Sadko et autres chants mythologiques des Slaves de l'Est (Biélorussie - Russie - Ukraine)

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Viktoriya et Patrice Lajoye Sadko et autres chants mythologiques des Slaves de l'Est (Biélorussie – Russie – Ukraine) LINGVA

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Viktoriya et Patrice Lajoye

Sadko

et autres chants mythologiques des Slaves de l'Est(Biélorussie – Russie – Ukraine)

LINGVA

Collection« Histoire – mythes - folklore »

2015Mikhaïl Dragomano et Lydia Dragomanova

Travaux sur le folklore slave, suivi de Légendes chrétiennes de l'Ukraine

Viktoriya et Patrice LajoyeSadko et autres chants mythologiques des Slaves de l'Est

© 2015 – Lingva et Viktoriya et Patrice LajoyeIllustrations de couverture :Ilya Repine, Sadko, 1876

Nikifor Savinij (école Stroganov), vie de Fedor Tyrine,fin XVIe-début XVIIe siècle

Une mythologie secondaire mais importante

« Nous n'ignorons pas que la byline russe soulève quantité d'autresquestions de mythologie, de littérature ou d'ethnographie comparéesnotamment. Outre que de semblables études n'offrent que desrésultats le plus souvent incertains, elles ont été faites déjà et bienfaites par Alfred Rambaud dans sa Russie épique. Nous n'avons pasdu tout l'intention de reprendre la tâche après lui et peut-être bienaussi que ces recherches de 'paléontologie mythique' sont un peupérimées. »

Ainsi s'exprimait en 1928 Louis Jousserandot, alors premier« vrai » traducteur des chants épiques russes en français1.Il est vrai que la publication en 1876 de La Russie épique parAlfred Rambaud a marqué une étape majeure dans laconnaissance que le public français pouvait avoir des chantstraditionnels de ce que l'on appelait encore la Russie, plusexactement l'Empire russe, lequel regroupait la Russieproprement dite, soit l'ancienne Moscovie, la Biélorussie ouRussie blanche, et l'Ukraine ou Petite Russie. Il y avait bien euauparavant quelques allusions dans divers articles ou ouvrages,mais rien de très solide, et souvent de seconde main2.L'ouvrage de Rambaud lui-même, particulièrement copieux, necontenait pas à proprement parler de traductions intégrales,mais il offrait de nombreux résumés des chants épiques del'ensemble de l'Empire russe, touchant à tous les domaines etdonc non seulement aux bylines (chants épiques)mythologiques, mais aussi aux bylines historiques, aux chantsreligieux, aux chants de cosaques ukrainiens, résumés

1 Jousserandot, 1928, p. 18.2 On en trouvera la bibliographie dans Jousserandot, 1928, p. 20.

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accompagnés de commentaires savants puisés dans les travauxdes ethnologues et mythologues russes les plus sérieux. Il n'amalheureusement guère été suivi. En 1910, Francisqued'Armade (pseudonyme de Blanche Pondaven, installée àRiga), publie un recueil d'adaptations en prose de bylines nonsourcées3. En 1928, donc, il y eut le recueil de LouisJousserandot, de très bonne facture, mais malheureusementlimité par les impératifs de la collection dans lequel il est paru.Bien plus tard, en 1962, les époux Ivanov donnent un brefrecueil d'adaptations en prose, là encore non sourcées4. Et c'està peu près tout, si l'on fait exception de quelques adaptationspour enfants. Côté ukrainien, la situation est encore pire,puisqu'il n'y eut que le remarquable recueil de Marie Scherrer,en 1947, riche par sa présentation de ce que sont les dumy, etpar son choix de textes, mais dénué, lui aussi, de commentairessur le fond légendaire des œuvres traduites5.Du côté des études mythologiques, le désert est encore plusvaste. Une thèse, mais non des moindres, fut consacrée parWilfrid Chettéoui à l'art d'un des plus remarquables chanteursde bylines, Ryabinine le père6. Cependant, elle fait la part belleà la forme et non au fond. Pour celui-ci, nous ne disposons qued'une poignée d'études, presque toutes publiées avant guerre,notamment par André Mazon et Georges Dumézil7.

