La star-personnage dans les films des années '30 et '40 à Hollywood
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Si cela est possible, comment la narration peut garder sa réalité fictionnelle même si elle est
corrompue par la star dans les films des années '30 et '40 à Hollywood ?
Mennuti Maria Sabatina.
Si cela est possible, comment la narration peut garder sa réalité fictionnelle même si influencée par
la star?
Dans cet essai on va chercher de comprendre si, pendant les années '30 et le début des années '40
dans un milieu industriel tel que Hollywood, les stars influençaient les personnages qu’ils jouaient.
Comment on le verra, les stars hollywoodiennes de cette période vivaient dans un contexte
industriel de production de masse. Le but n’était pas la mise en valeur des capacités de jeu de la star
mais, plutôt la mise en scène de la vie publique de la star.
Les studios, la presse, la radio concentraient toute leur production autour des stars et de leur relation
avec les spectateurs. Le but était de faire de la vedette un mythe mais en même temps de la rendre
'humaine' afin de garder un espoir pour le spectateur d’atteindre la vie de star, d’être comme elle et
de rêver une vie extraordinaire comme la sienne.
Selon la pensée de John Ellis, la star se complétait qu’aux travers d’un constat, l’état de ordinary et
extraordinary. La star apparaît ordinaire face au public, dans les revues et à travers les publicités
tandis qu’elle reste extraordinaire dans sa performance. La relation entre les deux faisait de la star
un héros.
On peut ajouter que la star était également le produit de la relation entre l'acteur et le personnage.
Hollywood avait pour but de renouveler de façon constante cette liaison pour créer ou intensifier
l’intérêt du public. On voit dans le texte l'exemple de Cary Grant et de Bette Davis dans leur rapport
différent aux personnages joués.
La narration, qui naissait et se développait dans un tel système industriel, réglait les équilibres entre
la star et le personnage, c'est-à-dire qu’il y avait une compensation entre le rôle que la star avait
dans la société et les rôles qu'elle jouait. Cela permettait d'enrichir la vedette de nouvelles
particularités, face au public impatient d'avoir des nouvelles et de connaître n'importe quel
information sur elle. Par rapport à la variété de rôles joués et les personnages interprétés le public
créait une attente vis à vis de la star et un avis critique sur son interprétation. Par cette relation
naissait la fidélité du public à la vedette et au genre d'appartenance.
L'analyse des personnages, selon Alonge et Carluccio doit se baser sur trois éléments : l'histoire,
l’intrigue (l'ensemble des événements dans lesquels il est impliqué) et le jeu de l'acteur par rapport à
sa personnelle interprétation du personnage. Les trois éléments se complètent grâce aux choix du
réalisateur et à son style.
On cherche, alors de comprendre si cela est possible de scinder le personnage de la star et de
comprendre dans quels cas, s’ils existent, une complète distinction entre les deux s’opère.
La crise du 1929 créa, dans le peuple américain, un milieu de souffrance et de pauvreté. Rien de
nouveau pour les pauvres, ignorés par la presse jusqu'à cette période-là, ils deviennent le premier
exemple d'un Pays qui sombre dans une destruction économique. La situation devint tout à fait
dramatique pour les businessmen qui avaient représenté jusqu'à cette période, la figure la plus
importante et estimable de la société américaine (Dickstein 2009, p. 216-217).
Hollywood impliquée dans la crise, décida de s'occuper du bonheur du public à travers
l'entertainment.
Entre fin 1929 et 1934, c'est-à-dire entre le passage au sonores et l'approbation de la censure selon
le Code Hays, Hollywood subit des importants changements. Le passage au sonore amena un
renouveau d'acteurs, tandis que la censure obligea les studios à adapter les longs-métrages à des
règles strictes et condamna à l'oubli des stars comme Mae West qui avait crée sa fortune grâce au
rôle de la femme fatale passionnelle et de ses blagues scandaleuses qui amusaient alors le public
masculin. La phrase la plus célèbre de l'actrice reste : « Is that a pistol in your pocket, or are you
just happy to see me? » du film She done Him Wrong de Sherman (1933, Paramount Pictures).
