9 Fonctions holomorphes

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19 Fonctions holomorphes Dans ce chapitre nous allons gĂ©nĂ©raliser la notion de dĂ©rivation rencontrĂ©e pour les fonctions d’une variable rĂ©elle au cas des fonctions d’une variable complexe. 19.1 La reprĂ©sentation de R 2 dans C Le corps C des nombres complexes est identiïŹĂ© Ă  R 2 par l’isomorphisme de R-espace vecto- riels : ϕ : C → R 2 z = x + iy 7→ (x, y) Si u C est une application R-linĂ©aire de C dans C, sa reprĂ©sentation dans R 2 est donnĂ©e par le schĂ©ma suivant : C u C → C ϕ -1 ↑ ↓ ϕ R 2 u R → R 2 c’est donc l’application u R = Ï•â—Š u C ◩ ϕ -1 et u C est R-linĂ©aire si, et seulement si, u R est R-linĂ©aire. Les applications C-linĂ©aires de C dans C sont les applications z 7→ αz oĂč α = a + ib est un nombre complexe avec a, b rĂ©els. La reprĂ©sentation R-linĂ©aire d’une telle application est l’application u R dĂ©ïŹnie par : u R (x, y)= ϕ (α (x + iy)) = ϕ ((ax - by)+ i (ay + bx)) =(ax - by, bx + ay) et sa matrice dans la base canonique de R 2 est A = a -b b a ¶ . RĂ©ciproquement si u C est une application de C dans C telle que u R = ϕ ◩ u C ◩ ϕ -1 soit une application R-linĂ©aire de matrice A = a -b b a ¶ , alors u C est l’application C-linĂ©aire z 7→ αz oĂč α = a + ib. Remarque 19.1 Ce rĂ©sultat est Ă  la base des conditions de Cauchy-Riemann que nous verrons un peu plus loin (paragraphe 19.6). En utilisant, pour α ∈ C * , la forme polaire α = ρe iΞ = ρ (cos (Ξ)+ i sin (Ξ)) avec ρ ∈ R +,* et Ξ ∈ R, l’application u R a pour matrice dans la base canonique de R 2 : A = ρ cos (Ξ) - sin (Ξ) sin (Ξ) cos (Ξ) ¶ 457

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Fonctions holomorphes

Dans ce chapitre nous allons gĂ©nĂ©raliser la notion de dĂ©rivation rencontrĂ©e pour les fonctionsd’une variable rĂ©elle au cas des fonctions d’une variable complexe.

19.1 La reprĂ©sentation de R2 dans CLe corps C des nombres complexes est identifiĂ© Ă  R2 par l’isomorphisme de R-espace vecto-

riels :ϕ : C → R2

z = x + iy 7→ (x, y)

Si uC est une application R-linéaire de C dans C, sa représentation dans R2 est donnée parle schéma suivant :

C uC→ Cϕ−1 ↑ ↓ ϕ

R2 uR→ R2

c’est donc l’application uR = ϕuCϕ−1 et uC est R-linĂ©aire si, et seulement si, uR est R-linĂ©aire.Les applications C-linĂ©aires de C dans C sont les applications z 7→ αz oĂč α = a + ib est

un nombre complexe avec a, b rĂ©els. La reprĂ©sentation R-linĂ©aire d’une telle application estl’application uR dĂ©finie par :

uR (x, y) = ϕ (α (x + iy)) = ϕ ((ax− by) + i (ay + bx))

= (ax− by, bx + ay)

et sa matrice dans la base canonique de R2 est A =

(a −bb a

).

RĂ©ciproquement si uC est une application de C dans C telle que uR = ϕ uC ϕ−1 soit une

application R-linéaire de matrice A =

(a −bb a

), alors uC est l’application C-linĂ©aire z 7→ αz

oĂč α = a + ib.

Remarque 19.1 Ce résultat est à la base des conditions de Cauchy-Riemann que nous verronsun peu plus loin (paragraphe 19.6).

En utilisant, pour α ∈ C∗, la forme polaire α = ρeiΞ = ρ (cos (Ξ) + i sin (Ξ)) avec ρ ∈ R+,∗ etΞ ∈ R, l’application uR a pour matrice dans la base canonique de R2 :

A = ρ

(cos (ξ) − sin (ξ)sin (ξ) cos (ξ)

)

457

458 Fonctions holomorphes

et uR = ρ·rΞ est la composĂ©e de la rotation rΞ d’angle Ξ = arg (α) (modulo 2π) et de l’homothĂ©tiehρ de rapport ρ = |α| > 0. C’est une similitude directe.

Remarque 19.2 Une similitude directe conserve les angles orientés et les cercles. Cette re-marque est à la base de la notion de représentation conforme que nous verrons plus loin.

Exercice 19.1 Soit α = a + ib un nombre complexe et uC l’application de C dans C dĂ©finiepar uC (z) = αz pour tout z ∈ C, oĂč z est le conjuguĂ© de z. Montrer que uC est R-linĂ©aire etdonner sa matrice dans la base canonique de R2.

Solution 19.1 La reprĂ©sentation R-linĂ©aire de uC est l’application uR dĂ©finie par :

uR (x, y) = ϕ (α (x− iy)) = ϕ ((ax + by) + i (bx− ay))

= (ax + by, bx− ay)

et sa matrice dans la base canonique de R2 est A =

(a bb −a

).

En utilisant, pour α non nul, la forme polaire α = ρeiΞ = ρ (cos (Ξ) + i sin (Ξ)) l’application uRa pour matrice :

A = ρ

(cos (ξ) sin (ξ)sin (ξ) − cos (ξ)

)

et uR = ρ · σΞ est la composĂ©e de la symĂ©trie orthogonale σΞ par rapport Ă  la droite DΞ faisant

l’angleξ

2=

arg (α)

2avec l’axe des x et de l’homothĂ©tie hρ de rapport ρ = |α| . C’est une simili-

tude indirecte.

La droite DΞ est dirigée par uΞ =

(cos

(Ξ2

)

sin(

Ξ2

))

, l’orthogonale D⊄Ξ est dirigĂ©e par vΞ =

( − sin(

Ξ2

)

cos(

Ξ2

))

et on a :

σΞ (uΞ) =

(cos (ξ) sin (ξ)sin (ξ) − cos (ξ)

) (cos

(Ξ2

)

sin(

Ξ2

))

=

(cos (Ξ) cos

(Ξ2

)+ sin (Ξ) sin

(Ξ2

)

sin (Ξ) cos(

Ξ2

)− cos (ξ) sin(

Ξ2

))

=

(cos

(ξ − ξ

2

)

sin(ξ − ξ

2

))

= uΞ

σΞ (vΞ) =

(cos (ξ) sin (ξ)sin (ξ) − cos (ξ)

) ( − sin(

Ξ2

)

cos(

Ξ2

))

=

(sin (Ξ) cos

(Ξ2

)− cos (ξ) sin(

Ξ2

)

− sin (ξ) sin(

Ξ2

)− cos (ξ) cos(

Ξ2

))

=

(sin

(ξ − ξ

2

)

− cos(ξ − ξ

2

))

= −vξ

donc σΞ est bien la symĂ©trie orthogonale par rapport Ă  la droite DΞ.

Exercice 19.2 Montrer qu’une application u : C → C est R-linĂ©aire si, et seulement si, ilexiste deux nombres complexes α et ÎČ tels que u (z) = αz + ÎČz pour tout z ∈ C.

Fonctions continues sur un ouvert de C 459

Solution 19.2 Il est clair qu’une telle application est R-linĂ©aire.RĂ©ciproquement si u est R-linĂ©aire, il suffit de connaĂźtre u (1) et u (i) pour connaĂźtre u (puisque(1, i) est une base du R-espace vectoriel C). On dĂ©finit alors les nombres complexes α et ÎČcomme les solutions du systĂšme linĂ©aire :

α + ÎČ = u (1)αi− ÎČi = u (i)

soit (α, ÎČ) =1

2(u (1)− i · u (i) , u (1) + i · u (i)) et on a pour tout z = x + iy ∈ C :

u (z) = xu (1) + yu (i) = x (α + ÎČ) + y (αi− ÎČi)

= α (x + iy) + ÎČ (x− iy) = αz + ÎČz.

19.2 Fonctions continues sur un ouvert de CNous dĂ©crivons tout d’abord quelques notions topologiques de base sur C.Toutes ces notions seront Ă©tudiĂ©es en dĂ©tails dans le chapitre sur les espaces mĂ©triques avec

le cas particulier des espaces vectoriels normés de dimension finie.

DĂ©finition 19.1 Étant donnĂ©s un nombre complexe ω et un nombre rĂ©el positif ou nul R, ledisque ouvert de centre ω et de rayon R est la partie de C dĂ©finie par :

D (ω,R) = z ∈ C | |z − ω| < Ret le disque fermĂ© de centre ω et de rayon R est la partie de C dĂ©finie par :

D (ω, R) = z ∈ C | |z − ω| ≀ R

Pour R = 0, on a D (ω, R) = ∅ et D (ω, R) = ω .En dĂ©signant par Ω le point de R2 d’affixe ω, un tel disque (ouvert ou fermĂ©) est identifiĂ©

au disque (ouvert ou fermĂ©) de R2 de centre Ω et de rayon R.Le bord d’un tel disque est le cercle de centre ω et de rayon R dĂ©fini par :

C (ω, R) = z ∈ C | |z − ω| = R .

Une paramétrisation de ce cercle est aussi donnée par :

(z ∈ C (ω, R)) ⇔ (∃t ∈ ]−π, π] | z = ω + R · eit)

DĂ©finition 19.2 On dit qu’une partie V de C est un voisinage de z0 ∈ C si elle contient uneboule ouverte centrĂ©e en z0 de rayon strictement positif.

DĂ©finition 19.3 On dit qu’une partie O de C est ouverte (ou que c’est un ouvert de C) si elleest vide ou si elle est non vide et pour tout z ∈ O il existe un rĂ©el r > 0 tel que D (z, r) ⊂ O.

L’ensemble vide et C sont des ouverts.Il est Ă©quivalent de dire qu’un ensemble non vide est un ouvert si, et seulement si, c’est un

voisinage de chacun de ses points.

Exercice 19.3 Montrer qu’un disque ouvert de C est un ouvert. Qu’en est-il d’un disquefermĂ© ?

460 Fonctions holomorphes

Solution 19.3 Soit D (ω,R) un disque ouvert. Si R = 0, on a alors D (ω, R) = ∅ et c’est unouvert. Sinon, pour z ∈ D (ω, R) , on a R−|z − ω| > 0 et pour 0 < Δ < R−|z − ω| , en utilisantl’inĂ©galitĂ© triangulaire, on voit que pour tout t ∈ D (z, Δ) , on a :

|t− ω| = |(t− z) + (z − ω)|≀ |t− z|+ |z − ω| < Δ + |z − ω| < R

(figure 19.1) ce qui signifie que t ∈ D (ω, R) . On a donc D (z, Δ) ⊂ D (ω,R) et D (ω, R) est un

ω

z

t

R

Δ

Fig. 19.1 –

ouvert.Un disque fermĂ© n’est pas ouvert. En effet pour z = ω + R · eiΞ ∈ D (ω, R) et tout Δ > 0, lepoint t = z +

Δ

2eiΞ est dans D (z, Δ) et pas dans D (ω,R) puisque :

|t− ω| =âˆŁâˆŁâˆŁÏ‰ +

(R +

Δ

2

)eiΞ − ω

∣∣∣ = R +Δ

2> R.

Exercice 19.4 Montrer qu’une rĂ©union quelconque d’ouverts de C est un ouvert.

Solution 19.4 Soit (Oi)i∈I une famille d’ouverts qu’on peut supposer non vides. Si z ∈ O =⋃i∈I

Oi, il existe un indice i ∈ I tel que z ∈ Oi et comme Oi est ouvert non vide, il existe un réel

ri > 0 tel que D (z, ri) ⊂ Oi ⊂ O. L’ensemble O est donc ouvert.

Exercice 19.5 Montrer qu’une intersection finie d’ouverts de C est un ouvert. Que dire d’uneintersection infinie d’ouverts de C ?

Solution 19.5 Soit (Oi)1≀i≀n une famille finie d’ouverts qu’on peut supposer non vides. Si

z ∈ O =n⋂

i=1

Oi, comme chaque Oi est ouvert, il existe des rĂ©el ri > 0 tels que D (z, ri) ⊂ Oi

pour tout i compris entre 1 et n et en notant r = min1≀i≀n

ri, on a r > 0 et D (z, r) ⊂ O. L’ensemble

O est donc ouvert.Dans le cas d’une intersection infinie, on peut avoir r = inf

i∈Iri = 0. Par exemple pour R ≄ 0 et

ω ∈ C, le disque fermĂ©+∞⋂

k=1

D

(ω,R +

1

k

)= D (ω, R) n’est pas ouvert.

Fonctions continues sur un ouvert de C 461

DĂ©finition 19.4 On dit qu’une partie F de C est fermĂ©e (ou que c’est un fermĂ© de C) si soncomplĂ©mentaire dans C, C \ F , est un ouvert de C.

L’ensemble vide et C sont Ă  la fois ouverts et fermĂ©s.

Exercice 19.6 Montrer qu’une intersection quelconque de fermĂ©s de C est un fermĂ©.

Solution 19.6 RĂ©sulte de :C \

⋂i∈I

Fi =⋃i∈I

(C \ Fi)

Exercice 19.7 Montrer qu’une rĂ©union finie de fermĂ©s de C est un fermĂ©. Que dire d’unerĂ©union infinie de fermĂ©s de C ?

