Plein comme un pot! Cabaret et boissons à Namur au début du 18e s.
CATTELAIN P. - 2002. Vestiges d'occupations du deuxième Âge du Fer dans la Grotte de la Roche...
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Bulletin de la Société Archéologique Champenoise
DECOUVERTES RECENTESDE L'AGE DU.FER DANS LE MASSIF DES
ARDENNES ET SES MARGES
REPAS DES VIVANTS ET NOURRITUREPOUR LES MORTS EN GAULE
actes du XXVe colloque international del'Association Française pour l'Etude de l'Age du Fer
Charleville-Mézières24-27 mai 2001
textes réunis par Patrice Méniel et Bernard Lambot
Société Archéologique Champenoise53, rue Simon - Reims
n° 16, supplément au bulletin n° 1-2002
VESTIGES D'OCCUPATIONS DU DEUXIÈME ÂGE DU FER DANS LAGROTTE DE LA ROCHE ALBÉRIC À COUVIN
(PROVINCE DE NAMUR, BELGIQUE).
Pierre Cattelain*
avec la collaboration de Steve Cabaraux (spéléologie), Anne Cahen-Delhaye (matérielarchéologique), Pascal Chauvaux (spéléologie), Bruno de Graeve (archéozoologie), IvanJadin (méthodologie-matériel archéologique) et Yves Quinif (karstologie)
Historique des recherches
Le réseau de grottes situé rue de la Roche Albéric(anc. rue des Carrières) à Couvin a été découverten 1901-1902, lors du creusement de la cave de lamaison située au n09. Les premières explorationsen 1902, puis en 1946, permirent d'avancer surenviron 80 m en direction du nord-ouest, découvrant tout un réseau de couloirs et de failles parfoistrès hautes. L'exploration du réseau semblant dangereuse, l'accès par la cave fut muré.En septembre 1986, Steve Cabaraux et Jean-MarcBruyer, amateurs de spéléologie, reprirent l'exploration systématique du réseau (fig. 1 : plan généraldu réseau). Plusieurs semaines de recherche leurpermirent de découvrir, au bout du réseau ouest, àune centaine de mètres de l'accès par la cave, unensemble de salles et de galeries dont le sol étaitjonché de fragments de poterie, d'ossements et dequelques éléments métalliques. Les éléments lesplus spectaculaires étaient trois vases complets etpratiquement intacts, découverts en contexte isolédans une galerie écartée (fig. 1 - 6 : salle aux troispots), ainsi qu'un crâne humain trouvé dans unecheminée à 3 m de hauteur environ.En novembre 1986, S. Cabaraux soumit le matérielarchéologique au Centre d'Etudes et deDocumentation archéologiques de Treignes(CEDARC/Musée du Malgré-Tout). En premièreanalyse, le matériel fut attribué au deuxième âgedu Fer (période de La Tène).Une première tentative de reconnaissance à caractère archéologique fut effectuée en décembre 1986par le CEDARC en compagnie de S. Cabaraux.L'exploration emprunta le réseau ouest, seul connuà l'époque et se trouva bloquée par des inondations après une cinquantaine de mètres. Tout aulong de l'année 1987, S. Cabaraux et J.-M. Bruyerpoursuivirent l'exploration spéléologique et levèrent
un premier plan schématique. Leurs recherchespermirent de reconnaître et de dégager le réseauest, nettement plus court et plus sec que le premier,mais d'un parcours plus difficile. Grâce à ce nouvelaccès, l'exploration archéologique put reprendre endécembre 1987. Elle permit d'estimer l'importancedu gisement, qui s'avéra particulièrement riche etqui allait nécessiter de nombreux mois de recherche.Toutefois, les propriétaires, M. et Mme E. Théron,désirant récupérer leur maison pour le 15 mars1988, une intervention d'urgence s'avérait indispensable. Par ailleurs, l'accès par la cave neconstituait certainement pas l'entrée par laquelle leréseau avait été pénétré à l'âge du Fer; la découverte de l'accès original était donc de toute première importance pour la compréhension