LE TOURNANT DE L'AGRICULTURE ROUMAINE INTRODUCTION

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LE TOURNANT DE L’AGRICULTURE ROUMAINE

INTRODUCTION

A. ctuellement, telle qu'évolue la PAC, on va vers une industrialisation

qui ne laisse plus de place aux paysans". Voilà comment Geneviève

Savigny, de la Coordination européenne Via Campesina, analyse la

Politique Agricole Commune, le mercredi 19 septembre 2012 à

Bruxelles. Ce jour-là, plus de 200 personnes, agriculteurs et membres

d’associations paysannes ou environnementales, manifestaient devant les

institutions européennes de Bruxelles pour manifester en faveur d’une autre

politique agricole en Europe alors que commençait le cycle de négociations d’une

nouvelle réforme de la PAC.

En effet, la dernière réforme de la PAC date de 2003 et beaucoup tentent de peser

sur les négociations entre la Commission Européenne, le Conseil des Ministres et

pour la première fois, le Parlement Européen. Il faut dire que les enjeux, qu’ils

soient financiers, économiques, sociaux ou environnementaux, sont énormes. Les

tensions entre les différents groupes politiques et institutions chargés de conclure

un accord sont visibles. Un retard est d’ailleurs annoncé puisque l’on sait déjà que

la réforme prévue pour 2014 ne rentrera pas en vigueur avant 2015.

La nécessité de réformer en profondeur la PAC s’impose aux yeux de beaucoup à

cause des nombreuses critiques qui la décrivent comme injuste ou inefficace. Mais

aussi parce que l’Union Européenne a connu depuis 2003 un changement

gigantesque qui a altéré totalement la nature et la dimension de sa question

agricole : les élargissements de 2004, avec dix nouveaux pays dont certains très

agricoles, et de 2007, avec la Bulgarie et surtout la Roumanie.

B.

La Roumanie est un cas à part en Europe avec plus de trois millions

d’exploitations (soit 32% des exploitations de l’U.E.), de deux millions

d’agriculteurs (soit près de 30% de la population du pays) et plus de treize millions

d’hectares utilisés pour l’agriculture qui pèse près de huit pourcents de son PIB.

"A

On comprend dès lors que les enjeux de la Politique Agricole Commune et de

l’économie agricole en général prennent dans ce pays un tout autre sens, un tout

autre poids.

Mais encore plus que sa dimension importante, c’est la structure particulière de

l’agriculture roumaine qui fait d’elle une exception dans le paysage européen. Plus

des deux tiers des exploitations présentes en Roumanie font moins de deux

hectares : une part énorme de l’agriculture repose donc sur la « petite

paysannerie ».

Or, cet état de fait donne lui aussi une autre envergure aux questions agricoles

européennes et aux critiques faites à la PAC. 80% des aides directes vont à 20%

des exploitations dans l’U.E. En Roumanie, la distribution des subventions est

encore plus inéquitable – et même la pire- de l’U.E avec 0,7% des exploitations

recevant 51% des aides. L’agriculture européenne semble se diriger vers une

structure bipolaire. En Roumanie, les exploitations de taille moyenne (entre deux

et 50 ha.) sont celles qui disparaissent le plus (moins 28%), tandis que les

exploitations de grande taille (de 50 à 10 000 ha.) augmentent et que les petites,

bien qu’en constante diminution, résistent encore, en se repliant sur elles-mêmes.

L’Union Européenne vogue-t-elle vers une « agriculture sans paysans » ? En

Roumanie le nombre de personnes travaillant dans le secteur agricole a diminué

de moitié en dix ans, dans un contexte de chômage urbain endémique et à un

rythme d’ailleurs deux fois plus élevé que la baisse du nombre d’exploitations.

Tout ceci montre l’importance et la portée de la problématique rurale et agricole en

Roumanie et illustre bien son caractère à la fois particulier et représentatif

d’enjeux européens, voire mondiaux, en tout cas terriblement actuels.

C.

Mais comment cela se passe-t-il réellement dans les campagnes roumaines ?

Comment ont évolué ces campagnes depuis 2004 et les premiers programmes

européens de « restructuration » agricole ?

Autrement dit, quel est le prix d’une transition entre une agriculture traditionnelle

paysanne et une agriculture industrielle en concurrence avec le reste de l’Europe

et du monde ? Quel est le rôle que joue la PAC dans cette transition ? Ce sont le

sujet et l’angle que nous avons choisis pour notre mémoire médiatique.

Mais avant de partir en reportage sur le terrain, il convient de dresser l’état des

lieux de l’agriculture roumaine, mais aussi européenne, et bien sûr mondiale car il

est impossible de comprendre la partie sans avoir connaissance des mécanismes

qui régissent le tout. C’est l’objet de cet État de la question.

D.

Pourquoi l’agriculture roumaine tend-t-elle vers une structure « duale », où les très

petites exploitations côtoient les très grandes ? Quel est le coût en termes

d’emploi de cette transformation ? Quel impact sur l’activité et le développement

rural ? Qui profitent de ces changements et qui en pâtit ? Quelles politiques

publiques soutiennent (ou contrecarrent) ces évolutions ? Dans quel but ? Cette

transformation est-elle inévitable ?

Autant de questions de première importance auxquelles nous tenterons de

répondre. Avant cela, il nous faut déterminer quels sont les questions que nous

n’allons pas nous poser.

En effet, l’agriculture et ses évolutions est un sujet passionnant parce qu’il touche

énormément de domaines: l’économie, l’histoire, la géographie, la politique, la

finance, l’agronomie, l’écologie, etc. Cependant dans le cadre de notre mémoire

de fin d’étude il convient de circonscrire notre sujet si l’on veut avoir une chance

de pouvoir dire vraiment quelque chose, le temps d’un reportage. Nous écarterons

donc toutes les problématiques liées à : la souveraineté alimentaire, les problèmes

environnementaux, la politique foncière et (à propos de la Roumanie) la transition

postcommuniste. Ce sont là des thèmes également très intéressants mais nous

avons choisi d’axer notre questionnement sur l’emploi et le développement rural,

deux matières souvent oubliées lorsque les médias parlent d’agriculture.

Évidemment, ces différents thèmes sont tous liés à la question qui nous occupe et

il est possible qu’ils apparaissent en toile de fond à certains moments de cet État

de la question.

E.

Tout au long de ce travail nous allons donc nous attarder à décrire la situation

actuelle de l’agriculture en Roumanie et à expliquer les mécanismes qui la

structurent. Pour cela, nous nous baserons sur un cheminement logique qui va du

général au particulier. Ou plus concrètement : du monde à la campagne roumaine.

Nous commencerons par réfléchir à l’agriculture en tant que marché global :

comment ce marché s’est progressivement libéralisé pour accompagner la

« mondialisation », quels traités et institutions en définissent les contours et le

fonctionnement, que représente ce marché en termes d’échanges, quels rapports

de forces sont à l’oeuvre pour déterminer l’avenir de ce marché et quels sont les

enjeux économiques, géopolitiques et humains de la compétition mondiale dans

ce domaine.

Nous concentrerons ensuite notre regard sur l’Union Européenne en analysant

bien entendu son indissociable instrument de gestion de l’agriculture : la Politique

Agricole Commune. Nous verrons comment celle-ci fut créée, et comment ses

buts et ses finalités ont évolué au fur et à mesure de ses différentes réformes.

Nous analyserons d’où vient son financement et comment se compose son

budget, pour nous intéresser ensuite à son organisation et aux mécanismes qui la

font fonctionner. Nous pointerons ses limites, ses effets collatéraux et ses

manquements (parfois envers ses propres engagements). Enfin nous terminerons

en décrivant le processus de réforme en cours, son fonctionnement et ses enjeux.

Mais connaître la PAC n’est pas encore connaître l’agriculture européenne. Nous

examinerons donc la situation de celle-ci, ou plutôt de celles-ci puisque nous

verrons l’état à la fois de l’agriculture paysanne et de l’agriculture industrielle sur le

vieux continent. La place qu’y occupe la paysannerie actuellement et les

évolutions profondes qu’elle a consenties pour s’adapter à la nouvelle donne

européenne et mondiale.

Il sera alors temps d’explorer la question roumaine. En abordant tout d’abord les

chiffres qui décrivent l’état actuel de l’agriculture roumaine, avant d’exposer les

différentes évolutions qu’elle a connues sous l’influence de l’Union Européenne,

avant 2007 dans un premier temps puis après son adhésion, et pour finir en

posant quelques pistes de réflexion quant à son avenir.

F.

Cet état de la question s’appuie sur de nombreux documents : ouvrages et articles

scientifiques, études institutionnelles, articles de presse, statistiques, etc. issus de

nos recherches. Il se base également sur des rencontres qui nous ont permis de

mettre un pied d’une manière plus « vivante » dans le gigantesque dossier

agricole. Deux entretiens ont été particulièrement riches en enseignement et sont

repris à certains moments de ce travail : tout d’abord la longue entrevue que nous

avons eue avec Gérard Choplin, animateur de la coordination paysanne

européenne Via Campesina, ensuite l’interview que nous avons réalisée de

l’eurodéputé et membre de la commission agricole, Marc Tarabella.

1. L’AGRICULTURE DANS LA MONDIALISATION1

La mondialisation, qui commence au milieu des années septante dans sa forme

moderne mais qui peut aussi se voir comme la suite d’un phénomène plus ancien,

a énormément accru les exportations de marchandises entre les différentes

parties du monde mais aussi les échanges de technologies, d’informations, de

services, etc. La mondialisation est aussi une nouvelle organisation géopolitique et

économique du monde où la hiérarchie des nations qui prévalait jusque-là est

bouleversée et où l’interdépendance des pays s’accroît. De cette économie

« globalisée », naît une nouvelle forme d’organisation des entreprises et des

institutions, notamment via la création de très grandes firmes internationales qui

s’adaptent à la nouvelle donne mondiale.

Cette nouvelle configuration n’a pas épargné l’agriculture même si, on le verra,

celle-ci a été et reste un cas à part au sein du phénomène de mondialisation des

économies. En analysant les caractéristiques de l’agriculture comme marché

mondial, il faut bien garder à l’esprit le statut particulier qu’elle occupe dans les

économies et les échanges internationaux. C’est une activité qui répond à un

besoin essentiel : nourrir les hommes. Et à ce titre un secteur dont la maitrise, au

niveau de la production et des échanges, est perçue comme essentielle par

beaucoup d’acteurs : états ou entreprises.

Cette maitrise passe en partie par l’élaboration de politiques agricoles par les

états. Ce point reviendra donc à plusieurs occasions dans notre analyse. Un autre

élément essentiel pour comprendre la complexité du secteur agricole est de savoir

qu’il est une partie du système alimentaire mondial, et donc est lié aux questions

de l’agroalimentaire et aux spécificités de ce secteur.

Comprendre l’importance et la particularité de la question agricole dans

l’économie mondiale amène aussi à un constat que Thierry Pouch énonce ainsi

dans son livre La guerre des terres : « La question agricole participe de la

fragmentation du monde » (2010, p.12). Nous verrons donc comment la question

1 �

Ce chapitre s’inspire essentiellement de l’ouvrage intitulé « La guerre des terres » de Thierry

Pouch, économiste et responsable du service études économiques de l’Assemblée permanente des

Chambres d’Agriculture en France, et du chapitre cinq de l’étude sur le système alimentaire mondial

réalisée par Jean-Louis Rastoin et Gérard Ghersi, « Internationalisation, mondialisation et

globalisation ». Lorsque d’autres sources sont utilisées en complément de ces ouvrages, elles sont

précisées en fin de paragraphe.

agricole se déploie au sein des relations internationales et des grandes

discussions commerciales multilatérales qui sont toujours en cours aujourd’hui.

1.1 Taille du marché agricole mondial

Que représente le marché agricole dans l’économie mondiale ? Les données les

plus récentes proviennent de l’OMC. Elles indiquent, en 2007, un montant

d’exportation de 215 milliards pour les MPA (Matières Premières Agricoles).

D’un point de vue plus large, c’est moins de 20% des 1 128 milliards de dollars

d’exportations de PAPF (Produits Agricoles et Produits Forestiers), à peine plus

par rapport aux 913 milliards de PA (Produits Alimentaires), dont à peu près 600

milliards sont des PAT (Produits Alimentaires Transformés).

Pour se faire une idée plus précise, entre 2004 et 2006, quinze marchés

internationaux de produits alimentaires avoisinaient ou dépassaient dix milliards

de dollars en moyenne. Le premier d’entre eux, avec près de 27 milliards, était

constitué de préparations (sauces, condiments et plats cuisinés). Dans cette liste

ne figurent que trois « commodités » (ou matières premières agricoles) : blé, soja,

maïs. Tous les autres produits sont issus de l’industrie agroalimentaire.

Six marchés dépassent aujourd’hui chacun un milliard de dollars alors qu’ils

étaient à des niveaux infimes auparavant : les exportations mondiales de porcs

approchent aujourd’hui sept milliards de dollars (contre 110 millions au milieu des

années 1980, soit un coefficient multiplicateur de plus de 60). Les aliments pour

animaux familiers atteignent 5,8 milliards (aussi multiple de 60), les farines pour

l’élevage sont à 3,3 milliards de dollars (70 millions en 1985), preuve du passage

à un élevage intensif à base d’aliments industriels. Les trois autres marchés

milliardaires relèvent de l’alimentation humaine sophistiquée (les crèmes glacées,

les pâtes pour boulangerie-pâtisserie et les yaourts).

On voit donc le déclin du poids relatif des produits agricoles par rapport aux

produits alimentaires et produits alimentaires transformés. Tous ceux-ci ne

représentant plus qu’une part infime des échanges internationaux : à peine six

pourcents des exportations mondiales de marchandises en 2007 (contre 46% en

1950).

1.2 Tendances des marchés agricoles et alimentaires

On l’a vu, le commerce de PAPF régresse au sein des exportations mondiales. On

peut constater aussi que les points perdus par les produits primaires sont gagnés

par les produits manufacturés, on estime à 67% en 2007 la proportion de PAT

dans l’ensemble des PA, contre 44% en 1984. La structure du commerce

alimentaire international a été profondément modifiée dans les 20 dernières

années : aux produits bruts se sont substitués les produits élaborés, nous

sommes bel et bien rentrés dans « l’âge agro-industriel ».

La régression des PAPF dans les exportations totales de marchandises ne signifie

pas pour autant que ces produits chutent en valeur absolue. Bien au contraire, ils

connaissent une croissance continue avec un accroissement annuel moyen

d’environ quatre pourcents depuis 1950 (avec une baisse autour des deux

pourcent pendant les années septante et quatre-vingt). Au sein des PAPF, la

progression des produits alimentaires est beaucoup plus rapide que celle des

matières premières non comestibles.

Autre phénomène : l’intensification des échanges intra-branches, c'est-à-dire au

sein de chaque catégorie de produits (par exemple les préparations à base sucre

ou celles à base de viandes). Ce qui souligne à la fois la diversification du secteur

et l’importance des grandes firmes internationales, celles-ci procédant à des

échanges entre leurs différentes branches réparties dans le monde, avant d’arriver

à un produit final.

Les exportations de produits agricoles et alimentaires (PAA), sur la longue

période, augmentent comme pour l’ensemble des marchandises, plus rapidement

que la production. On peut donc en déduire que la part du système alimentaire

ouverte sur l’international est en augmentation.

Évolution des exportations mondiales de produits agricoles et alimentaires.

(OMC, 2008 cité par Rastoin et Ghersi, 2010)

1.3 Ouverture internationale de l’agriculture

En 2005-2006, la moyenne mondiale du ratio exports agricoles/PIBA (PIB

Agricole) s’établissait à 56%, mais avec des écarts considérables entre les pays

du monde.

Certains petits pays à hauts revenus, avec une faible population et une

infrastructure logistique très performante (comme la Belgique par exemple) ont un

ratio qui dépasse 100%, grâce à la valeur ajoutée des produits transformés. Les

grandes puissances agricoles à forte population se situent à un niveau

intermédiaire avec un ratio entre 50 et 100% (comme les Etats-Unis ou le Brésil).

Suivent ensuite les pays très peuplés (comme la Chine) et les pays en voie de

développement à forte population et/ou infrastructure logistique défaillante

(Angola, Bangladesh, Tunisie, etc.)

Quant au ratio exports agricoles/ exports totales, il est très nettement inférieur

dans les pays riches et industrialisés (sauf exceptions : Australie, Nouvelle-

Zélande, Danemark) par rapport aux pays pauvres qui ont fréquemment un taux

élevé (plus de 50 %). Cette dépendance de la balance commerciale pour la

production agricole, dominée souvent par un ou deux produits à peine, indique

une forte vulnérabilité économique pour ces pays.

En ce qui concerne les produits, la moyenne d’exportation s’établit à onze

pourcents du total et ce chiffre n’a augmenté que de deux pourcents en 20 ans.

Mais là encore il existe de très grandes différences : par exemple 84% de la

production mondiale de kiwis est destinée à l’exportation, alors que seulement

trois pourcents des pommes de terres produites dans le monde sont exportées.

1.4 Structure du marché agricole mondial

Une première caractéristique importante des échanges internationaux de produits

agricoles et alimentaires est la forte polarisation de ce commerce: en 2007, 67%

des échanges mondiaux (exportations et importations) étaient réalisés par les

blocs de la « Quadriade » (Union européenne, ALENA, Mercosur et Chine), avec

un poids considérable des échanges « intra-régionaux », c'est-à-dire à l’intérieur

des zones régionales de libre échange existantes. Ainsi, le commerce entre les 27

pays de l’Union européenne représente plus du tiers des exportations mondiales

de PAPF.

Mais les cartes sont en train d’être redistribuées. Les gagnants sont

principalement les grands pays émergents, dont la part dans le commerce agricole

mondiale augmente fortement, mais aussi quelques petits pays comme le Liban,

le Sénégal, le Mozambique ou la Tunisie.

D’après les statistiques de la FAO, le top dix des plus gros exportateurs agricoles

est (dans l’ordre) : Etats-Unis, Pays-Bas, France, Allemagne, Brésil, Belgique-

Luxembourg, Italie, Espagne, Canada et Australie (classement sur 40 ans).

Cependant, si on adopte un point de vue plus géopolitique et que l’on considère

l’Union européenne comme un seul pays, en éliminant les échanges intra-

communautaires (qui représentent 78% des exportations agricoles totales de l’UE

en 2007), on fait alors apparaître le poids croissant des pays émergents.

Le top dix des exportateurs de produits agricoles et alimentaires.

((OMC, 2008 cité par Rastoin et Ghersi, 2010)

La liste est quasiment la même si on se concentre sur les produits alimentaires

transformés, avec quelques changements de places dans le classement mais cela

prouve que tous les grands exportateurs se sont engagés dans la voie de

l’agroalimentaire.

