Müller, Birgit 2009 - "Rendre technique un débat politique. Controverses autour des...

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TSANTSA *t lrt "2009: 27-36 COMMENT RENDRE TECHNIQUE UN DEBAT POLITIQUE MilTROVERSES AUTOUR DES BIOTECHNOLOGIES AGRICOLES AU SEIN DE LA FAO IO nes ea tIEU, et p. rntions sile et aris: f,sIRAcT: Hotl, T0 TRANSFoRM A PoLlTlcAL ISSUE lNTo A TECHNICAL 0NE: lÜINOVERSIES CONCERNING AGRICULTURAL BIOTECHNOLOGIES AT THE FAO lßarticle explores how the dispositif inwhich the policy guidelines of the FAo are embedded depoliticizes conflicts about property nisation tries to neutralise the controversies surrounding ety organisations, thereby reducing political controversies to the institution is, however, less its essence than a recurring antsbecomethesubjectofpoliticalandeconomiccontentionas 4focusingonthetheme«AgriculturalBiotechnologiesMeetingthe llnß of the Poor?» is produced and published. Ed6s: Expertise . participation . lnstitutions internationales' Politique alimentaire et agraire ' Dispositif de ddpolitisation IET TÜLLER 'ton ans pQ a soutev6 au moins trois contentieux' PremiÖrement' lbprtisans de la transg6nÖse voient tes OGM comme un tm de surmonter les contraintes environnementales qui Iaedture et le brevetage des ptantes transg6niques ont sus- ,tdes controverses sans pr6c6dent dans le monde entier' fuoduction des organismes g6n6tiquement modifi6s trition dans le monde et la muttiplication des 6meutes de [a faim. les recommandations politiques de Ia FAO qui pro- meuvent les nouvelles technologies agricoles ont 6t6 profon- d6ment remises en cause. Pourtant te d6bat sur les enjeux cruciaux [i6s aux technologies est d6potitis6 par les prati- ques de Ia gouvernance internationale de Ia FA0' Ces der- niöres entretiennent un semblant dharmonie et de consen- sus existe en fait une large gamme de points de vue et des conflits f6roces. Les recommandations politiques sur tes technologies agricoles sont l6nifi6es pour les rendre accepta- bles, nettoy6es de leurs 6t6ments conflictuels, bref, rendues «techniques>>.'fl est pourtant difficile de concevoir un projet d6mocratique la neutralisation et le d6placement du poti- tique sont toujours pr6sents (Garsten 2007)' La d6mocratie en tant quorganisation sp6cifique du politique, ordonn6e ä certaines vateurs universelles - libert6 et 6gatit6 - est struc- tur6e de telle fagon que le conflit y occupe une place recon- nue comme centrale. Formuler en d6mocratie un problöme comme 6tant potitique signifie tenir compte des forces adver- ses. des ideologies et des int6r6ts divergents qui sbpposent en public (Mouffe 1994). Quet iqpact la neutralisation dujeu d6mocratique a-t-elle sur le rÖ1ä politique de Ia FA0? D'un point de vue pratiqr., ,ont concern6s par tes politi ques de Ia FAO tous les consommateurs de nourriture dans le monde, c'est-ä-dire tout un chacun. Sont plus sp6cialement concern6s les producteurs de nourriture (paysans, agricul- teurs, bergers, chassgurs,.et cueilleurs. ouvriers agricoles qrposants mettent en garde contre les consequences rfvisibtes que la diss6mination des plantes g6n6tique- modifi6es dans l'environnement pourrait entrainer' llintroduction des OGM soulöve des ques- sant6 et de s6curit6 alimentaire. Ses partisans sou- qu'elle est indispensable pour combattre la faim et ition, alors que ses opposants mettent en avant Ie er potentiel que fait courir leur consommation, les ris- pourla sant6 näyant pas 6t6 suffisamment test6s' Troi- s Par ces controverses ont marque Nations Unies Pour läimentation elle soulöve des questions sur la redistribution et sur le contrOle de la production agricole (Mütler 2OO6b, 2008) puisque cinq compagnies agrochimr- sulement (Bayer Crop Science, Monsanto, Syngenta, DuPont) d6tiennent Ia plupart des brevets sur les transg6niques dans le monde entier. icutture, mandat6e pour promouvoir une nourriture et suffisante pour la population mondiale' Avec du nombre de personnes souffrant de d6nu- D0s§rER | 27

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TSANTSA *t lrt "2009: 27-36

COMMENT RENDRE TECHNIQUE

UN DEBAT POLITIQUEMilTROVERSES AUTOUR DES BIOTECHNOLOGIES AGRICOLES AU SEIN DE LA FAO

IO

nes

eatIEU,

etp.

rntions

sile et

aris:

f,sIRAcT: Hotl, T0 TRANSFoRM A PoLlTlcAL ISSUE lNTo A TECHNICAL 0NE:

lÜINOVERSIES CONCERNING AGRICULTURAL BIOTECHNOLOGIES AT THE FAO

lßarticle explores how the dispositif inwhich the policy guidelines of the FAo are embedded depoliticizes conflicts about property

nisation tries to neutralise the controversies surrounding

ety organisations, thereby reducing political controversies to

the institution is, however, less its essence than a recurring

antsbecomethesubjectofpoliticalandeconomiccontentionas4focusingonthetheme«AgriculturalBiotechnologiesMeetingthe

llnß of the Poor?» is produced and published.

Ed6s: Expertise . participation . lnstitutions internationales' Politique alimentaire et agraire ' Dispositif de ddpolitisation

IET TÜLLER

'ton

ans

pQ a soutev6 au moins trois contentieux' PremiÖrement'

lbprtisans de la transg6nÖse voient tes OGM comme un

tm de surmonter les contraintes environnementales qui

Iaedture et le brevetage des ptantes transg6niques ont sus-

,tdes controverses sans pr6c6dent dans le monde entier'

fuoduction des organismes g6n6tiquement modifi6s

trition dans le monde et la muttiplication des 6meutes de

[a faim. les recommandations politiques de Ia FAO qui pro-

meuvent les nouvelles technologies agricoles ont 6t6 profon-

d6ment remises en cause. Pourtant te d6bat sur les enjeux

cruciaux [i6s aux technologies est d6potitis6 par les prati-

ques de Ia gouvernance internationale de Ia FA0' Ces der-

niöres entretiennent un semblant dharmonie et de consen-

sus lä oü existe en fait une large gamme de points de vue et

des conflits f6roces. Les recommandations politiques sur tes

technologies agricoles sont l6nifi6es pour les rendre accepta-

bles, nettoy6es de leurs 6t6ments conflictuels, bref, rendues

«techniques>>.'fl est pourtant difficile de concevoir un projet

d6mocratique oü la neutralisation et le d6placement du poti-

tique sont toujours pr6sents (Garsten 2007)' La d6mocratie

en tant quorganisation sp6cifique du politique, ordonn6e ä

certaines vateurs universelles - libert6 et 6gatit6 - est struc-

tur6e de telle fagon que le conflit y occupe une place recon-

nue comme centrale. Formuler en d6mocratie un problöme

comme 6tant potitique signifie tenir compte des forces adver-

ses. des ideologies et des int6r6ts divergents qui sbpposent

en public (Mouffe 1994). Quet iqpact la neutralisation dujeu

d6mocratique a-t-elle sur le rÖ1ä politique de Ia FA0?

