoAmeacuterique
latine (Meyer 2005 61) Jusqursquoagrave preacutesent des accords drsquoassociation ont eacuteteacute signeacutes
avec le Chili la Bolivie le Peacuterou la Colombie et lrsquoEacutequateur puis le Venezuela
est devenu un Eacutetat membre en 2006 Cependant malgreacute les premiegraveres anneacutees
favorables le moins que lrsquoon puisse dire est qursquoen raison de diffeacuterents facteurs
dont la grave crise de lrsquoArgentine qui a deacutebuteacute en 1999 et exploseacute en 2001-2002
le Mercosul stagne depuis et a cesseacute drsquoapprofondir son ancrage Chaque Eacutetat
membre srsquoest enfermeacute dans ses problegravemes particuliers et le Mercosul reste un
exemple drsquointeacutegration reacutegionale sans coordination eacuteconomique (Baer et al 2002)
Certes ses liens avec la Communauteacute andine se sont resserreacutes et des neacutegociations
ont eacuteteacute reacutealiseacutees avec drsquoautres pays (le Mexique par exemple) ou drsquoautres groupes
mais leur ampleur reste modeste et compte tenu de lrsquoexpeacuterience drsquointeacutegration de
la reacutegion les espoirs sont reacuteserveacutes Lrsquoimpasse de lrsquoAlca analyseacutee plus loin nrsquoest
pas eacutetrangegravere agrave cette eacutevolution Pour avoir une vue drsquoensemble sur cette option
dirigeacutee vers lrsquoAmeacuterique latine le principal fait agrave retenir est lrsquoentreacutee du Venezuela
dans le Mercosul
Les relations Sud-Sud (hors Ameacuterique latine) sont une autre dimension de la
politique commerciale breacutesilienne qui a pris de lrsquoimportance du moins du point
de vue diplomatique (Meyer 2005) bien que drsquoune faccedilon geacuteneacuterale elles nrsquoaient
pas pris la forme drsquoune inteacutegration reacutegionale Drsquoune part les relations du Breacutesil
avec la Chine lrsquoInde lrsquoAfrique du Sud et drsquoautres eacuteconomies eacutemergentes se sont
deacuteveloppeacutees agrave plusieurs niveaux (multilateacuteraux ou bilateacuteraux) notamment au sein
du G20 accompagnant lrsquointensification rapide des eacutechanges commerciaux Drsquoautre
part le cas de lrsquoAfrique dans son ensemble est particuliegraverement repreacutesentatif de
la tendance Sud-Sud et plusieurs initiatives ont eacuteteacute lanceacutees par le gouvernement
breacutesilien dans le but drsquoun renforcement des relations commerciales avec ce conti-
nent geacuteographiquement proche (Oliveira amp Mouratildeo 2005 Coelho amp Saraiva
2004)
Bien qursquoils repreacutesentent eacutegalement deux orientations importantes de la politique
commerciale breacutesilienne reconnues par le gouvernement Lula lrsquoAlca et le Mercoeuro
nrsquoont pas connu drsquoavanceacutees pratiques significatives pendant cette peacuteriode En outre
comme nous lrsquoavons vu preacuteceacutedemment ces orientations nrsquoont pas eacuteteacute prioritaires
dans la politique internationale du gouvernement Lula qui favorisait le Doha Round
Srsquoagissant de processus remontant deacutejagrave aux anneacutees 1990 dont lrsquoentreacutee en vigueur
fondamentalement sous la forme drsquoune zone de libre-eacutechange eacutetait initialement
preacutevue pour 2005 lrsquoimpression est qursquoils traicircnent en longueur sans qursquoon puisse
reacuteellement entrevoir la fin des neacutegociations qui nrsquoont pas eacuteteacute abandonneacutees pour
autant Indeacutependamment de la multipliciteacute drsquoacteurs qursquoil faudrait prendre
en compte la question serait de savoir quel degreacute de pression a eacuteteacute exerceacute ndash ou
non ndash par le gouvernement breacutesilien agrave ce sujet LrsquoAlca est apparue drsquoabord comme
une sorte drsquoillustration de ladite theacuteorie des reacutegions naturelles (dans ce cas les
Ameacuteriques de lrsquoAlaska agrave la Terre de Feu) Mais compte tenu de lrsquounilateacuteralisme
traditionnel des Eacutetats-Unis envers lrsquoAmeacuterique latine et de lrsquoeacuteventail limiteacute des
produits inclus dans ces neacutegociations les pays de la reacutegion sont resteacutes reacuteticents agrave
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 101
cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
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20
30
40
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70
80
1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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cette initiative lanceacutee par George Bush pegravere en 1990 et la situation nrsquoa guegravere
changeacute depuis
En ce qui concerne les relations du Mercosul avec lrsquoUnion europeacuteenne crsquoest
toujours lrsquoimpasse presque trois ans apregraves lrsquoajournement des neacutegociations compre-
nant de reacuteelles concessions sur certains produits agricoles repreacutesentatifs suite agrave la
proposition avanceacutee en avril 2004 ndash agrave lrsquoeacutepoque ougrave Pascal Lamy eacutetait commissaire
europeacuteen aux relations exteacuterieures ndash qui semblait devoir finalement deacutebloquer les
neacutegociations La crise des reacutefeacuterendums et les nouveaux eacutelargissements nrsquoont pas
favoriseacute lrsquoinitiative de lrsquoUE toujours tregraves timide dans la reacutegion26 de son cocircteacute le
Breacutesil semble se concentrer davantage sur les questions purement multilateacuterales
(Doha Round et G-20) et les autres membres du Mercosul semblent encore moins