Un phénomène très important pour comprendre la structure du marché agricole et

alimentaire mondial est que dans la liste des dix premiers importateurs mondiaux

de produits agricoles et alimentaires figurent quasiment les mêmes pays que dans

celle des exportateurs. A l’exception notable du Japon présent ici (troisième

importateur mondial) et de l’Australie, absente. La plupart des pays connaissent

une progression de leurs importations allant de trois à cinq pourcents par an

(depuis au moins dix ans), ce qui est supérieur à la croissance des marchés

intérieurs et indique donc une hausse des besoins plus rapide que celle de la

production. L’U.E. des 27 est de loin le premier marché agricole et alimentaire

mondial, avec 46% des importations mondiales (douze pourcents si l’on exclut les

échanges intra-communautaires), un chiffre qui a doublé par rapport à l’année

2000. Les pays émergents quant à eux ne réalisent que seize pourcents des

importations mondiales, ce qui représente à peine 38% des dépenses du top dix.

Le top dix des importateurs de produits agricoles et alimentaires, 2007.

(OMC, 2008 cité par Rastoin et Ghersi, 2010)

Pour comprendre qui sont les véritables gagnants et perdants en termes de

commerce agricole il faut donc regarder la balance commerciale des différents

pays dans ce domaine. Le Brésil arrive ici clairement en tête, les Etats-Unis ne se

trouvant pas sur la liste parce que leur balance commerciale agricole est

relativement équilibrée bien que légèrement déficitaire.

Soldes commerciaux agricoles positifs et négatifs les plus élevés.

(OMC, 2008 cité par Rastoin et Ghersi, 2010)

1.4.1 Principaux flux de produits agricoles et alimentaires

Si l’on tente d’établir la carte des échanges agricoles et alimentaires, les flux de

produits dessinent à la surface de la planète des liens économiques denses, mais

inégaux. L’essentiel du commerce agricole et alimentaire mondial reste cantonné,

pour l’essentiel, à quelques « autoroutes » (maritimes, terrestres et aériennes) qui

relient des grandes puissances entre elles et laissent des miettes aux autres pays.

Le monde du commerce agricole est multipolaire : trois zones, Europe, Amérique

du Nord et Asie assurent 81% des exportations et 84% des importations totales.

Une seconde caractéristique lourde des échanges est la prépondérance des

échanges intra-zones : 81% pour l’Europe (effet « Union européenne »), 42% pour

l’Amérique du Nord (effet « ALENA ») et 56% pour l’Asie (dans ce cas, il n’y a pas

de zone de libre-échange, mais des relations d’affaires très actives). Ce qui

montre aussi la très grande efficacité des unions économiques pour stimuler les

échanges commerciaux.

Matrice du commerce international des produits agricoles et alimentaires,

2007.

(OMC, 2008 cité par Rastoin et Ghersi, 2010)

En fait, en éliminant les flux internes aux unions douanières existantes dans le

monde, le panorama change totalement : le marché international des produits

agricoles est divisé par deux (580 milliards de dollars au lieu de 1121), l’Asie

passe au premier rang avec 210 milliards, suivie de l’Amérique latine, de

l’Amérique du Nord et de l’Europe avec environ 100 milliards pour chaque sous-

continent. En réalité, le marché que l’on peut réellement qualifier d’international ne

représente qu’une très faible partie de la production mondiale. Il joue pourtant un

rôle pilote pour l’établissement des prix.

Si l’on s’intéresse aux changements à l’œuvre dans la structure des échanges, on

remarque que les marchés qui grandissent le plus sont l’ex-URSS, puis l’Afrique, il

s’agit toutefois de marchés de taille réduite (50 et 43 milliards de dollars). C’est

l’Amérique latine qui a tiré le plus grand profit de ces deux marchés émergents. La

CEI (Communauté des Etats Indépendants) et le Moyen-Orient ont également

réalisé une belle percée en Afrique. Les autres zones (du tableau ci-dessous)

enregistrent des progressions plus petites, mais qui sont cependant proches d’un

doublement en 7 ans, et ceci sur des flux économiques beaucoup plus importants.

Évolution du commerce international de produits agricoles entre 2000 et

2007 (en %)

(OMC, 2009 cité par Rastoin et Ghersi, 2010)

1.4.2 Rôle de la demande mondiale et son évolution

Une autre lecture que l’on peut avoir du marché international agricole est qu’il y a

deux catégories de clients : d’un côté, ceux qui sont en demande de produits de

base pour l’alimentation humaine, cela concerne les pays en voie de

développement et certains gros pays émergents ; et ceux qui ont besoin de

produits pour l’alimentation animale, comme l’U.E ou des pays émergents

déficitaires tels que la Chine et la Russie. Dans les deux cas, la demande gonfle

et est concentré sur un petit nombre de produits végétaux : blé, riz, maïs, soja. Or,

si le prix des matières premières en général croît à cause de l’élévation de la

demande mondiale, poussée par les pays émergents, les matières premières

agricoles ne font pas exception.

Le marché, déjà fortement sous pression, a été de plus déséquilibré par une

nouvelle utilisation des matières premières agricoles : les agrocarburants. Rien

qu’aux Etats-Unis, qui appliquent une politique stimulante pour ce secteur, la

consommation et avec elle la production de ce type de produit a doublé entre

2005 et 2007. Cette concurrence entre food et fuel dans un contexte de

raréfaction des terres et de l’eau, en plus du plafonnement des rendements de

l’agriculture productiviste, accentue les frictions économiques et financières autour

des produits agricoles.

« La rareté est de retour » (Pouch, 2010, p.130) et ces deux phénomènes

(augmentation de la demande mondiale et pression des agrocarburants) sont les

raisons de base qui ont mené à la hausse des prix des matières premières

agricoles et donc à la crise alimentaire de 2007-2008 et aux fameuses « émeutes

de la faim ». A cela il faut rajouter également la hausse des coûts de production et

de commercialisation des aliments, due en grande partie à l’augmentation du prix

du pétrole (qui a un impact sur le prix des engrais et autres intrants, des

emballages et des transports) mais aussi et surtout le rôle de la spéculation

financière.

1.4.3 Rôle des marchés à termes et de la spéculation financière

Le principe des marchés à terme et donc de la spéculation financière existe

depuis très longtemps (il a en fait quasiment suivi l’invention de la monnaie) et

permet historiquement de fluidifier un marché aussi risqué que celui de

l’agriculture. En assumant le risque de fluctuation des prix et en faisant le lien avec

des clients qui sinon n’auraient pas rencontré l’offre du producteur, le spéculateur

joue un rôle économique clé et même (du moins en théorie) stabilisateur pour le

marché. « L’histoire montre comment les producteurs ont réussi à transférer les

risques sur les négociants et comment ces derniers stabilisent les prix en

spéculant. » (Facchini, 2006)

Ceci étant, dans la réalité on observe parfois des divergences importantes entre

les marchés à terme et les marchés physiques qui peuvent aller jusqu’à de

véritables effets d’emballement. Or, les grandes bourses de commerce jouent un

rôle fondamental dans la fixation des prix mondiaux et ont un impact considérable

sur l’économie agricole de tous les pays. En 2007-2008, il aura suffi qu’une petite

partie des spéculateurs se détournent du gigantesque marché des subprimes,

alors en plein éclatement, pour venir inonder le marché des produits agricoles et

déclencher une forte hausse des prix de ceux-ci.

1.4.4 Rôle des multinationales dans le secteur de l’agroalimentaire et

de l’agrofourniture

Si on veut approcher la nature actuelle du marché mondial agricole, il est

impossible de faire l’impasse sur le rôle structurel que jouent les multinationales

de l’alimentaire dans celui-ci. Si l’agriculture reste un secteur très atomisé, le

système alimentaire mondial est lui dominé par une quarantaine de très grandes

firmes internationales. Celles-ci se sont constituées par un processus de « fusions

et acquisitions », qu’on retrouve dans tous les secteurs et qui est une

caractéristique de la mondialisation. Elles proviennent de la croissance externe de

firmes occidentales puisqu’on constate notamment qu’en 2006, plus de 90% des

730 milliards de dollars investis dans le système alimentaire mondial venaient de

pays à hauts revenus. Cependant, de nouvelles multinationales se forment dans

des pays comme la Chine, l’Inde, l’Argentine ou le Brésil et pourraient bien

modifier le jeu agroalimentaire mondial.

C’est clairement en amont du système alimentaire que la concentration est la plus

élevée, c'est-à-dire dans le secteur de l’agrofourniture qui produit les semences,

les engrais chimiques, les substances phyto et zoosanitaires et le matériel

agricole. Or ce secteur conditionne étroitement la configuration de l’agriculture et

une telle concentration de puissants groupes chimiques et mécaniques influe

forcément sur le modèle d’affaire adopté.

Au niveau de l’agriculture même, on peut observer aussi une nette tendance à la

concentration, bien que comme on l’a dit celle-ci est très loin d’être aussi avancée

que dans les secteurs en amont ou en aval. Portée à l’origine exclusivement par

des firmes agroalimentaires, comme dans le cas des fruits tropicaux avec Del

Monte ou United Fruits, cette concentration dans l’agriculture est aujourd’hui aussi

financée par des capitaux en provenance d’autres secteurs, attirés par la hausse

des prix alimentaires. Ainsi se développe dans le monde entier l’ « agribusiness »,

la production industrialisée à grande échelle, dont les résultats en termes de

volumes et de marge sont indéniables mais qui posent d’énormes problèmes

sociaux (pauvreté, exclusion) et environnementaux. Parmi les investisseurs de ce

type d’agriculture on trouve notamment des fonds souverains de pays cherchant à

sécuriser leur approvisionnement alimentaire en achetant des terres ailleurs : c’est

le phénomène de l’ « accaparement des terres ».

L’industrialisation du système alimentaire a généré des produits qui s’apparentent

aux biens de grande consommation et les matières premières agricoles sont

devenues des marchandises comme les autres. Cependant, leurs spécificités

légitiment toujours des traitements spécifiques de la part des états et des

instances internationales. C’est pourquoi nombre de pays connaissent des

politiques agricoles actives, avec intervention de l’Etat, et que les échanges de

produits agricoles sont une source de préoccupation majeure de tous les

gouvernements. Ce qui complique donc la tâche des grandes négociations

commerciales multilatérales dès que l’on commence à parler d’agriculture.

1.5 Les discussions sur le commerce agricole international

La question agricole fait bien évidemment partie des grandes négociations

internationales sur le commerce et si le poids des produits agricoles et

alimentaires est sur le déclin, voire marginal aujourd’hui, dans les échanges

mondiaux de marchandises, « ils n’en revêtent pas moins une importance décisive

dans les relations internationales » (Pouch, 2010, p.11).

Le dossier Agricole a toujours constitué la pierre d’achoppement des grandes

négociations commerciales internationales : déjà en 1982, alors que l’idée d’un

nouveau grand cycle de négociation (qui allait devenir « l’Uruguay Round »)

commençait à prendre forme, la réunion des ministres du commerce, alors dans le

cadre du GATT (voir plus bas), avait achoppé sur l’agriculture. Les négociations à

l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) sont d’ailleurs bloquées depuis

2001 principalement à cause de l’épineux dossier agricole qui rend impossible la

conclusion du Cycle de Doha (Organisation Mondiale du Commerce).

Pour rappel, l’OMC a été fondé à la suite de l’accord de Marrakech signé par 124

pays en 1994. Son avènement constitue une rupture dans les négociations sur le

commerce international car cette nouvelle institution intergouvernementale vient

prendre place aux côtés du FMI, de la banque mondiale ou des Nations Unies

pour succéder à une « simple » instance de dialogue qui prévalait jusque-là : le

GATT (General Agreement on Tarifs and Trade). Ce dernier, créé en 1947 à

Genève est composé de sept « cycles » dont le dernier, « l’Uruguay Round »

conclu en décembre 1993, allait donner lieu à la création de l’OMC. Le GATT avait

comme but principal l’abaissement des droits de douane et la réduction des

restrictions quantitatives et qualitatives pour le commerce international. De ce

point de vue c’est un succès puisque les droits de douane sur les produits

manufacturés sont passés de 40% en moyenne en 1947 à moins de quatre

pourcents en 1994 et que de nombreuses règles de « bonne conduite » ont été

fixées pour les « barrières non-tarifaires » telles que les subventions ou les

protections des marchés publics.

1.5.1 Le dossier agricole au sein de l’OMC

Comme nous l’avons mentionné, le sujet de l’agriculture (et celui, lié, des

industries agroalimentaires) peine encore à être intégrés aux grands accords de

l’OMC.

En fait le dossier agricole a bénéficié d’un régime d’exception au sein des

négociations internationales pendant très longtemps, la déclaration de Tokyo en

1979 soulignait encore le caractère spécifique de l’agriculture malgré l’apparition

des premières tensions autour de la PAC européenne, venant surtout des Etats-

Unis.

Les Etats-Unis justement ont été les premiers, dès 1933 et le New Deal, à

légitimer l’interventionnisme dans le secteur agricole pour le protéger des fortes

fluctuations de prix et pour le soutenir dans sa recherche de parts de marché au

niveau mondial. Et si les choses ont beaucoup évolué depuis, jamais les Etats-

Unis n’ont remis en question l’idée même d’une politique agricole (en tout cas

américaine) forte.

C’est à partir des années quatre-vingt, que la thèse comme quoi toute politique

agricole produit des distorsions de concurrence et est donc néfaste pour

l’économie mondiale commence à gagner du terrain. Le libéralisme économique

domine alors largement le climat intellectuel et l’accession de Ronald Reagan à la

présidence des Etats-Unis vient accentuer cette tendance.

Mais c’est surtout la confrontation ouverte en matière de politique agricole entre

les Etats-Unis et l’Union Européenne à la même époque qui amèneront les Etats-

Unis à s’engager sur le terrain du libéralisme dans ce domaine. Pour eux, la PAC

européenne est alors la cause de leurs pertes de parts de marché dans le secteur

agricole et son démantèlement est une priorité de l’administration Reagan. Les

Européens firent front pour protéger la Politique Agricole Commune qui leur avait

si bien réussi et se déclarèrent prêts à négocier uniquement si l’aide alimentaire

américaine, qui est une sorte de soutien indirect aux agriculteurs, était aussi mise

dans la balance. Finalement, l’Union Européenne, parce qu’elle ne veut pas

assumer seule l’échec des négociations, adoptera en mai 1992 une réforme

d’envergure de la PAC qui faisait la part belle aux exigences américaines et était

taillée sur mesure pour permettre un accord au GATT (Guyomard et Mahé, 1995).

En novembre 1992, alors qu’aucun accord international d’envergure n’avait jamais

été conclu sur ce sujet, les États-Unis et la Communauté Européenne d’alors

surmontèrent donc la plupart de leurs divergences concernant l’agriculture en

concluant ce qui était officieusement dénommé l’Accord de Blair House. Celui-ci

allait ouvrir la voie à un accord global sur l’agriculture et donc à la conclusion du

Cycle de l’Uruguay, commencé en 1986.

L’Accord Agricole, qui fait partie de l’accord général du Cycle de l’Uruguay de

1993, a conduit indéniablement à la limitation des subventions à l’exportation et à

la réduction des soutiens publics ayant un effet direct sur la production, comme

annoncé. Cependant, en matière d’accès au marché, il n’a pas entraîné de réelle

ouverture des frontières dans la plupart des pays développés car ceux-ci ont

utilisé au mieux les dispositions techniques de l’Accord (qu’ils avaient négocié)

pour maintenir une protection élevée sur les principaux produits agroalimentaires.

Les pays riches n’ont donc pas joué franc-jeu dans leur appel à plus de libéralisme

et ont fait primer leurs intérêts commerciaux immédiats. (Bureau, 2002).

Depuis 2001 et le programme de Doha (du nom de la capitale du Qatar où a eu

lieu la quatrième conférence interministérielle dans le cadre des négociations de

l’OMC), les principes libéraux ont gagné du terrain par rapport à « l’exception

agricole » mais l’agriculture reste un sujet à part et très sensible qui bloque le

processus de négociation de l’OMC.

En effet, le cycle de Doha se terminera par un échec surtout à cause de la

question agricole, sur laquelle portaient l’essentiel des tractations. Elle est ainsi au

centre des négociations commerciales internationales car aucun accord n’est

possible tant qu’elle n’est pas réglée. Or plusieurs groupes, aux intérêts

divergents, s’affrontent sur ce dossier. Ils sont résumés dans le tableau ci-

dessous, avec leurs objectifs. A noter que les différents groupes se superposent

parfois, certains pays rejoignant les positions de un ou plusieurs groupes en

fonction de leur situation géopolitique. Pour être totalement complet il faudrait

sans doute aussi ajouter un groupe : le « G-1 », composé des seuls Etats-Unis qui

ont un leadership et une tendance hégémonique particuliers à l’OMC.

Les coalitions de pays les plus actives à l’OMC.

(Rastoin et Ghersi, 2010)

L’objectif de Doha, repris par Hong Kong en 2005, était l’amélioration de l’accès

au marché, la réduction des soutiens internes à l’agriculture et la suppression des

aides à l’exportation. En somme, l’approfondissement des objectifs de l’Accord

Agricole, au nom de la réduction des distorsions venant perturber le

fonctionnement de la loi de l’offre et de la demande.

Son échec est essentiellement dû au fait que la plupart des pays n’avaient rien à

gagner à suivre la logique de l’OMC dans le domaine de l’agriculture : depuis 1993

et l’Accord Agricole, les pays riches se sont contentés de sauver certaines formes

d’aides, qu’ils pouvaient se permettre, en même temps qu’ils en interdisaient

d’autres pour légitimer l’abaissement des droits de douane, seule protection de

beaucoup de pays en voie de développement. « Le cycle de Doha est un cycle

dans lequel les pays développés tentent de forcer l’entrée des marchés des pays

en voie de développement, en particulier dans le domaine de l’agriculture »

(Choplin, Strickener et Trouvé, 2009).

La FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l'agriculture) a

déclaré en août 2006 que « l’effondrement des négociations commerciales

internationales du cycle de Doha [était] essentiellement dû à une tentative des

pays riches, des corporations et des puissants lobbies de s’accaparer des

avantages sur les marchés agricoles », regrettant en outre que les négociations se

soient focalisées sur « le commerce libre, plutôt que sur le commerce équitable ».

La FAO ajoute que « le cycle de Doha était sans grand intérêt pour les pays les

moins avancés, qui n’ont pratiquement rien obtenu lors des précédentes

négociations commerciales sur l’agriculture de l’OMC. Si la réduction des

subventions et des droits de douane agricoles par les pays développés se fait

dans l’intérêt des pays en développement, elle doit être appliquée dans un cadre

qui accroît les revenus de leurs petits agriculteurs et améliore leur sécurité

alimentaire » (FAO, 2006)

Il convient néanmoins de préciser cette fracture pays riches/ pays pauvres, où les

premiers cherchent à flouer les seconds en prônant le libéralisme sans l’appliquer

vraiment à eux-mêmes. Il faut rajouter au tableau tous ceux qui s’opposent à l’idée

même de politiques agricoles et revendiquent une libéralisation totale du secteur :

ce sont les pays du groupe de Cairns (voir tableau précédent), Brésil en tête. On

remarque d’ailleurs la présence de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande dans ce

groupe, preuve que les conflits entre pays développés existent aussi. De la même

façon l’Inde a toujours défendu l’exception agricole et s’est opposé

vigoureusement en 2008 à une libéralisation du secteur agricole mondial ce qui

montre bien qu’entre « géants émergents » les conflits sont possibles également.