D'un point de vue pratiqr., ,ont concern6s par tes politiques de Ia FAO tous les consommateurs de nourriture dans le

monde, c'est-ä-dire tout un chacun. Sont plus sp6cialement

concern6s les producteurs de nourriture (paysans, agricul-

teurs, bergers, chassgurs,.et cueilleurs. ouvriers agricoles

qrposants mettent en garde contre les consequences

rfvisibtes que la diss6mination des plantes g6n6tique-

modifi6es dans l'environnement pourrait entrainer'

llintroduction des OGM soulöve des ques-

sant6 et de s6curit6 alimentaire. Ses partisans sou-

qu'elle est indispensable pour combattre la faim et

ition, alors que ses opposants mettent en avant Ie

er potentiel que fait courir leur consommation, les ris-

pourla sant6 näyant pas 6t6 suffisamment test6s' Troi-

s Par ces controverses ont marque

Nations Unies Pour läimentation

elle soulöve des questions sur la redistribution

et sur le contrOle de la production agricole (Mütler

2OO6b, 2008) puisque cinq compagnies agrochimr-

sulement (Bayer Crop Science, Monsanto, Syngenta,

DuPont) d6tiennent Ia plupart des brevets sur les

transg6niques dans le monde entier.

icutture, mandat6e pour promouvoir une nourriture

et suffisante pour la population mondiale' Avec

du nombre de personnes souffrant de d6nu-

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DOSSIER

-!- --'i1;. .

et ouvriers de l'industrie agro-alimentaire), mais aussi les

entrepreneurs et les actionnaires de Iindustrie agro-alimen-

taire, de par [impact des politiques promulgu6es sur leurs

activit6s et par cons6quent sur leurs profits. Dans un sens

plus restreint, le pubtig de la FAO est forme par tous tes

citoyens que cela soit sous une forme individuelle ou col-

lective en ce qui conceriib les interactions avec Uinstitution

dans le cadre de forums, de programmes dässistance techni-que et sur ljlnternet. Les <<ruraux pauvres» constituent une

cible particuliäre pour ta FAO dont llobjectif fondateur est

«däm6liorer le bien-6tre des pauvres en ville et ä Ia campa-

gne» et d'encoürager leur participation aux <<actions de ter-

rain et au dialogue potiti.que» (FA0 1999: 5). Aujourd'hui,les

paysans pauvres. qui 6taient auparavant r6duits au r6le de

<<victimes sans voix», 6mergent comme une force nouvelle:

ils s'organisent, proposent des atternatives et participent ä

des forums parallöles aux conf6rences de Ia FA0.

J'examinerai dans cet article comment des acteurs indivi-duels et collectifs qui interagissent directement avec linsti-tution sont absorb6s dans I'espace organis6 par te dispositif

de d6politisation de la FAO et comment d'un autre cÖt6 its

tentent d€laborer une contre-conduite (Foucault 2004) ren-

dant possibte [e conflit. la controverse et [äction strat6gique.

Michel de Certeau appelle «strat6gie» le «calcul des rapports

de forces qui devient possible ä partir du moment oü un sujet

de voutoir et de pouvoir est isotable d'un <environnement).

Elle postule un lieu susceptibte de servir de base ä une ges-

tion de ses relations avec une ext6riorit6 distincte» (Certeau

1990: XLVI). Quelqu'un qrii ne peut compter ni sur un tieu

propre, ni sur une frontiÖre nette qui le.distingue de l'autre

comme une totalit6 clairement visible, fait rin'calcul tacti-que. La tactique par contre ägit dans l'espace de läutre dans

lequel on s'insinue sans pouvoir garder Ia distance. La tacti-que doitjouer avec des 6vönements pour les transformer en

«occasions» pour avoir un impact qui ne durera pas'

Je regarderai Uinstitution non pas comme une totalit6

confin6e mais comme un dispositif (Foucault 1994) qui attire

constamment de nouveaux acteurs pour les imptiquer comme

experts, interlocuteurs et donneurs dopinion en les enga-

geant avec des formes de calcul, de raisonnement technique,

ütcapacity building.Le dispositif de ta FAO essaie de produire

des r6cits coh6rents sur le politique que ces acteurs vont

int6grer ou contester. Pour Foucault, lbbjectif des disposi-

tifs de pouvoir n'est pas la socialisation, la stabilit6 structu-

relte, ltquilibre ou Ia r6duction de la complexit6, mais lbr-

donnancement des multiplicit6s humaines (Foucault 1975:

218). Le dispositif libÖre tout en r6glementant, autrement

diL il r6glemente la tibert6. Le role du dispositif n'est pas

d'imposerun certain type de comportement mais dbrganiser

un espace qui contraint sans contraindre selon des objectifs

determin6s (Fusulier et Lannoy 1999: 189). Dans cet espace

les acteurs instituent tout en 6tant institu6s, c'est-ä-dire

quils participent ä la production des normes et des rögles

et sont eux-mdmes int6gr6s dans le systÖme de contraintes

(Boudon et Bourricaud 7986:327) ä des degr6s divers.

Discuter des OGM en termes d'environnement et de sant6,

ainsi que de la fagon dont its peuvent am6liorer les condi-

tions de vie des «pauvres», ouvre un d6bat technique qui

suppose une base morale commune aux participants ä cette

discussion. Uam6tioration de la sant6 de la population mon-

diale, la lutte contre la faim et Ia r6duction de la destruc-

tion de ttnvironnement sont des objectifs 6nonc6s dans les

0bjectifs du Mitl6naire de 1'0NU. Ces derniers sont donc la

base d'un consensus gtobal qui limite le d6bat aux moyens

techniques ä mettre en euvre pour atteindre ces objectifs.