capables de faire entendre leur voix sur ce sujet Pourtant dans un article publieacute
il y a une dizaine drsquoanneacutees mais qui reste drsquoactualiteacute dans ses conclusions essen-
tielles Panagariya (1996) attirait deacutejagrave lrsquoattention sur le fait que les pays du Mercosul
devraient srsquointeacuteresser davantage aux conditions drsquoaccegraves au marcheacute de lrsquoUE mecircme
relativement agrave lrsquoAlca car les barriegraveres du premier bloc eacutetant plus eacuteleveacutees leur
eacutelimination serait plus avantageuse
Multilateacuteralisme versus inteacutegration reacutegionale
Compte tenu de ces deacuteveloppements quelques reacuteflexions srsquoimposent agrave propos de
cet enjeu majeur de la politique commerciale breacutesilienne Lrsquointeacuterecirct du gouverne-
ment Lula pour le Doha Round semble tout agrave fait justifieacute mais son peu de cas
pour lrsquointeacutegration eacuteconomique (y compris un eacutelargissement du Mercosul sans
approfondissement seacuterieux)27 a-t-il un sens Il est vrai qursquoune bonne insertion dans
lrsquoeacuteconomie mondiale peut ne pas passer neacutecessairement par lrsquointeacutegration eacutecono-
mique (voir les cas du Japon et de la Chine qui nrsquoont pas joueacute cette carte pendant
longtemps) mais il ne faudrait pas en minimiser les potentialiteacutes Comme le mon-
tre Baldwin (2006) dans les phases avanceacutees de la libeacuteralisation des eacutechanges
mondiaux on combinera de plus en plus multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale
de maniegravere ineacutedite et sophistiqueacutee ce qursquoil appelle laquo reacutegionalisation multilateacuteraliste raquo
En sous-estimant les formes plus avanceacutees drsquointeacutegration la politique commerciale
breacutesilienne parait dans les faits ecirctre tombeacutee dans un piegravege freacutequent aux Eacutetats-
Unis notamment dans les milieux universitaires et politiques selon lequel lrsquointeacute-
gration reacutegionale ougrave seules les expeacuteriences laquo leacutegegravere raquo de type zones de libre-eacutechange
semblent viables srsquooppose au multilateacuteralisme et au libre-eacutechange en oubliant que
les deux processus sont souvent en forte interaction
Dans un autre ordre drsquoideacutees lrsquoAlca et le Mercoeuro preacutesentent un inteacuterecirct non
tant en eux-mecircmes mais plutocirct parce qursquoils constituent des ouvertures possibles
vers des marcheacutes plus eacutelargis plus avanceacutes ayant un potentiel compeacutetitif eacuteleveacute Il
26 Pour une eacutetude approfondie de cette question voir P orto amp F locircres J r 2006 324-325 27 Agrave premiegravere vue lrsquoentreacutee du Venezuela dans le Mercosul semble logique Mais fait isoleacute
au cours de cette peacuteriode elle ne favorise pas lrsquoideacutee de consistance politique et eacuteconomique du
groupement bien au contraire eacutetant donneacute les caracteacuteristiques du reacutegime du colonel Hugo
Chavez
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
0
10
20
30
40
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70
80
1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
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Narlikar A 2003 International Trade and Developing Countries Bargaining Coalitions in the GATT amp
WTO Londres Routledge
LUSO 142_1037_86-108indd 107LUSO 142_1037_86-108indd 107 111607 12746 PM111607 12746 PM
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mdashmdashmdash 2005 The World Trade Organization Oxford University Press Oxford
Oliveira H Altemani de amp Mouratildeo FA Albuquerque 2005 laquo O processo de definiccedilatildeo da
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mdashmdashmdash 2004 laquo A poliacutetica comercial comum raquo in A Romatildeo (ed) Economia Europeia Oeiras
Celta Editora 225-267 (laquo Econoacutemicas raquo)
Strange S 1994 laquo Wake Up Krasner The World Has Changed raquo Review of International Political
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UNCTAD 2005 laquo Target for Developing Countries Should Be Products with Higher Value
Added Nobel Laureate Recommends raquo Genegraveve UNCTAD communiqueacute de presse 2 novembre
ltwwwunctadorgpressgt
Wolf M 2006 laquo Chile Blazes the Trail for Latin America raquo Financial Times 13 deacutecembre
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y a agrave ce sujet un deacutebat en cours au Breacutesil que le gouvernement ne semble pas
avoir trancheacute du moins drsquoune faccedilon claire Certains comme Nogueira Batista Jr
(2005) rejette ces deux alternatives dans les termes suivants
laquo la formation de lrsquoAlca renforcerait et consoliderait des tendances deacutefavorables qui
jalonnent lrsquoinsertion internationale du Breacutesil depuis les anneacutees 1990 [ ] Il nrsquoexiste
pas de diffeacuterence essentielle entre lrsquoAlca et lrsquoaccord de libre-eacutechange avec lrsquoUnion
europeacuteenne [ ] On trouve ici la mecircme eacutequivoque de nature strateacutegique [agrave savoir]
la supposition qursquoun pays en deacuteveloppement comme le Breacutesil puisse ecirctre inteacuteresseacute
par des zones de libre-eacutechange avec les eacuteconomies beaucoup plus puissantes et conso-
lideacutees comme celles des pays deacuteveloppeacutes [ ] Il serait hasardeux drsquoexposer nos
