« Insa Sané et Julien Delmaire. De la scène au texte, une éclosion afropéenne ?», Africultures...

INSA SANÉ ET JULIEN DELMAIREDe la scène au texte, une éclosion afropéenne ?Alice Lefilleul

Africultures | « Africultures »

2014/3 n° 99 - 100 | pages 172 à 179 ISSN 1276-2458ISBN 9782343053363

Article disponible en ligne à l'adresse :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-africultures-2014-3-page-172.htm--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

!Pour citer cet article :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Alice Lefilleul, « Insa Sané et Julien Delmaire. De la scène au texte, une éclosion afropéenne ? »,Africultures 2014/3 (n° 99 - 100), p. 172-179.--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Distribution électronique Cairn.info pour Africultures.

© Africultures. Tous droits réservés pour tous pays.

La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites desconditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votreétablissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manièreque ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur enFrance. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.

Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

Uni

vers

ité d

e M

ontr

éal -

-

132.

204.

3.57

- 2

4/08

/201

5 22

h20.

© A

fric

ultu

res

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - U

niversité de Montréal - - 132.204.3.57 - 24/08/2015 22h20. ©

Africultures

http://www.cairn.info/revue-africultures-2014-3-page-172.htm

http://www.tcpdf.org

Alice Lefilleul

172 I I n° 99-100 I Afropéa, un territoire culturel à inventer

AfRoPÉA dAns toUs sEs ÉtAts

Alice Lefilleul

Insa Sané et Julien Delmaire sont deux artistes actifs dans le paysage littéraire français actuel.

remarqués l’un et l’autre par les institutions culturelles élitistes (France Culture, Télérama, etc.) ou plus marginales

(Prix littéraire de la Porte dorée, mais aussi les scènes slam et rap), ils ont des parcours individuels et artistiques

qui les apparentent résolument à ce qui est aujourd’hui de plus en plus désigné par le terme Afropéa.

Insa sané et Julien delmaire

de la scène au texte, une éclosion afropéenne ?

Insa sané © Fred Pluviaux

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

Uni

vers

ité d

e M

ontr

éal -

-

132.

204.

3.57

- 2

4/08

/201

5 22

h20.

© A

fric

ultu

res

Docum


w.cairn.info - U


Africultures

Insa Sané et Julien Delmaire, de la scène au texte, une éclosion afropéenne ?

Afropéa, un territoire culturel à inventer I n° 99-100 I I 173

AFroDESCENDANTS – JuLIEN DELMAIrE EST MÉTIS, Insa Sané a immigré de Dakar à Sarcelles dans son enfance – vivant en France, ils puisent leurs influences artistiques dans la culture urbaine américaine (notamment le spoken word), mais aussi la poésie française et l’héritage laissé par les poètes de la négritude. Leurs romans se construisent autour d’intrigues mêlant jeunes immigrés de la deuxième génération, exilés d’Afrique de l’Ouest, et la diversité de la faune banlieusarde et parisienne.

Tant dans leurs choix créatifs (slam, rap, poésie et roman) que dans leurs thématiques privilégiées, ces deux auteurs se positionnent au carrefour entre les cultures africaines, afro-américaines et européennes. L’identité afropéenne se caractérise par cette inscription dans un espace mental et culturel multiple, à la fois subsaharien, caribéen et européen, une appartenance qui ne se fonde sur aucun compromis ou délaissement quels qu’ils soient. « De ce qui était jadis un lieu de rupture, ils ont fait un espace d’accolement où les mondes qui les constituent se touchent sans s’affronter. » écrit Miano à propos des Européens noirs contemporains 1. Être un artiste, un écrivain afropéen, c’est donc s’abreuver aux sources de sa multi-appartenance sans hiérarchisation aucune.