Entre 1910 et 1929, Hollywood créa un empire cinématographique et les stars devinrent les
représentants publiques et économiques des studios.
Au début des années '10 les acteurs et leur interprétation n'avaient aucune importance dans le film
mais le public commença tantôt à se démontrer intéressé aux interprètes ; des spectateurs
envoyaient des lettres aux studios pour avoir des informations sur la vie privée des gens qui jouaient
face à la caméra. L'industrie cinématographique comprit alors l'importance des acteurs et construisit
un empire économique.
Au début des années '20 la figure de la star était consolidée. Les plus célébrés comme Valentino e
Mary Pickford étaient des modèles pour la société de l’époque. Valentino était le héros romantique
victime des femmes, ses personnages sacrifiaient leur vie pour la femme aimée ; tandis que Mary
Pickord représentait 'the girl next door' qui convervait les caractéristiques de la fille pure et
virginale.
Les spectateurs devinrent fous des vedettes et à la mort de Valentino en 1926 (Alovisio 2011, p.92),
plusieurs femmes se suicidèrent les heures suivant la triste nouvelle, en face de l’hôpital où il était
mort.
Cela représentait le premier geste important d'adoration et divinisation des stars.
Si l’on feuillette n'importe quel fan magazine des années '20 ou '30, on peut croiser beaucoup
d'articles dédiés à la vie privée des stars, à ses amours, jusqu'à ses habitudes (leur petit déjeuner par
exemple) (Samter Winslow 1930, p.50).
Les talent-scounts qui étaient chargés de
découvrir des nouveaux visages (Davis 1993,
p.83), découvraient des acteurs par hasard, les
trouvaient dans les pièces de Broadway ou
proposaient des contrats aux femmes
participant aux concours de beauté. Les plus
chanceux signaient alors un contrat avec le
studio d'un maximum de 7 ans. Les premières
années permettaient de mettre à l’épreuve les
acteurs et de comprendre quel type de rôle
leur correspondait.
Une fois le rôle consolidé, le studio s'engageait à porter leur publicité aux travers des fan
magazines, les films et en immortalisant l’empreinte de leurs mains et pieds sur les parvis, tout
autour du Mann's Chinese Theater à Los Angeles.
La star pouvait avoir tout ce qu’elle voulait : argent, succès, propriétés, amours. Le studio aidait
l'acteur dans tous ses besoins tandis que le contrat forçait la star à accepter chaque rôle proposé,
parfois à se marier avec d’autres acteurs et d’accepter de cacher ses enfants ou d’éviter d'en avoir.
Hollywood avait, depuis sa naissance, comme objectif la création et le développement de
l'American Dream ; une telle gestion des stars contribuait à conserver cet but. À la base, les États-
Unis étaient le rêve des immigrants cherchant l’accès à la middle class et de vivre une vie aisée
(Dickstein 2009, p.217). Après la première guerre mondiale et plus tard avec la Grande Dépression
de 1929, l'industrie cinématographique se sentit responsable du bonheur du public. Le cinéma était
un moyen d’entertainment et son rôle devenait de plus en plus important dans la société américaine.
La star était au centre des fan magazines, des films et de l'économie cinématographique. Elle
représentait le studio avec qui elle avait un contrat. La MGM était le studio, le plus important
« More Stars than Heaven » était la maxime. Louis B. Mayer était le chef de la MGM ainsi que de
Joan Crawford, Clark Gable et Sherley Temple pour citer quelques noms célèbres de l’époque.
L'industrie hollywoodienne créa un réseau serré de communication entre le publique et la star.
L’intérêt qu’Hollywood produisit dans la culture de masse à l’égard de la vie des stars était
tellement grand qu’elles devinent un mythe au sien de la société, des exemples auxquels on pouvait
Image 1: Judy Garland laisse ses empreintes sur les parvis du Mann's Chinese Theater à Los Angeles 1939. http://david-paris.blogspot.ca/2012/10/hand-footprints-of-graumans-chinese_4.html
s'identifier. Les spectateurs étaient toujours à la recherche de rumeurs et d'informations sur les
vedettes qu'ils aimaient le plus, même si les fan magazines n'avaient pas d’importantes histoires à
raconter sur les vedettes, ils devaient rendre chaque geste, chaque événement auquel la star
participait, mythique, divin car les spectateurs souhaitaient rêver (Dench 2010, p.38). Les fans
envoyaient des lettres aux stars dans lesquelles ils avouaient leur amour, lui demandaient des
conseils sur n'importe quel sujet, lui envoyaient des cadeaux et des demandes au mariage (Morin
1961, p.82,83) .