entreprises agrave la concurrence impitoyable et sans entraves avec les grandes entreprises
europeacuteennes raquo28
Drsquoautres comme Fernando Mouratildeo (2005) professeur agrave lrsquouniversiteacute de Satildeo Paulo
et expert en relations internationales essaient de ne pas aborder la proposition de
lrsquoAlca de faccedilon lineacuteaire Au lieu drsquoopposer un refus preacutecipiteacute aux processus
drsquointeacutegration eacuteconomique internationale en particulier avec des pays plus deacutevelop-
peacutes Mouratildeo preacuteconise plus geacuteneacuteralement un engagement dans les neacutegociations
sans pour autant abandonner les discussions de principes ndash leur mise en œuvre
eacutetant de toute faccedilon graduelle car une compeacutetition directe et immeacutediate des
entreprises entre de tels groupements de pays sans preacuteparation ni deacutefense possibles
de la part des pays laquo plus faibles raquo ne peut ecirctre raisonnablement envisageacutee De
plus le contenu des projets sous-jacents aux neacutegociations pouvant mener agrave des
accords nrsquoeacutetant pas deacutefini une fois pour toutes il est selon lui neacutecessaire drsquoy
prendre part pour les changer (ceux-ci doivent naturellement porter sur des pro-
duits dans lesquels le Breacutesil et drsquoautres pays en situation similaire ont des avantages
sinon ils nrsquoont pas de sens) Enfin un autre argument consiste agrave mettre en doute
la volonteacute des pays deacuteveloppeacutes agrave signer des accords comme lrsquoAlca et le Mercœuro
dans la mesure ougrave ceux-ci repreacutesenteraient de veacuteritables ouvertures de leur marcheacute
notamment dans les secteurs dits laquo sensibles raquo inteacuteressant les pays en deacuteveloppement
Donc rester hors des neacutegociations et les attaquer serait endosser la responsabiliteacute
de lrsquoeacutechec sans beacuteneacutefice particulier
La question nrsquoest pas celle du deacuteveloppement des liens commerciaux et autres
(par lrsquointeacutegration reacutegionale ou non) entre lrsquoAmeacuterique latine et lrsquoAfrique mais drsquoune
prioriteacute qui lui serait donneacutee au deacutetriment de la recherche drsquoune orientation vers
les pays deacuteveloppeacutes Ainsi compte tenu de lrsquohomogeacuteneacuteiteacute des pays latino-ameacutericains
agrave bien des eacutegards on peut se demander si une polarisation des eacutechanges vers des
eacuteconomies peu deacuteveloppeacutees29 ne conduirait pas agrave des reacutesultats autres que ceux
escompteacutes au deacutepart agrave savoir la marginalisation du Breacutesil face aux grands cou-
28 Citations extraites de B atista J r 2005 84 et 133 Eacutevidemment les thegraveses de cet auteur
sont ici fort reacutesumeacutees 29 On sait que le commerce intrabranche caracteacuterise la dynamique commerciale et le commerce
exteacuterieur entre les pays les plus deacuteveloppeacutes Celui-ci serait limiteacute par cette orientation vers les
eacuteconomies moins deacuteveloppeacutees au deacutetriment drsquoune dynamisation possible du commerce interna-
tional Enfin ce commerce serait eacutegalement affecteacute par lrsquoinsuffisance des routes et autres moyens
de transport
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
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10
20
30
40
50
60
70
80
1999
Breacutesil
Chine
Inde
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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rants eacuteconomiques mondiaux et agrave sa deacutependance vis-agrave-vis des laquo sautes drsquohumeur raquo
des matiegraveres premiegraveres Il nrsquoest pas impossible qursquoagrave lrsquoavenir lrsquoAmeacuterique latine et
lrsquoAfrique dans leur ensemble deviennent durablement des reacutegions de fort dynamisme
eacuteconomique mais elles ont encore un long chemin agrave parcourir avant drsquoamorcer
ce processus Qursquoil y ait ou non inteacutegration comme le deacutemontre lrsquoexpeacuterience des
pays asiatiques y compris celle de la Chine si lrsquoon veut acceacuteleacuterer le rattrapage
eacuteconomique et supprimer les retards ce serait une erreur que de neacutegliger le res-
serrement des liens commerciaux et drsquoinvestissement avec les pays et les reacutegions
ougrave la compeacutetition fonctionne reacuteellement
La politique exteacuterieure du Breacutesil dans sa strateacutegie de deacuteveloppement
Il est inteacuteressant de comparer la strateacutegie internationale du Breacutesil au cours de
cette peacuteriode avec celles de la Chine et de lrsquoInde En effet ces deux pays le
premier plus ouvertement et drsquoune faccedilon peut-ecirctre plus approfondie que le second
(mais celui-ci drsquoune faccedilon tout de mecircme assez deacutetermineacutee)30 ont joueacute agrave fond la
carte de la mondialisation Cette question nrsquoest pas seulement acadeacutemique elle a
aussi une porteacutee pratique dans le deacutebat sur le taux de croissance au Breacutesil ndash limiteacute
en moyenne agrave 32 par an de 2003 agrave 200631 donc nettement plus faible que
ceux de la plupart des grandes eacuteconomies eacutemergentes en particulier de la
Chine et de lrsquoInde Crsquoest eacutegalement un objectif central si lrsquoon prend en compte
la faible croissance du PIB breacutesilien par habitant de 1980 agrave 2004 (Cunha 2006
11) De plus eacutetant donneacute la prioriteacute aux objectifs sociaux dans le programme