Cette « hybridité sereine » se traduit dans les parcours et les productions artistiques de Julien Delmaire et Insa Sané. Bien au delà du cliché dualiste de l’individu pris entre « tradition et modernité », ils évoluent d’une sphère à l’autre et construisent ainsi une œuvre mais aussi une identité artistique s’inscrivant dans une mouvance générationnelle. Fait significatif, on les retrouve dans l’entourage littéraire de Léonora Miano : Insa Sané figure parmi les jury du prix Mahogany tandis que Julien Delmaire a reçu pour Georgia 2, son premier roman, le Prix littéraire de la Porte dorée 2014 que l’écrivaine avait alors présidé.

dIRE Et ÉcRIRE, Un PARcoURs Et UnE conscIEncE socIALE

Sur la quatrième de couverture des romans d’Insa Sané, publiés dans la collection Exprim’ de la maison d’édition jeunesse Sarbacane, on peut lire qu’il est « écrivain, slameur et comédien ». Leader du groupe Soul Slam Band il revendique ces différentes casquettes et en tire résolument parti. Julien Delmaire se présente lui comme un slameur, poète et maintenant romancier. Puisque l’afropéanisme recouvre une hybridité sans appauvrissement, il semble que le mélange des pratiques et des genres littéraires y aille de soi. Le slam, le hip-hop, le roman et la poésie portent avec eux des marqueurs sociaux-culturels différents. Alors que les uns sont issus d’une contre-culture urbaine aux racines populaires états-uniennes (le spoken word et le hip-hop

1 - Léonora Miano, Habiter la frontière, Paris : l’Arche, 2012, p. 84.2 - Julien Delmaire, Georgia, Paris : Grasset, 2013, 256 p.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

Uni

vers

ité d

e M

ontr

éal -

-

132.

204.

3.57

- 2

4/08

/201

5 22

h20.

© A

fric

ultu

res

Docum


w.cairn.info - U


Africultures

Alice Lefilleul


sont nés dans les quartiers populaires afro-américains), les autres font au contraire partie d’une littérature longtemps réservée aux élites. Ainsi, publier chez Grasset tout en se revendiquant slameur ou encore considérer l’écriture romanesque comme la suite logique du hip-hop, c’est à la fois lier des espaces culturels et de classe.

Julien Delmaire et Insa Sané ont animé de nombreux ateliers d’écritures dans des milieux variés comme les écoles, les bibliothèques mais aussi les endroits où la société relègue sa marge : prisons, hôpitaux psychiatriques. « Ce texte évite les bons sentiments, il travaille sur la marginalité de manière à interroger ce qui est central dans la société. Ce sont les périphéries qui renseignent le mieux sur le centre 3 » a dit Léonora Miano à propos du roman Georgia, soulignant là l’importance du questionnement des notions de marge et de norme dans le travail de Delmaire. Les espaces d’expression de ces deux artistes sont multiples, empêchant qu’on leur accole une étiquette incomplète et dont ils ne voudraient certainement pas.

3 - Marie Poinsot, « Entretien avec Léonora Miano, présidente du jury 2014 du Prix littéraire de la Porte Dorée », Hommes et migrations [En ligne], 1306 | 2014, mis en ligne le 01 avril 2017, consulté le 15 janvier 2015. urL : http://hommesmigrations.revues.org/2818

Julien Delmaire © JF Paga Georgia © DR Grasset

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

Uni

vers

ité d

e M

ontr

éal -

-

132.

204.

3.57

- 2

4/08

/201

5 22

h20.

© A

fric

ultu

res

Docum


w.cairn.info - U


Africultures



dEs InfLUEncEs MULtIPLEs

Leurs textes fourmillent de références artistiques mêlées, suivant une logique qu’on pourrait donc qualifier d’afropéenne. Le poète congolais Tchikaya U Tam’si cotoie le groupe de punk anglais Joy Division dans les pages de Georgia tandis qu’Insa Sané fait précéder chacun des chapitres des quatre romans qui composent sa Comédie urbaine 4 d’un morceau de musique, composant ainsi la bande-son de ses récits. Celle-ci regroupe aussi bien les rappeurs français Démocrates D, Casey, Oxmo Puccino, que le reggae man ivoirien Alpha Blondy, le chanteur Maxime Le Forestier ou encore les groupes cultes de hip-hop East Coast Public Enemy et le Wu-Tang Clan. Cette revendication d’une trame culturelle qui puise aussi bien dans les cultures américaines, africaines que françaises est omniprésente dans la production littéraire de Delmaire et Sané.

