MERCI MAMAN! POLI 426/4 POLITICS OF NIETZSCHE
PRESENTED
BY : STEVE PLOUFFE-‐BERTHIAUME I.D. 5890071
TO : PROF. ELENI PANAGIOTARAKOU
FEBRUARY 27TH 2014
MERCI MAMAN! STEVE PLOUFFE-‐BERTHIAUME
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8 février 2001, c’est le jour où tout à changer. C’est le jour où ma mère s’est effondrée
au sol dans un stationnement d’épicerie. Victime d’une embolie cérébrale, communément
appelée ACV (arrêt cardio-‐vasculaire), ma mère venait de franchir le point de non retour.
Ainsi, cet évènement fût l’élément déclencheur qui changea ma vie. Certes, vous direz que
c’est normal suite à un tel évènement assez traumatisant pour un enfant de 16 ans et de sa
famille. Mais, le changement dont je fais allusion, qui est toujours en cours, et qui le sera
toujours selon moi, est beaucoup plus subtil. Le 8 février 2001 est la date où j’ai commencé
à expérimenter la solitude et tous ses défis qui en découlent. Ici, je pense aux défis
psychologique et philosophique concernant la conception que j’avais de la vie et de la
société dans son ensemble. C’est aussi à partir de ce moment, à travers la solitude, que j’ai
commencé à me connaitre réellement et à analyser « my inner self » afin de mieux
comprendre et démystifier ce qui était « moi » et ce qui m’était socialement inculqué.
Le 8 février 2001, c’est la date charnière que j’utilise dans le cadre de ce travail. Toutefois,
après plusieurs années de réflexion sur la personne que je suis, je tiens à écrire que la dite
date n’est en fait que l’élément déclencheur d’un processus déjà amorcé de nombreuses
années auparavant. À l’aube de mes dix ans, j’étais déjà un jeune garçon qui questionnait et
analysait beaucoup le monde dans lequel je vivais. Avec mon horaire chargé entre l’école,
les études et mon sport favori qui était le hockey, j’allouais peu de temps à approfondir les
réflexions qui se pavanaient dans ma tête. Déjà, malgré mon jeune âge, certains indices
laissaient croire que j’avais tendance à flirter avec ma conscience et à écouter « ma petite
voix intérieure » comme on dit. Donc, le 8 février 2001 fût, selon moi, la pièce manquante
qui venait de compléter le dispositif qui allait me permettre d’entreprendre le long chemin
de la libération à travers lequel la solitude devenait mon meilleur allié pour me sortir de se
que Nietzsche appelait l’esclavage moderne.
Ce travail sera présenté comme l’histoire, résumée, de mes treize (13) dernières années
vécues dans la solitude. Je suis conscient de la complexité du sujet traité et que d’écrire un
travail complet dépasserait largement les balises fixées pour ce travail. Toutefois, raconter
cet épisode de ma vie me permettra d’imager concrètement la notion de solitude, selon la
philosophie de Nietzsche, à travers laquelle il présentait le concept comme permettant
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éventuellement à un individu de se libérer de l’esclavage moderne. L’esclavage dont il est
question ici, est philosophique, psychologique et sociologique. Au sens figuré, l’individu ne
fait que suivre le troupeau sans se préoccuper de la pertinence de le suivre.
Le processus de libération élaboré par Nietzsche comporte trois étapes : la déconstruction
de soi, l’auto-‐identification de soi et la reconstruction de soi. La première et la deuxième
étape font parties du processus de solitude tel que décrit par le philosophe allemand et la
troisième étape comporte deux sous aspects, soit la reconstruction personnelle et la
reconstruction sociale de l’individu en processus de libération. Selon mon expérience
personnelle et ma compréhension de la philosophie de Nietzsche, ces trois étapes ne
peuvent être opérées distinctement les unes aux autres. Comme vous pourrez le remarquer
en lisant les lignes qui suivent, ces trois étapes sont en perpétuelles interactions et une fois
qu’un individu se lance dans le processus de libération, il se rend bien compte que c’est une
spirale sans fin. Pour faire une analogie à cette dernière affirmation, je crois que les écrits
de Nietzsche dans « Genealogy of Morals » représentent bien la complexité du processus qui
n’a aucune fin en soi, mais seulement un chemin qui s’étale à mesure que l’individu avance
dans sa quête de liberté. (Nietzsche, 2000)
Le travail sera divisé en trois sections, lesquelles correspondent à chacune des étapes
mentionnées précédemment soit : la déconstruction de soi, l’auto-‐identification de soi et la
reconstruction de soi. Le travail que j’ai fait comme individu a été accompagner de plusieurs
outils qui m’ont grandement aider et qui m’aide encore aujourd’hui à être une personne
relativement unique et consciente, mais qui se sent parfois en marge d’une société
majoritairement constituée d’esclave. Les outils en question sont partagés avec vous en
annexe et dans la bibliographie et vous réaliserez qu’il n’y a pas de chemin unique pour
devenir un individu libre comme l’entendait Nietzsche. C’est d’ailleurs un élément que je
tenterai de refléter dans ce travail car je considère que chaque individu possède et nécessite
ses propres outils pour paver son chemin vers la liberté.