politique du gouvernement Lula ceux-ci ne pourront ecirctre durablement satisfaits
que gracircce agrave une croissance soutenue (Amman 2005) Il est donc neacutecessaire
drsquoobserver ce que le gouvernement a fait de ce point de vue et drsquoanalyser comment
le rocircle de lrsquoexteacuterieur peut ecirctre optimiseacute pour contribuer agrave cet objectif
Le comportement des investisseurs eacutetrangers est tregraves significatif de ce point de
vue Il faut en effet noter que le Breacutesil a nettement perdu de son attractiviteacute par
rapport agrave la Chine et agrave lrsquoInde depuis le deacutebut de cette deacutecennie (cf figure 4)
Certes lrsquoInde reccediloit beaucoup moins drsquoinvestissement direct eacutetranger (IDE) que le
Breacutesil mais elle est en train drsquoeacutevoluer tregraves vite (passant de 36 milliards US$
drsquoentreacutees drsquoIDE en 2000 agrave 95 milliards US$ en 2006) et ainsi de rattraper son
retard dans ce domaine essentiel des relations exteacuterieures Aussi du point de vue
de lrsquoIDE lrsquohistoire des trois pays nrsquoest-elle pas la mecircme contrairement agrave la Chine
et agrave lrsquoInde le Breacutesil avait deacutejagrave beacuteneacuteficieacute de deux vagues drsquoentreacutees drsquoinvestissements
eacutetrangers au cours des derniegraveres deacutecennies la premiegravere dans les anneacutees 1960
et 1970 et la seconde entre 1995 et 2000 (celle-ci notons-le eacutetant plutocirct lieacutee au
30 Rappelons que lrsquoInde participe de plus en plus au marcheacute international mais elle maintient
un niveau eacuteleveacute de protection tarifaire (voir aussi G onccedilalves 2005 271) 31 Nous tenons ici compte de la reacuteeacutevaluation du PIB breacutesilien faite par LrsquoIBGE en mars 2007
qui lrsquoa releveacute drsquoenviron 10 sur lrsquoensemble des anneacutees 2000 (The Economist 24 mars 2007 57)
Drsquoapregraves plusieurs sources avant mars 2007 le taux annuel moyen de croissance du PIB pour
2003-2006 eacutetait dans la fourchette 26-28
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
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Breacutesil
Chine
Inde
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Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
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toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
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processus de privatisation alors en cours ensuite geleacute par le gouvernement Lula)
Le Breacutesil qui avait occupeacute parmi les pays en deacuteveloppement la premiegravere place
dans la destination des entreacutees drsquoIDE au cours des anneacutees 199032 (Mody 2007 3)
a nettement reculeacute dans ce classement au cours des anneacutees 2000 Lrsquoeacutevolution
constateacutee est donc relativement deacutefavorable pour le Breacutesil depuis 2000 comme
on peut le constater sur la figure 4 et ce drsquoautant plus que lrsquoon considegravere geacuteneacute-
ralement que lrsquoIDE constitue un des piliers drsquoune vraie strateacutegie englobant lrsquoexteacute-
rieur notamment en terme de transfert de technologie (Strange 1994)33 Ce
manque relatif drsquoentreacutees drsquoIDE nrsquoa pas poseacute de problegraveme en 2003-2006 agrave cause
du boom des matiegraveres premiegraveres et de lrsquoexceacutedent commercial qui srsquoen est suivi
mais il pourrait en ecirctre autrement lorsque surviendra la phase deacutepressive de leur
cycle
Eacutevidemment chaque pays suivra sa propre voie et mecircme srsquoil est improbable que
le Breacutesil ait le mecircme niveau drsquoIDE que la Chine ou que lrsquoInde on ne peut
pourtant eacutecarter lrsquoimportance majeure de cette eacutevolution deacutefavorable des IDE En
effet un nombre croissant drsquoauteurs considegraverent que ce flux est devenu un moteur
de lrsquoeacuteconomie mondiale encore plus important que le commerce (Kleinert 2004)
De plus une position strateacutegique nette sur lrsquoIDE est drsquoautant plus neacutecessaire que
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Breacutesil
Chine
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2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source UNCTAD
Fig 4 Breacutesil Chine et Inde entreacutees drsquoIDE 1999-2006
Milliards US Dollars
32 Ce flux mondial avait par ailleurs atteint des pics historiques depuis la seconde moitieacute des
anneacutees 1990 jusqursquoen 2000 bien qursquoil ait connu un fleacutechissement en 2001-2003 (M ody 2007 2) 33 Cela nrsquoest cependant pas valable pour la R amp D qui reste pour lrsquoessentiel dans le pays
drsquoorigine K leinert 2004 19-20
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les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
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Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
LUSO 142_1037_86-108indd 106LUSO 142_1037_86-108indd 106 111607 12745 PM111607 12745 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 107
toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
Instituto Superior de Economia e Gestatildeo
Bibliographie
Amman E 2005 laquo Brazilrsquos Economy under Lula The Dawn of a New Era raquo World Economics
VI (4) octobre-deacutecembre 149-169
Baer W Cavalcanti T amp Silva P 2002 laquo Economic Integration without Policy Coordination
the Case of Mercosul raquo Emerging Markets Review 3 269-291
