L’histoire complexe du muralisme en Sardaigne. L’invention d’une tradition de peinture murale...

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Nuevo Mundo Mundos Nuevos Images, mémoires et sons ................................................................................................................................................................................................................................................................................................ Francesca Cozzolino L’histoire complexe du muralisme en Sardaigne. L’invention d’une tradition de peinture murale et ses multiples influences. ................................................................................................................................................................................................................................................................................................ Advertencia El contenido de este sitio está cubierto por la legislación francesa sobre propiedad intelectual y es propiedad exclusiva del editor. Las obras publicadas en este sitio pueden ser consultadas y reproducidas en soporte de papel o bajo condición de que sean estrictamente reservadas al uso personal, sea éste científico o pedagógico, excluyendo todo uso comercial. La reproducción deberá obligatoriamente mencionar el editor, el nombre de la revista, el autor y la referencia del documento. Toda otra reproducción está prohibida salvo que exista un acuerdo previo con el editor, excluyendo todos los casos previstos por la legislación vigente en Francia. Revues.org es un portal de revistas de ciencias sociales y humanas desarrollado por Cléo, Centre pour l'édition électronique ouverte (CNRS, EHESS, UP, UAPV). ................................................................................................................................................................................................................................................................................................ Referencia electrónica Francesca Cozzolino, « L’histoire complexe du muralisme en Sardaigne. L’invention d’une tradition de peinture murale et ses multiples influences. », Nuevo Mundo Mundos Nuevos [En línea], Imágenes, memorias y sonidos, Puesto en línea el 30 enero 2014, consultado el 07 febrero 2014. URL : http://nuevomundo.revues.org/66333 ; DOI : 10.4000/nuevomundo.66333 Editor : EHESS http://nuevomundo.revues.org http://www.revues.org Documento accesible en línea desde la siguiente dirección : http://nuevomundo.revues.org/66333 Document generado automaticamente el 07 febrero 2014. © Tous droits réservés

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Francesca Cozzolino

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Referencia electrónicaFrancesca Cozzolino, « L’histoire complexe du muralisme en Sardaigne.L’invention d’une tradition de peinture murale et ses multiples influences.  », Nuevo Mundo Mundos Nuevos [Enlínea], Imágenes, memorias y sonidos, Puesto en línea el 30 enero 2014, consultado el 07 febrero 2014. URL :http://nuevomundo.revues.org/66333 ; DOI : 10.4000/nuevomundo.66333

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L’histoire complexe du muralisme enSardaigne.L’invention d’une tradition de peinturemurale et ses multiples influences.Introduction

1 « Muralisme » est le terme adopté en Sardaigne la plupart du temps par une multitude d’acteurs,pour désigner l’émergence et le développement d’une tradition de peinture murale toujoursen cours sur cette île. Nombreux sont les ouvrages, de natures diverses (guides touristiques,catalogues, essais)1 qui, surtout à partir des années quatre-vingt-dix, ont rassemblé un ensemblede productions graphiques et picturales sous la formulation de « muralisme en Sardaigne »ou bien de « murales de la Sardaigne ». Ainsi, émergent des discours qui font débat et sontparfois discutés par les acteurs-mêmes de ce phénomène. Ils diffusent l’idée d’une tradition depeinture murale propre à la Sardaigne qui, prenant ses origines d’influences diverses et variées,selon les acteurs que l’on interroge, se serait diffusée dans tout le territoire de l’île à partir desannées soixante-dix et devient aujourd’hui, dans certains villages, un bien patrimonial.

2 Nous avons posé notre regard sur ce phénomène, interrogé les acteurs, observé leurs pratiques.Par ce travail de terrain de longue durée2, nous avons produit l’ethnographie d’une pratiqueartistique donnée (la peinture murale) à travers l’observation des faits les plus ténus, des détailsde la vie quotidienne, au plus près de la réalité vécue des acteurs et nous avons tiré uneinterprétation de ce phénomène3. Tout en développant notre analyse sur un cas précis, nousn’avons pas hésité à porter un regard analytique sur cette pratique dans d’autres pays ou régionsdu monde. Nous recherchions, dans cet exercice comparatif, des éléments pouvant nous aiderà interpréter le phénomène que nous nous étions donné à observer. Cependant ce n’est pasdans ces travaux4 que nous avons trouvé les réponses recherchées, mais dans des ouvragestraitant de l’histoire de la Sardaigne5 ou encore dans les travaux d’anthropologues analysantun aspect de la vie sociale de l'île6 ou dans ceux de spécialistes de l’image et de l’écriture7.

3 Si les autres cas de peinture murale nous amenaient à constater des similarités, l'observationanthropologique renforçait bien souvent la singularité, non seulement du cas sarde, mais dechacun des cas de peinture murale pris en compte.

4 Le cas sarde, dès notre première approche, s’est affiché comme un phénomène complexe dontnous n’étions pas en mesure d’expliquer l'émergence – dans le territoire de la Sardaigne, à deuxmoments différents et dans deux zones diverses (le nord et le sud de l’île) – en le comparantavec les autres exemples existants. Cependant, le suivi du développement du muralisme enSardaigne nous a amené à repérer une variété d’influences diversement présentes. Toutes onteu un rôle dans l’avènement de ce phénomène. L’intention de cet article est donc de retracerla complexité de cette histoire et faire apparaître la multiplicité des traditions qui ont participéà la singularité du muralisme en Sardaigne.

5 Il importe de proposer une réalité chiffrée pour comprendre la portée et la particularité de cephénomène. Nous parlons d’un village de cinq mille habitants8, Orgosolo, qui présente plus dedeux cent cinquante murales

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. Dans toute l’île, nous pouvons dénombrer plus de soixante-dixvillages qui offrent au regard des peintures murales, soit un total de presque mille fresques.

6 Il s’agit donc d’une pratique exceptionnelle de peinture murale qui s’est développée à la findes années 1960. Les premières furent réalisées au départ par l’artiste Pinuccio Sciola dans lebourg de San Sperate (Cagliari). Son objectif était de réaliser des peintures dans l’espace publicafin qu’elles deviennent un moyen pour les gens de s’exprimer et de sortir l’art du musée.

7 Au milieu de la décennie suivante, cette pratique trouve un développement important àOrgosolo (Nuoro), village de montagne du nord de l’île. Les peintures traduisent ici l’héritaged’un fort militantisme de contestation qui a animé le village au cours des années 1968 à 1970

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durant lesquelles l’activisme de certains habitants a donné naissance à l’association « CircoloGiovanile d’Orgosolo »10. L’héritage et la mémoire de ces trois années d’activité alimentent lasensibilité qui est à la base de la réalisation de tous les murales du village à partir de 1970, etce pendant vingt ans. C’est dans les locaux de son siège que, grâce à la participation active duprofesseur de dessin de l’école, Francesco Del Casino11, furent produites toutes les affiches decontestation et de revendication qui orneront les murs de la commune pendant des années eten particulier au cours de la « lutte de Pratobello »12 et qui serviront de base pour la réalisationdes images de la plupart des peintures murales.

8 Ces affiches devinrent les premières esquisses des murales. Cette impulsion se poursuivit demanière intense. Il s’agissait, au départ, de reproduire des événements de la vie quotidiennelocale mais les thèmes allèrent ensuite bien au-delà. Aujourd’hui, le village est devenu uneattraction importante pour le tourisme national et international. La majorité d’entre elles a étéréalisée par Francesco Del Casino aidé par les générations d’élèves qui se sont succédées àl’école. Suite à l’expérience d’Orgosolo, le muralisme est devenu une pratique diffuse danstoute l’île.

9 Plusieurs éléments sont intervenus dans la naissance et l’évolution de cette pratique de peinturemurale. Nous retrouvons dans les témoignages des acteurs aussi bien l’influence des muralistesmexicains, celle des brigades chiliennes ainsi que celle des affiches de mai 68.