Lorsqu'en 2009 nous avons publié Ilya Mouromets et autreshéros de la Russie ancienne, aux éditions Anacharsis, nous

3 D'Armade, 1910. On fera l'impasse sur Les Chants oraux du peuple russe, publié en 1893par Achille Millien : ce recueil ne contient que des traductions de seconde, voire troisièmemain.

4 Ivanov, 1962.5 Scherrer, 1947. Bien longtemps auparavant, Alexandre Chodzko avait inclus quelques

chants ukrainiens à son recueil de chants lituaniens paru en 1879, mais il faut bien avouerque les traductions n'étaient guère fiables.

6 Chéttéoui, 1942.7 Brian-Chaninov, 1929 ; Dumézil, 1924, 1925, 1925b, 1969, 2003 ; Mazon, 1932 et 1933.

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nous basions pour ce recueil sur un travail d'analyse portant surle bogatyr (preux) Ilya, un héros tout droit venu du MoyenÂge, et dont la mémoire s'est pour l'essentiel conservée dansdes chants collectés au XIXe siècle. Ce sont ces chants quenous voulions rendre accessibles au public francophone,quatre-vingts ans après le bref recueil de Louis Jousserandot.Mais cela nous semblait insuffisant. Centré sur IlyaMouromets, cet ouvrage faisait la part belle aux bylines dites« kiéviennes », négligeant un grand nombre de textes quiméritaient tout autant d'être traduits, mais ne pouvaient l'êtresans déstabiliser un sommaire qui nous semblait cohérent.Aussi l'idée d'un second recueil, clairement orienté vers lamythologie, et cette fois-ci accompagné de commentaires, nousvint rapidement à l'esprit. Mieux, nous voulions ouvrir cenouveau projet à l'Ukraine et à la Biélorussie, comme l'avaitfait Alfred Rambaud, car lorsqu'il s'agit de mythologie, on nepeut nier une certaine cohérence de l'ensemble des Slaves del'Est, de la même manière qu'en Occident Irlande, Pays deGalles et Bretagne forment des entités géographiques etpolitiques différentes et autonomes, mais avec un fondsculturel commun, que l'on peut aborder au sein d'une mêmeétude.

L'intérêt premier des chants, par rapport aux contes dont tousles héros se nomment Ivan et sont parfaitementinterchangeables, est de proposer des personnages récurrents,qui forment une véritable mythologie secondaire. Mythologiecar, malgré de nombreuses variantes, il s'agit là d'un systèmelégendaire cohérent, mais secondaire car il ne s'agit pas d'unemythologie païenne, mais bien d'une mythologie chrétienne,issue d'un moule chrétien mais reprenant de très nombreuxéléments issus du paganisme des anciens Slaves, mais aussi desreligions des peuples voisins et apparentés. Il s'agit là somme

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toute du même type de mythologie que celle des Nartes duCaucase, lesquels sont issus eux aussi d'une mythologie recrééepar des populations qui furent (et souvent sont encore)chrétiennes ou musulmanes. On sait pourtant l'utilité qu'ont eueles Nartes dans le domaine de la mythologie comparée, grâceaux efforts permanents de Georges Dumézil : la mythologiepopulaire des Slaves de l'Est mérite tout autant une telle place.Pour autant, ce nouveau recueil n'a pas le moins du monde laprétention de faire le tour de la question. Le corpus des chantsépiques, religieux ou rituels russes, biélorusses et ukrainiens estimmense, et nous ne le découvrons qu'au fur et à mesure d'uneexploration qui n'a commencé qu'assez récemment, même sielle a déjà débouché sur quelques travaux8. Nous espéronssimplement contribuer à mieux faire connaître des chants quijusqu'ici étaient restés bien trop ignorés.