du site et lapoursuite des recherches.Deux week-ends de travail intensif furent doncorganisés début février 1988 par le CEDARC, encollaboration avec des chercheurs bénévoles del'Université de Liège. Ils avaient pour but le relevéde l'ensemble des vestiges jonchant le sol de lagrotte, fortement menacé de piétinement lors desexplorations.Au vu de l'intérêt exceptionnel du matériel récolté,unique dans l'Entre-Sambre-et-Meuse et quicouvre une période allant du début du 2e âge duFer jusqu'au début de l'occupation romaine de nosrégions, M. et Mme Théron acceptèrent de prolonger l'autorisation de fouilles jusqu'à la fin de l'année1988 (qu'ils en soient ici remerciés).Jusqu'en août 1988, l'équipe du CEDARC poursuivit l'étude du gisement archéologique, en effectuantnotamment des sondages en profondeur. Dans lemême temps, S. Cabaraux affinait l'exploration etle relevé spéléologique du réseau, tandis queRaoul Geeraerts, du Centre de Physique du Globeà Dourbes, effectuait des prospections en surfacedans le but de repérer l'accès original.
• Musée du Malgré Tout, 8·5670 Treignes.L'illustration de la présente contribution a été réalisée par Mlle Françoise Laurent, pour le matériel céramique et en ivoire, et Mlle Sandra Fernandez, pourles objets métalliques. Nous les remercions toutes les deux.
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Fig. 1 : Localisation et levé topographique de la Grotte de la Roche Albéric. 1 : zone archéologique; 2 : salle à l'halogène; 3 : sallerouge; 4 : salle aux poteries; 5 : salle de la hache; 6 : salle aux trois pots. En grisé: le niveau supérieur.Levé S. Cabaraux, J.-M. Bruyer et P. Chauvaux.
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Ces efforts conjoints aboutirent, le 8 août 1988, à ladésobstruction, dans le jardin des Théron, d'un«entonnoir» qui correspond probablement à unedes entrées originales du réseau. C'est par cetaccès, dûment consolidé, que les recherches sesont poursuivies jusqu'au début de 1989, momentoù le gisement fut mis «en réserve».
Aspects karstologiques
Le réseau de la Roche Albéric se présente commeun labyrinthe de galeries qui se recoupent danstous les sens. Cela correspond au réseau de fractures qui sillonnent la colline et dont certaines ontété élargies en galerie. Par endroits, là où les galeries se recoupent, des vides plus grands se sontcréés, surtout par des éboulements de blocs, formant des salles. Ces chutes de fragments de plafonds font progressivement «remonter» lavoûte. Une entrée a ainsi pu se créer par écroulement du terrain là où l'épaisseur de roche entre lavoûte de la grotte et la surface n'était pas trop grande, une dizaine de mètres, tout au plus.Ultérieurement, cette entrée a pu se reboucheravec des pierres, de la terre, des débris végétaux...La grotte, située près du cours de l'Eau Noire, a étéformée pour l'essentielle dans une zone noyée. Eneffet, c'est l'Eau Noire qui commande le niveau dela zone noyée dans les calcaires qui entourent larivière: aucune galerie ne peut exister vide d'eausous le niveau de la rivière!Ensuite, au cours des millénaires l'Eau Noire acreusé sa vallée, descendant sous' le niveau d~ lagrotte qui s'est ainsi trouvé dénoyée. Par moments,des petites rivières circulaient dans les galeries, yimprimant d'autres formes typiques de leur courantrapide, tels les «coups de gouge». Enfin, la grotteprit son allure actuelle avec les galeries en partieremplie d'eau, à cause des percolations. Uneentrée supérieure se forma par éboulement successif dans la «Salle rouge» (fig. 1 - 3), offrant unepossibilité de pénétration au deuxième âge du Fer.