Image 2:Marsch, Harriette [1930]. «The Gifts They Get». Dans Modern Screen, Novembre. http://archive.org/stream/modernscreenmaga01unse#page/92/mode/2up
Que constitue la base d’une telle adoration et imitation de la star?
La relation d'adoration et d'amour du public vers la star est à la base du rapport de fidélité qui se
développe entre les deux. À la fidélité pour la star s'ajoute celle du produit cinématographique
auquel la star participe et contribue à créer. On parle du genre cinématographique et du gender.
« Les genres sont des modèles de production de signification; ils agissent au niveau - syntaxique et
sémantique – pour lesquelles ils prévoient la présence d'une série des éléments récurrents; ils
permettent une organisation de l’expérience esthétique et narrative fondée sur le plaisir de la
répétition » (Pitassio 2002, p. 232).
Le but du genre n'est pas la création d'un produit standardisé mais le renouvellement des qualités de
la star, tandis que le gender est étymologiquement lié aux aspects ontologiques inhérents de la
personne comme la différence sexuelle, mais aussi, aux éléments acquis en relation avec la société
selon sa culture d’appartenance.
Ces aspects-là définissent les éléments basilaires pour la construction de la star car elle représente
un genre selon les caractéristiques du gender.
Le genre corresponde à un produit qui est construit et se développe selon des structures fixes. Cette
construction implique à son tour la fidélité du spectateur vers la star car elle entre dans la
quotidienneté du fan à travers les médias. La quotidienneté indique une affection et donc, la fidélité
à un sujet et/ou un objet.
Par exemple chaque jour nous nous réveillons dans le même lit, dans la même chambre et dans la
même maison, nous faisons le même trajet et nous travaillons au même endroit. Quand ces gestes-là
deviennent quotidiens et automatiques nous nous y 'attachons' et ils intègrent notre vie quotidienne.
Un fan des années '30 de Fred Astaire et Ginger Rogers allait au cinéma voir un film du couple, car
il voulait voir les deux acteurs jouer un couple qui se construit, qui se dispute et qui grâce à la danse
se renforce. Ce que suscitait l’intérêt et l'envie du public d’acheter un ticket de cinéma était que
généralement qu’il connaissait déjà l’identité du film, c'était l'affection envers les acteurs et envers
le genre que, même si inséré dans un schéma narratif consolidé, assurait des variations à chaque
films tournés par cette couple.
Le produit, par conséquent n'est pas un élément en stock, un ready-made, en citant Duchamp, mais
un élément qui renouvelle la qualité des stars même celles qui interprètent le même rôle dans des
films différents. Greta Garbo dans Camille (Cukor, 1936, MGM) ou Anna Karenina (Brown, 1935,
MGM) présente des femmes qui ont des attitudes communes même si elles vivent des histoires
différentes. À travers ces rôles, on ne souhaite pas montrer l’uni-capacité de Greta Garbo à jouer
des femmes abandonnées et trahies par leur grand amour, mais on veut indiquer l’habileté de
l'actrice dans sa capacité à varier les interprétations de la femme abandonnée et trahie. La
multiplicité des interprétations d’un même genre fait de l'actrice ce personnage-là et par conséquent
elle développe une attitude, une personnalité. Si cela n’était pas le cas, la star ne serait qu’un être
anormal qui existe que dans une réalité 'photographique', en autres mots une réalité majestueuse et
inaccessible au commun des mortels (les spectateurs), tandis que, cette répétition enrichit la vedette
de contenus, qui, se développent et se complètent aux travers des autres moyens de communication
(Alonge, Carluccio 2006, p.118).