8 Nous en donnons la liste en bibliographie.

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Créer le monde et l'ordonner

Vers sur le Livre de la Colombe

Sur cette montagne Fagorskaya9,Vers la Vraie Croix miraculeuse,Vers la pierre Latyr10,Vers la tête saine d'Adam est tombé le Livre de la Colombe.Ce livre est très grand,Il est bien long en longueur,Il est bien large en largeur,Il est très épais en épaisseur.Beaucoup de tsars et de tsarévitchs,Beaucoup de rois et de fils de roisArrivèrent et se réunirent à côté de ce livreÀ la grande gloire.Nous avions trois grands tsars,Le tsar Konstantine11 et le tsar Volotoman12,Il y avait le tsar sage David Ossievitch13.Le tsar Volotoman disait à David :« Toi, tsar sage, David Ossievitch !Dis-nous, seigneur, prophète :Qui a écrit ce Livre de la Colombe,Qui l'a imprimé » ?Et le tsar sage répondit :« C'est Jésus de Nazareth lui-même qui a écrit ce livre,Jésus de Nazareth, Dieu Céleste ;Isaïe le prophète lui-même lisait ce livre,Il le lisait depuis juste trois ans,Il a lu juste trois pages de ce livre ».Tous les tsars s'inclinèrent devant lui :« Nous te remercions, notre tsar sage,

9 Sans doute une déformation du Mont Thabor.10 Plus souvent Alatyr, le succin : Jakobson, 1971, p. 624. Certains chercheurs ont voulu voir

dans ce terme un emprunt au latin altar : autel. Cette pierre, dans les incantations russes,se trouve sur la mystérieuse île Bouyane, au milieu de la mer-océan, au pied d'un chêne.

11 Constantin le Grand, premier empereur chrétien.12 Peut-être une déformation de Volodimir, c'est-à-dire Vladimir, ou encore de Ptolémée.13 David, fils d'Esaü

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David Ossievitch.Tu sais, seigneur, dire de mémoire,De mémoire comme si tu lisais ;Dis-nous encore, seigneurCe qui est écritDans le Livre de la Colombe,Ce qui a été imprimé :D'où prend naissance notre monde,Pourquoi le soleil rouge brille,Pourquoi la nouvelle lune brûlePourquoi les étoiles drues brûlentD'où prend naissance l'aurore,L'aurore et le crépuscule,D'où prennent naissance les vents sur notre terre,D'où prennent naissance les tonnerres sur notre terre,D'où prennent naissance les tsars sur notre terre,D'où prennent naissance les princes et les boyards sur notre terre,Les paysans orthodoxes ? »Le tsar sage leur réponditLe tsar sage David Ossievitch :« Tsar Volotoman Volotomanovitch !Je vais vous le dire, mes amis,Je vais vous prêcher la chose suivante.Il est écrit dans le Livre de la Colombe :Notre monde prend naissanceDu Saint-Esprit de Sabaoth ;Le soleil rouge, du visage de Dieu,Du Christ même, Tsar Céleste ;La nouvelle lune, de la poitrine de Dieu ;Les étoiles drues, de la chasuble de Dieu ;L’aurore et le crépusculeDes yeux de Dieu, du Christ, tsar céleste ;Les vents prennent naissance sur notre terre –Du Saint-Esprit de Sabaoth,Du souffle de Dieu :Les tonnerres prennent naissance sur notre terre –Des paroles de Dieu ;Les tsars prennent naissance sur notre terreDe la tête sainte d’Adam ;