Méthodologie archéologique
L'accès difficile, la mobilité réduite dans lesespaces exigus, boueux ou inondés, le froid et l'humidité ont rendu contraignant tout travail dans lagrotte de la Roche Albéric. Ces difficultés, alliéesaux particularités archéologiques du site, nous ontconduits à adapter les techniques de fouilles traditionnelles.Dans l'état actuel de nos connaissances, le sites'étend sur deux niveaux: une salle supérieure etun réseau inférieur de salles, failles et galeries oùse trouve concentré le matériel archéologiqueapparent. Une grande partie de celui-ci jonche lesol. On observe également la présence d'osse-
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ments et de céramiques dans de nombreusesanfractuosités des parois et dans des failles plus oumoins hautes, ainsi que quelques éléments coincés entre des blocs éboulés qui forment le plafonddans une partie du réseau inférieur. Deux cônesd'éboulis ou de rejets renfermaient un abondantmatériel qu'il est parfois possible de recoller de l'unà l'autre malgré leur éloignement. Tous ces éléments indiquent qu'une part importante du matérielest tombée naturellement ou a été rejetée intentionnellement de la salle supérieure. Actuellement,la salle supérieure apparaît fort encombrée d'éboulis provenant de la proche surface, si bien quel'éventuelle couche archéologique n'y a pas encoreété localisée, à l'exception d'un tesson, trouvé endehors des deux coulées «d'éboulis». Notonsqu'aucune recherche n'a encore été effectuée dansles terrains de surface, actuellement occupés pardes jardins privés.Hors des zones soumises aux décharges de lasalle supérieure, la présence du matériel jonchantle sol s'expliquerait par une fréquentation duréseau inférieur. Les quelques sondages, réaliséspour situer le matériel en coupe, ont montré unniveau archéologique unique peu épais où seconfondent les diverses fréquentations du site. Lefilm d'argile brun-jaune qui s'est déposé depuis2000 ans voile la couche archéologique mais celleci, heureusement chargée en charbons de bois etfacilement décelable, est présente sur une grandepartie du secteur archéologique. En émerge lematériel le plus épais, ainsi que celui dégagé parles mouvements d'eau et les infiltrations. Enquelques rares endroits, le matériel est couvert parun fin plancher stalagmitique.Le travail a été effectué de manière très pragmatique. Il a consisté d'abord en un ramassage dumatériel - en priorité dans les passages exposésau piétinement - et en fouilles par locus.L'enregistrement de la position des objets a suivides principes simples:
- Des points de repère fixes, relevés topographiquement, ont été enfoncés dans les parois (œillets et plaquettes numérotées).
- Un axe a été tiré entre chaque couple de points aumoyen d'un décamètre suivant l'axe de la galerie, la distance entre les points variant en fonction du réseau.
- Par convention, en considérant le sens de la progression de l'entrée vers le fond des galeries et dessalles, les pièces archéologiques situées à gauche del'axe ont été notées en négatif, à droite en positif. Lesmesures prises sur l'axe (de A vers Z) correspondent auxcoordonnées X, les mesures perpendiculaires (+ ou -)aux coordonnées Y.
- Les points relevés ne correspondent pas forcémentà des objets isolés, mais plutôt à des groupes d'objets.Les loci ont été matérialisés dans la grotte par des sticksnumérotés. Les sachets dans lesquels ont été emballésles ensembles d'objets étaient munis d'une plaquette
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plastique portant le même numéro.- Le numéro d'inventaire de chaque objet a été conçu
de la manière suivante: CRA (Couvin Roche Albéric)suivi du n° de locus et du n° d'ordre de l'objet au sein dulocus. Ainsi, par exemple, le cinquième objet découvertdans le locus 72 porte le numéro CRA 72 05.