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LA DÉCONSTRUCTION DE SOI Je dois dire qu’il n’est pas facile d’écrire sur le sujet tellement les efforts déployés, pour
devenir une personne épanouie psychologiquement, philosophiquement et
sociologiquement, sont diversifiés et complexes. Comme je l’ai mentionné plus tôt, le
processus de libération que je poursuis est un travail de longue haleine et je peux affirmer
qu’initialement, cela ne fût pas un choix que d’expérimenter la solitude. Effectivement, le 8
février 2001, j’ai littéralement été poussé de force dans cette dernière.
Suite au décès de ma mère, je me suis retrouvé dans une situation familiale assez
particulière. Étant un jeune garçon « accroché au jupon de maman », je venais de perdre
mon repère, mon guide de vie alors que mon père travaillait sur des quarts de soir et que
ma sœur, âgée de 19 ans, vivait avec son copain. Cela faisait de moi un jeune homme qui, du
jour au lendemain, devait devenir autonome dans une maison déjà trop vide par l’absence
de sa mère. Certes, il m’aurait été aisément possible d’aller chercher de la compagnie pour
ne pas rester seul à la maison, mais comme beaucoup de gens qui vivent des moments de
deuil, je désirais le vivre seul car je me disais que les gens ne pouvaient pas comprendre ma
situation.
Cette première expérience dans la solitude a été tout un choc car, même avec la télévision,
les jeux vidéo et mon chien qui me tenait compagnie, il vînt un moment où le processus d’un
deuil commença à faire son chemin dans mon esprit. J’ai d’ailleurs rapidement accepté le
fait que plus jamais je ne reverrai ma mère. Toutefois, cette première prise de conscience
m’a amené à questionner tout ce qui m’entourait car selon l’éducation que j’avais reçu et
dans la culture occidental en général, la mort survenait seulement lorsqu’un individu
devenait vieux, disons après l’âge de 80 ans. Et ma mère! Elle n’avait que 41 ans. J’ai alors
commencé à réaliser que tout ce qui m’entourait pouvait être tout aussi éphémère.
Le fait de commencer à considérer tout ce qui m’entourait comme étant éphémère, j’ai
instinctivement cherché à me réfugier un peu plus dans ma solitude. Quoi de plus rassurant
que de se tourner vers soi-‐même lorsque le monde extérieur ne correspond plus aux idéaux
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que nous cultivions. Et bien sur, en me tournant vers moi-‐même, j’étais convaincu au moins
d’une chose, la personne que j’étais, elle, elle était bien réelle. Trois années se sont écoulées
avec cet état d’esprit qui m’habitait, soit de m’isoler du reste du monde et ne faire confiance
qu’à moi-‐même. Je considère ces années comme des années de solitude destructive car elle
n’était pas considérée comme une opportunité de développement de soi à ce moment de ma
vie.
À mes 19 ans, par un cheminement un peu erratique, j’ai commencé à travailler pour une
entreprise multinationale qui opérait dans ma ville natale de Saint-‐Hyacinthe. La solitude
dans laquelle je m’étais réfugiée devenait de plus en plus lourde à supporter. Elle le
devenait car à ce moment de ma vie, la solitude représentait pour moi seulement un moyen
de ne pas confronter la nouvelle vision de vie qui s’était logée dans mon esprit depuis trois
ans. J’avais l’impression de tourner en rond et que ma vie n’allait nulle part comme si
chaque journée était la même que la précédente. C’était un peu comme le jour de la
marmotte! Dans cet état d’esprit, ma conscience me parlait sans trop que je lui porte
attention. Cela ne faisait qu’accroitre le profond malaise qui m’habitait. Comme si ignorer
« ma petite voie intérieur » suffirait à la faire taire. Non seulement elle s’obstinait à me
parler mais le poids de la vie quotidienne devenait insupportable. Mais, je continuais à
tourner en rond sans trop savoir comment gérer la situation. Un jour, comme à la lueur
d’une chandelle, l’espoir s’était dessiné à l’horizon.
Après un peu plus d’un an à travailler pour Kimberly-‐Clark Inc., l’entreprise multinationale
en question, une opportunité se présentait à moi et allait me permettre de briser le cercle
vicieux dans lequel je me trouvais. L’entreprise annonçait la fermeture de son usine et le
transfert des opérations aux États-‐Unis. Pour ce faire, la compagnie avait besoin de
formateurs pour permettre le transfère des connaissances aux employés des usines
destinées à recevoir les lignes de production de notre succursale. Voilà ma chance de
quitter tout cette endroit sans avenir. Lorsqu’on m’a confirmé mon statut de formateur
attitré à l’usine de Conway, en Arkansas, ce fût pour moi un moment de réjouissance tout
simplement parce que j’avais l’opportunité de quitter un environnement qui, selon moi, me
rendait malheureux.
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C’est en novembre 2005 que je m’envolais pour Conway, tout sourire aux lèvres et mon
« backpack » rempli d’espoir de trouver un sens à ma solitude. Ce premier séjour à
l’étranger fût comme un baume appliqué sur une plaît. Non pas parce que j’avais réglé mon
problème de solitude et que j’avais trouvé le bonheur, mais parce que malgré
l’environnement et la culture dans lesquelles je me trouvais, le même état d’esprit pesait
sur mes épaules. C’est alors que j’ai réalisé que le problème, et donc la solution, était en moi.