Ces debats font partie de ce que Marc Ab61Ös (2006) appetle

la potitique de la survie. Au lieu de demander quels m6ca-

nismes font que les pauvres deviennent et restent pauvres,

ou ä travers quels m6canismes un groupe social appauvrit

un autre, on s'interroge sur la fagon dont les pauvres pour-

raient 6tre capables eux-mEmes de sortir de la pauvret6 et

de prot6ger leur sant6 et leur environnement.

Le d6bat sur tes OGM concerne une dimension politique

en termes de droits de propri6t6 intellectuelle sur [es plantes

agricoles, en mettant läccent sur les conflits entre agricul-

teurs et compagnies semenciÖres, entre d6tenteurs de bre-

vets au Nord et fournisseurs de mat6riel g6n6tique au Sud.

Pourtant. ces questions sur llappropriation des ressources

et sur te controle des moyens de production par les grandes

compagnies ont 6t6 longtemps bannies en tant que «ques-

tions politiques>> des documents produits par [a FAO. Pour-

tant, comme nous allons le voir, lbp6ration visant ä ren-

dre techniques ces questions politiques est de fait un projet

en cours de r6alisation qui naboutit jamais entiÖrement (Li

2007: 10). Dans Ia premidre partie de cet article. jänaty-

serai comment ta FAO emprunte le röle institutionnel d'un

courtier impartial en arbitrant le d6bat sur la biotechnolo-gie ä partir d'un point de vue neutre et technique. Dans la

deuxiöme partie, j'examinerai comment elle vise ä neutrali-

ser les conflits, via [e premier rapport annuel th6matique sur

The State of Food and Agriculture. Agricultural Biotechnology.

Meeting the Needs of the Poor? (2004) Enfin, dans [a troisiÖme

partie. je consid6rerai les r6actions ä cette publication qui

font 6merger des controverses politiques d'une fagon inat-

tendue. Je mäppuierai sur des documents (imprim6s et en

ligne sur Internet) produits par et ä travers llinstitution,ainsi que sur des enqu€tes de terrain men6es lors des conf6-

rences de la FAO aux niveaux r6gional et international, en

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t28|TSA]{rSA*14-2009

2003, 2004 et 2006, ainsi que sur de nombreux entretiensavec les administrateurs de la FAO et les membres de la Coor-

dination internationale de la soci6t6 civite (ICP). UICP est

compos6e dägriculteurs, de p6cheurs, de groupes environne-mentaux et dbrganisations des peuples autochtones, ä qui Ie

directeur g6n6ra[ avait fait la promesse formelle de renforcer

leur «participation ä la recherche sur les politiques agricoles

et aux activites dänalyse de la FAO» (Diouf 2003).

LE COURTIER: HONNETE, NEUTRE, OBJECTIF

Le röte que la FAO a tent6 de se tailler au cours des derniöres

ann6es et qui correspond ä des tendances similaires percep-

tibtes dans d'autres institutions des Nations Unies est cetui

dun «courtier» op6rant entre les gouvernements, le secteurpriv6 et la soci6te civile. Un courtier dans le sens le plus fon-

damentat est un interm6diaire entre lächeteur et le vendeur;

it aide ä n6gocier une transaction 6conomique ä [a satisfac-

tion des deux parties. Ladministration de [a FAO a jou6 untel röle entre les pays donateurs et receveurs au cours des

derniöres ann6es. Les fonds propres attribu6s ä llnstitutionayant consid6rablement diminuE depuis Ie d6but des annees

1990, la FAO a 6t6 r6duite, dans de nombreux cas, au cour-

tage de projets financ6s par des pays donateurs avec le pays

r6cipiendaire. L:6galit6 politique que tous les Etats ont en

principe dans lässembt6e de la FAO devient ainsi n6gocia-

ble par les modes de financement des projets, par läppro-che donor driven, qti donne aux pays donateurs le droit de

d6finir les politiques qu'ils veulent soutenir. Au lieu d'inter-venir de maniöre identique sur lägriculture et la nutritiondans le monde entier, ta FAO a eu tendance ä agir comme une

agence de d6veloppement distinguant les pays «d6velopp6s>»,

les plaEant de facto en dehors de sa sphöre d'influence, et

ceux <<devant 6tre d6velopp6s>>. La FAO participe ainsi ä «ta

volont6 däm6liorer» (Li 2007) qu'ele partage avec däutres

organismes de d6veloppement. La pr6tendue expertise de la

FAO pour optimiser ta vie däutrui est en soi une revendication

de pouvoir (Li ?007: 5), puisqu'ette justifie toute action sur [e

comportement des autres soi-disant dans leur propre int6r6t.tironie de ce type d'autoritd est qu'elte rend les bureaucraties

puissantes pr6cis6ment en leur donnant I'apparence d'6tre

d6potitis6es, c'est-ä-dire de ne pas 6tre motiv6es par des int6-r€ts contradictoires (Barnett et Finnemore 1999: 708).

Le r61e de courtier entre en conflit avec [e röle normatifde llnstitution: la formulation et [a promotion des droits de

üromme ä lalimentation (Directives volontaires en matiÖre de

droit ä lätimentation 2004), ä ta terre (D6claration finale de [a

TSANTSA*14.2009

Conf6rence CIRADR [Conf6rence internationale sur la r6forme

agraire et le d6veloppement rurat] 2006) et aux semences

(Trait6 international sur les ressources phytog6netiques pour

lälimentation et lägriculture 2004). Le röle de gardien de

valeurs morales et de normes universetles tend ä 6tre devanc6

par celui de <<courtier fort» ou de «courtier objectif», qui fonde

sa force sur Ia «comp6tence» et le «savoir». Ce röle reldve de

l'expertise de la FAO et de sa capacit6 ä pr6tendre de Ia sorte

ä une autorit6 normative sup6rieure sur les pays donateurs

et r6cepteurs. Bien qu'6tant toujours officiellement une ins-titution d6mocratique oü les diff6rentes valeurs et visions

du monde peuvent 6tre exprim6es et n6goci6es ä lAssembl6e

entre les gouvernements des pays membres, la FAO devientde facto rne institution r6gissant les affaires du monde par Ia

recherche de «la v6rit6» sur la base du savoir expert.