Un grand nombre d'observations sur le réseau etsur la position des objets, enregistrées par radio etsystématiquement retranscrites dans le carnet defouilles, ont pallié le manque de précision de certaines mesures et l'absence de notation de l'altitude, techniquement impossible, vu les moyens disponibles.En l'absence d'une séparation stratigraphique desphases d'occupation de la grotte, l'étude du matériel fournit des repères chronologiques et permet ladistinction d'ensembles d'objets d'époques ou defonctions différentes. Le report sur plan de cesassociations éclaire la répartition du matériel dansle réseau et sa fréquentation, de même que la miseen place du gisement.
Matériel archéologique et élémentschronologiques
Les vestiges matériels recueillis dans la grotte de laRoche Albéric sont abondants et dispersés dansnombre de salles. Les tessons de céramique et lesossements d'animaux dominent nettement, maison y trouve également quelques outils, ustensileset bijoux en fer, bronze et ivoire ainsi que des morceaux de terre brûlée et du charbon de bois. Onnotera la présence remarquable d'une mandibuleet de trois crânes humains.Plusieurs milliers de fragments de vases ont étéramassés et bon nombre ont été remontés, mais ungrand travail de reconstitution reste à faire. Commedans la plupart des sites d'habitat, les vases complets sont très rares: ainsi, à Couvin, seuls troisrécipients ont été retrouvés intacts ; mais encontexte isolé dans une galerie écartée (salle auxtrois pots). Quelques autres vases ont pu êtrepresque intégralement remontés.Vases complets et tessons fournissent d'importantsrepères pour cerner la chronologie de l'occupationde la grotte. Le site peut ainsi être daté du secondâge du Fer et des premières décennies de l'occupation romaine, soit entre le Ve siècle avant notreère et les premières années après J.-C. Cette datation est confortée par l'étude des objets métalliques, mais ne pourra pas être vérifiée par l'analyse au radiocarbone des charbons de bois, qui sontmélangés et contaminés par les infiltrations d'eau.
La céramique
De la poterie semble avoir été façonnée sur place,à en juger par la présence d'un grand fragment de
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vase mécuit, déformé par une cuisson ratée.La plupart des vases ont été montés à la main,sans l'aide de tour, dont l'usage ne se répandradans nos régions qu'au début de la dominationromaine.
Les vases à provisions
La plupart des tessons appartiennent à des vasesà provisions, c'est-à-dire des récipients qui présentent généralement des grandes dimensions et desparois épaisses. Le modèle le plus largementrépandu est du type «Halterner Kochtopf» à fondplat, panse oblique légèrement bombée et à lèvrerentrante renforcée par un rebord épaissi, délimitépar un sillon. La pâte, toujours dure, est parfoisporeuse et contient un abondant dégraissant minéral calcaire. Bon nombre de ces vases ont uneparoi extérieure rendue volontairement rugueusepour assurer une meilleure préhension (fig. 2 : 1).D'autres ont la surface sillonnée verticalement delégères incisions faites à l'aide d'un peigne (fig. 2 :2). Enfin, quelques fragments montrent un trou quiservait à recevoir les liens destinés à la suspension. La forme de ce type de vase n'apparaît qu'àla fin du second âge du Fer (ou La Tène finale), soitau 1er siècle avant J.-C., au cours duquel elle s'avère très répandue ; elle persiste sous l'Empireromain, surtout au cours du 1er siècle de notre ère.D'autres récipients ont certainement contenu desprovisions : c'est notamment le cas des grandsvases à large panse bombée, col vertical et lèvreévasée. Comme plusieurs pots du type «HalternerKochtopf», certains d'entre eux portent encore destraces de peinture noire qui couvrait la paroi extérieure du col et de la lèvre.Une série de tessons appartient à plusieurs bouteilles d'une facture très différente des autres vasesà provisions (fig. 2 : 3-4). Ces pots, destinés àcontenir des denrées liquides, sont les seuls à avoirété façonnés au tour de potier; ils appartiennent àune catégorie très bien représentée dans nosrégions au 1er siècle de notre ère: la «terra nigra».Ces bouteilles, de fabrication très soignée, sontdotées de parois particulièrement fines dont la couleur noire évoque les vases métalliques. Elles sontcaractérisées par un fond étroit muni d'un anneaude base, une haute panse largement bombée et uncol haut et étroit se terminant par une lèvre évasée; les exemplaires de Couvin sont rehaussés demotifs géométriques comportant des lignes horizontales et l'un d'eux montre des triangles surl'épaule. Cette vaisselle de qualité, qui n'a vraisemblablement pas été fabriquée sur place, auraitété introduite dans nos régions dès le règned'Auguste, au cours du dernier quart du 1er siècleav. J.-C.