1.5.2 Etat de la protection et du soutien à l’agriculture dans le monde

Tout ceci fait que le niveau de protection de l’agriculture et des industries

agroalimentaires reste élevé dans la plupart des pays du monde. En 2001, le taux

moyen mondial des taxes appliquées à l’importation était de 20 % dans le secteur

agricole contre 4,6 % dans l’industrie et les mines. De plus, en l’absence d’un

accord global, Il y a un traitement différencié des pays en fonction de

considérations économiques et géopolitiques. Les tarifs varient aussi fortement

selon les produits. L’U.E. par exemple applique des taux réduits pour l’Afrique

alors que les pays développés du groupe de Cairns subissent de lourdes taxes.

De la même manière, le blé ne subit pratiquement aucun droit de douane au sein

de l’U.E, alors que le riz, les produits laitiers, les viandes et le sucre sont

lourdement taxés.

Si l’agriculture reste un secteur très protégé, elle reste aussi un secteur très aidé,

particulièrement dans les pays développés. Les soutiens à l’agriculture

comprennent les interventions sur les prix agricoles et les subventions à la

production, mais aussi, d’une façon plus large, les services aux agriculteurs tels

que la recherche, la formation, les contrôles de qualité, la promotion des produits,

etc., financés sur fonds publics et les transferts du consommateur qui résultent de

la différence de prix entre le marché intérieur et le marché international.

L’agrégation de ces trois sortes d’aides, directes ou indirectes, donne des

montants colossaux : 372 milliards de dollars en 2006 pour les pays de l’OCDE

qui concentrent la majorité des transferts publics vers l’agriculture mondiale. On

comprend directement que les marchés agricoles ne fonctionnent absolument pas

dans des conditions de concurrence pure et parfaite.

La composition des subventions est variable selon les pays et reflète des

politiques agricoles et des conditions économiques différentes. Pour stimuler la

production agricole, il est par exemple possible d’apporter des aides au prix à la

ferme (solution privilégiée par l’U.E ou le Japon) ou bien à l’achat d’intrants (Etats-

Unis, Australie, Mexique,…).

Pour apprécier différemment l’intensité des soutiens que par des montants

globaux, on peut établir des indicateurs qui ramènent les aides totales au nombre

d’agriculteurs ou à l’emploi agricole, aux superficies cultivées ou encore au PIB.

Le poids sur le PIB des transferts vers l’agriculture est à la fois modeste (1 % en

moyenne pour l’ensemble des pays de l’OCDE) et considérable, car la moyenne

de la contribution de l’agriculture au PIB est pour ces pays de l’ordre de 3 %. Les

aides par emploi agricole se situent à près de 13 000 dollars, avec une fourchette

allant de 2 000 dollars pour la Turquie à près de 45 000 pour les États-Unis. Les

soutiens à l’hectare sont également dans une proportion de 1 à près de 40 entre

ces deux pays. On voit bien que, ici encore, les chiffres obtenus sont très variables

de pays en pays et reflètent des situations mais aussi des moyens difficilement

comparables. Ils permettent aussi de relativiser certaines idées préconçues : on

découvre par exemple que, par emploi agricole, les États-Unis sont de loin les

plus interventionnistes.

La négociation agricole à l’OMC ne porte que sur les soutiens directs à

l’agriculture (pas les services publiques ni les transferts du consommateur comme

expliqué plus haut, qui ne représentent que 29% des montants donnés). On

remarque que ceux-ci sont très concentrés sur l’Union européenne, les États-Unis

et le Japon qui représentent à eux trois 77 % des aides totales à l’agriculture. Si

on analyse l’évolution de ces soutiens sur les dix dernières années on constate

une stagnation ou une augmentation pour la plupart des pays (avec des

exceptions notables, comme le Japon), ce qui nous ramène encore une fois au

constat de l’échec des négociations de Doha concernant l’agriculture.

Les différentes sortes d’aides à l’agriculture sont réparties par l’OMC selon trois

catégories : une « boîte verte » qui comprend les subventions autorisées, une

boîte orange qui contient celles qui sont tolérées mais doivent être réduites ou ne

pas dépasser un certain seuil et une boîte bleue qui concerne les subventions

liées aux programmes de limitation de la production, qui sont également

plafonnées.

Ce classement a été instauré par l’Accord Agricole de 1994 et continue à

réglementer les formes de soutiens à l’agriculture, en raison des échecs

successifs des négociations ultérieures. Le programme de Doha implique la

réduction significative du niveau de remplissage des trois boîtes, en étant

bienveillant sur la boîte bleue et en épargnant la boîte verte.

Ainsi, les pays industrialisés ne vont « avoir de cesse de déplacer le maximum de

leur budget agricole dans la boîte verte de l’OMC en réformant un à un les

secteurs de production sur le même modèle : remplacement des soutiens aux prix

par des aides directes, puis découplage de celles-ci de la production. » (Choplin et

al., 2009). De cette manière l’U.E. peut continuer à légitimer sa PAC tandis que les

Etats-Unis ne doivent aucunement justifier l’aide alimentaire qu’ils accordent à leur

population et qui représentait 64 milliards de dollars en 2010 et concernait un

américain sur sept. (MOMAGRI, 2013)

2. LA PAC

2.1 Qu’est ce que la PAC en bref?

La PAC est la Politique Agricole Commune de

l’Union Européenne. Elle est la plus ancienne

des Politiques Communes. Elle est mise en

œuvre par la Direction Générale « Agriculture

et développement rural » de la Commission

européenne. Elle est aujourd’hui composée

de deux piliers : le premier, de base, qui vise le soutien des marchés et gère les

prix agricoles et le second, dit du développement rural. Encore aujourd’hui, elle

reste l’une des plus importantes dans l’Union Européenne et représente la plus

grosse dépense de l’Union. Pour la période 2007-2013, elle rassemblait 42,5% du

budget, ce qui représente 55,5 milliards d’euros sur les 129,1 milliards d'euros du

budget total de l’Union (Union Européenne, 2012).

2.2 Historique

2.2.1 La naissance de la PAC

L’idée d’une Politique Agricole Commune est née pendant la seconde guerre

mondiale, en 1943. A cette époque-là, l’Europe est alors réellement en retard par

rapport à ses besoins de production. En effet, elle est déficitaire au niveau de sa

production agricole : peu de sucre, de lait, de céréale et de viande bovine. Dans

son discours du 9 mai 1950, Robert Schuman2 appelle à la création d’une

communauté européenne. Six états répondent à cet appel : la France,

l’Allemagne, l’Italie et le Benelux. L’idée de cette politique commune est donc

d’atteindre, par cette union solidaire et en modernisant l’agriculture, une meilleure

productivité en Europe (Burny, 2010).

Après la seconde guerre mondiale, on a simplifié à outrance les systèmes de

culture pour créer des boulevards de l’alimentation. On a valorisé toutes les

plantes qui fournissaient le plus à l’hectare. La plante la plus riche en énergie,

c’est le maïs. Celle qui fournit le plus de protéines à l’hectare ? Le soja. Pour les

calories ? Le palme est imbattable. Une bonne dose d’engrais, de pesticides et

d’herbicides par-dessus, et la boucle était bouclée, le cercle vicieux installé.

(Saporta, 2010, p.115)

Lors du traité de Rome, le 25 mars 1957, la Communauté Economique

Européenne (CEE) est fondée. C’est là que va naître réellement la Politique

Agricole Commune européenne. On passe de la simple idée à la réalisation. Pour

seulement six pays, la communauté se confrontait déjà à bien des difficultés dans

l’élaboration d’une réelle politique agricole commune. Les cultures ne sont pas les

mêmes entre ces pays et les conditions climatiques ou encore les systèmes

sociaux sont très différents (Burny, 2010).

C’est à la conférence de Stresa en Italie, en juillet 1958, que les bases de la PAC

seront précisées. Et le 1er août 1962 elle entrera véritablement en vigueur.

2 �

Considéré comme l’un des « pères fondateurs » de l’Europe (1886-1963).

2.2.2 Les différentes réformes

La PAC a connu de nombreuses réformes depuis sa création. Nous allons

brièvement les énoncer en les mettant en lien avec leurs contextes respectifs.

Nous nous arrêterons plus en longueur sur les plus importantes.

Au sortir des années 1960, les objectifs productivistes de la Politique Agricole

Commune sont atteints et même dépassés. La PAC est alors victime de son

succès : les exploitations agricoles européennes sont en surproduction et l’Europe

est confrontée à des excédents énormes qu’elle doit stocker. Au niveau des

quantités de lait : en 1973 l’U.E avait déjà atteint l’autosuffisance et en 1983, elle

se retrouvait avec un million de tonnes de beurre et 700. 000 litres de lait en trop.

Plus tard, ce sera le secteur céréalier qui réalisera des surplus importants. Tout

cela entraine un coup budgétaire important puisque l’U.E. paie à l’époque des

subventions aux exportations pour écouler tous ces excédents sur le marché

international (Choplin, 2013).

Des mesures vont alors être mises en place afin de tenter d’aligner la production

sur les besoins du marché. C’est en 1984 qu’ont lieu les premières modifications.

Des mesures d'encadrement des dépenses semblent alors nécessaires. L’Union

va donc mettre en place des quotas laitiers et des dispositions de maîtrise des

marchés des céréales et du vin. En 1988, des nouvelles propositions seront faites

car les dernières démarches entreprises n’ont pas permis d’améliorer la situation.

Fin des années quatre-vingt, on avait entre autres atteint 10 millions de tonnes de

céréales en trop (Union Européenne, 2012).

Gérard Choplin, Alexandra Strickner, Aurélie Trouvé dans Souveraineté

alimentaire. Que faire ? :

Il fallait maitriser le productivisme, cesser de nuire à l’environnement et stopper le

dumping (que nous définissions comme l’exportation à un prix inférieur au coût

de production moyen du pays – hors subventions). Bien que les causes de la

crise aient été explicitées, que les solutions aient été proposées, l’Europe

politique ne va pas s’en sortir par le haut.

Au début des années 1990, nous sommes encore face à 25 tonnes de céréales

en trop et 900 000 tonnes de viande bovine. Seuls les quotas laitiers ont été

respectés.

C’est en 1992 qu’on peut réellement parler de la première réforme3. Elle vise

essentiellement à mieux recadrer la PAC dans le marché. L’Europe cherche alors

à diminuer son poids budgétaire en baissant les prix garantis. En effet, L’U.E.

garantissait un certain prix, bien au-dessus du prix mondial, aux agriculteurs pour

leur production. Cette baisse des prix va être compensée par des paiements

directs (premier pilier de la PAC) aux producteurs qui sont non plus en

concordance avec leur production mais proportionnels à la taille de leurs

exploitations. En échange de cette aide, les agriculteurs doivent garantir une

période de gel de la production. Face à une crise de la surproduction, le gel est la

meilleure solution qui ait été avancée par l’U.E. Cela permet de mieux maitriser la

production, de réduire les stocks et de renforcer la compétitivité (Direction de

l’information légale et administrative, 2013).

Cette réforme visait donc à résoudre des problèmes internes mais pas

uniquement. Il était nécessaire pour l’Europe de se conformer aux règles

internationales4. La PAC passe d’un soutien des marchés à un soutien aux

producteurs, puisque le soutien des prix est remplacé par des aides directes aux

agriculteurs (Direction de l’information légale et administrative, 2013).

Mais en 1995 de nouvelles contraintes arrivent comme l’élargissement de l’Union

Européenne aux Pays d'Europe Centrale et Orientale (PECO). Un processus

d’élargissement qui est surtout lié au potentiel de production agricole substantiel

que les PECO ajouteraient à l’Union grâce au caractère sensible de l’agriculture et

à la taille relative du secteur agricole dans ces pays (Union Europénne, 2012).

C’est en 1999 que le second pilier de la PAC va voir le jour. Celui-ci vise le

développement rural et représente aujourd’hui 20% du budget de la PAC. Il appuie

en fait surtout la modernisation et la restructuration agricole et très peu le

développement ou le maintien de l’activité dans les régions rurales (Choplin et al.,

2009).

3 �

Appelée aussi la réforme Mac Sharry, selon le nom du Commissaire à l’agriculture de

l’époque.

4 �

Rappelons que l’Organisation Mondiale du Commerce a été instauré 2 ans plus tard, en avril

1994.

Tandis que la PAC continue allègrement à vider le monde rural de son tissu de

paysans, on fait croire à l’opinion que le second pilier et ses mesures vont régler

les problèmes (Choplin et al., 2009).

C’est en 2003, lors d’une révision à mi-parcours, que la commission imposera un

découplage important des paiements directs du premier pilier malgré l’opposition

de la plupart des états européens. L’OMC ne peut en effet plus accepter le modèle

productiviste de la vieille PAC et l’énorme dumping5 qui l’accompagnait. Les

Européens ont donc cherché un moyen de faire du dumping en agriculture mais

en respectant les règles conclues avec les autres : on découple les aides de la

production et on diminue les aides à l’exportation. Le problème est qu’il n’y a donc

plus besoin de produire pour bénéficier des aides.

Pour vendre ce nouvel instrument aux agriculteurs et à l’opinion publique, on a

fait croire à tort que le découplage serait bon pour l’environnement et qu’il

supprimerait l’effet distorsif sur les marchés puisque les paiements ne dépendent

plus ni du type, de l’acte de production. Son effet pervers est de délégitimer les

paiements aux yeux du contribuable, qui ne voit pas pourquoi il devrait payer

quelqu’un qui peut ne pas produire (Choplin et al., 2009).

Le budget a été établi pour la période de 2004 à 2013, en distinguant les anciens

états membres et les nouveaux. C’est là que va être instauré la progressivité des

aides. En effet, les nouveaux membres ne vont pas directement accéder aux

mêmes aides que les quinze premiers (Burny, 2010).

La réforme de 2008 constitue essentiellement en un « bilan de santé » et à une

consolidation de la réforme de 2003.

2.2.3 L’élargissement

Avec seulement six pays dans les années soixante, l’Europe peinait déjà à mettre

au point une politique agricole commune entre ses membres. En 2004, elle ouvre

ses portes à dix nouveaux pays6 et en 20077 à encore deux autres. C’est donc

face à 27 agricultures distinctes qu’elle doit se confronter aujourd’hui.

5 �

Puisqu’on se retrouve dans un modèle avec de la surproduction et des aides à l’exportation,

l’Union Européenne faisait descendre un maximum les prix pour gagner plus en vendant plus.

6 �

Chypre, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, République tchèque, Slovaquie

et Slovénie.

Dix états en plus, cela veut dire quatre millions d’agriculteurs supplémentaires.

Cela promet de nouveaux débouchés mais surtout une concurrence beaucoup

plus accrue. Des pays très agricoles comme la Pologne et la Roumanie vont

notamment entrer en jeu. Ces deux pays possédaient un grand nombre de petites

et moyennes exploitations paysannes. Les adhésions de la Pologne et la

Roumanie ont marqué un virage pour les institutions européennes et nationales

parce qu’elles signifient que la transition vers une économie de marché est

considérée comme terminée dans ces pays (Darrot, Von Hirschhausen, 2011).

L’élargissement a contribué à une augmentation de 40% de la surface agricole

utilisée (SAU), de 40% la production céréalière, de 23% celle de lait et de

quatorze pourcents celle de la viande bovine de l’Union Européenne. Le budget

de la PAC a de son côté augmenté de 20%.

Un projet de modernisation des agricultures des futurs états membres, géré à la

fois par les gouvernements nationaux et l’Union Européenne, avait été mis en

place avant leur adhésion.

Afin que les futurs membres puissent un minimum se mettre à niveau, un

instrument agricole de préadhésion appelé SAPARD8 a donc été instauré par l’UE.

Ainsi, 1,33 milliard d’euro leur ont été accordés dès les quatre années

précédentes 2003. On atteint même la somme de 2,2 milliards si l’on ajoute les

sommes octroyées pour l’intégration de la Bulgarie et la Roumanie. Les résultats

obtenus sont bons puisque la production a été relancée dans tous ces pays mais

pour que la PAC puisse fonctionner totalement dans ces nouveaux états

membres, les millions de travailleurs qui s’y trouvent doivent encore apprendre à

mettre en pratique le droit communautaire (aGter et du secteur études, 2012).

7 �

Bulgarie et Roumanie.

8 �

SAPARD est un cadre d’aide communautaire à l’agriculture et au développement rural

durable destiné aux pays candidats d’Europe centrale et orientale durant le processus de préadhésion

pour la période 2000-2006. Il vise à résoudre les problèmes d’adaptation à long terme du secteur

agricole et des zones rurales. Il constitue un soutien financier à la mise en œuvre de l’acquis

communautaire en matière de politique agricole commune et de politiques connexes (Europa.eu).

Comme dit plus haut, la décision a été prise de leur octroyer les aides de manière

graduelle. La Roumanie recevait, en 2007, 25% des aides. Après quoi, elles ont

augmenté de cinq à dix pourcents chaque année de manière à ce qu’elles arrivent

en 2016 au même montant que les autres. Pendant cette période, les

gouvernements nationaux sont autorisés à ajouter des aides complémentaires. On

appelle ces aides des « top-ups »9 et celles-ci peuvent aller jusqu’à un certain

seuil qui est déterminé par l’Union européen (aGter et du secteur études, 2012)

(Renard, 2010).

2.3 Différence de traitement dans le premier pilier

L’aide uniforme à l’hectare tue l’agriculture et enrichit les propriétaires qui sont

déjà riches. Il faut aller à l’encontre de l’RPUS parce que ce n’est pas aider

l’agriculture mais c’est aider les propriétaires (Tarabella, 2013).

Les aides directes dans l’Europe des quinze, les aides du premier pilier, sont

appelées Régime de Payement Unique (RPU). On peut obtenir l’aide en

présentant un hectare éligible et en respectant une série de 18 normes qui

couvrent des domaines comme la sûreté alimentaire, le bien-être animal, etc.

(Renard, 2010).

Ces aides sont donc des payements directs à l’hectare mais avec des dispositions

spéciales. Ce RPU va en effet prendre différente forme. Les états membres ont la

possibilité de choisir entre trois modèles différents (Knight, 2010).

Le premier est le modèle historique. Le calcul est fait par exploitation. On le fait

sur base du montant que celle-ci a reçu pendant une période de référence

historique et par rapport au nombre d'hectares exploités au cours de cette même

période. Sur cette référence, l’exploitation reçoit les aides actuelles. C’est le

modèle notamment choisi par les régions belges.

La seconde possibilité est le modèle régional. On fait le calcul d’une enveloppe

globale sur le territoire du pays, également sur base des montants reçus lors de la

période de référence. Et on divise cette enveloppe globale par le nombre

d’hectare de la superficie agricole utilisée. On arrive donc à un montant uniforme

9 �

En Roumanie, ces aides sont appelées « plan national pour le développement rural »

(PNDR)

par hectare, au sein d’une zone géographique définie. Ce modèle est notamment

appliqué au Danemark.