Dans [a controverse sur les biotechnologies, [a FAO

revendique le röte d'un «courtiel honn6te et ind6pendant>>

entre les infgrr-nations contradictoires. IJambiguit6 de ce

role de courtier ressort dans läuto-pr6sentation du travailde la FAO sur Ia biotechnologie: <<Chaque fois que le besoin

s'en fait sentir, la FAO sert <d'honn€te courtier> en offrantun forum de d6bat. [...] La FAO s'efforce en permanence de

d6terminer les avantages, les potentiels et les risques asso-

ci6s ä llutilisation des technologies modernes pour accroitrela productivit6 de [a production v6g6tate et animale. Tou-

tefois, c'est aux gouvernements membres qu'i[ incombe de

formuler des potitiques en [a matiöre.»1 Ainsi, la FAO four-nit des analyses, d6termine les risques et les avantages et,

de sa position de savoir sup6rieur, elle intervient comme

m6diatrice dans les d6bats. Dans le m6me temps, Uinstitu-tion d6cline toute responsabilit6 sur les cons6quences que

les orientations techniques qu'elle a d6velopp6es auraientsur däutres, affirmant plutot que Ia responsabilit6 reviententiörement aux goüvernements qui les ont approuv6es.

Dans son effort global pour d6finir, classer et mesurer ce

qu'elle entend par la «faim», la «<nourfiture» et la «production

agricole», la FAO a contribu6 ä un systöme de gouvernance qui

repose sur la normalisation de ceux qui ont faim. Ces derniers

sont transform6s en unit6s statistiques, qui chacune repr6-

sente une infime partie des 850 millions däffam6s qui doivent6tre nourris pour parvenir ä remplir l'engagement du Sommet

mondial de lalimentation de 1996 de:f6duire de moiti6 dlci ä

2015 le nombre de personnes souffrant'de la faim. Le styte de

ce raisonnement produit des fagons aöteptabtes de d6couvrir

la «v6rit6»> sur les peuples, les populations, Ies nourritureset la nutrition pendant que les premiers deviennent de nou-

veaux objets d'enqudte et, finalement, des objets connus sans

' http://www.fao.orgibiotech/stat.asp?lang=fr (page consult6e le 9 octobre 2008).

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-1+i.. __.r1 -

mystöre (Ilcan et Phitlips 2003: 450)' La faim' la propri6t6

intellectuelle, la bio-s6curit6 et mdme le libre-6change sont

consid6r6s comme des probtämes techniques pour lesquels des

solutions techniques peuvent 6tre trouv6es'

Des ONG et des organisations de la soci6t6 civile ontjou6

un röIe croissant dans lßIaboration et Iinitiation des cadres

r6glementaires et volontaires n6goci6s sous l€gide de ta FAO'

lans un document officiel de cette agence sur ta strat6gie de

cooperation avec tes ONG et la soci6t6 civite (FA0 1993)' les

auteurs soulignent les avantages mutuels d6coulant d'une

telle de la FAO Pour

influ la FAO cherche

leur leurs Prises de

d6cision» (FA0 1999: 6). IJimpact que Ia soci6t6 civile peut

avoir sur t'6laboration des politiques ä llint6rieur de tlnsti-

tution et Par son biais est

ptexes que les organisation

tariat de Ia FAO ont avec les tinfluencer les politiques. Les gouvernements donnent leur

mandat ä la FAO et assument la responsabilit6 pour les poli-

tiques qui y sont men6es. Beaucoup d'0NG sont parties int6-

grantet aoaispositif international et servent de prestatai-

res de services pour r6atiser les projets de ta FA0'

N6anmoins tors des sommets mondiaux de Ualimentation

de 1996 et 2002, des ONG qui n€taient pas officiellement

accr6dit6es aupräs de ta FAO ont mis au point des strat6giesa-

1a

h-

niques pourraient 6tre trouv6es, elles ont attir6 lattention

sur les in6galit6s de

ont engendr6 la faim

natif, elles ont rejet6

et son soutien au libre-6change pour tancer le concept de

<<souverainet6 alimentaire»> d6fini comme le <<droit des peu-

Forum for Food Sovereignty 2OO2:8) 'Une des revendications

fortes 6tait Ie libre accäs des paysans aux semences qu'ils

estimaient menac6es par lärriv6e des semences transg6ni-

ques brevet6es sur le march6. Leurs points de vue ont regu

des m6dias une attention consid6rable' En cons6quence' en

2OO2,le directeur g6n6ral de la FA0,'Jacques Diouf' r6agit ä

cette cdtique en invitant le Comit6 international de planifi-

cation (IPC), organisateur du forum alternatif, ä faciliter de

nouvelles formes de <<dialogue» entre tes ONG, tes organisa-

tions de la soci6t6 civile, les mouvements sociaux et Ia FA0'

Les membres du Comit6 international de planification

r6agirent ä cette invitation avec prudence' Dans leurs

n6gociations avec le directeur g6n6ral, ils r6sistörent ä

Uinstitutionnatisation de leur fonction d'interm6diaire

et soulign r le fait

qu'ils ne fficielle

auprös de enrr un

comit6 de des ONG

et des mouvements sociaux vis-ä-vis de Ia FAO' 0fficieUe-

ment, toutes les organisations ayant particip6 ä la plani-

fication du forum atternatif paralläle au Sommet mondial

de llalimentation 2002 6taient membres de IIPC' Toute-

fois, aucune rÖgle formelle n'existait pour d6terminer

comment des organisations qui n'avaient pas particip6 ä

ll6v6nement initial seraient autoris6es ä assister aux r6u-

nions internes en tant qu'observateurs et aux 6v6nements

Yinterm6diaire de IiPC. Dans Ie

s de I'IPC voulaient sässurer que

nt ä ce <<dialogue>> (Diouf 2003)

adh6raient aux principes 6nonc6s dans la ptateforme sur

la souverainet6 alimentaire formul6e en 2002' Ils exigÖ-

rent un systöme de quotas permettant d'inviter en prio-

rit6 des repr6sentants des <<mouvements sociaux des pays

en d6veloppement>» et s'assurÖrent que les gouvernements

n'excluaient pas des membres de ta soci6t6 civile dont UIPC

avait facilit6 La participation (entretien 10'5'2006)'