Ce séjour à l’étranger fût d’ailleurs le premier de plusieurs qui allaient suivre dans les
années subséquentes car chaque expérience me permettait de mieux découvrir la personne
que j’étais. C’était comme me mettre au banc des accusés à chaque fois que je quittais pour
un monde étranger et qu’à chaque fois, je disséquais ma personnalité pour mieux la
dissoudre, pour mieux déconstruire tout ce qui m’avais été inculqué depuis ma naissance.
La dissolution de soi ne s’est toutefois pas opérée seulement lors mes séjours à l’étranger.
Lorsque je revenais au Québec, le processus continuait car j’étais conscient de mon
environnement et de l’esclave moderne qui s’était érigé en moi. Je réalisais comment les
gens, dont moi le premier, se comportaient majoritairement selon des valeurs socialement
construites, donc n’agissaient pas forcément de leur propre gré, mais plutôt comme des
robots programmés on ne sait trop au bénéfice de qui ou de quel groupe de personne ou
encore de quelle tranche de la société. Cette prise de conscience rejoint en quelque sorte la
vision du concept de « Agonistic Power » élaboré par Nietzsche. (Hutter and Friedland,
2013)
La déconstruction de soi est un long processus qui selon moi n’a pas de fin. Pour ma part,
cela a débuté il y a treize ans suite au décès de mère et il est toujours en cours. Toutefois, le
concept de dissolution de soi évolue dans le temps car une fois que certains aspects de ma
personnalité ont été dissout, je découvrais et découvre encore des particularités
profondément ancrées en moi. Ce travail de longue haleine demande beaucoup de réflexion
et de travail sur soi. Dans mon cas, les voyages à l’étranger ont été un outil qui m’a aidé à
dissoudre l’esclave que je devenais. Outre les voyages, j’ai eu recours à de nombreux outils
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pour m’aider dans ce cheminement et c’est ce dont j’aborderai dans la prochaine section de
ce travail intitulée l’auto-‐identification de soi.
L’AUTO-‐IDENTIFICATION DE SOI
Selon Nietzche, la déconstruction de soi, grâce à l’expérimentation de la solitude, est un
processus essentiel dans la quête de l’individu qui cherche à se libérer de l’esclavage
moderne. Toutefois, cela ne se fait pas en criant ciseaux et l’individu doit trouver les outils
nécessaires à sa dissolution pour éventuellement pouvoir se reconstruire dans toute son
unicité. C’est grâce à cette deuxième étape, l’auto-‐identification de soi, que, selon moi,
l’individu peut se déconstruire et éventuellement poser les bases destinées à sa
reconstruction.
Dans l’introduction de ce travail, j’avais mentionné que les trois aspects du concept de
libération de soi développé par Nietzsche étaient perpétuellement en interactions. Le
processus de dissolution de soi que j’expérimente depuis plus de dix ans a été accompagné
d’outils qui m’ont permis de m’auto-‐identifier. Les outils en question sont nombreux, mais
voici ceux qui ont prédominés, outre les voyages à l’étranger, dans mon cheminement
jusqu’à maintenant. Tout d’abord, je ne compte pas les heures que j’ai passé à lire des livres
sur des sujets aussi diversifiés que la philosophie, la psychologie, l’ésotérisme, la sociologie,
les religions, la biologie, et l’astronomie. J’ai aussi investi de nombreuses heures à méditer
grâce à différentes techniques comme la méditation bouddhiste traditionnelle, la pratique
du Chi et à travers l’expérimentation des rêves conscients et/ou éveillés (Webster). Cette
dernière technique m’a grandement aidé à avoir un certain accès à mon subconscient,
normalement actif seulement pendant les périodes de rêve profond chez la majorité des
gens (Jung, 2012). Dans mon cas, il m’a été possible de comprendre certains aspects de ma
vie grâce à cette technique. Une autre approche que j’ai préconisée a été les études
universitaire en sciences politiques. Ces études furent une grande source d’apprentissage
de ma personne dans la mesure où j’ai appris à comprendre le système mondial dans lequel
je me trouvais. Selon moi, pour savoir qui je suis, je me devais de savoir dans quel
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environnement j’évoluais pour ainsi pouvoir cerner les éléments susceptibles de nuire ou
contribuer aux efforts que je déployais pour trouver ma vraie nature. Cette liste non
exhaustive d’outils, qu’y m’ont grandement supporté dans mon processus d’auto-‐
identification, ont été intégrés à différentes étapes de ma vie au cours des treize dernières
années. Toutefois, dans le cadre de ce travail, je n’aborde que les volets des voyages et de la
méditation, ce qui me permettra de limiter la complexité du processus de libération de
l’esclavage moderne que je poursuis.
LA MÉDITATION
La méditation a été un outil que j’ai intégré très rapidement dans mon processus d’auto-‐
identification. Dès l’âge de 20 ans, en 2005, suite à mon premier séjour au États-‐Unis, j’ai
commencé à lire au sujet de la méditation et sur la religion bouddhiste. L’un ne va pas sans
l’autre, selon moi, car il n’est possible de s’approprier la méditation seulement qu’en
s’acculturant de la philosophie bouddhiste. Comme je venais de réaliser que le problème et
la solution résidaient forcément en moi et que, jusqu’à ce moement, j’avais adopté une
attitude négative à l’égard de la solitude, je me devais d’entreprendre une plongée profonde
dans mon esprit. Je ne pouvais faire autrement que d’expérimenter la méditation et
apprendre à apprécier ma solitude avant d’entreprendre la dissolution de l’esclave
moderne que j’étais. La méditation est un art qui s’apprend comme un enfant qui apprend à
patiner. Les premières tentatives étaient souvent peu concluantes et certaines peurs
m’animaient qu’en a l’inconnu qui sommeillait en moi.