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Les princes et les boyards prennent naissance –Des reliques saintes d’Adam ;Les paysans orthodoxes –D’un genou saint d’Adam ».Tous les tsars s’inclinèrent devant lui :« Nous te remercions, notre tsar sageDavid Ossievitch.Dis-nous encore, seigneur, prêches-nous ;Prêches-nous, dis-nous de la chose suivante :Quel tsar sera le principal parmi tous les tsars,Quelle terre sera la mère pour toutes les terres,Quelle mer sera la mère pour toutes les mers,Quel lac sera la mère de tous les lacs,Quelle rivière sera la mère de toutes les rivières,Quelle ville sera la mère de toutes les villes,Quel animal sera la mère de tous les animaux,Quelle montagne sera la mère de toutes les montagnes,Quelle pierre sera la mère de toutes les pierres,Quel arbre sera la mère de tous les arbres,Quelle herbe sera la mère de toutes les herbes ? »Le seigneur, tsar sage leur répondit,Notre tsar sage David Ossievitch :« Je vais vous dire, mes amis, je vais vous prêcherCe qui est écrit dans le Livre de la Colombe :« Chez nous, le tsar blanc sera le tsar de tous les tsars.Pourquoi donc le tsar blanc sera-t-il le tsar de tous les tsars ?Notre tsar blanc a la foi orthodoxe,Son grand domaine domine sur la terre :C’est pourquoi le tsar blanc est le tsar de tous les tsars.La terre de la Sainte Russie est la terre de toutes les terres.Pourquoi donc la terre de la Sainte Russie est-elle la terre

[de toutes les terres ?On construit des églises apostoliques sur cette terre,Des églises dévotes, pour des évêques ;Ils prient Dieu crucifié,Le Christ même – Tsar Céleste :C’est pourquoi la terre de la Sainte Russie est la terre de toutes les terres.La mer océan est la mer de toutes les mers.Pourquoi donc la mer océan est-elle la mer de toutes les mers ?

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Cette mer entoure toute la terre,Dans cet Océan se trouve le nombril de mer ;Du côté de l’estUne église générale se dresse de la merAvec douze chaires,Pour Saint Clément, Pape de Rome,Pour Saint Pierre d’Alexandrie :C’est pourquoi l’Océan mer est la mer de toutes les mers.Le lac Ilmen est la mère de tous les lacs.Ce n’est pas l'Ilmen qui est à côté de Novgorod,Ce n’est pas l'Ilmen qui est dans Constantinople,C’est l'Ilmen qui est sur la terre de Turquie14

Sous la première ville de Hiérosolyme15.Pourquoi donc le lac Ilmen est-il la mère de tous les lacs ?Parce que la mère rivière le Jourdain en sort,La rivière Jourdain est la mère de toutes les rivières.Pourquoi donc la rivière Jourdain est-elle la mère de toutes les rivières ?Le vrai Christ y a reçu le baptêmeEt se baignait dans la mère rivière Jourdain :C’est pourquoi la rivière Jourdain est la mère de toutes les rivières.La baleine-poisson est la mère de tous les poissons.Pourquoi donc la baleine-poisson est-elle la mère de tous les poissons,La terre est créée sur les baleines-poissons ;La Baleine-poisson a le pied sûr – elle ne bouge pas ;Si la Baleine-poisson se tourne,Alors la terre mère s’agita,Alors, cela sera la fin de notre monde :C’est pourquoi la Baleine-poisson est la mère de tous les poissons16.Hiérosolyme est la mère de toutes les villes.Pourquoi donc Hiérosolyme est-elle la mère de toutes les villes ?Hiérosolyme est la ville au milieu de la terre,

[le nombril du monde s'y trouve.Dans la première ville d’HiérosolymeSe trouve l’église généraleDe la sainte sacrée Marie.

14 Turquie désigne ici l'ensemble de l'empire ottoman. 15 Jérusalem.16 Allusion à une croyance commune à la Russie et une partie de la Sibérie et de l'Asie. Dans

le monde turcophone, ces baleines sont remplacées le plus souvent par des taureaux.