Baldwin RE 2006 laquo Multilateralising regionalism spaghetti bowls as building blocs on the
path to global free trade raquo The World Economy XXIX (11) 1451-1518
Batista Jr P Nogueira 2005 O Brasil e a economia internacional recuperaccedilatildeo e defesa da autonomia
nacional Rio de Janeiro Elsevier ndash Editora Campus
Bhagwati J 2004 laquo Donrsquot Cry for Cancuacuten raquo Foreign Affairs janvier-feacutevrier 52-63
Bresser-Pereira LC 1996 Economic Crisis and State Reform in Brazil Towards a New Interpretation
of Latin America Lynne Rienner Publishers Boulder
Cardoso E amp Helwege A 1992 Latin Americarsquos Economy Diversity Trends and Conflicts Cambridge
(Ma) The MIT Press
Carneiro R ed 2006 A Supremacia dos mercados e a poliacutetica econocircmica do governo Lula Satildeo Paulo
Editora UNESP
Coelho PM Pinto amp Saraiva JF Sombra eds 2004 Foacuterum Brasil-Aacutefrica poliacutetica cooperaccedilatildeo e
comeacutercio Instituto Brasileiro de Relaccedilotildees Internacionais Universidade de Brasiacutelia Brasiacutelia
Cunha P 2006 laquo Dissecando a integral do erro raquo in LC Bresser-Pereira (ed) Economia Brasileira
na Encruzilhada Rio de Janeiro Editora FGV
Economist (The) 2003 laquo A Survey of Brazil Make or Break Surveys raquo 22 feacutevrier
Elson A 2006 laquo What Happened raquo Finance amp Development XL (2) 37-40
Gonccedilalves R 2005 Economia Poliacutetica Internacional Rio de Janeiro Elsevier ndash Editora Campus
Klein LR 2005 South and East Asia Leading the World Economy 13th Rauacutel Prebisch Lecture
Genegraveve 2 novembre United Nations Conference on Trade and Development (UNCTAD)
ltwwwunctadorgendocsprebisch13th_klein_enpdfgt
Kleinert J 2004 The Role of Multinational Enterprises in Globalization Berlin Springer Verlag
Laborde D amp Fontagneacute L 2007 laquo Doha les raisons drsquoun eacutechec raquo Problegravemes eacuteconomiques
17 janvier 12-15 (reproduction partielle de La Lettre du CEPII nordm 257 juin-juillet 2006)
Martiacutenez J amp Santiso J 200320004 laquo Mercados financieros y elecciones juegos de confianza
en el caso de Brasil raquo Economiacutea Exterior 27 1-11
McKinnon R 2001 laquo Can the World Economy Afford US Tax Cuts The International
Standard Redux raquo Finance amp Development International Monetary Fund juin 14-17
Messerlin P 1995 La nouvelle organisation mondiale du commerce Paris DunodIFRI
Meyer M 2005 La nouvelle diplomatie commerciale breacutesilienne Lula danse avec le Sud Paris LrsquoHarmattan
Mody A 2007 Foreign Direct Investment and the World Economy Londres Routledge
Mouratildeo F 2005 laquo Alca-Mercosul um discurso desfocado raquo in PB Casella amp RE Sanchez (eds)
Quem tem medo da ALCA Desafios e perspectivas para o Brasil Belo Horizonte Del Rey 340-396
Narlikar A 2003 International Trade and Developing Countries Bargaining Coalitions in the GATT amp
WTO Londres Routledge
LUSO 142_1037_86-108indd 107LUSO 142_1037_86-108indd 107 111607 12746 PM111607 12746 PM
108 joaquim ramos silva
mdashmdashmdash 2005 The World Trade Organization Oxford University Press Oxford
Oliveira H Altemani de amp Mouratildeo FA Albuquerque 2005 laquo O processo de definiccedilatildeo da
poliacutetica externa africana no Brasil raquo in HA de Oliveira amp JAG Albuquerque (eds) A Poliacutetica
externa brasileira na visatildeo dos seus protagonistas Rio de Janeiro Editora Luacutemen Juris 47-78
Panagariya A 1996 laquo The Free Trade Area of the Americas Good for Latin America raquo
The World Economy 19 nordm 5 septembre 485-515
Porto MC Lopes amp Flocircres Jr R Galvatildeo 2006 Teoria e poliacuteticas de integraccedilatildeo na Uniatildeo europeia
e no Mercosul Rio de Janeiro Editora FGVAlmedina
Ricupero R amp Barreto F Mello 2007 laquo A importacircncia do investimento direto estrangeiro
do Brasil no exterior para o desenvolvimento socioeconocircmico do paiacutes raquo in A Almeida (eds)
Internacionalizaccedilatildeo de empresas brasileiras perspectivas e riscos Rio de Janeiro Elsevier ndash Editora
Campus ndash Fundaccedilatildeo Dom Cabral
Santiso J 2003 The Political Economy of Emerging Markets New York Palgrave Macmillan
Silva J Ramos 1990 laquo Economic Policy for Democratic Transition (with strong popular expec-
tations for a rapid material and social improvement) raquo Lisbonne Universidade teacutecnica de
Lisboa ISEG Departamento de economia (laquo Documento de Trabalho raquo 3)
mdashmdashmdash 2004 laquo A poliacutetica comercial comum raquo in A Romatildeo (ed) Economia Europeia Oeiras
Celta Editora 225-267 (laquo Econoacutemicas raquo)
Strange S 1994 laquo Wake Up Krasner The World Has Changed raquo Review of International Political
Economy I (2) 209-219
UNCTAD 2005 laquo Target for Developing Countries Should Be Products with Higher Value
Added Nobel Laureate Recommends raquo Genegraveve UNCTAD communiqueacute de presse 2 novembre
ltwwwunctadorgpressgt
Wolf M 2006 laquo Chile Blazes the Trail for Latin America raquo Financial Times 13 deacutecembre
LUSO 142_1037_86-108indd 108LUSO 142_1037_86-108indd 108 111607 12746 PM111607 12746 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 105
les entreprises breacutesiliennes favoriseacutees par lrsquoexceacutedent courant lrsquoaccumulation de
devises et le reacuteal fort ont aussi commenceacute agrave investir significativement agrave lrsquoeacutetranger
(Ricupero amp Barreto 2007) Il faut savoir qursquoau Breacutesil en 2006 les sorties drsquoIDE