John Ellis définit deux niveaux d’ 'irréalité' et de 'réalité' de la star, on également parler de
'humanité' et de 'divinisation' : le 'ordinary' et 'extraordinary' (Ellis 2007, p.92). Cette dualité
alimente la fidélité et est garante de la perpétuelle attention du public. La star est une personne
normale mais en même temps elle est un héros, le rêve inaccessible des spectateurs. Le jeu permet à
l'acteur de vivre des sentiments communs comme l'amour, la souffrance, le haine… Cela permet à la
vedette de se montrer 'ordinary' dans ses émotions et 'extraordinary' dans ses réactions aux
sentiments. Dans l'action elle devient le héros. Cette dualité reste forte même dans les fan
magazines où la quotidienneté de la star garde des attributs extraordinaires.
Alors on se demande s'il existe une narration dépourvue de cette présence de l'ordinary et
extraordinary qui cause l'incessante assiduité de la star dans tous les rôles joués; si cela existe, on
cherche à comprendre quels sont les moyens utilisés pour défendre la narration et les personnages
par l'influence de la star.
Les deux théoriciens Alonge et Carluccio définissent la star comme une trace documentée de
l'acteur parce que la vedette garde tous ses éléments physiques et ses attitudes comme acteur ; les
deux deviennent une seule identité. Ces éléments influencent les personnages joués (Alonge,
Carluccio 2006, p.118). La star est alors co-auteur du personnage qu’elle joue, non simplement
parce qu’elle lui donne sa voix et son corps mais parce qu’elle l'influence sémantiquement. Les
signes que la vedette crée, entrent en relation avec les destinataires (les spectateurs) qui les
interprètent par le prisme des rôles culturels et sociaux que la star porte dans la société. On peut
appliquer les études sémiologiques de Umberto Eco à ce sujet et affirmer que les stars sont
construites par des codici di riconoscimento (codes de reconnaissance) qui s'identifient aux travers
des connotations, ici de type iconographique et comportemental. Les signes produits vont créer des
codici di percezione (codes de perception) qui permettent au spectateur de reconnaître la star à
travers des éléments typiques qui la caractérisent. (Eco 1967, p. 106).
Il faut distinguer la vedette de l'acteur : l'acteur, à différence de la star n'entre pas dans l'univers des
code de reconnaissance et de perception parce que il ne partage pas sa vie publique ou privée. Dans
ce cas-là, pendant le tournage, l'acteur est le personnage, tandis que dans le cas des stars, le
personnage est la vedette.
Cary Grant est un des acteurs qui a construit son rôle de vedette hollywoodienne avec une forte
dualité entre sa personnalité humoristique, qu'il a toujours exploité dans les screwball comedy et le
rôle du héros dans les films d’escroquerie (inspiration de James Bond). Cary Grant a bien développé
et consolidé son rôle humoristique pendant les années '30 pour le garder pendant les années '40 et
'50. Hitchcock avait bien compris à la fin des années '30 que Cary Grant pouvait bien exploiter son
charme pour compléter son 'personnage' en vedette à travers des nouveaux rôles qui pouvaient le
rendre plus fascinant et bouleverser son appartenance aux rôles circassiens. Je parle de rôle de
cirque car Archie Linch (le vrai nom de Cary Grant) grandit dans le cirque et mena à travers Cary
Grant cette compétence artistique. Dans les films des années '30 Cary Grant devient un des
représentants de la screwball comedy et les spectateurs, surtout les spectatrices, sont fascinées par la
dualité séductrice et humoristique qu’il amène via son personnage.
Hitchcock dans le 1941 tourne avec Cary Grant et Joan Fontaine
Suspicion, une histoire d'amour et de secrets dans laquelle Lina
(Joan Fontaine) croit que son mari Johnnie (Cary Grant) veut la
tuer pour obtenir une hérédité. Hitchcock avait l'intention de faire
de Cary Grant un assassin et il tourne deux fins. Dans la première,
le préféré du réalisateur, Johnnie tue sa femme, tandis que dans la
deuxième le couple se rejoint. Telle l'habitude hollywoodienne,
avant la distribution nationale et internationale, le film était montré
dans un seul cinéma et les spectateurs dans la salle devaient
donner leurs avis. Les spectateurs étaient bouleversés par le final
où Cary Grant tue sa femme. Une star de telle importance et qui
avait joué des rôles comiques ne pouvait pas devenir un assassin,
pour cette raison la version officielle du film, que nous
connaissons reste
encore aujourd'hui avec l'happy ending (Truffaut 1962).