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6Fig. 2: 1: bord de vase à provision à panse éclaboussée (LT finale) ; 2 : vase à provision décoré au peigne (LT finale) ; 3-4 : col, panseet fond de bouteille en terra nigra (début de la période romaine) ; 5·6 : bords et organes de suspension de vase à cuire; 7: reconstitution du mode de suspension d'un vase à cuire.
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Fig. 3 : 8 : petit pot globuleux (LTfinale) ; 9 : coupelle (LT finale) ; 10 : terrine (LT finale) ; 11-12 : gobelets (LT ancienne) ; 13-16 : situleset bords de situles présentant des décors au doigt et à l'ongle (LT ancienne) ; 17: decor d'incisions et rainures horizontales; 18: décorgéométrique incisé (LT ancienne); 19: impressions au doigt; 20: impressions au bâtonnet; 21: impressions au poinçon.
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Les vases à cuire
Une série de fragments appartient vraisemblablement à de très grands vases qui ont servi de faitoutet dont le fond était peut-être arrondi. Ils sontmunis, comme la plupart des vases à provisions,d'un large bord rentrant, mais sont dotés en outred'organes de préhension ménagés sur la lèvre ellemême. Il s'agit d'une languette de terre traverséepar une longue perforation horizontale destinée àrecevoir un lien en matière végétale ou animale(fig. 2 : 5-6) ; celui-ci était relié à une crémaillère quipermettait de suspendre le récipient au-dessus dufeu (fig. 2 : 7). Il est intéressant de remarquer queces attaches reproduisent celles des grands chaudrons de bronze qui furent largement répandusdans toute l'Europe tempérée à la fin de l'époquede La Tène; on y retrouve en effet le détail des rainures verticales, ou côtes, qui caractérisent lesattaches métalliques. Ici encore, la surface extérieure de ces grands récipients a été rendue volontairement rugueuse dans un but fonctionnel, sansêtre dénuée d'effet décoratif. Ce type de vasesemble avoir connu une faveur particulière limitée àl'Entre-Sambre-et-Meuse puisqu'on ne connaîtactuellement de parallèles que dans les couchesd'occupation préromaine du sanctuaire deMatagne-la-Petite.
Autre vaisselle·
Les autres récipients ont été façonnés pour desusages divers qu'il n'est pas toujours aisé de préciser. On signalera un petit pot à paroi épaisse(fig. 3 : 8), une coupelle à fine paroi oblique (fig. 3 :9) et des terrines à panse oblique et lèvre légèrement évasée qui peuvent être datés de La Tènefinale (fig. 3 : 10).Deux types de vases remontent au début de LaTène, soit aux Ve, IVe ou à la première moitié duIlle siècle avant notre ère. Il s'agit de petits gobelets à pied étroit et haute panse (fig. 3 : 11-12) et de«situles» ou hauts vases à profil angulaire, carénés, réalisés à l'imitation des prototypes métalliques importés d'Etrurie au Ve siècle avant J.-C.(fig. 3 : 13 à 16). Bon nombre d'entre eux portentsur la panse un décor d'impressions ou des striesverticales réalisées au peigne.De très nombreux vases sont en effet décorés, partiellement ou presque entièrement. Le répertoiredécoratif comporte des incisions et des rainureshorizontales (fig. 3 : 17), un décor géométrique incisé qui est réservé aux vases carénés (fig. 3 : 18) etune vaste gamme d'impressions en encoches.Légères ou profondes, celles-ci sont réalisées audoigt, à l'ongle, au bâtonnet ou au poinçon (enessont alors rondes ou triangulaires) (fig. 3 : 19, 16,20-21). Ces impressions occupent toute la surfacede la panse ou se limitent à la partie la plus saillante du récipient (fig. 3 : 16).