10 Ce texte s’articule en cinq parties. Il s’agira tout d’abord d’expliquer l’émergence et ladiffusion de cette pratique dans l’île et les discours de justification ou de rejet qui ont suivi.L’évolution de ce phénomène a en effet été accompagnée d’une vive critique locale ainsique d’une reconnaissance intellectuelle. Des tensions et controverses dans ces discours nousempêchent de parler de ces fresques comme de simples peintures politiques, ou comme uneexpression d’art de rue, ou encore d'essais décoratifs. Puis, on mettra en avant l’idée d’unart politique qui se diffuse grâce à la rencontre de certains artistes sardes avec l’expériencedes muralistes mexicains et des brigades chiliennes. Cela conduira à montrer l’influence despratiques contestataires sur les murales réalisées dans le village d’Orgosolo et à interroger lafonction pédagogique de ces murales et leur rôle dans la construction de l’histoire d’Orgosolo.Le dernier point abordé concernera les changements qui vont conduire les peintures du villageà bénéficier du label de bien patrimonial.

1. L’émergence et le développement du phénomène et lesdiscours critiques qui l’accompagnent

11 Pendant la première moitié des années soixante-dix, nous ne trouvons au sujet de ces peintures,que des articles de chronique des quotidiens locaux. Un événement précis fait entrer ces objetsgraphiques dans les discours de la presse spécialisée en art et architecture. En 1976, annéede participation de Pinuccio Sciola et d’un collectif d’artistes sardes à la Biennale de Venise,paraissent deux articles approfondis dans les revues nationales « Domus » et « Qui touring »13.Au même moment, des contributions de l’historien d’art sarde Salvatore Naitza sont publiéesdans la revue « La grotta della Vipera »14 éditée par l’association crée à San Sperate par Sciola« Paese-Museo » et dans laquelle trouvent également place des articles, des lettres ouvertesou les témoignages de certains réalisateurs de murales.

12 En 1981, Gilles De Bure publie un livre sur le muralisme dans le monde15. Dans la sectiondédiée aux murs politiques apparaissent une dizaine de clichés des murales d’Orgosolo. Desévénements16 avaient eu lieu entre-temps et une centaine de murales avaient été réalisés dansle village d’Orgosolo. Ils ont, en quelque sorte, pris la place et la renommée de ceux de SanSperate et ont comme particularité une claire connotation politique.

13 Les premières publications traitant des murales de la Sardaigne apparaissent à la moitié desannées 199017. La peinture murale s'était diffusée dans toute l’île et cette propagation induitun nouvel intérêt pour ces objets. La même année, une association culturelle de la ville deBosa et la municipalité organisent un colloque, le premier et dernier en date, sur les murales.Parmi les intervenants figurent l’historien d’art Naitza et l’artiste Ernest Pignon Ernest. S'enest suivie la publication des actes du colloque en 199618. Cette initiative, qui ne venait pas du

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monde intellectuel mais des pouvoirs publics, marque une tendance qui se manifeste encoreaujourd’hui : l’intention des politiques culturelles de porter sur ces peintures la parole d’acteursissus du monde de l’art "officiel".

14 Au cours des dix dernières années, trois nouvelles publications sont apparues. Une seuleconcerne toute la Sardaigne : le catalogue-livre du photographe Yves Barnoux de 2002. Lesdeux autres sont des monographies ; l’une est dédiée à une zone géographique, le villagede San Sperate19, l’autre à une catégorie : les murales politiques20. Cette dernière, écrite pardeux intellectuels d’Orgosolo, annonce l'imposition d'un genre à part entière : celui du muralpolitique se diffusant dans toute l’île. L’ouvrage semble consacrer le mural politique commeune forme spécifique de contestation en Sardaigne et le situe dans la continuité des événementsqui avaient marqué l’Italie dans les années 1960 et 7021. Tout en mentionnant les origines de lapratique de la peinture murale dans le village de San Sperate, les auteurs révèlent la réalisationde la première peinture politique de l’île : un mural réalisé en 1969 par un groupe d’anarchistesmilanais de passage à Orgosolo. Cette pratique s’est ensuite développée dans ce même villagedans le cadre de programmes pédagogiques pilotés par le professeur de dessin Francesco DelCasino.

15 La monographie portant sur les murales de San Sperate, parue beaucoup plus récemment,en 2006, semble énoncer d’autres problématiques. Le titre nous en indique plusieurs : « SanSperate, all’origine dei murales ». Ce titre, traduit en français par : « San Sperate, à l’origine desmurales », est ambigu. Du point de vue graphique, l’ambiguïté du titre de l’ouvrage est donnéepar la virgule. Ainsi cette phrase, qui peut être interprétée comme : « San Sperate et les originesdes murales à San Sperate », doit être lue en tenant compte du fait qu’en 2006, les muralessont déjà perçus comme un phénomène connu au niveau international dont les origines sontattribuées aux villages de San Sperate et d'Orgosolo. D’ailleurs, cette pratique qui se développedans ces deux villages puis dans toute la Sardaigne, a souvent été récupérée par les programmesculturels de différentes municipalités et récemment par les services touristiques. Conscientde ces éléments, le lecteur sera facilement porté à interpréter le titre ainsi  : « San Sperate,à l’origine du phénomène murales  ». Cet ouvrage inscrit les origines des peintures dansl’initiative d’un artiste du village, le sculpteur Pinuccio Sciola, qui, de retour d’un voyage auMexique, aurait eu l’idée de peindre des murs du bourg dans le but de familiariser les habitantsà l’art. Cela semblerait annoncer un autre précédent dans les origines de cette pratique: lesmurales réalisées par les peintres mexicains dans les années vingt et trente au Mexique22.

16 Cette pratique, a, petit à petit, attiré l'attention des curieux, amateurs et touristes et a égalementéveillé l’intérêt des institutions publiques, la parole des intellectuels et a acquis les dimensionset le statut d’un phénomène sociale et culturel propre à la Sardaigne. En effet, entre le débutdes années 1980 et la fin des années 2000, toute une littérature grise a été produite sur cesujet23. Dans la majorité des cas, il s’agit de travaux de fin d’année d’étudiants de deuxièmecycle et de mémoires de maîtrise.

17 Entre temps, des textes moins élaborés et plus « publicitaires » paraissent, surtout dans levillage d’Orgosolo, à l'image des guides et brochures touristiques de la ville.

18 À San Sperate, l’émergence du phénomène avait d’abord amorcé une discussion sur lesmurales, leur appartenance ou non au monde de l’art. Mais à Orgosolo, de tels débats sur lestatut des peintures murales étaient initialement inexistants. Les murales n’étaient pas l’objetd’une parole, mais son support. Les villageois les ont tout d’abord utilisés pour exposerune parole contestataire, contre le gouvernement centralisateur italien ou pour se situer dansdes conflits locaux. Plus tard, ces fresques seront perçues comme des icônes sur des cartestouristiques et, plus récemment, comme des logos commerciaux. Ainsi, ces fresques sontdevenues l’image-symbole du village et une pratique diffusée dans toute l’île.

2. Entre un  « art pour tous » et un  « art politique ». Lesliens avec les expériences latino-américaines

19 Nous trouvons les toutes premières traces du mouvement qui donne naissance au muralismeen Sardaigne à travers l’activité d’intellectuels et artistes sardes qui, dans la deuxième moitiédes années 1950, essayent d’accroître la place de l’île dans le panorama artistique et culturel

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italien et de repenser le rôle de l’art24. En 1958 a lieu, à Nuoro, le Convegno di Icnusa aucours duquel artistes et intellectuels de l’île débattent du manque de moyens d’expression etde la nécessité de créer un nouveau langage. Au terme de différentes rencontres marquéespar ce désir de changement naît, en 1964, un premier pamphlet d’art politique : le Manifestodel Gruppo d’Iniziativa. Cette première expérience pose les bases théoriques du mouvementartistique qui entend défendre une pratique de l’art comme engagement au cœur de la sociétéen revendiquant un art à la portée de tous, hors des musées, s’exprimant par des messagessimples et cherchant véritablement à instaurer une logique participative avec les habitants.

20 A la fin des années 1960, la pratique de la peinture murale se développe autour d’une autrefigure emblématique,  héritière de cette atmosphère culturelle : le sculpteur sarde PinuccioSciola. Né en 1942, dans une famille d’agriculteurs, sa passion pour l’art le conduit à suivredes études à l’Académie des Beaux-arts de Cagliari pour se spécialiser ensuite à l’AcadémieInternationale des Beaux-arts de Salzburg et entreprendre plusieurs voyages d’études enEspagne, en France et au Mexique avant de rentrer dans son village d’origine. Ici, avec lacollaboration d’autres artistes locaux, il fondera une association, promotrice de la réalisationdes peintures murales à San Sperate  : «  Paese-Museo  ». Son objectif était de combattrel’élitisme artistique en redonnant aux habitants la possibilité de s’exprimer sur des thématiquesliées à leur vie quotidienne : la peinture murale, par sa forte visibilité, est identifiée commele moyen d’expression à la portée de tous et une occasion pour l’art de sortir des musées. Lespremières peintures murales naissent de ces expériences.