IntRIGUEs Et MoUVEMEnts tRAnscontInEntAUX

Si tous n’affichent pas aussi distinctement leur double ancrage que dans le premier roman de la Comédie urbaine d’Insa Sané, Sarcelles – Dakar 5, l’ensemble des textes de ces deux écrivains se partage d’une façon ou d’une autre entre l’Europe et l’Afrique.

Sarcelles-Dakar et Georgia sont ainsi construits autour d’allers-retours narratifs entre Paris et le Sénégal. Dans l’un c’est Djiraël jeune sarcellois qui retourne « au bled » dans le pays d’origine de ses parents tandis que dans l’autre, ce sont les souvenirs d’enfance de Venance, héros de l’intrigue et sans-papiers sénégalais vivant à Paris qui font surgir Saint-Louis par bribes.

L’inclusion dans Sarcelles – Dakar de courts contes à visée philosophique ou cosmogonique (« Les Deux singes et le Gorille », L’harmattan), racontés au jeune Djiraël par des personnages sénégalais et qui viennent commenter l’intrigue principale, apporte une dimension supplémentaire au roman. Plutôt que le mouvement migratoire, c’est la culture multiple qui est ainsi mise en scène. La Comédie urbaine ou Georgia ne sont pas uniquement des romans sur l’ immigration, peut-être pourrait-on d’ailleurs les lire comme des récits en migration, témoins des réalités et des consciences individuelles mouvantes nées des déplacements humains géographiques.

4 - C’est ainsi qu’Insa Sané surnomme l’ensemble de ses quatre premiers romans : Sarcelles-Dakar, Du plomb dans le crâne, Gueule de bois, Daddy est mort. Tous se déroulent à Paris et en banlieue et mettent en scène une jeunesse aux prises avec la réalité difficiles des cités. L’amour, l’amitié, la découverte des rudesses de la vie sont au cœur de ces récits, romans d’apprentissages contemporains.5 - Insa Sané, Sarcelles-Dakar, Paris : Sarbacane coll. Exprim’, 2006, 187 p.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

Uni

vers

ité d

e M

ontr

éal -

-

132.

204.

3.57

- 2

4/08

/201

5 22

h20.

© A

fric

ultu

res

Docum


w.cairn.info - U


Africultures

Alice Lefilleul


Lorsque Georgia débute Venance est déjà mort, et c’est sur son corps dans la soute de l’avion, qu’est braquée la lumière du récit. Le corps mort, déporté par la police, voyage contre son gré au contraire d’une conscience narrative bien vivante et qui habitera ensuite chaque lieux de l’intrigue. « Les hommes n’ont pas de racines, l’exil n’est pas un arrachement, plutôt un démâtage, une flottaison hasardeuse. » (Georgia, p. 55) écrit Julien Delmaire dans son roman. Le récit est un lieu à part entière, il construit une géographie plurielle et immobile qui s’incarne également dans chacun des personnages. Ainsi, ceux de Sané, Djiraël, Daddy, et Youba transportent avec eux leurs rêves, leur présent de banlieue, leurs origines diverses.

PERsonnAGEs AfRoPÉEns, IndIVIdUs MULtIPLEs

La galerie de personnages qui se déploie dans les romans d’Insa Sané et Julien Delmaire est à l’image de la pluralité afropéenne. Les clichés du jeune de banlieue ou du travailleurs sans-papiers sont investis et approfondis. Le texte fictionnel, en leur prêtant des intrigues amoureuses, des rêves, des gestes de vie quotidienne, les sort des travers dans lesquels ils sont bien souvent confinés. Ainsi, dans Georgia on croise Souleymane, un vieil homme qui, bien qu’il vive en France depuis des années, a fait de chez lui un lieu d’ancrage au pays où l’on boit le thé amer et l’on parle uniquement wolof. Il y a aussi Samba le dealer, qui était déjà voyou au pays nous rappelant ainsi que l’homme est le même sous différentes latitudes ; Diallo l’ami militant qui inlassablement se bat pour les sans-papiers et est « prêt à déchirer tous les sourires Banania des murs de France » (Georgia, p. 239) ; ou encore Fanta la cousine coiffeuse et enfin Barry le vigile congolais. Ces figures qui parsèment les pages du roman sont des typologies urbaines que le récit anime avec un souci de justesse constant. Leurs identités individuelles transcendent leurs origines et leurs couleurs. La plume de l’écrivain, tout comme le regard de la jeune Georgia sur son amant, n’est pas chargée de présupposés : « Quand Georgia disait nègre, il ne se sentait pas offensé, c’était le mot juste, un nègre n’était ni bon ni mauvais : il était nègre, sur le piton libre d’un volcan ou dans l’éclipse des fouets. » (Georgia, p. 131).