La proposition de Ia FAO mit en cause le fonctionnement

interne de IIIPC et beaucoup de temps fut consacr6 dans les

r6unions internes de I'IPC ä la ren6gociation des processus

internes et aux questions de responsabilit6 vis-ä-vis de ses

membres de base. Tout en tentant de r6sister ä Iinstitution-

nalisation de son dialogue avec la FAO, UIPC dut concilier

Ia formalisation de ses relations internes et la pr6servation

de son caractöre de forum ouvert. IJIPC accepta le dialogue

avec la FA0, ä la condition qu'il soit fond6 sur Ia «recon-

naissance mutuelle» et sur le <<respect de leurs espaces

propres» (entretien 10.5'2006). IjIPC tenta ainsi de bouger

ä'rr,. faqo. <<strat6gique» par rapport ä la FA0, par opposi-

tion ä une approche <<tactique» - pour reprendre ta distinc-

tion de Michel de Certeau (1990: XLVI)' IJobjectif strat6gi-

que explicite de IIIPC fut de renforcer la part des Nations

ünies qui s'occupe des questions alimentaires contre l'im-

pact mue par llOMC, de libre-6change et

de g propri6t6 intellectuetle' Les mem-

bres ue Ia FAO devienne une institution

<<pour le peupte et non pas seulement des gouvernements»

(entretien, 5.5.2006). Des membres de IIPC coopärent avec

Ies administrateurs de la FAO partageant leurs pr6occupa-

tions de mettre en pratique des valeurs et normes globales

sur le droit ä Ia nourriture, ä la terre et aux semences' Bien

DOSSIER

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30 l TSAllTsA * 14' 2009

qdayant un accÖs facile ä certaines sections de llinstitu-

li*, ift navaient pas accös ä d'autres sections opposees ä

hrs visions du monde et leur analyse politique'

IJobjectif leur influence

stesgouve embre dellIPC:

&ur Diouf, lobbYing'Ilne

ulement se donner le lustrde montrer: 0h, je suis tout6galement que les ONG fas

ltupernements au sujet de certaines questions'» (entre-

6*, f.rr.zO06) Inversement, Ies ONG esp6raient asseoir

lk pouvoir de n6gociation avec les gouvernements en

mtrant que les questions qu'eltes poursuivaient 6taient

ldenues par la FAO. Certaines organisations d6clarärent

rmrtement qu'elles voulaient que le secr6tariat de la FAO

gouvernements pour qu'its facilitentNG aux politiques nationales' Les ONG

FAO tentÖrent ainsi de parvenir ä une

ue vis-ä-vis des gouvernements et entre

une autorit6 morale et l6gale au-delä des

ffir€ts particularistes des gouvernements'

IIIGE AU PAYS DES MERVEILLES ET LE RAPPORT SOFA

lh des questions centrales que la controverse sur ta bio-

Echnotogie souläve est la tension probl6matique entre les

qerts» et les citoyens mobilis6s' IJexpert est devenu Uin-

lHocuteur privil6gi6 des organismes publics et des orga-

ddions internationates, en tirant sa t6gitimit6 d'une

ddisant objectivit6 scientifique' Lexpertise est devenue

r mtit central dans les conflits de pouvoir au sein des

Hutions et par rapport aux citoyens' Pourtant' comme

Iü, Habermas et däutres llont soulign6, il n'y a pas de

ffiscientifiqued6pourvued'int6rdtsetind6pendantededcs normatifs. Les relations entre llexpert engag6' tra-

dantpoursacausesurunebaseprofessionnetle'etlesüns inpliqu6s dans une cause sur une base volontaire'

ildonccomplexes.Iiid6ed'uneproc6dured'expertisol6etrraleurs et des consid6rations morales. op6rant unique-

xE sur la base de connaissances de sp6cialistes' est un

rqilte- Dös que des connaissances sp6cialis6es sont utili-

Des d6clarations d'experts, la soi-disant <<bonne science»

(sound science) entrent en concurrence directe avec les

objectifs politiques que la soci6t6 civile avance'

d'un thÖme central pour [agriculture et te d6veloppement

6conomique fut ajout6e au corpus de statistiques' 0n com-

*"nq. pu, le thÖme le plus controvers6 qui soitl- Agricultural

Biotichnotogy. Meeting the Needs of the Poor? Le rapport du

nir ä la fois des avantages 6conomiques et environnementaux

pour les pays en d6veloppement» (Hegwood 2005:4)'

Avec ce rapport, ta FAO cesse dädopter une approche «neu-

tre» envers les OGM et <<tombe du cot6 pro-0GM de ce d6bat

La pr6face authentifie Ie rapport comme un document offi-

ciel dans la mesure oü elle porte la signature manuscrite du

matiöre de biotechnologie qui pr6occupent ses mandants' en

particulier ses effets sur

male» (FAO 2004: VIII) et

et soutien Pour les Politi

Le raPPort est Pass6 Par

rapport et ses grandes lignhi6rarchie administrativescientifiques sur la biotechnologie furent recueillis et' enfin'

TSANISA TT 14. ZOO9

DCSSTER | 31

DOSSIER

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Birgit Müuer (cambridge phD 1986) est chercheure au LAIoS-EHESS ä Paris. ElIe a travailt6 sur des usines post-socialistes et

sur des mouvements sociaux et environnementaux en Europe et en Am6rique latine. Elle entreprend actuellement un projet

de recherche multi-site ä Ia FAO et parmi des producteurs au Nicaragua et au canada, intituie Nourriture, propriötö et pouvoir:

lestechnologiesagricolescommepolitiquesgrobalesetpratiqueslocales.Parmisespublications: DisenchantmentwithMarket

Economics. East Germans and western capitalism (New York: Berghahn 2007) '

LAIOS-CNRS/EHESS, 54 bd Raspail. F-75006 Paris

[email protected]

36 | TSAilTSA * 14' 2009

rsition,

rer que

ropda-ralis6eN6an-

rnismet'exte-üe leur

;6n6ral

16cem-

lors de

rntairerrinh6-t6rieurautori-verne-soci6t6

re de lales tel-iources

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lementnörent

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embres

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it 6tait:e pres-

rent uns anta-:s de lareulent

quelles

lencer.nstam-

;anisa-i resterr m6me'espace

r pay6s

itution

internationale. Elles risquent ainsi de perdre leur espace

propre de revendication et dbpposition, ce qui r6duiraitteurs actions ä des actions tactiques.