Pendant pratiquement deux ans, j’ai pratiqué la méditation quotidiennement. Au départ,
c’était par tranche de deux ou trois minutes pour ensuite se transformer en séance de dix,
quinze, vingt minutes et ainsi de suite pouvant atteindre parfois plus d’une heure. Grâce à la
méditation, j’en suis venu à apprécier ma solitude et le dialogue que j’entretenais avec mon
esprit. (Ricard, 2003) J’avais pris conscience de l’hyperactivité de l’esprit humain. Je veux
dire par cette affirmation qu’il est en constante communication autant avec l’intérieur que
l’extérieur de l’individu. (Rinpotché, 2007) Je considère ces deux premières années
d’expérimentation de la méditation comme la phase exploratoire de soi afin de découvrir
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tout ce qui m’habitait; mes pensées, mes croyances, mes préjugés et ma santé physique et
mental dans son ensemble.
Durant les années subséquentes, j’ai approfondi mes connaissances au sujet de la
méditation en intégrant diverses techniques comme la pratique du Chi, c’est-‐à-‐dire l’art de
sentir et d’utiliser l’énergie universelle. (Brown, 2004) Ce qui est intéressant avec la
pratique du Chi, c’est que j’ai appris à sentir les moindres signaux que mon corps m’envoie.
Une séance de Chi demande une extrême sensibilité de soi qui demande des années de
pratique de méditation. Depuis 2008, j’expérimente aussi la pratique du sommeil et du rêve
conscient à travers lesquelles je peux jouir d’un accès relatif à mon subconscient. (Jung,
2011) J’utilise le terme « accès relatif » car je suis toujours en processus d’apprentissage de
cette dernière car la « frontière » entre le conscient et le subconscient est très opaque et
non clairement défini. (Jung, 2012) Cette dernière pratique me permet de bien démystifier
chaque partie de mon esprit. Toutefois, j’en suis arrivé à ce niveau de méditation en
intégrant certains ouvrages relevant du domaine psychiatrique comme ceux écrient par le
célèbre Docteur Carl Gustav Jung.
Les nombreuses explorations dans les profondeurs de mon esprit m’ont permis d’apprécier
les moments de solitude et je leurs accorde maintenant une place prioritaire au quotidien.
Ces dernières années, j’ai parcouru mon intérieur et je suis conscient qu’il me reste
beaucoup à apprendre sur moi. Comme je le mentionnais plus tôt, le processus dans lequel
je me suis engagé il y a plus de dix ans est une spirale sans fin. Effectivement, chaque fois
que j’avance dans mon processus de déconstruction et que je découvre des profondeurs
inexplorées de mon esprit, je me dois de reconsidérer le travail déjà fait qui vient confirmer
ou infirmer les nouveaux constats sur ma personne.
Ici, il a été question d’un travail centré sur moi-‐même depuis plusieurs années. Ce qui m’a
été essentiel afin de permettre la déconstruction de soi et l’auto-‐identification qui sont
précurseurs à une reconstruction de soi dans toute son unicité. (Hutter, 2006) Il est, certes,
essentiel de faire ce travail individuel mais il est aussi primordial de garder contact avec le
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monde qui nous entoure car il est comme une énorme pièce de théâtre dans laquelle nous
sommes, parfois un acteur, parfois un figurant ou encore un spectateur.
LA RECONSTRUCTION DE SOI Vous venez de prendre connaissance de mon expérience à l’égard des deux premiers
concepts du processus de libération élaborer par Nietzsche. Vous avez aussi remarqué que
j’ai accordé beaucoup d’importance à ma solitude et que durant toutes ces années, j’ai
cherché à tirer le meilleur de ce que la solitude pouvait m’apporter. Comme vous avez pu le
remarquer, les deux premiers concepts se sont intercalés dans le temps. Toutefois, la
déconstruction de soi et l’auto-‐évaluation doit aussi s’accompagner d’une reconstruction de
soi dans le respect du travail que j’avais accompli pendant ces années.
Actuellement, je peux affirmer que j’ai commencé à intégrer le concept de reconstruction de
soi en même temps que celui de la déconstruction de soi. Selon Nietzsche, la déconstruction
de soi amène la suppression d’un partie ou de l’entité que nous sommes, ce qui laisse place
à intégrer les nouvelles valeurs qui correspondent à l’état de conscience du moment.
(Hutter, 2006) Je prend soin d’utiliser le terme « état de conscience du moment » car le
processus de libération dont il est question ici est en constante évolution. Les concepts de
déconstruction et d’auto-‐évaluation ont générés en moi le sentiment que tout est éphémère
et qu’éventuellement, ce qui est construit à un moment de ma vie peut ne plus l’être
ultérieurement.
Bien que j’aie intégré le concept de reconstruction de soi au même moment que celui de la
déconstruction de soi, le premier s’est opéré à de multiples paliers selon mon cheminement
parcouru dans la solitude, ma progression dans la conscientisation de mon état d’esprit et
les expériences de vie dont je faisais face dans le temps. À la lumière de cette affirmation, je
considère que j’ai expérimenté au fil des ans deux types de reconstruction, l’une qui est
interne (personnelle) et l’autre externe (sociale). Le premier s’est opéré dès le tout début
du processus alors que j’ai commencé à expérimenter le second il y a environ deux ans.