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Pourquoi cette église est-elle la mère de toutes les églises ?Dans cette église se trouve le Tombeau du Christ,Il se trouve sur la toile liturgique,L’encens fume à côté.C’est pourquoi cette place sacrée est la mère de toutes les églises.Le psautier est le livre de tous les livres.Pourquoi le psautier est-il le livre de tous les livres ?Les parents justes y sont commémorés :C’est pourquoi le livre Psautier est la mère de tous les livres.L’oiseau Strefil17 est la mère de tous les oiseaux.Pourquoi donc l’oiseau Strefil est-il la mère de tous les oiseaux ?Strefil vit au milieu de la mer,Il mange et boit sur la mer bleue,Il se reproduit sur la mer bleue.Quand Strefil secoue ses ailesÀ deux heures du matin,Alors tous les coqs commencent à chanter sur toute la terre,Toute la terre s’éclaire à ce moment-là :C’est pourquoi l’oiseau Strefil est la mère de tous les oiseaux.L’animal Indrik18 est la mère de tous les animaux.Pourquoi donc l’animal Indrik est la mère de tous les animaux ?Cet animal se trouve sur la montagne Sion ;Quand l’animal se tourne vers la montagne,Alors, la terre mère s’agite sous lui,Alors, tous les animaux s’inclinent devant lui :C’est pourquoi Indrik est la mère de tous les animaux.Le mont Thabor est la mère de toutes les montagnes.Pourquoi donc le mont Thabor est-il la mère de toutes les montagnes ?Jésus de Nazareth lui-même s’y est transfiguré,Il est douze fêtes aux Apôtres,Il est douze fêtes aux maîtres,Il a montré une grande gloire à Ses élèves ;Du mont ThaborIl est monté au ciel :C’est pourquoi le mont Thabor est la mère de toutes les montagnes.La pierre blanche Latyr est la mère de toutes les pierres.Pourquoi la pierre blanche Latyr est-elle la mère de toutes les pierres ?

17 Autruche.18 Animal non identifié, probablement la licorne.

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Le Christ de Nazareth lui-même, Tsar CélesteParlait et se reposait sur la pierre blanche LatyrAvec douze apôtres,Avec douze maîtres ;Il a établi la foi sur la pierre,Il a propagé des livres sur toute la terre :C’est pourquoi la pierre blanche Latyr est la mère de toutes les pierres.L’arbre cyprès est la mère de tous les arbres.Pourquoi donc l’arbre cyprès est-il la mère de tous les arbres ?Cet arbre est considéré comme sacréLa croix miraculeuse devant laquelle on s’inclineA été taillée de cet arbre,Le vrai Christ y a été crucifié :C’est pourquoi l’arbre cyprès est la mère de tous les arbres.La salicaire est la mère de toutes les herbes.Pourquoi donc la salicaire est-elle la mère de toutes les herbes ?Quand on amenait le Christ au crucifiement,La Sainte Vierge pleurait,Ses larmes tombaient sur la terre humide ;La salicaire poussait de ses larmes pures ;Sur notre terre, on découpe des croix miraculeuses,Dans la racine de la salicaire,De vieux moines les portent,Des religieux dignes les portent :Et cela les protège beaucoup, seigneur ».Tous les tsars s’inclinèrent devant lui :Nous te remercions, notre tsar sage,David Ossievitch.Tu sais, seigneur, dire de mémoire,De mémoire comme si tu lisais ».Le tsar Volotman lui dit :« Toi, tsar sage, David Ossievitch !Dis-moi encore, seigneur,Explique-moi mon rêve.Moi, le tsar Volotoman,Je ne rêvais pas beaucoup mais je faisais de rêves affreux :Comme si deux lièvres s'étaient rencontrésLoin, en rase campagne,Un lièvre était blanc, l’autre, gris,