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Les lampes
Plusieurs tessons et deux vases presque completsont une forme bien particulière: sur un fond plat estassujettie une paroi oblique qui présente un bordfortement festonné tel un parasol (fig. 4 : 22 à 24) ;ces festons sont obtenus par un repli de la pâteencore molle vers l'extérieur ou l'intérieur du récipient. Ces vases à bord festonné, de dimensionsmodestes, apparaissent dans la plupart des habitats de nos régions et du nord de la France dès ledébut du second âge du Fer; ils sont particulièrement abondants dans les grottes, ce qui laisse àpenser qu'ils ont servi à contenir de l'huile destinéeà l'éclairage. La surface extérieure de l'un d'eux estdécorée de profondes impressions réalisées aupoinçon. Certains portent à la base des trous destinés à leur suspension.
Les fusaïoles
Deux fusaïoles révèlent que les occupants de lagrotte ont pratiqué sur place le filage de la laine(fig. 4 : 25). Cette activité est corroborée par la présence de forces en fer et l'abondance des restes debrebis, au sein du matériel faunique (voir infra).
Les objets en métal et en ivoire
Outils et ustensiles en fer et ivoire
Parmi les quelques pièces métalliques qui noussont parvenues, on remarquera l'absence, peutêtre significative, de toute arme. On signalera leséléments suivants:
- une lourde hache en fer, à perforation parallèle au tranchant (fig. 4 : 26). Ce modèle, particulièrement fonctionnel, qui apparaît vers l'extrême finde La Tène, est encore en usage actuellement,comme «merlin», ou hache à refendre le bois;
- un couteau en fer, doté d'une lame courte ettrès large (fig. 4 : 27) ;
- une grande clef en fer, munie d'un panneton àdeux dents, qui devait être suspendue par unanneau (fig. 4 : 28) ; le modèle de cet ustensile serépand vers la fin de La Tène et restera en usagependant l'occupation romaine;
- un fragment de forces et ce qui pourrait êtreun soc de charrue font également partie des objetsmis au jour;
- enfin, deux pointes, l'une en en os, l'autreapparemment en ivoire ont été façonnées pour unusage qui nous échappe (fig. 4 : 29).
Objets de parure
La grotte de Couvin n'a livré jusqu'à présent quedeux objets en bronze, un anneau et une fibule. Lafibule, formée d'un arc en forme de ruban portant
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Fig. 4 : 22-24 : coupes et bord de coupe en parasol (LT ancienne) : 25 : fusaïole en terre cuile ; 26 : hache en fer (LT finale) ; 27 : couteau en fer t 28 : clef en fer (LT finale) ; 29 : pointe en ivoire (7) : 3D : fibule de Nauheim en bronze (LT finale).
un décor gravé en zig-zag longitudinal et un porteardillon triangulaire ajouré appartient au type dit de«Nauheim» (fig. 4 : 30).Apparue vers 100 avant J.-C., la fibule de«Nauheim» connut sa plus grande expansion entre70 et 20 av. J.-C. et fut à la mode dans un vaste territoire qui va de la Moravie à la Grande-Bretagne etde l'Espagne à l'Europe septentrionale.