On comprendre bien comment le rôle que Cary Grant avait construit jusqu'à ce moment-là ne
donnait pas la possibilité au spectateur de croire à la vedette dans un rôle différent ou plutôt dans
celui de 'méchant'.
Si on retourne à la théorie de Alonge et Carluccio on peut bien constater que le personnage n'est pas
autonome, il n'est pas simplement inscrit dans la réalité de la narration mais il fait corps avec la
vedette, les deux entités ne faisant plus qu'un.
Image 3: Suspicion, Hitchcock, 1941, RKO
Le spectateur, de son côté, attribut à Johnnie, le protagoniste du film, les personnage que Cary
Grant a dèjé joué et il regarde à son présent comme personnalité publique. Ceci crée une attente
chez le spectateur.
Wulff dans l'article « La Perception du Personnage dans le Film » parle d'une attribution (l’italique
est de l’auteur) de sens de la star par le public. Le spectateur crée des attentes à l'égard de la star par
rapport au genre d’appartenance et selon les attributs sociaux et comportementaux que la star a dans
sa vie publique et qu'elle manifeste à travers les médias comme la presse, les fan magazines et la
radio. Les attentes sont strictement liées à la fidélité du public et pour garder cette relation de
confiance il faut que la star reste cohérente d'une façon purement physique et comportemental
pendant toute sa carrière (Wulff 1997, p.26). Cette cohérence et la création de sens que suit sont
essentielles dans l'univers classique du cinéma hollywoodien parce que la star doit être toujours
bien reconnaissable, même dans sa 'construction' physique; c'est-à-dire que la star doit porter la
même coupe de cheveux, le même maquillage qui la rendent bien reconnaissable auprès du
spectateur.
Le public doit être pensé dans la collectivité en ce qui concerne l’interprétation du personnage dans
la récit par rapport à la réalité (Colls 2011, p. 50). Mais on peut parler de public comme d'individus
indépendants en ce qui concerne le rapport que le spectateur a avec une star, parce qu'un spectateur
peut aimer plus ou mois Cary Grant mais tous les moviegoing spectators connaissent bien le rôle de
la star dans la société.
Wulff schématise l'acteur dans six niveaux relationneles avec le personnage :
• l'acteur est l'acteur lui-même;
• le corps de l'acteur est en même temps le corps du personnage;
• l'acteur éclaire un personnage, il joue un rôle;
• le personnage s'inscrit dans le contexte de l’œuvre, dont on ne peut pas l'isoler;
• le personnage possède, relativement au message de la pièce ou de la scène, un contenu
intentionnel, il est le produit d'une énonciation de sens, et sert par exemple à illustrer une
« morale ».
• le personnage s'enracine dans le contexte sémiotique du « typage », et doit par conséquent
être considéré comme le représentant d'une classe, d'une caste, d'un groupe (Wulff 1997,
p.26).
L'acteur est fondamentalement lui-même mais quand il joue, il porte une masque qui s'adapte au
contexte du film. Le personnage au début est vide et il acquière du sens seulement en entrant en
relation avec les autres personnages et s'inscrivant dans un contexte social et cultural. Le spectateur
apprend à connaître le personnage à mesure que l'histoire se développe (Marchese 1983, p.187).
Selon le contexte de la narration, l'attribution de sens à l'acteur se mêle aux « macro-operateurs »
qui identifient des stéréotypes nationaux, raciaux, sexuels.. et que le public utilise pour définir des
« macro-attributions » de la star en relation au monde social. Les macro-attributions entrent en lien
avec l'attribution et vont créer une interprétation de l'acteur/personnage (Wulff 1997, p.28).