ont mecircme supplanteacute les entreacutees34 ce qui est vu sous cet angle reacuteveacutelateur de la
faiblesse de ces entreacutees
Dans le sillage de bien drsquoautres eacuteconomistes Lawrence Klein prix Nobel drsquoeacuteco-
nomie en 1980 dans sa Prebisch Lecture a recommandeacute agrave des pays comme le
Breacutesil de suivre lrsquoexemple des pays aujourdrsquohui deacuteveloppeacutes qui ne se sont pas
contenteacutes de
laquo miser uniquement sur la speacutecialisation des produits agricoles ndash car srsquoils lrsquoavaient fait
ils nrsquooccuperaient pas la place qui est la leur aujourdrsquohui ndash et qui ont eacuteteacute capables
de produire un large eacuteventail de biens et de services pour leur propre consommation
et celle du reste du monde par le biais du commerce ce qui les a conduits agrave la
position eacuteleveacutee qursquoils occupent sur lrsquoeacutechelle mondiale du bien-ecirctre mateacuteriel raquo (Klein
2005 UNCTAD 2005)
Lrsquoexpeacuterience des derniegraveres deacutecennies a mis en relief que des strateacutegies drsquointernatio-
nalisation adeacutequates (non seulement pour les petits pays comme on le croyait deacutejagrave
bien avant mais aussi pour de grands pays comme la Chine) ont eacuteteacute deacutecisives
pour acceacuteleacuterer la croissance et permettre la convergence La Chine dispose drsquoune
strateacutegie claire drsquoouverture internationale depuis la fin des anneacutees 1970 et lrsquoInde
depuis le deacutebut des anneacutees 1990 mais le Breacutesil semble toujours quelque peu
heacutesitant devant cet enjeu fondamental ndash le poids des thegraveses drsquoautonomie nationale
stricto sensu lrsquoheacuteritage de longues deacutecennies de substitution des importations etc
ne sont peut-ecirctre pas deacuteterminants mais restent toujours bien preacutesents et font
illusion Par ailleurs dans lrsquoapregraves-guerre le Breacutesil et drsquoautres pays latino-ameacutericains
ayant suivi une strateacutegie similaire ndash ce qui nrsquoa pas favoriseacute les tendances agrave
lrsquointernationalisation de leurs eacuteconomies ndash ont vu en conseacutequence leur conver-
gence reacuteelle vis-agrave-vis des Eacutetats-Unis se deacuteteacuteriorer tandis que celle des pays du
Sud-Est asiatique srsquoameacuteliorait (Elson 2006 Wolf 2006) Lrsquoaxe fondamental
de la strateacutegie neacutecessaire est lrsquoouverture agrave la concurrence internationale par la
peacuteneacutetration des marcheacutes avanceacutes et le renforcement de la compeacutetitiviteacute des
socieacuteteacutes nationales dans des marcheacutes ouverts lrsquoeacuteconomie inteacuterieure restant bien
soudeacutee au secteur exteacuterieur Lrsquoajournement continu de la mise en œuvre de cette
strateacutegie au nom de sa preacutetendue preacuteparation nrsquoest pas une solution durable et
consistante
34 Selon le journal Folha de Satildeo Paulo laquo Lrsquoinvestissement breacutesilien exteacuterieur bat des records la
sortie de ressources surpasse leur entreacutee pour la premiegravere fois raquo (22 novembre 2006) Drsquoapregraves
cette source entre janvier et octobre 2006 lrsquoIDE breacutesilien agrave lrsquoexteacuterieur a atteint 228 milliards
USD tandis que les entreacutees drsquoIDE ont eacuteteacute de lrsquoordre de 136 milliards USD Drsquoune faccedilon
significative le journal estime que le problegraveme ne reacuteside pas dans les sorties mais dans le bas
volume drsquoentreacutee des ressources relativement aux besoins du Breacutesil notamment si lrsquoon compare
ce flux avec ceux qui srsquoorientent vers les autres grandes eacuteconomies eacutemergentes Cependant le
rachat de la socieacuteteacute canadienne Inco par Vale do Rio Doce un investissement de 132 milliards
USD doit ecirctre consideacutereacute en fonction de ces chiffres de 2006
LUSO 142_1037_86-108indd 105LUSO 142_1037_86-108indd 105 111607 12745 PM111607 12745 PM
106 joaquim ramos silva
Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
LUSO 142_1037_86-108indd 106LUSO 142_1037_86-108indd 106 111607 12745 PM111607 12745 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 107
toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
Instituto Superior de Economia e Gestatildeo
Bibliographie
Amman E 2005 laquo Brazilrsquos Economy under Lula The Dawn of a New Era raquo World Economics
VI (4) octobre-deacutecembre 149-169
Baer W Cavalcanti T amp Silva P 2002 laquo Economic Integration without Policy Coordination
the Case of Mercosul raquo Emerging Markets Review 3 269-291
Baldwin RE 2006 laquo Multilateralising regionalism spaghetti bowls as building blocs on the
path to global free trade raquo The World Economy XXIX (11) 1451-1518
Batista Jr P Nogueira 2005 O Brasil e a economia internacional recuperaccedilatildeo e defesa da autonomia
nacional Rio de Janeiro Elsevier ndash Editora Campus
Bhagwati J 2004 laquo Donrsquot Cry for Cancuacuten raquo Foreign Affairs janvier-feacutevrier 52-63
Bresser-Pereira LC 1996 Economic Crisis and State Reform in Brazil Towards a New Interpretation
of Latin America Lynne Rienner Publishers Boulder
Cardoso E amp Helwege A 1992 Latin Americarsquos Economy Diversity Trends and Conflicts Cambridge
(Ma) The MIT Press
Carneiro R ed 2006 A Supremacia dos mercados e a poliacutetica econocircmica do governo Lula Satildeo Paulo
Editora UNESP