Solution 19.7 RĂ©sulte de :

C \n⋃

i=1

Fi =n⋂

i=1

(C \ Fi)

Une rĂ©union infinie de fermĂ©s de C n’est pas nĂ©cessairement fermĂ©. Par exemple pour R > 0

et ω ∈ C, le disque ouvert⋃+∞

k=1k> 1

R

D

(ω,R− 1

k

)= D (ω, R) n’est pas ouvert.

Exercice 19.8 Montrer qu’un disque fermĂ© de C est un fermĂ©.

Solution 19.8 Laissée au lecteur.

Le résultat suivant nous fournit une caractérisation séquentielle de la notion de fermé.

ThéorÚme 19.1 Une partie non vide F de C est fermée si, et seulement si, pour toute suite(zn)n∈N de F qui est convergente, la limite z = lim

n→+∞zn est dans F .

Si O est un ouvert non vide de C, on peut l’identifier Ă  un ouvert Ω de R2 et touteapplication f : O → C peut ĂȘtre identifiĂ©e Ă  l’application ϕ de Ω dans R2 dĂ©finie parϕ (x, y) = (P (x, y) , Q (x, y)) oĂč P est la partie rĂ©elle de f et Q sa partie imaginaire.

On connaßt déjà les notions de limite, de continuité et de dérivabilité pour les fonctionsréelles P et Q.

Nous allons dĂ©finir ces notions pour les fonctions d’une variable complexe et Ă©tudier le lienavec les notions rĂ©elles.

Pour la notion de limite, on se contente du cas particulier d’une fonction dĂ©finie sur unvoisinage d’un point privĂ© de ce point.

DĂ©finition 19.5 Soient V un voisinage d’un point z0 de C et une application f : V \z0 → C.On dit que f admet une limite en z0, si il existe un nombre complexe ` tel que pour tout rĂ©elΔ > 0, il existe un rĂ©el η > 0 tel que si z ∈ V et 0 < |z − z0| < η alors |f (z)− `| < Δ.

Comme dans le cas rĂ©el, on dĂ©duit de l’inĂ©galitĂ© triangulaire pour le module que si unefonction f admet une limite en un point, cette derniĂšre est alors unique et on peut noter` = lim

z→z0z 6=z0

f (z) . En pratique, on note ` = limz→z0

f (z) Ă©tant entendu que z tend vers z0 avec z 6= z0.

On a donc :(` = lim

z→z0

f (z)

)⇔ (∀Δ > 0, ∃η > 0 | 0 < |z − z0| < η ⇒ |f (z)− `| < Δ)

⇔(

limz→z0

|f (z)− `| = 0

)

(on peut toujours trouver η > 0 tel que D (z0, η) ⊂ V).

462 Fonctions holomorphes

DĂ©finition 19.6 Soient O un ouvert non vide de C et une application f : O → C.On dit que f est continue en z0 ∈ O si lim

z→z0

f (z) = f (z0) .

On dit que f est continue sur O, si elle est continue en tout point de O.

La continuité de f en z0 se traduit donc par :

∀Δ > 0, ∃η > 0 | z ∈ O et |z − z0| < η ⇒ |f (z)− f (z0)| < Δ

Exemple 19.1 Une fonction constante est continue en tout point de C.

Exercice 19.9 Montrer que la fonction z 7→ |z| est continue en tout point de C.

Solution 19.9 RĂ©sulte de ||z| − |z0|| < |z − z0| .

Exercice 19.10 Montrer que pour tout entier naturel n, la fonction z 7→ zn est continue entout point de C.

Solution 19.10 Pour n = 0, il s’agit de la fonction constante Ă©gale Ă  1 et pour n ≄ 1, z0 ∈ C,on peut trouver un rĂ©el R > 0 tel que z0 ∈ D (0, R) et pour tout z ∈ D (0, R) , on a :

|zn − zn0 | = |z − z0|

∣∣∣∣∣n−1∑

k=0

zn−1−kzk0

∣∣∣∣∣ ≀ nRn−1 |z − z0| →x→z0

0.

Exercice 19.11 Montrer que pour tout entier naturel n, la fonction z 7→ zn est continue entout point de C.

Solution 19.11 RĂ©sulte de :

|zn − z0n| = |zn − zn

0 | →x→z0

0.

Une définition équivalente de la continuité en un point est donnée par le résultat suivant.

ThĂ©orĂšme 19.2 Une fonction f : O → C est continue en a ∈ O si, et seulement si, pourtoute suite (zn)n∈N de points de O qui converge vers a, la suite (f (zn))n∈N converge vers f (a) .

Démonstration. On copie la démonstration du cas réel.Dans ce qui suit, O est un ouvert non vide de C et f une application de O dans C.

ThĂ©orĂšme 19.3 Si f : O → C est continue en z0 ∈ O, elle est alors bornĂ©e au voisinage de cepoint, c’est-Ă -dire qu’il existe un rĂ©el r > 0 et une constante M > 0 tels que D (z0, r) ⊂ O et :

∀z ∈ D (z0, r) , |f (z)| ≀ M.

Démonstration. On copie la démonstration du cas réel.Une définition topologique de la notion de continuité est donnée par le résultat suivant.

ThĂ©orĂšme 19.4 Une fonction f : O → C est continue sur O si, et seulement si, l’imagerĂ©ciproque par f de tout ouvert [resp. fermĂ©] de C est un ouvert [resp. fermĂ©] de O (i. e.f−1 (O) = O ∩Oâ€Č [resp. f−1 (O) = O ∩ F â€Č]oĂč Oâ€Č [resp. F â€Č]est un ouvert [resp. fermĂ©] de C).

Fonctions continues sur un ouvert de C 463

DĂ©monstration. Supposons f continue et soit O1 un ouvert de C. Pour tout z0 ∈ f−1 (O1) ,f (z0) est dans l’ouvert O1, il existe donc un rĂ©el Δ > 0 tel que le disque ouvert D (f (z0) , Δ)soit contenue dans O1 et avec la continuitĂ© de f, on peut trouver un rĂ©el η > 0 tel que pourtout z ∈ D (z0, η) ∩ O on ait f (z) ∈ D (f (z0) , Δ) ⊂ O1. On a donc D (z0, η) ∩ O ⊂f−1 (O1) eten posant Oâ€Č =

⋃z0∈f−1(O1)

D (z0, η) , on dĂ©finit un ouvert de C tel que f−1 (O1) = C ∩Oâ€Č, ce qui

prouve que f−1 (O1) est ouvert dans C.RĂ©ciproquement, supposons que l’image rĂ©ciproque par f de tout ouvert de C est un ouvert

de O. Pour z0 ∈ C et Δ > 0, f−1 (D (f (z0) , Δ)) est un ouvert de O, il existe donc un rĂ©el η > 0tel que D (z0, η) ∩ O ⊂ f−1 (D (f (z0) , Δ)) , ce qui signifie que |f (z)− f (z0)| ≀ Δ pour toutz ∈ B (z0, η) ∩ O. La fonction f est donc continue en tout point de O.

Pour ce qui est de l’image rĂ©ciproque des fermĂ©s, on utilise le fait qu’un fermĂ© est le complĂ©-mentaire d’un ouvert et l’image rĂ©ciproque du complĂ©mentaire est le complĂ©mentaire de l’imagerĂ©ciproque.

Pour ce qui est des opérations élémentaires, on a le résultat suivant.

ThéorÚme 19.5 Soient f, g deux fonctions définies sur O, à valeurs complexes et continuesen z0 ∈ O. Les fonctions f, |f | , f + g et fg sont continues en z0.Si f (z0) 6= 0, il existe alors un voisinage ouvert V de z0 dans O tel que f (z) 6= 0 pour tout

z ∈ V et la fonction1

fqui est définie sur V est continue en z0.

DĂ©monstration. Pour f c’est clair et pour les autres fonctions, on copie la dĂ©monstrationdu cas rĂ©el.

Exercice 19.12 Montrer que les fonctions z 7→ < (z) et z 7→ = (z) sont continues en tout pointde C.

Solution 19.12 RĂ©sulte de < (z) =1

2(z + z) et = (z) =

1

2i(z − z) .

De la continuitĂ© des applications z 7→ zn pour tout entier naturel n, on dĂ©duit que lesfonctions polynomiales sont continue sur C et que les fonctions rationnelles sont continue surleurs domaines de dĂ©finition.

Pour la composition des applications, on a le résultat suivant.

ThĂ©orĂšme 19.6 Si f : O → C est continue en z0 ∈ O, Oâ€Č est un ouvert de C contenant f (O)et g : Oâ€Č → C est continue en f (z0) , alors g f est continue en z0.

Exercice 19.13 Montrer que si ϕ : R+ → C est une fonction continue et f : O → C unefonction continue, alors la fonction z 7→ ϕ (|f (z)|) est continue sur O.

Solution 19.13 Soient Δ > 0 et z0 ∈ O. Comme ϕ est continue en |f (z0)| , il existe ÎŽ > 0tel que |ϕ (t)− ϕ (|f (z0)|)| < Δ pour tout rĂ©el t > 0 tel que |t− |f (z0)|| < ÎŽ. En dĂ©signantpar η > 0 un rĂ©el tel que ||f (z)| − |f (z0)|| < ÎŽ pour tout z ∈ O tel que |z − z0| < η, on a|ϕ (|f (z)|)− ϕ (|f (z0)|)| < Δ pour tout z ∈ O tel que |z − z0| < η. La fonction z 7→ ϕ (|f (z)|)est donc continue en z0.

464 Fonctions holomorphes

19.3 IntĂ©grales curvilignesDĂ©finition 19.7 Un chemin dans C est une application Îł : [a, b] → C continue et de classe C1

par morceaux, oĂč [a, b] est un segment rĂ©el non rĂ©duit Ă  un point (on a donc a < b).Si Îł (a) = Îł (b) , on dit que ce chemin est fermĂ© ou que c’est un lacet.Si l’application Îł est injective, on dit alors que le chemin est sans points doubles.

On rappelle qu’une fonction γ : [a, b] → C est dite de classe C1 par morceaux, s’il existe unesubdivision

a0 = a < a1 < · · · < ap < ap+1 = b

telle que la fonction f se prolonge par continuitĂ© en une fonction de classe C1 sur chacun desintervalle [ak, ak+1] (0 ≀ k ≀ p).

Si Îł : [a, b] → C est un chemin, son image Im (Îł) = Îł ([a, b]) est le chemin gĂ©omĂ©trique qu’ildĂ©finit et Îł est une paramĂ©trisation de Im (Îł) .

Si α, ÎČ sont deux nombres complexes, on dit qu’un chemin Îł : [a, b] → C relie α et ÎČ, siÎł (a) = α et Îł (b) = ÎČ. On dit alors, dans ce cas, que α est l’origine et ÎČ l’extrĂ©mitĂ© du chemingĂ©omĂ©trique Im (Îł) .

Exemple 19.2 Le cercle de centre ω et de rayon R > 0 parcouru une fois dans le sens directpeut ĂȘtre paramĂ©trĂ© par :

ÎłÏ‰,R : [0, 2π] → Ct 7→ ω + Reit

Ce lacet sera notĂ© plus simplement : |z − ω| = r.

Exemple 19.3 Pour α, ÎČ dans C, le segment [α, ÎČ] reliant α et ÎČ peut ĂȘtre paramĂ©trĂ© par :

Îł : [0, 1] → Ct 7→ (1− t) α + tÎČ

Si O est un ouvert non vide de C, f : O → C une fonction continue et Îł : [a, b] → O unchemin Ă  valeurs dans O, on peut dĂ©finir l’intĂ©grale de f le long de ce chemin en s’inspirant dela dĂ©finition de l’intĂ©grale de Riemann d’une fonction dĂ©finie sur un segment rĂ©el et Ă  valeurscomplexes. Pour ce faire, on dĂ©coupe, pour tout entier naturel n ≄ 1, l’intervalle [a, b] en n

intervalles de mĂȘme longueur en utilisant la subdivision (tn,k)0≀k≀n dĂ©finie par tk = a + kb− a

npour 0 ≀ k ≀ n et on associe Ă  ces subdivisions la suite (In)n≄1 dĂ©finie par :

∀n ≄ 1, In =n−1∑

k=0

f (zn,k) (zn,k+1 − zn,k)

oĂč zn,k = Îł (tn,k) . En Ă©crivant que :

zn,k+1 − zn,k = Îł (tn,k+1)− Îł (tn,k) = (tn,k+1 − tn,k) Îłâ€Č (tn,k) + o

(1

n

)

(Îłâ€Č (tn,k) = limh→0

γ (tn,k + h)− γ (tn,k)

hĂ©quivaut Ă  Îł (tn,k + h) − Îł (tn,k) = hÎłâ€Č (tn,k) + o (h) et ici

h = tn,k+1 − tn,k =b− a

n), on a :

In ≈n−1∑

k=0

f (zn,k) (tn,k+1 − tn,k) Îłâ€Č (tn,k)

et il est naturel de donner la définition suivante.

Intégrales curvilignes 465

DĂ©finition 19.8 Si O est un ouvert non vide de C, f : O → C une fonction continue etÎł : [a, b] → O un chemin Ă  valeurs dans O, alors l’intĂ©grale curviligne de f le long de Îł est lenombre complexe : ∫

Îł

f (z) dz =

∫ b

a

f (Îł (t)) Îłâ€Č (t) dt.

En notant :a0 = a < a1 < · · · < ap < ap+1 = b

une subdivision telle que Îł soit de classe C1 sur chaque [ak, ak+1] (0 ≀ k ≀ p), on a prĂ©cisĂ©ment :∫

Îł

f (z) dz =

p∑

k=0

∫ ak+1

ak

f (Îł (t)) Îłâ€Č (t) dt

Pratiquement cette intĂ©grale curviligne se calcule en posant z = Îł (t) et dz = Îłâ€Č (t) dt avec tparcourant [a, b] pour z parcourant Îł ([a, b]) .