On considère un autre cas très différent par rapport à Cary Grant, celui de Bette Davis. À la
différence de la plupart des vedettes hollywoodiennes, Davis a crée son univers de ordinary et
extraordinary en jouant des rôles différentes et opposés pendant toute sa carrière. À présent, nous
allons donc analyser des cas spécifiques :
Bette Davis a travaillé du 1932 au 1949 pour la Warner Bros. Si on se concentre seulement sur les
films des années '30 on peut constater qu'elle a joué la femme fatale dans Ex-Lady, ainsi que dans
plusieurs autres films du début de la décennie. En 1938 elle a été la fille qui choisit de se sacrifier
pour suivre l'homme que elle aime, contaminé par la fièvre jaune. En 1939 elle est l'affreuse reine
Elizabeth d’Angleterre qui condamne à mort son amant et enfin, la même années, elle joue dans le
fabuleux film Dark Victory, un des premières films qui concernent la lutte contre la maladie.
Ces quatre films témoignent la multi-relation que la star a avec ses personnages.
Bette Davis n'a jamais satisfait les éléments typiques caractéristiques d'une star de la période.
D'abord elle n'était pas belle et la beauté était la base du succès à Hollywood. C'est don plutôt son
très grand talent qui l'a aidé à devenir une des plus grandes vedettes d'Hollywood.
Face à une telle variété d’interprétations, les fan magazines ont combiné sa personnalité d'après ses
rôles pour justifier et expliquer au public qui était-elle (McDonald 2000, p.53-56).
Image 4: Ex-Lady, Florey, 1933, Warner Bros.
Image 5: Jezebel, Wyler, 1938, Warner Bros.
Image 7: Dark Victory, Goulding, 1939, Warner Bros.
Image 6: The Private Lives of Elizabeth and Essex, Curtiz, 1939, Warner Bros.
Peut-on encore parler de l'influence de la star dans la narration?
De Cardova distingue les termes de casting et performance. Le casting est un élément qui reste
cohérent dans le film pour toute sa durée, tandis que la performance est amplifiée à certains
moments du film et elle concerne l'activité corporelle. Les deux sont en relation mais selon le
théoricien, pendant le joue, si l’interprétation prend la place sur la présence corporelle (le casting) et
elle va en premier plan, il y a une séparation entre l'acteur et le personnage, car il sont agents de
deux actions différentes (De Cordova 1986, p. 236).
La présence corporelle, le casting reste cohérent pendant tout le film pour toutes les interprétations
des acteurs ou des stars. La présence physique de Bette Davis dans le film ou de Cary Grant est bien
marquée dans tous les films joués mais on peut hasarder à affirmer que Bette Davis scinde le
casting par la performance. On ne cherche pas à dire que Bette Davis a une capacité supérieure à
Cary Grant pour jouer des rôles différents mais que Bette Davis ne renouvelle pas ses qualités à
travers la répétition mais qu'elle les renouvelle en jouant des rôles différents. L'activité corporelle,
la performance, dans le cas de Bette Davis doit être lu à travers l'ensemble de ses interprétations.
C'est-à-dire que si on analyse seulement le film Dark Victory, on pourra dire que son interprétation
est magistrale et que l'activité corporelle prend la place sur la présence corporelle, mais la différence
c'est que ce qui active la performance dans le jeu de Bette Davis c'est la somme et la variété des
jeux à laquelle la star participe.
En ce sens, la vedette est incomplète et paradoxale si les personnages sont examinés
indistinctement. Selon Redmond et Holmes les personnages sont beaucoup plus complets que les
stars parce qu'ils offrent au spectateur soit le jeu, soit la beauté, soit les aventures d'un héros, tandis
que les vedettes sont incomplètes parce qu'elles n'offrent au public que leur image photographique
et c'est les médias et les films qui ont le devoir de donner une personnalité à cette image-là. On peut
alors dire dire que les deux se complètent (Redmond, Holmes 2007, p.90).
Morin souligne que la star n'est pas toujours présente dans le film. Il définit des catégories de
subdivision de héros du film et de héros en tant que star. La star est absente du film quand :
• il n'y a pas à la base le pouvoir économique et industriel ;
• il y a une absorption de l'acteur dans le héros;
• il n'y a aucune relation entre l'acteur et le rôle (character parts);
• le rapport entre le héros et le personnage agit seulement dans des secondaires rôles (Morin
1961, p.38).