Les restes humains
Les quelques restes humains retrouvés dans lagrotte de la Roche Albéric consistent en troiscrânes, une mandibule, une incisive, un tibia droitet une clavicule. Le crâne déjà cité, découvert toutau début de l'exploration dans une cheminée à 3 mde hauteur, ainsi que la mandibule, découverte à lasurface du sol de la grotte, appartiendraient, selonl'analyse de Mme M. Vandenbruaene, à un hommede 35-40 ans. Les deux autres crânes, ainsi que letibia, découverts ensemble dans une anfractuositétrès difficilement accessible à la base d'un pilier,appartiendraient à des femmes âgées d'entre 20 et34 ans.Ces ossements humains, relativement isolés desautres vestiges, pourraient avoir été déposés à desfins cultuelles. On sait, en effet, que les Celtesvouaient un culte particulier aux têtes des défuntsqu'ils aimaient déposer dans des lieux sacrés.Toutefois, la découverte de restes humains mélangés sans soin à des vestiges d'habitats est égaIement attestée dans le monde celtique.
Les restes animaux
Le mélange de l'ensemble du matériel au sein d'unniveau unique limite bien entendu l'intérêt de l'étude archéozoologique : sans datation radiométrique,il est impossible d'attribuer les vestiges fauniques àl'une ou l'autre des phases d'occupation actuellement reconnues. Néanmoins, l'étude globale de cematériel fournit quelques informations précieuses.806 des 1490 restes fauniques recueillis ont pu êtreidentifiés, soit 54 %. Hormis quelques restes manifestement intrusifs (mollusques, chauve-souris,lapin, campagnol, musaraigne et probablementrenard), la faune retrouvée est d'origine anthropique.Le tableau ci-dessous présente le décompte desespèces déterminées: il s'agit du décompte desossements et non du nombre minimal d'individus,qui n'a pas été calculé, sauf pour le chien (3-4 individus) et le bœuf (4 individus). Il appelle quelquesremarques.Au sein du gibier, le cerf est certainement surreprésenté : en effet, 19 des 23 restes identifiésproviennent de la ramure, et ne sont donc sansdoute pas imputables à une activité cynégétique ;quatre d'entre eux montrent des traces évidentes
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NR % NR %Mollusques inlrusifs 29 3,6 Inlrusifs 62 7,7Mammifères inlrusifs 33 4,1Lièvre 16 2,0Ceri 23 2,9 Gibier 40 5,0Sanalier 1 0.1Coq 7 0.9Moulon/chèvre 325 40.3Porc 299 37,1Bœuf 42 5,2 Domestiques 704 87,3Cheval 3 0,4Chien 28 3,5Talai 806 100 Talai 806 100,0
de façonnage. En revanche, les quelques restespost-crâniens portent des traces de découpe.À l'instar du lapin, il est possible qu'une partie desrestes de lièvres soit intrusive, en tant que proie deprédateurs animaux, tel le renard.Au sein du groupe mouton/chèvre, le mieux représenté, 155 fragments ont pu être spécifiquementattribués au mouton, et seulement 5 à la chèvre: lemouton apparaît donc comme clairement trèsdominant (rappelons par ailleurs la présence deforces et de fusaïoles au sein du matériel mis aujour).Le trio classique des animaux de boucherie (porc,caprinés, bœuf) représente 94,6 % des animauxdomestiques. Il s'agit essentiellement d'animauxjuvéniles ou sub-adultes. Dans l'ensemble, lestraces de découpe et de fracture intentionnelle desossements sont relativement peu nombreuses.Enfin, seuls 25 fragments (1,6 % des restes fauniquess) ont subi l'action du feu : 68 % de ceux-ciappartiennent au groupe mouton-chèvre, 12 % auporc, le reste n'est pas déterminable.En conclusion, il semble que si une partie desrestes animaux retrouvés dans la grotte provientprobablement de la consommation alimentaire, unepartie non négligeable du matériel retrouvé pourraitêtre la résultante de pratiques cultuelles. Le toutserait de savoir à laquelle des phases d'occupationou de présence les différentes composantes dumatériel fauniques doivent être attribuées.