Exercice 19.14 Soient ω un nombre complexe et R un rĂ©el strictement positif. Calculer :

In =

∫

|z−ω|=R

(z − ω)n dz

pour tout entier relatif n.

Solution 19.14 On a :

In =

∫ 2π

0

RneintiReitdt = iRn+1

∫ 2π

0

ei(n+1)tdt

=

0 si n 6= −12iπ si n = −1

Exercice 19.15 Donner une paramétrisation γ du bord du rectangle R défini par :

R = z ∈ C | −a ≀ < (z) ≀ a, −b ≀ = (z) ≀ b

oĂč a, b sont des rĂ©els strictement positifs. Calculer∫

Îł

zndz pour tout entier relatif n.

Solution 19.15 Une paramétrisation γ du bord de R est donnée par :

γ : [0, 4] → C∗

t 7→

(2t− 1) a− ib si 0 ≀ t ≀ 1a + ib (2t− 3) si 1 ≀ t ≀ 2(5− 2t) a + ib si 2 ≀ t ≀ 3−a + i (7− 2t) b si 3 ≀ t ≀ 4

et pour f continue sur C∗, on a :∫

Îł

f (z) dz = 2a

∫ 1

0

f ((2t− 1) a− ib) dt

+ 2ib

∫ 2

1

f (a + ib (2t− 3)) dt

− 2a

∫ 3

2

f ((5− 2t) a + ib) dt

− 2ib

∫ 4

3

f (−a + i (7− 2t) b) dt

466 Fonctions holomorphes

ce qui s’écrit en utilisant les changement de variables respectifs x = 2t−1, y = 2t−3, z = 2t−5,u = 2t− 7 :

∫

Îł

f (z) dz = a

∫ 1

−1

f (xa− ib) dx + ib

∫ 1

−1

f (a + iby) dy

− a

∫ 1

−1

f (−za + ib) dz − ib

∫ 1

−1

f (−a− iub) du

Pour f paire, cela donne∫

Îł

f (z) dz = 0 et pour f impaire, on a :

∫

Îł

f (z) dz = 2a

∫ 1

−1

f (xa− ib) dx + 2ib

∫ 1

−1

f (a + ibx) dx

Pour f (z) = z2n+1 avec n entier relatif diffĂ©rent de −1, on a :∫

Îł

f (z) dz = 2a

∫ 1

−1

(xa− ib)2n+1 dx + 2ib

∫ 1

−1

(a + ibx)2n+1 dx

=1

n + 1

[(xa− ib)2(n+1)

]1

−1+

1

n + 1

[(a + ibx)2(n+1)

]1

−1

=(a− ib)2(n+1) − (−a− ib)2(n+1)

n + 1+

(a + ib)2(n+1) − (a− ib)2(n+1)

n + 1

= 0

et pour f (z) =1

z, on a :

∫

Îł

dz

z= 2a

∫ 1

−1

dt

xa− ib+ 2ib

∫ 1

−1

dx

a + ibx

= 2a

∫ 1

−1

xa + ib

x2a2 + b2dt + 2ib

∫ 1

−1

a− ibx

a2 + x2b2dx

= 4iab

∫ 1

0

dt

t2a2 + b2+ 4iab

∫ 1

0

dt

a2 + t2b2

= 4ia

b

∫ 1

0

dt

t2 a2

b2+ 1

+ 4ib

a

∫ 1

0

dt

1 + t2 b2

a2

= 4i

∫ ab

0

dt

x2 + 1+ 4i

∫ ba

0

dt

1 + x2

= 4i

(arctan

(a

b

)+ arctan

(b

a

))

= 4iπ

2= 2iπ.

Nous verrons plus loin que ces résultats ne sont pas étonnant.

Exercice 19.16 Calculer∫

[1,2+i]

dz

z.

Solution 19.16 Si [α, ÎČ] est un segment dans C paramĂ©trĂ© par :

Îł : t ∈ [0, 1] 7→ (1− t) α + tÎČ

Intégrales curvilignes 467

on a, dans la cas oĂč 0 n’est pas sur le segment [α, ÎČ] :∫

[α,ÎČ]

dz

z=

∫ 1

0

ÎČ âˆ’ α

(1− t) α + tÎČdt =

∫ 1

0

ÎČ âˆ’ α

(ÎČ âˆ’ α) t + αdt

ce qui donne pour α = 1 et ÎČ = 2 + i :∫

[1,2+i]

dz

z= (1 + i)

∫ 1

0

dt

(1 + i) t + 1= (1 + i)

∫ 1

0

1 + t− it

2t2 + 2t + 1dt

= (1 + i)

(∫ 1

0

1 + t

2t2 + 2t + 1dt− i

∫ 1

0

t

2t2 + 2t + 1dt

)

= (1 + i)

(ln (5)

4+

arctan (3)

2− π

8− i

(ln (5)

4− arctan (3)

2+

π

8

))

=ln (5)

2+ i

(arctan (3)− π

4

)

Exercice 19.17 Calculer∫

|z|=1

f (z) dz pour les fonctions suivantes :

1. f (z) = |z|n pour z ∈ C∗, oĂč n est un entier relatif.2. f (z) = < (zn)−= (zn) pour z ∈ C∗, oĂč n est un entier relatif.

Solution 19.17 Une paramĂ©trisation du cercle de centre 0 et de rayon 1 parcouru une foisdans le sens direct est donnĂ© par l’application Îł dĂ©finie par :

∀t ∈ [0, 2π], Îł(t) = eit.

et on a∫

|z|=1

f (z) dz =

∫

Îł

f (z) dz =

∫ 2π

0

f (eit) ieitdt.

1. Pour f (z) = |z|n , on a :∫

Îł

f (z) dz =

∫ 2π

0

∣∣eit∣∣n ieitdt =

∫ 2π

0

ieitdt = 0.

2. Pour f (z) = < (zn)−= (zn) , on a :∫

Îł

f (z) dz =

∫ 2π

0

(cos (nt)− sin (nt)) (i cos (t)− sin (t)) dt

= i

∫ 2π

0

(cos (nt)− sin (nt)) cos (t) dt−∫ 2π

0

(cos (nt)− sin (nt)) sin (t) dt

= i

∫ 2π

0

cos (nt) cos (t) dt−∫ 2π

0

sin (nt) sin (t) dt

puisque∫ 2π

0

cos (nt) sin (mt) dt = 0 pour tous n,m dans Z. Et avec∫ 2π

0

cos (nt) cos (mt) dt =

0,

∫ 2π

0

sin (nt) sin (mt) dt = 0 pour n 6= m et∫ 2π

0

cos2 (nt) dt =

∫ 2π

0

sin2 (nt) dt = π pour

n 6= 0, on déduit que :∫

Îł

f (z) dz =

0 si n 6= 1(−1 + i) π si n = 1

468 Fonctions holomorphes

Exercice 19.18 Soit f dĂ©finie par f (z) = z2− 1 pour tout z ∈ C. Calculer∫

Îł

f (z) dz pour les

chemins suivants :

1. γ : t ∈ [0, 1] 7→ t + it2.

2. Îł : t ∈ [0, 2π] 7→ et+it.

3. Îł : t ∈ [0, 2π] 7→ cos (t) + i sin (2t) .

Solution 19.18 On a :

1.∫

Îł

f (z) dz =

∫ 1

0

((t + it2

)2 − 1)

(1 + 2it) dt

=

∫ 1

0

(t + it2

)2(1 + 2it) dt−

∫ 1

0

(1 + 2it) dt

=

[(t + it2)

3

3− (

t + it2)]1

0

=(1 + i)3

3− (1 + i)

= −5

3− 1

3i.

2.∫

Îł

f (z) dz =

∫ 2π

0

(e2t+2it − 1

)(1 + i) et+itdt

=

∫ 2π

0

e3(1+i)t (1 + i) dt−∫ 2π

0

(1 + i) e(1+i)tdt

=

[e3(1+i)t

3− e(1+i)t

]2π

0

=e6π

3− e2π +

2

3

3.∫

Îł

f (z) dz =

∫ 2π

0

((cos (t) + i sin (2t))2 − 1

)(− sin (t) + 2i cos (2t)) dt

=

∫ 2π

0

(cos (t) + i sin (2t))2 (− sin (t) + 2i cos (2t)) dt

−∫ 2π

0

(− sin (t) + 2i cos (2t)) dt

=

[(cos (t) + i sin (2t))3

3− (cos (t) + i sin (2t))

]2π

0

= 0

Exercice 19.19 Pour r > 0, on désigne par γr le demi-cercle défini par :

Îłr : t ∈[−π

2,π

2

]7→ reit.

Calculer limr→+∞

∫

Îłr

e−z

z2dz.

Intégrales curvilignes 469

Solution 19.19 On a, pour r > 0 :∫

Îłr

e−z

z2dz =

∫ π2

−π2

e−reit

r2e2itireitdt =

i

r

∫ π2

−π2

e−reit

e−itdt

et : ∣∣∣∣∫

Îłr

e−z

z2dz

∣∣∣∣ ≀1

r

∫ π2

−π2

e−r cos(t)dt ≀ 1

r

∫ π2

−π2

dt =π

r→

r→+∞0

et en consĂ©quence limr→+∞

∫

Îłr

e−z

z2dz = 0.

En utilisant les subdivisions prĂ©cĂ©dentes de l’intervalle [a, b] , des approximations de la lon-gueur du chemin Îł sont donnĂ©es par :

`n =n−1∑

k=0

|zn,k+1 − zn,k| ≈n−1∑

k=0

(tn,k+1 − tn,k) |Îłâ€Č (tn,k)|

et il est naturel de définir la longueur de γ comme suit.

DĂ©finition 19.9 Si Îł : [a, b] → C est un chemin, sa longueur est le rĂ©el positif :

` (Îł) =

∫ b

a

|Îłâ€Č (t)| dt.

Exercice 19.20 Calculer la longueur d’un cercle de centre z0 ∈ C et de rayon r > 0 parcouruune fois dans le sens direct et la longueur d’un segment reliant deux nombres complexes α et ÎČ.

Solution 19.20 Pour le cercle paramétré par γz0,r, on a :

` (Îłz0,r) =

∫ 2π

0

∣∣ireit∣∣ dt = 2πr

et pour un segment [α, ÎČ] :

` (Îł) =

∫ 1

0

|ÎČ âˆ’ a| dt = |ÎČ âˆ’ a| .

ThĂ©orĂšme 19.7 Si O est un ouvert non vide de C, f : O → C une fonction continue etÎł : [a, b] → O un chemin Ă  valeurs dans O, on a alors :

∣∣∣∣∫

Îł

f (z) dz

∣∣∣∣ ≀ ` (Îł) · supz∈Im(Îł)

|f (z)| .

DĂ©monstration. Comme Îł est continue, Im (Îł) est compact dans C comme image ducompact [a, b] par l’application continue Îł et la fonction f qui est continue est bornĂ©e sur lecompact Im (Îł) , ce qui valide l’existence de sup

z∈Im(γ)

|f (z)| .On a alors, par définitions :

∣∣∣∣∫

Îł

f (z) dz

∣∣∣∣ =

∣∣∣∣∫ b

a

f (Îł (t)) Îłâ€Č (t) dt

∣∣∣∣ ≀∫ b

a

|f (Îł (t))| |Îłâ€Č (t)| dt

≀ supz∈Im(Îł)

|f (z)|∫ b

a

|Îłâ€Č (t)| dt = ` (Îł) · supz∈Im(Îł)

|f (z)| .

La notion d’ouvert connexe dans C peut se dĂ©finir en utilisant les chemins.

470 Fonctions holomorphes

DĂ©finition 19.10 On dit qu’un ouvert O de C est connexe si deux points quelconques deO peuvent ĂȘtre joints par un chemin dans O (i. e. pour α, ÎČ dans O, il existe un cheminÎł : [0, 1] → O tel que Îł (0) = α et Îł (1b) = ÎČ).

En rĂ©alitĂ©, on dit usuellement qu’une partie C de C est connexe s’il n’est pas possible del’écrire comme rĂ©union disjointe de deux ouverts non vides de C (un ouvert de C Ă©tant unensemble C ∩O, oĂč O est un ouvert de C) et on montre qu’un ouvert non vide de C est connexesi, et seulement si, il est connexe par arcs, c’est-Ă -dire que deux points quelconques de C peuventĂȘtre reliĂ©s par un chemin dans C.

La dĂ©finition d’ouvert connexe que nous avons donnĂ© nous suffira.

19.4 Fonctions analytiquesPour ce paragraphe, O est un ouvert non vide de C, f une application de O dans C et z0

un point de O.

DĂ©finition 19.11 On dit que f est analytique en z0 s’il existe un rĂ©el r > 0 (dĂ©pendant de z0)tel que D (z0, r) ⊂ O et une suite (an)n∈N de nombres complexes tels que :

∀z ∈ D (z0, r) , f (z) =+∞∑n=0

an (z − z0)n

On dit aussi que f est analytique en z0 si elle est développable en série entiÚre au voisinagede z0.

On peut remarquer que a0 = f (z0) .Avec les notations de la définition précédente la série entiÚre

∑ant

n a un rayon de conver-gence R0 ≄ r.

Dire que f est analytique en z0 Ă©quivaut Ă  dire que la fonction fz0 : t 7→ f (z0 + t) , qui estdĂ©finie sur le disque ouvert D (0, r) , est dĂ©veloppable en sĂ©rie entiĂšre au voisinage de 0.

DĂ©finition 19.12 On dit que f est analytique sur O si elle est analytique en tout point de O.