Jäi montr6 comment lädministration de ta FAO auto-Elimine son r6le potitique d6mocratique en jouant le röle

du courtier objectif et neutre qui obscurcit plus les conflitsqu'il ne tes rend transparents. Elte minimise ainsi des dif-f6rences r6elles de pouvoir, des in6gatit6s 6conomiques et

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des rapports d'exptoitation r6duits ä des problömes techni-ques. Etle devient donc incapable de faire face aux enjeux

de pouvoir et de contrOte 6conomique dans [a r6glemgnta-

tion et t€valuation des biotechnotogies qui auraient pour-

tant besoin d'€tre r6gies par un acteur d6mocratique fort au

niveau international. Le vrai enjeu pour le futur röle politi-que la FAO est de redevenir une institution internationaleavec un financement propre capable de permettre aux anta-gonismes de s'exprimer et de se n6gocier en son sein.

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DossrER | 3s

DOSSIER

'i'lir

Les auteurs de cette lettre demandent si la FAO. en tantqubrganisme des Nations Unies, remplit toujours son man-

dat constitutionnel de servir les ruraux pauvres ou si elle

a perdu son ind6pendance au profit de grands acteurs 6co-

nomiques et politiques. Ils revendiquent pour [a soci6t6

civile un röle däct*,r potitique ä [int6rieur de Uinstitutionqui se justifie par L'<<engagement» de ta FAO ä consulter et

communiquer avec eux. Ils considörent par ailleurs comme

«un coup de poignard dans le dos des petits agriculteurs»

que cette consultätion näit pas eu tieu. Les auteurs souli-

gnent 6galement les divisions internes au sein de llinsti-tution sur lägro-liotechnologie et d6clarent que le rapport

insulte les gouvernäments membres de la FAO ayant «coura-

geusement» 16sist6 ä Iindustrie et aux pressions politiques,

ainsi que les scientifiques et les"administrateurs de ta FAO

qui ont d6vetopp6 des pratiques pälticipatives donnant [a

priorit6 au röle et aux droits des agricutteurs.

Cette lettre provoqua une critique interne au sein de täd-

ministration de Ia FAO et poussa le directeur g6neral ä 6crire

une lettre de justification ä sgn personnel, soulignant tou-

tes les autres initiatives que la FAO avait prises pour rem6-

dier au probläme de la faim dans le monde (Diouf 2004). It se

distancia ainsi implicitement de son plein soutien ä la bio-

technologie exprim6 dans la pr6face du rapport S0FA. Lors

d'une r6union avec des membres de UIPC, iI promit de leur

fournir lbccasion et les ressources financiäres n6cessaires

pour 6crire un contre-rapport. La directrice-adjointe respon-

sable du rapport d6nitssionna en 2006 et fut remplac6e par

un directeur adjoint, membre du Parti Vert altemand, et qui

encouragea activement lägro-6cologie. ' "

Comment comprendre ce qui semble 6tre une r6action

forte aux protestations contre le rapport S0FA? Leur impact

montre les limites du dispositif de d6politisation. Les ONG

qui font partie de IIIPC ayant jalousement gard6 leur auto-

nomie et assumant ainsi une position strat6gique (au sens

de Certeau 1990) ä partir de l'ext6rieur de L'institution, ont

6t6 capables de communiquer avec llinstitution tout en met-

tant en cause ses mEcanismes de gouvernance. Leur exp6-

rience semble confirmer les observations de Sidney Tarrow

sur le rapport des mouvements sociaux aux institutions: nile plein accös aux institutions, ni son absence ne donnentplus d'influence (Tarrow 7998:77). Int6grer pleinement les

m6canismes de consultation aurait r6duit llimpact de leur

contestation, tandis que läbsence däccds aurait rendu toute

communication impossible. Leur impact fut renforc6 par [e

fait que UIPC r6ussit ä affirmer la capacit6 däction cotlective

des paysans et de leurs organisations. Ceci alla ä l'encontre

de ta politique de la FAO qui ignora lbrganisation collective

et politique des paysans et tenta de gouverner les ruraux

pauvres en tant que cat6gorie r6ifi6e. Depuis leur position,

Ies organisations de la soci6t6 civile pouvaient montrer que

la Lutte pour le contröte des semences et pour l'approptia-

tion des ressources g6netiques 6tait travestie et neutralis6e

sous la forme d'un discours dbbjectivit6 scientifique. N6an-

moins leur effort pour combiner llint6gration au m6canisme

de Iinstitution et [e maintien d'un statut informel ä t'ext6-

rieur ne fut pas toujours couronn6 de succäs, au vu de leur

incapacit6 ä saisir lbccasion offerte par le directeur g6n€ra1

ä r6diger un contre-rapport.

Lorsque tes organisations de la soci6t6 civile furent r6cem-

ment invit6es ä la s6ance pl6niäre des Etats membres lors de

la 32" session du comit6 de la FAO sur la s6curit6 alimentaire

mondiale en d6cembre 2006, ils purent mesurerle dangerinh6-

rent au fait de passer d'une position strat6gique ä l'ext6rieur

ä une position tactique de lint6rieur. En 6change de l'autori-

sation ä occuper un tiers des places r6serv6es aux gouverne-

ments dans un forum sp6cial, Ies organisations de Ia soci6t6

civite durent ajuster leurs modes d'expression au rythme de Ia

r6union et renoncer ä traiter des questions conflictuelles tel-

les que le brevetage des semences et le contröle des ressources

gen6tiques. Bien que le contenu des discours et les questions

des repr6sentants de Ia soci6t6 civile contrastÖrent fortement

avec les d6clarations des gouvernements, ils ne donnÖrent

pas lieu ä un d6bat, et leurs d6clarations ne furent pas inclu-

ses dans le compte-rendu officiel de la r6union. Les contro-

verses furent r6sum6es par Ie pr6sident dans un rapport de

synthöse qui effaqait les antagonismes. Certains membres

des organisations de la soci6t6 exprimÖrent leur frustrationä ce niveau de «dialogue», le consid6rant comme une perte de

temps tandis que däutres pensÖrent au contraire qu'it 6taitutile de garder ltspace qu ils avaient conquis et de faire pres-

sion pour thccroitre et pour lbfficialiser.

CONCLUSION

Dans cet article, jäi montr6 comment le dialogue devient un

mode de gouvernance pour la FAO qui neutralise les anta-gonismes politiques et requiert des strat6gies habiles de ta

part des interlocuteurs de la soci6t6 civile s'ils ne veulentpas se retrouver ä l6gitimer des politiques avec lesquelles

ils sont en d6saccord ou qu'ils sont incapables d'influencer.