Le troisième est le modèle hybride. Les états qui l’utilisent peuvent appliquer des

systèmes de calcul différents selon les régions de leur territoire ou calculer les

payements en se fondant à la fois sur une approche historique et sur un taux

forfaitaire. Ces systèmes peuvent finalement également varier au cours du temps.

Ce type de modèle est appliqué en Allemagne, au Luxembourg, au Royaume-Uni,

etc. (Renard, 2010).

On comprend donc que c’est sur une base historique qu’on a établi les sommes

versées aux états membres. C’est pourtant ici que les nouveaux états membres

vont se retrouver face à un « problème » puisque leur enveloppe historique est

évidemment vide (Renard, 2010).

Pour les pays rentrés dans l’Union après 2003, ce système d’aide est remplacé

par le régime de paiement unique à la surface (RPUS), beaucoup plus simple. Un

hectare représente simplement une somme.

Le système de paiement des aides appliqué dans le cas de la Roumanie est le

régime de paiement unique à la surface (RPUS). Le seuil minimum pour les

aides a été décidé par le gouvernement roumain. Le plafond se situe à un

hectare, les parcelles détenues ne pouvant pas être inférieures à 0,3 ha ou à 0,1

ha pour les vignes et les arbres fruitiers. En imposant ces limites presque trois

millions d’exploitations ont été exclues, les aides concernant seulement 9,5

millions hectares de la SAU totale de 13,298 millions hectares. Selon les chiffres

du ministère de l’agriculture roumain, en 2011, un nombre de 1,088 millions de

bénéficiaires ont reçu 130,82 €/ha (dont 50,46 de complément national). Malgré

le fait d’être largement contesté pour son effet sur l’accroissement des inégalités,

le RPUS a été adopté car il est considéré plus facile à mettre en place dans le

pays où les démarches administratives et la gestion des aides posent encore des

problèmes. Ce système favorise néanmoins la polarisation de l’agriculture,

augmentant les écarts entre les petites et les grandes structures au niveau

national (aGter et du secteur études, 2012).

Si les modèles sur base historique figent les inégalités héritées du passé où les

gains étaient encore liés à la production, ces RPUS favorisent les grands

propriétaires et accentuent le dualisme de l’agriculture des pays qui les utilisent.

De plus, dans ce système simplifié, si l’aide augmente, les loyers et le coût de la

terre vont augmenter également. On n’achète pas seulement une terre, on achète

les subventions qui vont avec (Tarabella, 2013).

Seul la Slovénie et Malte avaient choisi de se confronter aux difficultés des RPU

dès le départ. En 2010, tous les pays rentrés en 2004 sont également passés à

cette formule. Aujourd’hui il n’y a plus que la Roumanie et la Bulgarie qui

bénéficient encore de ce type d’aides (Knight, 2010).

2.4 Buts et principes de la PAC

La Politique Agricole Commune de l’Europe a été élaborée, rappelons-le, dans

une période de carence alimentaire. On peut dégager cinq objectifs majeurs à la

PAC qui sont toujours d’actualité aujourd’hui.

1. Assurer la productivité et la compétitivité de l’agriculture européenne. Cet

objectif est purement économique et peut bien sûr être contesté, au niveau de

l’écologie notamment. Il reste aujourd’hui un objectif essentiel. Le but principal de

la PAC est d’améliorer l’utilisation des facteurs de production et de la main œuvre

afin de faire rentrer la production agricole dans une économie de marché.

2. Améliorer le revenu agricole. Il y a en effet des disparités à deux niveaux.

Tout d’abord au niveau externe (donc par rapport aux autres domaines) et ensuite

au niveau interne (les gros agriculteurs par rapport aux petits paysans).

3. Stabiliser les marchés : Rendre les prix moins volatile par rapport aux

conditions climatiques, etc.

4. Garantir les approvisionnements : Pour réaliser cet objectif, la PAC garantit

l’augmentation de la production intérieure et l’ouverture des frontières aux

importations.

5. Garantir des prix raisonnables aux consommateurs

A la conférence de Stresa, en juillet 1958, se sont dessiné quatre grands

principes directeurs (Burny, 2010) :

1. Marchés et prix unifiés : dès le départ on va unifier les marchés, les produits

peuvent circuler en toute liberté dans les pays de l’Union (Choplin et al., 2009).

2. Préférence communautaire : des taxes à l’importation vont être décidées sur

un certain nombre de produit afin de favoriser le marché intérieur (Choplin et al.,

2009). C’est le principe qui est le moins mis en œuvre. (Burny, 2010).

3. Parité et productivité : la productivité a été stimulée pour que les agriculteurs

puissent produire à moindre coût grâce à un soutien des prix agricoles. Les

revenus agricoles devaient atteindre donc progressivement ceux des autres

secteurs (Choplin et al., 2009).

4. Solidarité financière : les dépenses en matière agricoles ont été financée à

partir d’un budget commun qui ne correspondait forcement pas à la redistribution

qui en sera faite. En 1984, ce principe sera battu en brèche par de Margaret

Thatcher, exigeant de recevoir autant que sa contribution. Quand elle donnait une

livre au budget européen, elle voulait recevoir une livre en retour (Burny, 2010).

2.5 Les outils de la PAC

L’Union Européenne a en main des grands instruments afin d’atteindre les

objectifs de sa politique commune. Dans les marchés libres, les prix vont dans

tous les sens, on a donc décidés de définir plusieurs outils qui permettent de les

réguler :

1 Prix d’intervention : si le prix du marché européen descend en dessous

d’un « prix garanti », l’Union achète alors sur le marché. Elle stocke, exporte,

donne aux plus démunis ou alors détruit les surplus (Choplin et al., 2009).

2 Prix indicatif : est un prix plafond qui permet d’assurer un certain revenu

aux agriculteurs. C’est un prix indicatif, celui que la Communauté souhaite voir

obtenir par les producteurs agricoles compte tenu du niveau de production espéré.

3 Taxes à l’importation (ou le prix de seuil) : on peut forcement acheter

moins cher ailleurs, c’est pourquoi l’UE protège son marché en imposant des

taxes à l’importation (Burny, 2010).

4 Aides à l’exportation afin de combler, s’il existe, l’écart entre les prix

d’intervention et les prix mondiaux (Burny, 2010).

La PAC a également en sa possession des mesures structurelles qui lui

permettent d’éliminer les petites exploitations qu’elle évalue comme « non-viable »

ainsi que d’autres pour agrandir et moderniser les plus grandes afin d’abaisser

leurs coûts de production (Choplin et al., 2009).

Les dépenses en matière d’agriculture sont garanties par deux fonds différents

(compris dans le budget européen) :

le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA). Il finance le premier

pilier, c’est-à-dire les paiements directs aux agriculteurs et les mesures destinées

à réguler les marchés agricoles.

le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER).

C’est lui qui finance les programmes de développement rural des États membres

(Union Européenne, 2012).

2.6 Budget et bénéficiaire

Pour rappel, la PAC est composée de deux piliers. Le premier se focalise sur la

production, le soutien des marchés et les payements directs aux agriculteurs.

Le deuxième est la partie de la PAC qui se concentre sur le développement rural à

travers la modernisation des économies rurales, la diversification, etc. (Knight,

2010).

Avant toute chose, il est également bon de préciser que l’agriculture est le seul

secteur entièrement financé par le budget européen. Les dépenses nationales

sont censées être entièrement remplacée par la PAC.

La PAC est la plus grosse dépense de l’Europe. Elle représentait, en 2012, 40,8%

du budget. En regardant le tableau ci-dessous, on comprend que 77% des aides

de la PAC sont destinées au premier pilier. Le deuxième pilier, qui doit

subventionner le maintien de la vie rurale, est en certain point une illusion. Nous

l’avions déjà compris dans le point traitant de RPU et des RPUS (du premier pilier,

beaucoup plus important donc), la PAC actuelle favorise largement les gros

exploitants. Il faut également souligner que pour ce deuxième pilier, les actions

sont cofinancées par l’Europe et l'État membre. Nous verrons plus tard, avec le

cas de la Roumanie, pourquoi il a tant de mal à se mettre en place et à réaliser.

CE: crédits d'engagement - CP: crédits de paiement (Union

Européenne,2013)

La répartition des aides reflète « le poids respectif » des agricultures de chacun

des Etats membres. La France, dont l'agriculture représente 20% de l'agriculture

européenne, reçoit ainsi 20% du budget de la PAC. Cette tendance a été

renforcée lorsque l’on est passé à un système de paiement unique à l’hectare. La

critique que l’on peut dresser est que puisque les aides sont désormais

découplées de la production, les sommes d’argent perçue ne sont pas toujours

justifiables. Prenons l’exemple du Royaume-Uni. La reine d’Angleterre, l’un des

plus grandes fortunes du monde, bénéficiait en 2008 d’environ 530.000 euros pour

son domaine privé autour du château de Sandringha.

Le tableau des répartitions détaillées du budget de la PAC pour l’année 2009

montre également combien le développement rural est désavantagé. Il est

également important de noter la différence entre promesse et payement.

L’entièreté des aides directes et des interventions sur les marchés agricoles

annoncées ont été versée alors que seulement les trois-quarts des aides pour le

développement rural ont été distribuées.

(eur-lex.europa.eu,2009)

Nous l’avons également déjà souligné plus haut mais les différences notoires

entre les différentes agricultures sont également à prendre en compte dans la

distribution de ce budget. Le tableau si dessous nous laisse entrevoir cette

différence en comparant assez simplement l’agriculture roumaine à celle du

Royaume-Uni.

On constate qu’en Roumanie, en Pologne ou en Bulgarie, les aides accordées

pour la modernisation de l’agriculture sont bien plus importantes que dans les

autres pays d’Europe.

2.7 Les institutions impliquées et leurs rôles dans la réforme de la PAC

La commission européenne est responsable de la bonne gestion de la PAC et

contrôle son application. C’est le commissaire européen de l’agriculture,

actuellement Dacian Ciolos, et son équipe qui propose des modifications et

réformes des politiques agricoles. La DG de l'Agriculture et du Développement

Rural compte environ 1000 fonctionnaires. Elle est dirigée par José Manuel Silva

Rodiguez et est responsable de la mise en œuvre de la politique agricole (Union

Europénne, 2013).

Lorsqu’une réforme est proposée par le commissaire européen, la commission de

l’agriculture du parlement européen va pouvoir proposer des amendements sur

ces propositions. Après cela, ils vont être votés en séance plénière par tout le

parlement.

Le conseil des ministres de l’agriculture, comportant les différents ministres de

l’agriculture des pays membres, travaille sur base des textes acceptés ou rejetés

par le parlement. Les ministres doivent atteindre un consensus. Après quoi, il y

aura une renégociation entre les trois parties (commission, parlement et conseil

des ministres) jusqu’à qu’un texte unique soit approuvé par tous.

2.8 Limites de la PAC

L'Europe souhaite produire une agriculture compétitive d'une part mais désire

également soutenir les plus petites exploitations d'autre part. Qu'en est-il

réellement ?

Dans les textes européens, on note le projet de restructurer l'agriculture vers de

plus grandes exploitations dans une recherche de compétitivité maximale mais

également une volonté de soutien aux plus petites exploitations qui ne sauraient

pas s'adapter aux normes du marché.

Ces aides octroyées par la PAC sont-elles équitablement réparties entre ces deux

catégories ? L’étude réalisée par Catherine Darrot et Béatrice Von Hirshhausen en

2011 permet de comprendre dans quel sens vont les dispositions européennes

concernant la restructuration de l’agriculture des futurs membres. L’analyse porte

sur les textes définissant les efforts de préadhésion de la Pologne et de la

Roumanie et sur leurs effets réels. Le cas de la Pologne est intéressant car celui-

ci a lieu plusieurs années avant celui de la Roumanie. Les chercheurs ont donc pu

observer les effets des textes sur une plus longue période.

1) L'exemple de la Pologne

En Pologne l'axe 1 « modernisation » du second pilier de la PAC prévoit :

-l'aide à la modernisation des exploitations

-l'aide au départ en préretraite

-l'aide aux jeunes agriculteurs

L'axe 2 « soutien à la durabilité des zones rurales » du second pilier prévoit :

-l'aide à la diversification des activités

-les aides agro-environnementales

L'axe 1 a pour objectif le développement et la compétitivité des exploitations. L'axe

2 vise à soutenir les petites exploitations.

Mais ces subventions sont-elles efficacement réparties ?

Pour avoir droit à l'aide à la modernisation du second pilier, « il faut être capable

d'avancer le montant des investissements pour en bénéficier, l'Union Européenne

ne remboursant que 18 mois plus tard ». (p.77)

Conséquence : seules les exploitations déjà grandes et riches peuvent accéder à

cette aide à la modernisation. Le plus grand nombre de demandes de subsides

provient donc d'exploitations de tailles importantes qui peuvent se permettre

d'avancer l'argent.

De façon encore plus étonnante, les aides agro-environnementales destinées aux

petites cultures sont principalement octroyées aux grandes exploitations. Ces

aides ne vont donc pas « aux régions ou la main-d’œuvre agricole est la plus

élevée par hectare, autrement dit aux régions ou l'agriculture assure la plus forte

fonction sociale et est identifiée comme bénéfique pour l’environnement ». (p.78)

C'est également vrai pour les aides à la diversification des activités rurales dont la

destination est prévue à l'origine pour les petites exploitations dans les zones ou le

chômage rural est important. Ces aides sont « mieux captées dans les régions de

grandes exploitations, sans lien effectif avec le taux de chômage rural ». (p. 78-79)

Force est donc de constater que les aides allouées par la PAC vont aux

exploitations qui n'en ont pas pleinement l'utilité.

2) L'exemple de la Roumanie

En Roumanie les demandes d'aides directes du premier pilier de la PAC

proviennent essentiellement des régions où l’implantation des grandes

exploitations est la plus forte. Dans les régions ou la petite paysannerie est

fortement présente, les demandes sont rares. Comment expliquer cela ?

La PAC ne prend pas en compte les micro-exploitations de moins d’un hectare car

« elle considère que les plus petites exploitations sont vouées à une disparition

prochaine. Aucun dispositif d'aide ne leur est donc destiné ». (p.81)

Cette limitation fixée à 1 ha, exclut des aides 49,5% du total des exploitations et

cinq pourcents des terres. Et même si la parcelle correspond aux critères de

subventions, « le montage d'un dossier de demande, l'ouverture d'un compte

bancaire constituent pour bon nombre de familles paysannes un obstacle réel ».

(p.81)

Pour les aides agro-environnementales du second pilier (destinées à la base aux

petites exploitations), le critère de taille entre également en compte. Ainsi, les

subventions accordées vont quasiment toujours au même type d'exploitation. Cela

a pour effet de creuser toujours plus l'écart entre les structures agricoles.

2.9 Réforme de la PAC 2014-2020

C'est en octobre 2011 que sont lancées les premières discussions pour la PAC

2014-2020 entre la Commission Européenne, le Parlement Européen et le Conseil

des 27 Ministres de l'agriculture sous propositions de règlements de la

Commission. (Chambre Agriculture Normandie, 2013).

Le processus de réforme suit un calendrier précis :

Octobre 2011 : Publication par la commission de ses propositions de règlements

PAC.

Février 2013 : Décision du Conseil des Chefs D'Etat sur le cadre budgétaire 2014-

2020.

Mars 2013 : Avis du Parlement sur les propositions de règlements.

Mars 2013 : Avis du conseil des 27 Ministres de L'Agriculture sur les propositions

de règlements.

Avril-Juin 2013 : Négociations (« Trilogue ») entre les trois parties prenantes de la

décision.

Juin 2013 : (prévisionnel) Adoption de la PAC après 2013 par codécision du

Conseil des 27 Ministres et du Parlement Européen Validation par le parlement

Européen du cadre budgétaire 2014-2020.

2014 : (prévisionnel) Début d'application de la PAC réformée. (Chambre

Agriculture Normandie, 2013)

Les discussions de cette réforme se déroulent en parallèle avec les négociations

budgétaires de l'Union Européenne pour la prochaine période financière de 2014-

2020. En effet, pour pouvoir faire une réforme budgétaire de la PAC, il faut tout

d’abord savoir quel sera le montant du budget européen total et la part que la PAC

continuera d’avoir au sein de celui-ci. (Knops, 2012, p.2)

Les chefs d'Etats des 27 pays de l'Union Européenne se sont mis d'accord, le 8

février 2013, sur le budget à allouer à la nouvelle PAC : 362,9 milliards d'euros sur

la période 2014-2020 (un tiers du budget total européen) soit une réduction de

3,22% par rapport à la proposition de la Commission et une réduction de treize

pourcents par rapport au budget de la PAC 2007-2013. (Sopinska, 2013)

L’arrêté budgétaire du Conseil des Chefs d'Etats et les discussions qui ont eu le

13 mars au Parlement et le 19 mars 2013 au sein du Conseil des Ministres

permettent de mettre en lumière les accords conclus. (Chambre Agriculture

Normandie, 2013)

Voici quelques-uns des principaux accords (Chambre Agriculture Normandie,

2013) :

Dans le cadre budgétaire 2014-2020 de la PAC, « les crédits du premier

pilier baisseront de cinq pourcents environ par rapport à 2013. Les crédits

européens du second pilier (développement rural) 2014-2020 sont en baisse de

plus de huit pourcents. Le Parlement Européen espère modifier à la marge cet

accord avant la fin juin.

La structure de la PAC ne change pas. C'est à dire le mécanisme des deux

piliers de la PAC.

Les aides octroyées par le premier pilier sont mieux réparties entre les

différents états. « Les pays dont les aides par hectare du premier n'atteignent pas

90% de la moyenne européenne réduisent d'un tiers cet écart de 2015 à 2020. 12

pays verraient leurs aides progresser au premier rang desquels les Pays Baltes, la

Roumanie, la Bulgarie et la Pologne ».

Plafonnement des aides par exploitation. « Un plafond à 300 000 euros par

exploitation et par an serait instauré, avec une retenue progressive entre 150 000

et 300 000 euros ».

Mise en place de cinq pourcents de surfaces agricoles d’intérêt écologique

au lieu des sept pourcents proposés par la Commission.

Revendications de quelques pays pour la PAC 2014-2020 :

L'Allemagne, plus gros contributeur du budget européen, souhaite une PAC

forgée sur l'économie. Selon Angela Merkel, la PAC « doit se résoudre à faire

des économies de fonctionnement ». La proposition d'Herman Van Rompuy

de réduire fortement le budget de la PAC à hauteur de 25 milliards d'euros

semble être pour la Chancelière un bon projet. (L'est-éclair, 2013)

La France opte pour une tout autre position. Etant le plus grand bénéficiaire

des aides de la PAC, François Hollande souhaite une PAC dont le budget

reste important. Pour le président français, la PAC doit avoir « le budget le

plus élevé possible (...). La PAC doit avoir une dimension économique de

soutien des productions et des prix et donc renforcer les mécanismes

d'intervention.» (Le Monde.fr avec AFP, 2013)

La Roumanie est comme la France, désireuse d'avoir un budget important

pour la PAC 2014-2020. Le ministre roumain des Affaires européennes,

Léonard Orban, pense « qu'il est essentiel pour nous que l'on assure des

allocations substantielles pour la politique de cohésion et la politique agricole

commune. » (Ambassade de France en Roumanie, 2011)

2.9.1 Critiques de cette réforme (Knops, 2012)

De nombreuses personnes du monde civil et politique auraient espérer voir une

réforme plus juste vis à vis de l'environnement mais également voir une PAC qui

tienne d'avantage compte des petites exploitants face aux grandes entreprises

agricoles. Cette réforme est donc une déception.