Du théorÚme 14.11 sur la continuité des fonctions développables en série entiÚre au voisinagede 0, on déduit le suivant.

ThéorÚme 19.8 Toute fonction analytique sur O est continue sur cet ouvert.

DĂ©monstration. Pour z0 ∈ O la fonction fz0 : t 7→ f (z0 + t) =+∞∑n=0

antn, qui est définie

dans un voisinage de 0, est continue en 0, ce qui revient à dire que f est continue en z0.De cette continuité, on déduit que le développement en série entiÚre au voisinage de z0 est

unique.

Exercice 19.21 Montrer que toute fonction polynomiale est analytique sur C.

Solution 19.21 Comme pour tout nombre complexe z0 la famille((z − z0)

k)

0≀k≀nest une

base de Cn [z] , toute fonction polynomiale P ∈ Cn [z] s’écrit de maniĂšre unique P (z) =n∑

k=0

ak (z − z0)k et en consĂ©quence est analytique en z0 (on a an+k = 0 pour tout k ≄ 0).

Fonctions analytiques 471

Exercice 19.22 Montrer que la fonction f : z 7→ 1

1− zest analytique sur D (0, 1) .

Solution 19.22 On sait déjà que cette fonction est développable en série entiÚre en 0 avec,

pour tout z ∈ D (0, 1) , f (z) =+∞∑n=0

zn.

Pour z0 ∈ D (0, 1) et z ∈ D (z0, 1− |z0|) ⊂ D (0, 1) (faire un dessin), on a :

f (z) =1

1− z0

1

1− z−z0

1−z0

=+∞∑n=0

(z − z0)n

(1− z0)n+1

et f est analytique en z0.

Au paragraphe 15.2 nous avons dĂ©fini la fonction exponentielle complexe par ez =+∞∑n=0

zn

n!pour tout nombre complexe z. On note aussi exp (z) pour ez.

Exercice 19.23 Montrer que la fonction exponentielle complexe est analytique sur C.

Solution 19.23 En utilisant l’équation fonctionnelle vĂ©rifiĂ©e par la fonction exponentielle (thĂ©o-rĂšme 15.2), on a pour tout z0 ∈ C :

ez = ez0ez−z0 = ez0

+∞∑n=0

(z − z0)n

n!

et f est analytique en z0.

Nous verrons un peu plus loin que si f est une fonction développable en série entiÚre sur undisque ouvert D (0, R) de centre 0 et de rayon R > 0, elle est alors analytique sur ce disque.

En utilisant les résultats relatifs aux opérations sur les fonctions développables en sérieentiÚre au voisinage de 0 (théorÚmes 14.8 et 14.9), on déduit le suivant.

ThéorÚme 19.9 La somme et le produit de deux fonctions analytiques sur O est analytiquesur O.

Plus prĂ©cisĂ©ment si f (z) =+∞∑n=0

an (z − z0)n et g (z) =

+∞∑n=0

bn (z − z0)n pour z ∈ D (z0, r) ⊂ O,

on a alors f (z) + g (z) =+∞∑n=0

(an + bn) (z − z0)n et f (z) g (z) =

+∞∑n=0

cn (z − z0)n avec cn =

n∑k=0

akbn−k.

Exercice 19.24 Montrer que les fonctions f : z 7→ cos (z) , z 7→ sin (z) , z 7→ ch (z) et z 7→sh (z) sont analytiques sur C.

Solution 19.24 Ce sont des combinaisons linéaires de la fonction exponentielle.

Exercice 19.25 Montrer qu’une fonction rationnelle est analytique sur son domaine de dĂ©fi-nition.

472 Fonctions holomorphes

Solution 19.25 Sachant qu’une fonction polynomiale est analytique et en utilisant le thĂ©orĂšmede dĂ©composition en Ă©lĂ©ments simples, il suffit de montrer le rĂ©sultat pour les fonctions ration-

nelles de la forme z 7→ 1

(z − a)m oĂč a est un nombre complexe et m un entier naturel non nul.

Pour z0 ∈ C \ a et z ∈ D (z0, |z0 − a|) ⊂ C \ a , on a :

1

(z − a)m =1

(z − z0 + z0 − a)m

=1

(z0 − a)m

1(1− z−z0

a−z0

)m =1

(z0 − a)m

+∞∑n=0

an (z − z0)n

sachant que la fonction t 7→ 1

(1− t)m est dĂ©veloppable en sĂ©rie entiĂšre sur D (0, 1) .

Si maintenant f est une fonction rationnelle, le théorÚme de décomposition en élément simples

nous dit qu’elle s’écrit f = P +p∑

k=1

αk1

(z − ak)mk

oĂč P est une fonction polynomiale, les αk sont

des nombres complexes et les mk des entiers naturels non nuls. La fonction P Ă©tant analytique

sur C et les fonctions z 7→ 1

(z − ak)mk

analytiques sur C\ak , on en déduit que f est analytique

sur l’intersection de ces ensembles, soit sur C \ a1, · · · , ap qui est le domaine de dĂ©finition def.

Remarque 19.3 Montrer que le quotient ou la composĂ©e de deux fonctions analytiques estanalytique sur son domaine de dĂ©finition est assez dĂ©licat. Nous obtiendrons ces rĂ©sultats commeconsĂ©quences d’un rĂ©sultat Ă©lĂ©mentaire relatif au quotient ou Ă  la composĂ©e de deux fonctionsC-dĂ©rivables aprĂšs avoir dĂ©fini cette notion et montrĂ© qu’elle est Ă©quivalente Ă  l’analyticitĂ©.

19.5 La dérivation complexe. Fonctions holomorphesPour ce paragraphe, O est un ouvert non vide de C, f une application de O dans C et z0

un point de O.La notion de dĂ©rivabilitĂ© pour une fonction d’une variable complexe et Ă  valeurs complexes

se défini comme dans le cas réel.

DĂ©finition 19.13 On dit que f est dĂ©rivable en z0 si la fonction z 7→ f (z)− f (z0)

z − z0

définie

sur O \ z0 admet une limite en z0.

Quand cette limite existe, elle est unique, on la note f â€Č (z0) et on dit que c’est le nombredĂ©rivĂ© de f en z0.

De maniĂšre Ă©quivalente, on peut dire que f est dĂ©rivable en z0 si, et seulement si, elle admetle dĂ©veloppement limitĂ© d’ordre 1 en z0 :

f (z) = f (z0) + f â€Č (z0) (z − z0) + |z − z0| Δ (z) (19.1)

oĂč limz→z0

Δ (z) = 0.

Définition 19.14 On dit que f est holomorphe (ou C-dérivable) sur O si elle est dérivable entout point de O.

La dérivation complexe. Fonctions holomorphes 473

Si f est une fonction holomorphe sur O, la fonction z 7→ f â€Č (z) est la fonction dĂ©rivĂ©e de f.Si f est holomorphe sur O avec f â€Č Ă©galement holomorphe, la dĂ©rivĂ©e de f â€Č est notĂ©e f â€Čâ€Č.

Par rĂ©currence, on peut dĂ©finir les dĂ©rivĂ©es d’ordre n notĂ©es f (n) comme dans le cas rĂ©el. Nousverrons plus loin qu’une fonction holomorphe est en fait toujours indĂ©finiment dĂ©rivable (ce quiest faux pour les fonctions d’une variable rĂ©elle).

Exemple 19.4 Il est facile de vĂ©rifier qu’une fonction constante sur O est holomorphe dedĂ©rivĂ©e nulle en tout point.

Exercice 19.26 Les fonctions z 7→ z, z 7→ < (z) , z 7→ = (z) , z 7→ |z|2 , z 7→ |z| sont-ellesholomorphes sur C ?

Solution 19.26 Pour z 6= z0, on a en utilisant la reprĂ©sentation polaire z − z0 = ρeiΞ avecρ > 0 et Ξ ∈ [0, 2π[ :

z − z0

z − z0

=z − z0

z − z0

= e−2iΞ →ρ→0

e−2iξ

et en consĂ©quencez − z0

z − z0

n’a pas de limite quand z tend vers z0 dans C (par exemple, pour

Ξ = 0 et Ξ =π

2, on a deux limites diffĂ©rentes, ce qui n’est pas possible).

L’étude des autres fonctions sont laissĂ©es au lecteur.

Remarque 19.4 Les fonctions z 7→ z, z 7→ < (z) , z 7→ = (z) , z 7→ |z|2 nous fournissentdes exemples de fonctions indĂ©finiment dĂ©rivables vues comme fonctions de R2 dans R2 et nondĂ©rivables au sens complexe. La fonction z 7→ |z|2 est uniquement dĂ©rivable en 0 avec une

dérivée nulle (|z|2z

= z →z→0

0).

Exercice 19.27 Montrer que pour tout entier naturel n, la fonction f : z 7→ zn est holomorphesur C avec f â€Č (z) = nzn−1 pour tout n ≄ 1 et tout z ∈ C.

Solution 19.27 Pour n = 0, f est constante égale à 1 et elle holomorphe de dérivée nulle.

Pour n = 1, def (z)− f (z0)

z − z0

= 1, on dĂ©duit que f est holomorphe sur C avec f â€Č (z0) = 1 pourtout z0.Pour n ≄ 2, de :

f (z)− f (z0)

z − z0

=zn − zn

0

z − z0

=n−1∑

k=0

zn−1−kzk0 →

z→z0

nzn−10

(continuitĂ© sur C des fonctions z 7→ zp pour tout entier naturel p), on dĂ©duit que f est holo-morphe sur C avec f â€Č (z0) = nzn−1

0 pour tout z0 ∈ C.

Exercice 19.28 Montrer que pour tout entier naturel non nul n, la fonction f : z 7→ 1

znest

holomorphe sur C∗ avec f â€Č (z) = − n

zn+1pour tout z ∈ C∗.

Solution 19.28 De :

f (z)− f (z0)

z − z0

=zn0 − zn

znzn0 (z − z0)

= −n−1∑

k=0

zn−1−kzk0

znzn0

= −n−1∑

k=0

1

zk+1zn−k0

→z→z0

− n

zn+10

474 Fonctions holomorphes

(continuitĂ© sur C∗ des fonctions z 7→ 1

zppour tout entier naturel non nul p), on déduit que f

est holomorphe sur C∗ avec f â€Č (z0) = − n

zn+10

pour tout z0 ∈ C∗.

De la définition du nombre dérivé on déduit facilement le résultat suivant.

ThéorÚme 19.10 Si f est dérivable en z0 elle est alors continue en ce point.

DĂ©monstration. Se dĂ©duit immĂ©diatement de (19.1) .La rĂ©ciproque de ce rĂ©sultat est fausse comme le montre l’exemple de la fonction z 7→ z.Le rĂ©sultat de l’exercice qui suit nous sera utile pour montrer qu’une fonction de dĂ©rivĂ©e

nulle sur un ouvert connexe est constante.

Exercice 19.29 Soient f : O → C holomorphe, [a, b] un segment rĂ©el non rĂ©duit Ă  un point etÎł : [a, b] → O une fonction dĂ©rivable. Montrer que la fonction f Îł est dĂ©rivable sur [a, b] avec(f Îł)â€Č (t) = f â€Č (Îł (t)) Îłâ€Č (t) .

Solution 19.29 Pour t 6= t0 dans [a, b] , on a :

(f γ) (t)− (f γ) (t0)

t− t0=

f (γ (t))− f (γ (t0))

t− t0

=f â€Č (Îł (t0)) (Îł (t)− Îł (t0)) + |Îł (t)− Îł (t0)| Δ (Îł (t))

t− t0

= f â€Č (Îł (t0))Îł (t)− Îł (t0)

t− t0+ ή (t)

avecγ (t)− γ (t0)

t− t0→

t→t0Îłâ€Č (t0) et :

|ÎŽ (t)| = |Îł (t)− Îł (t0)||t− t0| |Δ (Îł (t))| →

t→t0|Îłâ€Č (t0)| · 0 = 0

(Îł qui est dĂ©rivable est continue, donc limt→t0

γ (t) = γ (t0) et limt→t0

Δ (γ (t))).

Dans le cas des fonctions d’une variable rĂ©elle, on sait qu’une fonction dĂ©finie sur un intervalleet Ă  valeurs rĂ©elles ou complexes est constante si, et seulement si, elle est dĂ©rivable de dĂ©rivĂ©enulle.

Dans le cas complexe, on vĂ©rifie facilement qu’une fonction constante est holomorphe dedĂ©rivĂ©e nulle et pour la rĂ©ciproque, on a le rĂ©sultat suivant.

ThĂ©orĂšme 19.11 Soient O un ouvert connexe de C et f : O → C une fonction holomorphe.Si f â€Č = 0, alors f est constante.

DĂ©monstration. Soient a, b dans O. Comme O est un ouvert connexe, il existe un arcaffine par morceaux et continu Îł : [0, 1] → O qui joint a et b. Un tel chemin est dĂ©fini par unesubdivision t0 = 0 < t1 < · · · < tp < tp+1 = 1 et pour 0 ≀ k ≀ p, t ∈ [tk, tk+1] :

γ (t) =tk+1 − t

tk+1 − tkak +

t− tktk+1 − tk

ak+1

oĂč les ak = Îł (tk) sont dans O avec a0 = a, ap+1 = b.

La dérivation complexe. Fonctions holomorphes 475

Les fonctions ϕk : t 7→ f (Îł (t)) sont alors dĂ©rivables sur [tk, tk+1] avec :

ϕâ€Čk (t) = f â€Č (Îł (t)) Îłâ€Č (t) = 0

et en consĂ©quence ϕk est constante sur [tk, tk+1] . On a donc f (ak) = f (ak+1) pour tout kcompris entre 0 et p et f (a) = f (b) . La fonction f est donc constante.