dÉcoRs En GRIs Et JAUnE

Chez Delmaire comme chez Sané les décors sont marqués, inscrivant l’intrigue dans une géographie renseignée. La dualité Afrique/Europe est tranchée. Paris et sa banlieue sont, si ce n’est grises et tristes, globalement hostiles. La crasse des squats de junkie voisine le béton des tours dans les pages de leurs romans. En revanche, les scènes se déroulant au Sénégal sont saturées de lumière et d’éléments pittoresques : les dibiteries, les bus n’diaga ndiaye, le pont Faidherbe, etc. Mais si cette binarité est évidente, elle se fond également dans un espace d’entre-deux, zone grise qui correspond alors au détachement provoqué par

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

Uni

vers

ité d

e M

ontr

éal -

-

132.

204.

3.57

- 2

4/08

/201

5 22

h20.

© A

fric

ultu

res

Docum


w.cairn.info - U


Africultures



l’exil « Démâtage, flottaison hasardeuse » (Georgia, p. 55), à la dérive du trouble amoureux, aux stratégies de débrouilles et divers arrangements avec la légalité.

Cette zone grise s’attache de fait à tout ce que les destinées individuelles ont d’incertaines mais aussi à ce qui les lient de façon constante et universelle. Faire s’aimer des personnages aussi différents que Georgia et Venance ou encore prêter aux jeunes héros de la Comédie urbaine des passions sentimentales dévorantes, c’est placer l’émotion au-delà d’une question de classe ou de couleur, c’est revendiquer leur humanité.Réalistes et contemporains, les décors caractéristiques ne transforment pas pour autant ces romans en récits exotiques. Lorsque Djiraël, héros de Sarcelles – Dakar, allume la télévision au Sénégal c’est pour y regarder des clips de rap américains sur la chaîne mcm Africa. C’est sans angélisme ni caricature que Delmaire et Sané évoquent les centres de rétentions, les cités, les grèves de la faim menées par des sans-papiers désespérés. La drogue et ses ravages muets et violents hantent également Georgia et certains récits de la Comédie urbaine. Le vieux nègre fatigué du Cahier de Césaire et celui à la médaille de Ferdinand Oyono deviennent alors chez Delmaire un junkie moins que rien : « Derrière elle, un vieux nègre dormait dans la solitude des branches coupées. » (Georgia, p. 132).

Un stYLE AfRoPÉEn ?

Julien Delmaire et Insa Sané ne s’adressent pas au même public. La langue ciselée et aux images lyriques du premier trouve naturellement sa place chez Grasset tandis que le rythme travaillé et les jeux entre différents niveaux de langage du second correspondent davantage au créneau « roman jeunesse » revendiqué par Exprim’. Leurs styles auraient alors d’afropéens leurs recherches de l’hybride, du composé. L’empreinte musicale est omniprésente, et le texte oscille parfois entre prose et rapsodie slamée : « Samba épela les syllabes du crime, il dit : freebase, shoot by driving, pimp, nigger, pusher. Il laissa couler le drame : South Central, Brooklyn, Campton, Bronx, Lennox street, Hell’s Kitchen. » (Georgia, p. 202), « On peut bousiller sa vie pour 50 cents, on rêve d’une Mercedes Benz, on a le goût de l’amérique comme du ketchup heinz ! » (Daddy est mort 6, p. 57).