« Ecolo s'est exprimé pour dénoncer les différents renoncements de la

Commission qui traduisait clairement une volonté de maintenir la PAC dans une

logique de compétitivité internationale désastreuse ». (p.8)

Thérèse Snoy, dans une note présentée au Bureau Politique le 20 septembre

2010, mettait en garde : « si rien ne change, les paysans vont continuer à

disparaitre et les ressources naturelles à se dégrader ». (p.8)

En 2012, José Bové, député au parlement Européen, s'offusque lui aussi de cette

réforme. « On croit rêver (...). Personne n'a demandé le renforcement de la

compétitivité des entreprises de l'agroalimentaire, personne n'a réclamé le

développement des biotechnologies pour lutter contre la faim dans le monde et

personne n'a revendiqué la mise en place d'une agriculture duale avec les agri-

managers d'un côté et les petits paysans aux fermes chancelantes de l'autre ».

(p.3)

Il semble très clair que la PAC, conservant son système architectural actuel

composé de deux piliers « ne remet aucunement en question le cadre néo-libéral

imposé par l'OMC, un facteur qui conditionne toute prise de décision en matière

de politique agricole ». (p.8)

Selon un Communiqué de Presse du groupe des Verts/ALE, en octobre 2011, «

Aujourd’hui, ce sont toujours les plus grosses exploitations agricoles qui

bénéficient le plus des aides de la PAC, mettant les petites exploitations agricoles

sous pression. Sur les 14 millions d'agriculteurs en Europe, 10 millions ne

touchent pas ou peu d'aides ». (p.9)

La nouvelle réforme de la PAC 2014-2020 prévoit un plafonnement des aides à

300 000 euros. Cette instauration de plafonnement était une revendication des

agriculteurs les plus modestes, elle pourrait donc être vue comme une bonne

nouvelle. Cependant ce montant est excessif pour les défenseurs d'une PAC plus

équitable car il est « bien trop élevé et n'aura pas l'effet escompté, à savoir, la

redistribution de paiements des plus privilégiés vers ceux qui en ont le plus

besoin. De plus, la commission ne prévoit pas de mécanismes qui empêcheraient

les cibles de cette mesure d'entreprendre des démarches juridiques pour

fragmenter leurs exploitations, et ainsi éviter les effets du plafonnement ». (p.12)

2.9.2 Rôle des lobbys, qui est gagnant ? (de Lacour, 2013)

Pour la première fois dans une réforme de la PAC, le Parlement Européen est co-

décisionnaire avec la Commission. Cela donne un autre pouvoir au parlement. Du

coup, les eurodéputés ont été visés par les différents lobbys, agro-alimentaires ou

ONG environnementales.

Pour donner un exemple de ces actions, la WWF a envoyé 40 000 mails, une

Good Food March a été organisée devant le parlement Européen... Les

organisations de la société civile ont ainsi souhaité attirer fortement l'attention des

députés européens.

Cependant, les différents lobbys ne travaillent pas tous avec les mêmes moyens

techniques et logistiques. Pour donner un exemple, la Copa - Cogeca, lobby agro-

alimentaire, compte 120 salariés permanents à Bruxelles alors que la plupart des

ONG environnementales ne font appel qu'a des bénévoles. Les forces d'actions et

d'influence ne sont donc pas les mêmes.

3. EVOLUTION DE L’AGRICULTURE EN EUROPE

3.1 Mutations de l’emploi agricole en Europe

On observe une tendance lourde dans le secteur agricole : plus un pays est

technologiquement avancé, plus son développement économique est élevé et plus

l’emploi dans le secteur agricole est menacé.

L’ouverture quasiment complète des frontières avec l’UE des 15, à partir de

2004, a encouragé l’émigration temporaire ou définitive de nombreux actifs

agricoles. Mais les petites exploitations n’ont pas forcément disparu et

constituent parfois un « refuge » face à la crise économique actuelle, comme en

Pologne (Bazin, 2011).

Ces dernières années, la diminution de la main-d’œuvre agricole, n’a pas touché

tous les pays de la même manière. Par exemple, l’emploi agricole reste plus

important dans le Sud de l’Europe (Eurostat, 2013). « Des études ont montré

qu’entre 1995 et 2000, en Bulgarie et surtout en Roumanie, l’activité agricole a

progressé, éloignant même ces deux pays de la structure d’emploi de l’UE »

(Bazin, 2011). En ce qui concerne l’Estonie, la Hongrie et la Pologne, leur

production agricole a progressé de plus de 80% depuis 2005, grâce à la forte

réduction des effectifs agricoles et l’augmentation des grosses exploitations

industrielles (FAO, 2012). Malgré une production agricole qui progresse, on

constate que, globalement, en Europe, l’emploi agricole décroît depuis la Politique

agricole commune entreprise en 1992 (Eurostat, 2013).

3.2 Evolution du nombre d’exploitations dans les pays de l’Union

européenne

En 2007, les PECO1010 concentraient 57% des exploitations agricoles de l’UE des

27. Le nombre d’exploitations dans l’ensemble des PECO10 a diminué en

moyenne de 8,3% entre 2003 et 2007, suivant la même courbe décroissante que

dans l’UE des quinze. Ce qui est interpellant c’est que parallèlement à cela, la

basse de la main d’œuvre agricole dans les PECO10 est beaucoup plus rapide

que la baisse du nombre d’exploitations, ce qui n’est pas le cas dans l’UE des

10 �

Les PECO : pays d’Europe Centrale et Orientale. PECO10 : Hors Bulgarie et Roumanie

(Bazin, 2011).

quinze. « Ceci indique une évolution rapide des systèmes de production –

substitution du travail par du capital dans les plus grandes exploitations (…) –

ainsi que le départ temporaire ou définitif des travailleurs en surplus et mal

rémunérés dans les petites exploitations familiales » (Bazin, 2011).

On constate donc que la baisse du nombre d’exploitations et l’accroissement de

leur taille signifie immanquablement une diminution de la main d’œuvre agricole.

3.3 Transition agraire11 : l’adaptation des Nouveaux Etats membres

(NEM) de l’UE

« L’élargissement de l’UE à dix pays d’Europe centrale et orientale y a

profondément transformé les conditions sociales, économiques et politiques du

développement agricole et rural » (Pouliquen, 2011).

Impulsés par la poursuite d’une forte croissance globale et par l’accès aux aides

de la PAC, la reprise agricole et les gains de productivité ont globalement évité le

bouleversement, a priori très redouté de part et d’autre, des équilibres Est-Ouest

des productions et échanges agricoles mutuels. Mais les écarts de productivité

restent substantiels et l’extrême dualisme structurel hérité de l’ère communiste

reste marqué. D’un côté en effet, les grandes et très grandes exploitations

sociétaires et individuelles, issues de l’ancien secteur socialisé, sont très

renforcées par les aides communautaires, de l’autre une partie notable des

minifundia de subsistance a trouvé des voies multifonctionnelles de résistance.

Toutefois, dans la plupart des NEM, les exploitations « moyennes » ont conquis

ou maintenu (notamment en Pologne) une place significative, mais le plus

souvent sans accéder au modèle « professionnel » ouest européen (Pouliquen,

2011).

Les réformes menées en Europe centrale et orientale n’ont pas fonctionné tel que

souhaité. Premièrement, le processus de redistribution ou de restitution des

parcelles, à l’œuvre après la Seconde Guerre Mondiale, a participé à la

fragmentation de la propriété. Deuxièmement, les marchés fonciers sous-

développés n’ont pas permis un regroupement de la propriété. Troisièmement, la

création de droits de propriété et le démantèlement des fermes collectives et

11 �

« Historiquement, la transition agraire correspond au passage de structures de production

petites, peu productives dégageant un surplus limité à des structures plus grandes, plus productives

pour la terre et le travail en mobilisant du capital et dégageant des surplus commercialisés

importants » (Benoit-Cattin, 2007).

étatiques durant la période post-collectiviste n’ont pas facilité la création

d’exploitations de taille moyenne comme prévu.

D’un point de vue économique, il était attendu que les petites exploitations, en

dessous de la taille critique nécessaire aux économies d’échelle, et les très

grandes exploitations, souffrant de coûts de transaction élevés et de

déséconomies d’échelle, disparaissent au profit d’exploitations individuelles de

taille moyenne comme dans les pays occidentaux (Pouliquen, 2011).

Finalement, la transition a donné lieu à un secteur agricole dual dans la plupart de

ces pays où énormément de petites exploitations coexistent avec des exploitations

de taille moyenne, ainsi qu’avec de très grandes fermes, peu nombreuses mais

utilisant la majeure partie des terres agricoles (Pouliquen, 2011).

Malgré cette bipolarité de l’agriculture en Europe, « la persistance des petites

exploitations de semi-subsistance et des grandes structures employant des

centaines d’employés (…) a sans doute permis d’éviter un désastre social pendant

la (…) période de transition économique, en garantissant un niveau de vie à des

millions de personnes dans les zones rurales » (Pouliquen, 2011).

Lors des négociations d’adhésion, la Commission européenne a,

exceptionnellement, permis aux Etats entrant d’apporter à leurs agriculteurs des

aides complémentaires à celles de la PAC car l’agriculture dans ces pays

constituait un secteur primordial et « elle pesait également lourd dans le budget

européen (45%) en raison des subventions aux agriculteurs » (Pouliquen, 2011).

L’adhésion signifiait donc, pour ces pays, recevoir une part du gâteau constitué

par ces subventions agricoles généreuses, alors que pour la Commission et pour

les anciens États membres, l’élargissement impliquait une augmentation de la

part budgétaire de l’agriculture, et donc une plus grande contribution de certains

pays (comme la France et l’Allemagne) au budget européen (Pouliquen, 2011).

L’intégration de douze nouveaux membres dans l’UE entre 2004 et 2007 a

profondément modifié la structure de l’agriculture européenne. La surface agricole

utilisée a augmenté de 38% et l’emploi agricole a plus que doublé (Bazin, 2011).

3.4 Compétitivité de l’agriculture européenne : bilan

Une des priorités universelles du marché mondial est d’assurer les bases d’une

concurrence loyale. Or, dans l’agriculture, actuellement, cette concurrence sur les

marchés est foncièrement déloyale. Chaque pays opère avec ses propres règles

et chacun d’eux voudrait être le maitre du jeu. Le problème c’est qu’aucun n’arrive

à se mettre d’accord en termes de fiscalité, droits des travailleurs, salaires,

protection sociale, etc.

« Certains pays acceptent de financer des politiques environnementales, d’autres

détruisent leur environnement à long terme pour produire intensivement. Certains

font du dumping monétaire, d’autres ont des monnaies surévaluées. Certains

soutiennent leurs agricultures pauvres, d’autres la maintiennent dans la pauvreté

comme avantage comparatif » (Griffon, 2011).

La globalisation et la libéralisation des marchés n’ont fait qu’accroître les

déséquilibres. La combinaison guerre des coûts et absence de règles douanières

de compensation ne fait qu’aggraver de jour en jour la vie de la plupart des

agriculteurs européens (Griffon, 2011).

Au sein de l’espace européen s’est développée une forte concurrence qui peut

menacer les agricultures de certaines régions. Au moins deux tendances

s’opposent : la spécialisation des agricultures en fonction de leurs avantages

compétitifs (les porcs au Danemark, le blé dans le Bassin parisien, l’arboriculture

dans les pays du Sud…) et la vision – plus alternative – d’agricultures localement

diversifiées et ancrées dans leur territoire de manière, notamment, à bien

s’intégrer dans l’économie locale, à conserver les emplois et protéger les

paysages comme un capital pour le futur. La concurrence est avivée par le fait

que les pays membres n’ont pas les mêmes règles sociales (travailleurs payés

sous le Smic en Allemagne) ni fiscales et que les subventions ne sont pas

réparties selon les mêmes critères (Griffon, 2011).

Si les nouvelles règles de la PAC n’évoluent pas rapidement, des crises locales

surgiront pour tel ou tel produit peu compétitif. La crise dans la filière porcine en

Grande-Bretagne en témoigne déjà (Griffon, 2011).

4. LE CAS ROUMAIN

4.1 Description et statistiques

4.1.1 Première approche de la Roumanie

En Roumanie, les sols et le climat permettent une production agricole efficiente.

En effet, le pays profite d’une large gamme de sols cultivables et fertiles : vallées

fluviales, bassins transylvains, sols semi-arides de la Dobroudja méridionale, etc.

De plus, la superficie de terres de labour couvre plus du tiers (38,2% en 2009

selon Eurostat) de la superficie totale du pays, c’est à dire 238 391 km2.

Ce sont principalement les cultures céréalières (maïs, blé, houblon, avoine) et

l’élevage qui font la renommée de l’agriculture roumaine. À cela il faut également

ajouter la viticulture, l’arboriculture et le maraîchage (Velcea, 1967).

En termes de production au sein des PECO, la Roumanie se situe en deuxième

position, juste après la Pologne. Cependant la production des agriculteurs

roumains varie fortement d’année en année car utilisant moins d’engrais et de

pesticides et travaillant avec des techniques moins performantes, leur production

est plus sensible aux conditions climatiques12 (OCDE, 2000).

« Avec 36% de l’emploi national et une contribution au PIB de seize pourcents en

1998, l’agriculture occupe une place plus importante en Roumanie que dans

n’importe quel autre pays d’Europe centrale et orientale, à l’exception de l’Albanie.

Par contre, la Roumanie a très peu développé les autres secteurs de son

économie » (OCDE, 2000).

Dans son étude « Transmission patrimoniale et relations intergénérationnelles en

Roumanie », Fiona Gaborean fait le constat d’un pays dont l’économie reste,

encore actuellement, très agraire. Pour appuyer son propos, elle se base sur une

enquête du Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation (2005) qui montrait que

45,1% de la population habitaient la campagne et que quatre millions de ménages

subvenaient à leurs besoins grâce à une agriculture de subsistance.

Actuellement, le secteur agricole roumain présente deux caractéristiques

générales : d’une part, il comporte une forte masse de petites et moyennes

exploitations familiales qualifiables de « paysannes », et d’autre part, depuis son

entrée dans l’UE, il fait l’objet d’un projet de modernisation de ses structures

d’exploitation avec le support des aides de la PAC13 (Darrot et Von Hirschhausen,

2011).

12 �

Avant la construction de digues, chaque inondation des cultures par le Danube affectait la

production.

13 �

Ces deux caractéristiques peuvent être transposées au secteur agricole polonais (Darrot,

2011).

4.1.2 Quelques chiffres évolutifs (FAO, 2012)

Population économiquement active dans le secteur agricole (en milliers) :

3680 (1980) 2603 (1990) 1739 (2000) 868 (2010)

Part de l’agriculture dans la population économiquement active totale (%) :

35 (1980) 24 (1990) 15 (2000) 9 (2010)

Montant annuel moyen des flux d’IDE14 destinés à l’agriculture :

56 millions $ (2005-2006) 159 millions $ (2007-2008)

Dépenses publiques : part de l’agriculture dans le montant total des

dépenses publiques (%) :

3,4 (2000) 4,9 (2007)

14 �

IDE pour Investissements Directs Etrangers : « Les IDE constituent la catégorie

d’investissements internationaux qu’une entité résidente d’une économie (l’investisseur direct)

effectue dans le but d’acquérir un intérêt durable dans une entreprise résidente d’une autre économie

» (Eurostat, 2013).

4.1.3 Tableau comparatif des statistiques du secteur agricole en

Roumanie et en Belgique (Eurostat, 2013)

Roumanie

(237 500 km2)

Belgique

(30 528 km2)

Population active agricole 28% (2012) 1% (2010)

Part du PIB agricole dans

le PIB total

7,9% (2011) 6,6% (2004)

Production de céréales en

milliers de tonnes

14 874 (2009) 0,7% (2011)

Production de viande en

milliers de tonnes

779 (2004) 1821 (2003)

Terres arables (%

superficie émergée)

38,2% (2009) 27,7% (2009)

Terres arables (hectares

par personne)

0,41 (2009) 0,08 (2007)

4.1.4 Typologie des exploitations agricoles roumaines (Villemin, Andreff

et Montaigne, 2011)

- Exploitations de subsistance : 76,3% (2002)

- Exploitations de semi-subsistance : 21,1% (2002)

- Exploitations familiales commerciales : 2,1% (2002)

- Sociétés commerciales privées : 0,2% (2002)

Cinq ans plus tard, en 2007, 64% des exploitations roumaines produisaient

toujours uniquement pour leur propre production.

4.1.5 Tableau évolutif des parts de la surface exploitée par les

exploitations agricoles selon leur taille en Roumanie 15 (Bignebat et

Latruffe, 2011)

1994-1995 2007

Exploitations de moins de 5 ha 45% 90%

Exploitations entre 5 et 50 ha

(exclus)

10%

Exploitations entre 5 et 100 ha

(exclus)

10%

Exploitations de 50 ha ou plus 0,4%

Exploitations de 100 ha ou plus 45%

On constate qu’entre la chute du système collectiviste et l’entrée du pays dans

l’Union européenne, la Roumanie a gagné énormément de petites exploitations et,

parallèlement, le nombre de grosses exploitations a fortement diminué.

Actuellement, 93% des fermes roumaines ont une surface de moins de cinq

hectares, mais elles ne représentent que 30% de la surface agricole totale.

Environ 200 fermes ont une surface supérieure à 2000 hectares. Et 2,7 millions de

Roumains travaillent dans l’agriculture, soit 28% de la population active (Bran,

2012).

Exploitations

individuelles

Exploitations de

personne morale ou

en groupement

1990 (période de transition) 12%

2007 (entrée de la Roumanie 100% 0,5%

15 �

Les cases vides signifient que les données n’ont pas été trouvées pour ce type d’exploitation

dans l’UE)

4.1.6 L’écologie en Roumanie

« On avait déjà foutu en l'air l'Europe de l'Ouest, et maintenant on va détruire toute

l'agriculture roumaine » (Wagenhofer, 2005).

D’un côté, on a une Roumanie qui est face à des défis environnementaux

importants dû à la période communiste après laquelle les grandes fermes

collectives ont laissé des terres usées dont les sols avait été surexploités. Sur 16

millions d’hectares de terres agricoles, 12 millions ont été touchées par des

facteurs tels que l’érosion, les inondations, etc.

Mais d’un autre côté, ce n’est pas aussi catastrophique que dans les pays qui

pratiquent l’agriculture industrielle depuis des décennies. De plus, les paysans ont

l’habitude d’utiliser moins de pesticides, ce qui à pour bénéfice de préserver les

sols.