En rendant les enjeux techniques, la FAO restreint constam-

ment les possibitit6s du jeu d6mocratique. Les organisa-

tions de la soci6t6 civile doivent toujours travailler ä rester

<<politiques» plutöt que de devenir «techniques». En mäme

temps, elles sont constamment sollicit6es ä occuper l'espace

du technique, ä devenir des experts pay6s ou non pay6s

pour Ia cause qutlles d6fendent au sein de Iinstitution

34lTSA1{TSA+l't'2009

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03).grös

pro-

grGs comme une «progression» qui nä pas n6cessairement

&destination, cette derniäre pouvant 6tre choisie une fois

trc la progression a 6td mise en mouvement. Uessentiel est

que [e mouvement se poursuive, devenant ainsi une fin en

sol un moteur qui alimente le systäme. Cette progression

crtpr6sent6e comme urgente, en d6pit du fait que la desti-

ration et Ie chemin ä prendre demeurent obscurs.

Selon la directrice adjointe, ce sont les scientifiquesqui doivent nous dire oü aller». La FAO devrait soutenir

ies proc6dures d€valuation «fond6es sur ta science» pour

&lterminer objectivement les avantages et les risques de

draque 0GM. Le röle pacificateur des experts scientifiques

consiste ä traduire les pr6occupations en seuils chiffra-Ues. En transformant une question ouverte en une ques-

tfun timit6e par un chiffre, l'ensemble de [a question est de

hit recadr6 (Pestre 2007: 477) . Il ne sägit ptus de contester

ln6cessit6 des cuttures transg6niques, mais de d6finir des

normes selon lesquelles on peut cultiver des OGM «sans dan-

ger». Louise Fresco propose que la FAO fixe un cadre dans

bquet Les biotechnologies pourraient €tre r6gtement6es et

4lprivois6es dans llint6r6t de toutes les parties, rendues

rentables pour les soci6t6s au Nord et utilisables pour les

slriruvres» au Sud. Le röle principal de la r6gtementation

edministrative est donc de cr6er de nouvelles rögles pour

f,aire face ä lin6tuctabte progrös et aux int6r6ts 6conomi-

ques ou politiques et de r6pondre aux craintes et au refusque les nouveaux systÖmes suscitent, en les rendant sürs

ouen montrant qu'ils sont sürs (Pestre citant Boudia 2007:

411) - ou dans ce cas 6quitables.

Dans le rapport S0FA, Ies «pauvres» apparaissent

comme une cat6gorie homogöne et non comme des acteurs

sociaux ayant des int6rets et des strat6gies diff6rents.lrt€me si r6f6rence est faite presque constamment aux

«problömes des pauvres», aux «semences pour les pau-

wes>», ä «la recherche pour les pauvres», ä «[a technologiepour les pauvres», ni leurs besoins r6ets ni leurs capaci-

t6s ou leurs comp6tences ne sont pris en compte. Aucune

nention n'est faite des techniques de production comple-

res et efficaces dans I'usage des ressources que de nom-

breux petits producteurs utilisent dans [e monde entier'Ge que Ie rapport d6crit comme l'avantage des cuttures

fansg6niques pour les <<pauvres» est que ces derniÖres

semblent offrir une solution simple aux problÖmes de mal-

nutrition et au manque de productivit6. Le rapport indi-que que comme la technologie «est incorpor6e dans une

semence» (FAO 2004: 104), ette serait plus facile ä utiliserpar les petits agriculteurs pauvres en ressources que des

cultures plus complexes qui n6cessitent d'autres intrantsou des strat6gies de gestion complexes.

TSANTSA S 14. 2CI09

RENDRE POLITIOUE

Cette vision des «ruraux pauvres» comme b6n6ficiairespassifs de la biotechnologie a 6t6 6nergiquement r6fu-t6e dans une lettre de protestation de I'IPC au directeurg6n6ral de La FAO, dat6e du 14juin 2004 et sign6e par six

cent soixante-dix organisations de la soci6t6 civile et huitcent un individus:

«Nous, les organisations soussign6es, les mouvements

et les individus impliqu6s dans llagricutture et dans des

questions agricoles, tenons ä exprimer notre indignationet notre d6saccord avec le rapport de la FA0. [...] Ce rap-port a 6t6 utitis6 dans un exercice de relations pubtiques

politiquement motiv6 pour soutenir f industrie de la bio-

technologie. Il favorise [a manipulation g6n6tique des

semences et soutient le biais dans [e financement de larecherche en faveur de cette technologie aux d€pens de

m6thodes.,6cologiquement rationnelles d6velopp6es par

les agriculteurs.'La maniöre dont le rapport a 6t6 6tabtiet diffus6 dans les m6dias soulöve, malheureusement, de

graves questions aü sujet de ilnd6pendance et de fint6-grit6 intellectue[e d'une importante agence des Nations

Unies. Avec ce rapport, la FAO s'6loigne de la souverai-

net6 alimentaire et des besoins r6els des agriculteurs du

monde. I[ est un coup de poignard dans [e dos des agricul-teurs et des ruraux pauvres que la FAO est mandat6e ä sou-

tenir. [...] Nous sommes profond6ment d6gus que Ia FAO

ait manqu6 ä son enga4ement (et ä votre propre promesse)

de nous consulter et de maintenir un dialogue ouvert avec

les petits agriculteurs et avec [a soci6t6 civile. En omet-

tant de consulter leurs organisations dans [a pr6paration

de ce rapport, la FAO a tourn6 le dos ä ceux qui sont le

plus directement touch6s par les technotogies qu'elle pro-

meut.» (Mulvaney et at. 2004)

La lettre de protestation, coneue comme repr6sentant

la soci6t6 civile, souläve ptusieurs questions: elle souligne

ta nature politique des recommandations d'experts soi-

disant neutres sur les technologies agricötes. Elte accen-

tue la capacit6 d'agir des petits agricutteurs et met en

6vidence les controverses sur les biotechnologies en tantque lutte pour le controle des semences et pour llusage de

I'argent public de la recherqhei.Etle relÖve que les solu-

tions rapides promues par les culf,ures transg6niques ren-

forcent les structures m6mes qui produisent la faim en

concentrant 1-e pouvoir et le contröle dans les mains de

quelques compagnies agro-chimiques en donnant «moins

dbptions aux agriculteurs pour soutenir et d6velopper

davantage leurs propres systämes agricoles et moyens de

subsistance»>{Mulvaney.qt.at. 200a).