Concrètement, j’ai donc été une dizaine d’années orienté sur la reconstruction de ma
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personne et que les premiers balbutiements quand à mon émancipation sociale n’a débuté
que tout récemment.
RECONSTRUCTION INTERNE
J’aimerais, tout d’abord, élaborer un peu plus sur le sujet des séjours à l’étranger dans cette
section. J’écrivais au début de ce travail que les voyages m’ont, en premier lieu, grandement
aidés à prendre conscience que la solitude était l’outil principal pour entamer la
déconstruction de soi et performer une auto-‐évaluation pointue de ma personne grâce à la
méditation. Je dois dire qu’en expérimentant ces deux concepts, le troisième s’est
automatiquement enclenché. Pour ceux qui ont beaucoup voyagé dans leur vie, et là je ne
parle pas de voyage dans les « tout inclus », comprendront parfaitement ce qui sera exprimé
dans les prochaines lignes.
Les simple fait d’avoir pris conscience de ma situation et d’avoir compris que j’étais moi-‐
même le problème et la solution est une construction interne en soi. C’est pourquoi j’ai
périodiquement rempli mon sac à dos et voyagé dans des régions aussi variées que
l’Amérique Centrale et du Sud, l’Europe, le Moyen-‐Orient et à l’intérieur de mon propre pays
le Canada. Chaque voyage me permettait de me connaitre un peu plus car les repères que
j’avais dans mon petit confort quotidien n’existait pas à l’étranger. C’est dans ces moments
que notre personnalité et notre état d’esprit sont les plus vulnérables et qu’ils se
manifestent explicitement à travers un phénomène connu sous le nom de « choc culturel ».
Dans le milieu de la coopération internationale, le processus du choc culturel chez l’humain
n’est pas une nébuleuse et je vous invite à approfondir vos connaissances à ce sujet. Bref, en
vivant des chocs culturels, j’ai souvent été confronté à des sentiments de malaise interne
par rapport à ce que je vivais à l’externe. Je saisissais alors ces moments déplaisants pour
les analyser durant mes séances de méditation. En procédant ainsi, je parvenais à
comprendre mes états d’âme face à certaines situations et comment des situations anodines
comme un syrien jetant un paquet de cigarettes au sol par exemple provoquait un
sentiment d’inconfort dans mon intérieur.
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De plus, ces séjours à l’étranger m’ont fait prendre conscience comment un individu est tout
simplement socialement construit selon son sexe, sa culture, sa religion et sa localisation
géographique par exemple. J’ai donc réalisé que j’étais aussi socialement construit et que
ces malaises n’avaient pas lieu d’être car ce n’étaient que des jugements biaisés de moi
versus l’autre. (Jung, 2012) Cette prise de conscience est aussi une construction en soi car
au moment même où j’avais réalisé cela, je venais d’intégrer une valeur bouddhiste très
importante, soit l’empathie envers l’autre. (Ricard, 2003) En d’autres mots, je m’appropriais
une certaine objectivité à l’égard de « l’autre ».
Ces merveilleux changements qui survenaient à l’étranger devenaient très perceptibles
lorsque je revenais au Québec. En voyageant, j’ai déconstruit la culture qui siégeait en moi
pour devenir un individu ouvert d’esprit et qui, comme il est souvent utilisé en coopération
internationale, est dépourvu de ses lunettes culturelles. Cette objectivité culturelle m’a aidé
à opérer une déconstruction de soi assez efficace car je percevais désormais ma propre
culture comme m’étant étrangère.
Voilà qui était très prometteur pour mes séances de méditation, car autant ma culture que
celle des autres étaient systématiquement toutes au banc des accusés. Je me plaçais donc
comme le spectateur de mon propre théâtre, soit mon esprit. Pour favoriser une
déconstruction et une auto-‐évaluation de soi réaliste, c’était selon moi la meilleure position
que je pouvais avoir car l’objectivité de mon regard brisait tous les tabous.
De voyage en voyage et de méditation en méditation, je poursuivais donc ma quête de
liberté et ces dix dernières années ont été chargées en terme de reconstruction interne. Si
aujourd’hui je me compare à ce que je fût il y a plus de dix ans, je peux affirmer que j’ai, au
sens figuré, appuyer sur le bouton « reset » et tout reconstruit à partir de rien. Devrais-‐je
plutôt dire à partir de tout? Bref, tout est passé sous la loupe interne : mes valeurs, mes
convictions, ma vision du monde, les religions, l’histoire; la mienne et celle de notre planète,
et ma reconstruction interne se poursuit toujours actuellement.
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RECONSTRUCTION EXTERNE
Ma reconstruction interne s’opère depuis une dizaine d’années déjà, mais le volet externe
n’est qu’à ses premiers balbutiements. La raison est que la reconstruction externe demande
une profonde connaissance de soi. Ce n’est que dans le tournant de l’année 2011-‐2012 que
j’ai commencé à explorer, et explore encore à tâtons, cette facette du concept de
reconstruction de soi. Comme je l’ai mentionné à la page 11, la reconstruction externe
s’associe au volet social de la reconstruction de l’individu. (Hutter, 2006) Je peux vous dire
qu’après avoir consacré plus de dix ans à me déconstruire, à m’auto-‐évaluer et à me
reconstruire intérieurement, la reconstruction sociale est une tâche gargantuesque.