De maniĂšre plus gĂ©nĂ©rale si f â€Č = 0 pour f : O → C holomorphe, la fonction f est constantesur chaque composante connexe de l’ouvert O.

Comme dans le cas des fonctions d’une variable rĂ©elle, on a les rĂ©sultats suivants relatifs auxopĂ©rations algĂ©briques sur les fonctions holomorphes, les dĂ©monstrations Ă©tant analogues.

ThéorÚme 19.12 Soient f, g deux fonctions holomorphes sur O.

1. Pour tous nombres complexes λ, ” la fonction λf + ”g est holomorphe sur O avec :

(λf + ”g)â€Č = λf â€Č + ”gâ€Č.

2. La fonction fg est holomorphe sur O avec :

(fg)â€Č = f â€Čg + fgâ€Č

(formule de Leibniz).

3. Si g (z0) 6= 0, alors la fonction g ne s’annule pas dans un voisinage de z0, les fonctions1

g

etf

gqui sont définies dans un tel voisinage sont dérivables en z0 avec :

(1

g

)â€Č(z0) = − gâ€Č (z0)

g2 (z0),

(f

g

)â€Č(z0) =

g (z0) f â€Č (z0)− f (z0) gâ€Č (z0)

g2 (z0).

DĂ©monstration. On copie la dĂ©monstration du cas rĂ©el.La formule de Leibniz se gĂ©nĂ©ralise, par rĂ©currence sur n ≄ 2 en :

(f1f2 · · · fn)â€Č = f â€Č1f2 · · · fn + f1fâ€Č2f3 · · · fn + · · ·+ f â€Č1 · · · fn−1f

â€Čn

les fk, pour k compris entre 1 et n Ă©tant des fonctions holomorphes sur O.Dans le cas oĂč toutes les fk sont Ă©gales Ă  une mĂȘme fonction f, on a :

(fn)â€Č = nfn−1f â€Č.

Exercice 19.30 Montrer qu’une fonction polynomiale est holomorphe sur C et qu’une fonction

rationnelle f =P

Q, oĂč P et Q sont des polynĂŽmes avec Q non nul, est holomorphe sur C \

z ∈ C | Q (z) = 0 .

Solution 19.30 C’est clair puisque les fonctions z 7→ 1 et z 7→ z sont holomorphe sur C.

Pour la composition des applications, on a le résultat suivant.

ThĂ©orĂšme 19.13 Si f : O → C est holomorphe sur O, Oâ€Č est un ouvert de C contenant f (O)et g : Oâ€Č → C est holomorphe sur Oâ€Č, alors gf est holomorphe sur O avec (g f)â€Č = (gâ€Č f) f â€Č.

Démonstration. On copie la démonstration du cas réel.

476 Fonctions holomorphes

DĂ©finition 19.15 On appelle fonction entiĂšre, toute fonction qui est holomorphe sur C.

Exercice 19.31 Montrer que la fonction exponentielle complexe est une fonction entiĂšre avecexpâ€Č (z) = exp (z) pour tout z ∈ C.

Solution 19.31 Pour z 6= z0, on a :

ez − ez0

z − z0

− ez0 = ez0ez−z0 − 1

z − z0

= ez0

+∞∑n=1

(z − z0)n−1

n!− ez0

= ez0

+∞∑n=2

(z − z0)n−1

n!

et :∣∣∣∣ez − ez0

z − z0

− ez0

∣∣∣∣ = |ez0| |z − z0|∣∣∣∣∣+∞∑n=2

(z − z0)n−2

n!

∣∣∣∣∣

≀ |ez0| |z − z0|+∞∑n=2

|z − z0|n−2

(n− 2)!= |ez0| |z − z0| e|z−z0|

et limz→z0

=ez − ez0

z − z0

−ez0 = 0, ce qui signifie que exp est dĂ©rivable en z0 avec expâ€Č (z0) = exp (z0) .

De cet exercice, on dĂ©duit que les fonctions cos, sin, ch et sh sont des fonctions entiĂšres avecpour tout z ∈ C : cosâ€Č (z) = − sin (z) , sinâ€Č (z) = cos (z) , châ€Č (z) = sh (z) et shâ€Č (z) = ch (z) .

La fonction tan est holomorphe sur C \π

2+ kπ | k ∈ Z

avec tanâ€Č (z) =

1

cos2 (z)= 1 +

tan2 (z) et la fonction th est holomorphe sur C \

kπ + iπ

2| k ∈ Z

avec thâ€Č (z) =

1

ch2 (z)=

1− th2 (z) .

19.6 Les conditions de Cauchy-RiemannO dĂ©signe encore un ouvert non vide de C et f une application de O dans C.On rappelle que si Ω est un ouvert non vide de R2, on dit qu’une fonction ϕ : Ω → R2 est

diffĂ©rentiable en (x0, y0) ∈ Ω s’il existe un application linĂ©aire dϕ (x0, y0) de R2 dans R2 telleque pour tout (x, y) ∈ Ω on ait :

ϕ (x, y) = ϕ (x0, y0) + dϕ (x0, y0) (x− x0, y − y0) + ‖(x− x0, y − y0)‖ Δ (x, y) (19.2)

oĂč lim(x,y)→(x0,y0)

Δ (x, y) = 0. Si ϕ = (P, Q) , oĂč P et Q sont Ă  valeurs rĂ©elles, alors la matrice de

l’application linĂ©aire dϕ (x0, y0) (la diffĂ©rentielle de ϕ en (x0, y0)) est :

Jϕ (x0, y0) =

( ∂P∂x

(x0, y0)∂P∂y

(x0, y0)

∂Q∂x

(x0, y0)∂Q∂y

(x0, y0)

)

(matrice jacobienne de ϕ en (x0, y0)).En notant respectivement P et Q la partie rĂ©elle et la partie imaginaire de f, on a le rĂ©sultat

suivant, oĂč ϕ : (x, y) 7→ (P (x, y) , Q (x, y)) est la reprĂ©sentation rĂ©elle de f.

Les conditions de Cauchy-Riemann 477

ThĂ©orĂšme 19.14 La fonction f est holomorphe sur O si, et seulement si, la fonction ϕ estdiffĂ©rentiable (au sens rĂ©el) sur Ω avec pour tout (x, y) ∈ Ω :

∂P∂x

(x, y) = ∂Q∂y

(x, y)

∂P∂y

(x, y) = −∂Q∂x

(x, y)

(conditions de Cauchy-Riemann).

DĂ©monstration. Supposons f holomorphe sur O. Pour z0 ∈ O, on note f â€Č (z0) = a + ibavec a, b rĂ©els. De (19.1) , on dĂ©duit avec les notations qui prĂ©cĂšdent que :

ϕ (x, y) = ϕ (x0, y0) + (a (x− x0)− b (y − y0) , a (y − y0) + b (x− x0))

+ ‖(x− x0, y − y0)‖ Δ (x, y)

ce qui signifie que ϕ est diffĂ©rentiable en (x0, y0) de matrice jacobienne :

Jϕ (x0, y0) =

( ∂P∂x

(x0, y0)∂P∂y

(x0, y0)

∂Q∂x

(x0, y0)∂Q∂y

(x0, y0)

)=

(a −bb a

)

et on a les conditions de Cauchy-Riemann.RĂ©ciproquement si ϕ est diffĂ©rentiable en (x0, y0) , les conditions de Cauchy-Riemann Ă©tant

remplies, l’expression complexe de (19.2) est :

f (z) = f (z0) +

(∂P

∂x(x0, y0) + i

∂Q

∂x(x0, y0)

)(z − z0) + |z − z0| Δ (z)

et :limz→z0

f (z)− f (z0)

z − z0

=∂P

∂x(x0, y0) + i

∂Q

∂x(x0, y0)

ce qui signifie que f est holomorphe en z0 de dérivée :

f â€Č (z0) =∂P

∂x(x0, y0) + i

∂Q

∂x(x0, y0)

Remarque 19.5 Les conditions de Cauchy-Riemann se traduisent en disant que pour f holo-morphe, la diffĂ©rentielle dϕ est C-linĂ©aire.

Remarque 19.6 En notant∂f

∂x=

∂P

∂x+ i

∂Q

∂xet

∂f

∂y=

∂P

∂y+ i

∂Q

∂y, nous avons vu avec la

dĂ©monstration prĂ©cĂ©dente que f â€Č (z) =∂f

∂x(z) et les conditions de Cauchy-Riemann se traduisent

par :

∂f

∂x(z) = f â€Č (z) =

∂P

∂x(x, y) + i

∂Q

∂x(x, y) =

∂Q

∂y(x, y)− i

∂P

∂y(x, y)

= −i

(∂P

∂y+ i

∂Q

∂y

)= −i

∂f

∂y(z)

ou encore par :∂f

∂x(z) = −i

∂f

∂y(z) = f â€Č (z) .

478 Fonctions holomorphes

Exercice 19.32 En utilisant les conditions de Cauchy-Riemann, montrer que les fonctionsz 7→ z, z 7→ < (z) , z 7→ = (z) , z 7→ |z|2 , z 7→ |z| , z 7→ ez ne sont pas holomorphes sur C.

Solution 19.32 Pour f : z 7→ z, on a f = P + iQ avec P (x, y) = x, Q (x, y) = −y et∂P

∂x(x, y) = 1 6= ∂Q

∂y(x, y) = −1. Cette fonction f n’est donc pas holomorphe. On montre de

maniĂšre analogue que les autres fonctions ne sont pas holomorphes.

Exercice 19.33 La fonction f définie sur C par f (z) = f (x + iy) = x2y + iy est-elle holo-morphe ?

Solution 19.33 On a f = P + iQ avec P (x, y) = x2y et Q (x, y) = y. Comme :

∂P

∂x(x, y) = 2xy 6= ∂Q

∂y(x, y) = 1

pour z dans C privĂ© de l’hyperbole H d’équation 2xy = 1 et :

∂P

∂y(x, y) = x2 6= −∂Q

∂x(x, y) = 0

pour les points de H, la fonction n’est pas holomorphe sur C.

Exercice 19.34 Montrer que si f est une fonction holomorphe sur un ouvert connexe O de Cet à valeurs réelles, elle est alors nécessairement constante.

Solution 19.34 En gardant la notation f = P + iQ avec P, Q à valeurs réelles, on a Q = 0

pour f Ă  valeurs rĂ©elles et des conditions de Cauchy Riemann, on dĂ©duit que∂P

∂x=

∂P

∂y= 0 sur

Ω et en consĂ©quence f â€Č (z) =∂f

∂x(z) = 0 ce qui Ă©quivaut Ă  dire que f est constante sur l’ouvert

connexe O.

Exercice 19.35 Soit f = P + iQ une fonction holomorphe sur un ouvert connexe O de C, oĂčP et Q sont respectivement la partie rĂ©elle et la partie imaginaire de f. Montrer que s’il existedes rĂ©el a, b tels que P + aQ + b = 0 sur O, alors f est constante.

Solution 19.35 Si a = 0, P est constante et on a ,∂P

∂x= 0,

∂Q

∂x= −∂P

∂y= 0, soit f â€Č (z) =

∂f

∂x(z) = 0 et f est constante sur l’ouvert connexe O.

On suppose maintenant que a 6= 0. De P+aQ+b = 0, on dĂ©duit que∂P

∂x+a

∂Q

∂x=

∂P

∂y+a

∂Q

∂y= 0

et donc∂P

∂x= −a

∂Q

∂x= a

∂P

∂y,

∂P

∂y= −a

∂Q

∂y= −a

∂P

∂x, ce qui donne

∂P

∂x= −a2∂P

∂x, soit

(1 + a2)∂P

∂x= 0, donc

∂P

∂x= 0 et

∂Q

∂x= −1

a

∂P

∂x= 0, ce qui entraĂźne f â€Č (z) =

∂f

∂x(z) = 0 et f

est constante sur l’ouvert connexe O.

Exercice 19.36 Connaissant les fonctions de la variable rĂ©elle exp, sin et cos, on peut dĂ©finirla fonction x 7→ eix = cos (x) + i sin (x) sur R et la fonction exponentielle complexe par z =x+iy 7→ exp (z) = exeiy sur C. Montrer, avec cette dĂ©finition, que cette fonction est holomorphesur C avec expâ€Č = exp .

Les conditions de Cauchy-Riemann 479

Solution 19.36 On a exp (z) = P (z) + iQ (z) avec P (z) = ex cos (y) et Q (z) = ex sin (y) .Les fonctions P et Q sont différentiables sur R2 et on a :

∂P∂x

(x, y) = ex cos (y) = ∂Q∂y

(x, y)

∂P∂y

(x, y) = −ex sin (y) = −∂Q∂x

(x, y)

et donc exp est holomorphe sur C. Et pour tout complexe z, on a :

expâ€Č (z) =∂ exp

∂x(x, y) =

∂P

∂x(x, y) + i

∂Q

∂x(x, y)

= ex cos (y) + iex sin (y) = exp (z) .

Exercice 19.37 On a défini la détermination principale du logarithme complexe par :

ln : C \ R− → Cz = x + iy 7→ ln (|z|) + i arg (z) = ln (|z|) + 2i arctan

(y

x+|z|

)

(paragraphe 15.8). Montrer que cette fonction est holomorphe sur C \R− avec lnâ€Č (z) =1

zpour

tout z ∈ C \ R−.

Solution 19.37 On rappelle que si Ξ est la dĂ©termination de arg (z) dans ]−π, π[ , on a x =

|z| cos (Ξ) = |z|(

2 cos2

(Ξ

2

)− 1

), y = |z| sin (Ξ) = |z| 2 cos

(Ξ

2

)sin

(Ξ

2

)et

tan

(Ξ

2

)=

y

2 |z| cos(

Ξ2

) 2 |z| cos(

Ξ2

)

x + |z| =y

x + |z|

avecΞ

2∈

]−π

2,π

2

[.