21 Si les motivations qui amènent Sciola et ses collègues à produire ces fresques sont denature essentiellement artistique, issues du désir de faire sortir l’art des musées pour lerapprocher des passants, l’inspiration d’autres muralistes, dans d’autres villages, est, elle,d’ordre essentiellement politique.

22 En effet, comme la biographie de cet artiste le montre, s’il s’était impliqué dans lesmouvements estudiantins de la fin des années soixante, ses peintures murales n’étaient pas lefruit d’un art engagé – ou « enragé » – comme les productions graphiques du mai 68 parisien.En revanche, selon l’artiste, son activité avait été fortement influencée pas les expériencesmexicaines et sa rencontre avec Siqueiros. Lors de ses séjours au Mexique, à la fin des années1960, il avait touché du doigt les œuvres de José Clemente Orozco et Diego Rivera et avaitfait la connaissance de David Alvaro Siqueiros auquel il dédiera un mural à San Sperate aprèssa mort advenue en 1974.

23 La mémoire des événements de la révolution mexicaine des années 1930 et des images desmonumentales peintures de propagande produites au cours de cette période, était encore vive.Siqueiros affirmait à cette époque : « On se disait vraiment que l’Art public est équivalent àl’art mural. C’est cela qui fut au début du mouvement muraliste mexicain »25.

24 Sciola ne fut pas indifférent à ces enseignements et si les expériences des muralistes mexicainsn’étaient pas inconnues non plus à Orgosolo, elles n’auront pas la même influence danscette autre partie de l’île. Francesco Del Casino déclare en avoir eu connaissance mais cesexpérimentations, éloignées dans le temps et l’actualité politique, n’avaient pas motivé les gensd’Orgosolo à s’impliquer dans la peinture murale. En revanche, d’autres murales, réalisés enAmérique Latine, dans un pays soumis à l'agitation de l'histoire, avaient fortement sensibiliséDel Casino et ses collègues :

« Sans doute on avait connaissance de la grande production d’affiches de Mai 1968 à Paris et,en ce qui concerne les murales, je connaissais un peu l’expérience mexicaine, mais peut-être quece qui nous a poussés le plus vers cette activité, a été l’expérience chilienne. Le coup d’état auChili fut un fait qui nous a beaucoup touchés et le caractère des murales chiliens nous semblaitproches de notre réalité »26.

25 À Orgosolo, une grande attention était portée à ce qui c’était passé au Chili lors du coup d’étatde 1973, événement auquel avait été dédiée une peinture, réalisée en 1977 par Francesco DelCasino (Fig. 1). L’affinité politique dont parle l’artiste était un sentiment vif, non seulementpour les gens d’Orgosolo, mais également pour les immigrés chiliens arrivés en Italie aprèsla révolution. C’est le cas d’Alain Jofré, artiste immigré dans les années 1970 et installé àRome. Là, il retrouve la ferveur politique qui avait animé sa peinture au Chili et il recommence

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à peindre de grandes fresques dans le cadre des Festa dell’Unità, fêtes populaires du PartiCommuniste Italien auxquelles les peintres et les artistes en général étaient invités à participer.Figure 1 - Peinture murale réalisée par Francesco Del Casino en 1977 en mémoire du coupd’état chilien de 1973 (peinture restaurée en 2004). 5, 20 x 2, 60 m. Orgosolo, Via di Vittorio.

Traduction des inscriptions : « Nous prenons dans les ombres du coucher du soleil des goutes de pluie fine. Nuit longuede soleil caché sous les ombres …. Ombre partout nous ramassons des blessés, des morts. Nous tenons serré la ragecomme quelque chose qui s’aime. Nous goûtons la haine comme un aliment. Nous reculons mais nous reviendronsdemain ».« Ils ne savent pas que nous avons beaucoup d’octobres dans notre histoire. Généraux sur votre septembre, tomberanotre octobre. (Poète chilien) ».

26 Dans son témoignage, il explique la raison de sa passion pour la peinture murale  : cettepratique est son moyen de s’exprimer en politique. Cet esprit avait ses racines dans le contextepolitique chilien, où pendant les trois ans du gouvernement de l’Unidad Popular, les peintresde gauche traduisaient artistiquement leurs engagements politiques. Jofré retrouvera le mêmeclimat politique dans l’Italie des années 1970. Ensuite, il arrivera en Sardaigne sur invitationdes artistes Ferdinando Medda, de Nuoro, et Antioco Cotza de Villamar, peintres sardes quis’étaient souvent joints à la réalisation de murales avec Francesco Del Casino.

27 Ces liens entre différentes traditions montrent que la pratique de la peinture murale enSardaigne s’est tout d'abord enracinée dans l’idée d’un art politique portée par les muralistesMexicains des années 1930 et celle d’un art accessible à tous. Les premières fresques de SanSperate sont le reflet des idées portées par des manifestes d’intellectuels locaux proclamantl’engagement de l’art au sein de la société, se rapprochant des idées de « los tres grandes »27 etleurs peintures monumentales. En revanche, les murales d’Orgosolo sont bien plus en relationd’autres types d’expériences latino-américaines reposant sur l’idée de la contestation politique,comme c’est le cas du Chili28 ou bien de pratiques contestataires reposant sur la productiond’objets graphiques (le mouvement estudiantin du mai 68 parisien29).

3. L’influence des pratiques contestataires sur les muralesd’Orgosolo

28 Comme nous l’avons expliqué ailleurs30, les peintures murales réalisées dans ce villagetémoignent de l’héritage d’un militantisme de contestation qui avait animé le bourg aucours des années 1968 et 1970. Ayant connaissance de l’expérience de San Sperate, lapeinture murale apparaît à Francesco Del Casino (réalisateur de la plupart des fresques à

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Orgosolo), comme la forme idéale pour donner une plus grande temporalité à des messagesqui, auparavant, étaient confiés aux affiches (Fig.2 et 3).Figure 2 - Peinture murale réalisée par Francesco Del Casino en 1976 en mémoire de la luttede Pratobello de 1969. Taille : 2,4 x 2,6 m. Orgosolo, Via Liguria.

Traduction de l’inscription : « Des engrais, pas des balles ».

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Figure 3 - Copie d’une affiche réalisée par le Circolo Giovanile d’Orgosolo en 1960.

29 Del Casino, comme les habitants du village interrogés sur les origines des murales, soulignentune parenté entre des objets graphiques (tracts, affiches et fresques) qui semblent apparteniraux mêmes sphères d’activités, celles des pratiques contestataires. Ces liens sont de plusrenforcés par les éléments visuels, aussi bien sur le plan linguistique (visible dans les énoncéset le vocabulaire employé dans les écrits qui accompagnent les peintures murales) que sur leplan formel (avec la présence d’attributs iconographiques qui se répètent comme le poing levéet la figure du militant).

30 Il s’agit d’une iconographie construite autour de l’actualité politique qui met en avant dessymboles de la culture protestataire : poings, mains, uniformes, objets appartenant au mondemilitant (tracts, affiches, banderoles). En ce qui concerne les contenus et les sujets, sedégage une tendance dominante depuis les origines du phénomène, celle de la mise en scèned’actions de contestation (des scènes de conflits, des manifestations et des rassemblements).

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Un nombre limité de peintures semble témoigner de l’étroite relation entre affiches et muralesqui est perceptible dans différents témoignages. Il s’agit de sept fresques, toutes réalisées parFrancesco Del Casino entre 1970 et 1980, qui reproduisent des affiches produites par le CircoloGiovanile ou bien qui reprennent le format de l’affiche (Fig. 4). Un autre groupe de peintures,toutes réalisées par le même artiste, se distingue des autres en présentant des phénomènes demise en abîme de l’écrit. Il s’agit de murales dans lesquels sont reproduits des pancartes, desaffiches (Fig. 5), un tract, une plaque commémorative ou un livre. On peut enfin trouver l’objetécrit dans la peinture elle-même comme dans le cas de fresques où sont collées, dans l’espacegraphique de l’image, des pages des journaux datées de l’époque de leur réalisation. Tous cescas témoignent d’une forte présence de l’écrit et du « support-d’écriture » dans les murales.