L’écriture semble être un jeu pour ces écrivains qui possèdent différents codes et s’amusent à les mettre en oeuvre, peut-être pour montrer – une fois de plus – qu’on ne peut les assigner à une catégorie sociale et/ou identitaire. Ainsi lorsqu’un des personnages de Daddy est mort croise une jolie fille gare du Nord, c’est avec humour que la plume d’Insa Sané transcrit sa réaction : « Oh oui, un calice à l’aube du printemps. Mon Dieu... elle est à en mourir... […] Les termes exacts de sa pensée furent plutôt : Putain !!! Elle est Sweppes à crever !!! »

6 - Insa Sané, Daddy est mort, Paris, Sarbacane, coll. Exprim’, 2010, 279 p.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

Uni

vers

ité d

e M

ontr

éal -

-

132.

204.

3.57

- 2

4/08

/201

5 22

h20.

© A

fric

ultu

res

Docum


w.cairn.info - U


Africultures

Alice Lefilleul


(Daddy est mort, p. 65) Ou encore lorsque Julien Delmaire convoque l’hymne national sénégalais, il le détourne pour commenter le bonheur ressenti par Venance après l’amour : « Pincez tous vos koras, frappez le balafon, le lion rouge a joui ! » (Georgia, p. 125).

Si leurs textes sont différents sous bien des abords, Julien Delmaire et Insa Sané n’en sont pas moins tous deux des artistes que l’on pourrait bel et bien qualifier d’afropéens. Mouvance culturelle et espace d’expression plus qu’étiquette restrictive, Afropéa abrite toutes sortes de domaines, de thèmes, de registres. Être un écrivain afropéen, ce n’est donc pas être cantonné à une petite case étroite, mais au contraire, et comme l’énonce clairement le titre du dernier roman d’Insa Sané, se trouver « partout chez soi » (Tu seras partout chez toi, Sarbacane, 2012). Plutôt qu’une utopie mondialiste, cette assertion ferait alors référence au droit pour les Afropéens de se revendiquer d’un continent et de l’autre, tout en investissant un espace neuf et encore à définir qui leur soit propre.

Les créations artistiques paraissent dès lors un territoire d’expérimentation idéal, espace imaginaire et à reconstruire à l’infini. Les romans, la musique, les pièces de théâtre dessinent Afropéa. Delmaire et Sané sont les artisans de ce que Miano pense comme « une littérature à venir, mais aussi des arts visuels ou des musiques. C’est ce que l’Europe peut encore espérer produire de neuf, sans doute sa dernière chance de rayonner. C’est le commencement de la post-occidentalité, qui n’est pas la négation du substrat européen mais sa transformation. » (Habiter la frontière, p. 86)

bIbLIoGRAPHIE

- Julien Delmaire, Georgia, Paris, Grasset, 2013, 256 p.- Léonora Miano, Habiter la frontière, Paris, l’Arche, 2012, 144 p.- Marie Poinsot, « Entretien avec Léonora Miano, présidente du jury 2014 du Prix littéraire de la Porte Dorée », Hommes et migrations [En ligne], - 1306 | 2014, mis en ligne le 01 avril 2014, consulté le 15 janvier 2015. URL : http://hommesmigrations.revues.org/2818

- Insa Sané, Sarcelles-Dakar, Paris : Sarbacane coll. Exprim’, 2006, 187 p.- Insa Sané, Daddy est mort, Paris : Sarbacane coll. Exprim’, 2010, 279 p.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

Uni

vers

ité d

e M

ontr

éal -

-

132.

204.

3.57

- 2

4/08

/201

5 22

h20.

© A

fric

ultu

res

Docum


w.cairn.info - U


Africultures



En marge de la parution du présent ouvrage, le laboratoire Sefea organisait le 20 février 2015 au Carreau du Temple le séminaire «Afropéa», ici une rencontre animée par Selim Rauer avec Alice Diop pour son film La Mort de Danton © SC

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

Uni

vers

ité d

e M

ontr

éal -

-

132.

204.

3.57

- 2

4/08

/201

5 22

h20.

© A

fric

ultu

res

Docum


w.cairn.info - U


Africultures

« Insa Sané et Julien Delmaire. De la scène au texte, une éclosion afropéenne ?», Africultures...

Documents

Transcript of « Insa Sané et Julien Delmaire. De la scène au texte, une éclosion afropéenne ?», Africultures...