En notant z = x + iy, on a f (z) = P (z) + iQ (z) avec P (z) = ln(√

x2 + y2)

et Q (z) =

2 arctan

(y

x+√

x2+y2

). Les fonctions P et Q sont différentiables sur R2 et on a :

∂P

∂x(x, y) =

x

x2 + y2,

∂P

∂y(x, y) =

y

x2 + y2

et :

∂Q

∂y(x, y) = 2

x+√

x2+y2−y y√x2+y2

x+√

x2+y22

1 +

(y

x+√

x2+y2

)2 = 2x√

x2 + y2 + x2 + y2 − y2

√x2 + y2

((x +

√x2 + y2

)2

+ y2

)

=x√

x2 + y2 + x2

√x2 + y2

(x2 + y2 + x

√x2 + y2

)

=x

(√x2 + y2 + x

)

(x2 + y2)(√

x2 + y2 + x) =

x

x2 + y2=

∂P

∂x(x, y)

480 Fonctions holomorphes

∂Q

∂x(x, y) = 2

−y

1+ x√

x2+y2

x+√

x2+y22

1 +

(y

x+√

x2+y2

)2 = −2y

(√x2 + y2 + x

)

√x2 + y2

((x +

√x2 + y2

)2

+ y2

)

= −y

(√x2 + y2 + x

)

√x2 + y2

(x2 + y2 + x

√x2 + y2

)

= −y

(√x2 + y2 + x

)

(x2 + y2)(√

x2 + y2 + x) = − y

x2 + y2=

∂P

∂y(x, y)

Les conditions de Cauchy-Riemann Ă©tant satisfaites, la fonction ln est holomorphe sur C \ R−avec :

lnâ€Č (z) =∂ ln

∂x(x, y) =

∂P

∂x(x, y) + i

∂Q

∂x(x, y)

=x

x2 + y2− i

y

x2 + y2=

z

|z|2 =1

z.

Exercice 19.38 Soient O un ouvert de C∗ et f = P + iQ : O → C oĂč P et Q sont Ă valeurs rĂ©elles. En utilisant l’écriture polaire des nombres complexes, z = reit, on peut Ă©crireP (z) = P (r, t) et Q (z) = Q (r, t) . Montrer que f est holomorphe sur O si, et seulement si, les

fonctions P et Q sont diffĂ©rentiables avec∂P

∂r=

1

r

∂Q

∂tet

∂Q

∂r= −1

r

∂P

∂t(expression polaire des

conditions de Cauchy-Riemann).

Solution 19.38 L’écriture z = reit se traduit par x = r cos (t) , y = r sin (t) . Si f est holo-morphe sur O, les fonctions P et Q sont diffĂ©rentiables sur Ω et on a :

∂P

∂r=

∂P

∂x

∂x

∂r+

∂P

∂y

∂y

∂r= cos (t)

∂P

∂x+ sin (t)

∂P

∂y

= cos (t)∂Q

∂y− sin (t)

∂Q

∂x=

1

r

(∂Q

∂y

∂y

∂t+

∂Q

∂x

∂x

∂t

)

=1

r

∂Q

∂t

et :

∂Q

∂r= cos (t)

∂Q

∂x+ sin (t)

∂Q

∂y

= − cos (t)∂P

∂y+ sin (t)

∂P

∂x= −1

r

(∂P

∂y

∂y

∂t+

∂P

∂x

∂x

∂t

)

= −1

r

∂P

∂t

RĂ©ciproquement si les fonctions P et Q sont diffĂ©rentiables avec∂P

∂r=

1

r

∂Q

∂tet

∂Q

∂r= −1

r

∂P

∂t,

de : ∂P∂r

= cos (t) ∂P∂x

+ sin (t) ∂P∂y

∂P∂t

= −r sin (t) ∂P∂x

+ r cos (t) ∂P∂y

Les conditions de Cauchy-Riemann 481

on dĂ©duit que : ∂P∂x

= cos (t) ∂P∂r− sin(t)

r∂P∂t

∂P∂y

= sin (t) ∂P∂r

+ cos(t)r

∂P∂t

et :∂P

∂x=

cos (t)

r

∂Q

∂t+ sin (t)

∂Q

∂r=

∂Q

∂y

∂P

∂y=

sin (t)

r

∂Q

∂t− cos (t)

∂Q

∂r= −∂Q

∂x

ce qui signifie que f est holomorphe sur O.

Exercice 19.39 Soit P : C∗ → R dĂ©finie par P (z) = P (x + iy) =x

|z|2 . DĂ©terminer, si elles

existent, toutes les fonctions Q : C∗ → R telles que f = P + iQ soit holomorphe sur C∗.

Solution 19.39 La fonction P : (x, y) 7→ x

x2 + y2est diffĂ©rentiable sur C∗ identifiĂ© Ă  R2 \

(0, 0) . Si f = P + iQ est holomorphe sur C∗, la fonction Q est alors diffĂ©rentiable sur C∗avec :

∂Q∂y

(x, y) = ∂P∂x

(x, y) =y2 − x2

(x2 + y2)2

∂Q∂x

(x, y) = −∂P∂y

(x, y) =2xy

(x2 + y2)2

De la deuxiĂšme Ă©quation, on dĂ©duit que Q (x, y) = − y

x2 + y2+ϕ (y) , oĂč ϕ est diffĂ©rentiable sur

R et avec la premiĂšre, on dĂ©duit que ϕâ€Č (y) = 0. On a donc Q (x, y) = − y

x2 + y2+c = − y

|z|2 +c,

oĂč c est une constante rĂ©elle et f (z) =x− iy

x2 + y2+ ic =

1

z+ ic.

Exercice 19.40 Soit Q : C → R dĂ©finie par Q (z) = P (x + iy) = cos (x) sh (y) . DĂ©terminer,si elles existent, toutes les fonctions P : C→ R telles que f = P + iQ soit holomorphe sur C.

Solution 19.40 La fonction Q : (x, y) 7→ cos (x) sh (y) est diffĂ©rentiable sur C identifiĂ© Ă  R2.Si f = P + iQ est holomorphe sur C, la fonction P est alors diffĂ©rentiable sur C avec :

∂P∂x

(x, y) = ∂Q∂y

(x, y) = cos (x) ch (y)

∂P∂y

(x, y) = −∂Q∂x

(x, y) = sin (x) sh (y)

De la premiĂšre Ă©quation, on dĂ©duit que P (x, y) = sin (x) ch (y) + ϕ (y) , oĂč ϕ est diffĂ©rentiablesur R et avec la deuxiĂšme, on dĂ©duit que ϕâ€Č (y) = 0. On a donc P (x, y) = sin (x) ch (y) + c, oĂčc est une constante rĂ©elle et :

f (z) = sin (x) ch (y) + i cos (x) sh (y) + c

= sin (x) cos (iy)− cos (x) sin (iy) + c

= sin (x + iy) + c = sin (z) + c.

Exercice 19.41 Soit P : C→ R dĂ©finie par P (z) = P (x + iy) = |z|2 . Montrer qu’il n’est paspossible de trouver Q : C → R telle que f = P + iQ soit holomorphe sur C (il n’existe pas defonction holomorphe sur C de partie rĂ©elle |z|2).

482 Fonctions holomorphes

Solution 19.41 Les conditions de Cauchy-Riemann s’écrivent : ∂Q

∂y(x, y) = ∂P

∂x(x, y) = 2x

∂Q∂x

(x, y) = −∂P∂y

(x, y) = −2y

ce qui donne Q (x, y) = −2xy + ϕ (y) et −2x + ϕâ€Č (y) = 2x, donc ϕâ€Č (y) = 4x, ce qui estimpossible (sans quoi, pour y fixĂ©, ϕâ€Č (y) prend une infinitĂ© de valeurs).

19.7 Fonctions harmoniquesDĂ©finition 19.16 Soit Ω un ouvert non vide de R2. On dit qu’une fonction ϕ : Ω → R estharmonique sur Ω si elle est de classe C2 sur Ω avec :

∂2ϕ

∂x2(x, y) +

∂2ϕ

∂y2(x, y) = 0

pour tout (x, y) ∈ Ω.

L’opĂ©rateur diffĂ©rentiel∂2

∂x2+

∂2

∂y2est notĂ© ∆ et appelĂ© laplacien.

ThĂ©orĂšme 19.15 Si f = P + iQ est une fonction holomorphe sur l’ouvert O avec P et Q declasse C2 et Ă  valeurs rĂ©elles, alors les fonctions P et Q sont harmoniques sur O.

Démonstration. En utilisant les conditions de Cauchy-Riemann et le théorÚme de Schwarzpour les fonctions de classe C2, on a :

∂2P

∂x2+

∂2P

∂y2=

∂

∂x

(∂P

∂x

)+

∂

∂y

(∂P

∂y

)=

∂

∂x

(∂Q

∂y

)− ∂

∂y

(∂Q

∂x

)

=∂2Q

∂x∂y− ∂2Q

∂y∂x= 0

et P est harmonique sur O.De maniÚre analogue, on vérifie que Q est harmonique sur O.

Remarque 19.7 Nous verrons plus loin qu’une fonction holomorphe est en fait indĂ©finimentdĂ©rivable et l’hypothĂšse P et Q de classe C2 est automatiquement vĂ©rifiĂ©e.

Exemple 19.5 La fonction P : (x, y) 7→ x2 + y2 n’étant pas harmonique (∆P = 4 6= 0), il nepeut pas exister de fonction holomorphe sur C de partie rĂ©elle x2 + y2 = |z|2 .

Exercice 19.42 Soit f = P + iQ une fonction holomorphe sur l’ouvert O ne s’annulant pas,oĂč P et Q sont de classe C2 et Ă  valeurs rĂ©elles. Montrer que la fonction ln (|f |) est harmonique.

Solution 19.42 On a ϕ = ln (|f |) =1

2ln (P 2 + Q2) et :

∂ϕ

∂x=

P ∂P∂x

+ Q∂Q∂x

P 2 + Q2

Fonctions harmoniques 483

∂2ϕ

∂x2=

(P 2 + Q2)((

∂P∂x

)2+ P ∂2P

∂x2 +(

∂Q∂x

)2+ Q∂2Q

∂x2

)− 2

(P ∂P

∂x+ Q∂Q

∂x

)2

(P 2 + Q2)2

=(P 2 + Q2)

((∂P∂x

)2+ P ∂2P

∂x2 +(

∂Q∂x

)2+ Q∂2Q

∂x2

)− 2

(P ∂P

∂x+ Q∂Q

∂x

)2

(P 2 + Q2)2

=

(∂P∂x

)2+ P ∂2P

∂x2 +(

∂Q∂x

)2+ Q∂2Q

∂x2

P 2 + Q2− 2

(P ∂P

∂x+ Q∂Q

∂x

P 2 + Q2

)2

Utilisant une formule analogue pour∂2ϕ

∂y2, on obtient :

∆ϕ =

(∂P∂x

)2+

(∂P∂y

)2

+ P∆P +(

∂Q∂x

)2+

(∂Q∂y

)2

+ Q∆Q

P 2 + Q2

− 2

(P ∂P

∂x+ Q∂Q

∂x

P 2 + Q2

)2

− 2

(P ∂P

∂y+ Q∂Q

∂y

P 2 + Q2

)2

= 2

(∂P∂x

)2+

(∂P∂y

)2

P 2 + Q2− 2

(P ∂P

∂x−Q∂P

∂y

)2

+(P ∂P

∂y+ Q∂P

∂x

)2

(P 2 + Q2)2

= 2

(∂P∂x

)2+

(∂P∂y

)2

P 2 + Q2− 2

P 2(

∂P∂x

)2+ Q2

(∂P∂y

)2

+ P 2(

∂P∂y

)2

+ Q2(

∂P∂x

)2

(P 2 + Q2)2

= 2

(∂P∂x

)2+

(∂P∂y

)2

P 2 + Q2− 2

(P 2 + Q2)

((∂P∂x

)2+

(∂P∂y

)2)

(P 2 + Q2)2 = 0.

Remarque 19.8 L’exercice prĂ©cĂ©dant peut se rĂ©soudre facilement en remarquant que l’hypo-thĂšse f (z) 6= 0 pour tout z ∈ O permet de dĂ©finir localement des dĂ©terminations holomorphesde ln (f) et ln (|f |) est harmonique comme partie rĂ©elle d’une telle dĂ©termination.

Le thĂ©orĂšme prĂ©cĂ©dent admet une rĂ©ciproque qui peut s’énoncer comme suit, en prenantpour l’instant, comme dĂ©finition intuitive d’un ouvert simplement connexe, un ouvert non vide,connexe et « sans trous ».

ThĂ©orĂšme 19.16 Si O est un ouvert simplement connexe et P : O → R une fonction harmo-nique, il existe alors des fonctions holomorphes sur O de partie rĂ©elle P.

DĂ©monstration. Admis.De telles fonctions s’écrivent f = P + iQ, oĂč Q : O → R s’obtient en rĂ©solvant le systĂšme

défini par les conditions de Cauchy-Riemann.

Exercice 19.43 Soit P : C → R dĂ©finie par P (z) = x2 − y2 − 2xy − 2x + 3y. DĂ©terminertoutes les fonctions Q : C→ R telles que f = P + iQ soit holomorphe sur C.