Chronologie
Si la majorité des objets peut être datée du 1ersiècle avant J.-C., quelques vases remontentcependant au début du second âge du Fer, entre475 et 250 av. J.-C. Dans l'état actuel de l'étude dumatériel, à peine abordée, il n'est pas encore possible d'entrevoir si cette occupation fut continue ousi elle fut interrompue vers les Ille et Ile siècles. Lechoix de la grotte, qui fournissait un excellent abrinaturel, pourrait suggérer une occupation au coursd'une période troublée. Or, l'invasion de noscontrées par l'armée romaine en 57 av. J.-C. et lestroubles profonds qu'elle entraîna pendant un quartde siècle fournirait une explication plausible auchoix d'un habitat protégé, du moins pour une desphases identifiées.
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Synthèse provisoire
Une grande partie des objets récoltés dans la grotte de la Roche Albéric suggère un matériel d'habitat. Cette interprétation se base sur la céramique,utilitaire et de facture relativement grossière, surl'abondance de charbons de bois, sur une partiedes ossements d'animaux qui constituent de touteévidence des déchets de cuisine, et sur l'absencede matériel typiquement funéraire. Les resteshumains, les charbons de bois et une partie desrestes fauniques retrouvés ne sont cependant pasincompatibles avec des pratiques cultuelles.L'étude, encore en cours, de ce matériel archéologique a déjà permis de distinguer au moins deuxgrandes phases de fréquentation de la grotte: l'uneau début de l'époque de La Tène (475 à 250 av. J.C.), l'autre à la fin de l'époque de La Tène et audébut de l'occupation romaine.Le matériel attribuable à la première phase, constitué pour l'essentiel de situles et de gobelets, peutêtre divisé en deux ensembles distincts. Le premiercomporte trois vases intacts, découverts imbriquésles uns dans les autres dans une galerie écartée duniveau inférieur. Il pourrait représenter soit undépôt rituel, soit une réserve de vaisselle, et apporte la certitude que les Celtes sont descendus dansle niveau inférieur à cette époque. Le secondensemble correspond aux tessons du début del'époque de La Tène éparpillés dans les salles etgaleries de la zone archéologique. Il conforte l'idéede la fréquentation du niveau inférieur dès cetteépoque. En effet, les remontages réalisés jusqu'àprésent ne montrent que peu de déplacements dumatériel dus aux agents naturels, impression
Bibliographie
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confirmée par les premières études karstologiques : cela signifierait que les objets se trouventlà où ils ont été abandonnés par l'homme.Le matériel attribuable à la seconde phase, plusabondant, comprend entre autres les vases à provision et à cuire, les bouteilles, la fibule de Nauheimet la plupart des objets en fer. Il peut égalementêtre divisé en deux ensembles. Le premier estconstitué de l'abondant matériel découvert dans lescônes d'éboulis situés en contrebas de la sallesupérieure. Il s'agirait soit d'une descente naturelledu matériel à partir de la salle supérieure par desfailles et des cheminées lors des éboulements, soitd'une décharge intentionnelle de détritus. Dans lesdeux cas, cela implique l'occupation de la sallesupérieure à la fin de l'époque de La Tène. Il est àremarquer que cette salle supérieure (salle rouge)est proche de la surface et relativement spacieuse,et surtout plus sèche, mieux ventilée et plus faciled'accès que le réseau inférieur. Le secondensemble indiquerait une circulation dans le réseauinférieur à la même époque. Il est en effet constitué, comme celui de la première phase, de trèsnombreux fragments de céramique éparpillés danstoute la zone archéologique de la grotte.A ce stade de la recherche, les vestiges de La Tèneancienne pourraient correspondre à des pratiquescultuelles, mais il serait utile de dater plus précisément les restes humains. En revanche, les vestigesde La Tène finale suggèrent plutôt des résidusd'habitat, situé soit dans la salle supérieure, nonencore véritablement explorée, soit en surface. Lapoursuite de la fouille devrait permettre de compléter,d'affiner ou d'infirmer cette première interprétation.
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