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Figure 4 - Peinture murale réalisée par Francesco Del Casino en 1978. Taille : 1,7 x 2,4 m.Orgosolo, Corso Repubblica.

Traduction de l’inscription : Honorable Bagnino, ministre délégué aux transportsRECHERCHÉPour les délits suivants :1) attentant au droit de l’étude ;2) tentative d’enfermement de 150 personnes dans un car ;3)condamnation par contumace prolongée de toutes les assemblées étudiantes.Considérable récompense à qui le capture. Le mouvement indépendant des étudiants.

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Figure 5 - Peinture murale réalisée par Francesco Del Casino en 1984 en mémoire de la luttede Pratobello. Taille : 3 x 7 m. Orgosolo, Corso Repubblica.

Traduction des inscriptions :« Mairie. Maison du peuple. Le peuple décide et le maire signe » ;« Non à la répression » ;« Ce sont les animaux qui protégerons le parc » ;« Femmes et hommes unis dans la lutte » ;« Assemblée populaire » ;« Dehors les vautours de la Sardaigne » ;« Avant les mouflons, sauvez les hommes » ;« Nord et sud unis dans la lutte » ;« Fascistes charognes » ;« Pâturages libres des patrons et des cannons » ;« Non aux licenciements, Ottana conseil d’usine » ;« La Sardaigne veut la renaissance, non des bases militaires » ;« Ce qui se passe à Pratobello, contre l’élevage et l’agriculture, est une provocation d’ordre colonial. Il faut remonterà la période du fascisme pour retrouver un événement pareil. Pour cette raison je me sens solidaire avec les bergerset les agriculteurs d’Orgosolo qui résistent avec courage et si je n’étais pas en mauvaise santé, je serais parmi eux.Emilio Lussu, juillet 1969 ».

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31 La présence de l’écriture dans ce type de peintures est un des premiers éléments qui nous aincité à chercher les origines de ce phénomène non dans une culture artistique, mais dans uneculture politique et plus précisément dans des pratiques contestataires.

32 Ces écritures, toujours peintes et réalisées à la main, s’affichent avec une simplicité graphiquetypique du lettrage de style vernaculaire. Cette simplicité revient également dans le choix de larédaction avec des formes langagières rudimentaires et un vocabulaire repérable serti de motsrécurrents : popolo, lotta, sostegno, compagni31. On peut observer des phrases qui se répètent(l’exhortation adressée aux femmes, hommes, bergers et ouvriers, à être solidaires et unis dansla même lutte), avec un vocabulaire qui relève d’un système culturel précis et fait référence àdes périodes historiques explicites (mai 68, la période des coups d’États en Amérique Latine).Le discours politisé affiché s’inscrit dans une période de grande ferveur militante, le but étantd'offrir un message rapide, compréhensible par les habitants du village, et censé les stimulerà prendre position où à s’impliquer dans le débat. On trouve ainsi des phrases appartenant augenre du slogan, telles que (Fig.6) : « Femmes unies dans la lutte », « On veut des engrais, pasdes balles », ou encore « Le moment est venu, peuples, d’en finir avec les abus. Renversonsles mauvaises coutumes, renversons l’arrogance ».Figure 6 - Peinture réalisée par Francesco Del Casino et des femmes du village en 1978.Taille : 5,7 x 2,7 m. Orgosolo, Corso Repubblica.

Traduction des inscriptions :« Femmes unies pour l’émancipation et la libération et pour une vrai place dans la famille et dans le monde du travail » ;« Le 8 mars 1908, enfermées par leur patron dans une usine de New York, 129 femmes mouraient dans un incendie ».

33 L’idée première de cette action d’affichage, délibérément liée à l’actualité, était de répondreau coup par coup aux événements, comme l’écrit un ancien membre du Circolo dans sesmémoires :

34 « À cette époque, tout était mis au mur, tout était public, nos affiches étaient un peu commeles journaux muraux des chinois, les dazibao je pense, voilà on avait pris l’inspiration un peude ça aussi »32.

35 On ne peut pas dire que le muralisme soit arrivé à Orgosolo par hasard. La présentationhistorique de ce phénomène montre d’une part, que les premiers murales ont été réalisés suiteà l'implication du « Circolo Giovanile » dans plusieurs luttes de revendications au cours desannées 1968 et 1970 et, d’autre part, qu’une partie des murales est construite sur le modèle detoute une tradition de pratiques contestataires33.

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4. Entre pédagogie et histoire. La peinture murale façonnel’histoire communautaire.

36 Il ne faut pas oublier que si l’esprit contestataire a marqué les premières productions à partirde 1975, la réalisation d’une bonne partie des peintures murales a eu lieu dans le cadrede programmes scolaires pilotés par le professeur de dessin Francesco Del Casino. Deuxexpériences ont été fondatrices.

37 En 1975, le professeur propose à ses collègues d’histoire et de littérature de mettre en placeun projet pluridisciplinaire à l’occasion de la célébration des trente ans de la libération del’Italie du fascisme. Ce projet prévoyait un travail en histoire autour des événements de 1945et, à partir d’une recherche sur les partisans de la région, la réalisation de plusieurs peinturesmurales portant sur le sujet. Il s'agissait de réaliser des hommages sous forme de portrait desanciens partisans de la région, comme, par exemple, la peinture reproduisant les partisansCongiargiu (Fig. 7).Figure 7 - Peinture murale réalisée par Francesco Del Casino et ses élèves en 1975 enhommage au partisan Congiargiu. Taille : 7,3 x 3 m. Orgosolo, Via Congiargiu.

38 Au cours de l’année scolaire 1976-1977, un projet pluridisciplinaire similaire est proposé,centré sur la réalisation de peintures murales en hommage aux grands protagonistes del’histoire italienne dont certaines rues du village portent le nom ; c’est le cas des peintures enhommage à Garibaldi, à Angioi et au général Cadorna .

39 L’initiative est aujourd’hui défendue par des professeurs de l’école primaire d’Orgosolocomme un projet pionnier :

« Avec ces initiatives, Del Casino avait anticipé l’idée des heures de coprésence qui n’existait pasencore, il avait commencé cette expérience avec les professeurs de lettres et d’histoire qui devaientexpliquer aux élèves qui étaient les personnages dessinés et à quelle période ils avaient vécu »34.

40 Selon le professeur, à ce moment-là, la scolarisation n’était pas tout à fait acceptée dans levillage et la plupart des enfants abandonnaient l’école pour aider leurs parents à la bergerie.Avec ces actions, d’une part Francesco Del Casino revendiquait un lien entre l’école etl’environnement social de l’enfant (d’où l’idée de promouvoir des initiatives scolaires commela réalisation de peintures hors des espaces de l’école, dans les rues du village), et, d’autre part,il cherchait à ne pas s’affilier à une éducation artistique selon le régime des Beaux-Arts maisà développer cet enseignement autrement en le reliant à d’autres disciplines. Un collègue de

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Del Casino insiste sur le fait que les murales du professeur ont contribué à éduquer toute lacommunauté d’Orgosolo35 à l’art :

« […] Les murales ont été comme des livres intériorisés de façon collective par une communautéisolée à l’intérieur d’un microcosme particulier. La fonction des murales a également étéd’éduquer les gens à l’art en leur donnant des clefs de lecture. Tout ça, pour une société d’économiepastorale où n’a jamais existé de tradition d’artisanat ou une recherche du beau car tout se réduisaità l’essentiel, a été un événement d’une remarquable importance qui a animé de façon positive lacommunauté d’Orgosolo ».

41 À l’initiative de Del Casino, la peinture murale a été adoptée comme méthode pédagogique parses successeurs. Gianfranco Fistrale, ancien élève de Francesco Del Casino, est aujourd’huiprofesseur de dessin dans l’école élémentaire de Sestu (Cagliari). Il anime des ateliers  depeinture murale dans les milieux scolaires et associatifs. Au cours d’un entretien, il expliquequ’il est important, pour lui, d’utiliser la peinture murale comme action pédagogique36. Parrapport au récit de Del Casino, une autre caractéristique de cette pratique est mise en valeur :la « création collective ». Par cette expression, Fistrale entend dire que la peinture muralea le mérite de permettre d’impliquer tous les jeunes à la réalisation d'un travail de groupe :« Travailler ensemble c'est inné dans la conception des murales. Un mural est une créationcollective ».