En Europe occidentale, on laisse les terres en jachère cinq à six ans alors qu’en

Roumanie une à deux années suffisent. Avec son entrée dans l’ « orbite

occidentale », le pays va être amené à traiter les sols exactement de la même

manière que dans les pays d’Europe de l’Ouest (Knight, 2010, pp.27-28).

4.2 Evolution de la culture paysanne roumaine : avant 2007

4.2.1 Fin de la domination ottomane et avènement du Vieux Royaume

En 1856, suite au traité de Paris qui symbolise la libération du peuple de l’emprise

ottomane, la Roumanie originelle se compose de deux principautés : la Valachie et

la Moldavie.

Dans son étude sur les réformes agraire en Europe centrale et orientale (2001),

Christian Giordano explique : « Après la conquête de son indépendance en 1877,

la Roumanie a dû affronter de puissants propriétaires terriens « autochtones » à

caractère féodal ou « patrimonialiste » – la noblesse et les boyards16 – qui, outre

16 �

Boyard : noble de haut rang dans les pays slaves, particulièrement en Russie (Xe-XVIII

e s.)

ainsi qu’en Moldavie, en Valachie et en Transylvanie. (Larousse, 2013)

leurs privilèges politiques, possédaient des fortunes économiques considérables

».

Depuis ses tout débuts, la Roumanie n’a cessé d’accumuler les réformes agraires.

Celles-ci ont fortement participé à la modernisation du pays. La première de ces

grandes réformes remonte à la période suivant la naissance du Vieux Royaume.

Elle porte sur l’expropriation de la propriété ecclésiastique et donc la

sécularisation de terres possédées, principalement, par des boyards. Avant d’être

promulguée, cette loi a été l’objet d’âpres débats dans la classe politique. Une fois

son entrée en vigueur en 1865, elle a permis à de nombreux paysans de gagner

leur liberté et aux familles de s’approprier les hectares qu’elles cultivaient déjà

(Giordano, 2001).

Henry L. Roberts mentionne que, malgré cette première réforme en faveur des

paysans, « les boyards conservèrent un tiers des terres, les meilleures et se virent

généreusement indemnisés par l’ État » (1969).

Les effets de la réforme agraire s’annulèrent rapidement, et ce pour les raisons

suivantes : premièrement trop peu de terres étaient attribuées à un trop grand

nombre de demandeurs, même si beaucoup de paysans étaient exclus de la

distribution et continuaient à travailler dans les latifundia17 des boyards ;

deuxièmement, la croissance démographique engendra, dans les campagnes,

une surpopulation dévastatrice ; troisièmement, les pratiques héréditaires

fondées sur la division en parts égales pulvérisèrent gravement la propriété. (…)

Les propriétaires se virent victimes d’un processus d’endettement rapide et

croissant qui les obligea (…) à solliciter des crédits aux intérêts exorbitants

auprès des boyards, des grands fermiers ou des usuriers. Une autre stratégie

consistait à restituer les terres aux anciens patrons et/ou à retourner travailler

dans les latifundia à des conditions presque équivalentes à celles d’autrefois

(Giordano, 2001).

David Mitrany explique qu’au début du XXème siècle, la société et l’économie des

campagnes roumaines fonctionnaient sous les modes du servage féodal et du

17 �

Latifundia : grand domaine agricole exploité extensivement et de façon archaïque (Larousse,

2013).

capitalisme réunis. Cette situation de détresse paysanne engendra des

soulèvements périodiques18.

4.2.2 La Grande Roumanie19 et l’entre-deux guerres

A la fin de la Première Guerre mondiale, une nouvelle réforme agraire se met en

place. Son but était avant tout de résoudre le vieux problème de la terre. Christian

Giordano explique : « La loi prévoyait que la propriété foncière ne pouvait

dépasser 100 hectares, les terres excédentaires dûment ôtées aux latifundistes

avec compensation par l’Etat devant, contre remboursement, être redistribuées en

lots de cinq à huit hectares » (2001). Cette seconde réforme a permis aux

paysans de récupérer une partie des terres des boyards.

Après la victoire des Alliés en 1918, la superficie de la Roumanie a doublé. Le

pays acquiert la Transylvanie, le Banat, la Bucovinie et la Bessarabie. Suite à cela,

la population roumaine a explosé, elle a augmenté de 70%. La nouvelle Grande

Roumanie devient à ce moment-là « un État hétéroclite, d’un point de vue tant

socioéconomique qu’ethnique » (Giordano, 2001).

Cette remarquable diversité contraignit le gouvernement de Bucarest à prendre

des mesures spécifiques pour chacune des régions. Dans ce cadre

socioéconomique, ethnique et législatif très complexe, les données officielles de

1921 disent qu’au total ce sont 6 millions d’hectares qui furent expropriés, dont 4

millions furent distribués à 1,4 million de paysans ; les 2 millions restants

demeurèrent aux mains de l’État ou furent assignés aux communes (Giordano,

2001).

Mais cette grande réforme ne rendit pas la Roumanie plus moderne qu’elle ne

l’était. « L’agriculture, avant la Seconde Guerre mondiale, ne réussit jamais

vraiment à décoller, et le niveau de vie dans les campagnes resta l’un des plus

bas d’Europe » (Giordano, 2001). En 1930, 6700 latifundistes détenaient encore

18 �

La grande révolte paysanne de 1907 traduisait le mécontentement des paysans vis-à-vis de

l’injustice de la propriété terrienne, aux mains de grands propriétaires. Elle peut être considérée

comme le point de départ de la nouvelle réforme agraire annoncée par le roi Ferdinand aux troupes

roumaines en pleine Première Guerre mondiale. (Roberts, 1969)

19 �

La Grande Roumanie (1920-1940) : le terme s’oppose à celui de Vieux Royaume. Il marque

le rattachement au pays de la Transylvanie, de la Bucovine, de la Bessarabie et d’une partie du Banat

roumain. (Larousse, 2013)

24% des terres tandis que 2,5 millions de paysans n’en possédaient que 28%. La

surpopulation de l’époque due à l’agrandissement du territoire d’après-guerre

provoqua une parcellisation excessive du sol (Giordano, 2001).

David Mittrany rend compte des inégalités créées par cette nouvelle loi dans les

régions gagnées après la Première Guerre mondiale, et en particulier en

Transylvanie. En effet, les minorités présentes dans ces régions ne pouvaient pas

bénéficier de cette réforme agraire car « les territoires acquis devaient être

attribués en premier lieu aux anciens combattants et aux veuves de guerre, qui,

évidemment, relevaient à tous égards de la nation roumaine » (Mitrany, 1930).

La réforme agraire, après la Première Guerre mondiale, avantageait la population

roumaine, paysanne pour une large part, tandis qu’elle défavorisait la population

magyare, vu que les Hongrois représentaient toujours la quasi-totalité des

latifundistes de Transylvanie qui auraient dû être expropriés, abstraction faite de

leur nationalité. (…) Le seul fait d’appartenir à la «nation ennemie », (…) pouvait

être à la base d’une discrimination dans la distribution de la terre. (…) Même si

en Transylvanie on ne peut parler de véritable persécution ethnique envers les

groupes minoritaires, il est indéniable que la réforme agraire incarne un

nationalisme en quête d’un idéal de « roumanisation territoriale et culturelle»

dans toute la région (Giordano, 2001).

Finalement, au lieu de moderniser les campagnes roumaines et de réduire le

retard de la Roumanie vis-à-vis des autres pays d’Europe occidentale, cette

seconde réforme est devenue un sujet particulièrement sensible entre les

différentes communautés. Les intérêts des grands propriétaires, en majorité

hongrois, se heurtaient continuellement à ceux des paysans, en majorité

roumains.

4.2.3 La période communiste

Dès 1949, le Parti Communiste au pouvoir en Roumanie a mis en œuvre « la

collectivisation » en organisant l’administration collective du cheptel, des terres et

des machines agricoles. (Ancuta, Ardelean, Arba et Darques, 2008).

Concrètement, les communistes adoptent des mesures d’expropriation avec

l’obligation pour les paysans de quitter leurs villages et leurs biens sans préavis,

en ayant parfois recours à l’agression physique et au chantage (accès des

enfants à l’éducation conditionné par l’entrée des parents dans la CAP20). Les

20 �

Coopérative Agricole de Production, Cooperativa Agricola de Productie : structures collectives

paysans roumains se transforment en travailleurs agricoles, propriétaires de leur

maison et d’une parcelle de 250 m2 maximum. Les familles les plus jeunes,

privées de ressources, émigrent et alimentent en main-d’œuvre les industries

dispersées sur tout le territoire national par le régime centralisé. (…) La vie

communautaire se dilue. Mis à part quelques localités choisies pour accueillir des

«centres agro-industriels», où étaient délocalisées quelques succursales

d’entreprises et où quelques blocs étaient construits pour signifier l’instauration

d’une vie meilleure, les investissements étaient généralement nuls ou très limités.

Les villages ont stagné. Réduit à sa seule fonction agricole et soumis aux

décisions prises par des autorités extérieures, l’espace rural a perdu son mode

de fonctionnement autorégulateur pour devenir un contenant (Ancuta, Ardelean,

Arba et Darques, 2008).

La seconde collectivisation a débuté en 1956. Tout comme la première, il s’agissait

d’exproprier la paysannerie sans pour autant nationaliser la terre. Durant toute la

période communiste la production et la gestion des fermes relevaient donc du

gouvernement. Ce qui a fait perdre au droit de propriété ses dimensions

historiques populaires fondamentales : usus, fructus, abusus21. « L’ordre

collectiviste agraire fondé sur l’appropriation sociale des moyens de production et

l’organisation collective du travail s’est substitué à l’idéal agrarien du paysan

propriétaire » (Maurel, 2011).

En 1973, 95% des terres cultivables appartiennent au secteur socialiste, 75% aux

coopératives agricoles de production (CAP) et 17% aux entreprises agricoles

d’Etat (IAS). (Eurostat)

En Roumanie, le monde rural a subi de plein fouet les politiques de privatisation

foncière car 90% de la terre a été collectivisée dans les années 50. (…) 10

millions d’hectares de terrains agricoles sont devenus propriété des coopératives

socialistes. La collectivisation a entrainé des transformations sociales

importantes : l’exode rural, les migrations journalières et hebdomadaires entre

ville et campagne, l’apparition du phénomène de « navetteurs » travaillant

alternativement à l’usine et aux champs des coopératives (Gaborean, 2011).

soumises à un régime de planification. Chaque coopérative se voit imposer des objectifs annuels mais

reste libre de les atteindre par les moyens qui lui conviennent. (Roger, 2002)

21 �

L’usus, le fructus et l’abusus : le droit d’user, de percevoir et de disposer (Larousse 2013).

« La figure du propriétaire a disparu de l’agriculture collectivisée tandis que s’est

affirmé le pouvoir des gestionnaires. Le caractère impersonnel de la propriété

collective a modifié les rapports à la terre et au travail, entraînant la

déresponsabilisation des travailleurs » (Maurel, 2011).

Néanmoins, Ion Velcea, docteur en géographie, faisait remarquer en parlant de la

Roumanie que la valorisation de certains terrains et la réduction des superficies

forestières isolées sous l’ère communiste avait contribuée à l’accroissement des

superficies agricoles du pays (Velcea, 1967).

A la fin des années 1980, l’économie roumaine était au bord de l’effondrement et

la population était profondément traumatisée par le régime autoritaire de

Ceausescu (OCDE, 2000).

4.2.4 La chute du système collectiviste

La chute du régime de Ceausescu (1989) marque un tournant dans tous les

secteurs de l’économie roumaine et particulièrement dans le secteur agricole.

Face à la pression paysanne, la Roumanie a dû engager la reprivatisation de ses

terres. Les gouvernements de l’ère postcommuniste ont donc mené plusieurs

réformes22 dans le but, notamment, d’améliorer les conditions de vie de la

population et, in fine, de regagner la confiance du peuple.

Au début des années 1990, le mot d’ordre du secteur agricole était la privatisation

de la propriété foncière qui était jusqu’alors collective ou étatique. Il s’agissait de

développer des exploitations individuelles plus efficaces que les formes collectives

de production.

Dans son article « Un village roumain face à la propriété privée », Florina

Gaborean parle d’un « retour paysan au passé » pour décrire le processus de

décollectivisation de l’agriculture (Pouliquen, 2011).

Il est intéressant de noter que la Roumanie constitue le seul pays d’Europe

centrale et orientale à avoir vu sa population agricole augmenter durant les

années 1990 du fait de ce « retour » massif dans les campagnes (Bazin, 2011).

22 �

En 1991, la loi sur le Fond foncier organisait la dissolution des coopératives agricoles. A la

place, des sociétés agricoles sont nées sous l’initiative de ménages ayant décidé de regrouper leurs

parcelles pour former une exploitation commune.

En 1996, le gouvernement fraichement élu d’Emil Constantinescu vote une série

de nouvelles lois : libéralisation des prix et du régime des changes, réduction des

droits sur les importations, élimination des subventions, démantèlement progressif

du contrôle du crédit dans le secteur agricole et promotion de l’investissement

étranger. Mais malgré toutes ces mesures, le déficit du commerce extérieur

roumain s’est aggravé et le chômage a nettement augmenté. De nombreuses

fermes roumaines, gérées par l’Etat autrefois, ont été abandonnées après la chute

de la dictature communiste. C’est ce qui a poussé le FMI en 1999 à conclure un

accord avec le pays pour redresser son économie. (Amblard et Colin, 2006 ;

OCDE, 2000).

Le journaliste Mirel Bran explique qu’après la chute du communisme, les pays

d’Europe de l’Est sont devenus très attractifs. Nombre d’exploitants agricoles

étrangers y ont vu des opportunités d’installation (Bran, 2012).

Comme le constate Marie-Claude Maurel à propos des agricultures d’Europe

centrale « En moins d’un demi-siècle, elles ont traversé trois ruptures majeures :

réformes agraires, collectivisation, décollectivisation » (2011, p. 2).

4.3 Evolution de la culture paysanne roumaine : après 2007

4.3.1 Production

On note en Roumanie un important déséquilibre entre la production animale et

la production végétale. La production de céréales et d’oléagineux23 représentait

à elle seule 67% de la production agricole en 2010.

La culture de céréales représentait 65% des terres arables. Elle s’élevait à 14 874

milliers de tonnes en 2009. En 2010, le rendement en céréales était de 3 331

kg/ha (Statistiques-mondiales, 2013).

La surface utilisée pour la culture du blé était de 2,15 Mha de blé, de 2,08 Mha

de maïs et 0,51 Mha d’orge. Les oléagineux utilisaient 18% des terres avec 0,53

Mha de colza, 0,79 Mha de tournesol et de 0,06 Mha de soja. La Roumanie

comptait en 2009 181 000 ha de vignes et la production de vin a été de 6,7

millions d’hl (Ambassade de France en Roumanie, 2011).

23 �

Plante cultivée pour ses graines ou ses fruits riches en lipides dont on extrait des huiles

alimentaires et dont on utilise les résidus de l'extraction dans l'alimentation du bétail (soja, colza,

tournesol, arachide, etc.) (Larousse, 2012).

En ce qui concerne l’élevage, la volaille constitue de loin la production principale.

En 2010, la Roumanie a élevé 80,8 millions de volaille dont 55% étaient des

poules pondeuses. Le cheptel porcin quant à lui s’élevait à 5,4 millions de bêtes

dont 1,7 dans des unités industrielles, l’ovin et le caprin comptait chacun 9,6

millions d’animaux. Deux millions de bovins étaient également élevés uniquement

pour une production laitière.

La production de bovins de races à viande n’est pas une priorité, du fait de la

préférence des consommateurs roumains pour la viande de porc et de volaille. La

production de lait, après une phase d’expansion jusqu’en 2006 avec 64,6 Mhl, est

en déclin avec 56,3 Mhl produits en 2009, et 49,1 Mhl produits en 2010. À 85%

composée de lait de vache, la production est autoconsommée à hauteur de 17%,

20% sont livrés aux laiteries, quinze pourcents sont vendus directement, et 42%

sont transformés en fromages. Les productions de viande porcine et de poulet ne

répondent pas en volume aux besoins des consommateurs et, en conséquence, la

Roumanie a recours à des importations en partie en provenance de l’UE. Les

animaux (bovins et ovins) vivants sont majoritairement exportés vers la Bulgarie,

l’Italie, la Grèce et le Moyen-Orient. La Roumanie manque d’une solide filière de

production bovine pour répondre aux exigences de la grande distribution

(Ambassade de France en Roumanie, 2011).

On peut préciser également que parmi les douze pays entrés dans l’UE après

2004, la Roumanie est le deuxième producteur agricole (après la Pologne)

(Darrot, Von Hirschhausen, Ghib, 2011).

4.3.2 Adhésion à l’Union Européenne : sous quelles conditions

Avant d’entamer ce point, rappelons que la Roumanie a subi 50 ans de production

collective et est entrée, à peine 18 ans après la chute du dictateur communiste

Nicolae Ceausescu, dans l’Union Européenne.

En 2003, en vue de sa prochaine adhésion dans l’Union, la Roumanie a entamé

un plan de modernisation du secteur agricole grâce à des subventions (SAPARD).

Aujourd’hui, les agriculteurs roumains perçoivent toujours des aides dans un but

de modernisation via le PNDR, programme national de développement rural et le

FEADR, fonds européen agricole pour le développement rural (Record, 2011).

Le Programme national de développement rural pour la période 2007-2013, vise

seulement neuf pourcents des fermes (soit seize pourcents de la surface

cultivées) – vraisemblablement à cause d’un manque d’information – et vu les

conditions imposées, seulement un quart des fermes peuvent postuler (Knight,

2010).

D’un point de vue européen, ce PNDR finance des top-ups : de l’argent en plus

des RPUS (premier pilier) que les nouveaux membres sont autorisés à verser à

leurs agriculteurs. Une partie de ces top-ups vient du second pilier mais la majorité

de l’argent vient du budget national. L’Europe autorise la Roumanie à

subventionner les fermes à partir de 0,3 hectares, mais celle-ci a choisi d’opter

pour un hectare. Cela lui revient à une centaine d’euros par hectare, qu’elle a déjà

des difficultés à payer. 2,6 millions de ménages sont donc exclus des payements

directs, soit la moitié de la population agricole (Knight, 2010).

Les nouveaux membres ne bénéficient pas directement des mêmes aides que les

autres pays européens. La Roumanie recevait en 2007 25% de la somme des

aides de la PAC. Le pourcentage augmentait de 5% par année jusqu’en 2010 puis

de 10% jusqu’en 2016 pour atteindre le même niveau que les autres pays (aGter,

2012).

Afin de favoriser l’intégration dans l’Union Européenne, des lois sont également

entrées en vigueur.

La loi 247 (2005) qui est une réforme de la propriété visant à fluidifier le

marché et à amener un regroupement des terres.

Elle abolit le plafond maximal de 200 hectares et le droit de préemption prévu par

la loi du fermage. Elle ouvre la possibilité de louer des terres à des personnes

physiques et à des entreprises étrangères. Elle assouplit également l’obligation

de réaliser le cadastre. Celui-ci n’est plus obligatoire au moment des ventes qui

ont pour objectif le regroupement des parcelles et pour les bénéficiaires du

programme «Rente Viagère » (aGter, 2012).