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Ils se sont battus ;On aurait que le lièvre blanc avait vaincu le gris,On aurait dit que le blanc était monté de la terre jusqu'au ciel,Et le gris marcha en rase campagne.Peux-tu me dire ? »Le tsar sage leur répondit :« Tsar Volotman Volotomanovitch !Je vais vous dire, ami,Je vais vous expliquer le rêve.Il est écrit dans le Livre de la Colombe :« Ce n’étaient pas deux lièvres qui se rencontrèrentMais la Justice et l’Injustice ;Le lièvre blanc était la Justice,Le lièvre gris était l’Injustice.Ce fut comme si la Justice avait vaincu l’Injustice :En la dernière année,En l’année huit mille,Dieu a transféré la Justice de la terre au ciel,Sur toute la terre, dans tous l’univers,Chez tous les paysans orthodoxes,Le secret a gagné les cœurs ;Celui qui fait des affaires secrètes,Une grande illégalité provient de lui ».Tous les tsars s’inclinèrent devant lui :« Nous te remercions, notre tsar sage,David Ossievitch.Tu sais, seigneur, dire de mémoire,De mémoire comme si tu lisais ;Tu as lu le Livre de la Colombe,Sur toutes les sagesses de l’univers ».Et nous chantons toujours la gloire des grands tsars,La gloire ne l’évite jamais,Aux siècles des siècles, amen19.

Commentaire :

Ce texte, mentionné dès le Moyen Âge20, et dont on a collecté plusieurs

19 Bessonov, 1861, p. 285-292.20 Mouchard, 2013.

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dizaines de versions à partir du XIXe siècle21, n'a à notre connaissance,jamais été exploité correctement par les non-slavistes. Ainsi Bruce Lincoln(mais il n'est pas le seul), lui donne le titre fantaisiste de The Poem on theDove King (sic !), confusion étrange entre le russe knig, « livre », etl'anglais king, « roi »22. Cela montre que dans l'ensemble, les spécialistesanglo-saxons du sujet n'ont jamais lu ce texte et n'en ont eu connaissanceque par des travaux de seconde main. De même, lorsque Lincoln lui donneune origine iranienne, il ne le fait que parce que les Slaves et les Scythes ontlongtemps coexisté. Mais le fait est que le chant russe n'entretient aucunrapport avec les textes iraniens. Par contre il est le texte le plus proche destextes indiens, comme l'avait déjà bien vu Schayer dès 193523.De même, un troisième témoignage aurait pu être apporté au crédit desSlaves, celui du texte apocryphe 2 Enoch, ou Livre des Secrets d'Enoch,apocryphe slavon dont subsistent deux versions, une longue et une autrecourte. La version longue contient de nombreuses interpolations quisemblent bien être toutes tardives. L'une d'elles, au chapitre 30, présentejustement notre mythe, mais de façon inversée : c'est le monde qui sert àfaçonner le premier homme, et non l'inverse :

« Et au sixième jour, j'ordonnai à ma sagesse de créer l'homme àpartir de sept composants :/1er/ sa chair, de la terre ;/deuxième/ son sang, de la rosée et du soleil ;/troisième/ ses yeux, de la profondeur des mers (dans deuxmanuscrits : du soleil) ;/quatrième/ ses os, des pierres ;/cinquième/ sa raison, de la mobilité des anges, et des nuages ;/sixième/ ses veines et ses chevaux de l'herbe de la terre ;/septième/ son esprit, de mon esprit et du vent24. »

Il est erroné de dire, comme l'a là encore fait Bruce Lincoln, qu'il s'agit d'untémoignage « juif »25. Il s'agit d'une interpolation récente dans un texteapocryphe juif, cette interpolation ayant eu lieu dans un milieu lettré serbe

21 Dudko, 2008.22 Lincoln, 1975, p. 123. La même erreur se retrouve dans Lincoln, 1991, p. 167 (avec une

translittération fautive du titre russe) ; cf. Mallory et Adams, 1997, sv « Cosmogony »,avec les mêmes erreurs. Bruce Lincoln se donne comme source l'article de Schayer, 1935,qui pourtant ne contient rien de ce genre!