42 Teresa Podda, ancienne élève de Francesco Del Casino, anime des ateliers de peinture muraledans les écoles de Nuoro et s’occupe régulièrement de restaurer des anciens murales. Selonelle, l’intérêt de cette pratique en tant que méthode pédagogique réside dans son potentiel desocialisation :

« Je me souviens encore du premier mural que j’avais fait avec Del Casino et des copains declasse. Maintenant il s’est effacé, c’était en 1976. Il représentait un four à bois et des femmesqui faisaient le pain. Tu sais, ma passion pour restaurer les murales est vraiment née de cesexpériences. Del Casino a été un bon professeur, je l’admire beaucoup parce qu’avec le muralil réussissait à intéresser tous les élèves à ce qu’on faisait, tous participaient, même ceux qui nesavaient pas dessiner, il leur donnait des parties à colorier et il les faisait se sentir importantsmême dans les petites choses. Le mural était alors une création de tous. On devrait faire encoredes choses comme ça, comme le faisait Del Casino avec ses élèves »37.

43 Depuis le départ de Del Casino à Sienne, Teresa Podda travaille beaucoup en collaborationavec un autre professeur de dessin de l’école de Nuoro : Ferdinando Medda. La peinture muralea été adoptée comme outil pédagogique par plusieurs professeurs et la plupart des réalisateursde murales enseignent dans des écoles : Medda à Nuoro, Diego Asproni à Bitti, Angelo Pillonià San Sperate, etc. Le mural a également « fait école » dans d’autres villages : à San Sperate,à Villamar. Un peu partout, des ateliers pédagogiques centrés sur la réalisation de peinturesmurales se mettent en place.

44 Mais, un changement important est à remarquer dans l’emploi de cette pratique commeméthode pédagogique. En 1975, Del Casino utilisait la peinture murale pour transmettre auxélèves la l'histoire de l’Italie et les initier, par le dessin et la peinture sur mur, à l’éducationartistique. Presque trente ans plus tard, cette méthode est reprise par les professeurs de l’écoledu village pour sensibiliser les élèves à cette histoire qui est devenue l’histoire actuelled’Orgosolo, c’est-à-dire l’histoire du village des murales.

45 Citons, par exemple, le projet éducatif, « À la recherche de nos racines », mis en place pendantl’année scolaire 1999-2000 à l’école élémentaire d’Orgosolo, qui illustre ce changement desens dans la mission pédagogique des murales.

46 Cette initiative prévoyait deux moments  : une première phase avait pour but la réalisationde plusieurs peintures murales dans le village à l’aide du professeur Francesco Del Casino,invité pour ce projet à faire un cours sur les murales dans le monde et expliquer la naissancede la peinture murale dans le village ; un deuxième temps envisageait le recueil des poésiesde poètes locaux. Le projet a été réalisé grâce à une subvention régionale dans le cadre desfinancements pour le soutien de la langue sarde. Dans le titre du projet apparaît clairement ceque les concepteurs entendent par « racines » de l’histoire d’Orgosolo : la poésie en langue

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sarde et les peintures murales réalisées par Francesco Del Casino. Ainsi ces peintures ne sontplus des outils d’apprentissage de l’histoire ; ils deviennent l’histoire.

47 Les professeurs responsables du projet affirment38 que les murales sont susceptibles d'aider lesjeunes à comprendre l’histoire. Par contre l’histoire que le projet se promet d’apprendre auxjeunes et celle que Del Casino est chargé de présenter n’est pas « l’Histoire » mais l’histoirespécifiques des murales. Ces images-objets39 qui étaient, auparavant, une méthode d’actionpédagogique sont maintenant l’objet même du programme pédagogique.

48 Ce projet didactique est mis en place dans le but de faire connaître aux élèves le patrimoinedu village :

« Le but de ce projet était de faire connaître le patrimoine culturel d’Orgosolo, et de le préserver,connaître pour ne pas oublier même de petits évènements qui de toute façon ont compté dans la viede la communauté d’Orgosolo et qui sont représentés dans les murales. L’histoire de l’expériencedes murales, quand tout a commencé, les motivations, les réactions de la population et del’administration communale, comprendre et analyser les contenus historiques et sociaux expriméspar les murales. Une première partie porte sur la connaissance des différentes techniques depeinture et dans un deuxième moment on se consacre à des connaissances du contexte historique,social et culturel dans lequel cet art est né, le but est également l’acquisition d’une sensibilité etdu respect des biens publics »40.

49 L’objectif des professeurs est alors de transmettre aux élèves, non seulement des connaissancessur une pratique, devenue une tradition et un élément d’histoire du village, mais également lerespect pour des objets traités comme des biens du patrimoine public.

5. De la fonction communicative à la patrimonialisation50 Dans le projet pédagogique évoqué, la peinture murale est présentée comme un élément

fondamental de l’histoire du village, elle est devenue l’histoire même et une de ses traditions.Ce dernier point, qui avait déjà fait son apparition dans le discours des professeurs porteurs duprojet pédagogique de 1999-2000, se confirme par les propos de plusieurs témoins, notammentcelui de l’ancienne adjointe à la culture à la mairie du village qui sous-entendait l’existenced’une tradition de murales à Orgosolo.

51 L’appartenance des murales à une tradition est en effet l’argument souvent avancé pourdistinguer les peintures murales faites par des artistes locaux des peintures faites par des artistesextérieurs au village comme celles réalisées au cours de la manifestation de peintures muralesqui a eu lieu en 1993 :

« La manifestation de 1993 n’a pas été un évènement réussi parce que la plupart des artistes invitésvenait de l’extérieur, et ils n’étaient pas dans la ligne de la tradition du village de faire des muralesqui existe ici à Orgosolo »41.

52 L’idée d’une peinture murale spécifique d’Orgosolo s’affirme dans la liaison entre histoire ettradition ; elle se propage dans les discours des villageois et des politiques locales. C’est enraison du sentiment d’une histoire commune que certains habitants sont prêts à défendre lesmurales sans tenir compte des critères esthétiques : « beaux ou vilains, s’ils parlent de notrehistoire, il faut les garder ». Ce qui semble être à la base de la persistance de ces peinturesest la mission, cette fois de l’ordre de la communication, qui leur est confiée : celle d’afficherl’histoire de la communauté et de fabriquer des "lieux de mémoire" au sens de Pierre Nora, aumême titre donc que des archives ou un musée.42.

53 À Orgosolo, ce qui est affiché par le biais des murales semble être le maintien d’une certainemémoire43, qui est donnée à voir aussi bien aux jeunes élèves et à tous les habitants du villagequ’aux touristes. L’espace public devient alors pour les premiers un lieu d‘apprentissage del’histoire que l’on veut leur transmettre ; pour les seconds, un lieu d’une mémoire partagée et,pour les touristes, un lieu de lecture du récit transmis, façonnant un cadre mémoriel. Il y a unlien à faire entre le partage d’un espace et le partage d’un événement qui constitue et alimenteune mémoire sociale. Ces mécanismes qui opèrent une requalification symbolique des espacesoù se trouvent les murales sont l’une des raisons qui justifient la permanence des ces fresqueset la prise en charge de leur restauration44.

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54 A la fin des années 1990, une nouvelle étape dans ce phénomène débute qui, cette fois, nese caractérise pas par un engagement dans la création mais plutôt par la pérennité de ce quicommence à être perçu comme patrimoine culturel. La municipalité d’Orgosolo commence àsuivre une direction de politique culturelle qui incite à prendre en compte les murales commedes éléments à part entière du patrimoine culturel du village. En cette période, plusieursprogrammes de restauration sont activés et financés par le service culturel de la mairie. En2000, une carte du village – le « Guide des murales d’Orgosolo» – indiquant les principauxmurales avec le nom de leur auteur et leur année de réalisation, est produite par le servicemunicipal à l’occasion de la fête traditionnelle du 15 août. Puis la même année l’administrationmunicipale met à disposition un financement spécifique pour la conservation et la restaurationdes peintures murales et confie cette mission aux étudiants de l’école d’art de la ville. Cen’est qu’une première initiative pour la valorisation de ces fresques dont la restauration seraeffectuée à plusieurs reprises.