Solution 19.43 On a ∆P = 0, donc P est harmonique et on peut trouver Q.Les conditions de Cauchy-Riemann donnent :

∂Q∂y

(x, y) = ∂P∂x

(x, y) = 2x− 2y − 2

∂Q∂x

(x, y) = −∂P∂y

(x, y) = 2y + 2x− 3

484 Fonctions holomorphes

De la deuxiĂšme Ă©quation, on dĂ©duit que Q (x, y) = 2xy +x2−3x+ϕ (y) , oĂč ϕ est diffĂ©rentiablesur R et avec la premiĂšre, on dĂ©duit que ϕâ€Č (y) = −2y − 2. On a donc Q (x, y) = 2xy + x2 −3x− y2 − 2y + c, oĂč c est une constante rĂ©elle et :

f (z) = x2 − y2 − 2xy − 2x + 3y + i(2xy + x2 − 3x− y2 − 2y

)+ ic

= (x + iy)2 + i (x + iy)2 − 2 (x + iy)− 3i (x + iy) + ic

= (1 + i) z2 − (2 + 3i) z + ic

Exercice 19.44 Montrer que si P : O → R est une fonction harmonique de classe C3, alors

la fonction ϕ = x∂P

∂x+ y

∂P

∂yest aussi harmonique.

Solution 19.44 On a :∂ϕ

∂x=

∂P

∂x+ x

∂2P

∂x2+ y

∂2P

∂x∂y

∂2ϕ

∂x2=

∂2P

∂x2+

∂2P

∂x2+ x

∂

∂x

(∂2P

∂x2

)+ y

∂

∂y

(∂2P

∂x2

)

= 2∂2P

∂x2+ x

∂

∂x

(∂2P

∂x2

)+ y

∂

∂y

(∂2P

∂x2

)

∂ϕ

∂y= x

∂2P

∂x∂y+

∂P

∂y+ y

∂2P

∂y2

∂2ϕ

∂y2= 2

∂2P

∂y2+ x

∂

∂x

(∂2P

∂y2

)+ y

∂

∂y

(∂2P

∂y2

)

et :∆ϕ = 2∆P + x

∂

∂x(∆P ) + y

∂

∂y(∆P ) = 0

ce qui signifie que ϕ est harmonique.

Remarque 19.9 Si dans l’exercice prĂ©cĂ©dant, O est un ouvert simplement connexe, alors Pest la partie rĂ©elle d’une fonction holomorphe et en consĂ©quence, elle est de classe C∞. Dans cecas , l’hypothĂšse P de classe C3 est superflue.En remarquant que :

f â€Č =∂f

∂x=

∂P

∂x+ i

∂Q

∂x=

∂P

∂x− i

∂P

∂y

et :zf â€Č = (x + iy)

(∂P

∂x− i

∂P

∂y

)= x

∂P

∂x+ y

∂P

∂y+ i

(y∂P

∂x− x

∂P

∂y

)

on dĂ©duit que x∂P

∂x+ y

∂P

∂yet y

∂P

∂x− x

∂P

∂ysont harmoniques comme partie rĂ©elle et imaginaire

de la fonction holomorphe zf â€Č.

Equivalence entre analyticité et holomorphie 485

19.8 Equivalence entre analyticitĂ© et holomorphieNous avons vu qu’une fonction de la variable rĂ©elle dĂ©veloppable en sĂ©rie entiĂšre au voisinage

de 0 est indĂ©finiment dĂ©rivable (corollaire 14.6). Maintenant que nous avons donnĂ© un sens Ă  lanotion de dĂ©rivation complexe nous allons montrer que ce rĂ©sultat est encore valable pour lesfonctions d’une variable complexe.

Le fait qu’une fonction analytique en z0 est holomorphe en ce point est Ă©lĂ©mentaire.

ThéorÚme 19.17 Une fonction analytique sur un ouvert non vide O de C est holomorphe surcet ouvert.

DĂ©monstration. Pour z0 ∈ O, il existe r > 0 tel que f (z) =+∞∑n=0

an (z − z0)n pour z ∈

D (z0, r) ⊂ O et pour z 6= z0 dans D (z0, r) , on a :

f (z)− f (z0)

z − z0

=+∞∑n=0

an+1 (z − z0)n = g (z)

avec limz→z0

g (z) = g (z0) = a1 puisque la fonction g est continue en z0 (la sĂ©rie entiĂšre∑

an+1tn

qui a mĂȘme rayon de convergence que∑

antn est continue sur D (0, r) , donc en 0). La fonction

f est donc dĂ©rivable en z0 de dĂ©rivĂ©e f â€Č (z0) = a1.De maniĂšre, plus prĂ©cise, on peut montrer que la dĂ©rivĂ©e d’une fonction analytique sur O est

elle mĂȘme analytique sur cet ouvert et donc holomorphe. AprĂšs avoir montrĂ© l’équivalence entreanalyticitĂ© et holomorphie, on dĂ©duira qu’une fonction C-dĂ©rivable est indĂ©finiment C-dĂ©rivable(ce rĂ©sultat Ă©tant faux pour les fonctions d’une variable rĂ©elle).

ThéorÚme 19.18 Si f une est fonction analytique sur un ouvert non vide O de C, elle est

alors holomorphe de dĂ©rivĂ©e f â€Č analytique. Si f (z) =+∞∑n=0

an (z − z0)n pour z ∈ D (z0, r) ⊂ O,

on a alors f â€Č (z) =+∞∑n=1

nan (z − z0)n−1 pour tout z ∈ D (z0, r) .

DĂ©monstration. Sachant qu’une sĂ©rie et sa sĂ©rie dĂ©rivĂ©e ont mĂȘme rayon de convergence,on peut dĂ©finir la fonction g sur D (z0, r) par :

∀z ∈ D (z0, r) , g (z) =+∞∑n=1

nan (z − z0)n−1 .

Soient z ∈ D (z0, r) , ρ > 0 tel que |z − z0| < ρ < r et h ∈ D (0, ρ− |z − z0|) \ 0 (figure 19.2).On a |z + h− z0| ≀ |z − z0|+ |h| < |z − z0|+ ρ− |z − z0| < ρ et :

f (z + h)− f (z)

h− g (z) =

+∞∑n=0

an(z + h− z0)

n − (z − z0)n

h−

+∞∑n=1

nan (z − z0)n−1

=+∞∑n=1

anPn (z, h)

oĂč on a posĂ© pour n ≄ 1 :

Pn (z, h) =(z + h− z0)

n − (z − z0)n

h− n (z − z0)

n−1

=n−1∑

k=0

(z + h− z0)n−1−k (z − z0)

k − n (z − z0)n−1

486 Fonctions holomorphes

z0

z

z + h

r

Fig. 19.2 –

On a alors :

|Pn (z, h)| ≀n−1∑

k=0

|z + h− z0|n−1−k |z − z0|k + n |z − z0|n−1

≀n−1∑

k=0

ρn−1−kρk + nρn−1 = 2nρn−1

la sĂ©rie∑

nan−1ρn−1 Ă©tant convergente.

Pour Δ > 0 donnĂ©, on peut donc trouver un entier naturel nΔ ≄ 1 tel que :

∀n ≄ nΔ,

+∞∑

k=n+1

kak−1ρk−1 < Δ

et un rĂ©el ρ1 ∈ ]0, ρ− |z − z0|[ tel que pour |h| < ρ1, on ait :∣∣∣∣∣

nΔ∑

k=1

akPk (z, h)

∣∣∣∣∣ < Δ

(on a limh→0

nΔ∑k=1

akPk (z, h) = 0), ce qui donne pour |h| < ρ1 :

∣∣∣∣f (z + h)− f (z)

h− g (z)

∣∣∣∣ < 3Δ

On a donc ainsi montrĂ© que limz→z0

f (z + h)− f (z)

h= g (z) , ce qui signifie que f est C-

dérivable en z de dérivée g (z) .La fonction f est donc holomorphe sur O de dérivée f analytique sur cet ouvert, donc

Ă©galement holomorphe.On a aussi montrĂ© avec ce thĂ©orĂšme qu’une fonction dĂ©veloppable en sĂ©rie entiĂšre au voisinage

d’un point z0 est holomorphe dans ce voisinage.Par rĂ©currence, on dĂ©duit le rĂ©sultat suivant.

Equivalence entre analyticité et holomorphie 487

Corollaire 19.1 Si f est une fonction analytique sur un ouvert non vide O de C, elle est alors

indĂ©finiment C-dĂ©rivable sur O et si f (z) =+∞∑n=0

an (z − z0)n pour z ∈ D (z0, r) ⊂ O, on a pour

tout entier p ≄ 1, f (p) (z) =+∞∑n=p

n!

(n− p)!an (z − z0)

n−p pour tout z ∈ D (z0, r) .

Avec les notations du corollaire, on a f (p) (z0) = p!ap, soit ap =f (p) (z0)

p!pour tout p ≄ 0.

Exemple 19.6 En utilisant ce théorÚme, on voit que la fonction exponentielle complexe estholomorphe sur C avec, pour tout z ∈ C :

expâ€Č (z) =

(+∞∑n=0

zn

n!

)â€Č

=+∞∑n=0

nzn−1

n!=

+∞∑n=1

zn−1

(n− 1)!

=+∞∑n=0

zn

n!= exp (z)

Exercice 19.45 En utilisant le fait que la fonction exp est holomorphe avec expâ€Č = exp, mon-trer que exp (a + b) = exp (a) exp (b) pour tous nombres complexes a et b.

Solution 19.45 On dĂ©finit la fonction f par f (z) = e−zez+c, oĂč c est une constante complexe.Cette fonction est holomorphe sur C comme produit de deux fonctions holomorphes avec f â€Č (z) =−e−zez+c +e−zez+c = 0, elle est donc constante Ă©gale Ă  f (0) = ec. Prenant z = −a et c = a+ b,on en dĂ©duit que ea+b = eaeb.

Le théorÚme de Cauchy qui suit nous dit que réciproquement toute fonction holomorphe surO est analytique sur cet ouvert.

Pour montrer ce théorÚme, on admet temporairement le résultat suivant.

ThĂ©orĂšme 19.19 Si f est une fonction holomorphe sur un ouvert non vide O de C, sa dĂ©rivĂ©ef â€Č est alors une fonction continue sur O.

ThĂ©orĂšme 19.20 (Cauchy) Soient f une fonction holomorphe sur un ouvert non vide O deC, z0 un point de O et R > 0 le plus grand rĂ©el (Ă©ventuellement Ă©gal Ă  +∞) tel que D (z0, R) ⊂O.Pour tout entier naturel n, le nombre complexe :

an =1

2iπ

∫

|u−z0|=r

f (u)

(u− z0)n+1du =

1

2πrn

∫ 2π

0

f(z0 + reit

)e−intdt

est indépendant du réel r ∈ ]0, R[ et pour tout z ∈ D (z0, R) , on a :

f (z) =+∞∑n=0

an (z − z0)n

DĂ©monstration. Soient z ∈ D (z0, R) et r > 0 tel que |z − z0| < r < R. On associe Ă  cesquantitĂ©s la fonction ϕ dĂ©finie sur [0, 1] par :

ϕ (Ξ) =

∫

|u−z0|=r

f ((1− ξ) z + ξu)

u− zdu

=

∫ 2π

0

f ((1− ξ) z + ξ (z0 + reit))

z0 + reit − zireitdt

488 Fonctions holomorphes

(pour u = z0 + reit sur le cercle de centre z0 et de rayon r, le point (1− ξ) z + ξu est sur lesegment [z, u] ⊂ D (z0, R)).

La fonction intĂ©grĂ©e est continĂ»ment diffĂ©rentiable en (Ξ, t) ∈ [0, 1] × [0, 2π] puisque f estcontinĂ»ment diffĂ©rentiable (vue comme une application d’un ouvert de R2 dans R2) et enconsĂ©quence ϕ est continue sur [0, 1] , dĂ©rivable sur ]0, 1[ avec :

ϕâ€Č (Ξ) =

∫ 2π

0

f â€Č((1− Ξ) z + Ξ

(z0 + reit

))ireitdt

=

[1

Ξf

((1− ξ) z + ξ

(z0 + reit

))]t=2π

t=0

= 0

par 2π-pĂ©riodicitĂ© de la fonction t 7→ f ((1− Ξ) z + Ξ (z0 + reit)) . La fonction ϕ est doncconstante sur ]0, 1[ et sur [0, 1] par continuitĂ©. On a donc :

ϕ (1) =

∫ 2π

0

f (z0 + reit)

z0 + reit − zireitdt = ϕ (0) = f (z)

∫ 2π

0

ireit

z0 + reit − zdt

soit :

f (z)

∫ 2π

0

reit

z0 + reit − zdt =

∫ 2π

0

f(z0 + reit

) reit

z0 + reit − zdt

ou encore :f (z)

∫

|u−z0|=r

du

u− z=

∫

|u−z0|=r

f (u)

u− zdu. (19.3)

Tenant compte de |z − z0| < r = |reit| , on peut Ă©crire que :

reit

z0 + reit − z=

1

1− z−z0

reit

=+∞∑n=0

(z − z0)n

rneint

la convergence Ă©tant uniforme quand t dĂ©crit [0, 2π] , ce qui donne :

∫ 2π

0

reit

z0 + reit − zdt =

+∞∑n=0

(z − z0)n

rn

∫ 2π

0

e−intdt = 2π.

Comme la fonction t 7→ f (z0 + reit) est bornĂ©e sur [0, 2π] (puisque continue), on peut aussiĂ©crire :

∫ 2π

0

f(z0 + reit

) reit

z0 + reit − zdt =

+∞∑n=0

(z − z0)n

rn

∫ 2π

0

f(z0 + reit

)e−intdt

et on a en définitive :

2πf (z) =+∞∑n=0

(z − z0)n

rn

∫ 2π

0

f(z0 + reit

)e−intdt

soit f (z) =+∞∑n=0

an (z − z0)n avec :

an =1

2πrn

∫ 2π

0

f(z0 + reit

)e−intdt =

1

2iπ

∫

|u−z0|=r

f (u)

(u− z0)n+1du.