Cela constitue un réel feu vert de la part de la Roumanie à l’agriculture industrielle.

La loi 71 (2011) qui est, en réalité, une annulation de la loi du fermage.

Celle-ci garantissait des contrats de location de minimum 5 ans. Le bail pouvait

être payé soit en produits, soit en argent (la référence étant le blé). Elle assurait

également le droit de préemption pour le locataire en cas de vente. Cette loi

ouvrait la location des terres uniquement aux citoyens roumains.

Le fermage est donc dès lors ouvert à des personnes et entreprises étrangères.

Cela explique le flux d’investisseurs et d’agriculteurs étrangers venus s’installer en

Roumanie (aGter, 2012).

Pour l’Union Européenne, accepter de s’étendre à l’Est voulait forcément dire :

une complexification du débat sur la programmation de la PAC. Elle doit

notamment prendre en compte l’hétérogénéité de la Roumanie et préparer un

nouveau budget (aGter, 2012).

L’émergence du modèle ouest-européen « d’exploitation familiale

professionnelle » intensive et de taille moyenne, a été beaucoup plus lente et

difficile que ce qui avait été prévu et souhaité. Ceci malgré l’important budget et

les outils ad hoc du deuxième pilier de la PAC (Pouliquen, 2011).

4.3.3 Conséquence sur l’agriculture roumaine

« Si on veut sortir d’une agriculture de subsistance et que les zones rurales

deviennent des zones de développement économique, il ne faut pas uniquement

laisser la place à des énormes exploitations agricoles, même si elles seront

immanquablement présentes. Il faut qu’à côté de cela, il y ait un autre modèle qui

fasse vivre les paysans dans les campagnes. Et il faut des fonds publiques pour

cela » (Tarabella, 2013).

La Roumanie est aujourd’hui profondément affectée par les décisions prises par

l’Union. Ce que l’Europe occidentale a en tête quand elle dit vouloir préserver

l’agriculture familiale n’a rien à voir avec la réalité du terrain à l’Est. « La PAC n’a

jamais été créée pour pouvoir supporter le poids de la petite agriculture

roumaine » (Choplin, 2013).

Aujourd’hui, même si la Roumanie s’est ouverte au marché mondial, ce sont les

mêmes problèmes qui existaient pendant la période communiste qui touchent les

agriculteurs. Or, ces problèmes affectent principalement les petits paysans. La

raison principale en est que la Roumanie n’a jamais vraiment eu le temps de

développer un véritable modèle agricole. Leur quotidien n’est que lutte pour

s’adapter au nouvel environnement (Knight, 2010).

Toujours lié à cette période postcommuniste, l’administration est lente et reste très

bureaucratique. Quantité d’actions du gouvernement roumain ne font que diminuer

la confiance que les paysans lui accordent. Pour exemple, certains subsides ont

été payés seulement en mai 2010 alors que le gouvernement les avait promis

pour début 2009 (Knight, 2010).

Pour accéder aux aides européennes, il y a une véritable tendance à

l’élargissement des structures.

En 2010, il y avait quinze pourcents de moins d’exploitation qu’en 2003 mais

seulement cinq pourcents de moins de la surface agricole utilisée (SAU) (aGter,

2012).

Le gouvernement semble donc s’être détourné des soucis des petits exploitants

pour se conformer au modèle de la rentabilisation européenne. Puisque ce qui

freine le développement des grandes exploitations en Roumanie, c’est la

parcellisation excessive des terres24, le ministère de l’agriculture travaille sur un

projet de rachat des petites parcelles pour pouvoir constituer des plus grandes

surfaces (Lepetitjournal, 2011).

Ces idées productivistes de la PAC, du gouvernement roumain et celles qui sont

prônées par certains économistes vont totalement à l’encontre de la préservation

de la paysannerie. Valeriu Tabara, l’ancien ministre roumain de l’agriculture,

affirmait en 2011 qu’il était important de réunir ces petits territoires afin qu’ils

puissent être exploité au mieux (Lepetitjournal, 2011).

Mais à qui profite réellement ce rassemblement ?

Aujourd’hui, même si l’Europe et le gouvernement roumain tente de la recadrer

dans le modèle capitaliste, l’agriculture roumaine n’a pas réussi à faire réellement

émerger un modèle. De plus, elle reste toujours fortement influencée par des

facteurs conjoncturels (aGter, 2012).

Plus de 85% des Roumains qui pratiquent une agriculture de subsistance n’ont

aucun plan de commercialisation et le gouvernement ne fait rien pour les aider

(Knight, 2010 pp.23).

On peut également mettre en avant des chiffres significatifs. Depuis son entrée

dans l’Union, la part de la population agricole âgée entre 15 et 24 ans est passée

de 52,5% en 2002 à 41,4% en 2008 (Knight, 2010 pp.23).

Si le deuxième pilier, comme nous allons le voir, offre des aides aux jeunes qui

démarrent, le manque d’information empêche ceux-ci de profiter et cet abandon

du gouvernement vis de l’agriculture familiale ne les pousse pas dans cette voie.

24 �

Le communisme a également sa part de responsabilité puisqu’il a laissé d’énormes

domaines qui profitent directement des subventions de la PAC (17%).

4.3.3.1 Comment les piliers favorisent les grosses fermes

Le premier pilier, qui s’occupe des aides directes, favorise les grandes surfaces

puisque nous sommes dans un système de paiement simplifié à l’hectare.

Le deuxième pilier, plus important en Roumanie25, s’adresse normalement d’autres

catégories de fermiers. Pourtant, nous sommes confrontés dans ce domaine à un

réel problème de mise en place de structures plus indépendantes. Il n’y a aucun

lien entre les petits agriculteurs et les centres de décision. Ceux-ci n’ont aucun

accès à l’information. S’ils sont en mesure d’accéder à des aides, ils n’en sont la

plupart du temps pas du tout informés. Le deuxième pilier n’est manifestement pas

conçu pour les paysans roumains (aGter, 2012).

Les paysans roumains ont toujours eu d’énormes difficultés à accéder à des

crédits. Aujourd’hui, c’est pire que jamais. Les possibilités de développement

agricole sont maintenant aux mains des étrangers. Ils arrivent avec des prêts

accordés par les banques de leurs pays respectifs et peuvent ainsi plus facilement

développer leurs activités. Une autre preuve des failles du deuxième pilier (et

également une preuve que la Roumanie n’était peut-être pas prête, au moins du

point de vue de l’agriculture, à s’ouvrir à l’Union), c’est qu’il nécessite 50% de

financement garantis à partir des banques des pays. Le manque d’établissement

de crédit en Roumanie le met donc largement en péril ! (Knight, 2010).

En 2008, 0.2% des fermes ont reçu 30% de l’argent des subsides et si on inclut

les fermes entre 100 et 500 hectares, soit 0.9% des fermes, on monte carrément

à 51% des subsides de la PAC pour la Roumanie. Il faut bien sûr aussi prendre

en compte le fait que seulement 30% des fermes roumaines pourraient recevoir

ces subsides. Et surtout, pour comprendre à quel point la majorité du « pactole »

est destinée aux industriels, de toutes les fermes qui reçoivent de l’argent en

Roumanie, 80% obtiennent à peine entre 98 et 490 euros ! La PAC soutient donc

un système qui existait déjà et le fait perdurer en l’amplifiant. Cette remarque est

généralisable à toute l’Europe mais la répartition des subsides n’y est pas aussi

contrastée qu’en Roumanie. En Europe occidentale, 50% des bénéficiaires

reçoivent 3% des subsides totaux (Knight, 2010).

25 �

Il représentait plus de 70% du budget de la PAC pour la Roumanie en 2009 ( DG Agri, 2009)

Il y a une réelle incapacité du gouvernement à administrer les fonds et à mettre en

œuvre la politique. Comment les agriculteurs pourraient-ils juger une PAC qui n’a

pas vraiment été mise en action ?

4.3.3.2 Mais où est la jeunesse ?

En plus d’avoir une agriculture très duale, la Roumanie a pour caractéristique

majeure la vieillesse de ses agriculteurs. Il y a en effet une très faible implication

des jeunes dans ce domaine. Beaucoup de retraités, par contre, y démarrent des

activités agricoles. Cela constitue pour eux un complément de revenus. Seize

pourcents des agriculteurs ont plus de 65 ans et 20% ont entre 55 et 64 ans. Le

problème majeur c’est que l’agriculture ne garantit pas un revenu stable pour ses

jeunes. La Roumanie est un pays très sensible aux évènements conjoncturels. En

2002, les jeunes entre 15 et 24 ans constituaient 52,5% de la population rurale. En

2008, on tombait à seulement 41,4% alors que le nombre de personnes âgées,

entre 55 et 64 ans, augmentait de quasiment 3%.Pourtant, le deuxième pilier de la

PAC accorde des aides à la jeunesse qui souhaite démarrer une exploitation

agricole. Le plus souvent les jeunes ne sont pas au courant de cette possibilité et

s’ils le sont et que la ferme leur a été léguée (sur le papier), c’est la plupart du

temps les ainés qui s’occupent toujours de la ferme et touchent les aides (Knight,

2010, p.23).

4.3.3.3 Changement des habitudes alimentaires

La Roumanie européanisée est confrontée à un autre problème : le changement

des habitudes alimentaires. Le pays est totalement dépendant de l’étranger pour

obtenir des produits finis. En 2005, elle exportait 59% de ses produits agricoles et

importait 68% de produits agro-alimentaires finis! Il faudrait donc soit que la

Roumanie commence elle-même à transformer ses produits soit qu’elle revienne à

des habitudes alimentaires plus « brute » et « locale ». En 2009, la Roumanie était

le 5ème plus gros producteur européen et pourtant importait toujours pour 3,7

milliards de produits agro-alimentaires (Knight, 2010, p.26).

Marc Tarabella, député européen réagit à ce sujet en soulignant : « Si tout va aux

grands groupes étrangers, je crains pour la paysannerie. Les Roumains devraient

développer une industrie agro-alimentaire ou un artisanat de transformation de

ses produits. Les Roumains pourraient valoriser et vendre leur produit. »

4.3.4 Développement de l’agriculture industrielle

(…) les donneurs d’ordres des agriculteurs, les façonniers de la terre, ce sont

désormais les industriels. Ils vont jusqu’à imposer les variétés qui leur

conviennent. Le libre arbitre de l’agriculteur dans tout cela ? Il n’existe plus. Le

paysan n’est plus qu’un technicien, lourdement endetté, à la solde des

industriels, avec lesquels il se doit d’être lié puisque ces derniers s’engagent à lui

acheter une partie importante de sa récolte chaque année (Saporta, 2010,

p.149).

Avant toute chose, il serait bon de préciser que la production destinée à

l’autoconsommation en Roumanie n’est pas qu’ « alimentaire», elle est un réel

moyen de consolider le tissu social et familial. Si cette production de subsistance

ne représente en rien un levier commercial, c’est aussi une manière de s’assurer

de la qualité de la nourriture qu’on mange.

Nous l’avons déjà vu plus tôt mais il est bon de le répéter puisque cela constitue

l’élément essentiel de notre reportage : l’agriculture roumaine est très duale. D’un

côté, il y a de très petites exploitations et de l’autre, des structures de productions

de plus en plus importantes. Cette confrontation est l’héritage de la collectivisation

et des politiques appliquées depuis la chute du Mur.

Aujourd’hui, ce sont particulièrement d’énormes exploitations de céréales et

d’oléagineux qui se développent en Roumanie.

Cette évolution de la taille des exploitations reflète les pensées d’Isabelle

Saporta : « Les petits agriculteurs disparaissent au profit de ceux qui sont

capables de payer des appareils énormes et des mises aux normes drastiques »

(Saporta, 2010, p.151).

Aujourd’hui, plus de la moitié des exploitations sont en dessous d’un hectare et

pourtant, elles occupent ensembles seulement 5% de la surface agricole utilisée

(SAU) (aGter, 2012).

Par contre, 48,8% de la surface agricole utilisée (SAU) est occupée par des

exploitations supérieures à cent hectares et par seulement 0,35% des

exploitations. (aGter, 2012).

Alain Pouliquen, agronome, économiste et directeur de l'Institut national de la

recherche agronomique (INRA), répondait en mars 2011 à une interview pour

agrobioscience.org :

Je pense ici à ce qui s’est passé notamment en République tchèque et en

Hongrie. Ces nouvelles grandes exploitations ont eu tendance à délaisser les

secteurs de l’élevage et des cultures maraîchères et fruitières pour se spécialiser

en cultures de céréales et oléagineux. D’un côté, ces dernières sont plus

rentables que les exploitations sociétaires d’origine, restées partiellement fidèles

à l’ancienne polyculture-élevage, mais de l’autre, elles génèrent beaucoup moins

d’emplois par hectare. Cette tendance a été renforcée par l’accès aux aides de la

PAC, en particulier le système du paiement unique à l’hectare. Ces aides ont

certes accéléré la nécessaire recapitalisation de ces grandes exploitations, donc

leurs gains de productivité. Mais, au-delà de certaines surfaces éligibles, non

seulement elles alimentent des rentes improductives, mais elles soutiennent des

spécialisations défavorables à l’emploi comme à la valeur ajoutée agricole.

« Le secteur évolue comme cela. A partir du moment où il y a des gains de

productivités, il y aura nécessairement moins de paysans dans les zones

rurales », explique quant à lui Marc Tarabella, eurodéputé en charge de

l’agriculture. « La perte d’emploi dans l’agriculture est inéluctable. Il n’y aura plus

30% de paysans de Roumanie en 2025, c’est certain. Mais il faut valoriser la

production roumaine et créer de l’emploi dans les zones rurales », ajoute-t-il avec

ferveur.

Cette entrée dans l’Union Européenne constitue une véritable invitation au

business agricole et surtout une opportunité pour les multinationales étrangères à

venir s’installer dans les milieux ruraux roumains. Cela va causer une véritable

destruction du mode de vie et de la culture roumaine.

« Il y aura d’office des grands groupes étrangers. Le mouvement est déjà

enclenché, ils ont déjà commencé à acheter des terres. Aux mains de qui sera

l’agriculture roumaine ? De celles des petits paysans ou des grosses sociétés

étrangères ? » questionne le député européen.

Le gouvernement sait pertinemment qu’une grosse partie des subsides de la

Politique Agricole Commune va aux industries. Il pousse d’ailleurs lui-même vers

la sortie les petits fermiers en se souciant peu de leur futur.

Dans le documentaire Roumanie : éleveurs porcins à terre, on est confronté aux

conséquences pour les paysans de l’arrivée de grands groupes étrangers sur le

territoire roumain. En 2004, Smithfield, un géant de l’industrie porcine est arrivé et

a bouleversé complètement le paysage agricole roumain. Après s’être implanté au

Mexique et en Pologne, cette industrie américaine a décidé de venir importer ses

méthodes industrielles en Roumanie. En 2008, à peine quatre ans plus tard, neuf

éleveurs locaux sur dix avaient déjà cessé toute activité. Si certains éleveurs se

battent pour survivre, ils se retrouvent souvent condamnés à une économie de

subsistance quasi-illégale puisqu’ils ont bien du mal à se mettre aux normes

sanitaires européennes. Dans le cadre de la PAC, Smithfield, le leader sur le

marché français de la charcuterie, a perçu 823 000 euros entre 2008 et 2011

(Camus, 2013).

Patrick Marcolini, docteur en philosophie et chercheur, écrit en 2007, dans sa

Lettre d’un Français aux Roumains qu’on empêche de traire leurs vaches à la

main :

Interdiction pour les paysans roumains de vendre leur lait trait à la main. Pour

toutes celles et ceux qui comptent vendre leur production laitière, ce règlement

de l’Union européenne signifie l’achat obligatoire de machines à traire ; c’est-à-

dire la disparition, à court ou moyen terme, de tous les paysans pauvres, qui ne

pourront pas assumer le coût de cet équipement et de son entretien. De

plus, l’application de ce règlement européen représentera un pas supplémentaire

vers l’alignement de la Roumanie sur les normes de la modernité qui prévalent à

l’Ouest.

Le résultat : de grandes exploitations mécanisées et spécialisées. Alors qu’une

ferme fournissait localement non seulement du lait, mais aussi du beurre, du

fromage et de la crème fraîche (sans compter les légumes, les œufs et la

viande), ces usines agricoles que seront désormais devenues les fermes ne

produiront plus que du lait, en abondance et revendu à des firmes qui se

chargeront de le transformer en une multitude de produits dérivés.

Cette mesure, qui interdit la traite manuelle des vaches, doit être replacée dans

le cadre plus général de l’industrialisation de l’agriculture, avec ses

conséquences sur le milieu naturel et sur le plan humain. Cette industrialisation

entraîne en effet l’appauvrissement des terres par leur exploitation intensive,

l’empoisonnement de l’eau, la disparition des espèces animales et végétales

considérées comme non exploitables ou non rentables, et enfin la transformation

ravageuse des paysages et des conditions climatiques, contribuant ainsi à créer

ces catastrophes que l’on présente abusivement comme « naturelles » :

tempêtes, sécheresses, inondations, dérèglement du cycle des saisons, etc. Sur

le plan humain, l’industrialisation de l’agriculture ne suppose rien moins que

l’éradication programmée de la civilisation paysanne. Elle suppose en effet la

ruine de milliers de paysan-ne-s, réduit-e-s à la misère, incapables de

moderniser leur exploitation et de vivre de la vente de leur propre production sur

le marché moderne. Elle suppose un exode rural massif, l’individualisation des

rapports sociaux et la dissolution des liens de parenté. Elle suppose la

désertification des campagnes…

Méfiez-vous de cette fascination pour l’Europe, de la fierté d’être Européen-ne-s

qui cache mal cette « volonté anxieuse de s’uniformiser » que Pasolini reprochait

aux Italiens de son temps, fraîchement convertis à l’idéologie européenne et à la

société de consommation.

4.3.5 Afflux d’agriculteurs étrangers en Roumanie

La Roumanie représente un véritable petit paradis sur terre pour les agriculteurs

étrangers. « Pour faire ce que j’ai fait en Roumanie en trois ans, il m’aurait fallu

trois générations en France » a déclaré Maxime Laurent, un agriculteur français

de 22 ans au journal La Croix (Mercier, 2012).

Le site internet, lepetitjournal.com rapporte les propos d’un jeune fermier suisse

venu s’installer en Roumanie : « En Suisse, un hectare de terre peut coûter

jusqu'à 80.000 euros, alors qu'ici, en Roumanie, nous avons acheté l'hectare entre

2.000 et 3.000 euros. En Suisse, tout est déjà fait, il n’y a plus de place pour les

jeunes. Ici, nous avons la possibilité de construire quelque chose en partant de

zéro ».

Le site internet rapporte également les propos d’un italien venu créer une

entreprise de fourrage agricole il y dix ans à Timisoara : « Beaucoup

d’investisseurs ont eu accès aux programmes des fonds européens. Cela leur a

permis d’acheter de nombreuses machines agricoles et de construire des silos où

sont entreposées leurs céréales. La production est ensuite exportée dans toute

l’Europe ».