55 Deux ans plus tard, en 2002 toujours à l’occasion des célébrations du 15 août – la Festadell’Assunta – une nouvelle brochure est réalisée qui présente une brève description duterritoire du village, le calendrier des festivités, des indications pour le rejoindre et l’histoiredes murales. La brochure, illustrée par des images de murales de Del Casino porte le titre :« Orgosolo. Des murs qui parlent dans un musée en plein air ».

56 Au printemps 2007, à la suite de plusieurs initiatives de l’administration locale45, la questionde la restauration atteint le niveau régional : la Direction aux Affaires Culturelles de la RégionSardaigne décide de cataloguer certains murales et de créer des fiches répertoriées dans sesarchives.

57 Une nouvelle époque commence, dans laquelle la préoccupation principale semble êtrecelle de la conservation des murales et leur documentation. Cette période est marquée parl’inauguration le 15 mai 2010 d’un centre du « Centro di Documentazione del Supramonte »,centre de documentation sur le patrimoine socio-anthropologique et architectural du village,incluant également une structure dédiée aux murales, nommée « Radichinas », parole sardequi veut dire « les racines ».

6. Conclusion58 Si à Orgosolo, le phénomène de la peinture murale a atteint un tel développement et une telle

importance, au point de motiver les politiques locales à la création d’une structure qui leur estdédiée, il ne faut pas oublier que dans plusieurs villages de l’île ces peintures sont présenteset sont également au cœur des politiques culturelles locales. Là aussi, la fonction publicitairedes murales a été exploitée pour mettre en scène, de façon différente à chaque fois, le villageet ses spécificités.

59 Comme le relève également la presse locale46 à plusieurs reprises, les murales se font unpeu partout porteurs de l’histoire d’un lieu et l’on retrouve, dans chaque cas spécifique, deséléments communs. L’un d’eux, qui se répète sous des formes différentes, est le retour auxtraditions. Cette tradition s’affiche à San Sperate dans une iconographie liée au monde paysanet au travail dans les champs (Fig.8) ; à Irgoli, dans les peintures représentant des femmes entrain de tisser de la laine (Fig .9) ; à Lula, dans les portraits des travailleurs des mines. La mêmefonction est attribuée aux murales dans ces villages : celle de l’affichage public de l’imagequ’on a choisi de donner. Le recours à une pratique, la peinture murale, et à une fonctioncommune, que nous avons appelée publicitaire, et sa diffusion dans l’île, nous permettent deparler d’un phénomène territorial : le muralisme en Sardaigne.

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Figure 8 - Peinture Murale réalisée par Angelo Pilloni en 1997. Taille  : 10,2 x 6,5 m. SanSperate, Via Arabei.

Figure 9 - Peinture murale réalisée par Nicoletta Congiu en 2004. Taille : 4,7 x 2,3m. Irgoli,Via G. Soro.

Traduction de l’inscription : « Nicoletta Congiu, 2004. Fileuses de laine ».60 Depuis la moitié des années 1990, dans les discours des acteurs, on ne parle plus seulement des

murales d’Orgosolo ou encore de ceux de San Sperate mais du « muralisme en Sardaigne »,ou encore du «  muralisme sarde  », ces dernières appellations sont adoptées comme titred’ouvrages qui traitent de ce phénomène. Cet aspect trouve confirmation dans les parolesdes habitants interviewés qui sont plutôt favorables à la présence des murales maintenantidentifiés comme produit de la culture sarde grâce aux thématiques affichées : les luttes localesà Orgosolo, le rappel des traditions à San Sperate ou Irgoli. Cette attitude de la population est

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également ce qui explique, en partie, le consensus des administrations municipales face à laréalisation de murales dans les villages. Le mural est donc devenu sarde.47

61 Dans ces différentes expériences fortement ancrées dans le contexte local, ce quipeut permettre un rapprochement est d’une part la fonction pédagogique, de l’autre laperformativité48 de la peinture murale. En effet les expériences de San Sperate, avaient pourfinalité de produire un art populaire, au sens où l’entendait Vasconcelos dans le Mexique desannées 30 49: un art visant à élever le niveau de la culture du peuple, tout en permettant demieux connaître et assumer sa véritable identité, ses origines ethniques et son métissage. Cespropos, mutés en ceux d’un art politique de parti par "los tres grandes", seront récupérés pard’autres expériences muralistes, celle sarde ou bien, dans une perspective plus large, celledes murales chicanos50, pour lesquels les murales, véritable pratique communautaire, avait unobjectif pédagogique à destination de la communauté, surtout dans des territoires symboles delutte, comme le Chicano Park de San Diego51 (par le biais d’images appartenant à une culturepartagée comme la vierge de Guadalupe)52. Le mural public, selon les activistes, aidait lesChicanos à faire revivre cette histoire que leurs enfants n’apprenaient pas à l’école. Ici résidele rôle performatif et l’efficacité de ces peintures qui comme dans le cas sarde, fabriquent unehistoire et façonnent une nouvelle image symbolique des murs qui les affichent53.

62 Si l’étude du phénomène sarde, nous amène à prendre en compte des éléments spécifiquementancrés dans l’histoire du territoire, il est également évident que nous pouvons repérer danscette histoire, si imprégnée d’une couleur locale, des éléments qui nous permettent d’avancerl’idée d’une histoire de la peinture murale faite de transferts et migrations de traditions, de"bricolages historiques" ainsi que de circulations de personnes. Ainsi le cas sarde se présentecomme un cas pouvant montrer une histoire complexe et multiple de la peinture murale, faited’une pluralité d’acteurs et du croisement des traditions. Nous sommes face à une pratiquequi, en plus de quarante ans de développement, a connu des changements d’usages et designifications. On peut postuler que cela a garanti la permanence d’une pratique, qui ne cessede se renouveler grâce à de nouvelles peintures (Fig. 10).Figure 10 - Peinture murale réalisée par 3 anciens militants du Larzac en 2009, à l’occasionde la célébration des 40 ans de la lutte de Pratobello. Taille : 1,8 x 2 m. Orgosolo, CorsoRepubblica

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Notas

1 Barnoux, Yves, Murales de la Sardaigne , Paris – Cagliari, Ettore Gasperini Editore, 2001. Kikinu,Muralismo a Orgosolo, Orgosolo, Kikinu, 1996. Mannironi, Riccardo, Arte murale in Sardegna,Cagliari, Incaspisano, 1994.2 Il s’agit de terrains de recherche réguliers qui ont eu lieu entre 2005 et 2010 et qui ont servi à laréalisation d’une thèse de doctorat : Cozzolino, Francesca, 2010, « Les peintures murales d’Orgosolo enSardaigne. Etude anthropologique », thèse de doctorat soutenue sous la direction de Béatrice Fraenkelle 16 décembre 2010, EHESS, Paris.3 Cozzolino, Francesca, «  L’invention et le devenir d’une tradition. Les murales d’Orgosolo enSardaigne », Cultures & Sociétés. Sciences de l’homme, n°25, 2013, p. 101-1104 Une première bibliographie comparative produite en 2010 a été par la suite augmentée en collaborationavec Ariela Epstein. Voir la bibliographie thématique dans l’introduction du dossier.5 Cagnetta, Franco, Banditi a Orgosolo, Firenze, Guaraldi, 1975; Corda, Elettrio, Storia di Orgosolo.1937-1953, Milano, Rusconi 1989; Le Lannou, Maurice, Pastori e contadini di Sardegna, Ed, La Torre,2006 (première éd. 1979), version original, Patres et paysans e la Sardaigne, Arrault, Tours, 1941 ;Vincent, Eduard, Il paese. Taccuino di Orgosolo 1964-1984, Cagliari, Edes, 1985.6 Gallini, Clara, Il consumo del sacro. Feste lunghe di Sardegna, Roma-Bari, Laterza, 1971 ;Heartherington, Tracy, Ecology, alterity and Sardinia, in « Social Anthropology », n° 9, 2001, p. 289-306 ; Pira, Michelangelo, La rivolta dell’oggetto : autobiografia della Sardegna, Giuffré, Milano, 1978 ;Satta, Gino, Turisti a Orgosolo. La Sardegna pastorale come attrazione turistica, Napoli, Liguori, 2001 ;