DossrER | 33

DOSSIER

le rapport fut remani6 pour r6pondre aux orientations poli-

tiques que [a FAO voulait rendre publiques. «Jusquäu niveau

du DG [directeur g6n6ra1], läccent est mis principalement

sur les questions techniques, la pr6cision, ll6quilibre, plus

vous montez U6chelte, plus läccent est mis srir tes messages,

les messages de la FA0,. Est-ce que le rapport encadre ces

messages correctement?{ (entretien, 4.5.2006)

Si llon ana§se sa trajectoire, le rapport S0FA n'est pas

technique et neutre comme iI täffiche, mais constitue une

d6claration potitique engageant ta FAO en tant qu'insti-

tution politique internationale diffusant ses messages

aux pays membres. It est egalement int6ressant de savoir

quelles sont les personnes qui n'ont pas 6t6 consult6es au

moment oü le rapport a 6t6 produit: certains administra-

teurs de l'institution qui n'6taient pas dhccord avec [e mes-

sage contenu dans le rapport soit nbnt'päs 6t6 contact6s,

soit ont refus6 de faire des observations sur un rapport dont

ils pensaient de ne pas pouvoir influencer la tendance g6n6-

rale. Cette publication ignora egalement le travail consid6-

rable de consultation et de discussion que la FAO s'enor-

gueitlissait dävoir accompli ä travers un forum 6lectronique

sur les biotechnotogies. Des milliers de pages d'opinions et

dänalyses accumul6es dans ce forum 6taient donc devenues

rien de plus que des voix perdues dans le d6sert. En outre,

IIPC nä pas 6t6 consult6 du tout.

Le rapport S0FA combine un langage d'impartialit6 et de

neutralit6 avec un discours qui pr6tend d6tenir ta v6rit6 et

affirme son emprise sur les f6alit6s objectives. La science, ou

plutöt une <<communaut6 scientifique internationate» dont

l'existence et la coh6rence est pr6suppos6e, seit'därgument

pour donner ä ces revendications une validit6 scientifique.

Les structures 6conomiques et politiques au niveau mondial

sont 6voqu6es comme un stafu quo invariable auquel tous les

acteurs 6conomiques et les acteurs politiques doivent sädap-

ter s'its veulent r6ussir dans te monde du libre-6change.

Un des administrateurs impliqu6s dans la production

du rapport explique: <<Pour 6tablir la v6rit6, nous tlouvons

les meilleures donn6es 6conomiques et scientifiques. Com-

ment pouvons-nous d6terminer ce qui est <le meilteur>? <Le

meilleur> est fond6 sur: Est-ce que le travail a 6t6 examin6s

par des pairs, est-ce qu'iL a 6t6 publi6 par un 6diteur respec-

table? Est-ce que la personne qui fait te travail a un partipris 6vident sur le sujet? Nous essayons de baser au mieux ce

que nous disons, surles meilleurs 6l6ments factuels. Quand

ily a des points de vue fort divergents, nous tenons compte

de ces diff6rents avis. La pr6pond6rance de la preuve pointe-

elte dans une certaine direction? Qa y est, et nous attons de

['avant!» (entretien, 4.5.2006)

La v6rit6 scientifique, comme cet administrateur la voit,

n'est pas 6tabtie sur un principe transcendant dbbjectivit6,

mais sur la r6putation acquise entre pairs, sur la r6putation

de ta revue oü te fait scientifique est pubti6, sur le nombre

de personnes qui ont le m6me point de vue et sur Ie senti-

ment subjectif de tädministrateur qui juge si le scientifi-que exprime ce qu'il pense pouvoir 6tre un parti pris. Cette

vue relationnelle de la science correspond, comme Latour et

Woolgar (1979) llont montr6, ä une pratique courante d6va-

luer le statut scientifique entre coltÖgues. Pourtant cet admi-

nistrateur estime qu'il peut 6tablir ä partir de critöres de

r6putation ce qui est le «meilleur» 6t6ment de preuve et en

fin de compte par l'Elimination de tous les autres points de

vue, ce qui est un fait. La <<bonne science» (sound science)

sur laquelle se base Ie rapport est ainsi fond6e sur un pro-

cessus social qui, en d6finitive, 6tablit une v6rit6 qui n'est

ni objective ni historique, mais qui a n6anmoins te pouvoir

de rel6guer toutes tes autres pr6tentions ä la v6rit6 ä t'6tat tle

fictions discr6dit6es. La bonne science est ici non seulement

politique, mais elle joue un type trÖs particulier de politique

du pouvoir et, ce faisant, etle n'est certainement pas d6sint6-

ress6e, mais plutöt l'expression de puissants int6r6ts.

Le discours sur le «progräs» scientifique est partie int6-grante de ce discours sur la bonne science. C'est aux LumiÖ-

res que remonte Uid6e de progrÖs, selon laquelle la connais-

sance s'appuie sur elte-m6me au fil du temps et conduit

finalement ä Uam6lioration. La directrice g6n6ra1e adjointe

de ta FAO. Louise Fresco, initiatrice du rapport S0FA sur

les biotechnologies, utilisa une image du roman Alice au

pays des merveilles pour cadrer son point de vue du progrÖs

scientifique. Je cite te d6but de son discours au Forum de

UUnion europ6enne sur lhgriculture durable en 2003: «I[

6tait une fois, perdue ä la crois6e des chemins, une petite

fille qui rencontre un chat. Le chat lui dit: <Si vous ne savez

pas oü vous voulez aller, alors la route que vous prenez napas d'importance.» Les mots du chat du Cheshire ont une

certaine pertinence pour nous aujourd'hui. Comme Alice,

ä travers le miroir de U6volution rapide du progrös scien-

tifique. nous jetons un coup d'eil sur un monde ä lävenirexcitant. Comme Alice, nous sommes ä ta crois6e des che-

mins avec de nombreuses voies qui s'ouvrent face ä nous, de

nouvelles opportunit6s cr66es par dtnormes progrös tech-

nologiques. Mais nous devons choisir soigneusement notre

destination, et les routes que nous pouvons prendre pour

y arriver.» (Fresco 2OO3) Et elle termine son discours ainsi:

«comme Alice lhpprend ä Ia fin, <vous €tes sür därriver guel-

que part, si seulement vous marchez assez longtemps>. Mais

soyons conscients que te temps est court» (Fresco 2003)-

Ce qui est remarquable par rapport ä sa vision du progräs

scientifique, c'est que la directrice adjointe congoit le pro-

gE&dTEqrlnirGrtlndi

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32 ITSAr{TSA S 14. 2009