Coelho PM Pinto amp Saraiva JF Sombra eds 2004 Foacuterum Brasil-Aacutefrica poliacutetica cooperaccedilatildeo e
comeacutercio Instituto Brasileiro de Relaccedilotildees Internacionais Universidade de Brasiacutelia Brasiacutelia
Cunha P 2006 laquo Dissecando a integral do erro raquo in LC Bresser-Pereira (ed) Economia Brasileira
na Encruzilhada Rio de Janeiro Editora FGV
Economist (The) 2003 laquo A Survey of Brazil Make or Break Surveys raquo 22 feacutevrier
Elson A 2006 laquo What Happened raquo Finance amp Development XL (2) 37-40
Gonccedilalves R 2005 Economia Poliacutetica Internacional Rio de Janeiro Elsevier ndash Editora Campus
Klein LR 2005 South and East Asia Leading the World Economy 13th Rauacutel Prebisch Lecture
Genegraveve 2 novembre United Nations Conference on Trade and Development (UNCTAD)
ltwwwunctadorgendocsprebisch13th_klein_enpdfgt
Kleinert J 2004 The Role of Multinational Enterprises in Globalization Berlin Springer Verlag
Laborde D amp Fontagneacute L 2007 laquo Doha les raisons drsquoun eacutechec raquo Problegravemes eacuteconomiques
17 janvier 12-15 (reproduction partielle de La Lettre du CEPII nordm 257 juin-juillet 2006)
Martiacutenez J amp Santiso J 200320004 laquo Mercados financieros y elecciones juegos de confianza
en el caso de Brasil raquo Economiacutea Exterior 27 1-11
McKinnon R 2001 laquo Can the World Economy Afford US Tax Cuts The International
Standard Redux raquo Finance amp Development International Monetary Fund juin 14-17
Messerlin P 1995 La nouvelle organisation mondiale du commerce Paris DunodIFRI
Meyer M 2005 La nouvelle diplomatie commerciale breacutesilienne Lula danse avec le Sud Paris LrsquoHarmattan
Mody A 2007 Foreign Direct Investment and the World Economy Londres Routledge
Mouratildeo F 2005 laquo Alca-Mercosul um discurso desfocado raquo in PB Casella amp RE Sanchez (eds)
Quem tem medo da ALCA Desafios e perspectivas para o Brasil Belo Horizonte Del Rey 340-396
Narlikar A 2003 International Trade and Developing Countries Bargaining Coalitions in the GATT amp
WTO Londres Routledge
LUSO 142_1037_86-108indd 107LUSO 142_1037_86-108indd 107 111607 12746 PM111607 12746 PM
108 joaquim ramos silva
mdashmdashmdash 2005 The World Trade Organization Oxford University Press Oxford
Oliveira H Altemani de amp Mouratildeo FA Albuquerque 2005 laquo O processo de definiccedilatildeo da
poliacutetica externa africana no Brasil raquo in HA de Oliveira amp JAG Albuquerque (eds) A Poliacutetica
externa brasileira na visatildeo dos seus protagonistas Rio de Janeiro Editora Luacutemen Juris 47-78
Panagariya A 1996 laquo The Free Trade Area of the Americas Good for Latin America raquo
The World Economy 19 nordm 5 septembre 485-515
Porto MC Lopes amp Flocircres Jr R Galvatildeo 2006 Teoria e poliacuteticas de integraccedilatildeo na Uniatildeo europeia
e no Mercosul Rio de Janeiro Editora FGVAlmedina
Ricupero R amp Barreto F Mello 2007 laquo A importacircncia do investimento direto estrangeiro
do Brasil no exterior para o desenvolvimento socioeconocircmico do paiacutes raquo in A Almeida (eds)
Internacionalizaccedilatildeo de empresas brasileiras perspectivas e riscos Rio de Janeiro Elsevier ndash Editora
Campus ndash Fundaccedilatildeo Dom Cabral
Santiso J 2003 The Political Economy of Emerging Markets New York Palgrave Macmillan
Silva J Ramos 1990 laquo Economic Policy for Democratic Transition (with strong popular expec-
tations for a rapid material and social improvement) raquo Lisbonne Universidade teacutecnica de
Lisboa ISEG Departamento de economia (laquo Documento de Trabalho raquo 3)
mdashmdashmdash 2004 laquo A poliacutetica comercial comum raquo in A Romatildeo (ed) Economia Europeia Oeiras
Celta Editora 225-267 (laquo Econoacutemicas raquo)
Strange S 1994 laquo Wake Up Krasner The World Has Changed raquo Review of International Political
Economy I (2) 209-219
UNCTAD 2005 laquo Target for Developing Countries Should Be Products with Higher Value
Added Nobel Laureate Recommends raquo Genegraveve UNCTAD communiqueacute de presse 2 novembre
ltwwwunctadorgpressgt
Wolf M 2006 laquo Chile Blazes the Trail for Latin America raquo Financial Times 13 deacutecembre
LUSO 142_1037_86-108indd 108LUSO 142_1037_86-108indd 108 111607 12746 PM111607 12746 PM
106 joaquim ramos silva
Lrsquoeacutetude de la politique commerciale du premier mandat du gouvernement Lula
preacutesente un tableau assez diversifieacute notamment dans ses reacutesultats Premiegraverement
une eacutevolution tout agrave fait favorable des principaux indicateurs du secteur peut ecirctre
constateacutee en particulier la balance commerciale a geacuteneacutereacute un large surplus la
dette exteacuterieure srsquoest substantiellement reacuteduite et le reacuteal srsquoest sensiblement appreacute-
cieacute Bien que les conditions preacutedominantes de lrsquoeacuteconomie mondiale aient contribueacute
agrave ces performances la gestion du gouvernement doit en ecirctre aussi creacutediteacutee car
des politiques macroeacuteconomiques bien fondeacutees et stables ont eacuteteacute mises en œuvre
et les ont soutenues En outre concernant un aspect neacutegligeacute par la plupart des
analyses sur le gouvernement Lula on est bien loin des expeacuteriences travaillistes
similaires qui ont eu lieu entre les anneacutees 1960 et le deacutebut des anneacutees 1980 et
qui se sont le plus souvent soldeacutees par une deacuteteacuterioration profonde des eacutechanges