23 Schayer, 1935, p. 322-323.24 Andersen, 1983, p. 150.25 Lincoln, 1975, p. 123.

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ou bulgare entre le XIIIe et le XVIe siècle26. Cependant, ce « mythe » duPuruṣa – du géant démembré constituant le monde – inversé, exprimé enAdam dans le monde chrétien n'est en fait pas spécifiquement slave. Il tiresa source de diverses œuvres apocryphes d'origine grecque dont le fond s'estrépandu dans toute l'Europe. Emil Turdeanu en a fait dès les années 1970l'inventaire, allant d'une version anglaise du VIIe siècle à des chantsnuptiaux roumains collectés au XIXe siècle. Citons à titre d'exemple uneversion roumaine :

« Et il [Dieu] a pris de la poussière,et de la terre il a pris de l'argile,et il a béni cette argile,et il en a faitun homme, son corps de la terre,ses os, de pierre,son sang, de la rosée,sa force, du vent,son âme, du Saint-Esprit,ses yeux, de la mer,sa beauté, du soleil,sa pensée, de la rapidité des anges27. »

De fait, ce motif est particulièrement bien attesté en domaine germanique(Angleterre médiévale28, Allemagne), en domaine celtique (Irlande29) et endomaine slave. Il tire vraisemblablement sa source d'un apocryphe grecdisparu mais dont la trace est aussi conservée dans un Chronographe grecdu XVIIe siècle30. Notons au passage qu'il est certain que cette croyancesavante a pu influencer le mythe scandinave équivalent, celui du géantYmir, démembré par Odin et ses frères pour constituer le monde. Dans tousles cas relevés par Emil Turdeanu, la constitution d'Adam à partir de sept ouhuit éléments est suivie de l'ajout de la création de son nom, formé despremières lettres du nom de quatre anges venus des quatre points cardinaux.Or après le démembrement d'Ymir, son crâne est posé sur quatre nains quiforment les quatre points cardinaux. Cela ne se retrouve pas ailleurs.Paradoxalement, les Vers sur le Livre de la colombe russe n’ont subi

26 Vaillant, 1952, p. XXI-XXII.27 Turdeanu, 1981. Une part de ces textes était déjà connue au XIXe siècle de Jacob Grimm

lorsqu'il recherchait des parallèles au mythe d'Ymir : Grimm, 2004, p. 565-574. 28 2 versions sont recensées par Tristam, 1975, p. 122.29 5 versions recensées par Tristam, 1975, p. 123, avec au total 10 variantes selon les

manuscrits.30 Turdeanu, 1981, p. 407.

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l'influence du motif apocryphe que dans le fait qu'elle identifie partiellementl'homme cosmique à Adam, du moins quand il s'agit d'en faire l'origine de lasociété. À l'inverse, certaines versions du motif apocryphe semblent bienavoir été influencées par une croyance locale en l'homme cosmique : c'est lecas de certains manuscrits de 2Enoch, qui donnent pour origines aux yeuxd'Adam le soleil, alors que les autres versions disent « la mer ». De même,le récit apocryphe slave Skazanie, kak sotvoril Bog Adama (Comment Dieua fait Adam), dont le plus ancien témoignage, chez les Slaves du Sud, est duXIVe siècle, montre une semblable restitution dans ses manuscrits russes :c'est le soleil qui sert à faire les yeux. Ce récit a été très populaire dansl'ancienne Russie, et c'est tout naturellement qu'on le retrouve dans lefolklore ukrainien31 et russe32.On notera pour finir que, d'un point de vue structurel, tous les textesscandinaves contenant le mythe d'Ymir sont du type « Questions etréponses ». Il en est de même pour les Vers sur le Livre de la colombe, danslesquels on interroge le roi David. Les apocryphes chrétiens sont le plussouvent de ce type. On pourrait ainsi penser que cette forme a été dictéejustement par ces derniers, mais il n'en est rien, puisque le Pahlavi Rivāyatiranien, qui contient aussi un mythe de ce genre et sur lequel aucuneinfluence chrétienne ne s'est exercée, est aussi un jeu de « Questions etréponses ». Ainsi Odin dans le Vafthrudnirsmal, demande : « Dis ceci enpremier lieu, si tes dons y suffisent, et si toi, Vafthrudnir, le sais : d'oùviennent la terre et le ciel élevé, ô savant géant ! »33. Comme en écho,Snorri fait que Ganglari demande aux dieux : « Quelle fut l'origine ?Comment cela commença-t-il ? Et qu'y avait-il auparavant ? ». Les Vers surle Livre de la colombe se font plus complexes puisqu'ils dévoilent dans laquestion l'ensemble des réponses attendues : « Dis-nous encore, seigneur, cequi est écrit dans le Livre de la Colombe, ce qui a été imprimé : d'où prendnaissance notre monde, pourquoi le soleil rouge brille, pourquoi la nouvellelune brûle, pourquoi les étoiles drues brûlent, d'où prend naissance l'aurore,l'aurore et le crépuscule, d'où prennent naissance les vents sur notre terre,d'où prennent naissance les tonnerres sur notre terre, d'où prennentnaissance les tsars sur notre terre, d'où prennent naissance les princes et lesboyards sur notre terre, les paysans orthodoxes ? » ; alors que le Rivāyatprocède-lui, tout comme le Vafthrudnirsmal, avec simplicité : « Cette(question) : Comment et de quoi a été fait le ciel ? »