Le défi est énorme pour moi car au fil des ans, je suis devenu une personne savourant sa
solitude. Le solitaire que je suis devenu est maintenant un peu maladroit à tisser des liens
sociaux dans son environnement. Effectivement, le chemin que j’ai parcouru jusqu’à
maintenant fait de moi une personne doté d’une conscience qui n’est pas partagé par la
grande majorité de la population. Je m’amuse à comparer la reconstruction externe à une
chasse aux trésors. C’est-‐à-‐dire que, comme Nietzsche le pensait, je cherche des perles rares
avec qui je partage sensiblement le même état d’esprit ou encore le même niveau de
conscience que moi. Ces personnes ne se trouvent pas à tous les coins de rue. Je comprends
aussi qu’en trouvant ce type de personne (like-‐minded), il se peut qu’elle ne soit que de
passage pour une période de ma vie plus ou moins longue. Cela s’explique dans la logique
que j’ai assimilée depuis plusieurs années que tout est éphémère. Que ce soit à l’interne
comme à l’externe, rien n’est permanent et chaque rencontre que j’ai fait jusqu’à
maintenant, j’ai tenté d’en apprécier toute l’importance du moment présent et d’y tirer une
leçon de vie que me permettait de continuer mon chemin comme individu épanoui et
unique. (Tolle, 2000)
Je suis conscient que la reconstruction externe est un travail de longue haleine, tout comme
les autres concepts développés précédemment dans ce travail. Ce que je trouve intéressant
à travers la reconstruction sociale, c’est qu’en appréciant la solitude et ayant une conscience
éclairée de ma personne, je ne ressens aucun empressement quand à ma reconstruction
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externe. Je peux me permettre de choisir minutieusement les personnes avec qui je désire
investir de mon temps. (Hutter et Friedland, 2013) Notez ici, que j’ai utilisé « investir » et
non pas « passer » du temps car je fais de chaque moment une expérience de vie
enrichissante.
En somme, la reconstruction de soi est un concept indissociable aux deux premiers. La
déconstruction de soi amène forcément la reconstruction de soi sous un nouvel angle. Afin
d’assurer le transfert harmonieux du premier concept à ce dernier, une auto-‐évaluation
poussée de soi est primordiale et tout cela demande temps et honnêteté envers l’individu
que nous sommes.
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CONCLUSION
8 février 2001, c’est le jour où ma mère est décédée. C’est le jour où mon monde s’était
effondré. C’est le jour où ma vie « prenais une méchante débarque » comme on dit en bon
québécois. C’est le jour où je croyais que tout s’arrêtait. Voilà treize ans que cet évènement
s’est produit. Aujourd’hui, mon discours ressemble plutôt à ceci; le 8 février 2001, c’est le
jour où ma vie, comme individu, commençait réellement.
Au départ, je craignais la solitude car j’ignorais ce qu’était la conscience. Je craignais la
solitude car je la voyais comme un fardeau à ma vie. Je craignais la solitude car j’ignorais
que « ma petite voie intérieur » était la meilleure alliée que je puisse espérer. Je craignais la
solitude car elle m’était tout simplement inconnue. Ce n’est que lors de mon premier séjour
à l’étranger que la première prise de conscience s’est opérée. La solitude, ce n’était pas
l’ennemi, mais plutôt la pièce maitresse d’un processus qui me permettrait de me libérer de
l’esclavage moderne et de devenir l’individu unique que je suis devenu et en développement
perpétuel.
Dans ce travail, il a été question de solitude et du processus de libération de l’esclavage
moderne tel que décrit par Nietzsche. Ce processus contient trois concepts indissociables
les uns aux autres, soit la déconstruction de soi, l’auto-‐évaluation de soi et la reconstruction
de soi.
Le premier concept s’opère seulement dans la mesure où l’individu prend conscience qu’il y
a un problème personnel à régler. Dans mon cas, j’ai réalisé que je devais déconstruire
l’individu que j’étais à la suite de mon premier voyage à l’étranger. J’ai réalisé que ma
solitude était la clé de voute qui allait me permettre de faire « une coupe à blanc » de tout ce
qui me constituait.
Le deuxième concept, l’auto-‐évaluation de soi, s’ajoutait logiquement dans le processus en
cours car pour me déconstruire, je devais posséder les outils nécessaires pour analyser
l’individu que j’étais. L’auto-‐évaluation m’a donc permis de mettre mon « inner self », mon
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esprit, sur le banc des accusés et le déconstruire petit à petit. Dans ce travail, j’ai abordé
seulement la méditation comme outil d’auto-‐évaluation car c’est le pilier majeur de tout le
processus de libération en cours. La méditation m’a permis d’expérimenter une solitude
constructive menant à l’émancipation de la personne que je suis réellement. L’auto-‐
évaluation est le concept médian entre la déconstruction et la reconstruction de soi. C’est à
travers ce concept j’ai pu détruire l’esclave moderne que j’étais pour construire un individu
dans toute son unicité.