Par character parts, Morin entend toutes les interprétations où l'acteur, le character actor ne laisse
aucune trace de lui-même dans le jeu. Par conséquent, on peut reprendre la théorie de De Cordova
et affirmer que les character parts existent car il y a des cas dans lesquelles la performance prend la
place du casting.
Les B-movies sont témoins de la même dualité entre l'acteur et le personnage car à ce moment là,
l'acteur n'a aucune vie publique qui peut créer une attente chez le spectateur. Il est inconnu et le seul
moyen pour rendre explicite sa présence au spectateur c'est le personnage.
On ajoute à cette égale relation entre le héros du film et l'acteur, les rôles qui ont produit des
vedettes. C'est-à-dire tous ces films qui ont mené un acteur à devenir une star. Par exemple Gone
With the Wind (Fleming, 1939, David O' Selznick Productions) a été le film qui a fait débuter Vivien
Leigh dans le rôle de Scarlett O'Hara. L'actrice n'était pas de tout connue à Hollywood et c'est grâce
à ce film colossal qu'elle a gagné en notoriété. Les spectateurs de masse se souviennent de Vivien
Leigh seulement dans le rôle de Scarlett O'Hara alors qu'elle a joué dans bien d'autres films comme
A Streetcare Named Desire en 1951 (Kazan, Warner Bros.), rôle qui l'a valu un l'Oscar.
Vivien Leigh est devenu le personnage et ses interprétations successives au cinéma ont toutes été
comparées à sa première grande interprétation. Le personnage est devenu partie intégrante de sa
notoriété et elle dépend donc de celui-ci. Dans ce cas là, comme dans le cas du B-movie, l'acteur
reste que un acteur dans le jeu est c'est le personnage qui va créer l'interprète.
On peut dire alors que c'est possible d'avoir une narration dépourvue des traces de l'acteur selon de
telle prospectives. Cependant on ne peut pas oublier la relation entre le récit et l'industrie
hollywoodienne. Un acteur qui arrive à s'imposer dans une maison de production peut obtenir
l'autonomie sur le personnage, mais il y a des autres éléments qui s'immiscent dans la pureté de la
narration, comme la censure et le genre. Une pure et complète liberté narrative pourrait exister
seulement si les deux éléments ne interagissent pas avec le texte.
Si dans le cas de Bette Davis, on peut parler d'un personnage indépendant, on ne peut pas parler
d'une narration indépendant du stardom. Errol Flynn qui joue avec Bette Davis dans The Private
Life of Elizabeth of Essex, apporte avec lui toutes les connotas du genre de l'aventure en costume.
Sa présence et celle de Olivia de Havilland, avec qui l'acteur avait déjà tourné cinq films, affirme le
genre et renouvelle la couple. Le film garde une importante différence au niveau narratif par rapport
aux autres films du genre et cela est bien lié à la présence de Bette Davis. Elle est la protagoniste du
film tandis que Olivia De Havilland garde un rôle secondaire et pour la première fois le personnage
interprété par Errol Flynn n'aime pas la jeune fille mais l'affreuse reine.
Pour conclure on peut soutenir qu'il y a des cas où le personnage peut être indépendant de la
présence de la star mais que cette autonomie ne peut pas exister au niveau narratif dans lequel le
personnage agit, parce que il y a des éléments et des autres personnage qui interagissent avec le
personnage 'vierge' et qui influencent la narration et la relation entre les parties. Morin spécifie que,
où l'univers industriel agit, le film ne peut pas garder sa autonomie et se distinguer du monde réel;
mais dans un contexte si limité et lié à l’économique peut être intéressant chercher l'exception
voilée, cachée ou paradoxale et dévoiler ce que est caché entre les lignes.
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Japan ».
MATÉRIEL AUDIO ET IMAGES
Truffaut, François. [1962] «Part 11. Mr and Mrs Smith through to Suspicion... » Dans François Truffaut, Le Cinéma selon Alfred Hitchcock. En ligne http://the.hitchcock.zone/wiki/Alfred_Hitchcock_and_Fran%C3%A7ois_Truffaut_%28Aug/1962%29
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