31 Ivanov, 1892, p. 90 ; Kabakova, 1999, p. 29-30.32 Blaznev, 1892 ; Kabakova, 2005, p. 25. 33 Trad. de Boyer, 1992, p. 521. Le texte est du Xe siècle.

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Nous sommes donc en droit de nous poser la question de l'existence d'untrès ancien « traité » de théologie cosmogonique indo-européen quiemployait la forme des « questions et réponses »34.

34 Lajoye, 2013.

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Bibliographie

Sources des textes :

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194

Table des matières

Introduction : une mythologie secondaire, mais riche et importante. p. 3

Créer le monde et l'ordonner …............................................................ p. 7Vers sur le Livre de la Colombe (Russie) …............................................. p. 9Chants de Noël sur la création du monde (Ukraine) ….......................... p. 20Incantations cosmologiques (Biélorussie, Russie, Ukraine)................... p. 22Yarilo (Biélorussie) …............................................................................ p. 25Svyatogor (Russie) ….............................................................................. p. 29

Mettre fin à ce monde …...................................................................... p. 35Elie le prophète (Russie) ….................................................................... p. 37

Fleuves et rivières …............................................................................. p. 47Dounaï (Le mariage du prince Vladimir) (Russie) …............................ p. 49Ah, Don, tu es notre Don (Russie) …..................................................... p. 61Conversation du Dniepr et du Danube (Ukraine) ….............................. p. 65

Sur les mers …....................................................................................... p. 67Sadko (Russie) ….................................................................................... p. 69Oleksi Popovitch (Ukraine) …................................................................ p. 80Gleb Volodievitch (Russie) …................................................................. p. 87Soloveï Boudimirovitch (Russie) …........................................................ p. 93

À la cour du prince Vladimir de Kiev ….......................................... p. 101Le boyard Stavière (Russie) …............................................................. p. 106Tchourila Plenkovitch (Russie) …........................................................ p. 114La mort de Tchourila (Russie) ….......................................................... p. 121Diouk (Russie) ….................................................................................. p. 126Les frères Zbrodovitch (Russie) …....................................................... p. 141Ivan Godinovitch (Russie) …................................................................ p. 144Mikhaïla Kasarinov (Russie) …............................................................ p. 152

195

Une mythologie secondaire …............................................................ p. 159Le tsar Saül Levanidovitch (Russie) …................................................. p. 161Vers sur Fedor Tiron (Russie) ….......................................................... p. 170Les trois frères d'Oziv (Ukraine) …...................................................... p. 177

En guise de conclusion …................................................................... p. 185Ilya et le trésor du monastère (Russie) …............................................. p. 187Grand-Père s'en vint dans la prairie (Biélorussie) ….......................... p. 187

Bibliographie …................................................................................... p. 189

Table des matières ….................................................................................. p. 195

Dépôt légal : 2e semestre 205