Le dernier concept, la reconstruction de soi, s’est opéré à deux niveaux. Le premier, soit la
reconstruction interne ou personnelle fût intégrée simultanément avec le processus de
déconstruction de soi. Cela va de soit dans la mesure ou les anciennes mœurs de l’individu
déconstruit sont remplacées par les nouvelles de l’individu libre. Cette première phase de
reconstruction fût suivie de la deuxième phase, soit la reconstruction externe ou sociale.
Cette dernière est à ses premiers balbutiements et je l’ai peu explorée jusqu’à maintenant.
Après plusieurs années à m’être recroquevillé dans ma solitude et à avoir travaillé
essentiellement sur l’individu que je suis aujourd’hui, la reconstruction sociale à pris une
telle valeur qu’il est primordial d’avancer à tâtons afin de soutirer ce qu’il y a de mieux pour
me permettre de poursuivre mon chemin vers la liberté.
J’espère avoir été en mesure de démontrer comment la solitude peut être bénéfique pour
un individu et que peut importe le chemin emprunter et le temps investi dans le processus
de libération, le résultat vaut amplement les efforts déployés. Initialement, il y a une
certaine chronologie dans ce processus, mais avec le temps, les trois concepts sont en
interrelations constantes. Aussi, plus le niveau de conscientisation augmentait, plus
j’intégrais des outils qui me permettaient de plonger un peu plus profonds dans mon esprit.
Ces treize dernières années ont été le terrain de jeu où les modifications spirituelles de mon
esprit amenaient un changement global de ma personne. (Schelling, 2006 et Gribbin, 2004)
Aujourd’hui, à la lumière de tout le cheminement que j’ai parcouru, j’ai su tirer le positif de
ce malheureux évènement survenu le 8 février 2001. Merci maman!
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BIBLIOGRAPHIE BROWN Simon G., La pratique du Chi; L’art de sentir et d’utiliser l’énergie universelle au quotidien, publié par les Éditions du Roseau, Espagne, 2004 GRIBBIN John, Deep Simplicity; Bringing Order to Chaos and Complexity, publié par Random House, New-‐York, USA, 2004 HUTTER Horst, Shaping the future; Nietzsche’s New Regime of the Soul and Its Ascetic Practices, publié par Lexington Books, Lanham, Maryland, USA, 2006 HUTTER Horst et FRIEDLAND Eli, Nietzsche’s Therapeutic Teaching; For Individuals and Culture, publié par Bloomsbury Publishing PLC, Londre, Angleterre, 2013 JUNG Carl Gustav, Psychologie de l’inconscient, publié par Le livre de poche, Édition 08, Espagne, 2011 JUNG Carl Gustav, Dialectique du Moi et de l’inconscient, publié par les Éditions Gallimard, Barcelone, Espagne, 2012 NIETZSCHE Friedrich, Basic Writings of Nietzsche, publié par The Modern Library, New-‐ York, USA, 2000 RICARD Matthieu, Plaidoyer pour le bonheur, publié par NiL Éditions, Paris, France, 2003 RINPOTCHÉ Yongey Mingyour, The Buddha, The Brain, and The Science of Happiness, publié par Harmony Books, Random House, The Crown Publishing Group, New-‐York, USA, 2007 SCHELLING Thomas C., Micromotives and Macrobehavior, publié par W.W. Norton & Company Inc, New-‐York, USA, 2006 TOLLE Eckhart, Le pouvoir du moment présent; Guide de l’éveil spirituel, publié par Ariane Éditions, Outremont, Montréal, Canada, 2000 WEBSTER Richard, Guide pratique des souvenirs des vies antérieures; Douze méthodes éprouvées, http://www.ada-‐inc.com/guide-‐pratique-‐des-‐souvenirs-‐de-‐vies-‐ anterieures.html, (livre que j’ai lu il y a plusieurs années et que je n’ai plus en ma possession)
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ANNEXE I ÉLOGE DE LA SOLITUDE (par Yvon Dallaire, psychologue) "Il existe peu de certitudes dans la vie. La mort constitue la première des certitudes et tous voudraient bien l'éviter, mais elle est inexorable. Une autre certitude que tous, ou presque, cherchent aussi à fuir est le fait que nous sommes condamnés à vivre seuls à l'intérieur du corps que nous sommes. Nous sommes assurés de passer le reste de notre vie avec nous-‐mêmes. Moins nous nous aimons, plus nous recherchons l'amour de l'autre, des autres, comme si le fait de trouver l'"âme soeur" pouvait nous sortir de notre solitude. Or, il n'y a pire solitude que celle que l'on peut vivre à deux. Nous sommes seuls, et le plus tôt nous l'acceptons, le plus tôt nous pouvons apprendre à vivre heureux avec nous-‐mêmes, en devenant pour nous notre meilleur ami, notre meilleur amoureux. Nous aimant, nous aimantons les autres. Pour trouver l'autre, il faut donc partir à la recherche de soi. Or, cette recherche ne peut se faire que dans le silence. Certes, des moments de fusion passionnelle peuvent parfois exorciser notre solitude et surtout notre peur de la solitude, mais la passion ne dure jamais qu'un temps et nous retrouvons immanquablement notre solitude, notre état étant d'être unique, donc seul. Nous sommes toujours seuls et serons toujours à l'intérieur de nous-‐mêmes. Chacun naît seul, vit seul et meurt seul. La réelle maturité débute le jour où l'on se sent l'auteur et l'acteur de son existence, le jour où l'on cesse de faire porter la responsabilité de sa vie sur autrui, le jour où l'on n'attend plus rien d'autrui, mais où l'on profite de tout ce que l'on possède et de ce qu'autrui nous offre. Le jour où je considère mon partenaire comme un invité dans ma vie et que je me considère comme tel pour l'autre peut être le jour où le véritable bonheur conjugal prend place. Pourtant, la majorité des gens paniquent à l'idée de vivre seul, car, pour eux, solitude égale isolement ou enfermement, alors qu'elle est plutôt une ouverture sur la vie intérieure et la créativité. C'est pour fuir l'isolement que des gens vont dans des églises ou des discothèques, s'impliquent socialement, regardent la télévision, écoutent la radio... Pourtant, impossible d'être heureux à deux si nous ne sommes pas heureux seul. Quel paradoxe de demander à quelqu'un d'autre de faire pour nous (nous rendre heureux) ce que nous ne faisons pas pour nous-‐mêmes. Comment voulez-‐vous que quelqu'un nous aime si nous-‐mêmes ne nous aimons pas ? je parle d'estime de soi, de cette estime et cette confiance en soi qui nous convainquent que nous avons le droit au meilleur de ce que la vie peut nous apporter, dont entre autres la
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présence d'une personne qui nous aime et que l'on aime, et que nous pouvons obtenir si l'on s'en donne réellement la peine."