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7 A titre d’exemple nous citons certains de ces travaux sur lesquels nous nous sommes appuyés. Pour voirl’intégralité des références, se référer à la bibliographie de la thèse citée. Barthes, Roland, Rhétorique del’image, « Communications », n°4, Paris Seuil, 1964. Belting, Hans, Pour une anthropologie des images,coll. Les Temps des Images, Paris, Gallimard, 2004. Christin, Anne-Marie, L’image écrite ou la dérisiongraphique, Idée et recherche, Paris, Flammarion, 1995 ; Fraenkel, Béatrice, « Actes d’écriture : quandécrire c’est faire », in Langage et société, n° 121-122, sept-déc 2007, p. 101-112. Heinich, Natalie, “Aupied du mur: sur une fresque ne milieu urbain”, in Sociologie et société, vol XXI, n°2, octobre 1989, p.91-101 ; Michaud, Eric, « Art, propagande, publicité » in La fin du salut par l’image, Paris, ed. Critiquesd’art, 1992, p. 136-160 ; Panofsky, Erwin, Introduction à l’analyse de l’image. Essais d’iconologie, Paris,Gallimard, 1967 (1ère éd. Oxford University Press, 1939)  ; Prévost, Bertrand, « Pouvoir ou efficacitésymbolique des images », in L’Homme, n°165, 2003, p. 275-282.8 En France, il existe un seuil défini par les démographes, pour déterminer ce qui relève du rural etde l'urbain. Le terme « village » est employé pour désigner une agglomération qui compte moins de2000 habitants. Il aurait donc fallu parler de "petite ville" dans ce cas, ou employer un terme plus neutrecomme bourg, bourgade, car si on dépasse ces chiffres, nous avons affaire à une ville et nous glissonsdans l'urbanité9 Nous utilisons le terme le terme espagnol de mural (et de murales) – à défaut de l’anglais murals –pour designer des grandes fresques narratives peintres sur les murs en Sardaigne, puisque celui-ci est leterme employé par les par les acteurs-mêmes de ce phénomène.10 Créé à la fin de 1967, dans une atmosphère de forte tension politique, et actif jusqu’à la fin de 1970, le« Circolo Giovanile d’Orgosolo » était l'une des nombreuses associations à caractère culturel et politiquenées dans la deuxième moitié des années soixante dans toute l’île. Cette association, au départ à butculturel, réunissait un grand nombre de militants du Parti Communiste Italien.11 Originaire de la ville de Sienne, Francesco Del Casino a occupé le poste de professeur de dessin dansl’école primaire d’Orgosolo entre 1965 et 1970. Après sa participation aux événements de la « Lutte dePratobello » et son implication dans les activités militantes du « Circolo Giovanile d’Orgosolo ». Leprofesseur fut éloigné du village pendant quelques années qu’il passera à enseigner dans une école sur lacôte de l’île. Il rentrera à Orgosolo pour retrouver son ancien poste en 1975 jusqu’en 1985. Il quittera alorsle village pour rentrer à Sienne, où il vit actuellement avec son épouse, ancienne habitante du village.12 La lutte de Pratobello intervient après l’accord des américains avec le gouvernement italien, en 1969,pour la création d’une base de l’OTAN dans un pâturage à côté d’Orgosolo. Elle a consisté en l'occupationde ce territoire par la population locale afin d’empêcher l’armée de créer sa base. Voir : Muggianu, Pietro,Orgosolo 68 – 70, il triennio rivoluzionario, Nuoro, Studio Stampa, 1998.13 Carboni, Maria, “Fatti e volti dei murales”, Qui Touring, Milano, février 1976.D’Urso, Teresa, “Un paese diverso”, Domus, Milano, octobre 1976.14 Naitza, Salvatore, L’esperienza artistica di “paese-museo”, in La Grotta della Vipera, n° 14, Cagliari,printemps 1979, p. 17.15 De Bure, Gilles, Murales, cultura delle strade, Milano, Silvana,1981.16 Nous nous référons ici aux événements de contestation liés à la lutte de Pratobello.17 Mannironi, Riccardo, Arte murale in Sardegna, Cagliari, Incaspisano, 1994. Piredda, GiovanniAndrea, I murales di Orgosolo, Olbia, Balzano, 1994.18 Sous la direction du « Centro di Cultura popolare » – U.N.L.A. – Murales in Sardegna, Artigianarte,Bosa, 1996.19 Olita, Ottavio et Pes, Nanni, San Sperate, all’origine dei murales, Cagliari, AM&D édition, 2006.20 Rubanu, Pietrina et Fistrale, Gianfranco, Murales politici della Sardegna, Cagliari/Bolsena, Massari/Dattena, 1998.21 L’ouvrage fait références aux idées diffusées par la contestation politique des mouvements juvénilesqui s’exprimaient dans les grandes villes italiennes dans les années de la “stratégie de la tension” et dansla période d’activité des brigades rouges. Voir : Garelli, Cesare, Il linguaggio murale, Milano, Garzanti,1978.22 Voir par exemple: Fauchereau, Serge, Les peintres révolutionnaires mexicaines, Paris, EditionsMessidor, 1985. Paz, Octavio, “La peinture social mexicaine”, in Rire et Pénitence, Paris, Gallimard,1983, p 163-182.23 Entre les années 80 et le début des années 2000, une dizaine de travaux d’étudiants a été produite sur lesujet. Nous en citons trois particulièrement intéressants (pour voir la liste complète nous renvoyons à labibliographie de la thèse citée) : Serenella Zedda, Aspetti della pittura murale in Sardegna : 1968/1988,vent’anni di esperienza. Due personalità : Diego Asproni e Pinuccio Sciola, sous la direction de SalvatoreNaitza, Université de Cagliari, 1989. Sandrine Lescaroux, Le muralisme en Sardaigne, sous la directionde M. Ajmerucci, Université de Toulouse Le Mirail, 1998. Patrizia Satta, I murales di Orgosolo, sous ladirection de Marco Schirru, Université de Cagliari, 2003