exteacuterieurs et par une gestion agrave court terme du processus de changement social
(Silva 1990) En deuxiegraveme lieu le gouvernement a deacutefini une strateacutegie claire en
ce qui concerne le cycle des neacutegociations internationales multilateacuterales en cours
(Doha Round) en particulier en exigeant une veacuteritable ouverture des marcheacutes
agricoles mondiaux et il srsquoest battu dans cette perspective difficile lui donnant
par ailleurs la prioriteacute dans sa politique commerciale internationale Bien qursquoil
faille du temps pour obtenir des reacutesultats preacutecis et malgreacute quelques incoheacuterences
lrsquoadoption drsquoune position proche du libre-eacutechange quand la plupart des pays
deacuteveloppeacutes semblent reculer est un point en faveur de la strateacutegie adopteacutee par la
politique commerciale breacutesilienne Troisiegravemement le progregraves en termes de ren-
forcement des processus drsquointeacutegration et drsquoorientation geacuteographique dans lesquels
la politique commerciale est engageacutee semble plus faible Le gouvernement paraicirct
rester sur la deacutefensive dans ce domaine Lrsquoobjectif de resserrer les liens avec le
reste de lrsquoAmeacuterique latine et avec lrsquoAfrique avec ou sans inteacutegration est juste
mais il ne devrait pas exclure la recherche drsquoune preacutesence active sur les marcheacutes
les plus deacuteveloppeacutes et la participation agrave leurs processus commerciaux drsquoinvestissement
et de transfert de technologie En quatriegraveme lieu lorsque lrsquoon compare le cas breacute-
silien avec ceux de la Chine et de lrsquoInde la place de lrsquoexteacuterieur dans sa strateacutegie
de deacuteveloppement eacuteconomique laisse apparaicirctre des faiblesses et des zones drsquoom-
bre notamment au niveau de lrsquoinvestissement direct eacutetranger La politique com-
merciale du gouvernement Lula semble ne pas avoir bien saisi tout lrsquoenjeu
de cette question centrale de lrsquoeacuteconomie mondiale y compris dans ses effets sur
le deacuteveloppement eacuteconomique Il est eacutevidemment possible que certains de ces
aspects changent au cours du deuxiegraveme mandat du Preacutesident Lula qui a deacutebuteacute
en janvier 2007
Le Breacutesil est une grande eacuteconomie eacutemergente crsquoest un pays qui possegravede entre
autres de vastes ressources naturelles il participe depuis longtemps agrave la vie des
organisations eacuteconomiques internationales comme le GATTOMC son niveau
moyen de deacuteveloppement reste toujours plus eacuteleveacute que ceux de la Chine et de
lrsquoInde mais la mise en œuvre drsquoune bonne politique commerciale qui puisse mener
agrave une ameacutelioration geacuteneacuteraliseacutee de la qualiteacute des produits exporteacutes (notamment de
ceux en concurrence avec les pays plus deacuteveloppeacutes) et la mise en œuvre drsquoune
strateacutegie internationale claire et agrave long terme englobant non seulement le com-
merce mais aussi lrsquoinvestissement et drsquoautres variables du secteur exteacuterieur reste
LUSO 142_1037_86-108indd 106LUSO 142_1037_86-108indd 106 111607 12745 PM111607 12745 PM
entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 107
toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
Instituto Superior de Economia e Gestatildeo
Bibliographie
Amman E 2005 laquo Brazilrsquos Economy under Lula The Dawn of a New Era raquo World Economics
VI (4) octobre-deacutecembre 149-169
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108 joaquim ramos silva
mdashmdashmdash 2005 The World Trade Organization Oxford University Press Oxford
Oliveira H Altemani de amp Mouratildeo FA Albuquerque 2005 laquo O processo de definiccedilatildeo da
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entre multilateacuteralisme et inteacutegration reacutegionale 107
toujours critique pour lrsquoacceacuteleacuteration de la croissance laquelle a eacuteteacute geacuteneacuteralement
insatisfaisante depuis le deacutebut des anneacutees 1980
7 feacutevrier 2007
Joaquim RAMOS SILVA Universidade Teacutecnica de Lisboa
Instituto Superior de Economia e Gestatildeo
Bibliographie
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108 joaquim ramos silva
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Oliveira H Altemani de amp Mouratildeo FA Albuquerque 2005 laquo O processo de definiccedilatildeo da
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Porto MC Lopes amp Flocircres Jr R Galvatildeo 2006 Teoria e poliacuteticas de integraccedilatildeo na Uniatildeo europeia
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Ricupero R amp Barreto F Mello 2007 laquo A importacircncia do investimento direto estrangeiro
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Lisboa ISEG Departamento de economia (laquo Documento de Trabalho raquo 3)
mdashmdashmdash 2004 laquo A poliacutetica comercial comum raquo in A Romatildeo (ed) Economia Europeia Oeiras
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Strange S 1994 laquo Wake Up Krasner The World Has Changed raquo Review of International Political
Economy I (2) 209-219
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ltwwwunctadorgpressgt
Wolf M 2006 laquo Chile Blazes the Trail for Latin America raquo Financial Times 13 deacutecembre
LUSO 142_1037_86-108indd 108LUSO 142_1037_86-108indd 108 111607 12746 PM111607 12746 PM