Equivalence entre analyticité et holomorphie 489

Il reste Ă  vĂ©rifier que ces coefficients an sont indĂ©pendants du rĂ©el r ∈ ]0, R[ . En effet pourr, râ€Č dans ]0, R[ , on peut trouver z ∈ D (z0, R) tel que |z − z0| < r et |z − z0| < râ€Č et on a alors

deux dĂ©veloppements en sĂ©rie entiĂšre f (z) =+∞∑n=0

an (z − z0)n et f (z) =

+∞∑n=0

aâ€Čn (z − z0)n avec

an =1

2iπ

∫

|u−z0|=r

f (u)

(u− z0)n+1du et aâ€Čn =

1

2iπ

∫

|u−z0|=râ€Č

f (u)

(u− z0)n+1du, et un tel dĂ©veloppement

est unique, on a nĂ©cessairement an = aâ€Čn pour tout n ≄ 0.Le thĂ©orĂšme prĂ©cĂ©dent nous dit qu’une fonction holomorphe est analytique et on a ainsi

montrĂ© l’équivalence entre les deux notions.Avec ce thĂ©orĂšme, on a aussi montrĂ© le rĂ©sultat suivant.

ThĂ©orĂšme 19.21 (Cauchy) Soient f une fonction holomorphe sur un ouvert non vide O deC, z0 un point de O et R > 0 le plus grand rĂ©el (Ă©ventuellement Ă©gal Ă  +∞) tel que D (z0, R) ⊂O.Pour 0 < r < R et z ∈ D (z0, r) , on a :

f (z) =1

2iπ

∫

|u−z0|=r

f (u)

u− zdu

(formule de Cauchy).

Démonstration. Tenant compte de∫

|u−z0|=r

du

u− z=

∫ 2π

0

ireit

z0 + reit − zdt = 2iπ,

la formule (19.3) nous donne :

f (z) =1

2iπ

∫

|u−z0|=r

f (u)

u− zdu

Remarque 19.10 Le corollaire 19.1 nous dit que les coefficients an du développement en série

entiÚre au voisinage de z0 sont donnés par an =f (n) (z0)

n!et avec l’expression intĂ©grale de ces

coefficients an,, on déduit que :

∀n ∈ N, f (n) (z0) =n!

2iπ

∫

|u−z0|=r

f (u)

(u− z0)n+1du

En définitives la connaissance de f sur le disque de centre z0 et de rayon r ∈ ]0, R[ suffit pourdéterminer f (z) pour tout z ∈ D (z0, r) et toutes les dérivées f (n) (z0) .

Remarque 19.11 Comme la composée de deux fonctions holomorphes est holomorphe, ondéduit que la composée de deux fonctions analytiques est analytique.

Exercice 19.46 Soit f une fonction dĂ©veloppable en sĂ©rie entiĂšre sur un disque D (0, R) oĂč

0 < R ≀ +∞ (R = +∞ signifie que D (0, R) = C) avec f (z) =+∞∑n=0

anzn pour tout z ∈ D (0, R) .

Montrer que la fonction g définie par g (z) = f (z) est holomorphe sur D (0, R) .

490 Fonctions holomorphes

Solution 19.46 On a g (z) =+∞∑n=0

anzn pour tout z ∈ D (0, R) et g est holomorphe sur D (0, R)

puisque développable en série entiÚre sur D (0, R) .

Exercice 19.47 On dĂ©signe par ln la dĂ©termination principale du logarithme complexe surC \ R−. Montrer que :

∀z ∈ D (0, 1) , ln (1 + z) =+∞∑n=1

(−1)n−1

nzn

Solution 19.47 Le rayon de convergence de la sĂ©rie entiĂšre∑ (−1)n−1

nzn vaut 1 (théorÚme

de d’Alembert), donc la fonction f dĂ©finie par f (z) =+∞∑n=1

(−1)n+1

nzn sur D (0, 1) est analytique

et en consĂ©quence holomorphe avec f â€Č (z) =+∞∑n=1

(−1)n+1 zn−1 =1

1 + z. Mais la fonction z 7→

ln (1 + z) est également holomorphe sur D (0, 1) (composée de fonctions holomorphes) avec

lnâ€Č (1 + z) =1

1 + z, il en rĂ©sulte que f (z) = ln (1 + z) + c, oĂč c est une constante (le disque

ouvert D (0, 1) est connexe). Faisant z = 0, on a c = 0 et f (z) = ln (1 + z) .

Corollaire 19.2 (Inégalités de Cauchy) En gardant les hypothÚses et notations du théo-rÚme 19.20, on a pour tout n ∈ N :

∣∣f (n) (z0)∣∣ =

n!

rnsup

|z−z0|=r

|f (z)| .

DĂ©monstration. On a :

∣∣f (n) (z0)∣∣ =

∣∣∣∣n!

2iπ

∫

|z−z0|=r

f (z)

(z − z0)n+1dz

∣∣∣∣

=n!

2πrn

∣∣∣∣∫ 2π

0

f(z0 + reit

)e−intdt

∣∣∣∣

≀ n!

2πrn

∫ 2π

0

∣∣f (z0 + reit

)∣∣ dt ≀ n!

rnsup

|z−z0|=r

|f (z)| .

Remarque 19.12 En remarquant que la fonction t 7→ f (z0 + reit) est 2π-pĂ©riodique et declasse C1 sur R avec des coefficients de Fourier donnĂ©s par :

∀n ∈ Z, cn (f) =1

2π

∫ 2π

0

f(z0 + reit

)e−intdt

la formule de Parseval nous donne :

+∞∑−∞

|cn (f)|2 =1

2π

∫ 2π

0

∣∣f (z0 + reit

)∣∣2 dt

Primitives des fonctions holomorphes 491

En Ă©crivant que

f(z0 + reit

)=

+∞∑m=0

am

(z0 + reit − z0

)m=

+∞∑m=0

f (m) (z0)

m!rmeimt

la sĂ©rie Ă©tant uniformĂ©ment convergente en t ∈ [0, 2π] , on a pour n ∈ Z :

cn (f) =1

2π

+∞∑m=0

f (m) (z0)

m!rm

∫ 2π

0

ei(m−n)tdt =

0 si n < 0f (n) (z0)

n!rn si n ≄ 0

et la formule de Parseval s’écrit alors :

+∞∑n=0

∣∣∣∣f (n) (z0)

n!

∣∣∣∣2

r2n =1

2π

∫ 2π

0

∣∣f (z0 + reit

)∣∣2 dt

Il en résulte que :

+∞∑n=0

∣∣∣∣f (n) (z0)

n!

∣∣∣∣2

r2n ≀ sup|z−z0|=r

|f (z)|2 =

(sup

|z−z0|=r

|f (z)|)2

et on retrouve les inégalités de Cauchy :∣∣∣∣f (n) (z0)

n!

∣∣∣∣ rn ≀ sup|z−z0|=r

|f (z)| .

Remarque 19.13 En gardant toujours les mĂȘme notations, la fonction g : z 7→ (z − z0) f (z)est holomorphe sur O et :

0 = g (z0) =1

2iπ

∫

|z−z0|=r

g (z)

(z − z0)dz =

1

2iπ

∫

|z−z0|=r

f (z) dz

et donc∫

|z−z0|=r

f (z) dz = 0 pour tout z0 ∈ O et r > 0 tel que D (z0, r) ⊂ O.

19.9 Primitives des fonctions holomorphesO désigne toujours un ouvert non vide de C et f une application de O dans C.

DĂ©finition 19.17 Soit f une fonction holomorphe de O dans C. On appelle primitive de f,tout fonction F holomorphe de O dans C telle que F â€Č = f.

Du thĂ©orĂšme 19.11, on dĂ©duit que si l’ouvert O est connexe et si f : O → C est holomorpheet admet des primitives, alors deux primitives de f sur O diffĂ©rent d’une constante.

ThĂ©orĂšme 19.22 Si F est une primitive de la fonction holomorphe f : O → C, on a alorspour tout chemin Îł : [a, b] → O :

∫

Îł

f (z) dz = F (γ (b))− F (γ (a))

492 Fonctions holomorphes

Démonstration. On a :∫

Îł

f (z) dz =

∫

Îł

F â€Č (z) dz =

∫ b

a

F â€Č (Îł (t)) Îłâ€Č (t) dt

=

∫ b

a

(F Îł)â€Č (t) dt = F (Îł (b))− F (Îł (a))

Dans le cas particulier, oĂč est un lacet, on a∫

Îł

f (z) dz = 0, si f admet des primitives sur O.

L’exercice 19.18 se rĂ©sout trĂšs simplement en remarquant que la fonction f dĂ©finie sur C par

f (z) = z2 − 1 admet pour primitive la fonction F dĂ©finie par F (z) =z3

3− z. Ce qui donne :

– pour Îł : t ∈ [0, 1] 7→ t + it2 :∫

Îł

f (z) dz = F (γ (1))− F (γ (0)) =(1 + i)3

3− (1 + i) = −5

3− 1

3i

– pour Îł : t ∈ [0, 2π] 7→ et+it :∫

Îł

f (z) dz = F (Îł (2π))− F (Îł (0)) =e6π

3− e2π −

(1

3− 1

)

– pour Îł : t ∈ [0, 2π] 7→ cos (t) + i sin (2t) :∫

Îł

f (z) dz = F (Îł (2π))− F (Îł (0)) = 0.

Remarque 19.14 Comme∫

|z|=1

dz

z= 2iπ 6= 0, on dĂ©duit que la fonction z 7→ 1

zn’admet

pas de primitive sur C∗. Il n’est donc pas possible de dĂ©finir une fonction logarithme comme

primitive de z 7→ 1

zsur C∗.

DĂ©finition 19.18 On dit que l’ouvert O est Ă©toilĂ© par rapport Ă  l’un de ses points, s’il existea ∈ O tel que pour tout z ∈ O, le segment [a, z] est tout entier contenu dans O.

Remarque 19.15 Un ouvert Ă©toilĂ© par rapport Ă  l’un de ses points est connexe.

Exemple 19.7 C∗ n’est pas Ă©toilĂ©.

Exercice 19.48 Montrer qu’un disque ouvert D (z0, R) est Ă©toilĂ© par rapport Ă  tous ses points.

Solution 19.48 Laissée au lecteur.

Exercice 19.49 Montrer que l’ouvert C \ R− est Ă©toilĂ© par rapport Ă  tous les points de R+,∗.

Solution 19.49 Laissée au lecteur.

ThĂ©orĂšme 19.23 Si O est un ouvert Ă©toilĂ© par rapport Ă  l’un de ses points, alors toute fonctionholomorphe f : O → C admet des primitives sur O.

Primitives des fonctions holomorphes 493

DĂ©monstration. Supposons l’ouvert O Ă©toilĂ© par rapport Ă  a ∈ O. Si f : O → C admetune primitive F sur O, on a alors pour tout z ∈ O :

∫

[a,z]

f (u) du =

∫

[a,z]

F â€Č (u) du = F (z)− F (a) .

On définit donc naturellement la fonction F par :

∀z ∈ O, F (z) =

∫

[a,z]

f (u) du = (z − a)

∫ 1

0

f (a + t (z − a)) dt.

Comme f est holomorphe, elle est indĂ©finiment diffĂ©rentiable O, vue comme une fonction dedeux variables rĂ©elles et il en est de mĂȘme de la fonction F avec :

∂F

∂x(z) =

∫ 1

0

f (a + t (z − a)) dt + (z − a)

∫ 1

0

f â€Č (a + t (z − a)) · tdt

=

∫ 1

0

(f (a + t (z − a)) + t · (z − a) f â€Č (a + t (z − a))) dt

=

∫ 1

0

∂

∂t(t · f (a + t (z − a))) dt

= [t · f (a + t (z − a))]t=1t=0 = f (z)

et :

∂F

∂y(z) = i

∫ 1

0

f (a + t (z − a)) dt + (z − a)

∫ 1

0

f â€Č (a + t (z − a)) · itdt

= i

∫ 1

0

(f (a + t (z − a)) + t · (z − a) f â€Č (a + t (z − a))) dt

= i

∫ 1

0

∂

∂t(t · f (a + t (z − a))) dt

= i [t · f (a + t (z − a))]t=1t=0 = if (z)

On a donc∂F

∂x(z) = f (z) = −i

∂F

∂y(z) et F est holomorphe sur O de dĂ©rivĂ©e f (conditions

de Cauchy-Riemann).

Exemple 19.8 La fonction z 7→ 1

zadmet des primitives sur C \ R−, une telle primitive est

donnée par :

F (z) =

∫

[1,z]

du

u

Comme F (1) = 0 = ln (1) , oĂč ln est la dĂ©termination principale du logarithme, on a :∫

[1,z]

du

u= ln (z) = ln (|z|) + i arg (z)

avec −π < arg (z) < π pour z ∈ C \ R−.

Corollaire 19.3 Si O est un ouvert Ă©toilĂ© par rapport Ă  l’un de ses points, alors toute fonction

holomorphe f : O → C et tout lacet chemin Îł : [a, b] → O, on a∫

Îł

f (z) dz = 0.

494 Fonctions holomorphes

Remarque 19.16 Les ouverts Ă©toilĂ© sont des cas particuliers d’ouverts simplement connexes.

Exemple 19.9 On a∫

|z|= 12

z

1 + z2dz = 0 car z 7→ z

1 + z2est holomorphe sur D (0, 1) et le

cercle de centre 0 et de rayon1

2est contenu dans ce disque.