Grâce aux fermiers venus d’Europe occidentale, la Roumanie a connu une

croissance de onze pourcents en 2011 (Bran, 2012b).

Actuellement pourtant, seules des sociétés enregistrées en Roumanie ont le droit

d’acquérir des terrains agricoles. Les chiffres montrent une toute autre réalité

puisque 800. 000 hectares sur neuf millions de terres cultivables étaient détenus

par des investisseurs étrangers en 2012. Cela représente quasiment neuf

pourcents. Ces derniers passent simplement par l’intermédiaire de société

roumaine. D’ici 2014, les choses pourraient encore se faire plus facilement et

s’accélérer, puisqu’à son entrée dans l’Union en 2007, la Roumanie s’est engagée

à ouvrir son marché foncier d’ici 2014 (Albert, 2012).

Mieux encore, en 2014, la Roumanie sera encore plus attirante car il y aura une

répartition plus égalitaire des subventions à l’hectare (entre les « nouveaux pays »

de l’Union et les plus anciens)26.

Certaines régions comme le Banat voyaient déjà en 2011 plus de 80% de ses

terrains agricoles entre les mains d’étrangers (lepetitjournal, 2011).

Les autorités aimeraient pourtant reprendre la situation en main en diminuant les

possibilités d’achat des territoires par les étrangers. Le ministre de l’agriculture,

Daniel Constantin, a parfaitement conscience du manque de capitaux des

agriculteurs roumains face à leurs compatriotes européens. Il voudrait imposer un

plafond de superficie afin de protéger les agriculteurs roumains (Belga, 2012).

En mars 2013, le gouvernement dévoilait une partie de cette nouvelle loi en

expliquant qu’il souhaitait imposer comme condition que les acheteurs soient eux-

mêmes agriculteurs afin de protéger les agriculteurs locaux (lepetitjournal, 2013).

D’autant plus que plus de 90% des achats en Roumanie se font uniquement dans

un but spéculatif (aGter, 2012).

Pourtant, même si depuis quelques années, les Roumains commencent à vendre,

la location reste tout de même entre les mains des habitants du pays. Ceux-ci

gardent un très fort attachement à la terre car elle est une valeur sûre. Assez

« amusant » puisque pour une fois, ce sont donc les petits qui louent aux grands.

Mais si les Roumains acceptent tout de même de vendre à des investisseurs

étrangers c’est qu’ils sont prêts à mettre le prix fort (en tout cas du point de vue

des Roumains). Que ça soit pour louer ou vendre, ils préfèrent traiter avec des

étrangers qu’ils estiment beaucoup plus sûrs que les paysans de leur propre pays.

Les contrats avec les sociétés étrangères sont plus fiables. Cela ne fait que

favoriser encore une fois la gestion de grande surface par un nombre de

personnes de plus en plus petit (aGter, 2012).

Nous pourrions conclure ce point en rappelant que pour les étrangers, la

Roumanie constitue donc un territoire doublement rentable. Premièrement, lors

de l’achat de terres qui se fait à des prix bien plus bas qu’en Europe occidentale.

26 �

Voire RPU et RPUS plus haut dans le texte

Deuxièmement, par le simple fait que la plupart de ces investisseurs ont accès

aux subsides européens qui leur permettent d’acheter des machines agricoles.

Certains sites internet comme « 3D conseil », se sont même lancé dans la

consultance pour les entrepreneurs agricoles qui voudraient aller s’installer en

Roumanie.

4.4 Avenir de l'agriculture en Roumanie

Comme vu dans les points précédents, la PAC 2014-2020 restera dans la lignée

de celle de 2007-2013, c'est à dire la volonté de développement d'une agriculture

industrielle dans une logique de compétitivité maximale au détriment des plus

petits exploitants.

La volonté de la Roumanie est d'aller vers « une diminution progressive et

acceptable du nombre d'actifs agricoles » (Ghib, 2009b, p.37).

Au mois d'avril 2012, le prix du lopin de terre en Roumanie s’élevait à 2000 euros

l'hectare en moyenne. Un prix défiant toute concurrence en Europe. Ainsi de

nombreux agriculteurs étrangers achetèrent en masse ces terres bon marché à

condition de créer une société dans le pays. A partir de 2014, la nouvelle PAC

supprimerait cette obligation. Ainsi, n'importe quel citoyen européen pourra

acheter directement des terres. Il y a donc fort à parier que les prix par hectares

augmenteront (Bran 2012).

4.4.1 La Roumanie nouveau grenier de l'Europe ?

L'Europe est actuellement dépendante de l'Amérique de Sud pour ses

approvisionnements en céréales. Dans un contexte de crise mondiale, 2013 sera

une année très importante car il pourrait se jouer une lutte pour les matières

premières agricoles. Cela pourrait être une opportunité pour la Roumanie qui a «

le potentiel de produire une proportion importante de la demande européenne en

produits agricoles » et pourrait donc ne plus être dépendante d'un autre continent

(Presseurop).

4.4.2 Une agriculture de subsistance pour les plus petits exploitants

« Capitalisme rime souvent avec appauvrissement et creusement du fossé entre

riches et pauvres » (Barthou, 2008, p.101).

Dans un marché où la logique de la compétitivité prime, les petits exploitants

agricoles sont laissés pour compte. Les possibilités de reconversion ne sont pas

évidentes. La mobilité professionnelle des personnes du rural vers l'urbain « serait

toujours entravée par le prix du logement, des transports, de l'accès à l'information

et de l'accès à la formation » (Ghib, 2009, p.37).

Dans ce contexte, les agriculteurs qui ne peuvent s'adapter aux normes du

marché ont développé des mécanismes de survie (Barthou, 2008, 105).

En Roumanie, l'économie de « débrouille » est très facilement observable. Les

activités de subsistance sont un rempart pour de nombreuses familles afin de se

nourrir en évitant de recourir au marché. Ce type d'activité permet « à de

nombreuses familles roumaines de résister aux difficultés et surtout de manger à

leur faim. » (Barthou, 2008, p.106)

« En Roumanie, dans le Programme National de Développement Rural (PNDR),

les exploitations dont la valeur économique est inférieur à 2 UDE (unité de mesure

de l'activité économique égale à 1200 euros de marge brute standard) sont

classées dans la catégorie des exploitations de subsistance. Elles représentent

environ 45% de la superficie agricole utilisée et 91% (3,8 millions) du nombre total

des exploitations. » (Page, 2010, p.74)

L'activité d'une agriculture de subsistance est souvent couplée avec un travail à

temps partiel.

Les exploitations de subsistance sont confrontées à de nombreux problèmes

(Page, 2010, p.78) :

« absence de débouchés pour leurs produits, qui est notamment le résultat

du faible coût des importations et des règles strictes concernant la vente

informelle de la production des petits exploitants ».

« difficultés d'accès aux mesures de soutien destinées à accroitre la

compétitivité et la diversification ».

« les règles d'hygiène ont porté préjudice aux petits exploitants locaux en

imposant des normes irréalistes ».

« les migrations économiques ont entraîné un manque de main d'œuvre

saisonnière dans les villages ».

« la diversification des revenus est sous-développée du fait du manque

d'opportunités ».

L'Europe désire des exploitations toujours plus grandes et compétitives.

Seulement, ces petites exploitations, contrairement aux grandes, sont «

importantes dans l'approvisionnement de toute une série de biens publics vitaux,

disposant d'une grande valeur économique. Qualité de l'eau, prévention des

inondations, résistance aux effets des changements climatiques, sécurité de l'eau

et alimentaire. » (Page, 2010, p.86)

Les petites exploitations roumaines peuvent donner à la Roumanie une image

régionale « proche de la nature » (Page, 2010, p.76)

Les zones rurales de Roumanie offrent des paysages uniques. La conservation

des traditions peut être bénéfique pour le tourisme. Seulement, « le manque de

centres d'informations locaux capables de promouvoir le tourisme au niveau local

fait obstacle à ce développement. » (Page, 2010, p.78)

CONCLUSION

Des changements profonds sont à l’œuvre dans les campagnes roumaines et

ceux-ci s’accélèrent avec le temps. Le dualisme de l’agriculture, hérité de la

période difficile de transition post-communiste, a été renforcé par le système de

paiement de la Politique Agricole Commune dès 2004 et par les premières aides

de pré-adhésion. La catégorie des très grandes exploitations s’est fortement

développée. Des sociétés roumaines se sont constituées sur le terreau des

anciennes fermes collectives et ont su attirer des capitaux étrangers pour se

moderniser à outrance tandis que d’autres groupes étrangers se sont implantés

par l’achat ou la location de terres, modifiant considérablement le paysage

agricole roumain. Dans ce contexte, la petite paysannerie roumaine a prouvé

qu’elle avait une forte faculté de résistance. Attachée à sa terre, elle se replie sur-

elle-même pour continuer à exister. Elle s’enfonce alors un peu plus dans une

agriculture de subsistance qui l’exclut totalement, et pour longtemps, du marché,

des aides et de tout espoir de modernisation.

La Roumanie vit donc bien sa transition entre une agriculture traditionnelle et une

agriculture industrielle dans un pays ouvert à la concurrence européenne et

mondiale. Mais quel est le prix d’une telle transition, dans l’Europe d’aujourd’hui ?

Des millions d’exploitations disparaissent, laissant leurs paysans grossir les rangs

des chômeurs dans les villes. Avec leur départ, le tissu social des campagnes se

désagrège. Ceux qui restent, et ils sont encore très nombreux, restent cantonnés

à une agriculture de subsistance et à une précarité qui empêchent un véritable

développement rural. A côté d’eux, se développe l’agribusiness, la production

agricole industrialisée à très grande échelle, qui n’est ni génératrice d’emploi

agricole, ni d’autres activités, réduisant ainsi les campagnes à n’être que

d’immenses monocultures. C’est de plus un modèle porteur de problèmes

environnementaux importants.

La restructuration de l’agriculture roumaine est inévitable. Et qui dit modernisation,

dit forcément pertes d’emplois. Cependant, il n’existe pas qu’une seule manière

d’opérer ces changements et ils pourraient donc être radicalement différents. Les

transformations en cours sont déterminées à la fois par la Politique Agricole

Commune, et ses différentes réformes, et par les règles du commerce

international. Le système de répartition des aides de la PAC, que ce soit les

paiements directs ou l’aide au développement rural, privilégie les plus grandes

exploitations, jugées comme les seules viables sur le marché. Les négociations

internationales sur le commerce ont accru l’ouverture de l’agriculture et donc la

concurrence mondiale et ont contraint l’Europe à réformer la PAC de manière à la

faire accepter par ses partenaires à l’OMC. De plus, le modèle agro-industriel

domine largement le système alimentaire mondial et, en amont de l’agriculture, les

sociétés d’agrofourniture imposent leurs vues. Les industriels définissent donc

l’avenir de l’agriculture, et la Roumanie ne fait pas exception.

En effet, la situation de l’agriculture roumaine est façonnée par des rapports de

force. Et ceux-ci penchent clairement en faveur des grandes exploitations. Avec

des résultats en termes de production et d’économies d’échelle indéniables et

soutenues par les industriels du secteur, elles peuvent se présenter aux autorités

européennes distributrices d’aides comme les plus méritantes et défendre un

système de répartition en leur faveur. Ainsi, ces exploitations sont triplement

gagnantes : elles produisent à moindre coût, achètent ou louent des terrains à des

prix bien moins élevés que dans le reste de l’Europe et reçoivent des subventions

de l’Union Européenne. Face à tout cela, les plus petites exploitations ne peuvent

qu’adopter une stratégie de survie. Elles sont pourtant celles qui répondent le plus

aux attentes de l’Union Européenne en matière d’emploi, de développement rural

ou de respect de l’environnement.

La deuxième moitié de l’année 2013 et l’année 2014 s’annoncent comme des

moments clés pour l’agriculture roumaine. Les négociations de réforme de la PAC

vont se poursuivre entre le parlement européen, la Commission et le Conseil. La

Roumanie devrait recevoir le même montant d’aide à l’hectare que les pays

d’Europe de l’Ouest ; le marché foncier roumain sera bientôt totalement libéralisé

et le nouveau directeur général de l’OMC (le Brésilien Roberto Azevedo, issu du

pays à la pointe de la lutte pour la libéralisation totale de l’agriculture mondiale) a

annoncé vouloir relancer les négociations commerciales internationales, y compris

concernant l’agriculture évidemment. Si l’agriculture roumaine se trouve bel et

bien à un nouveau tournant, il semble que celui-ci tourne une fois de plus dans la

mauvaise direction.

Glossaire

DG de l’Agriculture et du Développement Rural: Il est placé sous sur l’autorité

de Dacian Ciolos, le commissaire européen à l’agriculture. Il compte 1000

employés. Son directeur général est José Manuel Silva Rodriguez.

FEOGA : Fonds européen d’orientation et de garantie agricoles. Il finançait le

soutien des marchés et la section "Orientation" le développement rural. Il n’existe

plus depuis 2007.

FEAGA : Fonds européen agricole de garantie (remplace le FEOGA)

(financement du premier pilier)

FEADER : Fonds européen agricole pour le développement rural (remplace le

FEOGA) (financement du deuxième pilier)

PNDR : Plan national pour le développement rural. L’union européenne accepte

que les gouvernements nationaux ajoute de l’argent au SAPARD. Ce sont des top-

ups.

RPU (SFP) : Régime de Paiement Unique. Ce sont des aides découplées de la

production. Ce système consiste en des aides par hectare mais avec des

dispositions spéciales, il comporte trois variantes en fonction des pays : modèle

historique, régional ou hybride.

RPUS (SAPS) : Régime de Paiement Unique à la Surface. C’est le modèle

simplifié du RPU pour les nouveaux arrivants. C’est-à-dire une aide par hectare.

SAPARD : Instrument agricole de préadhésion ; un cadre d'aide communautaire à

l'agriculture et au développement rural durable destiné aux pays candidats

d'Europe centrale et orientale (PECO) durant le processus de préadhésion pour la

période 2000 - 2006. Il vise à résoudre les problèmes d'adaptation à long terme du

secteur agricole et des zones rurales. Il constitue un soutien financier à la mise en

œuvre de l'acquis communautaire en matière de politique agricole commune et de

politiques connexes. (Europa.eu, 2007)

Bibliographie

Albert, C. avec Belga (2012, 15 octobre). La Roumanie veut limiter l'achat de terres

agricoles par des étrangers. Consulté le 1er avril 2013 du site http://www.7sur7.be/ :

http://www.7sur7.be/7s7/fr/2765/Environnement/article/detail/1517586/2012/10/15/La

-Roumanie-veut-limiter-l-achat-de-terres-agricoles-par-des-etrangers.dhtml.

aGter, secteur études de l’ASP (2012). Quelle évolution des structures agraires

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Amblard, L. et Colin, J.P. (2006, mai-juin). Dimension organisationnelle et

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Table des matières

Le tournant de l’agriculture roumaine ....................................................................................................2

INTRODUCTION ........................................................................................................................................2

Définitions ................................................................................................................................................3

1. L’AGRICULTURE DANS LA MONDIALISATION .........................................................................................3

1.1Taille du marché agricole mondial ...................................................................................................4

1.2Tendances des marchés agricoles et alimentaires ..........................................................................4

1.3Ouverture internationale de l’agriculture .......................................................................................4

1.4Structure du marché agricole mondial ............................................................................................5

1.4.1 Principaux flux de produits agricoles et alimentaires..............................................................6

1.4.2 Rôle de la demande mondiale et son évolution ......................................................................7

1.4.3 Rôle des marchés à termes et de la spéculation financière ....................................................7

1.4.4 Rôle des multinationales dans le secteur de l’agroalimentaire et de l’agrofourniture ...........7

1.5Les discussions sur le commerce agricole international .................................................................7

1.5.1 Le dossier agricole au sein de l’OMC .......................................................................................8

1.5.2 Etat de la protection et du soutien à l’agriculture dans le monde ..........................................8

2. LA PAC ..................................................................................................................................................9

2.1 Qu’est ce que la PAC en bref? .........................................................................................................9

2.2 Historique .......................................................................................................................................9

2.2.1 La naissance de la PAC .............................................................................................................9

2.2.2 Les différentes réformes .........................................................................................................9

2.2.3 L’élargissement .................................................................................................................... 10

2.2 Différence de traitement dans le premier pilier .......................................................................... 10

2.4 Buts et principes de la PAC ......................................................................................................... 11

2.5 Les outils de la PAC ...................................................................................................................... 12

2.6 Budget et bénéficiaire ................................................................................................................ 12

2.7 Les institutions impliquées et leurs rôles dans la réforme de la PAC .......................................... 13

2.8 Limites de la PAC .......................................................................................................................... 14

2.9 Réforme de la PAC 2014-2020 ..................................................................................................... 15

2.9.1 Critiques de cette réforme (Knops, 2012) ............................................................................ 16

2.9.2 Rôle des lobbys, qui est gagnant ? (de Lacour, 2013) ........................................................... 16

3. EVOLUTION DE L’AGRICULTURE EN EUROPE ..................................................................................... 17

3.1 Mutations de l’emploi agricole en Europe .................................................................................. 17

3.2 Evolution du nombre d’exploitations dans les pays de l’Union européenne .............................. 17

3.3 Transition agraire : l’adaptation des Nouveaux Etats membres (NEM) de l’UE .......................... 17

3.4 Compétitivité de l’agriculture européenne : bilan ...................................................................... 18

4. LE CAS ROUMAIN ............................................................................................................................... 18

4.1 Description et statistiques .......................................................................................................... 18

4.1.1 Première approche de la Roumanie ..................................................................................... 18

4.1.4 Typologie des exploitations agricoles roumaines (Villemin, Andress et Montaigne, 2011) . 20

4.2 Evolution de la culture paysanne roumaine : avant 2007 .......................................................... 21

4.2.1 Fin de la domination ottomane et avènement du Vieux Royaume ...................................... 21

4.2.2 La Grande Roumanie et l’entre-deux guerres ...................................................................... 21

4.2.3 La période communiste ........................................................................................................ 22

4.2.4 La chute du système collectiviste ......................................................................................... 22

4.3 Evolution de la culture paysanne roumaine : après 2007 ........................................................... 23

4.3.1 Production ........................................................................................................................... 23

4.3.2 Adhésion à l’Union Européenne : sous quelles conditions .................................................. 23

4.3.3 Conséquence sur l’agriculture roumaine .............................................................................. 24

4.3.4 Développement de l’agriculture industrielle ........................................................................ 25

4.3.5 Afflux d’agriculteurs étrangers en Roumanie ....................................................................... 26

4.4 Avenir de l'agriculture en Roumanie ........................................................................................... 27

4.4.1 La Roumanie nouveau grenier de l'Europe ? ........................................................................ 27

4.4.2 Une agriculture de subsistance pour les plus petits exploitants .......................................... 27

CONCLUSION ........................................................................................................................................ 28

Glossaire ................................................................................................................................................ 28

Bibliographie ......................................................................................................................................... 29

Etat de la question