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24 Avec plusieurs années d'avance, nous retrouvons dans les idées exprimées par le Gruppo d’Iniziativa,les points fondamentaux du discours qui seront développés ensuite par les muralistes : de l'engagementpolitique à la critique du rôle traditionnel de l'artiste, des choix formels à l'emploi d'élémentsprovocateurs, de la présence d'écrits à la volonté d’amener l'art dans la rue, pour un contact nouveau etplus vital avec les gens. Voir : Cagliaritano, Ubaldo (dir), Voci di Sardegna : arti figurative, Siena, FonteGaia, 1964. Delogu, Ignazio, Bilancio della pittura in Sardegna : rassegne, in « Ichnusa », Gallizzi, vol7, n° 30, 1959. Delogu, Ignazio, Per una definizione dei rapporti fra arte e cultura in rapporto allo statoattuale delle arti figurative in Sardegna: dibattito, in « Ichnusa », Gallizzi, vol 6, n° 25, 1958. Prunas O.,Se Atene Piange. Arte et artisti a Nuoro dal secondodopoguerra agli anni 80. Thèse de maîtrise, sousla direction du Professeur Giorgio Pellegrini, Université de Cagliari, Faculté de Lettres et Philosophie,Année académique 1997-1998.25 Siqueiros, David Alfaro, Dipingere un murale, Milano, Fabbri, 1976, p. 20.26 Entretien avec Francesco Del Casino du 18 avril 2005, Sienne. Toutes les traductions d'entretienssont de l'auteur.27 Paz, Octavio, Le signe et le grimoire. Essays sur l’art mexicaine, Paris, Gallimard, 1995.28 Castro Garcia, Antonia, «Les murs comme support du politique  : la brigade Cachon au Chili(1989-1997) », in Cultures et Conflits, n°57, printemps 2005, p. 259-275. Rodriguez-Plaza, Patricio,La peinture baladeuse. Manufacture esthétique et provocation théorique latino-américaine, Paris,l’Harmattan, 200329 Fraenkel, Béatrice, Les affiches de Mai : l’atelier populaire des Beaux Arts, in « 68, une histoirecollective, (1962 -1981) », sous la direction de Artières P. et Zancarini-Furnel, Paris, La Découverte,2008.30 Voir également l’article  : Cozzolino Francesca, « De la pratique militante à la fabrication dupatrimoine. Le cas des murales de la Sardaigne », Cultures & Conflits, n°91/92, « Iconographie politiquecontestataire» sous la direction de Xavier Crettiez et Pierre Piazza, hiver 2013, p. 45-64.31 Peuple, lutte, soutien, camarades.32 Circolo Giovanile di Orgosolo (sous la direction de), Sa lotta de Pratobello, oeuvre polycopiée,Orgosolo (Nuoro), 1969.33 Il existe une grande littérature sur ce sujet. Voir par exemple : Tartakowsky Danielle, « Les imagesfont-elles encore image  ?  », Sociétés & Représentations, 2, nº 12, p. 161-174  ; Favre Pierre, Lamanifestation, Paris, FNSP, 1986 ; Crettiez Xavier et Sommier Isabelle (dir), La France rebelle, Paris,Michalon, 2006 ou Tilly Charles, La France proteste, Paris, Fayard, 1984.34 Extrait du témoignage du professeur Pierina Mongiu, recueilli par Patrizia Satta à l’occasion de sonenquête dans les écoles d’Orgosolo en 2003. Voir Satta P., Op. Cit. p. 53.35 Extrait de l’entretien effectué avec un collègue de Del Casino à Orgosolo le 16 août 2006.36 Entretien réalisé avec Gianfranco Fistrale le 22 août 2006 à Orgosolo.37 Entretien réalisé avec Teresa Podda à Orgosolo le 19 août 2006.38 Voir. Satta, Patrizia, 2003, Op. Cit. p. 144-14639 Nous faisons ici volontairement référence à la notion d’image-objet formulée par Jérôme Baschet dansson étude sur l’iconographie médiévale, puisque cette notion permet de prendre en compte la fonction desimages sur plusieurs registres ainsi que leur matérialité. Cette notion invite à une approche relationnelle.ll s’agit de saisir l’image-objet au sein des rapports sociaux et des situations sociales dans lesquelleselles sont produites et se trouvent engagées. Voir : Baschet, Jérôme, L’iconographie médievale, Paris,Gallimad, coll « Folio histoire. Inédit », 2008, p. 25-64.40 ibidem.41 Extrait de l’entretien avec l’ancienne adjointe à la culture de la Mairie d’Orgosolo, août 2008.42 Nora, Pierre, « Entre mémoire et histoire. La problématique des lieux », in Pierre Nora (dir). Les lieuxde mémoire, t. I, La République, Paris, 1984, p. 17-42.43 Exemplaire, dans ce sens, est la peinture murale en mémoire de la lutte de Pratobello qui, affichée surla façade de l’ancienne mairie du village, et qui a aujourd’hui le même statut que celui d’un mémorial. Atel point qu’en 2009, au moment de la célébration des 40 ans de la lutte, pour commémorer l’événement,les villageois ont demandé à des militants du Larzac de venir peindre à côté du « murale de Pratobello »,le symbole de la lutte du Larzac. Voir : Cozzolino, Francesca, « L’affichage de la parole contestataire.Le cas des murales d’Orgosolo (Sardaigne) », Silence, n°376, février 2010, dossier "Les murs, médiasalternatifs", p 10-13.44 Ce phénomène existe aussi en Irlande du Nord où la restauration des fresques militantes pard’anciens activistes paramilitaires payés par la municipalité de Belfast favorise également l’entretiend’une mémoire de guerre. Voir : Roston, Bill, Murals in the North of Ireland, Belfast, Beyon the Pale,1995.

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45 Merlini, Paolo, « Un progetto di tutela per i dipinti », in n La Nuova Sardegna, 12 octobre 2006, p. 7.46 Manca, Mauro, « Un movimento popolare alla ricerca dell’identità », L’Unione Sarda, 18/05/1982p.3. Bazzoli, Luigi, « Raccontiamo sui muri la nostra vita », La Domenica del corriere, Milano, 18novembre 1976.47 Cette situation est très proche de celle que d’autres chercheurs ont pu constater en Irlande du nord,où sont aussi partie prenante de la culture de guerre de l'Ulster avec un tourisme autour des peintureset des circuits organisés. Voir : Jarman, Neil, Parades and visual displays in Northern Ireland, OxfordNY, Berg, 1997; Miossec, Alan, Murals d’Irlande du Nord. Quel avenir après 100 années de pratiquecommunautaire ? CRBC, Rennes, 2011. Pragnère, Pascal, «Les peintures murales: instrument politiqueet patrimoine historique  », Euskonews (608, January 2012), (formerly published in Asmoz-Atejoka,October 2011, p.4-10).48 Notre approche visant à saisir la performativité de la peinture murale, s’inscrit dans une viséepragmatique et s’inspire de l’étude des actes d’écriture développés par Béatrice Fraenkel. Cetteperspective permet d’appliquer à notre étude, une anthropologie de l’art qui s’intéresse aux actions, à ceque les peintures murales font et font faire et qui nécessite de dépasser l’étude de l’image par la seuleanalyse visuelle de sa signification.49 Lee, Aantony W., Painting on the left. Diego Rivera, radical politics and San Francisco’s publicmurals, Berkley, University of California Press, 1999.50 Conrand, David, « Community Murals as Democratic Art and Education », in Journal of AestheticEducation, vol 29, n° 1 (Spring 1995), p. 98-102 ; Tréguer, Annick , Chicanos. Murs peints des États-Unis, Nancy, Presses de la Sorbonne nouvelle, 2000.51 Le Textier, Emmanuelle, « Minorités et espace public dans la ville. Le « Chicano Park » à San Diego(Californie) », Espaces et sociétés, 2006/1 no 123, p. 85-98.52 Voir à ce propos l’introduction de l’ouvrage : Latorre, Guisela, Walls of empowerment. Chicana/oindigest murals of California, Austin, University of Texas Press, 2008.53 Dans la même perspective, les peintures murales produites à Dakar en 1990 dans le cadre sur SetSetal, avaient pour mission de construire une nouvelle image symbolique de la ville, celle d’une villepropre. Voir : Diouf, Mamadou, « Fresques murales et écriture de l’histoire. Le set setal à Dakar », inPolitique africaine, n° 46, juin 2000, p. 41-54. ; Roberts, Allen , « Voir la ville invisible », in PolitiqueAfricaine n °100, décembre 2005-janvier 2006, p. 177-197.

Para citar este artículo

Referencia electrónica

Francesca Cozzolino, « L’histoire complexe du muralisme en Sardaigne.L’invention d’une tradition de peinture murale et ses multiples influences.  », Nuevo Mundo MundosNuevos [En línea], Imágenes, memorias y sonidos, Puesto en línea el 30 enero 2014, consultado el 07febrero 2014. URL : http://nuevomundo.revues.org/66333 ; DOI : 10.4000/nuevomundo.66333

Autor

Francesca [email protected] associée centre anthropologie de l’écriture, École des Hautes Études en Sciences Sociales(EHESS, Paris)Enseignante d’anthropologie de l’image et de l’écriture, École Nationale Supérieure Des ArtsDécoratifs, (ENSAD, Paris).

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Resúmenes

 L’objet de cet article est de donner à voir une histoire complexe faite de superpositions detraditions, d’adaptations de modèles venant d’autres pratiques (comme la tradition militante

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de pratiques d’inscription sur les murs) qui, dans le temps, ont construit le phénomènedu muralisme en Sardaigne. En décrivant le contexte d’émergence de ce phénomène et enretraçant les changements (matériels, symboliques et d’usages) qui ont affecté ces peintures,nous faisons apparaître ces adaptations, ces variations et déviations qui ont fait de la peinturemurale en Sardaigne une pratique artistique de rue ainsi qu’une pratique de contestationmilitante et plus récemment une stratégie d’action des politiques publiques et des opérateurstouristiques.

The complex history of murals in Sardinia.The invention of a tradition of wall painting and its many influences.The purpose of this article is to show a complex history, made of overlapping traditions,adaptations of models from other practices (such as the militant tradition of writing onthe walls) which have built the murals phenomenon in Sardinia over time. By describingthe context of the emergence of this phenomenon and tracking physical, symbolic andpractical changes that have affected these paintings, we show these adaptations, variationsand deviations that made the street art murals in Sardinia become a militant protest and morerecently a strategy for public policy action and tourist operators.

Entradas del índice

Mots clés :  peinture murale, patrimonialisation, pratiques contestataires, écritureexposée, ethnographie des pratiques artistiques.Keywords :  murals, heritage, protest strategies, writing practices, ethnography ofartistic practices.