ANNEXE II À CHACUN SON DÉFI (Steve Berthiaume) (Écrit en juillet 2012 lors de mon séjour au Sénégal) Pourquoi sommes-‐nous ici? Une question qui semble bien simple n’est-‐ce pas ! Certains dirons qu’ils sont ici pour en apprendre plus sur la culture sénégalaise et canadienne et d’autres dirons qu’ils sont ici pour prendre de l’expérience terrain pour un emploi futur. Cette dernière semaine passée dans la région de Kaolack a été pour moi une semaine particulièrement axée sur la réflexion. Pourquoi suis-‐je ici ? Je ne met aucunement pas en question ma présence à ce Séminaire car je suis tout à fait à mon aise parmi mes collègues sénégalais et canadiens, mais la dite question vagabondait dans ma tête depuis un moment. Bien sur, j’ai des raisons connues de tous de ma présence ici, mais au fond, les VRAIES raisons… celles qui dicteront la suite, me sont inconnues. Pourquoi ne pas profiter de la chaleur accablante de Kaolack pour me réfugier dans une chambre partiellement climatisée et y réfléchir. Certes, la raison de notre présence à Kaolack n’était pas de philosopher sur le pourquoi du comment des choses. Il y avait beaucoup de travail qui attendait les séminaristes. Les journées particulièrement chargées entre les activités organisées dans le cadre du Séminaire, les nombreuses entrevues, les déplacements qui s’y rattachent et la saisie des données recueillies nous a laissé peu de temps pour vaquer à d’autres occupations « hors contexte ». Seulement, cette question était omniprésente dans mon esprit. Pourquoi suis-‐je ici ? Une question qui semble bien simple n’est-‐ce pas ! Pourtant, la réponse ne l’est pas tout autant. Cette question, je me la pose régulièrement et, souvent, la réponse ne peut venir que quelques années plus tard. Cela fait parti du processus d’acquisition d’expérience et de connaissance de soi. Cette question sans réponse est simplement liée au fait que je ne possède pas les outils nécessaires pour y répondre actuellement mais que des évènements futurs le permettront. Toutefois, une fois en possession de ces nouveaux outils, l’évidence même de la question me permettra d’apprécier le chemin parcouru à sa juste valeur. Le chemin en question est unique pour chaque individu et les évènements qui le caractérisent n’ont de sens que pour ce dernier. Pour moi, ce chemin symbolise un défi en soi. Ce chemin, mon chemin, je l’imagine comme étant un voyage en train. Il avance vers une destination par des trajectoires sinueuses, s’arrêtant occasionnellement pour prendre des passagers à son bord. Certains sont présents que pour quelques stations et d’autres pour le
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trajet tout entier. Chacun imprègne le train de son vécu et tout au long du trajet je réalise la chance d’avoir partagé un siège avec chacun d’entre eux. Parfois, le siège est plutôt inconfortable et le désir d’être ailleurs m’envahit. Mais, c’est ma locomotive… ma voie ferrée… donc je reste. Parfois, la locomotive s’arrête, confronté à des obstacles obstruant la voie. La locomotive se demande alors si un jour elle arrivera à destinations et pourquoi il y a tant d’arrêts et d’obstacles en cour de route. Conçu pour aller de l’avant, la locomotive développe des techniques ingénieuses pour dégager ces obstacles et continue son chemin. Ces défis m’outillent pour les prochaines épreuves qui viendront en cour de route. Ces outils sont des éléments essentiels qui me permettront, tout comme la locomotive, d’avancer vers ma destination finale. Même si parfois je ne peux pas répondre et comprendre ma situation actuelle, je continue d’avancer et je me dis que les réponses me parviendront prochainement. Alors, en cour de route, il est primordial de garder en tête que tout à sa raison d’être et que si les réponses ne viennent pas immédiatement, elles jailliront éventuellement telles des étoiles scintillantes dans un ciel épuré de tous ses nuages. Vous, pourquoi êtes-‐vous ici ? Une question qui semble bien simple n’est-‐ce pas !
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